Rapport No 8014 Croissance soutenable et equite en Afrique subsaharienne Etude de prospective a long terme fILE COpy I '.' I 15 aout 1989 Departement technique Bureau regional Afrique RESERVE A L'USAGE OFFICI EL Document de la Banque mondiale Le present document fait I'objet d'une diffusion restreinte. II ne peut etre utilise par ses destinataires que dans I'exercise de leurs fonctions officielles et sa teneur ne peut etre divulguee sans I'autorisation de la Banque mondiale. -----------------------11 _._-_. - A N'UTILISER QU'A DES FINS OFFICIELLES [.. es auteurs du pr~sent rapport sont Pierre Lande ll-Mill s , Ramgopal Agarwala et Stanley Please. L'~quipe de base comprenait Osman Ahmed, Zafar Ahmed. Robert Barad, Kevin Cleaver, Jocelyn de Jong, Gladson Kayira, Barbara Pitkin, Raj Sharma, William Steel, Kalanidhi Subbarao et Gertrud Windsperger. Elle ~tait assist~e de Moussa Kourouma, Waheed Oshikoya et Sangeeta Parimoo. L'annexe statistique a ~t~ ~tablie par Ramesh Chander et Sandy Gain, avec le concours de Smangele Mkhwanazi. Parmi les nombreux collaborateurs qui ont contr.i.bu~ A la r~daction du pr~sent rapport, on citera Claude Ake, Jacques Giri, Paul Harri10n, Goran Hyden, Sanjaya Lall, Andrew Lerner, Janet McGaffey et Kifle Wodajo. En outre, un grand nornbre de sp~cialistes africains et non africains du d~veloppement ont pr~sent~ des notes ~crites ou ont particip~ A une vingtaine d'ateliers de travail organis~s en Afrique et ailleurs, et dont les r~sultats ont ~t~ pris en compte dans la pr~paration du prhent rapport. Le PNUD, la CEE et les Gouvernements canadien, finlandais, fran~ais, n~erlandais, norv~gien, su~dois et du Royaume-Uni ont financ~ une partie des contributions ~crites et des ateliers de travail africains. Le personnel des services g~n~raux, dirig~ par Jean Ponchamni, comprenait Barbara Dobrovodsky, Gloria Jackson et Patricia Moran. Clive Crook ~tait r~dacteur en chef. Le present document talt I'objet d'une diffusion restreinte. et ne peut etre utilise par ses destlnatalres que dans I'exerch:e de leurs rondlons otticielles. Sa teneur ne peut etre autrement dh'ulluie sans I'autorlsatlon de la Banque Mondlale. Sig1es APD Aide publique au d~veloppement BAD Banque africaine de d6veloppement BIRD Banque internationale pour la reconstruction et Ie d~veloppement CAD Comit~ d'aide au d6veloppement CEA Commission 6conomique pour l'Afrique des Nations Unies CEAEO Communaut6 6conomique de l'Afrique de l'Ouest CEOEAO Communaut6 6conomique des Etats de l'Afrique de l'Ouest CGIAR Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale OSA Dimensions sociales de l'ajustement FAA Fonds d'aide 1 l'Afrique FAS Facilit6 d'ajustement structurel FASR Facilit6 d'ajustement structurel renforc6e FMI Fonds mon6taire international GATT Accord g6n6ral sur les tarifs douaniers et Ie commerce NPI Nouveaux pays industriels OCDE Organisation de coop6r,tion et de d6veloppement 6conomiques OIT Organisation internationale du travail ONG Organisation non gouvernementale PAS Programme d'assistance sp6ciale PIB Produit inUdeur brut PME Petites et moyennes entreprises PNB Produit national brut PNUO Programme des Nations Unies pour Ie d6veloppement PNUREDA Programme des Nations Unies pour Ie redressement 6conomique et Ie d6veloppement de l'Afrique SADCC Conf6rence pour la coordination du d6veloppement de l'Afrique australe UDEAC Union douani~re et 6conomique de l'Afrique centrale UMOA Union mon6taire ouest-africaine UNICEF Fonds des Nations Unies pour l'enfance USAID Agence des Etats-Unis pour Ie d6veloppement international La persistance de 1a crise ~conomique en Afrique constitue un d~fi hors du commun pour 1es mj.1ieux du d~ve1oppement, tant du cOt~ des inte11ectuels que de celui des dirigeants. En r~ponse A ce d6fi, 1a Banque a publi6 une s6rie de rapports sur l' Afrique subsaharienne au cours des dix derni~res ann6es. La place dominante faite dans ces rapports, de mame que dans les efforts d~ploy6s par la communaut6s internationa1e, aux mesures qui doivent ~tre prises d'urgence pour que l'Afrique retrouve le chemin de 1a croissance, ~'6largit constamment. Or, la crise ne cesse de s'approfondir. A l'aube d'une nouvelle d~cennie, le moment est propice pour prendre rlu recul par rapport aux probl~mes imm~diats et se placer dans une perspective A plus long teLlne. Comment les ~conomies d'Afrique subsaharienne ont-elles ~volu~ durant les 30 ann~es qui ont suivi l'ind~pendance? QU'avons-nous appris? Quelles sont les perspectives pour 1a prochaine g~n~ration d'Africains? Autant de questior.s auxquelles s'efforce de r~pondre cette ~tude de prospective. Ce rapport est le fruit de recherches prolong6es, A l'occasion desquelles on a largement fait appel ~ des chercheurs, hommes d'affaires priv6s et hauts fonctionnaires africains, ainsi qu'A un vaste 6ventai1 de repr6sentants des bail leurs de fonds. En ce sens, 1a pr6paration de cette 6tude a 6t~ aussi importante que le document 1ui-mame. Le rapport s' inspire en outre des nombreuses ~tudes qui ont 6t6 entreprises par des institutions des Nations Unies et d'Afrique (en particulier la BAD, la CEA, l'OUA, 1a FAa, l'OIT, l'UNICEF et l'ONUDI), ainsi que par d'autres chercheurs. 11 est bien certain qu'on ne saurait faire pleinement justice en un seul rapport A la diversit~ des ~conomies africaines, A la complexit~ des probl~mes auxquels elles sont confront~es et aux opinions divergentes sur la meilleure mani~re de s'y attaquer. Nous ne nous flattons pas d'avoir toutes les r~ponses; notre but ~tait de passer tous les informations au peigne fin, d' ~couter tous les points de vue et d' exposer ce qui, A notre sens, constituait 1a meilleure estimation des orientations et des mesures qui devaient atre prises pour que les conditions de vie des Africains s'ameliorent de fa~on durable et soutenable. Ce rapport est 1a contribution apport6e par la Banque au processus permanent de dialogue et d'entente sur les programmes A entreprendre pour r~pondre aux besoins de d~veloppement de I' Afrique. Nous voudrions que les responsables gouvernementaux et la communaut6 du d6veloppement en g~n~ral, confront~s A la n6cessit~ de formu1er des strat~gies nationales A long terme, y voient un document de r~f~rence ou ils pourront puiser utilement. La~ majorit6 des pays africains s 'est lanc~e dans de vastes programmes d'ajustement ~conomique. La nature de ces programmes a beaucoup ~volu~ A meSUI"e que nous tirions les enseignements de l' exp~rience acquise et des erretJirs commises. Nous nous rendons compte d~sormais qu 'une restructuration fondamenta1e s'impose si l'on veut transformer les ~conomies africaines et les rendre comp~titives dans un monde ou 1a concurrence ne cesse de s'intensifier. 11 faut poursuivre les efforts d'ajustement et ~largir et apprc.fondir 1es r~formes. La route sera longue et difficile, et des mesures devrc,nt atre prises sp~cia1ement pour att~nuer 1a pauvret~ et prot~ger les groupes vuln~rables. Po,ur assurer 1a s~curiU alimentaire, cr~er des emplois et obtenir une am61iorationmodeste des niveaux de vie, les ~conomies subsahariennes doivent atteindre un rythme de croissance d'au moins 4 % par an. Si l'on se r~nre aux r6sultats pass~s, cet objectif mame semble fortement ambitieux, mais nous croyons qu'i1 peut &tre r~a1is~. Et pour que 1a croissance puisse &tre durable, des efforts de grande envergure doivent &tre d~p1oy~s pour prot~ger, et non pas d~truire, l'environnement. Pour 1es dix prochaines ann~es au moins, l'agricu1ture est consid~r~e comme 1e principal moteur de 1a croissance. 11 faut que 1a production a1imentaire augmente deux fois plus vite pour que 1 'Afrique parvienne ~ nourrir 1es bouches nouvelles et ~liminer peu ~ peu 1a malnutrition. Pour assurer 1a s~curit~ a1imentaire, i1 est indispensable de d~couvrir et d'app1iquer des technologies nouvelles et de ra1entir l'accroissement de 1a population. L'un des themes centraux du rapport est que 1es pays devront certes suivre des po1itiques macro~conomiques saines et se doter d'infrastructures efficaces pour cr~er un environnement propice ~ une utilisation productive des res sources , mais que ce1a ne suffira pas ~ transformer 1a structure des ~conomies africaines. Des efforts majeurs doivent simu1tan~ment &tre entrepris pour renforcer 1es capacit~s dans 1es pays africains - pour am~liorer l'instruction et 1a sant~ pub1iques et pour ~toffer consid~rab1ement 1e cadre institutionne1 dans 1eque1 doit s' inscrire 1e d~ve1oppement. C' est pourquoi 1e rapport appuie vigoureusement l' appe1 1anc~ par 1a CEA et l'UNICEF en faveur d'une strat~gie de d~ve1oppement ax~e sur l'~l~ment humain. Les causes profondes de 1a faib1esse de 1a performance ~conomique pass~e sont ~ rechercher dans 1a carence des institutions. L'initiative du secteur priv~ et 1es m~canismes du march~ sont importants, mais i1s doivent a11er de pair avec une bonne administration - une fonction pub1ique efficace, un systeme judiciaire fiab1e et une administration comptab1e de ses actes. L'~qui1ibre entre l'administration et 1es administr~s doit @tre am~lior~. Le rapport expose donc tout un ~ventai1 de propositions visant ~ donner aux gens ordinaires, et en particu1ier aux femmes, 1e pouvoir d'exercer plus d'initiative de maniere ~ am~liorer leur existence - mesures qui encouragent 1a formation d'organisations au niveau des co11ectivit~s, qui soutiennent 1es entreprises du secteur informe1 au lieu de 1es contrecarrer, et qui favorisent 1es organisations non gouvernementa1es et interm~diaires. On commence ~ &tre persuad~ que 1e d~ve1oppement doit s'effectuer ~ partir de 1a base et non A partir du sommet, et qu'i1 est pr~f~rab1e de formu1er 1es programmes dans 1e d~sir d' en apprendre plus que d' imposer des solutions toutes faites. Les difficu1t~s auxque11es est confront~e l'Afrique sont redoutab1es. La marge de manoeuvre est ~troite, c'est 1e moins qu'on puisse dire. L'~chec aurait des cons~quences d~vastatrices sur 1e plan humain. C'est pourquoi 1a concertation entre tous 1es agents du processus de d~ve1oppement gouvernements africains et institutions mu1ti1at~rales, secteur priv~ et bailleurs de fonds, publics et non gouvernementaux - est plus que jamais n~cessaire. Nous sommes tous responsables de l'avenir et les problemes sont assez vastes pour nous ayons tous un rOle ~ jouer dans leur solution. La collaboration entre gouvernements africains se traduira, on peut l'esp~rer, par un renforcement de la coop~ration et de l'int~gration r~gionales, theme central du Plan d'action de Lagos, qui occupe une place pr~pond~rante dans 1e Rapport sur Ie d~veloppement en Afrique 1989 publi~ par 1a BAD. Chacun des pr~c~dents rapports plaidait pour un accroissement de l'aide. Celui-ci ne fait pas exception ~ la reg1e, mais i l est ~vident que les apports financiers ext~rieurs doivent s'accompagner de r~formes ~conomiques. A long terme, Ie rOle de l'aide et de l'assistance technique doit diminuer. Mais, dans l'imm~diat, les besoins vont continuer ~ croitre et il importe de trouver des moyens de mobiliser ces res sources et notamment de prendre des mesures en vue d'all~ger Ie fardeau de 1a dette africaine. Les objectifs a atteindre font d~ja l'objet d'un consensus relativement large et, avec de la bonne volont~ et un dialogue ouvert, on parviendra a combler les divergences quant aux mesures particuli~res a appliquer. Effor~ons-nous donc ensemble de trouver un terrain d'entente - un terrain ~lev~ - qui permettra d'entreprendre une action concert~e et d'executer un programme strategique pour les annees 90 et au-dela, afin d' assurer a l'Afrique un avenir plus prosp~re. Barber B. Conable President Banque mondiale Table des mati~res Introduction et vue g~n~rale Qu'avons-nous appris? Perspectives de la prochaine g~n~ration Une strat~gie de croissance soutenable et ~quitable Un ordre du jour strat~gique pour les ann~es 1990 1 Trente ans en perspective: du pass~ 1 l'avenir Mod~les et tendances pass~s L'aggravation de la crise Les facteurs du d~clin Les perspectives pour la prochaine g~n~ration Le d~fi 2 Strat~gie pour une croissance durable Pour une strat~gie de d~veloppement de deuxi~me g~n~ration Pour une croissance durable et ~quitable Renforcer les conditions propices au d~veloppement D~velopper les capacit~s locales Les dimensions politiques et culturelles Les dimensions internationales Conclusion 3 Investir dans l'homme Vers un d~veloppement centr~ sur l'homme Universalisation des soins de sant~ de base et r~duction du taux de croissance d~mographique S~curit~ alimentaire et nutrition Enseignement primaire : Relance et universalisation Enseignement sup~rieur, formation professionnelle et pr~paration A l'emploi La conception et la gestion de programmes de valorisation des ressources humaines Soutien financier soutenu apport!! 1 la valorisation des ressources humaines 4 L'agriculture, source essentielle de croissance et de s~curit~ alimentaire Le d~fi de l'agriculture Mobiliser Ie secteurpriv~ Mobiliser la technologie Proteger l'environnement rural Mettre en place une infrastructure rurale Cr~er des associations de cultivateurs et reconnaltre Ie rOle des femmes Red~finir les regimes fonciers Le defi peut-il ~tre releve? 5 Industrie, mines et energie Industrie : Comment repondre aux marches Le defi de l'industrialisation Situation actuelle du developpement industriel Ouverture de possibilites de ventes Creation d'un environnement propice Constitution d'une armature industrielle Comment relever Ie defi Perspectives minieres Les mineraux : un bienfait mitige Potential et importance Investissements plus importants dans la prospection Un environnement propice ~ l'industrie miniere Perspectives d'avenir Energie pour la croissance Perspectives ~ horizon de 30 ans Une future strategie energetique 6 Promouvoir l'entreprise africaine L'effet catalytique de l'esprit d'entreprise Le developpement de l'entreprise africaine Les entrepreneurs du secteur informel Ameliorer Ie climat des affaires Ameliorer les competences des entrepreneurs Repondre au besoin 7 L'integration et la cooperation regionales: des paroles aux actes La situation actuelle Une nouvelle strategie au service de l'integration et de la cooperation regionales 8 Un financement soutenable du developpement Introduction Depenses de developpement Mobilisation des res sources interieures Ressources exterieures Assistance au developpement dans les annees 90 9 Un programme strategique pour les annees 90 La recherche de domaines d'accord Un programme strategique pour les annees 90 Instaurer un consensus en Afrique Instaurer un consensus entre les donateurs Vers une coalition mondiale pour l'Afrique Appendice statistique Mesures ~ prendre pour ameliorer les systemes d'information et les statistiques de base en Afrique subsahar!enne Encadr~ Encadr~ 1.1 L'impact des carences de l'infrastructure l'exp~rience du Nig~ria Encadr~ 1.2 La signification des biotechnologies pour l'Afrique Encadr~ 1.3 L'lle Maurice: du pessimisme malthusien au d~veloppement durable Encadr~ 2.1 Le plan malgache de protection de l'environnement Encadr~ 2.2 Nig~ria : les le~ons de l'ajustement Encadr~ 2.3 Les t~l~communications a l'~re de l'information Encadr~ 2.4 Entretien routier par la technique a forte intensit~ de main-d'oeuvre Encadr~ 2.5 Participation priv~e a la cr~ation de l'infrastructure Encadr~ 2.6 Restructuration des chemins de fer africains Encadr~ 2.7 R~forme de la fonction publique Encadr~ 2.8 Renforcement de la capacit~ d'analyse des politiques ~conomiques en Tanzanie Encadr~ 2.9 Entraide communautaire au Kenya Encadr~ 3.1 Le SIDA : Retentissement d~mographique et ~conomique Encadr~ 3.2 Acceptation du principe d'un paiement pour l'am~lioration de l'alimentation en eau Encadr~ 3.3 Planning amilial : Botswana et Zimbabwe Encadr~ 3.4 Interventions de nutrition efficaces par rapport au cont : Production d'un aliment de sevrage bon march~ au Zaire Encadr~ 3.5 Int~gration des services de sant~ et de nutrition pour les enfants de moins de trois ans Encadr~ 3.6 Interventions de nutrition efficaces par rapport aux conts Fourniture de suppl~ments de vitamine A au Burkina Faso Encadr~ 3.7 Programme de s~curit~ alimentaire du Botswana Encadr~ 3.8 Ethiopie : Perfectionnement des enseignants en cours d'exercice Encadr~ 3.9 Pr~paration a l'emploi Encadr~ 3.10 Malawi : une formule r~ussie de participation de la communaut~ a l'alimentation en eau Encadr~ 4.1 L'horticulture r~ussit bien au Kenya Encadr~ 4.2 Coop~ratives d'~pargne et de cr~dit au Cameroun Encadr~ 4.3 Insectes contre insectes Encadre 4.4 Conservation du sol et de l'eau au Burkina Faso Encadr~ 4.5 Le rOle des moyens de transport interm~diaires Encadre 4.6 Le Rwanda: Exemple d'adaptation reussie Encadre 4.7 Croissance de la production de mais dans les petites exploitations au Zimbabwe Encadre 5.1 Reussite de l'industrialisation anim~e par les exportations a Maurice Encadre 5.2 Coentreprise germano-zambienne Encadr~ 5.3 Madagascar exporte des v~tements d'enfants en Europe Encadre 5.4 Repercussions des programmes d'ajustement sur Ie secteur industriel de certains pays Encadr~ 5.5 Le Suame magazine du Ghana : Renforcement des moyens indigenes en ingenierie Encadr~ 5.6 Production de l'or au Ghana Encadr~ 5.7 Po@les a bon rendement energetique au Niger Encadr~ 6.1 L'apparition d'entrepreneurs dans l'agriculture Encadre 6.2 Les petites entreprises au Kenya Encadr~ 6.3 La diversite des institutions financieres informelles Encadr~ 7.1 La lutte contre l'onchocerchose Encadr~ 7.2 Rationa1iser les institutions r~giona1es Encadr~ 7.3 Ethiopian airlines Encadr~ 7.4 Un exemp1e de coop~ration r~giona1e: 1a recherche en entomologie Encadr~ 7.5 Mise en place de r~seaux r~gionaux pour ~lever 1e niveau de qualification professione11e Encadr~ 7.6 L'institut de gestion pour l'Afrique de l'Est de l'Afrique australe (ESAMI) Encadr~ 8.1 Botswana- gestion ~conomique des fortes fluctuations des produits de base Encadr~ 8.2 Burkina Faso: Economies r~a1is~es dans l'achat de produits p~troliers Encadr~ 8.3 Togo: une collaboration prometteuse avec 1es ONG Encadr~ 8.4 Rwanda: banques popu1aires Encadr~ 9.1 L'exemp1e nordique de d~ve1oppement Encadr~ 9.2 Le projet relatif aux dimensions socia1es de l'ajustement Tableaux Tableau 1.1 Comparaison des coUts typiques en Afrique subsaharienne et en Asie Tableau 2.1 Projections relatives A l'emp1oi Tableau 2.2 Projections des contributions des divers secteurs A 1a croissance du PIB, 1990-2020 Tableau 3.1 Comparaison des taux de f~condit~ : Afrique et Asie Tableau 3.2 Afrique subsaharienne : Population et s~curit~ alimentaire Tableau 3.3 Besoins financiers d'une va1orisation des ressources humaines reposant sur une large base en Afrique subsaharienne Tableau 5.1 Contribution des mines A certains pays en 1987 Tableau 5.2 Projections concernant l'offre tota1e d'~nergie primaire Tableau 8.1 Afrique subsaharienne: ~pargne int~rieure brute Tableau 8.2 D~penses militaires Tableau 8.3 Afrique subsaharienne: cadre macro~conomique i11ustratif Tableau 8.4 Besoins d'APD en Afrique subsaharienne pour 1a p~riode 1981-2000 Figures Figure 1.1 Niveaux de revenu en Afrique subsaharienne et dans les autres pays en d~veloppement Figure 1.2 L'Afrique subsaharienne diversit~ des performances ~conomiques Figure 1.3 L'Afrique subsaharienne structure du PNB Figure 1.4 L'Afrique subsaharienne exportations de marchandises Figure 1.5 Les exportations agricoles de l'Afrique subsaharienne en volume et en valeur Figure 1.6 La part de l'Afrique subsaharienne dans les exportations, en valeur Figure 1.7 La dette ext~rieure de l'Afrique subsaharienne et des pays tres endett~s Figure 1.8 Evolution des d~penses sociales par habitant ~margeant au budget de l'Etat Figure 1.9 Evolution du revenu par habitant Figure 1.10 Afrique subsaharienne et Asie du Sud: revenu, population, et investissement Figure 1.11 Index des taux de change effectifs r~els Figure 1.12 Index des prix agricoles r~els au producteur Figure 1.13 Indices des prix A l'exportation pour cing grands produits primaires d'exportation d'Afrique subsaharienne Figure 1.14 Population et urbanisation de l'Afrique subsaharienne Figure 1.15 L'Afrique subsaharienne : tendances ~conomiques FiguI'e 3.1 D~penses du gouvernement central consacr~es A la sant~ et A l'~ducation Figure 3.2 Taux de mortalit~ des enfants de moins de cinq ans dans certains pays de l'Afrique subsaharienne Figure 3.3 Projections du d~ficit alimentaire : Divers sc~narios Figure 3.4 Taux d'inscription dans l'enseignement primaire, par sexe, dans certains pays d'Afrique subsaharienne, 1985 Figure 3.5 Enseignement primaire universel : Sc~narios des coOts dans les pays A faible taux d'inscription Figure 5.1 Valeur des exportations de min~raux Figure 5.2 Production min~rale de l'Afrique subsaharienne. de l'Asie et de l'Am~rique latine et des Caralbes Les perspectives A long tenne de l'Afrigue subsaharienne Une strat~gie de relance et de croissance Introduction et vue g~n~rale 1. L' ind~pendance a ouvert de grands espoirs A I' Afrique 1. On croyait, en g~n~ral, qu'on allait rapidement faire augmenter les revenus et am~liorer la protection sociale. Et, effectivement, au d~but, beaucoup de pays africains sont parvenus A ~largir de fa~on sensible leur infrastructure de base et leurs services sociaux. Des efforts consid~rables ont aussi ~t~ d~ploy~s pour consolider des nouveaux Etats fragiles. 2. Apr~s une premUre p~riode de croissance, la plupart des Etats africains se sont mis A vaciller, puis A p~ricliter. 11 y a eu quelques exceptions, mais, dans son ensemble, 1 'Afrique subsaharienne connalt maintenant, depuis pr~s d'une dizaine d'ann~es, une diminution des revenus par personne, une intensification de la famine et une acc~l~ration de la d~gradation ~cologique. Le terrain qui avait ~t~ gagn~ sur Ie plan social est desormais en train d'@tre perdu. En derni~re analyse, les Africains sont aujourd'hui presque aussi pauvres qu'ils l'~taient il y a 30 ans. Cet ~tat de chases a conduit de nombreux gouvernements A entreprendre de profondes r~fonnes. Plus de la moiti~ ont opU pour des programmes d' ajustement structurel. Les pays qui ont poursuivi leurs r~fonnes, depuis le milieu des ann~el; 80, conunencent A voir apparaltre des signes d'am~lioration. Ces am~liorations conduisent A esp~rer que la relance a d~marr~. 3. L'exp~rience de la premUre g~n~ration d'Africains aprh l'ind~pendance pose des questions qui vont au fond des choses. Est-ce que l' Afrique pose des probUmes structurels sptkiaux qui n' ont pas ~t~ bien compris? A-t-on n~glig~ les dimensions institutionnelles? Est-ce que les r~cent,s progranunes de r~fonnes n' ont pas t!t~ assez vastes ou assez profonds? Peut-cm am~liorer les modalit~s de fonnulation et d 'ex~cution des r~fonnes? A-t-OJ1 correctement ~valut! l'impact des facteurs externes? Est-ce que l'assistance externe et les mesures d'all~gement de la dette sont appropri~es et suffisantes? Au-delA de l'ajustement, existe-t-il une vision A long tenne qui est A la fois cr~dible et dynamisante? 4. Ce sont ces questions - et notamment la derni~re - qU'on retrouve en filigrane dans le pr~sent rapport. En partant de l'expt!rience du pass~, il examine conunent il faut modifier les progranunes et les politiques pour obtenir une croissance dans l'~quit~ qui perdure pendant le prochain si~cle. Le rapport conclut que les gouvernements africa ins ne doivent pas se borner A consolider les progr~s r~alis~s dans Ie cadre des programmes d'ajustement. Ils doivent aller au-delA des questions de finances publiques, de politique mon~taire, de prix et de march~s pour s'attaquer aux probl~mes fondamentaux qui concernent les capacit~s humaines, les institutions, l'art de gouverner, l'environnement. la croissance et la r~partition de la population, et la techn()10gie. Pour obtenir des amHiorations, 11 faudra modifier les 1 Dans tout le prt!sent rapport, ftAfrique ft s' entend de l' Afrique subsaharienne. Les donn~es concernant l' Afrique subsaharienne excluent syst~matiquement 1'Afrique du Sud et 1a Namibie. - 2 - perceptions et 1es priorit~s. tout aut ant que 1es incitations. Par dessus tout, si l'on veut mettre ~ profit les ~nergies de l'ensemb1e de 1a population, i1 faudra que l'homme du commun participe, sur une plus large base, ~ la conception et ~ l'ex~cution des programmes de d~veloppement. 11 faudra du temps pour faire changer un grand nombre de ces ~l~ments. Bien que 1e rapport se place ~ un horizon ~ long terme, i1 faut prendre des mesures d~s maintenant pour faire ~vo1uer 1a situation plus tard. 5. Ce qui distingue 1e pr~sent rapport - et ce1a est important - est qu'il accorde autant de place A la fa90n dont on obtient des r~sultats qu'aux r~sultats eux-m@mes. Ce rapport est Ie fruit d'une intense collaboration entre Africains et bail leurs de fonds. 11 s'efforce de traduire l'~volution de la pens~e africaine depuis Ie Plan d'action de Lagos, en 1980, jusqu'au programme d'action present~ A l'ONU en 1986, A la D~claration d'Abuja de 1987, ~ la D~claration de Khartoum de 1988 et au rapport intitul~ flCadre africain de r~f~rence pour 1es programmes d'ajustement structurel fl , publi~ en 1989 par la Commission ~conomique des Nations Unies pour l'Afrique. Les questions de ressources humaines, de technologie, de coop~ration r~gionale, d'autonomie et de respect des valeurs africaines qui informent ces expos~s d'orientations africaines fournissent les principaux ~l~ments de la strat~gie que propose Ie rapport. 6. Des ateliers ont ~t~ organis~s A diverses ~tapes, pour obtenir leurs vues, dans des pays africains et en collaboration avec des bail leurs de fonds. Beaucoup d'eminents africains ont aid~ A definir la teneur et les lignes de force du rapport. Celui-ci ne pr~tend @tre qu'une contribution A l'~laboration par chaque pays africain d 'une strat~gie de developpement futuro 8i l'on veut qu'elle ait du sens, la formulation de politiques et programmes concernant tel ou tel pays ne peut @tre ~laboree qu'au niveau de ce pays. 7. Une etude de l'exp~rience acquise peut fournir rapidement quelques reponses. Mais d'autres questions, comme Ie retard apparent de la transition demographique en Afrique ou les questions extremement complexes qui concernent l'environnement, exigeront qu'on poursuive les recherches. Tout rapport consacr~ A l'Afrique subsaharienne doit affronter l'enorme diversit~ du continent et les faiblesses profondes des statistiques disponibles. Nous n'avons tous que trop conscience de la fa90n insuffisante dont nous comprenons un grand nombre de ces que stions. Cependant, Ie rapport ne saurait se borner A dresser un ordre du jour des recherches. 11 essaie, sur la base des informations, pour incomp1~tes qu'elles soient, que nous possedons aujourd'hui, d'en deriver les elements d'une strategie de futur developpement. L' amelioration des donnees africaines appelle de longs efforts. Entre-temps, les chiffres disponibles fournissent, malgre toutes leurs carences, suffisamment de preuves pour qu' on se rende compte de l'enormite des probl~mes. Le rapport s'en servira au mieux pour formuler des recommandations concernant les grandes orientations. 8. Bien qu'on Mette inevitablement en exergue ses echecs, l'Afrique a connu des reus sites , dont il y a beaucoup A apprendre. Ces reussites mont rent , avec beaucoup plus de vigueur que n' importe quelle theorie. ce qu'il est possible de faire. - 3 - 9. La responsabilit~ de la crise ~conomique de l' Afrique doit atre partag~e. Les organismes bailleurs de fonds et les conseillers ~trangers ont particip~, tout autant que les gouvernements, aux efforts de d~veloppement ant~rieurs. SOils veulent redonner espoir A l'Afrique, ils doivent tous atre pr@ts A apporter des changements fondamentaux A leur fa~on de voir les choses. Cependant, l'avenir du continent ne peut atre d~cid~ que par les Africains eux-m@mes. Les organismes externes ne peuvent intervenir, A la limite, qu'A titre d'appoint. Qu'avons-nous appris 10. En Afrique subsaharienne, la croissance ~conomique g~n~rale s' ~tablit, depuis 1960, A une moyenne de 3,4 %, soit un chiffre A peine suph ieur A celui de la croissance d~mographique. En 1987, la r~gion comptait 450 millions d 'habitants - soit plus du double qu' au moment de l'ind~pendance - et avait un PIB dont le total atteignait environ 150 milliards de dollars, soit un chiffre qui ne d~passe guere celui de la Belgique, pays qui n'a que 10 millions d'habitants. La croissance s'est r~partie de fa~on in~gale dans le temps et parmi les pays. On distingue trois grandes p~riodes : 1960-72, marqu~e par un relevement des revenus par personne; 1973-80, p~riode de stagnation; et 1981-87, que caract~rise un d~clin. Pour certains pays (par exemple, Ie Lib~ria, le Nig~ria et le Niger), le recul des revenus par personne depuis 1980 est d~sastreux - il d~passe largement la barre des 25 %. Et, comme toujours, il y a eu des exceptions - tout particulierement le Botswana, dont le revenu par personne a augmenU A raison de 9 % par an depuis 25 ans, le Cameroun (11 %) et Maurice (3 I). 11. crise ~conomique de 1 'Afrique, qui va s'aggravant, se La caract~rise par une faible croissance de l'agriculture, par l'effondrement de 1a production industrielle, par des exportatior.s m~diocres, par l'accumulation des dettes et par la d~gradation des indicateurs sociaux, des inst! tutions et de l' environnement. La production agricole a progress~ annuellement, en moyenne, de moins de 1,5 % depuis 1970 tandis que la production alimentaire ne parvenait pas A rattraper le rythme de la croissance d~mographique. Bien que l'industrie ait avanc~ A peu pres trois fois plus vite que I 'agriculture pendant les dix premi~res ann~es d'ind~pendance, on voit depuis quelques ann~es un renversement alarmant de la situation : de nombreux pays africains semblent en effet commencer A se d~sindustrialiser. Comme le volume des exportations augmente tres peu depuis 1970, l'Afrique a vu sa part des march~s mondiaux diminuer de pres de 1a moitU. 12. Durant les ann~es 70, les gouvernements ont contract~ de gros emprunts A l'~tranger afin de maintenir les revenus et les investissements. La dette A long terme de l'Afrique s'est multipli~e par 19 depuis 1970 et ~gale actuellement le PNB, ce qui fait de la r~gion celIe qui est Ie plus fortement endett~e (la dette de l'Am~rique latine n'atteint que 60 % de son PNB). Les obligations au titre du service de la dette - qui repr~sentaient 47 % des recettes d'exportation en 1988 - n'ont ~t~ honor~es qu'A moins de la moiti~. On a n~goci~ plus de 100 r~~chelonnements de dette et, malgr~ cela, les impay~s continuent de s'accumuler. - 4 - 13. La crise a aussi un profond retentissement humain. Dans de nombreux pays, les sommes consacr~es aux services sociaux se sont brutalement contract~es, la scolarisation est en baisse, la situation nutritionnelle empire et la mortalit~ infantile reste ~lev~e. Le chOmage d~clar~ est lui aussi en augmentation dans les villes, notamment parmi les jeunes diplOm~s. Et. faisant peser sa menace sur la capacit~ de production A long terme de l'Afrique, la pression d~mographique qui s'exerce sur les terres acc~l~re la d~sertification et Ie d~boisement. (Le bois de feu se fait de plus en plus rare et le ruissellement fait perdre sa fertilit~ au sol, m@me si l'on n'a jamais mesur~ pr~cis~ment aucune de ces tendances.) Enfin, la faillite des institutions est symbolis~e par la situation atroce d'universit~s qui pouvaient jadis aspirer A une renomm~e mondiale. par la d~sint~gration des routes pav~es, et par l'effondrement des syst~mes judiciaire et bancaire. Des bureaucracies pl~thoriques et m~diocrement administrees sont des poids morts qui accablent les secteurs de production. Beaucoup de gouvernements sont en pleine crise, min~s par la corruption, et de moins en moins capables d' attirer la confiance de l' ensemble de la population. Dans de nombreux pays, des troubles d'origine ethnique deciment des populations sans defense. 14. On parle beaucoup des facteurs qui sont A la source de ce declin economique de l' Afrique. Certains y voient surtout des causes externes, d'autres des causes internes. Les changements du revenu par personne ont trois grandes causes: variations des termes de l'echange, croissance d~mographique et augmentation de la production (PIB). o Pour l'ensemble de l'Afrique, l'analyse du Chapitre I montre que les pertes de revenus imputables A des modifications des termes de l'~change depuis 1960 sont moindres que les gains. D'autres r~gions ont subi de plus grandes pertes, mais se sont mieux tirees d'affaire. C'est la baisse du volume des exportations, plutOt que la baisse des prix, qui explique mieux la mediocrite des recettes d'exportation de l'Afrique. Les pays africains A faible revenu ont ~t~ le plus durement touches (leurs revenus ont perdu beaucoup de terrain durant 1es annees 70 et 80). o La croissance d~mographique ne cesse de s'intensifier depuis une trentaine d'annees. Elle depasse largement aujourd'hui la barre de 3 % et I' emporte sur les progr~s du PIB. Par contre, 1a population est en diminution dans la plupart des autres pays en developpement o La croissance du PIB de la region, qui est d~cevante, est en partie fonction du niveau et de l'efficacit~ des investissements. Les investissements bruts ont d'abord augmente (de 15 A 20 % au debut des ann~es 1970), puis retomber ensuite A 15 %. La production additionnelle obtenue grace Aces investissements a chQt~ d'une fa90n spectaculaire, tombant de 31 % en 1960 A 2,5 % durant les ann~es 1980. 15. La conclusion paralt claire. Bien que, A des dates diff~rentes, de nombreux pays africains aient vu leurs efforts de d~veloppement interrompus par des chutes brutales des cours mondiaux de produits fondamentaux, i1 faut bien dire que, A long terme, l'affaiblissement des revenus par personne qu'on observe dans l'ensemble de l'Afrique depuis la fin - 5 - des ann~e 70 s' exp1ique en grande partie par la baisse du niveau et de l'efficacit~ des investissements, aggrav~e par l'acc~l~ration de la croissance d~mographique - et non pas essentiel1ement par des facteurs externes. Mais c'est 1a faible rentabilit~ des investissements qui ~ t Ie principal facteur du d~clin r~cent de l'Afrique. Les frais d'~quipement et de fonctionnement de l'Afrique d~passent d'ordinaire de 50 A 100 % ceux de l'Asie du Sud - qui est la r~gion 1a mieux comparable. La gestion m~diocre du secteur public s'est sold~e par des entreprises publiques d~ficitaires, par de m~diocres choix d'investissements, par une infrastructure coQteuse et peu Hable, par des distorsions de prix (notamment des taux de change sur~valu~s, des prix administr~s et un cr~dit subventionn~) et, partant, par un manque d'efficacit~ dans l'affectation des ressources. Les salaires sont ~lev~s par rapport A la productiviU (notamment dans la zone du franc CFA) , m~me si 1es salaires r~e1s ont recul~ d'un qu&rt environ en Afrique depuis 1980. Les technologies interm~diaires (comme les charrettes A p~dale et 1a traction animale) sont trop peu emp1oy~es. Ce qui est encore plus fondamental. c' est 1a d~gradation de 1a qua1it~ du gouvernement, dont t~moignent les obstacles bureaucratiques, la recherche constante de rentes, 1a faiblesse des syst~mes judiciaires, et l'arbitraire des d~cisions; ce sont 1A des ~l~ments qui p~sent lourd dans 1e budget des entreprises et d~couragent les investisseurs. La plupart du temps, l'Afrique n'est tout simp1ement pas comp~titive dans un monde de plus en plus marqu~ par 1a concurrence. 16. Apr~s l'ind~pendance, 1es efforts de d~ve1oppement se sont sold~s par UIl ~chec parce que la strat~gie avait ~t~ mal con9ue. Les gouvernements se SOfit pr~cipit~s dans 1e "modernisation·, en copiant, sans les adapter, des mod~les occidentaux. 11 en est r~sult~ des investissements publics, d~cid~s sans pr~paration suffisante, dans des entreprises industrie11es, en n'acc()rdant que trop peu d'attention A l'agricu1ture paysanne, en comptant trop sur l'Etat pour faire fonctionner des entreprises commercia1es a10rs qu'i1 n'en avait comp~tence ni sur 1e plan de la gestion, ni sur 1e plan technique ni sur 1e plan des affaires, et en faisant trop peu d'efforts pour encourager un d~ve1oppement local, A partir de la base. Une formu1e qui a11ait~ du sommet A 1a base a en1ev~ toute motivation au bas peuple, dont on a absolument besoin des ~nergies pour r~aliser 1e d~ve1oppement. Perspectives de la prochaine g~n~ration 17. Certaines 1ignes de force fondamenta1es mou1eront Ie contexte du futur d~ve1oppement de l'Afrique. Le monde est au seui1 d'une nouvelle ~re techno1ogique qu' animent principa1ement les progr~s rapides des syst~mes d'information, des sciences biologiques et des recherches concernant 1es mat~ri.aux. Le traitement ultra rapide et peu coQteux des informations, ainsi que les nouvelles m~thodes de communications, sont en train de transformer 1a fa~on dont Ie monde conduit ses affaires. Une bonne connaissance du march~, des structures de production soup1es et des moyens de r~ponse rap ide aux nouvelles possibi1it~s offertes donneront A certaines entreprises commercia1es et agricoles un avantage sur leurs concurrents. La biotechnologie et 1a science des mat~riaux offriront une ~tonnante gamme de produits nouveaux qui pourront rendre rapidement d~passh les m~thodes c1assiques qU'utilise l'Afrique. Dans un pare!l contexte, i1 ne faut gu~re s'attendre 1 une am~lioration des cours des mati~res premi~res. - 6 - 18. Le g~nie g~n~tique, les cultures de tis sus et d'autres innovations offrent ~ l'Afrique des possibilit~s nouvelles, mais constituent aussi pour elle une menace consid~rable. Si l' Afrique ne veut pas se marginaliser davant age , mais profiter de ces ~volutions, deux initiatives prennent alors une importance fondamentale : l'Afrique doit : o am~liorer la formation scientifique et technologique et chercher ~ la mettre au plus haut niveau possible, tout au moins pour se doter d'un noyau de sp~cialistes; et o forger de nouvelles associations avec des entreprises et instituts de recherche comp~tents de pays d~velopp~s. 19. II existe en Afrique deux grandes/tendances : l'explosion de la croissance demographique et l'acceleration de la degradation de l'environnement. En 1983, la Commission economique de l'ONU a bross~ un "sc~nario de cauchemar" qui d~crit les consequences de la persistance d'une croissance d~mographique excessive dans un contexte de revenus stationnaires ou en recul. Sur la base des tendances actuelles, la simple multiplication des chiffres est vertigineuse : un continent qui avait moins de 100 millions d'habitants au debut du si~cle en aura un milliard en 2010. En l'absence d'un flechissement de la f~condite, la population doublera en 21 ans, imposant ainsi une charge impossible aux services sociaux et, dans plusieurs r~gions de l'Afrique (par exemple, dans Ie Sahel, dans le Rwanda, Ie Burundi, Ie sud du Malawi et le Kenya), exer9ant sur les terres des pressions que seule pourra attenuer une migration massive. II en r~sultera une accumulation de tensions sociales et politiques. Ce phenom~ne sous-entend aussi la poursuite d'une urbanisation rapide. En 2020, il y aura une trentaine de villes de plus de 1 million d'habitants. Selon la tenue du syst~me ~conomique, ce pourrait atre soit un ~l~ment de croissance et de modernisation, soit un mis~rable ~l~ment de destabilisation, alimentant la rebellion contre la mis~re des bidonvilles tentaculaires. 20. La d~gradation de l'environnement africain a des dimensions A Ia fois nationales et internationales. Si on ne l'arrate pas, elle menace la base de production de 1 'Afrique. Mais Ie d~boisement inqui~te aussi Ie reste du monde car il menace la riche diversite biologique de l'Afrique, banque irrempla9able de g~nes dont pourrait b~neficier l'humanit~ tout entUre. Elle contribue aussi ~ l'~chauffement de la plan~te. 21. 11 s' agit maintenant pour I' Afrique d' inverser son mouvement actuel de d~clin. Elle a la possibilit~ de Ie faire, avec ses vastes terres vierges et ses immenses ressources hydrauliques inexploit~es; ses gisements prometteurs de mineraux, de petrole et de gaz; sa population sous-utilisee; ses traditions de solidarite et de cooperation; et Ie niveau ~leve de soutien international sur lequel elle peut compter. Le moment est venu de relever ce d~fi et de mettre en place une nouvelle de strat~gie de d~veloppement pour la prochaine generation. Une strat6gie de croissance sou tenable et 6quitable 22. Si l'Afrique veut eviter la famine, fournir A sa population de plus en plus nombreuse des emplois valables et permettre aux revenus de progresser, elle doit avoir une croissance ~conomique d'au moins 4 % par an. - 7 - Ce chiffre doit constituer 1 'objectif minimum. Cette croissance serait essentiellement fond~e sur la production agricole, qui doit augmenter de 4 % par an. Les pays africains pourraient alors non seulement se nourrir eux-memes, mais obtenir les devises dont leur d~veloppement a besoin. Le chiffre avanc~ comme objectif de la croissance industrielle - 5 % au d~but, passant ensuite A 7 ou 8 % - est sup~rieur A celui de l'agriculture, ce qui concorde avec l'exp~rience acquise ailleurs. 5i tous les autres secteurs ont une croissance d'environ 4 A 5 %, il devrait etre possible de fournir des emplois A une population active qui augmentera d' environ 380 millions de travailleurs entre 1990 et 2020. 23. Pour atteindre ces objectifs, l'Afrique doit non seulement relever radicalement ses niveaux d '~pargne et d' investissement, mais doit aussi amHiorer consid~rablement sa productivit~ ../ de 1 A 2 % par an pour la main-d'oeuvre et d'environ 3 % par an pour les terres. Pour cela, il faut un environnement propice de services d'infrastructure et d'incitations pour stimuler une production efficace et l'initiative priv~e. II faut aussi des capacit~s humaines et institutionnelles renforc~es, depuis Ie village jusqu'aux ~chelons sup~rieurs du gouvernement et de l'industrie. Ces deux th~mes se retrouvent dans tout Ie rapport. 24. Pour que ces objectifs soient atteints A long terme, la strat~gie de croissance doit etre A la fois soutenable et ~quitable - soutenable, parce que ce sont de bonnes politiques en mati~re d'environnement qui prot~gent la capac.it~ de production des ressources naturelles de 1 'Afrique, et ~quitable parce qu'elle est Ie pr~alable d'une stabiUt~ poUtique A long terme. Equitable signifie, en particulier, qu'on prend des mesures pour r~duire la pauvret~, notamment en donnant aux pauvres un meilleur acc~s aux avoirs productifs. 25. La strat~gie A long terme que propose Ie pr~sent rapport envisage une r~orientation qui s'~carte des pratiques du pass~. Elle vise A lib~rer les ~nergies des gens du commun en les rendant davant age responsables de leur propre existence. Les b~n~fices seront cons id~r~s comme la preuve d' une entreprise efficace. Les agriculteurs tiendront la barre des services de vulgarisation agricole, et non pas l' inverse. Les investisseurs seront accueillis comme des associes, et non pas comme des ennemis. L'Etat cessera d'etre un entrepreneur pour devenir Ie promoteur de la production priv~e. Et Ie secteur marginal devra porter en soi les germes de l'esprit d'entreprise, et cesser d'etre un foyer de gangsters. 26. Un environnement propice. Les agriculteurs et les entrepreneurs ne seront efficaces que si les incitations qui leur sont offertes encouragent l' efficacit~. ilL' environnement propice" qui encourage la production et 1 'efficaciU compte deux volets : des incitations et une infrastructure physique. Les deux volets sont absoluement fondamentaux. 27. L'exp~rience acquise dans Ie monde entier prouve de fa~on convaincante que les pays dont les taux de croissance sont les plus ~lev~s ont maintenu leur taux de change A des niveaux comp~titifs, ont ~vit~ de prot~ger de fa~on excessive et discriminatoire leur industrie de fabrication et de minorer Ie prix de leurs produits agricoles, ont conserv~ des taux d'int~ret positifs et des salaires conformes A la productivit~, ont appliqu~ les principes du recouvrement des coOts A 1 '~tablissement du prix des - 8 - services publics, et ont ~vit~ l'acc~l~ration d'une forte inflation par des politiques disciplin~es en mati~re de finances publiques et de monnaie. Ces th~mes ont ~t~ repris quand on a formul~ les programmes d'ajustement structurel, mais ils n'on ~t~ jusqu'ici que partiellement suivis d'effet. Ils sont absolument essentiels A la relance de l'Afrique. 28. La politique qui suscite peut-I!tre le plus de controverses est celIe du taux de change. Des taux de change sur~valu~s encouragent la consommation de produits import~s et op~rent une discrimination contre les producteurs du pays. Pour activer la production et I' emploi, un taux de change comp~titif est essentie1. L'~Ument critique consiste A conserver des prix agricoles r~mun~rateurs et des salaires industriels comp~titifs sur Ie plan international. Mais, pour que les ajusteinents du taux de change donnent les r~sultats e~compt~s, il faut qu'existe une discipline financi~re rigide et que les gouvernements s'abstiennent de prendre la moindre mesure qui fasse artificiellement monter le niveau des salaires. 29. Une infrastructure n~glig~e - des routes mal entretenues, des ports peu efficaces, des services publics peu fiables, etc. - font consid~rablement augmenter les frais de fonctionnement des entreprises. La p1upart des pays africains se heurtent A ce probl~me. Dans certains cas, il s'agit d'un ~tat de choses chronique. Pour s'attaquer A ce probl~me, les gouvernements doivent donner la priorit~ A la remise en ~tat de l'infrastructure, avant de proc~der A des investissements dans de nouvelles installations. On peut r~duire les conts en recourant A de petits entrepreneurs locaux et augmenter les recettes en relevant les tarifs, notamment ceux des services pulics. Des r~formes d~lib~r~es des organismes parapub1ics peuvent aussi conduire rapidement A des am~liorations consid~rables. 30. Rattraper le temps perdu dans le domaine de l'entretien et de la r~novation demandera un travail qui absorbera une grande partie de 1a prochaine d~cennie. Pour y parvenir, et pour assurer aussi l'expansion et l'entretien indispensables, il faudra engager des d~penses A hauteur de 5 A 7 % du PIB; en m@me temps, il faudra prendre des mesures visant a re1ever 1a tarification des usagers, A encourager les industries nationales de construction, et A r~former la passation des march~s publics, 1 'administration des contrats et la planification des transports. Un public nombreux, mais diffus, subit les cons~quences d'une planification m~diocre et paie le prix de la n~gligence, du manque d'efficacit~ et de l' obsolescence. Une consul tation syst~matique des groupements organis~s d'int~ress~s (par exemp1e, chambres de commerce et d'industrie) peut renforcer 1a responsabilisation et conduire A de meilleures r~actions. De nombreux faits prouvent que le monde des affaires assume sans probl~me le cont int~gral de services fiables; si ces services n 'existent pas, les entreprises font faillite. 31. L'Afrique a besoin de villes efficaces susceptibles d'accueillir des entreprises comp~titives. Les services peuvent, dans une large mesure, se financer eux-ml!mes. 11 peut aussi en @tre de ml!me de l'am~nagement de meilleurs logements, qui est en m@me temps un grand cr~ateur d'emplois. On peut ~viter la pollution par l'~vacuation des d~chets en trouvant sur place des solutions peu conteuses. - 9 - 32. Renforcement des institutions. Ce dont I' Afrique a besoin, ce ntest pas tellement d'une diminution de la pr~sence de l'Etat, mais d'une amelioration de celui-ci; elle a besoin d'un gouvernement qui cherche moins a intervenir directement et donne a d'autres plus de possibilites de faire oeuvre productive. A tous les niveaux du gouvernement, il faut prendre des mesures pour am~liorer les administrations publiques et les entreprises parapubliques. Le renforcement des institutions est une entreprise de longue haleine qui exige une vision claire et un ordre du jour precis. Au niveau du gouvernement central, plusieurs pays ont deja entrepris de profondes r~formes, par exemple, Ie Ghana, la Guin~e et la RCA; il s'agit de creer une fonction publique moins plethorique, mieux disciplin~et mieux qualifiee, mieux motivee, dont les membres parfaitement competents re~oivent des traitements competitifs. II faut en particulier s'efforcer de donner aux gouvernements les moyens de mieux organiser l'~conomie et de mieux analyser les grandes orientations. Les entreprises publiques doivent avoir un mandat precis, jouir de l'autonomie de gestion et offrir des indicateurs de performance qu'on puisse surveiller. Les administrations locales pourraient aussi jouer un plus grand r6le si on leur octroyait plus d'autonomie et si elles disposaient de sources de revenus reguli~res et independantes. notamment pour gerer les reseaux urbains en expansion qui relient les villes A l'arri~re-pays. Dans les zones rurales, les services locaux, comme ceux d'alimentation en eau, pourraient ~tre mieux organises au niveau communal; pour cela, il faut ici encore pouvoir veritablement deleguer les responsabilites. 33. Le renforcement de la capaciU du secteur prive ne doit pas s'arr.eter A l'aide apportee aux associations communautaires. On peut amener des associations non gouvernementales locales 8 participer 8 l'effort de developpement en s'en servant d'intermediaires pour encourager des activites A la base. Les mutuelles de credit et les associations non structurees d'~pnrgne et de credit (par exemple, les tontines) pourraient consentir de petits credits aux agriculteurs et aux micro-entreprises. On pourrait aussi mobiliser sur place des consultants et des associations professionnelles. Tout cela exige un effort delibere et soigneusement orchestre de la part des dirigeants du pays, afin de renforcer les capacit~s locales. 34. En derni~re analyse, un meilleur art de gouverner exige un renouvellement politique. On entend par 18 une attaque tout a fait delib~ree contre la corruption, OU qutelle se presente, du niveau Ie plus eleve aux niveaux les plus bas, en donnant l'exemple, en renfor~ant les syst~mes de responsabilisation. en encourageant un debat public et en soutenant une presse libre. Cela signifie aussi qU'on donne pleins pouvoirs aux pauvres et aux femmes, en encourageant des organisations de base et des organisations non gouvernementales associations d' agriculteurs. cooperatives, clubs femillins. et ainsi de suite. Investir dans l'homme 35. Meme si elles sont bien developp~es. les institutions ne sont efficaces que dans la mesure OU leurs employes Ie sont aussi. L'~ducation et la sante etaient les priorit~s des strat~gies mises en place apres l'ind~pendance; elles doivent Ie rester A l'avenir. Mais il est essentiel d'apporter des ameliorations aux programmes. On a d~ja essaye de fixer des objec:tifs permettant d'obtenir une couverture universelle de la population - 10 - en matiere de soins de sante de base, d'education et de securite alimentaire. Ces objectifs n'ont pas ete atteints; la raison en est en partie parce que les efforts ont ete depasses par la rapidite de la croissance demographique, en partie parce que les deniers de 1 'Etat ont ete consacres ad' autres priorites. Or, il est impensable qu'on vive une autre generation sans faire un effort dHibere pour atteindre cet obj ectif. On peut y parvenir en modulant les priorites, en reduisant les depenses et en recouvrant les conts. Et on peut Ie faire sans abandonner l'objectif qu'on s'etait deja donne de relever la qualite. II est urgent d'ameliorer l'enseignement des sciences et de la technologie. On peut aussi reduire les conts et augmenter l'efficacite en encourageant les beneficiaires A participer A la conception, A la prestation et A la gestion des services. 36. Ralentissement de la croissance demographique. Relever Ie taux de croissance du PIB pour Ie porter de 2 a 4 % durant les prochaines annees serait une realisation importante. Mais les revenus ne vont guere s'ameliorer si la croissance demographique continue de s'accelerer. De plus en plus, les gouvernements africains en viennent A accepter qU'une politique demographique doit Hre un element obligatoire d 'une bonne strategie de valorisation des ressources humaines. 37. L'Afrique se trouve dans une situation singuliere. L'humanite n'a jamais connu de croissance demographique aussi rapide. D'apres les tendances actuelles, Ie continent aura pres de 500 millions d'habitants en 1990 et plus d'un milliard en 2010. Dans ces conditions, l'Afrique se trouve de moins en moins en mesure de se nourrir, d'eduquer ses enfants ou de trouver des emplois aux nouvelles recrues de la population active. Ce ne sont pas les chiffres absolus qui sont inquietants - il reste encore de vastes regions sous-peuplees - mais plutOt Ie taux eleve de croissance, ce qui signifie que la croissance economique et l'expansion des services sociaux doivent faire une course de vitesse pour que Ie niveau de vie parvienne a faire du sur place. 38. Le planning familial est la pierre angulaire de l'amelioration des soins de sante. L' Afrique a certains taux de mortalite maternelle et infantile qui comptent parmi les plus eleves du monde. Dans les pays les plus pauvres - Mali, Ethiopie, Burkina Faso - Ie quart environ de tous les enfants meurent avant d'avoir atteint l'Age de cinq ans. Le Zimbabwe et Ie Bostwana offrent des preuves convaincantes que, si l'on met en place des services de planning familial largement accessibles, l'emploi de la contraception devient eleve, notamment s'il est etaye par des campagnes dans les medias et par des programmes d' education A base communautaire. En Afrique plus qU'ailleurs, on continue de preferer un grand nombre d'enfants, mame quand la mortalite est en baisse. On n' a pas encore persuade les familIes qU'un meilleur espacement et un meilleur calendrier des naissances, ainsi qU'une reduction de leur nombre, peuvent reduire la mortalite et la morbidite infantiles, enfantines et maternelles. Desormais, la plupart des gouvernements africains soutiennent officiellement Ie planning familial, mais il est urgent d'accompagner les engagements verbaux d'un soutien technique, financier et administratif. Pour faire tomber Ie taux de croissance demographique de son niveau actuel eleve de 3,3 % par an A une moyenne de 2,75 % par an en 1990-2020, il faudra que l'indice synthetique de fecondite baisse de 6,7 enfants par femme a 3,4 en 2020. Un budget annuel des programmes de planning familial atteignant A peine 0,8 % du PNB suffirait A - 11 - mettre en place, dans la plupart des pays, des programmes efficaces de planning familial. 39. Les soins fondamentaux de sant~ ont la priorit~. Des progr~s consid~rables en direction d tune am~lioration des soins de sant~ sont possibles, m~me avec les s~v~res contraintes budg~taires auxquelles font face les pays africains, A condition que les cr~dits soient affect~s aux interventions pr~ventives et A de simples syst~mes A base communautaire, au lieu de I' ~tre A une m~decine curative coQteuse se pratiquant dans des h6pitaux modernes. Les campagnes de vaccination de masse sont un moyen efficace et peu coQteux de contrer plusieurs grandes maladies meurti~res de l'enfance. Et m~me les tr~s pauvres sont dispos~s A payer pour des soins de sant~, si on leur montre qu'ils re~oivent quelque chose pour leur argent. Un tel syst~me signifie avant tout qu'il faut assurer un approvisionnement fiable en m~dicaments peu coQteux en am~liorant leurs m~thodes d'achat et en organisant des livraisons r~guli~res aux dispensaires et aux postes de sant~. 40. On estime que deux Africains sur trois ne disposent toujours pas d' eau potable. Un acc~s universel A une eau salubre, pr~alable indispensable d'une am~lioration de la sant~, devrait ~tre un ~l~ment obligatoire de la strat~gie A long terme. Ce sont les hommes eux-m~mes qui d~tiennent la cl~ leur permettant d'atteindre cet objectif. Quand les collectivit~s participent A la conception, A la construction et A l'installation d' ouvrages d'aljmentation en eau, et sont charg~es de leur entretien, les projets d'eau ont tendance A ~tre plus efficients, plus efficaces par rapport aux coQts et, partant, plus faciles A entretenir. lei encore, on pourrait recouvrer une grande partie des coQts en instituant des redevances d'utilisation. 41. Attaque contre la faim. II y a de plus en plus d'Africains qui ont faim. Tandis que les graves p~nuries alimentaires ~taient l'exception en 1960, elles sont d~sormais devenues monnaie courante. On estime que Ie quart de la population de l'Afrique subsaharienne - plus de 100 millions d'habitants - se trouve en pr~sence d'une ins~curit~ alimentaire chronique. Par dessus tout, se pose en Afrique un probl~me d'approvisionnement. L'expansion de la production alimentaire est la solution - il s'agit d 'obtenir une croissance de 4 % par an - mais seulement si on lib~ralise auss! Ie commerce alimentaire au sein de I' Afrique. Cette croissance permettrait de nourrir la popUlation (qui augmenterait A raison de 2,75 % par an), d'am~liorer la nutrition (1 % par an) et d'~liminer graduellement les importations alimentaires (0,25 % par an) durant la p~riode 1990-2020. Mais il ne suffit pas de gonfler l'offre; il faut aussi que, en dehors du secteur agricole, les familIes aient un pouvoir d'achat suffisant. Grace A l'~levation du niveau de l'emploi que propose Ie sc~nario pr~vu, Ie nombre de mlllnages A faible revenu qui n' ont pas les moyens d' obtenir un r~gime alimentaire suffisant diminuerait progressivement. Mais les s~cheresses p~riodiques continueront A plonger dans la famine un noyau r~siduel compos~ des plus pauvres parmi les pauvres. Pour ce groupe vuln~rable, il faudra alors mettre en place des subventions alimentaires, ou des programmes "vivres contre travail", assortis de programmes qui altmentent directement les femmes et les enfants mal nourris. 42. Une population mieux instruite. La scolarisation a ~norm~ment augment~ au cours des trente derni~res ann~es, mais trop souvent aux d~pens de la qualit~. L'am~lioration de la qualit~ a d~sormais la priorit~. II est - 12 - indispensable d' augmenter les cr~dits r~serv~s ~ I' achat de manuels et d'autre mat~riel didactique. Relever les d~penses annuelles pour l'achat de manuels de l'enseignement primaire de 60 cents ~ environ 5 dollars par ~l~ve absorberait moins de 5 % des sommes que les donateurs consacrent chaque ann~e ~ l'assistance technique en Afrique subsaharienne. Les pays doivent aussi se donner la capacit~ leur permettant d'~laborer ~ bon march~ un mat~riel p~dagogique adapt~ aux conditions et besoins locaux. A long terme, l'objectif reste un accroissement de la scolarisation, notamment celIe des filles, ~ cause de l' influence profonde que leur ~ducation exerce sur Ie bien-atre familial. 43. Tout cela exigera qu'on d~pense de l'argent pour l'enseignement de base. Cependant, la premi~re chose ~ faire consiste ~ utiliser plus efficacement les moyens disponibles. On pourrait Ie faire, par exemple, en adoptant la formule des classes altern~es, en augmentant Ie nombre d'heures de cours, et en renfor9ant la gestion du syst~me scolaire. II est possible d'accroltre Ie budget de l'~ducation en percevant des droits d'inscription, notamment ~ l'universit~, et en canalisant une partie des sommes ainsi ~conomis~es vers l'enseignement de base. On peut ~galement accroltre les d~penses consacr~es ~ l'~ducation en encourageant l'enseignement priv~, ainsi que les contributions apport~es par les communaut~s aux constructions scolaires, au mat~riel p~dagogique et aux logements des enseignants. 44. Des changements fondamentaux s'imposent presque partout dans l'enseignement post-secondaire, si l'Afrique veut doter sa population active des comp~tences dont elle a besoin pour survivre durant la nouvelle ~re technologique. Les ressources devront atre r~orient~es, notamment en direction des sciences, de l ' ing~nierie, de la comptabilit~ et d' autres domaines techniques. II faudra r~duire consid~rablement les subventions ~ l'~ducation et ~tablir un meilleur ~quilibre entre les salaires et les autres ~l~ments de coOt. L'enseignement technique doit atre orient~ plus strictement vers les besoins des employeurs, qui devront participer davantage ~ l'organisation des cours; il faudra enfin forger des liens plus solides entre Ie lieu de travail et les ~tablissements de formation. 45. Gestion plus efficace des programmes sociaux. Si la responsabilit~ de la gestion des services sociaux de base est confi~e ~ des organismes locaux, ces services sont mieux adapt~s aux besoins des utilisateurs, qui acceptent alors plus volontiers d'assumer une partie de leurs coOts. Les mots d'ordre de l'avenir sont d~l~gation, participation de la communaut~ et recouvrement des coOts. Avec un tel systeme, les organismes centraux ont pour rOle de fournir un soutien technique en recourant ~ la m~thode de formation et visites. Les organisations non gouvernementales peuvent jouer, sur un plan d'efficacit~ par rapport aux coOts, un rOle pr~cieux d'interm~diaire entre ces organismes et les groupements communautaires. 46. Les femmes et les groupements f~minins ont une grande contribution ~ apporter pour am~liorer la prestation des services sociaux. En Afrique, ce sont en g~n~ral les femmes qui assurent la gestion du m~nage; ce sont elles qui ont la responsabilit~ de nourrir la famille et de fournir l'eau, d' assurer l'~ducation, les soins de sant~ et les services de planning familial. Elles interviennent aussi dans la production alimentaire et dans Ie commerce. La conception et l'ex~cution des programmes de valorisation des ressources humaines devraient reconnaltre leur rOle de fa90n plus explicite. - 13 - 47. Financement soutenu. Meme si on d!!ploie les efforts les plus vigoureux pour utiliser au mieux les moyens existants, ceux-ci ne suffiront pas. La straUgie propos~e pr~voit que seront doubl~es les d~penses publiques consacr~es ! la valorisation des res sources humaines - passant d'environ 4-5 % ! 8-10 % du PIB - d'ici ! l'an 2000. Cette expansion ne peut avoir lieu que si les bailleurs de fonds sont prets ! en assumer une partie des coOts et si l'on intensifie en m~me temps les efforts pour recouvrer les coOts en percevant des redevances, notamment pour l'enseignement postprimaire. Rel~vement de la production agricole 48. A l'encontre de ce qu'on faisait pr~c!!demment, c'est l'agriculture qui, dans la future strat~gie, est Ie principal moteur de la croissance. C'est I! OU l'Afrique jouit dans l'imm~diat d'un avantage comparatif. Elle tire de l'agriculture 35 % de son PIB, 66 % de son emploi et 40 % de ses expor.tations. En outre, les liaisons entre croissance agricole et croissance industrielle sont vigoureuses; les agriculteurs ont besoin du march!! urbain et lE~s producteurs urbains prosp~rent, pour une large part, en vendant ! la population rurale. M~me si lOon tient pleinement compte des contraintes de l'environnement, les possibilit~s d'expansion de la production agricole sont consid!!rables, bien qu'elles varient d'un pays A l'autre. II s'agit de faire passer la croissance de la production du niveau de 2 % auquel elle se situe depuis 1960 ! 4 %, qui est Ie niveau n~cessaire pour obtenir la s~curit~ alimentaire et relever les revenus, au d~but dans la modeste proportion de 1 % par an pour finir par arriver A 2 %. Pour cela, il faudra que la productivit!! de la main-d'oeuvre progresse d'environ 1,5 %. Comme il n'est pas possible d'augmenter la superficie cultiv~e de plus de 1 % sans exercer sur 1 'environnement des influences nuisibles (durant les 20 derni~res ann~es, Ie taux moyen a ~t!! de 0,7 I), il faut donc que la productivit~ de la terre s'am~!liore d'environ 3 % par an. 49. Un taux de croissance de 4 % est ambitieux, sans pour autant ~tre impossible. Le Rwanda, Ie Kenya, Ie Cameroun, la COte d'Ivoire et Ie Malawi 1 'ont tous obtenu, et l'ont parfois m~me d~pass~, pendant de longues p~riodes. Or, d'autres pays off rent un meilleur potentiel, tels Ie ZaIre, Ie Soudan, la Zambie et l'Ethiopie, pour ne nommer que les plus grands. En m~me temps, quelques pays, notamment ceux du Sahel, ne pourront sans doute jamais atteindre cet objectif. 50. Les march~s d'outremer dont d!!pend 1 'agriculture africaine resteront fortement comp~titifs. On ne peut s'attendre, ! long terme, ! voir augmenter les prix. Ce n'est que dans de rares cas - surtout dans celui du cacao - que l'augmentation de la production africaine risque de faire baisser sensiblement les cours mondiaux. Quoi qu' il en so it , les pays africains devront diversifier leur production et rechercher des march~s de produits fants.is ie, par exemple, les l!!gumes, fleurs et fruits hors saison. 51. Malgr~ l'~norme diversit!! des zones ~cologiques qui recoupent Ie continent, les politiques A mettre en oeuvre pour stimuler la croissance du secteur agricole africain ont un nombre surprenant de points communs. Pour atteindre l'objectif de croissance, tous les pays africains devront cr~er un - 14 - environnement propice, exploiter les nouvelles technologies, cr~er des capacit~s et sauvegarder les ressources naturelles. o Un environnement propice A l'agriculture signifie qu'on laisse les prix varier en ~fonction de l'~volution du march~, qu'on confie surtout au secteur priv~ la fourniture des intrants, la commercialisation, la transformation et 1 'exportation, qu 'on r~duit les contrOles administratifs, qu'on encourage Ie cr~dit A des taux d'int~r~t commercialement attrayants par l'interm~diaire d '~tablissements financiers priv~s indig~nes, tels que coop~ratives et mutuelles de cr~dit (comme c'est d~jA Ie cas au Rwanda et au Cameroun), qu'on r~forme progressivement Ie r~gime foncier de fa~on A permettre l'inscription au cadastre des titres de propri~t~, ce qui s~curise les exploitants et les encourage A bonifier leurs terres, et qu 'on am~liore les routes rurales en recourant A de petits entrepreneurs locaux et grace aux contributions des collectivit~s locales. o L'exploitation des technologies exige qu'on accorde une importance nouvelle aux recherches agricoles. Pour cela, il faut r~nover les ~tablissements nationaux de recherche, donner un rOle accru aux centres internationaux de recherche, et organiser des r~seaux pluri-nationaux pour grouper les recherches portant sur des sujets pr~cis. Cette strat~gie doit avoir pour ~l~ment essentiel la volont~ d'am~liorer la gestion des recherches et d'~tablir un lien entre Ie chercheur et l'exploitant en mettant en place un syst~me unifi~ de vulgarisation, selon la formule de formation et visites, qui r~ponde mieux qu'il ne l'a fait dans Ie pass~ aux besoins des agriculteurs et so it plus efficace que les syst~mes pr~c~dents Oll de multiples services de vulgarisation ne s'occupaient chacun que d'une culture particuli~re. o La cr~ation des capacit~s est un besoin qui se fait sentir a tous les niveaux; il s' agit de donner une meilleure formation aux chercheurs, aux agents de vulgarisation et aux agriculteurs et de renforcer les institutions rurales (associations d'agriculteurs. coop~ratives et groupements f~minins). o Des mesures visant A prot~ger l'environnement devront @tre mises en place pour att~nuer l'~rosion des sols, Ie d~boisement et la d~sertification. On coupe les arbres 29 fois plus vite qu'on ne les remplace. II y a peut-&tre jusqu'A 80 millions d'Africains qui ~prouvent des difficult~s A trouver du bois de feu. En Ethiopie, on a signal~ des pertes de 290 tonnes de couche arable A l'hectare. Des mesures simples peuvent avoir un retentissement profond : au Burkina Faso, on construit des banquettes de pierres pour r~duire Ie ruissellement et collecter la couche arable; en Ethiopie, les plantations d' arbres communaux ont ralenti Ie d~boisement; les agriculteurs k~nyans ont construit des terrasses sur des centaines de milliers de petites exploitations. I1 hut multiplier ces efforts sur tout Ie continent. Par dessus tout, il faut lancer des campagnes massives de plantation d'arbres. - 15 - 52. Bien que ces idees ne soient pas nouvelles, e11es ne sont pas encore 1argement mises en pratique. Des prix contr01es, un regime de restrictions commercia1es, des recherches desorganisees, de mediocres services de vu1garisation, de mauvaises routes rura1es, peu d'organisations efficaces d'agricu1teurs, un regime foncier confus et de mauvaises pratiques eco1ogiques sont 1a norme. C' est uniquement grAce l des interventions concertees qu'i1 sera possible d'atteindre et de maintenir 1es objectifs de croissance agrico1e dont depend 1e futur deve10ppement de l'Afrique. Un nouveau depart pour l'industrialisation 53. Depuis l' independance, la population active de I' Afrique - ouvriers, administrateurs et entrepreneurs - a acquis des competences techniques et une experience industrielle. Les entreprises indigenes vont depuis les travailleurs du metal independants qui construisent des po~les avec de la feraille au Kenya jusqu'l l'entreprise du Ghana qui utilise les dechets de canne l sucre pour fabriquer du papier. Aujourd'hui, les pays africains exportent non seulement des matieres premieres transformees mais aussi des produits manufactures, tels les v~tements de Madagascar, les produits d' electronique de Maurice et les radiateurs d' automobiles de la Tanzanie. II s'agit de partir de cette base pour rea1iser la transformation dynamique de 18 structure industrielle que les dirigeants africains ont envisagee dans Ie Plan d'Action de Lagos. 54. L' industrialisation devra prendre une voie differente de celle qu'envisageait, en 1980, la Decennie du developpement industriel de l'Afrique formulee par la CEA ONUDI. II est devenu de plus en plus evident que, dans Ie passe, en donnant un rOle preponderant l l'Etat, l'industrialisation de l'Afrique a cherche l creer des capacites sans se preoccuper suffisamment du coftt ou de la demande. Le resultat a ete une industrialisation tres peu efficace que subventionnaient fortement les consommateurs . et les contribuables. Depuis quelques annees, on cherche surtout l restructurer cette capacite (s'il Ie faut, en vendant de grosses entreprises publiques qui ne sont pas viables) et l remplacer les contrOles directs par Ie libre jeu du marche. Jusqu'ici, les reussites n'ont guere ete nombreuses; en fait, la production a baisse et plusieurs pays se trouvent maintenant dans une phase de desindustrialisation. II s'agit II en partie d'un ajustement indispensable - l'elimination des entreprises mal con~ues qui n'ont aucune possibilite de devenir rentables. Mais, pour que l'industrie reagisse de fa~on positive aux reformes, il faut ici encore qu'il existe un environnement propice, assorti de mesures pour susciter une demande et creer des industries. 55. Un environnement industriel propice. Vu leurs frais d'exploitation eleves, les pays africains devront, s'ils veulent Atre competitifs, faire preuve d'une volonte mieux affermie pour recourir l la politique des changes, entre:prendre des investissements d'infrastructure, constituer des partenariats internationaux et fournir des incitations afin de relever la productivite. Les gouvernements doivent non seulement abaisser les coftts de fonctlonnement directs en investissant dans l'infrastructure mais il leur faut aussi diminuer les frais administratifs et les risques financiers des invest.issements prives. Pour cela, ils devront cesser d'essayer de limiter les nouveaux investissements et adopter au contraire une attitude qui les facilite; ils devront cesser de proUger les entreprises existantes et - 16 - encourager au contraire 1a concurrence. II s'agit, en derni~re analyse, de recompenser l'efficacite et 1 'innovation. II faudra e1iminer r~glements et contr01es, A moins que des raisons majeures n'ob1igent A les conserver. 56. Bien que Ie secteur des entreprises pubUques ait agrandi 1a capacite industrie1le de nombreux pays, i1 pAtit aujourd'hui d'une gestion mediocre et d'un financement insuffisant. Le secteur prive detient 1a c1e de 1a future croissance industriel1e; or, 1es entrepreneurs prives ont souvent trouve de mei11eurs debouches en dehors de l'industrie (notamment en profitant des rentes de penurie que suscitaient 1es mesures de contrOle). Afin d'attirer 1es investisseurs. il est essentiel qU'existe un environnement economique et po1itique stable. Les gouvernements doivent soutenir les investisseurs prives aussi bien en paroles qu 'en actes - notamment en instaurant un regime juridique qui fonctionne bien et sur lequel on puisse compter pour proteger 1a propriete et rendre les contrats executoires. 57. Expansion des marches. II faudra developper l'industrie pour saisir les occasions qu' offre Ie marche. Une croissance industriel1e soutenue sera donc en partie fonction d'une vaste expansion de la demande nationa1e de produits manufactures d'origine locale. Essentiellement, il s'agira de tirer partie des liaisons entre l'agriculture et l'industrie sur Ie plan de l'offre et de la demande pour susciter dans 1es deux secteurs une croissance complementaire. Une amelioration des revenus agricoles fait accroitre la demande de biens de consommation et d'intrants agricoles dans les regions rurales et conduit A de nouveaux excedents qu 'utilisent les industries de transformation. L' accessibilite de produits manufactures appropries et peu cofiteux encourage 1es agriculteurs A investir afin d' ameliorer leurs revenus et leur fournit les moyens d' augmenter leur productivite. 58. Le fait que la plupart des pays africains ne constituent qu 'un marche peu important entraine deux consequences strategiques : les petits producteurs peuvent jouer un rOle singulier pour satisfaire la demande localisee et offrir un choix entre plusieurs concurrents; mais la rapide croissance industrielle dependra de la conqu~te d' autres marches. Les dirigeants africains ont eu raison de donner la priorite A l'elargissement des marches grAce A la formu1e d 'une integration regionale. Or, dans la pratique, les progr~s ont ete beaucoup trop 1ents. L'amelioration de l'acc~s aux marches voisins sera une etape intermediaire conduisant A des marches en dehors du continent. La concurrence sur les marches regionaux stimulera la concurrence, aidant ainsi 1es producteurs africains A affronter leurs homo1ogues du monde entier. 59. Creation de capacites industrielles. En Afrique, l'industriaUsation n'a pas dec1enche, jusqu'ici, un deve10ppement technologique indig~ne suffisamment vigoureux pour pouvoir se passer d'aide; e1le n'a pas non plus imparti aux travai11eurs et aux cadres administratifs les competences qui leur permettent de faire constamment augmenter 1a productivite. Pour faire passer l' industrie africaine de l' enfance A la maturite, la future strategie a pour element central un plan delibere visant A acquerir les competences et les connaissances qui permettent aux entrepreneurs, aux cadres administratifs et aux techniciens d'acquerir ~es competences indispensables. Les incitations devront @tre centrees sur 1a formation dans I' entreprise et sur I' adaptation de 1a technologie aux - 17 - conditions locales. 11 conviendra d 'encourager les associations industrielles a organiser des stages de perfectionnement. 11 faudra aussi inciter l'enseignement postprimaire a former une population active qui poss~de les comp~tences techniques et commerciales voulues. 60. En derni~re analyse, c'est en travaillant qu'on apprendra a fabriquer. Dans Ie cas de 1 'Afrique , cela signifie un partenariat avec des investisseurs ~trangers qui peuvent apporter a la fois les connaissances et les capitaux. Cependant, Ie transfert de comp~tence n'est pas automatique. On peut Ie faciliter en ~tablissant des liaisons inter-industrielles - par exemple, par Ie truchement de contrats de sous-traitance - et en encourageant les bureaux d'~tudes locaux. Encouragement de l'esprit d'entreprise africain 61. Au cours des prochaines d~cennies, les entrepreneurs africains devront relever un d~fi monumental - trouver un emploi productif pour une population active qui d~passera 600 millions de travail leurs en 2020 - c'est-a-dire Ie triple de son chiffre actuel. Ces emplois se trouveront sans doute dans une multitude de petites et de micro-entreprises, et non pas dans quelques grosses soci~t~s. Heureusement, 1 'Afrique ne manque pas d'entrepreneurs. Ces derni~res ann~es, en p~riode de crise ~conomique. ce sont les petites entreprises du secteur marginal qui ont fourni de plus en plus d' emplois et de produits. On estime en effet que ces entreprises fournissent aujourd'hui plus de la moiti~ des emplois urbains et apportent, dans de nombreux pays, jusqu'au cinqui~me du PIB. 62. Libre de toute r~glementation et objet d'aucune statistique, Ie secteur marginal groupe des petites entreprises qui interviennent dans de nombreux domaines - agriculture, industrie, commerce, transports, finance et services sociaux. 11 n'est pas statique, n'emploie pas n~cessairement des techniques traditionnelles, mais se lance dans les innovations et les adaptations qu'appellent les forces du march~. Ces entreprises trouvent dans le secteur marginal un environnement comp~titif, d~pourvu des contraintes qu'imposent des r~glements injustifi~s et bien adapt~ aux ressources disponibles et a 1a demande locales. Les entrepreneurs du secteur marginal sont ~tay~s par un syst~me d' institutions qui se situent a la base, - y compris un apprentissage sur Ie tas qui impartit la formation professionnelle et de petites associations qui peuvent repr~senter 1es int~r~ts de tel ou tel groupe et am~liorer l'acc~s au cr~dit et a d'autres ressources. 63. Cependant, un environnement de restrictions commerciales et l'insuffisance des liaisons avec les march~s organis~s freinent l'esprit d' entreprise et 1imitent les emplois qui pourraient trouver un terrain fertile dans la petite et 1a micro-entreprise. Les gouvernements peuvent aider de 1a mani~re suivante 1'essor de ces entreprises o de l'environnement des affaires. Des consultations Am~1ioration r~gu1:i.~res des associations du secteur priv~ peuvent faire augmenter la confiance a l'~gard de la stabilit~ des r~formes. Parmi 1es mesures pr~cises, on peut citer l' am~lioration de 1a situation juridique des entreprises du secteur marginal, l'~limination des taxes qui ~touffent l' initiative, la suppression des r~g1ements qui imposent des contraintes - 18 - excessives, la protection des droits de propri~t~ et des droits contractuels, et la garantie d'un reglement ~quitable des litiges. o Elargissement de l'acces au cr~dit. II faut laisser les banques percevoir des taux d'int~r~t etablis en fonction du march~ qui correspondent aux coQts administratifs r~els du credit A la petite entreprise. Pour les plus petites entreprises, des groupements officieux peuvent fournir des garanties reciproques qui mobilisent les ressources et recourir A des pressions sociales pour assurer Ie remboursement. o Encouragement de services autonomes. Les associations commerciales et professionnelles, les ONG, et les organisations de base peuvent souvent, mieux qU'un organisme d'Etat, fournir des services de vulgarisation et une assistance technique aux entrepreneurs. Les politiques qui encouragent la sous-traitance et soutiennent les bureaux d'etudes du pays peuvent ameliorer l'acces A la technologie et aux intrants. o Stimulation des marches locaux. On peut confier A de petits entrepreneurs locaux, pour Ie compte de l'Etat, l'achat de biens et l'obtention de services publics tels que l'enlevement des ordures, les transports, la reparation des v~hicules et I' entretien des routes. Des liaisons d'infrastructure am~lior~es et des programmes cibl~s d'assistance peuvent aussi aider A acc~l~rer les r~actions des entreprises aux stimulations du march~. D~blocage des richesses minerales et petrolieres de l'Afrique 64. L'Afrique est riche en mineraux et en petrole et, jusqu'ici, n'a tir~ parti que de peu d'entre eux. Cependant, des richesses min~rales et p~trolieres ne sont pas toujours un ~lement positif. Les sommes consid~rables que les gouvernements en ont retir~es dans Ie pass~ ont trop souvent perturbe Ie developpement, au lieu de l'encourager. L'argent a ~te dissipe et on a contract~ de gros emprunts sur la foi des futures recettes, ce qui a conduit A une charge excessive de la dette. Des distorsions mas sives ont fausse Ie systeme de prix - ce qu' on a appel~ "la maladie hollandaise" - et ont entrave la croissance industrielle et agricole. Le developpement des mines et des puits de p~trole n' apportera une vrai contribution A la croissance A long terme de l'Afrique que si les gouvernements exercent une stricte discipline, en proc~dant A des ~valuations rigoureuses des investissements et en emp~chant les taux de changes de devenir sur~values. 65. Dans la pratique, on a tres peu fait de prospection ces dernieres annees; en effet, les societes minieres transnationales (qui sont la meilleure source d' investissements eventuels dans la mise en valeur des usines) ont trouve que l'Afrique subsaharienne etait Ie continent Ie moins attrayant pour leurs investissements. Malheureusement, pour leur part, les entreprises n'ont souvent pas ete ~trangeres A ce malaise; elles ont refuse de communiquer des informations, n'ont pas forme un personnel local et n'ont pas etabli des liens avec l'economie du pays. Un autre defi de l'avenir consiste A bien gerer ce partenariat au profit des deux parties. 66. Au cours des 20 dernieres annees. la prospection minerale a diminue. en moyenne, de 2 % par an, alors qu'elle augmentait de 1,5 % par an - 19 - en Am~rique 1atine et en Asie. Cependant, i1 serait facile d'inverser cette tendance si 1es po1itiques ~taient plus favorab1es. Un objectif r~a1isab1e serait de faire augmenter 1a production de 5 % par an A long tenne; pour obtenir un tel r~su1tat, i1 faudra bien entendu du temps. 11 faudra un investissement annue1 (en grande partie priv~) d'environ 1 milliard de dollars pour 1a prospection et 1a mise en va1eur~~soit environ 1e quintuple du niveau actue1. Comme auparavant, un environnement propice sera n~cessaire pour arriver A ce r~su1tat: taux. de change comp~titifs, garantie de rapatriement des b~n~fices, gestion financi~re stable, transparente et ~quitab1e, et un code des mines attrayant qui pr~cise bien 1es obligations r~ciproques. En bref, 1es gouvernements doivent ~tab1ir avec 1es investisseurs ~trangers un nouveau partenariat mieux ~quilibr~ qui soit mutue11ement satisfaisant. L' alternative - engagement d 'experts par des entreprises mini~res d'Etat qui assument tous Yes risques - s'est sold~e par un ~chec dans 1e pass~ et ne semble pas devoir donner de mei11eurs r~su1tats A l'avenir. 11 en va de m~me pour 1a production de p~tro1e et de gaz. De l'~nergie pour 1a croissance 67. La demande d'~nergie suit un mouvement A peu pr~s para11~le A ce1ui du PIB, peut-Hre A un rythme l~g~rement acc~Ur~ dans 1es pays A moindre revenu. Sans l'assurance d'un approvisionnement ~nerg~tique, 1es ~conomies africaines ne vont pas croltre. Pour obtenir, comme e11e en a besoin, une expansion de 5 % de sa production d'~nergie, l'Afrique devra investir que1que 28 milliards de dollars pendant 1es dix prochaines ann~es, soit l'~quiva1ent d'environ 2 % de son PIB annue1. 68. L'Afrique poss~de d'abondantes ressources ~nerg~tiques. A e11es seu1es, 1es r~serves p~tro1i~res prouv~es ~quiva1ent A 120 ans de consommation aux niveaux actuels. Moins de 4 % du potentie1 hydro~lectrique de l'Afrique a ~t~ Mis en valeur. Les r~serves connues de gaz ~quiva1ent A 20 fois la capaciU hydro~lectrique actuellement install~e; on a trouv~ 135 milliards de tonnes de charbon. 69. Pour assurer ses besoins ~nerg~tique, l' Afrique doit sunnonter d '~normes probUmes techniques, financiers et ~cologiques. I1 faudra soigneusement ~tudier 1a situation pour d~finir 1a gamme de sources d'~nergie qui entralne 1e moindre cont. 11 existe de grandes possibi1it~s de r~duire 1es conts globaux grAce A une coop~ration entre pays, d' exploiter 1es r~serves de p~tro1e pour obtenir davant age de devises, et d'uti1iser au maximum 1e gaz nature1 qui provoque moins de pollution et n'est pas facile A vendre outremer. On peut r~a1iser d '~normes ~conomies simp1ement en am~liorant 1a gestion des services publics et en prenant des mesures qui encou:ragent une utilisation efficace de l'~nergie. 70. L' ~nergie m~nag~re pose un prob1~me particulier. Le s quatre-cinqui~mes des habitants de l'Afrique sont tributaires du bois de feu; or, plus de 50 millions d'Africains manquent de bois et leur nombre s'accrolt rapidement. II est urgent de prendre des mesures pour stimuler la plantation d'arbres et encourager l'emp10i de po~les plus efficaces ou d'autres combustibles, tels que Ie gaz en bouteille ou Ie k~ros~ne. L'augmentation du prix du bois de feu et du charbon de bois aiderait, mais beaucoup de fami1l.es pauvres n'auraient pas les moyens de payer. Les mesures visant A - 20 - surmonter la crise ~nerg~tique des m~nages devraient faire partie int~grante du plan d'action environnemental de chaque pays. Resserrement des liens entre Etats africains 71. Depuis longtemps, les dirigeants africains se rendent compte qu'il est imp~ratifde resserrer les liens entre leurs pays. La plupart des ~conomies africaines sont trop petites pour pouvoir ~ elles seules r~aliser des economies d'echelle ou de specialisation en l'absence de commerce, et leurs entreprises sont trop jeunes et manquent trop d'experience pour pouvoir affronter, sans une certaine protection, la concurrence d'exportateurs bien imp1antes sur les march~s. Or, les progr~s en direction de l'int~gration economique ont ete d~cevants. Depuis 20 ans, Ie commerce officie1 intra-regional n'a gu~re progresse. N~anmoins, Ie commerce officieux, qui est prosp~re et ne cesse de grandir, confirme la logique inh~rente qui justifie une int~gration accrue des marches. 72. Un seul groupement ~conomique - 1a Communaute economique de I' Afrique occidentale (CEAO) - a obtenu un certain succ~s. GrAce a la reduction des barri~res non douani~res, ~ sa monnaie commune, qui est convertible, a un bon mecanisme de compensation et a 1a mobilit~ de 1a main-d'oeuvre, les echanges entre les membres de la Communaute ont progresse au point d'atteindre environ 10 % du commerce total. Ce chiffre fait un contraste frappant avec les 3 % du commerce entre les membres de la Communaute economique d'Afrique orientale, qui est plus grande. 73. 5i l'on veut atteindre l'objectif d 'une meilleure int~gration regiona1e, i1 faudra intervenir plus hardiment pour cr~er un environnement propice. En premier lieu, il doit y avoir une bien meilleure harmonisation des po1itiques macroeconomiques, notamment des taux de change, qui peuvent alors s'inscrire dans 1e cadre d'un programme gradue1 de libera1isation qui favorise 1e8 produits africains de pref~rence aux produits etrangers. Une approche dirigiste, allant du sommet a la base - les gouvernements decidant que1les entreprises doivent s'insta1ler a tel ou tel endroit - ne donnera pas de mei11eurs resu1tats au niveau regional qu'au niveau national. Bien au contraire, l'integration doit ob~ir aux signaux du march~. En deuxi~me lieu, l'experience conduit a penser que la strategie qui risque de reussir Ie mieux est une strategie pragmatique et progressive qui permet a deux pays, ou a un plus grand nombre d'entre eux, de progresser chaque fois que l'occasion s'en presentee On peut songer, par exemple, a une formule qui permettrait a des institutions financi~res commerciales de l'open market d'apurer les desequi1ibres des paiements entre deux pays en recourant a des monnaies non convertibles. Une telle formule respecterait Ie principe d'une integration graduelle preconisee par Ie Plan de Lagos. En troisUme lieu, i l faut e1iminer 1es obstacles qui entravent inutilement les mouvements des capitaux, de la main-d'oeuvre et des biens. La simplification des modalites administratives, l'adoption de normes uniformes et l'amelioration des communications permettraient de faire de considerab1es progr~s. (A l'heure actuelle, il peut fa110ir jusqu'a 70 demarches separees pour faire traverser 1ega1ement une fronti~re a des biens.) Les investissements d'infrastructure ne devraient etre effectues qu'en reponse a une demande averee. En quatri~me lieu, 1e secteur prive peut, grace aux chambres de commerce, mieux diffuser les informations concernant Ie marche. - 21 - 74. La prolif~ration d'institutions r~gionales, constitu~es au coup par coup au cours des ans, a provoqu~ de difficiles probl~mes de coordination et de financement. Leur rationalisation doit occuper une place privil~gi~e dans l'ordre du jour. En effet, une telle mesure ne se bornerait pas a faciliter l'int~gration ~conomique; elle renforcerait aussi la coop~ration r~gionale dans toute une s~rie de domaines - ~ducation, recherches, gestion des bassins versants, etc. Conform~ment aux priorit~s propos~es pour Ie renforcement de la capacit~ et la formation technologique, on pourrait chercher tout particuli~rement a cr~er des centres d'excellence regionaux. Financement soutenable du d~veloppement 75. Reorientation des depenses de d~veloppement. Pour atteindre Ie taux de croissance de 5 % par an qui est envisage, l'Afrique subsaharienne devra porter son taux d'investissement de 15 a 25 % du PIB. II conviendra d'augmenter constamment les d~penses de valorisation des ressources humaines jusqu'a ce qu'elles atteignent 8-10 % du PIB annuel, soit a peu pr~s Ie double de leur niveau actuel (les donateurs fournissant environ la moiti~ du total). Les d~penses d'infrastructure devront se hausser aux alentours de 6 % du PIB. On pourrait aind couvrir les depenses d'equipement et les d~penses renouvelables , tout en assurant un bon entretien et en finan9ant les frais de fonctionnement. Contrairement a ce qu'on a fait dans Ie passe, ce sont des investisseurs du secteur priv~ qui fourniraient la plus grande partie des investissements dans les secteurs de production (estim~s a 4 % du PIB pour 1 'agriculture et a 3 % pour l'industrie). Pour taus les investissements publics, il est essentiel de proc~der a une ~valuation rigoureuse afin d'en augmenter l'efficacite. 76. Augmentation de l'epargne publique. II faut faire un effort consid~rable pour encourager l'epargne publique; il s'agit, a cette fin, d'au~nenter les recettes et de maltriser les depenses, d'une fa90n qui soit compatible avec les priorit~s de la future strategie de d~veloppement. II conviendra donc de remplacer peu a peu, en allant aussi loin que possible, les taxes frappant Ie commerce - c'est-a-dire les taxes a la production (et notamment a l'exportation) - par des taxes a la consommation. On pourrait, par exemple, relever les tarifs des services publics et percevoir des redevnnces pour certains services sociaux. Les mesures destinees a renforcer les rE!Cettes seraient contrebalanc~es par un resserrement considerable de la discipline financi~re afin de limiter les gaspillages, .de faire correspondre les depenses aux priorit~s du developpement, et de r~aliser un meilleur ~quilibre entre les depenses au titre des salaires et les d~penses au titre des materiaux. II s'agira de faire baisser la facture salariale des services publics, qui absorbe actuellement jusqu' a 60 % des recettes de certains pays, et d' augmenter les depenses permettant d' acheter les materiaux dont Ie personnel a besoin pour travailler dans de bonnes conditions et pour assurer l'entretien. On pourrait aussi obtenir des ~conomies en abaissant les subveIltions aux organismes parapublics et en reduisant les depenses militaires. 77. Mobilisation de l'epargne priv~e. La pratique du partage, qui est tr~s r~pandue en Afrique, ainsi que la tradition de projets de d~veloppement a base communautaire, ouvrent la voie a la mobilisation de l'epargne priv~e. Les contributions pourraient atre en esp~ces et en travail, pour effectuer des realisations locales interessant toute une s~rie de domaines - ecoles - 22 - primaires, dispensaires, eau potable, etc. Si elles b~n~ficient d'un appui vigoureux du gouvernement, ces initiatives, prises A la base, peuvent apporter une contribution de premier plan. 78. Il existe aussi une possibilit~ consid~rable de mobiliser davantage I' ~pargne des m~nages en la faisant transiter par Ie systeme financier. officiel et officieux. Malheureusement, les systemes financiers de nombreux pays africains se sont beaucoup d~grad~s ces dernieres ann~es et il est urgent de les r~former. Ces r~formes devraient viser A pratiquer des taux d'int~r~t r~pondant aux parametres du march~, A rationaliser les affectations du cr~dit, A renforcer l'encadrement bancaire, A appliquer des ratios prudents et A assurer Ie recouvrement des dettes. 11 s'agira, sur un plan g~n~ral, d'approfondir et de diversifier l'interm~diation financiere. 11 existe aussi de nombreuses possibilit~s d'encourager l'~pargne marginale et d'amener les ~tablissements de cr~dit A offrir des services financiers aux agriculteurs et aux entreprises du secteur marginal, notamment dans les r~gions ~loign~es. De meilleures possibilit~s d'investissement offertes au secteur marginal suffiront A encourager l'~pargne de ceux qui cherchent A ~largir l'horizon de leur entreprise familiale - par exemple. en achetant des charrues, des boeufs, des filets, etc. 79. L'~quilibredes ressources externes. Si l'on veut que les ~conomies africaines prosperent, elles doivent obtenir les devises leur permettant d' acheter les intrants essentiels. 11 est donc indispensable qu'elles agrandissent leur part des march~s mondiaux. Comme il ne semble guere probable qU'augmentent sensiblement les cours mondiaux de la plupart des produits primaires, un accroissement des recettes d' exportation doit venir de l'augmentation de la production, de la diversification conduisant A l'~laboration de nouveaux produits et d'une campagne agressive de p~n~tration des march~s asiatiques, qui se d~veloppent rapidement. Le sc~nario de croissance qui est propos~ pr~voit que la proportion des exportations en fonction du PIB doit passer de 19 % en 1986-87 A environ 24 % durant les ann~es 1990 et au-delA. Pour contrebalancer la compression de la derniere d~cennie, les importations du d~but des ann~es 90 devraient augmenter nettement plus vite que l'ensemble du PIB, pour atteindre un niveau d'environ 33 % du PIB en l'an 2000; par la suite, les importations augmenteraient au m~me rythme que Ie PIB. 80. Les hypotheses sur lesqueUes repose l'~quilibre g~n~ral des res sources sont les suivantes : un objectif de croissance du PIB fix~ initialement A 4 % par an, et passant ensuite A 5 %; un total d'investissements fix~ A 25 % du PIB pendant toute la p~riode; une ~pargne interne atteignant 18 % du PIB en l'an 2000 et passant A 22 % du PIB en 2020. Pour combler la lacune, on estime que les transferts nets (y compris tous les modes de financement) devront atteindre 9 % du PIB en l'an 2000. Par la suite, on pr~voit que Ie besoin d'~pargne externe baissera A 5 % du PIB en 2020. 81. Le sc~nario qui est envisag~ pour une croissance soutenue est fragile. II repose sur 1 'hypothese qu'on r~alisera les parametres fondamentaux (niveaux d'investissement, ~pargne, ratios de production additionnelle, etc.). Ce sont lA des objectifs ambitieux. Certains pays ne les atteindront pas. Quelques-uns pourraient mieux se tirer d' affaire. Leur ~chec obscurcira l'avenir. - 23 - Aide au d~veloppement durant les ann~es 1990 82. I1 faudra que 1a cadence de l'accroissement de l'aide atteint ces derni~res ann~es se maintienne pendant 1es ann~es 1990 si 1es pays africains doivent pouvoir poursuivre 1es diffici1es programmes d'ajustement entrepris r~cemment, et mettre en oeuvre, s'i1s ne l'ont pas encore fait, des programmes de r~forme. La 1iste de pays pouvant recevoir des cr~dits de l'IDA pourrait s'al1onger avec l'adjonction de plusieurs pays (qui rentrent actue11ement dans 1a cat~gorie des pays A revenu moyen). En outre, i1 faudra organiser, durant 1es ann~es 1990, des programmes sp~ciaux pour inverser le mouvement de recul qui s'est produit dans des secteurs tels que la s~curit~ alimentaire, la valorisation des ressources humaines et l'infrastructure, et pour financer de nouvelles initiatives dans les domaines du planning familial et de la protection de l'environnement. 83. L'Afrique subsaharienne pourra obtenir de l'ext~rieur les ressources dont el1e a besoin si 1es bai11eurs de fonds prennent 1es deux mesures suivantes : o s'i1s portent, pendant 1es ann~es 1990, leur aide brute officielle au d~ve1oppement A environ 4 % par an en termes r~e1s (chiffre inf~rieur A ce1ui des ann~es 80); et o s'ils mettent en place des m~canismes d'al1egement de 1a dette (de pr~ference de reduction de la dette) permettant aux paiements effectifs au titre du service de 1a dette de ne pas depasser ceux des derni~res ann~es (c'est-A-dire pas plus de 9 milliards de dollars pour l'ensemble de l'Afrique subsaharienne); et, A cette fin, si les pays A revenu moyen peuvent eux aussi b~n~ficier de mesures concessionne11es d'a11~gement de 1a dette. Ces hypoth~ses conduisent A une APD brute de 22 milliards de dollars (aux prix de 1990) en l'an 2000. Ces estimations veu1ent dire que, si l'on veut inverser 1e dec1in de l'Afrique, il faut repondre Aces besoins critiques, c'est-A-dire faire en sorte que l'APD augmente, en termes r~els, A raison de 4 % par an. Le fait que 1es revenus par personne sont non seulement faibles, mais baissent, pose pour l'Afrique des difficu1t~s particulieres qui appellent 1a mise en place de dispositifs d'aide sp~ciaux. En outre, i1 se peut que, pendant cette p~riode, l'APD doive faire face A de nouveaux besoins si l'on allonge 1a 1iste des pays susceptib1es de faire appel A l'IDA. Sans quoi, l'Afrique va probab1ement continuer A perdre du terrain. Par contre, s'i1 est possible de poursuivre pendant dix ans de plus les programmes sp~ciaux d' assistance entrepris durant 1es ann~es 80, l' Afrique devrait pouvoir arrater sa chUte, commencer A p1afonner pour finir par pouvoir diminuer l'aide dont e11e a besoin. 84. Composition de l'aide. Conformement A la strategie que propose 1e rapport, l'APD devrait se concentrer de plus en plus sur quatre secteurs prioritaires : o Soutien des d~penses publiques dans les domaines de l' infrastructure physique et de 1a va1orisation des ressources humaines. Dans toute la mesure du possible, 1e financement externe devrait financer des - 24 - "tranches de temps" des programmes de d~penses de secteurs et sous-secteurs, y compris les d~penses renouvelables d'exploitation et d'entretien. o Financement de l'ajustement structurel qui, tout en demeurant un ~l~ment important durant les ann~es 1990 et au-dell, devra ~tre employ~ de fa90n plus s~lective. Les pr~ts d'orientation devront de plus en plus ~tre consentis ex post, pour soutenir des mesures d~jl adopt~es, au lieu de l'~tre ex ante, quand la conditionalit~ repose sur des promesses de mesures l prendre l l'avenir. o Aide aux initiatives du secteur priv~, A tous les niveaux, en recourant plus intensivement aux organisations non gouvernementales pour canaliser l'APD, notamment pour Ie d~veloppement A la base. o Encouragement des 'programes d'int~gration r~gionale - sp~cifiquement, financement de soutien A la rationalisation des institutions r~gionales et aide pour couvrir les coOts temporaires de la lib~ralisation des ~changes A l'int~rieur de l'Afrique. Compte tenu de ces priorit~s, l'APD se d~composerait comme suit: 25 % pour l'infrastructure sociale, 25 % pour l'infrastructure physique et 50 % pour la production, l'assistance technique et l'aide-programme. 85. Efficacit~ de l'aide. Le d~ficit de financement est consid~rable et il est en train de se creuser. L'aide demand~e ne peut se justifier que si les fonds sont utilis~s efficacement et s'il apparait clairement que les besoins d' aide finiront par diminuer. Ni un bailleur de fonds, ni un b~n~ficiaire ne peut accepter une strat~gie qui repose sur une situation de d~pendance permanente. II doit exister un pacte cr~dible, pr~voyant que les fonds fournis A titre de l'aide ne servent pas, m~me de fa90n indirecte, l financer des d~penses militaires, une consommation de luxe ou la fuite des capitaux. 86. Pour qu 'un partenariat Meilleur et plus ~galitaire d~bouche sur une aide plus efficace, Ie dialogue et Ie suivi du secteur macro~conomique, ainsi que Ie programme d' aide qui lui est li~. doivent emprunter des voies parall~les. Le dialogue devra ~tre aussi intense et disciplin~ que dans Ie cas d'un pr~t A l'ajustement structurel. Mais il doit ~tre clair que Ie programme de r~formes est Ie programme du gouvernement, qu' il trouve son expression dans les documents de politique g~n~rale qu'~labore celui-ci et qu'il prend un caract~re enti~rement sp~cifique A la suite de s~minaires et ateliers organis~s dans Ie pays. A ce moment-lA, Ie programme de soutien dont sont convenus les bailleurs de fonds, qui est li~ A des programmes pr~cis ou aux d~penses des projets, variera en fonction de l'ensemble des r~sultats obtenus. L'aide des bailleurs de fonds deviendra donc beaucoup plus s~lective entre les pays, et penchera fortement en faveur de ceux qui r~alisent avec constance de solides programmes de r~forme. 87. Compte tenu de la prioriU accord~e au renforcement de la capacit~, l'assistance technique restera un ~l~ment fondamental du soutien apport~ par les bailleurs de fonds. Avec des d~penses qui atteignent environ 7 dollars par personne et par an, rien ne montre que les donateurs en ont pour leur argent. La plupart du temps, l'assistance technique ne fait l'objet d'aucune coordination, est mal administr~e, se fait au coup par coup, et s'inscrit - 25 - rarement dans Ie cadre d'une strat~gie d'ensemble visant A renforcer la capacit~ ou A d~velopper les institutions. II est absolument essentiel qu'on entreprenne, pays par pays, une ~valuation radicale des modalit~s de l'assistance technique. II convient de recourir davantage A des consultants d'Afrique ou d'autres pays du Tiers Monde et se pr~occuper beaucoup plus du transfert des comp~tences. A long terme, l'objectif doit viser A r~duire tr~s fortement l'assistance technique. La premi~re chose A faire consiste A remplacer des experts A long terme par des consultants A court terme. Un ordre du jour strat~gique pour les ann~es 1990 88. Le pr~sent rapport brosse A grands traits un menu d' options et d'id~es pour orienter la formulation de strat~gies de d~veloppement A long terme. Ses conclusions ont in~vitablement un caract~re tr~s g~n~ral, et ne font qu'indiquer les directions A prendre. II appartiendra A chaque pays de les d~velopper en fonction de son contexte particulier. Et, m@me au sujet de ces propositions g~n~rales, Ie d~bat se poursuivra parmi les Africains et entre les pays africains et leurs partenaires ~trangers. Cependant, l'objectif doit consister A rechercher un terrain commun - du plus haut niveau possible - permettant aux int~ress~s de joindre leurs efforts pour aller de l'avant. 89. O'ores et d~ja, un consensus est en train de se r~aliser au sujet d'un certain nombre d'importants ~l~ments. On peut donc proposer un ordre du jour strat~gigue des ann~es 1990. o Les programme d' ajustement doivent continuer A ~voluer: les programmes doivent mieux tenir compte de l'impact social des r~formes (et proteger les d~penses budg~taires consacr~es A la valorisation des ressources humaines), des investissements n~cessaires pour faire acc~l~rer la croissance et dE!S mesures a prendre pour assurer la soutenabilit~. II ne s' agit pas simplement d' obtenir un ~quilibre macro~conomique, mais d' op~rer dans Ie temps; une transformation fondamentale des structures. o La strat~gie doit @tre centr~e sur 1 'homme, et doit donner la priorit~ A la valorisation des res sources humaines et A la satisfaction des besoins fondamentaux. o II faut poursuivre d~lib~r~ment l'oeuvre de renforcement de la capacit~ par l'interm~diaire de r~formes instutionnelles A tous les niveaux du gC1uvernement, et de mesures qui encouragent les organisations du secteur priv~. o II faut mettre en place un environnement propice d'orientations g~n~rales qui encourage Ie d~veloppement de l'entreprise priv~e, redoubler d'efforts pour rendre efficaces les services d'infrastructure et soutenir Ie secteur marginal pour cr~er des revenus et des emplois. o Pour surmonter l'obstacle complexe que constituent une m~diocre production agricole, une croissance d~mographique rap ide et la d~gradation de 1"environnement, il faudra renforcer la recherche et la vulgarisation agricoles, ~largir les services de planning familial et adopter des plans d'action d'am~nagement de l'environnement. - 26 - o II faut poursuivre l'integration et la coordination regionales grAce A une serie de mesures pragmatiques et progressives qui facilitent Ie commerce transfronti~res, la mobilite de la main-d'oeuvre, 1 'education, les recherches. et la gestion des ressources naturelles. Une premi~re etape devrait consister A rationaliser les institutions regionales. o II faudra poursuivre pendant toute la decennie les programmes speciaux d'aide A l'Afrique. 90. Aucune de ces mesures n'ira loin, et on n'obtiendra gu~re d'aide externe, si I' Afrique n' ameliore pas son gouvernement. Les dirigeants doivent @tre davantage tenus responsables par les gouvernes. Les operations doivent avoir une plus grande transparence et les fonds doivent @tre visiblement bien administres - les rapports de verifications des comptes doivent @tre rendus publics, les modalites de passation des marches revisees, et ainsi de suite. 91. Le defi que do it relever l' Afrique est exceptionnel. Un echec aura it de terribles consequences. La reussite sera. dans une tr~s large mesure, fonction des rapports qui existeront entre les gouvernements africains et leurs partenaires etrangers. C'est pourquoi, il convient d'envisager des modes de collaboration nouveaux et plus etroits afin d'assurer que les questions de politique generale font l'objet de discussions et de revisions constantes. Pour faciliter ce dialogue, il convient d'envisager de constituer une coalition globale pour l'Afrique, enceinte OU les dirigeants africains (appartenant non seulement au secteur public, mais aussi au professions liberales et aux universites) pourraient rencontrer reguli~rement leurs principaux partenaires afin d' arr@ter des strategies susceptibles de servir de cadre A la conception des programmes d'aide aux divers pays, et des programmes particuliers visant A resserrer la cooperation africaine. 92. La coalition pourrait s' attacher en particulier A realiser un accord precis au sujet des mesures A prendre pour s'attaquer aux priorites qu'identifie Ie rapport: protection de l'environnement. renforcement des capacites, politique en mati~re de population, securite alimentaire et integration et cooperation regionales. Une telle coalition prouverait par les faits qu' il existe une nouvelle volonte partagee de travailler de concert, dans un esprit pragmatique, pour donner A l'Afrique un avenir meilleur. I - 27 - CHAPITRE 1 Trente ans en perspective: du pass~ l l'avenir Modeles et tendance~ pass~s 1.1 A les Africains misaient avec beaucoup d'espoir l'ind~pendance, sur un rapide. La fin du colonialisme avait lib~r~ de nouvelles d~veloppement ~nergies et les dirigeants africains ~taient r~solus l ce que leurs pays rattrappent Ie monde d~velopp~. La formule oil nous faut courir pendant qu'ils marchent" r~sume bien l'atmosphere pr~valente de cette nouvelle heure. Pas une minute ne devait ~tre perdue pour ~radiquer "l'ignorance, la pauvret~ et la maladie". Nombreux ~taient ceux qui encourageaient les Africains l faire preuve d'audace, affirmant que Ie continent pourrait trouver des raccourcis sur Ie chemin du d~veloppement. La communaut~ des bailleurs de fonds partageait cet optimisme et d~versait g~n~reusement des ressources. 1.2 Les strat~gies ~conomiques adopt~es par la premiere g~n~ration de dirigeants africains empruntaient les id~es d'~conomistes en vue l l'~poque. L'industrialisation ~tait consid~r~e comme Ie moteur de la croissance ~conomique et la cl~ de la transformation des ~conomies traditionnelles - en partie parce que les perspectives d'exportation des produits de base paraissaient m~diocres et en partie l cause d'un tres vif d~sir de r~duire la d~pendance l l'~gard des produits manufactur~s import~s. L'agriculture ~tait r~l~gu~e a une place secondaire de fournisseur de matieres premieres et de source de revenus fiscaux pour financer Ie d~veloppement d'autres secteurs. Les dirigeants africains pensaient que Ie r61e dominant devait incomber aux gouvernements dans la mise en oeuvre de ces strat~gies. Ce point de vue refl~tait leur m~fiance vis-l-vis des entreprises ~trangeres, la p~nurie de capitaax priv~s et d'esprit d'entreprise qu'ils percevaient localement, et leur suspicion voil~e l l'~gard des mecanismes du march~. En cons~quence, et en general avec Ie plein soutien des donateurs, ils elaborerent des plans d'ensemble quinquennaux, investirent dans de vastes industries de base g~rees par l'Etat et passerent d'innombrables reglementations de contr61e des prix, de restriction des ~changes et d'affectation du cr~dit et des devises ~trangl~res . 1.3 Ces efforts ont porte leur fruit. Partant d'un niveau tres bas, les Africains ont substantiellement allong~ l'esp~rance de vie et ~tendu l'alphab~tisme et les soins de sante sur Ie continent. Le nombre de personnes ayant re9u une formation a consid~rablement augmente et des investissements majeurs ont ~te realis~s en matiere d'infrastructures: routes, ports, telecommunications et energie. La region a connu des succes importants, en m~me temps que des echecs, et elle acquis une experience appreciable dans la gestion du developpement. Des pays nes avec des frontieres arbitraires heritel!s du colonialisme se sont battus pour ~tablir des Etats-nations et mettre en place de nouvelles structures gouvernementales. Dans certains cas - notamment en Angola, au Mozambique, en Somalie et au Soudan - la lutte continue et prime sur le developpement ~conomique et social. L'afrique du Sud reste une autre source de conflit et de destabilisation dans toute la partie australe du continent. - 28 - 1.4 La croissance economique globale de l'Afrique subsaharienne a ete en moyenne de 3,4 % par an depuis 1960, soit d'une fraction plus elevee que la croissance demographique. En 1987, la region, qui compte 450 millions d'habitants - plus du double de sa population au moment de l'independance - avait un PNB appro chant les 150 milliards de dollars, soit l'equivalent environ du PNB de la Belgique, qui n'a que 10 millions d'habitants. 1.5 A l'origine, la croissance economique etait moderee - bien que plus lente que dans la moyenne des autres pays en developpement. Son rythme s'est accelere apr~s 1967, stimule par Ie niveau record du prix des produits de base et Ie taux eleve d'investissement finance par les recettes d'exportation, auxquels s'ajoutaient l'emprunt aupr~s des banques commerciales et l'aide exterieure. Mais au fur et a mesure que l'on avan~a dans les annees 1970, certains pays commenc~rent a chanceler. Vers Ie milieu de la decennie, les performances economiques de l'Afrique etaient tombees au-dessous de celles des autres pays en developpement et a l'aube des annees 1980, la production etait meme en declin (Figure 1.1). 1.6 Dans l'ensemble de l'Afrique, la plus grande partie du secteur moderne est en difficulte depuis presque une decennie. Au contraire, Ie secteur informel (selon une definition large incluant les entreprises autochtones, pour la plupart non declarees, a la fois dans les zones urbaines et rurales, et les organisations locales intermedaires, non gouvernementales au communautaires) a fait preuve d'un remarquable dynamisme. Ceci est balable pour une large gamme d'activites dans l'agriculture, l'industrie, Ie commerce, les transports, la finance, les services sociaux et meme les echanges et l'integration au niveau regional. 1.7 Au-dela des grandes tendances, la situation diff~re considerablement d'un pays a l'autre (Figure 2.2, au verso). La croissance annuelle du PNB sur la periode 1961-87 s'est eta lee entre 8,3 % (Botswana) et 2,2 % (Ouganda). Le petrole explique l'essentiel de l'ecart - les exportateurs eux-memes ayant de bons au de mauvais resultats selon les fluctuations des cours du produit. Si l'on exclut les economies petroli~res, la production annuelle globale a initialement augmente pour decroitre ensuite en general vers la fin des annees 1970 et dans les annees 1980. 1.8 La variete des experiences refl~te l'etendue de la diversite de l'Afrique subsaharienne. Au sein des pays eux-memes existent parfois de grandes differences. La region compte une multitude de groupes ethniques, de langues et de religions. Pratiquement aucun pays n'y est homog~ne, culturellement ou socialement. Les types de gouvernements s'echelonnent des democracies veritables, qui encouragent Ie debat et Ie dialogue, aux regimes autoritaires ne tolerant aucune dissidence. Certaines economies sont etroitement contrOlees, alors que d'autres fonctionnent largement selon les mecanismes du marche. Les zones climatiques embrassent tout le champ des possibilites, des regions de montagne temperees et bien arrosees aux deserts arides et des savannes s~ches aux forets denses tropicales. La superficie des pays varie du minuscule au gigantesque. Cinq pays seulement comptent plus de la moitie des habitants de la region. La population du Nigeria depasse les 100 millions, alors que neuf Etats ont mains d'un million d'habitants. Les densites sont tr~s irreguli~res, avec plus de 246 habitants par kilom~tre - 28a - Fi ure 1.1 Niveaux de revenu en Afri ue subsaharienne et dans les autres pays en d6veloppement Revenu national brut par habitant Dollars I '3 ~o 800 700 600 500 "'if" ,It"b"i,··, "., .i';,1, 400 _/ 300 "11 " i""o""flt j "ibl, '!!.'!! _ ...... ---tttr"l 200 .,i, ,··· i 100 L-.-...,...--r--'--'r--"'-"'-""-""--r--r--r-:1:::98~0:-r--r--'--'r-l;;;9:85;-r~1987 1967 1970 Soarc, : 'orl, "bl'l, liitio. 1975 I"'·". ...., Produit int6rieur brut par habitant Dollars I ~80 650 600 550 500 SlbSlh,,.i,,,, 450 400 350 300 250 Asj, i. 5., 200 150J-~~--r-r""-""-.-,,--r-r""-""-'-"~~19~8:0,,--r--r1~9~85~19187 1961 1965 1970 1975 'oare, J '01'''1 I, I, little 10.41,1,. 'JI" - 28a'- F1qu,e 1.2 LtAf'lgue subsaha,lenne dlve,slti ~es pe,fo,mances lIconomlgue. Taux de c,olssance du PHB pax habitant, 1961-87 ",,/9,.0. Benin Bot.wana Burkina Fa50 Burundi Cameroun RCA Tchad Congo Cate d'Ivoire Ethiopia Gabon Gamble Ghana Guinea Kenya Lesotho Liberia Madagascar Malawi Mali Mauritanie ttaur ice Nioer Nio·ria Rwanda Senegal Seychell ·· Sierra Leone Somalie Soudan Swaziland Tanzania Togo Quganda Zaire Zambie Zimbabwe Ens.mble d. l'ASS Revenu interm.diaire Faible revenu Grands pay. Petits pay. Exportateur~ de p.trole Non-exportateur. d. petrol. Vulnerabl ·· ~ la ··ch.r ···· ~~-r-+--r-~-r-T~r-~~-r~ -3 ·2 ·1 0 2 345 678 9 - 28b - Not. I L.s taux de croissance d ·· groupesd. pays sont des moyenne. non pon~erees. Le groupe des grand. pays est constitus par les Etats d'Afrique subsaharienne comptant une population de plus de 22 millions d'habitants. Le groupe da. petit. pays comprend les 11 pays d'Afrique subsaharienn. d~nt la population est inferieure ou egale ~ un million d'habitants. Sourc. I Donne·· de la Banque Mondiale. - 29 - carre aut~ur du Lac Victoria et moins de un en Mauritanie. Quinze pays sont enclaves et six sont des iles. Le revenu par habitant varie sur une echelle de un a 20. Certains Etats sont dotes de richesses minerales ou petroli~res considerables, alors que d'autres en sont presque enti~rement depourvus. 1.9 Au-dela de cette diversite, on trouve des similitudes frappantes dans les probl~mes auxquels sont confrontes les pays d'Afrique subsaharienne: taux de croissance demographique eleves, faibles niveaux d'investissement et d'epargne (sauf dans quelques-unes des economies riches en mineraux); utilisation inefficace des ressources, fragilite institutionnelle et deficit en ressources humaines, declin general des revenus et du niveau de vie. II est donc possible de definir un certain nombre de th~mes communs qui serviront de cadre d'analyse des probl~mes du sous-continent dans son ensemble - th~mes qui meriteront une exploration ulterieure pays par pays pour rendre compte des conditions specifiques a chacun. La tache ne pourra etre menee a bien que par des specialistes des pays en question. L'aggravation de la crise 1.10 L'Afrique subsaharienne vient de faire l'experience de presque une decennie de dec lin du revenu par habitant et de degradation ecologique acceleree. Apr~s avoir diminue dans un premier temps, la production alimentaire a ensuite augmente, mais elle demeure inferieure a son niveau de 1980. L'Afrique a perdu une fraction importante de sa part du marche mondial des exportations. Certains pays africains ont regresse par rapport aux avancees anterieures qu'ils avaient realisees en mati~re de valorisation des ressources humaines, ce qui se traduit notamment par une diminution de la scolarisation. Le chOmage urbain declare pose un probl~me de plus en plus aigu dans de nombreux pays. 1.11 Au cours de la decennie ecoulee, six pays - la Guinee equatoriale, Ie Ghana, Ie Liberia, Ie Nigeria, Sao Tome et Principe et la Zambie - ont regresse du groupe des pays a revenu intermediaire a celui des pays a faible revenu (selon la classification du Rapport sur Ie developpement dans Ie monde). Si l'on tenait compte de la surevaluation des taux de change, d'autres encore auraient ete dans Ie meme cas. Au debut des annees 1960, les revenus par habitant des pays d'Afrique subsaharienne etaient similaires a ceux des autres pays en developpement, mais ils commence a marquer Ie pas dans les annees 1970 et, si la tendance actuelle se poursuit, ils se retrouveront au niveau de ceux pays d'Asie les plus pauvres au tournant du si~cle (Figure 1.1). Treize pays africains, comptant pour un tiers de la population de la region, sont en realite plus pauvres aujourd'hui par habitant qu'ils ne l'eteint a l'independance. 1.12 Plusieurs pays, cependant, contrastent avec ce tableau de declin generalise. Le Botswana, l'ile Maurice, Ie Cameroun, Ie Congo, Ie Gabon et, dans une moindre mesure, Ie Kenya et Ie Zimbabwe ont enregistre une croissance par habitant non negligeable au cours des vingt annees precedant 1985. Mais a partir de cette date, la situation s'est tr~s sev~rement deterioree pour les producteurs de petrole en raison de la chute des cours. - 30 - 1.13 La m~diocre performance g~n~rale de l'Afrique ces dix derni~res ann~es s'est traduite par un faible rythme de croissance des secteurs productifs, de mauvais r~sultats ~ l'exportation, Ie gonflement de la dette, un d~clin des indicateurs sociaux, la d~gradation de l'environnement et une impotence de plus en plus grande des institutions publiques. Chacune de ces tendances et les raisons qui y ont pr~sid~ sont examin~es ci-apr~s. La faiblesse de la croissance des secteurs productifs 1.14 Au cours des deux derni~res d~cennies, la part de l'agriculture 778dans la production est tomb~e au-dessous d'un tiers du PNB. L'industrie (y compris l'exploitation mini~re et p~troli~re) a connu une croissance beaucoup plus rapide, de 6% par an, pour atteindre 28 % du PNB (Figure 1.3). Mais ces grandes tendances ne refl~tent pas de transformation fondamentale de la structure productive en Afrique, ni une diversification des exportations, ni les changements intervenus dans la composition des ~changes. Pour la r~gion dans son ensemble, l'expansion de l'extraction p~troli~re a simplement compens~ Ie retard pris par la production agricole. La production indust:rielle est rest~e A environ 10 % du PNB, comptant pour moins d'un dixi~m.? des exportations. 1.15 Au cours des ann~es 1960, la production agricole a augment~ de 2.7 % par an, soit un taux similaire A celui de la croissance de la population. Par la suite, la croissance de l'agriculture s'est consid~rablement ralentie, plafonnant A une moyenne de 1,4 % par an de 1970 A 1985 - soit la moiti~ du taux de croissance d~mographique. Ce d~clin ~tait dQ A de nombreux facteurs, dont les grandes s~cheresses des ann~es 1972-73 et 1983-84, mais il refl~tait aussi 1a rel~gation de l'agriculture A un rang secondaire de priorit~ dans les strat~gies de d~veloppement qui ont suivi les ind~pendances africaines. Les politiques mises en oeuvre maintenaient des prix bas sur les produits agricoles, encourageaient la migration de la main-d'oeuvre et du capital vers les villes, soutenaient l'importation de denr~es alimentaires bon march~ telles que Ie bl~ et Ie riz qui satisfont les pr~f~rences du consommateur urbain, et n~gligeaient la recherche agricole. 1.16 La croissance de la population ~tant sup~rieure A cell~ de la production alimentaire, une augmentation des importations commerciales et de l'aide alimentaire ont ~t~ n~cessaires, sans toutefois ~tre suffisantes. La faiblesse du pouvoir d'achat, ajout~e A d'autres facteurs tenant A la distribution des revenus, a entraln~ une extension du fl~au de la faim. 1.17 Certains des autres secteurs productifs furent plus performants, mais seulement marginalement. Bien que la production industrielle ait augment~ de plus de 8 % par an au cours des ann~es 1960, cette pouss~e initiale n'a pas dur~. Le taux de croissance industriel moyen sur la p~riode 1965-87 a ~t~ environ Ie m~me que celui du PNB pris globalement. Le volume de la production mini~re, mesur~ d'apr~s les exportations, s'est accru de 1,7 % par an seulement, ne d~passant pas la croissance de la production agricole. La raison en est l'inadaptation des proc~d~s d'exploration et la lourdeur de 1 'imposition, qui ont emp~ch~ l'entretien et la modernisation. Seule l'extraction p~troli~re a ~t~ en forte expansion sur cette p~riode, bien que la prodllction (de nouveau ~valu~e d'apr~s les exportations) ait diminu~ d'un - 30a - Flgure 1.3 L'Afrigue subsaharlenne ; structure du PMB (Pourcentage du PMB se10n 1e prix a 1a productlon, en dollars 1981) INII"" NI.flttrrjt,. !3 'l. IItN, iNU"'" 107. It65 7',5 ,J"i.r4, 4. 4,"ar, ··tt. " e.U,.,., -..Ut, 'Jllleri,,- j.dd 1'",I.itlUa Ij.it" It Iftre"t,.. ItIrct ......" " I · ..... ION'",. IJlu"', N··flt_ft,. lIer" fNulr'" 11-7. S'rtlc" 40 I. "11 "',5 1"".,4, 4, 4."." - 31 - tiers par rapport au niveau record atteint vers 1980. Au total, la hausse de la production p~troliere compte pour 5 % de la croissance annuelle du PNB industriel sur la p~riode 1965-67. La m~diocrit~ des r~sultats des exportations 1.18 Au cours des ann~es 1960, Ie volume des exportations des pays africains a augment~ en moyenne de 6 % par an, presque tous ayant pris part A cette croissance. Cependant, depuis 1975, ce volume est rest~ stationnaire ou a m@me s~rieusement diminu~ dans la plupart des pays. Pour l'Afrique subsaharienne dans son ensemble, y compris les pays exportateurs de p~trole, Ie volume total des exportations a d~cru d'environ 0,7 % par an en moyenne (Tableau 1.4, au verso). 1.19 Au cours des ann~es 1960, les exportations agricoles (qui comptent aujourd'hui pour 1/5 de la production) ont augment~ de presque 2 % par an, mais par la suite, elles sont tres nettement d~cru - de plus de 3 % par an (Figure 1.5, au verso). Par voie de cons~quence, la part de l'Afrique sur les principaux march~s d'exportation agricole o~ elle est pr~sente a diminu~ au cours des ann~es 1970 et au d~but des ann~es 1980. Pour prendre un exemple, entre 1970 et 1984, sa part sur Ie march~ mondial de trois produits agricoles essent.lels, Ie caf~, Ie cacao et Ie coton, a diminu~ de 13 %, 33 % et 29 % respectivement. Parmi les six grands produits agricoles d'exportation, la part africaine du march~ a augment~ seulement pour Ie th~. 1.20 La part des exportations africaines dans l'ensemble du commerce mondia:l. est tomb~e de 2,4 % en 1970 a 1,7 % en 1985 (Figure 6.1, au verso). Le d~clin fut encore plus sensible pour les produits primaires non p~troliers, avec uIle baisse de 7 % A moins de 4 %. Cette chute a eu des implications importantes: si les pays d'Afrique subsaharienne avaient conserv~ la part sur les march~s des produits primaires non p~troliers qu'Us d~tenaint en 1970, et si les prix ~taient rest~s les m@mes, leurs recettes d'exportation auraient ~t~ de 9 A 10 milliards de dollars par an sup~rieures aux r~sultats effectifs en 198f,-87. La diff~rence atteint presque Ie montant du service de la dette pour l'ensemble de la r~gion sur cette p~riode. En pratique, il est possible qu'une partie du gain ait ~t~ absorb~e par une baisse des prix r~sultant de l'augme'ntation de l'offre; d'un autre cOt~, 1es pays concurrents n'auraient peut-@tre pas autant ~tendu leur part du march~ si l'Afrique s'~tait montr~e plus agressive (Chapitre 8). 1.21 La structure des exportations de l'Afrique subsaharienne est rest~e largement inchang~e sur la p~riode. Les produits primaires (y compris Ie p~trole) continuent d'occuper une tres large place: de 93 % des recettes d'exportation en 1970, ils ~taient pass~s A 88 % au milieu des ann~es 1980. Un petit nombre de pays, tels que l'lle Maurice et Ie Kenya ont fait un effort de diversification vers d'autres produits, mais ils demeurent l'exception. Les march~s A l'exportation de l'Afrique subsaharienne ont eux aussi tres peu chang~. la moiti~ environ des exportations de la r~gion continuant d'aller vers la Communaut~ europ~enne. Les exportations africaines n'ont pas encore tir~ avant age des march~s asiatiques en pleine expansion. - 31a - Flgure 1.4 L'Afr1aue subsahar1enne : exportat1ons de marchand1ses 'ilJi,r4, It lol,." 1'" 40 35 30 25 20 15 r.......-.. . 10 5 1970 1975 1980 1985 1987 h ··, Satret I '0"'" 4r ,. "'fll 1O.4i",. FIgure 1.5 Les exportations agrlcoles de l'Afrlque sqbsaharlenne en voluae at en valeur Index, 1961 '!100 230 220 210 200 ,,'til' ."oUJIt.t 190 II roJII' cOllhte 1f7' 180 170 160 150 140 130 120 110 100 90 8O~~~~~~-.~~~~-r~~~~~~~ 1961 1965 1970 1975 1980 1985 1987 ''''t ..", LI "," liscOIU ... lO.er, f"" nJ." 411 fllO,hUoi, '11',11 .u "., "ttt. II 111 rolIN' t.,.,U, ,ttit.t ,t,U, · "II' .i···· I. 1'7'. StIJ't. I ,,,. - 3lb - Flgure 1,6 La part de l'Afrlgue' subsaharlenne dans 1es exportatlons. en valeur 14~--------------------------------------~ 13 12 .. (,,,,C,Cj,,, ..111"., 11 .. (x",C,C1,.s I., "IS ·· ""'.,,,II.C 10 9 8 7 8 5 4 3 2 o 1950 '1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1,." Som. s ClKEf. .. - 32 - Le gonflement de la dette 1.22 Confront~s A la baisse des prix des produits de base, de nombreux pays africains ont massivement recouru A l'emprunt ext~rieur pour entretenir Ie niveau de d~penses atteint pendant les p~riodes d'expansion ant~rieures. La dette totale de l'Afrique subsaharienne est pass~e d'environ 6 milliards de dollars en 1970 A 134 milliards en 1988. Vers la fin de cette p~riode, la dette de la r~gion ~tait environ ~quivalent A son PNB et repr~sentait trois fois et demie ses recettes d'exportation. Approximativement 70 % de la dette totale, y compris les cr~dits commerciaux A court terme et les tirages sur Ie FMI, porte Ie taux du marche. 1.23 La dette de l'Afrique subsaharienne a augment~ plus vite que celIe d'autres regions en developpement, surtout depuis 1980. La dette A long terme a ete multipliee par 19 depuis 1970, pesant plus lourdement que n'importe OU ailleurs - la dette latino-americaine, par exemple, n'est que de 30 % du PNB. Mais l'Afrique subsaharienne est moins endettee envers des creancies prives (39 % contre 73 % pour l'Amerique latine) et environ un tiers de sa dette privee est garantie par les gouvernements preteurs. Les difficultes de l'Afrique subsaharienne A assurer Ie service de sa dette commerciale ont re9u relativement peu d'attention parce que sa part dans Ie total de la dette des pays en developpement est faible (environ 10 %) et ne constitue pas une menace pour Ie syst~me bancaire international. L'engagement des institutions financi~res privees en Afrique est limite a quelques pays a revenu intermediaire. 1.24 Les obligations au titre du service de la dette, qui donnent la veritable mesure du fardeau de 1 'endettement , ont atteint dans les annees 1980 un point ou les Etats n'etaient plus capables de remplir leurs engagements. Elles etaient de 47 % des recettes d'exportation en 1988. Une douzaine de pays d'Afrique subsaharienne seulement ont assure Ie service de leur dette sur une base reguliere depuis 1980. Pour les autres, les paiements ont dQ etre reduits, soit par reechelonnement, soit par accumulation des arrieres. Au total, entre 1980 et 1988, 25 pays d'Afrique subsaharienne ont procede a 105 reamenagements de leur dette. 1.25 Le service de la dette effectivement deboursee atteignait en moyenne 27 % des exportations de l'Afrique subsaharienne entre 1985 et 1988 (Figure 1.7). Mais ceci ne representait qu'environ 3/5 des obligations de la region. Le ratio du service de la dette etait encore plus eleve pour les pays a faible revenu - 30 %, ce qui est une charge insoutenable pour des pays desoles par la pauvrete. 1.26 La crise de la dette en Afrique subsaharienne n'est uniforme ni dans ses origines, ni dans ses effets. Quel que soit l'etalon adopte, les pays a faible revenu sont confrontes aux pires difficultes. Le ratio du service de leur dette est presque Ie double de celui des pays a revenu interm~diaire tres endettes, et plus du triple de celui des pays d'Asie a faible revenu. Parce qU'une grande partie de leur dette est concessionnelle (presque la moitie de la dette totale en Afrique a faible revenu, contre 5 % dans les pays classes comme tres endettes), il est possible que Ie ratio du service de la dette surestime la charge reelle de l'endettement port~ par - 32a - Flgure 1.7 La dette ext+rleure de l'Afrique subsaharlenne et des PlY' tr+s endett+s Dette exterieure tot.le/PHS 110~------------------------------------~ 100 90 eo 70 60 50 I 40 ",, I e,ts ,JldUd 30 /' ,..-'" 20 __ , ",. liS · "".. 1.","11,1" -,.".,........ --' 10+-~~~~~~~-r~~--r-T-~-r~~~~ 1970 1975 1980 1985 1981, ,.If, Service de la dette/Bxportations 40.---------------------________________ ~ 35 30 25 20 / 15 / / / 10 /. 5 "V ,-.".",..... ....... ", ,- /' 1$'. "".. 1.","11,j" 1975 1980 1985 1~1 '"" - 32b - Note : La cat.gorie "pays tres endettes" correspond au groupe des 17 pays en developpemant lourdement endettes, dont deux se trouvent en Afrique subsaharienne. La dette totale comprend la dette en cours · long terme, la dette a court terme (1977-87) et les credits du FMI. Le service de la dette comprend l'inter.t et l'amortissement de la dette · long terme. Les exportations concernent les biens et services. Les pourcentages sont bases sur le montant de la dette en dollars courants. Source I 9anque mondiale. I - 33 - l'Afrique A faible revenu. L'equivalent-don de la dette actuelle de l'Afrique A faible revenu est estime A 17 milliards de dollars. Mais m@me apr~s ajustement pour tenir compte de la part de l'element concessionnel, Ie trou que laisse chaque annee Ie paiement du service de la dette dans les capacites d'importation reste franchement insupportable dans un contexte d'investissement ralenti et de stagnation du PNB. 1.27 Le fardeau de la dette des pays d'Afrique subsaharienne A revenu intermediaire est ega1ement plus lourd que ce1ui d'autres pays tr~s endettes. Mais bien que 1e ratio de 1a dette sur les exportations ne soit que tr~s 1eg~rement plus faible, 1a capacite de leurs economies A s'adapter A cette charge est moindre. Leur PNB par habitant n'est que d'un tiers environ de ce1ui des autres pays tr~s endettes et leurs economies sont en moyenne de tai11e plus reduite. La structure de leurs exportations est genera1ement plus rigide. une part plus large etant concentree sur quelques produits primaires. La croissance des exportations y a ete erratique et globalement plus faib1e qU'ai1leurs. Leur performance economique a en general ete beaucoup plus negative que celIe des autres pays tr~s endettes et marquee par une stagnation du PNB et un dec1in de la consommation par t@te. Leurs importations ont ete comprimees davantage encore que cel1es des pays eligibles au Programme special d'assistance de 1a Banque mondia1e (PSA) qui ont beneficie, du moins dans 1a periode recente, de versements croissant au titre de l'aide pub1ique au deve1oppement. Les projections faites sur 1e ratio du service de leur dette conduisent a des chiffres considerablement plus eleves que pour les autres pays tr~s endettes. Une plus grande part de leur dette est due a des creanciers publics et leur dette commercia1e a genera1ement une valeur plus faible sur 1e marche secondaire. La deterioration des conditions sociales 1.28 11 devient maintenant de plus en plus evident que 1a situation sociale se degrade sous bien des aspects. Le taux de sco1arisation primaire a diminue depuis 1980 et l'esperance de vie reste bien inferieure A celIe de l'Asie du Sud. Le prob1~me de la securite alimentaire pose un defi de plus en plus grand: dans les annees 1970, 1a proportion des Africains souffrant de deficits alimentaires etait en 1eg~re hausse (a1ors que 1a population croissait a un rythme ~1ev~), mais 1'environnement ~conomique d~favorab1e des annees 1980 a acce1ere Ie mouvement de deterioration. Au cours de la derni~re decennie, A peine un quart des Africains au Sud du Sahara vivaient dans des pays ou 1a consommation alimentaire par habitant etait A 1a hausse. Par comparaison, dans 1a decennie precedente, 1a proportion correspondante avait ete d'environ deux-tiers. 1.29 Ma1gre Ie ra1entissement de 1a croissance economique, 1es depenses publiques par t@te dans les secteurs sociaux ont continue A augmenter en termes reels jusqu'au debut des annees 1980 (Figure 1.8). Cependant, apr~s la periode 1981-83, elles ont commence A baisser, ref1etant la gravite des difficu1tes financi~res auxque11es etaient confrontes un nombre croissant de gouvernements. Les coupes ont genera1ement affecte p1utOt 1es charges recurrentes non salariales, alors que les budgets etaient dejA trop faib1es dans ces secteurs - 0,60 dollars seulement par an et par e1~ve de l'eco1e primaire en 1983. - 33a - Figure 1.8 EvolutIon des d6pen.e. aoclalea par habItant 611tqeant ap budget de ~fEtat Index, 1975-100 1~~~----------------------------=~---------, 124 122 120 118 116 114 112 110 108 106 104 102 1oo~--~~~~--~--~--~~~~--~--~--r-~ 1975 1980 1985 1987 '"'f .ott S'0,····, 10. ".4'"., "., 17 "" 4",,1,.. , .., ...,i··". ,.ItC. , If' .t I.erts soarttS 4. ",, ...fIt 1O.4jIJ~. - 34 - 1.30 La croissance du chOmage declare devient une preoccupation majeure dans presque tous 1es pays africains. Ce phenomene est partie11ement une consequence de 1 'urbanisation, qui transforme 1e sous-emploi rural en chOmage urbain apparent. Un des aspects particu1ierement troub1ants du probleme est Ie nombre croissant de chOmeurs parmi 1es personnes ayant re9u une formation, contrecoup de l'inadaptation du systeme d'education aux besoins 10caux. La degradation de l'environnement 1.31 Les 21 millions de kilometres carres que couvre l'Afrique subsaharienne renferment des res sources naturel1es en eau et en territoires qui constituent un enorme potentie1 de croissance. Mais l'ecologie de l'Afrique est fragile et 1es signes de degradation sont de plus en plus apparents. La pression demographique entralne l'acce1eration de 1a desertification en for9ant populations et troupeaux A migrer vers des pAturages precaires. Le rendement de la terre diminue A cause de l'acceleration des rotations, de l'erosion du sol et du surpAturage. En outre, l'augmentation de 1a population accrolt 1a demande de bois de feu et de terres de culture; 1a deforestation qui en resulte intensifie 1e ruisse11ement et l'ecosion, abaisse 1e niveau des nappes phreatiques et peut eventue11ement reduire 1es precipitations dans 1es regionsx arides. La pollution pose un prob1eme de plus en plus serieux, en particu1uier dans 1es zones urbaines mal desservies. Enfin, pour completer 1e tableau, certains pays industrie1s essaient de se debarrasser de leurs dechets toxiques en Afrique. 1.32 Sur 1e fond de ces atteintes toujours plus poussees A l'environnement A l'eche11e du continent, certaines zones eco10giques ont des prob1emes specifiques. Le Sahel et 1es regions limitrophes du Kalahari subissent l'emprise croissante du desert et une degradation des sols acce1eree par 1a secheresse. Les pays dotes de for~ts denses tropica1es doivent 1utter contre une rapide deforestation. L'erosion des sols est particu1ierement intense dans 1es zones de peup1ement et de culture 1es plus denses - par exemp1e dans certaines parties de l'Ethiopie, du Kenya, de l'Ouganda ou du Burundi. L'effritement des capacites institutionnelles 1.33 Dans de nombreux pays africains, 1es administrations, tribunaux et etab1issements d'enseignement ne sont plus que des caricatures d'eux-m~mes. Ce de1abrement institutionne1 generalise est symbolise par 1a degradation des 10caux dans des institutions autrefois de reputation mondia1e, te11es que l'Universite de Legon au Ghana ou l'Universite Makerere en Ouganda, par 1a desagregation des systemes judiciaires, par 1e mauvais etat des routes jadis bien entretenues et par 1a dilapidation de reseaux ferroviaires en bon etat de marche dans 1e passe. 1.34 Mais l'impression genera1e d'un declin po1itique que donne l'Afrique est tout aussi inquietante. La corruption, l'oppression et 1e nepotisme sont de plus en plus apparents. Certes. ces traits ne sont pas specifiques A l'Afrique, mais i1s peuvent avoir ete exacerbes par des strategies de deve10ppement qui ont concentre 1e pouvoir et 1es ressources aux - 35 - mains de bureaucraties gouvernementales, sans qu'aient ~t~ prises de mesures de re~quilibrage garantissant la responsabilite des dirigeants envers Ie peuple et l'existence d'un consensus politique. Dans un certain nombre de pays, Ie non respect des voies legales a prive les institutions de leur l~gitimite et de leur credibilite. D'un autre cOte, la proliferation des r~glementations administratives sous forme de licences, contrOles et quotas a encourage la corruption et braque les individus contre Ie syst~me. 1.35 Dans certains cas, les militaires ont depose des regimes impopulaires, mais souvent, leur intervention n'a fait qu'accroltre la violence de l'Etat et l'anarchie. Parfois, elle a m~me mene a la guerre civile. Ces perturbations ont pouss~ de nombreuses populations a chercher refuge ailleurs, soit que leur vie ait ~te directement menac~e, soit que la secheresse et autres calamites naturelles soient devenues plus difficiles a affronter dans ces circonstances. L'Afrique subsaharienne, avec un dixi~me de la population mondiale, compte actuellement environ un tiers des r~fugies officiellement reconnus dans Ie monde (soit environ 4 millions), chiffre auquel il faut ajouter quelque 12 millions d'autres personnes deplacees dans la region. La crise de confiance 1.36 Nombreux sont ceux qui, en Afrique subsaharienne comme a l'ext~rieur, eprouvent un sentiment de desespoir de plus en plus profond. L'image n~gative de l'Afrique a l'~tranger n'a fait qu'aggraver la crise de confiance, cette crise ~tant renforcee par la representation de favorable du continent que donnent a l'exterieur les grands mass media, en insistant essentiellement sur ses malheurs economiques, sociaux et politiques - famines, desertification, refugi~s, violations des droits de 1 'homme, coups d'Etat, violence fratricide et probl~mes de sante. Parfois, cette image est projet~e depuis l'Afrique elle-meme, instrument d'une strat~gie pour tenter d'accroltre ponctuellement l'aide de l'~tranger. Cependant, en Afrique comme ailleurs, beaucoup pensent que la region risque de devenir excessivement d~pendante de l'assistance financi~re ext~rieure, des conseils dispens~s par l'etranger, et du personnel expatri~. Le danger est que ce pessimisme ne se concretise dans la pratique: des performances mediocres conduisent au d~couragement; les responsabilites sont alors transferees a d'autres; l'inaction ~branle la confiance en soi et finalement, les performances ne font que diminuer davantage. Ce processus sape la base elle-m~me sur laquelle peut s'appuyer la croissance et se developper la responsabilite de l'Afrique dans la prise en main de sa destinee. Les facteurs du dec lin 1.37 Certains imputent la responsabilite du d~clin ~conomique de l'Afrique a des facteurs qui ~chappent a son contrOle: mauvaises conditions climatiques, faiblesse des cours mondiaux des produits de base et insuffisance de l'aide. D'autres accusent les politiques mises en oeuvre - en particulier, les erreurs de gestion des ressources publiques et Ie manque d'incitations efficaces. La plupart des observateurs s'accordent a reconnaitre l'importance des facteurs structurels, au premier rang desquels la rapidit~ de la croissance d~mographique. - 36 - 1.38 Les variations du revenu par t~te ont trois principales composantes: la croissance economique interieure, la croissance de la population et les modifications des termes de l'echange. Les probl~mes de l'Afrique etant tr~s frequemment attribues a des facteurs externes defavorables, nous examinerons en premier lieu l'impact de l'evolution des termes de l'echange. Nous nous tournerons ensuite vers les causes internes. Les termes de l'echange 1.39 L'evolution des termes de l'echange de marchandises diff~re selon les groupes de pays et a subi des variations sensibles sur Ie long terme. Pour la region dans son ensemble, les termes de l'echange ont chute brusquement dans les annees 1980, ce declin devant toutefois ~tre apprecie par rapport au niveau exceptionnellement eleve qu'ils avaient atteint en 1980-81. Malgre cette baisse, ils restaient plus eleves dans la premi~re moitie des annees 1980 que dans les annees 1960 - quoi qu'ils soient tombes a un niveau inferieur en 1988. La perte de revenus causee par la deterioration des termes de l'echange depuis 1985 est largement inferieure aux gains anterieurs. Bien que cette deterioration se traduise par une diminution des ressources disponibles depuis 1960, la region a tire davantage de gains (a prix constant) des variations des termes de l'echange qU'elle n'a subi de pertes (Figure 1.9, au verso) A l'exception de 1986 et 1987, l'effet sur Ie revenu par habitant a ete :~inime, atteignant moins d'un dizi~me de point de pourcentage par an, en moyenne, sur l'ensemble de la periode 1961-88. D'un autre cOte, l'instabilite des prix a rendu la gestion economique beaucoup plus difficile. 1.40 Un certain nombre de pays africains ont ete durement touches par la baisse tendancielle des cours des produits de base, beaucoup d'entre eux ne disposant que d'une faible marge pour transferer leurs ressources vers des biens d'exportation plus lucratifs. Les pays a faible revenu ont subi une tr~s forte deterioration de leurs termes de l'echange dans les annees 1970, partiellement en raison de la montee des prix du petrole. Les annees 1980 leur ont apporte une plus grande stabilite, mais leurs termes de l'echange res tent. moins favorables qu' autrefois. L' augmentation reguli~re de I' aide n' a pu que compenser partiellement ces effets. Pour les pays a revenu intermE~diaire importateurs de p~tro1e, le tableau est plus complexe, leurs termes de l'echange s'etant tr~s rapidement ameliores a la fin des annees 1970 avant de subir une deterioration generale au debut des annees 1980. Dans un premier temps, ce declin fut tempere par une augmentation des emprunts commerc:iaux, mais les entrees de capitaux chut~rent brusquement apr~s 1983. 