Le financement du logement en République du Congo Vers un logement abordable pour tous Groupe de la Banque mondiale Avril 2020 © 2020 Banque Mondiale 1818 H Street