1.41 Malgre tout, nombre de pays qui ont subi une degradation similaire des termes de l'echange dans d'autres regions se sont mieux tires d'affaire. La baisse des revenus de l'Afrique doit etre imputee pour une large part a la combinaison d'une forte croissance demographique et d'une faible croissance du PNB. 11 est instructif de comparer la croissance du PNB par habitant en Afrique depuis 1960 avec celIe de l'Asie du Sud, seul groupe important de pays a faible revenu qui lui soit commensurable (Figure 1.10, au verso). Jusqu'au premier choc petrolier, Ie PNB par tete y a augmente presque deux fois plus vite qU'en Afrique subsaharienne. Depuis lors, bien que la moitie du PNB du sous-continent africain emane de pays exportateurs de petrole qui ont - 36a - en.... I. d·· paya d'Afrique .",b·· n.rienne I_x. Hil61-62~100 400 350 R.v.nu national brut Produit national brut ---- Population 300 Revenu national brut par habitant T.r~·· d. I"change 250 150 100 tI/III@~~.;'-' . ""--- ~~- ----- - ... ... ~ '. -..", 504-~~~-r~~~~~~~~~~~~-r~~ 1961 1970 1975 1960 1965 1988 Ann'. Pay- d'Afrique aub ·· harf.nne · f,ibl. rev.nu --- 350 ~.v.nu national brut Produ;t national brut P","ulation 300 Revenu national brut par habitant T.r __ d. 1 "chan·· ----._- 250 ......~ 150 100 .~f.~~~~""~.:~--::...;:----... ._. .. ll"'""'-...IIIIIIF.".11 -,_ .. _" -- Pay- d'Afrique aub .. h.ri.nne & ravenu int.r-'diair. i-.ortateur. d. p'trof. I_x. 1961-62.100 400 Rav,nu nationa' brut Produit national brut -~..... Population 350 Rav.nu national brut par Ter... d. I "chang. 250 150 100 5O~~~~~~~~~~~~~~~~~~ 1961 \~10 1975 1960 1985 1987 Annh I - 36b - Figure 1.10 Afrique subsaharienne et Asie du Sud Croissance de la population 't.ltll.' ····tl ..,t. CIOaret...,,) _1961-73 . 3.1 _1973-80 3 ~1980-87 2 o "ri"t , ...l6Irit.1I llit I. 514 Croi ··anc. du PN8 par habitant ,··, It troi ····tt ····tl ..,t. C,atrtt.tIgt) 3~-----------------------:~;;~ 2 o ·1 _1961-73 _1973-80 ·2 rz:a 1980-8'7 -3~------~----~-----------------r-------- I"l.1t ,"....rlt··t lsit I. '" ./ - 36c - Taux d'tnv··tt .....nt loarc,."" I. ,., 24 22.8 _1961-73 .1973-80 (22;l1980-87 20 ·· "riqlt S sl.,ri,... I,i, 4. S.I ~aux de rende.ent de l'investisseaent " ·· I, croiss,.(, ····'1 ..". (101'(""9" 35~-----------------------------------------' 30.7 _1961-73 30 '.1973-80 fZd1980-87 25 20 15 10 5 n ",it., ,,,,,,,,i,... lo.re, , ...,., .o.li,". / / /. , - 36d - 1. Dans I'ideal, cette mesure (de mime que Ie coefficient marginal de capital, plus traditionnel) d.vrait utiliser I'investissement OBI plutat que brut. L'utilisation de I'investissement brut signifie que Ie rendement ainsi calcul. peut baissar quand Ie taux d'inveatissement brut diminua, m.me s1 ca n'est pas Ie cas pour Ie rendement net. En pratique, Ie montant de la depreciation qu'il faudrait connaitre pour calculer l'investissement net est rarement disponible. A suppoa.r que Ie taux de deprecication soit de 10 '- du PNB (ce qui correspond a une estimation plutat elevee), 1. calcul de rantabilite nette de l'investissement conduit aux resultats suivants. Taux de rendement net (en pourcentage) 1961-73 1973-80 1980-87 Afrique subsaharienne 83,8 '- 23,5 '- 6,2 X Asie du Sud 47,8 '- 38,5 '- 36,1 '- Cette variation modi fie Ie niveau des taux de rendement mais la conclusion principale indiquant une forte chute du rendement de I'investissement an Afriquereste inchangee. Capendant, selon cette nouvelle methode de calcul, ce rendemant diminue egalement en Asie du Sud, mais plus lentement qu'en Afrique. - 37 - b~n~fici~ de ce choc, la croissance du PNB par t~te y a ~t~ n~gative, la d~t~rioration ~tant de plus en plus marqu~e. A l'inverse, cette croissance va en s'acc~l~rant en Asie du Sud. En moyenne, depuis 1973, l'accroissement annuel du PNB par habitant a ~t~ en Afrique de quatre points de pourcentage inf~rieur A celui de l'Asie. La croissance demographique 1.42 La population de l'Afrique subsaharienne est aujourd'hui de deux fois sup~rieure A celIe du continent en 1965 et de plus de cinq fois celIe qu'il comptait au d~but du siecle. Cette tendance A la hausse a gravement handicappe l'Afrique dans ses efforts pour elever son revenu par habitant. Si l'evolution demographique avait suivi la m~me tendance A la baisse qu'en Asie et en Amerique latine depuis Ie debut des annees 1970, Ie revenu par t~te pourrait atteindre aujourd'hui jusqu'A 10 % de plus que son niveau actuel, dans l'hypothese d'une croissance inchangee du PNB. Or, en Afrique, Ie rapport age-personnes A charge s'est constamment eleve et plus recemment, on a assiste A une diminution de la proportion de la population sachant lire, compter, disposant d'une alimentation correcte et se trouvant en bonne sante, autant de carences qui ont un impact negatif sur la productivite A long terme. Mais si la forte croissance demographique contribue au dec lin du revenu par habitant, l'explication ne s'arr~te pas lAo Un facteur crucial est la faiblesse de l'accroissement du PNB, qui elle-mame, decoule de la baisse des taux d'investissement et du peu d'efficacite des investissements realises. La baisse du tauxd'investissement 1.43 Les taux moyens d'investissement etaient sensiblement les m~mes en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne jusqu'A 1980 - environ 16 % du PNB dans les annees 1960, avec une hausse autour de 20 % dans la decennie suivante - bien qu'en termes reels, l'investissement africain ait ete moins eleve A cause de coOts superieurs. Depuis lors, ces taux ont diminue d'un quart en Afrique, alors qu'ils continaient A augmenter en Asie du Sud. En outre, la croissance de l'investissement en Afrique s'est interrompue peu apr~s Ie milieu des annees 1970, avant de commencer A suivre une pente descendante qui refletait la chute des taux d'epargne A la fois interieurs et exterieurs. Les premiers ont baisse suite A la reduction des revenus reels provoquee par Ie declin des termes de l'echange et de la production, et alors qu'apparaissaient de larges deficits dans Ie secteur public. Les seconds ont decru en raison de la tres forte diminution des flux de capitaux non concessionnels en 1984-85 et de la perte de solvabilite de l'Afrique engendree par la deterioration des performances ~conomiques interieures. Cependant, l'epargne exterieure est restee positive et, mame A leur point Ie plus bas, en 1985, les entrees reelles nettes de capitaux etaient inferieures de 8 % seulement A celles de la periode 1975-77. 1.44 La faiblesse des taux d'investissement dans un passe recent laisse augurer de la difficulte A restaurer la croissance (Chapitre 8). Cependant, puisque les taux africains etaient comparables A ceux de l'Asie du Sud jusqu'aux annees 1980, il est difficile de conclure que l'insuffisance de l'investissement a ete la cause des moindres performances economiques du I' . - 38 - continent depuis Ie milieu de la d~cennie 1970. En r~alit~, la diff~rence vient de la faible rentabilit~ de l'investissement en Afrique. La faible rentabilit~ des investissements 1.45 Mesur~s simplement comme Ie ratio de la croissance de la production sur Ie taux d'investissement au cours d'une ann~e donn~e, les rendements de l'investissement en Afrique ont constamment d~cru. Vers les ann~es 1980, ils atteignaient seulement 1/10 environ de ceux de l'Asie du Sud, alors qu'ils avaient ~t~ de plus d'un tiers sup~rieurs dans les ann~es 1960 et au d~but des ann~es 1970. S'ils ~taient calcul~s en comparant l'investissement de la fin des ann~es 1970 avec la croissance des ann~es 1980 (pour tenir compte du d~lai de r~ponse de l'offre), Ie d~clin paraltrait encore plus important. 1.46 Quelles sont les causes de cette chute de rentabilit~ des investissements? La r~ponse ne vient pas de la s~cheresse, car ses effets sur la production dans les ann~es 1980 n'ont gu~re ~t~ pires qU'au d~but des ann~es 1970. La diminution de la demande mondiale n'en est pas non plus la raison. En r~alit~, les exportations africaines ont perdu une part du march~. La chute la plus brutale des termes de l'~change de la r~gion s'est produite apr~s 1985, date a laquelle la stagnation et Ie d~clin du PNB ~taient des donn~es bien ~tablies. Tous les indices pointent en direction d'une chute de la productivit~: Ie rendement des r~coltes est a la baisse, Ie nombre des cycles de culture en terrain irrigu~ d~croit, les conts de transport augment.ent et Ie taux d'utilisation des capacit~s de production industrielle diminue. 1.47 La hausse du cont de l'investissement a contribu~ a la chute de la productivit~. Ce cont est g~n~ralement de plus de 50 % sup~rieur en Afrique qu'en Asie (Tableau 1.1). Une partie de l'~cart peut refl~ter la sur~valuation des monnaies en Afrique, bien que l'effet des taux de change soit r~duit dans la mesure o~ les investissements y sont a plus forte intensit~ d'importations. Le cont de l'investissement s'est accru dans les ann~es 1970 et 1980, au fur et a mesure que les contraintes li~es a l'infrastructure ou d'ordre institutionnel devenaient plus s~v~res. Les d~penses de fonctionnement et d'entretien des investissements sont aussi plus ~lev~es en Afrique, atteignant plus du double de celles de l'Asie. 1.48 Ces d~penses sont ~lev~es en partie du fait de circonstances sp~cifiques a 1 'Afrique. L'irr~gularit~ de la topographie rend conteuses la construction de routes et l'irrigation. La faible densit~ de la population et la grande dispersion de l'habitat (0.2 habitants par km2 en Afrique subsaharienne, contre 1,4 dans l'Asie a faible revenu) sont aussi des facteurs d'accroissement des conts. Les pays enclav~s doivent faire face a des difficult~s encore plus grandes. Des ~conomies non diversifi~es et manquant de main-d'oeuvre locale qualifi~e sont d~pendantes de conteuses importations d'expertise et de produits. Mais une grande part de l'explication de la crise ~conomique actuelle de l'Afrique est aussi imputable a la mauvaise gestion des deniers publics et a la m~diocrit~ de la politique ~conomique. L'un dans l'autre, ces deux facteurs ont port~ pr~judice a l'efficacit~ du secteur priv~, augmentant sensiblement les conts d~ja ~lev~s de l'activit~ ~conomique. - 39 - 1.49 La mauvaise gestion du secteur public. L'Etat exer9ant un r6le dominant - les depenses publiques en 1986 etaient de plus de 27 % du PNB, A comparer A 19 % seulement dans les pays A faible revenu hors Afrique - ses interventions affectent profondement l'efficacite globale de l'utilisation des ressources. Les exemples d'investissements publics mal choisis et maladroitement con9us sont plethore, certains ayant beneficie des concours de la Banque mondiale. Une evaluation de 1987 a revele que la moitie des projets de developpement rural acheves auxquels la Banque avait apporte son concours en Afrique avaient ete des echecs. Une usine de ciment desservant la Cote d'Ivoire, le Ghana et Ie Togo a ete fermee en 1984 apr~s seulement quatre ans de fonctionnement. Une entreprise de production de chaussures geree par l'Etat en Tanzanie n'a pu fonctionner A plus de 25 % de ses capacites, ne restant en exploitation que grace A une importante subvention des pouvoirs publics. Les gouvernements africains et les bailleurs de fonds etrangers (aussi bien banques commerciales qu'institutions de credit a l'exportation et organismes donateurs) doivent assumer chacun une part de responsabilite. Les institutions de financement et les fournisseurs etrangers ont encourage les exportations de capitaux en offrant des credits attrayants. En m~me temps, le defaut de coordination entre les donateurs a conduit a des chevauchements et des gaspillages. Les gouvernements ont egalement donne leur accord a - et souvent appuye - des investissements grandioses ou inadaptes aux besoins. En outre, la croissance rap ide des ressources en devises etrang~res, multipliees par cinq environ en termes nominaux entre 1970 et 1982, a agi en faveur d'une relache des crit~res d'investissement et de la discipline financi~re. L'expansion tentaculaire du secteur des entreprises publiques s'est produite pendant cette periode. Les gouvernements (et les donateurs) ont prefere investir dans de nouveaux bAtiments et equipements plutot que de fournir a leurs anciens employes les ressources necessaires A l'amelioration de la qualite de leur travail. En consequence, le stock de capital s'est deteriore et de nombreux investissements ont eu une rentabilite tr~s faible ou nulle. Les carences dans l'entretien et la gestion des infrastructures ont enormement accru le coQt de l'entreprise economique (Encadre 1.1). 1.50 Les distorsions de prix. Les vastes monopoles d'Etat, Ie controle des prix et l'affectation centralisee du credit et des devises ont ete monnaie courante en Afrique. La rupture avec les prix du marche et l'affectation inefficace des ressources qui en a resulte ont progressivement empire a mesure que les gouvernements avaient de plus en plus recours a des mesures administratives pour faire face a la penurie de devises et au deficit des recettes publiques. La crise a empire faute d'un ajustement rap ide des politiques A la baisse des prix d'exportation des produits de base qui a suivi la periode d'expansion du milieu des annees 1970, puis, au debut des annees 1980, en consequence du tarissement des flux de capitaux non concessionnels et de l'accroissement du service de la dette sur les emprunts passes. 1.51 L'aggravation des deficits budgetaires a entraine dans un premier temps une hausse de l'emprunt et des impots plutot qU'une diminution des depenses publiques. Les deficits ont alimente l'inflation, malgre les contrOles de prix. Les parites n'ayant pas ete ajustees, les taux de change reels ont augmente reguli~rement apr~s Ie premier choc petrolier, les taux de change paralleles divergeant de plus en plus des taux nominaux (Figure 1.14, - 39a - Tableau 1.1 Comparaison des couts typlques en AfrIque subsaharlenne et en Asle Afrique Asle a Afrique par sub- falble rapport a saharlenne revenu J'As/e a falble revenu Investlssements et construction Irrigation 6,0-10,0 2,5-6,0 1,4-2,4 (par ha, en mllllers de dollars 1984) Adductlons d'eau urbalnes 55-106 35-60 1,8 (par unite, en dollars 1985) Internats en ecole professlonnelle 5,0 3,0 1,7 (mllliers de dollars par place) Routes 250 190 1,3 (mllllers de dollars par km) Couts recurrents Education prlmalre 92 17 5,4 (en dollars 1980 par eUwe) Transport Entret/en des routes 4,8 2,2 2,2 (mllliers de dollars par km) Materiel roUiant 0,09 0.04 2,3 (dollars par tonne/km) Sala/res Gouvernement central 5,5 2,0 2,8 (multiple du revenu par habitant, moyenne annuel/e 1977-82) Ouvrlers de constructIon non qualifies 1,91 1.35 1,4 (moyenne, dollars/jour, 1989) Note: La couverture des pays varle se/on les Indlcateurs, en fonctlon de /21 - 39b - disponlbillte des donnees. Source: Dossiers de proJets et divers rapports de la BanQue mondla/e. Pour plus de detailS, voir HAna/ysls of Project Costs In Sub-Saharan African In Selected Sectors". Donnees concernant les salalres des fonctlonnalres de tEtat tlrees de Peter S. Heller et Alain A. Talt, Government Employment and Pay : Some International Comparisons, IMF Occasional Paper No.24, WashIngton D.C., Octobre 1983. - 40 - au verso). Les relations financieres internationales ont ete desorganisees suite a l'incapacite des Etats a remplir les obligations attachees au service de leur dette dans les annees 1980. Les biens d'echange ont les plus affectes par des contr5les de prix de plus en plus stricts et par la surevaluation de plus en plus nette des taux de change. Les prix reels des produits agricoles ont baisse dans la seconde moitie des annees 1970, a mesure qU'augmentaient les taux de change reels (Figure 1.12, au verso). Les entreprises publiques ont subi des deficits d'exploitation de plus en plus eleves et, tres rapidement, les banques appelees a leur rescousse, ont elles-m@mes realise des pertes. 1.52 Tous ces developpements ont durement frappe les producteurs. La surevaluation des taux de change (a laquelle il faut ajouter les taxes a l'exportation) a nui aux performances des exportations a partir du debut des annees 1970. En consequence, la part de la region dans les principaux marches de produits de base non petroliers a serieusement diminue. 1.53 Les distorsions de prix ont egalement cause des dommages a plus long terme. Les fermiers se sont abstenus d'investir dans la fertilisation des sols, les entreprises minieres ont ete peu actives dans l'exploration, appauvrissant ainsi leurs reserves, et les industriels ont sous-utilise leur stock de capital. En meme temps, les pouvoirs publics ont laisse les infrastructures se deteriorer. Faute de structures economiques flexibles, diversifiees et dynamiques, les trous dans Ie budget et la balance de paiements des pays de la region sont devenus impossibles a gerer. Obliges a fa ire marche arriere, les gouvernements ont souvent commence par trancher dans les depenses sociales, aggravant ainsi l'erosion du potentiel en ressources humaines. 1.54 Le niveau eleve des coUts salariaux. Le coUt eleve du travail par rapport a la productivite est une donnee d'autant plus importante en Afrique que Ie contenu en main-d'oeuvre, directe et indirecte, du produit fini depasse facilement 50 %. Le niveau eleve des salaires est un heritage du colonialisme. Dans la premiere moitie du siecle, les salaires reels refletaient l'abondance des ressources naturelles, la profustion de capital prive a risque, la presence de cadres expatries experimentes et la stabilite de l'aruninistration coloniale. Les expatries, employes pour compenser Ie manque de personnel africain qualifie, etaient payes au-des sus des echelles europeennes. Au fur et a mesure que les Africains acqueraient des qualifications comparables, leurs salaires etaient indexes sur ceux des expatries, tout en leur restant inferieurs. Apres l'independance, la retribution des autochtones qualifies s'est rapprochee de celIe des expatries et les salaires des travailleurs non qualifies, du moins dans Ie secteur formel ont ete rehausses par la legislation sur Ie salaire minimum. Mais ce qui semblait justifiable et economiquement viable au lendemain de l'indepE!ndance devint moins justifiable en presence d'un plus grand nombre d'AfriccLins qualifies et moins viable avec un encadrement moins experimente et des infrastructures moins efficaces au sein d'un monde de plus en plus competitif. Dans la plupart des pays africains, au debut des annees 1980 les salaires dans Ie secteur public etaient plusieurs fois superieurs a ceux de l'Asie. C'est ainsi que les salaires des fonctionnaires tanzaniens, bien que - 40a - F19u~e 1.11 Index des taux de change effectlfs r'els 1.4", 19·· · '" 150 140 130 120 110 100 ",if" ,"s.6.ri,·· , ---=~==~~--------~~~~i 90 s··1 .i"rl. 80 70 60 504--T~--T-~-T--~~~~--r-~-r~--~~-r~ 1970 1975 1980 1985 1987 ,.." Iott , 10" ··,. 4,. ,ro.", 10.4."" ,.r 1" ". 1"5 ,. 401'.rs. L. c.e#f01i, 'frif" , ··,.b.ri,." j.cl.t "aJ'It.t I. "" 4, crtl, r'gJol. , SoIrCf , Jo··4·· I. J. "'f" 1O.41.J ·· Flgu~e 1.12 Index de. p~lx agrlcoles r'~ls IU Droducteu~ 1.4", ",. · '0' 140~------------------------ ________________ ~ 130 120""1...._- 110 100 90 804-~~--T-~~--~~~~--~~~~--~~~~ 1970 " 1975 · 1980 1985 1987 I ... , /' ,I - 40b - Note I Moyenn.s ponder.es pour 17 pays d'Afrique subsaharienne pour las cultures d'exportation et 12 pays d'Afrique subsaharienne pour les cultures vivrieres. Source : Estimations de 1a Banque mondiale. - 41 - relativement bas pour l'Afrique, atteignaient plus du double de ceux de leurs homologues de Sri Lanka. 1.55 L'ajustement est bien engage. D'apres Ie BIT, les taux de salaire reels ont diminue d'un quart depuis 1980. Cet ajustement est brusque, mais necessaire pour refleter Ie sous-emploi cause par une croissance de la main- d'oeuvre qui a largement depasse la creation de postes de travail, et pour relever Ie defi de la concurrence internationale. Les devaluations ont contribue a ramener Ie cont en dollars des salaires africains a un niveau proche de ceux de leurs concurrents - en Tanzanie, au Ghana, en Guinee, par exemple -, bien que les taux de salaire officiels des pays de la zone franc restent eleves. 1.56 Les forces du marche ont maintenu les salaires reels en relation plus etroite avec la productivite dans Ie secteur informel. Jusqu'a une date recente, ces forces n'ont pas affecte les organismes gouvernementaux qui emploient la plus grande partie de la main-d'oeuvre qualifiee, ni les secteurs parapublics et les grandes entreprises privees oU les rentes de situation creees par les mesures de protection du commerce et les subventions ont contribue a financer des salaires plus eleves que ne Ie justifierait la seule productivite du travail. A l'heure actuelle, les salaires du secteur public atteignent a peine un niveau de subsistance dans certains pays et la structure salariale a ete tres severement resserree. La correction est parfois allee trop loin et la productivite en a souffert. 1.51 L'absence d'une moyenne. Un des traits caracteristiques des economies africaines est Ie caractere dualiste qu'y ont la consommation et la production. Les technologies intermediaires sont rares. Le transport se fait essentiellement par vehicule a moteur ou a pied (Encart 4.5). Dans certains pays, les bicyclettes, mobylettes, chariots et vehicules similaires sont etonnamment rares (Ie Burkina Faso, oU la mobylette est omnipresente, est une exception). L'Afrique a presque sept voitures pour mille habitants (Ie Zimbabwe en a 30, la Cote d'Ivoire 11, Ie Senegal 13); par comparaison, la Coree n'en que six, l'Inde deux et Ie Bangladesh 0,3. Quand les paysans se modernisent, ils passent de la houe au tracteur; rares sont ceux qui utilisent des boeufs, m~me la oU la glossine est absente. Du cote de la production, on trouve une infinite de micro-entreprises et quelques firmes modernes moyennes ou grandes, mais tres peu de choses entre les deux. au que l'on tourne son regard, il semble qu'il manque une moyenne. Les investissements et les conts d'exploitation sont plus eleves qu'ils ne Ie seraient si les technologies appropriees etaient plus souvent utilisees. Faute d'alternative, les consommateurs tendent a depenser de larges sommes sur les importations. Tous ces facteurs ne font qu'ajouter aux conts deja structurellement eleves des economies africaines. 1.58 La degradation des institutions gouvernementales. A l'independance, l'Afrique a herite d'administrations simples mais en bon etat de fonctionnement. Ces administrations etaient gerees en grande partie par des cadres expatries et n'etaient pas orientees vers Ie role de developpement que leur ont assigne plus tard les dirigeants africains, elargissant ainsi substantiellement les responsabilites de l'Etat. Simultanement, la promotion rap ide d'un personnel inexperimente et la politisation croissante de I. - 42 - l'ensemble de l'appareil administratif ont conduit a une diminution de l'efficacite. Une combinaison de goulOts d'etranglement administratifs, de "redevances· et "commissions· non autorisees, et de services non performants ont impose aux entreprises des coOts qui ont progressivement lamine leur competitivite internationale. La degradation graduelle des systemes judiciaires dans de nombreux pays a eveille chez les investisseurs etrangers la crainte que les contrats ne soient pas respectes. Ceux qui ont decide malgre tout d'investir ont exige des marges de profit elevees pour compenser Ie niveau du risque per9u. Des gouvernements autoritaires hostiles aux organisations locales et aux ONG se sont aliene une grande partie du public. En consequence, l'activite economique s'est deplacee de plus en plus vers Ie secteur informel. Trop souvent, Ie peuple voit Ie gouvernement comme la source, et non la solution, de ses problemes. Les perspectives pour la prochaine generation 1.59 A quel type d'environnement l'Afrique sera-t-elle confrontee dans les 30 annees qui viennent? L'avenir apportera vraisemblablement une acceleration des mutations technologiques, de nouveaux styles d'organisation industrielle, de concurrence et d'echange, une intensification des pressions sur les ressources ecologiques de la planete et un horizon demographique defiant les esperances de la region en des jours meilleurs. L'impact de tous ces facteurs ne peut etre ignore, mais il faut avant tout eviter que l'Afrique ne se renferme sur elle-meme, risquant de devenir completement peripherique par rapport a l'economie mondiale. La revolution technologique 1.60 Le monde est a l'aube d'un nouvel Age technologique, entraine par les progres dans les technologies de l' information, la micro-electronique, la biotechnologie et la science des materiaux. Les consequences de ces progres se feront sentir pratiquement dans tous les secteurs et non seulement dans ceux qui appartiennent au domaine de la haute technologie. 1.61 La disponibilite de moyens de communication et de traitement de l'information rapides et bon marche va transformer Ie monde des affaires et l'administration. Des reseaux mondiaux d'infoanation peanettront l'integration des marches et faciliteront la gestion d'etablissements industriels disperses. L'acces aux idees sera la cle de la competitivite. GrAce a certaines percees technologiques, de nouvelles possibilites d'echange de services a distance existent deja dans des domaines tels que Ie tourisme, la comptabilite et l'education. La faculte de transferer des fonds instantanement dans n'importe quelle partie du monde a deja mene a la creation d'un marche financier mondial fonctionnant 24 heures sur 24. Les applications industrielles des technologies de l'information sont en train de renouveler le visage des processus industriels et la division du travail au sein de l'ensemble de l'economie. 1.62 Certaines industries de services a forte intensite de main- d'oeuvI'e pourraient prosperer dans les pays en developpement en maintenant des liens flexibles avec des marches possedant Ie savoir faire a l'etranger. Mais un continent dote d'un systeme de telecommunications defectueux et - 43 - d'industries de services etroitement reg1ementees est voue A rester iso1e des grands courants du progreso Les perspectives qu'aura l'Afrique d'entrer veritab1ement dans 1e jeu de 1a concurrence dependront de l'intensite des efforts qu'e11e dep10iera pour creer une structure efficace de telecommunications de base et pour avoir acces aux reseaux mondiaux d'information en nouant des liens avec des partenaires internationaux. 1.63 Les progres des biotechnologies renferment ega1ement un enorme potentie1 pour l'Afrique, ouvrant 1a possibi1ite d'accroitre sa production agrico1e et de proteger des maladies sa population, ses reco1tes et son chepte1 (Encart 1.2, au verso). Contrairement A 1a Revolution verte, qui exigeait une irrigation et se 1imitait A quelques productions vegeta1es, 1a bio-revo1ution peut atteindre l'ensemble de la population rurale. En m@me temps, les pays tropicaux, qui controlent environ 70 % des ressources biogenetiques de 1a p1anete, pourront essayer de monnayer ce potentie1, qui s'apprecie de jour en jour, au profit de leur deve10ppement economique. Le developpement de partenariats avec des entreprises privees des Etats-Unis, du Japon et d'Europe, qui cherchent A forger des reseaux associant capitaux, capacites de recherche, filieres de marketing et acces aux ressources biologiques A l'echelle mondiale, suggerent que de nouveaux modes de transfert de techno1ogie sont en train d'emerger. Cependant, 1a commercialisation des biotechnologies presente aussi des risques. La fabrication en laboratoire et les produits de substitution peuvent menacer les marches traditionnels d'exportations agricoles de l'Afrique. La diffusion de nouvelles varietes de productions vegeta1es en Afrique sera inf1uencee par 1a mesure dans laquelle les entreprises reussiront A faire valoir un droit de propriete sur les applications des biotechnologies. 1.64 Les progres dans 1es sciences des materiaux auront une portee non moins determinante. Les fibres optiques en silicone ont pratiquement remplace le cuivre dans 1a fabrication des cables telephoniques. Les recherches en cours promettent la construction de moteurs A tres faible consommation grace A des ceramiques A haute temperature. La substitution de plus en plus rapide de materiaux de pointe - superconducteurs, fibres optiques de transmission, nouvelles matieres plastiques, alliages metal1iques, etc. - aux matieres premieres classiques va exercer des pressions sur les producteurs de mineraux. Les implications pour l'Afrique dependront de la capacite de ses exportateurs a s'ajuster aux modifications de 1a demande mondiale. Des po1itiques qui encouragent d'adoption de methodes de production efficaces, le developpement de nouvelles matieres premieres et l'accroissement des exportations de produits alimentaires et manufactures aideront la region A reduire sa dependance a l'egard de produits primaires dont la demande et en baisse. Les transformations de l'organisation industrielle et des methodes de gestion 1.65 Une nouvelle perception du progres techno1ogique, defini comme fonction de la flexibilite institutionnelle et de l'acces A l'information, est en train de naltre, obligeant a une reevaluation des structures institutionnelles. Il n'est pas impossible que de nouvelles methodes de conduite des affaires, derivees en partie de l'experience japonaise, soient plus aptes A repondre aux besoins de l'Afrique que les progres realises dans l'outillage grace aux technologies de pointe. Ces innovations incluent des - 44 - techniques de production dites "d'optimisation", te11es que: f1exibi1it~ de 1a sp~cia1isation, gestion globa1e de 1a qua1it~ et systeme de stockage au moment ad~quat. La combinaison de ces m~thodes am~liore 1a capacit~ de l'entreprise a r~pondre a l'evo1ution des preferences des consommateurs, g~n~ra1ement a un cout moins ~leve et en fournissant une qua1ite superieure. E11es peuvent aussi transformer 1es relations ext~rieures de l'etab1issement en favorisant 1a conclusion de contrats A plus long terme avec des fournisseurs moins nombreux mais plus fiab1es, ou en encourageant 1a coop~ration entre des fournisseurs potentie11ement concurrents. G10ba1ement, ces methodes de gestion tranchent tres nettement avec 1es concepts autrefois en vigueur dans 1es pays industrie1s qui mettaient l'accent sur 1a production de masse et 1es economies d'eche11e et consideraient 1a main-d'oeuvre comme un facteur de cout p1utot que comme une ressource. 1.66 L'Afrique peut tirer des 1e90ns interessantes des nouvelles perspectives qui s'ouvrent en matiere de progres techno10gique et de deve10ppement de 1a concurrence. La mise en oeuvre de methodes de production d'optimisation peut ~tre pour e11e 1e moyen 1e plus efficace et 1e plus rapide d'ame1iorer sa competitivit~ dans un de1ai reduit. Avec un minimum critique de qualifications comp1ementaires en matiere technique et de gestion, 1a recherche de qua1it~ des produits et 1es nouvelles formes d'organisation industrie11es peuvent s'averer particulierement fructueuses dans une serie d'industries de main-d'oeuvre te11es que 1es textiles, l'habi11ement et 1e montagE! l~ger. Les couts de transfert sont faib1es, residant essentie11ement dans l'am~lioration des qualifications de 1a main-d'oeuvre. Ma1gre tout, 1es ben~fices de l'innovation techno10gique a long terme risquent de ne pas se materia1iser si des m~thodes f1exib1es de gestion de 1a production n'ont pas et~ introduites A temps. L'Afrique devra donc franchir de formidab1es obstacles pour expo10iter ce potentie1, ce qui signifie, entre autres, reSOrbE!r 1e manque de qualification de 1a main-d'oeuvre, offrir 1es incitations n~cessaires au changement institutionne1 et e1ever 1a prise de consciE!nce des liens existant entre 1 'information, 1a techno10gie et 1a compet:Ltivit~ des structures. Les r~su1tats d~pendront en grande partie de 1a capacite de 1a region A entrer dans des accords de partenariat avec des entreprises et des institutions de pays plus avances. Les nouveaux modes de production, d'echange et de financement 1.67 La structure globa1e des ~changes et de 1a production subit ~ga1ement des changements d'une vaste portee. Le Bassin du Pacifique apparait comme la r~gion oh l'expansion du commerce mondia1 et des flux de capitaux est 1e plus rapide. D'ici A 2020, i1 sera probab1ement devenu 1e centre de 1a puissance economique. L'Afrique Sub-Saharienne de tout temps tournee vers 1e Nord et l'ouest, devra desormais se tourner ega1ement vers l'est. - 44a - 1.68 Plus que toute autre region, l'Afrique sera affectee par Ie ralentissement probable de la demande de produits primaires. Tout espoir de resurrection de la croissance economique base sur une remontee des cours semble deplace. Les projections de prix des cinq principaux produits primaires d'exportation de l'Afrique jusqu'~ l'an 2000 n'indiquent aucune appreciation significative (Figure 1.13). A l'exception du petrole, les prix sont aujourd'hui proches de leur niveau ~ long terme et, marne si l'on peut 1.69 Les flux de capitaux commerciaux ne seront probablement pas non plus d'un grand secours. Un grand nombre de gouvernements africains rlgule 1,13 Indices des pllx a i'exportation pour cina grands plodult. prlaalres d'expoltatlon d'Afrlgue 'ybsabarlenne (Index. 1980 a 100) Cit.., t,t" tot··, tiS". ,It,.J, 300 I 700 ····· Cltl. 600 240 - - - till· - - - toto. 180 --,It,.·, cli'" "."""'M"''''.' 500 400 .\::- .\::- 0" 300 120 200 60 ~(.';;""")" 100 O~~~--r-'--r~~~r-'--r~~--r-~~-r~--r-~~-r~~r-~~-r~~r-~'--r~~~r-'--r~~~r-;- 0 .", 1960 1965 1970 1975 ..... 1980 1985 1990 1995 2000 I.t. I lot. I "S, ~lfJdls ,., " j.~jt' ft " flJII' I.H,S" ~fI ,'HI its lfI.tlteufs. SOIre. I ...fIt JO~i,J,. - 45 - disposaient autrefois d'une cote de credit favorable qui leur permettait d'attirer assez facilement des financements de sources commerciales. Mais la crise de la dette et les mauvais resultats economiques du continent ont dissuade la plupart des pr~teurs. II ne faut pas s'attendre a un retournement de situation a court ou a moyen terme. Des changements de fond devront avoir lieu, parmi lesquels l'etablissement de la confiance politique, avant que ces canaux s'ouvrent de nouveau. De meme, la fuite de capitaux ne sera endiguee que lorsque la confiance aura ete retablie. Le meilleur moyen pour l'Afrique de recevoir des financements hors des sources gouvernementales est de creer des conditions attractives pour l'investissement prive direct puisque, par definition, ces financements seraient lies a l'accroissement de la production. Concurremment, des mesures doivent etre prises pour reduire la dette du continent. Mega-tendances africaines 1.70 La Commission economique pour l'Afrique (CEA) fut parmi les premi~res a dresser dans toute sa nudite Ie tableau des consequences a long terme des tendances evoquees ci-dessus. En 1983, elle a publie un "scenario de cauchemar" qui soulignait l'urgence de reformes fondamentales. Depuis lors, les perspectives n'ont fait que se deteriorer. 1.71 Les tendances demographigues. Les deux principales hypoth~ses qui sous-tendent Ie scenario de la CEA portent sur la croissance de la population et du PNB. Le tableau alarmiste qu'il depeint derive de l'accroissement colossal et extremement rap ide du peuplement du continent a prevoir si les taux actuels restent en vigueur. Dans cette hypoth~se, la population de l'Afrique doublerait tous les 20 ans, atteignant un milliard en 2010. M~me si la fertilite s'alignait a la baisse sur Ie mod~le asiatique, en 2050 la population africaine aurait atteint 1,7 milliard d'habitants. Un renversement des comportements attaches a la fertilite ne s'op~rera pas facilement et certainement pas du jour au lendemain. Le "scenario de cauchemar" de la CEA est donc davantage qU'un mauvais reVel il decrit une possibilite tr~s reelle. 1.72 Les consequences de cet essor de la population sont dramatiques (Figure 1.14). Dans les 30 annees a venir, les pays africains devront faire face a plus d'un doublement du taux d'entree dans la population active, gonflement qui viendra aggraver un probl~me de sous-emploi deja tr~s aigu. Ce rapide accroissement de la population conduira aussi assez vite un certain nombre de pays a passer d'une situation d'abondance a une situation de penurie en mati~re de terrains disponibles. Le coefficient de la population sur la surface utile, qui exerce deja une contrainte sur developpement agricole dans de nombreux endroits, va se deteriorer. En me me temps, la degradation ecologique va aller en s'accelerant. 1.73 La spectaculaire explosion demographique va creer de tr~s fortes pressions aux migrations a la fois nationales et regionales, entralnant des tensions sociales et politiques. La plupart des migrants iront s'installer dans des centres urbains en expansion qui deviendront des "megalopoles". En l'an 2020, l'Afrique comptera probablemement environ 30 villes de plus d'un million d'habitants, dont plusieurs depasseront les dix millions. . I . - 45a - Figure 1.14 Population et urbanisation de i'Afrique subsaharienne Million, 1200 1107 1100 1000 _·Urbain. 900 -Rural. 800 700 600 500 400 300 200 100 0 1960 · 1980 2000 2020 h." 'otl. L" chi"", 1011 1.,. ,t 1'1' 10.t 1" "oitctio., .""'.'11 I ·· 6."" 1., t··, I, ",tilitl. 501fc, · "'f" 10.11". Flgure 1.15 L'Afrigue subsaharienne . tendanees 'conoaigue! r'cent.· Index. 1980.100 122~-------------------------- ______________ ~ 120 116 112 108 'rollctio. "rico', 104 100 T.~~_--"" 'O"1f 1., "IO,tltlo., 92 60,s cOI.asti6'" u4---~----~--~----~--~----~--~--~. 1980 1981 1982 1983 1984 1985 ,_ 11M17 , Soarer · fit ,t "",, 1O.li.". '"" - 46 - 1.74 L'Afrique, hameau du "village mondial". La d~sertification et la d~forestation de l'Afrique sont de plus en plus des pr~occupations mondiales, tout comme Ie degr~ de pollution des pays industriels est une pr~occupation pour l'Afrique. L'attention internationale se concentre surtout sur les effets de ces ph~nom~nes, d'une part sur Ie r~tr~cissement des zones habitables et l'extinction des esp~ces, d'autre part, sur les modifications du climat mondial. L'impact plan~taire des modifications de l'environnement en Afrique subsaharienne fera vraisemblablement l'objet d'une attention croissante l l'avenir, au fur et l mesure que les questions li~es l l'environnement occuperont une place de plus en plus centrale dans les affaires mondiales. 1.75 L'Afrique subsaharienne est dot~e de tr~s grandes richesses naturelles, v~g~tales et animales. On estime qu'elle abrite plus de 300.000 esp~ces sur un total mondial de cinq millions. La For~t Tai de COte d'lvoire, la For~t Montane d'Afrique de l'Est, ainsi qU'une petite partie de Madagascar comptent parmi les r~gions du monde les plus diversifi~es biologiquement. Un grand nombre d'esp~ces v~g~tales et animales en Afrique se trouvent exclusivement dans des zones limit~es. Pour prendre un exemple, plus de 6000 plantes a fleurs, 106 esp~ces d'oiseaux et la moiti~ des esp~ces de cam~l~ons existant dans Ie monde sont uniques a l'ile de Madagascar. 1.76 La disparition de la flore et de la faune africaines a des cons~quences qui vont au-dela de la simple extinction des esp~ces. Elle signifie la perte d'un mat~riel g~n~tique utilisable pour Ie d~veloppement de nouvelles cultures, m~dicaments et produits industriels. La r~gression de la for~t et d'autres types de couverture v~g~tale en Afrique peut aussi entrainer d'amples changements climatiques a l'~chelle du globe. La pratique r~pandue du brOlis pour d~blayer les terres des for~ts et des broussailles augmente sensiblement la quantit~ de gaz carbonique dans l'atmosph~re, contribuant au r~chauffement climatique de la plan~te. Un ralentissement de la d~forestation r~duirait ces ~missions. En outre, une acc~l~ration des efforts de reboisement valoriserait Ie rOle de ces for~ts, qui fonctionnent comme de vastes pompes d~barrassant l'atmosph~re de grandes quantit~s de gaz carbonique par Ie biais de la photosynth~se. 1.77 M~me si la part de l'Afrique dans la pollution mondiale est mineure compar~e l celIe des pays industriels, les risques conjugu~s de perte de la diversit~ biologique et de changement g~n~ral du climat sont de plus en plus des pr~occupations internationales. lIs offrent l'occasion de mobiliser des res sources internationales pour r~duire la pauvret~ qui est la cause de la d~forestation. Le d~fi 1.78 La crise de l'Afrique est profonde. Mais face aux grands probl~mes qui seront l r~soudre, Ie continent poss~de aussi des atouts importants dont il pourra tirer parti. 1.79 En premier lieu, malgr~ la pression d~mographique dans certaines zones, ses ressources en territoires et en eau sont vastes. 11 est possible d'accroltre substantiellement la production agricole, moyennant l'utilisation I' - 47 - de technologies adapt~es. En outre, son consid~rable potentiel min~ral n'a pas encore ~t~ exploit~. L'Afrique dispose aussi d'immenses ressources ~nerg~tiques - r~serves de gaz nature 1 et potentiel hydro-~lectrique. Ces ressources sont in~galement distribu~es A travers Ie continent et ne sont g~n~ralement pas situ~es lA ou se trouve la population. Ainsi, Ie premier d~fi pos~ A la r~gion est-il de concr~tiser Ie r~ve de coop~ration panafricaine en permettant une plus grande libert~ de mouvement des moyens de production et des personnes. 1.80 Deuxi~mement, les femmes africaines, bien que davantage engag~es dans les activit~s de production que leurs consoeurs de la majorit~ des autres pays en d~veloppement, se heurtent A d'innombrables obstacles qui emp~chent la pleine r~alisation de leur potentiel. Si on leur donnait leurs chances, elles pourraient avoir un impact sur Ie d~veloppement du continent bien plus grand que dans Ie pass~. 1.81 Troisi~mement, Ie secteur informel se montre d'une grande vitalit~. Les traditions africaines de solidarit~ peuvent ~tre d'une valeur inestimable dans la mobilisation des populations au niveau local. La tradition tr~s r~pandue du partage peut ~tre utilis~e pour mobiliser l'~pargne priv~e en vue d'investissements locaux dans Ie domaine social. Les entreprises informelles ont fait preuve d'un remarquable dynamisme et l'on peut compter sur elles comme des sources essentielles de revenus et d'emplois. Pays apr~s pays, Ie secteur informel a d~montr~ une r~sistance et une capacit~ d'adaptation aux changements de l'environnement et des possibilit~s qui d~passe de beaucoup ce que l'on aurait pu pr~voir sur la seule base des distorsions de la politique ~conomique et sur l'inefficacit~ g~n~rale du secteur moderne forme 1 , en grande partie aux mains de l'Etat. 1.82 Ce dynamisme enracin~ au niveau local a chang~ les traditions continentales d'organisation communautaire en syst~mes d'auto-assistance - sur Ie mod~le du harambee au Kenya, par exemple. Ces mouvements, souvent appuy~s par des organisations non-gouvernementales ~trang~res, sont maintenant actifs dans de nombreux domaines: ~ducation et formation, soins de sant~ et planification familiale, adductions d'eau au niveau du village, production agricole, stockage, marketing, agriculture foresti~re, logement, am~lioration de l'habitat et d~veloppement des petites entreprises (Encadr~ 2.9). lIs ont jou~ Ie rOle d'interm~diaires entre les organisations de base et les sources d'aide publique, commerciale ou priv~e. 1.83 Quatri~mement, la grande richesse de l'Afrique en flore et faune des plus vari~es, ses paysages spectaculaires et ses plages de sable fin font du tourisme un secteur plein d'avenir, comme l'a d~jA d~montr~ l'exemple de certains pays, tels Ie Kenya. La diversit~ biologique de l'Afrique pr~sente un int~r~t immense au plan international. II est possible d'attirer des ressources consid~rables pour en assurer la protection et, plus globalament, pour assurer la sauvegarde de l'environnement (Encadr~ 2.1). 1.84 L'histoire du d~veloppement ~conomique est pass~ par des transformations remarquables. Certains pays, traditionnellement consid~r~s comme ~conomiquement faibles, se sont mis A prosp~rer. En Afrique, plusieurs Etats ont r~guli~rement obtenu de bons r~sultats ~conomiques depuis - 48 - l'independance (Encadre 1.3, au verso). 11 n'existe donc pas de raison insurmontable pour que les autres ne puissent faire de meme. 1.85 Depuis Ie milieu des annees 1980, l'Afrique a enregistre des changements importants en mati~re de politiques et de resultats economiques. Bien que les revenus par habitant aient plus fortement decru dans les deux annees 1986 et 1987 que sur la periode 1980-85, cette aggravation doit etre replacee dans Ie contexte d'autres signes notables d'amelioration apparus depuis Ie milieu des annees 1980. La chute importante du revenu par tete de la region entre 1986 et 1988 etait due a la combinaison d'une deterioration particulierement aigu~ des termes de l'echange et de la poursuite d'une forte augmentation de la population, deux facteurs negatifs qui neutralise rent la croissance de la production interieure. Cependant, si l'on compare les quatre dernieres annees au debut de la decennie 1980, pour la totalite de l'Afrique, on voit se dessiner peu a peu une amelioration des performances. Le PNB global de la region a augmente de 2,1 % par an en moyenne entre 1985 et 1988, inversant Ie declin annuel de 1,2 % des quatre annees anterieures. Pour 17 pays, comptant un tiers de la population de la region, la croissance de la production a ete plus forte que celIe de la population pendant cette periode. Certains ont enregistre un taux de croissance annuel impressionnant: 9,1 % a l'1le Maurice, par exemple, et environ 5 % au Kenya et au Ghana. Les cas de declin des termes de l'echange sont attribuables en grande partie a la chute des prix du petrole qui, depuis lors, se sont stabilises. Pour 1988, des estimations preliminaires montrent que les termes de l'echange se sont ameliores pour les pays non exportateurs de petrole. 1.86 La production et les exportations agricoles ont augmente plus vite depuis 1984 qu'en moyenne sur les deux decennies precedentes. Meme si l'on exclut la reprise qui a suivi la secheresse en 1985, les taux de croissance de ces dernieres annees apparaissent beaucoup plus eleves que la moyenne a long terme des annees 1970 et du debut des annees 1980, refletant la reponse positive donnee aux incitations economiques, bien qu'il faille aussi faire la part du beau temps. Les resultats les plus recents des exportations africaines sont encourageants. Le volume d'exportation des produits non petroliers a augmente globalement de presque 10 % sur la periode 1985-87, offrant un contraste marque avec la tendance a la baisse des 15 annees anterieures. En outre, la decroissance de la part de l'Afrique dans Ie marche des exportations mondiales de produits non petroliers a commence a se renverser en 1984 (Figure 1.15). 1.87 Ces progres sont souvent limites et ne sont pas a I' abri d 'un retournement de situation. Les economies non diversifiees de l'Afrique restent particulierement vulnerables aux chocs exterieurs. La faiblesse passee des taux d'investissement a fragilise la base economique pouvant servir d'appui au renouveau de la croissance. Cependant, des efforts plus soutenus pour ameliorer la gestion economique nationale peuvent aider a la poursuite des progres recemment realises. 1.88 La moitie envion des pays africains ont adopte de vastes programmes de reformes de leur politique economique au cours des annees 1980. A l'origine, ces programmes visaient essentiellement a resorber les desequilibres macro-economiques a court et a moyen terme. Avec Ie temps, ils - 49 - ont profond~ment ~volu~ pour inclure des mesures destin~es a s'attaquer aux blocages structurels sous-jacents. Dans cette optique, le r~ajustement des taux de change a ~t~ un ~l~ment crucial. Par suite, les taux de change effectifs ont commenc~ a baisser a partir du d~but des ann~es 1980, apr~s une d~cennie d' a,scension pendant laquelle l' ~cart s '~tait accru par rapport aux taux des autres r~gions en d~veloppement. La combinaison des d~valuations nominales et de la lib~ralisation du march~ a conduit a une hausse des prix agricoles r~els dans de nombreux pays, en particulier pour les produits d'exportation. La r~ponse imm~diate aces hausses de prix a ~t~ dramatique dans certains cas, comme pour le cacao au Ghana par exemple. Dans d'autres cas, la r~action aux r~formes a ~t~ lente. De nombreux pays ont enregistr~ un r~alignement des coUts r~els des facteurs de production, les taux d'int~r~t r~els devenant moins n~gatifs et les salaires r~els, a la fois de la main- d'oeuvre qualifi~e et non qualifi~e, continuant de diminuer. Dans certains pays, comme la Tanzanie, les salaires' r~els sont maintenant descendus a moins de la moiti~ de leur niveau de 1980, alors que dans d'autres, en particulier dans les pays de la zone franc, l'ajustement est plus lent. 1.89 Les performances ~conomiques ont ~galement ~t~ stimul~es par une forte augmentation de l'aide. En 1987, les entr~es nettes de capitaux internationaux ont ~t~ de 10 % sup~rieures en termes r~els a celles de la moyenne des ann~es 1975-79 et les estimations pour 1988 indiquent une poursuite de la tendance. 1.90 L'impact social de ce progr~s est difficile a mesurer. Les donn~es a jour sont disparates. Pour sUr, l'am~lioration des services publics n'aura de cons~quences positives sur l'environnement qu'apr~s un certain d~lai. N~anmoins, les indications dont on dispose sur plusieurs pays d'Afrique sugg~rent que 1es d~penses r~elles par habitant en mati~re de sant~ pub1ique et d'~ducation ont arr~t~ leur chute. Dans les pays OU des programmes d'ajustement ont ~t~ adopt~s tr~s t~t et avec un soutien important de la part des donateurs, il n'est pas impossible que le revenu par t~te soit aujourd'hui en train d'augmenter. 1.91 Les de l'Afrique ne peuvent ~tre r~solus prob1~mes ~conomiques exp~ditivement ni en pr~tant attention exclusivement a l'accumulation du capital ou a 1'ajustement economique. Les structures de production africaines doivent ~tre transformees et, dans certains pays, une reorientation radicale de 1a politique economique sera necessaire. Chaque pays est unique et il n'y a pas de reponse magique. De nombreux facteurs - le rythme du progr~s technologique, le d~clin des marches des produits primaires et le changement de structure de la production a l'~chel1e mondia1e - sont hors de portee des decideurs politiques africains. 11 est essentiel d'avoir une perspective a long terme. Les decisions a prendre sont difficiles - pour 1es bailleurs de fonds cCimme pour les gouvernements africains - car des changements profonds devront avoir lieu dans 1es modes d'attribution de l'aide. Par-dessus tout, chaque pays devra elaborer une strategie de d~veloppement adaptee aux conditions qui sont les siennes. - 50 - Encadr~ 1.1 L'impact des carences de l'infrastructure Nig~ria Des recherches men~es r~cemment au Nig~ria ont d~montr~ que Ie mauvais ~tat des infrastructrures s'est traduit par des coUts e1eves pour les entreprises manufacturi~res. Pour surmonter ces carences, e11es ont vo10ntairement accepte d'encourir des depenses considerab1es. Bien que 1es 179 entreprises etudiees aient ~te branch~es sur 1e reseau electrique, toutes ce11es qui avaient plus de 50 emp10y~s possedaient leur propre generateur d'appoint et avaient investi, en moyenne, 130.000 dollars (a un taux de change de 7,5 na~ra par dollar) dans leurs propres installations e1ectriques. Parmi 1es firmes de moins de 20 employ~s, un tiers seulement generait son propre courant. II en est de m~me pour l'approvisionnement en eau. Alors qu'aucune des petites entreprises n'avait eu les moyens d'installer sa propre adduction pour suppleer aux carences des services publics, 14 % des entreprises de 20 a 50 employes avaient fait cet investissement. Plus des deux tiers des plus grandes entreprises (ayant plus de 100 employes) avaient investi dans des forages prives. Les deficiences des services publics telephoniques et postaux constituent une contrainte supplementaire pour les entreprises. Celles-ci ont tente de surmonter la difficu1te en ayant recours a des messagers a motocyc1ette ou a des emetteurs radio. Plus leur tail Ie augmentait, plus elles ont eu tendance a se doter de leur propre equipement dans ces services, Ie degre d'importance attach~ aux moyens de communication ~tant aussi ~lev~ que celui de l'approvisionnement en eau. Parmi les grandes entreprises, 70 a 90 % avaient leur propre emetteur radiol L'etude a montre qu'alors que 1a valeur en capital des installations privees representait environ 10 % de la valeur totale des machines et des equipements pour les grandes entreprises, e1le ~tait en moyenne de 25 % pour les petites. Cette pt'oportion variait amplement selon 1es Etats, 1a tail Ie des entreprises et les types de services. Les depenses 1es plus ~lev~es concernaient la g~n~ration d'electricit~ - atteignant presque quatre fois celles des forages et des installations d'~puration. Bo~ Figure 1.1 Entreprisea 'quip' ·· de leur. prop,. ·· ; nfr ·· tructur ·· (Pourcent.g. a.ton nombr. d'employ'.) IUU . . , - - - - - - . . . . , 90 BO 70 10 1·'9 20·49 50·99 lIXH 99 200·499 - EI.ctrlciU _ Eau So~rc.: eanqu. ~di.I ·. I - 51 - Encadre 1.2 La signification des biotechnologies pour l'Afrique L'utilisation directe des biotechnologies pour la diffusion et la selection des plantes pourrait augmenter considerablement la productivite des cultures et la production alimentaire en general dans les pays en developpe- ment. GrAce aux techniques de culture tissulaire, on est en train de creer des varietes de manioc, d'huile de palme et d'arachide qui resistent mieux A la secheresse et aux maladies. Les travaux d'ingenierie genetique des plantes permettront peut-etre aussi de produire des grains de cafe contenant moins de cafeine, repondant ainsi aux nouvelles preferences des consommateurs, ou des esp~ces d'arbres A croissance acceleree, facilitant le reboisement. L'ameli- oration des techniques de fermentation en milieu solide, tel que la farine de manioc enrichie en proteines, augmentera la valeur nutritionnelle des ali- ments. GrAce A des transferts d'embryons, on pourra accroltre la capacite reproductrice du cheptel. Des vaccins produits grace A l'ingenierie genetique viendront sans doute A bout de la trypanosomiase, ouvrant ainsi au paturage des zones infestees par la glossine. On esp~re aussi que la recherche medi- cale sur les anticorps mononucleiques, actuellement la branche la plus dyna- mique de la biotechnologie, permettra bientot des examens et diagnostics medi- caux plus precis. De nouveaux vaccins contre la polio, la malaria, le SIDA ou la schistosomiase sont en cours de developpement. En outre, des syst~mes bio- genetiques integres seront peut-etre capables de generer en marne temps de l'alimentation pour l'homme et pour les animaux, ainsi que du combustible A travers la conversion microbienne de la biomasse. Il est possible que l'utilisation commerciale des nouveaux pro- duits bio-industriels entralne l'apparition de modes de production et d'echange agricoles radicalement differents, ce qui represente un risque pour les cultures africaines d'exportation. Par exemple, la production de vanille en laboratoire mettra peut-etre bientot en danger les moyens d'existence de 70.000 producteurs de gousses de vanille A Madagascar. Il n'est pas non plus impossible que les consommateurs aient bientOt le choix entre le Kenya AA et des grains de cafe produits biotechniquement dans l'Etat du Massachusetts. Une seconde preoccupation touche A la privatisation des resultats de la recherche. La pratique actuelle de protection des produits des bio- technologies de la premi~re generation par une patente, de maniere A couvrir toute utilisation ulterieure de materiau genere grAce A ces techniques, impo- sera A l'avenir des limites strictes A la concurrence. Pour les pays en de- veloppement, ceci peut aussi signifier le paiement de licences elevees pour les semences, rendant difficile la diffusion des nouvelles varietes de plantes aupres des petits agriculteurs. En outre, il est possible que la diminution de la diversite genetique qui risque de resulter de la large propagation des plantes generees par les biotechnologies, rende les cultures de plus en plus vulnerables A de nouvelles maladies. Une reponse flexible de l'Afrique A cette dynamique fortement con- currentielle doit se baser sur une surveillance etroite de l'evolution des biotechnologies, sur un accroissement de la collaboration en matiere de re- cherche et de developpement avec des entreprises occidentales et sur la mise au point de produits de substitution. En meme temps, l'Afrique devra realiser des progr~s enormes dans les domaines de l'enseignement scientifique et de la formation agricole. - 52 - Encadre 1.3 L'ile Maurice: du pessimisme malthusien au developpement durable La structure socio-economique de l'lle Maurice au debut des annees 1960 affichait la m~me recette de desespoir que la plupart des autres pays d'Afrique ~ l'heure actuelle. Sa population augmentait au rythme d'environ 2,5 % par an avec une croissance du revenu par habitant ~ peine perceptible. En 1965, Ie taux brut de natalite etait de 36, Ie taux de fertilite total de 4,8 et Ie taux de mortalite infantile de 64. Une explosion demographique d'une telle ampleur etait vouee ~ avoir de formidables effets sociaux et economiques. Par exemple, on prevoyait une augmentation proche de 50 % de la population en Age de travailler (15 ans ou plus) entre 1957 et 1972. Ces caracteristiques demographiques, combinees avec de faibles taux d'~pargne et d'investissement (moins de 12 et 15 % respectivement) et une structure mono- exportatrice basee sur Ie sucre, rendaient les perspectives de sortie du cercle vicieux de la pauvrete plutOt maussades. Mais Ie paysage a ~te radicalement trans forme par la mise en oeuvre pers~v~rante de saines politiques macro-~conomiques et demographiques. La strat~gie de substituion des importations suivie dans les annees 1960 n'~tait pas une option viable ~ long terme, bien qu'elle ait aide les industriels ~ acquerir de l'exp~rience et permis l'enracinement d'une nouvelle culture industrielle. A partir de cette exp~rience, des incitations ont ~t~ offertes a des entreprises industrielles etrangeres pour qu'elles implantent des activit~s de main-d'oeuvre ~ Maurice et y transforment des matieres premieres import~es en produits finis d'exportation. En cons~quence, la structure de l'~conomie s'est egalement transform~e. Le pays a tire avantage des possibilites pr~sentes sur les marches internationaux et exploit~ ses propres ressources - une bonne infrastructure, une main-d'oeuvre alphabetis~e et flexible payee ~ des taux de salaire competitifs. Les exportations representent 63 % du PNB mais l'economie n'est plus comme auparavant exclusivement dependante du sucre. Les biens manufactur~s - en particulier les textiles - comptent maintenant pour 39 % des exportatons. Stimu1~s par une croissance r~guliere du revenu par habitant (3 % par an en moyenne entre 1965 et 1986), l'investissement et l'epargne interieurs ont augmente et depassent maintenant 20 % du PNB. La politique economique nationale a egalement promu un developpement equitable - spatialement (en reduisant Ie taux de croissance de la population urbaine), sectoriellement (par Ie biais de politiques des prix favorables ~ l'agriculture) , inter-generationnellement (grAce ~ des politiques conservatrices d'emprunt et de gestion de la dette). La constance de l'effort en matiere de valorisation des ressources humaines, se distinguant par Ie programme de population sans doute Ie plus efficace de la region, a place Maurice parmi les champions economiques de l'Afrique subsaharienne. Le taux de croissance de sa population (1 % par an entre 1980 et 1986) est Ie plus bas de la region et l'esperance de vie y atteint 68 ans (en 1987). D'autres indicateurs relatifs ~ la sante et ~ la fertilite signalent egalement une amelioration significative: Ie taux brut de natalit~ est de 19 (1987), Ie taux global de fertilite de 2,2 (1986), Ie taux de mortalite infantile de 24 (1987) et Ie taux de mortalite juvenile de 1 (en 1984, c~ntre 9 en 1965). Les taux de scolarisation de 100 % pour l'ecole primaire et de plus de 50 % pour l'ecole secondaire sont eleves pour un pays en developpement ayant Ie niveau de revenu par habitant de l'lle Maurice. - 53 - Cet exemple d~montre qu'il est possible, grAce A des mesures politiques appropri~es, de surmonter des conditions de d~part difficiles et de mettre en oeuvre une transformation ~conomique. - 54 - CHAPITRE 2 Strategie pour une croissance durable Pour une strategie de developpement de deuxi~me generation 2.1 Depuis quelques annees, les gouvernements des pays africains s'attachent avec opiniatrete a renverser la tendance apparemment inevitable a la baisse du niveau de vie en Afrique. Ils peuvent et doivent reussir, car l'Afrique cedait a cet egard au fatalisme, elle vouerait sa population a une catastrophe majeure. Dans leurs interventions a la session extraordinaire que l'Assemblee generale des Nations Unies a consacree a l'Afrique en 1986, les dirigeants africains ont bien souligne qu'ils etaient conscients de la necessite de proceder a des reformes radicales. Ce present chapitre s'inspire du debat qui se poursuit en Afrique et d'un bilan de l'experience des 30 derni~res annees. A partir des mesures deja entreprises, il presente les principaux elements d'une strategie a long terme qui permettrait a l'Afrique d'operer le redressement indispensable a une reprise de la croissance. 2.2 Le scenario cauchemardesque esquisse au chapitre 1 n'est nullement le fruit d'une imagination debridee. En fait, il risque fort de se realiser si des mesures energiques ne sont pas prises. Pourtant, l'Afrique poss~de des terres et des ressources minerales inexploitees et dispose de ressources humaines necessaires a leur mise en valeur. Au cours des cinq derni~res annees, des reformes ambitieuses ont ete entreprises un peu partout, et ces reformes sont un premier pas dans la bonne direction. Si courageuses qu'elles soient, elles sont incompl~tes, et laissent enti~res les difficultes qui entravent le developpement a long terme de l'Afrique. Les gouvernements des pays africains se doivent d'elaborer des programmes d'action coherents et complets susceptibles d'emporter une large adhesion. 2.3 Toute nouvelle strategie a long terme doit s'appuyer sur une analyse lucide des le90ns du passe. Pour la generation qui a suivi l'accession des pays africains a l'independance, le developpement consistait a imiter et a rattraper les pays de l'hemisph~re nord. Dans cette optique, les pays africains ont privilegie le developpement des industries manufacturi~res fabriquant des produits de substitution des importations, et laisse l'Etat etre le moteur de l'investissement industriel. Cette strategie a echoue, notamment parce qu'elle reposait sur de mauvaises adaptations de mod~les etrangers. La philosophie dont elle s'inspirait pouvait se resumer en un mot: modernisation; on entendait par la l'adoption par les pays de l'hemisph~re Sud des valeurs, des institutions et de la technologie des pays de l'hemisph~re Nord. Cependant, au cours des 30 derni~res annees, de multiples elements de cette conception du developpement ont ete remis en question. D'autres schemas ont ete proposes. Ils accordent la primaute au developpement de l'agriculture, et mettent l'accent non seulement sur le rOle des prix, des marches et du secteur prive, mais aussi sur le developpement des capacites locales, la participation des collectivites locales, la decentralisation et le respect de l'environnement. A ce jour, cependant, ces idees n'ont gu~re ete appliquees, ou l'ont ete sans conviction. 11 est temps de les mettre pleinement en pratique. - 55 - 2.4 Des non africains ont pris une part preponderante et excessive 8 la conception generale et 8 l'elaboration detaillee des strategies de developpement adaptees apres l'independance. L'Afrique compte aujourd'hui, 8 tous les echelons, des responsables et des dirigeants africains experimentes qui definiront la strategie future. Les partenaires exterieurs continueront cependant 8 jouer un rOle de soutien important. Ce n'est pas parce qu'ils recherchent l'autosuffisance et entendent prendre leur sort entre leurs mains que les pays africains doivent se couper de l'economie mondiale et refuser l'aide exterieure. Or, du fait en partie des politiques suivies par les pays de la region, l'Afrique est en passe de subir une double marginalisation : marginalisation economique, puisque, depuis 1960, sa participation aux echanges mondiaux est tombee de 3 % 8 moins de 1,5 %, et marginalisation au sein des instances qui prennent des decisions strategiques de portee mondiale, phenomene imputable 8 ce que les superpuissances se disputent moins Aprement que par Ie passe les faveurs de l'Afrique. Une telle mise 8 l'ecart aurait des consequences desastreuses pour la region. De plus, Ie developpement rap ide de l'economie mondiale, Ie rythme effrene de l'accroissement demographique et les menaces qui pesent sur l'environnement 8 l'echelle planetaire rendent ineluctable une interdependance de plus en plus etroite de tous les pays. Les pays africains et leurs partenaires exterieurs ont inter~t 8 asseoir plus solidement leur collaboration et 8 la rendre plus equilibree. Les elements clefs d'une nouvelle strategie 2.5 Pour que l'Afrique puisse acceder un jour 8 la prosperite, la prochaine generation devra commencer par jeter les bases d'une croissance durable et equitable: durable parce qu'il faut veiller 8 preserver la capacite productive de l'environnement, eguitable parce que l'equite est 8 la fois l'une des conditions de la stabilite politique et un facteur de croissance durable. 11 s'agit en l'occurrence, non de repartir des richesses, mais d'assurer un acces aux moyens de production et de soulager la pauvrete. La creation de richesses est, contrairement 8 la recherche de la rente, facteur de croissance. On peut accelerer la croissance en mettant les moyens de production 8 la portee des plus defavorises, et en ame1iorant leur productivite. Ces objectifs ne se rea1iseront certes pas du jour au lendemain. Pour les atteindre, il faudra renforcer les institutions et accroitre les capacites locales. C'est 18 une tAche de longue haleine qui exigera une action politique axee sur Ie long terme. 2.6 Afin de prosperer dans un monde ou s'exerce une concurrence de plus en plus vive, l'Afrique devra accroitre tres fortement la productivite de sa main-d'oeuvre, de son capital et de ses ressources naturelles. II lui faudra 8 cette fin : instaurer des conditions propices aux activites productives et 8 l'initiative privee en mettant en place l'infrastructure et les services necessaires; accroitre tres fortement la capacite d'adaptation au changement 8 tous les niveaux, du village 8 la haute administration. - 56 - 2.7 La crise de d~veloppement que traverse l'Afrique tient avant tout aux carences du secteur public et du secteur priv~. Le d~veloppement d'un pays d~pend fondamentalement de son aptitude a d~clencher des changements durables et a s'adapter a ces changements. En Afrique, l'appareil de la puissance publique a ~t~ plaqu~ sur des soci~t~s traditionnelles, et son mode d'organisation est souvent totalement ~tranger a la culture indigene. Les pays africains ont h~rit~ d'une ~conomie dualiste, dont Ie secteur moderne est rest~ extr~mement fragile. De nombreux gouvernements se sont montr~s incapables de faire face aux tensions politiques suscit~es par une modernisation rap ide et par l'instabilit~ de l'~conomie mondiale qui a caract~ris~ les ann~es 70 et 80. 2.8 Les programmes d'ajustement structurel du d~but des ann~es 80 tendaient a am~liorer la r~partition des res sources par des mesures qui visaient essentiellement a corriger les distorsions des prix et des march~s. Ces programmes n'ont fait que pr~parer Ie terrain pour une augmentation de la production. II est vite apparu qu'un d~veloppement r~el et durable exigerait une transformation des structures de production et que les individus, comme les institutions, soient mieux a m~me de s'adapter au changement. Autrement dit, il faut renforcer les institutions et investir dans les ressources hurnaines. Lee pas faits dans cette direction sont loin de suffire. C'est Ie d~veloppement entendu dans ce sens tres large qui constitue Ie theme du pr~sent rapport. Cette conception du d~veloppement est conforme a la strat~gie mettant l'accent sur la dimension hurnaine pr~conis~e r~cemment par la Commission ~conomique pour l'Afrique. Elle fait de la personne hurnaine la fin ainsi que Ie moyen du d~veloppement. 2.9 Le d~veloppement des capacit~s conditionne ~galement la progression vers l'autosuffisance. objectif principal du Plan d'action de Lagos. L'autosuffisance. absolurnent indispensable au d~veloppement a long terme de 1 'Afrique, comporte de toute ~vidence une dimension r~gionale. Jusqu'a pr~sent, l'on a beaucoup entendu les th~oriciens de la coop~ration et de l'int~gration r~gionales, mais les mesures concretes prises en ce sens ont ~t~ d~cevantes. Le moment est venu de passer r~solurnent aux actes : des propositions pr~cises sont ~nonc~es au chapitre 7. Pour une croissance durable et ~quitable 2.10 5i faible que soit Ie revenu par habitant dans la r~gion, il existe actuellement de multiples possibilit~s de r~pondre plus efficacement aux besoins fondamentaux de la population africaine. Cependant, Ie niveau de vie ne pourra progresser r~gulierement et durablement que si Ie rythrne de la croissance ~conomique d~passe nettement celui de l'accroissement d~mographique, comme Ie montre a l'~vidence ce qui s'est pass~ en Tanzanie. au Ghana et en Ethiopie. Quelles seront les sources de la croissance ~conomique? Dans quelle mesure la tres forte croissance d~mographique de l'Afrique et la d~gradation de plus en plus rapide de son environnement compromettent-elles Ie d~veloppement de la r~gion? Comment faire en sorte que les bienfaits de la croissance soient ~quitablement r~partis? - 57 - Les sources de la croissance 2.11 On s'accorde de plus en plus a reconnaitre que les strategies d'apres l'independance premiere generation insistaient trop sur une industrialisation rap ide orchestree par les pouvoirs publics. La capacite creee en vertu de cette politique est excessive eu egard a l'etroitesse des marches interieurs, et les Etats africains ont montre que l'esprit d'entreprise n'etait pas leur fort et qu'ils etaient de mauvais gestionnaires. En revanche, Ie secteur non structure prospere presque partout de fa90n spectaculaire, en partie parce qu'il echappe a l'emprise reglementaire des pouvoirs publics. Cet essor temoigne de la vitalite et de l'esprit d'entreprise des Africains, et du potentiel de la petite entreprise, trop longtemps negligee. La strategie de premiere generation a auss! neglige l'agriculture, secteur qui dispose d'un avantage comparatif indubitable. Dans l'immediat, c'est avant tout sur l'exploitation des terres que l'Afrique devra compter pour faire progresser les revenus. A plus long terme, Ie secteur industriel pourra certainement contribuer de plus en plus a la croissance economique des pays africains, a condition que ceux-ci adoptent des politiques qui stimulent les investissements prives et l'esprit d'entreprise. Dans les prochaines annees, cependant, c'est l'agriculture qui devrait etre Ie moteur principal de la croissance de l'economie africaine. 2.12 L'agriculture contribue actuellement au PIB des pays africains a raison de 35 % et a leurs exportations a raison de 40 %. Les rendements agricoles sont tres inferieurs a ce qu'ils pourraient etre. Meme si l'on tient pleinement compte des imperatifs ecologiques qui limitent les possibilites d'exploitation des terres, Ie potentiel d'expansion de la production agricole apparalt considerable. Ce potentiel varie evidemment selon les pays. A long terme, il est a prevoir que les terres arides seront de plus en plus delaissees au profit de regions plus riches dont la croissance sera stimulee par l'afflux de main-d'oeuvre resultant de cette migration selon un schema analogue a celui observe en COte d'Ivoire au cours des 30 dernieres annees. 2.13 Pour les raisons exposees au chapitre 4, i l semble possible de doubler Ie taux de croissance de l'agriculture africaine, pour Ie porter a 4 % par an, ce qui est indispensable pour que Ie niveau de vie puisse progresser. C'est la un objectif ambitieux. L'industrie, dont la place dans l'economie africaine est beaucoup plus modeste que celIe de l'agriculture pourrait, de ce simple fait, se developper a un rythme nettement plus rap ide que celle-ci. Cependant, l'essor de l'agriculture comme de l'industrie exige que les relations entre les deux secteurs soient convenablement renforcees. Dans la plupart des pays africains, ces relations sont laches du fait de l'insuffisance de l'infrastructure, de l'inadequation de la production industrielle aux besoins des ruraux et de l'incapacite de remedier a la fragmentation des marches ruraux et urbains. 2.14 L'epargne des agriculteurs forme la base du financement de la formation de capital dans Ie secteur industriel. et l'epargne de la population urbaine retourne en partie vers les campagnes. Au Kenya, par exemple, les ruraux qui ont migre vers les villes pour trouver du travail - 58 - envoient en moyenne 21 % de ce qu'ils gagnent A des proches rest~s au village. Les ruraux qui migrent vers les villes viennent grossir la main- d'oeuvre industrielle, tandis qU'un certain nombre de salari~s quittent l'industrie et d'autres branches non agricoles pour retourner travailler dans l'agriculture A laquelle ils apportent un regain de dynamisme. La croissance de l'agriculture stimule la demande de biens de consommation et d'intrants agricoles produits par Ie secteur industriel, cependant que la croissance de l'industrie stimule la demande de produits alimentaires et d'intrants destin~s aux agro-industries. 2.15 S'il est indispensable d'insister sur l'importance de l'agriculture, il ne faut pas pour autant rel~guer l'industrie dans un rOle mineur. La progression de l'industrie en Afrique pendant les 25 derni~res ann~es a ~t~ d~cevante et la croissance de la production s'est fortement ralentie ces derni~res ann~es. N~anmoins, si les pays africains adoptent des politiques viables, rien ne devrait emp~cher Ie taux de croissance de l'industrie de reprendre une courbe ascendantesa progression dans les ann~es 90 pour atteindre les 8 % dans une vingtaine d'ann~es. Bien entendu, certains pays pourront faire mieux encore. Cependant, pour que ces objectifs de croissance de l'industrie puissent se r~aliser, les politiques industrielles devront ~tre fondamentalement revues au d~but des ann~es 90. Le progr~s du secteur industriel en Afrique exigera avant tout Ie transfert des comp~tences n~cessaires en mati~re de gestion et de commercialisation et dans les domaines technologique et financier. Le plus facile serait, A cet ~gard, d'organiser une collaboration avec les investisseurs locaux qui disposent des comp~tences voulues et ont acc~s aux march~s. Cette collaboration implique toutefois une r~vision radicale des strat~gies industrielles. L'exp~rience des pays d'Asie et d'autres r~gions fournit A cet ~gard de solides points de rep~re et on trouve d~jA en Afrique de bons exemples de ce qu'il est possible de faire. 2.16 Le secteur indig~ne non structur~ compte de plus en plus de chefs d'entreprise africains capables de participer a une telle collaboration. Les statistiques de la comptabilit~ nationale pas sent presque sous silence la croissance spectaculaire du secteur informel. Au ZaIre, par exemple, on estime que la valeur ajout~e de ce secteur est 25 fois sup~rieure au chiffre officiel. Bien que souvent p~nalis~ par la politique ~conomique, ce secteur est Ie plus dynamique dans de nombreux pays africains et distance de beaucoup tous les autres secteurs pour ce qui est des cr~ations d'emplois. 2.17 La croissance d~pend en premier lieu de 1 'agriculture , et en second lieu de l'industrie, mais d'autres secteurs peuvent ~galement y apporter une contribution essentielle. L'Afrique se doit d'exploiter toutes les possibilit~s qui s'offrent A elles. Les industries extractives, la production p~troli~re et Ie tourisme ont un bon potentiel de croissance. Dans les ann~es 80, les industries extractives ont contribu~ A hauteur de 13 % en moyenne au PIB des pays africains et leur ont rapport~ en 1988 environ 8 milliards de dollars de recettes en devises. Cependant, la croissance du secteur a ~t~ extr~mement lente durant la d~cennie, n'atteignant, avec 0,2 % par an, que Ie dixi~me de la moyenne mondiale. Dans Ie secteur minier comme dans l'industrie manufacturi~re, l'aptitude des pays A attirer des investisseurs ~trangers sera d~terminante. Bien que - 59 - Ie continent africain rec~le des r~serves prouv~es particuli~rement abondantes, les grandes compagnies mini~res ont pr~f~r~ investir ailleurs, attir~es par des conditions plus int~ressantes. Quant A la prospection, les projets de grande envergure ont ~t~ relativement rares depuis dix ans. 11 en est de m@me pour Ie p~trole. On trouvera au chapitre 5 des suggestions pour une r~orientation qui pourrait contribuer A acc~l~rer la croissance du secteur et A la porter de 3 a 5 %. Cependant, Ie d~veloppement de l'exploitation des ressources min~rales et p~troli~res ne doit pas @tre consid~r~ comme une solution de facilit~ qui dispenserait les pays africains de s'imposer une discipline financi~re et d'adopter des politiques viables. Comme Ie mont rent l'exemple du Nig~ria et celui de la Zambie, les b~n~fices du p~trole et des produits miniers, s'ils sont mal employ~s, peuvent ais~ment saper les fondements du d~veloppement a long terme. 2.18 Alors que sa progression mondiale est spectaculaire, Ie tourisme ne s'est que tr~s lentement en Afrique. Le total mondial des d~velopp~ d~penses de consommation consacr~es au tourisme est de l'ordre de 160 milliards de dollars et ces d~penses augmentent de 15 % par an. La part de l'Afrique atteint tout juste 2 % et elle est en diminution. N~anmoins, Ie secteur du tourisme est en plein essor dans quelques pays africains. Par exemple, Ie tourisme rapporte davantage de devises au Kenya qu'aucun des produits de base qu'il exporte. Le tourisme procure ~galement des recettes importantes a la Gambie, au S~n~gal, A Maurice et aux Seychelles. L'Afrique dispose de ressources touristiques remarquables qui, dans des pays comme l'Ethiopie, Madagascar et la Tanzanie, sont pratiquement inexploit~es. En Europe, les lieux de vill~giature sont en passe d'atteindre leur point de saturation, mais la demande touristique devrait continuer d'augmenter fortement. Les Europ~ens s'int~ressent donc de plus en plus A des destinations touristiques lointaines. Si l'Afrique ne devient pas plus accueillante, les touristes risquent fort de lui pr~f~rer l'Asie ou l'Am~rique latine. 2.19 II en va pour l'industrie et l'agriculture comme pour Ie tourisme : les march~s existent, mais ils sont Ie lieu d'une concurrence acharn~e et 11 faut s'attendre a ce que cette concurrence devienne plus vive encore dans les prochaines ann~es. La structure de la demande ~volue, de m@me que la technologie mise en oeuvre pour la satisfaire. Ne r~ussiront que ceux qui sauront s'adapter. L'avantage comparatif se mesure de plus en plus A l'intelligence des march~s, a la maltrise technologique et a l'adaptabilit~. lIne suffit plus de disposer d'une main-d'oeuvre abondante. 2.20 Eu ~gard A tous ces facteurs, il devrait ~tre possible de renverser dans les ann~es 90 la tendance au d~clin du revenu par habitant qui s'est amorc~e r~cemment en Afrique et de jeter les bases d'une croissance modeste par la suite. 11 faudra, pour y parvenir, proc~der a des r~formes radicales, jeter un regard neuf sur la contribution potentielle du secteur rural et revoir la strat~gie d'industrialisation et la strat~gie de mise en valeur des ressources humaines. Mais il faudra auss! prendre des mesures pour ralent!r l'accro!ssement d~mographique dans la r~gion. - 60 - Freiner l'accroissement d~mographique 2.21 Porter dans les prochaines ann~es Ie taux de croissance annuel du PIB de l'ensemble des pays africains de 2 % - taux moyen pour les dix derni~res ann~es - A 4 % ne serait pas un mince succ~s. Cependant, Ie revenu par habitant n'augmentera gu~re si, parall~lement a cette progression, la population continue d'augmenter a un rythme effr~n~. A long terme, un rel~vement sensible du niveau de vie n'est possible qU'au prix d'un ralentissement de l'accroissement d~mographique. Si les tendances actuelles se poursuivent, l'Afrique ~prouvera de plus en plus de difficult~ a nourrir ses enfants et a absorber les nouveaux demandeurs d'emploi. Lorsque les moins de 18 ans constituent la moiti~ de la population, la population active doit assumer une charge ~crasante. Traditionnellement, les enfants participent largement aux travaux agricoles; s'ils vont a l'~cole - comme ils Ie doivent pour devenir des adultes plus productifs - ils ne peuvent plus participer aux travaux des champs. Par ailleurs, les jeunes sont de plus en plus nombreux dans les zones urbaines OU la demande de main-d'oeuvre adolescente est beaucoup plus faible que dans les campagnes. Ainsi, a mesure que progresse Ie d~veloppement, les transferts de revenus entre g~n~rations - traditionnellement des enfants aux parents - tendent a s'inverser. 2.22 La situation d~mographique de l'Afrique est unique. Sa population s'accroit a un rythme sans pr~c~dent dans l'histoire de l'humanit~. En Asie et en Am~rique latine, l'am~lioration des services de sant~ et la prolongation de la dur~e moyenne des ~tudes se sont accompagn~es d'un ralentissement de l'accroissement d~mographique, mais en Afrique, c'est l'inverse qui s'est produit. En 1960, Ie taux annuel d'accroissement d~mographique ~tait, comme en Asie du Sud, de l'ordre de 2,5 % en Afrique et il atteignait 2,9 % en Am~rique latine. Aujourd'hui, la population de l'Asie du Sud n'augmente plus que de 2,1 % par an, et celie de l'Am~rique latine de 2,5 %, alors que Ie taux d'accroissement est pass~ en Afrique a 3,2 %. M@me si, du jour au lendemain, Ie taux de f~condit~ tombait en Afrique a deux enfants par couple, la population du continent continuerait d'augmenter pendant 60 A 70 ans. Si les tendances actuelles se poursuivent, elle doublera en 22 ans. Aucune r~gion du monde n'a jamais r~ussi a se d~velopper avec un pareil taux d'accroissement d~mographique. 2.23 En Afrique, 4 millions d'enfants viennent chaque ann~e grossir les rangs de la population d'&ge scolaire (augmentation de 3,22 I). Chaque ann~e, il faut nourrir, habiller, soigner un surcroit de population du m@me ordre, ce qui impose de lourdes ponctions sur les ressources publiques et priv~es, ne serait-ce que pour maintenir l'~tat sanitaire, le niveau d'~ducation et Ie niveau nutritionnel de la population. II ne reste pas assez A ~pargner et investir pour que Ie niveau de vie puisse progresser. 2.24 Les terres demeurent abondantes dans Ie continent, mais dans certains pays, l'agriculture et l'environnement se ressentent d~ja du passage de l'abondance a la p~nurie. Cette transition a pris des si~cles en Europe et en Asie. En Afrique sub-saharienne, elle se d~roule en quelques dizaines d'ann~es. L'Afrique change, et n'est plus ce continent aux vastes espaces vides que l'on se repr~sentait autrefois. Dans - 61 - certaines r~gions (notamment dans une bonne part du Sahel, au Burundi, au Rwanda, dans l'est du Nig~ria, dans l'ouest du Cameroun et au Kenya), la pression d~mographique est d~ja si forte qu'elle risque de provoquer une p~nurie de terres arables et d'autres ressources naturelles. II est vrai aussi que de nombreuses r~gions sont nettement sous-peupl~es. Certaines d'entre elles pourraient facilement faire vivre une population beaucoup plus nombreuse, mais l'accroissement d~mographique y est, comme ailleurs, si rap ide que leur population est r~duite a la mis~re. S'il est urgent de mettre un frein a l'explosion d~mographique en Afrique, ce n'est pas parce que la population du continent est trop nombreuse dans l'absolu, mais parce que son taux d'accroissement est trop rap ide pour que l'~conomie puisse suivre. 2.25 L'accroissement acc~l~r~ de la population de l'Afrique a des cons~quences ecologiques particuli~rement inqui~tantes. Dans plusieurs pays, Ie surpeuplement met a rude ~preuve Ie patrimoine de terres agricoles. Dans de nombreuses r~gions, les terres traditionnellement d~volues a l'agriculture sont d~ja surexploit~es, et pour faire face a l'expansion des besoins de la population, il faut mettre en culture des terres dont l'equilibre ~cologique est plus fragile. Tant que l'agriculture n'est pas modernisee, il en r~sulte une desertification rapide, Ie recul des for~ts et l'appauvrissement de la couverture veg~tale. Pourtant, l'Afrique pourrait faire vivre une population plusieurs fois superieure a sa population actuelle si elle adoptait de saines pratiques et certaines innovations technologiques. Cela ne peut se faire du jour au lendemain, dans l'intervalle, sa population continue d'augmenter rapidement, elle est vou~e au desastre. 2.26 Les Africains consid~rent encore que leur continent est riche en terres cultivables et manque de main-d'oeuvre, et rares sont ceux qui ont pris conscience des avantages qU'apporterait une r~duction de la tail Ie de la famille. La dimension de la famille est, en Afrique, une question tr~s delica,te consideree comme devant relever avant tout de decisions individuelles. Les taux de mortalite infantile devront, en gen~ral, @tre baiss~'s avant que les parents consacrent a reduire la tail Ie de leur famille. Chaque pays doit, bien entendu, definir sa politique en la mati~re en fonction de ses particularites culturelles et des caracteristiques de son economie. La mani~re dont les donateurs abordent la question est souvent inad~quate ou inefficace. Mais les realites d~mographiques auxquelles est confront~e l'Afrique sub-saharienne demeurent : l'accroissement exceptionnellement rapide de la population entrave la croissance ~conomique et la progression du niveau de vie, accel~re la degradation de l'environnement et, partant, compromet gravement Ie d~velclppement a long terme de la r~gion. 2.27 La conjonction d'une croissance demographique rapide, d'une modern,isation de l'agriculture et de leurs cons~quences pour l'environnement sont de dures realit~s qu'il faut se garder d'esquiver. Elles appellent un changement aussi radical des valeurs de la societ~ que celui qui s'est produit. La strat~gie future de developpement sera1t entach~e d'une lacune tr~s grave s1 elle ne pr~voya1t pas des mesures v1sant a freiner l'accr01ssement d~mographique. (Voir Chapitre 3.) S1 l'Afrique se fixait simplement pour object1f d'obtenir une baisse de - 62 - f~condit~ de l'ordre de celIe r~alis~e par d'autres pays en d~veloppement, Ie taux de croissance d~mographique se situerait A 2,75 % par an en moyenne au cours de la p~riode 1990-2020. Emploi et salaires 2.28 L'accroissement rapide de la population pose un probl~me aigu dans Ie domaine de l'emploi. La cr~ation d'emplois pour une population d'dge actif qui augmente rapidement doit @tre un objectif primordial. La moiti~ pratiquement des nouveaux demandeurs d'emploi des 30 prochaines ann~es sont d~ja n~s. II s'ensuit que m@me si la population n'augmentait plus qu'au taux de 2,75 % de 1990 A 2020, la main-d'oeuvre continuerait A croitre au rythme de plus de 3 % par an. Pour limiter Ie taux de chOmage A 10 % d'ici 2020, il faudrait augmenter l'emploi de 3,4 % par an environ. C'est-a-dire. en d'autres termes, qu'il faudra cr~er d'ici 2020 pr~s de 380 millions de nouveaux emplois (soit plus du double du niveau actuel) (voir Tableau 2.1). 2.29 L'agriculture occupe plus des deux tiers de la main-oeuvre en Afrique, et elle continuera a etre une source importante de nouveaux emplois au cours de la prochaine g~n~ration. L'agriculture, les industries laiti~res et la sylviculture ou toutes activit~s a forte intensit~ de main- d'oeuvre pourront se d~velopper rapidement. La capacit~ de l'agriculture a absorber de la main-d'oeuvre n'en reste pas moins limit~e. Pour assurer la s~curit~ alimentaire a l'ensemble du continent. la consommation alimentaire moyenne par habitant devrait augmenter de 1 % par an environ au cours de la p~riode 1990-2020 (voir Chapitre 3). Pour y parvenir et pour assurer la n~cessaire croissance des exportations agricoles, la productivit~ de la main-d'oeuvre agricole devrait augmenter de 1,5 % par an. En augmentant la production agricole de 4 %. on n'augmenterait donc les emplois agricoles que de 2,5 % par an de plus. ce qui. en fait, permettrait au secteur d'absorber pr~s de la moiti~ des nouveaux demandeurs d'emplois. 2.30 Meme si on appliquait Ie sc~nario Ie plus optimiste, une fraction seulement des nouveaux demandeurs d'emploi se pr~sentent chaque ann~e sur Ie march~ du travail pourrait esp~rer trouver du travail dans Ie secteur moderne. Le secteur public souffre d'une pl~thore chronique de main-d'oeuvre et c'est d'une r~duction d'effectifs, et non pas de nouvelles recrues, dont il a besoin. Dans certains pays, la contraction du budget de l'Etat a d~jA contraint les autorites a reduire les effectifs de la fonction pUblique. Les grandes industries modernes ne seront une source d'emplois importante que dans les quelques pays capables de les developper rapidement dans les prochaines decennies. En revanche, les petites ou moyennes entreprises peuvent tenir une place importante dans les branches du secteur manufacturier fabriquant des produits a faible intensite technologique, tels que les meubles, les vetements et les articles menagers. Ces entreprises et les entreprises du secteur du bAtiment et des travaux publics pourraient @tre une source importante d'emplois nouveaux. A tr~s long terme, c'est sur l'expansion des entreprises du secteur moderne et des services auxquels elles font appel que les pays africains doivent compter pour cr~er des emplois. Cependant, dans la majeure partie des pays africains, ces entreprises n'absorberont dans les annees qui viennent qu'une petite partie des nouveaux demandeurs d'emploi. On ne peut au mieux - 63 - esp~rer voir croitre les emplois salari~s du secteur moderne qu'A un taux de 3 A 4 % par an. 2.31 Ce sont les petites ou tr~s petites entreprises relevant pour la plupart du secteur informel qui devront absorber la majeure partie des nouveaux demandeurs d'emploi. Le secteur du bAtiment, par l'interm~diaire notamment des petites entreprises familiales n'employant que quelques ouvriers, devra sans doute, pour r~pondre A l'expansion rapide de la demande de logements, emboucher une masse de main-d'oeuvre. II en va de m~me des entreprises qui construiront une bonne partie des nouvelles infrastructures - ~coles, dispensaires, petits r~seaux d'~goOts, routes rurales et autres ~l~ments de l'infrastructure des campagnes et des petites villes. Et ce ne sont lA que deux exemples, parmi d'autres, des multiples activit~s et services que l'on pourrait d~velopper. 2.32 L'emploi dans Ie petites et tr~s petites entreprises devra croitre de 6 % par an en moyenne. II n'est pas d~raisonnable de penser que la productivit~ y augmentera au m~me rythme au moins dans Ie secteur agricole (1,5 % par an), et qU'en croissant au taux de 7,5 % par an, Ie secteur des petites et moyennes entreprises contribuera A hauteur de 1,5 % , c'est-A-dire dans la m~me proportion que les autres secteurs A la croissance du Pib (voir Tableau 2.2). Cette expansion est ~galement n~cessaire pour cr~er une demande effective de produits agricoles. 2.33 La l~gislation salariale a un impact direct sur la cr~ation d'emplois dans Ie secteur moderne. Les gouvernements ont en g~n~ral tent~ de fixer Ie salaire minimum A un niveau sup~rieur A celui d~termin~ par les lois du march~. Cette reglementation n'est gu~re respectee dans Ie secteur informel, mais pour les entreprises qui la respectent, elle tend A grever les coOts et A nuire A la competitivite. L'experience montre que ce genre de r~glementation a globalement pour effet de freiner les creations d'emplois. 2.34 L'exemple du Kenya illustre bien les cons~quences de la reglementation des salaires : dans ce pays, la reglementation a eu pour effet de faire quadrupler les salaires reels entre 1949 et 1968 (et de les porter. A un niveau plusieurs fois sup~rieur A celui du revenu agricole moyen). Par la suite, Ie Gouvernement k~nyen a cesse de relever autoritairement les salaires du secteur prive et laisse jouer les mecanismes du marche du travail. En l'espace de dix ans, Ie salaire d'un ouvrier non qualifie a ~te ramen~ A un niveau A peine sup~rieur A celui du revenu agricole moyen, et la distorsion des revenus en faveur des villes s'est donc trouv~e pratiquement eliminee. Cette correction a eu un effet remarquable sur l'emploi. Entre 1958 et 1968, Ie nombre des emplois du secteur moderne n'avait progress~, dans les zones urbaines, que de 1,6 % par an; entre 1968 et 1978, il a augmente de plus de 6 % par an (cette progression ne s'explique que partiellement par l'accel~ration de l'embauche dans Ie secteur public). Dans les annees 80, Ie Gouvernement a limite les hausses de salaires dans Ie secteur public A 75 % du taux de l'inflation et du fait de cette politique, les salaires reels du secteur priv~ ont continue A baisser. - 64 - 2.35 Les le~ons a tirer de ces exemples sont ~videntes. Les pouvoirs publics doivent s'abstenir d'intervenir sur le march~ du travail, sauf pour prot~ger la sant~ et la s~curit~ des travailleurs. Le march~ du travail fonctionne fort bien si ses m~canismes ne sont pas fauss~s. Les interventions dict~es souvent par la politique, ont contraires a la logique de l'~conomie. La fixation d'un salaire minimum par voie l~gislative, les r~glements qui restreignent la libert~ d'embauche et de licenciement et d'autres interventions du m~me genre tendent a gr~ver les conts, a r~duire la comp~titivit~ et a freiner les cr~ations d'emplois. De m~me, dans les pays ou le secteur public est le principal pourvoyeur d'emplois et est pris pour mod~le par les autres secteurs - ce qui est loin d'etre rare - la fixation des traitements de la fonction publique a un niveau sup~rieur a celui du march~ tend a gr~ver les charges salariales dans l'~conomie tout enti~re. Cette situation a cess~ dans des pays comme le Ghana, le Lib~ria, l'Ouganda et le Soudan ou les salaires r~els se sont effondr~s, mais elle subsiste ailleurs, notamment dans les pays de la zone franc CFA. Dans les 30 prochaines ann~es, l'expansion rap ide de la main-d'oeuvre tendra a faire baisser les salaires. Toute tentative visant a contrer cette tendance par des mesures administratives est, a long terme, vou~e a l'~chec, et elle aura a court terme pour effet de freiner la production et les cr~ations d'emplois. 2.36 Les exploitations agricoles et les entreprises ne pourront accroitre leur production et cr~er des emplois au rythme requis que si elles sont concurrentielles sur les march~s int~rieurs et ~trangers, ce qui suppose que les salaires refl~tent la productivit~ du travail dans l'agriculture et dans l'industrie. La strat~gie future de d~veloppement devra donc laisser, pour l'essentiel, les forces du march~ d~terminer Ie niveau des salaires. Urbanisation et migrations 2.37 L'accroissement rapide de la population a pour corollaire une urbanisation non moins rap ide , ce qui n'a en soi rien d'inqui~tant puisque urbanisation et d~veloppement ~conomique se renforcent mutuellement. Les migrations sont motiv~es par l'attrait ~conomique des villes, et ne doivent pas etre d~courag~es. A mesure qu'elles se d~veloppent, les villes peuvent mettre a profit des ~conomies d'~chelle et tirer parti de compl~mentarit~s qui leur permettent de d~passer la productivit~ des campagnes. L'urbanisation est un facteur de modernisation et de changement, et les villes constituent donc Ie centre nerveux du processus de d~veloppement. Cependant, il doit y avoir ~quilibre ~conomique entre les villes et l'arri~re-pays. 2.38 La croissance du secteur agricole suscite une demande de services de transport et autres services d'appui et la cr~ation d'industries de traitement des produits agricoles. L'augmentation du revenu disponible des agriculteurs stimule aussi la demande de biens et services d'origine urbaine. Les effets multiplicateurs jouent en g~n~ral tres fortement : cette demande contribue a son tour a faire progresser les revenus et l'emploi dans les villes, et cette progression tend non seulement a accroitre la demande de produits agricoles, mais aussi a am~liorer la productivit~ des industries productrices d'intrants agricoles. - 65 - Enfin, la rationalisation du transport, de l'entreposage et de la commercialisation des produits agricoles autorise un relevement des prix agricoles A la production alors que les prix de detail diminuent. 2.39 Si l'on compare l'evolution desdivers pays au cours des 30 dernieres annees, ilapparalt que ceux qui ont poursuivi des politiques menant A un developpement soutenu et A une agriculture diversifiee sont aussi ceux qui ont Ie mieux equipe leurs villes et developper leur reseau urbain. Les pays qui ont etouffe ou neglige leur agriculture sont ceux dont l'infrastructure urbaine est la plus degradee, m@me quand les industries extractives leur ont valu de larges excedents. Agriculture et developpement urbain vont A la fois de pair. 2.40 II n'en reste pas moins que nombre de gouvernements africains ont mene des politiques macroeconomiques favorisant nettement Ie secteur urbain. Leurs politiques commerciales et leurs politiques de credit pas sees ont encourage la creation de grandes industries A forte intensite de capital, implantees dans les grandes villes, tandis que celles menees en matiere d'approvisionnements agricoles, de subventions alimentaires et de taux de change tendraient A maintenir les prix des produits alimentaires A un bas niveau, au profit des consommateurs des villes et au detriment des agriculteurs. En raison pour partie de cette tendance A favoriser les villes, Ie rythme de l'urbanisation a jusqu'A present ete nettement plus rap ide dans les pays africains qu'il ne l'a ete en moyenne dans les autres pays en developpement. Les imperatifs de la rationalite economique comme de l'equite appellent une politique neutre. Les mesures d'ajustement que certains pays ont recemment ete contraints de prendre ont, dans plusieurs cas, tres fortement reduit les distorsions favorisant les villes, et ont eu une incidence marquee sur les revenus des citadins. En Tanzanie, les revenus agricoles reels ont progresse de 5 % entre 1980 et 1984, tandis que les salaires urbains diminuaient de 50 %; au Ghana, durant la m@me periode, les revenus agricoles sont restes stables, tandis que les revenus des citadi.ns diminuaient de 40 %; en COte d'Ivoire, Ie revenu moyen des citadi.ns, qui en 1980 etait 3,5 fois superieur A celui des ruraux, n'etait plus que Ie double en 1985. Au Nigeria, la progression des revenus agricciles a incite certains citadins A revenir, au moins temporairement, a l' agri cuI ture. 2.41 Si par Ie passe les citadins de maints pays africains ont beneficie d'investissements subventionnes d'infrastructure, les entreprises urbaines, et notamment les petites et moyennes entreprises A qui on doit Ie gros des nouveaux emplois, p§.tissent de l'insuffisance et du peu de fiabilite des services d'infrastructure. Pour assurer Ie bon fonctionnement des villes africaines et, partant, la croissance economique, il faudrait que les principaux services urbains soient financierement autonomes et que les collectivites locales mobilisent des ressources propres au lieu de compter sur Ie gouvernement central. Les sommes investies par Ie passe dans certaines grandes villes - Lusaka et Brazzaville, pour n'en citer que deux -semblent disproportionnees quand on les compare A la maigre infratructure de villes moyennes et petites. Les avantages de l'urbanisation dependent en partie du bon fonctionnement des reseaux quipermettent aux agriculteurs d'ecouler leur production sur les marches nationaux et internationaux; il est donc imperatif qU'une part - 66 - suffisante des investissements publics d'infrastructure aille aux villes moyennes, comme on l'a fait au Kenya. 2.42 Etant donn~ que la population de l'Afrique va plus que doubler entre 1990 et 2020, certaines r~gions seront soumises a une tr~s forte pression d~mographique, ce qui rendra n~cessaire des migrations internationales. Compte tenu des tendances pass~es et de ce que les diff~rents pays sont plus ou moins riches de ressources, il semble raisonnable de pr~voir des taux de migration internationale pouvant atteindre 1 % par an. 2.43 Ces migrations ne seront pas un ph~nom~ne nouveau. La population africaine a toujours ~t~ extr~mement mobile. Avant l'accession des pays africains a l'ind~pendance, d'importantes migrations avaient lieu d'un territoire a l'autre, sur de longues distances, a travers les frontieres impos~es par les puissances coloniales. Depuis l'ind~pendance. la COte d'Ivoire a accueilli plus de 2 millions de migrants venus du Sahel. L'ouverture des fronti~res ivoiriennes aux travailleurs migrants a eu des effets ~conomiques extr~mement b~n~fiques aussi bien pour la COte d'Ivoire que pour les pays d'origine de ces travailleurs (voir l'encadr~ 7.7). Les migrants procurent au pays d'accueil une main-d'oeuvre bon march~, et envoient des sommes importantes dans leur pays d'origine. Etant donn~ les tendances d~mographiques actuelles, il est indispensable que les pays africains facilitent les migrations au lieu de chercher ales freiner. Pour une croissance durable 2.44 Une croissance durable appelle une strat~gie de d~veloppement qui ne risque pas de compromettre la prosp~rit~ des g~nerations futures. Recemment encore, les politiques d~finies par les pays pays africains et les programmes des donateurs laissaient presque enti~rement de cOte la question de la durabilite du developpement. La croissance, envisagee dans une optique a court terme, ne pouvait ~tre entretenue qU'au prix d'un endettement exterieur de plus en plus lourd, de politiques du credit inflationnistes, de l'epuisement rapide des ressources naturelles et de la degradation des syst~mes ecologiques. La croissance ne saurait durer si elle est entretenue de cette fa90n. 2.45 Si la croissance epuise progressivement Ie capital d'un pays, il est inevitable qu'elle se ralentisse au bout d'un certain temps. Par capital, nous entendons ici non seulement les ~quipements, les machines et les infrastructures, mais aussi les ressources naturelles telles que la terre, l'eau et les mineraux, et Ie capital humain (capital de connaissances, capital sante, organisation sociale). Pour garantir une croissance durable, la strategie de developpement de deuxi~me gen~ration devra done mettre l'accent a la fois sur la conservation des ressources naturelles et sur la mise en valeur des ressources humaines. A la diff~rence du capital materiel, Ie capital humain s'enrichit lorsqu'on l'utilise. En outre, la sante et l'education des enfants d~pendent de la sante et de l'education de leurs parents. 2.46 Les ressources naturelles renouvelables, si elles sont gerees convenablement, peuvent durer ind~finiment. Cependant, on a partout un peu - 67 - tendance ales epuiser ou ales detruire par surexp10itation. Dans toute l'Afrique sub-saharienne, 1es for@ts sont en recu1, 1a desertification reduit 1a superficie des terres cu1tivab1es, des esp~ces anima1es et vegeta1es disparaissent et 1a qua1ite de l'air et de l'eau se degrade. Ces pertes ont des consequences non seu1ement pour 1a generation presente, mais aussi pour les generations futures. La viabilite ecologique du deve10ppement est une question crucia1e qui se pose dans tous 1es secteurs. 2.47 La protection de l'environnement et Ie deve10ppement economique sont intimement lies. L'environnement est un reseau d'ecosyst~mes complexe. Les arbres et l'herbe, par exemp1e. ne sont pas seu1ement une source de combustible et de fourrage : i1s contribuent a 1a fertilite des sols, i1s emp@chent l'erosion, retiennent l'eau, amortissent les variations climatiques et font partie de l'habitat de la faune. La preservation de ces ecosyst~mes est indispensable au bien-~tre et a la survie des ~tres humains. 2.48 En Afrique sub-saharienne, l'environnement est vulnerable. La proportion de sols fragiles atteint 80 %, et 47 % des terres sont trop arides pour se pr~ter a l'agriculture non irriguee; la hauteur de precipitations peut varier d'une annee sur l'autre de 30 a 40 %, ce qui est enorme. Dans la p1upart des regions, la pression demographique est telle que les agriculteurs sont contraints de mettre en exploitation des terres marginalement cultivables, ce qui entraine Ie recul des for~ts, une grave erosion des sols et une baisse de la productivite agricole. Les plus defavorises se procurent Ie combustible dont ils ont besoin en coupant Ie bois qui leur tombe sous la main. 11 en resulte que les centres de peuplement sont entoures d'une ceinture de plus en plus large de terres denud~es et steriles que leurs habitants doivent consacrer de plus en plus de temps et de travail au ramassage du bois de feu et aux cultures indispensables a leur survie et ont, de ce fait, de moins en moins de temps et d'energie a consacrer a l'amelioration de leur sort. Lorsque les atteintes portees a l'environnement se soldent par la reduction de la super:ficie des terres cultivables, la destruction partielle de la faune et de la flore sauvages, la diminution des ressources en eau, voire des modifications climatiques locales, les revenus et la qualite de la vie ne peuvent que diminuer au detriment toujours des plus defavorises. 2.49 Si l'on n'y met pas un frein, la degradation de l'environnement peut B.tteindre un seuil critique. Dans Ie Sahel, l'accroissement demographique et Ie recul tr~s rap ide des for~ts ont declenche une reaction en chaine qui se traduit par une reduction de la productivite biologique et economique telle qu'aujourd'hui la region a Ie triste privil~ge de se classer, par sa superficie, au premier rang des zones menacees par la desertification. La population rurale cherche refuge dans les villes et la mis~re est endemique. La population urbaine du Sahel a quadruple en 20 ana. La pollution atmospherique et la pollution de l'eau dans les agglomerations urbaines et l'augmentation de la consommation urbaine de mati~res premi~res telles que Ie bois de feu accel~rent Ie deboisement et la degradation de l'environnement. - 68 - 2.50 Une gestion rationnelle de l'environnement permettrait de briser ce cercle V1C1eux. Des programmes judicieux de plantation d'arbres, par exemple, r~duiraient notablement les risques de degradation des sols. Au Rwanda, l'approvisionnement en bois de feu et en fourrage et la lutte contre l'~rosion sont facilites par l'existence de for~ts communales et de pepinieres de village ainsi que par des programmes de plantation d'arbres et d'agroforesterie. Dans toute 1 'Afrique , il faudrait mobiliser les ruraux pour qu'ils plantent des arbres autour de leurs habitations. 2.51 Pour certains pays, une degradation de l'environnement aura des consequences imm~diates et aisement mesurables: c'est Ie cas par exemple du Kenya, dont Ie quart des recettes en devises lui sont procurees par des touristes attires par les beautes de la faune et de la flore sauvages. Pour d'autres, l'incidence de l'epuisement des ressources naturelles et de la pollution sur la croissance economique apparait moins clairement. Nombre des cofits entralnes par la degradation de l'environnement ne se manifestent qu'apres plusieurs annees ou dizaines d'annees et les indicateurs classiques du niveau de vie, tel que Ie PIB par habitant, ne les refletent pas. De plus, les depenses consacrees a la lutte contre la pollution, par exemple, sont considerees comme des depenses de consommation et non pas comme des investissements. 2.52 Lorsque l'accroissement rapide de la population va de pair avec l'erosion de la base de ressources, la gestion de ces ressources fait inevitablement l'objet de controverses alimentees par des conflits d'inter~ts. Les questions d'environnement font entrer en ligne de compte des effets externes. 11 faut s'attendre a ce que les groupes les plus puissants tentent de faire assumer les cofits ecologiques par les groupes plus faibles. 11 peut arriver ainsi que des pays developpes essaient de faire regler leur facture ecologique par des pays en developpement. Ces derniers devraient, par exemple, s'opposer vigoureusement a ce que les pays developpes exportent chez eux leurs dechets toxiques. 2.53 Jusqu'a present, la protection de l'environnement a consiste a investir dans des programmes de reduction de la pollution, de reboisement ou de gestion des ressources en eau, etc, con9us d'apres les resultats d'etudes d'impact ecologique realisees projet par projet. Ces programmes sont certes utiles mais sont insuffisants. Cette approche fragmentaire vise les symptOmes plutOt que les causes profondes des problemes ~cologiques. Les strategies de protection de l'environnement devraient a l'avenir ne pas se limiter a l'impact des projets et traiter des problemes ecologiques dans leur globalite, en tenant expressement compte des relations intersectorielles et des problemes qui peuvent se repercuter sur plusieurs generations. Dans cette optique, quelques pays africains ~laborent des plans d'action pour la protection de l'environnement. Ces plans tendent a creer les conditions d'une croissance durable par un ralentissement de l'accroissement demographique et par des modifications du r~gime foncier, des methodes d'elevage et des methodes de culture. L'elaboration de ces plans a donne lieu a des debats ouverts qui devraient favoriser la creation d'un consensus sur les mesures a prendre et en faciliter l'application de ces mesures grAce a une large adhesion de la population (voir l'encadre 2.1). - 69 - 2.54 La d~gradation des ressources nature lIes continuera-t-elle de compromettre la croissance ~conomique des pays africains? La reponse a cette question d~pendra pour une large part de la place que les probl~mes ecologiques tiendront dans les pr~occupations des pouvoirs publics, et de leur volont~ de prendre des mesures impopulaires pour les r~soudre. 11 faudra un certain courage politique pour integrer la gestion des res sources naturelles aux plans nationaux de developpement ~conomique. Les pays africains, pour surmonter les obstacles financiers et institutionnels auxquels ils se heurteront a cet ~gard, devront pouvoir compter sur une aide ext~rieure concessionnelle importante. Etant donn~ que la conservation des res sources naturelles est conforme aux int~rets de la communaut~ internationale tout enti~re, cette aide semble se justifier amplement. On pourrait envisager une formule selon laquelle l'assistance serait fournie sous r~serve de la mise en oeuvre de programmes viables de protection de l'environnement. Faute de tels programmes, l'assistance ne saurait procurer aux pays ben~ficiaires des avantages durables. Equit~ et recul de la pauvrete 2.55 La croissance ne s'accompagne pas necessairement d'un recul de la pauvret~ et n'est pas forc~ment une garantie de s~curit~ alimentaire. Les strat~gies futures de d~veloppement des pays africains doivent donc tendre express~ment a att~nuer la pauvret~ et a am~liorer la repartition des revenus. Les politiques suivies jusqu'a pr~sent tendaient a favoriser l'~lite urbaine par rapport aux ruraux d~munis, et les hommes par rapport aux femmes. La mise en place d'un r~gime d'incitations neutre serait une premi~re ~tape importante vers une soci~t~ plus ~quitable. En outre, l'un des principaux objectifs de la strat~gie devrait etre d'offrir a tous une meilleure alimentation, un meilleur approvisionnement en eau salubre, une meilleure sante et une meilleure nutrition, d'~largir l'acc~s a l'~ducation et dE! d~velopper les syst~mes d'assainissement. L'am~lioration du capital humain constitue un moyen efficace de favoriser la mobilit~ sociale et d'~galiser les chances d'acc~s a la prosperit~ ~conomique. 2.56 Dans les ann~es 70, les pays africains se sont de plus en plus attaches a satisfaire les besoins fondamentaux de leurs populations, par souci de leur bien-etre, certes, mais aussi parce qu'on ne pouvait s'attendre a ce qu'une main-d'oeuvre d~munie de tout engendre la croissance. La crise ~conomique du d~but des ann~es 80 a fait passer la satisfaction des besoins fondamentaux au second plan. Ce recul a et~ une erreur, car il importe d'~viter toute compression des depenses essentielles en temps de recession. 11 faut maintenant rattraper Ie temps perdu. Pour assurer a long terme l'equit~ du d~veloppement, i1 importe aussi de faciliter l'acc~s des plus d~favorises, et en particulier des femmes, aux moyens de production. Les r~formes agraires entreprises un peu partout en Afrique et les syst~mes de cr~dit mis en place pour les besoins des micro- entrE!prises constituent de bons exemples de I' action qui peut etre men~e dans ce sens. 2.57 Les programmes d'ajustement structurel comportent deja des ~l~ments visant A ameliorer Ie sort des plus defavoris~s (voir Encadre 9.2). Par exemple, Ie rel~vement des prix des produits agricoles profite aux r~gions ruraIes, qui abritent la majorit~ de la population pauvre. - 70 - Plusieurs pays envisagent de venir en aide aux travailleurs en surnombre en mettant en place des programmes "vivres contre travail". Mais il faut aller plus loin encore. II importe avant tout que les gouvernements s'abstiennent de r~duire les d~penses publiques consacr~es aux soins de sant~ de base et a l'~ducation et s'attachent ales augmenter des qu'ils Ie pourront. 2.58 Les obstacles qui devront ~tre surmont~s pour r~aliser une croissance ~quitable tiennent en particulier au dualisme ~conomique qui caract~rise la plupart des pays africains. Depuis l'accession de ces pays a l'ind~pendance, Ie nombre des emplois du secteur public y a augment~ dans des proportions consid~rables. Les jeunes diplOm~s africains ont tout naturellement cherch~ a s'employer dans la fonction publique, dans l'arm~e ou dans des entreprises para-publiques, sachant qu'ils y seraient mieux pay~s qU'ailleurs. La grille des r~mun~rations du secteur public sert souvent de modele pour les entreprises priv~es du secteur moderne. Les ressources publiques seraient mieux employ~es si elles servaient a satisfaire les besoins fondamentaux de la population plutOt qu'a cr~er des emplois improductifs et a entretenir une minorit~ de privil~gi~s. 2.59 De plus, il s'avere que de nombreux fonctionnaires qui, parce qu'ils d~livrent les licences d'importation ou attribuent les allocations de devises, par exemple, ont la haute main sur l'approvisionnement en certains intrants rares, se sont enrichis malhonn~tement ces dernieres ann~es. lIs vendent ces intrants aux prix pratiqu~s sur Ie march~ parallele, agissant souvent en collusion avec des entreprises de pays d~velopp~s. La recherche de l'avantage personnel et la fuite des capitaux qui va de pair avec ces pratiques nuisent au d~veloppement ~conomique et a la coh~sion de la soci~t~. L'Afrique n'a certes pas Ie monopole de la corruption, mais elle est peut-~tre moins bien arm~e que toute autre r~gion pour en supporter les cons~quences. Renforcer les conditions propices au d~veloppement 2.60 Le premier ~l~ment de la strat~gie en deux volets propos~e ici consiste a renforcer les conditions propices au d~veloppement. II ressort clairement du chapitre 1 que la faible productivit~ des secteurs producteurs de biens est au coeur des problemes ~conomiques de 1 'Afrique. Une r~orientation radicale du systeme d'incitations apparait essentielle. II faut d'une part inciter les consommateurs a acheter davantage de produits locaux, et d'autre part faire comprendre aux nouveaux demandeurs d'emploi qu'au lieu de vouloir a tout prix trouver un poste dans Ie secteur public, ils feraient mieux de mettre leurs comp~tences au service de l'industrie et de l'agriculture. La politique des prix, la politique des changes et la politique fiscale peuvent ~tre orient~es en fonction de cet objectif. R~orientation du systeme d'incitations 4.61 Les distorsions ~conomiques observ~es dans les pays africains ont, a de multiples ~gards, un effet n~faste sur la structure de la consommation des m~nages, la r~partition des revenus et Ie sch~ma de croissance de l'industrie. Les pays dont Ie taux de croissance est I. - 71 - re1ativement ~lev~ sont pr~cis~ment ceux qui ont su ~viter 1es pires de ces distorsions. I1s se sont attach~s A maintenir 1e taux de change de leur monnaie A un niveau qui garantisse 1a comp~titivit~ de leurs produits, i1s se sont gard~s de prot~ger excessivement ou par des moyens discriminatoires leurs industries manufacturi~res, ont ~vit~ de fixer 1es prix de leurs produits agrico1es A un niveau excessivement bas. ont fait en sorte que 1es taux d'int~rat r~e1s restent positifs. ont vei11~ A ce que 1a progression des sa1aires r~e1s ne d~passe pas ce11e de 1a productivit~, ont fix~ 1es tarifs des services d'infrastructure en fonction de leurs coOts et se sont ~pargn~s 1es f1amb~es inf1ationnistes en s'astreignant A 1a rigueur budg~taire et mon~taire. 2.62 Les programmes d'ajustement structure1 contribuent dans de nombreux pays A att~nuer 1es distorsions, mais i1 reste encore beaucoup A faire (voir l'encadr~ 2.2. Les chapitres 4 et 5 traitent plus en d~tai1 du r~gime des incitations dans l'agricu1ture et dans l'industrie. La po1itique des changes joue, quant A e11e, un rOle si crucial qu'e11e m~rite qu'on s'y arrate un peu plus longuement ici. 2.63 La po1itique des changes. Les d~bats sur 1a po1itique des changes sont g~n~ra1ement ax~s sur 1es moyens de r~a1iser A court terme certains ~qui1ibres macro-~conomiques. C'est ainsi qu'on en est venu A consid~rer qu'une d~va1uation s'inscrit automatiquement dans une po1itique d'aust~rit~. Cette fa90n de voir ne tient pas compte des incidences structure11es d'une d~va1uation. La place que tiennent 1es produits d'importation dans 1a consommation d~pend dans une large mesure du taux de change de 1a monnaie du pays, 1a sur~va1uation de 1a monnaie ayant tendance A d~courager 1a production int~rieure. Les pays africains pourraient s'attaquer A certains des principaux obstacles qui entravent leur croissance ~conomique en uti1isant 1a po1itique des changes pour modifier 1es termes internes de l'~change, en am~liorant 1a rentabi1it~ de 1a production int~rieure et en relevant 1es prix des biens de consommation import~s. 2.64 Tout programme A long terme visant A accroitre 1a production et A cr~l~r des emp10is devrait comporter une po1itique des changes. Pour stimuler 1a cr~ation d'emp1ois dans 1e secteur agrico1e et 1e secteur industrie1, i1 est indispensable de faire progresser 1a demande int~rieure et ext~rieure de produits locaux. Une d~valuation ~quivaut A une augmentation des prix des importations, ce qui d~courage la consommation de produits import~s et stimule ce11e de produits locaux. Les modifications du taux de change constituent un moyen simple de stimuler la production int~rieure; elle est de surcrolt est plus efficace que les restrictions tarifaires et autres obstacles au commerce. 2.65 Apr~s l'accession des pays africains A l'ind~pendance, la fraction de 1a population int~gr~e au secteur moderne (en particu1ier les salari~s du secteur public) a pris des habitudes de consommation qui, A terme, ~taient qualitativement et quantitativement incompatibles avec 1e niveau de 1a productivit~. La Tanzanie, dont 1e gouvernement a su freiner la hausse des sa1aires dans Ie secteur public, constitue A cet ~gard une exception notable. Dans certains pays, tels que Ie Ghana et l'Ouganda, l'effondrement de l'~conomie a entraln~ une baisse bruta1e de la - 72 - consommation. Point n'est besoin d'attendre une catastrophe pour ramener la consommation A un niveau compatible avec la capacite de production : on peut y parvenir efficacement en fltaxant" toutes les formes de consommation qui, directement ou indirectement, entrainent des sorties de devises. L'effet Ie plus evident de cette "taxation" serait, de la part des groupes les plus aises, un accroissement de la demande de biens et services locaux (employes de maison, chauffeurs et services domestiques divers) et, parallelement, une diminution de leur demande de produits d'importation (v~tements, appareillage electronique, etc.). Un tel transfert de consommation n'aurait que des avantages : il contribuerait A creer des emplois et A reduire les sorties de devises. II faut cependant se rendre compte qu'il n'est pas facile de modifier rapidement les habitudes de consommation. Les produits d'importation sont vite consideres comme des elements indispensables du train de vie et les fournisseurs comme les consommateurs se prevalent de leurs inter~ts acquis pour resister A des substitutions. A long terme, cependant, la structure de la consommation peut se modifier. 2.66 La politique des changes peut aussi stimuler l'integration economique regionale en Afrique - objectif politique majeur et condition necessaire d'une croissance durable. Cependant, Ie commerce intra-africain ne pourra pas se developper aussi longtemps que la surevaluation des monnaies africaines permettra d'importer A bon marche des marchandises produites hors du continent. Theoriquement, il devrait etre possible d'obtenir les memes resultats que ceux d'une devaluation par des mesures fiscales ou para-fiscales telles que l'institution de droits de douane et de subventions A 1 'exportation. Cependant, ces mesures presentent des inconvenients economiques evidents et soulevent des difficultes d'application non moins evidentes. Etant donne la longueur et la permeabilite des frontieres africaines, prendre en Afrique de telles mesures reviendrait A encourager la contrebande. Le maintien des taux de change A un niveau qui garantisse la competitivite des produits locaux constitue de beaucoup Ie Meilleur moyen de detourner les consommateurs des produits d'origine extra-africaine. 2.67 Pour toutes ces raisons, l'encadrement des changes apparait comme une condition primordiale de la realisation d'une croissance durable et d'une integration regionale plus etroite. Les modalites de la politique des changes peuvent varier. L'exemple de pays comme la Guinee montre qU'un marche libre des changes - avec eventuellement un systeme d'adjudication des allocations de devises - peut donner de bons resultats, et en particulier corriger la surevaluation de la monnaie locale. Des politiques plus interventionnistes ont donne de bons resultats dans des pays tels que Ie Ghana et Ie Malawi. 2.68 Une politique des changes interventionniste convient particulierement A un pays ou les entrees de devises sont importantes, qu'elles proviennent de l'exportation de petrole ou de mine raux , de superprofits resultant de flambees des cours d'autres produits de base dont Ie pays est exportateur, voire d'un afflux de capitaux etrangers (voir Encadre 8.1). Des situations de ce genre ont pour effet la surevaluation de la monnaie locale qui se manifeste par la necessite d'instituer des incitations a long terme pour stimuler la production locale. La politique f" - 73 - des changes devrait en pareil cas viser A rendre les prix agricoles suffisamment r~mun~rateurs et les salaires industriels conformes aux exigences de la comp~titivit~ sur les march~s internationaux. 2.69 Une certaine discipline financi~re est indispensable pour obtenir une d~valuation r~elle - c'est-A-dire une d~valuation dont les effets ne soient pas imm~diatement annul~s par l'aggravation de l'inflation. Le choix du moment est A cet ~gard crucial. II est bon, par exemple, de faire colncider une d~valuation avec une am~lioration des termes de l'~change ou une r~colte exceptionnelle, et non pas avec une p~riode difficile, comme Ie veut la th~se (politiquement bien commode) g~n~ralement admise. Les gouvernements doivent prendre conscience de l'incidence cruciale que la politique des changes peut avoir sur Ie d~veloppement A long terme et voir dans une am~lioration passag~re de la balance des paiements l'occasion d'op~rer une d~valuation plut6t qu'une excuse pour ne rien faire ou, pire, pour r~~valuer la monnaie. L'Indon~sie a habilement appliqu~ une strat~gie de ce genre en 1978. Am~lioration de l'infrastructure 2.70 La mise en place d'une bonne infrastructure contribue grandement A cr~er des conditions propices au d~veloppement. Bien que des investissements tr~s importants y aient ~t~ consacr~s dans Ie pass~, les services demeurent tout A fait inad~quats dans les pays africains. Dans nombre d'entre eux, il faut A une bonne partie des habitants une journ~e au moins pour atteindre une route praticable par tous les temps. En Afrique, la densit~ moyenne du r~seau routier est deux ou trois fois plus faible que dans les autres r~gions en d~veloppement. Les appels t~l~phoniques n'aboutissent que dans moins de 20 % des cas; dans de nombreux pays, Ie pourcentage est me me inf~rieur A 10 % pour les communications internationales. L'approvisionnement en eau potable et l'enl~vement des ordures laissent bien souvent A d~sirer. Au ZaIre, par exemple, les services relevant de l'infrastructure urbaine ne desservent me me pas la moiti~ des citadins. De plus, les infrastructures existantes en place tendent A se d~t~riorer faute d'entretien. Des autobus urbains sont immobilis~s par des pannes 90 % du temps. Les routes zalroises sont si mauvaises que la dur~e de vie moyenne d'une voiture particuli~re est estiDl~e A trois ans seulement. En Afrique de l'Ouest, Ie mat~riel d'entretien des routes n'est g~n~ralement exploit~ qu'A 30 A 60 % de sa capacit~. Les compagnies a~riennes, g~n~ralement publiques, sont trop nombreuses et ne coordonnent pas leurs services. On pourrait multiplier les E~xemples de ce genre. Tous ces probl~mes gr~vent tr~s lourdement les charges des entreprises en Afrique. 2.71 L'insuffisance notoire des infrastructures des pays africains tient a de multiples raisons.La premi~re est que, exception faite des r~seBux ferr~s, lea infrastructures h~rit~es de l'~poque coloniale ~taient tr~s rudimentaires. La seconde est que les organismes publics dont elles rel~vent se r~v~l~s inefficaces; d'une mani~re g~n~rale, ils n'ont pas su se doter de gestionnaires et de techniciens comp~tents. La troisi~me est que les pays africains n'ont pas pret~ une attention suffisante, dans leur politique d'~quipement, A la viabilit~ financi~re et a la qualit~ des servlces; la fixation des prix de certains services a un niveau trop bas a - 74 - entraine 1a deterioration des equipements et une reduction de l'offre. Par exemp1e, 10rsque 1es produits petro1iers sont autoritairement maintenus trop bas, i1 en resu1te du gaspi11age et des penuries, ainsi qu'une mauvaise desserte des regions rura1es. 2.72 La qua1ite des infrastructures importe tout particu1i~rement pour 1e deve10ppement et 1e bon fonctionnement des vi11es. En Afrique comme dans 1es autres regions en deve10ppement, 1es centres urbains, en expansion rapide, sont 1es creusets de l'accu1turation qui debouche sur 1a modernite et l'economie de marche. Les premi~res strategies de deve10ppement privi1egiaient 1es grands centres urbains. L'app1ication de cette strategie a dans bien des cas abouti A des distorsions de 1a po1itique des prix et de 1a po1itique d'investissement qui ont eu pour effet de couper 1es centres urbains de leur arri~re-pays. Aussi, cette strategie n'a-t-e11e pas permis d'etab1ir 1es reseaux urbains indispensables au deve10ppement des marches interieurs. Les strategies adoptees apr~s l'independance n'ont, par ai11eurs, gu~re contribue a deve10pper 1es institutions - en particu1ier 1es administrations locales - indispensables a une croissance ordonnee des vi11es. Etant donne 1e rythme prevu d'accroissement de 1a population africaine, 1a tendance A l'urbanisation rap ide observee dans 1a region devrait se maintenir a long terme en depit des mesures prises pour moderniser l'agricu1ture. L'existence de reseaux urbains efficaces favorisait 1e deve10ppement urbain comme 1e deve10ppement rural, i1 faut prevoir une expansion plus rap ide de l'infrastructure. La po1itique de deve10ppement doit, A cet egard, tenir compte du rOle que jouent 1es vi11es secondaires dans 1a prestation des services necessaires A l'agricu1ture. 2.73 Avec l'av~nement de l'~re de l'information, 1a clef du succ~s d'une po1itique nationa1e de deve10ppement sera 1a rapidite d'acc~s a l'information et aux idees, a l'eche11e mondia1e. Cette assertion vaut pour l'Afrique comme pour 1es autres regions. L'expansion et l'ame1ioration des reseaux te1ephoniques doit donc constituer un element essentie1 de 1a nouvelle strategie de deve10ppement. Des etudes recentes consacrees A 1a correlation entre services de telecommunications et deve10ppement economique ont montre que 1e ratio conts-avantages de ces services pouvait atteindre un a cinq, voire davant age dans certains secteurs. En Afrique, 1a densite te1ephonique n'atteint marne pas un poste pour 300 habitants. E11e est deux fois plus faib1e qu'en Asie et 16 fois plus faib1e qu'en Amerique 1atine. Et encore, ces chiffres ne rendent que partie11ement compte de 1a rea1ite, car 1e telephone fonctionne genera1ement tr~s mal en Afrique. La proportion de 1ignes en derangement faute d'entretien atteint 20 a 40 %; 1a densite des reseaux est tr~s inega1e, et 1es regions recu1ees ne sont souvent pas desservies du tout. La demande non satisfaite est si considerable qu'un secteur des telecommunications convenab1ement gere deviendrait tr~s vite rentable et degagerait ensuite d'importants benefices qui pourraient atre employes ai11eurs (voir l'encadre 2.3), 2.74 11 conte deux a trois fois plus cher de remettre en etat une route trap 10ngtemps negligee que de l'entretenir regu1i~rement, et 1e mauvais etat des routes gr~ve 1es frais d'entretien du parc automobile (voitures particu1i~res et vehicu1es uti1itaires), dans une proportion qui peut atteindre 50 % pour 1es routes rev~tues. et beaucoup plus pour 1es - 75 - routes non rev@tues. On estime qU'i1 en coOterait 5 milliards de dollars pour remettre en ~tat 1e r~seau routien africain, et 700 millions de dollars par an pour l'entretenir par 1a suite. Pour mobi1iser 1es sommes n~cessaires pour 1a r~fection de leurs r~seaux routiers, 1es pays africains devraient modifier profond~ment 1a structure de leurs d~penses. Depuis une quinzaine d'ann~es. 1es donateurs et 1es gouvernements africains se pr~occupent un peu plus du prob1~me de l'entretien des r~seaux routiers mais des r~su1tats durab1es n'ont ~t~ obtenus que dans quelques pays. Certains d'entre eux ont ~labor~ des m~thodes novatrices A forte intensit~ de main-d'oeuvre pour assurer l'entretien des routes dans 1es zones rura1es (voir Encadr~ 2.4). 2.75 Etant donn~ 1e retard consid~rab1e qu'i1s ont pris dans l'entretien de leurs r~seaux routiers, et compte tenu de l'urbanisation rapide du continent, comment 1es pays africains peuvent-i1s esp~rer, en p~riode d'aust~rit~ budg~taire, mettre en place 1es services d'infrastructure indispensables? Voici quelques recommandations d'ordre g~n~ra1 A leur intention : Accorder 1a priorit~ A 1a remise en ~tat des ~quipements existants p1utOt qu'aux investissements dans des ~quipements nouveaux; Faire plus 1argement appe1 au secteur priv~; Faire en sorte que 1es tarifs des services publics soient davantage en rapport avec 1es coOts de ces services; Pourvoir A long terme au financement de l'entretien des infrastructures. 2.76 R~pondre A 1a demande. Les groupes d'int~r@ts po1itiques et ~conomiques, dans 1es pays africains comme dans 1es pays donateurs, incitent 1es pouvoirs publics A cr~er des ~quipements nouveaux et particu1i~rement A lancer de vastes projets du type de ceux qui caract~risaient 1es programmes pass~s de d~ve10ppement des infrastructures. 11s s'appuient trop souvent sur des pr~visions excessivement optimistes de 1a demande et des recettes pour justifier des investissements qui, par 1a suite, se r~v~lent ne pas @tre rentab1es. Les pouvoirs publics doivent r~sist:er aux pressions exerc~es sur eux pour qu'i1s fassent construire des routes d'une uti1it~ 1imit~e a10rs qu'une partie du r~seau existant se d~t~riore. Lorsqu'i1s s'attachent A r~pondre aux besoins v~ritab1es, i1s doivent se poser 1a question de 1a hi~rarchie des priorit~s. Les projets d'am~lioration de l'infrastructure 1es plus rentab1es doivent @tre entrepris en premier. Entrent notamment dans cette cat~gorie 1es projets de d~ve10ppement du r~seau de t~l~communications et de construction de routes rura1es int~ressant des r~gions qui ont un bon potentie1 agrico1e ou des v1.11es qui vivent en ~troite symbiose ~conomique avec l'arri~re-pays agrico1e. 2.77 Faire davantage appe1 au secteur priv~. Les infrastructures d'un pays se composent d'~quipements durables qui, en r~gle g~n~ra1e, servent A 1a prestation de services devant, de par leur nature m@me, re1ever d'un monopole. 11 est donc normal que 1es pouvoirs publics aient 1a haute main sur 1es infrastructures. 11 importe cependant de bien distinguer entre 1es ~quipements et les services. Le secteur priv~ peut - 76 - ~tre utilement mis a contribution pour la gestion des services, m~me si les ~quipements sont mis en place par l'Etat et lui appartiennent. L'Encadr~ 2.5 donne diff~rents exemples de participation du secteur priv~ a la gestion du service des eaux, des services d'enl~vement des ordures et des transports publics. Au Nig~ria, une soci~t~ priv~e desservant Ie plateau de Jos vend de l'~lectricit~ a la National Power Authority. Cependant, la passation de contrats de sous-traitance avec des soci~t~s priv~es n'est une solution viable que si l'Etat respecte ses engagements et r~gle ses factures. 2.78 La plupart des pays africains ont peut-~tre avantage, tout en reconnaissant que les collectivit~s locales sont les mieux plac~es pour g~rer convenablement les services d'infrastructure (voir les paragraphes 2.110-2.111 ci-apr~s), a s'en remettre davantage au secteur priv~, tout particuli~rement pour les services de transport. A Khartoum, par exemple, les "bakassi" du secteur informel font des b~n~fices alors que la compagnie publique d'autobus accumule les d~ficits. On rel~ve des situations analogues dans de nombreuses villes africaines. En g~n~ral, les services de transport s'am~liorent lorsque des entreprises priv~es sont autoris~es a p~n~trer sur Ie march~ et lorsque les autorit~s mettent un frein a leurs tendances monopolistiques et a leurs pratiques restrictives. Dans nombre de pays, les carences des services publics contraignent particuliers et entreprises a investir dans des groupes ~lectrog~nes, des r~seaux priv~s d'adduction d'eau, des r~seaux de messageries radio, etc. Cela prouve qu'il y a place pour des services priv~s, et que les usagers sont pr~ts a payer pour les obtenir (voir l'Encadr~ 3.2). Les programmes int~ressant Ie secteur devraient pr~voir des moyens permettant de favoriser les interactions de ce genre. 2.79 De nombreux pays africains s'en remettent d~ja davantage au secteur priv~. Les mesures prises en ce sens sont plus ou moins hardies privatisation int~grale, privatisation des services auxiliaires (chargement et d~chargement et acheminement local du fret, par exemple) ou passation de contrats de gestion. Dans certains cas, les organismes publics ont ramen~ leur rOle a celui d'interm~diaire et de planificateur : c'est ainsi qu'au Malawi, l'Office central du logement est devenu un organisme de cr~dit, et a cess~ de jouer Ie rOle de promoteur. Plusieurs pays, dont Ie Ghana, Ie S~n~gal et Madagascar ont maintenant recours a des entreprises priv~es pour l'entretien des routes. 2.80 R~duire les coats. En Afrique, les coats unitaires des investissements d'infrastructure, qui varient ~videmment d'un pays a l'autre, peuvent atteindre Ie double de ce qu'ils sont en Asie, voire davantage dans Ie cas des services d'entretien. Cet ~tat de choses tient notamment a l'~troitesse et a la fragmentation des march~s nationaux. Mais il d~note aussi de mauvaises m~thodes de passation et d'administration des march~s publics, la faible productivit~ de la main-d'oeuvre et Ie manque d'ateliers locaux de m~canique et autres services d'appui. Dans certains pays africains, Ie march~ est trop restreint pour justifier la cr~ation d'un secteur du bAtiment et des travaux publics comportant des entreprises capables de r~aliser de grands travaux de remise en ~tat et d'am~nagement, et il est donc bon d'encourager la cr~ation d'entreprises qui desserviront - 77 - des marches sous-regionaux. A cette fin, il faudrait notamment harmoniser les reglementations nationales en matiere de marches publics. 2.81 Pour que les produits africains soit concurrentiels sur les marches internationaux, il est indispensable de reduire Ie cont des services d'infrastructure. La plupart des organismes exer9ant dans Ie secteur des infrastructures sont a mAme de comprimer leurs conts sans reduire la qualite ni Ie volume des services qu'ils fournissent. Les programmes de reduction des conts necessitent un contrOle etroit, et leur succes depend avant tout de la determination des cadres dirigeants. Certains organismes sectoriels en proie a des difficultes financieres ont pris conscience de la necessite de tels programmes; par exemple, les responsables de plusieurs compagnies africaines de chemins de fer acculees a la faillite se battent pour redresser leur entreprise (voir Encadre 2.6). Le taux d'utilisation des elements d'infrastructure peut etre releve moyennant une gestion rigoureuse et de modestes investissements. II est possible par exemple d'accelerer la rotation des wagons de chemin de fer, de reduire Ie temps d'immobilisation des navires a quai et d'accroitre la capacite de circulation : a Abidjan, par exemple, de nouvelles restrictions de stationnement dans les quartiers du centre ont permis d'y accroitre la capacite de circulation aux heures de pointe d'environ 30 %. 2.82 L'Afrique n'a, jusqu'a present, pas pleinement tire parti des methodes a forte intensite de main-d'oeuvre qu'il est possible d'appliquer a petite echelle pour developper et entretenir les equipements et fournir des services d'infrastructure. Les pays africains n'ont pas non plus suffisamment persevere dans leurs tentatives d'utilisation de techniques appropriees. Les vastes programmes lances, dans Ie cadre de la decennie de l'eau, pour la mise au point de pompes a main a usage rural et de systemes d'assainissement peu conteux ont montre que la clef du succes reside dans des eŁ:sais minutieux sur Ie terrain et une approche scientifique pluridisciplinaire. Des obstacles reglementaires et les carences des instit.utions entravent souvent l'utilisation de nouvelles techniques; ce sont des obstacles de ce genre qui, par exemple, ont freine l'essor des transports par conteneurs. 2.83 Pratiquer la verite des prix. Sauf peut-Atre lorsque les installations sont sous-employees, il n'y a pas de raison pour que les usagers des services d'infrastructure les paient moins cher qu'ils ne content. Les tarifs de ces services peuvent meme parfois Atre fixes a un niveal:l superieur a celui justifie par les conts a long terme afin de recouv'rer une partie du surplus du consommateur; les usagers de la plupart de ces services appartenant aux groupes A revenu eleve, cette pratique peut Atre consideree comme equitable. 2.84 Des tarifs fixes en vertu du principe de la verite des prix permettent souvent d'accroltre les recettes de 20 a 30 %. II est possible de relever les recettes publiques de 5 a 10 % en fixant Ie prix de I'eau et - 78 - de l'electricite, les redevances routi~res et les tarifs des telecommunications 8 un niveau tenant davant age compte des conts marginaux, encore que pour l'eau, il puisse y avoir lieu de prevoir des arrangements speciaux pour proteger les couches les plus defavorisees. 2.85 Pratiquer la verite des prix est fort bien; encore faut-il que les usagers r~glent leurs factures. Les taux de recouvrement sont notoirement insuffisants en Afrique sub-saharienne. Souvent, les gens refusent de payer parce qu'ils ne voient pas tr~s bien pourquoi on leur demande de l'argent; il arrive aussi que Ie produit des droits et redevances soit purement et simplement detourne. Selon des estimations recentes, Ie taux de recouvrement des peages routiers n'atteint en Afrique que 60 %, alors que Ie reseau routier se deteriore faute d'entretien. Ce cas n'a rien d'exceptionnel. En revanche, on a pu constater recemment, apr~s la mise en place de reseaux ruraux d'adduction d'eau, que les taux de recouvrement des redevances etaient satisfaisants lorsque les usagers participaient 8 l'exploitation et 8 l'entretien. 2.86 Pour limiter les pertes de capacites et les detournements de services, il faut aussi s'astreindre 8 une certaine discipline au niveau de l'exploitation. II peut ~tre particuli~rement payant de veiller 8 ce que les compteurs d'eau et d'electricite soient reguli~rement releves, de faire respecter la reglementation applicable aux vehicules 8 moteur et de contrOler les mouvements de navires et la navigation aerienne. De telles mesures peuvent accroltre de 40 8 50 % la capacite de nombreux syst~mes, 8 relativement peu de frais. 2.87 Garantir la securite financi~re necessaire. Les incertitudes financi~res aggravent les probl~mes inherents 8 la planification et 8 l'entretien des infrastructures. Des etudes de la Banque mondiale ont revele que Ie principal risque que courent les entreprises locales de travaux publics qui traitent avec les organismes publics est de ne pas ~tre payees reguli~rement. Dans plusieurs pays africains. les compagnies de services publics eprouvent des difficultes 8 recouvrer les sommes que leur doivent les minist~res et les entreprises parapubliques et les entreprises chargees de l'entretien des routes sont payees en retard. Dans certains cas, ces manquements tiennent 8 des difficultes de tresorerie : les comptables publics decident d'affecter les disponibilites 8 des r~glements qu'ils estiment plus urgents. lIs commettent 18 une erreur conteuse. Cette pratique conte 8 terme plus cher 8 l'Etat et ralentit la croissance economique. II est indispensable que les organismes de gestion des infrastructures puissent compter sur des recettes reguli~res. Bien qU'8 eviter en principe, l'affectation prealable des recettes budgetaires peut se reveler necessaire dans la pratique pour preserver les equipements collectifs et inciter les usagers a la discipline financi~re. 2.88 II Y a un fosse entre Ie montant actuel des depenses d'infrastructure des pays africains et les sommes qu'ils devraient consacrer au developpement et 8 l'entretien des infrastructures pour creer les conditions indispensables 8 leur croissance economique. Les pays africains ne pourront se developper durablement que s'ils s'attachent 8 combler ce fosse en engageant 8 long terme les ressources publiques necessaires. Dans la plupart des pays, il faudrait que Ie montant annuel - 79 - moyen des investissements d'infrastructure atteigne au moins 4 A 6 % du PIB, et l'affectation annuelle aux investissements d'infrastructure de 10 dollars (de 1980) par habitant doit @tre consid~r~e comme un objectif minimum, sauf pour les pays les plus pauvres. Les d~penses consacr~es A l'entretien courant doivent en outre @tre A la mesure des investissements. Les pays qui ont pris un retard important dans l'entretien de leur infrastructure devront, pour Ie rattraper, consacrer, pendant dix ans, 1 % de plus de leur PIB au poste entretien. D~velopper les capacit~s locales 2.89 L'instauration de conditions propices au d~veloppement rend possible une am~lioration de la productivit~, mais seul un renforcement consid~rable des capacit~s africaines permettra de relever durablement les taux de croissance dans la r~gion. Le d~veloppement des capacit~s locales comprend trois ~l~ments : la mise en valeur des ressources humaines, grAce notamment A la prestation de services de sant~ de base et A l'am~lioration de l'~ducation, de la nutrition et des qualifications techniques de la main-d'oeuvre; la restructuration de nombreuses institutions publiques et priv~es, en vue de cr~er des conditions dans lesquelles les travailleurs qualifi~s puissent fonctionner efficacement; la prise de conscience par les dirigeants africains de la fragilit~ des institutions, difficiles A mettre en place mais ais~ment an~anties, et donc de la n~cessit~ de s'attacher constamment Ales renforcer. Ces trois ~l~ments font bien souvent d~faut en Afrique. Des institutions nationales n'y ont que trop souvent ~t~ politis~es et utilis~es au profit d'~troits int~r@ts partisans au lieu d'etre mises au service d'objectifs nationaux. Mise en valeur des ressources humaines et productivit~ de la main-d'oeuvre 2.90 Au cours des 15 annees qui ont suivi leur accession A l'independance, les pays africains ont realise des progr~s remarquables en ce qui concerne l'alphab~tisation, la sant~ publique et l'esperance de vie de leur population. Depuis, cependant, certains d'entre eux ont r~gress~ dans ces domaines comme dans d'autres. La formation professionnelle laisse beaucoup A desirer et la productivite de la main-d'oeuvre reste tr~s faible. II est donc imperatif que la nouvelle strategie de developpement accorde une priorit~ elev~e A la relance de la mise en valeur des ressources humaines. 11 importe notamment d'ameliorer la qualit~ de l'education et des services de sante publique en Afrique. Jusqu'A present, l'enseignement et la formation professionnelle et les services de sante se s~nt, en r~gle gen~rale, developpes au detriment de leur qualite. 2.91 L'enseignement doit @tre con~u de mani~re qu'il reponde aux besoins reels des Africains. La repartition des credits entre enseignement primaire, secondaire et post-secondaire, entre enseignement et formation professionnelle et entre les diff~rentes disciplines doit de m@me @tre - 80 - fonction des exigences du d~veloppement. L'enseignement devrait avant tout tendre a d~velopper l'esprit d'analyse et l'ouverture a la technique. 2.92 Le d~veloppement des capacit~s locales implique aussi la formation d'~lites. Pour progresser, un pays a besoin d'une ~lite de technocrates : chefs d'entreprises, hauts fonctionnaires, administrateurs, universitaires et membres des professions lib~rales. Bien que peu nombreuse, cette ~lite est appel~e a jouer un rOle catalyseur important dans le d~veloppement. Etant donn~ le progres rap ide de la technologie, l'Afrique aura besoin de scientifiques et de techniciens si elle ne veut pas ~tre laiss~e pour compte. Cette question est trait~e au chapitre 3. Institutions publiques ou institutions priv~es? 2.93 Les strat~gies d'apres l'ind~pendance donnaient a l'Etat la haute main sur la production de nombreux biens et services. Vu les carences des institutions publiques, les r~sultats n'ont pas ~t~ brillants. De plus, les pouvoirs publics, bien loin de favoriser l'essor du secteur priv~, ont d~lib~r~ment frein~ l'initiative priv~e, et notamment le , d~veloppement des coop~ratives et des organisations locales. Les Etats africains sont en partie revenus sur cette politique, mais la question des rOles respectifs du secteur priv~ et du secteur public reste controversee: elle doit ~tre r~gl~e en fonction de la situation propre a chaque pays. 2.94 Le debat ne porte pas seulement sur la distribution des rOles entre l'Etat et le secteur prive, mais aussi sur les attributions respectives des autorit~s centrales, des administrations locales et des collectivit~s locales. Le but qu'il faut viser est la r~duction du rOle des administrations centrales par la decentralisation des services publics. De nombreux services essentiels, dont le service des eaux, les services de sante et l'enseignement primaire, fonctionnent mieux s'ils sont administres localement - voire a l'echelon du village - les administrations centrales se bornant a donner des conseils techniques et a fournir des intrants non produits localement. 11 s'agit d'inciter les gens a prendre en main leur destin~e, de rendre les collectivit~s locales davantage responsables de leur d~veloppement. et de rendre les pouvoirs publics plus attentifs aux desiderata de la population. 11 est possible de contribuer a la r~alisation de ces objectifs en favorisant la mise en place d'une structure institutionnelle pluraliste, OU devraient figurer en bonne place des organisations non gouvernementales et des administrations locales aux pouvoirs renforc~s. 2.95 Cela ~tant, l'Etat a un rOle essentiel a jouer dans l'instauration de conditions propices au d~veloppement ~conomique. Cr~er de telles conditions devrait m~me ~tre au premier rang de ses pr~occupations. 11 importe au plus haut point que l'Etat veille a ce que les r~glementations soient appliqu~es syst~matiquement et honnetement, assure le maintien de l'ordre et fasse en sorte que l'appareil judiciaire soit stable et fonctionne de fa90n objective et transparente: il lui incombe aussi de mettre en place une infrastructure fiable et efficace, ainsi que des services sociaux et des services d'information; c'est ainsi qu'il cr~era les conditions necessaires a l'efficacit~ des entreprises, qu'elles soient priv~es ou publiques. 'I - 81 - 2.96 La distribution des r6les entre l'Etat et le secteur prive devrait se faire de fa~on pragmatique et non pas en fonction de principes rigides. Dans bien des cas, les entreprises privees sont en mesure d'offrir a des conditions extr~mement competitives divers services publics - entretien des routes, transports, distribution d'eau, enl~vement des ordures, entretien des vehicules publics, par exemple. Cependant, il arrive aussi que des monopoles prives exploitent les consommateurs. Ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est la fiabilite et le rapport cont- efficacite des services rendus. 11 faut se garder de tout a priorisme quant au mode d'organisation "ideal" : ce qui compte avant tout, c'est de fournir les incitations voulues. 2.97 Les entreprises publiques, en r~gle generale, ne brillent pas par leurs resultats, encore qu'il y ait de notables exceptions (voir Encadre 7.3). Les cadres de ces entreprises sont handicapes par des interventions politiques. De plus, il est difficile de motiver salaries et dirigeants par des incitations appropriees lorsque l'esprit d'entreprise, le sens des affaires et le gont du risque font defaut. La prise de conscience de ces probl~mes a declenche dans le monde entier une vague de privatisations. 8i elle tient a rester dans la course, l'Afrique a inter~t a ne pas resister a cette vague. Les entreprises publiques continueront d'avoir leur place dans de nombreux cas, notamment pour la prestation de services publics et la production de certains biens co1lectifs. 11 peut arriver que le secteur prive ne soit pas a m~me de prendre la rel~ve mais, realiisee sur une assez longue periode et avec suffisamment d' imagination, la privatisation peut ~tre une solution viable. 2.98 11 Y a de mUltiples fa~ons d'ameliorer les resultats des entreprises publiques. La productivite d'une entreprise depend moins de son regime de propriete que de son mode d'exploitation. L'experience montre que les entreprises publiques ont de meilleures chances de succ~s lorsqu'on leur assigne des objectifs clairs et realistes, lorsqu'on les laisse gerer de fa~on autonome leurs affaires courantes et lorsque des indicateurs fiables permettent a l'organe de tutelle de suivre les progr~s accomplis sans s'ingerer indnment dans la gestion de l'entreprise. Jusqu'a present, ces conditions ont rarement ete reunies. 2.99 Les institutions, privees ou publiques - y compris les marches - sont les mediateurs du developpement. Le developpement institutionnel, au sens large du terme, rev~t donc une importance capitale et c'est essentiellement aux pouvoirs publics qu'il appartient de le favoriser. Or, rares sont les gouvernements africains qui se sont serieusement atteles a cette tAche. Les organismes apparaissent ou disparaissent sans que l'on semble beaucoup se preoccuper de l'interaction des divers elements de l'appareil institutionnel. 8ouvent, les institutions recemment creees commencent a pericliter d~s que les responsables de leur lancement les delaissent pour se consacrer a d'autres tAches. 80uvent aussi, les equipes dirigeantes se succ~dent avec une rapidite deconcertante; l'immobilisme face a des probl~mes urgents n'est pas moins frequent, et tout aussi nefaste. Pour remedier aces carences en l'espace d'une generation, les pays africains devront definir une strategie de developpement institutionnel englobant a la fois le secteur public et le secteur prive. - 82 - Am~liorer Ie fonctionnement des administrations 2.100 Comme l'a dit Ie Pr~sident Abdou Diouf, ce n'est pas d'un effacement de l'Etat dont les pays africains ont besoin, mais d'un appareil administratif qui rende plus efficace l'action des pouvoirs publics. En d~pit des reformes entreprises dans les ann~es 80, les administrations publiques continuent de fonctionner extr&mement mal en Afrique. Cette situation tient essentiellement aux facteurs suivants Ie gonflement incontrOI~ des effectifs dans les administrations et dans les entreprises publiques, qui servent bien souvent de refuge aux jeunes qui, leurs ~tudes termin~es, ne trouvent pas A s'employer ailleurs; l'avancement rapide de gens insuffisamment qualifi~s qui n'ont une idee pr~cise ni du fonctionnement des institutions qu'ils dirigent, ni du role qu'elles sont cens~es jouer; les difficult~s qu'~prouvent les cadres dirigeants, en raisondu contexte politique et social A motiver leur personnel et A lui imposer une certaine discipline; Ie fait que les gouvernants n'ont pas vraiment compris que Ie fonctionnement optimal d'une administration exige que son personnel, notamment ses cadres sup~rieurs, soit dfrment qualifi~ et agisse selon des r~gles et des crit~res objectifs. Ie resserrement dans un nombre croissant de pays des bar~mes des traitements de la fonction publique, au d~triment des cadres sup~rieurs. 2.101 Conscients de l'urgence du probl~me. plusieurs pays - notamment la la Gambie. Ie Ghana, la Guin~e. Mauritanie, Ie S~negal et la Republique centrafricaine - ont entrepris de vastes r~formes administratives, qui n'ont pas encore ~te men~es A leur terme. Ces reformes consistent essentiellement A redefinir et A preciser Ie mandat des organismes publics, et A les contraindre A ne recruter qu'apres une evaluation rigoureuse de leurs besoins; A organiser des tests et des examens qui facilitent la selection des ~lements les plus qualifies et Ie licenciement du personnel excedentaire moyennant une indemnisation et une aide A l'insertion dans Ie secteur prive; A ameliorer la gestion du personnel, et notamment A organiser des concours d'entree. A instituer des systemes de notation periodique permettant l'avancement au merite plutOt qu'A l'anciennet~ ou par favoritisme, et A etablir des registres du personnel cOlncidant exactement avec les etats de paie. A ameliorer s~lectivement la structure des salaires de maniere A pouvoir attirer et retenir un personnel hautement qualifie. 2.102 Les emplois du secteur public representent plus de la moiti~ des emplois non agricoles dans les pays africains, contre 36 % dans les pays d'Asie et 27 % seulement dans les pays latino-americains. Le gonflement chronique des effectifs nuit gravement A l'efficacite des organismes ,.. - 83 - publics, d'une part parce que les fonctionnaires sont mal r~partis et n'ont pas les moyens mat~riels de bien travailler et, d'autre part, parce que la pr~sence de nombreux oisifs sape Ie moral de ceux qui voudraient travailler. De nombreux minist~res fonctionneraient probablement mieux avec une fraction seulement de leurs effectifs actuels. II suffirait souvent, pour r~duire consid~rablement les effectifs, d'appliquer la r~glementation existante, et notamment de licencier les absent~istes inv~t~r~s, de respecter l'Age de d~part obligatoire a la retraite et de renvoyer Ie personnel temporaire une fois qu'il s'est acquitt~ des tAches pour lesquelles il avait ~t~ recrut~. II est possible de r~duire les charges salariales des administrations en ~liminant les emplois fictifs, les cumuls et l'avancement automatique. Un r~gime de r~mun~ration fond~ sur Ie m~rite, selon lequel une part plus importante de la r~mun~ration consiste en des primes accord~es en fonction du rendement plutOt que du rang occup~ dans la hi~rarchie, contribue A motiver Ie personnel. 2.103 Dans nombre de pays, les traitements de la fonction publique se sont sensiblement d~grad~s au cours des dix dernieres ann~es. Cette ~rosion a souvent proportionnellement Ie plus touch~ les cadres les plus hautement qualifi~s, ceux pr~cis~ment qui font Ie plus d~faut A ces pays et qui ~migrent en plus grand nombre. II apparait, en prenant comme rep~re nombre de criteres nationaux et internationaux, que les taux de r~mun~ration, trop ~lev~s lors de l'accession A l'ind~pendance, devront diminuer encore. II n'en reste pas moins que, dans plusieurs pays, ces taux sont tomb~s A un niveau o~ ils cessent d'@tre comp~titifs et ne permettent plus aux administrations de recruter Ie personnel ayant les comp~tences n~cessaires, ni aux agents de l'Etat de faire vivre leurs familles sur leurs seuls traitements. Les effets de cet ~tat de choses sont partout manifestes, qu'il s'agisse de moral du personnel, de l'extension du travail ou de la g~n~ralisation de formes diverses de corruption. Et cependant, malgr~ la vari~t~ et l'ampleur des besoins auxquels doit satisfaire Ie Tr~sor, il faudra, dans les pays o~ les traitements publics se sont effondr~s, op~rer en les ~talant de reductions syst~matiques des effectifs et affecter les ~conomies ainsi r~alis~es A une revalorisation des traitements pour motiver a nouveau Ie personnel de l'Etat. 2.104 Les problemes de personnel sont certes cruciaux, mais ils sont loin d'@tre les seuls. Le r~glement du personnel et les reglements financiers sont complexes, tr~s mal connus et appliqu~s n'importe comment, ce qui contribue a une tr~s grave dilution des responsabilit~s. Les d~passements de credits et les d~tournements de fonds sont chose courante et passent inaper9us faute d'une comptabilite efficace et d'audits. Et m@me lorsque des audits sont r~alis~s, ils restent g~n~ralement sans suite. II est imp~ratif de mettre fin a ce laxisme. Avec de la patience et de la pers~v~rance, il est possible de mener A bien une r~forme administrative. La Guin~e, dont les administrations s'etaient gravement d~t~rior~es durant les ann~es 10, a entrepris une reforme administrative qui a commenc~ de porter ses fruits et a notamment abouti au licenciement de 16 000 fonctionnaires ces deux dernieres ann~es. Le Gouvernement gambien est all~ encore plus loin; il a proc~d~ a des licenciements massifs qui ne l'ont pas emp@che d'@tre reconduit dans son mandat a l'issue d'~lections - 84 - 1ibres organis~es peu apr~s la mise en train des r~formes (voir Encadr~ 2.7). 2.105 Alors que 1es effectifs de 1a fonction publique sont p1~thoriques et que l'on compte de plus en plus de gens instruits parmi les chOmeurs, 1es pays africains manquent crue11ement de fonctionnaires comp~tents, en particu1ier de cadres techniques sup~rieurs. Cette situation tient en partie aux carences de 1a formation, et en partie a ce que de nombreux Africains qualifi~s pas sent dans 1e secteur priv~ ou ~migrent. On estime, entre autres, que 10 000 Nig~rians ayant une formation professionne11e auraient trouv~ un emp10i aux Etats-Unis. En leur offrant des conditions suffisamment attrayantes, i1 devrait ~tre possible de convaincre une bonne partie de ces travai11eurs de regagner leur pays d'origine. Ainsi, i1 ne suffit pas de former des gens qualifi~s; encore faut-i1 pouvoir 1es recruter et 1es garder, non pas tant en leur offrant des sa1aires ~lev~s (ce que 1es pays africains n'ont pas toujours 1e moyen de faire) qu'en faisant en sorte qu'ils exercent des emp10is productifs et stables qui leur apportent des satisfactions professionne11es suffisantes. Rendre plus efficace 1a gestion de l'~conomie 2.106 Les pays africains s'en sont jusqu'a pr~sent 1argement remis a des organismes ext~rieurs et a des consultants ~trangers pour 1es travaux d'ana1yse sur lesque1s reposent des d~cisions clefs de po1itique ~conomique. I1s doivent ~tre mieux ~quip~s pour se charger eux-m~mes de ce travail s'i1s veu1ent acc~der a une plus grande autonomie ~conomique. Dans 1es ann~es 80, 1es gouvernements africains ont dO ~laborer des programmes d'ajustement pour pouvoir obtenir une aide ext~rieure - en particulier ce11e du FMI et de 1a Banque mondia1e. I1s ont donc ~t~ amen~s a faire davantage appel a des analystes ~conomiques, mais 1es progr~s ont ~t~ 1ents. 11 faut que les gouvernements africains pr~voient 1es moyens de d~ve1opper a cet ~gard les capacites locales. Pendant la periode de transition, des conseil1ers ~trangers pourront continuer de participer aux analyses et aux activites de formation. A terme, cependant, les pays africains devraient faire spontan~ment appe1 a des experts en mati~re de politique ~conomique et ~tre a m~me de trouver chez eux ces experts. Les gouvernants pourraient commencer par recourir davantage aux services du personnel africain qua1ifie dont ils disposent deja. La sous-uti1isation de ce personnel contraint l'Afrique a s'en remettre davantage a des consei11ers etrangers dont el1e n'est d~ja que trop tributaire. 2.107 Les pays africains ne pourront pas se doter du jour au 1endemain de leur propre cadre d'ana1ystes ~conomiques. Ce cadre doit avoir une structure pyramidale. Au sommet de la pyramide, on trouve habitue11ement une petite ~quipe de conseil1ers qui s'occupent essentie11ement de la strat~gie ~conomique et d'autres grandes questions. Cette ~quipe doit ~tre id~ologiquement proche du pouvoir et avoir 1a confiance des dirigeants politiques. Juste en-dessous, on trouve 1a cat~gorie des analystes sp~cia1is~s dans divers aspects de la po1itique ~conomique - po1itique agrico1e, conservation, fixation des prix, budget, balance des paiements, etc. Ce sont des technocrates qui assurent la continuite en cas de changement de gouvernement. Pour am~liorer 1a qualit~ du travail de ces - 85 - sp~cialistes et assurer Ie maintien de l'appareil marne s'il est n~glig~ pendant un certain temps, il est indispensable que la pyramide s'~largisse au-dela de la haute administration, ce qui implique que les universit~s et les ~tablissements de recherche ind~pendants, ainsi que des bureaux d'~tudes ~conomiques, se lancent dans l'analyse ~conomique. Les donateurs ont apport~ une contribution utile au d~veloppement institutionnel en renfor9ant les moyens d'analyse ne relevant pas des pouvoirs publics - essentiellement par l'interm~diaire de fondations priv~es se consacrant a la recherche sur Ie d~veloppement a long terme. II existe des fondations de ce genre dans plusieurs pays, mais les pouvoirs publics ne font gu~re appel a leur concours. La Tanzanie fait exception a cet ~gard. Des ~conomistes appartenant au corps universitaire y ont jou~ un r~le pr~cieux dans l'~laboration de la r~forme ~conomique (voir l'Encadr~ 2.8). 2.108 Les pays africains doivent chercher a se doter d'experts de haut niveau et l'un des moyens d'y parvenir consiste a ~tablir des liens professionne1s entre ~conomistes africains. La cr~ation d'un r~seau professionne1 d'~conomistes en Afrique de l'Est est un pas important dans cette direction, et cette initiative pourrait uti1ement atre imit~e ai11eurs et dans d'autres disciplines (voir Encadr~ 7.5). 2.109 11 est extr~mementdiffici1e de proc~der aux analyses ~conomiques n~cessairesa 1a d~finition d'une po1itique sans pouvoir s'appuyer sur des donn~es fiab1es et r~centes. Or, 1es services statistiques laissent cruel1ement a d~sirer en Afrique. Dans 1a p1upart des pays, i1 faudrait de toute urgence 1es r~organiser comp1~tement et leur donner davant age de moyens financiers. La co11ecte des donn~es devrait atre r~orient~e en fonction des besoins des responsab1es de 1a po1itique ~conomique. Cette question est trait~e plus en d~tai1 dans l'annexe statistique. Renforcer 1es co11ectivit~s locales 2.11u Dans 1a p1upart des pays africains, 1a croissance des vi11es a ~t~ si rap ide que 1es services de p1anification et 1es services administratifs, tant centraux que 10caux, sont comp1~tement d~bord~s. C'est donc de plus en plus aux co11ectivit~s locales qu'i1 appartient de r~pondre a 1a demande, sans cesse croissante, d'~quipements collectifs. Cette ~vo1ution est dans l'ordre des choses, car les collectivit~s locales, en d~pit de leurs faiblesses et de leur manque de ressources financi~res, sont mieux p1ac~es que quiconque pour r~pondre aux besoins 10caux. Ce1a vaut aussi bien pour 1es campagnes que pour 1es vi11es. L'exemp1e du Rwanda, ou 1es communes ont su faire preuve d'initiative, mobi1isant 1a population pour qu'e11e participe a l'entretien des routes, a 1a plantation d'arbres et a 1a conservation des sols, i11ustre 1e potentie1 des co11ectivit~s locales. L'action men~e pour doter 1es co11ectivit~s locales de personnel comp~tent et 1es rendre attentives aux besoins 10caux est un ~l~ment essentie1 du d~ve10ppement des capacit~s. 11 faudra notamment renforcer 1es pouvoirs fiscaux des co11ectivit~s locales et d~finir nettement 1es d~l~gations de pouvoirs dont e11es b~n~ficient. Nombre des prob1~mes des co11ectivit~s urbaines et rura1es ne peuvent ~tre r~solus que 10ca1ement; 1es solutions impos~es par 1es autorit~s centrales sont vou~es - 86 - A l'echec. Ce qu'i1 faut, c'est miser sur l'energie et 1es ressources de 1a population locale. 2.111 Jusqu'A present, 1a decentralisation a consiste essentie11ement, en Afrique, A renforcer 1es services locaux des administrations centra1es. Pour justifier ce choix, on a fait va10ir que 1es co11ectivites locales, faute de contr01es suffisants, risquaient d'~tre para1ysees par 1a corruption et l'inefficacite. Cependant, un revirement se dessine. Les Etats francophones d'Afrique de l'Ouest ont entrepris un nouvel effort de decentralisation; 1e Nigeria a entrepris un programme de reevaluation de ses institutions locales eta1e sur dix ansj 1a Tanzanie s'emp1oie A revita1iser 1es co11ectivites locales. Ces initiatives vont dans 1a bonne direction. 11 convient de 1es e1argir et de 1es renforcer. Favoriser l'essor du secteur prive 2.112 Puisque 1es bureaucraties et entreprises d'Etat se sont averees inefficaces, 1es strategies futures de deve10ppement pourraient faire une plus grande place au secteur prive. Souvent. bien que 1e pouvoir central leur oppose une vive hosti1ite, 1es petites entreprises locales font preuve d'une vita1ite remarquab1e. En Guinee, par exemp1e, sous 1e regime precedent, de petites maisons de commerce privees ont continue d'assurer l'approvisionnement de 1a population en biens essentie1s en depit de l'acharnement que 1es bureaucrates mettaient A 1es en emp~cher. La nouvelle strategie devrait tendre A conci1ier 1es imperatifs d'une administration efficace avec 1es aspirations des Africains, qui ont 1e goat de l'entreprise independante, et avec 1a vo1onte des groupes sociaux et re1igieux et des co11ectivites locales de s'associer A l'effort de deve10ppement (voir Encadre 2.9). Pour exploiter cette capacite locale 1atente, i1 suffirait de lever certaines entraves administratives et de prendre des mesures de soutien. 2.113 La nouvelle strategie devrait tendre A exploiter 1e dynamisme du secteur prive et A encourager 1es initiatives l tous 1es niveaux. Ce1a veut dire soutenir A 1a base l'action des associations de village ou de quartier, aider au niveau intermediaire 1es associations locales privees, 1es federations de cooperatives et autres organisations et soutenir au plan national 1es chambres de commerce ou d'industrie, 1es associations de commer9ants, 1es organisations non gouvernementa1es A vocation po1yva1ente (te11es que CONGAD au Senegal et VADA au Kenya) et 1es associations de banquiers, de medecins, d'avocats, de comptab1es et autres associations professionne11es. L'action collective de ces divers groupes s'inscrit dans 1a tradition africaine (voir Encadre 8.3). Les dimensions po1itiques et cu1ture11es 2.114 Les enseignements de l'histoire donnent A penser que 1a 1egitimite po1itique et l'existence d'un consensus sont parmi 1es conditions essentie11es d'un deve10ppement durable. Pour ~tre viable, une strategie de deve10ppement con9ue pour 1es pays africains doit tenir compte des traditions historiques de l'Afrique aussi bien que des rea1ites actuelles. E11e suppose que l'on substitue aux attitudes souvent autoritaires du passe une po1itique de participation, l l'ecoute de 1a base " - 87 - et qui fasse intervenir les populations, au niveau du village notamment, dans les d~cisions qui les touchent directement. Modernisation 2.115 Les intellectuels africains soulignent dans leurs ~crits que dans la majorit~ des cas, les strat~gies initiales de d~veloppement n'ont pas su tirer parti de ce que les soci~t~s traditionnelles avaient de meilleur. Dans les ann~es qui ont suivi l'accession des pays africains A l'ind~pendance, les th~oriciens de la modernisation op~raient g~n~ralement une distinction tranch~e entre les soci~t~s "modernes" - c'est-!-dire, pour eux, "occidentales" - et les soci~t~s pr~-modernes ou traditionnelles. Selon eux, Ie progres consistait A mettre en place une soci~t~ moderne. Cette conception du progres est! l'origine de nombreuses erreurs qui ont notamment contribu~ ! l'~chec des r~formes agraires, des projets de d~veloppement de l'~levage, des mesures de fixation des populations rurales et des programmes de d~veloppement int~gr~. 2.116 Les strat~gies futures de d~veloppement doivent tenir compte de ce que nombre des valeurs et des institutions traditionnelles de l'Afrique, loin d'entraver Ie d~veloppement, peuvent y contribuer. Par exemple, la persistance des all~geances aux groupes primaires, quoique souvent d~plor~e par les non-Africains, a beaucoup contribu~ au d~veloppement en Afrique. La culture populaire, la participation des femmes A l'activit~ ~conomique, Ie respect de la nature sont autant de valeurs et de traditions qui peuvent @tre mises au service du d~veloppement. Les systemes informels de cr~dit tirent judicieusement parti des valeurs et des modes d'organisation sociale traditionnels (voir Encadr~s 4.2 et 6.3). De nombreuses m~thodes de cultures indigenes, notamment la polyculture, longtemps critiqu~es, sont maintenant consid~r~es comme techniquement d~fendables. D'une maniere g~n~rale, Ie malaise du secteur moderne contraste avec l'extr@me vitalit~ du secteur non structur~, solidement ancr~ dans les valeurs traditionnelles. Ce secteur a notamment su s'adapter avec la souplesse voulue aux ~v~nements ext~rieurs. 2.117 L'importance du secteur moderne ne doit toutefois pas etre minimis~e. II ne fait aucun doute que pour acc~l~rer la croissance de la production agricole, il importe d'am~liorer la productivit~ grAce a l'adoption de proc~d~s de culture, d'outils et de machines modernes. II y a place aussi pour la modernisation dans d'autres secteurs. Cependant, Ie secteur moderne devrait tendre d~sormais A compl~ter Ie secteur traditionnel plutOt qu'! l'~vincer. II faut se garder aussi d'id~aliser Ie secteur traditionnel, si r~els que soient ses m~rites. La modernisation demeure un objectif valable, mais il doit s'agir d'une modernisation solidement ancr~e dans Ie substrat social de chaque pays. 2.118 Les institutions traditionnelles ne sont pas immuables; elles ~voluent constamment en fonction des circonstances. Les programmes de d~veloppement ne peuvent r~ussir que s'ils tiennent pleinement compte des caract~ristiques sociales de chaque pays et de sa dynamique culturelle. Chaque pays doit, sans perdre de vue ses objectifs fondamentaux, se doter d'institutions dont Ie fonctionnement soit compatible avec Ie systeme de valeurs observ~ par sa population. Dans certains domaines, cependant, il - 88 - n'y a gu~re place pour des compromis. Les liens fami1iaux et ethniques qui renforcent l'action des co11ectivit~s locales n'ont pas ~ entrer en 1igne de compte dans 1e fonctionnement des administrations centra1es, dont 1e personnel doit ~tre choisi se10n des crit~res de qualification, et 00 toute confusion entre deniers publics et ressources priv~es est ~videmment a proscrire. Accession des femmes aux responsabi1it~s 2.119 I1 est de plus en plus admis que 1es femmes apportent une contribution essentie11e au d~ve10ppement. E11es ont un rOle pr~pond~rant dans 1a production a1imentaire, e11es g~rent 1es ressources fami1ia1es et c'est d'e11es que d~pend 1e bien-~tre des fami11es (voir 1e chapitre 3). Cependant, en ce qui concerne 1e rOle des femmes, i1 semble bien que 1es traditions ai11ent a l'encontre des imp~ratifs du d~ve10ppement. En Afrique, 1es femmes sont soumises a toutes sortes de suj~tions d'ordre juridique, ~conomique et social. I1 subsiste m~me certaines lois qui leur refusent 1a capacit~ juridique. Au Zalre, par exemp1e, une femme a besoin de l'autorisation de son mari pour ouvrir un compte en banque, et 1e nouveau code civil dispose que 1es biens de l'~pouse sont g~r~s par son mari sauf si ce1ui-ci est d~c1ar~ incapable, et que, si l'~pouse peut g~rer 1es biens qu'e11e a acquis dans l'exercice de sa profession, ceux-ci peuvent lui ~tre soustraits par son mari s'i1 estime qu'i1 en va de l'int~r~t du m~nage. De te11es entraves juridiques re1~guent 1es femmes dans 1e rOle d'agents ~conomiques du secteur non structur~. 2.120 Les strat~gies futures de d~ve1oppement devraient traiter 1es femmes comme des adu1tes a part entiere. Les gouvernements africains et 1es donateurs devraient aider 1es associations f~minines a participer p1einement au d~ve10ppement ~conomique et social en leur accordant des moyens de formation et de cr~dit et en faisant en sorte que 1es institutions officie11es 1es traitent comme 1es autres groupements et organisations. Le pouvoir au service du d~ve10ppement 2.121 La longue 1iste des prob1~mes de d~ve10ppement des pays africains d~note une crise du pouvoir, 1e pouvoir ~tant entendu ici comme 1e pouvoir po1itique de diriger des affaires d'une nation. Faute d'un secteur priv~ suffisamment influent pour mettre un frein a leurs exces, 1es serviteurs de l'Etat, dans de nombreux pays africains, se sont d'abord servis eux-m~mes sans crainte d'~tre inqui~t~s. Les simples particu1iers ont r~agi en se prot~geant par des r~seaux de relations personne11es p1utOt qu'en cherchant a mettre l'Etat tout puissant devant 1a responsabi1it~ de ses ~checs. I1 en est r~su1t~ une personna1isation de 1a vie po1itique qui contraint 1es po1iticiens a cu1tiver une c1ient~le s'i1s veu1ent rester au pouvoir. Les dirigeants s'arrogent de vastes pouvoirs discr~tionnaires et n'ont cure de 1a l~gitimit~. L'information est contr01~e, et 1es associations b~n~vo1es, si e11es n'acceptent pas d'etre dirig~es par des gens ~ 1a solde du pouvoir, risquent d'etre dissoutes. Ce1a ne cr~e guere un c1imat propice au dynamisme ~conomique. Dans 1e pire des cas, l'Etat verse dans 1a tyrannie et l'arbitraire. Cette pente n'est pourtant pas irr~sistib1e. Comme 1e montre l'exemp1e du Botswana, une ~quipe dirigeante - 89 - devouee peut reussir A operer un redressement. Un tel redressement exige des efforts systematiques pour mettre en place une structure institutionne11e pluraliste, la volonte de respecter les lois et une protection jalouse de la liberte de la presse et des droits de l'homme. 2.122 Les intermediaires ont un role important A jouer : ils peuvent, A l'interieur de 1a societe, exprimer les preoccupations locales plus efficacement que les institutions locales. lIs sont ainsi A m~me d'elargir Ie champ des idees et des va leurs qui influent sur l'orientation des politiques. lIs peuvent aussi faire pression sur les detenteurs de la puissance publique pour les inciter A plus d'efficacite et pour les responsabiliser. Au Kenya, Ie National Christian Council joue ce role depuis un certain temps. Des organisations du m~me genre sont apparues dans plusieurs autres pays. Bien que leur role puisse donner lieu A des controverses politiques, les intermediaires contribuent indubitablement A faire participer davant age les citoyens a l'effort de developpement. Lorsqu'ils traitent avec les organisations locales, les intermediaires doivent agir avec circonspection. lIs commettent souvent l'erreur de court-circuiter les notables locaux, souvent parce qu'ils leur reprochent de profiter de leur situation. Le reproche ne semble guere fonde; bien au contraire, des etudes ont montre que 1a collaboration avec les dirigeants locaux contribuait A l'efficacite des programmes de developpement. II est indispensable de mieux informer Ie public pour Ie sensibiliser davant age aux problemes de developpement. Trop souvent, une mauvaise information - parfois deliberee - sur la politique gouvernementale emp@che la formation d'une conscience politique et decourage la participation populaire. Lutter contre la corruption 2.123 L'ampleur de la corruption depend largement de l'exemple donne par ceux qui tiennent les renes du pouvoir. Une fois que de mauvaises habitudes ont ete prises, il est difficile de s'en departir. Et l'aide etrangere, souvent fournie par l'intermediaire d'entrepreneurs ou de fournisseurs avides de s'enrichir, a malheureusement multiplie les occasions de malversations. Des centaines de millions de dollars, ainsi detournes, ont quitte l'Afrique pour alimenter des comptes bancaires prives. Le coftt de ces pratiques ne se mesure pas seulement aux sommes detournees, mais aussi A l'effet profondement demoralisateur qu'elles exercent sur la societe en general. 2.124 II Y a plusieurs moyens de lutter contre la corruption. L'elimination des controles inutiles reduit considerablement les possibilites qu'ont les fonctionnaires de s'enrichir par des pots de vin. La transparence des modalites de passation des marches, l'obligation de tenir une comptabilite rigoureuse et a jour, l'obligation de publier des rapports d'audit, et des consignes de severite donnees aux magistrats charges de poursuivre ceux qui detournent les deniers publics sont autant de mesures qui contribuent a une gestion financiere honn~te. Les organismes d'aide exterieure ont Ie droit d'exiger que des mesures de ce genre soient prises. Les Etats donateurs se doivent aussi d'exercer des poursuites contre les entreprises ayant leur nationalite qui recourent a des d,essous de table pour emporter des marches; malheureusement, les Etats- Unis s~nt, pour Ie moment, Ie seul pays a avoir rendu ces pratiques - 90 - ill~gales. La pr~sence d'une presse libre et vigilante - attributs qui ne sont que trop rarement ceux de la presse africaine - contribue notablement A une saine gestion des affaires publiques, et cela vaut pour l'Afrique comme pour les autres r~gions. II se trouve que les deux pays africains qui obtiennent les meilleurs r~sultats ~conomiques - Maurice et Ie Botswana - sont des d~mocraties parlementaires ou la libert~ de la presse n'est pas un vain mot. Les dimensions internationales 2.125 Les efforts des pays africains ne pourront aboutir que dans un climat international propice. L'instauration d'un tel climat d~pend en particulier de quatre facteurs la relance de l'int~gration et de la coop~ration r~gionales; les conditions du commerce international, qui devraient ~tre lib~rales et orient~es vers la croissance; une assistance financiere assurant aux pays de la r~gion des apports r~guliers sur une longue p~riode; moins de dirigisme de la part des donateurs. 2.126 Les Africains considerent depuis longtemps que l'int~gration et la coop~ration r~gionales sont indispensables au d~veloppement soutenu de leur r~gion, et ils n'ont pas tort. Cependant, il faudra des initiatives nouvelles pour que des progres r~els soient accomplis A cet ~gard (voir Ie Chapitre 7). Le probleme de l'Afrique du Nord ne sera pas abord~ dans Ie pr~sent rapport. II n'est cependant pas exclu de penser qu'on trouvera des solutions aux problemes qui ont divis~ les peuples de la r~gion et que sera instaur~e entre les pays d'Afrique australe une coop~ration ~conomique qui, A terme, transformera les perspectives de l'ensemble de la r~gion. 2.127 Pour que l'Afrique puisse accro1tre et diversifier ses exportations, il est essentiel que les ~changes internationaux se d~veloppent. Les pays africains, dans Ie cadre du GATT, b~n~ficient du Systeme g~n~ralis~ de pr~f~rences, et la Convention de Lom~ leur ouvre pratiquement sans restriction les march~s de la Communaut~ ~conomique europ~enne. Pour les produits manufactur~s, l'acces aux march~s ne pose donc pas de problemes. En revanche, les pays africains se heurtent souvent A des obstacles lorsqu'ils veulent exporter ceux de leurs produits agricoles pour lesquels ils sont comp~titifs - la viande de boeuf par exemple. Des pratiques de dumping ont gravement compromis les exportations de produits laitiers du Kenya, et les restrictions d'importation impos~es par les Etats-Unis ont eu Ie m~me effet sur ses ventes de fleurs coup~es. Les mesures protectionnistes qui emp~chent l'importation de produits africains ne servent ni les int~r~ts des pays importateurs, ni ceux des pays exportateurs, et elles devraient ~tre vigoureusement combattues. II faudrait de m~me encourager les nouveaux pays industriels A ouvrir leurs march~s aux produits africains. 2.128 L'Afrique doit se donner pour but de devenir progressivement moins tributaire de l'aide ext~rieure et de s'en passer un jour completement. Cette aide n'a pas que des r~sultats positifs et, parmi les effets n~gatifs, Ie plus grave est peut-atre qu'elle permet de remettre au - 91 - lendemain les decisions penibles. La communaute des donateurs se doit de veiller avec Ie plus grand soin a ce que les retombees negatives ne soient pas les plus fortes. Cependant, les besoins minima d'assistance exterieure des pays africains resteront a moyen terme importants (voir Ie chapitre 8). 11 importe que les donateurs garantissent aux pays africains disposes a entreprendre des reformes durables des apports reguliers qui progresseront dans la mesure voulue. 11 est indispensable aussi que des mesures hardies soient prises rapidement pour reduire la dette des pays africains, comme on Ie verra au Chapitre 8. 2.129 Les donateurs devraient ~tre disposes a faire preuve de souplesse lorsqu'ils aident les pays africains a developper leur capacite. II apparait de plus en plus que les formules appliquees dans l'hemisph~re nord ne permettent m~me pas de regler efficacement les probl~mes des pays de cet hemisph~re : dans certains de ces pays, la lutte contre la pauvrete n'a gu~re donne plus de resultats que dans les pays de l'hemisph~re sud. II n'est pas rare que les programmes etablis a l'intention des pays de l'hemisph~re sud Ie soient par des specialistes de l'hemisph~re nord qui proc~dent sans faire appel aux responsables locaux et, bien sOrt sans tenir compte des desiderata de la population. Les programmes ainsi con~us sont souvent appliques sans conviction par les pays interesses, ce qui explique dans bien des cas leur inefficacite. Des formules d'assistance nouvelles et plus efficaces sont proposees au Chapitre 9. Conclusion 2.130 Les strategies futures de developpement doivent avoir pour objectif premier de transformer les structures de production, de stopper Ie declin des institutions des pays africains et de jeter les bases d'une croissance durable et equitable. Les programmes d'ajustement structurel mis en oeuvre recemment en Afrique constituent un premier pas important dans la bonne direction, mais il reste fort a faire, et il convient de s'attacher davantage a attenuer les consequences sociales nefastes que peuvent avoir ces programmes. Le manque d'efficacite de ces derniers tient essentiellement a l'insuffisance des capacites locales, tant dans Ie secteur priv~ que dans Ie secteur public, ainsi qu'a leur conception et a leurs modalites d'execution. Trop souvent con~ues par des experts de l'exterieur, les reformes sont mal assimilees et sont mises en oeuvre sans conviction. Un profond malaise politique paralyse l'action dans la plupart des pays de la region. Le public voit dans l'elite un groupe de profiteurs egolstes, et les gouvernements n'ont pas su rallier Ie peuple a la cause du developpement. 2.131 L'Afrique poss~de d'abondantes ressources. Moyennant un certain nombre de mesures hardies, les pays africains pourraient aisement parvenir a un taux de croissance annuelle de 4 %, et c'est la l'objectif propose ici. La strategie dans laquelle s'inscriraient ces mesures devrait : Poursuivre les progrmmes d'ajustement. Ces programmes devraient @tre progressivement modifies de mani~re a tenir davantage compte de l'impact social des reformes, des investissements necessaires pour accelerer la croissance et des mesures A prendre pour que les realisations soient durables. - 92 - Mettre l'accent sur Ie developpement des capacites locales. L'Afrique a besoin de lancer un nouvel effort pour mettre en valeur ses ressources humaines. Cela suppose une totale reorientation du syst~me d'enseignement et de formation afin d'ameliorer la qualite et Ie rapport efficacite-conts et de mieux l'adapter aux besoins; un renforcement systematique des institutions publiques et priveesj un degraissage des organismes publics plethoriques qui, au lieu d'exercer une activite de contrOle, s'attacheraient a promouvoir Ie developpement et a encourager l'essor d'organisations non gouvernementales et de groupements populairej Creer des conditions propices a l'exercice d'activites productives : supprimer les reglementations inutiles qui gr~vent les charges des entreprisesj maintenir les taux de charge a des niveaux competitifs et renforcer les services d'infrastructure. Briser Ie cercle vicieux forme par une faible production agricole, une demographie galopante et la degradation de l'environnement en ameliorant la recherche agricole et les services de vulgarisation, en encourage ant la planification des familIes et en mettant en oeuvre des plans de protection et de l'environnement. Poursuivre les efforts d'integration et de cooperation regionale pour surmonter la fragmentation des economies africaines. Forger entre les gouvernements et les donaeurs des liens veritables d'association fondes sur ces objectifs. 2.132 Les chapitres qui suivent traitent plus en detail des principales questions a regler pour mettre en oeuvre cette strategie. Le rapport s'ach~ve sur un expose des besoins financiers des pays africains, du rOle que devraient jouer les donateurs et des mesures a prendre pour que se constitue a l'echelle mondiale une coalition pour Ie succ~s d'une strategie nouvelle concertee de developpement de l'Afrique. - 92a - Encadre 2.1 Le plan ma1gache de protection de l'environnement Le Gouvernement ma1gache a entrepris une action rigoureuse pour parer a 1a grave degradation de l'environnement qui menace 1e deve10ppement a long terme du pays. Avec l'aide des uonateurs, i1 a etab1i un Plan d'action pour l'environnement (PAE) , comportant cinq trains de mesures visant o a limiter 1e deboisement et l'erosion des sols; o a preserver 1e patrimoine bio10gique unique de Madagascar; o a suivre de pr~s 1es deve10ppements eco10giques; o a sensibi1iser 1a population aux questions d'environnement; et o a stopper 1a pollution des vi11es. Quatre-vingts pour cent de 1a superficie de Madagascar etait a l'origine couverte de for~ts et est peup1ee d'une faune et d'une f10re extr~mement variees. 11 n'en reste aujourd'hui de forets que sur 16 % du territoire. Sans un renversement des tendances actuelles, 1es for~ts nature11es de Madagascar auront disparu d'ici 30 ans environ; ce recu1 entraine une desastreuse erosion des sols et 1a disparition progressive, mais irreversible d'esp~ces biologiques d'une diversite exceptionne11e, qui constitue une perte permanente pour l'humanite. Le deboisement a en outre pour consequence une baisse constante de 1a ferti1ite des sols et une enorm.,. augmentation du coOt des investissements et de l'entretien des grands reseaux d'irrigation et de construction de barrages. Les degAts subis tous 1es ans par l'environnement sont de l'ordre de 5 a 15 % du PNB. Le PAE a ete con9u sous forme d'action continue presentant 1es caracteristiques suivantes : () Un ferme engagement politique. Le Plan, qui a ete lance par 1e Premier Ministre, a beneficie de l'appui des partis et est consldere comme faisant partie integrante du plan de deve10ppement de Madagascar. Une ChartE! nationale de l' environnement sera soumise a l' approbation de I' As sE.!mblee nationa1e. Bien que les donateurs aient enti~rement souscrit a l'initiative du Gouvernement, i1s n'ont ete que les cata1yseurs d'un veritable elan national. (l Une large participation et un effort de communication. Pour preparer le plan, on a mobilise environ 150 specialistes locaux appartenant a diverses disciplines et attaches a diverses organisations publiques, semi-pub1iques et privees. On a en outre lance une energique campagne multimedia pour sensibi1iser toutes 1es couches de la societe malgache aux questions d'environnement. L'enseignement de l'eco10gie est progressivement introduit a tous 1es niveaux de l'enseignement : primaire, secondaire et universitaire. Cl Un rap ide passage du stade de 1a recherche a celui de l'action. Les etudes faites ont debouche sur des actions sur Ie terrain, des operations pi10tes, l'etab1issement d'un grand programme d'investissement - 93 - et 1a r~daction de propositions de r~formes po1itiques et institutionne11es. Le programme d'investissement propos~ comprend : des projets de gestion des bassins versants pour prot~ger de vastes p~rim~tres irrigu~s, des barrages hydro~lectriques et des r~servoirs; une co11ecte syst~matique d'informations sur l'environnement (~tab1issement de cartes, t~l~d~tection, l'~tab1issement de cadastres) pour am~liorer 1a gestion des ressources. et des programmes ~ducatifs. Sur 1e plan juridique et po1itique, i1 est pr~vu de modifier 1a 1~gis1ation et 1a fisca1it~ fonci~res pour encourager 1a population A reboiser et adopter des pratiques de nature A pr~server l'environnement en lui donnant de mei11eures garanties sur son droit A 1a terre. en ~tab1issant des proc~dures permettant de passer syst~matiquement au crib1e 1es gros investissements et de contr01er 1es esp~ces en voie de disparition. Les efforts faits par Madagascar pour pr~server 1a diversit~ bio1ogique unique de ses terres, qui r~pondent A une pr~occupation durable de l·humanit~. se sont attir~ un puissant appui des donateurs. Ses efforts porteront d'ai11eurs des fruits sur 1e plan ~conomique sous forme de tourisme ~co1ogique. Un grand projet touristique, qui ouvrirait 1es parcs nationaux au tourisme dans 1e cadre de contr01e rigoureux. a ~t~ 1anc~ avec 1e concours de fonds priv~s. Ce tourisme sera une source, non seu1ement de recettes fisca1es et autres, mais ~ga1ement de cr~ation d'emp1ois dans une r~gion qui en a 1e plus grand besoin. Le Lesotho, Maurice, 1e Ghana et 1e Rwanda ont eux aussi 1anc~ des initiatives en faveur de l'environnement, et d'autres pays ont manifest~ leur d~sir d'en faire autant. L'exemp1e de Madagascar leur sera d'un pr~cieux secours. - 94 - Encadr~ 2.2 Nig~ria: 1es 1e y ons de l'ajustement L'~conomie nig~riane est un exemp1e des distorsions caus~es par 1a f1amb~e des prix des produits de base, l'effet positif des mesures vigoureuses prises par 1e Gouvernement pour r~orienter 1es incitations et 1a n~cessit~ de temp~rer 1es r~percussions socia1es n~gatives des mesures d'ajustement. La brusque hausse des prix du p~tro1e a fait passer 1es exportations de 4 milliards de dollars en 1975 A 26 milliards de dollars en 1980, tandis que 1e PNB par habitant passait de 360 dollars A plus de 1.000 dollars. La hausse des d~penses pub1iques a1iment~e par 1es recettes du p~tro1e s'est traduite par un d~laissement de l'agricu1ture au profit des services. L'effondrement des prix du p~tro1e s'est toutefois accompagn~ de ce1ui des recettes d'exportation du Nig~ria. En 1986, e11es n'~taient plus que de 6 milliards de dollars, tandis que 1a dette ext~rieure ~tait pass~ de 5 milliards de dollars en 1980 A 25 milliards de dollars en 1986. Le volume r~e1 des importations a diminu~ A un taux moyen de 20 % par an. Les taux de croissance sont devenus fortement n~gatifs et 1e PNB par habitant est tomb~ a 370 dollars. A l'issue du d~bat public, 1e Gouvernement a adopt~ un programme visant a 1ib~ra1iser l'~conomie et 1aisser 1e march~ fixer 1e niveau des prix o en introduisant un syst~me de fixation des taux de change soumis aux lois du march~; o en ~liminant 1es licences d'importation et en 1ib~ra1isant 1a r~glementation relative aux exportations; o en supprimant 1es contr61es de prix et 1es offres de commercialisation agrico1e; et (I en adoptant des po1itiques budg~taire et mon~taire de nature a ~tayer cette action. Ce programme, qui a ~t~ 1anc~ en 1986, a transform~ 1a structure des incitations a l'~conomie. Une devaluation de 75 % de 1a monnaie a sensiblement augment~ 1es prix re1atifs des produits d'importation. 11 en est r~su1t~ une re1ance du secteur des cultures arborico1es. Mais, a mesure que 1es agricu1teurs se sont orientes davantage vers 1es cultures d'exportation et 1a subtitution des importations, 1es prix des produits a1imentaires ont augment~, rendant cette production plus rentable. Cette am~lioration des incitations a l'agricu1ture a renvers~ 1a tendance a favoriser 1e secteur urbain au d~triment de l'agricu1ture qui s'~tait d~ve1opp~e durant 1e boom p~tro1ier. L'ajustement des taux de change et 1es r~formes commercia1es ainsi op~r~es ont r~orient~ 1es devises vers 1es secteurs oh e11es etaient susceptib1es d'~tre 1e plus productives. Les entreprises manufacturi~res, au lieu de faire essentie11ement des montages ou de fabriquer des produits a base de mat~riaux et de pi~ces import~s, se sont tourn~es vers 1a fabrication A base de mat~riaux locaux. Apr~s cinq ann~es de contraction - 95 - au taux de 4 % par an en moyenne, la production manufacturi~re a repris sa croissance a partir de 1987. Le nouveau taux de change et un regime des prix ont ameliore l'utilisation des ressources dans l'economie et encourage les exportations. Bien que les investissements et le niveau des importations aient continue a baisser depuis l'adoption du programme, la production a peu a peu repris. Au cours des cinq annees allant de 1982 a 1986, la production reelle, compte tenu de la production petroli~re, a l'exclusion de l'agriculture, a baisse de 15 %. Plus de la moitie de cette perte avait ete compensee en 1987 et 1988, en depit d'une baisse de 30 % de la valeur reelle des importations. Les exportations de produits autres que le petrole, notamment celles de cacao et autres produits agricoles, ont augmente considerablement, de 40 % par an en 1987 et 1988. Bien que le programme ait rendu l'economie plus efficace, il n'a pas encore debouche sur une reprise des investissements prives, qui sont la cle de toute croissance future. Pour relancer les investissements prives, les autorites ont derni~rement liberalise la reglementation a laquelle ils sont soumis, et notamment relAche les restrictions opposees aux investissements etrangers directs, commence a gerer les grandes entreprises publiques comme des entreprises commerciales et a privatiser les plus petites d'entre elles. En raison en partie du marasme des investissements prives, le PIB est tout juste parvenu a croltre au m~me rythme que la population, et les revenus par habitant ont stagne. La main-d'oeuvre augmentant plus rapidement que les creations d'emplois, le chOmage est reste eleve, encore que le retour a la terre d'un grand nombre de migrants desireux de tirer parti des possibilites nouvelles offertes par le secteur rural a partiellement allege le probl~me. Les salaires reels, qui avaient baisse de plus de moitie en 1982-86, ont baisse d'encore 10 % en 1987, et une mauvaise recolte en 1987 a provoque une hausse des prix. L'assouplissement la politique financi~re du debut de 1988 a accentue les pressions exercees par les prix. Bien que les traitements de la fonction publique aient ete augmentes au debut de 1988, la hausse brutale des prix des produits alimentaires a en grande partie fait perdre aux fonctionnaires Ie benefice de ce rel~vement. Au milieu de 1988, la stabilisation du budget et une bonne recolte ont ralenti la hausse des prix des produits alimentaires jusqu'au debut de 1989. Ensuite, il s'est a nouveau produit une hausse rapide des prix, traduisant en partie la depreciation de la monnaie et la baisse de financement par l'Etat des depenses en devises. Les consequences de cette evolution ont ete extr~mement dures sur le plan social. Plusieurs le90ns se degagent de l'experience nigeriane. La principale est qu'il y a lieu de gerer prudemment Ie produit d'un boom des prix des produits de base. II est en effet difficile de comprimer les depenses publiques lorsque Ie boom prend fin et d'adapter l'economie a un niveau plus bas de depenses. C'est aces difficultes que Ie Nigeria a dU de ne pas pouvoir reagir immediatement a l'effondrement des recettes petroli~res et de voir s'accumuler une dette etrang~re dont il ne pouvait assurer Ie service. La deuxi~me le90n a tirer de cette experience est que la devaluation peut relancer la production agricole et permettre une utilisation plus efficace des ressources. La troisi~me est qu'on ne peut escompter que les mesures macroeconomiques auront un effet immediat. La politique par impulsions sape la confiance des investisseurs et prive ". - 96 - l'~conomie des investissements qui sont indispensables A sa reprise. Ajoutons A cela qu'il faut consid~rer l'ajustement comme un processus continu et que, si une rigoureuse discipline budg~taire n'est pas observ~e, l'inflation peut ais~ment faire perdre au pays les b~n~fices des r~formes et Qtre source de probl~mes sociaux qui auraient pu Qtre ~vit~s. - 97 - Encadr~ 2.3 Les t~l~communications A l'~re de l'information Dans un monde OU l'information joue un rOle de plus en plus important, la comp~titivit~ de l'Afrique d~pendra de sa capacit~ A acc~der A l'information et A communiquer A l'~chelle mondiale. L'informatique a revolutionne Ie processus de decision, augmente la productivite et redistribu~ les avantages comparatifs. Les techniques nouvelles - qu'il s'agisse des ordinateurs personnels, des machines fac-simil~ ou des reseaux num~riques - sont en train de produire une profonde r~volution dans la conduite des affaires. L'utilisation de tout ce materiel suppose la mise en place d'un reseau de telecommunications de base. Or, A l'heure actuelle, la demande non satisfaite de lignes de l'Afrique est de l'ordre de plus de 60 % de la capacite install~e. L'experience d'autres pays montre qu'A une croissance du PIB de 4 % devrait correspondre une expansion du nombre des lignes t~lephoniques de 10 %. Au cours des derni~res annees, ce taux d'expansion a ete de 7 % par an. Pour rattraper l'arriere, il faudrait, sans ~tre trop ambitieux, que Ie nombre des lignes augmente de 12 % par an dans l'Afrique subsaharienne, ce qui represente un investissement de l'ordre de 800 millions de dollars par an, ou de 0,5 % du PIB. C'est lA un objectif modeste compare A l'enorme expansion en cours dans les pays developpes. Les pays europeens consacrent actuellement 0,7 % de leur PIB A cette expansion, alors que l'Afrique n'y consacre que 0,3 %. Pour atteindre cet objectif, l'Afrique devra repenser sa politique traditionnelle A l'egard des telecommunications. Les monopoles publics existants sont dejA debordes et n'ont pas les competences en gestion, les techniciens et les ressources financi~res pour faire face au fonctionnement des services actuels et A leur modeste expansion. En traitant les services de telecommunications comme des services commerciaux et, A certains egards, en les privatisant, on reussirait mieux A mobiliser les ressources et les competences n~cessaires. Le rapport coftt-avantages de bons reseaux de communications est si eleve et les pertes economiques dues A l'insuffisance des services actuels sont telles qu'on peut ~tre sftr que Ie secteur priv~ ne pourra manquer de s'interesser A ce march~. - 98 - Encadre 2.4 Entretien routier par la technique A forte intensite de main-d'oeuvre La refection et l'entretien des routes, qu'il s'agisse de routes principales ou de routes de desserte, sont generalement assures au moyen essentiellement d'un equipement coQteux. Etant donne la penurie de devises dont pAtissent maints pays, cet equipement leur a souvent fait defaut. II peut ~tre remplace par des techniques A forte intensite de main-d'oeuvre qui permettent d'economiser des devises et creer des emplois. En Gambie, un projet pilote d'entretien A base de main-d'oeuvre a montre qU'on pouvait, a un coQt interessant, recourir A de petits entrepreneurs villageois (hommes et femmes). Les entrepreneurs en question ont rapidement acquis Ie savoir-faire necessaire et ont organise efficacement les travailleurs necessaires pour faire Ie travail. lIs ont pu Ie faire parce qu'on a su mettre au point des procedures plus simples pour l'attribution, Ie suivi et Ie paiement des marches, ainsi que pour Ie contrOle de l'execution du travail et de la productivite. Le Kenya, Ie Malawi et Ie Ghana ont eux aussi execute avec succes des programmes de refection des routes rurales bases sur l'utilisation de main-d'oeuvre. Des techniques A forte intensite de main-d'oeuvre ont ete employees avec succes dans Ie Projet kenyen de routes d'acces rurales et Ie Projet de routes secondaires. Le Malawi a lui aussi fait la preuve de la viabilite et de l'efficacite des techniques A forte intensite de main-d'oeuvre pour la refection des routes dans son Programme d'amelioration des routes de district. Le Ghana a decide d'utiliser des methodes A forte intensite de main-d'oeuvre pour 25 % environ de son programme annuel de refection et d'entretien des routes de desserte. II a ainsi prouve que ces methodes permettaient de faire les travaux pour 15 % de moins que par les methodes habituelles et d'economiser jusqu'A 40 % sur les conts en devises. Les petits entrepreneurs, apres quatre mois de formation pratique suivie par deux mois de contrats-essais, peuvent desormais fournir chacun 2 km en moyenne de routes rev~tues de haute qualite par mois. lIs emploient 200 personnes environ (dont 30 A 40 % de femmes) par jour contre 50 personnes environ dans les methodes A forte intensite de capital. Les salaires des travail leurs representent des revenus en especes qui stimulent l'economie rurale. Dix-neuf entreprises au total ont ete ainsi formees dans Ie cadre d'un projet finance par la Banque mondiale et Ie PNUD, et execute par l'OIT. Les depenses au titre de tracteurs, de remorques et de materjel manuel de compactage se sont elevees A environ 100.000 dollars par entrepreneur, contre 1,0 A 2,0 millions de dollars par entrepreneur dans les methodes A forte intensite de capital. - 99 - Encadr~ 2.5 Participation priv~e A la cr~ation de l'infrastructure L'entreprise priv~e peut contribuer efficacement A la mise en place de services d'infrastructure, comme le montrent les exemples suivants. Services priv~s d'approvisionnement en eau. L'aptitude du secteur priv~ A fournir des services d'infrastructure a ~t~ illustr~e par la Soci~t~ de distribution dteau de la COte d'Ivoire (SODECI), qui approvisionne en eau potable 130 vi11es et agg1om~rations, par l'interm~diaire d'un vaste r~seau de cana1isations comme A Abidjan, ou de syst~mes bien ~tab1is comme dans 1es vi11es de dimensions plus r~duites. La SODECI appartient conjointement A des int~r~ts priv~s ivoiriens, au Gouvernement et A une soci~t~ fran9aise. Son fonctionnement repose sur 1e principe fran9ais de l'affermage, en vertu duque1 l'autorit~ pub1ique se charge de 1a construction du syst~me mais en confie l'exp1oitation et l'entretien et 1e recouvrement des redevances A un exp10itant priv~, 1e fermier. Cet arrangement a derni~rement ~t~ ~tendu A un contrat de concession, en vertu duque1 1a SODECI se charge ~ga1ement de r~a1iser 1es investissements n~cessaires pour ~tendre 1e syst~me de distribution d'eau. Les plans d'investissement doivent ~tre approuv~s par 1e Gouvernement. Les recettes de 1a SODECI proviennent d'un droit repr~sentant un tiers environ du tarif d'eau. Bien que 1a structure tarifaire pr~voie un taux plus faib1e pour 1es petits consommateurs, qui permet aux couches d~favoris~es de s'approvisionner en eau, i1 est con9u de mani~re A couvrir 1a tota1it~ des coats, 1e service de 1a dette et un exc~dent pour 1es investissements futurs. Tarifs et droits sont fonction du volume d'eau consomm~e si bien que ce sont 1es consommateurs et non 1es contribuab1es qui acquittent 1e prix du service, et l'existence de compteurs permet de r~duire au minimum 1es pertes d'eau. La SODECI a toujours d~gag~ des b~n~fices et e11e a connu une expansion rap ide parce que son service de distribution d'eau est parmi 1es mei11eurs en Afrique. En1~vement des ordures. L'en1~vement des ordures par une entreprise priv~e au Togo est e1le aussi un exemp1e de l'efficacit~ du secteur priv~. La Soci~t~ d'en1~vement des ordures municipa1es (SOTEMA), togo1aise soci~t~ priv~e constitu~e grAce A une participation technique et A une aide financi~re fran9aises, a commenc~ A assurer l'en1~vement et l'~vacuation des d~chets municipaux solides A Lom~ en 1974. Le produit d'une taxe annue11e d'en1~vement des d~chets, acquitt~e par 1es propri~t~s desservies, est 1a principa1e source des recettes servant A payer 1a SOTEMA, et 1e succ~s de l'op~ration tient en tr~s grande partie A l'aptitude que 1a municipa1it~ a manifest~ A recouvrer cette taxe. La SOTEMA, qui a d~marr~ avec un contrat renouve1ab1e d'un an lui confiant l'en1~vement, 1e transport et l'~vacuation de tous 1es d~chets, co11ecte aujourd'hui 284.000 tonnes de d~chets par an en moyenne. La Soci~t~ s'est toujours acquitt~e de mani~re responsab1e de sa tAche et a contribu~ sensib1ement A am~liorer l'environnement. Sa gestion a ~t~ saine et n'a cess~ de croltre et de faire des b~n~fices. E11e est parvenue A r~a1iser de s~rieuses ~conomies de coat en faisant fabriquer un mat~rie1 d'en1~vement loca1ement sous licence. Apr~s 15 ans d'activit~ donnant .I - 100 - toute satisfaction, la SOTEMA est maintenant parvenue A obtenir un appui d'~tablissements bancaires locaux et e1le ~tudie des offres qui lui ont ~t~ faites d'~tendre ses op~rations A d'autres villes togolaises et A l'~tranger. Transport public des passagers. Les exploitants priv~s d'autobus sont parvenus A p~n~trer sur Ie march~ A Accra au Ghana, OU les transports publics laissaient A d~sirer. Une petite entreprise priv~e, mont~e par un m~canicien en 1985, a achet~ quelques vieux autobus qui avaient ~t~ vendus aux ench~res par la soci~t~ publique d'autobus. Apr~s une remise en ~tat op~r~e dans Ie secteur informel, les autobus ont ~t~ mis en service. L'entreprise poss~de d~sormais 40 autobus qui assurent un service pas sagers r~gulier sur de nombreuses routes A Accra. Le rapport effectifs autobus est de 5, soit un quart du rapport correspondant des compagnies publiques d'autobus. L'aptitude que cette entreprise priv~e a montr~ A assurer un service efficace en r~alisant des b~n~fices et sans d~placer les tarifs fix~s par l'administration peut servir d'exemple aux administrations qui tentent de r~organiser et de rendre plus efficaces les soci~t~s publiques de transport. - 101 - Encadr~ 2.6 Restructuration des chemins de fer africains Les chemins de fer, qui ~taient jadis l'ossature du syst~me de transport africain, sont aujourd'hui dans une situation critique o En 1985-87, deux seu1ement des chemins de fer de l'Afrique subsaharienne sur 22 semb1ent @tre parvenus A d~gager un modeste surplus financier. Les gros d~ficits sont 1a norme. En 1985, sur neuf chemins de fer pour 1esque1s on dispose de donn~es fiab1es, on en comptait un dont 1es coOts d'exp1oitation ~taient de 90 % et un autre dont 1es coOts d'exp1oitation d~passaient de 50 % 1es recettes. o Le trafic ferroviaire subsaharien en r~gle g~nera1e a enregistre une baisse, en termes abso1us et en ce qui concerne sa part du trafic. Les chemins de fer ghan~ens qui transportaient environ 2,6 millions de tonnes de fret au d~but des ann~es 70 n'en transportaient plus que 0,4 million de tonnes vers 1985. Les chemins de fer nig~rians ont perdu 33 % de leur trafic entre 1979 et 1986. Au Soudan, 40 % des exportations etaient transport~es par voie de chemin de fer en 1980; en 1986, cette part ~tait tomb~e A 5 %. o Les chemins de fer ont en g~n~ra1 eprouv~ des difficu1t~s a maltriser leur charge sa1aria1e et n'ont pas su adapter leurs effectifs a 1a baisse du trafic. Les d~penses de personnel absorbent 75 % des recettes dans 1es pires cas et 47 % dans 1es mei11eurs, 1es depenses de l'ordre de 50 % etant consid~rees comme un maximum acceptable compte tenu des autres coOts. La productivit~ du personnel est ega1ement faib1e. Une ~tude faite en 1986 a montre que dans 1es dix pays d'Afrique francophone, 1a productivite moyenne des chemins de fer etait de 18 % inferieure a ce11e d'Asie et d'Amerique 1atine. o Les insuffisances de l'entretien se traduisent par une faib1e disponibi1it~ en locomotives et en materiel rou1ant, inferieure souvent a 60 %, voire m~me a 40 % dans certains r~seaux. Bien qu'i1s aient 1e plus grand besoin de rentr~es, 1es chemins de fer ne sont pas en mesure d'accepter 1e fret qui leur est offert par 1es exp~diteurs faute de materiel ou en raison du mauvais etat de ces derniers. Les chemins de fer pourraient contribuer tr~s sensib1ement a r~pondre A l'augmentation de 1a demande de fret et de transport de passagers resultant de 1a reprise economique. I1s devraient moins s'en remettre, pour leur exploitation, aux allocations autoritaires du trafic de fret. Bien geres, i1s pourraient soutenir 1a concurrence des entreprises privees de transport routier et offrir d'autres itineraires aux pays sans littoral. L'effort insuffisant que font 1es chemins de fer en mati~re de marketing et leurs pi~tres services commerciaux sont souvent 1e resu1tat de monopole, exacerbe par une gestion bureaucratique et un manque d'autonomie. Pour redresser 1a situation, i1s devraient s'attacher A ame1iorer leurs capacites A p1anifier, A analyser 1a demande, A commercia1iser leurs services et A etab1ir 1e coOt des services. lIs pourraient se tai11er des marches speciaux, te1s que servir de transporteurs long courrier pour 1e trafic de transit, mais i1 faudrait pour ce faire qu'i1 existe une - 102 - mei11eure coordination intermoda1e avec 1es ports et services de transports maritimes. Les d~ficits des chemins de fer tiennent A 1a structure des tarifs, mais l'habitude risque d'etre prise de tab1er sur des subventions. 11 faut, pour que 1es chemins de fer deviennent fiab1es, que leur direction ait une autonomie beaucoup plus grande en mati~re de fixation des tarifs et des prix, de contr01e de tous 1es ~l~ments des conts et de gestion du personnel. 11 faut ~ga1ement repenser 1e rOle et 1a composition de leur consei1 d'administration et refondre 1es multiples contr01es et r~glements en vigueur pour y introduire plus de c1art~ et de coh~sion et de rigueur comptab1e. Au Kenya, au S~n~ga1 et au Gabon o~ des efforts de restructuration sont en cours, l'ob1igation d'op~rer des r~formes institutionne11es a d~jA ~t~ inscrite dans lea contrats d'objectifs n~goci~s entre 1a direction du chemin de fer et 1es pouvoirs publics. Ces efforts ne seront couronn~s de aucc~s que si 1es deux parties se conforment aux obligations ainsi souscrites. - 103 - Encadr~ 2.7 R~forme de la fonction publique La r~forme de la fonction publique est une des priorit~s de nombre de gouvernements africains. De s~rieux efforts sont notamment faits A cet ~gard en R~publique centrafricaine, au Ghana, en Guin~e et en Gambie. Dans chacun de ces pays, les effectifs de la fonction publique ont augment~ tres rapidement, servant en partie A r~sorber Ie chOmage en p~riode de r~cession ~conomique. Les charges salariales ont de ce fait absorb~ une tres grande partie des recettes publiques. En 1986, les traitements des 75.000 fonctionnaires guin~ens repr~sentaient 50 % des d~penses publiques. En Gambie, l'effectif des fonctionnaires a doubl~ entre 1974 et 1984. Au Ghana, la croissance de cet effectif a ~t~ de cinq fois sup~rieure a celIe de la main-d'oeuvre et a ~t~ de l'ordre de 14 % par an entre 1975 et 1982. En R~publique centrafricaine, les traitements de la fonction publique ont absorb~ 60 % des recettes publiques. Le blocage r~cent des recrutements a permis d'enrayer l'augmentation des charges salariales, qui cependant restent insoutenables. Le plafonnement des salaires et Ie bloc age des promotions ont retir~ toute motivation A un personnel dont Ie moral ~tait d~ja tres atteint. En regIe g~n~rale, la productivit~ a ~t~ extr@mement faible, la discipline pratiquement absente et Ie sens des responsabilit~s d~ficient. La premiere mesure pour redresser la situation a ~t~ de proc~der a un recensement du personnel pour ~liminer des ~tats de paie de personnel fantOme, les fonctionnaires ayant d~pass~ la limite d'Age, mettre un terme aux promotions non m~rit~es et aux indemnit~s injustifi~es et dresser une liste pr~cise du nombre des fonctionnaires et de leur r~partition entre les services. En Gambie, Ie recensement a r~v~l~ que 20 % des effectifs de la fonction publique ~taient en surnombre et cette d~couverte a ~t~ suivie de compression du personnel. La R~publique centrafricaine a mis fin au recrutement des diplOm~s, a introduit des concours d'entr~e et, A la suite du recensement des fonctionnaires, a r~alis~ des ~conomies de 7 A 8 % sur ses charges salariales. La deuxieme ~tape consistait a proc~der A des v~rifications pour faire concorder les effectifs avec les besoins en personnel, ~tablir des structures hi~rarchiques appropri~es et identifier Ie personnel en surnombre. Pour s'assurer que les agents les plus comp~tents seraient retenus au service de l'Etat, l'administration guin~enne les a soumis A un examen. Le r~sultat en a ~t~ la mise en cong~ administratif de 14.000 fonctionnaires en attendant des compressions de personnel et la d~cision de 9.000 de prendre une retraite anticip~e. Le Ghana a proc~d~ A une v~rification syst~matique de tous les postes et emplois avec Ie concours de 60 inspecteurs et a supprim~ 24.000 emplois A la fonction publique sur deux ans. Ces deux premieres s~ries de mesures ~tant prises, il fallait, pour ~viter de proc~der A nouveau A des recensements et examens d'aptitude coOteux, mettre en place un systeme efficace d'information sur Ie personnel, capable de fournir des donn~es A jour sur les effectifs et sur la r~partition du personnel entre les services administratifs par cat~gorie d'emploi. II fallait ~tablir des proc~dures fiables et pratiquement A toute ~preuve pour que les recrutements, promotions, mutations, d~parts A - 104 - la retraite, etc., soient enregistres sans delai dans Ie systeme et que les etats de paie soient ajustes en m~me temps, de maniere A empecher que des traitements ou indemnites ne soient verses a des personnels non existants ou n'ayant pas droit aces paiements. L'informatisation de ce systeme permet de Ie mettre regulierement A jour et de proceder a des verifications rapides. En Gambie, la verification des effectifs a ete suivie de la mise en place d'un rigoureux contrale des versements au titre de salaires et des nouveaux engagements. Des mesures analogues sont en voie d'~tre prises en Guinee et au Ghana. Le quatrieme volet des efforts de reforme est la mise en place d'un systeme de formation de base et de formation en cours d'emploi qui s'insere dans un plan complet de restructuration de la fonction publique, tenant compte de profils de carriere clairement definis. En particulier, pour remedier aux faiblesses inherentes dans la gestion du personnel, une formation specialisee est dispensee aux fonctionnaires des services du personnel. Au Ghana et en Gambie, les verifications d'effectifs et d'emplois ont ete effectues par des fonctionnaires dQment selectionnes qui ont re9u une formation intensive aux procedures d'inspection et aux techniques d'analyse des emplois. Le cinquieme volet de la reforme a ete la necessaire refonte du cadre juridique et reglementaire de la fonction publique. L'objectif en eta it de revoir et de simplifier Ie code de la fonction publique, les statuts et Ie reglement du personnel, et les conditions d'emploi de maniere a tenir compte de la necessite de creer une fonction publique moins plethorique, soucieuse de rentabilite et dotee d'un personnel motive. Cette refonte a ete liee, en Gambie, a une revision des baremes des traitements et des indemnites, ainsi que les primes et avantages divers, afin d'harmoniser les elements de la structure existante et de lier les primes aux resultats individuels. Au Ghana, en se fondant sur des etudes comparatives, on a releve les traitements des echelons les plus eleves de deux manieres pour arr~ter de serieux exodes de cerveaux qui s'etaient produits dans l'administration et pourvoir a des postes depuis longtemps vacants. Dans les quatre pays, les reformes se sont egalement soldees par des licenciements. Le succes de la reforme a en fait dependu de l'habilete avec laquelle l'administration a su proceder a ces compressions de personnel. En Gambie, on a prevu un plan de reaffectation des fonctionnaires en surnombre. Au Ghana, on a cree une commission de reaffectation chargee d'aider les anciens fonctionnaires a trouver des emplois dans Ie secteur prive. En Guinee, les pouvoirs publics ont lance un pr~gramme de reinsertion assorti de facilites de credit, administre par des banques locales. La reforme de la fonction publique est un long processus qui ne va pas sans difficulte sur Ie plan politique. Pour la faire accepter et donc en assurer Ie succes, il faut qu'elle soit non seulement transparente et equit,able, mais aussi qu'elle s'accompagne de mesures permettant aux fonctionnaires licencies de se recaser de fa~on productive dans Ie secteur prive. - 105 - Encadr~ 2.8 Renforcement de la capacit~ d'analyse des politiques ~conomigues en Tanzanie L'Universit~ de Dar es-Salaam (UDSM) est une des rares universit~s en Afrique o~ enseignants et chercheurs contribuent sensiblement A l'analyse de la politique ~conomique nationale. Le Bureau de recherche ~conomique (BRE) , cr~~ en 1965 avec Ie concours de la Fondation Rockefeller, a d~marr~ avec du personnel expatri~ tandis que les Tanzaniens ~taient envoy~s A l'~tranger faire des ~tudes universitaires sup~rieures. L'effort fait pour cr~er un centre de tr~s haut niveau a ~t~ interrompu par la suppression du concours financier de la Fondation Rockefeller en 1971. Le personnel permanent a ~t~ recas~ dans la fonction publique et Ie personnel expatri~ a quitt~ Ie pays. Ce recul a pris fin en 1979 lorsque la Su~de s'est offerte A apporter un appui technique au BRE et A la Facult~ d'~conomie et A en former Ie personnel A l'Universit~ de Lund. Le programme actuel comporte de courts s~jours d'~tudes, des cong~s sabbatiques pour les cadres sup~rieurs, les cours de professeurs ~trangers et la fourniture de mat~riel. GrAce A cette aide, l'Universit~ de Dar es- Salaam compte aujourd'hui un solide groupe compos~ de plus d'une douzaine d'~conomistes tanzaniens capables de faire des recherches ind~pendantes et des analyses de la politique ~conomique. Le Gouvernement a de plus en plus fait appel aux ~conomistes de l'Universit~de Dar es-Salaam pour l'~laboration de sa politique au cours des derni~res ann~es. Ceux-ci ont ~t~ d~tach~s aupr~s d'~tablissements publics et parapublics o~ ils ont particip~ A des groupes de travail et ~mis des avis sur Ie contenu du Programme de redressement ~conomique et les n~gociations ext~rieures. Plusieurs donateurs ont financ~ des ~tudes sur les th~mes, tels que l'inflation, la r~forme tarifaire, la commercialisation des cultures, Ie rassemblement et l'analyse des donn~es sur les r~sultats des entreprises parapubliques et les charges renouvelables du budget. Les ~conomistes de l'Universit~ ont ~galement ~t~ A l'origine de discussions informelles des options en pr~sence dans Ie cadre d'ateliers organis~s avec la participation de hauts fonctionnaires; en 1988, ils ont lanc~ une publication trimestrielle consacr~e A l'examen de la conjoncture et des probl~mes de politique contemporaine. Les r~sultats ainsi obtenus tiennent A trois causes. Premi~rement, les bases solides jet~es il y a plus de 20 ans avec une aide ext~rieure ont permis A l'Universit~ de traverser la crise des ann~es 70 et de former une deuxi~me g~n~ration d'~conomistes qualifi~s, en nombre suffisant pour assurer un bon d~marrage. La deuxi~me est que les pouvoirs publics ~taient dispos~s l ouvrir largement Ie d~bat sur les difficiles questions d'orientation et l faire appel A des Tanzaniens n'appartenant pas l l'Administration pour renforcer les ~quipes charg~es d'~laborer la politique. La derni~re est que les donateurs se sont montr~s de plus en plus conscients du fait que les experts locaux sont une source qualifi~e et relativement peu coQteuse de comp~tences pour leurs programmes. - 106 - Encadr~ 2.9 Entraide communautaire au Kenya Undugu, qui signifie fraternit~ en swahili, est le nom d'une association priv~e qui s'est donn~ pour mission, au Kenya, d'aider les adolescents pauvres des villes a trouver des emplois en leur donn ant une formation et a aider les collectivit~s a soulager 1a misere et a fournir des logements a bas prix a leurs habitants. Lanc~e par un groupe d'action catho1ique, cette association a d~marr~ en 1972 en offrant d'h~berger et de nourrir 1es jeunes qui vivaient des pourboires gagn~s en aidant 1es automobi1istes a se garer dans 1es rues de Nairobi. Pour donner aux adolescents une formation professionne11e, e11e a cr~~ un systeme d'enseignement ftpo1ytechnique vi11ageoisft qui s'est ult~rieurement transform~ en un remarquab1e programme d'apprentissage. Dans Ie cadre de ce programme, l'association paie 1a moiti~ environ des salaires des adolescents a des artisans commer~ants dispos~s a les former et a mis au point un mode de formation commerciale simple a l'usage de ces commer~ants et artisans. Les apprentis sont tenus d'assister a des cours pour acqu~rir un minimum de connaissances th~oriques et, a la fin de la p~riode d'apprentissage, passent des examens officiels. lIs parviennent en g~n~ral a passer ces examens au bout de neuf mois alors qu'i1 faut habitue11ement deux ans aux ~leves des ~tab1issements de poly technique de village publics. L'objectif de l'association ~tant, outre 1a formation, de cr~er des emplois pour les adolescents, e1le a fini, pour se procurer des revenus, par cr~er ses propres unit~s de formation et de production en menuiserie, travail du m~tal, m~canique et confection de v~tements. A la suite des succes enregistr~s a l'occasion d'un contrat d'entretien de voitures de la NORAD, el1e a cr~~ des installations autonomes d'entretien en 1986. Undugu a commenc~ a s'occuper de construction de logements en 1983 a la sui.te d 'un incendie qui a ravage les bidonvilles de Nairobi. Avec l'aide de 1a communaute pour la p1anification et des contributions des participants aux travaux de construction, pres de 500 demeures d'une piece, en c1ayonnage rev~tu de boue, une deuxieme salle communautaire et un jardin d'enfants ont ~t~ construits. Le projet suivant consistait en une reconstruction de 250 maisons d~truites par de fortes inondations, auxquelles on a ajout~ des latrines a fosse, des sentiers et une route. Un troisieme projet a permis de fournir des logements a 6.400 squatters environ. Pres de 1.070 maisons ont ~t~ construites, avec une main-d'oeuvre fournie par les habitants eux-m~mes, pour moins de 300 dollars en moyenne par logement, soit un cont sensib1ement inf~rieur a celui des logements bon march~ construits avec l'aide du Gouvernement. Bien que leur qualit~ en soit l~gerement inferieure a cel1e de ces derniers, 1es logements ainsi construits sont de beaucoup sup~rieurs a ceux pratiquement faits de carton et de papier qu'ils rempla~aient. La gamme des activites de l'association n'a cess~ de s'~tendre. Dans un effort pour rem~dier aux causes m~mes de la pauvret~, elle a commenc~ a s'occuper d'enseignement primaire, de classes d'alphab~tisation pour femmes adultes et de fournir des services de sante de base. Pour assurer un revenu aux femmes et aux adolescents, el1e a forme une cooperative de ventes d'objets r~cup~res sur la d~charge principale de Nairobi. Au d~but - 107 - de 1986, Undugu, qui participait A plus de 20 programmes, a jug~ utile de red~finir son rOle et l'orientation A donner a son action future. L'association a d~cid~ de fa ire porter tous ses efforts sur la cr~ation d'emplois, en continuant A avoir une action de formation et de cr~ation de petites entreprises, sur les logements A faible coOt et sur Ie d~veloppement communautaire au moyen de la cr~ation de groupes d·int~r~t. L'association a aujourd'hui un personnel salari~ de plus de 100 K~nyens et deux ou trois volontaires. En 1987, son budget ~tait de plus de 1 million de dollars, dont la moiti~ provenant de ces activit~s productrices de revenu, dont une boutique d'artisanat dans l'un des beaux quartiers de Nairobi et un nombre croissant de contrats de consultation A des groupes int~ress~s par son exp~rience et son savoir-faire. ·1< - 108 - CHAPITRE 3 Investir dans l'homme Vers un d~veloppement centr~ sur l'homme 3.1 L'homme est A la fois la fin et Ie moyen du d~veloppement. Si l'am~lioration de la sant~, de la nutrition et de l'~ducation est un fin en soi, des etres humains en bonne sant~ et dot~s d'une solide formation s~nt, eux, Ie principal instrument du d~veloppement. 3.2 Pour mesurer Ie d~veloppement sur Ie plan de l'acc~s aux services fondamentaux de sant~, l'~ducation et l'alimentation fournissent de meilleures donn~es que la plupart des autres variables. Mieux r~partis entre les m~nages, les indicateurs sociaux, tels que l'esp~rance de vie A la naissance, expriment de fa90n plus exacte la situation de la majorit~ de la population que ne Ie font les revenus par personne. Le Kenya, par exemple, ou Ie PNB par personne n'atteint que 330 dollars, a une mortalit~ infantile plus faible et une meilleure scolarisation primaire que la C6te d'Ivoire, ou Ie PNB atteint 740 dollars par personne. 3.3 Combler Ie foss~ qui s~pare l'Afrique des pays mieux d~velopp~s sur Ie plan de l'acc~s aux services de base est plus facile que retr~cir l'~cart des revenus. Au cours des 30 derni~res ann~es, l'acc~s aux services de base est devenu beaucoup plus uniforme, et l'~cart peut se r~duire encore plus rapidement pendant les 30 ann~es qui viennent. Des pays comme la Chine et la Thallande sont parvenus A beaucoup se rapprocher de leurs objectifs sociaux en consacrant environ 5 % de leur PNB A la sant~ et A l'~ducation alors que leurs revenus par personne n'~taient pas plus ~lev~B que ne Ie sont aujourd'hui ceux de l'Afrique subsaharienne. 3.4 Depuis l'ind~pendance, l'Afrique a fait de remarquables progr~s en mati~re de valorisation des ressources humaines; cependant, elle a essuye aussi des revers inqui~tants, qui sont imputables, au premier chef, aux d:.fficult~s des finances publiques et AI' accroissement de la population. Si les tendances actuelles se poursuivent, la base du d~vel()ppement A long terme s'en trouvera sap~e. 3.5 La strat~gie de d~veloppement futur se donne un nouvel objectif de valorisation des ressources humaines. Dans l'imm~diat, les priorit~s sont doubles : am~liorer la qualit~ et la pertinence de l'~ducation, A tous les niveaux, et r~orienter l'emploi des ressources publiques vers l'enseignement de base et les soins de sant~ fondamentaux, planning familial compris. A plus long terme, et en 2020 au plus tard, les pays africains pourront, sans enfreindre au r~alisme, viser A offrir A tous leurs habitants la s~curit~ alimentaire. une formation primaire et les soins de sant~ fondamentaux. Synergie des programmes de valorisation des ressources humaines 3.6 Les ~l~ments qui constituent les programmes de valorisation des ressources humaines constituent un r~seau ou ils se renforcent mutuellement. Le planning familial, par exemple. est mieux accept~ lorsque - 109 - Ie niveau g~neral de mortalit~ est relativement faible et Ie niveau de l'education relativement ~lev~. Le planning familial ameliore la sante de la m~re et de l'enfant en permettant d'espacer les naissances. De m~me, l'eau potable et l'assainissement sont plus ben~fiques lorsque l'education sanitaire ameliore l'hygi~ne et l'enseignement de la nutrition encourage de meilleures habitudes alimentaires. L'alimentation en eau potable reduit les infections chez les enfants et renforce la situation nutritionnelle. 3.7 Des enfants en bonne sante ont plus de chances d'aller A l'~cole et d'elargir leurs connaissances que les enfants malades ou sous-alimentes. A son tour, l'education permet de mieux comprendre les probl~mes de sant~ et d'intervenir sur Ie plan de la pr~vention et du traitement. En r~gle g~n~rale, on constate une plus faible incidence de mortalit~ chez les enfants dont la m~re est all~e A l'~cole. Le fait qu'une m~re ait connaissance, en particulier, de mesures de sant~ et de nutrition peu coQteuses, telles que la vaccination, la rehydratation orale, l'allaitement au sein et l'hygi~ne peut exercer une influence profonde sur la survie de l'enfant. Des parents scolaris~s et en bonne sante sont ceux dont les enfants ont Ie plus de chances d'~tre eux-m~mes scolaris~s et en bonne sant~. De m~me, Ie rel~vement des niveaux de l'enseignement renforce la productivit~ agricole et contribue A l'efficacite de la vulgarisation agricole et, partant, A la securite alimentaire. Une population en meilleure sant~ peut produire davantage d'aliments et obtenir de meilleurs revenus,qui peuvent deboucher sur de nouvelles am~liorations de la nutrition, de la sant~ et de l'education. On voit donc que l'am~lioration de l'acc~s A la sant~ et A l'education est essentielle pour Ie developpement A long terme de l'Afrique subsaharienne. Mauvaise qualit~ et diminution de l'acc~s aux ressources humaines 3.8 La qualit~ des services sociaux varie dans toute l'Afrique subsaharienne, mais elle est en g~n~ral m~diocre et s'est degrad~e durant les annees 80. II est urgent de prendre des mesures de redressement. L'am~lioration de la qualit~ et de la teneur de l'~ducation est particuli~rement importante pour aider une croissance soutenable. 3.9 Dans la plupart des pays africains, les programmes de valorisation des ressources humaines ont cherch~ A repondre aux besoins de l'~lite. Des services de sant~, d'~ducation, d'alimentation en eau, d'assainissement et autres offerts A la majorite des pauvres sont inexistants ou r~sultent des efforts des collectivit~s locales et d'ONG qui ne re~oivent de l'Etat qu'un maigre soutien financier et technique. Les gouvernements n'ont pas fait grand chose pour obtenir la participation des collectivites - et cela dans des soci~tes ou, depuis fort longtemps, les decisions sont prises en commun. Pour am~liorer sur une large base les indicateurs sociaux de l'Afrique, il faudra reorienter la politique de l'Etat et l'usage des deniers publics, en accordant plus de poids aux syst~mes de prestation qui repondent aux besoins fondamentaux d'une large gamme de beneficiaires, et notamment des pauvres. 3.10 A la suite de l'amenuisement recent des ressources publiques provoque par les mediocres resultats economiques de l'Afrique, les services sociaux se sont degrades dans de nombreux pays au fur et A mesure que des coupures etaient pratiques dans les budgets (voir Figure 3.1). On constate 'I - 110 - ~galement que la scolarisation au niveau de l'enseignement primaire reste stationnaire ou recule; et, dans certains pays pauvres, les taux de mortalit~ infantile sont encore tr~s ~lev~s. Quand l'acc~s aux services de sant~ et A l'enseignement publics se caract~rise par de graves in~galit~s. une r~duction, m@me l~g~re, de l'ensemble des d~penses sociales peut exercer un effet disproportionn~ sur la sant~ des m~nages les plus pauvres. II est donc important, durant les crises financi~res, de prot~ger les d~penses publiques consacr~es aux services sociaux de base. Figure 3.1 D~penses du gouvernement central consacr~es A la sant~ et A l'~ducation Pourcentage du PIB 10~--------------------------------~ · · · s .......... 3 Za'''. ···· ~.'.~'- a ....... 'It Ouganda ... ·'~; ····~-~~!........... · .----.. ··· -- Annee Source Banque mondiale 3.11 Comment faire pour que, en 2020, la s~curit~ alimentaire, l'enseignement primaire et les soins de sant~ fondamentaux soient accesslbles A tous en Afrique subsaharienne1 Pour commencer, il sera absolument essentiel d'inverser Ie mouvement de contraction des revenus par personne et d'obtenir un rel~vement modeste, mais soutenu, des niveaux de vie. L'objectif de 4 % par an qui est fix~ a la croissance annuelle du PIB entralnerait des accroissements comparables des recettes de l'Etat susceptibles d'@tre investies dans la valorisation des res sources humaines - qui est elle-m@me essentielle pour soutenir la croissance projet~e. Ensuite, 11 faudra fa ire baisser les taux de f~condit~, sans quoi l'am~lioration de la qualit~ de l'~ducation, de la sant~ et d'autres services indispensables a l'accumulation d'un capital humain et au d~veloppement, ainsi que leur acc~s, se trouvera forc~ment limit~e. En troisi~me lieu, bien que, A tous les niveaux, l'~ducation et les soins de sant~ aient besoin qu'on les dote de moyens plus abondants, il faut attribuer relativement plus de ressources publiques a l'enseignement primaire et aux services fondamentaux de sant~. II faut souligner que, en fixant l'objectif de croissance du PIB a 4 % par an, les hOpitaux, la m~decine curative et l'enseignement sup~rieur continueront A recevoir des ressources suppl~mentaires; c'est leur part relative du budget de l'Etat qui devra diminuer. En outre, compte tenu des difficult~s budg~taires dans lesquelles se d~battent actuellement beaucoup de pays, il est urgent de trouver de nouvelles sources priv~es pour financer l'enseignement sup~rieur et les soins de m~decine curative. II faut en m@me temps prendre des - 111 - mesures pour reorienter l'enseignement superieur vers une formation qui impartisse de solides competences utiles. En quatri~me lieu, il faudra faire serieusement des efforts pour reduire les coUts, encourager la mise en place de formules de participation aux frais, amener la population a participer a la gestion des services, intensifier les activites d'animation et relever l'efficacite des services sociaux. En cinqui~me lieu, les principaux programmes doivent ~tre con~us de telle sorte que les personnes des deux sexes puissent en tirer partie. Enfin, il faudra engager des ressources supplementaires dans les secteurs sociaux. Figure 3.2 Taux de mortalite des enfants de moins de cinq ans dans certains pays de l'Afrique subsaharienne Taux (par 1000) .1HO 300 1_ 01lIII0 IZJ HI85 c::J .'911 100 o '- , MIl Za'ire ~ Tanzant. Kony& 21mbllMe HIgIriIt Note : Le taux de mortalite des enfants de moins de cinq ans est Ie taux de mortalite de ces enfants pour 1.000 naissances vivantes. Source: UNICEF. Universalisation des soins de sante de base et reduction du taux de croissance demographique Menaces critiques contre la sante 3.12 Sur 27 pays pour lesquels on poss~de des statistiques, 11 ont un taux de mortalite maternelle superieur a 500 pour 100.000 naissances vivantes, contre 44 en Chine et 90 au Sri Lanka. Chaque annee, il y a environ 150.000 m~res qui meurent en Afrique, et a peu pr~s Ie m~me nombre qui deviennent invalides a la suite de complications de la grossesse et de l'enfantement. Dans la plupart des pays de l'Afrique subsaharienne, Ie taux de mortalite infantile est compris entre 100 et 170 pour 1.000 naissances vivantes, contre 29 et 34 au Sri Lanka et en Chine. Dans de nombreux pays, les morts d'enfants de moins de cinq ans representent pr~s de la moitie de l'ensemble des dec~s. Dans les pays les plus pauvres, comme Ie Mali, l'Ethiopie, Ie Burkina Faso et Ie Niger, 70 a 77 % seulement des enfants vivent jusqu'a l'Age de cinq ans; dans la plupart des pays, l'amelioration de la survie des enfants se fait lentement (voir Figure 3.2). - 112 - 3.13 L'Afrique se trouve aussi en pr~sence de que1ques-uns des prob1~mes g~n~raux de sant~ 1es plus graves - et 1es plus opiniAtres - notamment 1es maladies end~miques tropica1es. L'environnement aide 1a survie des vecteurs (c'est-l-dire des insectes vo1ants) qui transmettent 1es maladies. Seu1es de grosses - et coQteuses - interventions peuvent venir l bout de maladies comme l'onchocercose et 1a schistosomiase. Des campagnes ont r~duit leur pr~va1ence, mais e11es ont souvent ~t~ interrompues durant 1es ann~es 70 et 80. Non seu1ement faut-i1 reprendre 1a 1utte, mais i1 faut aussi mettre sur pied des programmes qui administrent, dans des conditions d'efficacit~, 1es nouveaux m~dicaments qui viennent d'atre Mis sur march~, afin d'att~nuer l'intensit~ de l'infection et de freiner 1a morbidit~. 3.14 La contraction des disponibi1it~s a1imentaires a fait empirer 1a malnutrition. En outre, comme 1es m~re ont une f~condit~ ~lev~e, 1es enfants ont un faib1e poids l 1a naissance et deviennent 1es plus vu1n~rab1es l 1a malnutrition et l l'infection. Les survivants aux maladies de 1a petite enfance ont une morbidit~ qui demeure ~lev~e : on estime en effet que 200 millions d'Africains ont un pa1udisme chronique et sont handicap~s pour 1e restant de leur existence. Entre 1979 et 1983, l·esp~rance de vie l 1a naissance a recu1~ dans neuf pays de l'Afrique subsaharienne. 3.15 A tout cela est venue s'ajouter l'~pid~mie du SIDA, qui est de nature l mettre l rude ~preuve 1es services de sant~ d~jl surcharg~s des pays ou e11e se r~pandra durant 1es prochaines d~cennies (voir Encadr~ 3.1). Le traitement des sid~ens pourrait coQter fort chert sans parler des coQts indirects que devra supporter 1a soci~t~ sous forme de perte de main-d'oeuvre et de gagne-pain. 11 est probable qu'i1 faudra d~tourner au profit du SIDA des res sources qui auraient ~t~ consacr~es au traitement d'autres maladies et aux campagnes de lutte. Am~liClration des soins de sant~ 3.16 La crise ~conomique dans 1aque11e sont plong~s de nombreux pays africains a non seu1ement fait baisser des revenus d~jl faib1es et a d~grad~ de m~diocres conditions de vie, mais e11e a aussi port~ un coup aux moyens dont disposait 1e secteur des soins de sant~ en freinant 1es d~penses pub1iques consacr~es l l'achat de m~dicaments et de produits m~dicaux. 11 est essentiel de maintenir 1es affectations budg~taires, notamment pour 1a fourniture des soins de base, si l'on veut que 1es services de sant~ apportent 1a contribution dont ils sont capab1es l l'am~lioration de 1a sant~, l 1a productivit~ et au d~ve10ppement. La mei11eure fa~on d'y parvenir, dans beaucoup de pays africains, consiste l faire assumer par la population - particu1iers, fami11es et co11ectivit~s - 1a responsabi1it~ de ses propres soins de sant~. Les gouvernements, 1es ONG et 1e secteur priv~ doivent soutenir ces efforts. 11 faut consulter 1es co1lectivit~s et les encourager l participer en ~tablissant leurs propres priorit~s et en mettant sur pied leurs propres programmes de soins de sant~. 11 faut ~ga1ement prater attention aux m~thodes (tel1es l'information et 1es communications) qui permettent l la population de participer l 1a prise de d~cisions quand il s'agit de concevoir et d'ex~cuter des programmes d'antennes sanitaires. - 113 - 3.17 Souvent, les nouveaux investissements dans les soins de sant~ n'ont pas conduit a une r~partition ~quitable de leur couverture dans l'ensemble du pays. De m~diocres communications et de mauvais moyens de transport met tent les rares services disponibles hors de port~e de la plus grande partie de la population. Sans aucun doute. il faut ~valuer de nouveau les priorit~s et ~largir la couverture des services. En outre, il faut envisager d'intensifier la participation du secteur priv~ et des ONG aux interventions qui ne rel~vent pas des soins de sant~ primaires, et notamment aux soins curatifs. Les sommes considerables (par rapport aux revenus) que la population consacre aux services priv~s de sant~, dont la qualite est souvent douteuse, semble rendre ~galement possible Ie recouvrement des frais des syst~mes de soins de sant~ mis en place par l'Etat et par les ONG. 3.18 La rationalisation de l'achat et de la distribution des produits pharmaceutiques pourrait r~duire les cants. En ameliorant les m~thodes d'achat, on peut ~conomiser 40 a 60 % des budgets. Au Mali, une ~tude a montr~ qu'on pouvait economiser 15 a 20 % du budget des m~dicaments en am~liorant la strat~gie d'achat d'un produit antibact~rien largement employ~, l'ampicilline injectable. La Tanzanie offre un bon exemple de programme efficace et peu conteux d'achat et de distribution de m~dicaments; son Programme des m~dicaments essentiels approvisionne r~guli~rement les 20 millions d'habitants des zones rurales en m~dicaments essentiels, moyennant un cant d'environ 0,30 dollar par personne et par an. Au Cameroun, une etude a constate que 35 % des medicaments se perdaient dans les r~servces m~dicales o~ de mauvaises m~thodes de gestion et de contrOle conduisaient a des conditions d'entreposage d~plorables qui rendaient les m~dicaments inutilisables parce que leur date de peremption ~tait d~pass~e. On peut aussi r~aliser de grosses ~conomies en am~liorant les pratiques de prescription et en amenant Ie public a mieux respecter les consignes d'emploi. Dans chaque domaine. il faut voir quels rOles peuvent ~tre remplis de la mani~re la plus efficace par les secteurs priv~ et public et par les ONG. 3.19 La rationalisation de l'emploi de la main-d'oeuvre dans Ie secteur de la sant~ pourrait en am~liorer l'efficacite. En confiant de simples interventions a un personnel moins qualifie, notamment dans les hOpitaux, on laisserait aux medecins et au personnel infirmier plus de temps a consacrer aux probl~mes complexes et inusit~s. Dans les zones rurales de 1 'Afrique , les agents de sant~ communautaires sont en premi~re ligne du syst~me de soins de sant~; leur travail souvent m~diocre pourrait ~tre amelior~ si on renfor9ait leurs liens hierarchiques, ce qui leur permettrait de recevoir une formation et un encadrement efficaces. En outre, un grand nombre d'agents non qualifi~s et superflus (par exemple, les gardiens et les concierges) pourraient ~tre licenci~s sans pour autant compromettre la qualite. 3.20 II est possible d'accel~rer l'expansion des services de soins de sant~ de base grAce a des modalit~s de prestation efficaces par rapport aux conts. C'est ainsi que les interventions de prevention peuvent donner des r~sultats de grande envergure moyennant un cont modique. On peut eviter un grand nombre de morts maternelles en organisant sur une base communautaire Ie planning familial, les soins prenataux et les soins d'accouchement. On peut apprendre aux accoucheuses traditionnelles a identifier les m~res a - 114 - risques ~lev~s pour les aiguiller vers des ~tablissements dot~s du personnel et du mat~riel n~cessaires, r~duisant ainsi les l~sions ou maladies occasionn~es par l'accouchement et am~liorerant les possibilit~s de survie. En encourage ant l'espacement des naissances, l'allaitement au sein (qui donne une immunit~ passive au nouveau-n~ et se traduit aussi par des avantages sur le plan de la nutrition) et de bonnes pratiques de sevrage et d'alimentation, on peut r~duire la mortalit~ infantile. 3.21 Moyennant un cont modeste (et un encadrement rudimentaire), la vaccination est efficace contre les principaux tueurs de l'enfance. Par exemple, un vaccin contre la rougeole, qui conte 0,06 dollar, r~ussit A barrer la voie A la maladie. Pour vacciner un enfant contre les six maladies-cibles - rougeole, polio, coqueluche, dipht~rie, t~tanos et tuberculose - il faut, estime-t-on. d~penser 5,00 dollars. La campagne de vaccination rap ide a fait beaucoup de progr~s dans les pays en d~veloppement; or, le tiers seulement des enfants afriains sont vaccin~s contre ces maladies. La situation varie d'un pays A l'autre. Des pays comme le Botswana, la Gamble et la Tanzanie ont presque atteint leurs objectifs d'une couverture A 100 %, tandis que le Kenya pourrait parvenir A 80 % en 1991. Cependant, dans de nombreux pays, il faut redoubler d'efforts pour acc~l~rer la couverture et proc~der A de grandes r~formes des m~thodes de gestion afin de rendre ces programmes soutenables. 3.22 La plupart des pays de l'Afrique subsaharienne ont fait leur la d~claration d'Alma-Ata concernant les soins de sant~ primaires et soutiennent l'objectif de "la sant~ pour tous·. Or, l'influence que les ~lites urbaines nanties exercent sur la polltique de l'Etat, conjugu~e A l'absence de polltiques sanitaires vis ant A corriger les probl~mes de distribution, a fauss~ la r~partition des ressources, qui se fait au d~triment des populations pauvres des zones rurales et de l'accroissement des services de m~decine pr~ventive. Par exemple, au S~n~gal, la r~gion du Dakar-Cap Vert - ou vit moins de 30 % de la population - s'est vue attribuer pr~s de 60 % du budget des m~dicaments de 1979-80. 70 % des m~decins du S~n~gal. 60 % des sages-femmes et plus de 40 % du personnel infinnier. Les bailleurs de fonds jouent leur r6le dans cette partialit~ des soins de sant~ envers le secteur tertiaire en soutenant dans les zones urbaines des projets A forte intensit~ de capital. Ce qui est ironique. toutefois, c'est que les pauvres des villes n'ont peut-~tre pas plus acc~s A de bons soins de sant~ que la population rurale. 3.23 On peut r~gler la plupart des probl~mes qui exigent l'aiguillage des patients vers d'autres ~tablissements sans faire appel A des h6pitaux, ou en utilisant de petits h6pitaux ou centres de sant~ r~gionaux, qui sont d'acc~s facile. L'argent consacr~ aux services curatifs a ~t~ sans rapport avec les cr~dit affect~s aux soins de sant~ de base et la charge que les grands h6pitaux repr~sentent alors pour les budgets de fonctionnement est souvent ~crasante. Par exemple, les frais de fonctionnement de l'h6pital principal de Brazzaville sont ~gaux A l'ensemble des cr~dits que le Congo consacre aux soins de sant~ de base. 11 y a cependant des exceptions. Par exemple, depuis 1972, la Tanzanie a frein~ la construction d'h6pitaux afin de canaliser ses ressources vers les services fondamentaux de sant~ des zo~es rurales et des communaut~s. En r~gle g~n~rale, les futures strategies de d~veloppement devraient limiter les investissements dans de nouveaux h6pitaux ou dans l·expansion de services de m~decine curative des - 115 - ~tablissements existants aux seuls cas ou il est prouv~ qu'on ne pourrait pas mieux servir la sant' publique en augmentant les cr~dits consacr~s aux soins de sant~ de base, y compris les installations interm~diaires qu'exige leur soutien. L'am~lioration, dont les hOpitaux (tout comme les autres ~l~ments du syst~me de soins de sant~) ont tellement besoin, exigera qu'on perfectionne la gestion et la formation. 11 faut ouvrir des centres de sant~ satellites pour encourager la population A se faire soigner en d~but de maladie, att~nuant ainsi la situation de crise de morbidit~ qui r~gne dans la plupart des hOpitaux. 3.24 11 convient de noter que les pressions exerc~es sur l'emploi du temps des femmes compromettent l'efficacit~ des soins de sant~. Les femmes n'ont que des possibilit's limit'es de se rendre aux centres de service (par exemple, pour des vaccinations); c'est pourquoi des dispensaires mobiles pourraient Atre plus rentables qu'ils ne semblent l'@tre quand on tient compte du coQt que repr~sente Ie temps des femmes. Des interventions de sant~ peu coQteuses, comme la th~rapie par r~hydratation orale, peuvent comporter, semble-t-il, des coQts occultes du fait qu'elles emp@chent les femmes de consacrer leur temps A des activit~s productives. Des politiques que lib~rent les femmes des contraintes de temps devront donc aller de pair avec des interventions de soins A base communautaire. 3.25 Dans les pays de l'Afrique subsaharienne, l'am~lioration de la prestation des soins de sant' d~pend de la sauvegarde et de l'am~lioration des affectations budg'taires r~serv~es au secteur et d'une utilisation plus judicieuse de ces ressources. En mati~re de soins de sant~, un peu d'agent peut faire long feu. Selon l'OMS, il devrait @tre possible, selon Ie niveau de d~veloppement de l'infrastructure, de fournir les soins de sant~ essentiels moyennant des frais de fonctionnement de 10 dollars par personne et par an. MAme dans les pays les plus pauvres, dont Ie PIB par personne se situe aux alentours de 200 dollars, les d~penses publiques A engager pour donner progressivement une couverture universelle aux soins de sant~ primaires ne d~passeraient pas 2 % du PNB, pour passer A 3 % en l'an 2000, A condition d'adopter des mesures pour am6liorer l'efficacite. L'eau et l'am~lioration de la sant~ 3.26 L'acc~s A l'eau potable, conjugu~ A des am~liorations de l'assainissement et de l'hygi~ne personnelle, contribue A une meilleure sante. Ce n'est pas seulement la qualit~. mais la quantite d'eau qui peuvent intervenir dans la sant~. Dans de nombreuses regions africaines, les familIes consacrent un temps excessif A chercher de l'eau. Dans les basses terres du Lesotho, 30 % des familIes pas sent plus de 2 heures et demie par jour A la recherche de l'eau. Dans 1a zone orientale du Nigeria, la qu~te de l'eau peut prendre jusqu'A 5 heures par jour. Une telle situation exige un effort physique consid~rab1e de la part des porteurs d'eau, femmes et enfants, qui sont en g~n~ra1 1es ~tres les plus vuln~rables sur 1e plan de 1a nutrition. Or, ce temps perdu pourrait ~tre consacr~ aux soins des enfants, A 1 'agriculture , A la pr~paration des aliments, A l'~ducation ou A d'autres activit~s dont b6n~ficie la sant~. A l'encontre des b~n~fices pour la sant~, on peut mesurer les b~n~fices ~conomiques d~cou1ant des ~conomies de temps qU'apporte l'am~lioration de l'alimentation en eau; des recherches r'centes ont montre que ces b~nefices peuvent ~tre importants. - 116 - 3.27 Bien que la couverture se soit am6lior6e durant les ann~es 80, on estime que les deux-tiers des habitants des zones rurales de l'Afrique n'ont pas acc~s A des services am6lior6s d'alimentation en eau. Jusqu'A une date r~cente. Ie coOt ~lev6 par personne des systtmes d'adduction d'eau a ~t~ un obstacle majeur A l'accroissement de la couverture d'alimentation en eau de l'Afrique. Des technologies modernes ont r6duit Ie prix de revient de l'eau potable par personne; on est.ime 1 environ 55 dollars par personne Ie coOt d'6quipement en pompes manuelles et en simples syst~me gravitaires; ce chiffre varie cependant selon les r6gions. Un coOt modique ne garantit pas n6cessairement la r6ussite. Ce sont les @tres humains qui tiennent la cl~ de cette derni~re. Les femmes, en particulier, ont tout int6r@t A faire bien fonctionner les programmes d'alimentation en eau car ce sont elles qui, g~n~ralement, sont Ie plus touch6es par les difficult~s d'acc~s A l'eau. Chaque fois que les collectivit6s participent A la conception, A la construction, A l'installation et 1 l'entretien des ouvrages d'adduction d'eau, les projets hydrauliques fonctionnent mieux, sont plus efficaces par rapport aux coOts et, partant, sont plus durables. Au Malawi, pr~s de I million d'atres ont accts A l'eau potable grace A des syst~mes que poss~dent, construisent et, en grande partie, entretiennent les collectivit~s desservies. Et les consommateurs semblent pr@ts A payer l'eau potable (voir Encadr~ 3.2, au verso). Grice 1 la participation de la collectivit~ et au partage des frais, des d6penses renouvelables d'environ 0,5 % du PNB (compte non tenu des coOts partag~s) donneraient largement acc~s A l'eau potable. Sant~ et f~condit~ 3.28 Un Meilleur espacement et un Meilleur calendrier des naissances, ainsi que la r6duction du nombre d'accouchements, peuvent faire baisser la mortalit6 et la morbidit~ infantiles, enfantines et maternelles. Un enfant n~ dans l'intervalle de deux ans qui suit la naissance pr~c~dente court 90 % plus de risques de mourir la premitre ann6e de sa vie qU'un enfant n~ deux ans apr~s, ou plus tard. Au fur et A mesure qU'augmentent les taux de survie des enfants, les taux de f~condit~ diminuent; les parents cessent d'avoir trop d'enfants pour se garantir l'avenir. L'abaissement de la f~condit~ grAce au planning familial se solde par une population en mailleure sant~. 3.29 Une croissance d~mographique laiss6e 1 elle-m@me surcharge les capacit6s des services sociaux de toute l'Afrique subsaharienne. Elle impose un fardeau qui gr~ve l'~pargne des individus, des m6nages et de l'Etat, affaiblit les efforts nationaux visant l am6liorer la qualit~ de la vie et la productivit6 de la popUlation; et exacerbe Ie probl~me que pose Ie fl~chissement des d6penses de soins de sant6 par personne. Des politiques visant l am6liorer les soins de sant6 doivent Aller de pair avec des politiques visant l faire baisser les niveaux de f~condit6, et inversement. R6duction de la croissance d6mographique 3.30 L'indice synth6tique de f6condit6 - nombre d'enfants n6s d'une femme pendant ses ann6es f6condes - de tousles pays africains (A l'exception de Maurice) d6pa~se sensiblement celui de pays en d6veloppement - 117 - qui ont des niveaux comparables de revenu par personne, d'esp~rance de vie ~ la naissance, d'~ducation des femmes et de pr~valence de la contraception (voir Tableau 3.1). Cet ~tat de choses s'explique non seulement par la valeur ~conomique ~lev~e des enfants dans les zones rurales d'Afrique, mais aussi par les nombreux facteurs socio-~conomiques qui d~terminent les aspirations de f~condit~ des m~nages. On connalt mal ce dernier ~l~ment. Cependant, dans Ie contexte africain, on peut comprendre la grande valeur ~conomique que repr~sentent les enfants dans les zones rurales. En effet, les Africains qui habltent ces zones consacrent de longues heures ~ l'agriculture et ~ l'ex~cution d'autres travaux du m~nage. Les enfants apportent une aide: ils travaillent aux champs, gardent les troupeaux, vont chercher de l'eau et du bois de feu, et prennent soin de leurs freres et soeurs. Au fur et ~ mesure que la frontier~ du bois de feu s'~loigne et que s'~puisent les ressources en eau et en terres, on a davant age besoin d'enfants pour ex~cuter une partie de la charge de travail accrue. Le probleme se complique du fait que les taux de mortalite infantile sont ~lev~s. Les liens entre population, pauvret~. mortalit~ et environnement sont complexes; les politiques de r~gulation des naissances doivent donc etre integr~es ~ des politiques qui aident ~ all~ger la charge de travail des femmes, ~ proteger l'environnement et ~ maltriser la mortalit~ infantile. Tableau 3.1 Comparaison des taux de f~condit~ : Afrique et Asie Taux Education mortalit~ des filles Indice Revenu infantile (Taux de Taux de pre- synthetique par (pour 1.000 scolarlsation) valence dela de personne Esp~rance naissances Pri- Secon- contraception f~condit~ (dollars) de vie vivantes) maire daire (pourcentage) 1987 1987 1986 1986 (estimation Ie plus recente) Afrique subsaharienne Zimbabwe 5,9 580 58 72 129 46 40 Botswana 5,0 1050 59 67 105 31 29 Kenya 7,7 330 58 72 94 20 17 Nigeria 6,5 370 51 105 5 Maurice 2,1 1470 67 23 106 51 78 Asle du Sud Inde 4,3 300 58 99 92 35 35 Bangladesh 5,5 160 51 119 60 18 25 Sri Lanka 2,7 400 70 33 103 66 57 Nepal 5,9 160 51 128 79 25 15 I - 118 - TAches A accomplir 3.31 Les projections courantes de la Banque supposent que l'indice synth~tique de f~condit~ baissera de ~o % en Afrique subsaharienne pendant la prochaine g~n~ration, tombant de 6,657 en 1990 A 3,4 en 2020, ce qui sous-entend, pour les trois prochaines d~cennies, dex taux de croissance d~mographique atteignant, respectivement, 3,0, 2,6 et 2,1 %. Or, m~me s'il en est ainsi, la population de l'Afrique d~passera la barre de 1 milliard d'habitants en 2020. 3.32 Au cours des deux derni~res d~cennies, de nombreux pays non africains ont fait tomber leur indice synth~tique de f~condit~ d'environ 6 A 3. Le Botswana et Ie Zimbabwe semblent d~cider A en faire de m~me (voir Encadr~ 3.3). Tous les pays africains devraient essayer d'obtenir les m~mes r~sultats. Cependant, vu l'insuffisance des programmes de planning familial dans toute l'Afrique subsaharienne, il est peu probable que se produise la r~duction de f~condit~ que supposent les projections courantes. Pour concr~tiser les projections de la Banque mondiale, il faudrait que les taux de pr~valence de la contraception pas sent de leur niveau actuel de 0-10 % A 50-60 % en 2020. Dans les quelques pays africains OU ce chiffre ne d~passe pas Ie double ou Ie triple du taux actuel, Ie probl~me ne devrait pas ~tre insu~ontable A condition que les gouvernements s'engagent vigoureusement A obtenir ce r~sultat. Dans les autres pays ou les programmes de planning familial manquent de dynamisme, il faudrait d~cupler la pr~valence de la contraception durant les 30 prochaines ann~es. Dans tous les cas, il est n~cessaire d'intervenir avec une vigueur beaucoup plus grande dans les secteurs de l'~ducation des filles et du planning familial A base communautaire. 3.33 Plus des trois-quarts des gouvernements africains se sont d~clar~s au planning familial, mais peu de pays ont fait suivre attach~s leurs paroles de mesures satisfaisantes en apportant un soutien technique, financier et administratif A la promotion et A la prestation de services de planning familial. En 1974, A la Conf~rence mondiale de la population de Bucarest, tous les pays de l'Afrique subsaharienne (A l'exception du Botswana, du Ghana et du Kenya) se sont d~clar~s satisfaits de leurs taux de f~condit~ et de croissance d~mographique et pensaient que cette derni~re n'avait rien A voir avec leurs probl~mes ~conomiques. La plupart voyaient dans Ie planning familial un moyen acceptable d'am~liorer la sant~ de la m~re et de l'enfant. En 1986, seuls Ie Tchad, la COte d'Ivoire, Ie Gabon, la Guin~e-Bissau et la Mauritanie suivaient des politiques natalistes ou ne soutenaient gu~re Ie planning familial; sept pays avaient en 1989 des politiques explicites en mati~re de population et cinq (Ghana, Maurice, Nig~ria, Ouganda et Zambie) s'~taient fix~s des objectifs pr~cis de r~duction de la f~condit~. Or, mame dans ces cas, il faut que les expressions d'inqui~tude contenues dans des documents de politique g~n~rale fassent place A des actes qui engagent les deniers de l'Etat. 3.34 En dehors de Maurice, Ie Zimbabwe et Ie Botswana sont les seuls pays d'Afrique A avoir obtenu un important recul de la f~condit~, qui est tomb~e de 8 et 6,9, respectivement, en 1965 A 5,7 et 5,0 en 1988. Ces pays ont les taux les plus forts d'emploi de moyens modernes de contraception de l'Afrique subsaharienne, qui s'~l~vent, respectlvement, A 36 et 32 % des femmes mari~es en Age de procr~er. Les politiques d'Etat ont jou~ un rOle - 119 - fondamental : elles ont fait intervenir l'~ducation et ont veill~ A ce que les services de planning familial soient largement accessibles. L'exp~rience a prouv~ que les d~clarations officielles en faveur du planning familial doivent etre assorties d'objectifs pr~cis de r~duction de la f~condit~, et suivies de la mise en place de strat~gies op~rationnelles qui en assurent la r~alisation. Demande de planning familial 3.35 Seulement 3 A 4 % des couples africains pratiquent a contraception. On est en train cependant de voir se cr~er des foyers de demande de planning familial. Des enquetes sur le terrain semblent indiquer qu'A peu pr~s le tiers de toutes les Africaines veulent espacer leurs enfants; les femmes plus jeunes et ulieux ~duqu~es veulent moins d'enfants. Au Ghana, par exemple, les femmes de 40-44 ans veulent sept enfants, mais celles de 15-19 ans n'en veulent que cinq. En moyenne, les Africaines qui sont all~es au moins dix ans A l'~cole veulent trois enfants de moins que les femmes sans ~ducation. Enfin, 25 A 50 % des morts li~es A la maternit~ sont associ~es A un avortement, ce qui semble indiquer l'existence d'une demande insatisfaite de services de planning familial. 3.36 Des faits de plus en plus nombreux montrent que, lorsqu'existent des services de planning familial, l'emploi de la contraception est ~lev~. A Chogoria, au Kenya (il s'agit d'une communaut~ rurale de 200.000 habitants), un programme pilote offre des services accessibles et un suivi de sant~ et de planning familial. En 1985, environ 35 % des couples de Chogoria employaient des m~thodes modernes de contraception, c~ntre 8 % dans l'ensemble du pays. Dans un projet rural du Zaire, le taux est d'environ 25 %. contre une moyenne nationale de 3 %. Au Zimbabwe, le taux est pass~ de 14 % en 1980 A 36 % en 1988, grace A l'intensification d'un programme national. On trouve cependant des cas ou il n'a pas ~t~ possible de cr~er une demande (par exemple, au Ghana), meme quand les femmes poss~daient les connaissances voulues au sujet de l'approvisionnement en contraceptifs. En parei1s cas, i1 faut approfondir les connaissances de mani~re A obtenir de meilleurs r~sultats. 3.37 Meme aux niveaux OU se situe actuellement la demande de planning familial, les taux de pr~valence de la contraception pourraient etre port~s A 25 % en Afrique, alors qu'ils se situent aujourd'hui entre 0 et 10 % dans la plupart des pays. Pour y parvenir. il faudra donner une forte expansion aux services de planning familial. avec l'aide du secteur priv~ et du secteur commercial, qui peuvent aussi fournir des informations et assurer la formation. 3.38 S'agissant de la population urbaine et ~duqu~e, l'objectif principal devra consister A leur faire connaltre OU obtenir les services et A leur faire prendre conscience des avantages et des risques des diverses m~thodes. Quant A la population rurale, qui est plus attach~e aux traditions et n'a pas d·~ducation. il s'agit de la pr~parer pour qu'elle accepte les services modernes de planning familial le jour OU ils seront mis en place. On peut ~largir les programmes de planning familial en mobi1isant les groupements communautaires et f~minins. L'essentiel. on lOa vu au Kenya, est d'offrir aux femmes A 1a fois une ~ducation et un planning familial A base communautaire. - 120 - 3.39 On n'a pratiquement rien fait pour stimu1er 1a demande par 1 'information, l'~ducation et 1a communication (IEC); or, cette formu1e a conduit a d'exce11entes r~ussites dans d'autres r~gions. Les interventions de IEC comportent des campagnes dans 1es medias, des presentations par des agents de sant~, des campagnes dans 1es ~co1es et sur 1es 1ieux de travail, une propagande par des animateurs locaux, ainsi que des s~minaires et voyages d'etudes pour de hauts fonctionnaires et des dirigeants re1igieux. Le secteur priv~ peut ~ga1ement jouer un rOle. Au Kenya, comme en Inde, i1 offre aux employes d'entreprise, ainsi qu'aux co11ectivites, des programmes efficaces et novateurs de planning familial. A long terme, i1 faudra aussi entreprendre de grandes recherches, en particu1ier pour savoir comment creer une demande et donner plus d'efficacit~ aux services dans 1es petites co11ectivites iso1ees et au sein d'une population peu sco1arisee. Offre de services de planning familial 3.40 Des etudes ont montre qu'on fait augmenter l'emp1oi du planning familial en rendant 1es services mieux accessib1es; A TaIwan, par exemp1e, vers le milieu des ann~es 60, un accroissement de 1 % du nombre d'agents de planning familial a entralne une baisse de f~condit~ de 1 A 2 %. Se10n 1es Enqu~tes sur 1a pr~va1ence de 1a contraception et 1es Enqu~tes d~mographiques et sanitaires effectuees en Afrique durant 1es ann~es 80, 30 A 40 % des femmes qui ne se servaient pas de methodes modernes de planning familial faisaient ~tat du manque d'acc~s (ignorance des methodes, ignorance du lieu o~ se procurer 1es produits, conts ~leves, etc.) pour exp1iquer 1e fait qu'el1es ne 1es emp10yaient pas. 3.41 Dans beaucoup de pays africains, l'information et 1es services se limitent aux grandes vi11es. Dans quelques pays, et notamment au Zimbabwe et au Botswana (voir Encadre 3.3), 1a majorite des co11ectivites urbaines et rura1es ont faci1ement acc~s aux services. D'autres pays, dont 1a Tanzanie, le Mozambique, 1e Kenya, 1e Burkina Faso et 1e Mali, mettent gradue11ement en place des services de planning familial dans l'ensemb1e de leur territoire; cependant, 1es progr~s sont 1ents. 3.42 En Afrique, 1a plupart des services de planning familial sont offerts par Ie syst~me de soins de sante pub1ique, ou y sont int~gr~s, d'ordinaire dans 1e cadre des services de sante materne11e et infantile. Les prestations de IEC font un para11~le avec 1es syst~mes de sante et d'enseignement. Cette formu1e peut reussir lorsque 1es reseaux de sante et d'enseignement sont vigoureux et etendus, comme au Zimbabwe et au Botswana. 11 y a neanmoins de nombreux pays, dont 1a p1upart des pays 1es plus pauvres et 1es plus desherites, o~ 1e syst~me de soins de sante pub1ique (comma 1es autres services sociaux) est si mediocre et a une couverture si 1imitee qu'i1 est incapable de fournir, sur une large base, des services efficaces de planning familial. 3.43 On voit donc qu'une expansion rapide de l'acc~s au planning familial exigera, dans 1a p1upart des pays de l'Afrique : a) un renforcement et un e1argissement des syst~mes de soins de sante pub1ique, et b) 1a creation de circuits nouveaux et supp1ementaires de services de planning familial et de IEC. 11 s'agit ici d'organisations privees de planning familial; de reseaux non gouvernementaux de soins de sante - 121 - (missions, soins A la charge des employeurs, praticiens priv~s, etc.); d'autres groupements non gouvernementaux s'occupant de d~veloppement (groupements f~minins, associations A base communautaires); de r~seaux public d'animation hors sant~ (agents de vulgarisation agricole, agents de d~veloppement communautaire, etc.); et du secteur commercial (pharmacies, boutiques polyvalentes de campagne, marchands ambulants, etc.). En m~me temps, il faut s'efforcer A la fois d'att~nuer la d6gradation de l'environnement (par exemple, perte de fertilit~ su sol, d~boisement, ~puisement des ressources hydrauliques) et d'all~ger la charge g~n~rale de travail des femmes qui peuvent alors satisfaire la demande suppl~mentaire de main-d'oeuvre familiale. 3.44 Dans certains pays d'Afrique, les femmes pr~f~rent avoir moins d'enfants, mais de nombreux facteurs socio-culturel, dont la volont~ de leurs maris, les emp~chent d'adopter Ie planning familial. Cet 6tat de choses indique combien il est important d'entrer en contact avec les hommes soit sur les lieux de travail soit par d'autres moyens, par exemple, par l'interm~diaire du syst~me de vulgarisation agricole. 11 semble aussi montrer que les groupements f~minins pourraient utilement servir A fournir des services de planning familial car ils encouragent la solidarit~ entre femmes et peuvent les aider A prendre d'elles-m~mes des d~cisions concernant leur f~condit~. coats 3.45 Quel serait Ie coat d'un grand programme de planning familial? En prenant pour base une exp~rience r~cente, le Zimbabwe pourrait, en d~pensant 0,6-0,8 % de son PNB annuel, r~duire la f~condit6 de 50 %, et la faire tomber d'environ 6 en 1985 A 3 en 2010. En 2020, le Botswana pourrait r6duire de moiti6 son indice synth~tique de f~condit~, qui se situe actuellement A 6,5, en d~pensant chaque ann~e une moyenne de 0,8 % de son PNS de 1986. Non seulement des coats annuels de 0,6-0,8 % du PNB sont modestes, mais ils sont largement compens~s par les ~conomies r~alis~es, grAce A l'abaissement de la f~condit~, sur les budgets de l'~ducation et de la sant~ et sur les importations alimentaires. S~curit~ alimentaire et nutrition 3.46 Une faim chronique sape la productivit~ des hommes et les rend plus vuln~rables A la maladie. La s~curit~ alimentaire s'est d~grad~e depuis l'ind~pendance en Afrique subsaharienne : les graves p~nuries alimentaires qui ~taient exceptionnelles en 1960 sont d6sormais fr~quentes. Au niveau des m~nages, la s6curit~ alimentaire subit directement l'influence des r~sultats de 1 'agriculture. Dans de nombreux pays, la malnutrition a un caract~re saisonnier : elle s'aggrave avant la r~colte, au moment o~ les approvisionnements alimentaire s'~puisent. Les famines r~currentes des ann~es 80 ont montr~ d'une mani~re ~clatante le degr~ consid~rable d'ins~curit~ alimentaire qui existe dans la r~gion. 3.47 Exprim~e en valeur ~nerg~tique, la consommation alimentaire de l'Afrique subsaharienne s'est situ6e, entre 1965 et 1985, aux alentours de 2.100 calories par personne et par jour, soit environ 85 % des rations recommand6es. On estime que Ie quart environ de la population de l'Afrique subsaharienne - plus de 100 millions de gens - obtient, en faisant la I - 122 - moyenne des "bonnes" et des "mauvaises" ann~es, moins de 80 % la ration calorique que recommandent la FAO et l'OMS. Durant les ann~es de s~cheresse et les autres mauvaises ann~es, Ie nombre des mal nutris serait encore plus ~lev~. Tableau 3.2 Afrique subsaharienne Population et s~curit~ alimentaire 1990 2000 2010 2020 Cas I 1. Population (millions d'habitants) 500 700 1010 1500 (avec f~condit~ constante) 2. Production alimentaire (en ~quivalents de 90 110 135 165 millions de tonnes de mals) (au taux actuel de croissance de 2 % par an) 3. Besoins alimentaires (en ~quivalents de 100 160 250 410 millions de tonnes de mals pour obtenir la s~curit~ alimentaire universelle en 2020) 4. D~ficit alimentaire (en ~quivalents de 10 50 115 245 millions de tonnes de mals) Cas I I 1. Population (comme dans Ie Cas I) 500 700 1010 1500 2. Production alimentaire (A 4 % de 90 135 200 300 croissance annuelle) 3. Besoins alimentaires (comme dans Ie Cas I) 100 160 250 410 4. D~ficit alimentaire (comme dans Ie Cas I) 10 25 50 110 Cas III 1. Population (millions d'habitants) 500 680 890 1100 (avec indice synthHique de f~condit~ qui diminue de 50 % pour tomber A 3,3 % en 2020) 2. Production alimentaire (en ~quivalents de 90 135 200 300 millions de tonnes de mals) (A 4 % de croissance annut!lle) 3. Besoins alimentaires (en ~quivalents de 100 150 220 305 millions de tonnes de mals) 4. D~ficit alimentaire (en ~quivalents de 10 15 20 5 millions de tonnes de mals) 3.48 Les pays du Sahel et la zone centrale de la r~gion australe (Botswana et r~gions avoisinantes), o~ les pr~cipitations sont peu abondantes et irr~gulit!res, forment un noyau d'ins~curit~ alimentaire; cependant, toutes les sous-r~gions ont des pays en butte au mame problt!me, mais avec une intensit~ diff~rente. En dehors des pays en proie A des s~cheresses p~riodiques, comme l'Ethiopie, il y a des pays o~ la - 123 - r~partition des revenus est particuliArement in~gale et o~ une partie de la population est extr@mement pauvre, bien que la base agricole et les niveaux nationaux de revenu soient vigoureux (Kenya). L'ins~curit~ alimentaire est ~galement fr~quente dans les pays qui sont le th~Atre deguerre-s civiles (Mozambique. Angola et Ethiopie); dans les pays dont l'infrastructure est m~diocre (Zalre et Ouganda); dans d'autres pays 1 forte population urbaine pauvre (Zambie et peut-@tre Soudan), et dans les pays o~ la gestion ~conomique a arr@t~ la croissance ou n'a pas soutenu une r~partition ~quitable des b~n~fices. 3.49 Tout programme public qui s,attaque au probl~me d'une ration alimentaire minimum doit op~rer une distinction entre p~nuries alimentaires chroniques (c'est-l-dire d~ficits constants) et crises alimentaires passag~res, caus~es par de mauvaises r~coltes, des crises ~conomiques et des troubles civils. En outre, dans les m~nages pauvres, les femmes et les enfants sont plus vuln~rables 1 la malnutrition, ce qui montre que les interventions doivent @tre con~ues de maniAre 1 atteindre des groupes vuln~rables bien d~finis. 3.50 Afin d'obtenir la s~curit~ alimentaire universelle en 2020, il faut intervenir 1 la fois sur le plan de la demande et sur celui de l'offre. 11 est essentiel d'am~liorer la production agricole car c'est la croissance de l'agriculture qui assure l'accAs de tous aux aliments. Cependant, il faut aussi que les pouvoirs publics interviennent sur le plan de la demande, notamment dans le cas des m~nages dont les revenus et le pouvoir d'achat sont m~diocres ou instables. Pr~visions des besoins alimentaires 3.51 11 est difficile d'~valuer les besoins alimentaires des pays africains pendant une p~riode de 30 ans; en effet, toutes pr~visions de ce genre doivent se fonder sur des hypoth~ses concernant les niveaux actuel de ration calorique, les futurs taux de croissance d~mographique et le comportement de la production. N~anmoins, il est n~cessaire d'estimer les besoins afin d'~tablir des pr~visions des besoins d'importation et de l'aide alimentaire. Nous exposons ci-apr~s les grandes lignes de la m~thode employ~e. 3.52 En 1986, la consommation calorique journali~re moyenne des pays de l'Afrique subsaharienne se situait aux alentours de 85 % des besoins nutritionnels. Alors que, en 1986, il Y avait huit pays dont la ration calorique moyenne ~tait ~gale ou inf~rieure 1 80 % de la ration recommand~e, les projections supposent qu'il n'y a aucun pays o~, en 1988, la ration calorique moyenne ~tait inf~rieure 1 80 % du m1n1mum indispensable. Afin d'assurer la s~curit~ alimentaire du pays, on postule que la consommation calorique moyenne passe au moins 1 110 %, comme l'ont fait des pays qui se sont rapproch~s de la s~curit~ alimentaire, par exemple, la Chine. En effet, le pouvoir d'achat n'est jamais ~galement r~parti et les mieux nantis consomment plus de calories que ne l'exige un bon ~tat de sant~. L'~cart entre les besoins et l'offre alimentaire au niveau r~gional est ~valu~ dans le cadre de trois s~ries d'hypoth~ses : a) la production augmente de 4 % par an et la croissance d~mographique tombe progressivement 1 2.75 % en 1990-2020; b) la production nationale augmente de 4 % par an et la population de 3,3 %; et c) la production - 124 - alimentaire et la population nationales augmentent, respectivement de 2 et 3,3 %. Ces chiffres sont donn~s dans Ie Tableau 3.2. L'accentuation prononc~e du d~s~quilibre alimentaire, dans les deux derniers cas (voir Figure 3.3) montre l'importance fondamentale que pr~sentent Ie maintien de la croissance de la production 1 4 % par an et la r~duction de la croissance d~mographique afin d'assurer 1 long terme la s~curit~ alimentaire au niveau r~gional. 3.53 Un accroissement de la production alimentaire de 4 % par an permet une croissance d~mographique moyenne de 2,75 % durant la p~riode 1990-2020, une croissance annuelle de 1 % des disponibilit~s alimentaires par personne et une croissance annuelle de 0,25 % pour r~duire la d~pendance des importations alimentaires. II faut bien souligner que, m~me avec une croissance annuelle de 4 % de la production alimentaire nationale, les importations alimentaires doubleront, passant de 9-10 1 20 millions de tonnes en 2010, mais tomberont 1 5 millions de tonnes en 2020. II faudra assurer les importations alimentaires en ayant recours 1 une formule combinant des importations commerciales et une aide alimentaire. Figure 3.3 Projections du d~ficit alimentaire : Divers sc~narios Equivalents de millions de tonnes de ma!s 280 240 220 200 180 110 140 120 100 80 /" ./'''' "_~ 10 40 Cas III 20 0 11185 2000 2001 2010 2015 2020 1* Ann~e Cas 1 % de croissance annuelle de la production agricole, taux de : 2 f~condit~ constant. Cas 2 : 4 % de croissance annuelle de la production agricole, taux de f~condit~ constant. Cas 3 : 4 % de croissance annuelle de la production agricole, taux de f~condit~ en baisse. Source . 8anque mondiale. - 125 - affre 3.54 Pour r~pondre aux besoins alimentaires grandissants en faisant appel aux culture traditionnelles, il faut apporter des am~liorations compl~mentaires 1 la technologie de la transformation et de l'entreposage des produits d'origine locale. L'accroissement de la demande de c~r~ales ~trangeres en Afrique subsaharienne s'explique, en partie, par leur temps de pr~paration plus court; cette qualit~ sera de plus en plus appr~ci~e au fur et 1 mesure que l'urbanisation se poursuivra et que les femmes auront a s'occuper de plus en plus de choses. II faut cr~er des vari~t~s de c~r~ales dont la transformation peut ~tre group~e et qui sont plus faciles 1 transporter. L'am~lioration de l'entreposage asure un approvisionnement r~gulier des march~s locaux en produits alimentaires. 3.55 Une grande partie de la population africaine priv~e de s~curit~ alimentaire se compose de petits exploiants agricoles - qui sont souvent des femmes - vivant dans des r~gions isol~es ou les transports coQtent cher et qui n'ont que peu ou pas acces aux march~s. Dans la plupart de ces cas, l'intensification de la production vivriere et l'am~lioration de la stabilit~ des approvisionnements sont sans doute les seules fa90ns d'assurer la s~curit~ alimentaire. Si l'on examine la s~curit~ alimentaire sur Ie plan de l'offre, on voit qu'il faut ~liminer les pr~jug~s dont pAtissent les femmes agriculteurs en matiere d'acces au cr~dit. a la vulgarisation et 1 la recherche-d~veloppement. La r~forme des institutions financieres, grAce 1 la lib~ralisation des normes de pr~ts et des m~thodes de remboursement, permettrait aussi de faire augmenter la productivit~ agricole des femmes et d'am~liorer les revenus qu'elles tirent du commerce. 3.56 Le Chapitre 4 examine les questions critiques de politique agricole, dont les besoins technologiques et institutionnels qu'il est indispensable de satisfaire si l'on veut obtenir une forte croissance de la production alimentaire nationale. Le pr~sent chapitre souligne qu'il faut mettre un terme 1 la discrimination subtile qui s'exerce contre l'agriculture en g~n~ral. qu'elle soit pratiqu~e 1 des fins de consommation ou pour 1 'exportation. La croissance de la production pourrait assurer a long terme la s~curite alimentaire de l'ensemble de la region, mais il se peut qu'elle ne soit pas realisee dans tous les pays; Ie commerce alimentaire intra-africain est donc un ~lement essentiel (voir Chapitre 7). Demande 3.57 M~me si l'approvisionnement alimentaire s'ameliore. la repartition des revenus et de la richesse, ainsi que la concentration r~gionale de la production, pourront laisser d'importants segments de la societ~ d~munis du pouvoir d'achat leur permettant d'acheter des aliments de base en quantit~s suffisantes. A long terme, la solution consiste a ameliorer les revenus et l'emploi. 3.58 A court et 1 moyen termes, il se peut qu'il faille recourir 1 diverses interventions, par exemple, 1 des subventions alimentaires ou a des programmes d'aide 1 l'emploi et aux revenus en periode de mauvaises recoltes, s'ajoutant aux programmes qui, en soutenant directement la nutrition, visent 1 eliminer la malnutrition chronique des meres et des enfants. Les femmes forment une proportion considerable de la population - 126 - vuln~rable et il faut les aider 1 participer aux programmes d'emploi et d'alimentation. Dans de nombreux pays, les subventions ont vis~ 1 tort, et souvent pour des raisons politiques, une population urbaine qui ne souffre pas de la pauvret~. II est indispensable de cibler pr~cis~ment les subventions alimentaires sur les groupes vuln~rables. Comme les structures institutionnelles et administratives sont m~diocres, il paralt essentiel de doter les programmes d'un m~canisme d'autociblage en employant des "produits inf~rieurs· sur Ie plan ~conomique (mais non sur Ie plan nutritionnel), tels que les c~r~ales secondaires. Le ·ciblage g~ographique·, qui borne l'acc~s aux r~gions ou un fort pourcentage de la population a des ant~c~dents d'ins~curit~ alimentaire et de malnutrition, comme on Ie fait en Inde, pourrait @tre une formule 1 essayer. Des subventions alimentaires que g~re Ie gouvernement ne concordent pas avec l'objectif qui consiste 1 ~liminer l'intervention de l'Etat dans la commercialisation des aliments. C'est pourquoi, et 1 moins que l'aide alimentaire ne soit mise directement 1 la disposition des groupes vuln~rables, par exemple, les groupes que frappe la famine, il faut rompre Ie lien qui unit la fourniture d'aliments subventionn~s et l'aide alimentaire. De nouvelles initiatives s'imposent. Par exemple, les fonds de contrepartie r~unis grace 1 la vente (par les circuits commerciaux ou aux ench~res) de produits fournis au titre de l'aide alimentaire, pourraient servir 1 subventionner les aliments et 1 am~liorer les revenus des groupes vuln~rables. 5i elles visent effectivement les groupes sans s~curit~ alimentaire, les d~penses consacr~es 1 la subvention des aliments pourraient @tre modestes. 3.59 Des m~canismes soutenant les revenus des groupes d~favoris~s peuvent fournir des esp~ces ou des aliments en ~change de travail ou sous forme de transfert. II n'y a pas de solution unique. La formation de revenus dans Ie cadre de travaux publics qui renforcent l'infrastructure est particuli~rement appropri~e pour l'Afrique. La main-d'oeuvre ne doit pas @tre r~mun~r~e 1 un tarif sup~rieur au bar~me de base, si l'on veut que les travaux publics r~pondent aux crit~res de ciblage. Le coOt de ces m~canismes pour Ie gouvernement varie : il faut de 0,50 1 5-10 dollars pour obtenir 1 dollar d'augmentation des revenus, selon Ie salaire offert et les frais de d~placement des participants pour se rendre sur Ie lieu de travail. 3.60 L'absence de discrimination sur Ie plan des salaires peut attirer des femmes vers les travaux publics, comme on l'a vu dans la r~gion de Maharashtra en Inde. Le fait que des femmes ont un emploi productif peut aider 1 am~liorer la situation nutritionnelle, notamment celIe des enfants. Les travaux publics peuvent aider les femmes dont Ie gagne-pain traditionnel est de plus en plus menac~; n~anmoins, seuls Ie Botswana et la Mauritanie ont mis en place de tels m~canismes. Programmes de nutrition 3.61 Des pratiques d'alimentation qui laissent 1 d~sirer, les contraintes que les travaux du m~nage imposent 1 l'emploi du temps des femmes, Ie manque de micronutriments essentiels et la m~diocrit~ de l'assainissement et de l'alimentation en eau sont autant d'~l~ments qui interviennent dans la nutrition. II en va de meme de certains comportements - la fa~on dont les m~res nourrissent leurs enfants et - 127 - traitent la diarrh~e, la mani~re dont sont administr~s et d~pens~s les revenus du m~nage, et Ie choix et la pr~paration des aliments. Ces comportements semblent ~tre ind~pendants des niveaux de revenu de la plus grande partie de la population en Afrique subsaharienne; il faut y ajouter un mauvais etat de sante. C'est ce qui explique la persistance de la malnutrition malgre Ie rel~vement des revenus, comme on l'a vu au Rwanda, au Kenya et en Gambie. Si l'on ne parvient pas A faire baisser les taux de natalite et A ameliorer les approvisionnements alimentaires, tout espoir de progr~s sur Ie plan de la nutrition doit reposer essentiellement sur des interventions ax~es sur la famille qui visent A modifier les pratiques d'alimentation. 3.62 Les risques nutritionnels apparaissent avant la naissance. Des millions d'Africaines sont sous-aliment~es et ont une an~mie ferriprive chronique qui, de concert avec Ie paludisme et les maladies intestinales, affaiblit les moyens dont elles disposent pour faire face aux exigences physiques de la grossesse, de l'enfantement et de l'allaitement au sein. Des femmes enceintes sous-alimentees risquent davant age d'avoir des enfants d'un faible poids A la naissance qui deviennent alors la proie de l'infection et de la maladie et meurent en bas Age. Si son b~b~ meurt, la m~re s'arr~te de donner Ie sein et recommence pr~matur~ment A ovuler; elle peut donc tomber enceinte plus rapidement que si son enfant avait surv~cu. Le prochain enfant sera plus faible, et Ie cercle vicieux se poursuivra - malnutrition de la m~re, mort du nourrisson et fecondite elevee. 3.63 Les enfants qui survivent A la periode neonatale ont quelques mois de nutrition satisfaisante tant qu'ils prennent Ie sein (l'allaitement au sein est quasi universel en Afrique, mais il est en train de diminuer dans les zones urbaines). La periode la plus critique pour la survie de l'enfant se situe entre 6 et 18 mois; la raison en est en partie parce que les trois premi~res annees de son existence sont celles durant lesquelles il a Ie plus besoin d'energie (environ 27 %) pour grandir. L'alimentation solide commence souvent trop tard, contient trop peu de calories ou n'est pas assez frequente. La ration alimentaire insuffisante qui en resulte, conjuguee aux maladies (souvent imputables au manque d'hygi~ne de 1 'alimentation) , est un exemple classique d'interaction entre infection et malnutrition qui explique pour une bonne part la forte mortalite infantile en Afrique. 3.64 Les strategies de nutrition devront chercher a surmonter les mauvaises habitudes alimentaires et A corriger certaines carences. On peut ameliorer la situation nuteitionnelle quel que soit Ie niveau des approvisionnements alimentaires. De toute ~vidence, ce sont les femmes auxquelles s'adressent surtout (mais pas exclusivement) les programmes d'education en mati~re de nutrition, notamment en ce qui concerne l'utilit~ de l'allaitement au sein et les besoins des jeunes enfants au moment du sevrage et par la suite. En surveillant la croissance, on peut a la fois faire du depistage et impartir dans d'excellentes conditions des informations concernant la nutrition. Durant les s~ances de pesee, on peut montrer aux m~res (et aux p~res) comment identifier et traiter les causes d'une croissance insuffisante. Cependant, une meilleure information ne suffit pas; il faudra aussi apporter d'autres soutiens, par exemple, des aliments A forte densite energetique destines aux enfants qui rendent - 128 - inutile la preparation de supplements alimentaires et font gagner du temps aux femmes. 3.65 Des programmes d'alimentation directe doivent egalement ~tre organises A l'intention des enfants malnutris. Un projet realise au Zaire est un bon exemple de methode peu conteuse d'intervention nutritionnelle (voir Encadre 3.4). De tels programmes doivent comporter un volet de soins de sante primaires; la surveillance de la croissance doit identifier les enfants qui ont besoin de supplements alimentaires (et eliminer du programme ceux qui n'en ont plus besoin). 3.66 Les programme d'alimentation directe ne sont pas necessairement conteux, s'ils sont bien cibles sur les enfants qui courent Ie plus de risques sur Ie plan de la nutrition. L'Inde a mis au point un systeme de ce genre dans l'etat de Tamil Nadu (voir Encadre 3.5). Malgre les differences qui existent entre l'Afrique et l'Asie, les modalites de gestion du projet de Tamil Nadu pourraient @tre reprises pour combattre la malnutrition en Afrique subsaharienne. Le projet d'Iringa, en Tanzanie, a obtenu des ameliorations analogues de la nutrition au moyen d'une formule de mobilisation sociale et de participation communautaire qui utilise efficacement les medias locaux, m~me si on aurait pu obtenir de meilleurs resultats en y integrant des services complementaires. Compte tenu de la prevalence de malnutrition grave (des deuxieme et troisieme degres) chez 20 a 30 % de la population enfantine (Agee de 1 a 5 ans) de l'Afrique, des programmes de nutrition comparables a celui de Tamil Nadu conteraient environ 200 millions de dollars par an, soit a peu pres 0,1 % du PIB de l'Afrique subsaharienne. 3.67 Les carences en micronutriments posent un grave probleme de nutrition en Afrique subsaharienne. Trois pathologies sont frequentes. La cecite (xerophthalmie) est causee par une carence en vitamine A, qui est egalement liee a la pneumonie, a la rougeole et a la diarrhee chez les enfants. La carence en fer, qui est la cause la plus frequente d'anemie, sape Ie travail et la sante et peut egalement se repercuter sur les fonctions psychologiques et sur Ie developpement cognitif. La moitie au moins des femmes en Age de procreer, plus de 60 % des femmes enceintes et la moitie environ de tous les enfants de moins de 12 sont anemiques. La carence en iode, qui est elle aussi repandue, cause Ie goitre chez environ 30 millions d'Africains, et Ie cretinisme chez un autre demi million. 3.68 On peut guerir ces pathologies invalidantes au prix de coUts modestes et les gouvernements africains pourraient plausiblement viser a les eradiquer avant 2020 (voir Encadre 3.6). Moyennant 4 cents par personne et par an, on peut ioder Ie sel ordinaire et l'adjonction du fer conte 0,05-0,09 cents de plus. Comme les cereales transformees industriellement, qu'il est possible de fortifier avec des vitamines et des minerallx moyennant un cont modique, ne sont guere consommes en dehors des zones llrbaines, on pourrait fournir des supplements de micronutriments dans les zones rurales, en m~me temps que des services de sante, par exemple, les vaccinations. C'est la une methode efficace par rapport aux conts, puisque les principales cibles sont les jeunes enfants qU'on vaccine, et les femmes en Age de procreer qui les accompagnent. - 129 - 3.69 Ainsi donc, si l'on veut attaquer Ie probleme de la securite alimentaire dans une optique globale, il faut faire place non seulement aux programmes d'accroissement de la production alimentaire nationale, dont l'importance est critique, mais aussi a plusieurs autres programmes visant specifiquement des groupes vulnerables. Dans ces conditions, un programme global de securite alimentaire et de nutrition coQterait entre 1 et 2 % du PIB, selon les pays. Une telle methode est realisable sur Ie plan administratif, comme Ie montre l'experience du Botswana (voir Encadre 3.7). Enseignement primaire : Relance et universalisation 3.70 Une intensification des investissements dans l'education peut accelerer la croissance de plusieurs fa~ons. Par exemple, on a constate que des agriculteurs scolarises obtiennent de meilleurs niveaux de productivite que ceux qui ne l'ont pas ete. La recherche a egalement montre que l'education de la mere renforce la probabilite de survie de l'enfant. Des etudes de coQts-avantages entreprises durant les dix dernieres annees dans 16 pays africains semblent indiquer que, dans Ie domaine de l'education, Ie taux de rentabilite sociale atteint 26 % dans l'enseignement primaire, 17 % dans l'enseignement secondaire et 13 % dans l'enseignement superieur. L'education est un element intrinseque du developpement, pris au sens Ie plus large du terme; elle donne a la population, et en particulier aux pauvres, les connaissances de base qui representent la fa~on la plus sQre d'en faire des citoyens qui se suffisent a eux-m~mes. 3.71 Or, on a souvent dit que l'enseignement primaire obligatoire avait simplement pour but d'augmenter Ie taux d'inscription. Un tel systeme ne sert absolument a rien si l'on n'en garantit pas la qualite. En Afrique, non seulement les inscriptions sont stationnaires, mais l'enseignement primaire est d'une qualite mediocre, et qui ne cesse de baisser. Les tests de lecture, de sciences et de mathematiques montrent qU'un grand nombre d'Africains n'apprennent que tres peu de choses. Si l'on veut faire augmenter les inscriptions, il est donc important d'assurer au prealable la qualite. 3.72 Une raison de la qualite mediocre de l'enseignement primaire est la modicite des sommes consacrees au materiel pedagogique par eleve - 0,60 dollar par eleve et par an en Afrique, soit 1,1 % des frais de fonctionnement de l'enseignement primaire. Cet etat de choses s'est aggrave ces dernieres annees, car les salaires ont ete proteges par rapport aux autres rubriques du budget. On estime que, au minimum, les manuels et les fournitures coQtent 5 dollars par eleve et par an. Cependant, le probleme est autre que financier. 11 est dQ aussi au fait que la plupart des pays africains n'ont guere les moyens d'elaborer a prix modique des ouvrages d'enseignement qui reposent sur de bons principes pedagogiques et concordent avec le plan d'etudes national. Selon les cas, les pays auront besoin d'acquerir leurs propres capacites, tout au moins pour adapter et preparer un materiel d'enseignement et, parfois, pour rediger, publier et imprimer leurs propres ouvrages. 3.73 Si l'on veut ameliorer la qualite, il faudra aussi relever le niveau de competence professionnelle des enseignants tout en emp~chant d'augmenter les coQts de la preparation pedagogique. La chose est - 130 - possible. Certains pays (Burkina Faso) ont raccourci la duree de la preparation avant l'entree en service, tandis que d'autres ont inscrit les techniques d'enseignement a distance au programme de la formation prealable (Nigeria, Tanzanie et Zimbabwe) et ont adopte des formules inedites de perfectionnement en cours d'exercice, comme en Ethiopie (Encadre 3.8). 3.74 L'amelioration des examens peut aider a surveiller la qualite des ecoles et a assurer que les eleves acquierent des facultes cognitives et ne se contentent pas de faire des exercices de memoire. On peut aussi ameliorer la qualite en veillant a ce que les plans d'etudes et Ie materiel pedagogique soient conformes a l'environnement africain. Enfin, l'emploi de la langue locale pendant les premieres annees de l'enseignement primaire pourrait egalement aider a ameliorer la qualite. 3.75 Si l'amelioration de la qualite est la consideration dominante et represente la priorite immediate, il s'agit aussi, a long terme, d'augmenter la scolarisation, et notamment celIe des filles. On trouve d'enormes variations du taux d'inscription - depuis Ie Niger et la Somalie, avec des taux de 36 et 32, respectivement, jusqu'au ZaIre, a Madagascar, au Togo, a la Zambie et au Kenya, parmi d'autres pays, ou Ie taux de scolarisation etait proche de 100 en 1985. En regIe generale, Ie taux de scolarisation des filles est plus faible que celui des gar~ons, m~me dans les pays OU Ie taux general de scolarisation est eleve (voir Figure 3.4). 3.76 En 1983, les filles ne representaient, dans les pays de l'Afrique subsaharienne, que 44 % des effectifs de l'ecole primaire, 34 % de ceux des ecoles secondaires et 21 % de ceux de l'enseignement superieur. Les filles ont plus de probabilite que les gar~ons d'abandonner leurs etudes, la raison etant en partie qu'on a besoin d'elles pour les travaux menagers. L'analphabetisme est beaucoup plus repandu parmi les femmes. 3.77 L'inegalite dont pAtissent les filles dans Ie domaine de l'education cotlte cher. En effet, on a montre que i) l'education de la mere est peut-~tre l'element Ie plus important qui intervient dans la sante et la nutrition de la famille; et ii) l'education renforce la productivite agricole et, comme l'agriculture de subsistance est surtout pratiquee par des fE!mmeS, il y a lieu de croire que I' enseignement de base donnera a celles-ci, au sein de leur famille, une meilleure capacite de gain, un plus grand nombre de debouches et un pouvoir de decision accru. En outre, on a montre que quelques annees de frequentation de l'ecole primaire suffisent a faire diminuer la fecondite, soit directement en faisant mieux connaitre aux fE!mmeS I' existence de la contraception, soit, d 'une maniere indirecte, en reduisant la demande d'enfants puisque les femmes comprennent qu'elles peuvent ameliorer leurs revenus ou parce qu'on recule l'Age du mariage et, partant, Ie nomb.re d' annees fecondes. - 131 - Figure 3.4 Taux d'inscription dans l'enseignement primaire, par sexe, dans certains pays d'Afrique subsaharienne, 1985 Taux l~~--------------------------------I 120 _ Gar~OIl. _ FiU ·· 100 IZ:::l To tal 80 80 20 o Guip.. Ethiopi. S06,a1 lIinill Cat. d'lVolfe Togo Note: Le taux d'inscription dans l'enseignement primaire represente Ie nombre d'enfants inscrits a l'ecole primaire en pourcentage de la population scolarisable a ce niveau. Source: Rapport sur Ie developpement dans Ie monde, 1989, Banque mondiale. 3.78 De nombreux pays qui veulent ameliorer la qualite de l'enseignement primaire et faire augmenter les inscriptions devront majorer l'ensemble des depenses consacrees au secteur de l'education, en pourcentage du PNB, et accroitre graduellement la part relative de l'enseignement primaire dans Ie budget de l'education. On observe neanmoins d'importantes differences d'un pays a l'autre. 11 se pourrait que certains pays obtiennent l'universalite de l'enseignement primaire bien avant 2020; d'autres, non. La Figure 3.5 montre quelles sont les incidences, sur Ie budget de fonctionnement, de la realisation de la scolarisation primaire obligatoire, dans Ie cadre d'une amelioration de la qualite de l'enseignement, dans cinq pays a faible revenu ou Ie taux de scolarisation est bas. Ces projections se fondent sur les hypoth~ses suivantes : i) pour ameliorer la qualite, les frais de fonctionnement par el~ve du primaire, tels qu'ils etaient en 1983, sont majores dans tous les cas de 5 dollars au titre du materiel pedagogique servant a relever la qualite; ii) ces depenses par el~ve, revisees dans Ie cas de chaque pays, restent constantes en termes reels; iii) la population scolarisable augmente en fonction de la reduction generale de fecondite et d'un PNB qui s'accroit de 4 % par an; iv) les collectivites apportent d'importantes contributions a la construction d'ecoles. Sur la base de ces hypoth~ses, on prevo it que ces pays devront augmenter progressivement les frais de fonctionnement de l'enseignement primaire, les faisant passer de 1-2 % a 3-4 % du PNB afin de realiser l'universalite de l'enseignement primaire en 2020. Le Cas 1 montre que, si les depenses restent a leur niveau actuel, ces pays n'atteindront pas, m~me en 2020, l'objectif de l'enseignement primaire universel. 11 faut souligner ici que ces projections ne representent pas une recommandation qui s'adresserait uniformement a tous les pays. Certains pays, ou l'enseignement primaire est obligatoire, consacrent d'ores et deja 3-4 % de leur PNB a cet enseignement. Dans - 132 - quelques pays (par exemple, Ie Kenya), l'objectif de l'enseignement primaire universel peut @tre atteint bien avant 2020, moyennant un modeste accroissement des d~penses. 3.79 Tandis qu'une r~duction des .coOts par ~l~ve de l'enseignement primaire semble improbable dans la plupart des pays africains, il est n~anmoins possible d'un peu mieux utiliser les ressources. Dans certains cas, on peut mettre en place un syst~me de classes altern~es, augmenter la charge de l'enseignant et utiliser des techniques d'enseignement a distance (bien qu'il faille veiller a ne pas compromettre la qualit~). Au Senegal, par exemple, Les services de planification esp~rent faire augmenter Ie nombre d'el~ves de 6 % en l'an 2000 grAce a un syst~me de classes altern~es mis en place dans 20 % des ecoles. Au Burundi, les classes altern~es ont aide a faire tomber les coats unitaires a 35 dollars (au regard de 52 dollars pour la moyenne de l'Afrique) sans effet perceptible sur la qualit~. L'accroissement des effectifs des classes est un autre moyen de reduire les coats, notamment dans les zones rurales. Enfin, comme Ie montre l'exp~rience du Kenya, la radio interactive peut @tre un utile instrument qui permet d'am~liorer la qualit~ de l'enseignement et d'enrichir l'environnement scolaire. Figure 3.5 Enseignement primaire universel Sc~narios des coats dans les pays a faible taux d'inscription Taux brut d'inscription 100 go --Casel - Cas82 80 70 60 50 1.4.01% 40 1,4.01% 30 1.4.01% 1.4.01% 20 1985 1990 2000 Ann~e Cas 1 : Les depenses consacr~es a l'enseignement primaire, exprimees en pourc:entage du PNB, restent constantes aux niveaux de 1985. Cas 2 : Les depenses consacrees a l'enseignement primaire, exprimees en pourcentage du PNB, augmentent graduellement pour tenir compte de l'acc:roissement progressif du taux brut d'inscription, de mani~re a obtenir en 2020 un enseignement primaire universel. Le Cas 2 comporte un el~ment concernant la qualite. Note: Les pays etudi~s sont Ie Burkina Faso, l'Ethiopie, Ie Mali, Ie Niger et la Somalie, OU les revenus par personne sont compris entre 120 et - 133 - 280 dollars. Les chiffres du graphique representent les projections de depenses consacrees A l'enseignement en pourcentage du PIB. Source Estimtions des services de la Banque mondiale. 3.80 En Afrique, sur 1.000 enfants qui commencent leur scolarisation primaire, 600 seulement se retrouvent en classe terminale. Les abandons et les redoublements font augmenter d'environ une fois et demie le cont de la formation primaire d'un eleve qui termine ses etudes; dans de nombreux pays A faible revenu, le cont atteint plus du double. Les eleves redoublent la terminale du primaire pour ameliorer leurs possibilites d'obtenir, aux examens de fins d'etudes, les notes qui leur permettront d'~tre acceptes dans les etablissements secondaires. On a montre qu'on reduisait le nombre des redoublements en instituant un examen separe d'entree dans l'enseignement secondaire. Dans certains cas, les abandons et les redoublements peuvent ~tre dus aux incapacites mentales que provoquent une mauvaise nutrition et les carences en micronutriments. En pareils cas, des interventions appropriees, par exemple, des programmes cibles de repas scolaires, assortis de supplements de micronutriments, pourraient ameliorer la capacite d'acquisition des connaissances et reduire les taux d'abandon. 3.81 Dans la plupart des pays africains, on voit grandir la demande d'acces A un enseignement secondaire qui ne peut offrir qu'un nombre limite de places. lei encore, l'expansion ne doit pas prendre le pas sur l'amelioration de la qualite. La solution consiste A reduire les conts, notamment par des mesures concernant la formation et l'utilisation des enseignants. Dans de nombreux pays, l'equipement et le personnel enseignant sont considerablement sous-utilises au niveau secondaire; en effet, le taux d'encadrement s'etablit A 23:1 au niveau secondaire, contre environ 30:1 en Asie du Sud. Le recours A l'enseignement A distance dans le secondaire est un autre moyen de reduire les conts, comme l'a montre le Malawi. Enfin, il est absolument essentiel d'ameliorer le recouvrement des conts, A condition d'offrir des bourses, en fonction du merite, aux eleves appartenant aux groupes les plus defavorises. Vu la rarete des ressources publiques, il faut mobiliser des ressources privees pour les investir dans l'enseignement secondaire, comme le fait le Kenya. Tandis que l'enseignement secondaire offre des possibilites considerables de rationalisation, ainsi que de reduction et de partage des cants, ces possibilites sont encore plus grandes dans l'enseignement superieur. Enseignement superieur, formation professionnelle et preparation A l'emploi 3.82 Pour survivre et faire face A la concurrence dans le monde competitif du 21e siecle, l'Afrique aura besoin non seulement de citoyens qui sachent lire, ecrire et compter, mais aussi de specialistes hautement qualifes et competents qui devront realiser d'excellentes recherches, formuler les politiques et mettre en oeuvre des programmes essentiels pour la croissance et le developpement economiques. Les etablissements d'enseignement superieur doivent pouvoir @tre en mesure de donner une formation dans les domaines universitaires et professionels qui correspondent aux divers environnements de travail de l'Afrique. - 134 - Enseignement superieur 3.83 Les connaissances scientifiques et technologiques sont en train d'ouvrir des horizons enti~rement nouveaux en dehors du continent. Les universites africaines devront mettre en place quelques programmes de hautes etudes universitaires, de niveau mondial. en matiere de sciences et d'ingenierie, si ces pays veulent avoir acces aux nouvelles frontieres de la science et de la technologie. Malheureusement, vu la situation actuelle de l'enseignement superieur en Afrique, Ie continent est incapable de se preparer a profiter de l'expansion des fronti~res de la connaissance. A l'heure actuelle, l'enseignement superieur africain se caracterise par un ensemble incongru de filieres, une surproduction de dipOmes de qualite inferieure et des coOts eleves. 3.84 Depuis l'independance, l'enseignement superieur a re9u une place privilegiee. Profondement conscients de leur dependance a l'egard des techniciens etrangers, les gouvernements africains ont depense sans compter pour les universites et les centres de formation. Les inscriptions dans l'enseignement superieur sont passees de quelques milliers d'etudiants en 1960 a un demi million aujourd'hui. La population souhaite vivement donner a ses enfants une formation superieure et les gouvernements ont repondu a cet appel. Les subventions publiques ont atteint un tel niveau que les coOts directs de l'enseignement superieur ont ete presque nuls pour les particuliers, ce qui a renforce la demande. Dans Ie passe, Ie taux de rentabilite prive de l'enseignement superieur etait de l'ordre de 30 % (ce taux etait Ie plus eleve du monde) tandis que Ie taux de rentabilite sociale n'atteignait que 13 %. Cependant, compte tenu de l'accroissement du chOmage des diplOmes, il se peut que Ie taux de rentabilite se soit recemment abaisse. 3.85 Malgre l'accroissement du nombre de diplOmes et, parmi eux, du nombre de chOmeurs, il n'y a pas assez de main-d'oeuvre qualifiee dans des domaines tels que les sciences, l'ingenierie et la verification des comptes et aussi pour occuper les postes de cadres superieurs dans les secteurs de la co:nptabilite et du management. Malgre la part considerable du budget que les gouvernements consacrent a l'enseignement superieur, les expatries restent nombreux dans l'enseignement et il y a encore beaucoup de techniciens etrangers dans les scienes, les mathematiques et d'autres domaines specialises; il semble qu'il y ait plethore de diplOmes dans certaines disciplines, et penurie dans d'autres. 3.86 L'exode des cadres fournit une explication des penuries de techniciens de haut niveau. Aux seuls Etats-Unis, il y avait en 1985 plus de 34.000 etudiants africains, dont beaucoup risquent de ne pas retourner en Afrique; i1 semble par ailleurs que plus de 70.000 Africains qualifies aient opte pour rester en Europe. Cette migration s'explique (entre autres) par la chOte des revenus reels, qui a atteint 16 % entre 1980 et 1985 et a rendu encore plus attrayantes les remunerations offertes outre-mer. D'autres facteurs sont les mauvaises conditions de travail et l'instabilite politique. Sur Ie plan positif, la migration de travailleurs qualifies a l'interieur de l'Afrique a ete elle aussi importante, notamment en direction du Nigeria, du Gabon, de la COte d'Ivoire, du Kenya et du Zimbabwe, ce qui montre l'existence d'un marche grandissant du travail specialise au sein de 1 'Afrique. - 135 - 3.87 L'enseignement superieur est de qua1ite mediocre et pourrait se degrader davantage. Une raison en est 1a mediocre qua1ite de l'enseignement primaire et secondaire, qui, lui aussi, se degrade. Une autre raison est l'amenuisement des ressources consacrees aux dotations hors sa1aires (par exemp1e, immobi1isations physiques), qui ne representent que 2 % de l'ensemb1e des frais de fonctionnement de l'enseignement tertiaire. 11 s'ensuit, dans l'immediat, que 1e niveau universitaire des dip10mes est 1amentab1ement bas. L'Afrique prend donc de plus en plus de retard sur 1e plan des effectifs a haute competence et des moyens de gestion de son economie. Or, 1e di1emne est que, au debut du prochain si~c1e, 1a qua1ite de l'enseignement superieur africain doit ~tre mei11eure qu'e11e ne l'est aujourd'hui si l'on veut que 1e deve10ppement de l'Afrique devienne autosoutenu. 3.88 Dans l'ensemb1e de l'Afrique subsaharienne, 1e cont de l'enseignement superieur par e1~ve-annee s'etab1issait a 3.655 dollars en 1979-80, a11ant depuis 895 dollars en Soma1ie jusqu'a 11.081 dollars au Zimbabwe. Exprimes en pourcentage du PIB par personne, ces conts sont six a sept fois plus e1eves que dans certains pays d'Asie et neuf fois plus e1eves que dans certains pays d'Amerique 1atine. Le gaspi11age, 1a proliferation de petits etab1issements et un personnel p1ethorique, notamment 1e personnel non enseignant, ainsi que 1a po1itique quasi-universe11e de ne percevoir aucun droit d'inscription, sont autant d'e1ements qui contribuent a des conts plus e1eves. Au Nigeria, par exemp1e, 10-20 % seu1ement des conts effectifs de l'enseignement superieur sont recouvres, a10rs que 30-40 % 1e sont dans l'enseignement primaire et secondaire. Les indemnites subventionnees de 10gement, d'a1imentation, de transports et de soins de sante par etudiant de l'enseignement superieur s'e1evaient, exprimees en pourcentage de 1a moyenne du traitement de 1a fonction pub1ique, se montaient a 62-63 % au Benin et au Burkina Faso, a 43 % au Niger et au Cameroun et a 24 % en COte d'Ivoire et au Kenya. On trouve dans 1a p1upart des autres pays une situation analogue. Non seu1ement 1e fait de ne percevoir aucun droit conduit a une augmentation des frais que supporte 1e public, mais i1 contribue aussi, de fa~on indirecte, aux conts e1eves puisque 1es beneficiaires n'ont aucune raison de freiner 1es depenses non essentie11es. 3.89 Pour resoudre 1a crise de l'enseignement universitaire, des mesures radica1es s'imposent afin d'ame1iorer 1a qua1ite, reduire 1es conts par etudiant et par dip10me, freiner 1e nombre de sortants dans 1es domaines qui ne soutiennent pas 1e deve10ppement economique, et attenuer 1a charge imposee aux sources de financement en intensifiant 1a participation des beneficiaires et de leurs fami11es. Si l'on veut atteindre l'objectif principal qui consiste a ame1iorer 1a qua1ite, ces ressources devront ~tre trouvees grAce a une reforme de l'enseignement superieur proprement dit. C'est uniquement en mettant en place des po1itiques visant a faire baisser 1es conts unitaires, a limiter 1e nombre de sortants et a e1argir 1e principe du partage des conts par 1es beneficiaires qu'i1 sera possible de 1iberer 1es ressources indispensables au retab1issement de 1a qua1ite. 3.90 A plus long terme, on peut ame1iorer et maintenir 1a qua1ite grace A 1a mise en place de programmes ou de centres d'exce11ence qui seraient responsab1es des hautes etudes universitaires et des recherches. - 136 - On pourrait ainsi concentrer le personnel et les res sources de mani~re a obtenir une masse critique dans les domaines prioritaires. En mettant sur pied de tels programmes et institutions sp~cialis~s de haute qualit~, les gouvernements africains offriraient aux bons ~tudiants une option attrayante en remplacement d'~tudes a l'~tranger et inciteraient les chercheurs universitaires a poursuivre leurs travaux sur le continent, s'attaquant ainsi au grave probl~me de "l'exode des cerveaux". Afin de r~aliser des ~conomies tout en assurant une haute qualit~, ces centres d'excellence devraient avoir un caract~re r~gional (voir Chapitre 7). Formation professionnelle 3.91 Comme il urgent de donner a la population active les ~tait comp~tences par des emplois pr~cis, de nombreux pays ont investi exig~es dans des ~tablissements de formation professionnelle. Peu d'entre eux disposent cependant de politiques et d'un cadre institutionnel coh~rents qui permettent d'impartir un enseignement professionnel et une formation technique a la fois efficaces et appropri~s. 3.92 On am~liore l'efficacit~ et la qualit~ de la formation professionnelle en l'orientant en fonction de la demande d'emploi, en intensifiant la participation des employeurs et en renfor9ant la transition entre la formation et l'emploi. Dans de nombreux pays, la formule d'un apprentissage compl~t~ par un enseignement th~orique en dehors de l'emploi a donn~ de bons r~sultats. L'exp~rience montre que cette formule peut etre efficace aussi bien pour les grosses entreprises du secteur moderne que pour les petites entreprises qui vont cr~er la plus grande partie des nouveaux emplois (Encadr~ 3.9). 3.93 La r~action a la demande d'emplois est l'~l~ment primodial qui conditionne la formation professionnelle, apprentissage compris, et aussi l'am~lioration de la qualit~ de la pr~paration. Pour commencer, il faut constituer un organisme national qui finance et administre la formation en collaboration avec l'industrie. Cet organisme pourrait se consacrer a une s~rie d'activit~s de formation parascolaire et pourrait relever du mlnistere du travail, afin de pouvoir mieux recruter son personnel et r~pondre aux besoins des employeurs. 11 faut regrouper les ~tablissements de formation professionnelle et de pr~paration a l'emploi et en faire la r~forme de maniere a ~conomiser des ressources d~ja maigres et a renforcer la qualite; seuls les ~tablissements qui sont axes sur les demandes du march~ du travail seront conserv~s. Les plans d'etudes devront etre ~largis pour englober des domaines tels que la formation en gestion, de maniere a pouvoir aider les entreprises. Certains pays ou le secteur moderne est vigoureux seront en mesure de recouvrer une partie des conts aupres des employeurs ou des int~ress~s; dans la plupart des pays, les conts seront couverts par les deniers publics. 3.94 Le plan de pr~paration a l'emploi que Maurice est en train de mettre sur pied tient compte d'un grand nombre de ces ~l~ments. 11 cherche a r~pondre aux signaux qu'envoie le march~ du travail a court terme en proc~dant a des am~nagements rapides de 1a dur~e et de la teneur de la formation. La formation parascolaire a court terme sera administree par un Bureau autonome, place sous la responsabilit~ d'un Conseil de la formation industrie11e et professionne11e compos~ de repr~sentants du gouvernement et - 137 - de l'industrie. Le systeme sera financ~ par un impOt de 1 % sur 1es salaires et par un cr~dit budg~taire du m@me montant fourni par l'Etat. 3.95 Dans les pays ou la fonction publique est chroniquement pl~thorique, les gouvernements doivent r~examiner leur politique de formation. II faut r~du~fe Ie nombre d'~leves admis dans les ~tablisements de formation et r~orienter celle-ci de maniere a donner aux futurs fonctionnaires de meilleures comp~tences. Par ailleurs, la formation pour la fonction publique devra @tre li~e aux possibilit~s d'am~nagement des carrieres. L'exp~rience de la Malaisie, pays ou existe un vigoureux systeme de formation pour Ie secteur public, a montr~ qu'il est essentiel que les stagiaires et les responsables soient en contact ~troit. Pour obtenir Ie perfectionnement syst~matique de leurs employ~s, les gouvernements doivent mettre sur pied, ce qu'ils font rarement, des programmes d~taill~s a long terme de pr~paration a la fonction publique. 3.96 Dans une grande partie de l'Afrique, Ie petit nombre de personnel qualifi~ dont chaque pays a besoin et Ie coOt ~lev~ d'une pr~paration de qualit~ (y compris am~nagement du plan d'~tudes, perfectionnement du personnel, mat~riel et ~quipement) peuvent rendre prohibitifs les coOts unitaires de la pr~paration a l'emploi. C'est pourquoi, il est important que les gouvernements soutiennent Ie principe d'une formation a l'~chelle r~gionale (voir Chapitre 7). Science et technologie 3.97 Durant les ann~es 60 et 70, de nombreux pays ont ouvert des ~tablissements nationaux et r~gionaux de recherches. Des recherches de niveau international sont effectu~es dans des centres tels que Ie Centre international sur la physiologie et l'~cologie des insectes (ICIPE) au Kenya (voir Encadr~ 7.4) et dans les instituts internationaux de recherche agricole qui relevent du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR), tels que Ie Centre international pour l'~levage en Afrique (ILCA), en Ethiopie. Cependant, en regIe g~n~rale, les systemes nationaux de recherche n'ont pas donn~ de bons r~sultats. Parfois, ils ont cr~~ une couche isol~e de recherches modernes qui ne sont soutenues ni par une large base de personnel ayant une formation technique ni par un public inform~ capable de mettre a profit les r~sultats des recherches. En outre, et malgr~ l'effort de formation, l'Afrique manque des techniciens de niveau moyen qui sont essentiels pour ~tayer les travaux scientifiques et techniques. 3.98 Les travaux scientifiques sont rarement soumis a l'examen de collegues. Les compressions apport~es aux budgets des recherches entralnent souvent des coupures draconiennes dans les fonds consacr~s au mat~riel, aux travaux sur Ie terrain, a l'achat de revues, et a beaucoup d'autres rubriques en dehors des salaires. Trop souvent, les recherches entreprises par les pouvoirs publics sont tributaires du soutien de bailleurs de fonds et s'effondrent quand ce soutien disparait. Dans cette optique. il est essentiel. a long terme. de pr~voir syst~matiquement pour la recherche-d~veloppement des d~penses d'environ 1 % du PIB. 3.99 Des am~liorations de la qualit~ de la recherche sont fonction d'une interaction accrue entre les utilisateurs et les producteurs de - 138 - technologie, et d'un engagement plus vigoureux des echelons superieurs de l'Etat A l'egard de la science et de la technologie. Les entrepreneurs se heurtent aux limites que leur impose l'environnement commercial dans leurs efforts pour exiger et produire une technologie d'adaptation (voir Chapitre 6). Sur d'autres continents, ce sont eux qui produisent A faible coOt un materiel intermediaire economiseur d'energie qui correspond au marche local et acqui~rent un ensemble de competences techniques qui leur permet d'identifier les besoins du pays et d'en rechercher des solutions. La creation d'un environnement propice et l'encouragement du developpement des entreprises devraient aider. A cet effet, les instituts de recherches devraient s'efforcer d'obtenir la partcipation du secteur prive A leur gestion. On peut aussi ameliorer Ie volume des recherches en etablissant des r~seaux avec d'autres instituts. Les instituts africains peuvent encourager une evolution en ce sens en organisant des conferences, des ateliers et des publications de concert avec leurs homologues d'autres pays en developpement. Temoin les manifestations qu'organise l'Academie africaine des sciences de Nairobi. 3.100 A long terme, l'efficacite de l'infrastructure de la science et de la technologie en Afrique sera fonction de l'engagement pris A la fois par Ie public et par les gouvernements de fournir un soutien constant aux institutions nationales et regionales de sciences et de technologie qui encouragent l'excellence et l'utilite. L'excellence doit etre un processus dynamique decoulant de l'amelioration de la qualite et de l'utilite des syst~mes d'education, qui reconnait Ie rOle que jouent les universites pour former les specialistes qui occupent des postes de professeurs, de chercheurs et d'animateurs. La recherche est un element intrins~que et fondamental de ce processus si l'on veut que les universites attirent et conservent un personnel de haut calibre qui ne doit pas uniquement relegue aux taches d'enseignement, comme c'est Ie cas dans de nombreux pays. 3.101 On ne peut pas prendre un chemin de traverse pour creer un environnement qui incite A la recherche et A l'innovation. II faut que les baillEmrs de fonds et les gouvernements continuent A fournir un soutien. De brusques fluctuations du soutien et d'imprevisibles changements de cap portent tort, dans n'importe quelle societe, A l'implantation d'une infrastructure technologique. 3.102 Le soutien des bailleurs de fonds doit donc servir A amener A la science et A la technologie africaines un certain niveau d'excellence et d'utilite et aider A etablir des liens reliant les institutions A d'autres institutions qui se trouvent en dehors du continent. Pour cela, il faudra redefinir la mission des universites et des etablissements de recherche africains pour qu'ils puissent parvenir A ce niveau d'excellence et d'utilite, se mettent en quete de talents de haute qualite et leur fournissent un soutien approprie, et, en particulier, encouragent Ie recrutement de jeunes hommes de science par les institutions de science et de technologie. La creation de reseaux d'institutions et d'hommes de sciences d'Afrique et d'autres continents sera un element intrins~que de ce syst~me; des liaisons avec la communaute internationale de sciences et de technologie aideront A surmonter l'isolement des chercheurs africains et A renforcer leur qualite. - 139 - 3.103 La nouvelle strategie doit embrasser trois niveau de technologie - la haute technologie, les applications dans les entreprises moyennes, et les besoins au niveau des villages. Afin d'imbriquer la science et la technologie dans le developpement economique et social, il faudra mettre en place des dispositifs tripartites bien con9us faisant intervenir l'enseignement, la recherche et la prestation de services. L'acquisition d'une technologie intermediaire moins coQteuse est importante si l'on veut s'attaquer aux probl~mes du "chainon manquant" (voir Chapitre 1). 11 serait souhaitable d'examiner de plus pr~s les possibilites d'obtenir des produits et des services d'autres pays en developpement. La conception et la gestion de programmes de valorisation des ressources humaines 3.104 Les services de sante, d'enseignement, de planning familial, de nutrition et d'alimentation en eau manquent souvent d'efficacite dans la plus grande partie de l'Afrique. Les ecoles n'ont pas de manuels, les dispensaires manquent de medicaments et ni les ecoles ni les dispensaires ne sont proprement repares et entretenus. De m~me, les ouvrages d'alimentation en eau sont souvent inutilisables parce qu'ils n'ont pas ete sufisamment entretenus. L'experience montre que la gestion des services essentiels pourrait ~tre confiee a des organismes decentralises - administrations locales, collectivites ou ONG. Des services tels que les ecoles primaires, les dispensaires et les pompes a eau fonctionnent dans les meilleures conditions si ce sont les utilisateurs ou des organismes proches qui s'en occupent. Quand les services se degradent ou cessent de fonctionner, les utilisateurs peuvent rechercher la cause du mal et prendre des mesures pour y remedier. 5i on a besoin d'argent pour entretenir ou reparer les installations, ou pour fournir des manuels ou des medicaments, point n'est besoin d'attendre l'affectation d'un credit par le gouvernement central. Les utilisateurs sont mieux dispos~s a prendre en charge une partie du coQt s'ils participent directement a la gestion. 3.105 8i l'on encourage une gestion decentralisee fondee sur le principe de la participation, cela ne veut pas dire qu'on embellit l'idee qu'on se fait des collectivites locales. Les elites et de puissants droits acquis peuvent subvertir l'inter~t general. Mais, dans un monde imparfait, une gestion orientee vers les utilisateurs a plus de chances de repondre aux besoins et aux exigences des beneficiaires vises. Cela est particuli~rement important en Afrique, OU il y a peu de cadres experimentes susceptibles de travailler dans des organismes fortement centralises et ou l'effort de groupe et l'action communautaire s'inscrivent dans de vieilles traditions. 3.106 Les organismes a gestion centralisee ont un rOle important a jouer pour fournir aux groupements locaux des services techniques de soutien. C'est ce que montrent bien les exemples du Malawi (Encadre 3.10), du Kenya et du Zimbabwe, qui ont organise de bons programme d'alimentation en eau. Ce sont des services techniques centralises qui donnent les directives, apportent un soutien et fournissent des produits a des groupements d'usagers places sous administration locale. Dans les ecoles primaires, les services de planning familial, de sante et de nutrition, ainsi que le personnel local. doivent @tre tenus au courant de l'evolution technique du domaine qui les interessent. La meilleure fa90n d'amenager , - - 140 - l'interface entre les services techniques fournis par un organisme central et Ie personnel et la gestion locaux consiste A recourir A des programmes fond~s sur des visites r~guli~res et sur une interaction entre les organismes centraux, Ie personnel form~ sur place et les b~n~ficiaires. Cette m~thode de formation et de visites est employ~e par la vulgarisation agricole et transmet A un public tr~s divers des ipformations concernant les techniques de production. Le syst~me de formation et de visites, convenablement adapt~ pour la valorisation des ressources humaines, pourrait aider A atteindre ceux qui ont Ie moins acc~s aux services sociaux, et cela d'une fa90n efficace par rapport aux conts. 3.107 Le syst~me de formation et de visites se prete particuli~rement bien aux prestations de sant~; en effet, il existe d~jA toute une s~rie d'innovations techniques peu conteuses qui peuvent etre efficaces contre les principales causes de mortalit~ et de morbidit~ des nourrissons et des enfants. On peut citer ici en exemple Ie traitement de r~hydratation par voie orale (TRO) contre la diarrh~e. Les agents qui utilisent Ie syst~me de formation et visites travaillent individuellement avec les membres de la communaut~ et peuvent faire connaitre aux femmes les besoins nutritionnels de leurs enfants, ainsi que les principes du planning familial. En rcrutant sur place des agents de sant~ communautaires A qui on donne une formation A intervalles r~guliers et qui travaillent sous une ~troite supervision, les messages du syst~me de formation et visites ont plus de chances d'etre accept~s. Dans un projet bien administr~ qui a utilis~ avec succ~s Ie syst~me de formation et visites - Ie projet de Tamil Nadu, en Inde .. un petit nombre d'agents peu r~mun~r~s, recrut~s et form~s sur place,. se sont r~v~l~s tr~s efficaces par rapport aux conts. 3.108 L'ex~cution des r~formes et des programmes d'am~lioration de la qualit~ exigent un syst~me administratif qui fonctionne bien et peut fournir un mat~riel p~dagogique aux ~coles et des produits m~dicaux aux dispensaires, tout en assurant l'encadrement et en apportant un soutien. Dans beaucoup de pays africains, la sant~, l'~cucation et la s~curit~ alimentaire rel~vent de diverses structures administratives parall~les qui ne sont gu~re int~gr~es sur Ie plan fonctionnel. Ces structures administratives freinent la coordination des activit~s et des programmes. Une int~gration horizonta1e est n~cessaire, notamment au niveau du village et de la communaut~, afin de porter au maximum les relations de synergie qui existent entre ces facteurs. Tarification des usagers 3.109 Encourag~s par les bailleurs de fonds, un grand nombre de gouvernements insistent que l'eau doit etre fournie gratuitement. Or, comme il n'y a pas d'argent pour installer ou entretenir les pompes ou les bornes-fontaines, il n'y a pas d'eau. Les consommateurs doivent alors soit payer cher l'eau qu'ils ach~tent A un vendeur soit parcourir de longues distances pour trouver de l'eau (Encadr~ 3.2). C'est Ie meme genre de situation qu'on retrouve trop souvent dans Ie domaine de l'~ducation et des services de sant~. Quels que soient les m~rites de la gratuit~ des services sociaux, la r~alit~ africaine est telle que de nombreux habitants, et en particulier les plus pauvres et les plus vuln~rables, n'ont que peu ou pas: d'eau. Si l'on veut donner A tous en 2020 une formation ~l~mentaire, des soins de sant~ primaires et une alimentation en eau, - 141 - chaque pays doit alors reexaminer son attitude l'egard de la tarification des usagers. 3.110 Dans un rapport publie en 1987 sous Ie titre ftL'ajustement a visage humain ft , l'UNICEF a souligne qu'il fallait aborder les problemes au cas par cas. Bien que l'~ICEF ne preconise pas l'institution de redevances d'usagers quand il s'agit des besoins fondamentaux de 1 'homme, il semble qu'il y ait place pour un recouvrement des coUts, notamment pour des services tels que l'alimentation en eau et l'assainissement. Le recouvrement integral des coUts aupres des beneficiaires de services qui ne sont pas fondamentaux merite d'~tre encourage. II s'agit de l'enseignement universitaire et des services de sante non essentiels. On peut pratiquer un recouvrement selectif pour des services tels que l'enseignement secondaire, Ie traitement medical curatif et l'eau courante a domicile. Cependant, chaque fois qu'on pratique Ie recouvrement des coUts, il faut prevoir des exceptions en cas de difficultes economiques extr~mes ou de merite particulier. Les femmes en tant que chefs de file 3.111 Au sein da menage, les femmes africaines jouent un r6le de chefs de file en matiere d'alimentation, de nutrition, d'eau, de soins de sante, d'education et de planning familial, et cela dans une mesure beaucoup plus grande que partout ailleurs dans Ie monde en developpement. Elles ont toujours fait des travaux agricoles, pratique Ie commerce et se sont adonnes A d'autres entreprises economiques. Ce sont les femmes qui protegent Ie bien-~tre de leurs enfants et ont la responsabilite explicite d'assurer leurs besoins materiels. 3.112 Or, les femmes voient menaces les moyens economiques dont elles disposent, et notamment ceux qui leur permettent de s'occuper du bien-etre de la famille. La "modernisation" a fait pencher la balance au detriment des femmes. Le cadre juridique et les services du secteur social moderne et de la production mis en place par les pays africains independants (et aussi par la plupart des projets realises sous l'egide de l'exterieur) n'ont guere aide les femmes. Les regimes juridiques ont opere une discrimination en matiere de droit de propriete de la terre, en mettant les terres nouvellement inscrites au cadastre au nom des hommes (dans leur pretendu r6le de chef de menage), souvent au mepris des droits traditionnels des femmes a l'utilisation de la terre; de m~me, ce sont generalement les hommes qui re90ivent Ie paiement pour Ie travail familial effectue dans Ie cadre de contrats de culture. Souvent, il est plus difficile aux femmes d'avoir acces a 1 'information, A la technologie, a des ressources et au credit. La vulgarisation agricole et les institutions financieres officielles ont des prejuges en faveur d'une clientele masculine, malgre l'importance des femmes en tant que producteurs. Les femmes doivent payer plus cher pour obtenir des services financiers et des intrants materiels tels que les engrais (ou elles doivent s'en passer). II y a aussi des differences considerables dans Ie domaine de l'education : or, l'education des filles a une incidence sur la sante et la nutrition familiales, sur la productivite agricole et sur la fecondite. Le manque de moyens et les pressions qui s'exercent sur Ie temps et sur l'energie imposent d'enormes obstacles que les femmes doivent franchir pour prendre - 142 - soin de leur propre sant~, de leur propre nutrition, et de ce11es de leurs enfants. 3.113 Dans ces conditions, 1es femmes sont moins bien arm~es que 1es hommes pour profiter de l'am~lioration des possibi1it~s de gagne-pain qui se sont fait jour en Afrique. Bien que l'a1iment~tion et 1a nutrition soient essentie11ement l'affaire des femmes en Afrique subsaharienne, et bien que 1es femmes soient 1es principaux acteurs de l'agricu1ture, on a re1ativement n~glig~ 1a pratique ind~pendante de l'agricu1ture par 1es femmes. Par c~ntre, 1es femmes ont vu augmenter leur part du travail familial, mais sans qu'e11es en soient r~mun~r~es; dans l'industrie et dans 1e commerce, 1es femmes ont dQ se borner a de petites op~rations du secteur marginal; quel que soit 1e dynamisme de ces op~rations, et malgr~ 1es empires commerciaux ~chafaud~s par 1es femmes dont les entreprises ont ~t~ 1e mieux couronn~es de succes, 1es revenus moyens des femmes sont re1ativement bas. Du fait qU'e11es sont moins sco1aris~es, les femmes sont aussi handicap~es sur 1e plan de l'acces aux emplois du secteur organis~; cel1es qui r~ussissent a se faire engager occupent des postes inf~rieurs qui sont moins bien r~mun~r~s. Un revenu plus bas nuit a leurs possibi1it~s d'asurer Ie bien-~tre de leurs enfants. 3.114 En para1lele a ces handicaps dans 1e domaine "public" (producteur de revenus), 1es femmes se trouvent en butte a des pressions accrues au sein du m~nage. Les combustibles nature1s et l'eau qui sont indispensables aux soins de sant~ et a 1a pr~paration des aliments se font de plus en plus rares et coQteux et i1 faut beaucoup de temps pour se les procurer. Les femmes se voient ob1ig~es de passer plus de temps pour faire durer 1es ressources dont e11es disposent ou bien e11es doivent faire davantage appe1 a l'aide des enfants, ou de r~duire 1e niveau d'a1imentation et de soins des enfants. Des apparei1s qui permettent de gagner du temps, comme les petits apparei1s de mouture, des po~les efficaces, des projets de reboisement et, ce qui est sans doute 1e plus important, une alimentation en eau plus abondante peuvent ~tre des moyens particu1ierement efficaces par rapport aux coQts d'att~nuer que1ques-unes des contraintes qui sont impos~es aux femmes dans 1a conduite du m~nage. 8i l'on tient compte des conditions diffici1es dans 1esquel1es 1es femmes doivent g~rer les ressources du m~nage.il pourrait ~tre possible d'accroltre Ie rendement et l'efficacit~-coQt des interventions de valorisation des ressources humaines. - 143 - Tableau 3.3 Besoins financiers d'une va1orisation des ressources humaines reposant sur une large base en Afrique subsaharienne (en pourcentage du PNB) Depenses A engager Resu1tats A engager en l' an de 1985 immediatement 2000 Interventions de securite a1imentaire D,S D,S Nutrition 0,2 0,2 Enseignement primaire universe1 et amelioration de sa qua1ite 1,3 1,5 2,2 Planning familial 0,8 0,8 Eau et assainissement 0,5 D,S Soins de sante primaires 1,35* h O 2,5 Total partie1 5,5 6,7 Autres investissements connexes Science et techno1ogie D,S 0,8 Enseignement secondaire et superieur 1,7 2,5 2,5 Total 4-5 8,5 10,0 .. = negligeable. * Total des soins de sante, c'est-A-dire y compris soins primaires et autres. Soutien financier soutenu apporte a la valorisation des ressources humaines 3.115 M~me si l'on prend toutes les mesures necessaires pour donner plus de rentabilite et d'efficacite A 1a prestation des services, reduire les conts unitaires et ameliorer la tarification des usagers, la future strategie de developpement exige que, d'ici a l'an 200 et au-dela, on double les investissements annuels consacres a 1 'homme , pour les faire passer d'environ 4-~ % a environ 8-9 % du PNB (voir Tableau 3.3). C'est lA un chiffre plus eleve que ce1ui de pays comme Ie Sri Lanka, la Chine, Maurice et la Coree, qui sont parvenus a assurer, sur une large base, I' acc~s aux ress,')urces humaines en y consacrant environ 5 % de leur PNB. Mais l'Afrique subsaharienne a des popUlations tres dispersees et, en general, une infrastructure mediocre. II faut s'attendre A des variations significatives des besoins d'un pays a l'autre, etant donne 1e degre different de valorisation des res sources humaines auquel sont parvenus les divers pays. 3.116 En conclusion, il faut mettre 1es recommandations qui demandent un accroissement des depenses consacrees par les pays et les bai11eurs de fonds aux programmes de valorisation des ressources humaines dans Ie contexte d'une vaste strategie qui doit formuler et executer des programmes visant a creer un environnement propice permettant de stimuler la croissance des secteurs productifs de l'agriculture et de l'industrie. En resume, l'ordre du jour strategique des annees 90 doit viser a : - 144 - o doubler d'ici A l'an 2000 et au-de1A 1e total des d~penses, le faisant passer de 4-5 A 8-10 % du PNB afin de donner A 1a population toute enti~re une formation primaire, des services de sant~ et de planning familial, 1a s~curit~ a1imentaire et une bonne nutrition; on peut escompter qU'une proportion importante de ces fonds seront fournis par des donateurs; o am~liorer 1a qua1it~ de tous 1es services, et notamment de l'~ducation et des soins de sant~; o am~liorer 1a rentabilit~ des d~penses en modifiant les affectations dans chaque secteur, en cib1ant 1es ressources sur 1es plus d~sh~rit~s et en pratiquant 1e recouvrement des coQts; et o intensifier. dans l·ex~cution des programmes, 1e recours indispensable aux organisations non gouvernementa1es A base communautaire; 1es femmes doivent jouer un rOle de chefs de file dans tous 1es domaines de 1a va1orisation des ressources humaines. - 145 - Encadre 3.1 Le SIDA : Retentissement demographique et economique L'organisation mondiale de la sante estime qu'il y a en Afrique plus de 1 million d'~tres infectes par Ie virus HIV, dont 30 % deviendront sideens en quelques annees. Les regions les plus durement touchees. au centre de l'Afrique, sont Ie Zalre, Ie Rwanda, l'Ouganda, Ie Burundi, la Tanzanie et Ie Kenya. Des enqu~tes effectuees dans ces pays rev~lent des taux de seropositivite allant de 5 A 20 % chez les adultes des villes, et des taux encore plus eleves chez les groupes A risques. Le SIDA peut se repandre rapidement en Afrique. La prevalence des maladies transmises sexuellement (MTS) s'explique par la pratique repandue d'un comportement sexuel entralnant des risques eleves qui facilite aussi la transmission du virus HIV. A Bangui, en Republique centrafricaine, la seropositivite des adultes est pas see de 2,1 % en 1985 A 7,8 % en 1987. Chez les prostituees du Kenya, elle a augmente de 4 A 59 % en cinq ans. Le taux de mortalite imputable au paludisme depasse celui des maladies liees au SIDA mais Ie nombre de morts, notamment de tout jeunes enfants, pourrait augmenter durant les prochaines decennies a la suite de la pandemie du SIDA. Divers mod~les font en effet passer Ie taux brut de mortalite de 20 A 100 % dans Ie bref espace de 20 ou 30 ans, par rapport a la situation qui existerait en I' absence du SIDA. Les taux de mortalite infantile pourraient augmenter de 50 %, sinon plus. Au fur et A mesure que se repand la maladie, Ie traitement des sideens intensifiera les demandes dont seront l'objet les precaires systemes de soins de sante des pays qu'elle envahit. Une analyse effectuee au Zalre montre que les conts du traitement du SIDA vont de 132 dollars par malade (dans des etablissements de sante publique) A 1.584 dollars (dans Ie secteur prive). Une moyenne ponderee (70 % des patients traites dans un etablissement de sante publique, 25 % d'assures et 5 % soignes dans Ie secteur prive) donne un cant moyen de 229 dollars par sid~en. En multipliant cette moyenne par Ie nombre de personnes qu'il va sans doute devoir soigner, on obtient un cant direct atteignant au total 49 millions de dollars en 2010. Pour Ie financer, le budget national de la sante devrait ~tre majore de 58 % en 1993, et de jusqu'a 244 % en 2010. Une formule de partage des conts pourrait quelque peu alleger cette charge, mais celle-ci deviendra trop lourde, apres l'an 2000, pour pouvoir ~tre supportee sans subvention. On voit donc que Ie SIDA a des incidences budgetaires, sans parler des difficultes materielles qu'il entralne pour Ie systeme de prestation des soins de sante. La lutte contre Ie SIDA va probablement absorber une partie des res sources qui etaient affectees au traitement et A la maltrise d' autres maladies importantes. A l'hOpital Mama-Yemo, au ZaIre (2.000 lits), 50 % des malades des services medicaux chirurgicaux sont seropositifs et 25 % des deces sont lies au SIDA. Pour traiter Ie SIDA, il faudra aussi plus de devises pour acheter des produits pharmaceutiques. Le Programme des medicaments essentiels de l'OMS risque de voir s'aggraver ses penuries, au fur et A mesure que les sideens sont de plus en plus nombreux A vouloir se faire traiter pour des infections recurrentes, qui resistent davantage au traitement et exigent de plus fortes doses de medicaments. - 146 - 11 Y a aussi d'autres coQts. Le SIDA frappe surtout les jeunes et les personnes d'Age mQr qui vivent leurs ann~es de meilleure productivit~. Parmi les adultes africains, les personnes infect~es ont en majorit~ de 16 a 29 ans. Une ~tude des coQts effectu~e par Ie Zaire estime que Ie nombre d'ann~es de vie en bonne sant~ obtenues grAce a la pr~vention d'un cas de SIDA est en moyenne de 6,2. Ces ann~es de bonne sant~ sont ~valu~es a 5.512 dollars dans les zones urbaines et a 893 dollars dans les zones rurales. En pond~rant les coQts par Ie pourcentage de population vivant dans les zones urbaines et rurales, on obtient un coQt indirect moyen de 4.600 dollars, soit 20 fois Ie coQt direct d'un cas de SIDA. II est impossible de d~terminer avec pr~cision l'impact du SIDA, mais il est urgent d'instituer des campagnes de lutte. Les strat~gies de lutte contre Ie SIDA sont fonction de l'~pid~miologie particuliere de la maladie dans Ie pays concern~. Les ~l~ments suivants sont n~anmoins indispensables : o les programmes doivent @tre int~gr~s aux soins existants de sant~ primaire, aux programmes de planning familial, aux services de sante maternelle et infantile et aux programmes de lutte c~ntre les MTS; o il faut organiser des programmes de conseils efficaces et constants aux personnes dont on d~cele la seropositivit~ au virus du SIDA, afin de renforcer des modes de comportement qui pourraient r~duire la diffusion de l'infection; o il faut mettre en place des m~thodes de diagnostic rap ide et de traitement efficace des vic times des MTS qui sont particulierement vulnerables au HIB. (La distribution cibl~e de condoms a ~t~ efficace au Kenya; la fourniture gratuite de condoms aux prostitu~es a fait baisser les taux d' infection); et () il faut mettre en place des campagnes d'information et d'etudcation visant les populations d'Age scolaire, les personnes sexuellement actives et les prostitu~es. - 147 - Encadr~ 3.2 Acceptation du principe d'un paiement pour l'am~lioration de l'alimentation en eau Dans les zones urbaines, les m~nages a revenu moyen et sup~rieur ont en general l'eau courante, qui beneficie de subventions. Les menages qui ne sont pas raccordes aux services municipaux des eaux, et notamment les m~nages pauvres, ache tent souvent I' eau, en la payant fort cher, a des vendeurs prives - et consacrent parfois plus de 5 % de leurs revenus aces achats. La vente privee de l'eau est un systeme a la fois peu efficace et coOteux. A Onitsha, au Nigeria, qui est un important marche d' Afrique occidentale comptant environ 700.000 habitants, seuls 8.000 m~nages (soit environ 50.000 personnes) ~taient raccord~s en 1987 au reseau public d'alimentation en eau. La plus grande partie de la population obtenait l'eau d'un systeme complique et bien organis~ du secteur priv~. Environ 275 camions-citernes ache tent de l'eau a une vingtaine de puits priv~s, pour la vendre a des m~nages et a des entreprises munies de r~servoirs, dont beaucoup revendent ensuite l'eau par seau aux particuliers. Ce systeme est fiable et fournit une eau de qualite relativement bonne, mais qui coOte cher. Le transport de l'eau par camion-citerne et a pied n'est pas efficace, et les proprietaires des camions ont pu etablir les prix a leur guise. Les menages payaient en moyenne un total de 120.000 naira par jour (28.000 dollars en 1987), soit environ 24 fois plus que les sommes encaissees par la soci~te des eaux, qui ne fournissait que 1,5 million de gallons par jour - soit la moitie du volume transitant par Ie systeme de ventes privees. M~me durant la saison des pluies, les menages payaient au total environ 51.000 naira par jour (12.000 dollars) aux vendeurs, soit plus du decuple de ce qu'encaissait la societ~ des eaux. En d~finitive. les m~nages d'Onitsha payaient aux vendeurs une somme qui repr~sentait a peu pres Ie double des frais annuels d'exploitation et d'entretien d'un nouveau systeme d'eau courante, et 70 % de l'ensemble des coOts annuels d'un nouveau systeme alimentant la ville d'Onitsha. Les menages pauvres paient l'eau plus cher que les menages a revenus moyens et elev~s. A Onitsha, les menages a faible revenu (moins de 100 naira, soit 23 dollars par personne et par mois) consacrent a I ' eau jusqu'a 18 % de leurs revenus, durant la saison seche, contre 2 ou 3 % dans Ie cas des m~nages nantis. A Addis Ab~ba, les pauvres des villes consacrent une forte proportion de leurs revenus a l'achat d'eau. Ce que les consommateurs paient effectivement n'est pas la m@me chose que ce qu'ils sont pr~ts a payer. Une etude de l'acceptation du principe d' un paiement par Ie s menage s du district de Newala, dans Ie sud de la Tanzanie, a estime que la majorite etaient pr@ts a payer plus de 8 % de leurs revenus pour avoir acces a des bornes-fontaines dans leurs villages. Outre les revenus, un grand nombre de facteurs determinent ce qu 'un menage est pr@t a payer pour l'amelioration de l'alimentation en eau. Un important determinant est Ie temps consacre a aller chercher l'eau aux points d'approvisionnement existants. En moyenne, les femmes du district de Newala etaient pr~tes a payer 20 % de plus que les hommes pour l'amelioration des services d'eau. Les femmes marchent frequemment 8 heures par jour pour aller chercher de l'eau a des sources traditionnelles, et un seau d'eau achete aux vendeurs coOte souvent 50-100 % du salaire d'une journee de travail agricole. - 148 - Vu Ie coOt de renoncement du travail consacr~ A la recherche de l'eau. 11 n'est pas surprenant que, malgr~ leurs maigres ressources, les pauvres soient pr~ts A consacrer une proportion importante de leurs revenus A l'eau. L'acceptation du principe d'un paiement d~pend aussi de l'id~e qU'on se fait du droit de recevoir l'eau gratuitement des pouvoirs publics. Ceux qui ne croyaient plus que l'Etat avait la responsabilit~ de fournir de l'eau ~taient pr~ts A payer 14 % de plus que ceux qui persistaient A croire Ie contraire. On voit donc que les gouvernements doivent non seulement mettre en place de solides pratiques de recouvrement des coOts, mais aussi doivent faire un effort sp~cial pour faire abandonner par la population l'id~e que la gratuit~ de l'eau est un droit fondamental. - 149 - Encadr~ 3.3 Planning familial: Botswana Zimbabwe Le Zimbabwe et Ie Botswana sont a l'avant garde du planning familial en Afrique subsaharienne. Leurs programme~ sont accessib1es a 1a p1upart des habitants. La contraception moderne est bien connue et ses niveaux d'emp1oi - en 1988, 36 % au Zimbabwe et 32 % au Botswana - sont 1es mei11eurs de l'Afrique. Et tous deux semb1ent obtenir d~sormais un recu1 sensible des niveaux de f~condit~. Or, ces deux pays ont suivi des m~thodes diff~rentes, ce qui montre bien qu'il n'y a pas, dans ce domaine, de modele de r~ussite, et que toutes les strat~gies doivent prendre pour point de d~part la situation particu1iere de chaque pays. Gependant, on trouve dans 1es deux pays une combinaison favorable de facteurs g~n~raux, dont une croissance ~conomique et des revenus par personne de bons a exce1lents, d'exce11ents systemes d'infrastructure et d'administration, une population dont 1es niveaux d'~ducation et de modernisation sont ~lev~s, 1es niveaux de morta1it~ 1es plus faibles de l' Afrique subsaharienne et un attachement vigoureux du gouvernement au planning familial (qui, sur Ie plan officie1, est seulement qualifi~ d'intervention de sant~). Le Zimbabwe a un remarquable programme de planning familial. Se fondant sur 1a r~ussite d'une organisation non gouvernementale de planning familial, Ie gouvernement d~cida, apres l'accession du pays a l'ind~pendance, de travailler avec e11e et en fit un organisme parapub1ic, appel~ Gonseil national du Planning familial du Zimbabwe (ZNFPG), a qui il confia une grande partie des responsabi1it~s de prestation et de promotion du planning familial. Le Gouvernement finance actuellement environ 70 % du budget du ZNFPG, qui b~n~ficie ~galement d'un important soutien de plusieurs bailleurs de fonds, surtout l'USAID et, dans une moindre mesure, Ie FNUAP. Le ZNFPG a un r~seau de dispensaires de planning familial et surtout un programme d 'antennes de distribution a base communautaire, qui emploie environ 600 ~ducateurs distributeurs proches des communaut~s et fournit la moiti~ environ des services de planning familial. Les agents communautaires, qui s'occupent uniquement du planning familial, sont bien r~mun~r~s (plus de 100 dollars par mois). Le ZNFPG a ~galement mis sur pied une exce1lente strategie de lEG (Information, ~ducation et communication), ainsi qu 'une cellule de suivi, d'evaluation et de recherche. R~cemment, et avec l'aide d'un projet de sante b~n~ficiant de l'aide de la Banque mondiale, 1e Gouvernement a d~cid~ d'offrir des services de planning familial par son r~seau d'~tablissements de sant~, qui devraient en devenir 1es plus importants dispensateurs. II existe une coordination et une coop~ration exce1lentes entre Ie ZNFPG et les agents de sant~. N~anmoins, c'est Ie systeme d'antennes communautaires qui est rest~ la cheville ouvriere du programme de planning familial du Zimbabwe dans les zones rurales. Le programme du Botswana, qui est discret, differe a presque tous les ~gards de ce1ui du Zimbabwe. Le pays n'a jamais eu d'association ind~pendante de planning familial, dont le Gouvernement ~tait, et reste, pratiquement le seu1 fournisseur : il a distribu~ en 1988 environ 95 % des contraceptifs. Les services de planning familial prennent les dispensaires pour base et sont fournis exc1usivement dans le cadre d'un programme int~gr~ - 150 - de materno-infantile planning familial qui est r~alis~ dans tous les sant~ ~tablissements de sant~. C'est Ie personnel infirmier des dispensaires qui fait la plus grande partie du travail de planning familial. II existe aussi un r~seau rudimentaire d'antennes, constitu~ par des agents choisis par les collectivit~s, appel~s ~ducateurs de bien-~tre familial, qui sont cens~s avoir quelques activit~s de pr~vention dans leur village, s' occuper de promouvoir Ie planning familial, aiguiller les patients vers d'autres ~tablissements et assurer l'approvisionnement. Dans la pratique, la plupart de ces agents travaillent dans les dispensaire de sant~ materno-infantile, en qualit~ d'aide-infirmi~res. Le Botswana a un bon r~seau de services de sant~; ce r~seau est dense - 80 % de la population se trouve 1 15 km au maximum d'un ~tablissement de sant~ - si bien que, pour la vaste majorit~ de la population, l'acc~s aux services de planning familial ne pose aucun obstacle. Une difficult~ plus grave provient de la couverture insuffisante et de la qualit~ des services de lEC, aussi bien dans Ie domaine de la sante que dans celui du planning familial; il faut y ajouter Ie manque de services offerts aux hommes et aux adolescents, qui no rmalement n'ont pas recours aux services de sant~ materno-infantiles. N~anmoins, Ie programme a r~ussi 1 faire bien connaltre et 1 faire accepter les avantages du planning familial. - 151 - Encadre 3.4 Interventions de nutrition efficaces par rapport au coQt Production d'un aliment de sevrage bon marche au Za1re L'Agence des Etats-Unis pour le developpement international (AID) s'est servie au Za1re de dons alimentaires pour aider une entreprise privee, la Victoria Assorted Products (VAP) , A reduire 1e coQt de fabrication du CEREVAP, melange a1imentaire nutritif destine aux enfants au sevrage et aux femmes qui courent un risque de malnutrition. L'AID a aide 1a VAP A acheter une extrudeuse qui a servi A e1aborer un aliment de sevrage A partir de produits locaux. En echange de ce materiel, 1a VAP a accepte de vendre cet aliment A prix reduit au public et aux programmes d'a1imentation realises par des ONG. Les dispensaires publics de SMI vendaient un aliment de sevrage analogue, compose de mats et de soja (le ma1s fourni au titre de l'aide a1imentaire et 1e soja de production locale) A un prix reduit qui variait en fonction des revenus des menages. Le CEREVAP a ete 1e seu1 aliment de sevrage manufacture qui soit reste bon marche durant 1a crise des devises, parce qu'i1 uti1isait uniquement des produits locaux. Les ventes commercia1es de CEREVAP ont augmente, en partie grAce A l'effet exerce sur 1e deve10ppement du marche par 1es distributions de l'Etat. En reduisant 1es risques que 1es programmes de nutrition po sent pour 1es investisseurs prives, cette coordination entre une entreprise locale. un programme d' Etat et l' aide a1imentaire internationa1e a permis au ZaIre d'avoir un aliment de sevrage bon marche qui, dans les vil1es, aide les m~res pauvres A assurer 1es besoins nutritionne1s de leur fami11e faci1ement et A bas prix. I· - 152 - Encadr~ 3. 5 Int~gration des services de sant~ et de nutrition pour les enfants de moins de trois ans En Inde, Ie projet de Tamil Nadu, entrepris en 1980, visait les enfants Ag~s de 6 a 36 mois, ainsi que les femmes enceintes et allaitantes. Les ~l~ments principaux du projet ~taient un systi!!me de surveillance de la croissance, permettant aux mi!!res et aux agents de sant~ d' identifier les enfants pr~sentant des carences nutritionnelles; une alimentation suppl~mentaire a court terme pour aider les enfants gravement malnutris a atteindre un r~gime acceptable de gains de poids; des suppl~ments alimentaires aux mi!!res a risques (mi!!res ayant un enfant malnutri ou qui avaient perdu un enfant); et un vaste programme de communication comportant une instruction individuelle et Ie recours aux m~dias. En quatre ans, on a cr~~ 9.000 centres communautaires de nutrition, confi~s chacun a un agent de nutrition de sexe f~minin qui, recrut~e sur place, avait huit ans de scolarit~ et ~tait consid~r~e comme une mi!!re modi!!le; ces agents ~taient appuy~s par les antennes de sant~ et les services d'aiguillage du D~partement de la sant~. Les centres pi!!sent les enfants tous les mois et fournissent des aliments pour 90 jours a ceux qui ne grandissent pas normalement. Les r~sul tats pr~liminaires mont rent que, apri!!s sept ans de fonctionnement, Ie programme a r~duit d'environ 50 % la malnutrition au Tamil Nadu, moyennant 8,1 dollars par an et par b~n~ficiaire - et cela. so it dit entre parenthi!!ses. durant une p~riode de d~clin ~conomique. On attribue la r~ussite du programme au systi!!me de "formation et visites" en matii!!re de nutrition, qui donne aux agents une solide formation et un bon encadrement. La surveillance de la croissance a permis de d~pister correctement les enfants qui couraient les plus grands risques, et s'est r~v~l~e efficace pour apprendre aux mi!!res a conserver leurs enfants dans une bonne situation nutritionnelle grAce a des modifications permanentes du comportement. Enfin, une Łois identifi~s les enfants a risques, Ie programme a pu leur fournir imm~diatement des suppl~ments alimentalres "a titre de remi!!de contre la malnutrition" . Le coo.t-efficaci t~ remarquable du proj et s' expUque par Ie ciblage pr~cis des b~n~ficiaires; par un systi!!me qui r~duisait Ie besoin de supplements alimentaires en d~celant rapidement les probli!!mes; et par Ie fait que ll~s suppl~ments alimentaires n' ~taient qu' un remi!!de th~rapeutique a court terme, jusqu'a ce que la mi!!re puisse poursuivree elle-m~me la tAche. - 153 - Encadr~ 3.6 Interventions de nutrition efficaces par rapport aux conts Fourniture de suppl~ments de vitamine A au Burkina Faso En 1987, Ie Gouvernement du Burkina Faso, 1 'UNICEF et Helen Keller International ont entrepris un projet pilote visant ~ r~duire radicalement l'incidence de la carence en vitamine A, qui peut conduire ~ la c~cit~. lIs ont Mis sur pied un plan d' action de deux ans ~ ex~cuter dans quatre provinces du pays. Ce plan comporte : o la distribution, trois fois par an. de m~gadoses de vitamine A ~ 1 million d'enfants de moins de dix ans et ~ environ 267.000 femmes apres 1 · accouchement. Les comprim~s, fournis par 1 'UNICEF, sont distribu~s par des agents de sant~ villageois et par Ie personnel des dispensaires; o la formation d'agents de sant~ qui ~margent au budget de l'Etat, pour leur apprendre ~ d~pister et ~ traiter la carence en vitamine A (xerophthalmie). L'UNICEF et Helen Keller International forment des formateurs burkinabe qui forment ~ leur tour des agents de sant~ provinciaux et locaux, ainsi que des enseignants; o l'encouragement de la production d'aliments riches en vitamines A dans les jardins communautaires et scolaires, en m~me temps qU'une ~ducation en matiere de nutrition et une vaste campagne d'~ducation du public, afin d'encourager la consommation de ces aliments. Des Ie d~but, Ie Gouvernement s'est vigoureusement attel~ ~ la tAche. Le projet devait ~tre ~tendu l'ann~e suivante ~ quatre autres provinces, pour finir par @tre r~alis~ dans l'ensemble du pays. Des efforts analogues, visant ~ corriger les carences en vitamine A, sont en cours de r~alisation au Soudan, en Mauritanie, au Niger et dans la zone d'urgence de l'Ethiopie. - 154 - Encadr~ 3.7 Programme de s~curit~ alimentaire du Botswana GrAce A un vaste programme de s~curit~ alimentaire, Ie Bostwana est, parmi les autres pays d'Afrique australe en butte A 15 s~cheresse, Ie pays ou la malnutrition est la moins r~pandue. D~s Ie d~but, peu apr~s 1980, Ie programme a ~limin~ la malnutrition grave parmi les enfants de moins de cinq ans et a maintenu A un niveau constant la sous-nutrition mod~r~e, et cela malgr~ une s~rie d' ann~es de s~cheresse et de chUtes brutales de la production locale de c~r~ales. La conception, l'organisation et la gestion du programme reposaient sur Ie principe qu'il fallait donner plus de moyens et plus de souplesse aux organisations qui s'int~ressaient aux divers aspects de la s~curit~ alimentaire. Le programme comporte : o un volet d' alimentation directe par I' interm~diaire des ~coles primaires et des centres de sant~; o l'accroissement de l'alimentation en eau; o l'organisation de travaux publics d'urgence destin~s A fournir A court terme un suppl~ment de revenus; o des programmes de soutien et de r~novation de l'agriculture pour acc~l~rer la reprise apr~s la s~cheresse. Le programme fait appel A plusieurs minist~res. Le Minist~re des administrations locales et des terres s'occupe des importations au titre de l'aide alimentaire. des achats locaux, et de la distribution aux ~coles et aux ~tablissements de sant~. Le Minist~re de la sant~ suit l'~volution de la situation nutritionnelle et organise l'alimentation dans les dispensaires tandis que Ie Minst~re de l'~ducation surveille l'alimentation des enfants dans les ~coles primaires. Quand il n'y a pas de s~cheresse, un programme limit~ d'alimentation s'occupe des jeunes enfants scolaris~s, des enfants qui ne vont pas encore A l'~cole, ainsi que des femmes enceintes et allaitantes. Durant une s~cheresse. on intensifie Ie programme de mani~re A alimenter chaqu'e jour tous les enfants jusqu' A l ' Age de dix ans, ainsi que les groupes vulnerables. Les aliments sont surtout fournis par l'aide alimentaire mais, quand il n'est pas possible de les obtenir avec suffisamment de rapidit~, Ie gouvernement puise dans ses r~serves mon~taires pour acheter des c~r~ales panifiables sur Ie march~ international; ces sommes lui sont remboursees plus tard par les organismes donateurs. Le Minist~re des ressources minerales et des affaires hydrauliques s'occupe de l'alimentation des menages en eau, en consultation avec les administrations locales, et fournit des suppl~ments d'eau aux menages, en fonction des besoins, en procedant A des forages temporaires ou par d'autres moyens. Ces mesures portent sur tout Ie pays, si bien qu'aucune communaute est privee d'un acc~s raisonnable A l'eau Afin de fournir A court terme des supplements de revenus, des projets A forte intensite de main-d'oeuvre sont entrepris dans toutes les zones rurales ou se trouvent des etablissements humains. Chaque annee, 40.000 A 70.000 habitants obtiennent des revenus en esp~ces en travaillant A la construction d'amenagements d'infrastructure locaux, ou A d'autres activit~s que proposent les comites de village. Le Minist~re de I' agriculture administre Ie programme de secours et de relance agricoles par l'intermediaire de ses services de vulgarisation et de ses services vet~rinaires. Tous les agriculteurs re90ivent un lot de semences de base et. - 155 - s'ils n'en ont pas, ou pas assez, des animaux de trait. Pour prot~ger la capacit~ de production des agriculteurs et des ~leveurs, on achete le vieux b~tail A un prix plancher, ce qui permet d'att~nuer les pressions qui s'exercent sur les p!turages tout en fournissant des revenus aux m~nages. Ces mesures aident A r~duire le nombre de camps d'urgence qu'il faut am~nager et A att~nuer les besoins de r~installation; il y a cependant des ann~es ou les mesures qui encouragent une r~duction des pressions sur les p!turages n'ont pas ~t~ suffisantes. Les composantes du programme sont coordonn~es par un Comit~ interminist~riel de la s~cheresse, dont le secr~tariat est assur~ par le Ministere des finances et de la planification du d~veloppement. Ce comit~ joue ~galement un rOle important sur le plan de la surveillance de l'hygrom~trie et de la situation des cultures; i l fournit aux ministeres interess~s des informations qui leur font rapidement connaitre l'~volution de la situation. L'intervention de plusieurs ministeres a permis au Botswana de faire face A la s~cheresse, quel que soit le niveau de l'aide re9ue. Bien que le recrutement d'un personnel entraine certains frais, il a permis de mieux graduer les mesures prises. Le poids de ces interventions sur le budget a varie selon la gravit~ de la s~cheresse. En 1982-83, le cont s'est elev~ au total, non compris l'aide alimentaire, A 3,4 % de l'ensemble des d~penses de d~veloppement; en 1984-85, il a atteint 12 %. La part des bail leurs de fonds est tomb~e de 33 % en 1982-83 A 9 % en 1984-85. L'aide alimentaire, qui a ~t~ efficacement coordonn~e par les donateurs, a repr~sent~ environ 20 % de l'ensemble de la consommation de c~r~ales, soit pres de 39 kg par personne en 1984, c'est-A-dire un chiffre sup~rieur A la moyenne de toute 1 'Afrique subsaharienne et ~galement sup~rieur A celui de nombreux autres pays (beaucoup plus pauvres) frapp~s par la s~cheresse. Dans une certaine mesure, le Botswana pr~sente un cas sp~cial. La plus grande partie de sa population se trouve dans la r~gion orientale du pays. La r~gularit~ de la s~cheresse pr~dispose le gouvernement a prendre des mesures de stabilisation. Le revenu national relativement ~lev~ du pays, sa bonne situation sur le plan des devises et les r~serves qu'il a pu accumuler grace a ses min~raux met tent le programme sur une base financiere solide et lui donne en particulier une certaine latitude pour importer des produits alimentaires. Quoi qu'il en soit, l'exemple du Botswana prouve qu'on peut organiser des systemes de soutien institutionalis~s qui permettent d'obtenir la s~curit~ alimentaire. - 156 - Encadr~ 3.8 Ethiopie : Perfectionnement des enseignants en cours d'exercice En 1983, l'Ethiopie a mis en place un Plan de d~veloppement d~cennal qui donnait une priorit~ ~lev~e a I ' ~ducation. A long terme, i1 s' agissait d'instituer 1 'enseignement primaire obligatoire, de r~partir les possibi1it~s de scolarisation de fa~on plus ~quitab1e entre zones rurales et urbaines, et de privi1~gier la formation pratique. Le Gouvernement a construit des ~co1es, r~vis~ 1es plans d'~tude, distribu~ de nouveaux manue1s et mis en place des systemes de formation. Les r~formes ont ~ga1ement ouvert des centres p~dagogiques provinciaux et institu~ un r~gime de formation r~giona1e des enseignants. Le Gouvernement s'est efforc~ de d~ve1opper 1es moyens d'administration et de planification dont disposaient 1es bureaux de l'~ducation des r~gions et des "awraja" (sous-r~gions administratives); i1 a construit sept instituts de pr~paration p~dagogique et une centaine de centres p~dagogiques d'awraja. Ces centres assurent l'encadrement sco1aire, se chargent du perfectionnement des enseignants en exercice et fournissent des services de soutien. En 1988, 1es instituts de pr~paration p~dagogique ont dip~m~ 4.200 enseignants, contre 1.200 dix ans auparavant. A cause de 1a proximit~ des ~co1es, 1es enseignants peuvent suivre pendant l'~t~ de brefs stages qui leur permettent d' accroitre leurs comp~tences sans pour autant avoir a encourir de gros frais de d~placement. Ce modele offre des 1e~ons aux autres pays car i1 encourage 1a formation du personnel local, ~vite des programmes de formation coQteux parce qu'ils sont trop centralis~s et sensibilise l'enseignant a des situations locales pr~cises. - 157 - Encadr~ 3.9 Pr~paration A l'emploi Dans la plupart des pays de l' Afrique subsaharienne, l' enseignement classique et 1 'enseignement professionnel sont orient~s vers Ie secteur moderne. lIs content cher et sont donc inaccessibles pour un plus grand nombre de gens, tout en imposant de lourdes charges au budget de l'Etat. La formation qui est offerte n'est pas suffisante pour pr~parer les ~leves au travail qui les attend A la sortie de l'~cole. Dans ces conditions, des systemes de formation qui conjuguent l'exp~rience pratique et un enseignement th~orique offrent de grandes possibilit~s de fournir Ie "chalnon manquant" qui est essentiel pour l'Afrique subsaharienne. II en est particulierement ainsi dans un contexte ou les press ions d~mographiques ne vont pas manquer de continuer A s'exercer sans relAche, approfondissant ainsi Ie foss~ entre les emplois et les chOmeurs. La d~gradation de la situation ~conomique et les faibles niveaux de productivit~ et de comp~tence de la main-d'oeuvre, conjugu~s A la contraction de 1 'emploi dans Ie secteur public, viennent compliquer encore davant age Ie probleme de l'absorption de la main-d'oeuvre. On a besoin de m~thodes novatrices pour apprendre A la population toute une s~rie de m~tiers dans des conditions de cont-efficacit~, am~liorer la qualit~ de la formation et encourager Ie travail ind~pendant une fois la formation termin~e . Pour modifier Ie systeme actuel de formation scolaire ant~rieure A l' emploi e't Ie remplacer par une formation sur Ie tas et en cours d' exercice, compl~t~e par une formation th~orique, il faudra s'assurer de la participation du secteur priv~ et des organisations locales (par exemple, corps de m~tiers et organisations ouvrieres) tout en maintenant Ie principe d 'une gestion g~n~rale de la formation par Ie secteur public. Une fois institu~ ce principe d'un apprentissage compl~t~ par un enseignement th~orique, on pourra : o enseigner, A tous les niveaux, apres la sortie de l'~cole, toute une s~rie de techniques de production et de services, dans des domaines administratifs et techniques, ainsi que des m~tiers traditionnels et modernes; o d~finir au sein du systeme des normes permettant de rendre comparables les comp~tences acquises, ce qui permettrait aussi de moduler la formation en fonction du profil de comp~tences recherch~s; o r~duire les conts unitaires de la formation, qui doivent ~tre assum~s en partie par ceux A qui elle est impartie. La Plan national d'apprentissage ouvert du Nig~ria donne un exemple d'un systeme de formation qui allie apprentissage traditionnel sur Ie tas et enseignement th~orique scolaire. Lanc~ par la Direction de I' emploi du Nig~ria. ce Plan a r~ussi, des sa premiere ann~e (1987 88), A persuader des entreprises publiques et parapubliques, ainsi que des employeurs du secteur priv~, dont des ateliers du secteur marginal, de recevoir des apprentis. Le Plan fournit un soutien financier et logistique de 50 naira par mois et par apprenti. et donne au formateur 150 naira pal' an et par apprenti. Les d~tails de la formation re9ue et des r~sultats obtenus sont consign~s et v~rifi~s par des moniteurs au moins une fois toutes les deux semaines. ce qui permet d'assurer la qualit~. - 158 - L'exemple du Nig~ria prouve qu'il est possible d'avoir une formation orient~e vers la demande dont les coOts sont partag~s - l'employeur donne la formation et l'apprenti travaille pour un salaire moindre. Une meilleure utilisation des ~tablissements scolaires de type classique pourrait faire baisser davantage les coOts unitaires, en permettant 1 de plus nombreux apprentis de compl~ter leur formation pratique et en portant rem~de 1 la p~nurie actuelle de formateurs qualifi~s. Les ~tablissements de formation et les formateurs profitent des contacts avec les entreprises et des informations que celles-ci leurs communiquent. II existe d'autres initiatives analogues. Le Togo a ouvert des centres r~gionaux de formation professionnelle pour renforcer I' apprentissage en donnant un compl~ment de formation th~orique et en apportant des mat~riaux d'enseignement aux entreprises, sous la direction d'une inspection consultative de l'apprentissage. Des nouvelles modalit~s de formation sont ~galement mises 1 l'essai dans des programmes r~alis~s sous l'~gide de l'aide allemande. Au Soudan et au Botswana, les apprentissages de trois ans se subdivisent entre formation pratique sur Ie tas et cours de th~orie dans des ~coles professionnelles. Au Zimbabwe. les ~l~ves ..>nt un an et demi de formation pr~professionnelle, suivies d'un an et demi de formation pratique sur Ie tas. Le Malawi a ~labor~ un syst~me de formation qui conjugue une formation donn~e dans des ~tablissements et des apprentissages de deux ou trois ans; ce syst~me d~bouche sur des certificats d' aptitude d' ouvrier qualifi~ ou de technicien. Une partie de la formation est financ~e par un impOt de capitation per~u des entreprises. Des m~thodes de ce genre, qui comportent un ~l~ment de souplesse. peuvent renforcer les syst~mes de formation et am~liorer, 1 la sortie de 1'~cole, la transition vers Ie monde du travail. - 159 - Encadre 3.10 Malawi: une formule reussie de participation de 1a communaute A l'a1imentation en eau Le programme rural de conduites d'eau, au Malawi, est souvent considere comme l'un des programmes d'eau 1es micux reussis et 1es mieux soutenab1es de l' Afrique; i1 peut avoir des retentissements dans d' autres pays de l'Afrique subsaharienne. Le programme: o prend pour base un profond engagement de la communaute, tandis que 1e gouvernement n'a que des responsab1ites 1imitees, mais bien definies; o a commence modestement, avec une techno1ogie qui pouvait ~tre faci1ement comprise par 1es habitants de 1a localite, qui pouvaient ensuite se charger de l'entretien; o a ete elargi progressivement, apr~s en avoir fait l'experience et tire des lec;ons concernant la conception du programme et l'emploi de technologies appropriees. En commenc;ant dans une communaute de 2.000 habitants en 1968, 1e Departement du deve10ppement communautaire s'est servi d'un projet pilote pour acquerir de l' experience aUn de mobiliser 1a participation de la communaute, et de perfectionner au maximum les techniques de construction et d'exploitation. Le projet se bornait au debut aux regions OU l'on pouvait se servir de conduites uti1isant 1a gravite et OU il eta it facile d' entretenir les ouvrages. II est desormais etendu A des regions OU les conditions sont differentes et OU l'on trouve de l'eau en sous-so1. Le programme a bien defini les responsabilites de 1a communaute et du gouvernement. Les communautes, qui organisent et g~rent 1es ouvrages d'adduction d'eau, sont chargees de choisir 1es sites, d'e1ire 1es comites de l'eau, d'organiser 1es travaux de terrassement, d'elire les equipes de reparation, de reunir des fonds pour l'achat de pi~ces de rechange et de veiller a l'observation des r~glements concernant l'uti1isation de l'eau. Le gouvernement fournit 1es fonds de demarrage, definit des normes, se charge de responsabilites techniques, par exemp1e, des enquetes hydrologiques, du dossier technique, de la fourniture de materiaux et de 1a surveillance du fonctionnement du syst~me. C'est aussi Ie gouvernement qui forme les membres de la communaute, ce qui evite de faire participer un grand nombre d'agents de vulgarisation et d'ingenieurs relevant de l'Etat, tout en assurant un bon entretien. Un inconvenient est qu'on ne tient pas suffisamment compte du r61e des femmes dans l'alimentation en eau. Ce sont en effet les femmes qui fournissent plus de 1a moitie de l'effort collectif du programme; plus des deux-tiers des membres du comite charge de l'entretien des bornes-fontaines sont des femmes. Or, 10 % seulement des membres des comit~s de planification - qui prennent 1es decisions concernant 1es responsabi1ites et la conception - et des equipes de reparation sont des femmes. Le gouvernemFnt a aide les communautes A fournir A pr~s de 1 million d'habitants une alimentation en eau fiable et accessible. La reussite du progranune a encourage les agents de sante publique A entreprendre des programmes complementaires, qui veillent A ce que l'amelioration de l'alimentation en eau apporte tous les effets vou1us sur 1a sante. - 160 - CHAPITRE 4 L'agriculture, source essentielle de croissance et de securite alimentaire Le defi de l'agriculture 4.1 L'agriculture en Afrique doit accomplir au cours des annees 1990 et au-delA une tache enorme. Elle devra en effet subvenir aux besoins d'une population en accroissement rapide. Il lui faudra realiser une croissance de la production vivri~re suffisante non seulement pour maintenir la production par habitant, mais aussi pour diminuer les carences caloriques et reduire les importations de produits alimentaires. Ce faisant, elle devra devenir source majeure d'emplois pour la main-d'oeuvre croissante du continent et devenir concurrentielle sur les marches mondiaux de fa90n A produire les devises dont l'Afrique a besoin pour alimenter sa croissance economique. Et tout cela devra ~tre fait tout en inversant la degradation des ressources naturelles qui menace la production A long terme. Cette tache enorme exige que l'agriculture soit transformee. 4.2 Transformer l'agriculture et developper sa capacite de production: telle est la condition sine qua non d'une croissance de l'ensemble de l'economie. Pour que les objectifs de la securite alimentaire - exposes au chapitre 3 - puissent ~tre atteints, il faudra que la production alimentaire augmente d'environ 4 % par an. Au-dela de cet objectif, si l'on veut faire augmenter les revenus et repondre aux besoins d'importations de l'Afrique, la production de cultures d'exportation doit se developper A raison de 4 % par an au moins. Ainsi, l'Afrique doit fixer A 4 % par an au minimum son objectif de croissance agricole a long terme. 4.3 Ce ne sera pas une tache aisee. Au cours des 30 derni~res annees, la production agricole en Afrique subsaharienne n'a augmente que de 2 % par an. Les exportations agricoles ont diminue et les importations alimentaires se sont accrues d'environ 7 % par an. Pourtant. malgre cette croissance rap ide des importations de produits alimentaires, il y avait en moyenne au debut des annees 1980 une centaine de millions de personnes qui etaient sous-alimentees - et beaucoup plus les annees de mauvaises recoltes. Les penuries graves sont aujourd'hui courantes; la secheresse et la famine ont ete frequentes au cours des annees 1980. Ces penuries alimentaires temporaires ont des effets plus graves encore dans le contexte d'une insecurite alimentaire chronique. 4.4 Le potentiel agricole des pays africains est extr~mement variable. L'Afrique centrale, l'Afrique occidentale humide et l'Afrique australe ont une importante superficie cultivable et une faible densite de population. A l'inverse, la majeure partie du Sahel, certaines regions de l'Afrique de l'Est montagneuse, ainsi qu'une bande aride s'etendant depuis la cOte de 1 'Angola, a travers le Botswana et le Lesotho, jusqu'au sud du Mozambique ont une population trop importante pour subvenir A ses besoins - d'ob 1a necessite d'importer des produits alimentaires. Pour faire face 1 ces difficu1tes. i1 faut augmenter 1a productivite des terres arables. Lorsqu'i1 y a encore beaucoup de terres et peu de main-d'oeuvre, c'est 1a productivite du travail qui doit Atre accrue. Toutefois, c'est Ie manque de terres qui est le cas Ie plus frequent - et qui Ie devient plus encore - 161 - du fait de l'accroissement d~mographique. Beaucoup de pays ou de r~gions d'Afrique ont une vaste superficie mais beaucoup moins de terres arables. D'apr~s une ~tude r~cente de la FAO, 30 % seulement des terres en Afrique sont en mesure de soutenir la production de cultures pluviales. Un quart environ de cette superficie est utilis~. Toutefois, la majeure partie des terres arables non utilis~es est recouverte de forat vierge qui doit atre pr~serv~e pour des raisons ~cologiques. 4.5 Selon la FAO, la superficie cultiv~e n'a augment~ que de 0,7 % par an au cours des 20 derni~res ann~es. A supposer que ce taux ne puisse pas atre plus ~lev~ ~ l'avenir, il faudra alors que 1a production augmente de plus de 3 % par an - soit trois fois plus vite que jusqu'~ maintenant. Ce progr~s de 1a productivit~ ne pourra venir que de changements techno10giques. 11 peut s'agir d'une utilisation plus intensive de facteurs de production chimiques et organiques; de l'int~gration de l'~levage dans les syst~mes de culture de fa~on ~ uti1iser l'~nergie anima1e et le fumier; de l'utilisation de nouvelles cultures d'un meilleur rapport; de mei11eures techniques d'irrigation, d'instruments manuels am~lior~s et de mei1leures techniques de stockage des r~co1tes; et de l'am~lioration des m~thodes d'~levage et de culture. 11 faudra qu'i1 existe un ensemble de po1itiques con~ues de fa~on que les cultivateurs trouvent profitable d'op~rer ces changements. Si l'infrastructure rurale, en particu1ier les routes, ~tait am~lior~e, il serait plus facile aux cu1tivateurs de se procurer les facteurs de production et de vendre leurs produits; par ai11eurs, les fami1les rura1es exer~ant des activit~s r~mun~r~es auraient plug facilement acc~s aux biens de consommation. Une plus gr~nde s~curit~ de l'occupation des terres encouragerait l'investissement et les mesures de conservation. De meilleurs services financiers aideraient les cultivateurs A ~pargner ou A emprunter pour s'~quiper. S'i1 a atteint un plus haut niveau d'instruction et qu'il est en meilleure sant~, un cultivateur est plus susceptible de chercher A faire augmenter sa productivit~ et de conserver 1es ressources. Des ~tudes de pr~investissement plus approfondies aideraient les gouvernements A ~viter 1es investissements qui sont dangereux pour l'environnement - par exemple d'importants projets d'irrigation ou de peuplement qui supposent un d~boisement. Quant aux entreprises, une combinaison d'incitations et de sanctions est n~cessaire pour les persuader de ne pas vendre de produits chimiques dangereux pour l'environnement, de ne pas utiliser de techniques destructives d'exp10itation des forats et de ne pas d~verser des polluants dans les rivi~res et les nappes d'eau souterraines. 4.6 La migration des zones ~ forte densit~ de population vers les r~gions peu peup1~es doit atre encourag~e, mais e11e ne permettra pas A elle seule de r~soudre 1es prob1~mes des pays fortement peupl~s. Les r~gions peu peupl~es - par exemple 1a forat tropicale humide de l'Afrique centrale et 1es zones arides et semi-arides du Sahel et de la majeure partie de l'Afrique austra1e - n'ont pas la capacit~ de subvenir aux besoins d'une population beaucoup plus importante. C'est pour cette raison qU'i1 est si vital pour l'Afrique d'accroltre 1a productivit~ des terres. 4.7 Que peut-on donc esp~rer ~ long terme? Au cours des ann~es ~ venir, l'agricu1ture africaine peut atre transform~e. La main-d'oeuvre abondante du continent, sa proximit~ de l'Europe et les caract~ristiques de ses saiaons donnent ~ certaines parties de l'Afrique un avantage comparatif - 162 - dans la production d'un certain nombre de cultures. En 2020, les cultivateurs, ayant re~u une meilleure instruction, pourraient utiliser les terres, la main-d'oeuvre et les capitaux beaucoup plus efficacement. Un secteur priv~ vigoureux pourrait garantir des op~rations efficaces de transformation et de commercialisation des produits agricoles, et des investissements plus ~leves, allant de pair avec l'utilisation de technologies nouvelles, pourraient fa ire augmenter regulierement les rendements. De nouveaux march~s int~rieurs et exterieurs pourraient s'ouvrir pour les articles traditionnels ainsi que pour de nouveaux produits, permettant, entre autres, un commerce intra-africain de produits alimentaires. Tout cela suppose que la qualit~ des produits serait meilleure, que la commercialisation serait plus dynamique et que le gouverneruent interviendrait moins. Les cultivateurs participeraient davantage A l'orientution des politiques agricoles et du d~veloppement rural. Des revenus plus eleves et des services sociaux plus developp~s ainsi qu'une meilleure securit~ alimentaire rendraient les zones rurales attrayantes, encourage ant d'autant plus la constitution de communautes agricoles dynamiques. 4.8 Malgr~ la vari~te incroyable de zones ~cologiques, de micro-climats et de sols - exigeant dans chaque cas des cultures, des semences et des techniques agricoles diff~rentes - les principales strategies n~cessaires pour eperonner le developpement agricole sont remarquablement semblables dans l'ensemble de l'Afrique : Accroltre le r6le du secteur prive en matiere de fixation des prix et de vente des produits agricoles et des facteurs de production agricole, et d'amelioration des services d'intermediation financiere A l'intention des cultivateurs; Mettre au point et diffuser des techniques nouvelles pour accroltre la productivite; Ameliorer la securit~ de l'occupation des terres et augmenter la protection de l'environnement; Developper l'infrastructure rurale afin de renforcer les liens economiques entre villes et campagnes et d'ameliorer la commercialisation des produits; Encourager les particuliers et les associations des zones rurales - y compris les femmes - A participer davant age A la prise de decisions; Promouvoir la coop~ration regionale, surtout en matiere de commerce de produits alimentaires et de recherche commune. 4.9 Les deux premieres strategies - faire intervenir le secteur prive et utiliser de nouvelles techniques - sont les plus importantes. Or, trop peu de gouvernements africains et de donateurs les considerent comme telles. Les strat~gies agricoles appliquees sans succes au cours des ann~es 1960 et 1970 sont encore couramment utilisees aujourd'hui. II s'agit notamment : - 163 - De faire contr6ler par le gouvernement les prix, les subventions A l'achat de facteurs de production, les march~s et l'approvisionnement en facteurs de production; De financer les cultivateurs par des banques de cr~dit agricole para-~tatiques; De financer le d~veloppement rural au moyen de projets r~gionaux de d~veloppement g~r~s par le gouvernement; De vendre les cultures d'exportation par l'interm~diaire d'entreprises para-~tatiques ne s'occupant en g~n~ral que d'un seul produit; De concevoir l'irrigation dans Ie cadre de projets de grande ou moyenne envergure, g~r~s par Ie gouvernement. 4.10 Ces strat~gies sont trop tributaires d'administrations publiques n'ayant pas la comp~tence voulue. Les questions li~es au r~gime foncier, a l'environnement et au r61e des femmes, ainsi que la n~cessit~ de mettre en place les moyens n~cessaires, n'ont guere re~u d'attention. L'application des strat~gies est fortement tributaire de l'assistance technique. De plus, les cultivateurs n'ont pas la possibilit~ de participer a la prise de d~cisions. Or, les chances de progres sont bien meilleures si on laisse les cultivateurs diriger leurs propres affaires - vendre leurs produits librement, investir comme ils Ie souhaitent, cr~er leurs propres coop~ratives de cr~dit, d'approvisionnement et de vente, g~rer leurs propres systemes d'irrigation, ~tre propri~taires des terres qu'ils exploitent et assumer la responsabilit~ de la protection de l'environnement. C'est l'avenir de l'Afrique qui est en jeu : il faut faire appel aux meilleurs cerveaux, arr~ter les meilleures politiques et choisir les meilleures m~thodes; a tous les niveaux, le sentiment de l'urgence de la tAche doit animer les efforts. Mobiliser Ie secteur priv~ 4.11 Dans Ie secteur agricole. comme dans les autres secteurs, les gouvernements africains se sont pour la plupart m~fi~s des forces du march~. lIs pensaient que les march~s ne fonctionneraient pas parce qu'ils seraient contr6l~s par des n~gociants Apres au gain (souvent des ~trangers ou des membres de minorites ethniques). et que les marges ben~ficiaires seraient excessives. La plupart des gouvernements africains ont donc institu~ des contr61es sur la vente des principales cultures (c~r~ales dans la majeure partie de l'Afrique de l'Est, cultures d'exportation dans l'Afrique de l'Ouest). Souvent, le commerce priv~ ~tait interdit purement et simplement. La participation du Gouvernement aux activit~s de vente et de transformation de produits agricoles, voire la monopolisation de ces activit~s, ~tait chose courante. Les entreprises d'Etat qui s'occupaient de ces activit~s ~taient souvent coQteuses et inefficaces. La ou on a laiss~ Ie secteur priv~ fonctionner a peu pres librement - par exemple au Kenya pour les cultures arbustives, en Afrique de l'Ouest pour des cultures vivrieres (autres que Ie riz et le bl~), et pour les produits de l'~levage dans de nombreux pays - les activit~s de commercialisation sont rest~es relativement efficaces. En interdisant ainsi au secteur priv~ les - 164 - activit~s de commercialisation et de transformation, les gouvernements supprimaient du m~me coup le potentiel de developpement de l'esprit d'entreprise. De surcrolt, les entreprises du secteur public n'ont pas cherche a trouver de nouveaux march~s d'exportation, de nouvelles cultures ou de nouveaux produits, non plus que de nouvelles techniques. 4.12 Depuis longtemps, la plupart des gouvernements africains consid~rent que l'instabilit~ des prix d~courage l'investissement dans l'agriculture. En outre, ils pensent que, dans le domaine des produits alimentaires, l'instabilite des prix a la production se traduit par l'instabilite des prix a la consommation, ce qui risque de faire du tort aux consommateurs pauvres. De ce fait, de nombreux gouvernements ont essay~ de stabiliser les prix a 1a production. Par la suite, l'objectif a ~te non plus seulement de stabiliser les prix des cultivateurs, mais aussi de maintenir a un faible niveau les prix des produits alimentaires a la consommation. Toutefois, les prix etaient souvent fixes a un niveau si bas que les cultivateurs n'etaient gu~re encourages a passer par le syst~me officiel de commercialisation et que des marches parall~les, sur lesquels les prix n'etaient pas contr6les, se sont d~velopp~s par reaction. Les fonds de stabilisation des prix, etablis pour niveler les prix, ont rarement donne les resultats escomptes. En effet, lorsque les fonds sont excedentaires, on a tendance ales utiliser a d'autres fins; lorsqu'il se produit des deficits, il n'y a pas de fonds pour les combler. Une solution serait de placer les fonds de stabilisation sous le contr6le de conseils d'administration representant les producteurs et les consommateurs, de fa90n que les gouvernements ne puissent y avoir acc~s. Cette methode est a l'essai en ce moment en Republique centrafricaine. 4.13 Souvent les gouvernements ont maintenu les prix a la production a un niveau artificiellement bas (en termes reels) en laissant leurs taux de change se gonfler excessivement. Venant s'ajouter aux subventions aux prix destinees au ble et au riz importes, cette distorsion a accelere le processus de substitution des produits locaux par des importations. Le marche des produits traditionnels produits localement (par exemple le sorgho, le millet, les racines et les tubercules) s'est donc trouve reduit. Un autre resultat a ete qu'il n'y avait plus gu~re de raisons de transformer les aliments traditionnels de fa90n a chercher ales rendre plus attrayants pour les citadins et les consommateurs aises. Un taux de change gonfle a le m~me effet sur les cultures d'exportation que sur les produits de substitution des importations : reduire leur valeur en monnaie locale et d~courager la production. 4.14 Des prix variables, qui fluctuent en fonction de l'offre et de la demande sur le marche local et le march~ international, sont pour les cultivateurs les meilleures indications leur signalant quelle quantite ils doivent produire et a quel moment. Les prix locaux peuvent alors augmenter quand l'offre est limitee - ce qui aide a stabiliser le revenu des cultivateurs ainsi que l'offre elle-m~me. De plus, dans le cas d'une approche reposant sur Ie jeu des forces du marche, les gouvernements ne sont plus soumis aux pressions politiques les incitant a maintenir a un faible niveau les prix a la consommation (et, partant, les prix a la production). Quant aux cultures d'exportation, si les prix a la production refl~tent les conditions du marche mondial lorsque le cours mondial d'un de ces produits est faible, les cultivateurs seront incites a passer a - 165 - d'autres types de cultures d'un meilleur rapport. Lorsque les prix locaux de cultures d'exportation sont fix~s par les gouvernements, les cultivateurs ne peuvent r~agir rationnellement A l'~volution des conditions sur Ie march~ mondial. 4.15 Pour que les prix soient variables, il faut un syst~me de commercialisation dans lequel les n~gociants prives peuvent se faire concurrence. En effet, lorsque Ie commerce est monopolis~, les gouvernements peuvent se sentir obliges de prot~ger les cultivateurs en fixant des prix minimum. Par contre, les pays africains qui ont autoris~ un syst~me lib~ral de commerce int~rieur et d'exportation et qui ont relativement peu touch~ aux prix agricoles ont enregistr~ une croissance agricole plus ~lev~e que ceux qui ne l'ont pas fait - on peut citer l'exemple du Kenya en ce qui concerne Ie caf~, les cultures vivri~res autres que Ie ma~s, Ie bl~ et les fruits et l~gumes (voir encadr~ 4.1); celui de l'Afrique de l'Ouest et de l'Afrique centrale en ce qui concerne les cultures vivri~res autres que Ie riz et Ie bl~; et celui de la Guin~e, du Ghana et du Nigeria A la suite de la recente lib~ralisation des prix et de la suppression des restrictions au commerce (tous les produits agricoles). Toutefois, lorsque les taux de change sont gonfl~s et que l'achat de produits alimentaires continue d'etre Ie fait de monopoles, il peut etre justifi~ - faute de mieux - de prot~ger les cultivateurs en fixant des prix d'achat minimum. Une conclusion tr~s nette s'impose : sauf pour des raisons de securit~ alimentaire dans certaines circonstances extremes (examinees au chapitre 3), il vaut mieux ~viter l'intervention sur les prix. 4.16 Une controverse dure toujours : les incitations doivent-elles encourager l'autosuffisance alimentaire en favorisant les cultures vivri~res par rapport aux cultures d'exportation? La question n'est pas lAo Ce qu'il convient de corriger c'est la discrimination qui s'exerce contre l'agriculture en g~n~ral en ce qui concerne les subventions et non la pref~rence d'un type de cultures par rapport A un autre. Une fois cela fait, les incitations devraient etre les memes pour cultures vivri~res et cultures d'exportation et les cultivateurs choisiront en fonction de leur avantage comparatif. Les pays qui ont un avantage comparatif en mati~re de production de cultures d'exportation devraient l'exploiter, quitte A importer s'il Ie faut des produits alimentaires. Cela sera dans l'int~ret non seulement de la croissance et de la hausse des revenus, mais aussi de la s~curite alimentaire. 4.17 Le commerce intra-africain de produits agricoles, en particulier de produits alimentaires, devrait augmenter A mesure que les dis torsions internes des taux de change, des prix agricoles et des syst~mes de commercialisation sont eliminees. R~duire les obstacles au commerce intra-africain donnera aux pays la possibilite de se sp~cialiser selon l'avantage comparatif de chacun et permettra de d~velopper les d~bouch~s. 4.18 On fait parfois valoir que, les cours mondiaux de la plupart des produits agricoles africains ayant diminu~, il faut que les gouvernements interviennent pour proteger les producteurs de produits d'exportation. Les prix agricoles ont en effet diminue. Le caract~re lethargique de la croissance dans 1es pays deve1opp~s a r~duit 1a demande A 1a fin des annees 1970 et au d~but des annees 1980. En meme temps, l'offre de I ' - 166 - certaines cultures d'exportation a augmente, provenant essentiellement d'Asie et d'Amerique latine (surtout Ie cafe, l'huile de palme et Ie cacao). De plus, de nouveaux produits de substitution sont apparus pour certains produits tropicaux (caoutchouc synthetique et sucre provenant du sirop de mals et de la betterave A sucre). En raison de la faible part du marche que detient 1 'Afrique , sauf dans Ie cas du cacao, les cours mondiaux ne sont pas sensiblement affectes par Ie niveau de la production en Afrique. 4.19 Cela dit, la baisse des prix n'explique pas pourquoi l'Afrique a vu diminuer son rOle sur les marches mondiaux au cours des 20 derni~res annees en ce qui concerne Ie cacao, Ie cafe, l'huile de palme, Ie caoutchouc, Ie coprah, Ie the et Ie coton. Ce sont les pays asiatiques - qui ont des regimes commerciaux plus liberaux, un investissement prive plus vigoureux et une productivite en hausse - qui ont pris la rel~ve. L'experience de l'Afrique montre que les gouvernements ne peuvent se permettre de proteger les cultivateurs contre une baisse durable du cours mondial de leurs produits d'exportation. II faut au contraire, grAce A des regimes libres et transparents de prix et de commercialisation, laisser les cultivateurs s'adapter et reagir. Pour avoir la meilleure chance de reussir, l'Afrique doit devenir plus competitive. Le rOle des gouvernements est d'aider les cultivateurs A augmenter leur productivite. Encourager Ie contrOle des coUts et prevoir une reglementation qui rende possible d'ajuster la production en fonction de l'evolution du marche, telle est la meilleure fa90n de lutter contre la baisse des prix mondiaux. 4.20 Les syst~mes de subvention en Amerique du Nord et en Europe occidentale ont cree des stocks abondants et ont fait baisser Ie prix des cereales et des produits de l'elevage qui sont importes par les pays africains et qui font concurrence aux produits locaux. Dans ce cas, une protection tarifaire contre les produits beneficiant de subventions et contre Ie dumping est justifiee; des exemples recents sont notamment les produits laitiers, les cereales et les huiles alimentaires provenant d'Europe et d'Amerique du Nord. Pour ces produits, les coUts de production sont plus faibles dans bien des pays d'Afrique que dans les pays exportateurs. Si les subventions disparaissaient, l'Afrique aurait beaucoup A gagner. La protection tarifaire permettra de developper la capacite de production et fera se creer des entreprises qui vendent les produits locaux. ROle des grandes et moyennes exploitations 4.21 Un meilleur syst~me d'incitations devrait beneficier non seulement A I' a.griculture pratiquee en petites exploitations, mais aussi A celIe des grandes et moyennes exploitations privees. Les exploitations qui peuvent regrouper les activites de production, de commercialisation et de transformation de produits agricoles sont plus susceptibles de mettre au point de nouveaux produits et de trouver de nouveaux debouches. Souvent, elles pas sent des contrats de production avec de petits cultivateurs qui beneficient alors de techniques modernes, de services de contrOle de la qual:lte, de services de commercialisation et d'autresservices encore. La COte d'Ivoire, le Malawi et le Kenya ont attire des investissements prives dans des plantations qui produisent des cultures d'exportation - cafe, the, fruits et legumes au Kenya (voir encadre 4.1); bananes, ananas, fruits et - 167 - caoutchouc en Cate d'Ivoire; tabac au Malawi. Un r~gime plus libre en matiere d'investissements priv~s attire des capitaux nationaux et ~trangers et aussi des experts techniques et des agents de commercialisation. Des Africains instruits, qui rejetteraient l'id~e d'~tre de petits cultivateurs, pourraient ~tre tent~s de travailler dans des entreprises agricoles modernes. Encourager l'~pargne et Ie cr~dit dans les zones rurales 4.22 Pour fournir les fonds n~cessaires aux investissements agricoles et permettre aux agriculteurs d'avoir davantage de liquidit~s, il faut qu'il existe des interm~diaires financiers efficaces desservant les zones rurales. De nombreux ~tablissements para-~tatiques de cr~dit ~tablis a l'intention du secteur agricole ont ~chou~, en raison essentiellement d'une mauvaise gestion. Les pr~ts motiv~s par des consid~rations politiques ont ~t~ chose courante et les d~fauts de paiement ont ~t~ fr~quents en pareil cas. Les gouvernements ont ~galement eu tendance a maintenir les taux d'int~r~t a un niveau inf~rieur au taux du march~. De ce fait, la demande de credit a toujours ete sup~rieure a l'offre. Le credit a ete rationn~ - et ce, en fonction de criteres qui ne tenaient souvent pas compte de la qualite des investissements envisages. II n'est guere surprenant que ces institutions de credit aient subi de fortes pertes. 4.23 Une meilleure approche serait de laisser les taux d'inter~t equilibrer l'offre et la demande. C'est alors Ie jeu des forces du marche qui deciderait de l'octroi du cr~dit. Par ailleurs, des taux d'interet plus eleves permettraient aux banques d'~tre moins dependantes des fonds publics et encourageraient l'epargne. Les banques obtiendraient les ressources necessaires pour renforcer la gestion de leurs operations dans les zones rurales. Les banques commerciales pourraient elles aussi ~tre incitees a consentir des pr~ts agricoles ou encouragees a pr~ter aux agriculteurs par des intermediaires (par exemple, les commer~ants qui vendent a credit des facteurs de production et du materiel agricole, ou qui commercialisent les produits agricoles). C'est ce qui COmmence a se faire au Kenya, par exemple. Toutefois, il faudra assez longtemps pour que les banques commerciales priv~es consentent des pr~ts importants au secteur agricole. M~me alors, il n'y aura guere de progres tant que l'on ne laissera pes les banques appliquer les procedures prevues dans les accords de pr~t en cas de defaut de paiement. 4.24 Pour que les petits exploitants puis sent obtenir du cr~dit, la meilleure fa~on est d'encourager la creation d'institutions financieres du secteur non organise (voir chapitre 6). Celles-ci fonctionnent sur la base d'epargne faite par leurs membres et de pr~ts consentis a des groupes qui sont collectivement responsables de la dette. La pression des autres membres du groupe augmente les probabilites de remboursement, etant donne que, si un membre fait defaut, l'ensemble du groupe perd son credit. Les defauts de paiement sont rares. D'importantes institutions d'epargne et de credit fonctionnent avec succes, notamment au Rwanda, au Burundi, au Benin, en COte d'Ivoire, au Cameroun et au Togo (voir encadres 4.2 et 8.4). Mobiliser la technologie - 168 - 4.25 En Afrique, les sols doivent ~tre exploites de fayon judicieuse pour pouvoir continuer a produire. Dans les zones arides, il s'agit essentiellement de sols sableux et poreux, qui manquent d'elements nutritifs. La majeure partie des plaines humides ont un sol acide, ayant une teneur en aluminium qui peut ~tre toxique pour les plantes. Les sols les plus fertiles du continent sont ceux des regions montagneuses de l'Afrique de l'Est, OU la declivite du terrain accrolt les risques d'erosion, et ceux qui sont constitues d'argile et de terres alluviales, qui risquent d'~tre satures d'eau. La plupart des sols africains sont aisement degrades lorsque la vegetation est affaiblie ou qu'elle disparalt. A l'exception des plus humides d'entre elles, toutes les regions ont une pluviosite imprevisible. Dans la majeure partie du continent (les deux tiers, selon certaines estimations), il y a un fort risque de secheresse chaque annee. De plus, m~me les annees OU les precipitations sont adequates au total, il arrive que les pluies commencent trop tard ou finissent trop tOt et les periodes s~ches peuvent survenir a un moment critique de la campagne. Les possibilites d'irrigation sont beaucoup plus faibles qu'en Asie, ou l'irrigation constitue la source principale de croissance de l'agriculture. De plus, les caracteristiques tr~s diverses du continent en mati~re de pluviosite, de sol et de relief se combinent pour produire une diversite extraordinaire de micro-environnements. 4.26 Au fil des siecles, neanmoins, les Africains ont trouve des moyens de tenir compte de ces difficultes. Ainsi, l'elevage noma de etait sans doutE! Ie seul systeme convenant aux zones arides de l'Afrique, les precipitations rares et irregulieres exigeant de deplacer les animaux a la reChE!rche de pAturages et d'eau. Les methodes de culture sur coupe et brOlis etaient appropriees dans les zones de for~t et de savane, ou les terres sont abondantes et qui sont peu peuplees, parce qu'elles permettaient de longues periodes de jachere pour la regeneration des sols. 4.27 Le probleme est que, du fait de la croissance demographique rapide, les terres et les ressources n'etaient pas suffisantes, dans la majeure partie de l'Afrique, pour que ces systemes traditionnels de culture et d"elevage extensifs puissent se poursuivre. Les pressions qui s' eXE!rCent sur les terres se traduisent par une baisse des rendements des cultures et par Ie surpAturage. La couverture vegetale s'affaiblit et l'erosion s'accelere. De ce fait, il convient de mettre au point ou d'adapter sans tarder des techniques plus productives qui correspondent aux beso:~ns particuliers des cultivateurs africains et a leur environnement. 4.28 Les tentatives qui ont ete faites ces 30 dernieres annees pour introduire des techniques nouvelles en Afrique ont donne des resultats decevants. Ainsi, au cours des annees 1960 et 1970, des techniques "modernes" ont ete envisagees pour les cereales, les cultures arbustives, les oleagineux, Ie coton et d'autres cultures, fondees sur l'utilisation de varietes a plus fort rendement, d'engrais et de methodes chimiques de lutte contre les parasites et les maladies - et, dans certains cas, la mecanisation des operations. Bien souvent, ces techniques tttoutes faites tt ont echoue. Dans la plupart des cas, les cultivateurs n'avaient pas la main-d'oeuvre, les capitaux ou les terres necessaires pour utiliser les techniques correctement. Les machines, les engrais, les insecticides et herbicides chimiques et les semences a haut rendement doivent ~tre achetes - or, les cultivateurs africains fonctionnant au niveau de subsistance ou - 169 - gu~re au-delA ont du mal A se procurer l'argent n~cessaire. Les cultivateurs ne se sont habitu~s que lentement A se servir de facteurs de production et de mat~riels modernes. L'utilisation des produits chimiques destin~s A la protection des plantes n'~tait pas tr~s bien comprise. Les semences A fort rendement ne donnaient pas de meilleurs resultats que les semences traditionnelles en l'absence d'engrais et de m~thodes de culture appropriees. De surcroit, les politiques appliquees par les gouvernements en mati~re de prix et de commercialisation ne permettaient souvent pas d'utiliser les techniques nouvelles de fa~on rentable. Les engrais n'~taient importes que lorsque les gouvernements disposaient des devises n~cessaires et aussi qu'ils etaient disposes Ales utiliser A cette fin. Enfin, les techniques "modernes" etaient parfois diffus~es sans ~tre adapt~es aux caract~ristiques locales. Dans ces conditions, il etait nature 1 que les cultivateurs hesitent A abandonner les m~thodes traditionnelles. 11 convient maintenant de lancer un nouvel effort pour adapter les techniques agricoles aux besoins des cultivateurs africains. Recherche de vari~tes A plus haut rendement 4.29 Les nouvelles varietes de cultures introduites en Afrique au cours des 30 derni~res ann~es ont eu un succ~s limite. Une variete de mars A fort rendement, utilisee par de nombreux petits cultivateurs au Zimbabwe et au Kenya, se r~pand en Afrique de l'Ouest. Des varietes ameliorees de riz de bas-fonds et de ble sont egalement disponibles dans certaines parties de l'Afrique subsaharienne. L'Institut international d'agriculture tropicale est en train de mettre au point des vari~tes de manioc r~sistant aux maladies, dont Ie rendement est un peu meilleur que celui des vari~t~s existantes. De nombreuses autres vari~t~s nouvelles ont donn~ de bons r~sultats dans les stations de recherche o~ les conditions - sol, techniques de cultures et eau - ~taient bonnes, mais n'ont pas r~ussi aussi bien dans des conditions r~elles. De nouvelles variet~s doivent ~tre experimentees dans de nombreuses exploitations pour que l'on soit sUr qu'elles donnent des resultats au moins aussi bons que les variet~s locales. Utilisation accrue d'engrais 4.30 La quantite moyenne d'engrais chimiques utilises en Afrique est inf~rieure A 10 kilograrnrnes A l'hectare, contre environ 90 kilogrammes en Chine et en Inde. La demande est faible parce que les cultivateurs traditionnels ont l'habitude d'utiliser seulement des quantites limit~es de produits nutritifs organiques, tels que matieres vegetales decompos~es, cendres et fumier, et aussi parce que les cultures traditionnelles ne reagissent souvent que moderement aux engrais chimiques. En marne temps, l'offre d'engrais est peu abondante en raison de l'inefficacite des services publics, de mauvais systemes de transport, du manque de devises etrangeres et de restrictions imposees A la vente d'engrais par Ie secteur prive. 4.31 La demande d'engrais chimiques augmentera A mesure que les systemes de culture changeront et que de nouvelles techniques agricoles et de nouvelles varietes de cultures seront adopt~es. Toutefois, il n'est en general pas justifie d'en subventionner l'utilisation, ce qui ne fait qU'encourager Ie gaspillage. L'essentiel est de faire en sorte que des - 170 - quantit~s suffisantes d'engrais soient disponib1es au prix de revient. Dans de nombreux pays d'Afrique, la demande ne peut @tre satisfaite parce qu'il y a des p~nuries. II est fr~quent que les entreprises publiques g~rent mal la distribution d'engrais. Pour r~duire les difficult~s d'approv!sionnement, les commer9ants priv~s et les entreprises priv~es devraient @tre autoris~s A importer, produire et distribuer eux-m@mes les engrais. ContrOler les prix et les marges b~n~ficiaires ne fait que d~courager l'entreprise priv~e. Enfin, des devises devraient @tre disponibles pour financer les importations d'engrais correspondant A la demande (de pr~ference grace aux reformes des politiques de change exposees au chapitre 2) et la distribution d'engrais devrait @tre prise en consideration lors de la planification des r~seaux de transport. 4.32 Les engrais organiques quant A eux seront toujours necessaires parce qu'ils augmentent la capacite qU'a Ie sol de retenir l'eau et les elements nutritifs et de resister A l'erosion. lIs reduisent egalement la quantite d'engrais chimiques necessaires - ce qui est souhaitable tant pour des raisons economiques que pour des raisons ecologiques. Certains dechets agro-industriels - pulpe et ~calures de cafe, balle de riz, feuilles de th~ utilisees, molasse et residus des raffineries de sucre - devraient @tre utilis~s comme engrais organiques, venant s'ajouter au fumier et aux dechets de cultures qui sont couramment utilises. Protection phytosanitaire 4.33 Les parasites et les maladies - brunissure du riz, bact~riose du manioc et acariens, par exemple - provoquent d'importantes pertes avant la recolte en Afrique, pertes qui vont de 10 % jusqu'A 80 %. La demande de produits chimiques et de pr'oduits de lutte contre les maladies, dont beaucoup ont des effets nefastes sur l'environnement, va augmenter. II faudra des programmes planifies de lutte phytosanitaire, qui prevoient d'utiliser les pesticides et fongicides en quantites limitees seulement et qui font appel de plus en plus A des moyens culturaux et biologiques (voir encadre 4.3). Des varietes qui resistent aux parasites et aux maladies devront @tre mises au point et il faudra trouver des m~thodes de culture qui rAduisent la propagation de ces parasites et maladies. Irrigation, ressources en eau et maitrise de l'eau 4.34 Dans l'Afrique subsaharienne, 5 millions d'hectares sont irrigues - l~g~rement plus de la moitie par des moyens modernes, Ie reste au moyen de methodes artisanales traditionnelles. Soixante-dix pour cent environ de la surface irriguee se trouve dans trois pays : Ie Soudan, Madagascar et Ie Nigeria. On evalue A moins de 20 millions d'hectares la superficie pouvant se pr~ter A l'irrigation. Le developpement de l'irrigation pourrait contribuer sensiblement A la production agricole au Tchad, en Ethiopie, en Ouganda, au Senegal, en Mauritanie, au Malawi et au Mali, en plus des trois pays cites ci-dessus. Ces pays ont des zones arides qui pourraient @tre cultivees si elles etaient irriguees avec de l'eau provenant de rivieres ou de nappes souterraines. Les possibilites les plus prometteuses sont des systemes coUtant de l'ordre de 1 500 dollars par hectare ou moins, qui peuvent @tre construits et entretenus par les cultivateurs avec l'assistance du Gouvernement. II s'agit notamment d'irrigation de surface utilisant l'eau de puits, d'inondation contrOlee et de mise en valeur de - 171 - vall~es et de bassins, de mar~cages et de plaines d'irrigation. Ces m~thodes d'irrigation se sont souvent propag~es spontan~ment; c'est le cas par exemple des petits syst~mes priv~s mis en place par des cultivateurs mauritaniens dans la vall~e du S~n~gal. En outre, les sommes consacr~es a la bonne utilisation et 8 l'entretien des installations existantes, ainsi qu'a leur remise en ~tat seront des investissements rentables dans bien des pays. 4.35 La gestion et la conservation de l'eau pour les r~coltes pluviales sont importantes. Dans les zones semi-arides et 18 OU il risque d'y avoir des p~riodes de s~cheresse, il est essentiel de maximiser la proportion d'eau de pluie qui p~n~tre dans le sol pour ~tre utilis~e par les cultures, au lieu de se perdre ou de raviner le sol. On peut pour ce faire utiliser un syst~me d'~pandage (en amenant l'eau par des rigoles dans les champs cultiv~s) et de collecte de l'eau (qui permet de capter, a l'aide de canaux et de digues de terre ou de pierre, les eaux de ruissellement provenant d'une vaste zone pour les amener sur des surfaces plus r~duites plant~es de cultures ou d'arbres) (voir encadr~ 4.4). Mat~riel agricole 4.36 Dans de nombreuses parties de l'Afrique, il faudra augmenter la productivit~ du travail grAce 8 l'utilisation d'un mat~riel agricole plus moderne. L'exp~rience montre qu'une mecanisation totale n'est pas la solution, a court ou a moyen terme. L'utilisation de tracteurs pour labourer et de bulldozers pour d~fricher a acc~l~r~ la d~gradation des sols dans de nombreuses r~gions. Les machines sont mal entretenues, en partie du fait du manque de devises ~trang~res pour l'achat de pi~ces de rechange. Les animaux de trait sont souvent une solution plus rentable. En outre, de nombreux petits projets encourageant des "techniques appropri~es", ex~cut~s par des institutions b~n~voles privees, ont fait adopter des instruments m~caniques simples qui n'appellent gu~re d'entretien et qui sont peu on~reux et faciles a utiliser. Le plantoir est un exemple d'outil manuel qui permet de reduire de moiti~ le temps necessaire pour ensemencer un hectare a la main. Les machines tir~es par des animaux, telles que charrues et semoirs, ont un potentiel ~norme en Afrique. 11 en va de m~me d'installations amelior~es de stockage sur place, ainsi que de machines a d~cortiquer et de machines de traitement ou de transformation preliminaire de certaines cultures. Elevage 4.37 L'~levage offre de bonnes possibilites pour la croissance du revenu rural en Afrique. Les petits an!maux (moutons et ch~vres) et la volaille constituent un potentiel important qUi n'a pas encore ~t~ exploit~ dans la majeure partie de la region. Ce sont les bovins qui sont actuellement les plus nombreux, contribuant pour une forte proportion a la valeur ajoutee agricole - plus de la moitie dans certains pays. Le cheptel total - 160 millions de t~tes de betail - est in~galement reparti dans le continent. Dans l'Afrique de l'est montagneuse, ou il n'y a pratiquement pas de mouches ts~-ts~, se trouve un cinqui~me de tout le b~tail sur une superficie ne representant que 11 % de la superficie totale de l'Afrique subsaharienne. La zone soudano-sah~lienne, ou se trouve un tiers du total, a une tr~s forte densit~, alors que l'Afrique centrale humide, ou la mouche - 172 - ts~-ts~ est end~mique, n'a que 3 % du cheptel total sur 18 % de la superficie de l'Afrique subsaharienne. 4.38 L'~levage peut ainsi faire partie d'un syst~me de culture int~gr~, dans la mesure OU il produit des engrais organiques et la traction animale. Par contre, les animaux contribuent aussi A la disparition progressive de la couverture v~g~tale de l'Afrique. L'id~e est donc d'accroitre l'~levage lA ou il est insuffisant, en vue d'augmenter la production et la traction animale, tout en r~duisant les effets n~fastes qu'il peut avoir sur l'environnement. 4.39 Les solutions seront variables. Dans les r~gions montagneuses, l'int~gration de l'~levage dans les syst~mes d'exploitation est d~jA en cours. Dans les zones humides et sous-humides, des m~thodes peu on~reuses - pieges et pulv~risations - peuvent permettre de r~duire Ie nombre de mouches ts~-ts~, mais non de les ~liminer. La solution serait alors d'encourager l'utilisation d'animaux nains r~sistant A la trypanosomiase (la maladie transmise par la mouche ts~-ts~), et de mettre au point des v~hicules et machines agricoles plus l~gers que ces animaux puissent tirer. Dans les zones cultiv~es plus seches, l'augmentation des troupeaux des cultivateurs produira une pression de plus en plus forte sur les paturages, A laquelle viendra s'ajouter celIe des troupeaux des pasteurs qui paissent dans les chaumes et les jach~res arbustives pendant la saison seche. II serait souhaitable de contrOler davantage Ie paturage, mais on n'a pas trouv~ de moyen efficace pour ce faire. Les zones de paturage plus seches ont des problemes diff~rents. Les pasteurs exploitent au mieux les maigres ressources des parcours A mesure qu'elles se d~placent et il n'y a guere de possibilit~ d'accroitre leur production et leur productivit~. Le surpaturage est grave aux alentours des trous d'eau publics et des centres urbains et constitue une cause princip~le de la d~gradation de l'environnement. De nouveaux points d'eau devraient ~tre creus~s en des points tres espac~s dans les zones pastorales et allou~s A des groupes d'utilisateurs, de fa~on A ~viter une concentration excessive des animaux. 4.40 Des services v~t~rinaires sont essentiels au d~veloppement de l'~levage dans toutes les r~gions, mais on peut laisser Ie secteur priv~ s'en charger pour l'essentiel. Les services nationaux de sant~ animale devraient s'attacher essentiellement a reglementer les veterinaires prives, A organiser et A subventionner les campagnes de vaccination et d'autres mesures de sant~ d'urgence que les v~t~rinaires priv~s sont peu susceptibles d'entreprendre sauf sous contrat avec Ie Gouvernement. Comme peu de v~t~rinaires prives choisiront de s'installer dans les zones de paturage les plus ~loign~es, celles-ci d~pendront aussi, pour am~liorer les services de sant~ animale, de "para-veterinaires" remun~res par la vente de m~dicaments. Dans toutes les r~gions, les agents de vulgarisation devraient enseigner aux propri~taires de b~tail des m~thodes am~lior~es d'~levage et de production de fourrage. Promotion de la p~che 4.41 La p~che offre un important potentiel en Afrique, qu'il s'agisse de la mer ou des eaux interieures. Toutefois, les prises diminuent (de 7,5 millions de tonnes en 1977, elles sont tomb~es A 5,9 millions de tonnes en 1985) en raison d'une exploitation excessive et de l'~volution de - 173 - l'environnement. La production totale se r~partit comme suit: flottes africaines. 30 % environ; flottes ~trang~res, 45 %; p~che dans les eaux int~rieures, 24 % et pisciculture, 1 %. Le potentiel de d~veloppement peut ~tre r~alis~ de diff~rentes fa90ns : expansion des flottes nationales; imposition plus efficace des activit~s des flottes ~trang~res (qui sont habituellement autonomes et ne profitent gu~re aux pays dans les eaux desquels elles p@chent); am~lioration des m~thodes de p@che traditionnelle (pirogue). essentiellement en r~duisant les pertes apr~s la p~che; et d~veloppement plus rapide de la pisciculture. Amelioration de la recherche agricole 4.42 Des techniques meilleures ne seront pas suffisantes pour soutenir a moyen et a long terme Ie taux de croissance annuel pr~vu de 4 %. Le petit nombre de techniques agricoles nouvelles mises au point au cours des 20 derni~res annees illustre la baisse de la qualite de la recherche agricole en Afrique. Celle-ci, souvent rudimentaire et animee par un tres petit nombre de scientifiques, avait pourtant contribue considerablement au developpement de l'agriculture en Afrique au cours des 60 premi~res annees du XXe siecle. Elle a permis de faire adopter par les cultivateurs africains un certain nombre de cultures - cacao, caoutchouc, mangues, the, agrumes, mals et, plus tard, mals hybride - de m@me que les engrais et des outils et mat~riels agricoles nouveaux. Le declin de la recherche s'explique par Ie manque d'int~r@t des gouvernements et par une mauvaise gestion, plutOt que par un manque de fonds. Dans beaucoup de pays d'Afrique en effet, il y a aujourd'hui davant age de chercheurs qui depensent davantage d'argent, sans gu~re produire de r~sultats. Les projets financ~s par des donateurs n'ont pas am~liore la situation. Les montants consacres par cultivateur a la recherche agricole ont et~ plus ~lev~s en Afrique subsaharienne que partout ailleurs dans Ie monde en d~veloppement : 360 millions de dollars des Etats-Unis environ en 1980 (derni~re ann~e pour laquelle on poss~de des donnees), contre a peu pr~s 190 millions en Asie du Sud, OU il y a pourtant beaucoup plus de cultivateurs. II est urgent que les instituts africains de recherche agricole soient remis en etat et que leurs directeurs, soucieux d'obtenir des resultats, agissent avec toute la fermet~ voulue de fa90n que ces etablissements puissent de nouveau jouer leur role crucial : mettre au point, adapter et propager des techniques agricoles amelior~es, y compris des produits nouveaux. 4.43 La plupart des pays africains sont trop petits pour financer la recherche agricole dont ils ont besoin. II faudra que la recherche fondamentale - ainsi d'ailleurs qU'une bonne partie de la recherche appliqu~e - soit entreprise dans les centres internationaux de recherche agricole et dans des universit~s et centres de recherche de pays developpes. II convient de renforcer les activites internationales de recherche agricole destin~es a l'Afrique, en particulier celles qui concernent l'am~lioration des techniques. Les travaux de recherche prometteurs en biotechnologie agricole, qui d'ici a l'an 2000 auront une influence majeure sur l'agriculture dans Ie monde, seront entrepris au depart dans les centres de recherche de pays d~velopp~s et dans les centres internationaux de recherche agricole, parce qu'ils exigent de fortes mises de fonds et de hautes comp~tences techniques. Ces institutjons devront - 174 - jouer un rOle accru dans Ie transfert et l'adaptation de nouvelles techniques destin~es A l'Afrique (voir encadr~ 7.4). 4.44 La recherche internationale n'aura d'effet en Afrique que si ses resultats peuvent !tre adapt~s aux conditions locales. II est donc crucial de remettre en etat les systemes nationaux de recherche agricole. La premiere chose a fa ire est de dresser des plans d'action nationaux, definissant les tAches prioritaires et pr~voyant Ie suivi et l'~valuation des resultats et leur transformation en recommandations destinees aux cultivateurs. Les ecoles superieures d'agronomie devraient ~tre incitees a participer a cet effort. Les activit~s des donateurs devraient !tre strictement coordonn~es; a cet ~gard, la cr~ation recente du Programme special pour la recherche agricole en Afrique (PSRAA) est encourageante. Les centres internationaux de recherche agricole doivent ~galement ~tre incites a fournir un appui technique aux systemes nationaux. Une fa~on d'y parvenir serait que les chercheurs des differents pays echangent davantage d'informations sur les resultats obtenus. Des reseaux regionaux permettraient aux pays africains plus petits de participer a des sujets de recherche specialis~e. Am~lioration des services de vulgarisation agricole et de la fourniture de facteurs de production 4.45 Les services de vulgarisation, qui permettent de transf~rer sur Ie terrain les r~sultats de la recherche, ont ~galement un rOle important a jouer en communiquant aux chercheurs des informations sur les besoins des cultivateurs. Les cultivateurs procedent a des exp~riences pour adapter les r~sultats de la recherche a leurs conditions particulieres et les services de vulgarisation pourraient s'interesser davantage a cette source d'information. Gela dit, peu de pays africains ont des services efficaces de vulgarisation au niveau national. Dans la plupart des cas, ces services sont i'ragmentes, so it qu'il y ait des systemes diff~rents pour des cultures diff~rentes, soit que chaque systeme releve d'un projet de developpement localis~. Lorsqu'il y a plusieurs services finances par des donateurs dans un pays donn~, il en r~sulte souvent une certaine confusion, et la mise en place de programmes efficaces de vulgarisation au niveau national en devient plus difficile. La gestion et la supervision en sont frequemment assez relach~es; 1es liens avec la recherche sont faibles; les agents sont insuffisamment form~s et il n'y a pas d'information en retour provenant des cultivateurs. II serait plus rentable que chaque pays africain ait un systeme national de vulgarisation, auquel les donateurs pourraient contribuer collectivement. L'id~al serait qu'il y ait un agent de vulgarisation pour 200 a 1 000 cultivateurs, selon la densite de la population. Ges agents s'occuperaient de toutes les activites agricoles. Les techniques qui ont fait leurs preuves dans des environnements similaires pourraient ~tre recommandees, la pr~ference etant donnee a celles qui sont peu onereuses et comportent peu de risques. Les agents de vulgarisation devraient proposer au cultivateur - en lui off rant des options plutOt qu'un ensemble tout fait - les techniques qui conviennent Ie mieux A ses conditions particulieres. Gela n'interdirait pas aux societ~s priv~es et aux coop~ratives d'offrir des services de vulgarisation pour les cultures qu'elles vendent (con~e c'est Ie cas pour Ie tabac dans de nombreux pays). Par ailleurs, lorsqu'un service destine a une seule culture fonctionne bien (par exemple dans certains programmes de culture du - 175 - coton), il pourrait ~tre elargi de fa90n a s'appliquer aussi a d'autres cultures. 4.46 Des programmes fondes sur le "systeme de formation et de visites" - systeme de vulgarisation mis au point avec succes en Asie - sont experimentes en Afrique. Les superviseurs s'assurent que les agents rendent bien visite aux cultivateurs comme ils le devraient; comme les agents suivent periodiquement des stages de formation et qu'ils ont des contacts avec les activites de recherche, ils se perfectionnent constamment et ils sont en mesure de communiquer aux chercheurs les resultats obtenus par les cultivateurs ainsi que les questions que ceux-ci peuvent avoir. Ce systeme est un bon exemple de renforcement de la capacite : il vise a ameliorer les competences locales, a developper la gestion, a renforcer les institutions africaines et a aider a communiquer aux services publics les informations provenant des cultivateurs. En rassemblant en un seul systeme les services publics de vulgarisation, on peut faire baisser les coOts. Au Kenya, certains cultivateurs ont obtenu une augmentation du rendement du mals pouvant aller jusqu'a 50 %, grAce a un systeme national de vulgarisation de cet ordre. Le systeme de formation et de visites existe aussi au Togo, en COte d'Ivoire, au Senegal, au Nigeria et au Burkina Faso et il est en train d'etre mis en place dans d'autres pays africains. 4.47 Des mecanismes efficaces pour la vente de facteurs de production, de materiel et de betail sont cruciaux, mais il n'en existe guere. En general, il vaut mieux laisser ces activites au secteur prive. Le role du gouvernement doit etre de fournir suffisamment de devises etrangeres, d'entreprendre des travaux de recherche et d'en communiquer les resultats aux cultivateurs. Les services publics de recherche et de vulgarisation, ainsi que les organisations benevoles privees, devraient mettre au point des facteurs de production et des biens d'equipement (nouveaux outils manuels, materiel a traction animale, races de bovins hybrides, installations de stockage de cereales, fourneaux a bon rendement energetique, etc.) qui puissent ensuite etre produits et diffuses par le secteur prive. Reorientation de l'enseignement agricole 4.48 Dans la plupart des pays africains, les etablissements d'enseignement agricole dispensent une formation insuffisante aux etudiants, qui, ensuite, preferent souvent entrer dans la fonction publique plutOt que de devenir agriculteurs. C'est la un enorme gaspillage. Une meilleure formation devrait etre dispensee a l'intention de trois groupes differents : les techniciens agricoles qui seront proprietaires ou exploitants d'entreprises agricoles et agro-industrielles privees, le personnel des services de recherche, des services veterinaires et des services de vulgarisation, et les chercheurs et decideurs agricoles de haut niveau. C'est un domaine dans lequel les donateurs peuvent faire une enorme contribution. Proteger l'environnement rural 4.49 On ne possede pas d'informations exactes sur la degradation de l'environnement dans la majeure partie de l'Afrique. De toute evidence, - 176 - toutefois, le d~boisement est un probl~me pressant. D'apr~s l'enquete la plus r~cente, entreprise en 1980, chaque ann~e 3,7 millions d'hectares de forets sont d~truits, soit 0,6 % des 703 millions d'hectares en Afrique. Le d~boisement se produit ! un rythme 29 fois plus ~lev~ que la plantation de nouveaux arbres. En meme temps, il y a pour 55 millions d'Africains une p~nurie de bois de feu. Le deboisement cause la destruction non seulement d'une grande partie de la faune et de la flore de 1 'Afrique , mais aussi de ses cultures pr~-agricoles, comme celle des pygmees. 4.50 D'apr~s les maigres informations dont on dispose, de 80 ! 90 % des zones de pAturage et 80 % des terres cultivees en cultures s~ches peuvent etre touchees par la degradation des sols. L'~rosion, fr~quente dans toutes les regions de l'Afrique subsaharienne, est sans doute plus grave que partout ail leurs en Ethiopie : la couche arable y est emportee A raison parfois de 290 tonnes par hectare sur les pentes tr~s escarpees. En Afrique de l'Ouest, on a releve des pertes de 10 ! 20 tonnes de terres par hectare sur des pentes me me tr~s peu inclinees. L'~rosion eolienne est assez consid~rable dans les zones plus arides. On signale aussi frequemment une diminution de la fertilite des terres cultiv~es dans de nombreuses parties de l'Afrique. 4.51 Une caracteristique commune des diff~rents aspects de la degradation de l'environnement est la destruction ou l'affaiblissement de la couverture vegetale du fait du surpAturage, de la surexploitation des sols ou du deboisement, ce qui expose le sol aux effets de la pluie et du vent. A quelques exceptions notables pr~s, les efforts faits par des gouvernements pour lutter contre la degradation des sols ont ete vains parce que la conservation des sols exige habituellement un surcrolt de travail de la part du cultivateur, que celui-ci est souvent dans l'impossibilit~ de fournir. De plus, les prix peu eleves des produits agricoles et aussi l'ins~curite de l'occupation des terres font que, sur le plan financier, la conservation n'est gu~re attrayante. PlutOt que d'essayer de sauver un lopin de terre d~grade, il est moins onereux de passer! un autre qui est moins ablme. Un environnement rural plus prosp~re (grAce! la suppression de facteurs de distorsion - prix, taux de change, impOts, etc. -, ! une plus grande securite du regime d'occupation des terres et A l'am~lioration de la productivite) est necessaire pour que les cultivateurs. les habitants des for~ts et les pasteurs s'interessent ! la conservation. Tous les efforts de conservation seront vains si les cultivateurs ne consid~rent pas qU'ils sont dans leur interet. 4.52 Les activites de conservation qui ont reussi en Afrique sont riches en enseignement. Au Kenya, le programme national de conservation des sols, qui a et~ lanc~ avec l'aide d'un financement de la Su~de en 1974 et qui a eu pour prolongement un projet national de vulgarisation, a permis de mettre en terrasses des centaines de milliers de petites exploitations, les cultivateurs faisant eux-memes la majeure partie du travail sans etre remuneres. D'autres techniques ont donne de bons resultats : utilisation de paillis en surface; mise au point de varietes de cultures qui germent rapidement et prot~getlt le sol des pluies pr~coces; et utilisation d'un syst~me de cultures intercalaires qui produit une couverture plus dense, augmente la production et fournit un rendement plus stable. Un labourage minimum (on plante alors A travers une liti~re d'herbes mortes ou de chaume) permet de reduire l'~rosion et d'accroltre les rendements. Dans - 177 - les terrains vallonn~s, une technique consiste A planter suivant les courbes du relief des rang~es de gramin~es fourrag~res, telles que du vetiver, pour l'infiltration de l'eau. Le vetiver produit une haie dense, constitue un filtre parfait, est peu on~reux et ne demande pas d'entretien. En fait, dans les terrains accident~s, Ie simple fait de cultiver suivant les courbes de niveau donne d~jA de bons r~sultats. Au Burkina Faso, les cultivateurs disposent des rang~es de pierres en travers des pentes dont Ie sol est menac~ d'~rosion. Ces rang~es ralentissent le ruissellement, augmentent l'infiltration de l'eau et retiennent la terre. Elle peuvent permettre de remettre en ~tat les terres d~sertifi~es (voir encadr~ 4.4). Pour qu'elle ait la moindre chance d'atre adopt~e, il faut que la conservation du sol accroisse Ie rendement des cultures; ne demande que peu de liquidit~s ou pas du tout; et n'exige pas un mat~riel on~reux. Si la m~thode consiste A planter des arbres, elle doit produire du bois de construction et du bois de feu ou du four rage et ne doit pas exiger trop de travail au d~triment des cultures. 4.53 Dans les sols souvent fragiles de l'Afrique, 1es arbres protegent Ie sol du vent et de 1a pluie, fournissent des matieres organiques qui am~liorent 1a structure du sol et vont chercher en profondeur les produits nutritifs et l'eau souterraine que les racines des cultures annue11es ne peuvent pas atteindre. Dans de nombreuses r~gions, les p~riodes de jachere ont ~t~ trop raccourcies pour que les arbres en r~g~n~ration naturel1e puissent parvenir a maturit~ et remp1ir ces fonctions. Le b~tai1 de plus en plus nombreux est source de surp!turage, ce qui r~duit 1a capacit~ des for@ts de se r~g~n~rer nature1lement. La couverture forestiere de l'Afrique diminue rapidement et 1e d~frichage pour l'agriculture va se poursuivre. Si les arbres doivent jouer un rOle accru pour 1a conservation du sol et la production agrico1e, i1 faudra que ce soit dans les zones cultiv~es, grace A l'agroforesterie. De nombreuses formules sont possibles: arbres d'ombrage plant~s aux alentours des habitations; arbres et arbustes plant~s en rang~es serr~es suivant les courbes de niveau pour ~viter l'~rosion du sol. Les cultures arbustives - comme Ie cacao, 1e caf~ et 1e th~ - jouent Ie marne rOle que les arbres dans 1es systemes d'agroforesterie. 11 faudrait planter davantage d'arbres qui produisent des fruits, des noix ou du four rage , de fa~on a diversifier la base de 1a production alimentaire. Dans 1es zones semi-arides, 1es brise-vent compos~s d'arbres d'especes et de hauteurs diff~rentes semb1ent donner de bons r~su1tats. Dans les zones humides, il peut ~tre souhaitable d'uti1iser une formu1e de cultures interca1aires - arbres, arbustes et cultures de diff~rentes hauteurs - qui permet une couverture v~geta1e totale. L'~lagage fournit du bois de feu, des piquets de clOture et du fourrage ou du paillage riche en azote pour engraisser 1es terres. 4.54 La grave penurie de bois de feu dans de nombreuses parties de l'Afrique ne pourrait @tre que partiellement combl~e par 1a plantation de bois communaux et d'especes destin~es a la production de bois de feu. 11 faut, de plus, prendre des mesures pour garantir la gestion systematique des for@ts. Faute de ressources financieres et autres, cette tache est hors de la port~e des services de foresterie des pays de l'Afrique subsaharienne. La responsabilit~ devra alors en @tre transf~r~e aux communaut~s locales. L'id~e est de limiter l'exp10itation des for~ts a ce qui est n~cessaire pour r~pondre aux besoins des zones rura1es en ~nergie et A une partie de ceux des vi11es - dans toute 1a mesure possible sans - 178 - causer de dommage A l'environnement. Pour ce faire, il faut avoir la capacite voulue pour decider A quel endroit Ie bois de feu doit ~tre ramasse, prevoir la regeneration des stocks (ce qui, dans certains cas, exige une modification des droits fonciers traditionnels) et veiller A ce que les frais soient recouvres. Les arbres pour la production de bois de feu ne seront plantes en grand nombre (on en plante dejA quelques-uns pour une utilisation personnelle) que lorsque Ie bois deviendra un produit commercialise et que les prix seront attrayants pour les exploitants. C'est ce qui se passe dejA dans la majeure partie de l'Afrique de l'Est. Par ailleurs, on cherche A faire ralentir la consommation croissante de bois de feu grace A l'utilisation de fourneaux A bois et A charbon de bois A meilleur rendement energetique (voir encadre 5.7). 4.55 Cela dit, il ne suffira pas de changer les methodes de culture pour conserver les sols et l'eau et pour reduire la destruction des forets. Les plans d'action forestiers tropicaux mis au point recemment par la FAO, Ie PNUD, la Banque mondiale et Ie World Resources Institute pour un certain nombre de pays africains prevoient toute une gamme d'autres mesures (voir aussi encadre 2.1), notamment les suivantes : renforcer les services de foresterie et de protection de la nature qui prot~gent les forets existantes ainsi que la faune et la flore et qui reboisent lA OU les forets ont ete detruites; modifier les accords passes avec les societes d'exploitation foresti~re pour les inciter A participer A la protection des forets et au reboisement; et modifier Ie regime fiscal applique Aces societes de fa~on qu'elles aient A payer Ie coQt reel - sur Ie plan economique et social - des arbres qu'elles vendent. 4.56 Les lacs, marecages, rivi~res et eaux cOti~res de l'Afrique sont des ressources precieuses qu'il convient de proteger. lIs constituent en effet l'habitat de poissons et d'autres animaux et ils jouent d'autres fonctions ecologiques importantes. Les eaux de surface sont utili sees pour l'irrigation, l'hydroelectricite, la navigation, l'alimentation en eau et la p~che. Ces ressources peuvent ~tre gravement compromises par d'autres activites economiques. Ainsi, des produits chimiques provenant de l'agriculture ou de l'industrie peuvent polluer l'eau potable. L'erosion des SQls aggrave l'accumulation de sediments dans les reservoirs et les syst~lnes d'irrigation. Le rejet de dechets des villes dans les rivi~res et les l,agunes cOti~res reduit la productivite de la peche qui fournit, outre des produits d'alimentation, des revenus et des emplois. Pourtant, peu de pays ont des politiques ou des institutions prevues pour la gestion des ressources en eau et des ressources halieutiques. 4.57 Dans bien des pays d'Afrique, la faune et la flore sont menacees par une exploitation non contrOlee, par Ie braconnage et par la diminution de l'habitat des animaux sauvages dans les for~ts et les parcours. Souvent, il y a de nombreux animaux et de nombreuses plantes de toutes sortes dans des zones marginales qui seraient relativement peu rentables si elles etaient utilisees autrement. Les plantes et animaux sauvages fournissent des ressources de subsistance. Leur preservation contribuerait pour beaucoup A la securite alimentaire et A la qualite de 1a vie des communautes rurales. Certains pays d'Afrique exploitent commercialement leurs pares naturels et en retirent des avantages assez importants (souvent en devises), provenant de la viande et d'autres produits animaux ainsi que du tourisme. Faire partieiper les eommunautes locales A la gestion des - 179 - ressources de la nature peut aussi contribuer a inverser les tendances actuelles a la destruction, ce qui produirait des avantages tant sur Ie plan ~conomique que sur Ie plan ~cologique. Mettre en place une infrastructure rurale 4.58 Dans l'ensemble, l'infrastructure rurale est tout a fait d~fectueuse. Son am~lioration est une condition essentielle de la modernisation et de la croissance de l'agriculture. Inciter les cultivateurs a vendre leurs produits ne sert pas a grand-chose s'il est trop difficile et trop on~reux de se rendre sur les march~s locaux et d'en revenir (voir encadr~ 4.5). 11 est crucial de construire des routes dans les zones rurales. 4.59 La construction et l'entretien de routes rurales ne devraient pas relever uniquement de services centraux. Ceux-ci sont d~ja surcharg~s par les tAches qui concernent les routes principales et, de plus, ils sont souvent situ~s tres loin des zones desservies par les routes rurales. 11 faudra des arrangements institutionnels et financiers distincts pour celles-ci, par exemple pr~voir la d~centralisation de certaines institutions existantes, en faisant appel a la participation de communaut~s locales, et utiliser des entrepreneurs et des techniciens locaux. Des techniques a forte intensit~ de main-d'oeuvre peuvent ~tre utilis~es pour maintenir les conts a un niveau peu ~lev~ et cr~er des emplois locaux (voir encadr~ 2.4). 4.60 Si l'infrastructure dans les zones rurales est un imp~ratif majeur, Ie d~veloppement agricole d~pend aussi du soutien des villes OU sont vendus les produits. La plupart des activites non agricoles pourraient ~tre execut~es avec efficacite par Ie secteur priv~ : transports, commerce, services de reparation, vente de biens de consommation, etc. L'infrastructure necessaire devra etre mise en place dans les villes de la region. Des services de sante et des ecoles devront aussi @tre cr~es (voir chapitre 3). Lorsqu'on fixe l'ordre de priorite des investissements pour l'infrastructure, il faut eviter la discrimination dont sont souvent victimes les zones rurales et les petites villes. Creer des associations de cultivateurs et reconnaitre Ie rOle des femmes 4.61 L'~lite politique et economique est plus susceptible de tenir compte des besoins des cultivateurs si ceux-ci ont leurs propres organisations. Ces organisations, si elles sont v~ritablement representatives, contribuent a donner des moyens d'action aux collectivites locales. L'action collective est profondement ancree dans la tradition des soci~tes africaines. 11 existe d~ja de nombreux groupes - consacres par exemple a la gestion des terres, a la commercialisation de produits agricoles et a la fourniture de facteurs de production en cooperatives, a l'epargne et au cr~dit, etc. En Afrique, les coop~ratives les plus reussies sont celles qui servent a vendre et a transformer les cultures marchandes comme Ie cafe et Ie lait - cultures pour lesquelles une technologie simple peut produire une valeur ajoutee assez importante a repartir entre les membres du groupe. Les cooperatives d'epargne et de credit fonctionnent bien elles aussi. Par contre, les cooperatives ne donnent souvent pas de bons resultats lorsqu'elles sont organis~es par Ie - 180 - gouvernement ou qu'elles concernent des produits a fort volume et faible valeur qui peuvent facilement ~tre vendus par des n~gociants priv~s. Pour r~ussir, la coop~ration doit ~tre volontaire et elle doit @tre g~r~e par la base. Faire assurer la gestion par les membres de la communaut~ est un moyen d'y parvenir. Une autre formule consiste a fonder les coop~ratives sur des structures et des groupements sociaux coutumiers, comme c'est souvent Ie cas. Cela dit, les gouvernements peuvent fournir une assistance technique, par exemple des services consultatifs en matiere de comptabilit~. de droit et de technologie. Une l~gislation qui permet de cr~er et de dissoudre plus facilement les coop~ratives est utile aussi. 4.62 Les femmes sont sans doute les membres les plus importants. et les moins pris en consid~ration, de la population rurale. Elles contribuent pour 70 % environ a la production de denr~es alimentaires de base. Dans la plupart des soci~t~s africaines, les droits et obligations des femmes sont complexes. II arrive que des champs soient allou~s aux femmes (provenant habituellement des terres de leur pere ou de leur mari) , qu'elles soient charg~es de cultures ou d'activit~s particulieres et qu'elles aient un revellU ind~pendant provenant de certains produits ou, comme c'est Ie cas en Afrique de l'Ouest, de la vente de ceux-ci. Souvent, les avantages de cert.dnes initiatives - promotion de cultures marchandes, m~canisation, vulg.~.risation et r~installation - vont aux hommes, car ce sont eux qui s'occupent de ces questions. Enfin, a mesure que la superficie des exploitations diminue a chaque succession et du fait de la pression d~mographique. et que les hommes cherchent du travail a l'ext~rieur et deviennent des cultivateurs a temps partiel, ce sont de plus en plus les femmes qui sont charg~es de la ferme familiale. Dans de nombreuses r~gions, la moiti~ de toutes les exploitations sont g~r~es par des femmes; parfois, par exemple au Congo, cette proportion est de 70 %. Les tAches agricoles des femmes augmentent, tandis que leurs tAches traditionnelles - ~lever les enfants, ramasser Ie bois, aller chercher l'eau et piler la nourl:'iture - restent les m@mes ou augmentent ~galement. De ce fait, il arri,re souvent que la pr~paration des terres. les semailles et Ie sarclage soient retard~s, ce qui fait baisser Ie rendement. 4.63 Les r~gimes fonciers africains qui donnent aux femmes l'usage de terres appartenant A un parent proche ont tendance A disparaltre A mesure que la pression d~mographique rend les terres plus pr~cieuses. Lorsqu'il y a des programmes d'enregistrement et de colonisation des terres, ce sont habituellement les maris qui sont enregistr~s comme seuls propri~taires. Dans la mesure ou elles n'ont pas de titre de propri~t~ et qu'elles n'ont pas non plus de s~curit~ de la jouissance des terres, les femmes ont un acces limit~ au cr~dit, ce qui fait qu'il leur est plus difficile d'acheter des iacteurs de production. 4.64 11 Y a plusieurs fa~ons d'aider les cultivatrices africaines. Lorsqu'il y a un programme d'enregistrement des terres, il faut reconnaltre et prot~ger les droits des femmes en ce qui concerne la part des terres qui leur revient, pendant la vie de leur mari et apres sa mort. Mame lorsqu'il existe encore un systeme de propri~t~ communautaire, il faudrait officialiser les droits des femmes. 11 faudrait aussi all~ger les tAches qui reviennent aux femmes - par exemple, en faisant en sorte qu'il y ait de l'eau et du bois plus pres des habitations. Des fourneaux a bon rendement ~nerg~tique peuvent permettre de r~duire Ie temps consacr~ au ramassage du - 181 - bois. Les systemes de recherche et de vu1garisation agrico1es doivent par ai11eurs ~tre sensib1es aux besoins des femmes. Les cu1tivatrices devraient participer aux exp~riences faites dans 1es exploitations pour mettre A l'~preuve de nouvelles vari~t~s de cultures et de nouvelles techniques, de fa~on que ce11es qui seront fina1ement recommand~es correspondent A peu pres aux besoins des femmes et tiennent compte de leurs limitations. Les femmes ne repr~sentent actue11ement que 20 % environ de ceux qui re~oivent une formation agrico1e et ce chiffre devrait ~tre plus proche de 50 %, comme i1 l'est en Asie. 11 faudrait vei11er A ce que 1es agents de vu1garisation soient conscients du rOle, des besoins et des prob1emes des femmes et i1s devraient avoir pour contacts parmi 1es cu1tivateurs une proportion de femmes correspondant A ce11e des femmes chefs d'exp10itation. Dans de nombreuses r~gions du Kenya, 1es femmes constituent d~jA 1a moiti~ de tous 1es contacts des agents de vu1garisation, dont beaucoup disent que 1es femmes sont plus int~ress~es et plus engag~es que 1es hommes. La constitution de groupes f~minins doit aussi ~tre encouragee. Ceux-ci pourraient a10rs ~tre uti1is~s, par exemp1e, non seu1ement comme contacts pour 1es agents de vu1garisation, mais aussi comme interm~diaires pour l'octroi du cr~dit necessaire A l'achat de facteurs de production. Enfin, i1 convient d'intensifier l'enseignement dispense aux femmes. On a pu constater en effet que 1es cu1tivateurs qui ont un plus haut niveau d'instruction obtiennent de bien mei11eurs resu1tats des techniques nouvelles. Red~finir 1es r~gimes fonciers 4.65 Les differentes formes de r~gime foncier en Afrique varient entre deux extr~mes: propri~t~ communautaire et propriete individue11e. L'~vo1ution est sans doute 1a suivante. A l'origine, quand i1 y a un surplus de terres, 1es droits sont d~finis en fonction des groupes p1utot que des particu1iers. A l'interieur du groupe, 1es droits de l'individu ou de 1a fami11e reposent sur des traditions et coutumes complexes qui servent A garantir que 1e groupe contr01e l'uti1isation et l'a1i~nation des terres. Pour reduire au minimum 1es risques de conflits entre membres de la societe et garantir 1a survie du groupe, 1es droits de l'individu A l'egard de terres particu1ieres sont transitoires. A mesure que 1a population augmente et que 1es terres deviennent plus rares, on ne peut plus dependre de 10ngues periodes de jachere pour maintenir 1a fecondite du sol et le caractere temporaire des droits d'occupation n'incite pas les individus A amender 1a terre. Des techniques de restauration de la fecondite, qui exigent un investissement de capitaux et de travail, doivent ~tre adoptees et i1 faut donc A cette fin que les cultivateurs soient incites a changer leurs fa~ons de faire. Un important moyen d'incitation est 1e droit permanent de cu1tiver la terre et de la 1eguer ou de la vendre. La securite de ce droit de propriete est importante aussi pour 1a mise en place de systemes de credit rural; la terre constitue en effet une garantie attrayante. 4.66 Comme de nombreux pays (et de nombreuses regions) en sont a des stades differents de cette evolution, les regimes fonciers sont varies et changeants en Afrique. La modernisation de 1 'agriculture , combinee avec la pression demographique, rendra necessaire 1'adoption de titres de propriete. Les regimes fonciers traditionnels doivent ~tre codifies. On pourrait aussi prevoir des titres de propriete collective. Dans la p1upart - 182 - des pays d'Afrique, il faudra plus d'une dizaine d'ann~es pour mener A bien un programme d'enregistrement des terres, et il ne faudrait entreprendre ce processus qu'A la demande des int~ress~s. En fixant les droits fonciers par une l~gislation nationale, on ira vraisemblablement A l'encontre des droits coutumiers en vigueur. Des m~canismes judiciaires de r~glement des diff~rends entre propri~taires se r~clamant les uns de droits traditionnels et les autres de droits modernes doi,rent donc @tre mis en place d'urgence. De m~me que dans Ie cas d'autres mesures n~cessaires A la croissance de l'agriculture, l'~l~ment d~terminant de toute politique fonci~re sera la capacit~ administrative n~cessaire pour la g~rer. Le d~fi peut-il ~tre relev~? 4.67 On ne saurait surestimer l'importance que l'am~lioration de la croissance agricole pr~sente pour tous les objectifs de d~veloppement en Afrique, en particulier l'am~lioration de la s~curit~ alimentaire. Pourtant, les obstacles ext~rieurs et int~rieurs qui devront ~tre surmont~s sont ~normes. L'une des contraintes est Ie manque de comp~titivit~ de 1 'Afrique. II existe des d~bouch~s internationaux pour la production africaine - l'objet est de r~cup~rer ces march~s en augmentant la comp~titivit~. A cette fin, les gouvernements devront entreprendre toute la s~rie de mesures d~crites ci-dessus, et surtout celles qui concernent les taux de change, la commercialisation et les techniques. Pour r~aliser l'objectif de croissance de 4 % par an, il faut une augmentation de la productivit~ du travail de l'ordre de 1 A 2 % par an seulement, ~tant donn~ que la main-d'oeuvre elle-m@me est en accroissement. Quant A la productivit~ des terres, elle doit augmenter d'au moins 3 % par an. De nombreux autres pays ont r~alis~ cette hausse de productivit~ dans l'agriculture et sont devenus comp~titifs sur les marches mondiaux. 4.68 11 existe d~jA un march~ int~rieur pour les produits alimentaires, dont la demande est en partie satisfaite A l'aide d'importations. Ce march~ va se d~velopper sous l'effet de l'accroissement demographique, de 1 'industrialisation, de l'urbanisation et des programmes d'amelioration de la s~Gurit~ alimentaire. Par cons~quent, pour peu que les politiques appropri~es soient adopt~es, il y aura un marche int~rieur et ext~rieur suffisant pour absorber l'augmentation de 4 % envisag~e pour 1a production agricole. L'Afrique ne peut se permettre l'immobi1isme - e11e doit rechercher activement des debouch~s dans le monde entier. L'e1imination des obstacles s,opposant dans la r~gion au commerce de produits alimentaires serait un progr~s important A cette fin. 4.69 Les faiblesses institutionnelles de l'Afrique et la fragilite et la deterioration de son environnement physique sont des probl~mes qui sont difficiles A r~soudre. Mais si l'on y parvient, la plupart des pays de l'Afrique subsaharienne pourront atteindre Ie taux de 4 % pr~vu pour la croissance de l'agriculture. Plusieurs pays ont soutenu ce taux pendant des periodes assez longues entre 1965 et 1987 - Kenya, Malawi, Botswana, COte d'Ivoire, Cameroun, Maurice et Rwanda (voir encadr~ 4.6). Or, A I' exc,eption de la COte d' Ivoire et du Cameroun, ce sont des pays dans lesquels les conditions naturelles n'~taient pas particuli~rement favorables. En fait, au moment de l'ind~pendance, des pays comme le Rwand,a, 1e Malawi et le Botswana ~taient consid~r~s comme n' ayant gu~re de potentiel. A l'inverse, peu d'observateurs auraient pens~ qu'au Ghana, au - 183 - ZaYre, en Ouganda, en Zambie et au Soudan, Ie secteur agricole allait ~chouer. Dans les quatre pays les plus importants (Nig~ria, ZaYre, Soudan et Ethiopie), ayant ensemble (en 1986) 47 % de la population de l'Afrique subsaharienne, la production agricole augmente de 1,5 % par an depuis une vingtaine d'annees, ce qui se traduit par une diminution de la production par habitant. Or, ces pays (8 l'exception peut-@tre de l'Ethiopie) ont un potentiel agronomique meilleur que celui de la plupart des pays qui ont r~ussi. 4.70 8i Ie Rwanda, Ie Malawi et Ie Botswana ont pu soutenir pendant un certain temps un taux de croissance de 4 %, il faut en conclure que ce sont seulement les faiblesses de leurs politiques et de leurs programmes qui emp@chent certains pays tels que Ie Nig~ria. Ie ZaYre, Ie Soudan, la Zambie et la Tanzanie de faire de m@me. Si l'on compare ceux qui ont Ie mieux r~ussi avec ceux qui ont Ie moins bien reussi, on constate que, dans presque tous les cas, les premiers ont appliqu~ des politiques visant 8 encourager Ie secteur priv~, l'am~lioration des techniques, l'infrastructure rurale, l'enseignement agricole et, dans certains cas, la r~forme agraire. Or, ce sont 18 les politiques propos~es dans Ie pr~sent chapitre. La politique agricole suivie r~cemment au Ghana, en Guinee et au Zimbabwe a ~volu~ elle aussi dans la m@me direction et les resultats ont ete positifs (voir encadre 4.7). 4.71 Le succ~s ne sera pas universel. Dans les pays qui ont un faible potentiel agricole, par exemple dans Ie Sahel, l'augmentation des revenus viendra essentiellement de l'emploi temporaire, saisonnier ou plus permanent de leurs nationaux dans l'agriculture et l'industrie de pays V01S1ns. Ces migrations peuvent avoir des effets mutuellement avantageux (voir chapitre 7). En outre, il y aura des pays qui n'adopteront pas les reformes necessaires. Les projections de la croissance agricole dans l'Afrique subsaharienne faites par diverses organisations sont inferieures 8 4 %. La FAO, par exemple, predit un taux de 3,5 %; or, un taux de 3 % ne ferait que suivre l'accroissement demographique. Le nombre de ceux qui sont mal nourris - une centaine de millions de personnes - augmenterait au lieu de diminuer, 8 moins que l'on n'accroisse considerablement l'aide alimentaire. L'agriculture ne produirait pas de surplus economique qui puisse contribuer au developpement de l'industrie et des secteurs sociaux. 4.72 En resume, les elements principaux d'un plan d'action visant 8 accelerer la croissance agricole sont les suivants : Un r51e plus grand doit etre donne au secteur prive, y compris aux cooperatives et aux organisations communautaires. La commercialisation des produits agricoles doit @tre libre. Les prix doivent etre fonction de l'offre et de la demande, de fa90n 8 regulariser et stimuler la production. L'investissement prive doit etre encourage dans les activites de production et de transformation des produits agricoles et dans la fourniture de facteurs de production, et non pas limit~ par des reglementations et des contr51es administratifs excessifs ou une legislation trop stricte. L'intermediation financi~re dans les zones rurales de la part de banques commerciales et de cooperatives devrait @tre encouragee et non limitee par les reglementations. - 184 - II convient de lancer de nouveaux efforts intensifs en vue de renforcer la gestion de la recherche agricole au niveau national et de la lier A des services nationaux de vulgarisation bien con~us. Un effort de recherche plus intensif, consacr~ a l'Afrique, doit ~tre fait par les centres internationaux de recherche et par des r~seaux multinationaux. A cette fin, une am~lioration de la qualit~ de la formation agricole s'impose. La mise en place et l'entretien de l'infrastructure rurale doivent recevoir davantage d'attention et les utilisateurs doivent participer a son entretien et a son fonctionnement. Des plans d'action nationaux pour la protection de l'environnement doivent ~tre adopt~s, concernant l'~rosion des sols, Ie d~boisement et la gestion des ressources en eau. Les programmes destines A venir en aide aux cultivatrices et aux negociantes doivent recevoir assistance et encouragement de la part du Gouvernement. Les groupements feminins ont besoin d'assistance; ce sont de bons interm~diaires pour la fourniture de services de vulgarisation et de cr~dit dans les zones rurales. Les gouvernements devraient faciliter l'~volution des regimes fonciers, en fournissant les mecanismes juridiques et administratifs necessaires pour assurer une plus grande s~curit~ de la jouissance de la terrE! . 4.73 Cette strategie est tres differente de ce qui est pratiqu~ actuE'llement dans la plupart des pays. Les gouvernements ont encore tends.nce en effet a administrer les prix agricoles, les march~s et l'approvisionnement en facteurs de production; a utiliser des institutions para-~tatiques plut6t que priv~es pour l'octroi de cr~dit et la mise au point de nouvelles cultures; a preconiser de grands ouvrages d'irrigation plutet que des systemes de dimensions r~duites; a prevoir les services de recherche, de vulgarisation et de sante animale dans Ie cadre de diff~rents projets de developpement local financ~s par des donateurs, plut6t que dans 1e cadre de programmes nationaux coordonnes. A quelques exceptions notables pres, ils ne pr~tent guere d'attention A l'environnement, au regiIrle foncier ou a la fa~on de donner aux hommes et aux femmes dans les zones rurales les moyens de prendre en mains leur existence. L'agriculture ne peut devenir un moteur de croissance que si toutes ces pratiques changent. Le facteur determinant n'est pas d'accroltre considerablement ,l'investissement public dans l'agriculture - c'est de rendre Ie secteur agricole plus productif, grace A l'adoption de meilleures politiques, au renforcement des institutions et, surtout, au perfectionnement des ressources humaines. - 185 - Encadre 4.1 L'horticulture reussit bien au Kenya Au Kenya, les terres arables sont devenues peu abondantes compte tenu de la main-d'oeuvre croissante. Dans ces conditions, l'horticulture, qui utilise de fa~on intensive les terres et la main-d'oeuvre, est particulierement appropriee. Elle emploie environ 20 % de la main-d'oeuvre (1,8 million de personnes) pendant la recolte et elle offre aux petits exploitants une source supplementaire de revenus, ainsi qu'une plus grande securite alimentaire. II y a une forte demande, interieure et internationale, pour les produits de l'horticulture; A lui seul, Ie marche interne en plein developpement absorbe 90 % des fruits et legumes produits localement, qui se substituent aux pommes, bananes et raisin importes. Les conditions climatiques favorables du pays permettent de produire des fruits et legumes tropicaux, semi-tropicaux et temperes. La gamme des produits ne cesse de s'accroltre. Plus de 50 varietes de fleurs sont cultivees. Le Kenya, qui n'avait pratiquement pas d'exportations de fleurs il y a 15 ans, est maintenant Ie quatrieme exportateur de fleurs du monde; les roses, les orchidees et les oeillets sont les plus prises. La production de produits horticoles frais pour l'exportation a augmente de fa~on spectaculaire, passant de 1 476 tonnes (d'une valeur equivalant A 434 000 dollars des Etats-Unis) en 1968 A 36 500 tonnes (54,7 millions de dollars) en 1987. lIs viennent au troisieme rang des exportations agricoles pour la production de devises. lIs sont expedies vers une trentaine de pays, Ie marche Ie plus important etant Ie Royaume-Uni qui absorbe plus de 40 %. Les pays du Moyen-Orient deviennent eux aussi un marche de plus en plus important. L'expansion de l'horticulture a ete rendue possible par la cooperation entre les entrepreneurs locaux, les investisseurs etrangers et Ie Gouvernement, facilitee par l'Autorite de developpement horticole (Horticultural Crops Development Authority) (HCDA) creee en 1967. La HCDA est une institution para-etatique qui vend certains des produits cultives par les petits exploitants. Elle a Mis au point, avec Ie Centre du commerce international, un systeme d'information sur les marches, delivre des licences aux exportateurs horticoles, cree des stations d'emballage, participe A la repartition de la capacite de transport aerien et contribue A standardiser les emballages. Le Ministere de l'agriculture, avec l'aide de la HCDA, fournit les services de vulgarisation et les conseils de commercialisation dont Ie secteur a besoin. II contrOle aussi la qualite des produits de fa~on A maintenir des normes internationales. L'Institut de recherche agricole du Kenya, qui releve du Ministere des sciences, de la recherche et de la technique, experimente de nouvelles varietes et supervise la vente de plants. Le secteur prive et la HCDA se font librement concurrence dans les domaines de la recolte, des transports, de la vente et de la fixation des prix. C'est Ie secteur prive qui est la source principale de financement. Les coOts de commercialisation sont relativement modestes parce que de nombreux exportateurs, surtout les societes etrangeres, ant d'etroites relations avec les marches exterieurs. Une assistance bilaterale et des investissements etrangers prives provenant de plusieurs pays ant permis de - 186 - financer 1a recherche et 1a production hortico1es, 1a fonnation, l'exp~rimentation, 1a gestion de l'eau et l'assistance technique. Le succes de 1a production hortico1e au Kenya est riche en enseignements pour d'autres pays d'Afrique. Le Gouvernement, par l'intenn~diaire de 1a HCDA, a servi de faci1itateur et de coordinateur, mais i1 n'a pas mis en place une lourde bureaucratie. II n'est pas intervenu dans Ie jeu des forces du march~, mais s'en est remis aux incitations priv~es. - 187 - Encadre 4.2 Cooperatives d'epargne et de credit au Cameroun Les cooperatives de credit (CC) au Cameroun sont un exemple remarquable d'institutions financieres rurales efficaces. Elles s'inspirent d'associations non formelles d'epargne et de pr~t (tontines ou njangis) , qui ont, dans de nombreuses regions du Cameroun, une longue tradition datant d'avant la monetisation. Ces associations encouragent leurs membres a epargner regulierement et les obligent a rembourser leurs emprunts par des versements reguliers. Les cooperatives de credit ont trans forme en institutions permanentes ces arrangements temporaires a court terme. Les premieres de ces cooperatives ont ete constituees en 1963 dans Ie nord-ouest, region OU les tontines etaient chose courante. Ensuite, elles se sont propagees progressivement dans des regions voisines et on prevoit qu'elles se repandront dans tout Ie pays. Les CC repondent surtout aux besoins des personnes a faible revenu dans les zones urbaines et les zones rurales. Les familIes rurales ont besoin d'un endroit sUr pour deposer leurs economies. Les CC offrent au moins Ie m~me degre de securite que les tontines, un choix bien superieur de formules d'epargne et une plus grande facilite de retrait en cas de besoin. Alors que Ie secteur bancaire officiel au Cameroun traverse une periode de crise, les CC sont florissantes : Ie taux de croissance de l'epargne a ete en moyenne d'environ 25 % entre 1982 et 1987 et, a la fin de 1987, 231 cooperatives de credit, ayant environ 68 000 membres, avaient 33 millions de depOts en equivalents-dollars et 24 millions de pr~ts. M~me si de nombreux membres utilisent les CC exclusivement pour l'epargne, celles-ci illustrent l'importance de l'epargne pour les operations de credit. En effet, il est plus facile a un organisme de credit d'evaluer la capacite de remboursement d'un emprunteur potentiel s'il connalt les habitudes d'epargne de celui-ci. Les CC, dont les fonds destines aux pr~ts de retrocession proviennent exclusivement de l'epargne de leurs membres, ont ainsi tendance a faire preuve de plus de prudence que les institutions qui financent leurs operations de pr~t a l'aide de ressources exterieures. Le mouvement des cooperatives de credit a une strategie a long terme pour mettre en place des institutions solides. En vue de promouvoir la qualite de ces institutions, la Ligue camerounaise des cooperatives de credit (CAMCCUL) a ete creee en 1968 en tant qU'organisation faltiere, afin de fournir a ses membres des services d'appui (services de comptabilite et de gestion, unite centrale de financement, formation, et services d'audit et d'assurance). Avant d'~tre immatriculee, une nouvelle CC fonctionne provisoirement comme un club d'epargne n'ayant pas Ie statut de cooperative. Une CC etablie qui ne repond pas aux normes professionnelles fixees perd son statut de cooperative et risque d'~tre fermee. Les CC et la CAMCCUL sont de veritables cooperatives, creees et contrOlees par les membres et leurs representants. Bien que les CC soient des cooperatives officielles enregistrees aupres de l'Etat, Ie Gouvernement n'intervient pas dans leur fonctionnement. En fait, les cooperatives affiliees contrOlent et supervisent les operations et les finances de la CAMCCUL par l'intermediaire de leur - 188 - conseil d'administration et de leur comite de supervision, qui sont elus par les membres et responsables aupr~s d'eux. Selon leurs dimensions, les CC sont gerees par des cadres soit benevoles soit remuneres. Les directeurs et administrateurs de la CAMCCUL, qui sont remuneres, sont des professionnels de la banque et des cooperatives, et des ressources considerables sont consacrees A la formation du personnel. Le succ~s de ces cooperatives tient sans doute A ce qu'eIIes ont adapte une institution traditionnelle A des notions economiques modernes. Elles sont responsables aupres de leurs membres et repondent aux besoins de ceux-ci. Au fil des ans, Ie mouvement cooperatif a maintenu son autonomie et son caract~re prive exceptionnel est attrayant pour ses nombreux actionnaires. - 189 - Encadr~ 4.3 Insectes contre insectes Le manioc est l'aliment de base de plus de 200 millions de personnes dans plus de 35 pays d'Afrique, ce qui donne une id~e de son importance en cas de r~coltes mauvaises ou catastrophiques. 11 y a quelques ann~es, les journaux titraient : "Un puceron d~vore le coeur de l'Afrique" - il s'agissait de l'aleurode du manioc identifi~ pour la premi~re fois au ZaYre en 1973. En m~me temps qu'une vari~t~ d'acariens du manioc (signal~e pour la premi~re fois en Ouganda en 1971), l'aleurode s'est propag~ rapidement le long d'une large bande allant du Mozambique jusqu'au S~n~gal et en Guin~e-Bissau, et passant par le ZaYre, la R~publique centrafricaine et la cOte de l'Afrique de l'Ouest. Dans les cas d'infestation grave, l'un ou l'autre de ces insectes peut r~duire le rendement de 80 %. Les pertes ~conomiques sont ~valu~es A pr~s de 2 milliards de dollars par an; certains cultivateurs ont abandonn~ la culture du manioc. Aujourd'hui, toutefois, grAce a l'Institut international d'agriculture tropicale (IITA) a Ibadan (Nig~ria), un programme r~ussi de contrOle biologique a commenc~ a renverser cette tendance. L'histoire du Programme panafricain de lutte biologique contre l'aleurode est un mod~le de pers~v~rance remarquable, de coop~ration r~gionale et internationale et de succ~s technique et ~conomique. Le rapport coQts-avantages du programme est estim~ au bas mot A 150 1. Ce programme m~rite une attention particuli~re pour plusieurs raisons 11 utilise une m~thode non chimique de lutte contre les insectes, qui n'est pas dangereuse pour l'environnement et qui ne gr~ve pas les ressources en devises; 11 offre une solution permanente et autonome face a un probl~me agricole majeur; 11 profl~e essentiellement aux cultivateurs de subsistance; C'est un programme national b~n~ficiant d'apports ext~rieurs A la r~gion, sous forme d'assistance technique et de formation; En temps, c'est une bonne illustration des avantages de la m~me coop~ration r~gionale (par exemple, assistance de l'OUA pour faciliter les vols d'un pays A l'autre, l'organisation de s~minaires r~gionaux et les ~changes d'informations). Ce programme a ~t~ cr~~ A l'issue d'un s~minaire international parrain~ par l'IITA et le Gouvernement zalrois en juin 1977. Parce que le manioc est une culture de faible valeur cultiv~e essentiellement par des agriculteurs pauvres dans des terrains tr~s dispers~s et qu'il est difficile de lutter contre les aleurodes avec des pesticides chimiques, une strat~gie double a ~t~ recommand~e : mettre au point des vari~t~s de manioc r~sistant aux insectes et lancer un programme de controle biologique. L'IITA a relev~ une liste de pr~s de 30 esp~ces de pr~dateurs et de parasites, la plus int~ressante semblant ~tre une minuscule gu~pe parasite - 190 - (Epidinocarsis lopezi). Elle est devenue l'~toile du programme biologique Ie plus important et Ie plus r~ussi du monde. Dans certaines conditions ~cologiques, elle se multiplie rapidement et se disperse. En 1985, apr~s quatre ann~es pendant lesquelles on a lAch~ ces gu~pes, leur pr~sence a ~t~ confirm~e dans 11 pays. II y a tout lieu de penser que ce parasite peut s'~tablir dans toute la bande de culture du manioc. Toutefois, la situation est trop urgente pour permettre cette approche passive. De nombreux autres pays voudraient obtenir une aide A la formation et une assistance technique pour mettre en place des programmes nationaux. Faute du personnel n~cessaire et de l'insuffisance de la production dans les services cent raux du programme au si~ge de l'IITA A Ibadan, cette demande ne peut pas ~tre satisfaite enti~rement, mais de nouvelles installations ont ~t~ construites A Cotonou (B~nin). Ce dont on a Ie plus besoin est de techniciens qualifi~s pour s'occuper des op~rations de reproduction du parasite et diriger et appliquer les programmes nationaux. De nombreux donateurs ont appuy~ Ie programme de base, mais Ie manque de fonds est encore chronique, dn en partie. paradoxalement. au succ~s du programme qui donne A tort l'impression que Ie probl~me d'infestation du manioc en Afrique a ~t~ r~gl~. En fait, il y a encore beaucoup A faire pour propager les parasites dans la r~gion touch~e et pour appuyer un programme parall~le dans Ie cadre duquel on cherche A mettre au point une formule de lutte biologique contre l'acarien du manioc. - 191 - Encadr~ 4.4 Conservation du sol et de l'eau au Burkina Faso Un projet de recherche et de vulgarisation agricole {"Projet agro-forestier (PAF)"), lanc~ en 1979 dans Ie Yatenga au Burkina Faso, visait a r~duire l'~rosion du sol et Ie ruissellement de l'eau. II utilisait un syst~me simple, bon march~ et a forte intensit~ de main-d'oeuvre consistant a creuser des cuvettes dans la terre pour capter l'eau de pluie pour les arbres. Des digues de pierres, construites pour ralentir Ie ruissellement de l'eau de pluie des terrasses, se sont av~rees utiles pour r~duire l'~rosion et garder l'humidit~ dans Ie sol. Le Yatenga se trouve dans la partie du Sahel qui jouxte l'extr~mit~ m~ridionale du Sahara. C'est une r~gion s~che, avec des pr~cipitations annuelles de 350 a 650 millim~tres. et sujette a la s~cheresse. Les techniques agricoles traditionnelles causent une ~rosion consid~rable et d~pendent de longues p~riodes de jach~re pour r~tablir la productivit~ du sol. Or, un fort accroissement d~mographique a forc~ les cultivateurs a raccourcir, voire ~liminer. les p~riodes de jachere et les m~thodes traditionnelles de contrOle de l'~rosion du sol se sont r~v~l~es insuffisantes. Des tentatives faites dans Ie pass~ par Ie Gouvernement et par des organisations internationales pour am~liorer la situation se sont dans l'ensemble sold~es par des ~checs. Pour enrayer la d~gradation de l'environnement, Ie PAF, financ~ et g~r~ par OXFAM, a persuad~ huit coop~ratives de village de preter des terres pour faire une exp~rience. Sceptiques au d~but, les participants sont devenus plus int~ress~s lorsque d'importantes quantit~s d'eau se sont accumul~es dans les minuscules bassins de captage. Plusieurs ont d~cid~ de planter du riz pluvial dans ces bassins et la culture du sorgho a ~t~ introduite. Ces cultures ont donn~ de bons r~sultats et les cultivateurs ont commenc~ ales utiliser sur leurs propres terres, d~laissant les parcelles communes. Lorsque Ie personnel du projet a constat~ que 1es cu1tivateurs ~taient plus int~ress~s par ce genre de cultures que par les arbres, il a chang~ de m~thode. II a ~galement tenu compte du fait que les cultivateurs pr~f~raient creuser des bassins rectangulaires qui demandaient moins de travail et il a commenc~ a utiliser une m~thode analogue a une technique traditionnelle qui avait ~t~ abandonnee. Pour rendre plus efficace la collecte de l'eau, Ie PAF a mis au point un dispositif bon march~ et assez ing~nieux : un niveau fait d'un tube plein d'eau, qui permet de d~terminer avec precision les courbes de relief sur les pentes peu accus~es du Yatenga. Cette technique est maintenant utilis~e par des milliers de cultivateurs. Le PAF a constate qu'il pouvait former des villageois en deux ou trois jours. Ainsi, bien qu'il ait moins de six personnes sur place, i1 a enregistre des resultats impressionnants en mati~re de formation. Aujourd'hui, plus de 60 000 hectares, s'~tendant vers Ie nord, sont touches par les mesures de conservation du sol. Les rendements se sont am~liores parce que les digues retiennent l'eau de pluie dans 1es champs, ce qui accrolt l'absorption de l'eau dans Ie sol et donc son absorption par les cultures. Les engrais - 192 - (habituellement du fumier et des mati~res organiques) ~pandus dans les champs risquent moins d'~tre emport~s par l'eau, si bien que Ie sol se trouvant directement derri~re les digues est plus fertile. Au bout de la premi~re ann~e, la terre accumul~e derri~re ces digues atteignait parfois 20 centim~tres. Les hausses de rendement peuvent @tre spectaculaires la premi~re ann~e (de 15 A 30 %), mais Ie syst~me doit @tre bien g~r~, et il faut continuer A engraisser les terres pour que Ie rendement se maintienne. Ce projet a r~ussi pour plusieurs raisons La technologie est simple. Les cultivateurs de la r~gion connaissaient les principes g~n~raux de la conservation du sol et de l'eau, si bien qu'ils pouvaient comprendre les techniques et fa ire eux-m@mes Ie travail de base et l'entretien; Le programme de vulgarisation est simple. Un petit nombre d'agents peuvent aider de nombreux cultivateurs, si bien qu'il n'est pas n~cessaire de mettre en place un r~seau complexe; Les avantages sont ~vidents et les coOts sont tr~s restreints. Les cultivateurs n'ont pas A se d~placert A faire pousser des cultures qu'ils connaissent mal, A emprunter de l'argent pour acheter une nouvelle technologie ou A faire quoi que ce soit de tr~s diff~rent de ce dont ils avaient l'habitude. Avec un investissement modeste de temps et d'effort, ils peuvent accroltre la production et r~duire les risques. Le projet peut @tre imit~ A peu de frais. Les techniques mises au point sont maintenant diffus~es un peu partout par d'autres ONG et par les services nationaux de vulgarisation. Cela permet d'esp~rer qu'une superficie beaucoup plus importante pourra ~tre remise en ~tat ou protegee ou cours des 10 annees A venir. - 193 - Encadr~ 4.5 Le rOle des moyens de transport interm~diaires Dans les zones rurales de 1 'Afrique , il est rare que l'on trouve des moyens de transport A louer, et bien souvent, les services de transport automobile sur routes ne fonctionnent que les jours d'ouverture du march~ le plus proche - une fois par semaine dans certains endroits. 11 en r~sulte un paradoxe : dans les villages situ~s tr~s pr~s des villes. les produits agricoles locaux sont vendus A bas prix et ne trouvent quand mame que peu d'acheteurs, tandis qu'A une dizaine de kilom~tres de lAo dans une ville, les produits frais sont chers et difficiles A trouver. Cela s'explique par le fait que peu de personnes dans les campagnes peuvent se permettre un moyen de transport, si bien que la vaste majorit~ des d~placements se font A pied et que les femmes rurales sont charg~es d'assurer la majeure partie des transports. Pour tous ceux qui habitent loin d'un service de transport motoris~, un voyage par bus ou par taxi-brousse oblige quand mame A parcourir un long chemin a pied A partir du village. En raison de ce manque de moyens de transport, les produits agricoles sont, en majeure partie, transportes sur le dos ou sur la tate. Les transports absorbent donc une quantit~ ~norme de temps et d'~nergie dans les m~nages. Par exemple, d'apr~s une enquate r~cente, 1e nombre moyen d'heures consacr~es a cette tAche par m~nage dans les villages allait de 417 heures par personne et par an en Tanzanie A 522 heures au Ghana. En Tanzanie, plus de 70 % des charges ainsi transport~es l'~taient par des femmes. Les moyens intermediaires de transport peuvent r~duire consid~rablement le temps et l'effort consacr~s a porter des charges sur le dos ou sur la tate, dans la mesure OU ils sont plus rapides et permettent de transporter davantage. Des etudes faites dans le nord du Ghana ont montr~ qu'une remorque tiree par bicyclette peut au moins quintupler la capacite d'une personne, chaque cycliste pouvant transporter jusqu'a 200 kilogrammes. Une petite voiture A bras, con~ue a cette fin, transporte jusqu'A 150 kilogrammes, six fois le poids qui peut atre transporte sur la tate, et diminue consid~rablement le risque de blessure au cou ou a la colonne vert~brale. Le Centre de conseil technologique du Ghana encourage maintenant la production et l'utilisation de ces remorques et de ces voitures A bras, qui ont toutes les deux ~te adapt~es aux conditions locales. Le projet pr~voit des ouvertures de cr~dit et une assistance technique de fa~on que des entreprises locales puis sent commencer a fabriquer, assembler et entretenir ces v~hicules. - 194 - Encadr~ 4.6 Le Rwanda: Exemple d'adaptation r~ussie Pa~i les quelques pays qui ont r~ussi A faire augmenter la production agricole plus rapidement que la population, Ie Rwanda est exceptionnel. II y est en effet parvenu sans provoquer les injustices qui ont parfois accompagn~ Ie d~veloppement dans d'autres pays, sans disposer de terres abondantes, comme en COte d'Ivoire par exemple, et, jusqu'A maintenant, en grande partie sans utiliser de produits chimiques ou de vari~t~s am~lior~es. La production alimentaire au Rwanda a augment~ de 4,7 % par an entre 1966 et 1982, tandis que la population augmentait a un rythme de 3,4 %. Le Rwanda a ~vit~ de favoriser les villes comme cela se fait si souvent en Afrique. Le Gouvernement est rest~ attentif aux int~rats de la majorit~ agricole en d~te~inant les politiques de prix, les taux de change, les priorit~s fiscales et la mise en place d'institutions rurales efficaces. Ce sont les forces du march~ qui ont fix~ Ie niveau des prix des produits al~mentaires, qui ont augment~ de 10 A 17 % par an pendant les ann~es 1970; les prix indicatifs fix~s par Ie Gouvernement A un niveau relativement ~lev~ n'ont pas ~t~ appliqu~s. GrAce a un taux de change r~aliste et a l'absence d'impOts excessifs, les producteurs du principal produit d'exportation - Ie caf~ - ont pu recevoir une forte proportion du prix fronti~re. C'~tait une entreprise para-~tatique qui ~tait charg~e de s~lectionner et de traiter Ie caf~, mais la commercialisation ~tait laiss~e a des n~gociants priv~s. Dans cet environnement propice, la croissance de la production a r~sult~ essentiellement de changements apport~s spontan~ment par les cultivateurs. La raison principale de cette croissance est que la superficie cultiv~e a augment~, a raison de 3,7 % par an en moyenne entre 1966 et 1983. Une partie des terres nouvelles se trouvaient dans des r~gions de savane plus arides, au potentiel moindre que les hauteurs volcaniques. De nombreuses terres ont ~t~ r~cup~r~es par drain~ge dans des mar~cages et des vall~es fertiles. Dans de nombreuses r~gions des hauts plateaux, il y a maintenant trois r~coltes par an, une pendant chacune des deux elaisons des pluies et la troisieme pendant la saison seche. La structure de la production a elle aussi chang~. La production de bananes, cultiv~es essentiellement pour la production de bi~re, a diminu~, passant de 62 % de la production totale en volume en 1966 a 48 % en 1984. La part des c~r~ales et des l~gumineuses a elle aussi diminu~, passant de 16 A 13 %, tandis que celIe des tubercules, qui pe~ettent de produire plus de calories par hectare, a augment~, passant de 22 A 39 % de la production. A meswre que les dimensions des exploitations s'amenuisaient et que les jach~t"es et la production de fourrage diminuaient, Ie b~tai1 a peu A peu ~t~ remplac~ par des animaux plus petits; les bovins ont diminu~ de 19 % entre 1970 et 1981 tandis que les petits an!maux ont augment~ de plus de 80 %. II est aujourd'hui de plus en plus difficile au Rwanda de d~velopper encore la production. Pratiquement toutes les terres arables sont d~ja cultiv~es, a l'exception des valUes de deux fleuves importants qui pourra.ient ~tre rendues exploitables par d'on~reux ouvrages de drainage. - 195 - La population augmente au rythme de 3,7 % par an. Les taux de fecondite et de natalite sont les plus eleves de l'Afrique et en 1983, Ie taux d'utilisation de contraceptifs modernes etait inferieur A 1 %. En 1948, les dimensions moyennes des exploitations n'etaient que de 1,2 hectare et, comme les terres sont subdivisees entre les heritiers mAles, les exploitations diminuent A chaque generation. Deja en 1984, plus d'un quart de toutes les fermes etaient inferieures A un demi-hectare. La methode de jachere a pratiquement disparu. Les cultivateurs ont depuis longtemps l'habitude d'utiliser des engrais organiques et des paillis, mais Ie fumier est de moins en moins abondant A mesure que les exploitations deviennent trop petites pour produire du fourrage pour Ie betail, et il n'y a plus suffisamment de vegetation pour les paillis. De ce fait, les rendements de certaines cultures de hautes terres - bananes, haricots, cafe - sont en train de baisser. Les solutions qui ont donne de bons resultats dans Ie passe ne pourront plus servir desormais. II faut enrayer l'accroissement demographique. Les strategies agricoles doivent s'attacher desormais A favoriser la culture intensive et A faire augmenter les rendements, et non plus A etendre les surfaces cultivables ou A passer de plu.; en plus A la culture de tubercules A faible valeur proteique. Le changement a commence. Le programme rwandais de conservation du sol et des for~ts est devenu l'un des plus efficaces de l'Afrique. C'etaient les autorites coloniales belges qui avaient lance l'effort de conservation du sol. En 1960, plus de 750 000 hectares etaient couverts de fosses anti-erosion, mais au cours de la decennie suivante, la plupart des ouvrages de conservation ont ete abandonnes ou detruits. Depuis 1973, la priorite est de nouveau donnee a la conservation des ressources, mais les efforts ne sont devenus vraiment intenses qu'a partir de 1980. A cette date, 15 % seulement des exploitations etaient protegees par des terrasses, des fosses d'infiltration ou des bandes de graminees fourrageres a racines profondes, Ie long des courbes de niveau. En 1985, 63 % des exploitations etaient protegees et l'objectif est d'atteindre 100 % a la fin de 1989. De nouvelles varietes (de pommes de terre par exemple) et l'utilisation de produits chimiques commencent a se repandre. De nouvelles varietes de mals et de haricots ont ete mises au point. L'experimentation d'engrais a donne des resultats mitiges, mais l'utilisation d'engrais chimiques est economiquement rentable pour la culture de pommes de terre, de patates douces et de riz. Toutefois, pour que les nouvelles varietes et techniques puissent se repandre, Ie Rwanda a besoin de mettre en place un reseau de vulgarisation efficace et adapte. - 196 - Encadre 4.7 Croissance de la production de mals dans les petites exploitations au Zimbabwe Les tendances recentes de la production de cereales au Zimbabwe sont tres differentes des tendances pour l'ensemble de l'Afrique. La production de cereales par habitant a augmente de 80 % et celIe de mals a double entre 1959 et 1985. La majeure partie de l'augmentation de la production de mals en 1979 est venue des petits exploitants. Au cours des annees 1970, la productivite etait faible, les rendements n'atteignaient en moyenne qu'un septieme de ceux des exploitations commerciales et les ventes de mals representaient moins de 5 % du total des ventes sur les marches du pays. La guerre, Ie manque de facteurs de production - en particulier semences et engrais - et Ie faible niveau des prix etaient autant d'obstacles A la production. Apres 1979, par contre, la production de mals dans les petites exploitations a triple. Les superficies cultivees ont augmente de plus de 90 %, les rendements ont double et en 1985, les petits exploitants produisaient plus de la moitie du mals produit dans Ie pays. Soixante pour cent de cette producti()n supplementaire pouvait ~tre vendue et le mals produit par les petits exploitants representait un tiers de tout Ie mals livre A l'Office de vente des cereales (OVC). Gette augmentation de la production entre 1979 et 1985 a ete facilitee par l'expansion rap ide des mecanismes d'approvisionnement en facteurs de production et de ventes des produits, par Ie meilleur acces au credit disponible et par la hausse des prix A la production. Entre 1979 et 1981, Ie Gouvernement a augmente de 80 % Ie prix reel A la production et il a laisse Ie rapport entre prix du mals A la production et prix des engrais augmenter de 50 %. Le prix reel A la production a diminue apres 1981, mais ce rapport n'a pas baisse autant. La Societe gouvernementale de credit agricole a aussi ameliore l'acces des petits exploitants au credit et 10 % d'entre eux environ ont re~u des pr~ts en 1985. Des techniques ameliorees ont ete introduites et rapidement absorbees. Des varietes hybrides ont ete mises au point pour les zones A fort potentiel et celles A faible potentiel et, entre 1979 et 1985, la fourniture de semences de varietes hybrides aux petits exploitants a quintuple. Des essais d'engrais ont ete faits qui ont permis de formuler des recommandations adaptees aux conditions agro-ecologiques des petites exploitations; en 1986, celles-ci avaient augmente de 400 % leurs achats d'engrais. La distribution de facteurs de production s'est amelioree lorsque les commer~ants ont commence A stocker des engrais, des semences, des insecticides et du materiel agricole. Les fabricants d'engrais et les societes agro-chimiques ont commence A promouvoir leurs produits en vendant dans les villages et en organisant des demonstrations. L'acces aux marches est devenu plus facile lorsque l'Office de vente des cereales a augmente Ie nombre de points de livraison. En m~me temps, des investisseurs prives ont mis en place des structures d'achats autorisees par l'OVC, ainsi que des operations de transport entre les exploitations et les marches. - 197 - L'exemple du Zimbabwe montre que, si les techniques sont per~ues comme ~tant profitables et qu'!l existe des services agricoles d'appui, les petits exploitants augmenteront la production. La production de mals a augment~ parce que les techniques disponibles ont rendu Ie mals plus rentable que la plupart des autres cultures. Les quantit~s produites pour Ie march~ se sont d~velopp~es lorsque les prix A la production ont augment~ et que l'acces aux march~s est devenu plus facile. La structure du march~ permettait aux investisseurs priv~s de venir compl~ter les investissements du Gouvernement. I. - 198 - CHAPITRE 5 Industrie, mines et ~nergie Industrie : Comment r~pondre aux marches Le d~fi de l'industrialisation 5.1 En Afrique, la croissance industrie11e sera fortement tributaire du relevement ~ventuel de la production et des revenus agricoles. Si les revenus agricoles s'am~liorent, on devrait voir augmenter la demande de produits manufactur~s, tandis que l'accessibilit~ de biens de consommation a port~e de leur bourse devrait encourager les agriculteurs a accroitre leur production. L'industrie peut assurer la transformation de la production agricole exc~dentaire et fournir aux agriculteurs les intrants dont ils ont besoin pour faire progresser la productivit~. L'~pargne obtenue grAce a l'agriculture peut servir a financer une industrie qui emploie la main-d'oeuvre liberee par l'am~lioration de la productivite agricole. II faut continuer d'exporter des produits agricoles pour pouvoir payer les biens d'importation dont l'industrie a un besoin grandissant alors que l'industrie elle-m~me gagnera davant age de devises. 5.2 Depuis que les pays africains sont devenus ind~pendants, leur population active a acquis des competences techniques et une experience industrielle - a titre d'ouvriers, de cadres et d'entrepreneurs. Les entreprises indigenes vont depuis Ie petit artisan du Kenya qui fabrique des cuisinieres avec de la feraille jusqu'a une entreprise du Ghana qui se sert de d~chets de canne a sucre pour fabriquer du papier. Aujourd'hui, les pays africains exportent non seulement des matieres premieres transform~es mais aussi des produits manufactur~s, par exemple des articles d'habillement de Madagascar et des radiateurs automobiles de Tanzanie. II s'agit d'utiliser cette base pour r~aliser la transformation dynamique de la structure industrielle qu'ont envisagee les dirigeants africains dans Ie Plan d'action de Lagos et la D~cennie de developpement industriel de l'Afrique. 5.3 Malgre toutes ces realisations encourageantes, il y a eu des revers. Durant les ann~es 80, Ie secteur industriel de nombreux pays s'est contracte; ce phenomene s'explique en partie par les resultats m~diocres de l'agriculture, par un assujettissement excessif a des intrants importes et par une crise grandissante qui affecte les recettes en devises et les dettes. Trop peu d'entreprises ont utilise judicieusement les moyens 10cauK ou ont su acquerir des competences industrielles. 5.4 Si l'on veut stimuler un esprit d'innovation et de concurrence, il faut faire trois choses : ~largir les marches en augmentant les revenus (et, partant, la demande) agric01es, et ouvrir des marches d'exportations inter-r~gionaux et sur d'autres continents; creer un environnement propice aux investissements industriels en fournissant une infrastructure et des services commerciaux fiables; en ameliorant l'intermediation financierej en encourageant l'emploi ind~pendant et les petites entreprises - 199 - ainsi que des entreprises plus importantes; et en faci1itant 1a concurrence en reduisant 1a paperasserie et en rationa1isant 1a protection (entre pays et a l'interieur des pays); acguerir un potentie1 en renfor9ant l'education, 1a formation, l'apprentissage sur 1e tas, 1es rech~rches, 1e transfert de techno1ogie, Ie partenariat avec des entreprises etrangeres, 1a sous-traitance, l'information et 1es associations commercia1es. Une future strategie 5.5 Apres l'independance, l'industria1isation de l'Afrique a surtout cherche a mettre en place des moyens materiels de production. Conformement a la theorie du developpement qui avait cours a l'epoque, el1e est partie de l'hypothese que 1e manque de capital freinait la croissance. Des po1itiques de remp1acement des importations ont attire des investissements etrangers en protegeant 1es marches. La fisca1ite agrico1e et des emprunts a l'etranger ont aide a financer des investissements publics dans une industrie lourde qui fournissait a un marche etroit des produits onereux. La capacite ainsi instal1ee n'etait pas bien adaptee a la situation locale de l'offre et de 1a demande et il n'est pas possible de maintenir une grande partie des equipements en etat de marche. 5.6 Dans 1a majorite des cas, les industries modernes de fabrication restent modestes : el1es sont demeurees stationnaires entre 1965 et 1987, fournissant environ 10 % du PIB et absorbant 9 % de l'emp1oi. La p1upart des industries restent iso1ees des marches mondiaux, n'adoptent pas de nouvelles technologies et ont des prix de revient eleves par rapport aux industries etrangeres qui travaillent dans les mei11eures conditions. Le protectionnisme a encourage les investissements, mais n'a rien fait pour stimuler 1es innovations qui permettent d'ameliorer 1a productivite ou d'intensifier 1a croissance afin de financer 1es importations dont on a besoin. A l'avenir, i1 faudra que 1a structure industrie11e privi1egie des entreprises concurrentielles, a forte croissance, qui sont liees a l'economie du pays. Pour relancer les investissements en ce sens, il faudra restructurer ou e1iminer 1es entreprises deficitaires et faire de gros efforts pour mobi1iser 1es res sources nationa1es et etrangeres susceptibles d'@tre investies. 5.7 Lors d'une reunion qu'ils ont tenue en mai 1989, les Ministres africains de l'industrie se sont engages a participer, aux cOtes de l'ONUDI et de la CEA, a la preparation d'une nouvelle strategie industrielle pour la Deuxieme decennie du developpement industriel en Afrique. De l'avis general, cette strategie doit s'attaquer a des questions fonctionnelles, par exemple, aux moyens humains, techniques et institutionnels qui sous-tendent Ie developpement, et ne doit pas se borner simplement a creer ou a renover des installations industrielles. 11 est moins dangereux d'assouplir les modalites de transformation industriel1e que d'encourager l'obtention de tel ou tel produit; temoin les diverses usines sous-uti1isees qui, un peu partout en Afrique, produisent a grand prix de l'acier ou des engrais, et montent des automobiles. 5.8 Les nouveaux pays industriels (NPI) qui se sont le mieux tires d'affaire ont protege leurs marches locaux mais les ont aussi ouverts peu a - 200 - peu a la concurrence, ont encourag~ les exportations et ont identifi~ les comp~tences et les moyens techniques dont ils avaient besoin pour se doter d'une main-d'oeuvre polyvalente. Pour atteindre cet objectif, l'Afrique devra abandonner Ie principe d'une planification centralis~e pour adopter une attitude orient~e vers Ie march~, remplacer la r~glementation par la concurrence et cesser d'essayer en vain de transplanter des technologies pour acqu~rir syst~matiquement des moyens qui lui soient propres. 5.9 Cette strat~gie a pour pierre angulaire l'acquisition progressive des comp~tences dont on a besoin pour utiliser et adapter des techniques nouvelles. En Afrique, la strat~gie industrielle a eu tendance a privil~gier Ie mat~riel (installations et machines) et a n~gliger la formation de la main-d'oeuvre et des cadres pour maltriser des technologies nouvelles. De bonnes relations de travail avec les investisseurs et les hommes de marketing internationaux peuvent aider a combler les lacunes technologiques; pour cela, il faudra des conditions ~conomiques et politiques stables permettant, avec Ie temps, de cr~er un climat de confiance. 5.10 II faudra laisser chaque ~l~ment du continuum des dimensions de l'indl.lstrie africaine acqu~rir ses propres forces. Malgr~ la n~gligence que lui ont manifest~ les pouvoirs publics, Ie secteur marginal a jou~ un rOle dynamique : il a offert des possibilit~s de gagne-pain et a fourni a bon compte a la population peu fortun~e les produits manufactur~s dont elle avait besoin. Cependant, les petites et moyennes entreprises (PME) sont souvent sous-repr~sent~es (c'est Ie "chalnon manquant" dont il est question au Chapitre 6). Les PME peuvent adapter les techniques aux moyens et aux produits disponibles sur place en fonction des cr~neaux qui apparaissent sur les march~s du pays et de l'~tranger. Elles accumulent aussi l'experience technique, administrative et commerciale dont a besoin la grosse entreprise pour se d~velopper dans de bonnes conditions. Une r~fonne des r~glementations et un soutien institutionnel pourraient aider les progres du secteur marginal, des PME et de la grande industrie. 5.11 Comme l'a montr~ l'exp~rience des NPI, on peut acc~l~rer la croissance si on prend pied sur des march~s d'exportation. On peut ainsi aider l'industrie a se transformer, sous la pression de la concurrence, grace a l'infusion de nouvelles technologies, et permettre a certaines industries de porter leurs horizons au-dela du march~ national. Par c~ntre, des monnaies sur~valu~es et des politiques de remplacement des importations ont rebut~ les investisseurs, qui se sont abstenus de placer leurs capitaux dans des industries d'exportation africaines. Des march~s sous-r~gionaux peuvent jouer un rOle important; ils facilitent Ie passage vers la comp~titivit~ internationale, tout en renfor9ant l'autosuffisance r~gionale. Avec des politiques plus favorables et avec une croissance agric~le d'environ 4 % par an, il devrait ~tre possible de soutenir une croissance industrielle qui atteindrait progressivement une moyenne de 7 % par an dans l'ensemble de 1 'Afrique , et d~passerait ce chiffre dans certains pays. 5.12 Chaque pays doit combiner ces ~l~ments strat~giques en fonction de son propre contexte. Des pays enclav~s agraires a faible revenu comme Ie Burkina Faso, Ie Burundi, Ie Malawi, Ie Mali, l'Ouganda, Ie Rwanda et Ie Tchad vont sans doute mettre en relief les liens entre l'industrie et - 201 - l'agriculture. Des pays qui commencent leur industrialisation chercheront A se donner une base d'~ducation, de formation et d'infrastructure qui leur permettra plus tard de renforcer leur industrie. Des march~s d'exportations non traditionnelles pourraient @tre exploit~s par les pays dont l'industrialisation est plus avanc~e, comme la COte d'Ivoire, Ie Ghana, Ie Kenya, Ie Nig~ria, Ie S~n~gal, la Zambie, Ie ZaIre et Ie Zimbabwe. Situation actuelle du d~veloppement industriel 5.13 Pendant la periode coloniale, l'industrie des fabrications s'occupait surtout de transformer des produits destin~s a l'exportation (c'~tait Ie cas, par exemple, du Cameroun, de la COte d'Ivoire, du Ghana, du Nig~ria, du S~negal); de produire en grandes quantit~s des biens de consommation bon marche, notamment dans les territoires OU il Y avait une grand nombre de colons, comme Ie Kenya et Ie Zimbabwe, mais aussi Ie Ghana, Maurice, Ie Nigeria, Ie Sen~gal et Ie ZaIre; et d'elaborer du petit materiel destine aux mines au ZaIre, en Zambie et dans Ie Zimbabwe. Durant les annees 60, apr~s l'independance, l'existence de barri~res douani~res a conduit des societes commerciales internationales a installer sur place des usines pour produire des biens de consommation; c'est s ce moment-Is que l'expansion a demarre. Durant les annees 70, des investissements directs de l'Etat dans l'industrie lourde ont joue un rOle dominant dans la creation de capacit~ (par exemple en COte d'Ivoire, au Ghana, au Nigeria, en Tanzanie et en Zambie). 5.14 Les premiers resultats ont ete prometteurs. En Afrique subsaharienne, l'industrie des fabrications a vu sa valeur ajoutee augmenter de plus de 8 % par an pendant les annees 60 - soit pr~s du double du taux de croissance du PIB. Les fabrications depassaient Ie PIB de 15 % dans 12 pays (Botswana, Cameroun, COte d'Ivoire, Ghana, Kenya, Madagascar, Maurice, Senegal, Tchad, Togo, Zaire et Zimbabwe) en 1965 et dans six autres pays (Burkina, Ethiopie, Mozambique, Rwanda, Swaziland et Tanzanie) en 1973. La production s'est diversifiee sur le plan du nombre de produits, mais les biens de consommation sont restes dominants. La proportion d'industries de biens interm~diaires est pass~e, durant les annees 70, d'environ 30 % aux alentours de 40 %, grace surtout aux investissements que quelques pays ont effectues dans des raffineries de petrole. Stagnation et non transformation 5.15 Cependant, les annees 70 ont montre que Ie simple remplacement de produits de consommation importes par des produits d'origine nationale n'entralnait ni l'ind~pendance economique ni l'efficacite technique. En effet, les industries de remplacement etaient fortement tributaires d'importations d'intrants, de pieces d~tachees et de mat~riel et elles ont ete vulnerables aux penuries de devises qui se se sont produites quand les cours des produits de base ont fl~chi au moment m@me OU augmentait Ie prix du petrole. Dans les pays africains A faible revenu, la valeur ajoutee des produits manufactures a vu sa croissance tomber A 2 % par an durant la premiere moitie des annees 70 pour devenir negative dans la deuxieme moitie. Dans les pays importateurs de petrole A revenu moyen, elle a diminue de 8 A 4 % par an entre ces deux periodes. Seuls, les exportateurs - 202 - de p~troleont pu soutenir la croissance de leurs industries manufacturi~res pendant les ann~es 70 - A une cadence de 9 % par an. Bien que l'industrie des fabrications ait augment~ de 11 % par an de 1980 A 1986 en Chine et en Inde et de 5 % dans d'autres pays A faible revenu, elle est rest~e pratiquement stationnaire en Afrique subsaharienne et, A hauteur de 10 %, sa part du PIB d~passait A peine son chiffre de 1965. 5.16 La "d~sindustrialisation", c'est-A-dire un recul de la production de produits manufactur~s, est un ph~nom~ne qui a eu lieu dans 10 pays durant les ann~es 70 et dans 11 autres au d~but des ann~es 80. Parmi les pays les plus durement touch~s figurent Ie B~nin, Ie Ghana, Ie Lib~ria, Madagascar, Ie Mozambique, la Tanzanie, Ie Togo et Ie ZaIre. Dans certains pays, l'utilisation de la capacit~ est tomb~e au-dessous de 30 %. La capacit~ industrielle existante pouvait @tre sous-utilis~e pour les raisons suivantes contraction de la demande A la suite de la diminution des revenus r~els et de mesures de stabilisation; gamme de production, conception ou prix de revient peu appropri~s, notamment dans certains investissements publics; manque de devises pour soutenir les industries tributaires des importations; et mauvais entretien et manque de pi~ces d~tach~es, entrainant une d~gradation compl~te de certaines installations. 5.17 Certaines politiques, par exemple une forte protection, de vastes syst~mesde r~glementation et des investissements dirig~s, ont contribu~ A ces probl~mes, auxquels il faut ajouter d'autres probl~mes plus fondamentaux, tels que la faiblesse des liens avec l'~conomie interne, des cofits de production ~lev~s et l'absence d'encouragement A l'am~lioration de la productivit~. Des tentatives faites pour stimuler telle ou telle industrie ont ~chou~ parce que la r~ussite demande beaucoup plus qu'une cat~gorie de produits. Alors que les usines de montage d'automobiles ont toujours fait de mauvaises affaires, la construction de carrosseries de camions sur des chassis import~s a fourni, pendant des d~cennies et sans b~n~fice d'un soutien officiel, des v~hicules qui ont efficacement transport~ des voyageurs et des marchandises. 5.18 Les moyens dont dispose Ie secteur public pour tirer efficacement parti des investissements qu'il conserve exerceront sans aucun doute pendant un certain temps une influence sur l'ensemble du secteur industriel. Selon toutes probabilit~s, qu'ils agissent A titre d'investisseurs directs ou non, les gouvernements continueront A intervenir quand il faudra prendre des d~cisions au sujet d'importants nouveaux investissements industriels. Cependant, de nombreux gouvernements mettent une sourdine A leur rOle de propri~taires afin d'~viter plusieurs ~cueils de la centralisation qui ont compromis les objectifs A long terme de l'industrialisation : - 203 - l'utilisation de criteres politiques, de preference A des criteres economiques, pour orienter Ie choix, l'emplacement et la gestion des investissements; la reglementation et des contrOles des salaires qui ont fait augmenter les conts unitaires et ont mine la competitivite; des conts eleves, pour les utilisateurs d'aval, des produits elabores par des industries de base fortement protegees et peu efficaces; l'elimination des entrepreneurs et des directeurs etrangers avant de disposer de nationaux qualifies pour prendre leur place; et l'exclusion des investissements prives quand l'Etat avait la mainmise sur des monopoles rentables. 5.19 II est possible de conjuguer une strategie de remplacement des importations et des pressions concurrentielles afin d'assurer une production efficace, comme l'ont fait les pas NPI. Jusqu'ici, peu d'entreprises africaines ont ete en mesure de relever suffisamment la productivite pour passer du stade des industries naissantes A celui de concurrents internationaux. Les differences entre les pays africains et les NPI sont en particulier les suivantes : Le marche interieur est de dimensions,relativement reduites, ce qui rend difficile d'encourager la concurrence et d'obtenir des dimensions efficaces pour ce seul marche. La construction de la capacite n'est pas allee de pair avec l'scquisition et l'utilisation de connaissances et de competences, alors que la plupart des NPI ont fait un effort systematique, par l'intermediaire de leurs syst~mes d'education, pour avoir une population qui sache lire, ecrire et compter et pour acquerir des connaissances dans Ie domaine des sciences et de l'ingenierie. La concurrence interne a ete freinee en reglementant les nouveaux investissements, alors que les NPI se sont servis de la concurrence interne et des encouragements A l'exportation pour amener les entreprises A reduire leurs prix de revient si elles voulaient survivre et croitre. Les pays africains se sont bornes A reproduire les produits importes en se servant de techniques et d'un materiel transplantes, sans gu~re se preoccuper d'adapter la technologie et la conception aux conditions et aux materiaux locaux. Souvent, les NPI ont elabore une version simplifiee des produits pour leur marche interieur avant de l'ameliorer pour les marches d'exportation. Tendances mondiales de la technologie et de l'information - 204 - 5.20 Durant les 10 derni~res annees, l'innovation technologique et la concurrence se sont intensifiees dans l'industrie mondiale, grAce en partie a l'emploi de l'informatique. Les methodes de production doivent pouvoir s'adapter afin de profiter, quand elles se presentent, des possibilites de benefices eleves. Pour qu'une industrie se developpe rapidement, elle doit avoir acc~s a des informations concernant les marches et doit pouvoir se raccorder a des reseaux mondiaux de commercialisation. Une main-d'oeuvre bon marche et des economies d'echelle sont moins importantes que des informations - et des reactions - rapides. 5.21 Pour profiter de ce marche global, l'industrie africaine devra s'associer a des interets etrangers; il faudra aussi qu'on l'encourage plus vigoureusement a exporter. A Maurice, la formation d'une main-d'oeuvre industrielle qualifiee, de bons contacts avec l'etranger et des politiques fiscales et une infrastructure appropriees ont permis aux exportations d'articles d'habillement de connaitre une expansion phenomenale vers Ie milieu des annees 80 (Encadre 5.1). Sur plus petite echelle, Ie Botswana, Madagascar, Ie Malawi et Ie Mozambique suivent cette strategie. 5.22 Une integration verticale des principales industries du pays est moins importante aujourd'hui pour la reussite de l'industrialisation. La reduction du prix des transports en vrac a encourage l'integration au-dela des fronti~res nationales. Des produits divers, depuis les sweaters jusqu'aux ordinateurs, font intervenir des operations de transformation et de montage qui ont lieu dans plusieurs pays. 5.23 Si l'Afrique ne profite pas de ces tendances mondiales, il est possible qu'on voit se creuser les fosses de technologie et d'information. Au fur et a mesure que les producteurs mondiaux ameliorent leur productivite, les consommateurs africains devront payer de plus en plus cher pour proteger des industries qui utilisent des technologies depassees. Par exemple, dans Ie domaine de la siderurgie, la technologie des hauts-fourneaux exige une production a grande echelle, qui entraine des coUts eleves; certains pays ont obtenu une forte efficacite avec des "mini-usines". Pour l'Afrique, les elements fondamentaux d'une bonne strategie d'acquisition de technologie sont l'obtention de bons conseils techniques concernant l'utilite, l'adaptabilite (notamment en se servant d'une technologie intermediaire) et la conception des produits; une gestion appropriee du transfert de technologie; et la formation des travailleurs qui seront appeles a l'utiliser. Evolutions positives susceptibles de servir de points de depart 5.24 L'experience prouve que l'industrie africaine peut affronter la concurrence sur les marches mondiaux. En Tanzanie, un fabricant de radiateurs automobiles s'est servi d'une technologie et de formateurs de l'Inde pour mettre sur pied une production qui, malgre sa tail Ie reduite, n'en est pas moins efficace; plus de 10 % de celle-ci a ete exportee vers des pays voisins, vers l'Inde, Ie Moyen-Orient et Ie Royaume-Uni. Un fabricant de vetements du Botswana vend ses articles de mode a Londres et a New YI)rk. La C6te d'Ivoire exporte des produits et du chocolat qui utilisent les f~ves de cacao que Ie pays ne parvient pas a exporter. En Zambie, une entreprise d'ingenierie de l'Etat a recti fie avec un minimum - 205 - d'aide externe les d~fauts de conception d'une usine de montage d'autobus. Le Nig~ria exporte des tissus, Ie S~n~gal des plastiques et Ie Kenya de la joaillerie et de la vannerie. 5.25 L'industrie africaine a souvent profit~ des occasions qu'offrait Ie march~ et s'est adapt~e aux mat~riaux qu'elle trouvait sur place. De petites entreprises de Nairobi utilisent des d~chets de conditionnement pour construire des logements A bon march~. Des entreprises de la COte d'Ivoire et du Ghana fabriquent des conserves d'~picerie fine A l'intention d'Africains r~sidant A l·~tranger. Une entreprise du Zimbabwe exporte des pi~ces usin~es sur commande qui servent A r~parer de vieilles automobiles en Europe. Quand Ie Ghana n'a plus pu importer, des distillateurs locaux ont remplac~ Ie sucre par la m~lasse et les m~caniciens ont appris A fabriquer des pi~ces d~tach~es pour des automobiles et des pompes A eau. 5.26 Certains pays ont commenc~ A am~liorer leur environnement de politique pour obtenir une industrialisation soutenue et efficace qui donne un plus grand rOle aux entreprises priv~es. L'~limination des contrOles des prix et l'assouplissement des taux de change ont att~nu~ Ie risque de voir des decisions arbitraires amenuiser les b~nefices. La liberalisation des importations dans des pays COmme Ie Ghana, Ie Kenya, Madagascar et Ie Nig~ria a r~duit les rentes de raret~, fait augmenter l'acc~s aux intrants necessaires et contraint les monopoles A reduire leurs conts afin d'affronter la concurrence. Le rel~vement des prix agricoles a fait augmenter A la fois la demande rurale et l'offre de mati~res premi~res dans des pays allant de la Guin~e au Zimbabwe. Dans des pays comme la COte d'Ivoire, la Guin~e et Ie Togo, l'Etat a cesse d'~tre proprietaire d'industries, ouvrant ainsi la voie aux investissements prives et a cre~ la possibilite d'accroitre l'efficacite en intensifiant la concurrence. 5.27 Toutefois, ces mesures font souvent intervenir de penibles choix politiques et ne garantissent pas que l'offre reagira comme prevu. La strategie de deuxi~me generation s'efforce de creer Ie marche comp1~mentaire et les conditions de l'offre dont a besoin pour reussir la transformation de la structure industrielle. Ouverture de possibilit~s de ventes 5.28 Si elle veut revigorer l'industrie et obtenir pour les fabrications un taux de croissance constant A hauteur de 8 % par an, l'Afrique doit cr~er et rechercher une demande nationale, regionale et etrang~re A laquelle elle est en mesure de repondre. 11 faut modifier les politiques afin de lier etroitement la production industrielle aux marches interieurs de produits et d'intrants et orienter les entreprises vers les exportations. Demande interieure 5.29 La Deuxi~me decennie de developpement industriel des Nations Unies pour l'Afrique durant les annees 90 comptera parmi ses objectifs la reorientation des industries de fabrication pour repondre aux besoins des trois quarts de la population africaine qui vit d'agriculture. M~me dans les economies mini~res du Botswana, de la Zambie et du Zimbabwe, l'agriculture (qui ne fournit que 3 A 12 % du PIB) occupe plus de 70 % de - 206 - la population active. La demande potentielle represente un puissant moteur de croissance, s'il est possible de la satisfaire a des prix raisonnables. 5.30 Dans Ie passe, l'industrialisation visant a remplacer les importations a conduit a creer de grosses entreprises qui devaient repondre a la demande urbaine sans trop se preoccuper des conts. La population agricole a une propension relativement elevee a depenser ses revenus supplementaires pour acheter des produits simples et bon marche elabores par de petites entreprises locales. Outre des articles d'habillement et du mobilier, elle a besoin d'intrants et de materiel qui lui permettent d'ameliorer sa productivite. Les femmes ont besoin d'outils, de materiel ou des services de transformation alimentaire (par exemple, pour la mouture du mals) , ainsi que d'appareils qui simplifient leur travail menager et leur laissent ainsi plus de temps pour se consacrer a la production agricole et a d'autres activites remuneratrices. 5.31 Les petites entreprises repondent aces besoins. Comme la population agricole de l'Afrique est tr~s dispersee et ne dispose que de moyens de transport mediocres, de petits producteurs qui utilisent des materiaux locaux se trouvent souvent avantages par rapport a la grande production centralisee. Dans un pays OU les revenus sont peu eleves, la modicite du cont et la facilite d'entretien ont plus d'importance que la normalisation et l'acquereur peut negocier un achat a temperament avec Ie vendeur. On pourra mieux faire demarrer Ie moteur si on encourage la croissance des revenus ruraux et si l'on se rend compte du rOle complementaire que les petits fabricants peuvent jouer dans une strategie de developpement economique centree sur l'agriculture. On encouragera par ailleurs les grosses entreprises a ameliorer leur productivite si on elimine les obstacles qui entravent leur croissance et les emp~chent d'entrer librement en concurrence. D'autres mesures sont necessaires pour faciliter la sous-traitance et etablir d'autres rapports entre grosses et petites entreprises; ce sont des liaisons de ce genre qui, dans les pays d'AsiH, ont aide a amlHiorer la capacite technique des PME. 5.32 L'amelioration des revenus agricoles suscitera aussi une demande de produits fabriques en serie. Dans les villes, Ie mouvement rap ide de migration assure une croissance continue de la demande de ces produits; or, les entreprises qui alimentent ce marche ont perdu de leur efficacite sous l'effE~t d'une protection excessive. Elles auront des difficultes a s'ajuster quand cette protection diminuera, a moins de pouvoir reduire leurs conts, par exemple en exportant vers des pays voisins afin de mieux utiliser leurs capacites. 5.33 Bien que les entreprises traditionnelles qui produisent a l'intention des petits acheteurs a faible revenu ne fournissent pas une proportion importante du PIB, elles apportent neanmoins une contribution significative a la croissance a long terme de la production en creant ce noyau d'entrepreneurs experimentes qui peuvent constituer Ie "chainon manquant" et devenir plus tard les investisseurs et les cadres d'entreprises plus importantes. L'assouplissement des r~glements facilitera cette evolution dynamique qui transformera des entreprises traditionnelles en PME. - 207 - 5.34 Le taux de change est un instrument critique qui permet de mieux relier la croissance industrielle et l'offre interne. II existe peu de possibilites d'encourager Ie recours A des fournisseurs locaux quand la monnaie est surevaluee et quand les droits de douanes per~us sur les intrants importes sont modestes. Tant que Ie Ghana n'a pas liberalise ses taux de change, la grosse usine de savon importait de l'huile vegetale parce qu'elle pouvait recevoir des permis d'importer au taux de change officiel, alors que les petits producteurs de savon employaient l'huile de palme de production locale qui coUtait moins cher que les produits importes au taux du marche parall~le. La devaluation aide l'utilisation de la main-d'oeuvre et des intrants locaux pour lesquels Ie pays jouit d'avantages comparatifs; elle aide aussi Ie developpement d'activites, agriculture comprise, qui font un emploi intensif des ressources locales. Marches regionaux 5.35 En Afrique, l'integration regionale (dont il est question plus en detail au Chapitre 7) est importante pour Ie ~eveloppement d'un grand nombre d'industries intermediaires et d'industr~es de biens d'equipement en effet, peu de pays ont un marche interieur dont la dimension permet d'atteindre un niveau approprie de production et de concurrence. Pour investir en direction d'un marche multinational, il faut que les prix de revient soient competitifs et les regimes commerciaux stables. 5.36 Des pays voisins peuvent absorber une capacite excedentaire et permettre d'acquerir l'experience indispensable pour s'attaquer aux marches plus importants d'outremer. En Zambie, une entreprise de vetements a reussi A survivre A l'effondrement du marche national en exportant des uniformes en Tanzanie et en Allemagne, grAce aux contacts et A l'experience de son associe allemand (Encadre 5.2). Les brasseries du Kenya ont exporte vers les pays voisins avant de vendre sur les marches etrangers. On peut s'attendre A voir s'intensifier Ie r6le des entrepreneurs africains dans Ie developpement de marches regionaux s'ils peuvent plus facilement se deplacer et virer leurs recettes en devises. 5.37 La liberalisation des barri~res commerciales auxquelles se heurtent les fabricants africains peut aider des entreprises sous-utilisees et trop protegees A s'ajuster A la multiplication des marches et A l'intensification de la concurrence sans pour autant les exposer trop rapidement a la concurrence internationale. Certaines entreprises pourront ne pas atre en mesure de lutter contre la concurrence des entreprises de pays voisins. D'autres pourront Ie faire - et les consommateurs profiteront de la baisse des prix. A l'heure actuelle, certains fabricants exportent officieusement par l'intermediaire de marchands, au lieu d'utiliser les circuits officiels, dont les coUts depassent souvent tous les benefices qu'on peut realiser. Une liberalisation generale du commerce a plus de chances de reussir que des negociations au coup par coup car elle peut, s'il Ie faut, mettre en place des mecanismes de compensation qui tiennent compte des coUts de l'ajustement. Marches d'outremer 5.38 Sur les marches nationaux, et marne sur les marches regionaux, l'accroissement de la productivite agricole et Ie developpement de - 208 - l'urbanisme ne pennettent de soutenir qU'une croissance industrielle limit~e. Bien qu'il soit difficile et long de s'implanter sur de nouvea~x march~s d'outremer, c'est lA une fonnule critique pennettent d'acc~l~rer la naissance de la production industrielle et d'accroltre les rentr~es de devises, notamment par les moyens suivants : transfonnation de mati~res premi~res exportables qui ont ~t~ en butte A une politique hostile aux exportations; articles d'artisanat, bien que ce march~ souffre des caprices de la mode; aut res cr~neaux du march~ A forte rentabilit~ car ils r~pondent A une demande sp~cialis~e (par exemple, jouets en bois, jus de fruits tropicaux); et produits nonnalis~s, au cas OU la main-d'oeuvre et les prix de revient locaux r~pondent aux param~tres des producteurs ou des acheteurs internationaux (par exemple, mobilier en pi~ces d~tach~es du Ghana). 5.39 Pour r~ussir, un d~veloppement diversifi~ des exportations exige une politique de change r~aliste, un environnement g~n~ral stable et propice, et des d~lais pennettant aux investisseurs de r~agir. La lib~ralisation des march~s des changes peut exercer quelques effets A court tenne, t~moin la reprise des exportations de bois et d'ananas du Ghana, mais Ie cas de Maurice montre toute l'importance qu'il faut accorder A une po1itique de souplesse (Encadr~ 5.1). Des po1itiques positives comportent des mesures de promotion, par exemple 1a mise en place de syst~mes de financement des exportations et de parcs industriels. Entre-temps, l'intensification des exportations de produits manufactur~s passera principalement, dans de nombreux pays, par l'~tape de premi~re transfonnation de mati~res premi~res exportables. Bien que cette transfonnation puisse fa ire augmenter 1a valeur ajout~e, 1es pays doivent veiller A ~viter Ie danger qui consisterait A transfonner des mati~res premi~res de grande qua1it~ en produits de qua1it~ moyenne. La transformation de mati~res premi~res de qualit~ non exportable en produits semi-m.anufactur~s exportab1es est une innovation prometteuse (par exemple, 1e choco1at de la COte d'Ivoire). 5.40 Les pays qui recherchent une croissance rap ide de produits nonna1is~s ou de produits susceptib1es d'occuper un certain cr~neau doivent s'attendre A voir des entrepreneurs ~trangers jouer un rOle important, comme ce fut Ie cas de l'entreprise germano-zambienne d'exportation d'unifonnes (Encadr~ 5.2). La r~ussite de TaIwan s'exp1ique en partie par les investissements directs et par 1es sous-traitances d'entreprises am~ricaines et japonaises. Le Bangladesh a augment~ rapidement ses exportations de v@tements apr~s qu'une entreprise cor~enne ait appris leur m~tier A des ouvriers qui, une fois en possession de la techno1ogie, ont ~u alors organiser leurs propres entreprises. La COte d'Ivoire a r~ussi A exporter du chocolat en profitant des connaissances techniques et de l'exp~rience du marketing que lui apportait un associ~ fran~ais. Les pays mieux d~velopp~s peuvent encourager ces r~alisations en abaissant leurs barri~res douani~res et autres. - 209 - 5.41 Afin de reduire l'assujettissement de l'Afrique A l'etranger, il conviendra de mettre sur pied des conventions d'association visant A assurer la formation technique et Ie transfert de technologie (voir ci-apr~s). II conviendra egalement d'encourager les entrepreneurs africains en leur offrant un environnement moins restrictif et plus propice aux affaires. Une femme malgache a reussi A exporter en Europe, sans soutien exterieur, des vAtements pour enfants parce qu'on lui avait offert certains avantages (Encadre 5.3). Creation d'un environnement propice 5.42 Pour reussir A poursu!vre une croissance industrielle relativement rapide, les entrepreneurs africains doivent reagir A l'amelioration de la demande interne et aux incitations A exporter. Dans Ie passe, la concurrence a ete freinee, A l'interieur des pays, par des regimes de permis restrictifs, par des syst~mes d'affectation directe du credit et des devises, par des contrOles des prix, par des encouragements selectifs A investir, et par des dispositifs administratifs complexes. Parfois, l'Etat a mame pratique une politique d'hostilite A l'egard des investissements prives. Les gouvernements peuvent aider: en procedant A une dereglementation qui encourage la competitivite; en rationalisant les distorsions de la structure de protection; en investissant dans l'infrastructure (et en prenant d'autres mesures) afin de reduire les coQts eleves de la conduite des affairesj et en ameliorant l'acc~s au credit. 5.43 Le Mozambique a montre qu'il est possible de modifier rapidement et de fa~on profonde l'environnement de politique generale. En deux ans, son Gouvernement est passe d'une economie planifiee, o~ les prix etaient contrOles, A une economie o~ mame les entreprises d'Etat fonctionnement sur une base commerciale dans un environnement liberalise o~ la valeur de la monnaie est fixee sur une base concurrentielle. Cette politique et la reduction des coQts de main-d'oeuvre, exprimes en dollars, ont conduit une entreprise de Hong Kong A s'associer A une fabrique de vatements appartenant A l'Etat pour constituer une coentreprise d'exportation. Politiques de concurrence 5.44 A l'avenir, la politique industrielle devra aller au-delA des incitations du marche. Les gouvernements devront les appuyer en modifiant radicalement les r~glements et leurs modalites d'application. Parmi les mesures permettant de rendre l'environnement commercial plus positif et plus competitif (il en est egalement question au Chapitre 6) figurent les dispositions suivantes : 1 - 210 - elimination des permis 1imitant 1a capacite de 1a p1upart des industries et amenagement des dispositions permettant d'octroyer plus faci1ement un statut juridique aux petites entreprises; encouragement automatique des investissements en prenant pour base des crit~res d'octroi compatibles avec des objectifs d'efficacite et de creation d'emp10is; bonne administration d'un ensemble de dispositions juridiques qui assurent l'execution des contrats, faci1itent 1es transferts d'avoirs A 1a suite de fai11ite et definissent 1es droits de propriete; et lois et po1itiques du travail qui prot~gent 1es droits des travai11eurs sans pour autant g~ner 1es entreprises. Rationalisation de 1a protection 5.45 La protection a apporte des avantages industrie1s et a encourage 1es investissements, mais e11e a aussi encourage un comportement peu competitif. Dans 1e passe, de nombreux pays ont protege leurs industries de fas:on permanente contre 1a concurrence des importations grAce A des droits: de douanes, A des restrictions quantitatives et au rationnement des devis~s; i1s 1es ont ega1ement protegees contre 1a concurrence interne en 1imitant 1a creation d'entreprises nouvelles. Les restrictions des importations creent des rentes de rarete qui permettent aux entreprises de survi~'re ma1gre une faib1e utilisation de leur capacite et ma1gre des economies neg1igeab1es de devises; c'est 1e cas des usines de montage d'automobi1es du Kenya, du Nigeria, du ZaIre et de 1a Zambie. La protection a ete faussee par une mosalque de restrictions quantitatives, de droits de douanes e1eves sur certains articles, et d'exonerations pour d'auttes articles au benefice de certaines entreprises et de certains organismes d'Etat. 5.46 Le prob1~me consiste A etab1ir un equi1ibre entre 1a protection, qui fait vivre 1es industries nationa1es, et 1a concurrence, qui contraint 1es entreprises A innover, A augmenter leur productivite et A reduire leurs conts. Bien que l'industria1isation entraine norma1ement des fai11ite~, du fait de l'evo1ution des marches et de 1a productivite, beaucoup d'industries africaines ont ete protegees, ce qui a conte cher en pertes d'efficacite et en prix e1eves A 1a consommation. Le cont des dislocations, quand 1es entreprises se trouvent soudainement en presence de 1a concurrence, peut lui aussi ~tre e1eve. Les gains obtenus grAce A l'abaissement des conts et A une nouvelle croissance peuvent se materia1iser dans des industries differentes et plus 1entement que 1es pertes de production et d'emp1oi des entreprises qui ne peuvent survivre A un redoub1ement de 1a concurrence. 5.47 Les restrictions quantitatives rendent 1a protection excessivement e1evee, variable et diffici1e A ca1cu1er. Quand 1es importations font l'objet de restrictions (ou quand 1es droits de douanes sont e1eves), 1e prix que 1es consommateurs doivent payer pour 1es marchandises rares en arrivent au point ou 1a population prend 1es risques de recourir A 1a contrebande. 5i l'on remp1ace 1es restrictions - 211 - quantitatives et les droits de douanes tr~s eleves par un amenagement des taux de change et par des droits de douanes moderes, on a l'avantage de reduire la contrebande, de faire augmenter les recettes et de rendre transparent Ie niveau de protection. Le Ghana a inflechi ses importations vers les circuits legaux et a fait augmenter ses revenus en delivrant facilement des licences pour des importations payees A l'avance et en les frappant d'une taxe prealable de 20 %. Un amenagement du taux de change a egalement aide A faire augmenter les importations officielles en reduisant la difference entre les taux de change officiel et parall~le. 5.48 La perception des droits de douanes, qui est plus faible que ne Ie sugg~rent les taux nominaux eleves, a atteint en moyenne, dans 35 pays, environ 13 % de la valeur des importations durant les annees 80. Seuls Madagascar et Ie Soudan ont per~u plus de 20 % en 1984-86 (contre 14 pays durant les annees 70). La Guinee, la Guinee-Bissau, Ie Mali, l'Ouganda, la Somalie, la Tanzanie, Ie Tchad, Ie ZaIre et la Zambie ont per~u en moyenne moins de 10 % en 1986. Ces chiffres sont inferieurs A la moyenne de tous les taux nominaux parce que : les importations officielles ont tendance A comporter surtout des biens d'equipement et des biens intermediaires qui ne sont gu~re passibles de droits de douanes; les organismes publics et un grand nombre d'entreprises ne paient pas de droits de douanes sur les intrants; et les importations qui font l'objet de restrictions et sont frappees de droits eleves entrent clandestinement dans Ie pays ou sont deguisees en produits passibles de droits modiques. 5.49 Quand les droits de douanes sont eleves sur les produits de consommation et faibles sur les intrants, les entreprises peuvent tirer parti du differentiel en important les intrants pour les incorporer dans un produit protege. En pareil cas, la protection de la valeur ajoutee (Ie "taux de protection effective") peut Qtre elevee et les cofits reels peuvent Qtre parfois superieurs aux benefices. Beaucoup de pays ont des usines de montage qui rent rent dans cette categorie. Quand il y a de grandes differences de droits de douanes et de contenu des importations, les taux de protection effective varient eux aussi beaucoup. En Zambie, par exemple, 24 % des biens de consommation avaient des taux de protection effective de plus de 500 % en 1975, alors que 17 % etaient penalises par une protection effective negative; dans Ie cas des biens intermediaires, 5 % seulement avaient des taux de plus 500 % et 30 % avaient une protection effective negative. La distorsion ainsi obtenue des incitations A l'investissement en faveur des produits les plus fortement proteges (il s'agit souvent de biens de consommation durables et de produits de luxe frappes de droits considerables pour obtenir des recettes) aide A expliquer la prevention de la structure industrielle en faveur du marche urbain A revenus eleves. Les taux extr~mement eleves de protection expliquent pourquoi de nombreuses entreprises ont pu survivre malgre un manque d'efficacite tr~s prononce, voire des pertes de devises. 5.50 Une structure plus uniforme des droits de douanes reduirait les distorsions des incitations entre les diverses industries en eliminant les - 212 - diff~rentiels entre intrants et production. La Guin~e est pass~e d'un syst~me complexe de droits de douanes multiples a un r~gime comportant seulement deux droits, un droit uniforme de 30 % et un droit moins ~lev~ pour les produits de premi~re n~cessit~, tels que les produits pharmaceutiques; les produits de luxe sont frapp~s d'un droit d'accise suppl~mentaire, qu'ils soient import~s et d'origine locale, ce qui repr~sente une ~volution souhaitable en direction de taxes a la consommation destin~es a alimenter Ie Tr~sor. 5.51 Cependant, on ne devrait pas relever de fa~on g~n~rale les droits de douanes frappant les intrants, afin d'~viter de p~naliser les industries d'exportation en leur faisant payer les intrants a un prix sup~rieur au cours mondial. Bien que, en th~orie, des syst~mes de remboursement ou de ristourne puissent contrebalancer Ie paiement de taxes. des d~rogations temporaires ou des cr~dits fiscaux consentis aux exportateurs donnent de meilleurs r~sultats. 5.52 Deux questions principales se posent : comment r~duire une protection excessive et donner aux entreprises suffisamment de temps pour s'ajuster et pendant combien de temps faut-il continuer a aider les entreprises qui ne r~ussissent pas a r~duire des conts excessifs? Lorsque la protection est ~lev~e, il faut l'abaisser avec suffisamment de lenteur pour que les entreprises puissent s'adapter en proc~dant a des investissements de r~novation, en modifiant leurs gammes de production et en prenant des mesures visant a r~duire leurs conts. Les gouvernements peuvent aider en veillant a ce que ces entreprises disposent de moyens de financement et d'une assistance technique. Des am~nagements des taux de change peuvent faire contrepoids a une r~duction de la protection, bien qu'ils fassent augmenter les besoins financiers des entreprises tributaires d'intrants import~s. La d~valuation du naira a permis a un fabricant de pneus du Nig~ria de neutraliser l'intensification de la concurrence sur Ie march~ national par des exportations vers des pays voisins. 5.53 Apr~s avoir fix~ un calendrier raisonnable d'abaissement des droits de douanes et d'~limination des exon~rations et des restrictions quantitatives, les gouvernements devront ~viter de mettre en place un r~gime de protection s~lective. de fa~on A pouvoir lib~rer des ressources que pourront utiliser des industries de croissance. Des politiques d'ajustement ont encourag~ la croissance industrielle quand elles se sont appuy~es sur une lib~ralisation de l'acc~s aux importations (Encadr~ 5.4). Comment surmonter des conts de production ~lev~s 5.54 Les entreprises africaines font souvent des investissements pour transporter des mat~riaux, des biens, voire des ouvriers. La m~diocrit~ des routes fait augmenter Ie cont de l'entretiell. De petites entreprises qui ne poss~dent pas de v~hicules ~prouvent des difficult~s a vendre au-delA de leur march~ local. Au Nig~ria, les chutes de courant ont conduit la quasi-totalit~ des entreprises A acheter des g~n~rateurs de secours afin d'~viter les arr~ts temporaires de production. Les industries d'extraction et d'autres industries qui se trouvent en dehors des grandes villes ont dQ construire des logements pour leurs ouvriers. Envisag~e dans son ensemble, l'industrialisation devrait comporter des investissements - 213 - publics d'infrastructure (dont il est question au Chapitre 2) et d'autres mesures visant a faire baisser certains de ces coats. 5.55 Certains investissements d'infrastructure justifient qu'on accorde aux entreprises une aide de contrepartie, par exemple sous forme de subventions ou de cr~dits fiscaux. Les industries d'extraction et de transformation, comrne les mines, l'industrie du bois et l'industrie des huiles v~g~tales. aident a ouvrir l'acc~s aux zones rurales. 11 y a aussi beaucoup de cas ou ce sont des d~cisions politiques qui ont impos~ des coats ~lev~s. Les usines sid~rurgiques du Nig~ria sont souvent loin de leurs fournisseurs de billetes et de leurs march~s. Les tentatives faites par le Ghana pour d~velopper une industrie de la chaussure ont echoue, en partie parce que la tannerie et l'usine de chaussures etaient tr~s loin l'une de l'autre, et etaient egalement loin des principaux marches urbains. 5.56 S'il n'y a pas sur place des fournisseurs de pi~ces detachees et des services de r~paration, l'entretien du materiel devient coateux. Les entreprises doivent donc ou bien disposer de stocks excessifs de pi~ces detachees ou bien courir Ie risque de devoir freiner leur production en attendant l'arrivee des pi~ces par avion. En r~gle generale, le developpement d'une industrie des pi~ces detachees s'est heurt~ a des importations bon marche et a la concentration de la protection sur les biens de consomrnation et sur les industries de base (ce qui fait augmenter Ie coat des materiaux pour les industries intermediaires). La devaluation de la monnaie nigeriane a deja conduit des entreprises a entretenir leurs installations au lieu de les remplacer. 5.57 La formule ideale est la production nationale d'un materiel qui repond aux conditions locales et peut ~tre facilement repare. Un entrepreneur indien a mis au point un mat~riel simple et durable de mouture du manioc et du mals qui est employe au Ghana. Le Zimbabwe exporte du mat~riel agricole vers des pays voisins dont Ie sol a des caracteristiques analogues. Quand on achete du materiel importe, il faut tenir compte des moyens dont disposent les techniciens locaux pour en assurer l'entretien et produire des pi~ces detachees. 5.58 Des entreprises qui c~dent du materiel selon la formule de cr~dit-bail pourraient aider a resoudre les probl~mes techniques et financiers des PME. Elles pourraient realiser les economies d'~chelle dont on a besoin pour mettre en place des installations techniques et des ateliers de reparations au service de plusieurs entreprises. En louant leur materiel, les entreprises pourraient surmonter la difficulte que presente l'obtention de credit pour acheter des machines et s'assurer que les fournisseurs tiennent compte des modalites d'utilisation et d'entretien. Le Cameroun, la COte d'Ivoire, la Gambie, Ie Kenya, Ie Malawi et la Tanzanie ont etendu Ie systeme de location-vente aux biens d'equipement et ont encourage la constitution d'entreprises de leasing. Pour suivre leur exemple, d'autres pays pourraient devoir modifier leurs cadres juridiques et fiscaux. Interm~diation financiere 5.59 En Afrique, Ie syst~me financier, tout comme la r~partition des entreprises par dimensions, a un "chalnon manquant". Le syst~me bancaire I. - 214 - commercial et les banques de d~veloppement sont au service de gros clients bien implant~s, qui b~n~ficient souvent de taux d'int~r~t subventionn~s. D'ordinaire, l'~pargne familiale permet de lancer des micro-entreprises qui peuvent, s'il Ie faut, obtenir du cr~dit par des moyens officieux, mais a des taux d'int~r~t extr~mement ~lev~s. Par contre, les propri~taires de PME n'ont guere acces aux capitaux dont ils ont besoin et les petites entreprises languissent du fait de ne pouvoir se procurer un capital de roulement a des taux raisonnables. 5.60 Les systemes financiers se sont d~t~rior~s avec Ie d~clin de l'~conomie et, souvent, a la suite de politiques d'ajustement qui font soudainement augmenter les fonds dont les entreprises ont besoin pour rembourser des emprunts ~trangers ou importer des intrants. Quand Ie Ghana a d~cupl~ en un an son taux de change officiel, Ie systeme bancaire n'~tait pas en mesure de fournir Ie cr~dit additionnel dont les entreprises avaient besoin pour importer des intrants qui leur coataient plus cher en devises. Le Ghana vient de commencer a restructurer son secteur financier. 11 en va de m~me de la Guin~e, de Madagascar et du Nig~ria (voir Chapitre 8). 5.61 11 faut ~galement s'efforcer d'~tablir des liaisons entre les institutions financieres du secteur officiel et les m~canismes officieux de cr~di.t (voir Chapitres 6 et 8). M~me les travailleurs ind~pendants pauvres peuvent effectuer grace a l'~pargne la plupart des modestes achats dont ils ont besoin. Les mutuelles de cr~dit, les tontines et des groupements analogues pourraient constituer une base permettant d'obtenir du cr~dit aupr~s d'institutions financieres officielles ou pourraient fournir Ie capital d'entreprise, peut-~tre par l'interm~diaire de march~s des capitaux nouvellement cr~~s (voir Encadr~s 4.2 et 6.3). Constitution d'une armature industrielle 5.62 II ne servira a rien d'acc~l~rer la croissance de la capacit~ industrielle si l'on n'am~liore pas ~galement les moyens permettant de la concevoir, de la g~rer et de 1 'employer. Les ~checs de 1 'industrialisation, tout comme ses r~ussites, s'expliquent souvent par un d~fau.t ou par la perspicacit~ d'un entrepreneur, d'un gestionnaire ou d'un technicien. 5.63 La raret~ des industries et le manque de capitaux priv~s ont conduit la plupart des gouvernements africains a entreprendre l'industrialisation en courtisant des investisseurs ~trangers et en effectuant des investissements publics dans des industries prioritaires. Pour leur part, les entrepreneurs dynamiques ont pr~f~r~ saisir les occasions plus rentables que leur offraient Ie secteur non structur~ ou d'autres secteurs. Cependant, m~me dans de telles conditions, on a vu augmenter consid~rablement le nombre d'entrepreneurs exp~riment~s. Pour r~aliser l'industrialisation, il est essentiel de pouvoir disposer de ces talents (Chapitre 6). 5.64 Si l'on veut am~liorer la productivit~ et passer de la petite et moyenne entreprise a la grosse entreprise moderne, il est important d'am~liorer les moyens techniques et les capacit~s de gestion. Bien que beaucoup de pays aient trop de diplOm~s, ceux-ci n'ont pas toujours les comp~tences techniques de niveau moyen ou les capacit~s de direction dont - 215 - on a besoin. Les programmes ~d'africanisation~ r~alis~s par des entreprises ~trang~res ont tendance a ne pas donner aux cadres locaux des responsabilit~s suffisantes pour qu'ils puissent prendre des d~cisions. N~anmoins, certains pays, parmi lesquels on compte l'Ethiopie, ont r~ussi a former des gestionnaires comp~tents. Au Kenya et au Zimbabwe, de bons ing~nieurs de production permettent aux industries textiles de fonctionner a un niveau plus proche de la meilleure pratique internationale que celles de Ia Somalie et de la Tanzanie. On a besoin d'am~liorer l'~ducation et d'intensifier la formation sur Ie tas pour que I'Afrique dispose en nombre suffisant de bons administrateurs et d'ing~nieurs de m~tier. 5.65 Qu'ils appartiennent au secteur public ou au secteur priv~, les investisseurs ont besoin de conseils techniques portant sur les possibilit~s de r~alisation pratiques des projets, leur conception, les options technologiques, les sources de mat~riel, les sp~cifications et Ie transfert de technologie. On peut citer en exemple de cas ou une technologie mal adapt~e a conduit a des coOts d'exploitation insoutenables une usine de sid~rurgie du Nig~ria, une usine d'engrais du B~nin, une usine de d~nim de COte d'Ivoire, ainsi qU'une fabrique de chaussures de Tanzanie. Pour adapter la conception du produit, Ie mat~riel et les m~thodes de production aux besoins et aux moyens locaux, il faut disposer de techniciens et de gestionnaires comp~tents, comme ce fut Ie cas d'une usine rentable de radiateurs d'automobiles de Tanzanie. 5.66 L'acquisition de moyens techniques dans ces domaines varie en fonction de la complexit~ de la technologie, des possibilit~s offertes par Ie march~ et de la main-d'oeuvre. Pour obtenir ces moyens, il est essentiel d'identifier les comp~tences fonctionnelles qui peuvent ~tre adapt~es a divers secteurs d'application. Education et formation 5.67 Les m~thodes qui ont ~te employ~es en Afrique, avec une aide etrang~re, dans Ie domaine de I'education et de la formation, ont accorde plus d'importance aux briques et au ciment qu'au "logiciel" : methodes enseignement, programmes, ~quipement et exp~rience pratique. C'est en particulier Ie cas de l'enseignement de type classique. L'expansion de l'enseignement g~n~ral peut renforcer la productivit~, m~me quand il s'agit d'acteurs du secteur traditionnel, dont beaucoup n'ont que peu ou pas d'education. Au niveau Ie plus bas, il serait utile de savoir lire, ecrire et compter. L'inscription de notions de comptabilit~ ~l~mentaire au programme d'~tudes devrait aider ceux qui finissent par s'~tablir a leur compte. Dans les ecoles moyennes et secondaires, des notions el~mentaires de technique, de comptabilit~ et de gestion, y compris une exp~rience pratique, devraient aider a preparer la majorit~ des ~l~ves qui ne se destinent pas a des professions liberales. 5.68 Certains domaines sp~cialises, par exemple la comptabilite et l'ingenierie, pourraient justifier des programmes d'enseignement sup~rieur. D'autres. qui concernent sp~cifiquement telle ou telle industrie (par exemple la conception de produits textiles, l'~lectronique), devraient b~n~ficier du soutien de l'industrie qui pourrait. par exemple, fonder une chaire. Des associations industrielles peuvent ~galement creer des instituts de formation dont les moniteurs sont fournis par des fabricants, - 216 - comme c'est le cas de l'industrie textile du Sri Lanka, qui a cherch~ de cette mani~re a am~liorer son potentiel d'exportation. 5.69 Toutefois, les modalit~s d'enseignement officiel sont fonction de maigres ressources budg~taires. Une forte proportion de la formation technique est assur~e en dehors des circuits officiels par le systeme d'apprentissage, notamment dans les secteurs des m~tiers de tailleur, du travail sur m~taux, de la menuiserie et de la r~paration des v~hicules, m~me si les pouvoirs publics ne se sont guere occup~s jusqu'ici de ce systeme. La formation sur Ie tas, qui est l'un des points les plus faibles de l'industrie africaine, permet aux ouvriers d'assimiler la technologie. L'envoi a l'~tranger de cadres et de techniciens qui vont se former dans des entreprises les expose aux meilleures pratiques d'organisation de la production, de contrOle de la qualit~, de commercialisation et de distribution. Plac~s aux cOt~s des stagiaires, des techniciens ~trangers peuvent faire du bon travail si la formation a un caractere pratique et si les responsabilites sont partag~es. Les pouvoirs publics peuvent aider en assouplissant les reglements en mati~re d'emploi des ~trangers et en fournissant des incitations fiscales aux programmes de formation. Le Nigeria et Ie ZaIre offrent des abattements fiscaux (finances grAce a un petit impOt sur les salaires) aux entreprises qui met tent en place une formation interne. Science et technologie 5.70 Les pays qui disposent d'universit~s et de centres de recherches peuvent les adapter pour qu'ils aident davantage l'industrie. Les laboratoires devraient chercher a obtenir des contrats d'entreprises de fabrication. 11 convient de donner la priorite a l'adaptation des produits et des technologies a l'environnement local. Par exemple, Ie Centre de consu.ltation en technologie de la Facult~ des sciences et de technologie du Ghana s'est beaucoup occup~ de l'emploi des materiaux locaux par l'industrie de la construction. 5.71 Les normes nationales devraient non seulement servir a la reglementation mais devraient aussi aider les entreprises a ameliorer leurs normes et a mieux contrOler la qualit~. En COte d'Ivoire, un service assure les essais de machines agricoles. L'exp~rience cor~enne semble indiquer que l'industrie peut avantageusement utiliser ses propres centres de ccntrOle de la qualit~, notamment pour prendre pied sur les marches d'exFortation. 5.72 Les pouvoirs publics peuvent aider les entreprises en mati~re de reche'rche-developpement technologique. Les organismes d'Etat pourraient ~tre en mesure d'aider les associations professionnelles en leur communiquant des informations et en facilitant les contacts avec leurs homologues et fournisseurs ~trangers. Les entreprises ont besoin d'incitations financieres pour mettre en place leurs propres cellules de recherche et de contrOle de la qualit~, dont Ie financement peut ~tre assure par des credits fiscaux ou par des taxes industrielles. Les entreprises devraient aussi avoir des structures de salaires et d'incitations qui encouragent les innovations au service de la productivite et assurent l'avancement des techniciens qui font montre d'esprit novateur. - 217 - 5.73 On n'a gu~re r~ussi Ie transfert de technologies entre 1es pays industrialis~s et l'Afrique. Pour ~tre efficace, Ie transfert de technologie exige des techniciens qui puis sent enseigner ce que l'exp~rience leur a appris et des techniciens locaux en mesure d'absorber ces connaissances et de les mettre en pratique. Les NPI offrent de fructueuses possibilites de partenariat car ils viennent de passer eux-m@mes par une stage d'apprentissage et d'adaptation de la technologie. Ce sont des entrepreneurs de Hong Kong qui ont joue un rOle catalytique dans la reussite des exportations de Maurice. Au Ghana, l'assistance technique de fournisseurs d'~quipement de TaIwan a permis A une entrepreneur de surmonter la p~nurie de devises en fabriquant du papier hygi~nique avec de la bagasse (residu de canne A sucre des distilleries locales). Relations 5.74 11 faut s'efforcer d'encourager les relations inter-industrielles, qui renforcent l'effet de diffusion de la croissance industrielle et facilitent Ie transfert de technologie et de savoir-faire. En COte d'Ivoire, un gros fabricant de chaussures s'est mis A vendre des chaussures que fabriquaient sous contrat de petites entreprises plus rentables constituees par ses anciens employes. Dans Ie cadre de contrats de sous-traitance, de grosses entreprises apportent a leurs fournisseurs des connaissances techniques et leur apprennent les principes de la commercialisation et du contrOle de la qualit~. Des associations industrielles peuvent jouer un rOle en trouvant des fournisseurs locaux qU'elles mettent en contact avec des acheteurs. Un taux de change et un regime douanier qui favorisent les fournisseurs locaux sont des prealables indispensables. Ces sous-traitants peuvent recevoir directement une aide a propos de questions juridiques et techniques. 5.75 Les consultants jouent un rOle important dans Ie transfert de technologie. Les gouvernements devraient donc encourager l'expansion des bureaux d'etudes, notamment dans Ie secteur priv~, par exemple en recourant autant que possible A des consultants du pays et en encourage ant les organismes d'assistance technique a travailler avec des homologues locaux. 5.76 Le developpement des moyens d'action industriels est une demarche qui s'affermit d'elle-m~me et dont les divers el~ments se soutiennent les uns les autres; la cadence et la continuite de la croissance ~conomique se repercutent sur la rapidite du developpement. Une croissance rap ide et soutenue permet l'expansion de l'enseignement et de la formation de base et donne la possibilite de d~ployer plus rapidement les nouvelles technologies. Elle permet ~galement aux entreprises de prendre les risques A long terme qu'entrainent la recherche, Ie developpement et la formation. 11 faut que les ~tablissements scientifiques effectuent des recherches fondamentales et etudient leurs applications dans l'industrie pour pouvoir adapter les technologies et les methodes aux conditions locales (voir Encadre 5.5). Comment relever Ie d~fi 5.77 Le rOle que la strat~gie exposee ci-dessous sous-entend pour l'Etat est sensiblement different du rOle que celui-ci a joue apr~s - 218 - l'ind~pendance. Au lieu de diriger 1e d~ve10ppement industrie1, 1es pouvoirs publics devraient 1e faci1iter. Les fonctions de supervision seraient 1imit~es, par exemp1e, a 1a protection de 1a sant~, de l'environnement et du syst~me bancaire. Le gouvernement se donnerait essentie11ement pour tAche de mettre en place 1es moyens institutionne1s et 1es ressources humaines permettant aux entrepreneurs de saisir 1es occasions que leur offre 1e march~. 11 fournirai~une bonne infrastructure, assurerait un enseignement de base, aiderait des ~tab1issements techniques et des organismes de formation, donnerait son appui aux associations industrie11es et assurerait 1e bon fonctionnement des syst~mes juridique et financier. 5.78 Avec 1e temps, grAce a 1a vigueur accrue du secteur priv~ et a 1a suite des compressions du budget du secteur public, 1a p1upart des pays verront diminuer consid~rab1ement 1a part que ce dernier consacre a l'industrie. Cependant, 1a restructuration du secteur public est un travail diffici1e et long dans 1es pays qui ont d~cid~ qu'i1s ne peuvent plus subventionner des entreptises d'Etat qui fonctionnent a perte. La premiere chose a faire consiste a r~partir 1es entreprises pub1iques en trois cat~gories : entreprises viab1es, entreprises qui ne peuvent survivre a court terme qu'a fonds perdus et entreprises qu'i1 faut fermer. 5.79 La fermeture d'entreprises est diffici1e a r~a1iser sur 1e plan po1itique. Mais c'est 1e groupe d'entreprises interm~diaires qui pose 1es prob1emes 1es plus complexes. 11 est possible qu'i1 faille engager certaines d~penses avant de pouvoir attirer des acqu~reurs. Comme ce fut 1e cas en Guin~e, 1es acheteurs du secteur priv~ peuvent exiger des concessions sp~cia1es qui sont contraires a l'esprit de concurrence. Le Nig~ria est en train d'essayer d'offrir au pub1j.c des actions d'entreprises pub1iques mais cette m~thode est moins r~a1isab1e dans 1es petits pays. Entre-temps, 1e secteur public peut essayer d'ame1iorer l'efficacit~ en ~tab1issant des po1itiques, des directives et des criteres de performance et en donnant aux administrateurs toute latitude pour exercer leur m~tier. Le r~gime de propri~t~ est moins important, en soi, qu'une exploitation ob~issant aux principes de 1a concurrence. 5.80 La privatisation offre une possibi1it~ singu1iere d'am~liorer 1es capacit~s industrie11es en faisant intervenir une aide technique externe grAce a 1aque11e on remet en ~tat des entreprises susceptib1es de devenir rentab1es. Mais 1a privatisation n'est pas 1e seu1 moyen de progresser. Les conventions d'association et 1es contrats de gestion avec des e:ntreprises ~trangeres doivent ~tre con9us de mani~re a porter au maximwn 1e transfert de comp~tences et de savoir-faire. Au S~n~ga1, des investissements belges ont repris une usine de machines agrico1es que l'Etat avait dQ fermer et ont pu diversifier 1a gamme de produits, ~laborer des ~l~ments de construction m~ta11ique et exporter 1a moiti~ de 1a production vers des pays voisins. De m~me, au Togo, une entreprise am~ricaine a r~nov~ une 1aminerie qui avait appartenu a l'Etat, a modifi~ 1a gamme de produits et exporte d~sormais dans 1a r~gion. 5.81 Pour qu'une strat~gie fond~e sur 1a concurrence puisse fonctionner. 1es gouvernements doivent changer d'attitude a l'~gard de 1a r~glementation. 11s peuvent encourager les investisseurs priv~s a rattraper le terrain perdu par les industries du secteur public en - 219 - facilitant leurs interventions et en eliminant les risques politiques. Cependant, l'industrie privee manquera d'efficacite si les concurrents du pays m@me et les importations n'exercent pas une pression constante qui encourage les innovations gr~ce auxquelles on peut reduire les coOts. 5.82 Les choix de strategie, les instruments de politique et les voies de l'industrialisation varieront d'un pays a l'autre. Les mines et le pet role encourageront 1es industries assciees et exerceront une influence sur 1es politiques commercia1es de pays comme l'Angola, 1e Cameroun, le Congo, 1e Gabon, 1e Nigeria et 1a Zambie. Les pays agrico1es a faible revenu commenceront sans doute leur mouvement de croissance surtout dans Ie secteur des industries fondees sur l'augmentation de 1a demande rura1e et des intrants agricoles, dont 1es textiles, Ie mobi1ier simple et l'outillage manuel. Avec le temps, les industries pourront se diversifier et e1argir la gamme de leurs produits. 5.83 Certains pays comme 1e Ghana, Madagascar, Ie Senegal, la Zambie et le ZaIre ont a resoudre de difficiles problemes de transition pour les industries qui ont ete fondees dans des conditions de tres forte protection. Comme la COte d'!voire, Ie Kenya, Maurice et 1e Zimbabwe, ces pays possedent l'experience et 1es competences leur permettant d'intensifier ieurs exportations non traditionnelles vers des pays voisins et vers les marches d'outremer, a condition que leurs politiques d'exportation soient plus favorables et les marches regionaux mieux integres. Le Nigeria est suffisamment grand pour se doter d'industries pouvant beneficier d'importantes economies d'eche11e mais i1 doit s'assurer que les technologies et l'emplacement des usines permettent une production efficace. 5.84 Les elements strategiques qui sont proposes ici ne sont fournis que pour aider 1es decisions que chaque pays doit prendre en fonction de la situation dans laque11e il se trouve. Dans chaque cas, la strategie comporte quatre th~mes principaux : La structure industriel1e se transforme en fonction des possibi1ites offertes par 1e marche, aussi bien dans le pays qU'a l'etranger. Elle ne peut pas @tre determinee par des decisions prises en fonction de l'offre. Pour eviter que se creuse davantage 1e fosse qui 1a separe du reste du monde, l'industrie doit @tre competitive. A cet effet, 1es pays doivent acquerir de partenaires etrangers un savoir-faire technique et une connaissance du marche. Pour pouvoir profiter des possibilites en mettant en oeuvre des formules nouvelles qui fassent appe1 au principe de la concurrence, il est essentiel, surtout pour 1a petite entreprise, qU'existe un environnement positif a l'egard de l'entreprise privee, avec un minimum de contrOle exerce au moyen de reg1ementation et avec des investissements dans des services comp1ementaires. La cle d'une structure industrielle efficace et bien adaptee est la constitution progressive et 1ente de moyens techniques, de - 220 - capacit~s de gestion et d'un esprit d'entreprise grAce A l'~ducation, aux recherches et, surtout, A la formation sur Ie tas et A l'exp~rience pratique. Perspectives mini~res Les min~raux : un bienfait mitig~ 5.85 L'Afrique est riche en min~raux et en p~trole. Cependant, la plupart des pays d'Afrique subsaharienne commencent A peine A tirer parti de ces ressources. Pour beaucoup de pays, l'abondance relative de min~raux a ~t~ un bienfait mitig~. Souvent, ces pays ont dissip~ d'importantes recettes et ont contract~ de grosses dettes, sur la foi de leurs richesses min~rales. De massives distorsions des incitations, rendues possibles par les recettes mini~res, ont entrav~ Ie d~veloppement de l'agriculture et de l'industrie. Un grand nombre de pays dont les secteurs miniers sont d~velopp~s n'ont donc pas connu de croissance plus rapide que les autres. Le Niger et Ie Lib~ria, par exemple, ont chacun d'importants secteurs miniers, mais ont eu une croissance annuelle n~gative de leur PIB durant les ann~es 80. 5.86 Les march~s mondiaux des min~raux ont toujours ~t~ caract~ris~s par l'instabilit~. Une s~rie de hauts et de bas exerce un effet profond~ment destructif sur les ~conomies qui sont tributaires de leurs richesses minieres. Seul Ie Botswana a mis en place des m~canismes efficaces qui permettent d'accumuler, durant les p~riodes de haute conjoncture, une ~pargne qui sert A att~nuer les chocs ~conomiques des p~riodes de vaches maigres (voir Encadr~ 8.1). 5.87 A l'heure actuelle, l'Afrique a besoin des capitaux a risque et des connaissances techniques des soci~t~s mini~res transnationales pour l'aider a d~bloquer ses richesses min~rales. Dans Ie pass~, les rapports avec les entreprises ~trang~res ont souvent ~t~ mal g~r~s. En m~me temps, les s(}ci~t~s ~trang~res n'ont pas toujours bien trait~ les pays d'accueil quand il s'est agi de partager les recettes de mines rentables. En outre, il est souvent arriv~ que les soci~t~s ~trang~res ont refus~ de communiquer des informations et ne se sont guere pr~occup~es de former des nationaux a des postes de cadres et de relier les mines A l'~conomie locale. 5.88 La production miniere pourrait (et devrait) devenir une source importante de croissance dans beaucoup de pays africains. Mais ce potentiel ne sera pas entierement r~alis~ tant qu'une formule d'association mutuellement b~n~fique ne sera pas trouv~e entre Ie gouvernement et les investisseurs. 11 faut ~galement mettre en place un cadre de politique g~n~rale veillant a ce que les recettes minieres servent a encourager un solidH d~veloppement A long terme et que des mesures syst~matiques sont prises pour donner A l'Afrique les moyens de d~velopper son industrie min~rale. Potentiel et importance 5.89 Sur le plan g~ologique, l'Afrique possede un potentiel min~ral qui est ~gal, sinon sup~rieur, A celui des autres continents. L'Afrique occidentale, par exemple, a une g~ologie analogue A celIe du Br~sil. pays - 221 - ou, depuis une vingtaine d'ann~es, les mines prennent un grand essor - notamment celles d'or, d'~tain et de fer. Les pays d'Afrique australe ont beaucoup de points communs, sur 1e plan g~ologique, avec l'Afrique du Sud, ou la production mini~re s'est fortement d~velopp~e durant les ann~es 70 et 80. Les connaissances dont on dispose semb1ent indiquer que l'Afrique subsaharienne pourrait renfermer des min~raux a valeur ~lev~e - or, diamants et autres pierres pr~cieuses, min~raux industrie1s et terres rares. Ces min~raux peuvent @tre exploit~s dans des d~lais relativement brefs, sans les investissements massifs d'infrastructure qu'exigent les min~raux volumineux. 5.90 Les gisements de diamants du Botswana comptent parmi 1es plus riches du M~nde. La Guin~e poss~de quelques-unes des r~serves de bauxite de la mei11eure qualit~ mondiale et ses mines de fer de Mifergui Nimba ont une teneur exceptionnelle. Le Ghana a un potentiel en or consid~rab1e, tout comme d'autres pays (dont 1e Mali, Ie Burkina Faso et Ie Soudan) ont un excellent potentiel de production de m~taux pr~cieux. On a r~cemment confirm~ l'existence d'une autre grande zone aurif~re dans Ie sud de 1 'Ethiopie , a10rs que les zones ouest et nord de ce pays renferment des zones mini~res prometteuses dont on a a peine commenc~ l'exploration. Le Zimbabwe pourrait produire du platine. Le minerai de cuivre de la Zambie et du Zalre a en g~n~ral une teneur trois a quatre fois plus ~lev~e que Ie minerai de l'Am~rique du Nord et contient souvent du cobalt. Le Zalre a non seu1ement des r~serves de cuivre suffisantes pour 50 ans d'exploitation mais poss~de aussi, A Tenke et A Fungerume, 1es gisements de cuivre non d~velopp~s les plus riches du M~nde. 5.91 Ma1gr~ les progr~s limit~s qui ont ~t~ faits pour exploiter ce potentiel, les mines jouent d~ja un rOle important dans les pays subsahariens. Afrique du Sud non comprise, ces pays fournissent en effet environ 5 % de la production mini~re mondia1e; les principaux produits sont Ie cuivre, Ie diamant, l'or, l'uranium et la bauxite. A eux deux, la Zambie et 1e Zalre produisent 74 % de la production mondiale de cobalt et 16 % de ce11e de cuivre. Neuf autres pays de l'Afrique subsaharienne fournissent plus de 40 % de la production mondiale de diamants. La Guin~e vient au deuxi~me rang des producteurs mondiaux de bauxite, Ie Sierra Leone au deuxi~me rang de ceux de rutile. Le Zimbabwe est Ie troisi~me producteur mondial d'amiante et Ie Gabon Ie troisi~me producteur de mangan~se. L'Afrique obtient ~galement d'importantes quantit~s d'uranium, de chromite, de fer, de nickel, de p1omb, de zinc, de phosphate et de cadmium. La production min~rale africaine est importante pour les industries mondia1es de l'atome et de l'a~rospatiale. pour Ie fer (titane), Ie p~tro1e (p1atine, al1iages), pour les m~taux pr~cieux et pour les industries abrasives. - 222 - Figure 5.1 Afrique subsaharienne Valeur des exportations de min~raux Dollars de 1985 Cuivre 55 % Di amants 11 % Autres 25 % Or 6 % Aluminium 3 % 1960 3.740 millions de dollars Cuivre 27 % Or 14 % Aluminium 11 " Urani um 9 % 1987 5.141 millions de dollars Note: Prix exprimes en prix constants en fonction de l'indice de 1a valeur unitaire des produits manufactures. SOUrCE! : Banque mondia1e. - 223 - 5.92 Les mines contribuent aux recettes en devises et aux finances publiques (Figure 5.1). Leurs exportations (A l'exc1usion du p~tro1e et du charbon) se sont ~lev~es en moyenne A 6 milliards de dollars par an entre 1980 et 1987 - ce qui repr~sente environ 30 % des exportations non p~troli~res (et environ 14 % de l'ensemble des exportations) de la r~gion. En 1988. grace a la hausse des cours des min~raux. les exportations de produits miniers ont d~pass~ 8 milliards de dollars. Les mines apportent une contribution importante a l'~conomie de 15 pays subsahariens, auxquels elles fournissent 57 % des exportations, 13 % du PIB et environ 20 % des recettes publiques (Tableau 5.1). Tableau 5.1 : Contribution des mines a certains pays en 1987 Exportations Mines en % Valeur Taxes minieres minUres de 1 'ensemble ajouUe en % de (en millions des miniere en 1 'ensemble de dollars) eXEortations % du PIB des taxes Botswana 1420 90 44 55 Za!!.re 1266 73 24 37 Zambie 836 93 15 7 Zimbabwe 609 43 8 Guin~e 584 92 21 82 Niger 290 80 8 13 LiMria 217 58 14 Ghana a * 159 19 2 Gabon 120 9 3 Mauritanie 127 31 12 2 Sierra Leone 113 74 13 67 Togo 87 29 7 11 S~n~gal 65 9 2 2 Burkina Faso 50 20 3 TOTAL 5943 55 12 20 Note : Les mines englobent la fonderie et Ie raffinage. a Al~inium non compris. Non disponible. Exp~rience pass~e 5.93 Entre la fin des ann~es 50 et Ie d~but des ann~es 70, l'industrie miniere africaine a connu une p~riode de croissance et de diversification. De grandes mines ont ~t~ mises en exploitation, dont des mines de bauxite en Guin~e, de manganese au Gabon, de fer en Mauritanie et au Lib~ria, de cuivre et de nickel au Botswana, d'amiante et de nickel au Zimbabwe, d'uranimum au Niger et en Namibie et de phosphate au Togo et au S~n~gal. La production d,.. cuivre et de cobalt s' est intensifi~e au Za!!.re et en Zambie, et celIe de diamants au Za!!.re. Un grand nombre de ces nouvelles mines ~taient t!xplnJt~es selon une formule de coentreprise par Ie gouvernement et par des propri~taires du secteur priv~. - 224 - 5.94 Par contre, au cours des 15 derni~res ann~es, les nouveaux investissements ont ~t~ modestes, sauf au Botswana. L'Afrique a donc vu se r~tr~cir sa part du march~ de nombreux m~taux et min~raux, dont le cuivre, l'~tain, la chromite et les diamants. Les ~trangers n'ont gu~re manifest~ d'int~rAt l l'~gard de nouveaux investissements en Afrique et les entreprises d'Etat se sont en g~n~ral born~es, dans les meilleurs des cas, l effectuer de nouveaux investissements pour remplacer des r~serves qui s'~taient ~puis~es. Le faible niveau des investissements priv~s a ralenti la diversification, qui a abandonn~ les min~raux traditionnels en faveur des m~taux pr~cieux et des min~raux industriels, qui sont plus rentables. La valeur totale de la production min~rale africaine a recul~, en termes r~els, de 2 % par an en Afrique, alors qU'augmentait celle de l'Asie et de l'Am~rique latine. D'apr~s les projets d'investissements actuels, la divergence va s'accentuer durant les ann~es 90 entre l'Afrique et ces deux autres continents, l moins que ne soient prises de nouvelles i~itiatives (Figure 5.1). Figure 5.2 Production min~rale de l'Afrique subsaharienne, de l'Asie et de l'Am~rique latine et des Caralbes En milliards de dollars de 1985 1S~--------------------------------' 14 ... Afrique subsaharienne ... Asie 11 ~ Amerique latine et Caralbes 10 · · 2 o Ann~e Note : Les chiffres repr~sentent la valeur brute et projet~e de 1 'aluminium, du cuivre, du minerai de fer, du zinc, du nickel, de l'~tain, de la bauxite, de l'alumine et de l'or. SOurcE! : Banque mondiale. 5.95 Les investissements m1n1ers ont ~t~ frein~s par des restrictions concernant le droit de propri~t', par de lourdes modalit~s de r~glementation, par des dispositifs fiscaux peu attrayants et par l'instabilit~ de l'~volution macro~conomique. C'est ce qu'on peut observer en Zam.bie et au ZaIre, qui occupai'mt auparavant une position dominante parmi les exportateurs africains de produits miniers. L'industrie mini~re de Zambie est en recul depuis qu'elle a ~t~ nationalis~e en 1969; au ZaIre, l'exploitation des mines d'Etat a ~t~ compromise par l'ing~rence des pouvoirs publics. La Zambie et le ZaIre ont tous deux de grosses r~serves de cuivre mais leur part du march' mondial est tomb'e de 24 % en 1960 l 15 % en 1987. - 225 - 5.96 Au cours des 20 A 30 dern:~res ann~es, on a fait peu de grandes d~couvertes min~rales en Afrique. Par contre, on a d~couvert et mis en exploitation d'tmportants gisements dans d'autres pays - cuivre au Chili, m~taux pauvres et ~tain au Br~sil, bauxite au Venezuela, or en Papouasie Nouvelle-Guin~e et min~raux industriels, or et diamants en Australie. S'il n'y a pas eu de nouvelles d~couvertes en Afrique, ce n'est pas parce que les perspectives mini~res y sont m~diocres mais parce qu'on n'a pas fait suffisamment de prospection. 5.97 Au cours des dix derni~res ann~es, la moiti~ des d~penses de prospection et d'exploitation mini~res du monde ont ~t~ consacr~es a l'or, surtout en Australie, au Canada et aux Etats-Unis - OU se conjuguaient un bon potentiel de ressources, de puissants investisseurs locaux et des incitations attrayantes (notamment en Australie et au Canada) offertes aux capitaux nationau~ et ~trangers. Les pays en d~veloppement qui ont un bon potentiel de production d'or et off rent des conditions attrayantes aux investisseurs priv~s - comme Ie Br~sil, Ie Chili, l'Indon~sie, la Papouasie Nouvelle-Guin~e et les Philippines - ont eux aussi particip~ a cet essor. Les pays de l'Afrique subsaharienne ont rat~ l'occasion. M@me dans ceux OU l'on a exploit~ de nouveaux gisements d'or et de diamants - Burkina Faso, Guinee, Ghana et Zimbabwe - les projets ont ~te en general de faible envergure et les investissements modestes. Investissements plus importants dans la prospection 5.98 L'industrie mini~re est tributaire d'investissements de prospection A risques eleves. Les entreprises qui exploitent des minerais m~talliques consacrent d'ordinaire A la prospection 1 A 5 % du produit de leurs ventes annuelles. Dans Ie cas des m~taux precieux et d'autres mineraux dont Ie march~ augmente plus rapidement, les d~penses de prospection sont en g~n~ral plus elevees. Par exemple, en 1987, l'Australie a produit pour 2,1 milliards de dollars d'or et a d~pense 280 millions - soit environ 13 % des ventes - pour faire de la prospection. La meme annee, la production minerale canadienne a atteint environ 15 milliards de dollars et les d~penses de prospection environ 900 millions. Avec une production annuelle estimee a 5 milliards de dollars, l'Afrique subsaharienne devrait, semble-t-il, depenser chaque annee au moins 250 millions de dollars pour la prospection; en fait, elle n'en depense qu'environ 100 millions. Etant donne la longue periode de gestation qui s'ecoule entre la d~couverte d'un gisement et la production, (il s'agit d'ordinaire de 5 A 15 ans), cette diff~rence en moins menace de condamner l'industrie africaine A un avenir qui d~passe a peine Ie niveau de stagnation. 5.99 On peut faire remonter au d~but des annes 70 la raison qui explique ce faible niveau d'investissement dans la prospection. Au fur et A mesure que l'Etat a resserr~ son contrOle sur les grosses exploitations mini~res, beaucoup de soci~t~s mini~res internationales ont quitte l'Afrique, pr~f~rant faire des affaires dans des pays comme l'Australie et Ie Canada, ou dans d'autres pays en d~veloppement - comme Ie Bresil, l'Indonesie ou la Papouasie Nouvelle-Guinee - ou Ie cltmat d'investissement ~tait plus favorable aux capitaux A risque ~lev~. - 226 - 5.100 Les entreprises mini~res d'Etat n'ont pas, en g~n~ral, mobilis~ les investissements qui ~taient n~cessaires pour maintenir la production sur la voie d'une croissance continue. Une ing~rence politique constante dans l'exploitation et la gestion des mines a compromis leur efficacit~. Vu les lourdes dettes de nombreux pays ou domine l'industrie mini~re et qui sont excessivement tributaires des exportations de min~raux, la production mini~re de l'Etat est devenue insensible A la conjoncture des march~s; les mines A prix de revient ~lev~ n'ont pas am~lior~ leur efficacit~ et ont continu~ leur production, m@me A perte. Les mines rentables ont manqu~ de fonds pour les travaux de prospection et de mise en valeur; en effet, leurs recettes servaient A d'autres fins, et on ne se pr~occupait gu~re de les r~investir. La plupart des pays africains n'ont pas voulu (ou n'ont pas pu) constituer des coentreprises avec des soci~t~s mini~res internationales et peu d'entre eux ont eu un secteur priv~ suffisamment vigoureux pour prendre leur place. 5.101 La stagnation de l'industrie mini~re africaine s'explique non seu1ement par de faibles investissements. mais aussi par des carences de gestion, Ie manque de comp~tences techniques, un environnement g~n~ral peu propice et des ing~rences politiques. Malgr~ l'abondance de leurs ressources, les pays subsahariens se heurtent A la concurrence d'~conomies de march~; s'ils n'offrent pas un climat d'investissement qui attire les capitaux et les moyens techniques des grandes soci~t~s mini~res - soit directement soit dans Ie cadre de coentreprises - les mines africaines continueront A marquer Ie pas. La vigueur du secteur des mines de bauxite de la Guin~e (qui fournit plus de 90 % des recettes d'exportation et plus de 80 % des recettes du secteur public) est due A une collaboration efficace avec ses associ~s ~trangers quand Ie reste de l'~conomie ~tait en d~sarr.oi. 5.102 L'exp~rience montre que, en r~gle g~n~rale, des d~penses de prospf!ction d' environ 100 millions de dollars par an conduisent A Is d~cou"erte de deux gisements· de faible A moyenne importance dont l'exploitation est rentable. En moyenne, une nouvelle mine qui exploite ce genre de gisement exige un investissement d'environ 60 millions de dollars et peut fournir une production dont la valeur annuelle est ~gale au cont du d~marrage de la mine. Bien qu'il faille du temps pour regagner la confiance des investisseurs, il devrait @tre possible de doubler. A court et A moyen termes, Ie niveau des fonds que l'Afrique consacre A Is prospection pour Ie porter A 400-500 millions de dollars pendant les dix prochaines ann~es. La croissance de la production du secteur minier pourra.it alors augmenter progressivement pour atteindre la barre de 5 % par an vets la fin des ann~es 90. Un environnement propice A l'industrie mini~re 5.103 A l'encontre de l'Australie ou du Canada, les soci~t~s mini~res d'Afrique se heurtent A de difficiles probl~mes d'infrastructure et doivent engager de fortes d~penses de prospection car elles ont besoin de techniciens ~trangers et de mat~riel import~, manquent de services contractuels locaux et n'ont pas d'installations de soutien. Cependant, les chances de d~couvertes sont meilleures en Afrique. Dans les autres continents, la plupart des gisements faciles A trouver sont d~jA exploit~s. - 227 - 5.104 Pour obtenir 1es conditions d'un re1~vement du secteur A long terme, des entreprises mini~res privees, en mesure de fournir 1es capitaux, d'assurer 1a gestion et d'apporter 1a techno1ogie dont on a besoin pour donner une vigueur nouvelle au secteur minier d'Afrique, devront former des associations avec 1es gouvernements de pays d'accuei1 capab1es de creer un environnement propice aux investissements qui prot~ge ega1ement 1es inter~ts du pays. Pour reussir, 1a cooperation doit reconnaitre 1es obligations reciproques et partager equitab1ement 1es benefices. En conservant un inter~t minoritaire, 1es gouvernements peuvent suivre l'evolution du secteur minier. C'est lA une tAche comp1exe, qui exigera de 1a part des gouvernements africains qu'i1s repensent leurs rOles et leurs po1itiques A l'egard du secteur minier. Les principaux elements d'un environnement propice concernent 1e regime de changes, 1a fisca1ite, Ie rapatriement des benefices et 1e dispositif de reg1ementation. En finan9ant des services consu1tatifs specialises, la communaute des bail1eurs de fonds pourrait aider 1es gouvernements africains A negocier des accords miniers qui soient A 1a fois equitab1es et techniquement sans faille. 5.105 Regime des changes. Comme la plus grande partie de la production minera1e est destinee A l'exportation, la rentabi1ite des mines est sensible A la politique des changes. E1le peut rapidement s'amoindrir A 1a suite d'une devaluation; c'est ce qui est arrive aux mines d'or du Ghana au debut des annees 80. Une monnaie sureva1uee est un puissant encouragement A la contrebande de l'or et des pierres precieuses avec les pays voisins, comme ce fut 1e cas des diamants au ZaIre au debut des annees 80. En outre, un acc~s insuffisant aux devises peut compromettre l'exp1oitation des mines. En effet, les mines doivent importer des pi~ces detachees, des materiaux et des biens d'equipement pour remp1acer ou e1argir leur capacite. Le manque de devises a contribue aux difficu1tes de la societe mini~re d'Etat de la Zambie (ZCCM) durant les annees 80 et un acc~s limite aux devises a freine ces derni~res annees 1es investissements miniers au Zimbabwe. 5.106 Regime fiscal. Des dispositions fisca1es equitab1es et stables sont essentie11es A une association durable entre l'Etat et des investisseurs prives. Ces derniers exigent une rentabi1ite qui justifie leurs mises de fonds; 1es gouvernements escomptent pour leur part recevoir une partie des benefices A titre de dedommagements pour l'emploi du patrimoine national et pour assurer que l'exp10itation des mines contribue au developpement economique. 11 est possible de negocier au cas par cas des formules de dispositif fiscal qui tiennent compte de la situation particuli~re des divers gisements. Ce qui est absolument essentiel pour gagner A long terme la confiance des investisseurs est un respect scrupuleux des accords realises. 5.107 Rapatriement des benefices. Les investisseurs etrangers ne seront pas disposes A risquer leur argent - i1 s'agit de centaines de millions de dollars dans 1e cas des grands projets - s'i1s n'ont pas des assurances abso1ues qu'ils peuvent rapatrier leurs benefices. A cet effet, on peut avoir non seulement des accords officiels entre les investisseurs et l'Etat, mais on peut aussi recourir A des trust offshore pour assurer Ie service d'emprunts etrangers, payer les fournisseurs, verser des dividences 1 l'investisseur etranger et Ie rembourser de ses depenses d'equipement. - 228 - Vu l'ampleur des risques et des investissements, ces dispositions exceptionnelles sont justifi~es. 5.108 Dispositif de r~glementation et cadre institutionnel. La stabilite et la transparence concernent aussi Ie regime d'acces a la terre, l'octroi des permis de prospection et de droits miniers, les accords d'exploitation des mines, et les dispositions de gestion, de commercialisation et d'exportation qui sont normalement regies par un code minier, tout comme Ie sont la securite des mines et les normes de protection de l'environnement. Les investisseurs doivent ~tre snrs d'avoir droit au titre de propri~t~ des mines et voudront se prevaloir de reglements simples et objectivement appliques en matiere de travail. En bref, les investisseurs prives recherchent des reglements explicites, precis et non discretionnaires qui suivent les grandes lignes des normes mondiales de l'industrie. II ne s'agit pas d'abroger des contrOles necessaires, mais plutOt de rassurer les investisseurs en leur faisant savoir que ces contrOles ne seront pas appliques arbitrairement. 5.109 Mame avec un bon dispositif de reglementation, il peut arriver que les investisseurs prennent une position d'attente si les institutions du secteur minier sont trop faibles pour assurer sa bonne administration ou pour aider la prospection grAce a l'obtention systematique de donnees fondamentales de geologie et de mineralogie. La plupart des pays ont besoin de renforcer leurs services des mines et leurs enqu~tes g~ologiques. L' am~!lioration de la formation de techniciens et d' administrateurs est absolument essentielle si l'Afrique veut renforcer Ie rOle qu'elle joue dans Ie d~veloppement du secteur. Comme toutes les industries, les mines ont ~"galement besoin d'une bonne infrastructure de transport, de services publics fiables et d'autres services de soutien. Trop souvent, ces services n'existent pas, ce qui fait augmenter considerablement les conts de l'exploitation miniere. Perspectives d'avenir 5.110 L'affaiblissement recent de la demande de mineraux traditionnels (fer, plomb, cuivre) est contrebalance par une tendance nouvelle en direction de produits de haute technologie (alliage l~gers. produits ceramiques et terres rares). Pendant une dizaine d'annees, on s'attend a voir augmenter la demande de metaux traditionnels a raison de 1,5-2,5 % par an. Les chiffres pourraient ~tre beaucoup plus eleves dans Ie cas de certains metaux employes par l'industrie chimique et d'autres mineraux indus:triels. L' industrie miniere continuera a se trouver en pr~sence d 'un marche mondial capricieux. L'industrie miniere de l'Afrique devra ~tre pr!te A prof iter des nouvelles occasions qui lui seront offertes avec une production suffisamment flexible pour pouvoir tirer parti des periodes de haute conjoncture et avec l'efficacite technique et les moyens financiers lui permettant de surmonter les periodes de recession. 5.111 En Afrique subsaharienne, l'industrie miniere pourra se relever si les gouvernements mettent en place l'environnement propice indispensable qui attire les societes minieres transnationales; l'Afrique devra ~tre vue comme un lieu OU les risques politiques ne sont pas prohibitifs. Par exemple, les entreprises privees ont intensifie leurs travaux de prospection au Ghana apres l'adoption, vers Ie milieu des annees 80, d'un - 229 - code des mines et des investissements plus encourageant (Encadr~ 5.6); et des soci~t~s mini~res ~trang~res ont n~goci~ r~cemment des permis de prospection et ou des accords de d~veloppement des mines au Botswana, en Guin~e, au Mali, au Zimbabwe et A Madagascar. Des dispositifs analogues sont A diverses ~tapes de n~gociation avec Ie Lib~ria, la Tanzanie et Ie Burkina Faso. La r~ussite de ces premi~res initiatives pourraient prendre une importance critique pour Ie renouveau minier de l'Afrique : en effet, d'autres soci~t~s, moins dispos~es A s'aventurer sur de nouveaux territoires et moins au courant de la situation en Afrique, voudront voir des r~alisations positives avant de s'y lancer A leur tour. L'autre formule, selon laquelle les soci~t~s mini~res d'Etat engagent des sp~cialistes et assument tous les risques, n'a rien donn~ dans Ie pass~; il vaut mieux l'~viter. 5.112 Depuis une trentaine d'ann~es, les investissements effectu~s dans les mines africaines existantes sont en recul. Cette tendance doit @tre invers~e. La plupart des grands projets miniers sont con9us pour une vie utile de 20 A 25 ans. Au fur et A mesure que 1a mine vieil1it, on a besoin de nouveaux investissements pour confirmer de nouvelles r~serves, remplacer les installations et Ie mat~riel anciens et ouvrir de nouveaux secteulS d'exvloitation. II se peut aussi qu'il faille renouveler des contrats de vente a long termp-o Un grand nombre de mines mises en exploitation au milieu des ann~es 60 et au d~but des ann~es 70 en arrivent maintenant A ce stade. 5i rien n'est fait, i1 se pourrait qu'on ferme des mines qu'on aura it pu continuer A exploiter. Le d~c1in de 1a production de cuivre en Zambie, par exemple, s'explique en partie par Ie manque de fonds A r~investir; et l'avenir des mines de bauxite de la Guin~e sera en partie fonction des investissements effectu~s au d~but des ann~es 90. 5.113 On pr~voit que la valeur de la production mini~re mondiale va passer d'environ 140 milliards de dollars en 1987 A environ 200 milliards de dollars en 2010 (chiffres exprim~s en prix de 1987). A condition qu'existe un environnement propice, il devrait @tre possible A l'Afrique d'obtenir, entre 1995 et 2010, un taux de croissance de 1a production de 5 % par an en termes r~els. L'Afrique subsaharienne pourrait alors faire passer sa part de la production mondiale d'environ 5 %, qui est son chiffre actuel, aux alentours de 8 % en 2010 - ce qui repr~senterait 16 milliards de dollars d'exportations (en dollars de 1987). Ce taux de croissance exigerait, de 1995 A 2005, des d~penses annuelles d'~quipement de 1 milliard de dollars - qui s'ajouteraient aux d~penses n~cessaires pour maintenir la production A ses niveaux actuels; ces capitaux devraient @tre fournis en grande partie par des entreprises priv~es. Ce chiffre repr~senterait une forte augmentation par rapport aux niveaux d'investissement actuels mais n'est pas du tout impossible A atteindre si les politiques appropri~es sont mises en place d~s maintenant. 5.114 Les pays africains devraient @tre en mesure d'attirer des capitaux A risque de soci~t~s mini~res ~trang~res pour la prospection et la mise en valeur. L'am~lioration de l'environnement macro~conomique qui a eu lieu dans de nombreux pays et Ie fait que certains gouvernements sont dispos~s A rechercher et A encourager de nouveaux investissements ~trangers, ont aid~ A stimuler un renouveau d'int~Iet A l'~gard des mines africaines. En g~n~ral, les investisseurs qui s'int~ressent aux mines se placent A un horizon de 10 A 20 ans : ils examinent non seulement 1e corps - 230 - de minerai, son emplacement, 1es perspectives du march~, 1es risques techniques et 1e coat comparatif par rapport A d'autres projets, mais aussi l'environnement des investissements dans 1e pays d'accuei1 - stabi1it~ po1itique, perspectives macro~conomiques, risques de change, acc~s aux devises, possibi1it~ de rapatriement des b~n~fices et des dividendes et dispositifs fiscaux. Energie pour 1a croissance 5.115 Dans un tel contexte, 1es organismes mu1ti1at~raux pourraient jouer un rOle cata1ytique important. Leur participation, fut-e11e margina1e, pourrait aider A garantir des conditions d'~quit~, A fournir aux gouvernements une ~va1uation technique ind~pendante des propositions d'investissement et A assurer 1es soci~t~s mini~res qu'e11es trouveront une atmosph~re dans 1aque11e i1 est possible de n~gocier des accords de concE!ssion raisonnab1es. 5.116 Au cours des 30 derni~res ann~es, l'insuffisance et 1e manque de fiabi1it~ de l'approvisionnement en ~nergie a contribu~ A 1a 1enteur de 1a croissance de l'Afrique. Et 1a demande grandissante de bois de feu m~nager entraine un d~boisement chronique. 11 est donc indispensable de trouver 1es Dloyens de surmonter ces prob1~mes si l'on veut que 1es ~conomies afric:aines prosp~rent. 5.11i' Durant 1es 25 derni~res ann~es, 1a consommation d'~nergie commercia1e a suivi, dans 1es pays en d~ve10ppement, une ~vo1ution paral1~le A celle du PIB. En supposant qu'i1 en ail1e de m~me en Afrique, i1 faudra a10rs que 1a production commercia1e d'~nergie augmente A raison d'env'iron 5 % par an, si l'on veut que 1es pays africains atteignent, comme pr~vu, des taux de croissance annue11e de 4 A 5 % (voir Tableau 5.2). Pour ce1a, i1 faudra que l'offre d'~nergie commercia1e augmente de six fois entre 1986 et 2020, avec des investissements qui passeraient, au total, d'environ 2 milliards en 1990 A 4,7 milliards de dollars en l'an 2000 (aux prix de 1989) - soit l'~quiva1ent 2 % du PIB (voir Tableau 1). Par sous-secteur, 1a production d'~lectricit~ devrait augmenter de sept fois, ce11e de gaz nature1 de dix fois et ce11e des combustibles solides (charbon et lignite) peut-~tre de trois fois. Le reste des besoins commerciaux en ~nergie seraient assur~s par des produits p~tro1iers. 5.118 L'Afrique subsaharienne poss~de d'abondantes ressources ~nerg~tiques nature11es : un taux de croissance de 1a production de l'~nergie de 5 % ne consommerait qu'une petite partie des ressources connues en p~tro1e, en gaz, en charbon, en houi11e blanche et en ~nergie g~othermique. C'est ainsi, par exemp1e, que 1es r~serves p~tro1i~res connues ~quiva1ent A 120 ann~es de consommation dans 1a r~gion, A sa cadence actuelle; on pense que de nouvelles prospections r~veleront beaucoup d'autres r~serves. Les vastes ressources hydro~lectriques de l'Afrique ont, estime-t-on, un potentiel d'environ 300 gigawatts (GW) , dont moins de 4 % ont ~t~ mis en valeur. Les r~serves connues de gaz nature1 ~quivalent A 250 GW d'~lectricit~. soit 20 fois la capacit~ hydro~lectrique actuellement install~e et cinq fois celle qu'on pourrait capter de fa90n rentable pendant les 30 prochaines ann~es. N~anmoins. l'inegalit~ de 1a r~partition des ressources, la longueur des distances de transmission et 1a dimension des march~s imposent des limites A 1a r~a1it~ du d~ve10ppement. - 231 - L'Afrique se heurte A d'~normes obstacles pour concr~tiser ce potentiel et obtenir, dans des conditions ~conomiques, l'~nergie dont elle a besoin pour soutenir sa croissance. 5.119 La formulation des strat~gies en mati~re d'~nergie doit soigneusement tenir compte des coOts qu'elles entra1nent pour l'environnement. La construction de barrages pour obtenir de la houille blanche inonde des for~ts et des terres agricoles. La production, Ie raffinage et Ie transport du p~trole peut polluer l'air et l'eau. La combustion d'hydrocarbures l&che dans l'atmosph~re du gaz carbonique qui contribue A ~l'effet de serrett dont est menac~ Ie climat de la terre. 5.120 11 faut mettre en place, dans le secteur ~nerg~tique, des dispositifs de protection de l'environnement, renforcer les organes charg~s de les faire respecter et adopter des technologies appropri~es de lutte contre la pollution. Par unit~ d'~nergie, le gaz lib~re environ la moiti~ mains d'oxyde de carbone que Ie charbon et renferme moins de polluants; il convient donc d'en encourager, chaque fois que possible, la prospection et 1 'exploitation. 5.121 Une am~lioration de l'efficacit~ ~nerg~tique dans les secteurs de l'industrie, des utilisations m~nag~res, des bAtiments commerciaux, des transports et de l'electricit~ ~conomise de l'argent et, en r~duisant la croissance de la consommation, ralentit l'augmentation des ~missions de gaz qui provoque l'effet de serre. Plusieurs pays (par exemple, Ie 5~n~gal) ont Mis sur pied des programmes qui aident avec succ~s les entreprises consommatrices d'~nergie A adopter des technologies plus efficaces dans leur emploi de celle-ci. II faut ~laborer des politiques con~ues pour acc~l~rer le rythme d'application des technologies qui font un usage efficace de l'~nergie. 5.122 La pierre angulaire de tout programme d'utilisation efficace de l'~nergie est une syst~me de prix qui exprime Ie coOt v~ritable de l'~lectricit~. 5i l'on vend 1'~lectricit~ trop bon march~, non seulement on pousse A la consommation mais aussi on compromet profond~ment les recettes d'exploitation des services publics. La tarification de l'~lectricit~ au coOt marginal pourrait aider A assurer A long terme l'~quilibre financier de ces services et leur fournir les moyens d'avoir une expansion qui corresponde A l'accroissement de la demande (voir Chapitre 8). 5.123 Des strat~gies de croissance soutenable A long terme devraient comporter des recherches-d~veloppement dans Ie domaine de ressources renouvelables telles que l'~nergie solaire et ~olienne, la biomasse et la petite hydro~lectricit~. Une petite production d~centralis~e d'~nergie faisant appel A ces sources pourrait ~tre particuli~rement utile dans les zones rurales, o~ l'~lectrification peut exercer une influence sur l'agriculture et sur l'industrie, ainsi que sur les conditions de vie. Des combustibles de substitution, comme ceux d~riv~s de la biomasse, peuvent atre utilis~s par la petite industrie et par les transports. - 232 - Tableau 5.2 Projections concernant l'offre totale d'~nergie primaire Sources d'~nergie Chiffres effectifs /a Projections 1960 1988 2020 mtoe mtoe mtoe Produits commerciaux P~trole 5,6 24,0 140 Gaz naturel 0,0 3,0 30 Electricit~ /b 0,5 3,0 20 Charbon 3,5 4,0 10 Total partie I 9,6 34,0 200 Bois de feu n.d. 66,0 200 TOTAL n.d. 100,0 400 l! mtoe = millions de tonnes d'~quivalent ~nergie; les pourcentages sont exprim~s en fonction de l'ensemble de l'offre d'~nergie primaire. /b Hydro~lectricit~ et electricite geothermique. Note n.d. = non disponible. Source Nations Unies, Energy Statistics Year Book, 1970-73, New York, Nations Unies, 1986. Perspectives a horizon de 30 ans 5.124 Le secteur energetique englobe les sources non commerciales d'~nergie primaire (surtout bois de feu) et l'energie commerciale (petole. gaz naturel, hydroelectricite, charbon et un peu d'electricite g~othermique). Le~ energies renouvelables (par exemple, l'energie solaire) pourraient devenir importantes, notamment dans les regions lointaines A l'interieur des pays. - 233 - Le bois de feu : une crise qui s·aggrave 5.125 Les quatre-cinqui~mes de la population de l'Afrique subsaharienne obtiennent tout ou partie de leur ~nergie du bois (bois de feu, charbon de bois et r~sidus agricoles), qui fournit les deux-tiers de l'~nergie consomm~e. D'ores et d~ja, plus de 50 millions d'Africains doivent faire face a une grave p~nurie. 5i les tendances actuelles se poursuivent, la demande de bois de feu va au moins tripler d·ici a 2020. La demande augmente dans les villes, dont la population devrait doubler en 12 a 15 ans. Si les m~nages urbains continuent de consommer du bois de feu a la cadence actuelle, la demande urbaine repr~~~ntera, en l'an 2000, entre 50 et 75 % de l'ensemble du bois de feu utiUs~ dans la plupart des pays au sud du Sahara. Dans beaucoup de r~gions, Ie taux de consommation du bois de feu d~passe de loin Ie taux de croissance naturelle. M~me si on acc~l~re la plantation d'arbres (voir Chapitre 4), des p~nuries chroniques sont presque in~vitables. Les principales raisons d'une exploitation sans contrOle de la couverture foresti~re sont, en dehors du d~frichement, Ie fait qu'il n'y a. dans la plupart des pays, aucun encouragement a une bonne gestion ou a l'optimisation des rendements. Pour r~tablir un ~quilibre entre offre et demande, il faut : am~liorer la gestion de la couverture foresti~re en confiant aux communaut~s locales Ie contrOle de l'exploitation. Pour cela. il faut que la population locale soit assur~e d' avoir droit a une rentabilit~ satisfaisante des ressources qu'elle g~re. II faudra donc r~soudre, a la satisfaction des populations rurales impUqu~es, les questions de r~gime foncier, d 'usufruit et de recettes; ~tablir un prix ~conomique du bois de feu et du charbon de bois (comme l'ont fait Ie Malawi et Ie Niger) afin d'encourager la conservation et l'adoption d'autres combustibles et stimuler les exportations de charbon de bois que produisent dans des conditions efficaces des pays a exc~dents. comme Ie Congo et Ie Zaire; encourager l'emploi de po~les plus efficaces a charbon de bois et a bois, y compris les po~les et les fours qU'utilisent les industries rurales (Encadr~ 5.7) et encourager aussi 1 'adoption de techniques de carbonisation plus efficaces grAce a un meilleur syst~me de stimulants; d~velopper des de substitution fiables, accessibles sur ~nergies Ie plan et vendues a un prix appropri~, comme Ie ~conomique k~ros~ne et Ie gaz naturel en bouteille. et aider les familIes urbaines a faible revenu en mettant en place des syst~mes appropri~s de cr~dit ou de subvention pour acheter des po~les et des appareils m~nagers qui utilisent ces combustibles; renforcer Ie d~veloppement institutionnel grAce a la planification, a la gestion et a la formation de la main-d'oeuvre afin de donner au secteur public les moyens de formuler, de suivre, d'~valuer et d'am~nager des strat~gies efficaces concernant le bois de feu. Energie primaire commerciale - 234 - Energie primaire commerciale 5.126 L 'Afrique subsaharienne produit environ 1,8 % de I' ~nergie primaire commerciale du monde (avant sa conversion en d'autres formes d'~nergie) et en consomme 0,5 %. Les sources principales sont Ie p~trole (70 % de 1a consommation en 1988), Ie gaz nature 1 (9 %), la houille blanche (9 %) et Ie charbon (12 I). La consommation par personne est la plus faible du monde et n'a augment~ qu'A raison de 0,9 % par an durant les ann~es 80. Par contre, la consommation d'~nergie commerciale par personne de l'Inde est d~sormais Ie double de celIe de 1 'Afrique, apr~s avoir augment~ A raison de 4,9 % par an entre 1970 et 1986. Dans l'hypoth~se d'une augmentation de l'offre d'~nergie de 5 A 6 % pendant les 30 prochaines ann~es, l'offre de p~trole et de houille blanche devrait, dans la gamme d'~nergie primaire commerciale. rester A 70 %, celIe du gaz nature 1 passer A 15 % et celIe de la houille blance A 10 %, tandis que la part du charbon tomberait A 5 %. Riche ··· et pauvre en p~trole et en gaz 5.127 Les r~serves prouv~es de p~trole de I' Afrique subsaharienne ~taient estim~es, au d~but de 1989, a 20,S milliards de barils (2,3 % du total mondial) - dont la plus grande partie se trouvent dans Ie Golfe de Guin~e. A eux deux, l'Angola et Ie Nig~ria fournissent 80 % de la production annuelle de la r~gion, qui se monte a 2,2 millions de barils par jour, et dont 84 % est E!Xport~e. Les autres pays africains consacrent 20 A 40 % de leurs recettes annuelles d'exportation a l'achat de p~trole, ce qui est paralysant pour leurs ~conomies. Cependant, les milieux p~troliers s'accordent g~n~ralement A reconnaltre qu' il reste encore A d~couvrir d' importants gisements de p~trole dans certaines r~gions relativement inexplor~es en dehors du Golfe de Guin~e. 5.128 Bien que 1 'Afrique subsaharienne poss~de 3,5 % (dont les quatre-cinqui~mes se trouvent au Nig~ria) des r~serves mondiales connues de gaz naturel, sa consommation est limit~e. La plus grande partie du gaz est obtenll en association avec Ie p~trole et est brQl~ A la torche. II existe des reserves consid~rables prouv~es mais sous-d~velopp~es au large du Nig~ria et, d.:l.ns une moindre mesure, au large de pays comme la Tanzanie, Ie Cameroun, la COte d'Ivoire et Ie Soudan. 5.129 Encouragement de la prospection et de la mise en valeur. La prospection pour Ie p~trole et Ie gaz a pris du retard. En 1987, 2.303 puits ont et~ for~s en Am~rique latine, contre seulement 237 en Afrique subsaharienne - et lIs se trouvent presque tous dans trois pays. Le taux de r~ussite a ~t~ bon; dans Ie Golfe de Guln~e, on a enregistr~ une d~couverte pour 2,5 puits, contre une moyenne mondiale de 5,6. En outre, les coQts de production sont comp~tltifs par rapport A ceux de r~gions comme l'Indon~sie. la Mer du Nord et I' Alaska, qui ont ~t~ Ie th~4tre d 'une prospection intensive malgr~ de difficiles conditions mat~rielles. 5.130 Les pays qui offrent un potentiel de prospection et de mise en valeur se subdivisent en trois groupes : Les producteurs actuels de p~trole (par exemple Ie Nlg~ria, Ie Cameroun, Ie Congo, Ie Gabon, l'Angola et la COte d'Ivoire), ou se trouvent la plus grande partie des r~serves prouv~es. Les coQts de mise en valeur et les risques y sont relativement faibles et - 235 - la prospection portera sans doute sur les gisements maritimes connus, par exemple dans Ie Golfe de Guin~e. Les pays o~la prospection a toutes chances de d~boucher sur la d~couverte de champs de p~trole (par exemple, Ie Mozambique, la Tanzanie et les zones maritimes du Soudan). Les principaux obstacles sont des perspectives incertaines de recettes en devises provenant des exportations d'hydrocarbures liquides; l'exiguit~ des march~s locaux de gaz naturel; de longues p~riodes de gestation des investissements; et Ie cont ~lev~ de l'infrastructure. Le champ de Pandi en Mozambique et Ie champ de Songo Songo en'Tanzanie restent sous-d~velopp~s pour ces raisons. Les pays de l' int~rieur, comme Ie Tchad, Ie Niger. Ie Soudan m~ridional et la R~pub1ique centrafricaine. Des march~s locaux 1imit~s du p~tro1e et du gaz, 1e cont de l'infrastructure et 1es difficu1t~s de transport au-dela des fronti~res pour a1imenter les march~s locaux ou vers 1a cOte pour 1es exportations ont frE!in~ 1a prospection. Une coop~ration entre les pays et un environnement favorable faciliteraient leur exploitation. 5.131 A 1 'heure actuelle, la prospection et 1a mise en valeur des ressources africaines en p~trole et en gaz sont fonction d' un r~gime d' association avec des soci~t~s p~tro1i~res transnationa1es qui peuvent fournir les moyens financiers et techniques. Afin d' attirer de grosses soci~t~s p~tro1i~res, les pays doivent cr~er des environnements propices a 1a prospection et a la mise en valeur. Au Kenya, par exemple, 1es soci~t~s p~troli~res ont consenti a conc1ure des accords de prospection apr~s 1a r~vision de 1a l~gislation, du r~gime fiscal et du bar~me des redevances. Un grand nombre de bassins p~tro1iers susceptib1es d' ~tre exploit~s se trouvent dans p1usieurs pays. Dans ces cas, la prospection serait facilit~e par une coop~ration mu1tinationa1e - qui pourrait, par exemp1e, pr~parer des bases de donn~es techniques fiab1es concernant plusieurs pays, harmoniser leurs l~gislations, mettre en place des dispositions sur des corridors r~gionaux de transports et d~finir les fronti~res nationales avant d'empecher des diff~rends. Un bon exemple est celui de 1a va11~e du Rift, qui est particuli~rement prometteuse mais o~, jusqu'ici, les travaux de prospection ont ~t~ modestes. 5.132 Rationalisation des raffineries. L'Afrique poss~de 23 raffineries d'une capacit~ d'environ 44 millions de tonnes par an - soit pr~s du double. de la demande de la r~gion. Des prix de revient ~lev~s et une coop~ration m~diocre entre pays voisins rendent les exportations impossibles. En 1986, la capacit~ a ~t~ utilis~e a hauteur d'environ 60 %; 13 raffineries n'ont qu'une capacit~ de 30.000 barils ou moins par jour, ce qui est peu pour une industrie ou les ~conomies d' ~chelle sont importantes. A I' exception du Nig~ria et de la COte d'Ivoire, une technologie d~pass~e limite la proportion de produits a valeur plus ~lev~e par rapport aux carburants lourds a faible cont; l'entretien est m~diocre; et les march~s nationaux sont trop petits pour ~tre ~conomiques. En Afrique, les conts moyens d'exploitation d'une raffinerie atteignent 2 dollars Ie baril, contre 0,75 dollar ailleurs. Les probl~mes des raffineries d'Etat sont souvent les m@mes que ceux des organismes parapublics africains (voir Chapitre 2). - 236 - 5.133 Les pays continuent d'exploiter des raffineries qui ne sont pas rentables pour un certain nombre de raisons : dans certains cas, les m~canismes qui ~tablissent les prix des produits p~troliers ~labor~s dans les raffineries fournissent des rentes qui subventionnent de coUteuses entreprises parapubliques (c'est ce qui se passe, par exemple, au Cameroun et au Congo); dans d'autres cas, il s'agit de conserver l'acces au credit offert par les fournisseurs de brut dans Ie cadre de contrats d'Etat a Etat; et, dans d'autres encore, ce sont des raisons de standing au pour former des ingenieurs (par exemple, au Nigeria et en COte d'Ivoire). La plupart de ces raffineries sont mal adapt~es au marche local et produisent un excedent de mazout qu'il faut alors exporter vers l'Europe ou l'Am~rique du Nord au prix de lourdes pertes. Plus de la moiti~ de la production de la raffinerie de la SONARA, au Cameroun, par exemple, est excedentaire et doit @tre exportee. 5.134 Certains pays ant aussi fait de gros investissements dans des installations d'entreposage excedentaires qui grevent considerablement Ie coUto La COte d'Ivoire, par exemple, possede des entrepOts inutilises, finances par l'Etat, dont la capacite equivaut a quatre mois de la consommation nationale: entre-temps, Ie secteur prive possede des entrepOts suffisants pour satisfaire la demande. Le coftt que represente Ie financement du capital immobilise dans les stocks strategiques de produits p~troliers constitue un autre fardeau pour les finances publiques. Parfois, on pourrait reduire ces stocks sans pour autant mettre la securite nationale en danger. 5.135 La rationalisation des raffineries sur une base regionale au sous-regionale pourrait permettre d'augmenter l'utilisation de la capacite, d'ameliorer l'efficacite et d'economiser au moins 300 millions de dollars par an. Pour cela, il faudra ameliorer l'efficacite des installations modernes (comme celles du Nigeria et de la COte d'Ivoire), grouper autour d'elles et sur llne base regionale la demande des petits marches et fermer les raffineries qui ne sont pas non rentables. 5.136 Abaissement du coftt du petrole vendu et de sa distribution. En Afrique subsaharienne, Ie petrole est Ie plus cher du monde; Ie manque d'efficacite des raffineries n'est qu'une explication partielle de cet ~tat de choses. Les penuries de devises conduisent 1es pays a acheter Ie petrole par petits lots, ce qui ne leur permet guere de profiter de 1a conjoncture du marche. Une infrastructure mediocre rend les approvisionnements irreguliers et peu fiables. 5.137 II est possible de surmonter ces problemes. Le Gouvernement de la Tanzanie, par exemple, a fait appe1 a l'aide du secteur prive et de bailleurs de fonds internationaux pour remettre son vieux systeme en etat. Des penuries chroniques de carburant, dans l'interieur du pays, ont provoque une centaine de millions de dollars de pertes annuelles qui auraient pu @tre evitel~s. Dans d' autres cas, une cooperation entre les pays pourrait ameliorer l'approvisionnement en produits petroliers et leur distribution. Le TClgO est un exemp1e particulierement interessant: on a ferme la raffinerie locale, qui n'~tait pas rentable et on a transforme certaines de ses installations en depOt par leque1 transitent 1es produits reexportes vers d'autres pays de la region, soit a l'interieur (Burkina Faso et Mali) soit Ie long des cOtes (Guinee, Liberia, etc.). Le depOt de Lome fait des benefices, alors que, auparavant, la raffinerie travaillait a pertes. - 237 - Ltavenir du charbon 5.138 Plus de 90 % des gisements de houille de l'Afrique, qu'on chiffre A 135 milliards de tonnes, se trouvent dans trois pays enclav~s - Botswana, Swaziland et Zimbabwe. Le manque de capical, de main-d'oeuvre qualifi~e, de demande et d'infrastructure, ainsi que des conts de transport ~lev~s, continueront A en freiner l'exploitation A moins que Ie prix du p~trole n' augmente de fa~on spectaculaire. N~anmoins, il est possible de mieux utiliser Ie charbon pour r~pondre A long terme aux besoins ~nerg~tiques de I' Afrique. A I' avenir, toute expansion sur grande ~chelle devra ~tre assortie de mesures pour,prot~ger l'environnement. Une 61ectricit6 mains ch~re et plus fiable 5.139 En 1986, l'Afrique avait une capacit~ install~e d'~lectricit~ de 19 GW, dont les deux-tiers ~taient fournis par des centrales hydro~lectriques et Ie reste par des centrales thermiques, la plupart chauff~es au mazout. La consommation d'~lectricit~, qui est inf~rieure A 200 kwh par personne, est faible, m~me en fonction des normes de pays en d~veloppement (elle atteint 435 kwh en Inde). Les consommateurs sont surtout les m~nages et Ie secteur public. Les utilisations industrielles et commerciales sont peu importantes. En 1986, 86 % de l'~lectricit~ ~tait fournie par des services publics et 14 % par des g~n~rateurs commerciaux qui s' en servaient pour leurs propres installations ou la vendaient. En raison du peu de coop~ration entre les pays, seulement environ 8 % de l'~lectricit~ a ~t~ export~e. La part des producteurs ind~pendants pourrait consid~rablement augmenter si les r~glements Ie permettaient. 5.140 Les compagnies d'Hectricit~ sont pour la plupart de petites entreprises qui n'ont que rarement la possibilit~ d'obtenir les ~conomies d'~chelle qui justifient les grands barrages ou l'infrastructure conteuse dont on a besoin pour utiliser Ie gaz. La capacit~ install~e ne d~passe 1 GW que dans sept pays, dont Ie plus important est Ie Nig~ria. Les pertes d'~lectricit~ sont consid~rables - 30 % ou davant age dans certains pays, imputables en partie aux vols de courant. L'offre est irr~guli~re et une grande partie de la demande reste insatisfaite Encadr~ 1.1). 5.141 Une planification m~diocre a conduit A de conteux investissements dans une capacit~ de g~n~ration excessive, au d~triment des installations de distribution et de leur entretien. Au ZaIre, par exemple, l'utilisation de la capacit~ ne d~passe pas 25 % A cause de la r~partition peu efficace de la charge entre les centrales hydro~lectriques. Tandis que la capacit~ existante peut n'atre utilis~e qu'A hauteur de 50 %, sinon moins, un entretien m~diocre - qui entraine des pannes et de longues coupures de courant - a tendance A contraindre A investir dans de nouvelles installations. Le Nig~ria, par exemple, a environ 5 GW de capacit~ install~e pour alimenter un march~ qui, aujourd'hui, est l~g~rement inf~rieur A 2 GW. Souvent, l'~quipement est profond~ment d~grad~. L'entretien pourrait atre un moyen efficace par rapport aux conts d'accroitre les fournitures d'~nergie. 5.142 Plusieurs grands probl~mes se posent aujourd'hui pour les compagnies de gaz et d'~lectricit~ d'Afrique personnel pl~thorique - 238 - (d'environ 30 %) et bar~mes trop bas pour fournir des moyens suffisants pour assurer une exploitation m1nLmum, sans parler de l'entretien et des investissements. En outre, les arri~r~s vont de six mois a un an; les taux d'encaissement d~passent rarement 80 % de l'~lectricit~ vendue. En outre, la dette est d~bilitante, a cause d'un surinvestissement et d'un m~diocre contrOle de la qualit~. 5.143 L'Afrique a un ~norme potentiel hydro~lectrique inexploit~ et ses abondantes r~serves de gaz naturel sont en grande partie inutilis~es (beaucoup de puits de gaz sont ciment~s ou, quand Ie gaz est obtenu en association avec Ie pHrole, il est brftl~ a la torche). Il convient de donner la priorit~ a l'utilisation de ces ressourees ~nerg~tiques indig~nes non exportables - en d~veloppant des march~s plus importants, dans Ie cadre d'une coop~ration multinationale, afin d'obtenir les ~conomies d'~chelle qU'exigent les ~normes investissements d'~quipement qu'elles entrainent; en ~tablissant des prix ~conomiques et en am~liorant les encaissements - qui sont essentiels pour assurer la viabilit~ financi~re et pour obtenir des capitaux destin~s a de nouveaux investissements; et en attirant des capitaux ~trangers pour des investissements qui ne b~n~ficient d'aucune garantie de l'Etat ou dans Ie cadre de privatisation. On a besoin de formules de financement novatrices - par exemple, un exploitant construit une usine, l'exploite jusqu'a ce qu'il soit rentr~ dans ses fonds puis la c~de au gouvernement. 5.144 II existe beaucoup de possibilit~s de rationaliser la production d' ~lectricit~ pendant les 30 prochaines ann~es, notamment grAce a des interconnexions de grilles nationales qui fonctionnent bien, par exemple entre Ie Ghana, Ie Togo, Ie B~nin et la COte d'Ivoire en Afrique occidentale, entre l'Ouganda et Ie Kenya et entre la Zambie et Ie Zimbabwe en Afrique orientale. En derni~re analyse, toute l'Afrique occidentale pourrait ~tre inter:onnect~e. Un syst~me analogue pourrait devenir r~alisable en Afrique orientale, mais probablement pas avant 20 ans. L' int~gration accrue des syst~mes d' Hectricit~ et I' amHioration de l'utilisation de la capacit~ pourr.aient rendre ~conomiquement viable une tranche suppl~mentaire de 60 GW. On pC1urrait ainsi multiplier de sept fois, d' iei a 2020, la production d'~nergie primaire par les eentrales hydro~lectriques, ce qui permettrait a la houille blanche de fournir 10 % de 1'~nergie primaire commerciale. 5.145 L'Afrique renferme 107 billions de pieds cubiques de gaz naturel, et pourtant la production de gaz n' alimente que 3 % de la consommation ~nergetique du continent. Par contre, I' Argentine a des r~serves de 25 billions de pieds cubiques (Ie quart de celIe de l'Afrique) qui fournissent plus du tiers de l'~nergie dont elle a besoin; toute l'Afrique subsaharienne consomme moins de la moiti~ de ce chiffre. En supposant que la consommation de gaz aille d~cupler en 30 ans, les r~serves actuelles dureront plus d'un si~cle. En outre, les centrales chauff~es au gaz cofttent moins cher a construire que les centrales hydro~lectriques. L'investissement projet~ de 10 milliards de dollars d'ici a 2020 dans l'infrastructure du gaz naturel permettrait de r~aliser, aux prix du p~trole de 1989, 3 a 4 milliards de dollars d'~conomies par an. 5.146 La grille interconneet~e du Ghana, du B~nin, du Togo et de la COte d'Ivoire donne un bon exemple ce qui pourrait ~tre fait pour optimiser grAce a la coop~ration l'utilisation des ressources indig~nes en ~nergie primaire. - 239 - En p~riodes de s~cheresse, la r~gion est expos~e A des pannes de courant. L'exploitation coordonn~e des interconnexions pennettrait d'optimiser l'emploi de l'~nergie hydro~lectrique accumul~e en COte d'Ivoire et au Ghana, et assurerait. aussi qu'on pourrait tirer partie de 1a capacit~ thennique des quatre pays en p~riodes de s~cheresse. La coordination des programmes d'expansion pennettrait aussi A certains pays de retarder de deux ou trois ans de gros investissements pour profiter d 'un exc~dent qui se trouve temporairement ail1eurs, et inversement. A plus long tenne, 1a coop~ration r~giona1e serait renforc~e si Ie Nig~ria faisait partie de l'interconnexion, ce qui pennettrait d'importer l'~nergie bon march~ fournie par 1es centra1es thenniques chauff~es au gaz et d'exporter l'~nergie hydro~lectrique durant les ann~es de p1uies abondantes. 11 existe des possibilit~s analogues en Afrique orientale entre des pays qui poss~dent de gros potentiels d'hydro~lectricit~ et/ou de gaz naturel (Ouganda, Zambie. Tanzanie, Mozambique, Rwanda et Ethiopie) et 1es pays pauvres en ~nergie (Soudan, Kenya et Zimbabwe); n~anmoins, il n'est gu~re probable qu'elles soient r~a1is~es durant 1es 20 prochaines ann~es. Energie solaire 5.147 L'~lectricit~ obtenue grAce A l'~nergie solaire reste coftteuse et n'est rentable que dans les zones ~loign~es ou Ie coOt des autres sources d'~nergie est prohibitif. Des technologies solaires simples peuvent servir A s~cher des produits agrico1es ou A chauffer l' eau. On pourrait ainsi r~duire la demande de bois de feu. L'~nergie photovo1talque peut. par exemp1e. r~frig~rer 1es vaccins dans les dispensaires ruraux. 5.148 Le principal inconv~nient de l'~nergie solaire est qU'on ne peut l'obtenir que durant 1a journ~e - or, en Afrique subsaharienne, l'~lectricit~ sert surtout A l'~c1airage. Dans ces conditions, l'emp1oi sur grande ~chel1e de l'~nergie solaire ne deviendrait r~alisab1e en Afrique que dans 1es cas ou il serait possible de stocker 1 '~lectricit~ dans des conditions plus ~conomiques. Une future strat~gie ~nerg~tique 5.149 Pour r~a1iser une expansion soutenab1e de l'offre d'~nergie afin d'appuyer sa croissance ~conomique, l'Afrique a besoin : D'~laborer pour Ie secteur ~nerg~tique des strat~gies nationa1es A long tenne se fondant sur l'utilisation au moindre coftt d'une gamme de sources d'~nergie nationa1es, import~es et internationa1es. Ces strat~gies comportent 1es ~l~ments fondamentaux suivants : ~tab1issement d'un ordre de priorit~ des investissements, avec un mei11eur ~qui1ibre entre d~penses d'entretien et de r~novation et investissements dans de nouvelles capacit~s; utilisation efficace des ressources et installations locales; conservation des sources coftteuses d' ~nergie, dont 1e p~trole et 1e bois de feu; po1itique de prix saine; renforcement des institutions qui s' occupent d' ~nergie; et entretien de 1a capacit~ insta1l~e. D'encourager entre 1es pays une coop~ration vigoureuse afin d'obtenir une exploitation et une utilisation optima1es de - 240 - l' I§nergie pour crl§er des marchh plus importants qui permettent des investissements I§conomiques et une utilisation optimale des ressources en houille blanche, gaz et autres I§nergies primaires; amoindrir les obstacles administratifs qui entravent l'achat, la transformation et la distribution du pHrole et des produits pl§troliers par des consortiums priv~s et ~liminer les barri~res du commerce international; et encourager conjointement la prospection et la mise en valeur de bassins gl§ologiques qui occupent plusieurs pays en cr~ant des conditions favorables aux investissements. De cder un environnement propice qui attire de gros investissements, notamment dans le p~trole et le gaz. Les I§Uments fondamentaux sont analogues 1 ceux dont il a I§tl§ question plus haut 1 propos des mines; il s'agit de crl§er un cadre contractuel qui I§tablisse un environnement favorable aux investissements tout en prot~geant les intl§rAts nationaux. D'encourager une utilisation plus efficace et d' acc6Urer 1a recherche-dl§veloppement de technologies 1 utilisation efficace de l'~nergie; d'encourager la tarification de l'l§lectricit~ au cont marginal et de donner plus d'efficacitl§ aux m~canismes de fixation des prix des produits p~troliers; de poursuivre la recherche-dl§veloppement portant sur les sources d' I§nergie renouvelables. De prendre des mesures concert~es pour s'attaquer 1 la crise du bois de feu. 5.150 Les efforts dl§ployh actuellement pour dl§velopper le secteur ~nerg~tique sont fortuits et mal coordonnl§s. 11 est essentiel d'avoir une approche plus rigoureuse et plus sysUmatique aux niveaux national, Sous-I"l§gional et rl§gional, en tenant compte des parametres de l'envlronnement. Les organismes multilat'raux et bilat'raux d'aide ont un grand rOle a jouer pour encourager et soutenir ces efforts nationaux et r~giollaux. - 241 - Encadr~ 5.1 R~ussite de l'industrialisation anim~e par les exportations A Maurice Les industries de fabrication jouaient un rOle secondaire dans l'~conomie de Maurice avant son ind~pendance, en 1968. L'~conomie du pays reposait sur Ie sucre et la modiciU des revenus, ains! que les faibles dimensions du march~, n'offraient gu~re de possibilit~s d'implantation d'une industrie efficace qui remplace les importations. Aprh I' ind~pendance, Ie pays a identifi~ Ie tourisme et les industries A vocation exportatrlce parmi les sources possibles de croissance, suivant en cela Ie modUe de petits pays d' Asie, tela que Hong Kong, Singapour et TaIwan. La Loi de 1970 sur la Zone franche industrielle visait A attirer des investisseurs mauriciens et ~trangers vers Ie secteur des industries de transformation travaillant pour 1 'exportation. Parmi les incitations offertes figuraient des exon~rations fiscales temporaires sur les dividendes et les b~n~fices non distribu~s, l'entr~e des intrants import~s en franchise de douane, Ie libre rapatriement du capital et des dividendes, des conditions d'emploi souples, et l'accessibilit~ de terrains et usines. Les politiques de change et salaires furent elles aussi con9ues pour assurer la rentabilit~ de la production destin~e OJ. l'ex~ortation. Pendant les ann~es 70, les r~sultats obteuus ont ~t~ remarquables. En quelques ann~es, les investissements industriels ont quadrupl~, financ~s en partie grace aux b~n~fices d'une vigoureuse industrie sucri~re. Le PIB r~el a progress~ A un rythme annuel d'environ 10 % pendant la plus grande partie de la d~cennie. Cependant, la croissance des industries de fabrication s'est arr~t~e en 1979-82, quand la baisse des cours du sucre, Ie deuxi~me choc p~trolier et la r~cession mondiale ont provoqu~ de graves d~s~quilibres financiers et ~conomiques. Le gouvernement a dagi rapidement avec des mesures de stabilisation A court terme, un ajustement du taux de change, la reforme de sa politique commerciale et un blocage des salaires et des prix pour arr~ter la hausse des coQts de main-d'oeuvre. D'autres mesures visaient A donner une vigueur nouvelle aux exportations industrielles : accords bilat~raux pour ~viter la double imposition des dividendes, plan de garantie du cddit A l'exportation pour prot~ger les banques commerciales en cas de cessation de paiement, remboursement des droits de douane sur les nouvelles exportations d'entreprises orient~es vers Ie march~ national, et promotion des exportations A l'~tranger. Ces am~nagements ont eu lieu au moment ou, sous la pouss~e des incertitudes politiques qui ~taient apparues sur Ie territoire, les capitaux de Hong Kong recherchaient A l'~tranger des possibilit~s d'investissement dans des pays ou la croissance des exportations textiles n'~tait pas frein~e par des mesures de contingentement. Les investissements indust.riels ont donc consid~rablement augment~ en 1983/84 et Ie nombre d'industries de transformation A vocation exportatrice est pass~ de 195 en 1984 A 408 en 1986 et A 586 en 1988. Sous l'impulsion du secteur des vAtements en tissus chaine et trame et en tissu A la maille, les exportations de produits manufactur~s ont augmenU A raison de 30 % par an et ont remplac~ Ie sucre comme principale exportation de Maurice. - 242 - Encadre 5.1 (conttd.) Tableau 5.1 de l'Encadr~ Composition des exportations de Maurice, 1970-88 (en pourcentage) 1970/71 1980/81 1987/88 Sucre 93,5 60,0 33,9 Zone franche industrielle 32,6 61,2 Autres .2d --L.!! ~ Total 100,0 100,0 100,0 Source : Banque mondiale. - 243 - Encadre 5.2 Coentreprise germano-zambienne Apr~s un debut prometteur sur Ie marche des vAtements de la Zambie, une coentreprise germano-zambienne, Serioes Ltd., a subi, vers la fin des annees 70, les contrecoups d'une contraction de la demande nationale et des restrictions frappant les importations d' intrants. Pour surmonter ces difficultes, Serioes s'est mis a la recherche d'un marche a l'etranger. II est devenu un vigoureux exportateur en se playant sur un creneau special du marche international - les uniformes militaires et ceux des compagnies d' aviation. Cette reussite s' explique en particulier par les elements suivants aptitude de l'entreprise a trouver un creneau sur Ie marche; gestion permettant d'obtenir une qualite et des coOts competitifs; et transfert de technologie par ~'intermed~aire de la formation. L'entreprise fabriquait des vAtements masculins, des v~tements de sport, des uniformes et des v~tements feminins. Tr~s rapidement, les produits de l'entreprise furent vendus dans toute la Zambie, puis dans les pays voisins; l'entreprise ouvrit alors des magasins de vente au detail. Le directeur de la compagnie, de nationalite sri-lankaise, avait prouve qu'il savait s' adapter aux conditions de I' Afrique. L' installation d 'un materiel de qualite s'accompagna d'une formation pratique, a l'usine, donnee par des techniciens allemands competents. Cette formation sur Ie tas a assure qu'il avait transfert, et non pas simple acquisition de technologie, et a permis a des employes locaux d'occuper eventuellement des pastes de cadres moyens et superieurs en remplacement d'etrangers. Malgre un debut prometteur, la contraction du marche national et Ie manque de devises pour importer les intrants a amene Serioes a licencier la moitie de ses employes en 1983. L'experience accumulee par Ie fondateur en mati~re de production et d'exportation l'a conduit a rechercher un creneau specialise lui permettant de survivre. Apr~s une premi~re vente d'uniformes militaires a la Tanzanie, la compagnie s'est mise a vendre des uniformes a d'autres pays africains et vient recemment de s'implanter sur Ie marche de l'Allemagne occidentale. Elle a egalement trouve un autre creneau, celui des uniformes de compagnies aeriennes. La reus site de Serioes montre comment un associe etranger peut jouer un rOle catalytique fondamental s' il apporte en m~me temps I' experience, la vision, les competences techniques, une connaissance de gestion et Ie sens des affaires qui permettent de trouver un creneau sur un marche international extr~mement competitif. - 244 - Encadr~ 5.3 Madagascar exporte des vAtements d'enfants en Europe L'art traditionnel de la broderie malgache et les avantages comp~titifs apport~s par la d~valuation ont permis A une malgache de s'implanter sur Ie march~ europ~en des vAtements d'enfants haut de gamme. Deux ans apr~s avoir abandonn~ la d~coration d'int~rieur pour la fabrication de nappes brod~es. elle exportait en effet en Europe plus de 1 millions de dollars de vAtements d'enfants et de nappes brod~es. La broderie est un art bien connu A Madagascar. Pour fournir A ses clients des nappes brod~es de haute qualit~, la jeune d~coratrice recruta des femmes, en 1986. pour travailler dans son arri~re-cour. Elle fit faire aussi pour sa fille des robes qui furent bien accueillies lors d'un voyage qu'elle fit en Europe. En 1987, elle pr~senta A Paris. A l'occasion d'un salon de couture. une collection de vAtements pour enfants brod~s de haute qualit~. Elle avait choisi des mod~les classiques qui ne changent gu~re avec la mode et avait mis en valeur une finition parfaite pour capter Ie march~ haut de gamme. En choisissant ce cr~neau, elle est devenue moins tributaire d'informations concernant les tendances de la mode. La grande d~valuation mise en place par Madagascar en 1987 lui a permis de mieux lutter contre la concurrence sur les march~s internationaux, notamment de la part des exportateurs philippins. Ses affaires ont prosp~r~ grAce aux commandes d'exportation et, au bout de deux ans A peine, elle employait 300 femmes. Une croissance plus rapide aurait ~t~ possible si elle avait pu recevoir un financement bancaire, mais elle h~sitait A prendre des engagements en exc~s de ses moyens financiers. La quasi-totalit~ des ~l~ments de production sont de fabrication locale, y compris les tissus en coton malgache. En I' absence de carton, Ie conditionnement utilise des articles de vannerie traditionnels en fibres naturelles pour prot~ger les vAtements durant Ie transport. Apr~s avoir ~t~ nomm~e pr~sidente de I' association des exportateurs de v~tements, elle a obtenu d' Air Madagascar une r~duction des tarifs de transport a~rien des marchandises A destination de l'Europe, qui ~taient beaucoup plus ~lev~s que dans Ie sens Europe-Madagascar. Le Gouvernement a facilit~ l'op~ration en rendant les exportations plus rentables et en simplifiant les d~marches. L'entrepreneur local a r~pondu en adapt ant des produits et des m~tiers locaux A un march~ international sp~cialis~. Dans ce cas, les moyens existaient; il ne manquait qu' un environnement favorable et un sens des affaires pour y ajouter une valeur consid~rable. - 245 - Encadr~ 5.4 R~percussions des programmes d'ajustement sur Ie secteur industriel de certains pays Au d~but, les programmes d' aj ustement exercent sur l' industrie des effets l la fois positifs et n~gatifs; laur r~sulat final varie beaucoup se10n 1e produit et se10n l'entreprise. La d~va1uation fait augmenter la rentabilit~ des produits qui remp1acent des importations, et celle des exportations, tandis que la hausse des prix agrico1es fait accroltre 1a demande des principaux biens de consommation et des intrants agricoles; par contre, 1es mesures de stabilisation freinent 1a demande globale. Des prats ~ l'ajustement att~nuent 1es contraintes de change et am~liorent l'acc~s des entreprises aux intrants dont elles ont besoin, mais la lib~ralisation des importations intensifie les pressions que 1a concurrence exerce sur les entreprises peu efficaces. Les industries qui ne pouvaient pas importer tous les intrants dont el1es avaient besoin ou qui ~taient en mesure d'exporter ont r~agi de fa~on positive aux mesures d'ajustement, alors que celles qui ~taient fortement prot~g~es, ~taient tributaires d'intrants import~s ou dont les produits ne faisaient l'objet que d'une demande 1imit~e ont couru plus de risques. En derni~re analyse, l'effet a ~t~ positif, comme Ie montrent 1es statistiques de p1usieurs pays 00. la production industrielle a cess~ de reculer pour recommencer ~ croitre aussi longtemps que l'ajustement s'est poursuivi (ce qui n'a pas ~t~ Ie cas en COtye d'Ivoire ou en Zambie). . I - 246 - Encadre 5.4 (Cont'd.) Tableau 5.2 de l'Encadr~ Croissance de la production de produits manufactur~s, des exportations et de l'utilisation de la capacit~ avant et pendant la p~riode de r~forme (en pourcentage par an) Utilisation Production Exportations de la capacit~ Avant Apr~s Avant Apr~s Avant Apr~s COte d'Ivoire - 1,8 (81-83) 5,8 (84-86) - 6,9 12,3 Ghana -17,1 (80-83) 15,0 (84-87) -10,4 51,8 19 32 Nig~ria - 7,8 (82-85) 0,2 (86-87) -15,4 18,1 30 57 Zambie - 3,1 (82-84) 4,0 (84-86) 5,4 7,2 38 54 Source Banque mondiale, World Tables 1988-89, Washington, D.C. 1989. Les exportations de produits manufactur~s ont vigoureusement r~agi a l'am~lioration des stimulantset ont dans tous les cas stimul~ la croissance g~n~rale de la production, bien que leur base de d~part ait ~t~ r~duite. Dans plusieurs pays, la d~valuation a conduit a un emploi accru d'intrants d'origine locale et a la reprise d'industries de transformation de produits export~s. telles que ce lIes du bois et du cacao. Une grande partie de l'accroissement correspond a la r~cup~ration de march~s d'exportation et a l'expansion d'op~rations existantes, comme c'est Ie cas, par exemple, des exportations textiles du Ghana et du Nig~ria en direction des pays voisins, et de produits a base de cacao de COte d'Ivoire et du Nig~ria a destination de l'Europe. Des entreprises de plus en plus nombreuses recherchent des d~boUGh~s d' exportation, parfois pour des produits nouveaux, comme les v~tements de Madagascar et Ie glycerol du Ghana. :Les taux d'utilisation de la capacit~ se sont am~lior~s sensiblement et rapidement, en partie parce que les pr~ts a l'ajustement ont att~nu~ les contra.intes qui frappaient les intrants import~s. Au Nig~ria, Ie taux moyen d'uti.Lisation a presque doubl~, pour atteindre 57 %, surtout dans Ie secteur des industries de biens de consommation. Par contre, les industries de produits interm~diaires et de biens de consommation ont ~t.~ compromises par la r~duction de la production; les entreprises dont les produits contiennent plus de 66 % d' importations travail lent a moins de 50 % de leur capacit~. Les politiques d'ajustement semblent exercer les pressions les plus fotes sur les grosses entreprises tr~s prot~g~es, qui appartiennent souvent au secteur public des industries de base. Par exemple, dans cinq entreprises moins efficaces de Zambie, l'utilisation de la capacit~ est tomb~e de 56 a 25 %. Dans certains pays, la d~valuation a rendu la main-d' oeuvre plus comp~titive sur Ie plan international. A Madagascar, Ie salaire horaire, exprim~ en dollars, est tomb~ en 1986 a 0,29 dollar, contre 0,40 en Inde et 1,89 it Hong Kong, ce qui a conduit des fabricants de v@tements de Hong Kong qui avaient des usines a Maurice a investir a Madagascar. Certaines grosses entreprises ont r~agi a l'intensification de la concurrence et a l'assouplissement des lois du travail en r~duisant leurs effectifs afin de diminuer leurs budgets de main-d'oeuvre. La main-d'oeuvre ~trang~re a ~t~ Encadre 5.4 (Cont'd.) - 247 - particuli~rement touchee apr~s que la devaluation l'ait rendue plus ch~re. L'experience du Nigeria sugg~re que l'emploi peut augmenter dans les petites entreprises qui, auparavant, etaient moins concernees par les restrictions contre Ie licenciement des employes en surplus. Les politiques d'ajustement encouragent des reconversions structurelles au sein d'une industrie au fur et ~ mesure que diminuent d'importance les entreprises fortement protegees tributaires des importations et qu'augmentent les exportations et la transformation d'intrants d'origine nationale. La production industrielle - et notamment les exportations - se sont ameliorees dans leur ensemble ~ court terme dans les pays qui procedaient ~ un ajustement; il faut cependant ranimer la demande nationale afin de soutenir la reprise et la croissance ~ long terme. - 248 - Encadre 5.5 Le Suame magazine du Ghana Renforcement des moyens indig~nes en ingenierie Au Ghana, la petite industrie temoigne, depuis Ie debut des annees 70, d'une resistance et d'une croissance remarquables. Le secteur non structure s'est revele particulierement ingenieux pour survivre A la crise economique de la fin des annees 70 et du debut des annees 80. Dans Ie cadre du Programme de relevement economique entrepris en 1983, Ie secteur non structure de l'industrie et des services a permis de lancer des innovations technologiques A forte intensite de main-d'oeuvre pour remplacer les importations. Des efforts sont en cours pour ameliorer les conditions institutionnelles et financieres afin de permettre Ie developpement de l'esprit d'entreprise et de la technologie industrielle. Un exemple d'ingeniosite et d'esprit d'entreprise est fourni par Ie "Suame Magazine" de Kumasi groupement d'environ 5.000 artisans qui travaillent dans des abris de fortune. Ces mecaniciens de petits garages et ateliers reparent et reconditionnent de vieux vehicules et de vieilles machines et transforment les dechets metalliques en se servant d'outils relativement primitifs. Jusqu' A 80 % du parc automobile du Ghana, qui devient Age, est entretenu et reconstruit dans des ensembles de garages marginaux, comme Ie Suame Magazine, ou des specialistes font les travaux de mecanique, de carrosserie, d'electricite et autres. Ces mecaniciens ont appris A fabriquer les pieces de vehicules et de machines qui etaient devenues introuvables durant la crise economique. lIs ont prospere dans Ie cadre du Programme de relevement economique parce que l'accroissement du taux de change officiel, qui a augmente d'un facteur de cent depuis 1983, a rendu relativement coftteuses les pieces importees tandis que La liberalisation des importations permettait de se procurer plus facilement les outils et les intrants necessaires. Le Gouvernement est intervenu pour aider ces artisans indigenes en leur offrant des services techniques, en leur donnant une formation et en leur consentant du credit. Le Centre de consultation technologique de la Faculte des sciences et de la technologie aide depuis plus de dix ans Ie Suame Magazine dans Ie cadre de sa Cellule de formation en technologie intermediaire. Le Centre fonctionne desormais avec un minimum d' apport financier de l'Etat. Celui-ci a repris Ie principe des cellules de formation dans l'ensemble du territoire par l'intermediaire d'une organisation novatrice, appelee Ghana Regional Appropriate Technology Industrial Services (GRAT IS), qui donne sur place une formation en matiere d' elaboration de produits. Le Centre et GRATIS effectuent des recherches qui leur permettent de mettre au point des technologies appropriees utilisant des materiaux locaux pour d'importants secteurs tels que l'outillage agricole, les transports intermediaires, et les materiaux de construction. lIs fournissent egalement de precieux conseils aux entreprises qui elaborent de nouveaux produits. La formation dans Ie cadre d'institutions comme l'Institut technique de Kumasi s 'est revelee populaire et efficace. Par l'intermediaire de son Projet de remise en etat des transports, qui beneficie du soutien de l'IDA, Ie Gouvernement organise une formation qui ameliore les competences des - 249 - Encadre 5.5 (Cont'd.) m~caniciens des ateliers marginaux et enseigne des rudiments de comptabi1it~ et de gestion. Le Gouvernement a ~ga1ement mis en place un programme pilote qui fournit du cr~dit aux petits exp10itants de groupements de garages, comme Suame Magazine. Les b~n~ficiaires sont des coop~ratives de m~caniciens qui se sont constitu~es pour acheter et uti1iser en commun des machines, comme 1es tours et 1es rectifieuses de vi1ebrequins. L'Association nationa1e des garagistes garantit "les pr~ts. qui sont fournis ! des conditions commercia1es par 1a Banque de 1a s~curit~ socia1e. .D'une moyenne d'environ 3.000 dollars, ces pr~ts ont d~j! aid~ 1es petits m~caniciens ! am~liorer sensib1ement 1a qua1it~ de 1eursprestations et leurs comp~tences. "I - 250 - Encadr~ 5.6 Production de l'or au Ghana Au moment de son ind~pendance, Ie Ghana ~tait Ie principal producteur d'or d'Afrique occidentale, avec une production proche de 1 million d'onces par an. La production a suivi pendant 20 ans un mouvement constant de baisse pour tomber A 277.000 onces en 1983, A la suite de la sur~valuation de la monnaie, de nombreux obstacles qui entravaient les investissements priv~s et du manque de fonds permettant au secteur public d'investir dans Ie secteur. L'industrie de l'extraction de l'or du Ghana possede Ie potentiel min~ral lui permettant de retrouver, voire d~passer. son ancien niveau maximum de production. Le Gouvernement a fait de la production d 'or un objectif principal de son programme de relevement ~conomique. Le Gouvernement a pour strat~gie d' encourager les investissements miniers en faisant une r~forme des orientations g~n~rales. En 1986, il a mis en place, pour attirer les investisseurs priv~s, un nouveau code minier coh~rent, un systeme de taxation et un cadre de r~glementation. D~sormais,. c'est une Commission Qes min~raux qui n~gocie les dispositions fiscales et les modalit~s d'acces aux devises en fonction de principes bien d~finis et uniform~ment appliqu~s, et qui d~livre des baux et des permis de prospection. Ces mesures renforcent les r~formes macro~conomiques - et surtout un ajustement consid~rable du taux de change - en attirant de l'~tranger des capitaux et, en mame temps, les experts en gestion et les techniciens dont Ie pays a grandement besoin. De cette maniere, Ie Ghana a pu adopter des m~thodes am~lior~es d'extraction et de r~cup~ration, par exemple la lixiviation des d~blais, qui sont d~jA tres employ~es ailleurs. La nouvelle attitude du Gouvernement donne d~jA de bons r~sultats. On pense que la production d'or va atteindre environ 400.000 onces en 1989 - soit environ 50 % de plus que son chiffre Ie plus bas o~ elle ~tait descendue en 1983. Vers Ie milieu de l'ann~e 88, la Southern Cross Mining, propri~t~ d' invl~stisseurs privh A hauteur de 70 % et de la State Mining Company A hauteur de 30 %, a ouvert la premiere mine d' or qui ait ~t~ mise en exploitation au Ghana depuis plus de 40 ans, et dont la production atteint actueI1ement environ 36.000 onces par an et va sans doute augmenter. Trois autres compagnies minieres, la Canadian Bogosu Resources, les Ghanaian Australian Goldfields et les Teberebie Goldfields, qui appartiennent toutes au secteur priv~ A hauteur de 90 % et au Gouvernement A hauteur de 10 %, doivent commencer leur exploitation d' ici deux ans. D' autres nouvelles mines d'or en sont A diverses ~tapes de prospection et de planification. Enfin, Ashanti Gold Mines, une coentreprise d~tenue A 45 % par Ie secteur priv~ et A 55 .t par Ie Gouvernement et la mine d' or la plus importante et la plus rentable du Ghana, a presque termin~ une tranche de grands travaux qui doivent porter sa production, obtenue en grande partie en sous-sol, de 280.000 onces en 1987 A 400.000 onces par an en 1991; elle est sur Ie point d'entreprendre une nouvelle tranche d'expansion qui obtiendra 100.000 onces suppl~mentaires par an A partir de gisements superficiels. La production d'or du Ghana devrait alors d~passer 600.000 onces par an; elle continuera d'augmenter durant la prochaine d~cennie. - 251 - Encadr~ 5.7 Po~les A bon rendement ~nerg~tique au Niger Comme dans la plupart des pays de l'Afrique subsaharienne, Ie bois est la source principale d'~nergie du Niger, OU il fournit les quatre-cinqui~mes de l'~nergie brute. Environ 98 % des m~nages des zones urbaines s'en servent pour pr~parer les aliments. La consommation grandissante du bois de feu et la fa90n peu efficace dont il est recueilli et consomm~ ont exerc~ un effet nuisible sur l'environnement et sur l'~conomie du pays. Pour surmonter ces probl~mes, Ie Gouvernement a mis sur pied un programme visant A am~liorer l'efficacit~ de la consommation de combustible par les m~nages urbains. II s'agissait de remplacer Ie po~le traditionnel, qui manquait d'efficacit~, par un nouveau po~le portatif en m~tal, d'un mod~le am~lior~, et de mettre en place, sans aucune subvention, un r~seau autonome et ind~pendant de prcduction et de vente qui utilise les r~seaux commerciaux existants. Plusieurs interventions ont eu lieu en m~me temps. On a donc con9u un po~le plus efficace (appel~ Mai Sauki); on a form~ des artisans pour Ie fabriquer; on a apport~ des am~liorations au r~seau de commercialisation; et on a fait la publicit~ du nouveau Mai Sauki. Pendant les deux ann~es de r~alisation du projet, on a fabriqu~ et vendu pr~s de 40.000 po~les, soit 200 % de plus qu'on avait pr~vu A l'origine. Le Mai Sauki a r~ussi parce qu'il r~pond aux besoins des consommateurs et des producteurs. II est facile A utiliser et il est adapt~ aux habitudes de cuisson locales. Les d~penses consacr~es par les m~nages au bois de feu ont diminu~ de 30 %, soit une somme suffisante pour rattraper en deux mois seulement Ie prix du po~le. Les 116 ouvriers en m~taux ind~pendants form~s par Ie projet qui vendent Ie Mai Sauki ont pratiquement doubl~ leurs b~nHices. La r~ussite du projet s'explique aussi par Ie fait qu'il ~tait ouvert aux suggestions et a fait preuve de souplesse pour reprendre des activit~s d~jA entreprises pour faire connaitre les po~les. Beaucoup de Nig~riens, depuis les Chefs de district jusqu'aux Organisations f~minines, en passant par l'Organisation de la jeunesse du Niger, ont particip~ au projet, tandis que des techniciens et des ing~nieurs du Laboratoire national de recherches solaires collaboraient A la conception et aux essais des po~les. Le projet a ~galement b~n~fici~ de la collaboration d'ONG, d'organisations locales, et d'associations b~n~voles, telles que Ie Church World Service, l'Association bois de feu, Ie Corps de la paix, les Volontaires europ~ens pour Ie d~veloppement. et beaucoup d'autres encore. En travaillant d~s Ie d~but en liaison ~troite avec diverses organisations nationales et ~trang~res, Ie projet a pu tirer parti de leurs exp~riences et les aider A son tour dans leurs travaux en canalisant les efforts qu'elles entreprenaient dans Ie cadre du projet. - 252 - CHAPITRE 6 Promouvoir ltentreprise africaine Lteffet catalytique de l'esprit d'entreprise 6.1 L'Afrique a besoin d'entrepreneurs. La p~rennit~ de la croissance ~conomique d~pendra de l'aptitude de la population africaine, quelle que soit son origine sociale, A tirer parti des nouvelles opportunit~s commerciales et techniques qui ne manqueront pas de se pr~senter. Au cours des trois prochaines d~cennies, la population de l'Afrique sub-saharienne devrait s'accroitre d'au moins 600 millions de personnes, ce qui correspond A plus d'un doublement de la population active. Ce sont les entrepreneurs africains qui devront cr~er les emplois correspondants et seule leur initiative permettra de garantir que la production en quantit~s suffisantes de biens et de services A des coUts raisonnables. 6.2 Les entrepreneurs sont des gens aptes A d~celer des possibilit~s de profit, dispos~s A prendre des risques pour les concr~tiser et capables d'organiser une entreprise. Quels que soient les pays, Ie nombre de personnes ayant un sens inn~ de l'entreprise est limit~. C'est A des motivations d'ordre ~conomique et non A des impulsions instinctives que r~pondent en premier lieu la plupart des entrepreneurs qui sont en effet attires par toute activit~ susceptible de g~n~rer des profits. De mani~re g~n~rale, lorsque l'environnement ~conomique est d~favorable, les entrepreneurs A consacrer leur ~nergie A la recherche de rentes de situation. C'est par rapport A cette alternative plus simple que seront jug~es les possibilit~s de profit qui pourraient r~sulter du recrutement d'employ~s suppl~mentaires ou de l'achat de nouveaux ~quipements pour d~velopper des activit~s productives. Pour que les entrepreneurs poursuivent de telles activit~s A long terme, i1 faut qu'ils soient libres dtaccumuler des profits. tant pour r~compenser leur succ~s que pour COmpeI\Ser leurs pertes ~ventuelles. 6.3 Le secteur informel est un excellent exemple des forces et des faible'sses des entreprises africaines. Les activit~s de ces entreprises qui nE' sont ni r~glement~es ni pour la plupart repertoriees, s'exercent dans les secteurs les plus accessibles et les plus concurrentiels des ~conoIl'1ies africaines. Ces entreprises qui sont pour la plupart tr~!) petite's constituent un vivier d' entrepreneurs. Soumis A des r~glementations contraignantes et ignor~ par les pouvoirs publics, Ie secteur informel a d~velopp~ ses propres institutions traditionnelles pour r~pondre A ses besoins de cr~dit et de formation. Cependant, du fait de leur environnement ~conomique restritif, de leurs liens t~nus avec les march~s formels et des infrastructures insuffisantes dont ils disposent. les entrepreneurs du secteur informel n'ont pas ~t~ en mesure d'augmenter leurs effectifs et de se d~velopper. 6.4 Un environnement plus propice et un support plus efficace aux initiatives des entrepreneurs permettraient A des entreprises de toute tail Ie d'apporter une contribution importante au d~veloppement. Les entrepreneurs eux-m@mes devront participer activement A l'am~lioration des politiques, des r~glementations et des institutions qui les concernent. En - 253 - adoptant une approche participative qui permette de mieux adapter les politiques et les institutions administratives aux besoins des entrepreneurs, les pouvoirs publics peuvent renforcer la confiance dans les r~formes juridiques et institutionnelles, am~liorer la productivit~ et diminuer le cofit des affaires A tous les niveaux. A quelques variations pr~s selon les pays, les objectifs d'une telle approche seront les suivants: · am~liorer le climat des affaires en ~liminant les r~glementations injustifi~es, en prot~geant Ie droit de propri~t~ et le droit des contrats et en am~liorant l'!mage des entrepreneurs aupr~s du public. · d~velopper les syst~mes financiers et les r~seaux d'information afin d'acc~l~rer la r~ponse aux incitations des march~s, d'encourager la creation d'emplois et d'am~liorer la productivit~ des petites entreprises. · les march~s en les reliant par des moyens de communication ~largir ad~quats, en d~centralisant la passation des march~s publics et en encourageant la participation du secteur priv~ aux prestations de services publics. · encourager les associations (y compris les associations commerciales et professionnelles, les organisations traditionnelles et les ONG) qui permettent aux entrepreneurs de d~fendre leurs inter@ts et de mobiliser les resoorces dont ils ont besoin. Le d~veloppement de l'entreprise africaine 6.5 Les agriculteurs, les commer~ants, les artisans et les responsables de grandes entreprises africains constituent un vivier d'entrepreneurs locaux. A mesure 00 les gouvernements assouplissent leurs contrOles sur la concurrence et Ie commerce, ces groupes commencent A tirer profit des nouvelles incitations du march~. Certes, il existe dejA des exemples de succ~s mais Ie d~veloppement de l'emploi et de la production n~cessaire A long terme ne s'est pas encore mat~rialis~. Pour permetr2 A leurs ~conomies de s'engager sur la voie d'une croissance durable et ~quitable, les pays africains devront r~~valuer les exp~riences pass~es, les contraintes actuelles et les perpectives futures de l'entreprise en Afrique. La tradition commerciale africaine 6.6 L'esprit d'entreprise a une longue histoire en Afrique sub- saharienne. Dans certaines r~gions de ce continent, le commerce sur de longues distance par caravanes remonte au onzi~me si~cle. Les archives de plusieurs villes d'Afrique de l'ouest, notamment Tombouctou, Kano et Salaga. t~moignent du rOle d'~tape que ces villes ont jou~ pour des caravanes trans-saharienne dont les effectifs pouvaient compter jusqu'A 2.000 commer~ants et caravaniers extr@mement bien organis~s. Des d~couvertes arch~ologiques ont permis de prouver l'existence du "Grand Zimbawe" dont les activit~s mini~res ~taient li~es aux march~s d'exportation arabes A partir de la cOte sud-est de l'Afrique. Tolerant la ·1 - 254 - diversit~ ethnique et Ie pluralisme religieux. ces centres commerciaux ont d~velopp~ leurs propres r~gles et institutions ainsi qu'un syst~me d'~changes lib~ral et un jargon professionnel commun. 6.7 Les villes et les villages de l'ensemble du continent t~moignent des profondes traditions commerciales de 1 'Afrique. Les commer~ants et les artisans d'aujourd'hui continuent d'organiser leurs activit~s en fonction de coutumes et de r~gles tr~s anciennes dont Ie respect est assur~ par des institutions traditionnelles. En Afrique de l'ouest et en Afrique centrale, les femmes assurent Ie commerce des v@tements, des bijoux et des chaussures qui sont achet~s en gros en Europe et revendus au d~tail sur les march~s locaux. Les "Reines des marches" qui sont choisies par leurs pairs r~glementent Ie commerce du poisson, de l'huile de palme et d'autres denr~es locales qui est tr~s importants. Les "Nana Benz" du Togo sont c~l~bres pour leur succ~s dans Ie domaine de la commercialisation des textiles. A Dakar, les cordonniers fabriquent des chaussures traditionnelles non seulement pour Ie march~ sen~galais mais ausi pour l'exportation vers la Gambie et Ie Mali A travers des circuits commerciaux informels · 6.8 Les hommes, les capitaux et les marchandises ont toujours voyag~ en Afrique, ce qui a permis une diss~mination des id~es et des techniques. Des groupes ethniques tels que les Hausa-Fulanis se sont ~tablis dans de nombreux pays pour commercialiser leurs produits et leurs talents. Les investissements ~trangers et les technologies import~es ont eu une influence consid~rable sur Ie d~veloppement de la grande industrie publique et pr:Lv~e. Dans plusieurs r~gions. des entreprises ~trang~res jouent un rOle :Unportant en mati~re de transfert de capitaux et de technologies. Certaines de ces entreprises sont une source importante de formation pour les entrepreneurs nationaux. ModifIer les rOles du secteur public et du secteur prive 6.9 Au cours des trois premi~res d~cennies qui ont suivi les ind~ptmdances, les responsables politiques se sont concentres principalement sur la promotion de grandes entreprises industrielles. Celles-ci devaient devenir les fleurons du d~veloppement et b~n~ficiaient de ce fait d'un support g~nereux de la part des pouvoirs publics. C'est ainsi que les grandes entreprises b~neficiaient d'un acc~s pr~f~rentiel au cr~dit, d'un traitement de faveur en mati~re de devises et d'une protection contre la concurrence sous forme de subventions, de tarifs douaniers, de quotas et de licenses exclusives. Leur capacit~ etait souvent augment~e sans tenir compte de consid~rations de coilt ou de rentabi1it~. 6.10 Les Etats jouaient Ie rOle d'entrepreneur car on estimait que Ie secteur priv~local ne disposait ni des capitaux ni de l'expertise n~cessaire pour susciter un developpement economique et une indust.rialisation rapides. L'Afrique etait consider~e comme un continent d~pourvu d'entrepreneurs locaux et dans lequel un secteur moderne "progressif" contrastait avec A un secteur informel "retardataire" tout au plus capable de pourvoir aux besoins de subsistance. Considerant les activit~s du secteur informel comme marginales pour Ie d~veloppement, les - 255 - responsablespolitiques ont consid~rablement sous-estim~ la profondeur et le potentiel de l'esprit d'entreprise africain. Ce faisant, ils ne se sont pas rendus compte que leurs politiques rel~guaient les entrepreneurs dans le secteur informel. 6.11 Presque tous les gouvernements africains ont essay~ de temps en temps de promouvoir la petite et moyenne entreprise (PME) mais Ie cadre politique et institutionnel existant ~tait en g~n~ral peu favorable aces entreprises. La plupart des PME qui se sont d~velopp~es en r~ponse a la loi de l'offre et de la demande l'ont fait en d~pit du m~pris ou contre la volont~ des pouvoirs publics. Au Ghana et en Tanzanie qui sont des cas extr~mes, des ressources ~normes ont ~t~ consacr~es aux entreprises pUbliques tandis que les entrepreneurs locaux qui ont essay~ de contourner les contrOles de prix ont vu leurs installations d~truites et leurs propri~t~s confisqu~es. De m~me, en Ouganda, l'ensemble de la communaut~ asiatique a H~ expuls~e en 1972 afin que l'Etat puisse contrOler Ie secteur priv~. Ces mesures ont frein~ la croissance ~conomique en decourageant les investissements A long terme tant etrangers que locaux. Dans les cas les plus favorables, les entreprises publiques ont simplement prive les entreprises locales de l'acc~s aux marches et aux financements. 6.12 Dans les annees quatre-vingt, les rOles respectifs du secteur public et du secteur prive se sont considerablement modifies. A mesure ou ils decouvraient les limites des strategies de d~veloppement adoptees apr~s les independances, les gouvernements ont commence a tenir compte des entrepreneurs dans leurs politiques A long terme d'emploi et de croissance. Dans la plupart des pays, Ie secteur public a progressivement perdu sa predominance economique et les initiatives priv~es tant locales qu'etrang~res ont et~ de plus en plus encouragees. Les contrOles auxquels etaient soumis les investissements ~trangers ont ete assouplis et les capitaux locaux qui s'etaient accumul~s grace a des rentes de situation ont commence A s'orienter vers des activites productives. De mani~re generale. les gouvernements sont devenus plus conscients de l'impact de leur politiques tant sur les decisions economiques au jour Ie jour que sur les investissements prives A long terme. Perspectives et contraintes 6.13 En dehors du secteur informel, les petites et moyennes entreprise sont rares. Cette absence d'entreprises capables de combiner les technologies import~es et locales - c'est a dire Ie "maillon manquant" - est l'un des principaux obstacles au developpement de l'Afrique. Malgre les reformes de politique recentes, l'esprit d'entreprise est brid~ par les r~glementations en vigueur et l'insuffisance de la demande de biens et de services locaux. II est difficile pour des petits entrepreneurs de constituer les capitaux necessaires, de mettre leurs competences en commun ou d'avoir acces A des infrastructures et des services adequats. La situation evolue malgre tout et en depit de ces difficultes. dans certains pays, de nouvelles ent-reprises sont en train de se developper (Voir Encart 6.1). I· - 256 - 6.14 Dans d'autres r~gions du monde, surtout en Asie, une couche interm'diaire d'entreprises moyennes s'eat d~velopp'e au cours des trente demUres ann~es entre les entreprises les plus importantes et les entreprises les plus modestes. Les produits et les services offerts par ces entreprises sont bien adapt~s au contexte de nombreux pays en d~veloppement qui se caract~rise par des exc~dents de main d'oeuvre, une p~nurie de re,sources ~nerg~tiques et de devises, un manque d'informations et de comp~tences, une raret~ des capitaux d'investissement et des variations climatiques et p~dologiques importantes. Les PME permettent en effet de cr~er des emplois 1 moindre coOt et de faire une utilisation plus intensive des res sources locales. Ces entreprises contribuent ~galement A promouvoir l'~quit~ en produisant des biens et des services accessibles 1 la majorit~ des populations. Enfin, elles permettent de d~velopper l'esprit'd'entreprise par la formation sur Ie tas. Par cons~quent, en conciliant les exigences d'une consommation de masse avec les ressources disponibles et les technologies locales et import~es, les PME jouent un rOle vital dans Ie d~veloppement. 6.15 PERSPECTIVES. Le sc~nario de croissance de 4 % pr~sent~ dans Ie Chapitre 2 suppose une augmentation consid~rable de la capacit~ d'absorption de main d'oeuvre et de la productivit~ des petites entreprises. 11 faudra pour cela que les gouvernements africains prennent les mesures n~cessaires pour encourager ces activit~s 1 forte intensit~ de main d'oeuvre et dont la valeur ajout~e est importante. En 2020, une part importante de la valeur ajout~e en Afrique devra atre g~n~r~e par Ie secteux' des services qui consomme beaucoup de main d' oeuvre et dont la proximit~ par rapport aux march~s lui offre une protection nature lIe dont Ie secteur industriel ne b~n~ficie pas. Ceci devrait atre possible car, par exemple, dans les zones rurales, les entreprises non agricoles peuvent foumix des services ~l~mentaires en mati~re de cr~dit, de construction. de santa et d'~ducation. Ces activit~s coupl~es 1 une am~lioration de la productlvit~ agricole peuvent 1 leur tour stimuler la demande grAce A une augmentation des revenus ruraux. 6.16 Mame Ie Kenya qui est industriellement l'un des pays africains les plus avanc~s a pris r~cemment des mesures en vue de promouvoir les petites entreprises et les entreprises rurales non agricoles. Dans son Document parlementaire No 1. Ie gouvernement a pr'sent~ les grandes lignes d'un vaste programme d'appui aux PME. Ce rapport affirme: Pour que les kenyens puissent b~n~ficier d'une am~lioration ne serait ce que modeste de leurs conditions de vie, il est indispensable que ··. la grande majorit~ des emplois soit cr~~e. non pas dans les villes ou dans des grandes entreprises mais dans des exploitations agricoles et des petites entreprises de production et de services tant rurales qU'urbaines. Dans beaucoup d'autres pays africains, les perspectives de d~veloppement de grandes industries sont encore plus limit~es et il sera d'autant plus n.cessaire de cr~er des emplois productifs par l'interm~diaire des petites entreprises. - 257 - 6.17 CONTRAINTES. Le poids de lafiscalit~ et des r~glementations decourage les petits entrepreneurs d'integrer leurs activites a des syst~mes financiers et des circuits d'information formels. De ce fait, les possibilites de regroupement de leurs ressources se limitent au reseaux informels. Les politiques commerciales ont en general favorise les grandes entreprises a forte intensite de capital et augmente Ie coftt de fonctionnement des PME. Le plafonnement des.taux d'inter~t et les politiques sectorielles de credits qui devaient beneficier aux PME ont en realite desequilibre les march~s financiers et emp@che une allocation efficace des ressources financi~res. Les banques ~vitent de pr~ter aux PME car les garanties qu'elles presentent sont en g~n~ral insuffisantes et de plus. dans de nombreux pays, les credits a long terme restent rares du fait que les taux d'inter@t d~couragent les depOts a long terme (Voir Chapitre 8). 6.18 Les services de vulgarisation et les programmes d'assistance aux PME parrain~s par les Etats ont dans l'ensemble ~choue du fait de leur coUt insoutenable, d'une participation limit~e des interess~s et de leur inadaptation aux besoins. L'instabilit~ politique a egalement decourage les investissements en aggravant les incertitudes ~conomiques. Enfin. l'application erratique et arbitraire des r~glementations existantes a fausse les r~gles du jeu et incite un grand nombre d'entrepreneurs a se montrer tr~s prudents dans leurs rapports avec les marches et les services formels. De ce fait, le passage du secteur informel au secteur formel peut paraitre trop risqu~ m@me pour les entrepreneurs les plus innovateurs. De plus. les rentes de raret~ g~n~r~es par les politiques restrictives des Etats ont souvent permis des profits plus importants que ceux que pourraient generer des investissements ~conomiquement productifs. De ce fait, rares sont les entreprises qui ont la possibilite d'innover et de se developper et, en r~alite. la plupart d'entre elles fonctionnent bien en de~a de leur potentiel. Les entrepreneurs du secteur informel 6.19 Les petites entreprises independantes qui fonctionnent en marge des r~glementations en vigueur contribuent de mani~re substantielle a l'emploi et a la productivit~. Des estimations r~centes de l'Organisation internationale du travail (OIT), mont rent qu'en Afrique sub-saharienne. le secteur informel emploie 59 % de la population active urbaine. Par ailleurs, une enqu~te de l'OIT portant sur 17 pays africains a permis de cons tater que la production de ce secteur repr~sentait en moyenne 20 % du PIB (soit 15 milliards de dollars par an) des ~conomies concern~es. 6.20 Contrairement a leur r~putation en mati~re fiscale, un grand nombre d'entrepreneurs du secteur informel consacrent une partie importante de leurs revenus au paiement d'impOts. L'OIT a estim~ que plus de 40 % des entreprises du secteur informel de 10 pays d'Afrique sub-saharienne payent des impOts ou des patentes. Le produit des patentes que les petits ateliers de r~paration et les vendeurs de rues sont tenus d'obtenir constituent une part tr~s importante des revenus municipaux dans des villes telles que Bamako et Ouagadougou. Ces petites entreprises sont aussi - 258 - soumises A une taxation indirecte. En effet. n'~tant pas ~ligibles A des exon~rations particuli~res de droits de douane sur les ~quipements et fournitures import~s, la plupart de ces entreprises doivent s'approvisionner aupr~s de d~taillants, absorbant de ce fait le coQt de la fiscalit~ sur les ventes, le carburant et les importations. N'ayant qu'un acc~s limit~ aux circuits d'~pargne, les entrepreneurs du secteur informel sont particuli~rement vun~rables A l'inflation, qui est en fait une taxe sur la d~tention de liquidit~s. 6.21 Le dynamisme du secteur informel s'explique par sa capacit~ d'adaptation A l'~volution des march~s et par l'~troitesse de ses liens avec les institutions traditionnelles. Du fait de leur facilit~ de cr~ation et de dissolution, les petites entreprises constituent un d~bouch~ id~al pour l'esprit d'entreprise A tous les niveaux de la soci~t~. De plus, pour les femmes, les pauvres et les minorit~s, le secteur informel est souvent le seul d~bouch~ possible. Les femmes jouent un rOle important dans le secteur informel en grande partie du fait que leur droit de propri~t~ n'est pas reconnu. Dans certains pays, une femme doit demander la permission de son mari pour obtenir une license ou pour ouvrir un compte en banque. Les entreprises requ~rant des investissements limit~s et g~n~rant rapidement des revenus donnent A un grand nombre de groupes d~savantag~s la possibilit~ d'~chapper A de telles restrictions d'ordre juridique ou social. 6.22 Les frais de d~marrage d'une entreprise sont en g~n~ral peu ~lev~s dans le secteur informel. Les petits entrepreneurs financent la majeure partie de leurs investissements sur leur ~pargne et celle de leur famille. Selon des estimations de l'OIT, ces·ressources financent 92 % des inves:tissements des petites entreprises au ZaIre et 99 % au Kenya. La majorite de ces entreprises sont des entreprises individuelles dont la main d'oeuvre est fournie par les propri~taires, les apprentis et la famille qui ne sont pas pay~s. Les institutions traditionnelles et les r~seaux familiaux assurent en moyenne quatre cinqui~mes des besoins de formation. Le dynamiame du secteur informel 6.23 Les entrepreneurs du secteur informel participent A des activit~s tr~s diverses, telles que 1 'agriculture , l'industrie et les r~parations, le commerce et la construction. Ils assurent egalement des services de transport, d'eau, de communications et de formation ainsi que des services financiers. Leur formation est ~galement tr~s vari~e. Dans les zones rurales, ces entrepreneurs peuvent @tre so it des agriculteurs qui se livrent hors saison A des activit~s non agricoles soit des prestataires de biens et de services qui exercent localement leurs activit~s A plein temps. Dans les villes, ce sont soit d'anciens agriculteurs, so it des membres de groupes ethniques qui sont entrepreneurs de tradition, soit des gens qui ont abandonn~ leurs ~tudes. 11 s'agit parfois ~galement de personnes qui ont ~t~ licensi~es par le secteur public ou priv~ ou d'agents de l'Etat qui cherchent A am~liorer leurs revenus officiels. 6.24 UTILISATION EFFICACE DES RESSOURCES LOCALES. Les entreprises du secteur informel font de la main d'oeuvre et des mati~res premi~res une - 259 - utilisation plus intensive que 1es entreprises pub1iques ou ~trang~res qui dominent 1a grande industrie. Du fait de fonds de rou1ement insuffisant ainsi que d'autres contraintes aff~rentes A 1a production A petite ~che11e, ces entreprises travai11ent 1e plus souvent A 1a commande. E11es peuvent de ce fait r~pondre presque imm~diatement A l'~vo1ution de 1a demande. De plus, bien que 1es technologies qu'e11es uti1isent soient simples, e11es sont ~ga1ement faci1ement adaptab1es. Enfin, 1es petites entreprises font preuve d'innovation, notamment en ce qui concerne 1e recyc1age des rebuts. Ainsi, par exemp1e, en Tanzanie, des artisans fabriquent des 1ampes au k~ros~ne et des fourneaux au charbon de bois A partir de bidons de p~tro1e martel~s. De mAme, au ZaIre, des forgerons fabriquent des outils agricoles avec de l'acier provenant d'~paves de camions. 6.25 La demande pour les biens et services de petites entreprises a augment~. Ainsi, au Ghana, au d~but des ann~es quatre-vingt, lorsque les devises se sont faites rares, les producteurs ont substitu~ des intrants locaux aux intrants import~s. Dans des circonstances simi1aires, en Ouganda, 1es petits producteurs ont commenc~ A fabriquer des pi~ces d~tach~es pour l'industrie locale. Au Nig~ria, Ie programme d'ajustement a stimul~ la demande de services locaux de maintenance et de r~paration. Un certain nombre de gouvernements africains sont en train d'adopter des mesures en vue de tirer parti des forces de ce secteur. Par exemple, au Kenya, les petits ateliers de fabrication ou de r~paration peuvent maintenant b~n~ficier d'une assistance quel1e que soit leur localisation, alors qU'auparavant 1a tendance ~tait de re1~guer ces entreprises dans des domaines industriels iso1~s (Voir Encart 6.2). 6.26 SENSIBILITE AUX SIGNAUX DU HARCHE. Afin de tenir compte de l'augmentation de 1a demande de 1a population urbaine qui est en Afrique en p1eine expansion, les commer~ants, qui sont pour la plupart des femmes, ont cr~~ des r~seaux de distribution informels. Ces r~seaux sont importants dans la mesure ob i1s permettent d'assurer la distribution de denr~es alimentaires et de biens de consommation entre les campagnes et les villes et a travers les fronti~res. Au S~n~ga1 et au Ghana, par exemple, les coop~ratives agricoles traditionne1les ont r~ussi A s'int~grer aces r~seaux ce qui leur a permis de diminuer leurs coOts de commercialisation et d'am~liorer leur acc~s aux intrants. Pour des ~conomies entrav~es par des march~s imparfaits, des agitations po1itiques, des infrastructures insuffisantes ou des probl~mes d'environnement, 1e commerce non d~clar~ a travers les fronti~res est une source d'approvisionnement et un d~bouch~ essentiels pour 1es producteurs locaux. 6.27 Les commer~ants savent tr~s bien uti1iser leurs r~seaux informels pour surmonter 1es difficult~s qu'ils rencontrent. Cependant leurs initiatives se heurtent souvent aux r~glementations officielles concernant 1es prix, 1e petit commerce, Ie change et 1es exportations. De plus en plus, les responsables po1itiques ont appris A appr~cier la contribution fondamenta1e qu'apportent 1es commer~ants au d~ve1oppement ~conomique et A modifier leurs po1itiques en cons~quence. Par exemple, Ie gouvernement ghan~en a r~cemment 1~ga1is~ 1es boutiques de change qui op~raient auparavant au march~ noir. - 260 - 6.28 IMMUNITE REGLEMENTAlRE. Les entrepreneurs peuvent A travers le secteur informel satisfaire la demande n4glig4e par les entreprises qui sont strictement r~glement4es. La plupart des pays africains disposent de codes de construction et de r~glementations concernant l'occupation des sols qui r4sultent en des coftts de construction qui sont hors d'atteinte de la majorit4 de la population. Cependant, bien que la croissance d4mographique et la migration urbaine aient d4cup14 la population des plus grandes villes d'Afrique au cours des vingt-cinq dernitres ann4es, Ie nombre d'occupants par logement n'a pour ainsi dire pas chang4, grAce en grande partie A la construction de logement non d4clar4e. Selon certaines estimations, cette activit4 repr4sente environ 20 % des investissements bruts locaux dans la plupart des pays africains. La Tanzanie et la Zambie ont encourag4 la construction de logements bon march4 en octroyant des titres de propri4t4 et en d4veloppant des infrastructures dans des zones d'habitat spontan4. 6.29 Certains gouvernements ont encourag4 un d4veloppement de la concurrence dans le domaine des services publics. Comme on l'a mentionn4 dans Ie Chapitre 2, les petites entreprises offrent des solutions avantageuses en mati~re de transport et - bien qu'elles ne disposent pas d'autorisations officielles et de subventions - leurs services sont com:urrentiels par rapport aux services publics. Ces entreprises de transport peuvent diminuer leurs coftts de fonctionnement en ajustant leurs itin4raires et leurs arrAts pour maximiser l'utilisation de leurs v4hicules. Par exemple, il est habituel que les chauffeurs attendent que leurs v4hicules soient pleins avant d'effectuer un trajet au lieu de respecter des horaires fixes. Ces entreprises desservent des march4s qui ne Ie seraient pas autrement car leurs v4hicules peuvent circuler sur des routes qui sont inaccessibles aux moyens de transport public conventionnels. D4veloppement institutionnel de base 6.30. L'organisation et le fonctionnement des entreprises du secteur infclrmel ob4issent A des valeurs et des traditions locales dont Ie respect est asur4 par des structures institutionnelles qui peuvent s'adapter plus rapidement aux circonstances que les organisations formelles qui op~rent en marge de ces traditions. En matitre de finance, de formation et r~glementation, les organisations formelles pourraient etre plus efficaces esi elles entretenaient des relations plus 4troites avec les entreprises infiJrmelles traditionnelles. 6.31 FINANCEMENT. Le sysUme financier in forme 1 se compose d'associations d'4pargne et de cr4dit, de fonds tournants, de banquiers et de preteurs ambulants et inclut 4galement un grand nombre de transactions financi~res entre familIes et amis. Ce systtme est accessible meme aux titulaires de revenus modestes car il repose plus sur des relations personnelles que sur des garanties formelles. A travers le continent africain, les fonds tournants connus sous Ie nom de -tontines· ou de ~susus" qui se sont multipli4s sont particulitrement faciles d'accts. Au Ghana, par exemple, des collecteurs d4sign4s font chaque jour le tour des march4s pour recueillir les d4pOts des commer~antes sur leur lieu de - 261 - travail. Dans les campagnes. ces collecteurs font leurs rondes Ie matin de bonheur avant que les agriculteurs ne partent aux champs et en fin de journ~e lorsqu'ils reviennent de leur travail (Voir Encart 6.3). 6.32 Dans plusieurs pays, des syst~mes informels se sont progressivement d~velopp~s en des organisations financi~res A part enti~re. En COte d'Ivoire, au S~n~gal, en Guin~e, au Mali et au Cameroun, des clubs d'~pargne ont ~t~ cr~~s. De m~me que les autres associations informelles, ces clubs sont bas~s sur la confiance personnelle mais sont ~galement des interm~diaires financiers efficaces capables de fournir des garanties mutuelles. Au S~n~gal, l'un de ces clubs, La Financi~re, qui a ~t~ cr~~ en 1983 est devenu en cinq ans une organisation de pr~s de 400 membres avec un capital cumul~ de 167 millions de FCFA. Le Togo et Ie Congo aident des groupes d'entrepreneurs A mobiliser leurs ~pargne selon des formules similaires en liaison avec Ie syst~me bancaire. 6.33 FORMATION. La plupart des entrepreneurs du secteur informel se sont form~s sur Ie tas, en faisant des essais et des erreurs, ou en observant et en aidant d'autres entrepreneurs. Beaucoup ont commenc~ comme apprentis dans des entreprises d~jA ~tablies dans certains m~tiers. Les conditions de recrutement des apprentis sont en g~n~ral faciles A remplir et les relations familiales ou amicales sont souvent plus importantes que l'~ducation formelle. La dur~e moyenne d'apprentissage varie entre un an et demi (pour les teinturiers) et cinq ans (pour les charpentiers). Les apprentis sont pour les petites entreprises une res source pr~cieuse car i1s ne coOtent pas cher. Souvent, ils sont simp1ement log~s et nourris et re90ivent une indemnit~ de faib1e montant. En g~n~ral, A mesure que leurs qualifications augmentent, leurs conditions d'emploi s'am~liorent et parfois, ils obtiennent le droit de vendre une partie de leur production. 6.34 Les formules d'apprentissage ont du succ~s car elles forment A des techniques et des metiers qui sont demandes. En combinant la formation th~orique et pratique, l'apprentissage permet de toucher une grande partie de 1a population y compris ceux qui ont d~jA un emploi. Compte tenu des contraintes financi~res et administratives des gouvernements, ces formules d'apprentissage bon march~ et dans une large mesure autofinanc~es devraient ~tre encourag~es. Par exemple, 1e Syst~me national d'apprentissage ouvert qui a ~t~ r~cemmment mis en place au Nig~ria encourage le placement d'apprentis dans des entreprises artisanales en d~frayant une partie des coOts, en contrOlant la qualit~ de l'instruction et en dispensant une formation th~orique compl~mentaire en dehors des heures de travail (Voir Encart 3.9). 6.35 ORGANISATION ET DEFENSE DES INTERETS PROFESSIONNELS. Les associations informelles r~glementent les relations d'affaires en utilisant l'influence de leurs membres pour faire respecter les accords, r~gler les conflits et promouvoir des objectifs communs. Au Mali et au Togo, des associations inf~rmelles d'artisans facilitent l'acc~s aux moyens de production grAce 1 des achats group~s et 1 la location d'~quipement. Au Ruanda, des associations qui avaient initialement ~t~ cr~~es pour s'opposer 1 certaines politiques d~favorables du gouvernement sont maintenant l~galement reconnues et n~gocient p~riodiquement avec les pouvoirs publics . I - 262 - des probl~mes relatifs aux permis de travail, au cr~dit, aux imp5ts et au droit d'occupation des domaines publics. 6.36 En tant que repr~sentants et avocats de leurs circonscriptions traditionnelles, les ONG locales travaillent avec des associations informelles A la conception, A l'~laboration et A la mise en oeuvre de mesures de support aux petites entreprises. Leurs d~cisions ~tant prises par consensus conform~ment A la tradition locale, les associations informelles peuvent aider les entreprises les plus petites A am~liorer leur acc~s A des financements et A des informations grace aux relations qu'elles entretiennent avec les march~s formels. Elles peuvent egalement identifier les ressources particuli~res dont ces entreprises peuvent avoir besoin et les aider de la mani~re la plus efficace. Enfin, etant de plus en plus fr~quemment reconnues officieillement, ces associations peuvent commencer progressivement A d~fendre les interAts de leurs membres comme Ie font les chambres de commerce pour les entreprises plus importantes. Les limites de l'informalite 6.31 Bien que Ie secteur informel offre aux entrepreneurs un environnement concurrentiel et un support traditionnel, il ne peut pas leur fournir les infrastructures materielles et sociales qu'exigent les investissements et la croissance A long terme. Les possibilites qu'offre Ie secteur informel en cas de non respect des contrats, de violation des droits de propriet~ ou de publicite mensong~re sont limitees. Les petits- entrepreneurs peuvent certe$ s'assurer que leurs droits seront respect~s et qu'ils seront pay~s en limitant leurs affaires A leurs proches relations et en restant petits mais une telle d~marche peut Atre contreproducytive en mati~J:e de cont et d'efficacit~. Un cadre juridique adapt~ et rassurant permettrait aux petits entrepreneurs d'echapper aux limites de l'informalite st d'eliminer certains des obstacles qui s'opposent au d~vel(jppement de leurs activites. 6.38 II arrive parfois que mAme des entreprises importantes dependent de r~seaux informels pour leur alimentation en eau et en ~lectricite, pour leurs communications ou pour l'evacuation de leurs dechets. Ces solutions improvis~es ne sont cependant pas toujours ideales et les conts qui s'y attachent pourraient Atre considerablement reduits si les reseaux de servi<:es publics etaient plus fiables et plus efficaces. En raison de pannes et de sautes de tension frequences, un grand nombre d'industriels nigerians doivent produire leur propre electricite en utilisant des generateurs individuels qui sont onereux (Voir Encart 1.1). Au ZaIre, les entreprises sont forcees d'utiliser des syst~mes de communications par radio tr~s conteux du fait que la plupart du temps, Ie reseau tel~phonique ne fOllctionne pas. Certains rem~des informels sont parfois assortis de conts souciaux qui sont insoutenables A long terme. Ainsi, les raccordements ill~gaux imposent aux usagers payants des surconts injustes, de mAme que des methodes d'evacuation des dechets ecologiquement inadequates peuvent poser de serieux probl~me8 de sante et que l'exploitation incontrOlee des ressources naturelles peut hypoth~quer Ie bien @tre des generations futures. - 263 - 6.39 Un grand nombre de gouvernements essayent de tirer parti des forces du secteur informel tout en corrigeant ses lacunes. Par exemple, les plans de d~veloppement les plus r~cents du Burkina Faso et du Kenya incorporent des mesures de support aux petites entreprises et aux institutions traditionnelles. De m~me, la COte d'Ivoire et Ie S~n~gal ont mis au point des syst~mes particuliers de licenses pour am~liorer Ie statut juridique et la s~curit~ des petites entreprises. L'all~gement du coQt des formalit~s officielles ainsi que l'am~lioration du support dont ils b~n~ficient ont incit~ un grand nombre d'entrepreneurs du secteur informel a formaliser leurs activit~s et a regrouper leur ressources en d~veloppant des relations avec les march~s et les institutions du secteur formel. AMELIORER LE CLIHAT DES APPAlRES 6.40 Les entrepreneurs ont besoin d'un environnement stable pour pouvoir investir ou augmenter leur production. La participation d'associations repr~sentatives au processus d'~laboration des politiques est la premi~re mesure a prendre pour r~duire les incertitudes aff~rentes a l'entreprise et assurer la stabilit~ des r~formes r~glementaires ou institutionnelles. Une telle participation exige cependant un changement d'attitude des pouvoirs publics et des entreprises. Les responsables politiques doivent reconnaitre Ie rOle tr~s important que joue Ie secteur priv~ et ~viter de prendre des mesures arbitraires qui perturbent ses activit~s. Les programmes d'ajustement structurels devraient encourager ces associations a participer au processus de r~forme politique et institutionnel. Pour leur part, les entrepreneurs doivent apprendre a op~rer dans un environnement Oll la comp~titivit~ et l'efficacit~ et non les privil~ges ou l'~vasion sont la cl~ du succ~s a long terme. Politiques fiscales 6.41 La fiscalit~ ne devrait pas d~courager l'entreprise. L'utilisation de la fiscalit~ pour orienter l'investissement priv~ en fonction d'objectifs ~conomiques et sociaux qui ont la pr~f~rence officielle peut avoir des effets secondaires ind~sirables. Les politiques douani~res et de change qui ont pour but de prot~ger la grande industrie d~favorisent souvent les petites entreprises. Les offices de commercialisation ~tatiques qui extraient des revenus de l'agriculture grace a des contrOles de prix ont parfois d~courag~ l'augmentation de la production agricole. Pourtant, cela ne doit pas @tre n~cessairement Ie cas. Les syst~mes d'incitations peuvent ~tre consid~rablement am~lior's en rempla~ant les tarifs douaniers sur les intrants industriels import~s et les taxes sur les exportations agricoles par des impOts sur la consommation et des redevances pour les services publics (Voir Chapitre 8). 6.42 Les codes d'investissement pr~voient g~n~ralement des mesures particuli~res pour encourager certains investissements, telles que des exon~rations de droits de douane et un acc~s pr~f'rentiel au cr'dit ou aux devises. L'objectif initial de la plupart de ces codes 'tait de favoriser la cr'ation de grandes industries grace a des investissements 'trangers. Bien que les discriminations explicites envers les investisseurs locaux alent 't~ dans une large mesure 'limin'es, l'approche au coup par coup qui - 264 - est celIe de la plupart des codes pr6sente encore des inconv6nients importants. En effet, elle encourage la corruption et limite l'acces aux avantages du code des petites entreprises qui ne disposent pas de l'influence ou des ressources n6cessaires pour obtenir des autorisations discr6tionnaires. Ces systemes d'incitation doivent par cons6quent &tre reformu16s afin de promouvoir la cr6ation d'emplois grace 1 l'utilisation de techniques de production 1 forte intensit6 de main d'oeuvre et d'augmenter la valeur ajout6e grace 1 une utilisation accrue des ressources locales. Les criteres d'6ligibilit6 devraient &tre simplifi6s et les avantages devraient etre accordes automatiquement aux entreprises 6ligibles. Ces avantages devraient &tre veritablement incitatifs et pas seulement des palliatifs pour d'autres mesures qui d6couragent les investissements. Le cadre reglementaire 6.43 L'exces d'interference bureaucratique incite au non respect des lois, encourage les entrepreneurs 1 trouver des moyens de tourner les reglements et diminue la comp6titivit6 de ceux qui les respectent. La suppression des reglementations les plus contaignantes permettrait d'6liminer les coftts caches que de nombreux entrepreneurs doivent supporter pour obtenir des permis et enregistrer leur entreprise. La corruption n'est qu'un aspect de ces coftts. En effet la longueur et la complexite des procedures ne font qu'aggraver les manques 1 gagner en matiere d'efficacite et de competitivite. 6.44 L'objectif de la reglementation des entreprises doit &tre reconsidere. La reglementation d'industries telles que l'industrie pharmaceutique et chimique par Ie gouvernement peut se justifier par Ie souci de proteger Ie public contre des risques de maladie ou de deterioration de l'environnement. Par contre, l'utilisation de permis pour maintenir Ie nombre d'entreprises 1 un niveau officiellement predetermine est en general contreproductive car elle substitue la decision de l'administration au jugement des entrepreneurs. En creant des obstacles inutiles ! la creation et au developpement des entreprises, les proc6dures restrictives d'obtention de licenses et d'enregistrement freinent Ie developpement des entreprises locales et les emp&chent d'atteindre Ie niveau de productivite necessaire pour penetrer sur les marches internationaux. 6.45 Les bureaucrates ont certes un goftt prononce pour les contrOles, mais si l'on veut encourager les PME 1 se developper, les procedures d'autorisation et les autres reglementations devront &tre soigneusement reconsiderees et n'&tre maintenues que si elles sont parfaitement justifiees. L'objectif devrait &tre de se doter d'un systeme d'enregistrement simple et automatique qui confere un statut juridique aux entreprises et permette un suivi statistique. Pour certaines categories d'activites - et notamment pour les travailleurs independants - les procedures d'enregistrement et d'autorisation devraient &tre elimines 1 moins qU'elles n'aient une utilite particuliere d'un point de vue statistique. 11 faudrait cependant s'assurer qU'une telle elimination ne - 265 - prive pas ces entreprises d'un statut juridique ou les prive de l'acc~s aux infrastructures dont elles ont besoin. Cadre juridique et politique 6.46 11 est indispensable pour Ie succ~s A long terme des entreprises de mettre au point cadre juridique simple et transparent et d'en assurer Ie respect (Voir Chapitre 2). Dans la plupart des pays africains, les entrepreneurs doivent op~rer dans un environnement juridique et politique tres incertain. Cette incertitude des regles officielles du jeu a un coQt tres important pour les entreprises et les ~conomies dans lesqueilies elles operent. Les lois doivent atre claires et applicables A tous, des entreprises politiquement ou ~conomiquement pUissantes aux micro- entrepreneurs. Toutes les entreprises peuvent b~n~ficier d'un cadre juridique qui d~finisse pr~cis~ment Ie droit des contrats et de la propri~t~ et qui serve d'instance ~quitable pour Ie reglement des conflits. 6.47 Le respect des reglements peut atre am~lior~ en faisnt participer les int~ress~s A leur ~laboration. Comme Ie montre l'exp~rience du secteur informel, l'efficacit~ des r~glements d~pend plus de conventions sociales que de sanctions. Les conventions qui ant servi de guide aux pratiques financieres, politiques et commerciales dans Ie secteur informel peuvent servir d'exemple pour ~laborer des lois qui soient adapt~es aux besoins ~conomiques et sociaux des diff~rents pays. 6.48 Des d~clarations officielles reconnaissant les m~rites de l'esprit d'entreprise, telles que Ie Document parlementaire kenyan de 1986, peuvent aider A cr~er un climat plus prop ice et plus pr~visible pour les investissements A long terme. Cependant, l'am~lioration de la perception de l'esprit d'entreprise sera d'autant plus efficace qu'elle s'accompagnera d'un changement de comportement des pouvoirs publics. Par exemple, une r~forme des tarifs douaniers sera plus rassurante si elle r~pond A un programme r~aliste annonc~ A l'avance. Les petites entreprises sont particulierement vuln~rables A une application arbitraire des reglements. Dans des cas extremes, des entreprises qui avaient mis des ann~es ou des g~n~rations A se d~velopper ont vu leur activit~s perturb~es ou arrat~es du fait de nouvelles reglementations impr~vues. En reconnaissant publiquement les m~rites ~conomiques et sociaux des entrepreneurs - grands et petits - les pouvoirs publics peuvent contribuer A r~duire les incertitudes de ceux- ci et A promouvoir un climat d'affaires plus stable et plus concurrentiel. AHELIORER LES COHPETENCES DES ENTREPRENEURS 6.49 Malgr~ les efforts consacr~s A la lib~ralisation des economies africaines, Ie nombre d'entrepreneurs engag~s dans des activit~s productives A long terme reste limit~. Les pays africains peuvent aider les entrepreneurs A surmonter les obstacles qui demeurent en am~liorant les institutions et les Infrastructures qui les supportent. Les organisations publiques et priv~es doivent aider les entrepreneurs A r~pondre plus rapidement aux incitations du march~ en mobilisant les res sources humaines et financieres n~cessaires (tant sur Ie plan local que sur Ie plan international> et en stimulant la production locale de biens et de - 266 - services. Les programmes d'assistance 1 des groupes particuliers - par exemple les licenci~s du secteur public ou priv~, ceux qui quittent l'~cole, les femmes ou les pauvres - peuvent aussi avoir un effet d'entrainement important. Mobilisation des res sources financi~res et humaines 6.50 SYSTEMES FINANCIERS. Les syst~mes bancaires doivent @tre restructur~s et renforc~s pour pouvoir mobiliser l'~pargne n~cessaire au financement des investissements et ~largir l'acc~s au cr~dit (Voir Chapitre 8). Dans Ie pass~, les gouvernements ont essay~ d'all~ger les conts financiers des PME en plafonnant les taux d'int~r@t et en r~orientant les cr~dits. Cependant ces politiques ont dans l'ensemble ~chou~ car elles ignoraient Ie probl~me plus fondamental de l'acc~s au cr~dit. Les banques de d~veloppement publiques qui ont ~t~ cr~~es grace 1 des programmes de pr@t subventionn~s pour pallier les carences per~ues des syst~mes financiers ont prouv~ qu'elles ne pouvaient pas ou ne voulaient pas recouvrer leurs cr~dits. Ltacc~s des PME au cr~dit sera plus durable s'il se fait par l'interm~diaire des banques commerciales qui peuvent appliquer des taux d'int~r@t tenant compte du cont et des risques effecti!s que comportent les cr~dits aces entreprises. 6.51 Le probl~me de l'insuffisance des garanties offertes par les petites entreprises peut @tre abord~ de plusieurs mani~res. L'enregistrement officiel de terrains et de batiments qui ne sont pas r~pert()ri~s permettrait d' am~liorer les garanties d 'un grand nombre de petites entreprises. La formation des responsables de pr@t des banques commer.:iales a 1 '~valuation des projets permettrait de r~duire les exigeno:es en mati~re de garantie grace 1 une meilleure estimation des taux de ren'tabilit~ des projets. Les syst~mes de location d '~quipement, tels que celui qui vient d'@tre mis en place au Ghana, qui basent les dur~es de remboursement des pr@ts sur Ie cont des ~quipements lou~s et sur Ie cash flow qll'ils permettent de g~n~rer pourraient @tre une solution int~re:ssante pour un grand nombre de PME. 6.52 II faudrait encourager les banques 1 d~velopper leurs relations avec des associations de tr~s petites entreprises qui peuvent fournir des garant:Les mutuelles pour les pr@ts. L'exemple de la Grameen Bank au Bangladesh et du programme du Bedan Kredit Kecamatan (BKK) en Indon~sie a prouv~ que de tels syst~mes peuvent @tre tr~s efficaces. Les banques popula:Lres du Ruanda, les caisses de cr~dit du Cameroun et la "Savanna bank" au Nig~ria utilisent des techniques similaires pour am~liorer Itacc~s au cr~dit de petits groupes d'emprunteurs. 6.53 SYSTEMES D'INFORMATION. Les entrepreneurs peuvent d~velopper leurs d~bouch~sgrace 1 des structures coop~ratives qui permettent la diss~mination d'information sur les march~s locaux et r~gionaux de biens et de services. Les services publics de vulgarisation ont dans l'ensemble ~chou~ et Ie nouveau consensus est que les programmes priv~s sont pr~f~rables pour mettre en place des syst~mes d'information durables et apporter une assistance technique aux entreprises locales. Le succ~s de ces efforts volontaires d~pend de l'aptitude des associations commerciales - 267 - et professionnelles locales, des ONG et des organisations traditionnelles - qui travaillent parfois en collaboration avec les pouvoirs publics et les bail leurs de fonds -A mettre au point des syst~mes permettant d'adapter ces services A la demande. 6.54 Les soci~t~s de conseil locales sont ~~alement bien plac~es pour r~aliser les ~tudes de factibilit~ et d'ex~cution n~cessaires pour attirer des financements. Au Togo et au Ghana, il existe des programmes d'assistance permettant de faciliter l'acc~s A de tels services de conseil. Ces programmes ne devraient appuyer que les soci~t~s de conseil capables de produire des projets bancables plutOt que d'encourager la production massive d'~tudes inutiles. De tels programmes peuvent contribuer A la mise en place de syst~mes d'information durables destin~s A fournir aux entrepreneurs l'expertise technique la mieux adapt~e au contexte locale. 6.55 11 faudrait ~galement encourager les grandes entreprises A sous- traiter certaines de leurs activit~s A des entreprises moins importantes et promouvoir le d~veloppement de ces derni~res en les aidant A pr~parer des demandes de cr~dit et des ~tudes de march~ et en leur fournissant de l'~quipement, de la formation et des moyens de contrOle de qualit~. Les programmes priv~s de regroupement des petites entreprises pour leur permettre la location ou l'achat en commun et l'utilisation A temps partag~ d'~quipement peuvent g~n~rer des gains de productivit~ et des ~conomies d·~chelle. Les syst~mes coop~ratifs volontaires, comme ceux qui existent au Kenya et au Mali peuvent aider les petites entreprises A se procurer des intrants aupr~s de fournisseurs locaux et r~gionaux importants. Ces initiatives peuvent atre facilit~es par des banques de donn~es permettant aux entrepreneurs de localiser l'~quipement disponible (y compris de l'~quipement d'occasion) ou d'obtenir des licenses pour l'utilisation de technologies import~es. 6.56 Les m~dias peuvent ~galement contribuer A am~liorer l'environnement des petites entreprises. Les journaux, magasines et autres publications priv~es facilitent les contacts entre les acheteurs et les vendeurs potentiels. Ils permettent ~galement aux entrepreneurs de se tenir au courant des projets et de l'~volution de la technologie. De mani~re plus g~n~rale, ces publications fournissent aux milieux d'affaires un moyen d'expression et de d~fense de leurs int~rats. Les pouvoirs publics devraient autoriser les groupes priv~s A diss~miner leurs propres publications, promouvoir des discussions ouvertes et garantir la libert~ de la presse. Catalyseurs 'trangers et publics 6.57 CATALYSEURS ETRANGERS. Les soci~t~s multinationales ont ~t~ traditionnelleemnt appr~ci~es pour leurs investissements. Cependant. elles peuvent jouer un rOle encore plus important en mati~re de transfert de savoir faire technique, commercial et administratif. Ces soci~t~s peuvent en effet contribuer au d~veloppement des petites entreprises en les aidant A identifier de nouveaux projets rentables et A rassembler les ressources financi~res et humaines n~cessaires pour les r~aliser. A Maurice et A Madagascar, les industries de confection ont ~t~ cr~~es initialement A - 268 - partir d'investissements effectu~s par des compagnies ~trang~res. La collaboration qui s'est ~tablie entre ces compagnies et des entreprises locales a eu un effet catalytique sur les entrepreneurs locaux qui ont essay~ par la suite de suivre leur exemple. 6.58 Les entreprises et institutions ~trang~res peuvent avoir un autre effet catalytique. Ainsi, la Compagnie africaine de services de gestion, qui est une organisation l but non lucratif, a ~t~ cre~e par 40 soci~t~s multinationales en coop~ration avec des organismes de d~veloppement bilat~raux et multilat~raux pour fournir aux entreprises africaines une aide l la gestion sur une base r~mun~r~e. En 1986, la Soci~t~ financi~re internationale, Ie Programme des Nations unies pour Ie d~veloppement et la Banque africaine de d~veloppement ont lanc~ Ie Fonds africain pour Ie d~veloppement de projets (FADP) qui l partir de ses bureaux r~gionaux d'Abidjan et de NaIrobi aide les PH! africaines l trouver des investisseurs et des partenaires techniques sans investir elle-m~me dans les projets. 6.59 CATALYSEURS PUBLICS. Les gouvernements peuvent aider directement les entrepreneurs par l'interm~diaire d'organismes sp~cialis~s. Par exemple, pour permettre aux nouveaux investisseurs de surmonter les obstacles bureaucratiques existants, Maurice a cr~e un Centre d'investissement qui centralise les demandes de licenses, d'enregistrement, de permis et de services publics. De tels points de contact uniques peuven~ @tre tr~s utiles pour les investisseurs ~trangers et locaux qui pourraient en cas contraire renoncer l remplir la multitude de formalit~s administratives n~cessaires. II faudrait doter ces centres d'un v~ritable pouvoir de d~cision et simplifier les autorisations et autres proc~dures requisBs auparavant par les autres instances administratives responsables. 6.60 Une modification des proc~dures de passation des march~s, y compris l'introduction de pr~f~rences raisonnables, permettrait de stimuler la fourniture locale et r~gionale de biens et de services dans Ie cadre des march~:Si publics. Le volume des commandes et les normes de qualit~ requises devrail:!nt @tre contrOUs pour ~viter toute discrimination injustifi~e envers les petites entreprises. Les gouvernements peuvent ~galement aider les exportateurs priv~s en simplifiant et en acc~Urant les proc~dures d'exportation, en am~liorant Ie fonctionnement des ports et en les aidant a identifier des marchh ~trangers pour des produits locaux. Les banques centrales peuvent ~galement aider les exportateurs s~rieux l se procurer les intrants import~s dont ils ont besoin en les autorisant l d~tenir des devises. 6.61 Les entreprises publiques peuvent ~galement avoir un effet catalytique sur Ie d~veloppement de l'esprit d'entreprise et de l'expertise technique. Dans plusieurs pays, dont la Zambie, Ie Kenya et la COte d'Ivoire. des anciens dirigeants d'entreprises publiques ont cr~~ leurs propres soci~t~s. Pour jouer ce rOle de vivier, les entreprises publiques doivent elles-m~me se montrer plus entreprenantes. Elles devraient en particulier ~tre g~r~es de mani~re autonome et dans des conditions strictement commerciales. La performance des responsables et des employ~s devrait ~tre encourag~e par des incitations appropri~es. Les politiques de - 269 - salaires et de recrutement devraient @tre con~ues de mani~re a r~compenser les employ~s productifs et permettre aux dirigeants de proc~der si n~cessaire a des licenciements (Voir Chapitre 2). Investir dans les hommes 6.62 La des strat~gies de d~veloppement de l'entreprise p~rennit~ priv~e de l'aptitude des entrepreneurs a mobiliser leurs propres d~pend ressources. M~me s'il ~tait possible de dispenser individuellement aux entrepreneurs les financements et les comp~tences dont ils ont besoin, les gouvernements ne pourraient pas a eux seuls r~unir les res sources financi~res et humaines n~cessaires pour maintenir Ie dynamisme et la croissance de l'~conomie. Toutefois, des programmes bien cibl~s visant a identifier et a d~velopper l'esprit d'entreprise de certains individus ou groupes d'individus peuvent se r~v~ler tr~s utiles. A condition d'@tre bien con9us et bien r~alis~s, ces programmes peuvent en effet g~n~rer des b~n~fices ~conomiques et sociaux bien sup~rieurs a leurs coOts. 6.63 PROGRAMMES DE PROMOTION DE L'ESPRIT D'ENTREPRISE. Des programmes a cout terme destin~s a promouvoir l'esprit d'entreprise se sont r~v~l~s efficaces en dehors d'Afrique. G~n~ralement, les candidats sont soumis a des proc~dures de s~lection et a des tests de comportement pour @tre ~ligibles a la formation pr~vue par ces programmes. Par exemple, en Inde, l'Institut de d~veloppement de l'entreprise dispense de l'instruction et des conseils depuis la s~lection des projets jusqu'au d~marrage des entreprises. Au Ghana, des anciens agents de l'Etat b~n~ficient de conseils sur la mani~re d'investir dans de nouvelles entreprises leurs indemnit~s de d~part. Le S~n~gal et Ie Nig~ria essayent d'utiliser de tels programmes pour promouvoir Ie travail ind~pendant parmi ceux qui ont quitt~ l'~cole ou perdu leur emploi. Enfin, au Kenya et au Malawi, des programmes pilotes ont ~t~ lanc~s pour aider les propri~taires d'entreprises existantes. 6.64 Les programmes de promotion de l'esprit d'entreprise doivent veiller a ce que la demande de formation corresponde aux possibilit~s offertes par une ~conomie concurrentielle. lIs devraient a cet ~gard ~viter de permettre l'acc~s de privil~gi~s a des cr~dits subventionn~s et a d'autres formes de traitement particulier. Si la formation des heureux ~lus s~lectionn~s a partir de groupes particuliers ne peut pas permettre a elle seule de r~soudre les probl~mes a long terme d'emploi et de productivit~ de l'Afrique, les entrepreneurs qui auront ~t~ form~s pourron~ malgr~ tout servir d'exemple a d'autres. Ces programmes peuvent ~galement aider les gouvernements a identifier et a ~liminer les contraintes qui sont inutilement impos~es aux entrepreneurs par leur environnement. 6.65 DEVELOPPEMENT DES MICRO-ENTREPRISES. L'exp~rience a prouv~ que les programmes de suppor~ destin~s aux groupes ~conomiquement et socialement d~savantag~s sont un moyen efficace d'am~liorer les salaires et la productivit~. Bien que de tels programmes soient assez r~cents, on dispose d'un nombre croissant de preuves que Ie d~veloppement des entreprises africaines les plus modestes - qui sont en g~n~ral poss~d~es par des femmes, des r~sidents ruraux et des pauvres urbains - peuvent avoir I ... ~ - 270 - un impact important sur l'emploi et les revenus. Grace A l'amelioration des revenus des pauvres qu'ils permettent, ces programmes peuvent aussi stimuler la demande de biens et de services. 6.66 Les programmes de developpement des micro-entreprises les plus efficaces sont ceux qui sont geres localement et qui ont des objectifs precis. Bien que Ie nombre de beneficiaires potentiels soit important, l'assistance individuelle dont ils ont besoin est relativement limitee. Par exemple, des prets de 300 dollars E.U. ou moins peuvent faire une difference importante. Les associations de micro-entreprises peuvent selectionner les emprunteurs et contrOler Ie remboursement des prets et de ce fait, ameliorer considerablement l'acc~s au credit et A l'information. Les ONG locales peuvent aider A identifier les besoins des groupes cibles, A diminuer les couts administratifs et A ameliorer la distribution des ressources. Les programmes visant A promouvoir Ie developpement d'associations auto-suffisantes peuvent continuer A generer des benefices longtemps apr~s que l'assistance exterieure a cesse. Infrastructures et services gen6raux 6.67 CONSTRUCTION. La construction de logements cr~e de l'emploi pour des ma~ons, des charpentiers et des forgerons locaux. Dans les campagnes, la construction fournit de l'emploi aux agriculteurs en dehors de la saison des cultures et peut servir de transition pour la creation d'entreprises rurales non agricoles. Elle cr~e des emplois A faible cout, g~n~re des revenus A partir des loyers et souvent, elle permet aux entrepreneurs d'acqu~rir leur premier atelier ou entrepOt. Les responsables de la coordination de ces activit~s contribuent A d~velopper les I=omp~tences de gestion. Enfin, un meilleur acc~s au credit au logement et une protection plus efficace des droits de propriete peuvent ~largir la port~e des financements formels et d~velopper la demande pour ces services. 6.68 Apr~s avoir fait leurs preuves dans la construction de logements, les entrepreneurs peuvent s'orienter vers des projets plus importants tels que la construction et l'entretien des routes. Les gouvernements peuvent faciliter cette transition en confiant l'execution de projets de travaux publics A des entreprises locales. Par exemple, Ie Ghana, Ie Kenya, Ie Burundi et Madagascar ont commenc~ A abandonner les syst~mes de regie qui consistent A gerer administrativement les travaux de g~nie civil et confient de plus en plus ces travaux A des entreprises locales. Ceci permet de r~duire les couts d'infrastructures et de d~velopper l'emploi grAce A l'utilisation de techniques A plus forte intensite de main-d'oeuvre. L'utilisation de proc~dures d'appels d'offres et un prompt r~glement des factures peuvent aussi reduire les incertitudes des entrepreneurs prives. Les associations d'entreprises locales devraient aider activement leurs membres A etudier les aspects techniques et A elaborer Ie calendrier des projets de travaux publics. 6.69 RECHERCHE ET TRANSFERT DE TECHNOLOGIE. Les entrepreneurs capables de tirer parti des possibilit~s ~conomiques des technologies locales ou import~es sont les pr~curseurs du"maillon manquant" ~voque pr~c~demment. les gouvernements et les donateurs devraient par cons~quent - 271 - les encourager en finan~ant des programmes de recherche et en vulgarisant des technologies commercialement viables. Les 6coles peuvent appuyer ces initiatives en encourageant des carri~res permettant de combiner l'expertise technique et les comp6tences de gestion. Des programmes de familiarisation des 6tudiants avec des entreprises locales permettraient d'6tablir des liens tr~s importants entre les 6tablissements d'enseignement et Ie milieu des affaires. 6.70 SERVICES. La privatisation des entreprises publiques dans Ie domaine du commerce, des transports, de la finance et des services sociaux est en cours dans plusieurs pays. Ces r6formes peuvent ouvrir de nouvelles perspectives aux initiatives des entrepreneurs. Lorsque la privatisation des services publics entraine une augmentation de la concurrence, elle peut avoir un effet catalytique important sur les entreprises locales. Par exemple, au Nig6ria, l'abolition des offices de commercialisation du cacao a ouvert de nouvelles possibilit6s A des commer~ants et des associations de producteurs priv6es. En Mauritanie, l'ouverture du secteur des transports A la concurrence a permis la cr6ation de grandes compagnies d'autobus priv6es. 6.71 L'6ducation et la sant6 offrent des possibilit~s imm~diates et a long terme de promotion de l'initiative priv6e. A mesure ou les d6penses consacr6es au d6veloppement des ressources humaines ont diminu~, les africains de toute provenance sociale - des plus riches au plus pauvres - ont montr6 qu'ils 6taient dispos6s A assumer Ie coOt de leur ~ducation et de leur sant6 (Voir Chapitre 3). Ces activit6s devraient ~tre encourag~es car elles 6largissent l'acc~s des b6n~ficiaires et permettent de mettre en place des syst~mes durables pour r~pondre A des objectifs sociaux. Les gouvernements peuvent appuyer ces initiatives en ~liminant les barrie res a l'entr~e, tandis que les associations professionnelles et commerciales, les ONG et les organisations traditionnelles peuvent, en collaboration avec les organismes officiels garantir la qualit~ des services sociaux fournis par Ie secteur priv6. R~pondre au be.oin 6.72 L'entreprise commence avec les hommes et les strat~g!es de d~veloppement doivent reconnaitre que si les gouvernements peuvent faciliter Ie progr~s. ce sont les hommes qui Ie feront aboutir. Beaucoup d'africains sont d~jA dispos~s A trouver des opportunit~s, A prendre des risques et 1 r~pondre aux incitations du march~. Cependant, cec! n'est pas suffisant pour r~soudre les probl~mes A long terme de product!vit~. d'emploi et de croissance ~conomique. Les entrepreneurs ont auss! besoin d'un environnement ~conomique propice, c'est A dire qui leur permette de planifier l'avenir, de r~compenser leurs efforts et qui les encourage A investir en eux-memes et dans leurs entreprises. II leur faut ~galement des syst~mes financiers et des moyens d'information qui leur ouvrent l'acc~s aux ressources dont ils ont besoin, des infrastructures qui les relient au reste de l'6conomie et des institutions qui permettent un d~veloppement harmonieux des ressources humaines. - 272 - 6.73 En collaborant avec les gouvernements et les associations locales 1 l'amelioration du clirnat des affaires et 1 la promotion de l'esprit d'entreprise, les donateurs peuvent apporter une contribution irnportante 1 cet effort. Cependant, l'aide exterieure - financi~re et technique - sera d'autant plus efficace qu'elle permettra aux gouvernements: de reorienter les financements de l'Etat vers les infrastructures et les services plutOt que vers les entreprises publiques. de regulariser Ie statut juridique des entreprises du secteur informel et de renforcer les institutions traditionnelles qui les supportent. d'eliminer les obstacles 1 la creation, a la dissolution et au developpement des petites entreprises, en assurant Ie respect du droit des contrats et de la propriete et en assurant un r~glement equitable des conflits. d'encourager Ie developpement de syst~mes financiers et de syst~mes d'inforrnation prives permettant d'elargir l'acces des entreprises aux capitaux et aux technologies. d'aider des groupes particuliers a repondre aux incitations du marche, a creer des emplois et ameliorer leur productivite. 6.74 Les entrepreneurs joueront un rOle fondamental dans la transfc)rmation des economies africaines. Cette vision de l' avenir de l'Afrique fait l'objet d'un consensus que traduisent les reformes de politique ainsi que d'autres initiatives recentes. En creant un environnement prop ice au developpement optimal des competences et des talents de leurs entrepreneurs, les pays africains peuvent fa ire de l'esprit d'entreprise et de son effet d'entrainement la cle de voute d'une croisallce durable et equitable. - 273 - Encart 6.1. L'apparition d'entrepreneurs dans l'agriculture Une etude recente la COte d'lvoire fait etat de l'apparition d'un nouveau groupe d'entrepreneurs agricoles. Ce groupe est heterogene; il comprend des femmes et des immigrants ainsi que des entrepreneurs qui etaient auparavant des agriculteurs ou des salaries urbains. Pour tirer parti des opportunites offertes tant par 1es marches locaux que par les marches d'exportation, ces entrepreneurs ont cree des entreprises qui infirment 1a distinction traditionnelle entre le secteur forme1 et Ie secteur informel. lIs font un usage considerable des services bancaires et commerciaux formels ainsi que de techniques modernes de production, mais beneficent egalement de l'appui des reseaux traditionne1s qUi leur permettent d'avoir acces A 1a main d'oeuvre, aux terres et a l'epargne dont ils ont besoin. Par exemple, un de ces entrepreneur, mecanicien et agro-technicien de formation, travail1ait pour une entreprise urbaine, lorsqu'en 1985, il perdit son emploi et decida de se consacrer A plein temps A l'agricu1ture. 11 gere maintenant une plantation de cacao et de cafe de 170 hectares qui emploie toute une gamme d'equipements agricoles et dont 1a productivite est exce1lente. De m@me, un ancien employe d'une plantation du Burkina Faso a cree sa propre plantation familiale de bananes avec l'aide de 120 employes salaries et de maneuvres qui sont en grande partie des nationaux. Bien que la plantation continue de fonctionner de maniere informelle, sa capacite d'exportation a ete reconnue sous forme de l'attribution d'un numero de code d'exportation officiel. Parmi les 28 autres exemples cites figurent une commer~ante urbaine qui a commence un elevage de volailles et un ancien directeur d'une entreprise de travaux publics qui a cree une plantation d'ananas de 100 hectares. En combinant des techniques agricoles et des methodes commerciales avancees dans 1e cadre d'unites de production de tail1e moyenne, ces entrepreneurs ont pu atteindre des niveaux de productivite tres superieurs A ceux des petites et des grandes exploitations. Grace a leur apprentissage sur 1e tas, i1s ont pu trouver un compromis entre les risques et 1es possibi1ites de profits que presentaient leurs investissements. Ces exemp1es montrent bien comment les systemes traditionnels et modernes peuvent encourager des initiatives spontanees en reponse aux incitations des marches. - 274 - Encart 6.2. Les petites entreprises au Kenya Au Kenya, au cours de la derni~re d~cennie, l'emploi a augment~ tr~s rapidement dans Ie secteur informel urbain. Le d~veloppeemnt de ce secteur a ~t~ la principale raison du taux mod~r~ d'augmentation du chOmage urbain. De m~me, les activit~s non agricoles repr~sentent une source croissante de revenus et d'emploi dans les campagnes. Ces activit~s devront ~tre la principale source de nouveaux emplois jusqu'A la fin du si~cle. La petite entreprise et l'artisanat dans les villages et les villes de march~ devront g~n~rer au moins 75 % des emplois urbains suppl~mentaires n~cessaires pour ~viter une augmentation du chOmage. Dans Ie pass~, certaines petites entreprises ont ~t~ harcel~es ou ignor~es par les pouvoirs publics. Dans Ie cadre de la r~glementation promulgu~e en 1976, les vendeurs de rue titulaires de permis n'avaient Ie droit d'avoir qU'un employ~. Les autorit~s locales avaient l'habitude de faire des contrOles et d'arr~ter les employ~s en surnombre pour d~faut de permis. Parfois, Ie cont des permis quadruplait du jour au lendemain ce qui posait des probl~mes tr~s s~rieux aux commer9ants concern~s. Dans Ie secteur des transports, les petits op~rateurs de "matatus" n'avait pas Ie droit de faire concurrence aux compagnies d'autobus sur certains itin~raires. Les petits fabriquants et les petits ateliers de r~paration ont vu leurs conts de production augmenter du fait de mesures favorisant les grandes entreprises et leur interdisant d'exercer leurs activit~s A proximit~ des centres de consommation. Le Plan de d~veloppement 1974-78 a reconnu ces probl~mes en ces term.~s: "ces entreprises ont ~t~ parfois harcel~es A tort mais ceci doit tr~s rapidement cesser". N~anmoins, la r~forme a tard~ comme Ie prouve Ie Docwnent parlementaire de 1986 qui demandait la nomination d'une commission sp~ciale pour analyser les contraintes d'ordre juridique qui sur Ie plan national et local restreignent encore les activit~s des petites entreprises. A partir des ann~es soixante-dix, Ie Kenya a ouvert officiellement Ie secteur des transports A la concurrence en reconnaissant les "matatus" et en les autorisant A se constituer en associations pour d~felldre leurs int~r~ts. Cependant, un d~cret r~cent a banni l'association des "matatus" A la suite d 'une tentative d' augmentation des tarifs au delA des limites fix~es par Ie gouvernement. Cette association pourrait permE!ttre A la profession de s' auto r~glementer en vue d' am~liorer l' ~tat des routes et la s~curit~ de la circulation, mais il faudrait pour cela que son pouvoir de repr~sentation soit en permanence reconnu. Le gouvernement s'est efforc~ d'encourager les activit~s des petites entreprises de production et de r~paration que l'on appelle en kiswahili des "jua kalin, c'est A dire ceux qui travaillent au soleil. De simples abris ~quip~s d'~lectricit~, d'eau, de t~l~phones publics et de toilettes ont ~t~ install~s avec l'aide des pouvoirs publics, d'ONG et de banques locales. En leur fournissant des infrastructures essentielles tout en pr~servant leurs relations informelles et leur proximit~ des march~s, Ie gouvernement a permis A ces petites entreprises de fabrication et de r~paration de cr~er des coop~ratives de production et d'~pargne pour am~liorer leur acc~s au cr~dit et A la technologie. Une banque de Nairobi a d~jA commenc~ faire des pr~ts A des coop~ratives de "jua kali". - 275 - L'am~lioration des installations de travail de ce secteur a aussi encourag~ l'~tablissement de liens avec des entreprises plus importantes. En 1988, une compagnie kenyanne priv~e, Sparewise Ltd, a ~te cr~~e pour assurer la location-vente d'equipement moderne, a des conditions avantageuses, aux "jua kalis". - 276 - Encart 6.3. La diversit~ des institutions financi~res infonnelles Parmi les syst~mes financiers informels, les plus connus sont les fonds tournants, appel~s "susus" au Ghana, "danduk" au Soudan, tontines au Cameroun et "hagbad" en Somalie, pour n'en citer que quelques uns. G~n~ralement, un fonds tournant est organis~ par un groupe de personnes qui se connaissent parce qu'elles sont voisins, qu'elles pratiquent le m~me m~tier ou qu'elles font partie de la m~me famille au sens large. La plupart de ces associations conservent une partie de l'~pargne qu'elles recueillent pour alimenter une caisse d'assurance commune pour des urgences ou des services sociaux. Les membres de ces associations se r~unissent r~guli~rement pour d~terminer le montant de leurs contributions, les payer et d~cider de leur utilisation. L'ordre de rotation est d~termin~ par anciennet~, par ~lection, par lotterie, n~gociations, ench~res ou par l'urgence des besoins d'un des membres - mais dans tous les cas par consensus. Les associations a fonds fixes sont similiares a des caisses d'~pargne. Les participants confient leur ~pargne a intervalles r~guliers a un tr~sorier qui les conserve pendant une p~riode convenue d'avance et la retourne en totalit~ a l'~ch~ance. Ces fonds peuvent ~tre utilis~s pour des pr~ts a des membres ou a des non membres, les int~r~ts correspondants reve~nant au fonds. Les ressources de ces associations sont utilis~es a des fins tr~s diverses, allant de l'achat de nourriture et de v~tement en p~riode de d~tresse au financement de c~r~monies et de biens de consommation durable (automobiles, ~quipements m~nagers). Elles servent ~galement a acqu~rir des ~quipements permettant de g~n~rer des revenus (caDlions, machines a coudre, moulins a grain) qui sont parfois poss~d~s en COmD1Un et a financer des transactions commerciales et les investissements d'exploitations agricoles ou de petites entreprises. En dehors de leur r6le en mati~re de mobilisation de ressources, un grand nombre d'institutions financi~res informelles servent aussi de syst~mes de s~curit~ sociale. Par exemple, en Ethiopie, les membres des IDIR font des contributions p~riodiques qui leur donnent droit a des avantages en cas de d~c~s ou de maladie, de perte d'emploi ou d'eDlprisonnement. Ces groupes peuvent ~tre bas~s sur l'appartenance a une m~me communaut~ ou a une m~me organisation. Cette derni~re affiliation est plus courante dans les villes, les membres de ces associations ~tant souV'ent des employ~s d'une m~me administration ou d'une m~me entreprise ou des diplom~s d'une m~me ~cole. Ces syst~mes informels permettent ~galement de faciliter le commerce a travers les fronti~res. Par exemple, en Somalie, une part importante du CODm"lerce d'importation et d'exportation ainsi qu'une partie des rapatriements de devises utilisent de tels syst~mes. Les exportateurs de b~tail conservent une partie de leurs recettes d'exportation sous forme de devises qu'ils d~tiennent a l'~tranger. Les importateurs ach~tent ces devises au taux du march~ parall~le. lIs collectent ~galement les devises des somaliens qui travaillent a l'~tranger, en versent la contrepartie a leurs familIes en Somalie et les investissent dans des importations. - 277 - Le succ~s des syst~mes financiers informels s'explique principalement par leur adaptation A l'environnement socio-culturel dans lequel ils op~rent. Le taux extr~mement faible de d~fauts de paiement s'explique non seulement par les pressions qU'exercent les membres du groupe sur les d~linquants mais aussi par la convergence des int~r~ts du groupe et des fonctions du syst~me. - 278 - CHAPITRE 7 L'int~gration et 1a coop~ration r~giona1es Des paroles aux actes 7.1 Les chapitres pr~c~dents ont mis en ~vidence p1usieurs exemp1es ou 1a et 1e commerce r~gionaux pourraient venir ~pau1er 1e coop~ration d~ve1oppement a long terme de l'Afrique. Les plus importants sont 1es suivants o Le d~ve1oppement des capacit~s. Le Chapitre 3 appe11e a 1a cr~tion de centres r~gionaux d'exce11ence ou pourraient ~tre concentr~es 1es res sources permettant de mener des activit~s de formation et de recherche de grande qua1it~ dans 1es mati~res scientifiques, techno1ogiques, agrico1es, ~conomiques, dans 1a gestion des affaires et dans bien d'autres domaines. o La s~curit~ a1imentaire. 11 est clair d'apr~s 1e Chapitre 4 qu'une intensification des ~changes entre 1es pays d'Afrique aiderait a surmonter 1es d~s~qui1ibres en mati~re d'approvisionnement a1imentaire, r~duisant ainsi la d~pendance de l'Afrique sur les importations a1imentaires de l'~tranger. La lib~ra1isation du commerce alimentaire r~giona1 contribuerait a la s~curit~ a1imentaire. L'~tablissement de stocks alimentaires, la mise au point de pr~visions communes en mati~re de r~coltes et l'application conjointe de mesures de surveillance des maladies du b~tail sont aut ant d'autres domaines ou une approche r~gionale pourrait se traduire par un gain pour tous les pays concern~s. La coop~ration r~gionale est aussi essentielle pour renforcer 1a lutte contre les nuisibles et am~liorer la gestion des res sources nature1les - en particll1ier, en vue du d~ve1oppement des bassins fluviaux. o L'industrie. Le Chapitre 5 met en ~vidence les avantages que pourrait apporter une 1ib~ra1isation plus rap ide au sein de l'Afrique, dans 1e cadre d'un programme g~n~ral de 1ib~ra1isation des ~changes. Une te1le d~marcne aiderait les entreprises existantes sous-uti1is~es et sur-prot~g~es a s'ajuster a l'extension des march~s et a l'intensification de la concurrence sans qu'elles soient expos~es trop rapidement a la concurrence internationale. Les march~s internes dans la plupart des pays africains ne sont pas assez vastes pour r~aliser des ~conomies d'~chel1e et pour ~tre concurrentiels dans de nombreuses industries de biens interm~diaires et d'~quipement (tels que 1e papier, l'acier, 1es produits pharmaGeutiques), alors que la coop~ration r~giona1e peut contribuer a d~ve1opper efficacement toutes ces industries. Les pays voisins peuvent aussi fournir des d~bouch~s aux 1es capacit~s exc~dentaires et un terrain d'exp~~ience pour aborder ensuite de plus grands march~s internationaux. o Le Chapitre 5 cherche a d~montrer que l'exploration L'~nergie. et 1e des r~serves en hydrocarbones de l'Afrique serait d~veloppement facilit~s si ces activit~s ~taient entreprises simultan~ment dans plusieurs pays voisins ayant des structures g~ologiques similaires. De plus, les conts d'exploitation, de raffinement et da distribution du p~trole pourraient atre singuli~rement abaiss~s grace a la coop~ration r~giona1e. 11 en est de m~me pour le d~ve1oppement du gaz naturel et de l'~nergie hydro~lectrique. Dans ce dernier domaine, des ~conomies substantielles pourraient ~tre r~a1is~es par la connexion de plusieurs r~seaux ~lectriques natiommx. - 279 - 7.2 Depuis longtemps, les dirigeants africains ant place la cooperation et l'integration regionales au premier rang de leurs priorites. Elles etaient un th~me central du Plan d'action de Lagos de 1980 (PAL), de la session speciale des Nations Unies sur l'Afrique en 1986, et d'un grand nombre d'autres declarations et rapports de haut niveau sur la politique et la strategie de developpement de l'Afrique. Ceci est particuli~rement important pour les pays enclaves, plus nombreux en Afrique que sur n'importe quel autre continent. La fragmentation de l'Afrique a ete consideree, non sans controverse, comme une formidable contrainte. La situation actuelle 7.3 Nombre d'institutions qui oeuvrent pour l'integration et la cooperation regionales ant ete creees dans les annees qui ant suivi l'accession a l'independance, mais sans avoir ete veritablement planifiees. Le Plan d'action de Lagos fournit un cadre conceptuel et programmatif pour l'integration economique. II divise l'Afrique subsaharienne en trois sous-regions : l'Afrique de l'Ouest, l'Afrique centrale et l'Afrique de l'Est et australe. D'apres Ie schema prevu par Ie Plan de Lagos, chaque sous-region devra passer par trois phases : libre echange, union douani~re et communaute economique. 7.4 L'Afrique compte plus de 200 organisations de cooperation regionale. Plus de 160 sont intergouvernementales, et les autres non gouvernementales, la plupart de ces dernieres etant subventionnees par l'Etat. L'efficacite des institutions regionales souffre de la lourdeur des structures, de la politisation des affectations, du peu d'empressement des pouvoirs publics a donner des responsabilites aux cadres regionaux et du fait que, dans la quasi-totalite des pays membres, les questions regionales ne sont pas jugees prioritaires. Nombre de gouvernements - m~me les plus riches - ne se sont pas acquittes des obligations financi~res decoulant de leur qualite de membres. 7.5 L'integration commerciale a donne des resultats decevants : la part du commerce intra-regional dans l'ensemble des echanges n'a pas progresse depuis au mains 20 ans. Ceci est da en partie a l'inegalite de la repartition des benefices et des coats. Des pays qui ant du mal a equilibrer leur budget et leur balance des paiements cherchent a eviter les coats immediats de l'integration regionale, qui doivent cependant ~tre supportes pour degager des benefices a long terme. Les petits pays et les pays pauvres craignent par ailleurs que les partenaires riches et developpes accaparent l'essentiel des benefices procures par 1 'integration, et que les mecanismes de compensation soient insuffisants. 7.6 Les reussites en matiere de cooperation regionale tiennent a une meilleure delimitation des objectifs et a la possibilite pour taus les partenaires d'en retirer des avantages dans les meilleurs delais. En regle generale, il s'agit aussi de cas au les bailleurs de fonds exterieurs ant pris 1 leur charge une grande partie du financement. - 280 - Les le~ons A tirer de l'integration commerciale 7.7 De tous les dispositifs d'integration commerciale, la Communaute economique de l'Afrique de l'Ouest (CEAO) est celIe qui a Ie mieux reussi. Elle a realise une integration poussee qui encourage la specialisation economique et facilite Ie mouvement de la main-d'oeuvre depuis les pays pauvres du Sahel (Mali, Burkina Faso) vers les riches pays du littoral (Senegal et COte d'Ivoire), et organise l'acheminement des marchandises dans l'autre sens. En reduisant les obstacles non tarifaires et en instituant un mecanisme de compensation satisfaisant, elle a pu accroitre sensiblement les echanges intra-regionaux, qui representent actuellement environ 10 % du commerce total. 7.8 Tous les membres de la CEAO, a l'exception de la Mauritanie, appartiennent a l'Union monetaire ouest africaine (UMOA) et ont pour devise Ie franc CFA, qui est rat tache au franc fran~ais. lIs ont une banque centrale commune OU leurs reserves sont deposees dans un compte du Tresor public fran~ais. En echange du privil~ge de convertibilite, les Etats membres de l'UMOA ont accepte de limiter leurs deficits budgetaires et Ie montant total des credits accordes. En tout etat de cause, la convertibilite n'est pas Ie seul ingredient necessaire pour promouvoir les echanges regionaux; il faut aussi mettre en place un cadre reglementaire et favoriser la mobilite des facteurs. 7.9 La Communaute economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), dont sont membres les pays de la CEAO et ceux de l'Union du fleuve Mano (MRU) , n'a gu~re avance sur la voie de l'integration economique. Les obstacles tarifaires et non tarifaires n'ayant pas ete reduits, les echanges entre les membres de la CEDEAO sont au m~me niveau qu'au debut des annees 70, soit environ 3 % des echanges internationaux du groupe. Le proHl des echanges n'a pas non plus evolue. Le Nigeria et la COte d'Ivoire dominent toujours Ie secteur des exportation d'articles manufactures. La mobilite de la main-d'oeuvre, loin de progresser, a recule. C'est ainsi qu'en 1981 et 1983, Ie Nigeria a expulse plus de 1 million de travailleurs temporaires ghaneens. II n'y a pas de mouvement de c,apitaux a l'interieur de la region en raison du sous-developpement des mardles financiers. En outre, la r~gle edictee par la CEDEAO en ce qui conclarne l'origine des produits est devenue une pomme de discorde. Pour etre admis au benefice des preferences tarifaires de l'organisation, les produits doivent etre fabriques par des entreprises contrOlees par des entrepreneurs nationaux au moins jusqu'a concurrence de 51 % du capital. Cette r~gle, qui n'existe pas au sein de la CEAO, encourage les fabricants nationaux, mais limite les exportations de la COte d'Ivoire et du Senegal (puisque leurs usines sont traitees comme des etablissements etrangers) et decollrage les investissements etrangers. 7.10 Dans la sous-region de l'Afrique centrale, les dispositifs d'integration commerciale ont la aussi donne des resultats decevants. La Communaute economique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC), la plus recente, a eu du mal a demarrer. La Communaute economique des pays des Grands Lacs (CEPGL) a eu des probl~mes financiers et on ne s'est guere soucie d' appliquer son programme de liberalisation des echanges. L 'Unice, des Etats de l'Afrique centrale (UEAC) a bien une monnaie convertible franc CFA ., mais les echanges a l'interieur du groupe ont flechi, alo - 281 - que ses ~changes avec des pays non membres ont augment~. C'est ainsi que Ie principal partenaire commercial africain du Congo (qui est membre de l'UEAC) est Ie Za~re (qui n'est pas membre du groupe). L'UEAC r~alise pres de la moiti~ de son commerce africain avec la CEDEAO et moins de 45 % A l'int~rieur du groupe. 711. La lenteur relative des progres de l'int~gration en Afrique centrale tient peut-~tre A l'absence d'un chef de file r~gional. En Afrique de l'Ouest, Ie Nig~ria, la COte d'Ivoire et Ie S~n~gal ont pris la t~te du mouvement d'int~gration ~conomique. 7.12 L'effondrement de la Communaut~ ~conomique la plus prometteuse, la Communaut~ de l'Afrique de l'Est (EAC), montre comment l'incapacit~ A r~soudre les diff~rends politiques peut compliquer les problemes que pose in~vitablement tout projet d'int~gration ~conomique associant des pays parvenus A des niveaux de d~veloppement diff~rents. L'EAC est n~ avec une devise commune, une infrastructure coordonn~e A l'~chelon r~gional, des politiques ~conomiques harmonis~es, un systeme d'institutions communes et une mobilit~ forc~e de la main-d'oeuvre. Elle s'est d~sint~gr~e A la fin des ann~es 70 A propos de la r~partition des b~n~fices, A cause de divisions politiques et A l'occasion de conflits d'int~r~t opposant Ie Kenya, la Tanzanie et l'Ouganda. 7.13 Apres une p~riode de d~sillusion, l'int~gration ~conomique a refait surface avec la Zone d'~change pr~f~rentiel pour les Etats d'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (ZEP), qui regroupe 15 Etats souverains h~t~rogenes dont la masse s'~tend de la Corne de l'Afrique A l'Angola et aux lIes de l'Oc~an indien. Tous les pays qui se situent entre ces deux secteurs en sont membres. L'Angola, Ie Botswana, Madagascar, Ie Mozambique et les Seychelles n'y appartienent pas encore. 7.14 La ZEP vise A promouvoir les ~changes intra-r~gionaux en r~duisant les obstacles tarifaires et non tarifaires, en particulier en accordant un traitement pr~f~rentiel A certains produits. Pour ~tre admis au b~n~fice de ce traitement, un pays doit wpr~senter un int~r~t pour les pays membres tant du point de vue de l'exportation que de celui de 1 'importation" , l'entreprise qui Ie fabrique doit ~tre une entreprise locale A raison d'au moins 51 % du capital et ses composantes doivent provenir d'un pays membre de la ZEP A raison d'au moins 60 %. 7.15 L'abaissement des droits de douane a ~t~ lent et il a ~t~ difficile d'appliquer la regIe des 51 %. Cinq Etats, dont Ie Zimbabwe, ont b~n~fici~ de d~rogations temporaires. La revendication formul~e par les pays peu d~velopp~s aux fins d'une r~partition ~quitable des b~n~fices de la lib~ralisation est devenue une pomme de discorde avant m~me que ces b~n~fices n'aient commenc~ A se concr~tiser. On a cr~~, pour faciliter Ie reglement des ~changes, une chambre de compensation g~r~e par la Banque centrale du Zimbabwe, mais elle reste insuffisamment utilis~e. Les le90ns a tirer de la coop~ration r~gionale 7.16 Tenant compte de l'~chec de la Communaut~ de l'Afrique de l'Est, la Conf~rence pour la coordination du d~veloppement de l'Afrique australe (SADCC) a ~vit~ l'approche par l'int~gration des march~s pr~f~rant adopter - 282 - une approche progressive de la coop~ration r~gionale, structur~e par projets. La r~ussite de la SADCC en tant qU'organisation de coop~ration r~gionale repose en partie sur Ie fait qu'elle a pr~f~r~ l'action concrete a la constitution d'un secr~tariat complexe; les gouvernements des pays membres assurent eux-m@mes l'ex~cution des programmes sectoriels qui leur sont confi~s. Les programmes de la SADCC visent a r~duire les liens ~conomiques avec l'Afrique du Sud; c'est ainsi qu'elle a ~labor~ de grands projets dans Ie domaine des transports ainsi que de grands projets industriels r~gionaux (en partie financ~s par des bail leurs de fonds ext~rieurs), qui ont procur~ des b~n~fices imm~diats aux Etats membres. 7.17 II existe aussi des institutions de coop~ration r~gionale qui b~n~ficient d'un important soutien de la part des gouvernements et des organismes ext~rieurs en vue d'interventions ponctuelles, comme dans Ie cas du programme relatif a la c~cit~ des rivieres en Afrique de l'Ouest, qui est parrain~ par un consortium de donateurs (Encadr~ 7.1, Programme de lutte contre l'onchocercose). II y a aussi des centres de formation et de recherche r~gionaux qui enregistrent de bons r~sultats, tels que l'Institut de gestion pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe (ESAMI) et l'Organisation r~gionale africaine de normalisation (ORAN). De m@me. l'exploitation en coop~ration du r~seau hydro~lectrique interconnect~ par la Volta River Authority (Administration de la Volta, au Ghana) et les commissions de l'~lectricit~ du B~nin, du Togo et de COte d'Ivoire a donn~ d'excellents r~sultats. 7.18 Pourtant, nombre d'organisations intergouvernementales d'Afrique subsaharienne connaissent une crise financiere. Certains services techniques r~gionaux ont cess~ de fonctionner, comme l'Organisation commune de lutte antiacridienne et de lutte antiaviaire (OCLALAV), l'Organisation internationale de lutte contre Ie criquet migrateur africain (OICMA) et l'Organisation de t~l~d~tection de Bamako. Le plus important investissement industriel r~gional, la Cimenterie d'Afrique de l'Ouest (CIMAO), qui avait ~t~ partiellement financ~e par la Banque mondiale, a ferm~ ses portes en 1984 : son clinker revenait environ deux fois plus cher que sur Ie march~ mondial. Une nouvelle strat~gie au service de l'int~gration et de la coop~ration r~gionales 7.19 Comme mieux tirer parti de l'option r~gionale? Les pietres r~sultats des efforts d'int~gration commerciale qui ont suivi l'ind~pendance ont ouvert un d~bat sur leur efficacit~ dans les conditions actuelles de 1 'Afrique. Les critiques de l'int~gration commerciale l'ont caracteris~e comme une strat~gie d'~chec, affirmant que ce modele d'int~gration, copi~ sur l'exp~rience des pays europeens (hautement industrialis~s qui entretiennent entre eux des courants d'echange tres intense, n'est pas applicable en Afrique ou les echanges entre pays sont peu actifs et Ie niveau d'industrialisation peu avance. La gamme des biens ~changeables y est consider~e comme limit~e et, en consequence, l'infrastructure de transports et de communications est insuffisante. Les critiques recommandent donc l'abandon de l'approche par l'int~gration commerciale et son remplacement par une nouvelle approche mettant l'accent sur Ie renforcement des moyens de production r~gionaux. Ainsi, la priorite serait-elle accordee a l'investissement regional dans les industries - 283 - lourdes (industries chimiques, fer et acier) et dans les infrastructures de transports et de communications. Les difficultes d'approvisionnement sont en effet per9ues comme la contrainte principale empachant l'accroissement des echanges entre les pays africains. 7.20 Cependant, l'experience sugg~re que la plupart des pays ne sont pas prats a acheter des biens a des prix eleves A leurs partenaires quand d'autres biens sont disponibles ailleurs A meilleur marche. Dans Ie passe, les gouvernements africains se sont montres tr~s presses de negocier des accords de traitement preferentiel et de compensation. Les vrais probl~mes ont re9u tr~s peu d'attention : non competitivite des Etats membres comparee aux fournisseurs des pays tiers, cofit eleve de l'entreprise economique, penurie de devises et de credits etrangers due aux distorsions dans la politique macroeconomique, insuffisante complementarite des biens produits, restrictions touchant Ie commerce des produits alimentaires, etc. 7.21 L'approche par le biais de la production n'aborde pas ce genre de probl~mes. Elle ne definit pas comment et ou doit atre genere Ie capital A investir dans l'expansion de la production. Cependant, le volume considerable du commerce informel montre qu'il est possible de surmonter la contrainte de l'insuffisance des moyens de transport et de communication. En l'absence de signaux de la part du marche, l'approche par la production - supposant le developpement d'industries de base (acier, ciment, et produits chimiques) dirigees par l'Etat, quel qu'en soit le cofit et independamment de la demande du marche - peut accelerer Ie rythme d~ l'integration regionale. Selon cette approche, tout l'investissement viendra du secteur public. Mais l'experience montre que la gestion du secteur public en situation de protection des marches resulte dans des projets cofiteux et non viables economiquement. Cette approche ne constitue done pas une base saine pour l'integration. 7.22 La strategie alternative que propose ce rapport comporte trois elements: l'elaboration d'approches progressives mais globales de la cooperation et de l'integration regionales; le renforcement de formes fonctionnelles specifiques de cooperation; et la creation d'un environnement permettant le libre mouvement des biens, des services, de la main-d'oeuvre et du capital. Une approche progressive mais globalisante 7.23 L'integration aura le plus de chances de reussir si elle repose sur une approche tr~s progressive qui tienne compte des interats economiques communs. Mais pour que cette approche aboutisse, encore faut-il que tous les partenaires soient convaincus des avantages qu'elle peut procurer et s'engagent veritablement A la concretiser. Les divisions, les jalousies et la mefiance omnipresentes qui marquent les relations entre les pays de la region donnent a penser que les premiers pas seront les plus difficiles. 7.24 Pour surmonter ces difficultes, il faudrait encourager la creation de sous-groupes reunissant deux ou plusieurs pays (une fois qu'ils sont convaincus des avantages A tirer de cette association) dont l'integration serait plus rapide que dans le cas d'autres membres. A noter I' - 284 - que cette approche progressive ne doit pas entrainer la cr~ation de nouvelles organisations, mais reposer sur des accords bilat~raux (ou multilat~raux) entre gouvernements ayant compris les avantages qu'ils peuvent escompter d'une lib~ralisation r~ciproque des march~s des produits et des facteurs. Les bailleurs de fonds peuvent contribuer A l'entreprise en fournissant des ressources A l'appui du commerce r~gional transfronti~res r~alis~ par des entreprises priv~es. 7.25 Les organisations permanentes n'ont pas A monopoliser les programmes; dans certains cas, il sera plus efficace de s'attaquer de fa~on ponctuelle A tel ou tel goulet d'~tranglement. En tout ~tat de cause, la politique retenue doit comporter des mesures synergiques et compl~mentaires. Le renforcement des infrastructures r~gionales ne servira gu~re l'int~gration r~gionale s'il n'est pas assorti de r~formes des politiques ~conomiques destin~es A accroitre la demande de biens et de services. L'avenir des r~formes d~pendra des stimulants pr~vus, en particulier en ce qui concerne les taux de change et de la lib~ralisation des march~s. De plus, les r~formes n'auront de chances d'aboutir qui si l'on am~liore les infrastructures mat~rielles et valorise les ressources humaines. 7.26 11 est essentiel de mettre en oeuvre des programmes d'application progressive destin~s A lever les principaux obstacles A l'int~gration r~gionale, de m@me que des programmes nationaux d'ajustement structurel. Chaque phase d'ex~cution devrait permettre d'aller de l'avant pour ce qui est de l'harmonisation des politiques et de l'entretien et de l'am~lioration des infrastructures. 7.27 Pour commencer, il est urgent de rationaliser les organisations r~gionales (Encadr~ 7.2). Ces organisations devraient ~tre r~form~es et transform~es en institutions sobres et efficaces dot~es d'un mandat clairement d~fini et d'un v~ritable pouvoir de d~cision. Ainsi, elles pourraient en suite entrainer Ie mouvement de cr~ation d'infrastructures mat~rielles, techniques et l~gales qui serviraient de base aux ~changes r~gionaux de biens, de services, de main-d'oeuvre et de capital. Les bail leurs de fonds pourraient apporter un appui appr~ciable A cette entreprise de rationalisation en fournissant des financements concessionnels permettant de couvrir les conts pendant une p~riode transitoire. Transports, communications et services r~gionaux 7.28 Les insuffisances des transports routier, a~rien, ferroviaire et maritune et des services de t~l~communications sont autant d'entraves aux ~changE!S r~gionaux et ~l~vent Ie cont de l'activit~ ~conomique en Afrique. Dans la plupart des cas, l'infrastructure existante a ~t~ mise en place pour pE!rmettre A chaque pays de commercer avec des pays non africains. Trois d~cennies encore apr~s l'accession A l'ind~pendance, les liens entre les pays d'Afrique subsaharienne demeurent t~nus. 7.29 Mais il ne suffit pas d'injecter un volume consid~rable de capitaux dans la cr~ation d'infrastructures pour stimuler Ie commerce intra-~Ifricain. 11 faut aussi att~nuer ou ~liminer les autres entraves au commerce. L'une des rares r~alisations concr~tes de l'Union du fleuve - 285 - Mano, un pont entre la Sierra Leone et Ie Liberia, ne reste-t-il pas virtuellement inutilise du fait des restrictions imposees des deux cOtes de la fronti~re? 7.30 11 ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. 11 vaudrait mieux, en effet, mettre en place un regime coordonne d'incitations et eliminer les entraves administratives au commerce avant d'ameliorer l'infrastructure pour repondre A l'expansion des echanges suscitee par les reformes de politique economique. Les investissements A realiser dans ce secteur devraient @tre determines sur la base d'une evaluation approfondie de l'etat actuel et potentiel des echanges transfronti~res et ne constituer l'element principal d'un programme d'action que s'ils sont la condition sine qua non de l'apparition de nouveaux echanges ou de l'expansion de courants d'echanges existants. lIs devraient @tre completes par des projets de rehabilitation et de modernisation des infrastructures existantes. 7.31 Les programmes de cooperation regionale en mati~re de transports et de communications devraient se concentrer sur l'efficacite et la fiabilite des services. Ceci est particuli~rement important pour les activites de transit vers les regions situees loin du littoral et vers les pays enclaves. Les conts de transport terrestre sont gonfles par des procedures douani~res encombrantes et depassees, par Ie manque de coordination operationnelle entre les differents modes de transport - en particulier aux points de liaison entre les ports et les chemins de fer - et par l'insuffisance d'harmonisation des reglementations applicables au transit de marchandises. En outre, les reglementations imposees par les pays enclaves, en particulier en ce qui concerne les droits de fret reserves aux transporteurs nationaux et l'affectation des devises etrang~res pour les depenses de transit, ont egalement contribue A l'augmentation des conts. 7.32 Des organisations sous-regionales, en particulier la ZEP, ont prepare des propositions et des plans d'action pour regler Ie probl~me des obstacles non physiques au transit. Leur mise en oeuvre a ete lente et entravee par des revers resultant de changements unilateraux. Un veritable engagement politique est necessaire pour aboutir. C'est grAce A un tel engagement qU'ont pu avoir lieu les progr~s realises dans Ie developpement d'un syst~me efficace de transit regional Ie long du corridor de Beira sous les auspices de la Commission des transports et des telecommunications de l'Afrique australe. 7.33 11 importe de definir sans retard des politiques simples et coherentes pour conferer efficacite et fiabilite aux services de transport. Le choix des itineraires et des modes de transport, ainsi que la coordination de l'exploitation de couloirs donnes doivent @tre laisses aux chargeurs et aux transporteurs. Dans ce cadre, on fera davantage appel aux exploitants prives, y compris ceux qui op~rent dans Ie secteur non structure. Les chemins de fer africains ont perdu du terrain au profit des services de transport routier par camion sur longue distance. S'ils veulent reaffirmer leur avantage comparatif et ameliorer les perspectives de regagner leur viabilite financi~re, ils devront realiser des progr~s rapides en mati~re de cooperation operationnelle et de coordination de leur politique commerciale (Encadre 2.6). - 286 - 7.34 Ce sont l'aviation civile et Ie transport maritime qui profiteront vraisemblablement Ie plus d'une cooperation regionale axee sur les servies. La decision recemment prise de restructurer les compagnies aeriennes nationales africaines dont la coordination laisse a desirer pour realiser une integration regionale plus poussee devrait se doubler d'une decentralisation et d'un elargissement des possibilites de gestion et d'exploitation par Ie secteur prive. Une approche similaire appliquee au secteur maritime devrait permettre a l'Afrique de profiter de la reorganisation mondiale des transports maritimes internationaux. 7.35 L'amelioration des services regionaux ouvre de vastes perspectives aux entreprises nationales privees ou publiques. L'une des plus belles reus sites a cet egard est celIe de la compagnie aerienne publique, Ethiopian Airlines. Son reseau regional africain s'est taille une reputation mondiale d'efficacite technique et gestionnelle et de flair commercial (Encadre 7.3). 7.36 Les transports, l'electricite, la banque, les communications et les assurances sont des facteurs qui se pr@tent a une extension regionale de l'exploitation nationale publique et privee. Une meilleure integration des marches et l'amelioration des transports reduiraient Ie coftt des intrants essentiels et celui de la distribution des produits, ce qui rendrait ceux-ci competitifs sur les marches africains et mondiaux. L'amelioration des telecommunications peut satisfaire des besoins fondamentaux en Afrique en diminuant Ie coftt des transactions, en rendant inutile un mode d'acheminement classique plus onereux, et en ameliorant l'efficacite du marche en facilitant l'acces des operateurs a l'information commE!rciale. 7.37 Le projet intitule Pan African Telecommunications (projet panafricain de telecommunications) constitue une reponse regionale complete qui integre Ie reseau africain de telecommunications en reliant entre eux les z:eseaux nationaux. La demande de services de telecommunications au niveau national etant faible, Ie renforcement de la capacite des reseaux nationaux doit constituer une priorite a court terme. II permettra, a plus long terme, d'integrer plus facilement Ie reseau africain. Mise en place de centres regionaux de formation theorique et pratique et de recherche 7.38 L'acquisition de competences techniques est coftteuse. Aucun pays africain ne peut financer tous les etablissements d'enseignement supeI"ieur necessaires a la formation et a la recherche-developpement. L'Aft"ique a besoin de centres d'etudes avancees dans differents domaines et la djmension regionale offre les meilleures garanties d'efficacite tant pour la creation que pour l'exploitation de ces centres (Encadre 7.4 L'ICIPE). 7.39 La formation et la recherche techniques etant specialisees, la cooperation regionale permet de realiser d'importantes economies d'echelle. La qualite en profite egalement car l'institution regionale peut moduler parfaitement Ie recrutement en fonction des besoins et justifier l'allocation de locaux et de materiel (bibliotheques. laboratoires, etc.) _ - 287 - ce qui n'est pas possible pour une institution d'envergure plus modeste. Elle peut ainsi se fixer des normes plus ~lev~es. De plus, en mettant en contact des ~tudiants et des enseignants de plusieurs pays, les institutions r~gionales ~largissant l'horizon intellectuel des int~ress~s et encouragent les contacts transfronti~res entre les hommes et les institutions. Une initiative de cet ordre, Ie Coll~ge interafricain d'~lectrotechnique (Inter-African Electrical Engineering College) bilingue de C~te d'Ivoire, qui r~pond aux besoins de formation des services publics de distribution d'~lectricit~ des pays d'Afrique, est promise a un bel avenir. 7.40 II existe deux cat~gories d'institutions s'adressant a plusieurs pays. II y a celles qui rel~vent d'une gestion r~gionale et celles qUi, tout en relevant d'une gestion nationale, ont un rayonnement plus vaste. Les institutions qui appartiennent a cette deuxi~me cat~gorie ont moins de probl~mes de gestion ou de budget. La mise sur pied de centres r~gionaux d'~tudes avanc~es A partir des institutions nationales qui acceptent des ~tudiants venus de plusieurs pays ~vite au pays d'envoi d'avoir a cr~er et a g~rer des institutions on~reuses et permet au pays d'accueil d'abaisser ses coOts unitaires en optimalisant l'echelle de ses installations. 7.41 A l'heure actuelle, 62 centres techniques nationaux d'Afrique francophone acceptent des etudiants etrangers. En outre, on compte au moins 86 instituts de formation technique regionaux et jusqu'a 60 associations r~gionales de formation et de recherche. Mais un effort continu n'en est pas moins necessaire pour coordonner et rationaliser la kyrielle d'institutions regionales existantes. 7.42 Au lendemain de l'accession a l'independance, plusieurs universit~s r~gionales ont enregistre des succ~s, telles les Universites de l'Afrique de l'Est, du Botswana, du Lesotho et du Swaziland. Mais la croissance rap ide des effectifs a r~duit les avantages potentiels sans naturellement faire baisser les frais gene raux supplementaires qu'occasionne la gestion d'une universit~ regionale. Ces universites se sont donc desintegrees. On voit pourtant apparaltre une forme de cooperation plus souple, comme dans Ie cas des accords conclus dans Ie cadre de la SADCC selon lesquels les gouvernements se sont engages a accepter les etudiants etrangers dans certaines disciplines scientifiques ou techniques sous-representes au niveau national. L'Universite du Botswana propose une formation a la science vet~rinaire, celle de Zambie forme des specialistes des industries extractives et m~caniques et celIe du Zimbabwe offre une formation a l'agronomie. 7.43 D'autres secteurs de cooperation apparaissent. L'Association des universites africaines, l'Association des facultes d'agriculture d'Afrique (AFAA) et l'Association des enseignants africains (African Teachers Association) pourraient, si on leur accordait un certain appui, jouer un rOle essentiel pour promouvoir la communication entre enseignants et entre etablissements. La constitution de reseaux repr~sente un autre moyen tr~s rentable d'~lever Ie niveau de qualification professionnelle et doit A ce titre ~tre poursuivie (Encadr~ 7.5). 7.44 Les programmes de perfectionnement professionnel du Groupe consultatif pour 1a recherche agricole internationale (GCRAI) et de - 288 - plusieurs instituts de perfectionnement des cadres offrent un autre exemple de coop~ration r~gionale et sous-r~gionale. Le GCRAl a renforc~ les moyens nationaux africains de recherche agricole par Ie biais de l'appui institutionnel et de la formation des chercheurs. De leur cOt~, l'lnstitut de gestion pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe (ESAMl), Ie Centre africain d'~tudes sup~rieures en gestion (CESAG) et l'lnstitut panafricain pour Ie d~veloppement (IPD) ~laborent des programmes de formation A l'intention d'une clientele r~gionale et ~paulent les instituts nationaux pour ce qui est notamment de la gestion et de l'administration des projets. L'ESAMl s'autofinance par la prestation de services de consultants (Encadr~ 7.6). 7.45 La r~gionalisation pr~sente aussi bien des attraits pour les industries de pointe pour lesquelles, comme dans Ie cas de l'h~liotechnique, les sp~cialistes sont tres rares, les mises de fonds consid~rables et Ie nombre de personnes A former dans un pays donn~ r~duit. Le Centre r~gional d'~nergie solaire (CRES) de Bamako, parrain~ par la CEAO, dispose d'installations uniques en leur genre et ales moyens d'~tre A la pointe de la recherche solaire appliqu~e. 7.46 Conf~rant une nouvelle dimension A la formation th~orique et pratique et A la recherche, l'optique r~gionale aura A long terme des retomb~es b~n~fiques sur la coop~ration ~conomique et politique dans la r~gion. Elle permet de cr~er des institutions en prise directe sur les r~alites locales et diminue Ie besoin de faire appel A des enseignants et chercheurs ~trangers et d'envoyer des ~tudiants A l'~tranger. Gestion des ressources nature lIes 7.47 La qualit~ de la gestion des ressources naturelles d~termine la durabilit~ de la croissance. Une grande partie de l'Afrique est prise dans l'~tau de la d~sertification~ de la d~gradation des terres ou du d~boise'ment, qui menace son avenir ~conomique. Certains problemes concernent plus particulierement certains pays, mais d'autres sont justifiables d'une approche r~gionale : c'est Ie cas de la protection phytosanitaire. La lutte engag~e dans la sous-r~gion de l'Afrique de l'Ouest c~ntre les acridiens, naguere tres efficace, n'est plus que l'ombre d'elle-m~me. 7.48 La protection de la faune sauvage est ~galement mieux assur~e dans Ie cadre d'une action r~gionale. Les r~serves zoologiques transnationales d'Afrique de l'Est, par exemple, appellent un certain degr~ de coordination et une action collective. ne serait-ce que pour lutter c~ntre des fl~aux tels que Ie braconnage. On pourra s'inspirer de l'exemple de l'East African Wildlife Society pour doter d'une organisation efficace d'autres zones dont la faune a besoin d'~tre prot~g~e au niveau sous-r~gional. 7.49 Une ~troite coop~ration r~gionale est une condition indispensable A la gestion des bassins-versants. Les organisations cr~~es A cette fin - organisation des vall~es des fleuves S~n~gal et Zambie, Administration du bassin du fleuve Niger, Commission du bassin du lac Tchad, Union du fleuve Mano, Organisation de l'~lectricit~ des Grands lacs et Organisation du bassin de la Kagera - affichent un bilan in~gal. Les - 289 - probl~mes rencontr~s tiennent surtout A la nature trop ambitieuse des objectifs, A l'insuffisance des cr~dits allou~s et A la p~nurie de main-d'oeuvre qualifiee. La planification des bassins fluviaux n'a pas suffisamment retenu l'attention et les pays membres ont rarement formul~ des plans nationaux en regard de plans de gestion des bassins-versants coordonn~s au niveau r~gional. 7.50 II faudrait relancer les organisations d'am~nagement des bassins fluviaux en leur assignant des objectifs plus limit~s. Elles ne devraient ~tre investies que des responsabilit~s dont les pays membres ne peuvent s'acquitter individuellement, A savoir la planification de l'amenagement A l'~chelle du bassin et Ie contrOle de l'ex~cution des plans d'amenagement adopt~s par les pays membres. Les organisations r~gionales qui sont charg~es de l'am~nagement des bassins pourraient, en consultation avec les gouvernements, integrer les plans nationaux d'am~nagement dans les plans de mise en valeur globale des bassins. Les gouvernements entreprendraient d'executer des projet precis isol~ment ou collectivement. Creer un environnement facilitateur pour les ~changes, la concurrence et la mobilite de la main-d'oeuvre 7.51 des marches constituerait pour l'Afrique la L'~largissement retomb~e b~nefique plus directe d'une int~gration ~conomique renforc~e au niveau r~gional. Certains pays (Ethiopie, Nig~ria et Soudan) produisent des exc~dents de viande, d'autres (COte d'Ivoire. Madagascar. Maurice. Mauritanie, Mozambique, S~negal et Somalie) des excedents de poisson: d'autres encore (Burundi, Kenya, Zimbabwe) des exc~dents de c~reales. La COte d'Ivoire, Ie Soudan et Ie Zimbabwe exportent du coton: la COte d'Ivoire, Ie Liberia et Ie Nigeria du caoutchouc: Ie Kenya, Ie Mozambique, Ie Malawi et la Tanzanie, du the: la COte d'Ivoire, Ie Ghana et Ie Nigeria du cacao; et Maurice, Ie Swaziland et Ie Zimbabe du sucre. Certains pays (Ethiopie, Ghana, ZaYre et Zambie) ont un exc~dent d'hydroelectricite; d'autres (Angola et Nigeria) un excedent de petrole et d'energie. Certains disposent dejA de moyens modernes de production industrielle de biens de consommation et de biens intermediaires (Cameroun, COte d'Ivoire, Ethiopie, Kenya, Maurice, Nigeria, Tanzanie et Zimbabwe), tandis que d'autres n'en sont pas encore A ce stade. 7.52 Les benefices de l'integration economique par Ie biais du commerce pourraient ~tre importants. Officiellement, les echanges entre les pays d'Afrique subsaharienne atteignent seulement 4 milliards de dollars - soit 6 % seulement de la totalite du commerce africain, estime A 65 milliards de dollars - et ont stagne ou decline pour la majorite d'entre eux depuis les annees 70, periode au cours de laquelle la plupart des schemas d'integration des march~s, tels que les accords de traitement pr~f~rentiel et les unions douani~res, ont ~te elabores. Ceci est dn essentiellement A des politiques macroeconomiques - surevaluation des taux de change, distorsions dans l'affectation du credit, et production orientee vers Ie march~ interieur - qui ont stimule la croissance des marches parall~les et du Commerce transfronti~re non structure en Afrique. On estime que, m~me aujourd'hui, jusqu'A 5 milliards de dollars supplementaires d'importations africaines du reste du monde pourraient ~tre fournies par d'autres pays africains qui exportent dejA des produits similaires hors de la region. - 290 - 7.53 L'action se justifie egalement sur la base des realites actuelles. L'integration economique africaine se pratique deja tr~s largement a travers Ie commerce informel et d'autres modes d'echange non officiels. La croissance du commerce transfronti~re non structure reetablit en partie les intenses mouvements de transfert de biens et de migrations humaines qui caracterisaient la vie economique et sociale avant la colonisation. Pour de nombreux Africains, les avantages d'une integration economique plus poussee sont deja visibles dans la vie quotidienne a travers cet echange informel qui maintient les prix a un bas niveau en accroissant la concurrence, permet de se procurer des produits non disponibles localement, fournit des possibilites d'emploi dans des pays voisins et encourage l'initiative economique. Le commerce non structure permet egalement de realiser des profits en contournant les obstacles officiels et la disparite des conditions entre pays. 7.54 LA LIBERALISATION DES ECHANGES. Les benefices de l'integration ne pourront etre pleinement recoltes que si la liberalisation commerciale depasse Ie stade de quelques timides abaissements de droits de douane sur un nombre limite de produits et permet l'ouverture des marches des facteurs de production, de m~me que ceux des biens et services. Le defi est de creer des stimulants commerciaux capables d'encourager Ie secteur prive a entreprendre des activites d'echanges transfronti~res creatrices de richesse. 7.55 L'importance que revet Ie commerce entre pays africains pour ce qui est de stimuler la croissance economique ne tient pas seulement au fait qu'il leur permet d'echanger des produits et des services complementaires. Les echanges entre pays fabriquant des produits analogues sont tout aussi benefiques car ils concourent a accroitre la productivite des entreprises et dE!s exploitations agricoles par rapport aux autres sources d'approvisionnement. On dit souvent que Ie Japon et la Coree ont edifie une industrie fortement protegee; on oublie de dire qu'ils ont adopte des politiques rigoureuses qui visaient a rendre les producteurs efficaces, en particulier par Ie biais de la concurrence interieure. La strategie pour Ie Mveloppement de l'Afrique doit aller dans Ie meme sens. 7.56 L'intensification de la concurrence inciterait a augmenter la productivite, a diminuer les conts, et a eliminer les distorsions de la politique economique. Mais les marches interieurs de bien des produits sont si peu developpes qu'il n'y a pas de place pour des entreprises concurrentes. La concurrence doit donc venir des importations. La liberalisation des marches a l'interieur de l'Afrique pourrait beaucoup aider les producteurs africains a entrer en concurrence, et par la meme elever la productivite et stimuler la croissance. 7.57 La liberalisation commerciale en general doit etre integre aux efforts de restructuration des economies africaines. Cependant, la liberalisation commerciale unilaterale a evolue lentement et a parfois connu des revers. Ceci refl~te les difficultes qu'affrontent les producteurs africains face a la concurrence sur les marches mondiaux et l'opposition de certains groupes d'interet qui ont traditionnellement profite des restrictions aux echanges. Les gouvernements, en l'occurrence, craignent de devoir affronter les conts politiques du chOmage et de la - 291 - diminution des rendements. en particu1ier dans 1e court terme. pendant 1a p~riode o~ 1es entreprises 1es plus fragi1es seront amen~es A r~duire leurs activit~s ou m~me A fermer boutique et avant que de nouvelles activit~s soient suffisamment bien engag~es pour fournir une compensation. La 1ib~ra1isation des ~changes au niveau r~giona1 permettrait une approche par ~tapes en cr~ant un environnement concurrentie1 dans un cadre 1imit~. 7.58 Une acc~l~ration de 1a 1ib~ra1isation au niveau r~giona1. en para11~le avec une 1ib~ra1isation commercia1e g~n~ra1e, permettrait un d~ve1oppement plus rap ide des ~changes et aurait des avantages que ne permet pas 1a 1ib~ra1isation uni1at~ra1e. Les b~n~fices 1es plus importants sont A attendre de 1a combinaison d'un programme de 1ib~ra1isation commercia1e g~n~ra1e par ~tapes et d'un d~mant~lement r~ciproque ~che1onn~ des obstacles au 1ibre mouvement des biens, des services, de capitaux. et de 1a main-d'oeuvre au sein de l'Afrique. 7.59 En 1imitant 1es pr~f~rences r~giona1es, 1a 1ib~ra1isation commercia1e g~n~ra1e garantira que 1a 1ib~ra1isation entreprise au niveau r~giona1 a pour effet essentie1 1a cr~ation de nouveaux courants d'~changes et que 1es distorsions aux mouvements commerciaux sont maintenues A un niveau minimum. En outre, plus 1a 1ib~ra1isation commercia1e globa1e sera rapide et pouss~e, plus faib1e sera 1a probabi1it~ que de nouvelles ressources soient mal dirig~es et uti1is~es pour produire des biens non concurrentie1s destin~s A un march~ r~giona1 artificie11ement cr~~ par un haut niveau de protection contre des pays tiers. Ainsi, l'approche propos~e devrait-elle r~sulter dans une intensification du commerce r~giona1 d~coulant en grande partie du remplacement de la production nationale par des importations r~gionales plus efficaces. Au fur et a mesure que l'utilisation des capacit~s des entreprises les plus efficaces augmentera, les coOts unitaires s'abaisseront au-dessous du niveau qui pourrait ~tre atteint A la seule ~chelle nationale. 7.60 LE FINANCEMENT DU COMMERCE REGIONAL. Le d~veloppement des ~changes entre pays africains d~pendra ~galement de l'existence de moyens et d'instruments financiers, c'est-A-dire des r~seaux bancaires mettant A 1a disposition des commer9ants et des entreprises des lettres de cr~dit, des cr~dits A l'exportation et autres services financiers. Un fournisseur africain offrant des prix et une qualit~ concurrentiels n'en serait pas moins d~savantag~ par rapport aux concurrents non africains s'il ne b~n~fici ,:. t pas de modalit~s de financement ad~quates. A ce niveau micro-~r ;Homique, le syst~me bancaire devrait ~tre ~largi et d~velopp~, notamment en am~liorant les conditions d'acc~s du secteur priv~ aux devises fortes et au cr~dit. 11 faudra pour ce1a que les banques commerciales acceptent de couvrir les risques et que les bailleurs de fonds aident les gouvernements A absorber les risques autres que commerciaux. 7.61 C'est au niveau macro~conomique que le financement du commerce r~gional pose les probl~mes les plus ~pineux. Les d~s~quilibres des courants d'~changes entre pays membres sont in~vitables. On a cr~~ des chambres de compensation (la CCAO pour la CEDEAO, la PTACH pour la ZEP et l'ECCASCH pour la CEEAC) pour compenser les soldes entre pays. Les r~glements doivent bien ~tre libell~s en monnaies convertibles parce qu'aucun membre ne peut se permettre d'accumuler des avoirs en monnaies d'autres membres. Toutefois, ~tant donn~ l'insuffisance de leurs recettes - 292 - et devises convertibles, les membres tiennent beaucoup ~ utiliser ces devises fortes pour r~gler des achats aupr~s de fournisseurs non africains et non pour Ie r~glement des comptes avec leurs voisins. Les pouvoirs publics pourraient faciliter Ie financement en permettant au secteur priv~ de d~tenir et de c~der librement des devises africaines aux prix d'~quilibre du march~. A cette fin, les charnbres de compensation pourraient ~tendre aux banques commerciales leurs accords en cours avec les banques centrales. 7.62 LA MOBILITE DE LA MAIN-D'OEUVRE ET DES CAPITAUX. En dernier lieu, il serait souhaitable d'~pauler la lib~ralisation commerciale r~gionale par l'~lirnination des entraves aux mouvements de la main-d'oeuvre et de capitaux qui pourraient venir compenser les d~ficits chroniques des ~changes. La libert~ de mouvement de la main-d'oeuvre et du capital au sein de la r~gion arn~liorerait les perspectives de croissance en cr~ant les conditions - intensification de la concurrence et ~largissement de l'acc~s au march~ - n~cessaires aux fusions, acquisitions, partenariats d'entreprises et autres formes d'int~gration horizontale et verticale. GrAce ~ ces transformations, les entreprises africaines pourraient r~duire encore davantage leur cout unitaire et devenir plus comp~titives sur Ie plan international. 7.63 Certains pays n'ont pas assez de bonnes terres agricoles pour nourrir leur population, tandis que d'autres souffrent d'une p~nurie de main-d'oeuvre. Les perspectives ~conomiques des populations des pays du Sahel, par exemple, sont lirnit~es. Ceux-ci ne peuvent faire face ~ la croissance d~mographique qui est la leur que si on les laisse migrer vers les pays du littoral dot~s d'un meilleur potentiel ~conomique (Encadr~ 7.7). De m~me, il faudra, dans les trente ann~es qui viennent, att~nuer la tr~s forte pression d~mographique qui pr~vaut aujourd'hui autour des Grands Lacs en organisant un d~placement de populations vers d'autres r~gions. 7.64 Depuis quelques ann~es, on assiste en Afrique subsaharienne ~ un net renforcement des migrations de travailleurs qualifi~s, qui ne trouvent pas d'emploi dans leur pays d'origine. C'est ainsi que des cadres ghan~ens travaillent notamment en COte d'Ivoire, au Gabon, au Kenya et au Nig~ria. II arrive aussi ~ des ouvriers professionnels et ~ des ouvriers sp~cialis~s de franchir la fronti~re sans papiers en r~gle. Les travailleurs migrants ont nagu~re jou~ un rOle en ce qui concerne l'innovation et la cr~ation d'entreprises, surtout dans Ie secteur non structur~. 7.65 Un syst~me de change r~aliste est indispensable au commerce intra-africain. Les ~changes entre membres de la CEAO (dont la monnaie est Ie franc CFA convertible) repr~sentent actuellement 10 % de leur commerce total, alors qu'ils n'atteignent m~me pas 1 % du commerce total pour les autres membres de la CEDEAO; il est vrai que dans leur cas, la convertibilit~ a ~t~ suspendue du fait des dettes accurnul~es et des retards de r~glement. 7.66 Mais la convertibilit~ des monnaies n'est pas tout. Les ~changes entre membres de ltUEAC - Ie seul autre groupement dtAfrique ~ avoir une monnaie convertible - ne repr~sentent que 2 % du commerce total, ce qui est l'un des plus rnauvais r~sultats du continent. Ces deux - 293 - groupements sont aussi les seuls en Afrique l jouir d'une relative libert~ de circulation interne des capitaux. La convertibilit~ mon~taire et la mobilit~ des capitaux sont des conditions n~cessaires mais non suffisantes de l'expansion durable des ~changes r~gionaux. 7.67 LES AUTRES OBSTACLES AUX ECHANGES. Une fois qu'on aura mis en place une meilleure structure r~gionale d'incitation, il faudra simplifier ou ~liminer maints obstacles qui tiennent l certaines r~glementations et proc~dures applicables aux ~changes transfrontieres. 11 s'agit notamment des contingents et des accords de licence. 11 convient ~galement d'appliquer les proc~dures simplifi~es d'ores et d~jl arr~t~es, comme Ie reglement douanier relatif au transit routier de la ZEP. Les contrOles aux frontieres et les proc~dures de transit trop complexes entrainent d'importants retards, qui r~duisent Ie commerce intra-africain et ~levent Ie cont de l'activit~ ~conomique en Afrique. 7.68 Le passage l~gal de marchandises d'un pays africain l un autre ne n~cessite pas moins, dans certains cas, de 70 formalit~s administratives. Au ZaIre, il y en a 39 pour les exportations et 30 pour les importations, parmi lesquelles figurent les signatures, validations, licences et autorisations accord~es par d'innombrables administrateurs qui tous pr~levent une "taxe". Un r~gime g~n~ral et ouvert de licences d'importation pour les produits que souhaitent vendre les partenaires r~gionaux doit ~tre mis sur pied pour accroitre les ~changes et renforcer l'int~gration. 7.69 La p~nurie d'informations commerciales est un autre obstacle l l'expansion des ~changes. 11 semble par exemple que Ie Cap-Vert ignore que Ie Cameroun pourrait remplacer Ie Portugal comme fournisseur de disques en aluminium qui entrent dans la fabrication des ustensiles de cuisine. Les industriels priv~s devraient contribuer l la diffusion des informations pertinentes. Les producteurs africains - tant agricoles qu'industriels - doivent adopter une attitude plus active et plus offensive en matiere de commercialisation et de concurrence. lIs y seront encourag~s par la mise en place d'un systeme d'incitations qui r~compensent ceux qui s'engagent dans cette voie. 7.70 11 est tout aussi indispensable d'adopter des normes et des sp~cifications techniques uniformes pour tous les produits fabriqu~s. Le systeme m~trique n'est pas d'emploi universel en Afrique. Ceci mis a part, bien des clients sont convaincus que les sp~cifications techniques sont plus faciles a v~rifier et Ie contrOle de la qualit~ et la fiabilit~ de la livraison meilleurs dans Ie cas des fournisseurs non africains. On peut citer l'exemple du fabricant nig~rian de bicyclettes que les clients des pays africains voisins acceptent plus facilement lorsqu'elles ont ~t~ pr~alablement envoy~es au Royaume-Uni en vue de leur r~exp~dition, que si elles ont ~t~ directement export~es. M~canisme de p~r~quation 7.71 Sans r~partition clairement ~tablie des b~n~fices entre les pays, il y a tout lieu de s'attendre a ce que l'int~gration r~gionale se heurte a des obstacles politiques insurmontables. Le cas des march~s communs r~ussis - la Communaut~ ~conomique europ~enne, par exemple - donne - 294 - A penser que la cr~ation de vastes entit~s ~conomiques accentue la sp~cialisation et am~liore la distribution du revenu par habitant. L'int~gration africaine devrait ~galement am~liorer l'affectation des ressources, permettant ainsi d'accroltre les revenus en valeur absolue. 7.72 Cependant il se peut que, du fait de l'int~gration, les revenus relatifs de certains partenaires augmentent plus rapidement que d'autres, A mesure qu'apparaissent de nouveaux pOles d'industrialisation. Aussi faut-il mettre en place des m~canismes de p~r~quation, qui peuvent prendre la forme d'un transfert direct au budget des pays dont l'~conomie est mains florissante, comme dans Ie cas de l'Union douani~re d'Afrique australe. Tout m~canisme de p~r~quation non automatique pr~sente un risque de d~faillance, car les gouvernements participants peuvent suspendre les paiements en cas de crise budg~taire. II faut ~galement veiller A ce que les agents ~conomiques priv~s aient, comme les Etats, directement acc~s A ces m~canismes et que ceux-ci soient con9us de fa90n A r~duire les couts li~s aux imperfections du march~ et de l'appareil bureaucratique. 7.73 La p~nurie de devises ~trang~res et les contraintes budg~taires ayant peu de chances d'~tre att~nu~es dans un avenir proche, la tentation de ne pas respecter les engagements r~gionaux pourra contribuer A compromettre les efforts d'int~gration. C'est lA que les bailleurs de fonds peuvent intervenir. Leur aide rev~t une importance pour les membres relativement pauvres d'un groupement r~gional, surtout dans les premiers temps. Promouvoir une identit~ panafricaine 7.74 Au-delA des politiques, des infrastructures et des institutions, i l faudra bien r~pondre A une exigence fondamentale en mobilisant les organes d'information, les ~tablissements d'enseignement et les organisations culturelles pour populariser la coop~ration intra-africaine en tant que facteur de progr~s pour toutes les soci~t~s africaines. On pourra.it A cette fin mettre sur pied un programme complet de s~minaires, d'ateliers et de voyages d'~tudes A l'intention de journalistes, cr~er un centre d'information r~gional qui produirait et distribuerait des articles de fond, des brochures, des programmes vid~o et des films, et inscrire dans les programmes d'enseignement, notamment au niveau de l'enseignement sup~rieur et des hautes ~tudes universitaires, des cours sur l'histoire, la civilisation et l'~conomie africaines. En outre, l'assouplissement des restrictions A la libert~ de circulation et aux conditions de s~jour pourraient favoriser les prises de contact au niveau des individus sur Ie continent. 7.75 Les populations ne pour rant etre durablement gagn~es A l'id~e de coop~ration r~gionale que si l'on cr~e dans chaque pays d'Afrique des groupes d'enseignants, d'intellectuels et de responsables locaux qui soient eux-memes acquis A cette id~e et qui soient capables de d~finir les mesures A prendre. En derni~re analyse, l'int~gration r~gionale n'est pas quelque chose qui peut venir d'en haut; il lui faut d'abord pousser des racines au sein de la population. Et pour cela, il est essentiel d'am~liorer Ie niveau d'information de chaque pays sur les autres et de multiplier les ~changes et les prises de contact. - 295 - 7.76 Les ~coliers pourraient en apprendre davantage sur leurs voisins africains. On pourrait aussi leur enseigner que l'auto-responsabilit~ ne signifie pas introversion et qu'il ne s'agit pas de compter sur ses seules ressources. II s'agit de se donner les moyens de coop~rer, sur la base de la concurrence, avec ses voisins et avec les autres r~gions du monde. Utiliser au mieux les points forts du pays en contrebalan~ant ses faiblesses par la coop~ration avec les voisins. Admettre qU'aucun pays, surtout parmi les plus pauvres de l'Afrique subsaharienne. ne peut se passer des autres. - 296 - Encadre 7.1 La lutte c~ntre l'onchocercose Mis sur pied en 1974, Ie Programme de lutte c~ntre l'onchocercose est un exemple de ce qui peut @tre entrepris au titre de la cooperation regionale pour resoudre un probleme commun A plusieurs pays. L'onchocercose est une maladie parasitaire qui entraine la debilite et des lesions oculaires qui vont jusqu'A la cecite. Environ 30 millions de personnes vivent dans des zones d'Afrique de l'Ouest OU la maladie a ete (ou est encore) endemique. Elle est repandue dans les zones de savane et a depeuple des vallees assez fertiles. Elle est due A un ver parasite filiforme. La femelle adulte s'enclave dans les nodosites sous-cutanees de l'homme et produit des millions d'embryons en 10 ou 15 ans. La maladie est transmise par la piqQre d'une simulie femelle. Le programme de lutte c~ntre les simulies vise A detruire les gItes larvaires en repandant des insecticides dans les rivieres A partir de petits avions ou d'helicopteres. Un groupe d'ecologistes controle en permanence l'impact environnemental des insecticides en collaboration avec les pays beneficiaires du programme. Parallelement A la lutte antivectorielle, celui-ci a collabore avec les laboratoires pharmaceutiques en vue de la mise au point d'un medicament, l'ivennectine. Des essais sur Ie terrain realises sur une grande echelle ont pennis d'etablir l'innocuite de l'ivermectine et son efficacite en ce qui concerne la reduction de la morbidite. Elle est en voie de completer l'arsenal des moyens de lutte antivectorielle. Le programme a necessite un dispositif institutionnel exceptionnel : onze gouvernements d'Afrique de l'Ouest, des organisateurs, des bailleurs de fonds et des specialistes internationaux. Les quatre organisateurs (PNUD, FAD, Banque mondiale et OMS) etablissent les principes directeurs et supervisent les operations; l'OMS est l'agent d'execution du programme. La Banque mondiale mobilise les contributions, gere Ie fonds special du programme et est Ie principal responsable du developpement socio-economique complementaire. Le programme emploie plus de 600 personnes, dont 96 % d'Africains. Les objectifs assignes sont precis, mais les modalites d'execution sont tres souples. La fidelite des bailleurs de fonds procure des emplois de duree relativement longue, ce qui permet de s'assurer les services d'un personnel tres motive. Actuellement, Ie programme est finance par 20 pays donateurs et organisations internationales, les pays beneficiaires prenant A charge 1 % environ des depenses annuelles. Le programme ne revient qu'A 1 dollar par personne protegee et par an. On a pu enrayer la transmission de la maladie dans 95 % de] 'air' initiale d'execution du programme, qui representait 764.000 km 2 et regroupait pres de 20 millions d'habitants. Le parasite est en voie de disparition dans la population humaine. Certains malades voient leur infection se resorber. Plus de 4 millions d'enfants nes recemment grandissent sans plus courir Ie risque d'@tre infectes. Les vallees des rivieres ou la maladie est eradiquee sont en voie de repeuplement. On cree de nouveaux villages et l'on accrolt la production agricole. Dans Ie cadre d'un rapport de 1986 de l'Agency for International Development des Etats-Unis, on a calcule que les 150.000 km 2 de terres ainsi rendues A la culture pourraient nourrir 10 millions de personnes par an. - 297 - Le succ~s du programme est dO aux facteurs suivants : les pays participants ont d~cid~ de mettre en commun et de r~partir les ressources pour appuyer des op~rations centralis~es et techniquement complexes; une strat~gie a long terme raisonnable et dont l'objectif ~tait clairement fix~ a permis de mener le programme a bonne fin; conquis par les perspectives ouvertes par le programme en mati~re de sant~ et de retomb~es ~conomiques, les bailleurs de fonds ont engag~ des ressources suffisantes; l'engagement des pays donateurs et des pays b~n~ficiaires a ~t~ renforc~ par des r~sultats concrets, sur les plans sanitaire et socio-~conomique, et cela d~s le d~but des op~rations; les r~sultats et l'efficacit~ du programme sont le fruit d'une bonne gestion et de l'intervention des organisateurs et des comit~s ind~pendants d'experts. D'ici la fin des ann~es 90, le r~servoir de parasites devrait avoir disparu chez presque tous les habitants des 11 pays vis~s par le programme. Par la suite, le renforcement de leur dispositif sanitaire devrait permettre aux pays b~n~ficiaires de d~pister toute r~apparition de la c~cit~ des rivi~res et de l'~liminer A l'aide du nouveau m~dicament : l'ivermectine. - 298 - Encadr~ 7.2 Rationaliser les institutions regionales II existe plus de 200 organisations r~gionales de coop~ration et d'int~gration en Afrique subsaharienne. Cette prolif~ration et ce chevauchement de responsabilit~s entralnent, au niveau r~gional, des desaccords li~s a la delimitation des champs d'activite et de dispersions d'all~geance. lIs imposent a chaque gouvernement une lourde charge financiere et administrative. M~me des pays comme la COte d'Ivoire et Ie Nig~ria ~prouvent de plus en plus de difficult~s a faire face a leurs obligations financieres. Les gouvernements accumulent des arri~res de plus en plus importants de contributions au budget et aux comptes sp~ciaux de la majorit~ de ces institutions. Celles-ci ont donc du mal a ex~cuter les tAches qui leur sont confi~es, a plus forte raison planifier leurs activit~s futures. Invariablement, Ie budget des institutions regionales ne leur permet pas d'executer les tAches fix~es par les pouvoirs publics. Aussi, m~me si ceux-ci r~glaient leurs arrier~s, Ie niveau de leur contribution ne permetrait pas aux cadres de ces institutions d'ex~cuter leur mandat. Cette penurie de fonds les emp~che de faire un meilleur usage des ressources mises a leur disposition. Les gouvernements ont d'autres charges administratives et financieres. La plupart des institutions doivent, en vertu de leur acte constitutif, organiser chaque ann~e plusieurs conf~rences de haut niveau. Quelle que soit l'annee consideree, elles alourdissent un programme de travail deja charge. Les conf~rences africaines et les autres rencontres au niveau regional, voire international coOtent aux gouvernements de l'argent dont les benefices qu'elles procurent ne justifient pas l'emploi. Par ailleurs, la proliferation des institutions cr~e un probleme de coordination insurmontable. Les principales organisations regionales et techniques africaines sont structurees comme suit : un organe decisionnel supr~me, regroupant les chefs d'Etat; un organe de coordination des politiques, compos~ de ministres, et un organe d'execution elu par les chefs d'Etat. Le plus souvent, les chefs d'Etat se r~unissent une fois tous les deux ans et les ministres tous les ans. Cette structure administrative est lourde et inoperante. Devant la gravite du probleme, Ie Plan d'action de Lagos, puis des d~clarations de l'OUA et de la CEA ont tire la sonnette d'alarme. La CEA et l'OUA ont present~ des propositions de rationalisation que les gouvernements des pays africains ont approuv~es, mais elles tardent a @tre suivies d'effet. On n'a pas dispers~ les organisations moribondes et on n'a pas fusionn~ des institutions apr~occupations voisines. D'un autre cOt~, 11 faut cr~er des institutions regionales ou renforcer celles qui existent d~ja dans certains domaines essentiels tels que la recherche agricole, la planification des bassins fluviaux, la formation th~orique et pratique sup~rieures (y compris des centres d'~tudes avanc~es), les transports (aerien et maritime) et la lutte c~ntre les nuisibles. - 299 - Encadre 7.3 Ethiopian Airlines Entreprise publique creee en 1946, Ethiopian Airlines s'est taille une reputation mondiale d'efficacite technique et gestionnelle, de flair commrcial et de viabilite financiere qui a survecu aux vicissitudes politiques et economiques que Ie pays a traversees avant et apres la revolution de 1973. La compagnie aerienne a constitue un reseau tres rentable de routes internationales et interieures. C'est la seule entreprise de transport aerien A avoir cree un veritable carrefour de communication regionale operant des liaisons aeriennes dans toute l'Afrique subsaharienne. Son reseau africain, notamment les routes reliant l'Afrique de l'Est et l'Afrique de l'Ouest, represente actuellement 25 % de ses recettes. Son succes tient au depart a l'accord d'exploitation conclu avec TWA dans les annees 50. La qualite technique de la flotte a fait l'objet de revisions periodiques et on a mis en place les moyens techniques permettant d'assurer l'entretien de la flotte et la formation des membres d'equipage, des mecaniciens, du personnel navigant de cabine et des responsables des services de commercialisation et des services financiers. La compagnie est aujourd'hui en mesure de mettre ses services a la disposition d'autres compagnies aeriennes d'Afrique et du Moyen-Orient, dont beaucoup emploient des equipages et des techniciens ethiopiens pour une duree determinee. Si l'on excepte une courte periode A la fin des annees 70 , les considerations politiques n'ont pas empiete sur les criteres de selection des cadres superieurs de la compagnie. Le conseil d'administration est largement ouvert aux membres du Cabinet, mais ceux-ci ne se sont jamais immisces dans la gestion quotidienne. La mise au point des routes, la politique des prix, le recrutement et le licenciement ont toujours ete du ressort de la direction executive. La politique n'a fait une incursion qu'au niveau des remunerations, en cherchant A les aligner sur celles qui etaient en vigueur dans les autres secteurs de l'economie nationale. Au-delA des aspects techniques, le succes de la direction est dft pour l'essentiel A sa capacite d'adopter et de conserver une approche purement commerciale, qui lui a permis d'accorder la priorite A la viabilite financiere des lignes, qu'elles soient anciennes ou nouvelles. La direction applique une stricte discipline financiere, dans le cadre de laquelle les pouvoirs publics doivent acquitter leur dft sans delai lorsque des fonctionnaires utilisent les vols reguliers ou lorsqu'un avion est requisitionne par l'Etat. Ethiopian Airlines occupe une position competitive sur toutes les routes qu'elle exploite. Lorsque les pouvoirs publics ont envisage de proteger les routes nationales contre la concurrence etrangere, la direction a preconise et obtenu une politique d'exploitation ouverte. Celle-ci, a-t-elle fait valoir, etait indispensable A la compagnie pour rester competitive sur les marches europeens, sans compter que "le cocon dit protecteur risquait fort bien de devenir un carcan". La compagnie a ainsi pu realiser un benefice net presque chaque annee (1979 est une exception) et obtenir sans difficulte des pr~teurs internationaux qu'ils financent l'acquisition de nouveaux appareils. Elle ne re~oit aucune - 300 - subvention de l'Etat, mis a part une exoneration fiscale degressive. Son independance financi~re, telle qu'elle ressort de son compte de produits et de son compte de capital, donne une confortable marge de manoeuvre a la direction et n'incite gu~re les pouvoirs publics a empieter sur ses prerogatives. Le produit final est un service a bas prix de revient et efficace qui est un element de l'integration nationale et regionale et qui procure des devises grAce a l'exploitation des vols internationaux. - 301 - Encadr~ 7.4 Un exemple de cooperation regionale La recherche en entomologie Le Centre international de physiologie et d'~cologie entomologiques (ICIPE), au Kenya, est A la fois un centre africain d'~tudes avanc~es et un exemple de r~ussite dans la constitution d'institutions r~gionales africaines. Sa cr~ation a r~pondu A la conviction selon laquelle la recherche fondamentale est indispensable pour que les Africains puissent ~tre maltres de leur destin. Le recours au transfert de techniques occidentales ne peut A lui seul r~soudre les graves problemes que posent les insectes pour la sant~ des populations et des r~coltes des zones tropicales. Cr~~ en 1979 dans un garage de Nairobi, l'ICIPE a d~m~nag~ A Duduville (ou il a son siege) et gere une antenne pres du Lac Victoria. Son budget d'exploitation s'~leve actuellement A 10 millions de dollars. II emploie 50 chercheurs de haut niveau et 63 charg~s de recherche africains (~tudes universitaires du troisieme cycle et titulaires d'un doctorat) repr~sentant plusieurs disciplines, telles que l'~cologie, la biochimie et la toxicologie. L'ICIPE a obtenu un appui important des milieux scientifiques et un concours financier d'origines multiples, et notamment de l'OPEP et du PNUD. En 1981, il a travers~ une mauvaise passe financiere pour avoir trop n~glig~ les applications pratiques de ses activit~s de recherche. II a adopt~ depuis une approche plus r~aliste et privil~gie A pr~sent la recherche appliqu~e par rapport A la recherche fondamentale, et des directeurs de programme A demeure ont remplac~ les directeurs de recherche venus de l'~tranger. L'ICIPE est devenu un centre de recherche et de formation de r~putation internationale ou travaillent des chercheurs africains tres comp~tents. II doit son succes et sa vitalit~ au sens des responsabilit~s dont font preuve ceux qui en ont la charge et A l'enthousiasme et au talent de ses chercheurs. Le programme de recherche du Centre porte sur les nuisibles des cultures, les tiques du b~tail, les glossines et autres insectes vecteurs de maladie chez l'homme. En ce qui concerne les nuisibles, Ie Centre essaie de tirer des enseignements des succes obtenus par les Chinois en matiere de lutte biologique contre les insectes, en utilisant des virus et des microbes porteurs de bact~ries toxiques pour d~truire les insectes t~r~brants, comme ce champignon qui d~vore les larves d'insectes. Pour passer du laboratoire au travail sur Ie terrain, l'ICIPE fait souvent appel A la coop~ration de ses voisins en proc~dant A des essais qui englobent leurs terres. II a mis au point une vari~t~ de mals A maturation pr~coce, qui donne avant la fin de la saison des pluies et qui r~siste aux insectes. Elle a bon goQt, mais sa couleur n'a pas la pr~f~rence de la population, probleme que Ie Centre s'emploie A r~soudre. L'ICIPE travaille A la mise au point d'un vaccin c~ntre les tiques et lutte contre les glossines qui transmettent des parasites du sang responsables de la trypansomiase africaine (maladie du sommeil) chez l'homme et les animaux. II a adapt~ une technique ~labor~e par des chercheurs zimbabw~ens et britanniques aux besoins d'une campagne au niveau des villages. De jeunes Masals (hommes) ont pu, en fabriquant des pieges - 302 - dont l'odeur attire 1es insectes, reduire de 50 % 1a population de glossines sur une superficie de 110 km2 dans 1es montagnes Nguruman. Ces pi~ges sont un exemp1e de recherches sur 1es pheromones, c'est-l-dire 1es codes chimiques de 1a communication entre 1es insectes. L'ICIPE s'efforce d'identifier 1e melange de pheromones que l'insecte terebrant feme11e utilise pour attirer 1e mAle et vue de l'accoup1ement. Ce melange pourrait servir 1 rendre impossible toute rencontre entre 1es mAles et 1es feme11es. Le Centre poursuit ega1ement des recherches dans 1e domaine des vecteurs de maladies parasitaires comme 1es leishmanioses, caracteristiques des zones semi-arides. Des mi11iers de personnes sont atteintes d'une forme de 1eishmaniose qui rappe11e 1a l~pre ou d'une autre qui affecte 1es visc~res. - 303 - Encadre 7.5 Mise en place de reseaux regionaux pour elever le viveau de qualification professionnelle Deux fois par an, 35 a 50 economistes africains - universitaires, fonctionnaires, chercheurs - venant d'une bonne quinzaine de pays se rencontrent pour examiner et evaluer les resultats de leurs recherches et de celles de leurs coll~gues. Cette reunion du Consortium africain de recherche economique illustre a merveille Ie succ~s d'un programme d'infrastructure regionale. Cree en 1988, Ie Consortium fournit des credits et un appui technique aux reseaux de chercheurs en poursuivant un double objectif. 11 s'agit, d'une part, d'encourager la recherche macroeconomique en Afrique et de renforcer les centres de recherche nationaux en assurant Ie perfectionnement de leur personnel et, d'autre part, de faire mieux connaltre aux dirigeants et hommes politiques la recherche economique appliquee et l'utilite qu'elle peut avoir pour la prise de decision. Le Consortium beneficie actuellement de plusieurs concours financiers et il est administre par la Rockefeller Foundation. II est installe A Nairobi et son budget pour l'exercice annuel en cours - 1,35 millions de dollars - sert A financer les travaux d'une vingtaine d'equipes composees chacune de quatre ou cinq chercheurs. Au debut des annees 80, des economistes africains de formation recente ont ete appeles A participer A la revision radicale des politiques economiques nationales entreprises par les pouvoirs publics. A cette epoque, la penurie d'economistes confirmes et la faiblesse des centres de recherche africains faisaient que l'analyse des politiques economiques etait Ie plus souvent confiee A des consultants etrangers ou au personnel des institutions multilaterales de financement du developpement, avec un concours local tr~s reduit, et, de ce fait, n'avait pratiquement pas de repercussions locales et manquait de continuite. Le Consortium est issu d'un projet anterieur lance en 1984 par le Centre canadien de recherche et pour le developpement international, visant A apporter un appui financier pour surmonter les obstacles qui empechaient de mener une recherche de qualite dans les centres nationaux d'Afrique de l'Est et d'Afrique australe A une recherche de qualite : manque de materiel, de locaux et de biblioth~ques, blocages d'ordre bureaucratique qui retardaient Ie transfert aux equipes de recherche des subventions en devises etrang~res mises A leur disposition par les bureaux centraux, et coupure intellectuelle des chercheurs A la fois vis-A-vis de leurs coll~gues des universites de la region et vis-A-vis des dirigeants politiques. Le Comite consultatif du Consortium, compose d'eminents chercheurs et de hauts fonctionnaires africains, fixe les th~mes de recherche. Les equipes natinales se sont jusqu'A present consacrees surtout A l'etude des questions relatives A la balance des paiements et A la gestion des finances publiques. Le Comite consultatif envisge d'y ajouter, A moyen terme, la gestion de la dette exterieure et l'ajustement, ainsi que Ie regime fiscal. Le programme commun de recherche permet aux equipes de comparer et d'analyser les resultats. C'est ainsi que des chercheurs tanzaniens ont pu apporter une contribution directe aux debats publics recents sur .I - 304 - l'ajustement structurel dans leur pays. Le Consortium permet aux autres membres d'en tirer parei11ement profit et de d~terminer dans que11e mesure l'exp~rience ainsi partag~e est transportable dans d'autres pays africains. L'existence des r~seaux. dont les membres se d~p1acent A l'~tranger, parfois pour y travai11er, est aussi un moyen d'~changer des id~es et des donn~es d'exp~rience au niveau international. De leur cOt~. des chercheurs venus d'Europe, d'Am~rique du Nord ou d'autres r~gions du monde participent A des r~unions, sont associ~s A des projets de recherche ou se font d~tacher aupres d'instituts de recherche africains. Les r~unions nationa1es destin~es A popu1ariser et discuter 1es r~su1tats de la recherche et leurs r~percussions sur l'~laboration de 1a politique ~conomique permettent ~ga1ement d'~tab1ir des contacts entre 1es hauts fonctionnaires techniciens et les milieux politiques pour que ceux-ci soient mieux A m@me de juger des cons~quences ~conomiques des d~cisions po1itiques. Par ailleurs. Ie Consortium finance l'Eastern Africa Economic Review. qui publie les r~sultats de 1a recherche r~a1is~e par les membres du r~seau. Le succes du Con~rtium s'explique essentie1lement par 1e fait que 1a souplesse et la p1uridisciplinarit~ de l'approche qu'i1 a retenue lui permettent d'adapter ses programmes aux besoins de chaque groupe de chercheurs. En leur offrant la possibilit~ de demeurer en contact avec leurs col1egues d'Afrique et d'ail1eurs, il aide en permanence les chercheurs africains ayant re9u une formation solide A se tenir au courant des derniers progres de leur discipline. En abaissant les barrieres traditionne11es qui s~parent les pouvoirs publics et universit~s. il permet aux d~cideurs po1itiques d'appr~cier 1a valeur des ressources acad~miques locales. II constitue un modele dont on pourrait utilement s'inspirer dans d' autre's domaines. - 305 - Encadre 7.6 L'institut de gestion pour l'Afrique de l'est et l'Afrique australe (ESAHI) En 1974, les Etats membres de la Communaute de l'Afrique de l'Est - Kenya, Tanzanie et Ouganda - ont fonde A Arusha (Tanzanie) l'Institut de gestion de la Communaute de l'Afrique de l'Est, qui etait un centre de perfectionnement des cadres repondant aux besoins des organismes publics en matiere de formation, de services consultatifs et de services de recherche. A la suite de l'eclatement de la Communaute, en 1977, d'autres pays ont rejoint les trois membres fondateurs : Angol~, Botswana, Comores, Djibouti, Ethiopie, Lesotho, Madagascar, Malawi, Maurice, Mozambique, Namibie, Seychelles, Somalie, Zambie et Zimbabwe. En 1980, l'Institut a ete rebaptise Institut de gestion pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe (ESAHI). L'Institut se propose d'ameliorer l'efficacite de la gestion des secteurs public et prive des pays de la region. 11 offre chaque annee A Arusha une cinquantaine de programmes de courte duree de perfectionnement des cadres en cours d'emploi et environ 25 programmes dans d'autres pays de la sous-region, auxquels participent plus de 1.500 stagiaires. L'ESAHI collabore A l'elaboration et A la presentation des programmes des instituts de gestion et des entreprises, et elabore souvent des programmes specialement con9us pour les besoins de certaines entreprises publiques et privees. L'appui du PNUD et d'autres bail leurs de fonds a permis A l'ESAHI de lancer un programme visant A accroitre Ie rOle de femmes dans Ie developpement unique en son genre en Afrique. La formation dispensee comporte un tronc commun et des programmes sectoriels tels que la planification et la gestion des projets, les finances publiques, la politique et la gestion des transports, les echanges commerciaux et Ie secteur bancaire, et les systemes de traitement de 1 'information. L'institut organise des stages de courte duree en collaboration avec les organismes qui font appel A ses services, comme Air Tanzania, Kenya Railways, les banques de commerce du Kenya et de l'Ouganda et Ie Credit agricoles de Zambie. L'ESAHI abrite par ail leurs Ie siege de l'Association des instituts de perfectionnement des cadres de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (AHTIESA), et forme les instructeurs nationaux qui peuvent ensuite organiser des stages similaires dans leur propre institut - comme Ie stage de perfectionnement des cadres du secteur du bAtiment et des travaux publics organise dans le cadre d'un projet finance par l'OIT et de l'atelier sur les methodes de cas organise en collaboration avec l'Institut de developpement economique (IDE). L'ESAHI a fourni une assistance technique au Conseil des services de gestion (Management Service Board) de la Zambie et A des instituts nationaux, et a accueilli des representants de centres nationaux d'Ouganda et du Lesotho dans Ie cadre d'affectations de courte duree. L'ESAHI tire environ 90 % de se,s recettes des frais de stage et re90it chaque annee des subventions des pays membres dont Ie montant represente 10 % de son budget. Une trentaine d'organismes internationaux - Ie PNUD etant le donateur principal - ont contribue A la realisation de ses programmes en lui versant des subventions couvrant surtout la retribution 1- - 306 - des participants, le d~tachement de personnel pour de courtes p~riodes et le versement des r~mun~rations. D'autres bailleurs de fonds aident actuellement l'ESAMI A parvenir A l'autonomie financi~re et A r~aliser son objectif consistant A cr~er un Centre de gestion des transports africains quasi autonome, projet qui est d'ores et d~jA appuy~ par les donateurs et la r~gion. L'ESAMI a un personnel permanent de 35 sp~cialistes africains hautement qualifi~s choisis dans les pays membres apr~s s~lection et, en cas de besoin, engage des consultants locaux pour diriger certains stages sp~ciaux. La direction ex~cutive et la gestion financi~re rel~vent d'un Directeur g~n~ral et d'une ~quipe de gestion. Le Directeur g~n~ral fait rapport au Conseil d'administration compos~ de hautes personnalit~s des Etats membres. L'ESAMI constitue pour l'Afrique une option de substitution A la formation de cadres A l'~tranger d'autant plus int~ressante que cette formation revient trois fois plus cher. Et la r~tribution de ses services de consultant est tr~s inf~rieure aux honoraires vers~s aux consultants ~trangers. L'appui de la communaut~ internationale devrait permettre A l'Institut de parvenir A l'autonomie financi~re en 1990. - 307 - CHAPITRE 8 Un financement soutenable du d~veloppement Introduction 8.1 La strat~gie future de d~veloppement propos~e dans le pr~sent rapport met l'accent sur les r~formes et sur le renforcement des institu- tions. Ce sont lA des activit~s qui ne requi~rent pas beaucoup de res- sources. Toutefois, elles sont incapables de susciter une r~action au niveau de l'offre sans une coOteuse infrastructure d'appui, qu'elle soit mat~rielle ou sociale. La baisse des d~penses d'infrastructure durant les ann~es 80 a nui aux perspectives de croissance de 1 'Afrique; aussi cette tendance doit-elle @tre invers~e. Le financement n~cessaire A cette fin doit @tre soutenable et, A long terme, il doit @tre en grande partie d'origine int~rieure. N'emp@che que les flux de ressources ext~rieures continueront A jouer un rOle crucial jusqu'au siecle prochain, ne perdant progressivement de l'importance qu'A partir de l'an 2010, et cela sous r~serve que les r~formes et objectifs propos~s dans le pr~sent rapport soient r~alis~s. 8.2 L'affectation d'un montant ad~quat de d~penses publiques au fonc- tionnement et A la maintenance des infrastructures sociales et mat~rielles existantes est tout aussi importante, sinon davant age que la mise en place d'investissements nouveaux. Lorsqu'on ~tablit des objectifs en matiere d'~pargne priv~e et publique, il faut tenir compte des d~penses r~currentes essentielles. D~penses de d~veloppement Investissements meilleurs et plus nombreux 8.3 D'apres ce qu'on a pu observer depuis plus de vingt ans, il semble bien que les pays en d~veloppement qui r~ussissent le mieux ont connu des taux d'investissement ~lev~s. Pris en groupe, les pays ou' le revenu par habitant est en hausse ont eu des taux d'investissement d'environ 20 A 25% de leur revenu. Dans les pays asiatiques d'Extr@me-Orient, ou' la croissance a ~t~ la plus rap ide , ce taux a ~t~ d'environ 25 A 30%. La Chine a investi quelque 33% de son PIB pour r~aliser un taux de croissance de plus de 9% entre 1980 et 1986. Cependant, malgr~ les taux moyens d'investissement ~lev~s en Maur~tanie (30%) et au Togo (24%) les taux moyens de croissance y ont ~t~ tres faibles (respectivement 1,8 et - 0,3% en 1980-86). 11 semble donc qu'un taux minimum critique d'investissement constitue une condition n~cessaire certes, mais non suffisante, de d~velop pement soutenu. 8.4 Le taux de rendement des investissements de la plupart des pays d'Afrique subsaharienne est faible comparativement aux pays d'autres r~gions et a m@me fl~chi au fil des ann~es (voir Chapitre 1). Un des objectifs de la strat~gie future en matiere de d~veloppement est donc d'augmenter l'efficacit~ des investissements, tAche qui prendra beaucoup de temps et d'efforts. M~me si le taux de rendement des lnvestissements peut Atre augment~ de moiti~ (d'environ 13% durant les ann~es 70 A 20% d'lci - 308 - lOan 2000) Ie taux d'investissement (public et priv~) doit s'~tablir A quelque 25% du PIB si lOon veut atteindre un taux de croissance annuelle de 5%. R~orientation de l'investissement 8.5 La strat~gie future en mati~re de d~veloppement met l'accent sur la mise en valeur des ressources humaines et l'am~lioration de l'infra- structure mat~rielle, afin de fournir aux producteurs du secteur priv~ les conditions de succ~s n~cessaires. La composition des investissements par secteur doit traduire ces priorit~s. 8.6 A titre d'illustration, d~taillons comme suit, par volume et com- position, un investissement projet~ (de 25% du PIB): * Agriculture (infrastructure rurale comprise). Comme on lOa not~ au Chapitre 4, l'investissement public doit essentiellement @tre li~ A l'adop- tion de meilleures techniques. Les possibilit~s de r~alisation de projets coOteux, comme de vastes r~seaux d'irrigation, sont limit~es. La croissance devra plutOt provenir de l'am~lioration des vari~t~s, de la fourniture plus fiable d'intrants (engrais, eau, pesticides, mat~riel agricole) et d'une meilleure gestion du cheptel. Les investissements susceptibles d'@tre les plus rentables concerneront pour l'essentiel la recherche et la vulgarisation, les projets d'irrigation A moyenne ou petite ~chE!lle, la sylviculture, la conservation des sols et la mise en valeur des terres, l'~levage et la pisciculture, ainsi qU'une infrastructure rurale A coOt modeste pour la desserte de zones A bon potentiel agricole. Pour l'ensemble du secteur agricole, un investissement de 4% du PIB (infrastructure rurale comprise) serait n~cessaire pour atteindre un taux de croissance de 4%. 1< Industrie manufacturi~re. La strat~gie d~crite au Chapitre 5 souligne que Ie secteur non structur~ (A faible intensit~ de capital) serait la source principale de croissance. Les principales composantes de l'inves- tisBement en ce domaine seraient les suivantes: expansion s~lective des industries cl~s; expansion consid~rable de la fabrication non structur~e; d~vl!loppement de technologies appropri~es; constitution de capacit~s en mat1~re de techniques et de gestion; remise en ~tat et maintenance des ~quipements existants. On estime qu'un investissement total de 3% du PIB peut donner lieu A un taux de croissance de 5% de l'industrie manufacturi~re. ,. Mines et ~nergie. L'ouverture de nouvelles zones A l'exploration et la prospection, ainsi que Ie remplacement d'installation et d'~quipements obsol~tes exigerait des investissements consid~rables. En ce qui concerne l'~nergie, il existe un bon potentiel d'investissement en centrales hydro- ~lectriques et g~othermiques, en gaz naturel, en combustibles solides (charbon et lignite) en p~trole et en techniques A bon rendement ~nerg~tique. Un investissement de 1,5% du PIB devrait permettre une croissance sectorielle de 5%. * Infrastructure (rurale exclue). Un ~l~ment cl~ d'un environnement favorable A la production est une infrastructure bien con~ue. II faudrait effectuer dans ce domaine des investissements ~quivalant A 5,5% du PIB et - 309 - dont les principaux ~l~ments seraient les suivants: l'ex~cution de tous les travaux de maintenance et de r~habilitation trop longtemps diff~r~s en Afrique; la r~novation des installations existantes pour emp~cher qu'elles se d~t~riorent davantage; l'am~lioration des infrastructures A taux de rentabilit~ ~lev~ (telles que les t~l~communications) et nouveaux inves- tissements pour rem~dier aux insuffisances d'une infrastructure dont les secteurs productifs ont un besoin urgent. * Mise en valeur des ressources humaines. Les besoins d'investissement en d~veloppement de ressources humaines seront ~lev~s en raison du pour- centage ~lev~ de la population que repr~sentent les jeunes et de la haute priorit~ accord~e A l'investissement en capital humain. La r~alisation des objectifs de base en mati~re de d~veloppement de ressources humaines exigerait que l'investissement total passe de 4-5% du PIB A 8-10%; une partie consid~rable de cette d~pense serait A caract~re r~current. Les investissements nouveaux ~quivaudraient A quelque 3% du PIB, l'accent ~tant Mis principalement sur l'enseignement primaire, Ie progr~s scientifique et technologique, Ie planning familial, les soins de sant~ primaires, l'adduction d'eau potable et la nutrition. * Autres secteurs. II faudra investir A hauteur de 7% du PIB pour satisfaire les besoins en mati~re de finance, d'assurance et de services aux entreprises, de logement et autres constructions, d'h6tels, restaurants et tourisme, de transports et entreposage, de commerce de gros et de d~tail ainsi que d'autres services. 8.7 Les d~penses publiques doivent ~galement couvrir les conts de fonc- tionnement et Ie remplacement du capital. L'examen des d~penses publiques en Afrique confirme fr~quemment A quel point les conts de fonctionnement et d'entretien sont n~glig~s. Dans un bon nombre de pays, il faudra proc~der A une analyse bien plus approfondie pour pouvoir fixer des normes saines en mati~re de maintenance et de fonctionnement des ~tablissements de services essentiels (tels que les soins de sant~, la distribution d'eau et l'enseignement primaire), et d'entretien des investissements routiers existants, ainsi que pour estimer les conts r~currents qU'entrainerait l'ex~cution de nouveaux investissements. II faudra aussi continuer A attacher une grande importance A la revue syst~matique de tous les investissements publics et de tous les programmes de d~penses, pour juger du caract~re appropri~ de leur taille, de leur composition, du dosage de projets nouveaux et de projets d~jA en cours, du financement du fonctionnement et de l'entretien et de la protection des programmes prioritaires. Tout cela constitue une condition sine qua non d'une gestion saine. Mobilisation des ressources int~rieures 8.8 Le taux d'~pargne global a fl~chi brutalement en Afrique, tombant de quelque 18% en 1972 A approximativement 13% en 1987. Dans bien des pays, les taux r~cents sont plus faibles encore. Cette chute est surtout attribuable A l'~pargne publique qui est non seulement n~gative mais aussi en diminution (voir tableau 8.1). Dans certains pays, des r~formes ont r~ussi A r~duire Ie d~ficit budg~taires, mais il reste encore beaucoup A faire pour augmenter l'~pargne publique. - 310 - Augmentation des recettes publiques 8.9 Vers la fin des ann~es 70, les recettes fiscales se situaient en Afrique aux alentours de 20% du PIB. Le recul des exportations et la baisse de leurs prix au cours des ann~es 80 ont r~duit ce pourcentage dans beaucoup de pays ou' les recettes provenaient en grande partie, directement ou indirectement, des impOts sur Ie commerce ext~rieur. En ce qui concerne les recettes globales, la situation ~tait bonne dans les pays africains A revenu faible ou moyen jusqu'assez r~cemment. Entre 1966 et 1979, ann~e ou' l'effort fiscal a atteint son maximum, les recettes publiques progressaient en moyenne de 20% plus vite que Ie PIB. 8.10 Ce nonobstant, la configuration des impOts et des prix des services publics, de m~me que Ie montant global des recettes, ne r~pondait pas aux besoins sociaux et ~conomiques. Les taxes sur le commerce ext~rieur retar- dent le d~veloppement de l'agriculture et de l'industrie et contrarient en g~n~ral la croissance et le soulagement de la pauvret~. Dans les ann~es 60 et 70, elles repr~sentaient quelque 45% des recettes totales, bien que leur part ait quelque peu fl~chi durant la pr~sente d~cennie. Si l'on compte comme impOt indirect les transferts financiers pr~lev~s sur les exc~dents des offices de commercialisation A l'exportation, les taxes sur le commerce ext~rieur repr~sentent plus de la moiti~ des recettes. Le recours excessif A ces taxes s'explique par le fait qU'elles sont faciles A administrer. 8.11 Les taxes A la consommation sont pr~Urables parce qu'elles n'affec- tent pas la production. A la diff~rence des droits A l'importation, elles ne d~t.ournent pas des capitaux et des res sources en cadres de gestion de l'agriculture, des industries et du commerce nationaux A forte intensit~ de main-d'oeuvre vers des industries capitalistiques ou' les investissements sont lieu rentables. En outre, elles n'affaiblissent pas les incitations A produi.re pour l'exportation. Si ce sont les produits marchands comme tels qui sont impos~s, tous les biens consomm~s dans Ie pays, qu'ils soient d'origine nationale ou import~s, sont tax~s au mame taux. Tous les autres biens sont exon~r~s, y compris les importations de produits interm~diaires, de mati~res premi~res ou de biens de capital. A la diff~rence des taxes sur la production, les taxes sur les produits marchands n'exercent pas un effet "en cascade" sur l'ensemble du processus de production, et elles permettent aux producteurs de faire leur choix parmi les facteurs en fonction de leur coOt relatif pour l'~conomie. 8.12 La mobilisation des ressources et Ie d~veloppement gagneraient A un passage graduel de taxes sur Ie commerce ext~rieur aux taxes sur la consoDooation et Ie revenu. II faudrait accorder moins d'importance aux taxes A l'importation et davantage A des taxes sOigneusement cibl~es sur les vEmtes ou sur des produits d~termin~s, aux recettes tir~es de la con- sommation des services rendus par les ~tablissements d'utilit~ publique et aux droits per~us de fa~on s~lective sur certains services sociaux. Le potentiel de perception d'une rente (et de recouvrement de recettes grAce A l'imposition de cette rente) r~side moins dans le surplus du producteur (imposition des exportations) et davantage dans celui du consommateur tir~ de l'utilisation des services modernes d'utilit~ publique (transports, electI'icit~, eau, t~l~communications). Toutefois, ~tant donn~ l'~tendue du recours aux impOts sur Ie commerce ext~rieur, cette transition doit s'op~rer sur une base s~lective. Elle do it aussi faire l'objet d'une - 311 - programmation et d'un ~talement judicieux. La plupart des pays laissent leur systeme fiscal ~voluer dans cette direction a mesure qu'augmente leur PNB. Tableau 8.1 Afrique subsaharienne: ~pargne int~rieure brute Pourcentage du PIS 1987 Epargne int~rieure brute 17,8 15,3 12,6 Epargne publique a -3,3 -5,9 7,2 Epargne priv~eb 21,1 21,2 19,8 a. Exc~dent ou d~ficit du budget courant b. Ca1cul~e par diff~rence c. Avant la crise p~troli~re d. Apr~s l'effondrement des prix du p~trole 8.13 PRELEVEMENT D'UN DROIT SUR LES SERVICES. II serait possible d'augmenter consid~rablement les recettes publiques en exigeant un paiement ~gal au prix de revient pour l'utilisation des services d'infrastructure: routes et ~coulement des eaux, eau et ~goQts, ~lectricit~ et t~l~communi cations. Dans la majeure partie de 1 'Afrique , les prix des services d'infrastructure sont inf~rieurs a leur coQt ~conomique et ne suffisent mame pas a financer l'entretien de l'infrastructure en question (voir Chapitre 2). Mame une augmentation mod~r~e des rendements financiers ~quivaudrait a quelque 20 a 30% des recettes publiques courantes. Les r~formes de ce genre seraient relativement faciles a administrer, a suivre et a v~rifier et ne comporteraient que des pertes d'efficacit~ n~gligeables. Elles pourraient atre administr~es sans charge additionnelle pour les couches de la population a faible revenu. II serait ~galement possible d'exiger une plus forte participation au coQt des services de sant~ et d'~ducation. 8.14 Dans Ie cadre d'un examen r~cent de projets de la Banque dans diff~rents secteurs, il a ~t~ proc~d~ a une estimation de la diff~rence entre des taux effectifs de rendement et ceux qui seraient atteints si les tarifs ~taient fix~s en fonction du coQt marginal. Pour Ie courant ~lectrique la diff~rence est a peu pr~s d'entre 5 et 10 points de pourcentage. Pour l'eau, Ie rendement financier est g~n~ralement nul ou n~gatif et inf~rieur de quelque 10 points de pourcentage au rendement potentiel d'une tarification au coQt marginal. La COte d'Ivoire fait ~c~ exception. Jusqu'en 1985, 1es tarifs app1iqu~s a l'eau traduisaient ,le coQt marginal en longue p~riode, soit environ 1 dollar E.U. par m~tre cube, si bien que Ie secteur ~tait financi~rement autonome et produisait des - 312 - recettes ~quivalent a 5% des recettes publiques. De cette fa~on, ce service d'utilit~ publique pouvait s'auto-financer et poss~der en permanence un vaste programme d'adduction d'eau. Dans la plupart des pays africains, les frais des services d'infrastructure sont couverts en partie par pr~l~vement sur les recettes g~n~rales. Dans Ie cas des t~l~communications, les prix couvrent fr~quemment tout au plus la moiti~ du coOt marginal et ce montant n'est pas int~gralement recouvr~. S'agissant des routes, les redevance des usagers prennent principalement la forme de taxes sur les v~hicules et leurs carburants ainsi que de droits de licence. Ces pr~l~vements varient fortement d'un pays A l'autre et d~passent souvent les d~penses effectivement consacr~es aux routes, mais sont loin d'atteindre les montants n~cessaires A la maintenance, la r~habilitation et les nouveaux investissements. 8.15 Une tarification des services d'infrastructure A leur coOt total et une participation accrue aux coOts des services de sant~ et d'~ducation permettaient d'accroltre les recettes publiques d'entre 20 et 30%. Abstraction faite des routes, les augmentations des prix ne doivent pas ~tre consid~r~es comme des impOts, mais bien comme des redevances qui refl~tent Ie coOt marginal de la fourniture. Les services d'utilit~ publiques devraient gagner suffisamment pour couvrir leurs d~penses d'entretien et de fonctionnement, r~mun~rer ad~quatement leur capital et avoir assez de res sources pour financer leur expansion. De cette fa~on les services d'infrastructure ne figureraient dans les comptes publics au volet du debit, mais ils seraient capables de constituer une source appr~ciable de rlecettes. 8.16 II convient d'~valuer l'effet qU'une telle augmentation des rede- vances aura it sur les principaux usagers des services d'infrastructure. Dans un pays subsaharien typique, une agumentation de 20 A 30% des recettes publlques Aquivaut A environ 4 A 6% du PIB, soit entre 8 et 12% du revenu du Sf:!cteur moderne. L' augmentation sera, toutefois, compens~e en partie par des r~ductions des taxes sur Ie commerce ext~rieur. 8.17 Ce sont essentiellement les groupes urbains A revenu plus ~lev~ qui jouissent des avantages procur~s par les investissements d'infrastructure. II n'existe donc aucune raison d'ordre social ou ~conomique pour ne pas maj Ol:er les tarifs sur I' ~lectricit~, les t~l~communications, etc. En outrE~, une r~cuperation plus ~tendue des coOts des services rendus au sect{!ur moderne ne constituerait gu~re une charge pour les entreprises, A cond;~ tion qu' e lIe soi t imposee graduellement et s' accompagne d' une am~l:~oration de la qualit~ des services. Elle aurait vraisemblablement pour effet d'augmenter les revenus en r~duisant Ie rationnement et les files d'attente et en minimisant les encombrements. C'est ainsi que l'efficacit~ des services d'Hectricit~ peut ~tre augmenUe par une r~duction du "d~lestage de demande" , qui revient cher aux consommateurs parce qu'il les oblige A faire des investissement en g~n~ratrices d'appoint (voir encadr~ 1.1). 8.18 Cette approche pr~sente encore d'autres avantages. Les recettes devraient ~tre relativement faciles A recouvrer et A administrer. Elles auraient aussi tendance A s'accroltre avec Ie revenu, ce qui contribuerait A la stabilisation des recettes publiques. Elles permettraient de financer la mise en oeuvre de programmes A forte intensite de main-d'oeuvre et A - 313 - rendement ~lev~ pour la r~novation et l'entretien de l'infrastructure. Elles constitueraient aussi un moyen de tirer des res sources du secteur non structur~. A mesure qu'une ~conomie se d~veloppe et se renforce, Ie recours a ces services s'accroit, ce qui constitue un moyen d'augmenter les recettes sans causer des d~sincitations ou des complexit~s administratives. 8.19 Les principales difficultes inh~rentes 8 la r~cup~ration des coUts sont de nature institutionnelle (am~liorations des compteurs, du facturage et de la responsabilite financiere des usagers, sans quoi les recettes suppl~mentaires ne peuvent pas ~tre recouvr~es). II s'agit donc de renforcer la capacit~ des institutions 8 recouvrer leur dUo 8.20 Les analystes en finances publiques ne pr~tent g~n~ralement que peu d'attention au degr~ d'empressement du secteur priv~ 8 payer les services sociaux dont il b~n~ficie. Or, les montants que les m~nages consacrent par exemple aux medicaments et a l'instruction peuvent ~tre considerables, et ce sont 18 des d~penses de d~veloppement tout aussi bien que celles que les pouvoirs publics effectuent aux m~mes fins. On a aussi tendance a ne pas tenir compte de la propension des m~nages, m~me pauvres, a investir en avoirs productifs, bien que les d~penses y aff~rentes constituent un ~lement important de l'~pargne priv~e. ContrOle des depenses publiques 8.21 Au cours des annees 60 et 70, la croissance des recettes publiques a donn~ lieu 8 des montants insoutenablement ~leves de d~penses r~currentes, jointas 8 un recrutement peu judicieux de personnel. Le probleme a ~te aggrave par les donateurs, qui finan9aient des projets sans avoir ~valu~ leur incidence sur les budgets courants ou leur compatibilit~ avec un programme d'investissement public coh~rent. En outre, les fluctuations des cours des exportations exer9aient un effet de cliquet sur les d~penses: en effet, les engagements pris en p~riodes de haute conjoncture fiscale ~taient fort difficiles 8 comprimer lorsque les recettes fisc ales s'amenuisaient. Chose plus desastreuse encore, 1es chutes importantes et r~p~tees des recettes durant les ann~es 80 ont forc~ bien des gouvernements 8 op~rer des coupes dans les depenses, notamment de mat~riel. De ce fait, les ~coles ~taient a court de livres, les hOpitaux manquaient de m~dicaments et la maintenance des infrastructures ~tait negligee. Moyennant une gestion financiere prudente, un pays peut ~viter de tels problemes (voir encadr~ 8.1). Une fois que les mesures en matiere de recettes sont entrees en vigueur, il faudra une discipline financiere bien plus stricte, pour veiller a ce que les depenses refletent les priorites en matiere de developpement, notamment des ressources humaines, et 8 ce qu'il existe un Meilleur equilibre entre les depenses salariales et celles en materiels. 8.22 Les depenses peuvent ~tre reduites par Ie biais d'une gestion plus stricte de l'usage des deniers pUblics, notamment en comprimant les subventions aux etablissements paraetatiques et aux entreprises publiques, en suveillant de plus pres la masse salariale de l'Etat et en diminuant les depenses militaires. Dans l'Afrique subsaharienne, de nombreuses entreprises publiques subissent de lourdes pertes, ce qui contribue 8 grever les budgets. Ces entreprises presentent un tableau desolant d'inefficacite et de mediocrite. Les objectifs non economiques qui sont - 314 - all~gu~s pour excuser leurs r~sultats d~favorables sont rarement r~alis~s. LA oU' ont ~t~ adopt~es des r~formes telles que des politiques plus judicieuses, une gestion plus stricte, un niveau plus appropri~ de tarifs et de redevences d'usagers, la liquidation ou la r~habilitation d'entreprises non viables, on constate de bons r~sultats (par exemple en Gambie. au Mali, auS~n~gal, en Somalie et en Tanzanie). A plus long terme ces mesures, jointes A un certain degr~ de privatisation, doivent se solder par un accroissement de l'~pargne publique. 8.23 La masse salariale des Etats d'Afrique subsaharienne est en r~gle g~n~rale ~lev~e par rapport au PNB et au total des d~penses publiques. Dans certains pays. tel que Ie Burkina Faso, les d~penses de personnel repr~sentent presque la moiti~ des d~penses de l'administration centrale. Pour contenir Ie gonflement de cette masse salariale, les divers pays ont adopt~ tout un ~ventail de mesures - blocage du recrutement, abolition du recrutement automatique des diplOm~s. retraites anticip~es et m@me licen- ciements avec paiement d'indemnit~s - avec un succ~s in~gal. Dans la plupart des pays, les r~mun~rations ont fl~chi en valeur r~elle depuis 1980. Cela ne s'est pas traduit par un grand nombre de d~parts volontaires. mais plutOt par un relAchement des efforts et une recrudescence des seconds emplois, clandestins ou non. En pratique, les premi~res compressions - et les plus faciles - ont port~ sur les intrants compl~mentaires et les mat~riaux n~cessaire A une prestation efficace des services. 8.24 Les pays africains consacrent en moyenne 37% de leurs recettes aux frais de personnel. Comme leurs ressources sont limit~es, il est souhaitable que leur masse salariale Ie soit ~galement. C'est ainsi que Ie Ghana a d~cid~ de limiter la masse salariale de la fonction publique A entre 5 et 5,5% du PIB. A cette fin. la fonction publique (comptant 300.000 agents) a ~t~ amput~e de 24.000 unit~s en 1987-88. En r~gle g~n~rale. les Etats devraient viser a ne pas laisser leur masse salariale d~passer 25% des recettes int~rieures. 8.25 Une r~duction des d~penses militaires peut ~galement contribuer A une augmentation de I'~pargne publique. Dans l'Afrique subsaharienne. ces d~penses repr~sentent une fraction relativement importante du PIB. Dans certai~s pays. elles sont vraiment disproportionn~es (voir Ie tableau 8.2). Dans lsl plupart des pays dont la performance est favorable, comme Ie Botswana, Ie Ghana et Maurice. les d~penses militaires sont relativement faibles. - 315 - Tableau 8.2 D~~enses militaires (Pourcentage des d~penses totales de l'Etat) 1980 1981 1985 1986 Pays de l' Afrique subsaharienne 12,10 11,74 10,03 Quelques pays Ethiopie 30,00 34,00 34,63 32,00 Ouganda 25,19 31,18 15,62 26,34 Zimbabwe 25,04 20,54 15,20 16,30 Somalie 19,20 22,67 Burkina Faso 16,96 18,41 19,19 18,26 Kenya 16,43 10,73 8,72 10,57 S~n~gal 16,84 11,83 10,82 10,60 Soudan 13,20 12,25 12,18 10,15 Non disponible 8.26 Une autre fa~on d'accroltre l'~pargne publique est le resserrement des march~s publics par le recours aux appels d'offres, aux achats en vrac, ~ l'am~lioration de la manutention et ~ d'ad~quates v~rifications et justifications des d~penses. Les donateurs doivent se pr~occuper de contribuer a la mise en place de ces am~liorations. 8.27 Etant donn~ le manque de ressources auquel de nombreux pays afri- cains sont comfront~s, il convient de ne rater aucune occasion de rationa- liser les depenses publiques. La vigilance en ce domaine peut ~tre payante de multiples fa~ons (Voir encadre 8.2). Epargne communautaire 8.28 L'idee que la planification detaill~e et le contrOle de l'Etat constituent la meilleure fa~on d'assurer le d~veloppement en Afrique est discredit~e. On attend d~sormais davant age de l'autonomie et de la decen- tralisation. Devant la baisse de l'epargne tant publique que privee, les gouvernements sont de plus en plus dispos~s ~ envisager d'autres solutions. Dans les zones rurales, les services de sant~ sont consider~s de plus en plus comme une affaire locale, OU interviennent ~ la fois des agents de sante modernes et traditionnels. Les services d'utilite publique, tels que la distribution d'eau, sont repris par les collectivit~s. Les techniques sont developp~es avec la participation des communaut~s; il en va de meme des efforts de protection de l'environnement. 8.29 L'Afrique poss~de une riche tradition de service social ~manant des collectivit~s ou des groupes. Ceci se manifeste dans la pratique fort r~pandue de partage, l'accent ~tant mis sur les initiatives venant de la base et les projets fond~s sur les collectivit~s. Cette coop~ration se fait le plus souvent au coup par coup et d'une mani~re non structuree. Les projets de developpement bases sur une collectivit~ constituent un moyen de mobiliser une "~pargne communautaire" (en esp~ces ou en main-d'oeuvre), pour toute une gamme d'activit~s locales. - 316 - 8.30 Le d~veloppement communautaire est souvent Ie fait d'une auto- assistance, par exemple, pour la construction, reparation et maintenance d'installations de la collectivit~. Comme les participants sont ~galement des b~n~ficiaires directs, la motivation tend A ~tre puissante. Ces projets sont autant de fa90ns efficaces d'utiliser des ressources gratuites pour satisfaire les besoins les plus urgents des collectivit~s. En voici quelques exemples: * Dans Ie district de Jasikan du Ghana 18 bourgades et villages ont rassembl~ en 1988 quelque 200.000 dollars E.U. pour Ie financement de la premi~re phase d'un programme triennal de d~veloppement int~gr~ con9u par la population locale. Les projets comprenaient des ~coles primaires, des dispensaires et des installations d'eau potable. La population fournissait du travail ou de l'argent et Ie conseil du district, les mat~riaux de construction et une assistance technique. Ailleurs les paysans construisent, avec l'assistance du minist~re des travaux publics, une route de desserte qui doit faciliter Ie transport des denr~es agricoles vers Ie march~. * Au Mali, un Fonds du village de Segou a ~t~ cr~~ grAce A l'~pargne des villageais eux-m~mes; il doit servir A mettre en train un syst~me de d~veloppement auto-g~r~. Les collectivit~s villageoises ont pu augmenter ainsi leur production de sorgho, introduire et d~velopper la culture de ni~b~s et reprendre la culture d'arachides et de maYs abandonn~e lors de la s~cheresse. G~r~ par un comit~ compos~ de villageois, Ie Fonds procure aussi des intrants essentiels, tels que les semences, des medicaments A usage humain ou animal et un syst~me amtHiore de commercialisation. Au Malawi, la participation communautaire A l'adduction d'eau - un des programmes les plus reussis d'Afrique subsaharienne - est base sur une participation intense des collectivit~s et sur des responsabilites, limiteE:s mais clairement d~finies, des pouvoirs publics (voir Encadre 3.10). Plusieurs des themes exposes dans Ie present rapport - developpement des ressources humaines, protection de l'environnement et autononlie - sont parfaitement compatibles avec Ie concept d'~pargne communs.utaire et d' activites basees sur la collectivite. AI' avenir, la mobilisation de l'epargne communautaire, encouragee par les pouvoirs publics, pour Ie financement non seulement de services publics et de biens collectifs, mais aussi d'activites productrices de biens et generatrices de revenu. peut apporter une contribution importante au developpement, surtout sur Ie plan local. Sur une population active d'environ 600 millions de personnes en l'an 2020, il Y en aura fort probablement un grand nombre qui seront, au moins saissonnierement, sous-employees en milieu rural. L'epargne communautaire ne sera pas seulement utile pour Ie financement des besoins urgents et du d~veloppement, mais elle pourra egalement servir A creer des emplois productifs. 8.32 Les initiatives ne peuvent pas s'epanouir isolement. Limitees et dispersees qu'elles sont, elles ne peuvent guere avoir d'effet si elles ne sont pas incorporees dans un ensemble plus vaste. Comme l'ingerence d'une bureaucratie centrale risque d'etouffer l'initiative locale, il convient d'encourager des structures d'appui intermediaires mais non gouvernementales, qui serviront de lien entre l'Etat et la myriade d'efforts d'auto-assistance et de developpement deployes sur une petite - 317 - ~chelle. Ces ONG ont l'avantage d'@tre plus proches des collectivit~s rurales que les administrations (~tant souvent en contact direct avec Ie peuple, elles y gagnent une empathie qui fait ordinairement d~faut A des fonctionnaires), fortement motiv~es, sensibles aux conts et sympathiques envers les solutions A forte intensit~ de main-d'oeuvre, enfin, flexibles, grAce A leur petite tail Ie et la d~centralisation des prises de d~cision qui les caract~rise. Les pouvoirs publics doivent s'efforcer d'encourager les ONG, qu'elles soient nationales ou aient leur si~ge A l'~tranger. Promotion de l'~pargne priv~e 8.33 II existe en Afrique subsaharienne un potentiel de mobilisation de l'~pargne des m~nages, A condition de renforcer Ie syst~me financier, qu'il soit structur~ ou non. A cet ~gard, Ie gouvernement a un rOle important A jouer. Un acc~s plus facile aux institutions financi~res et une am~lioration des circuits d'interm~diation encourageraient les m~nages A diff~rer la consommation en faveur de l'investissement. Malheureusement, dans bien des pays, Ie syst~me financier s'est d~grad~, au point que des r~formes s'imposent d'urgence. Par contre, Ie secteur non structur~ fait preuve de vitalit~; aussi faut-il l'encourager A participer plus activement au d~veloppement. 8.34 LA CRISE DU SECTEUR FINANCIER. Lors de l'accession A l'ind~pendance, Ie secteur financier des pays africains se composait de banques dont la client~le consistait principalement en expatri~s, de caisses d'~pargne postale, de mutuelles de cr~dit et de pr@teurs sur gages. Certes, il s'est d~velopp~ par la suite, mais la qualit~ des services a ~volu~ diff~remment dans les divers pays. Dans certains, Ie syst~me bancaire est devenu pratiquement illiquide. C'est ce qui s'est pass~ en Guin~e et en Guin~e ~quatoriale au d~but des ann~es 80 et r~cemment en Angola, en Mozambique et au B~nin. Au Kenya et au Nig~ria, par contre, les services financiers se sont am~lior~s et ont gagn~ en importance. 8.35 Les financiers ont ~t~ influenc~ par les politiques macro- syst~mes ~conomiques. M@me si celles-ci ~taient peu judicieuses, les banques commerciales ont pu fonctionner tant que l'Etat ne s'en servait pas pour financer Ie d~ficit du secteur public. 11 en a ~t~ ainsi en Ouganda tout au long des ann~es de troubles civils et au Soudan, en d~pit des difficult~s aigu~s que traversait l'~conomie. Au Zaire aussi, Ie syst~me bancaire est demeur~ liquide malgr~ l'inflation ~lev~e et la d~pr~ciation rapide de la monnaie. 8.36 Dans les pays de la zone CFA, Ie syst~me bancaire s'est d~grad~ ces derni~res ann~es. Bien qu'ils aient r~ussi pour l'essentiel A contenir les d~ficits budg~taires et l'inflation, les gouvernements, n'ayant pas la possibilit~ d'imprimer de la monnaie, ont forc~ les banques commerciales A financer des d~penses qui auraient normalement dn @tre couvertes par des subventions de l'Etat. II en est r~sult~ l'effondrement du syst~me bancaire du B~nin et une grave crise bancaire dans d'autres pays de la zone CFA. Les cr~ances douteuses ou irr~couvrables d~tenues par ces banques d~passent 3 milliards de dollars E.U., soit au moins 30% des actifs int~rieurs du syst~me bancaire. Les gouvernements de la zone du franc CFA se sont encore immisc~s de bien d'autres fa90ns dans l'allocation du cr~dit. rls ont amen~ les banques commerciales A accorder du cr~dit A des - 318 - entreprises publiques insolvables. lls ont fait octroyer des cr~dits de campagne sur la base des conts de production (taxes ~ l'exportation comprises) pour des montants sup~rieurs aux recettes d'exportation. Parfois des cr~dits ont ~t~ accord~s ~ des particuliers sur la base de leurs relations personnelles. Enfin, l'accumulation d'importants arri~r~s de paiements de l'Etat envers des fournisseurs et entrepreneurs priv~s n'a pas seulement nui au portefeuille des banques, mais a indirectement contraint celles-ci ~ financer le d~ficit budg~taire. Cela ne veut pas dire. toutefois, que toutes les faillites de banques doivent ~tre imput~es aux pouvoirs publics. Certaines banques priv~es ont chavir~ ~ la suite d'une mauvaise gestion et du non-respect des r~glementations de la banque centrale et des codes de conduite. La r~habilitation des secteurs financiers africains et leur approfondissement constituent des conditions sine qua non du succ~s de toute strat~gie de d~veloppement future. 8.37 Politiques de cr~dit. M~me dans les pays OU le syst~me d'~conomie de march~est bien ~tabli, l'octroi de cr~dit par les banques commerciales est affect~ par des consid~rations politiques. Dans bon nombre de pays africains, le degr~ d'ing~rence de l'Etat a ~t~ consid~rable. L'exp~rience sugg~re que le moyen le plus efficace de r~aliser la croissance avec ~quit~ est d'utiliser des instruments fiscaux - taxes et subventions - et de g~rer les banques commerciales selon des principes commerciaux. Pour refl~ter les risques et les conts aff~rents ~ l'administration des pr~ts, les marges bancaires doivent ~tre plus ~lev~es pour un client empruntant une petite somme sans aval que pour une per sonne solvable qui emprunte une somme importante. 8.38 Les gouvernements ont essay~ de fournir des cr~dits pr~f~!rentiels ~ des secteurs particuliers et aux groupes sociaux m~ritants mais ces cr~dits ont souvent ~t~ mal utilis~s. La plupart des institutions de financement du d~veloppement et des banques sp~cialish (exemple : pour le l()gement ou l'agriculture) ont fait faillite. Par ailleurs, dans la majorit~ des pays africains, la taille du march~ est trop modeste pour soutEmir plusieurs institutions financ!~res sp~cialis~es dans un environnement concurrentiel. Les banques commerciales ~tablies sont souvent mieux plac~es pour fournir des services ~ leur client~le. Avec la concurrence, les conts des banques peuvent ~tre contenus - ils Ie sont rarement dans les banques d'Etat. 8.39 Les objectifs poursuivis au moyen des cr~dits bonifi~s ou directs peuvent ~tre r~alis~s plus efficacement grAce ~ des politiques de prix, et de politiques commerciales et fiscales. Ainsi, on peut accroltre Ie rE!VenU agricole en relevant les prix ~ la production et en am~liorant l'infrastructure rurale (notamment pistes rurales) et en g~n~ral la qualit~ des services publics dans les r~gions rurales. On peut stimuler les investissements r~alis~s par les petites entreprises par des politiques commerciales et fiscales et par l'assistance technique. Certains gouvernements ont am~lior~ les logements des m~nages urbains ~ faible revenu en leur fournissant des terrains viabilis~s. Lorsque les d~penses publiques se limitent ~ l'infrastructure, les ~conomiquement faibles sont plus avantag~s; les pr~ts bonifi~s au logement favorisent souvent les particuliers ~ revenu moyen et ~lev~. - 319 - 8.40 Institutions financi~res informelles. En raison des conts eleves, Ie syst~me bancaire commercial formel ne sera peut-etre pas dispose a fournir des services financiers aux regions eloignees ou aux menages A faible revenu. Ges services peuvent generalement ~tre fournis plus efficacement par des voies moins officielles. Dans certains pays de l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique centrale, les tontines ou leur equivalent offrent une methode efficace pour mobiliser l'epargne et octroyer de petits pr~ts aux menages a faible revenu. La performance en mati~re de remboursement des pr~ts non assures par des garanties forme lIes mais resultant des pressions sociales est generalement excellente (voir Encadre 6.3). On peut promouvoir ces societes traditionnelles d'epargne et de credit en instaurant des liens avec les institutions financi~res formelles (voir Encadre 8.4). 8.41 II devrait incomber aux banques ou aux societes informelles d'epargne et de credit d'evaluer les risques associes aux demandes individuelles de credit. Les autorites monetaires devront s'assurer que Ie rythme de creation monetaire est compatible avec les objectifs economiques gene raux. Get equilibre devrait idealement ~tre realise avec des taux de change et d'interet en equilibre avec les marches, ce qui permet d'eviter Ie rationnement. Gela n'a pas ete Ie cas dans la plupart des pays africains. II faudrait suivre cette politique A l'avenir. 8.42 Taux d'inter~t. Lorsque Ie taux d'inflation est superieur au taux d'interet nominal, les creanciers sont perdants et les emprunteurs gagnants; on ne peut donc realiser l'equilibre sans rationner Ie credit. Lorsque Ie taux de depreciation anticipe de la monnaie nationale depasse la difference entre Ie taux d'interet interieur et les taux d'interet A l'etranger, les detenteurs d'avoirs financiers libelles en monnaie nationale gagnent A convertir ces actifs en avoirs libelles en devises. Geci aboutit A une fuite de capitaux et A une plus forte depreciation de la monnaie nationale - situation qui n'est gu~re propice aux investissements interieurs. 8.43 Recemment certains pays ont pris des mesures pour ramener les taux de change et d'inter~t A des niveaux plus compatibles avec l'equilibre du marche. L'experience a montre que ces ajustements ne pouvaient reussir si l'on ne retablissait pas la discipline budgetaire et qu'il est souvent avantageux de relAcher les contr6les progressivement. Malgre ces difficultes. les pays devraient viser a liberaliser les taux de change et d'inter~t s'ils veulent maximiser leur potentiel de croissance. 8.44 Rehabilitation des syst~mes bancaires. A court terme, il est extr~ment urgent de retablir un syst~me bancaire operationnel dans les cas ou il s'est effondre. Lorsque Ie public a perdu confiance dans les banques, la meilleure solution serait de commencer A zero en creant de nouvelles comme on l'a fait en Guinee A la fin de 1985. Lorsque Ie syst~me bancaire ne s'est pas encore effondre, il faut Ie restructurer sans tarder et les mesures adoptees doivent etre assez energiques pour inspirer confiance au public et aux milieux d'affaires. 8.45 Le train de mesures doit ~tre adapte a chaque pays. Si l'ingerence politique dans l'allocation de credit est en grande partie a l'origine de l'affaiblissement du syst~me. il convient de prendre des - 320 - mesures pour prot~ger les banques contre ces ing~rences. Ie cas ~ch~ant en vendant les int~r~ts du gouvernement dans ces banques. Les autorit~s mon~taires devront peut-~tre renforcer la supervision des banques en exigeant des v~rifications des comptes r~guli~res et en appliquant des ratios prudentiels. Si la faiblesse des taux de remboursement est imputable ~ l'absence de garanties (et/ou aux difficult~s d'application), il convient de modifier Ie syst~me juridique. De nouveaux instruments financiers seront peut-~tre n~cessaires; Ie cr~dit-bail fournit peut-~tre un m~canisme financier plus sftr que Ie pr~t mon~taire. 8.46 NOUVEAUX INSTRUMENTS FINANCIERS. Lorsque Ie syst~me bancaire fonctionne en toute s~curit~. l'interm~diation financi~re devrait ~tre progressivement approfondie et diversifi~e pour d~velopper des march~s de capitaux et march~s mon~taires flexibles. La banque centrale pourrait alors r~gler la masse mon~taire par une politique d'open market en achetant et en vendant les instruments mon~taires, ce qui vaudrait beaucoup mieux que d'imposer des plafonds de cr~dit ~ chaque banquet puisque ces plafonds r~duisent la concurrence et peuvent ~tre discriminatoires. Une politique d'open market exige des instruments mon~taires (notamment bons du Tr~sor a long terme et obligations de soci~t~, certificat~ de d~pOts bancaires) qui sont des liquidit~s et sont disponibles, assorties d'~ch~ances correspondant aux besoins des milieux d'affaires. Mais les obligations ne sont liquides que si Ie march~ est actif, ce qui n'est pas Ie cas dans la plupart. des pays africains. Le chiffre d'affaires sur Ie march~ secondaire des obligations en COte d'Ivoire ~tait de 0,7 % en 1987, contre une moyenne de 50 :~ dans les pays industrialish. 8.47 Pour mobiliser l'~pargne et faciliter Ie financement des investissements, les march~s mon~taires peuvent ~tre complet~s par des bourses des valeurs. 11 en existe dans certains pays africains, mais Ie chiffr*! d' affaires journalier est modeste. La bourse d' Abidjan, cr~~e en 1976, *~st inactive depuis des ann~es, en raison de r~glements qui favorisent les Ivoriens et de la crise ~conomique qui s~vit depuis Ie d~but des ann~es 80. Par ailleurs, les r~sidents ais~s investissent les avoirs financiers a l'~tranger plutOt que dans Ie pays. Si les nationaux n'ont pas cOIlfiance dans leur propre march~ int~rieur, on ne peut s' attendre que les ~trangers lui fassent confiance. L'expansion des march~s des capitaux int~riE!Urs exige un climat de confiance dans I' ~conomie et dans la stabilit~ des politiques financi~res et ~conomiques. Les autorit~s ont de toute evidence un rOle essentiel a jouer sur ce plan. 8.48 Les march~s des capitaux pourraient se d~velopper suffisamment dans les pays comme Ie Kenya et Ie Nig~ria pour permettre aux autorit~s mon~taires -de mettre en oeuvre une politique d' open market pour remplacer les contrOles mon~taires dir~ts tels que les plafonds de cr~dit. Chaque gouverI1ement devrait avoir une perspective ~ long terme de l'~volution de son syst~me financier et devrait d~finir Ie calendrier de mani~re r~aliste. Puisque la plupart des ~conomies africaines sont de taille modeste, leurs march~s financiers et march~s mon~taires int~rieurs devraient ~tre li~s ~ d'autres march~s africains et des pays industrialis~s ~galement. Cela favoriserait Ie commerce et la cr~ation d'entreprises conjointes entre pays africains, et des ~changes entre l'Afrique et Ie reste du monde. En particulier, cela stimulera l'entr~e de capitaux priv~s et des technologies ~trang~res dans les pays africains. - 321 - Ressources ext~rieures Potentiel d'exportation 8.49 Les r~sultats ~ l'exportation de l'Afrique sont r~v~lateurs du potentiel inexploit~ du continent. Les taux de croissance annuels moyens des exportations de l'Afrique subsaharienne sont tomb~s de 6,6 % en 1965-80 ~ -0,8 % en 1980-87. La part de l'Afrique dans les march~s mondiaux est tomb~e de 2,4 % en 1970 ~ 1,3 % en 1987. L'expansion du commerce mondial au cours des trois derni~res d~cennies semble avoir largement laiss~ de cOt~ l'Afrique. Si les ~conomies africaines doivent se d~velopper, elles devront am~liorer leurs parts des march~s mondiaux et diversifier leur gamme d'exportations. 8.50 On objecte souvent qu'il ne serait pas souhaitable de d~velopper les exportations de mati~res premi~res, car la demande est g~n~ralement in~lastique, si bien que, lorsqu'un pays producteur adopte un comportement agressif en mati~re d'offre, cela est pr~judiciable ~ l'ensemble du secteur; d'abord lorsque les prix diminuent et ensuite peut-etre que certains producteurs sont oblig~s d'abandonner cette activit~. O'un point de vue pratique, ce sophisme n'est pas convaincant. Le fait que les producteurs se font concurrence pour les march~s est une r~alit~ fondamentale, aussi bien dans Ie secteur secondaire que dans Ie secteur primaire. Au cours des ann~es 70, c'est pr~cis~ment ce comportement agressif, sur le plan de l'offre, de la part d'autres pays en d~veloppement producteurs qui a ~rod~ la part des exportations de l'Afrique, situation qui a ~t~ aggrav~e par les subventions agricoles dans les pays d~velopp~s. 8.51 La production africaine de la plupart des mati~res premi~res, ~ l'exclusion du cacao, du caf~ et du cuivre, repr~sente une part relativement modeste (moins de 20 %) du march~ mondial. Meme un doublement de la production aurait une incidence faible sur l'offre mondiale. L'Afrique ne peut pas se permettre d'adopter un rOle passif et perdre des parts de march~s encore plus importantes au profit des exportateurs plus agressifs de l'Asie et de l'Am~rique latine. Lors de la n~gociation d'accords sur les produits de base, la perte de parts de march~s par l'Afrique devrait etre consid~r~e comme un argument en faveur d'un traitement plus favorable. 8.52 Les perspectives de rel~vement sensible des prix de la plupart des mati~res premi~res ~tant m~diocres. l'accroissement des recettes d'exportation doit provenir d'une augmentation de l'offre des exportations actuelles 'et de la diversification. Bien que la diversification soit un objectif ~ long terme essentiel,~ court et moyen terme les pays doivent chercher ~ d~velopper leurs exportations traditionnelles puisqu'il faudra du temps pour qU'un nouveau produit devienne une source importante de recettes d'exportation. En tout ~tat de cause, il serait sage d'offrir des incitations neutres pour lesexportations en g~n~ral, et ~viter des politiques cibl~es qui risquent d'aboutir ~ une mauvaise affectation des ressources. G~n~ralement les gouvernements ne sont pas tr~s dou~s pour choisir les gagnants. - 322 - 8.53 II est encourage ant de constater qu'au cours des 15 derni~res ann~es, certains pays africains ont r~ussi A trouver de nouveaux cr~neaux sur les march~s mondiaux pour certains produits de base comme les huiles v~g~tales, Ie soja, et les produits de la p~che. Le Kenya a du succ~s dans les exportations de fruits, l~gumes et fleurs. Mais, A l'exception de Maurice, les pays africains ne se sont pas lanc~s en grand dans l'industrie l~g~re A forte intensit~ de main-d'oeuvre, et les rares biens manufactures export~s sont essentiellement des produits primaires transform~s ayant une faible valeur ajoutee (voir Chapitre 5). 8.54 L'Afrique subsaharienne doit trouver de nouveaux marches. Sur son marche traditionnel, 1 'Europe, a enregistr~ une chute des importations en provenance des pays en d~veloppement (qui sont tomb~s de 34 ~ 20 % au cours de la periode 1970-85); parcontre, les Etats-Unis sont maintenant Ie plus gros marche pour les importations de ces pays. Etant donn~ que la part des marches asiatiques et la part des produits non traditionnels dans Ie march~ mondial va probablement augmenter rapidement, il faudrait deployer des efforts speciaux pour penetrer sur ce marche. La concurrence sur les march~s internationaux demeurera intense, mais une croissance ~conomique continue A l'echelon mondial pourrait developper la demande pour les exportations africaines. Les pays africains doivent reorienter les exportations et ~largir Ie commerce intraafricain (voir Chapitre 7). Mais il n'y a pas d'option facile; l'Afrique reussira ou echouera selon qu'elle sera capable ou non de soutenir la concurrence. 8.55 La composition et Ie niveau de croissance des exportations variera bien sQr avec Ie pays. Dans la future strat~gie de developpement, Ie ratio exportation-PIB d'apr~s l'objectif fix~ devrait passer d'une moyenne annuelle d'environ 19 % en 1986-87 ~ environ 24 % d'ici l'an 2000 et A 28 % en l'an 2020 : Ie taux de croissance des exportations devrait s'ameliorer sensiblement et passer d'un taux negatif en 1981-87 ~ environ 5 % par an, renversant Ie flechissement de la part de l'Afrique sur Ie marcl".e des exportations primaires. Besoins d'importation 8.56 Les perspectives d'expansion des exportations ~tant modestes, l'Aftique sera confrontlle ~ une penurie de devises jusqu'au dllbut du prochain si~cle. La stratllgie proposlle dans Ie prllsent rapport n'est pas capitalistique, mais l'accent Mis sur l'infrastructure et la hausse des taux d'investissement proposee exigent neanmoins des importations substantielles de biens d'equipement. 8.57 Les pays africains peuvent encore amlliiorer l'efficacitll de l'utilisation des importations et de r~duire les importations de produits de luxe et de denrees alimentaires. Au fur et A mesure que la production intllrieure augmente, les produits interieurs pourront remplacer les importations, particulierement au niveau des biens ayant une valeur ajoutlle elev~e. Neanmoins, au dllbut des annees 90, les importations devront augmenter plus rapidement que Ie taux du PIB global pour compenser la compression de la dllcennie precedente. Les importations dans les annees 90 devront augmenter d'au moins 1 % par an de plus que Ie taux de croissance projet~ du PIB (4 I). Ceci implique une elasticit~ de 1,2 pour les annees 90, ce qui sugg~re des importations representant environ 33 % du PIB - 323 - en l'an 2000. Par la suite, les importations pourraient augmenter proportionnellement au PIB. L'exp~rience r~cente des pays africains en termes de programmes d'ajustement solides (Ghana, Kenya et Maurice) sugg~rent une ~lasticit~ d'importation de 1,5. On suppose que si la production alimentaire augmente, la croissance des importations alimentaires diminuera et, ~tant donn~ la hausse projet~e des investissements, qui passeront de 15 A 25 % du PIB, les importations de biens d'~quipement augmenteront plus que Ie revenu. Solde global des ressources 8.58 Les besoins de ressources ext~rieures pour un programme de croissance et de d~veloppement social peuvent @tre calcul~s soit comme ~tant l'~cart entre les investissements et l'~pargne int~rieure ou comme l'~cart entre les besoins d'importation et la capacit~ d'exportation. Ex post, les deux sont identiques. 8.59 Un objectif initial de croissance du PIB de 4 % par an, puis de 5 %, a (voir Chapitre 2). Si on ne m~nage aucun effort pour ~t~ propos~ r~duire la croissance d~mographique, les revenus par habitant pourraient augmenter d'environ 1 A 2 % au cours de la p~riode 1990-2020. Les hypoth~ses macro~conomiques utilis~es pour analyser les implications de cet objectif sont ~nonc~es au Tableau 8.3. Etant donn~ la m~diocrit~ de la base de donn~es, et l'incidence des ajustements de taux de change sur Ie commerce par rapport aux ratios du PIB, les param~tres donn~s sont g~n~raux et Ie sc~nario est illustratif. II n'y a pas de projection ~conomique bas~e sur des tendances et relations historiques puisque l'objectif est de modifier la strat~gie de croissance ant~rieure. 8.60 Les faibles niveaux ou est tomb~e l'~pargne ne peuvent se relever que lentement, ~tant donn~ que la r~orientation de la consommation et des comportements est une tAche de longue haleine. Un taux d'~pargne int~rieur global de 22 % du PIB peut @tre r~alis~ d'ici l'an 2020 si l'on veut r~duire la d~pendance A l'~gard du financement ext~rieur. D'ici l'an 2000, toutefois, Ie taux d'~pargne peut atteindre 18 % du PIB, ce qui, apr~s d~duction pour paiement d'int~r@ts, pourrait laisser un ~cart entre l'investissement et l'~pargne d'environ 9 % du PIB. 8.61 L'effet des mesures visant A promouvoir les exportations et l'~volution probable des march~s mondiaux pour les exportations de l'Afrique subsaharienne ne peuvent @tre ~valu~s que pays par pays. Dans l'ensemble, un taux de croissance du volume des exportations l~g~rement sup~rieur au taux de croissance du PIB envisag~ serait un objectif minimum et faisable pour mettre la r~gion en mesure de diminuer son d~ficit de ressources ext~rieures. 8.62 Etant donn~ la chute accus~e par des importations africaines au cours de la derni~re d~cennie - et il ne faut pas oublier que les importations par habitant correspondent A environ la moiti~ des importations du d~but des ann~es 80 - une certaine reprise des importations s'impose A court terme. A long terme. cependant. on suppose que Ie ratio importations-revenu demeure A peu pr~s constant. - 324 - 8.63 Le transfert net n~cessaire pour comb1er 1es d~ficits ext~rieurs est donc A peu pr~s 1e mame : environ 9 % du PIB en l'an 2000. Par 1a suite, 1e besoin d'~pargne en devises (en pourcentage du PIB) devrait f1~chir d'apr~s les projections, atteignant 5 % du PIB d'ici l'an 2020. Tableau 8.3 AFRIQUE SUBSAHARIENNE CADRE MACROECONOMIQUE ILLUSTRATIF R~sultats Projections 1975-80 1980-85 1986-87 1990 2000 2020 Taux de croissance du PIB (pourcentage annue1) 2,8 -0,3 0,8 2,5 5 5 Investissement (pourcentage du PIB) 21,4 16,2 15,1 17 25 25 Epargne int~rieure brute 19,6 13,9 11,8 12 18 22 Coefficient d'ajustement ~ -3,0 -1,0 -2,9 -3 -2 -2 Transferts nets (pourcentage du PIB) 4,8 3,3 6,2 8 9 5 Importations Ib (pourcentage du PIB) 29,0 23,7 25,S 30 33 33 Exportations (pourcentage du PIB) 24,2 20,4 19,3 22 24 28 Transferts nets (pourcentage du PIB) 4,8 3,3 6,2 8 9 5 Pour m~moire Rendement de l'investissement 1Ł 13,0 ~ 5,0 15 20 20 ElasticiU des importations 2,1 ~ ~ ~ 11 ~ Ajustement pour paiements d'int~rats et erreurs et omissions (divergences entre comptes nationaux et balance des paiements, y compris traitement de l'assistance technique). Ib Biens et services exempts d'int~rats obtenus A partir des chiffres d'exportation et des transferts nets enregistr~s et inclut les postes tels que assistance technique, d~penses A l'~tranger qui ne sont pas enti~rement refl~t~s dans les comptes nationaux. 1Ł Valeur ajout~e additionnelle par unit~ d'investissement. ~ N~gligeable ou n~gatif. - 325 - Assistance au developpement dans les annees 90 Niveaux de l'aide 8.64 L'autonomie est un objectif important dans Ie Plan d'action de Lagos et d'autres declarations des pays africains. La strategie de developpement future est con9ue pour realiser cet objectif a long terme. D'ici l'an 2020, la dependance de l'Afrique a l'egard des ressources exterieures pour financer son developpement et ses importations de denrees alimentaires devrait, d'apr~s les projections, @tre plus faible qu'aujourd'hui (voir Tableau 8.3). 8.65 Un haut niveau de transfert de ressources pourrait aboutir a un syndrome de dependance, a une chute de l'epargne interieure, a des taux de change surevalues et a des taux de salaires eleves. Cependant, avec un cadre de politique approprie, ces transferts peuvent @tre associes a des taux de croissance eleves et des taux de change et de salaires appropries. En Coree, par exemple, les transferts de ressources se chiffraient a environ 10 % du PIB pendant les annees 60 et 70, cependant on a realise des taux de croissance impressionnants du PIB et des exportations, et des taux d'investissement eleves tout en maintenant des taux de change et des salaires concurrentiels. 8.66 L'elan d'aide engendre ces derni~res annees devra @tre maintenu au cours des annees 90 pour plusieurs raisons. Les pays devront continuer les programmes d'ajustement difficiles entrepris ces derni~res annees. Ceux qui ne se sont pas encore lances dans les reformes devront Ie faire. A mains que ces progfammes soient finances adequatement, ils ne peuvent @tre efficaces ni soutenus. II est utile de comparer les reussites des pays comme Ie Ghana, la Guinee et la Gambie, ofi Ie financement a ete adequat avec Ie cas de la Zambie ofi, faute de financement, il a ete difficile pour Ie Gouvernement de poursuivre son programme d'ajustement. 8.67 Deuxi~mement, de grands pays pourront recevoir des credits de l'IDA. Le Nigeria est deja admissible et sera de plus en plus tributaire de l'aide publique au developpement pour faire face a son deficit de ressources exterieures. Dans Ie passe Ie Nigeria recevait un montant negligeable d'assistance publique au developpement (0,6 dollar par habitant en 1986). Si d'ici l'an 2000, il devait recevoir Ie m@me niveau d'APD par habitant que d'autres pays africains exportateurs de petrole comme la COte d'Ivoire et Ie Cameroun, il absorbera environ 2,50 milliards de dollars d'APD par an, ce qui correspond a une augmentation de 17 % de l'APD estimative pour l'annee 90. En outre, on prevoit que l'Angola va devenir membre de l'IDA. 8.68 Troisiemement des efforts speciaux sont necessaires dans les annees 90 : pour remedier a 1a rechute intervenue dans les domaines tels que la securite alimentaire, Ie developpement des res sources humaines et l'infrastructure; et pour financer les initiatives au niveau de la planification familiale et de l'environnement. D'ici l'annee 2000, les importations de denrees alimentaires vont probablement augmenter d'environ 15 millions de tonnes, et caUterant environ 4 milliards de dollars aux prix de 1988, dont une part importante devra @tre satisfaite au moyen de l'aide etrangere. En ce qui concerne la valorisation des ressources humaines, des - 326 - d~penses additionnelles d'environ 10 milliards de dollars (prix de 1990) par an seront n~cessaires d'ici l'an 2000. Quant aux routes, l'arri~r~ d'entretien A lui seul cofitera d'apr~s les estimations 5 milliards de dollars, qui s'ajouteront aux 700 millions de dollars qui seront n~cessaires chaque ann~e au cours de la prochaine d~cennie pour ~viter d'autres d~t~riorations. Quant au planning familial et A la protection de l'environnement, d'importants efforts initiaux sont n~cessaires pour donner de l'~lan A ces programmes. 8.69 Comme on l'a d~montr~ ci-dessus, un transfert net de ressources repr~sentant environ 9 % du PIB sera n~cessaire en moyenne pour financer une croissance soutenue au cours des ann~es 90. L'APD n~cessaire pour satisfaire ces objectifs sera fonction de variables telles que programme d'all~gement de la dette, apports de capitaux non concessionnels d'organismes publics et priv~s, et besoins de r~serves, qui sont entour~es d'incertitudes. Avec des r~formes de politiques soutenues, on pourrait am~liorer sensiblement les envois de fonds priv~s, en augmentant les remises priv~es en freinant la fuite de capitaux et en am~liorant les flux d'investissements priv~s ~trangers. Toutefois l'exp~rience de plusieurs pays, tels que Ie Ghana et Ie S~n~gal, sugg~re qu'il faudra du temps pour r~tablir la confiance du secteur priv~ et, au cours de la prochaine d~cennie, on ne peut s'attendre qu'A des progr~s modestes. Par ailleurs, ~tant donn~ la d~t~rioration de la capacit~ d'endettement des pays de la r~gion, les emprunts non concessionnels devraient ~tre plus limit~s que par Ie pass~. On estime que les recettes nettes en provenance de ces sources seront modestes, probablement de l'ordre de 6 milliards de dollars par an. 8.70 Les besoins de ressources ext~rieures de l'Afrique subsaharienne au cours des ann~es 90 pourront ~tre satisfaits si les donateurs r~alisent deux objectifs connexes. Tout d'abord, au cours des ann~es 90, l'APD brute continue d'augmenter d'environ 4 % par an en termes r~els. Deuxi~mement, des m~~canismes d' all~gement de la dette sont mis en place afin que les paieme!nts r~e1s au titre du service de la dette des pays ayant entrepris des r~!formes ~nergiques soient maintenus dans des limites raisonnables (pour un menu des options d'all~gement de la dette, voir par. 8.73 A 8.86). Pour la r~gion dans son ensemble, on estime que l'all~gement de la dette permettra de maintenir les paiements au titre du service de la dette dans 1es arm~es 90 A peu prlls au m~me niveau que pendant 1es ann~es 80 (environ 9 milliards de dollars par an). Si un all~gement de cette ampleur n'est pas accord~, il faudra mobiliser une assistance ext~rieure plus importante ou alors, si l'all~gement de la dette est sup~rieur A l'estimation ci- dessus, les besoins d'assistance ext~rieure seront r~duits dans une proportion identique. 8.71 Les organismes multilat~raux, incapables de r~~chelonner leurs pr@ts, ont mobilis~ un financement suppl~mentaire sp~cial pour les pays africB.ins A faible revenu. Par Ie truchement d'un programme d'action conjoint de la Banque mondiale en faveur de l'Afrique subsaharienne, Ie Fonds d'aide A l'Afrique (FAA) a mobilis~ pr~s de 2 milliards de dollars d'aide hors projet et un cofinancement conjoint des programmes d'ajustement structurel du milieu de 1985 au milieu de 1988. La Banque mondiale a ~galement lanc~ un programme sp~cial d'assistance en faveur des pays A faible revenu surendett~s d'Afrique subsaharienne, A la fin de 1987, qui fournit un financement A d~caissement rap ide et tr~s concessionnel. Pour - 327 - ~tre ~ligible, un pays doit avoir avec la Banque mondiale et Ie FMI un programme de r~formes ~conomiques appuy~ par les donateurs. Au milieu de 1989, 22 pays ~taient ~ligibles. Le programme sp~cial d'assistance a quatre ~l~ments principaux : d~caissement suppl~mentaire de l'IDA; cofinancement concessionnel de l'ajustement procur~ par les donateurs bilat~raux et d'autres organismes multilat~raux; r~~chelonnement concessionnel, et financement concessionnel de l'int~r~t dn sur les pr~ts de la Banque mondiale. Dix-huit gouvernements et organismes donateurs se sont engag~s a verser un montant initial de 6,4 milliards de dollars pour Ie cofinancement. dont environ la moiti~ peut ~tre consid~r~e COmme financement additionnel aux programmes d'aide existants. 8.72 En 1986, Ie FMI a ~tabli sa Facilit~ d'ajustement structurel pour fournir une assistance A des conditions de faveur (taux d'int~r~t de 1/2 %, avec remboursement sur une p~riode de dix ans, y compris quatre ans et demi de diff~r~ d'amortissement, aux pays a faible revenu entreprenant des programmes d'ajustement structurel complet. II a d~caiss~ environ 0,667 milliard de dollars pour la r~gion africaine en 1986-88. Pour ~largir la r~serve de ressources concessionnelles a la disposition des pays a faible revenu, Ie FMI a ~tabli la Facilit~ d'ajustement structurel renforc~e, qui est entr~e en vigueur en janvier 1988. Les contributions des donateurs devraient fournir de nouvelles ressources A concurrence d'un montant total de 8,4 milliards de dollars, et accroitre la concessionnalit~ des ressources FMI en Afrique subsaharienne. Au milieu de 1989, huit pays africains avaient eu acc~s a cette facilit~. All~gement des dettes : Un "menu" d'options 8.73 L'Afrique ne peut se sortir de sa crise ~conomique actuelle sans une r~duction notable du fardeau de sa dette. Plusieurs initiatives importantes on ~t~ lanc~es ces derni~res ann~es en vue de produire un all~gement de la dette et de nombreuses propositions nouvelles sont envisag~es. Ces initiatives et propositions offrent un "menu" d'options qui visent a maintenir les paiements de service de la dette actuels dans des limites raisonnables et supportables. Ces options peuvent ~tre rang~es en deux grandes cat~gories : celles qui concernent la r~duction des dettes et les r~~chelonnements de la dette concessionnelle A des termes plus souples, c'est-A-dire en retardant les paiements de service de la dette ou en r~duisant la charge de la dette A long terme, et celles qui concernent les "swaps" ou ~changes de cr~ances. 8.74 REDUCTIONS DE LA DETTE ET REECHELONNEMENTS. En ce qui concerne les pays a faible revenu, plusieurs donateurs (par exemple Ie Canada, Ie Royaume-Uni, la R~publique f~d~rale d'Allemagne et la Su~de) ont converti des pr~ts bilat~raux concessionnels en dons. En outre, l'Afrique subsaharienne a ~t~ la b~n~ficiaire d'environ les deux tiers des annulations de dettes notifi~es par les cr~diteurs pour l'ensemble du monde, proportion beaucoup plus forte que sa part de la dette concessionnelle mondiale. Plus r~cemment, la France a d~cid~ d'annuler des dettes concessionnelles de 35 des pays africains les plus pauvres; on pr~voit que cette mesure reviendra a annuler environ 2,4 milliards de dollars de dettes. Les Etats-Unis ont ~galement annonc~ leur intention d'annuler un milliard de dollars de pr~ts A des pays d'Afrique subsaharienne A partir d'octobre 1989. Cependant, les possibilit~s - 328 - d'allegement dans Ie cadre de cette option sont limitees car les paiements prevus au calendrier d'amortissement de l'APD bilaterale (concessionnelle) sont faibles. Au cours de l'exercice 88, l'IDA a utilise une partie des remboursements re9us A offrir des credits supplementaires aux pays qui ne beneficiaient plus de prets de la BIRD, pour les aider A satisfaire leurs obligations de service sur leurs emprunts anterieurs aupres de la BIRD. En outre, l'IDA a affecte 100 millions de dollars pris sur ses revenus nets de l'exercice 89 pour financer, A titre gracieux, une nouvelle facilite qui est elle-meme destinee A financer la reduction de la dette commerciale des pays "IDA seulement" ayant des programmes economiques A moyen terme satisfaisants et un plan de service de la dette complet. 8.75 Au Sommet economique de Venice en 1987, les sept grands pays industriels (Groupe des sept) sont convenus que "pour ceux des pays les plus pauvres qui entreprennent des efforts d'ajustement, il convient d'envisager la possibilite de reduire les taux d'interet sur la dette existante, et de s'entendre, en particulier dans Ie cadre du Club de Paris sur des periodes de remboursement et des differes d'amortissement plus longs en vue d'alleger la charge de la dette". Depuis lors, les reechelonnements par Ie Club de Paris ont ete Ie reflet de cette nouvelle position, avec la Somalie, Ie Mozambique, Ie Malawi, Ie Niger et la Guinee- Bissau recevant des periodes d'amortissement de vingt ans assorties de differes d'amortissement de dix ans et sept autres pays d'Afrique subsaharienne recevant des periodes d'amortissement de 14 ans avec des diff~res de six ans. En 1988, les pays du Groupe des sept ont en outre adopte des mesures visant a reduire les obligations de service de la dette bilaterale des pays a tres faible revenu, en vue d'alleger leurs problemes de balance des paiements immediats. 8.76 Aux termes de l'accord du Sommet economique de Toronto de juin 1988, les dettes des pays qualifies pour les credits de l'IDA pourront etre reechelonnees, sur la base de l'une des trois options suivantes, au choix de chaque pays crediteur: a) remise d'un tiers du service de la dette sur les obligations reechelonnees par Ie Club de Paris; b) reechelonnement de toutes les obligations reunissant les conditions, A des taux du marche, mais avec des periodes d'amortissement tres longues (duree 25 ans et diffE~re d' amortissement de 14 ans); et c) reechelonnement de toutes les obligations reunissant les conditions, A des taux concessionnels, avec une longue periode d'amortissement (14 ans, dont huit ans de differe). Au milieu de 1989, l'initiative de Toronto avait ete appliquee A sept pays africains A faible revenu (Republique centrafricaine, Madagascar, Mali, Niger et Tanzanie en 1988; Senegal et Ouganda en 1989). 8.77 En mars 1989, Ie Secretaire americain du Tresor a demande au PMI et a la BIRD d'appuyer et d'encourager les efforts visant A reduire la dette commerciale de certains grands pays en developpement, en servant de catalyseur a de nouveaux financements. Par la suite, la BIRD et Ie PMI ont accepte qU'au cours des trois annees suivantes une proportion de leurs prets soit reservee a la reduction de la dette. On prevoit que Ie "Plan Brady" couvrira plusieurs pays d'Afrique subsaharienne. 8.78 Au-dela de ces initiatives, des propositions ont ete faites pour offr.I.r un allegement A long terme de la dette commerciale, aussi bien 'que pubLique. Parmi elles figure une proposition de la BAD (conjointement avec - 329 - la S.G. Warburg de Londres) qui sugg~re un plan de "mobili~risation" selon lequel des cr~ances 8 court 'et 8 moyen terme pourraient ~tre ~chang~es contre des bons 8 plus long terme ayant la m~me valeur faciale mais porteurs d'un taux d'int~r~t plus faible pour toute la dette, sauf pour les prAts concessionnels de cr~diteurs bilat~raux et les pr~ts des agences multilat~rales. D'apr~s la formule de 1a BAD, la dette admissible serait ~chang~e contre des bons 8 vingt ans, a rembourser d'un seul coup, portant un int~rAt fixe inf~rieur aux taux du march~. Au lieu de faire des paiements 8 une multitude de cr~diteurs, Ie d~biteur ferait alors des versements annuels 8 un fonds de rachat g~r~ par un conseil d'administrateurs. Cet organisme assurerait la gestion de l'actif du fonds de mani~re 8 racheter les bons au moment de leur ~ch~ance. 8.79 SWAPS CONTRE DES ACTIFS LOCAUX. Au cours des deux ann~es pass~es, des propositions ont ~t~ faites en vue de r~duire la pression sur les ressources en devises en proc~dant 8 des ~changes d'avoirs locaux - mat~riels ou financiers - contre des cr~ances. Le Nig~ria a d~j8 converti en nairas pr~s de 100 millions de dollars (8 la date de mai 1989) de billets 8 ordre et a re9u des demandes de conversion pour un montant approchant 1,6 milliard de dollars. Les types d'~changes de cr~ances varient grandement mais ils ont certaines caract~ristiques en commun. La plupart des arrangements permettent au d~biteur de partager la d~cote de la cr~ance, de d~terminer les secteurs de l'~conomie dans lesquels des participations pourront Atre prises, et de placer des restrictions sur les rapatriements de dividendes et de principal. 8.80 La forme d'~change la plus simple - dette contre participation - n'est que peu applicable 8 l'Afrique en raison du manque d'investissements apparemment possibles et de l'absence de march~s financiers d~velopp~s. La possibilit~ d'~changer des cr~ances contre des avoirs d'entreprises publiques est 8 l'~tude au Congo et au Togo mais, jUSqU'8 pr~sent, aucun accord de cette nature n'a ~t~ conclu. 8.81 De nouvelles formes innovatrices de conversion des dettes sont en train d'Atre explor~es. Par exemple plusieurs .~changes "dette contre nature" ont ~t~ propos~s. L'un des moyens consisterait a ~changer des cr~ances contre de la monnaie nationale, ou des bons int~rieurs, qui seraient d~tenus par une organisation ~cologique locale, laquelle proc~derait 8 des investissements dans des projets touchant a l'environnement. Un autre moyen consisterait a vendre des cr~ances a une soci~t~ multinationale pour appuyer des investissements ~cologiquement sains ou encore, en proc~dant plus directement, on pourrait lier l'all~gement de la dette officielle de mani~re a appuyer des actions en faveur de l'environnement. Le premier ~change dette contre nature a pris place en juillet 1987 en Bolivie sous forme d'un accord visant 8 prot~ger la forAt ombrophile bolivienne. Cette approche pourrait Atre ~largie de mani~re a couvrir toute forme d'accord du type "dette contre d~veloppement". Par exemple, en d~cembre 1988, la Midland Bank a donn~ au FISE sa part de la dette soudanaise (800.000 dollars) que Ie Gouvernement du Soudan a ensuite rachet~e en monnaie locale, les fonds ainsi lib~r~s ~tant utilis~s en faveur d'un programme d'eau, de reboisement et de sant~ dans la r~gion de Kordofan. Pour la Midland Bank, l'avantage ~tait que la donation pouvait Atre trait~e comme une d~pense lui permettant de r~duire ses impOts. - 330 - 8.82 Une variation possible consisterait pour Ie donateur, A acheter une cr~ance (avec une d~cote) puis A la passer A une ONG, ~tant entendu que Ie Gouvernement d~biteur rach~terait ensuite la cr~ance en monnaie locale ou en bons. L'ONG aurait alors la facult~ d'~changer les nouvelles cr~ances qU'elle d~tiendrait. La valeur des avoirs re~us dans cet ~change serait probablement inf~rieure A la valeur faciale de la cr~ance, mais elle serait sup~rieure A son prix d'achat. L'ONG pourrait utiliser ce proc~d~ A des fins de d~veloppement. Des ~changes d'instruments en monnaie locale de ce type ne sont utiles que si Ie pays dispose d'une ~pargne int~rieure suffisante; autrement, il peut en r~sulter des pressions inflationnistes. Dans la zone du franc CFA, les possibilit~s d'~changes de ce genre sont particuli~rement r~duites en raison de la convertibilit~ de la monnaie locale en francs fran~ais. 8.83 Le Congr~s des Etats-Unis a r~cemment autoris~ Ie Pr~sident A permettre, A partir de l'ann~e budg~taire 1990, A des pays d'Afrique subsaharienne d'assurer Ie service de leur dette envers Ie Fonds d'aide au d~veloppement et d'appui ~conomique en monnaies locales au lieu de dollars, et A renoncer compl~tement aux paiements de service de la dette dans certaines circonstances. Pour r~unir les conditions, Ie pays d~biteur devra avoir avec Ie FMI un accord de confirmation, un accord au titre de la facilit~ d'ajustement structurel (FAS) , ou de la FAS renforc~e, ou enfin un programme d'ajustement structurel convenu avec 1a BIRD. Impact des mesures d'all~gement de la dette 8.84 Beaucoup des initiatives ci-dessus ne s'appliquent qu'aux pays africains A faible revenu et il n'y a pas de programmes sp~ciaux comparab1es pour les pays africains A revenu moyen confront~s A une crise aigUe de leur dette. En Afrique, les pays A revenu moyen doivent faire face A des probl~mes de d~veloppement A long terme qui ne diff~rent pas notablement de ceux des pays A faible revenUe En fait, apr~s correction pour tenir compte de la sur~valuation de leur monnaie - dans Ie cas du· Nig~ria par exemple - certains de ces pays se retrouvent dans la cat~gorie A faible revenu et doivent @tre consid~r~s comme pouvant b~n~ficier des m@mes mesures d'all~gement de la dette que celles qui sont accord~es aux pays africains A faible revenu, A condition toutefois qu'i1s soient d'accor.d pour appliquer des programmes d'ajustement. 8.85 II Y a toute une gamme de probl~mes techniques et juridiques A r~soudre, sans parler des questions de "triche" et de moralit~. Chaque pays d~biteur a une situation et un profil d'endettement qui lui sont particuliers et la solution de ses probl~mes d'endettement do it @tre d~cid~e au cas par cas. Comme principe g~n~ral, on peut admettre qU'un all~gement de la dette ne doit @tre accord~ qu'aux pays qui sont A 1a fois surendett~s et pr@ts A adopter des r~formes en vue d'am~liorer leurs capacit~s de croissance et de service de la dette. Pour que les pays d~biteurs puissent r~ellement en b~n~ficier, les financements sp~ciaux d'all~gement de la dette ou les r~~chelonnements de dette concessionnelle doivent Atre v~ritablement "additionnels" et ne pas prendre la place de budgets d'aide d~jA affect~s aux pays b~n~ficiaires. Dans les pays ayant de groB pobl~mes d'arri~r~s, un financement relais peut Atre n~cessaire pour que les facilit~s d'all~gement puissent jouer. - 331 - 8.86 Les all~gements de dette ne peuvent jamais se faire sans coOt mais les dettes de 1 'Afrique, bien qu'elles aient des effets d~vastateurs pour l'Afrique elle-mame, ne sont que relativement mineures pour les cr~diteurs, par rapport! la dette mondiale. Des r~ductions de dette du type de celles consenties par les banques commerciales aux grands pays d'Am~rique latine ne seront probablement pas offertes ! l'Afrique et, ! certains ~gards notables, elles ne lui sont pas applicables. II ne faut compter sur des all~gements de dette importants ! partir d'argent frais dans Ie proche avenir et les r~~chelonnements conventionnels ne suffiront probablement pas pour produire l'allegement n~cessaire ! la reprise de la croissance. Pour la plupart des pays africains, Ie probl~me pr~dominant est celui de la dette pUblique. Les accords de Toronto vont dans la bonne direction mais il est clair qu'un allegement de plus grande port~e est n~cessaire. Etant donn~ la gravit~ des problemes de l'Afrique, sa pauvret~ et sa d~tresse sociale, en regard des gros avantages dont ont b~n~fici~ les consommateurs des pays cr~diteurs grAce A la baisse des prix des produits de base, il est raisonnable d'esp~rer que les mesures d'allegement permettront de maintenir les paiements de service de la dette dans les ann~es 90 ! leur niveau des ann~es 80 (environ 9 milliards de dollars par an), ou A un niveau inf~rieur. Tableau 8.4 - BESOINS D'APD EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE POUR LA PERIODE 1981-2000 (Milliards de dollars) Moyenne annuel1e Projections Projections 1981-85 1986 1990 2000 (Dollars courants) (Dollars de 1990) Transferts nets 5 8 12 19 (% du PIB) (3) (5) (8) (9) Paiements de service de 1a dette 9 9 9 9 Autres flux al 6 6 6 6 APD brute 8 11 15 22 a/ Comprennent les emprunts non concessionnels bruts, l'investissement prive exterieur direct net, les transferts prives nets, les changements des reserves et les erreurs et omissions. I - 332 - Besoins d'une assistance sp~ciale continue 8.87 Les hypoth~ses ci-dessus conduisent A des besoins d'aide publique au d~veloppement de l'ordre de 22 milliards de dollars (en prix de 1990) par an en l'an 2000 (voir tableau 8.4). Pour r~pondre Aces besoins, l'APD devra croltre de 4 % par an en termes r~els. En fait, c'est ce taux de croissance qui a ~t~ r~alis~ au cours des ann~es 80. Cependant, ~tant donn~ 1es perspectives actuelles d'aide, il risque de ne pas l'@tre pendant les ann~es 90 (A moins que la part d'APD al1ant aux pays A faib1e revenu n'augmente) car la r~affectation de fonds d'APD pris A des pays pauvres d'autres r~gions g@nerait s~rieusement leurs efforts de d~ve10ppement. A d~faut de fonds suffisants. Ie d~clin de l'Afrique se poursuivrait probablement dans les ann~es 90. Cependant, si les programmes sp~ciaux d'assistance en faveur d'Afrique peuvent continuer pendant une autre d~cennie, soit sous forme d'un montant total d'APD plus ~lev~, soit parce qU'une part plus grande de l'APD irait aux pays A faib1e revenu, l'Afrique devrait @tre capable de renverser son d~clin puis de passer A un plateau et, fillalement A une r~duction de l'aide. 8.88 11 est clair que les besoins d'APD de l'Afrique d~pendront du nombre de pays qui r~ussiront A introduire et A maintenir des programmes ~conomiques susceptibles A 1a fois d'accroltre l'efficacit~ de l'emploi de leurs l:essources et de mettre les questions de d~veloppement au centre de leur po1itique. Les bail1eurs de fonds doivent reconnaltre que pour eux Ie d~fi consiste A s'assurer que ces programmes de r~forme ne s'effondreront pas faute d'un financement ext~rieur suffisant. D~terminer ce qui est "suffisant" n'est pas une question de m~canique ~conomique. Dans certains cas, l'aide ext~rieure peut @tre trop abondante et par 1A saper l'engagement national envers un programme; dans d'autres cas el1e peut @tre insuffisante. C'est affaire de jugement. Dans ce domaine, les jugements doivent @tre faits d'une mani~re discip1in~e. Une d~cision concernant 1e niveau optimum d'assistance ext~rieure A accorder A un pays ne doit pas @tre influenc~e par des press ions politiques et bureaucratiques ~troites du cOt~ des bailleurs de fonds. Risques de tomber court 8.89 Etant donn~ 1es incertitudes du climat ~conomique mondial et les hypoth~ses optimistes d'une am~lioration de la capacit~ d'absorption et d'ex~cution de nombreux gouvernements africains, Ie sc~nario du tableau 8.3 ne peut @tre consid~r~ que comme une illustration. En fait, Ie risque de tomber court par rapport aux projections est s~rieux. Celles-ci pr~voient une am~lioration d'environ 50 % de l'efficacit~ des investissements par rapport aux ann~es 70. En outre, elles supposent que pendant les ann~es 90, l'~pargne domestique et 1es transferts nets, en pourcentage du PIB, augmenteraient de 50 %. En l'absence d'une augmentation du ratio transferts nets/PIB, Ie taux de croissance du revenu par habitant tomberait A 0,3 %. Avec une stagnation du taux d'~pargne int~rieur, Ie revenu par habitant serait lui aussi stagnant; enfin, si l'efficacit~ des investissements ne s'am~liore pas, Ie revenu par habitant baissera. De m@me, si l'am~lioration de ces trois param~tres n'est que la moiti~ de ce11e pr~vue, Ie revenu par habitant sera encore stagnant. Tout r~sultat inf~rieJr conduirait A une continuation du d~clin du revenu par habitant. - 333 - Dans un tel cas, il ne serait pas possible de s'attaquer efficacement au recul qui s'est produit dans des domaines tels que la s~curit~ alimentaire, la valorisation des ressources humaines, la d~gradation de l'environnement et de l'infrastructure - tous ~l~ments qui sont pourtant si essentiels A une croissance durable. II est clair qu'il ne s'agit pas d'une situation de tout ou rien; cependant, la marge est faible entre, d'une part, une avance modeste de la croissance et une am~lioration du bien-@tre des @tres humains, et d'autre part, une spirale de d~clin qui pourrait facilement devenir politiquement explosive. Composition de l'aide 8.90 En accord avec la strat~gie propos~e dans Ie rapport, il faut que l'APD soit de plus en plus centr~e sur l'appui des d~penses publiques en mati~re d'infrastructure sociale et mat~rielle. Le financement de l'ajustement structurel restera une composante importante de l'aide dans les ann~es 90 et au-delA mais il devra @tre plus s~lectif. Les pr@ts d'assistance technique devront @tre restructur~s et il faudra utiliser les ONG plus intensivement pour orienter l'APD, en particulier vers Ie d~veloppement par la base. 8.91 L'une des principales recommandations du rapport consiste A encourager l'instauration d'un climat permettant A l'agriculture et A l'industrie de croltre plus rapidement en r~ponse aux occasions se pr~sentant sur Ie march~ et aux changements techniques. M@me dans les pays africains d'ob~dience socialiste, ces secteurs sont domin~s d'une mani~re ~crasante par des agriculteurs et par des entreprises priv~es - traditionnelles, interm~diaires, ou de grande taille. II y a des possibilit~s, mais seulement des possibilit~s limit~es, d'une assistance directe du secteur public (y compris de la part des bailleurs de fonds) en faveur de ces unit~s de production. Cependant, l'appui de l'Etat et des bail leurs de fonds aux agriculteurs et entrepreneurs du secteur priv~ doit @tre indirect. II doit premi~rement encourager la mise au point d'un syst~me d'incitations refl~t~ par une am~lioration des politiques macro- ~conomiques et sectorielles. Deuxi~mement, l'appui indirect doit venir principalement du financement direct de l'infrastructure humaine (recherche et vulgarisation, ~ducation, sant~ et formation) et mat~rielle (routes, t~l~communications, production d'~lectricit~ et transports maritimes). Les am~liorations de la production et de la capacit~ agricoles et industrielles d~pendent d'abord de celles qui sont apport~es aux politiques et A l'infrastructure. II est essentiel de formuler des programmes publics de d~penses visant A la fois A r~duire les ~carts sociaux et A d~velopper l'infrastructure humaine et mat~rielle sur laquelle s'appuie la croissance. 8.92 Avant et pendant les ann~es 70, la strat~gie des bailleurs de fonds s'attachait surtout au financement de projets et de l'assistance technique correspondante en vue d'am~liorer l'infrastructure humaine et mat~rielle. Les r~sultats d~cevants de cette premi~re strat~gie les ont conduit, au cours des ann~es 80, A mettre l'accent sur des appuis financiers A d~caissement rapide en faveur de r~formes, principalement sous forme de prAts A l'ajustement structurel et sectoriel organis~s par la Banque mondiale ou Ie FMI. Ces deux strat~gies de pr@t ont eu leurs forces et leurs faiblesses. La question est de savoir comment elles pourront @tre - 334 - modifi~es au cours des ann~es 90 pour appuyer l'~volution des strat~gies de d~veloppement que nous avons ~voqu~es? 8.93 PRETS A CARACTERE SOCIAL ET PRETS DE DEVELOPPEMENT DE L'INFRASTRUCTURE. La composition de l'appui des bail leurs de fonds devra passer de plus en plus du financement des importations diverses dans le cadre d'un programme d'ajustement structurel au financement direct des d~penses locales de d~veloppement qui devront se faire en faveur de l'infrastructure mat~rielle et de la valorisation des ressources humaines. La plus grande partie des financements ext~rieurs ne doit pas se limiter A des prets-projets. Cela a souvent conduit A trop s'attacher A des investissements en briques et ciment et pas assez aux d~penses renouvelables en moyens d'instruction, m~dicaments, fonctionnement et entretien. En outre, les prets-projets des bailleurs de fonds ont fr~quemment ~t~ dirig~s vers des projets A forte intensit~ d'importations et ont ~t~ conduits sans tenir compte des distorsions qu'ils introduisaient dans les politiques et programmes sectoriels. Le financement ext~rieur par tranche des programmes sectoriels, ou d'un niveau inf~rieur, permet de s'entendre sur des modifications ~ventuelles en cours d'ex~cution, et d'~viter ainsi les risques d'apparition de distorsions. Cette fa~on de proc~der permettrait ~galement d'adapter plus facilement les financements aux progres r~alis~s en matiere de politique macro-~conomique aussi bien que sectorielle. Cette position aurait l'avantage d'offrir un ~l~ment d'automaticit~ souhaitable. Ainsi, si les bail leurs de fonds sont d'accord pour financer un certain pourcentage des d~penses de d~veloppement dans les domaines essentiels - valorisation des ressources humaines et infrastructure - les pays qui donneront la priorit~ A ces deux secteurs, recevront automatiquement une part plus forte de l'aide. 8.94 PRETS A L'AJUSTEMENT STRUCTUREL. Les pr~occupations de politique macrc,-~conomique et sectorielle seront toujours pr~sente pendant les ann~es 90 et au-delA. L'ajustement structurel n'est pas un effort conduit en une seule fois mais il reflete une ~valuation et une modification continues des prix, des taux de change, des mesures financieres et des autres dispc'sitions macro-~conomiques et sectorielles. Avec un taux de croissance d~mog,raphique sup~rieur A 3 % par an, les pays d'Afrique ne peuvent pas se perme,ttre de perdre une seule occasion d'am~liorer l'efficacit~ de l'emploi de leurs ressources en changeant sans cesse leur politique. En cons~quence, la question est de savoir comment les bail leurs de fonds pourront appuyer les programmes d'ajustement structurel le plus efficacement. 8.95 Les prets A l'ajustement structurel, tels qu'ils ont ~t~ pratiqu~s au cours des ann~es 80, seront encore n~cessaires. Ils lient directement le financement de la Banque mondiale et les financements bilat~raux A un programme convenu de r~formes macro-~conomiques et sectorielles. 11 faudra, plus que par le pass~. s'efforcer d'int~rioriser le processus et d'apporter un appui apres-coup aux mesures d~jA en vigueur, plutOt qu'un appui conditionnel A des promesses d'actions futures (voir chapitre 9). Dans les ann~es 80, il ~tait n~cessaire de pr~voir des conditions ex ante mais dans les ann~es90. l'Afrique subsaharienne sera arriv~e A un autre stade. Au fur et A mesure que les pays progressent. ils ont besoin d'appuyer des mesures qui sont d~jA en place. Pour aller dans - 335 - Ie sens de cette tendance, il sera souhaitable de renforcer les capacites de gestion des pays concernes. 8.96 ASSISTANCE TECHNIQUE. D'apres les rapports a ce sujet, l'assistance technique des bail leurs de fonds en faveur de l'Afrique a depasse 3 milliards de dollars en 1987. En moyenne, pour 42 pays d 'Afrique , elle a represente l'equivalent de 7 dollars par habitant. Les depenses concernant les aides volontaires ou benevoles et l'assistance technique incorporee aux projets d'equipement (soit 400 millions de dollars pour la Banque mondiale seulement) ne sont pas comprises dans ces chiffres. On estime que plus de 80.000 personnes travaillent en Afrique comme conseillers techniques. Ce total comprend des conseillers politiques au niveau des gouvernements, des directeurs d'organismes operationnels et des specialistes experimentes - techniciens, infirmiers ou enseignants. Ce haut niveau d'assistance technique doit ~tre vu face a l'enorme accroissement du nombre des Africains eduques, formes et experimentes depuis l'independance. L'expansion des ressources humaines africaines se poursuivra au cours de la prochaine generation. Les implications de cette evolution pour la politique d'assistance technique des donateurs doivent ~tre etudiees - en particulier si l'on considere que les attitudes des donateurs et des gouvernements africains envers l'assistance technique ont tres peu change au cours de la derniere generation. Dans Ie domaine de 1 'education, la plupart des pays d'Afrique ne dependent plus d'enseignants de l'assistance technique dans Ie primaire ni Ie secondaire. Cependant, dans de nombreux pays, c'est encore l'education qui re90it la plus grande part de l'assistance technique, suivie par l'agriculture et la sante. Dans de nombreux services des administrations centrales et des organismes operationnels, il y a de nombreux experts expatries. Par exemple, bien qu'une generation d'Africains ait ete eduquee et formee en economie, les ministres des finances et de la planification continuent a engager des expatries pour l'analyse des politiques. De nombreux gouvernements n'ont pas confiance dans leurs specialistes locaux et se laissent tenter quand on leur offre des expatries - qui souvent ne leur content pas cher. Cependant, au cours des quelques derni~res annees, de nombreux gouvernements - notamment Ie Kenya et la Cote d'Ivoire - et les donateurs sont devenus conscients de la necessite de modifier la politique d'assistance technique. On peut en voir un exemple encourage ant en Tanzanie o~ Ie renforcement des capacites d'analyse de la politique economique commence a donner des resultats (voir l'encadre 2.8). 8.97 L'assistance technique sera encore necessaire. Les specialistes en ingenierie, agronomie et finances continueront A ~tre rares. Cependant, les gouvernements africains aussi bien que les gouvernements donateurs doivent resister A l'envie de trop recourir A des expatries. De plus en plus, l'assistance technique devra servir A renforcer les capacites et institutions locales, alors que dans Ie passe cette mission passait apres celIe qui consistait A faire Ie travail. Le moment est venu pour que les donateurs orientent leur assistance technique vers Ie renforcement des capacites locales et l'accroissement du nombre des cadres locaux qualifies grAce A des programmes de formation. Le renversement de la tendance a exporter les cerveaux pourrait auss! faire partie d'une politique de ce genre. I. - 336 - 8.98 L'assistance technique n'est pas seulement une r~ponse A la p~nurie de sp~cialistes africains dans certains domaines mais elle est aussi le reflet de l'incapacit~ des institutions, en particulier dans le secteur public, d'attirer et de retenir des sp~cialistes locaux qualifi~s. 11 ne sera possible de moins compter sur les conseillers ~trangers que lorsque les questions de formation des nouveaux sp~cialistes n~cessaires et d'utilisation de ceux qui existent auront ~t~ r~solues. Avec l'~volution de la qualit~ des syst~mes ~ducationnels et l'instauration des r~formes du secteur public, la composition de l'assistance technique pourra @tre concentr~e plus directement sur la formation et, en d~finitive, @tre r~duite en termes absolus. Les donateurs des pays africains doivent se fixer des objectifs dans ce sens. 8.99 En attendant, on peut am~liorer la qualit~, la rentabilit~ et la gestion de l'assistance technique. Comme premi~re ~tape, les donateurs doivent rechercher des sp~cialistes comp~tents dans d'autres pays en d~veloppement. Une autre ~tape doit consister A encourager la formation de r~seaux et les jumelages, en particulier avec des institutions homologues dans des pays en d~veloppement dans lesquelles il y aura it plus de chances qU'ailleurs de trouver des sp~cialistes connaissant bien la situation des pays du Tiers monde. 11 est possible aussi de r~duire le coftt ~lev~ des conseillers et d'encourager un plus grand recours aux capacit~s locales en pr~voyant des postes A temps partiel, les conseillers venant p~riodiquement sur place, au lieu de servir A plein temps. Le choix des homologues et le suivi des performances ont ~galement besoin d'~tre am~lior~s. 8.100 11 est largement admis que l'assistance technique est mal g~r~e. Les gOllvernements b~n~ficiaires disposent rarement de donn~es sftres en ce qui concerne le nombre, la composition et la r~partition des conseillers techniques travaillant dans leur pays. En ce qui concerne l'emploi de l'assistance technique et son ~limination progressive, il n'ont pas non plus dt! politique clairement d~finie et li~e A des plans A long terme de valorisation des ressources humaines du secteur public. S'il y avait des plans de genre, ils pourraient servir A orienter non seulement les programmes int~rieurs de formation, mais aussi les programmes d'assistance technique eux-m@mes. Le PNUD a entrepris des ~tudes dans plusieurs pays A ce sujE!t. 8.101 LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES (ONG). Une strat~gie de dEiveloppement qui cherche A s'appuyer surtout sur le dynamisme des agriculteurs, des communaut~s locales et d'autres ~lEiments hors du secteur moderne a besoin d'@tre appuyEie du cOt~ des donateurs par une ~volution correspondante de 1a po1itique de financement. Ce besoin d'~volution a ~t~ reconnu. -De plus en plus, les donateurs font parvenir leur aide par l'interm~diaire d'ONG, de l'h~misph~re Nord aussi bien que d'Afrique. En 1987, les contributions officiel1es en faveur d'activit~s d'ONG se sont montEies A environ 2,2 milliards de dollars, ce qui repr~sente A peu pr~s 5 % de l'ensemble de l'APD. En outre, les pays du ComitEi d'assistance au dEiveloppement ont re9u quelques 3,3 milliards de dollars en fonds de dEiveloppement rassemblEis par des organismes privEis. 8.102 Ceci refl~te une conviction croissante que la plupart des ONG s'int~ressent aux probl~mes des sociEit~s traditionnelles et aux besoins de leurs membres les plus pauvres, probl~mes et besoins qui restent souvent - 337 - ignor~s des autorit~s officielles. Les ONG ont appris ~ travailler avec les organisations de la base et 1 mettre sur pied des projets avec un minimum d'aide financiere et d'assistance technique ext~rieure, aidant ainsi les pauvres 1 s'entraider (voir l'encadr~ 5.7). Ces activit~s s'opposent nettement 1 l'id~e courante que l'assistance officielle a cr~~ une d~pendance. Parmi les donateurs, les ONG ont fait preuve d'une souplesse et d'un dynamisme qui sont comparables 1 ceux des communaut~s dans lesquelles elles travaillent. En particulier, elles se sont ~cart~es de plus en plus des secours d'urgence pour s'orienter vers l'aide au d~veloppement, surtout dans les domaines de l'agriculture, de l'adduction d'eau, de la nutrition, de l'~ducation et de la sant~. Elles ont obtenu de nouveaux appuis chez les pays donateurs, en partie parce qu'elles sont per~ues comme aidant directement les pauvres, sans interm~diations bureaucratiques coQteuses des donateurs et des gouvernements b~n~ficiaires, et sans les dangers de voir l'assistance aboutir dans les poches des riches, des militaires et des gens corrompus. 8.103 Les points forts des ONG sont impressionants mais ils sont parfois exag~r~s. Le renforcement des institutions locales s'est r~v~l~ difficile et il est courant que des projets ~chouent apres Ie d~part du personnel des ONG. L'une des principales questions qui se posent est de savoir comment tirer parti des r~ussites locales pour fournir rationnellement des services. Le danger serait de recourir encore plus aux ONG de l'h~misphere Nord pour r~partir l'aide, ce qui aurait pour effet de les surcharger et de leur faire perdre l'avantage de la souplesse, de l'ind~pendance et des frais g~n~raux peu ~lev~s qui ont fait jusqu'l pr~sent leur efficacit~. Certaines ONG sont en train de r~agir en cr~ant des d~tachements locaux pour ~largir et d~centraliser leurs op~rations. D'autres cooperent directement avec les gouvernements, ou parallelement, pour d~velopper plus rapidement les capacit~s des ONG africaines (voir l'encadr~ 8.3). Les activit~s de formation, d'assistance technique et de constitution de r~seaux de diffusion d'informations techniques chez les ONG africaines figurent parmi les activit~s poursuivies. Un grand nombre des difficult~s rencontr~es refletent celles qui caract~risent 1es rapports entre les donateurs officiels et les gouvernements - c'est-A-dire la n~cessit~ d'~tre moins dirigiste, de faire confiance aux organismes locaux et de s'~carter des pr~ts-projets pour s'orienter vers des pr~ts appuyant des programmes plus larges. L'une des difficult~s consiste 1 d~cider ~ quel moment il faut appuyer financierement une ONG locale - si on Ie fait trop tOt, on risque d'affaiblir ses motivations altruistes; si on Ie fait trop tard, on mine les efforts visant 1 faire progresser les projets d'adduction d'eau, d'organisation d'~coles, etc. Dans certains pays, il n'est pas inhabituel que les ONG critiquent les mesures prises par l'Administration en particulier quand elles sont per~ues comme d~favorables aux classes d~savantag~es; dans les cas de ce genre, il serait souhaitable que l'Administration adopte une attitude tol~rante. Tous ces problemes sont en fait des problemes de r~ussite; chacun d'eux sera r~solu en son temps; tous r~clament d'~tre prudents et d'~viter de distribuer l'argent aveugl~ment aux institutions, projets et programmes. 8.104 INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE. Le rapport a fait ressortir la n~cessit~ d'une int~gration r~gionale si l'on veut obtenir un d~veloppement durable en Afrique. Cependant, la rationalisation des institutions r~gionales, les r~formes des politiques et Ie renforcement des - 338 - infrastructures sociales et materielles, pourtant si necessaires, ne peuvent se faire sans argent dont une grande partie devra provenir de donateurs. Ceci exigera d'eux une reorientation de leur politique d'aide en faveur de l'echelon regional, plutOt que des pays pris individuellement. 11 y a dejA des propositions innovatrices de financement d'une harmonisation des reformes parmi les pays d'une m@me region, comme par exemple celle de l'Union douani~re et economique de l'Afrique centrale (UDEAC) · 8.105 Tout ceci sugg~re une evolution necessaire de la repartition sectorielle de l'aide au developpement pendant les annees 90. La composition de l'aide devra varier d'un pays A un autre et d'un donateur a un autre. Cependant, il peut @tre utile de donner quelques indications approximatives sur les changements impliques par la strategie proposee. Au cours des derni~res annees, l'infrastructure sociale, l'infrastructure materielle, les secteurs productifs, l'assistance technique et l'aide- programme ont beneficie chacun d'environ 20 % de l'APD. La strategie proposee fait appel a une augmentation de l'aide en faveur de l'infrastructure sociale et materielle et A une reduction (en termes relatifs) de l'aide publique directe A 1 'agriculture , l'industrie, l'assistance technique et 1 'aide-programme. La composition suggeree est de 25 % pour l'infrastructure sociale, 25 % pour l'infrastructure materielle et 50 % pour le secteur public, l'assistance technique et 1 'aide-programme. A ces niveaux, l'APD couvrira environ la moitie de toutes les depenses publiques de valorisation des ressources humaines et d'entretien et amelioration de 1 'infrastructure. L'assistance technique et l'aide- programme seront maintenues A leurs niveaux actuels pendant les dix annees A venir. Les investissements dans les secteurs productifs quant A eux, devront faire appel de plus en plus au secteur prive, localement et a l'etranger. Efficacite de l'aide 8.106 Les niveaux de l'APD devront correspondre de plus en plus aux performances ex post. La communaute du developpement, y compris 1 'Afrique , devra mieux s'organiser pour combattre la gabegie et les "erreurs" evidentes d'emploi des fonds publics. 8.107 Les besoins estimes de ressources exterieures des pays africains atteignent des chiffres considerables et ils continuent de monter. Ils representeront environ 32 dollars par habitant en l'an 2000, au lieu de 26 en 1986 et de 14 A 18 dans les pays d'Asie septentrionale comme le Bangladesh et le Nepal. Les raisons d'accorder une aide plus grande A l'Afrique resident dans le besoin particulier A ce continent de b&tir son infrastructure materielle et humaine et de renforcer ses capacites de developpement. Cependant, il faut qu'A cette preference corresponde la conviction que les ressources exterieures seront bien utilisees. 8.108 Une aide exterieure atteignant un tel niveau, dispensee pendant toutes les annees 90 et au-delA, ne risque-t'elle pas d'aggraver une dependance existante ou de la creer? L'aide genereuse des donateurs ne - 341 - Encadr~ 8.1 Botswana - gestion ~conomique des fortes fluctuations des produits de base Les fluctuations prononc~es des prix des produits ont exerc~ des effets n~gatifs sur la croissance de beaucoup de pays africains exportateurs de produits primaires. Les d~penses excessives qui accompagnent les p~riodes de "boom" sont g~n~ralement suivies par des compressions domageables lorsque les recettes s'effondrent. Bien que Ie Botswana d~pende fortement de son secteur minier qui a peu de liaisons avec Ie reste de l'~conomie, ce pays constitue a cet ~gard une exception. Le Botswana a relativement bien r~ussi a g~rer les hautes et basses conjonctures parce que Ie gouvernement ~vite d'augmenter excessivement les d~penses publiques, mais accumule plutOt des r~serves internationales et des d~pOts a la Banque centrale pour utilisation une fois que Ie boom aura pris fin. Lorsque Ie march~ du diamant a fl~chi en 1981, personne ne pourait pr~dire la gravit~ ou la dur~e de la crise. Le gouvernement a adopt~ sans tarder tout un train de mesures d'ajustement, compris un abaissement du taux de change, une r~duction du cr~dit bancaire, ~.le majoration des taux d'int~r~t, une compression des d~penses publiques et un blocage des r~mun~rations du secteur public. Par la suite, alors que la balance des paiements ne faisait que s'am~liorer, Ie principal d~fi qui se posait au Gouvernement ~tait de savoir comment il devait g~rer les ressources consid~rables que lui procuraient les exportations pour promouvoir une croissance ~conomique soutenue. Devant des exc~dents des paiements ext~rieurs courants s'~l~vant a quelque 13% du PIB en 1984-86 (et m~me a 37% en 1987) Ie gouvernement a pris comme politique de st~riliser environ 60% de la masse salariale. A la diff~rence des autres pays exc~dentaires, Ie Botswana a d~valu~ son taux de change r~el de 42% en 1980-87 pour faire en sorte que sa strat~gie de diversification de l'~conomie ne so it pas compromise. Un ~l~mentqui a sftrement contribu~ A 1a prosp~rit~ du Botswana est la continuit~, au sein de son gouvernement, depuis son ind~pendance, d'une direction exp~riment~e dans la gestion macro~conomique. Parmi les principaux d~cideurs, beaucoup Ie sont depuis bien des ann~es; aussi ont-ils particip~ a la longue s~rie de d~bats sur les questions ~conomiques. Les principaux chefs politiques reconnaissent l'importance de la dimension ~conomique des probl~mes auxquels ils sont confront~s et ont acquis de l'exp~rience dans la mise en balance des diverses consid~rations, ~conomiques et autres. La tradition de discussion franche et ouverte sur les probl~mes auxquels Ie peuple du Botswana est confront~ a permis au Gouvernement d'arriver a un consensus sur les politiques a long terme. Les principales d~cisions ne sont prises qu'au terme de consultations tr~s pouss~s au sein de l'administration et dans Ie cadre de francs d~bats au parlement. C'est pourquoi les politiques ainsi adopt~es r~sistent A l'usure du temps. - 342 - Encadr~ 8.2 Burkina Faso: Economies r~alis~es dans l'achat de produits p~troliers Le Burkina Faso est un pays enclav~ situ~ A 1000 km du port Ie plus proche. C'est pourquoi il a ressenti les cons~quences de la derni~re crise p~troli~re beaucoup plus rapidement que d'autres pays. Instruits par cette exp~rience, les pouvoirs publics ont pris toute une gamme de mesures courageuses pour s'assurer un approvisionnement Ie moins coQteux possible en produits p~tro liers. Parmi ces mesures figure la diversification des sources d'approvi- sionnement et des ports de d~barquement, ainsi qu'une am~lioration notable de l'infrasturcture nationale et des installations de stockage. Ce processus a ~t~ amorc~ A la suite d'une ~tude des cons~quences finan- ci~res des approvisionnements en carburants, du transport de ceux-ci et de la gestion de leur stockage. La Soci~t~ nationale des hydrocarbures de Burkina (SONABHY), soci~t~ d'Etat cr~~e en 1985, s'est vu confier en exclusivit~ la tache de superviser tous les aspects du secteur p~trolier. L'achat de produits petroliers a ~t~ base sur des negociations bilat~rales avec l'Algerie, Ie Nig~ria et, plus r~cemment, Ie Br~sil. Dans Ie but de diversifier les ports de d~barquement, les autorit~s ont men~ des n~gociations officielles en vue d'un transit pr~f~rentiel par Lom~, Cotonou et Tema. Afin d'ameliorer la capacit~ de stockage, elles ont conclu avec les compagnies p~troli~res priv~es un accord qui pr~voit Ie stockage de r~serves pour 60 jours, l'Etat s'engageant A leur fournir des emplacements pour leurs r~servoirs et A autoriser des pr~ts bancaires pour l'am~lioration des infrastructures et l'importation des v~hicules de transport Ces mesures ont eu les r~sultats suivants: * La SONABHY ach~te les produits p~troliers aupr~s des fournisseurs les moins chers par appel d'offres international sur Ie march~ du disponible A Rotterdam, soit isol~ment, soit en association avec un pays voisin. Ce groupement donne lieu A une baisse du prix d'achat et des frais de transport; * Les approvisionnements sont obtenus via les ports de Lom~, Cotonou et Tema, un plus grand nombre de points de vente de produits p~troliers ont ~t~ ouverts et les wagons-citernes sont mieux utilis~s parce que chaque compagnie p~troli~re s'en sert; * Les ~conomies r~alis~es sur la diversification des fournisseurs et des transports sont estim~es A 6 millions de dollars E.U. par an. En ()utre, les pays voisins profitent de l'initiative, tant les pays enclav~s (Mali et Niger) que les pays cOtiers (Togo, COte d'Ivoire, B~nin et Ghana). La partie m~ridionale du Mali est approvisionn~e A partir de Bobo- Dioulasso et une partie du Niger pourait l'&tre A partir d'Ouagadougou, dont Niamey n'est distant que de 500 km. Des effets positifs indirects sont exerc~s par l'activit~ ~conomique accrue enregistr~e dans les secteurs des transports, de la banque et de l'assurance, de m&me que par les am~liorations apport~es A l'infrastructure. En outre, Ie syst~me a pu jusqu'ici s'auto- financer, sans mise de fonds initiale de l'Etat. - 343 - Encadr~ 8.3 Togo. Une collaboration prometteuse avec les ONG Le gouvernement du Toto a pris l'initiative de renforcer les organismes non gouvernamentaux (ONG) nationaux; c'est la un exemple remarquable de partenariat qui vise a ~tablir un cadre institutionnel novateur pour la collaboration entre l'Etat et les ONG. Dans Ie m~me temps, l'Etat accorde directement son soutien financier aux projets de d~veloppement patron~s par les ONG. Tout cela s'ins~re dans un programme national de participation au d~veloppement, programme qui pr~voit des micro-projets amorc~s et r~alis~s au niveau des collectivit~s et qui vise a favoriser la participation effective de ces collectivit~s a la cr~ation et au renforcement de capacit~s et d'institutions locales et a mobiliser des ressources concessionnelles suppl~mentaires pour les initiatives de d~veloppement a petite ~chelle. Au coeur de ce nouveau cadre se situe un comit~ de direction OU sont repr~sent~s paritairement l'administration et les ONG. Le gouvernement lui a confi~ Ie mandat limit~ mais autonome de choisir les projets des ONG qui doivent ~tre financ~s, de d~terminer la politique a suivre ainsi que d'en diriger 1 'application, enfin de servir de lieu de rencontre pour Ie dialogue sur l'ex~cution du programme. Le gouvernement a cr~~ au sein du Minist~re du plan et des mines une division sp~ciale (PDLP/ONG) charg~e de coordonner et d'administrer Ie programme et d'assurer la liaison avec les diverses ONG et l'assocation des ONG (FONGTO). Dans Ie cadre d'un programme pilote, l'administration et les diverses ONG ont ~t~ aux prises avec les probl~mes pratiques de la coop~ration et ont pers~ver~ dans leurs efforts pour arriver a un consensus. Leur exp~rience fait mieux comprendre la dynamique de la mise en place d'un partenariat efficace entre l'administration et les ONG: * Le respect pour Ie rOle et la contribution de chaque partenaire exige que Ie cadre de collaboration puisse soutenir un ~quilibre parfois pr~caire entre, d'une part, l'ind~pendance et l'autonomie des ONG et, d'autre part, les pr~occupations et priorit~s l~gitimes du gouvernement. * Une direction politique activement bienveillante est une condition essentielle du succ~s: elle renforce Ie respect et la confiance mutuels, favorise la prise de conscience de la compl~mentarit~ de la relation et fait en sorte que les organismes d'Etat facilitent Ie travail des ONG. * Le partenariat et la participation jouent un rOle important dans les rapports entre les ONG et les collectivit~s qu'elles servent (comme dans les rapports entre les ONG et l'administration). Si l'on veut que les projets puissent @tre soutenus et soient rentables a long terme, les collectivit~s doivent ~tre associ~es plus explicitement a la conception et a la mise en oeuvre et doivent pouvoir d~finir leur propre contribution. L'exp~riencedu projet pilote a d~gag~ un double enseignement. Premi- ~rement, Ie choix des repr~sentants des ONG appel~s a si~ger au comit~ de direction s'est r~v~l~ difficile et controvers~, ce qui montre que les ONG sont autonomes et ind~pendantes non seulement par rapport a l'Etat mais aussi I' - 344 - entre elles. II s'est av~r~ que l'assocation des ONG ne peut servir de lieu de dialogue et de base de participation A un cadre collectif comme Ie comite de direction que si ce rOle est accepte par l'ensemble des ONG. Deuxi~mement, Ie programme pilote avait defini tr~s imparfaitement Ie rOle et les fonctions du comite de direction; en outre, son autonomie et son pouvoir de d~cision n'etaient initialement pas pleinement acceptees par 1 'administration. Ce manque de clarte en mati~re d'autorit~ et de pouvoir de d~cision a men~ a des actions qui ont effectivement sap~ l'autorit~ du comit~ et qui ont gravement indispos~ les ONG. Elle a ~galement r~v~l~ les limites organisationnelles et operationnelles des ONG, ce qui fait ressortir Ie n~cessit~ de renforcer les capacit~s d'~valuation technique des projets propos~s et de suivi de leur ex~cution. Le programme pilote a profite ccnsid~rablement aux deux parties, si bien que Ie cadre institutionnel de collaboration entre l'Etat et les ONG s'en est trouve renforc~. Le gouvernement a r~affirm~ sa ferme volont~ de d~l~guer les prises de d~cision au comit~ de direction et a r~organise la division PDLP/ONG en consequence. L'accord s'est fait sur les crit~res d'admissibilite des ONG et de choix des projets et des directives pour la declaration et l'administration des operations des ONG ont ete ~laborees. Un nouveau projet de developpement des initiatives venant de la base sera finance par l'IDA; il doit soutenir les activites de developpement des ONG au niveau de collectivites et renforcer la capacite des ONG locales A concevoir et A g~rer leur :orojets, ce qui aidera les autorites comme les ONG A consolider et A approfondir un partenariat si prometteur. - 345 - Encadr~ 8.4 Rwanda: bangues populaires Les objectifs des banques populaires sont de mobiliser l'~pargne rurale, octroyer des pr~ts A des fins de production, et d'appuyer et stimuler les coop~ratives. Depuis 1975, ann~ee ou elles ont commenc~ A fonctionner, ces banques sont devenues les plus importantes institutions financi~res du Rwanda dans les r~gions rurales et celles qui se d~veloppent Ie plus rapidement. Les Banques populaires sont une r~ussite car : elles sont bas~es sur un syst~me "mutualiste" bien adapt~ aux r~gions qu'elles desservent; elles sont situ~.es surtout dans les r~gions rurales non desservies par d'autres institutions financi~res et par cons~quent tirent parti de la . propension A ~pargner relativement forte de la population rurale; elles offrent un m~canisme appropri~ pour fournir de petits pr~ts pour les besoins ~l~mentaires, l'agriculture et les activit~s des microentreprises dans les r~gions rurales. L'Union suisse des banques Raiffeisen a aid~ les Banques populaires a pr~parer l'op~ration, A former les techniciens et couvrir les frais de d~marrage. Le Gouvernement subventionne les pr~ts agricoles depuis 1983, mais ces subventions diminuent chaque ann~e. Pour ouvrir de nouvelles succursales, Ie personnel du bureau central passe plusieurs mois dans la r~gion A familiariser les membres de la communaut~ avec l'objectif de l'institution. Ceux qui s'inscrivent comme membres peuvent acheter dix actions et ont droit A effectuer des d~pOts, recevoir des pr~ts, et voter A l'assembl~e g~n~rale annuelle locale, OU Ie Conseil d'administration et Ie Conseil de supervision sont ~lus. Le Conseil d'administration de la succursale, a son tour, ~lit les repr~sentants au Conseil national, qui fixe la politique g~n~rale. Le Conseil d'administration approuve les pr~ts et, pour ce faire. les membres du Conseil re90ivent une formation en analyse, approbation et proc~dures de supervision des pr~ts. Les superviseurs du bureau central inspectent les succursales et un d~l~gu~ du bureau central participe aux r~unions sur l'approbation des pr~ts. G~n~ralement une succursale n'a qu'un agent des Banques populaires dont la responsabilit~ principale est d'enregistrer les transactions, soumettre les relev~s mensuels au bureau central, et informer Ie Conseil d'administration des arri~r~s de remboursement de pdts. Les succursales sont pour la plupart situ~es dans les r~gions rurales et les principaux d~posants sont de petits ~pargnants ayant dans leur livret environ 13.650 francs rwandais (170 dollars). En 1988, 102 succursales avaient ~t~ ~tablies et l'objectif vis~ est d'ouvrir au moins une succursale dans chacune des 143 communes du Rwanda. Entre 1980 et 1988, les d~pOts aupr~s des banques commerciales et des caisses d'~pargne ont augment~ 279 % de tandis que les d'pOts aupr~s des Banques populaires ont augment~ de 726 %; les avoirs totaux, fonds propres et recettes ont doubl' en valeur courante. Cette - 346 - r~ussite s'explique en partie par Ie fait qu'il y a tr~s peu de banques commerciales dans les r~gions rurales; Ie seul autre syst~me d'~pargne, les tontines, utilisent souvent les services des Banques populaires pour g~rer leurs fonds. Le bureau central fixe Ie montant maximum de prAts que peut approuver chaque succursale, sur la base de la qualit~ de son portefeuille et de l'augmentation des d~pOts. La r~gle consiste A octroyer de petits prAts A beaucoup de gens plutOt que de gros prAts A une poign~e de particuliers. Bien que les agriculteurs fournissent plus de la moiti~ des d~pOts, jusqu'en 1988 ils ont re~u environ 31,4 % des prAts car les activit~s commerciales et de construction ont ~t~ favoris~es. Les Banques populaires ont maintenant commenc~ A modifier la composition de leur portefeuille de prAts. Certaines des initiatives donnent des r~sultats encourageants, mais la diversification est entrav~e par l'absence de services de formulation des projets et de personnel comp~tent. Par rapport A d'autres institutions financi~res de d~veloppement, un intervalle de 30 A 60 jours entre la demande de prAt et Ie d~caissement est une moyenne favorable. Les d~penses administratives totales et les conts de personnel peuvent Atre ~galement compar~s favorablement A la plupart des programmes de cr~dit rural dans les pays en d~veloppement. L'exploitation des succursales a ~t~ rentable; cependant en raison des conts de supervision des succursales (par Ie bureau central), l'institution dans son ensemble n'est plus rentable, mais les pertes nettes diminuent. En 1988, les Banques populaires ont atteint un ~quilibre financier consolid~, assistance ~trang~re non comprise. Fonctionnant sur Ie principe mutualiste bien ancr~ dans la soci~t~ rwandaise, les banques populai.res semblent Atre de nature A d~velopper Ie syst~me financier. Elles ont eu beaucoup de succ~s au niveau de la mobilisation de l'~pargne car la population rurale appr~cie l'avantage et la s~curit~ que conf~rent les livrets de banque. De mAme elles ont relativement bien r~ussi A mettre au point un m~canisme de prAt appropri~ pour les petits prAts en faveur des am~liorations agricoles et des microentreprises dans les r~gions rurales, activit~ qui est difficile en soi. Les op~rations ont ~galement ~t~ favoris~es par l'environnement relativement stable et Ie faible taux d'.inflation. - 347 - CHAPITRE 9 Un programme strat~gique pour les ann~es 90 9.1 L'Afrique risque de connaltre un avenir tragique. Cette menace ne pourra ~tre ~vit~e que si l'on agit imm~diatement. Toutefois, il n'existe pas de solutions rapides, ni de programmes d'action simples. Si l'on teconnalt g~n~ralement la gravit~ des probl~mes, leur complexit~ rend extr@mement difficile une collaboration efficace entre les nombreux partenaires qui oeuvrent pour Ie d~veloppement de 1 'Afrique les gouvernements africains, les organismes bilat~raux et multilat~raux et les ONG, locales et ~trang~res. II est temps de rechercher les domaines d'accord et de passer des paroles aux actes. La recherche de domaines d'accord 9.2 Pour r~ussir Ie processus de d~veloppement, il faut concevoir et appliquer des politiques a peu pr~s correctes et ~viter les erreurs d~sastreuses et non pas disposer seulement d'un petit nombre de politiques parfaites. II faut ~viter tout dogmatisme dans la d~finition de programmes d'action communs. Fort heureusement, dans la pratique, les d~saccords sont peu nombreux. Un examen des nombreux rapports officiels sur l' Afrique publi~s pendant les ann~es 80 par les Africains, Ie syst~me des Nations Unies et d'autres organismes multilat~raux r~v~le nombre de positions communes. De plus, les divergences se sont nettement att~nu~es pendant les ann~es 80. Toutefois, la notion g~n~ralement partag~e selon laquelle il y aurait d~saccord est elle-m@me source d'inaction. II convient donc de d~terminer les points de vue communs, si l'on veut r~ussir la collaboration. 9.3 Le consensus qui se fait jour concerne aussi bien Ie diagnostic que les principaux objectifs. Quel que soit Ie point de vue politique sous lequel on se place, l'on convient g~n~ralement qu'il faut accorder la priorit~ absolue a la valorisation des res sources humaines et au d~veloppement des institutions; que l'agriculture a un rOle fondamental du point de vue de l'augmentation des revenus et de la s~curit~ alimentaire; qu'il convient d' accorder beaucoup plus d' attention a la protection de l'environnement et qu'il faut favoriser la petite entreprise et les organisations au niveau de la collectivit~ et promouvoir la participation des femmes au d~veloppement. Les probl~mes complexes devront ~videmment @tre r~solus sur Ie plan technique. Les sp~cialistes poursuivront leurs ~changes de vues par exemple, sur la politique des changes, Ie recours au protectionnisme pour favoriser la croissance industrielle, ou m@me sur les meilleurs moyens de renforcer la recherche agricole. Ces d~bats sont un ~l~ment n~cessaire de la qu~te permanente de solutions et ne portent nullement atteinte au consensus g~n~ral sur les objectifs, qui est Ie point de d~part de la collaboration. 9.4 Dans un petit nombre de cas, les objectifs eux-m@mes continuent de faire l'objet de vifs d~bats. Tout bien pes~, l'on constate beaucoup plus de domaines d'accord que de divergences. Les questions ayant fait l'objet d'un consensus peuvent @tre regroup~es sous trois grandes rubriques. La n~cessit~ de restructurer les ~conomies africaines 9.5 En p~riode de crise ~conomique et financi~re, les responsables tendent fatalement a privil~gier la stabilisation sur Ie d~veloppement a long terme. Aucun ~tat ou pays ne peut en effet fonctionner longtemps s' il I - 348 - enregistre d' importants d~s~quilibres macro-~conomiques. Toutefois. 1 'on reconnalt aussi g~n~ralement que les probl~mes ~conomiques de l'Afrique sont si profonds qu' ils ne pourront @tre r~solus au moyen de progranunes de stabilisation classiques. Peu de gouvernements doutent que l'actuel malaise ~conomique de l' Afrique appelle des r~formes hardies. En fait, les deux tiers des pays d' Afrique ont entrepris une certaine forme d' ajustement structurel. Le succ~s de ces programmes est un pr~alable 8 toute strat~gie a long terme. Le probl~me 8 r~soudre est d'aller au-de18 de la stabilisation pour v~ritablement transformer les structures de production (comme la Commission ~conomique des Nations Unies pour l'Afrique l'a r~cemment soutenu) et de faire ainsi passer les ~conomies africaines de la stagnation 8 une croissance robuste. 9.6 Les programmes d'ajustement structurel n~cessaires sont complexes et difficiles. lls n~cessitent d'@tre examin~s et modifi~s en permanence. La plupart d'entre eux visent d~j8 8 mettre en place des mesures qui favoriseront l'initiative priv~e, r~duiront les contrOles r~glementaires et ~largiront Ie rOle des m~canismes du march~. Des r~formes de ce type sont en cours dans Ie monde entier. Elle vi sent 8 promouvoir (plutOt qu' a contrOler) Ie d~veloppement. A cet ~gard, en Afrique, aucune mesure n'est plus c:ontrovers~e que la d~valuation. Mais 18 aussi, les opinions ont ~volu~. Plusieurs pays - Ie Nig~ria, Ie Ghana, la Guin~e et la Gambie pour ne citer que quelques-uns - ont appliqu~ des politiques des changes hardies. Les r~sultats sont in~gaux, mais prometteurs. La croissance s'est g~n~ralement acc~l~r~e. Corriger la sur~valuation des taux de change est une condition n~cessaire, mais pas suffisante de la reprise ~conomique : telle est la le~on que l'on peut tirer des exp~riences en cours. Les modifications des tallX de change, pour @tre r~ellement b~n~fiques, doivent ~tre appuy~es par dElS mesures rigoureuses - en particulier une politique d' aust~rit~ salari.ale et de discipline fiscale - pour juguler I' inflation. 9.7 L'on convient aussi universellement qu'il importe d'associer, aux mesures f iscales et mon~taires, des dispositions visant a minimiser les incidences sociales n~fastes de l'ajustement et en particulier a r~orienter la d~p'E!nse publique en faveur de l' enseignement fondamental, de la sant~ et de la nutrition. Pour ce faire, les pouvoirs publics auront besoin de meillellrs renseignements sur les indicateurs sociaux de base. Plusieurs pays ont r~cemment lanc~ des progranunes visant 8 prendre en compte les dimensions sociales de l'ajustement. La r~duction des effectifs pl~thoriques du secteur public est particulierement douloureuse. Pour pallier au bouleversement social r~sultant de cet ajustement n~cessaire mais douloureux, l'on peut indemn.lser le personnel licenci~ et l' aider a trouver un emploi dans Ie secteuI' priv~; des programmes de ftvivres c~ntre du travail" peuvent ~galement att~nul~r Ie choc, en servant de filet de s~curit~ a ceux qui n'ont pas d'autres sources de revenus. 9.8 De nombreux gouvernements africains ont entrepris une difficile r~~valuation du rOle de l'Etat. Par Ie pass~, la r~flexion th~orique des responsables africains ~tait domin~e par la dichotomie entre les modHes capitaliste et socialiste de d~veloppement. L'exemple nordique de . d~veloppement (voir encadr~ 9.1, ci-aprh) illustre un autre modiHe de d~veloppement, o~ l'Etat prend I 'initiative pour ce qui est de la valorisation des res sources humaines, de l' appareil administratif et des infrast.ructures physiques alors que la souplesse et les incitations de - 349 - l'entreprise priv~e et la discipline du march~ peuvent jouer librement dans les secteurs de la production de biens et les services aut res que ceux conGernant lesinfrastructures. Priorit~ · la personne humaine 9.9 Am~liorer la sant~, propager les services d·enseignement. assurer la s~curit~ alimentaire. cr~er des emplois telles sont les priorit~s communes de tous les partenaires du d~veloppement de l·Afrique. Tout Ie reste - la croissance ~conomique, la politique fiscale. la gestion des taux de change etc. sert simplement · atteindre l ' obj ectif fondamental am~liorer la qualit~ de la vie. La r~duction de la pauvret~ est g~n~ralement consid~r~e comme l'objectif fondamental. VUNICEF souligne · juste titre que les pauvres et les enfants sont ceux qui pAtissent Ie plus de politiques ~conomiques inadapt~es. C'est pourquoi tous les partenaires du d~veloppement de l'Afrique souscrivent · l'appel lanc~ par l'UNICEF en faveur d'un ajustement structurel · visage humain - comme Ie d~montre l'appui remarquable dont jouit Ie programme commun visant · prendre en compte les dimensions sociales de l'ajustement (voir encadr~ 9.2, ci-apr~s). 9.10 Le bien-~tre de l'homme est ~troitement li~ · la limitation de la croissance d~mographique. Peu de questions pr~tent plus · controverse. Toutefois, ces dix derni~res ann~es. les pays d' Afrique ont repens~ leur position en mati~re de planification familiale. La grande majorit~ des participants · la conf~rence des ministres africains de la sant~. tenue en janvier 1989 au Niger, s'est prononc~e en faveur d'une politique d~mographique active alors que les Africains pr~sents · la Conf~rence mondiale de la population, · Bucarest. il y a 15 ans,· s'~taient pour la plupart opposh · de telles mesures. Plusieurs gouvernements ont d~j. commenc~ · mettre en place des programmes efficaces de planification familiale. L'action en faveur de l'autosuffisance 9.11 Promouvoir l'autosuffisance des pays d'Afrique : cet objectif. qui rencontre un large ~cho, a ~t~ consacr~ dans l'Acte final de la Conf~rence de Lagos et a g~n~ralement l'aval des partenaires de l'Afrique. Cela veut dire qu'il faudra am~liorer les moyens dont disposent les pays d'Afrique de telle sorte qu'ils puissent assumer l'enti~re gestion de leur ~conomie, sur les plans technique et administratif - c'est 1. un des th~mes principaux du pr~sent rapport. Une mesure importante consisterait · cr~er des associations professionnelles et de formation de haut niveau (sur des bases r~gionales et nationales), pour disposer de sp~cialistes de premier plan dans tous les domaines techniques et professionnels. 11 faud·ra veiller particuli~rement · accroitre les services de formation scientifique et technique de qualit~. de sorte que I' Afrique puisse suivre les progrh r~volutionnaires de 1a biotechnologie et de la science des mat~riaux. A l'~chelon de la collectivit~, cela veut dire permettre aux gens de mieux contrOler leur destin6e. 9.12 On a souvent interpr6t~ l'autosuffisance du seul point de vue des dendes alimentaires et des produits industriels. Certaines pr~cisions s' imposent l ce propos. La recherche de l ' autosuffisance. con~ue de la sorte, ne tient pas compte des avantages potentiels du commerce. D6tacher - 350 - davantage l'Afrique de l'~conomie mondiale entraverait gravement son d~veloppement. Toutefois, Ie commerce devrait refl~ter l'interd~pendance et non pas la d~pendance. S' agissant des denr~es alimentaires, on peut soutenir de mani~re convaincante que It Afrique est devenue trop tributaire des importations. L'accroissement des ~changes de produits alimentaires entre pays d'Afrique est une r~ponse : il est propos~, au chapitre 7, de lever les obstacles actuels au mouvement des denr~es alimentaires des pays exc~dentaires vers les pays d~ficitaires. Cependant, de nombreux pays d'Afrique qui sont actuellement importateurs de denr~es alimentaires pourraient satisfaire une part nettement plus grande de leurs besoins si la structure des incitations et, en particulier, les taux de change ~taient plus favorables. Cette constatation vaut ~galement pour les produits industriels bien qu'il serait naIf de pr~tendre rendre les soci~t~s africaines concurrentielles sur Ie march~ mondial du jour au lendemain. II faudra prot~ger les industries. La lib~ralisation devra se faire par ~tapes de mani~re A disposer du temps n~cessaire A l'acquisition des capacit~s et A la restructuration des unit~s de production inefficaces. 9.13 La strat~gie de d~veloppement des industries ftessentielles", pr~conis~e au d~but des ann~es 80, pose des probl~mes particuliers. Peu de pays disposent de march~s suffisamment grands pour justifier une industrie sid~rurgique, une industrie chimique ou une fabrique d'engrais. Les pays risquent d'enregistrer de lourdes pertes si Ie secteur public continue de prendre ses d~cisions en mati~re d' investissement sans tenir compte des signaux du march~. Les investissements de cet ordre ne serontproductifs que dans Ie cadre d'une int~gration r~gionale respectueuse des forces du march~. 9.14 L'int~gration et la coop~ration r~gionales entre ~tats dtAfrique sont un objectif que nombre de pays ont A coeur et qu'on peut classer A juste titre dans l'action en faveur de l'autosuffisance. Si l'on veut obtenir des r~suLtats, il faudrait Ie poursuivre de mani~re pragmatique et graduelle pour surmonter les nombreux obstacles pratiques qui ont ralenti Ie progr~s A ce jour. L'appui des donateurs pourrait contribuer largement A all~ger les coOts de la transition. 9.15 Certains responsables ont estim~ que la croissance fond~e sur l'exportation ~tait incompatible avec l'autosuffisance. Cela est inexact. Si la substitution des importations offre souvent les possibilit~s les plus imm~diates d'investissement industriel, une action en faveur de l'exportation peut @tre pleinement compatible avec la production pour Ie march~ national et avec l'autosuffisance. Si l'on consid~re que l'Afrique finira par devenir un march~ unique, une substitution r~ussie des importations servirait A constituer une base d'industries capables d'@tre concurrentielles A 1 'exportation. Devenir concurrentiel : telle est la clef. L'Afrique n'a rien.A gagner des entreprises qui vendent des produits plus on~reux que ceux disponibles sur les march~s mondiaux. En outre, 1 'Afrique dispose d'installations non utilis~es dans nombre d'industries essentielles d~jA ~tablies; au cours des ann~es 90, Ie d~fi consistera A exploiter ces ressources efficacement avant d' investir dans de nouvelles usines. Dans l'intervalle, on peut convenir que des perspectives immenses stoffrent aux fabricants africains pour ce qui est de satisfaire la demande du continent en mat~riaux de construction, meubles, v@tements, ustensiles de cuisine et autres biens de consommation de base, et de Ie faire A des prix - 351 - concurrentiels. C'est dans ce domaine qU'une capacit~ industrielle devrait d'abord @tre constitu~e. 9.16 On reconnalt largement que la promotion de l'autosuffisance locale est un ~l~ment essentiel de toute strat~gie de d~veloppement future. L'objectif est de mobiliser les ~nergies locales pour la fourniture de services de base. La clef est de renforcer les collectivit~s locales et de trouver des moyens pour que les femmes jouent un rOle accru dans Ie d~veloppement. Si lYon s'accorde g~n~ralement sur ces objectifs, on ne prend que trop rarement des mesures pour les r~aliser. Dans les ann~es 90, il faudra concevoir des strat~gies explicites visant a d~velopper les capacit~s des administrations et des organisations commerciales locales. L'objectif ultime est de donner aux particuliers et aux collectivit~s les moyens d'assurer leur propre d~veloppement. Un~l~ment essentiel de cette strat~gie consistera a d~terminer precisement les droits de propri~te fonciere. Un programme strategique pour les annees 90 9.11 Le present rapport suggere de modeler Ie programme strategique de l'Afrique pour les ann~es 90 sur la base de sept grands themes mutuellement lies et fond~s sur Ie consensus qui se dessine. En depit de leur diversite consid~rable, les pays presentent assez d' analogies pour que la plupart d'entre eux puissent prendre ces themes en compte lors de la mise au point de leurs plans sp~cifiques. L'ajustement aux fins de la croissance 9.18 Les programmes d' ajustement structurel ont presque touj ours ete Mis en place pour faire face a une crise financiere immediate. Les problemes des economies africaines sont beaucoup plus profonds. On a vu au chapitre premier que les programmes d'ajustement structurel commencent a produire des r~sultats, mais lentement. Dans la plupart des cas, Ie processus a a peine commenc~ et, trop frequemment, les efforts n 'ont pas ete soutenus. Les h~sitations et l'inaction - les coups d'accordeon repetes - font obstacle a la relance et prolongent sensiblement la p~riode d'ajustement et les difficult~s concomittantes. Le plus difficile pour les pays africains est de faire en sorte que les investisseurs aient confiance; mame lorsqu'ils y parviennent, ces derniers mettent un certain temps a reagir. 9.19 Le d~fi est de rendre les producteurs africains concurrentiels sur les march~s mondiaux, autrement dit de transformer l'Afrique de telle sorte qU'on puisse y faire des affaires efficacement - ce qui est loin d'atre Ie cas actuellement. C' est pourquoi les efforts d' ajustement doivent atre radicaux et prolong~s i1 faut en effet transformer la structure de production en profondeur. L'ajustement structurel est necessaire mais il doit @tre poursuivi - sans dogmatisme - pour devenir un ajustement diff~rent. Diff~rent parce que l'on tiendra davantage compte de ses incidences sociales, parce que l'on encouragera la concurrence graduellement. en commen~ant par r~duire les obstacles aux echanges entre pays d'Afrique et parce que l'on recourra essentiellement aux taux de change plutOt qu'a des interventions administratives pour ramener les cotlts au niveau de ceux des principaux concurrents de l'Afrique. - 352 - 9.20 De nouvelles priorit~s appelleront une nouvelle structure des d~penses publiques. Les pouvoirs publics se heurtent g~n~ralement 1 une vive opposition bureaucratique lorsqu'ils cherchent 1 modifier les affectations de cr~dits, mais force est de constater que c' est par Ie biais des affectations budg~taires que lOon peut modifier Ie plus facilement les priorit~s de d~veloppement. La future strat~gie de d~veloppement propos~e dans Ie pr~sent rapport pr~voit des d~penses accrues en mati~re d'~ducation, de sant~, de sciences et de techniques, d'infrastructure et de protection du milieu. Deux objectifs sp~cifiques sont propos~s : consacrer 8 1 10 % du PIB 1 la valorisation des ressources humaines et 5 % 1 l'entretien et 1 la r~fection des infrastructures. Ces augmentations devront @tre compens~es par des r~ductions de cr~dits 1 d' autres postes pour une part, et par une mobilisation accrue des ressources, de I' autre. COl1llle la COl1lllissicn ~conomique des Nations Unies pour l'Afrique lOa soutenu 1 juste titre, une r~duction sensible des d~penses militaires et de la masse salariale du secteur public pourrait permettre d'effectuer d'importantes ~conomies. Cela implique un d~graissage progressif du secteur public, OU la pl~thore d'effectifs est devenue chronique. Le pourcentage des d~penses publiques consacr~ 1 l'agriculture et 1 l'industrie pourrait @tre moindre que par Ie pass~ et une part plus large pourrait @tre faite 1 l'investissement priv~. Un recouvrement des d~penses effectu~ sur une base large et plus efficace et une politique plus ~nergique de perception de l'impOt permettraient d'accroltre les recettes. Valoriser les ressources humaines 9.21 La valorisation des ressources humaines devrait @tre la priorit~ absolue du progral1llle strat~gique pour les ann~es 90, ce qui refl~terait la d~term.ination cOl1lllune d' inverser Ie d~clin enregistr~ ces dix derni~res ann~es. Le pourcentage des d~penses consacr~es 1 cette activit~ devrait @tre major~ et des efforts importants devraient @tre effectu~s en vue d'am~liorer la qualit~. Les affectations de cr~dits aux services sociaux de base ne devraient plus apparaitre cOl1llle des ~l~ments r~siduels du budget. Chaque pays devrait instaurer un progral1llle contrOlable visant I' am~lioration de l'enseignement fondamental, de la sant~, de la planification familiale et de la nutrition et fixer un calendrier pour parvenir 1 une couverture universelle. Certains pays pourront peut-etre atteindre cet objectif 1 la fin des ann~es 90, d'autres auront peut-etre besoin de 20 ans, mais nulle part u, r~alisation ne devrait prendre plus de 30 ans. 9.22 Vaincre la faim et la malnutrition: c'est 11 l'un des objectifs critiques de toute strat~gie de d~veloppement ax~e sur la personne humaine. Pour assurer la s~curit~ alimentaire de I' Afrique, il faudra avant tout, accroltre la productivit~ agricole 1 'augmentation du cOl1lllerce intra-r~gional pourra permettre d' am~liorer la distribution des denr~es alimentaires. La s~curit~ alimentaire est aussi fonction des revenus r~els : il faudra faire en sorte que les pauvres aient les moyens d' acheter les aliments qui leur sont n~cessaires. On peut escompter que la croissance ~conomique aidera 1 r~soudre Ie probleme de l'ins~curit~ alimentaire, 1 long terme; des interventions sp~cifiques, cOl1llle Ie subventionnement des denr~es alimentaires ou des progral1llles de promotion de l'emploi et des revenus seront peut-etre n~cessaires 1 plus court terme. - 353 - 9.23 Les donateurs eux aussi devraient considerer 1a va1orisation des ressources humaines conune une priorite pour I' Afrique au cours de 1a prochaine decennie. L' appui accorde aux depenses renouve1ables (traitements, salaires, materiels pedagogiques, medicaments et autres fournitures) au titre des progranunes devrait beneficier d'une priorite superieure A celIe accordee aux bAtiments. Ceci implique que les donateurs soient disposes A financer les depenses locales; faute de quoi, leur preference pour Ie financement des depenses en devises etrang~res pourrait facilement fausser les priorites. Mettre en place des moyens 9.24 La situation actuelle de l'Afrique est essentiellement imputable A la penurie de competences techniques et d'institutions publiques et privees vigoureuses. Mais I' Afrique connalt une situation paradoxa Ie , car des personnes eduquees sont au ch6mage. Les rem~des suggeres sont radicaux. o En premier lieu, l'amelioration de la qualite devrait ~tre l'objectif primordial dans l'enseignement et la formation. II faudra rechercher l'excellence avec acharnement. L'Afrique serait mieux desservie si ses universites utilisaient les res sources dont elles disposent actuellement pour produire des dip16mes moins nombreux mais mieux formes et privilegiaient nettement 1es competences techniques et analytiques. La qualite est importante A tous les niveaux, de haut en bas, jusqu'au primaire. o En deuxieme lieu, il convient d'accelerer la reforme des entreprises publiques. Les mesures necessaires sont bien connues la plus importante est de definir clairement la tAche des responsables et de leur donner toute latitude pour executer les plans dont il aura ete convenu. o En troisieme lieu, i1 faudrait ne menager aucun effort pour appuyer les organisations locales, conununales et non gouvernementales de tous types - associations vil1ageoises, cooperatives, societes de credit, associations professionnelles, chambres de conunerce et d'industrie etc. Ces initiatives auront plus de chance de reussir, si les organismes sont implantes localement. Dans beaucoup d' endroits, les organisations informelles de credit (les "tontines", par exemple) ont mieux reussi que 1es banques conunerciales modernes et, en regIe generale, Ie secteur informel est plus dynamique que Ie secteur public. I1 faudra donc tirer parti de cette base autochtone solide, ~tre A l'ecoute et confier des responsabilites reelles aux beneficiaires de tout progranune de developpement. o En quatrieme lieu, les administrations publiques devraient ~tre reamenagees de fond en comble : bien loin de se borner A contrOler Ie developpement, elles devraient au contraire Ie promouvoir activement. Les effectifs plethoriques devraient ~tre elimines graduellement et Ie personnel maintenu devrait ~tre systematiquement recycle. Le nouveau personnel devrait ~tre recrute par concours et les primes devraient ~tre liees aux resultats effectifs. Le personnel qualifie devrait ~tre correctement remunere. - 354 - o En cin9ui~me lieu, il faudrait renforcer l'analyse des politiques nationales en recourant davantage aux nationaux, aux consultants locaux et aux chercheurs d 'universites les mieux formes et en ameliorant la co11ecte des donnees. Assurer 1a reprise de 1a croissance et creer des emp10is 9.25 La mise en place de nouveaux moyens et un climat po1itique favorable constituent 1es fondements d'une augmentation de 1a production. Mais ces seu1es mesures ne suffiront pas. La croissance agrico1e depend d'une recherche novatrice en vue de mettre au point de nouvelles techniques et des services de vulgarisation efficaces pour assurer 1a liaison entre l'exp1oitant et 1e chercheur. Pour croltre, 1e secteur industrie1 et 1es industries extractives devront attirer des investisseurs dotes des ressources et des competences vou1ues pour Monter des operations viab1es; i1 faudra aussi que 1es investisseurs etrangers soient disposes A s'associer ree11ement avec 1es hommes d' affaires locaux. Or, les investisseurs prives ne se manifesteront que si 1e code des investissements d'un pays (c'est-A-dire 1e regime fiscal et 1a reglementation relative aux changes) reconnaissait que Ie profit et Ie paiement de dividendes sont 1a recompense necessaire du risque. 9.26 Pour atre concurrentie11es, 1es entreprises ont besoin de services publics economiques, de telecommunications fiab1es et d'autres infrastructures. Aussi, 1e programme pour 1es annees 90 doit-i1 prevoir 1a refection et l'entretien du reseau d'infrastructures qui s'est degrade pendlmt 1es annees 80, ainsi que 1a creation de nouvelles infrastructures dans des secteurs critiques. Une te11e po1itique devra notamment s'app1iquer aux telecommunications, qui constituent un gou1et d'etrang1ement; ce secteur est, A I 'evidence, suffisamment rentable pour pouvoir s'autofinancer. Sans de bems services de telecommunications, l' Afrique ne participera pas a 1a revolution de l'informatique. Ces programmes devraient comporter des mesures visaIlt a ameliorer 1a gestion et 1e financement des services d'infrastructure essentie1s, pour 1esque1s des contrats de sous-traitance peuvent I!tre conclus dans certains cas avec 1e secteur prive. 9.27 11 n'y aura pas croissance sans chefs d'entreprise. On peut faire beaucoup pour promouvoir l'esprit d'entreprise en Afrique en reconnaissant Ie rn1e et 1a vita1ite du secteur informe1 - en remp1a~ant 1a legislation discriminatoire. en abo1issant 1a reg1ementation et les contrOles inuti1es qui p~sent sur la petite entreprise et en faci1itant l'acc~s au credit et aux debou.ches. 9.28 Que la croissance soit soutenue est une condition necessaire mais pas suffisante. E11e doit aussi ~tre equitable. Pour ce faire, i1 faut que chacun puisse gagner sa vie d 'une mani~re ou d 'une autre. Et 1a seu1e croissance n'assure pas 1a creation rapide d'emp1ois. L'agricu1ture ne peut pas accuei11ir tous ceux qui arrivent sur Ie marche du travail. Une grande partie de l'augmentation de 1a main-d'oeuvre devra donc atre absorbee dans des activites hors exploitation, dans de petites entreprises et dans 1e secteur des services. Les po1itiques qui favoriseront 1a creation d'entreprises stimu1eront donc aussi 1a creation d'emp1ois. II faudra assoup1ir 1a legislation relative au sa1aire minimum et 1a reglementation - 355 - restrictive du travail, qui freinent l'expansion de l'emploi. Les pouvoirs publics pourront, pour mettre en place un filet de s~curit~, mettre en place des programmes de "vivres contre travail". Pr~server Ie patrimoine de l'Afrique 9.29 Les ann~es 90 seront critiques pour l'environnement, A mesure que la croissance d~mographique imposera des pressions accrues sur les ~cosyst~mes de I' Afrique. Les arbres et les esp~ces qu' Us abritent et nourrissent disparaissent rapidement; les p~nuries de bois de feu deviennent de plus en plus aigu!s; la terre v~g~tale disparalt des pentes fertiles et ne peut pas @tre remplac~e; les prairies surpAtur~es se transforment en d~serts. La mont~e rap ide de la pollution menace la sant~ dans les villes africaines qui connaissent l'explosion d~mographique. 9.30 Les mesures visant A lutter contre la destruction acc~l~r~e des ressources naturelles de l'Afrique sont de plus en plus au premier plan des programmes des pouvoirs publics et des organismes ext~rieurs op~rant sur Ie continent. Les programmes visant A arr@ter et esp~re-t-on, A renverser Ie processus de d~sertification, et A mettre fin A la destruction des for@ts tropicales, A l'~rosion des terres arables et A la pollution dans les villes m~ritent tous d'@tre ~nergiquement appuy~s. II est inacceptable d'assurer la poursuite de la croissance ~conomique pour les hommes et les femmes d'aujourd'hui au prix d'un habitat nature 1 improductif pour les g~n~rations futures. Mettre en place, pays par pays, des plans d'action pour l' environnement et mobiliser un vaste appui populaire aux fins de leur ex~cution effective: telle est la voie dans laquelle il faut s'engager sans plus tarder. II faudra aussi entreprendre d 'urgence des programmes de reboisement massifs A l'~chelon de la collectivit~. Acc~l~rer l'int~gration et la coop~ration r~gionales 9.31 Les objectifs relatifs A l'int~gration et A la coop~ration r~gionales devront @tre poursuivis avec une d~termination renouvel~e, pour surmonter l' esprit de clocher. Le Plan d' action et l' Acte final de la Conf~rence de Lagos ont d~fini Ie cadre de base. 11 importe maintenant de prendre des d~cisions en vue de rationaliser les institutions r~gionales, de lib~raliser les ~changes entre pays africains, d'all~ger les contrOles en mati~re de transport et de faciliter les paiements entre pays d'Afrique. II faudrait ~galement pr~voir des programmes visant A atUnuer les goulets d' ~tranglement en mati~re d' infrastructures, pour r~pondre A la demande identifi~e. II faudrait ~galement s'employer plus syst~matiquement A exploiter les nombreuses possibilit~s de coop~ration mutuellement b~n~fique en mati~re d'~ducation, de science et de technique, de sant~, de recherche et de gestion des ressources naturelles. Assurer Ie renouveau politique 9.32 II ne servira pas A grand chose de cr~er un environnement propice et de mettre en place des moyens locaux si Ie contexte politique n'est pas favorable. Seule la croissance du secteur productif permettra d'am~liorer Ie niveau de vie et de satisfaire les besoins fondamentaux. Elle exige des investissements. Mais investisseurs et producteurs n'ont plus confiance. Cela fait trop de temps que l' instabilit~ dgne dans de nombreux pays - 356 - d 'Afrique , aussi bien sur Ie plan des politiques que sur celui des institutions. V~chec 1 gouverner est si commun que l'on n'esp~re plus grand chose. Toutefois, la population ressent un besoin de renouveau qui frise mame Ie d~sespoir et l'exprime largement. II arrive trop fr~quemment que les cadres les mieux form~s d'Afrique vivent en exil ou que leurs comp~tences ne soient pas mises 1 profit. 9.33 Les investisseurs sont d~courag~s non seulement parce que l'application des politiques n'est pas pr~visible mais aussi parce qu'ils ne savent pas comment les fonctionaires les interpr~teront ou les appliqueront. Ce probl~me est aggrav~ par Ie fait que les cadres juridiques fiables pour l'application des contrats font souvent d~faut. II faudra r~instaurer la primaut~ du droit. Ceci implique un r~am~nagement du syst~me judiciaire, l'ind~pendance du judiciaire, Ie respect scrupuleux de la loi et des droits de l'homme 1 tous les niveaux des pouvoirs publics, la comptabilisation transparente des deniers de l'Etat et l'existence d 'une cour des comptes ind~pendante, responsable non devant l'ex~cutif mais devant une l~gislature d~mocratique. Ces institutions ind~pendantes sont n~cessaires pour assurer la responsabilisation. 9.34 De l'avis g~n~ral, cette crise est essentiellement due au fait que dans de nombreux pays l'administration est d~tourn~e de sa fonction premi~re et sert les int~rats d 'un petit nombre de personnes. Le fait que la communaut~ des donateurs soit dispos~e 1 tol~rer l'ind~licatesse (en n'insistant pas aupr~s des fournisseurs pour qu'ils se conduisent scrupuleusement. en ne veillant pas 1 ce que les fonds soient correctement utilis~s, en fermant les yeux sur des irr~gularit~s en mati~re de comptabilit~ et de v~rification, en tol~rant un certain laxisme en mati~re de passation des march~s) aggrave Ie malaise. Chacun d~plore ouvertement la situation et souhaite qu'elle change. Mais tel ne sera pas Ie cas tant qU'on n'insistera pas sur la justification de l'emploi des fonds. Instaurer un consensus en Afrique 9.35 La n~cessit~ de passer "des paroles aux actes" ne diminue pas l'importance des "paroles· . Les programmes d' action ne peuvent ~tre poursuivis que s'ils sont Ie fruit d'un consensus r~sultant d'un dialogue dans chaque pays. On ne parviendra pas facilement au consensus. II faudra aborder de difficiles probl~mes, d'ordre politique, social et autre; s' attaquer aux int~rats en place qui b~n~ficient de la distortion actuelle des incitations et des contrOles; r~viser les esp~rances politiques et personnelles et s'interroger sur les positions intellectuelles et id~()logiques · 9.36 Les responsables ont ~t~ peu enclins 1 autoriser un libre d~bat dans la plupart des pays d'Afrique. C'est 11 une erreur; un d~bat large et vigoureux sur les r~ussites et les ~checs depuis l'ind~pendance est vital et constitue un pr~alable essentiel 1 tout choix entre les orientations des politiques g~n~rales, si I' on veut comprendre les options et parvenir au consensus. Ce d~bat doit @tre encourag~ dans les m~dias, dans les universit~s et dans des ateliers 1 participation non limit~e. C'est un pr~alable 1 un engagement v~ritable et impliquant Ie plus grand nombre envers la strat~gie du d~veloppement de la deuxi~me g~n~ration. - 357 - 9.37 Les programmes d'action etant destines 1 des pays en particulier, ils doivent refleter les caracteristiques nationales et @tre adaptes aux valeurs culturelles, s'ils veulent attirer l'appui populaire. Ceci est manifeste dans des secteurs delicats comme l'education, la sante, la population et les relations professionnelles. Ainsi, au Japon, Ie schema occidental typique de relations du travail heurte la sensibilite nationale; et Ie modele japonais a ete fonde sur les normes sociales nationales. L'Afrique elle aussi devra rechercher les modeles qui lui conviennent. 9.38 En consequence, pour passer des paroles aux actes, il faudra disposer d'un contexte institutionnel favorable. Ce contexte doit resulter du consensus politique et en me me temps l'appuyer. Chaque pays devra aborder ce probleme selon ses propres methodes. Le maximum que les organismes exterieurs puissent faire est d'appuyer la recherche de ce consensus. Instaurer un consensus entre les donateurs 9.39 L'Afrique se heurte A des difficultes exceptionnelles et merite un traitement exceptionnel de la part de la communaute des donateurs. L'Afrique, tout comme l'Europe immediatement apres la deuxieme guerre mondiale et l' Inde pendant les annees 60, connait des besoins particulierement aigus et requiert aujourd'hui d'un appui massif et coordonne pour surmonter ses graves problemes. Les donateurs devraient travailler de concert pour axer leurs efforts dans des secteurs clefs. o II faut trouver des moyens de reduire la charge de la dette. Les solutions ne manquent pas : ce qui fait defaut, c'est la volonte politique des pays les plus riches de resoudre ce probleme de fa~on decisive. o Les donateurs devraient inserer leurs efforts dans un cadre A plus long terme, reconnaitre que la mise en place de moyens est au coeur m@me du probleme et que Ie renforcement des institutions et Ie developpement des capacites est un long processus qui exige de faire preuve de hauteur de vues et de persistance pendant des decennies et non pas des annees. II faut reorienter l'assistance technique et mieux la gerer, pour accorder la priorite 1 la mise en place de moyens. o L' assistance exterieure doit aller au-dell de l'investissement pour " couvrir des depenses de developpement plus largement definies (y compris les depenses concernant la sante, l'education, la protection de l'environnement et l'entretien et la refection des infrastructures). Les donateurs devraient de plus en plus financer une "tranche" de programmes sectoriels ou sous-sectoriels, plutOt que de financer des projets. S'agissant des programmes relatifs aux ressources humaines et 1 I' infrastructure, l' appui devrait porter sur les depenses de fonctionnement et d'entretien. L'assistance des donateurs ne devrait pas concerner seulement les transactions entre ~tats. mais aussi les activit~s des organisations non gouvernementales et du secteur prive. - 358 - o Enfin, les donateurs devraient acheminer les ressources de mani~re plus s~lective vers les ~tats qui appliquent d~ja des r~formes et uti1isent rationne11ement l' assistance ext~rieure qu' i1s rec;oivent. Vers une coalition mondia1e pour l'Afrique 9.40 De nombreux m~canismes institutionnels en particulier les r~unions consultatives et les tables rondes - ont ~t~ mis au point pour coordonner 1es mesures prises par les donateurs, les organismes des Nations Unies et 1es pays africains. Les organismes des Nations Unies ont des responsabilit~s particuli~res pour toute une gamme de probl~mes sectoriels et fonctionnels. Des m~canismes comme Ie Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale concernent des programmes qui visent a r~soudre des probl~mes pr~cis. Et pendant les ann~es 80, a mesure qu'on a davantage reconnu la profondeur et la gravit~ des probl~mes ~conomiques africains, des m~canismes institutionnels circonstantiels ont ~t~ cr~~s dans Ie cadre du syst~me des Nations Unies (par exemple, Ie PANUREDA), du Comit~ du d~veloppement (par exemple les ~tudes de la Banque mondiale sur l'Afrique subsaharienne et les initiatives connexes) et du Comit~ d'aide au d~vel(lppement (CAD) de 1 'OCDE et du Club du Sahel. Ce1a a permis de r~pondre avec s:ouplesse aux besoins imm~diats d' action conjointe a propos de probl~mes tels que les denr~es alimentaires, la s~cheresse et la dette. 9.41 II est de plus en plus manifeste que les causes du malaise ~conoMique africain sont profondes et persistantes. En outre, elles sont li~es si inextricablement les unes aux autres que, pour r~soudre efficacement les probl~mes, il faudra disposer d'un ensemble coh~rent de programmes - des programmes conc;us par l'~tat int~ress~ et appliqu~s au moyen d'institutions renfoJ:'c~es. Les mesures prises par les donateurs ne remplaceront pas la volont~ politique soutenue de developper des capacith institutionnelles. Et les politiques et programmes - m~me s'ils sont les meilleurs - ne seront pas ex~cut~s efficacement sans ce renforcement. 9.42 Peut-on inverser Ie d~clin de l'Afrique? La r~ponse est oui. On Ie peut et on Ie doit. L'alternative est trop horrible pour qu'on la contemple. L'inversion de la tendance doit ~tre Ie r~su1tat d'une action prise en Afrique m~me. Les pays sont comme les arbres : on ne peut pas les faire grandir en les tirant de l'ext~rieur; leur croissance doit r~pondre a leur ].ogique propre et ~tre alimentee par leurs racines. Mais I' Afrique aura besoin d'un appui ext~rieur soutenu et accru, si elle veut relever Ie d~fi sans t.rop de souffrances. Cet appui devrait ~tre offert dans Ie cadre d 'un accord qui. sans porter atteinte au droit des Africains de d~terminer leur polit:tque, permette de tenir compte des preoccupations et des idees de la commullaut~ internationale pour Ie developpement. 9.43 II est urgent de conclure un nouvel accord international pour l'Afrique, afin de continuer sur la lancee du PANUREDA, qui s'ach~vera en 1990. Le PANUREDA a fourni un cadre pour la coordination des efforts d'aide a 1 'Afrique, essentiellement par Ie biais de reunions conjointes des institutions des Nations Unies. Pour faire progresser ce processus, il est propoise de constituer une nouvelle coalition mondiale pour les annees 90. Cette coalition devrait ~tre plus large et plus permanente et permettre a la fob 11UX donateurs et aux bl!nl!ficiaires de se consulter. Elle porterait sur toute la gamme des probl~mes de d~veloppement a long terme. Mais Ie along - 359 - terme W n'implique pas que l'on pourra attendre longtemps avant dtagir. Au contraire t il faut d~s maintenant s'employer A atteindre les objectifs. 9.44 La coalition mondiale pour 1 'Afrique qutil est propos~ de constituer serait une enceinte OU des dirigeants africains (et pas seulement ceux du secteur public, mais aussi ceux qui travaillent dans Ie priv~, les membres de professions lib~ralest les universitaires et les collaborateurs d' organisations non gouvemementales) pourraient rencontrer leurs partenaires essentiels - les organismes bilat~raux et multilat~raux et les principales organisations non gouvernementales ~trang~res en vue d'arreter des strat~gies qui guideraient ensuite la conception des programmes dtassistance individuels des pays. L 'une des premUres tAches de cette coalition pourrait etre de convenir des mesures concernant les domaines prioritaires d~finis dans Ie pr~sent rapport : protection de I' environnement, constitution de capacit~s, politique d~mographique, s~curit~ alimentaire, int~gration et coop~ration r~gionales. Elle pourrait inciter la communaut~ intemationale A acheminer une assistance A des programmes port ant sur ces domaines et A mettre en place des programmes de suivi. La constitution de cette coalition serait un progr~s d~cisif pour l'Afrique et ses partenaires. Elle serait Ie t~moignage d'une nouvelle volont~ de collaborer en vue d'un avenir meilleur. - 360 - Encadre 9.1 L'exemp1e nordique de deve10ppement Au milieu du 1geme siec1e, 1es pays nordiques etaient des economies agraires a faib1e revenu. En commen9ant par 1a Suede vers 1870, i1s ont tous connu une croissance e1evee pour devenir des pays hautement industria1ises. En 1987, 1e PIB par habitant moyen dans 1es cinq pays nordiques se montait a 19 670 dollars E-U; i1 etait 1egerement superieur a ce1ui des Etats-Unis et du Japon et 48 % plus e1eve que 1e PIB moyen des pays de 1a CEE. En outre, 1es indicateurs sociaux de 1a Scandinavie sont parmi 1es mei11eurs au monde. Les pays nordiques ont, tout comme 1es autres, des caracteristiques qui leur sont specifiques. Toutefois, leur succes est dO a un certain nombre de facteurs, qui meritent d'~tre examines, A savoir notamment 1e rOle re1atif de l' Etat et du marche, 1a structure de l' orientation commercia1e et 1a cooperation regiona1e. ROle de l'Etat et du marche. Au debut de leur developpement, les Etats nordiques se sont fixes pour mission de fournir les infrastructures, une administration et des services sociaux de qualite, la fabrication de biens etant laissee pour l'essentiel a l'entreprise privee et a la discipline du marche. L'Etat a favorise activement l'acces universel aux services sociaux, encourage des relations harmonieuses entre la main-d'oeuvre et Ie patronat et promulgue une reglementation legere concernant Ie secteur prive. Ces methodes etaient radicalement differentes de celles pratiquees dans les pays socialistes. OU les pouvoirs publics ont assume la propriete et la direction des moyens de production. Elles s' ecartaient egalement des pratiques suivies dans les economies planifiees du tiers monde, ou les pouvoirs publics essayaient de prendre en main les secteurs clefs de l'economie dans les industries manufacturieres. Elles differaient egalement des systemes purement orientes vers Ie marche ou, parce que les pouvoirs publics n'ont pas fourni de services sociaux, la libre entreprise a ete a l'origine d'importantes disparites sur Ie plan des revenus, des richesses immenses allant de pair avec une pauvrete aigu~. Toutes autres encore ont ete les methodes suivies par Ie Japon et par la Coree, ou l'Etat a joue un rOle de chef de file pour determiner les orientations industrielles a suivre et creer et proteger les industries clefs. Les pays nordiques ont inlassablement favorise Ie consensus entre la main-d'oeuvre organisee, Ie capital et les pouvoirs publics. A leur sens, il ~tait essentiel, pour Ie developpement economique et la stabilite politique, que tous beneficiaient des avantages de la prosperite economique. Tres tOt, les societes nordiques se sont efforcees d'atteindre l'objectif de l'alphabetisation universelle tout en mettant l'accent sur un enseignement superieur de qua lite , bien que limite. Ces politiques ont favor!se la participation informee du public a la prise de decision sociale et economique et permis de disposer d'une main-d'oeuvre en bonne sante et bien formee. Le rOle de facilitation joue par Ie secteur public et Ie respect pour les mecanismes du marche ont permis aux pays nordiques d' at teindre un niveau eleve d'efficacite economique. L'entreprise privee, encouragee par l'Etat mais non dirigee par lui est devenue Ie principal agent de la creation et de 1 'expansion des industries manufacturieres et de leurs organismes commerciaux et financiers. - 361 - Orientation commerciale et coop~ration r~gionale. Les Scandinaves sont depuis longtemps ouverts aux progres commerciaux et techniques de l·~tranger. La structure de l'orientation commerciale s'est dessin~e en cons~quence du jeu des forces du march~, alors que les politiques commerciales du Japon et de la Cor~e ont ~t~, pour l'essentiel, d~finies aux ~chelons les plus ~lev~s. En outre, l'expansion pr~coce de l'esprit d'entreprise industriel nordique ~tait li~e ~ la base de res sources nationales, ~ la demande ~manant du secteur agricole et aux investissements dans l'infrastructure. Toutefois, les exportations sont devenues de plus en plus Ie moteur de l' expansion industrielle. Les petits pays nordiques ont d~montd les possibi1it~s qU'offre la coop~ration r~gionale, en d~pit d'une dotation en ressources relativement homo gene et de structures de production concurrentielles plutOt que compl~mentaires. Des relations politiques stables et pacifiques ont favoris~ la coop~ration ~conomique, men~e sans structures institutionnelles on~reuses. Les ~changes intra-r~gionaux sont pass~s de 12 ~ 13 % (du commerce total des pays nordiques) avant la premiere guerre mondiale ~ 30 % ou plus par la suite. La transformation remarquable des pays nordiques qui, agraires ~ l'origine sont devenus des ~conomies industrielles modernes, offre un exemple sp~cifique de d~veloppement. Leur succes est attribuable ~ une ~conomie de march~ sociale, associant l~s politiques ~conomiques de la libre entreprise A des politiques sociales actives. - 362 - Encadr~ 9.2 Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement a ~t~ lanc~ en 1987 en coop~ration par Ie Bureau r~gional du PNUD pour l'Afrique, la Banque africaine de d~veloppement et la Banque mondiale dans I' objectif d'ins~rer des politiques et des programmes visant la r~duction de la pauvret~ dans les plans de d~veloppement, au stade de leur conception. A ce jour, 26 pays d'Afrique et 11 donateurs participent au projet. Des activit~s ont d~but~ aux niveaux r~gional et national. Au niveau r~gional, Ie projet appuie la mise au point d'un cadre conceptuel, empirique et de politiques g~n~rales en vue de renforcer les fondements des plans de d~veloppement visant la croissance dans l'~quit~. II appuie ~galement l'~laboration d'un programme r~gional de formation aux fins de l'analyse des politiques sociales et Ie renforcement des bases de donn~es statistiques sur les conditions de vie des m~nages. II favorise la recherche africaine sur les dimensions sociales du d~veloppement et la coop~ration entre ~tablissements de recherche africains et non africains aux fins de l'analyse des politiques et des programmes visant la r~duction de la pauvret~ dans Ie cadre de l'ajustement structurel. Au niveau national, Ie projet constitue un apport pour l'~tablissement d'un rapport d'~valuation national, faisant Ie point de la situation de la popUlation sur Ie plan de la pauvret~ et identifiant les problemes politiques clefs, sur la base des informations disponibles. II appuie ensuite l'ex~clltion d'une strat~gie op~rationnelle nationale compos~e des ~l~ments ci-aprf!S : o un ~l~ment politiques g~n~rales, concernant notamment la conception et l'appl~cation de mod~les macro~conomiques en vue de prendre en compte les incidences des politiques macro~conomiques sur la r~partition et sur l'empl(Ji, au stade de leur ~laboration; des programmes relatifs aux d~penses socialEls fondamentales A l'intention des pauvres, A pr~server dans tout programme de restructuration des d~penses publiques; o dE!s t!d~ments programmes et projets concernant : la conception et Ie suivi d'interventions sp~cifiques visant A prot~ger des groupes vuln~rables pendant l'ajustement et A favoriser la participation des pauvres A l'activit~ socio-~conomique, essentiellement par la promotion d'initiatives au niveau de la collectivit~ concernant les activit~s r~mun~ratrices A petite ~chelle et la petite infrastructure sociale; o un ~l~ment d~veloppement institutionnel concernant Ie renforcement de la capacit~ nationale de planification et de programmation de la politique sociale, l'analyse politique des dimensions sociales du d~veloppement et la cr~ation de bases de donn~es statistiques pour ~valuer I' ~volution des conditions de vie des m~nages. Le principal d~fi que Ie projet vise A relever est Ie suivant : int~grer l'objectif de r~duction de la pauvret~ dans la conception de strat~gies macro~conomiques, aider A r~orienter les programmes de d~penses publiques en faveur des pauvres, promouvoir la participation de groupes communautaires et d 'organisations non gouvernementales A la conception et A l'ex~cution de politiques socio-~conomiques et de plans de d~veloppement. - 363 - Appendice statistique Mesures A prendre pour am~liorer les syst~mes d'information et les statistiques de base en Afrique subsaharienne A.I Dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne avant l'ind~pendance, on se bornait pour l'essentiel A recueillir des donn~es A l'occasion de recensements p~riodiques de la population, A dresser l'~tat des ~changes cormnerciaux et A pr~parer des synth~ses sur la base de dossiers administratifs. Lors de l'ind~pendance, les pays ont d~sir~ r~aliser les objectifs du d~veloppement ~conomique et social et s 'y sont attach~s en ~laborant des plans de d~veloppement officiels pluriannuels : Ie besoin de donn~es s'est fait de plus en plus sentir. Des services ou cellules statistiques ont ~t~ cd~s, dont les effectifs ~taient A l'origine du personnel expatri~ financ~ dans Ie cadre de prograrmnes d'aide multilat~rale et bilat~rale. Le personnel expatri~ a transplant~ les notions et m~thodes pratiqu~es ail leurs sans les adapter A la situation locale. Le syst~me de comptabilit~ nationale de l'ONU, qui met l'accent sur les transactions du march~, n' a pas ~u modifi~ pour tenir compte de la pr~dominance des activit~s de subsistance dans l'Afrique essentiellement rurale. On a tent~ de mesurer la production agricole dans un milieu OU les syst~mes de culture ne se pr~taient pas aux analyses scientifiques de coupes-t~moins mises au point en Inde. Et m~me des notions d~mographiques de base, cormne celIe de m~nage, qui est fond~e sur une situation non africaine, ont ~t~ utilis~es sans ~tre modifi~es. A.2 Les donn~es, outre d'~tre inappropri~es. parvenaient trop tard aux responsables pour ~tre utiles. Des ressources humaines et financUres modestes ~taient r~parties dans divers secteurs et domaines des statistiques, OU elles ne suffisaient pas pour la tAche. Les renseignements ~taient souvent d~pass~s, parce que l'on avait privil~gi~ la collecte A grande ~chelle et les ~num~rations compl~tes dans un souci de fiabilit~ et qu'on manquait de moyens de calcul et de mise en tableaux. Les ressources des organismes statistiques, d~jA insuffisantes, ont ~t~ encore amoindries en cons~quence des mesures d'aust~rit~ prises dans les ann~es 70 et au d~but des ann~es 80. De nombreux employ~s ont quitt~ les services statistiques pour rechercher des emplois mieux r~mun~r~s dans d'autres secteurs. Les pouvoirs publics accordent g~n~ralement une priorit~ tr~s faible A la collecte des donn~es et i1 n'existe virtuellement pas de statistiques fiables dans de nombreux pays. A.3 La situation actuelle a ~t~ bien r~sum~e dans Ie rapport ~tabli par la Cormnission ~conomique pour l'Afrique A l'occasion de la Conf~rence cormnune des planificateurs, des statisticiens et des d~mographes africains. "Des lacunes statistiques sont constat~es dans tous secteurs et tous aspects de la situation africaine. Dans Ie domaine de la d~mographie, il est impossible de d~terminer pr~cis~ment m~me la taille et Ie taux de croissance de la population de certains pays d' Afrique. Pour ce qui est des statistiques sociales, on manque de chiffres concernant I' alphab~tisation, les ratios d'inscription scolaire, la situation institutionnelle de l' enfant et les niveaux de pauvret~. S'agissant des statistiques ~conomiques, des s~ries ~conomiques de base cormne Ie PIB et les flux des ressources font parfois d~faut. Les donn~es sur les ressources nationales et l'environnement sont tr~s rudimentaires, lorsqu'elles sont disponibles". Si l'on veut concevoir des strat~gies de croissance durable dans l'~quit~ en Afrique, il convient d'am~liorer d'urgence les syst~mes d'information. . ! - 364 - Nouvelle strat~gie de d~veloppement pour les syst~mes d'information A.4 Le pr~sent rapport contient de nombreuses r~f~rences aux types d' informations n~cessaires pour formuler et ex~cuter les politiques. 11 engage les pouvoirs publics A aborder Ie plus rapidement possible les probl~mes de population la n~cessit~ d'informations sur l'~volution d~mographique, 1 '~volution des attitudes concernant la Ucondit~ et les variables qui influent sur 1 '~volution d~mographique n 'en est que plus manifeste. La cr~ation d'un environnement propice A un accroissement de la productivit~ exige de disposer d' informations sur les revenus, les coUts, les prix, les finances publiques et les investissements. Pour mettre en place les moyens n~cessaires A une gestion ~conomique et efficace, il faudra pouvoir entreprendre une analyse des politiques et effectuer des choix rationnels sur la base d' informations fiables. La priorit~ accord~e A I' ~quit~ implique qu' il faudra disposer de syst~mes d' information en vue d'identifier les groupes d~savantag~s et de suivre les incidences des politiques de croissance sur les b~n~ficiaires et les non b~n~ficiaires. Si l'on veut examiner la question de la viabilit~ du d~veloppement, il ne faudra pas consid~rer Ie capital seulement comme I' "appareil de production" (les machines, par exemple) mais inclure dans ce concept les ressources naturelles et Ie capital humain. eUment dont les cadres classiques de comptabilite nationale ne tiennent pas pleinement compte. Le besoin est donc manifeste : ~largir la port~e des cadres existants et recueillir et analyser des donn~es concernant les ~l~ments pr~cit~s. A.S II faudra agir dans les quatre grands secteurs ci-apr~s Donn~es sociales et d~mographiques. Ressources naturelles et environnement. Statistiques des prix et de la production. Comptes de la nation. Pour chacun de ces secteurs, il faudra pr~ciser davantage les priorit~s. II faudra ~galement formuler un programme d'action, A l'intention des gouvernements africains et de la communaut~ internationale. La notion d'une association dans Ie developpement, ~voqu~e dans Ie rapport, vaut egalement pour la mise au point de syst~mes de donnees. Donnees sociales et d~mographiques A.6 La plupart des pays d'Afrique ont particip~ aux series de recensements de la population de 1970 et de 1980, mais Ie programme de recensement africain (financ~ par Ie FNUAP et d'autres donateurs) ne semble pas avoir ~U maintenu. L' EnquAte mondiale sur la f~condi U en Afrique subsaharienne a permis d' obtenir des donn~es demographiques valables [une seule fois]. Les enquAtes sur la population et la sanU menees par Westinghouse ont etoffe les travaux anterieurs, mais cr~e peu de capacites autochtones. Le programme de mise en place de dispositifs nationaux d'enquAte sur les m~nages de l'ONU et sa variante africaine, Ie programme de mise en place de dispositifs africains d 'enquAte sur les m~nages ont ~te lanc~s dans un petit nombre de pays. On a effectu~ des enquAtes sur les menages portant sur des questions telles que les d~penses des menages, la main-d' oeuvre et les caract~ristiques d~mographiques, mais de nombreuses enquAtes sur Ie terrain ont ete suspendues ou abandonnees faute de - 365 - ressources. Au nombre des autres initiatives, qui n' ont pas toutes ~t~ couronn~es de succ~s, on peut citer Ie syst~me mondial d'alerte pr~coce et les syst~mes de surveillance de l'UNICEF qui portent sur la nutrition et les probl~mes de sant~. Du fait que l'on a privil~gi~ les enqu~tes portant sur une question unique, les donn~es obtenues ont ~t~ limit~es au domaine recherch~. On n'a pas pu comme on l'avait escompt~ regrouper les r~sultats provenant de diverses enqu~tes : il a ~t~ impossible d'~tablir des ensembles de donn~es multidimensionnels en raison de variantes dans la tail Ie de l'~chantillon, les d~finitions et la couverture. Tout bien pes~, l'exp~rience incite A faire preuve d'humilit~. A.7 La Banque mondiale, reconnaissant qu'il convient de disposer de donn~es A jour pour pouvoir s'attaquer aux probl~mes politiques imm~diats et pressants des ann~es SO, a lanc~ l'~tude relative A la mesure des niveaux de vie, qui a trois grands objectifs : 1) recueillir des donn~es de qualit~ au moyen d'enqu~tes sur les m~nages int~gr~es, sp~cialement con9ues et portant sur plusieurs sujets, 2) mettre rapidement les r~sultats en tableaux aux fins d'utilisation imm~diate et 3) analyser les donn~es en vue de r~pondre A des pr~occupations sp~cifiques en mati~re de politique g~n~rale. Cette ~tude visait ~galement A d~velopper les capacit~s nationales de collecte r~gli~re des donn~es. Dans Ie cadre de cette enqu~te, des donn~es d~taill~es ont ~t~ recueillies sur les domaines suivants : l'~pargne, la situation du logement, Ie niveau d'instruction et les inscriptions scolaires, la situation sur Ie plan sanitaire, les activit~s ~conomiques au niveau des m~nages (y compris les revenus et la participation de la main-d'oeuvre), les ca~act~ristiques d~mographiques, la structure des d~penses et de la consommation, la propri~t~ de biens durables, les ant~c~dents en mati~re de f~condit~ et des donn~es anthropom~triques en vue d'~valuer la nutrition. A.S II ressort de l'exp~rience acquise lors de cette enquate en COte d'Ivoire et au Ghana qu'il est tout A fait possible de remplir des questionnaires complexes en effectuant des visites successives. En outre, l'utilisation d'ordinateurs individuels pour l'entr~e des donn~es, leur v~rification et leur pr~sentation sous forme de tableaux peut permettre d'~viter les longs d~lais inh~rents au traitement des donn~es et de pr~senter des tableaux de base regroupant des donn~es d'assez bonne qualit~ six A huit mois apr~s I' ach~vement des op~rations sur Ie terrain. L' int~gration de l'analyse des politiques dans les activit~s men~es dans Ie cadre de l'enquate a permis de transformer rapidement les donn~es en produits analytiques n~cessaires pour l'~tablissement des politiques et utilis~s a cet effet. A.9 La Banque mondiale a mis a profit l'exp~rience acquise a cette occasion pour concevoir un programme d'action ~largi en vue de prendre en compte les dimensions sociales des politiques d'ajustement. Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement (voir encadr~ 9.2) comprend l'~tablissement d'enqu~tes int~gr~es sur les m~nages portant sur des questions multiples, de sorte a relier l'analyse A la conception de programmes palliatifs visant a att~nuer les incidences de l'ajustement sur les groupes en d~tresse, de mesures visant a prot~ger les investissements sociaux face a la contraction des cr~dits publics ainsi que de programmes destin~s aux groupes les plus d~favoris~s. La mise en place de dispositifs nationaux permanents d'enquate et d'analyse est un ~l~ment fondamenta1 du projet, tout comme 1a cr~ation de base de donn~es concernant 1a situation ~conomique et sociale des m~nages. - 366 - A.l0 Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement, bien qu'A ses d~buts, a ~t~ chaleureusement accueilli par les 26 pays d'Afrique subsaharienne qui y participent. La communaut~ des donateurs a, avec tout autant d'enthousiasme, accord~ un financement qui a compl~t~ les ressources modestes consenties par les pouvoirs publics. Le Bureau de statistique de l'ONU et la Commission ~conomique pour l'Afrique sont convenus de collaborer avec la Banque dans les pays o~ Ie programme de mise en place de dispositifs nationaux d 'enquAte sur les m~nages et Ie proj et relatif aux dimensions sociales de l'ajustement sont en cours, pour coordonner l'ex~cution de ces deux programmes. La nouvelle collaboration entre les gouvernements africains et la communaut~ des donateurs constitue un regain d'effort pour r~soudre les probl~mes statistiques en Afrique. GrAce A cette coordination, les gouvernements africains seront, ce qui est plus important, associ~s A part enti~re A l'entreprise de d~veloppement A plus long terme des statistiques en Afrique subsaharienne. A.ll Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement est tr~s prometteur pour les statistiques en Afrique. En plus de transf~rer de nouvelles m~thodes et techniques, il devrait permettre de cr~er des institutions par Ie biais d'une collaboration active en mati~re de collecte et d'analyse des donn~es ainsi que de recherche,associant utilisateurs et producteurs de donn~es au niveau national. 11 fournira. des donn~es imm~diates et directes sur les m~nages concernant divers domaines et l'on pourra, sur la base de ses conclusions, ~tablir des agr~gats macro~conomiques A jour et plus fiables concernant la consommation, les investissements et l'~pargne des m~nages, ce qui donnera des aper~us sur les relations entre les m~nages et les secteurs productifs de l'~conomie. 11 servira aussi A former des ressortissants de pays africains A tous les niveaux de I' appareil stat.istique et une haute priorit~ a ~t~ accord~e A la formation d'~num~rateurs et d'analystes sur Ie terrain. A.12 Le projet relatif aux dimensions sociales de l'ajustement ne doit toutefois pas faire perdre de vue les efforts nationaux. 11 faudra prot~ger et promouvoir l'investissement en mati~re de renforcement des dispositifs au-deU de la dur~e du projet. Les apports exUrieurs devront Atre grad1.lellement Himin~s et les pouvoirs publics devront Atre responsables du financement des op~rations d'enqu~te apr~s les quatre ou cinq premi~res ann~es du projet; de plus, il est pr~vu que les apports techniques ext~rieurs seront modestes apr~s l'~tape initiale. Si les pouvoirs publics ne prennent pas 1e relai, on aura agi en pure perte. I Ressources naturelles et environnement A.13 11 convient de disposer de donn~es nettement meilleures pour g~rer les ressources naturelles et l'environnement de l' Afrique. La Banque mondiale s'est employ~e activement A identifier les bases de donn~es existantes et potentielles relatives A 1 'environnement et a organis~ une s~rie d'ateliers avec la participation du Programme des Nations Unies pour l'environneent (PNUE). 11 a ~t~ difficile de parvenir A un consensus sur un cadre appropri~, car deux approches distinctes s'opposaient. La premi~re se pr~occupe essentiellement des aspects physiques et met l'accent sur la mesure physique des variables relatives A l'environnement et aux ressources. La seconde privi1~gie les sysUmes de donn~es ~conomiques et tente d' obtenir des - 367 - mesures en termes monetaires. S'agissant de l'approche physique, un peu plus facile! mettre en oeuvre, on ne dispose pas des moyens necessaires pour fournir des mesures en unites communes. Quant! l'approche economique, elle est fondee sur des hypoth~ses controversees et elle est generalement d'application delicate. A.14 La Banque mondiale, oeuvrant en collaboration avec des sptkialistes des ressources, Ie Bureau de statistique de l'ONO et Ie PNUE cherche ! parvenir ! un consensus sur un cadre minimum qui reliera un ensemble de comptes satellites au syst~me de comptabilite nationale classique. II devrait @tre possible de concevoir un ensemble pratique de principes directeurs, sur la base d'etudes de cas effectuees par la Banque et par l'ONU et apr~s avoir teste diverses methodes comptables. A.IS Si l'on consid~re les revenus comme Ie flux de biens et de services que l'on peut consommer sans epuiser Ie capital, il faudra modifier les notions fondamentales en matiere de comptabilite nationale. Les cadres statistiques existants, comme Ie Syst~me de comptabilite nationale (SCN) concretisent une vision etroite de la production et du capital et mesurent Ie capital de maniere qui laisse ! desirer. II est encourageant de constater que 1es specia1istes nationaux qui revisent actuel1ement Ie SCN effectuent certaines modifications necessaires. Le nouveau SCN comportera un ensemble de recommandations relatives aux comptes satellites, en vue d'etab1ir des agregats ajustes tenant compte de l'uti1isation des ressources nature11es epuisab1es et des depenses afferentes A 1a protection de l'environnement. A.16 De nombreux pays ne disposent pas d'ensemb1e de donnees microeconomiques sur 1 'environnement , parce que 1es priorites et efforts statistiques mondiaux et nationaux n'ont pas permis de mettre au point 1es programmes appropries sur 1e plan des definitions, des methodes et de 1a classification. Le defi est donc de concevoir rapidement des systemes de donnees microeconomiques et des cadres comptab1es qui prennent en compte 1es ressources nature11es et 1es preoccupations eco1ogiques. L'app1ication de ces systemes et principes directeurs prendra du temps et i1 faudra que 1es uti1isateurs nationaux determinent l'ordre des priorites dans ce domaine. Statistigues relatives aux prix, au commerce et aux sa1aires A.17 La gestion rationne11e des systemes mutue1lement lies des prix et des incitations est critique pour parvenir A une croissance soutenue et equitable. Dans de nombreux pays, 1es indices des prix A 1a consommation sont fondes sur des ponderations depassees qui ne ref1~tent pas 1a structure actuelle de la consommation. Les series de prix uti1isees pour l'etablissement de ces indices ref1etent essentie11ement 1es prix en milieu urbain. Quant aux statistiques des salaires, e11es ne concernent, lorsqu' e11es sont etab1ies, qu 'un petit nombre de secteurs etroitement definis de l'economie. A.IS Compte tenu de l'importance des prix dans 1a po1itique des pouvoirs publics, i1 est essentie1 de mettre en place d'urgence un systeme integre de re1eve des prix et de ca1cu1 des indices. De nombreux pays d'Afrique, avec l'aide de 1a Communaute europeenne ont participe au projet de comparaisons internationa1es. Vingt-trois pays ont participe ! 1a derni~re phase (phase V) de ce projet. Bien que 1es informations aient ete uti1isees uniquement - 368 - pour calculer des parit~s du pouvoir d' achat aux fins de comparaisons internationales, on pourrait exploiter davantage l'ensemble consid~rable de donn~es recueillies. Le projet de comparaisons internationales pourrait, avec la collaboration de la Communaut~ europ~enne, atre ~largi de sorte A comprendre la mise au point d'un programme int~gr~ de statistiques des prix concernant les prix A la production, a la consommation, a l'importation et A 1 'exportation. Les progr~s pourraient @tre rapides si l'on augmentait l~g~rement Ie financement et si l'on renfor~ait les efforts en vue de former du personnel statistique national. Un programme relatif aux statistiques des prix devrait ~galement comporter des ~l~ments concernant l'~tablissement de manuels sur les m~thodes a employer pour regrouper et analyser les donn~es relatives au prix. A.19 Les statistiques des ~changes exterieurs, bien qu'elles soient les statistiques administratives les plus anciennes et les plus solides dans nombre de pays sont moins a jour et moins fiables ces derni~res ann~es. Le syst~me automatis~ concernant les donn~es douani~res - syst~me informatis~ Mis au point par la CNUCED et adopt~ par plusieurs pays d'Afrique subsaharienne - permettra d'actualiser les travaux relatifs aux statistiques du commerce ext~rieur. En plus d'am~liorer les donn~es sur les ~changes commerciaux et la balance des paiements, il facilitera l'enregistrement des recettes douani~res et permettra de calculer plus facilement les indices relatifs au prix et au volume des ~changes ext~rieurs. A.20 II serait possible de mettre en oeuvre un programme d' ~tablissement de statistiques des salaires dans des secteurs clefs administration, entreprises publiques, entreprises industrielles et commerciales grandes et moyennes et importants commerces de services si on l'int~grait A la collecte des statistiques de la production. Statistiques agricoles A.21 L'agriculture continuera de jouer un rOle consid~rable en Afrique. Toutefois, selon la plupart des analystes et responsables, les estimations disponibles de la production agricole ne sont pas fiables et laissent beauc:oup A d~sirer. La n~cessit~ de disposer rapidement de statistiques plus fiables de la production a ~t~ r~affirm~e aux niveaux national, r~gional et mond1al. Aussi bien l'analyse des politiques sectorielles que les syst~mes d'alE!rte pr~coce. l'~valuation des besoins en denr~es alimentaires et l'~tude des normes nutritionnelles exigent de disposer de donn~es de base sur la production agricole. Compte tenu de l'importance de l'agriculture et de sa part dans Ie PIB, les estimations relatives a la production agricole sont tout autant critiques pour la pr~paration de comptes ~dcro~conomiques. A.22 Les statistiques relatives a la production agricole ont ~t~ ~tablies dans la plupart des pays d'Afrique au moyen d'enqu@tes agricoles compl~t~es par des estimations des r~coltes, mal supervis~es (et de nature essentiellement subjective) effectu~es par des vulgarisateurs et d'autres fonctionnaires locaux. Dans les cas ou les techniques de mesures ont ~t~ objectives, la principale m~thode utilis~e a ~t~ d' effectuer des coupes-t~moins et de mesurer les parcelles et les zones cultiv~es. Toute~fois, dans de nombreux cas, les donn~es ainsi obtenues peuvent entralner des surestimations et des variations syst~matiques, en raison de l'hH~rog~n~it~ des conditions culturales dans les parcelles et les zones - 369 - examinees. De plu3, cette methode peut ~tre utilisee pour les cultures cereali~res mais ne convient pas aux cultures fruiti~res et aux cultures de tubercules. Ces probl~mes sont aggraves par Ie coOt eleve de cette methode et Ie temps considerable qu'elle necessite. La necessite de poster des enumerateurs dans des zones eloignees pendant de longues periodes accrolt les coOts, ce qui am~ne A utiliser des echantillons en grappe et de petite taille. II n' a pas ete possible de maintenir 18 collecte regulUlre de donnees relatives A la production dans Ie cadre d'un syst~me d'enqu~te A base large et on a donc davantage utilise des methodes subjectives. A.23 Dans Ie cadre des efforts nationaux deployes pour mettre en place des statistiques agricoles de base autre que les simples donnees relatives A la production annuelle, on a effectue d'importantes enqu~tes aux fins de recensements agricoles. Ces recensements ont coOte cher et n'ont pas encore produit les resul tats escomptes. En consequence de retards dans leur traitement, les donnees ont ete publiees avec des delais considerables - souvent de trois A cinq ans ce qui en limite la valeur pour des utilisateurs qui doivent resoudre des probl~mes immediats. A.24 Les critiques des methodes actuelles ont preconise des techniques plus simples et plus rentables de collecte des donnees de la production agricole, l'actualite etant un element important. De l'avis de certains, les exploitants peuvent fournir des estimations raisonnablement fiables de la production, ce qui permettrait de concevoir des echantillons meilleur marche et plus efficaces. La Banque mondiale, en cooperation avec la FAO et avec I' appui de 1 'UNICEF, a cherche A verifier l'hypothhe selon laquelle les estimations de la production obtenues en interrogeant les exploitants peu apr~s la moisson peuvent ~tre au moins aussi fiables que les estimations obtenues par des mesures physiques, y compris les coupes-temoins. Les conclusions de cette enqu~te peuvent ~tre resumees succinctement comme suit : Les coupes-temoins semblent entrainer d' importantes surestimations, de l'ordre de 30 % en moyenne, avec une fourchette de 15 A 40 %. Les estimations fournies par les exploitants sont remarquablement proches des chiffres effectifs relatifs A la production dans tous les pays. les variations etant comprises entre 8 % en moins et 7 % en plus. Les variations sont egalement nettement moindres que celles etablies sur la base de coupes-temoins. A.25 Les probl~mes qui se posent depuis des dizaines d'annees au sujet des donn~es relatives A la production agricole peuvent ~tre resolus si ces conclusions de recherche sont appliquees systematiquement et affinees. II faut maintenant s'employer A promouvoir ces methodes au moyen d'un programme de seminaires, de cours de formation, de manuels et d'applicationspratiques. Les pays d'Afrique auront besoin d'un appui financier modeste pour mener un tel effort, qui proviendra largement des ressources fournies par les donateurs et mises de cOte aux fins du suivi et de l'evaluation des projets de developpement agricole et rural. Ces ressources peuvent ~tre completees par des allocations budgetaires nationales au titre des recensements agricoles et des enqu~tes sur les coupes-temoins. Un tel effort devrait permettre d'ameliorer les estimations du PIB et de la production agricole. Autres statistigues de la production - 370 - A.26 Dans de nombreux pays d'Afrique subsaharienne, les donn~es relatives A la production d' autres secteurs sont elles aussi extr~mement lacunaires, si tant est qu'elles existent. La production industrielle est mal mesuree. La part des services dans la production totale est mal enregistr~e. Les donnees relatives aux finances publiques sont lacunaires et sont pr~sent~es avec des retards consid~rables. Les renseignements sur les transactions ext~rieures sont imprecis. Pour resoudre ces probl~mes, il faudra mettre au point un progranune ~ long terme visant ~ renforcer les systemes comptables et ~ renforcer les dispositifs statistiques nationaux. II faudra ~galement davantage tenir compte des utilisateurs dans la determination des priorites statistiques. Les enqu~tes statistiques classiques devraient repondre A des besoins specifiques plutOt que d'essayer de saisir toutes les donnees. Parall~lement aux enqu~tes sur les menages effectuees dans Ie cadre du projet relatif ~ la dimension sociale de l'ajustement, il faudra realiser une enqu~te bien designee et multisectorielle concernant les entreprises et les etablissements et portant, dans une premiere etape, sur un sous-ensemble d'entit~s economiques grandes et moyennes. Dans Ie cadre de cette enqu~te, on devrait recueillir uniquement des donnees sur la production, l'emploi, les salaires et la formation de capital. Comptabilite nationale A.27 Les informations precitees devraient permettre aux offices statistiques africains de disposer des ensembles de donnees de base necessaires a l'etablissement de comptes macroeconomiques dans Ie cadre du systeme de comptabilite nationale. En l'absence d'une conception integree de la mise au point de systemes d' information, il ne sera pas possible de real:Lser I' obj ectif recherche, mettre en place des comptes nationaux fiables et a jour. A.28 Dans Ie contexte du renforcement des systemes de comptabilite nationale, on peut identifier un certain nombre de mesures clefs. Le cadre du systeme de comptabilite nationale est complexe. Bien que la necessite urgente de manuels pratiques ait ete reconnue a l'occasion de la revision de ce systeme. en cours au niveau international, Ie Bureau de statistique de l'Om' n'a pas pu produire et publier rapidement de tels manuels, faute de disposer des credits necessaires. Une augmentation modeste des ressources s'impose, si l'on veut que les travaux se poursuivent. A.29 L'amelioration de la qualite et de l'actualite des comptes nationaux est un objectif a long terme dont la realisation demandera 10 ans ou plus. La plupart des pays d' Afrique subsaharienne trouveront que les moyens statistiques dont ils disposent ne suffiront pas a cette tache. M~me une fois que les flux d' information s' amelioreront, les retards dans les calculs emp~cheront que l'on dispose en temps voulu des comptes nationaux suffisamment ventil~s pour satisfaire les besoins en matiere d'analyse. II est donc necessaire d'effectuer un effort collect if en vue de calculer des estulations preliminaires et legerement agregees. Cela est a la portee de 1a plupart des pays et devrait etre fait de maniere systematique. Modernisation et renforcement des systemes statistiques - 371 - A.30 11 est complexe et difficile de construire des capacites viables pour disposer d' un flux de donnees pertinentes et d' actua1ite propres l faciliter la prise de decisions. Pour ce faire, il faudra renforcer les institutions existantes en mettant en place une infrastructure statistique viable. 11 faudra aussi concevoir des bases de sondage, dresser des annuaires des entreprises, preciser les methodes utilisees, concevoir des classifications et adapter les definitions. 11 faudra ega1ement, ce qui est tout aussi important, constituer un reseau de cadres et de personnel de niveau intermediaire et d' appui grAce l des activites de formation et de recyclage. Des programmes d' assistance bilateraux et multilateraux ont tente de fournir toute une gamme d' apports et de res sources aux fins de la realisation de ces objectifs. A.31 Les efforts de renforcement des dispositifs n'ont eu que des resultats modestes. On peut attribuer cet etat de choses l six problemes Insuffisance des ressources de contrepartie fournies par 1es gouvernements, ce qui laisse entendre qu'ils accordent peu d'importance l la mise au point de statistiques. Programmes circonstantie1s. Depart de statisticiens formes dans d'autres secteurs et disciplines. Decouragement du personnel des services statistiques en raison de 1a remuneration insuffisante, du manque de motivation et d 'une image peu valorisante. Programmes d'assistance repondant aux voeux d'uti1isateurs et axes vers la production d' informations destinees l des activites statistiques internationales hautement visib1es. Absence de strategie nationale l long terme relative aux syst~mes d'information. 11 importe maintenant de deployer des efforts aux niveaux national et international pour renforcer 1es syst~mes statistiques en Afrique. Efforts nationaux A.32 La plupart des offices statistiques d'Afrique subsaharienne commencent l renforcer et l moderniser les syst~mes. Ils doivent relever Ie double defi pose par les nouvelles demandes en mati~re de donnees et la grave penurie de ressources : manque de credits, exode permanent du personnel forme, infrastructure statistique affaiblie et inaptitude generale l produire les donnees demandees. 11 s' agit maintenant de satisfaire les divers elements de la demande en concevant un programme national coherent relatif aux flux d'information. II faut egalement que chaque pays convienne d'un ensemble minimum de priorites. 11 faut harmoniser les besoins divergents (et parfois conflictuels) des differents utilisateurs pour concevoir un programme statistique equilibre. 11 faudrait que, dans chaque pays, un programme - 372 - graduel de d~veloppement des statistiques sur plusieurs ann~es articule les priorit~s et d~termine syst~matiquement les besoins, ce qui servirait de base a l'~valuation syst~~tique des capacit~s d'~tablissement de donn~es. Au-dela de ces mesures initiales, il est crucial que les dirigeants engagent et continuent d'engager les ressources budg~taires n~cessaires. A titre de r~ciproque, il faudrait que les utilisateurs promettent de fournir des ressources et que les producteurs s'engagent a communiquer les renseignements n~cessaires, ce qui devrait entamer le processus a long terme de renforcement des organismes statistiques. A.33 La conception de systemes statistiques viables ne pourra progresser que si l'on change d'attitude et cherche a promouvoir une approche quantitative a la prise de d~cisions. Cette ~volution devra avoir lieu a tous les niveaux de l'administration parmi les responsables, les utilisateurs, les analystes et le personnel statistique et devra s'accompagner de mesures tangibles. A.34 FIXATION DES PRIORITES. Les pouvoirs publics et les responsables doivent, en collaboration avec les donateurs internationaux, prendre l'initiative pour d~terminer les besoins et les priorit~s et concevoir un programme d' action. Ils devront parvenir a un consensus dans plusieurs domaines. En premier lieu, pour cr~er des organismes a long terme, il faudra accorder la priorit~ absolue a la formation des nationaux a tous les niveaux du systeme statistique. De nombreux centres de formation existent d~ja aux niveaux national et r~gional mais ont besoin d' @tre renforc~s. 11 ~tait quelque peu erronn~ de mettre l'accent. comme on l'a fait, sur la formation au niveau sup~rieur. A l'avenir, il faudra davantage axer les efforts sur le personnel de niveau interm~diaire et privil~gier la formation pratique sur la theorie statistique. A.35 En deuxieme lieu, le manque de moyens de traitement des donn~es a constitu~ un important obstacle. Bien que le mat~riel ait dans certains cas const;.tu~ une entrave. c'est l'inaptitude a concevoir de logiciel qui a pos~ les probames les plus graves. Les progres rapides de la micro-informatique permettent maintenant d'utiliser des ordinateurs bon march~ au lieu des gros ordinateurs centraux. En outre, les programmes commerciaux relatifs aux statistiques et aux enqu@tes, relativement bon march~, suffisent pour la plupart des besoins. Et de nombreux progiciels ~tablis par 1 'ONU et les bureaux de statistique des pays d~velopp~s ne sont pas largement diffus~s. Si les pays se procuraient ces progiciels et dispensaient la formation n~ces~.airet ils n' auraient pas besoin d 'un logiciel personnalis~ qui exige que des informaticiens consacrent beaucoup de temps a la conception et a la mise c,u point des programmes. A.36 En troisieme lieu, il convient de s'interroger sur le probleme de l'actualit~t qui ne concerne pas seulement les moyens informatiques disponibles. Par tradition, les bureaux de statistique considerent que les donn~es leur appartiennent et s'abstiennent de pr~senter des tableaux sans les accompagner d·analyses. Mais la capacit~ d'effectuer de telles analyses leur fait souvent d~faut. La fonction d'analyse devrait @tre confi~e aux utilisateurs des donn~es qui ont g~n~ralement des sp~cialisations par sujet, ce qui. permettrait aux bureaux de statistique de se consacrer davantage aux probUmes statistiques et d' axer leur attention sur la publication plus - 373 - rapide des donn~es. Les offices statistiques disposant de moyens d'analyse devraient n~anmoins ~tre renforc~s. A.37 FINANCEMENT ET INCITATIONS. En plus d'~tablir des plans pluriannuels pour chacun des grands domaines d'activit~, il faut engager des ressources budg~taires avec une certaine garantie de continuit~. Cet engagement, politique et administratif, constituera un t~moignage pr~cieux pour ceux qui sont charg~s de la modernisation de l'appareil statistique. A.38 Les syst~mes d'incitation existants - les traitements et Ie statut du personnel statistique - sont inad~quats, a l'~vidence. II devrait ~tre possible de relever le moral et d' insuffler une nouvelle vie aux offices statistiques, grAce a des am~liorations, m~me modestes, des incitations. On ne pourra arr~ter l'exode des comp~tences et retenir le personnel que si l'on prend des mesures pour r~gler Ie probl~me des incitations. Parce que les probl~mes particuliers des offices statistiques m~ritent leur attention, les pouvoirs publics devraient assigner une haute priorit~ a la mise en place d'incitations appropri~es, mon~taires et non mon~taires, a l'intention du personnel statistique. En effet, les organismes statistiques continueront a stagner, si l'on ne r~gle pas Ie probl~me du d~couragement des effectifs en mettant au point un meilleur syst~me d'incitations. Efforts internationaux A.39 L'absence d'une coordination ad~quate entre donateurs, en particulier au niveau des pays, est peut-~tre la caract~ristique la plus saillante des efforts pass~s. Les programmes et priorit~s nationales en mati~re de statistiques ont fait l'objet de distortions en raison des interventions concurrentielles des donateurs. Pour ce qui du choix des disciplines statistiques, on a beaucoup insist~ sur la d~mographie et peu sur les donn~es agricoles. Les services consultatifs techniques fournis par les donateurs ont tendu a aboutir au d~tachement de conseillers de longue dur~e, ce qui a entraln~ des d~penses consid~rables. Peu a ~t~ fait pour adapter les m~thodes et les optiques a la situation locale. sommes consid~rables ont ~t~ affect~es au mat~riel et a Des l'~quipement, sans tenir compte des frais d'entretien et de fonctionnement ou de la n~cessit~ de disposer d'un logiciel connexe. Les efforts de formation ont ~t~ ax~s pour l'essentiel sur la formation post-universitaire a l'~tranger. Les centres r~gionaux se sont d~grad~s, les donateurs adoptant pour l'essentiel une approche par pays. Les programmes p~dagogiques des centres nationaux et r~gionaux ont privil~gi~ la th~orie sur les applications pratiques. - 374 - A.40 11 est essentie1 de coordonner 1es programmes d'aide pour tirer 1e mei11eur parti possible des ressources, pour fournir aux pouvoirs publics 1es moyens de concevoir des programmes viab1es de d~ve1oppement statistique, pour formuler 1es priorit~s, pour insuffler une optique r~gionale et pour r~a1iser les avantages des ~conomies d'~chel1e. 11 est sugg~r~ de cr~er un groupe consu1tatif africain sur les statistiques. Ce groupe, compos~ de tous 1es donateurs, bilat~raux et mu1ti1at~raux, s'occuperait des grandes questions pos~es par l'appui au d~ve1oppement statistique en Afrique, y compris ce1les qui vont au-de1A des pr~occupations statistiques nationa1es. Le groupe pourrait ~ga1ement constituer un fonds modeste, financ~ au moyen de contributions volontaires des organismes participants, qui acheminerait des ressources aux programmes r~gionaux d'appui - concernant en particu1ier 1es centres de formation r~gionaux, 1a mise a l' essai et l' adaptation des m~thodes en vue de r~pondre aux besoins de l' Afrique, l' ~tab1issement de directives et de manue1s avec une orientation africaine et 1e financement de 1a recherche et des exp~riences concernant 1es techniques statistiques appropri~es . A.41 En s'inspirant du mod~le relatif a 1a dimension socia1e de l'ajustement, 1e groupe pourrait s'occuper des aspects r~gionaux et internationaux des activit~s relatives au d~ve1oppement des travaux dans 1es quatre secteurs pr~cit~s statistiques socia1es et d~mographiques, statistiques relatives aux ressources nature11es et a 1 'environnement , statistiques des prix et de 1a production et comptes de 1a nation. Dans 1e cadre de son effort, i1 pourrait financer un groupe ~largi de consultants sp~cia1istes des domaines pr~cit~s, qui serait rattach~ soit a la Division de stlltistique de la CEA soit a d'autres organismes sous-r~gionaux. Ces consultants dispenseraient des services consu1tatifs techniques aux pouvoirs pub1i(:s dans 1e cadre de missions de courte dur~e et de visites p~riodiques, ce qui permettrait d'~viter de recruter des consultants pour une longue dur~e dans les pays. A.42 Pour rehausser l'importance des syst~mes d'information dans 1e cadre des programmes nationaux et internationaux, 1es groupes consu1tatifs ou 1es tables rondes p~riodiques de donateurs devraient inscrire r~guU.~rement a leur ordre du jour la question de 1a mise au point de systemes d' information nationaux. Les programmes statiatiques nationaux pourra.ient en suite ~tre examin~s dans un contexte plus large et 1es donateurs pourra.ient annoncer leur contribution, y compris pour ce qui est du financement des d~penses locales. De la sorte, 1es gouvernements africains et les donateurs porteraient beaucoup plus d' attention aux problemes des statistiques et 1a coordination n~cessaire serait assur~e. A.43 La mise en place de systemes d' information viables en Afrique subsaharienne sera gradue11e et demandera de long d~lais. De concert avec 1e donateurs internationaux, 1es pouvoirs publics et 1es responsab1es nationaux doivent prendre l'initiative pour d~terminer 1es besoins et les priorit~s et concevoir un programme d'action.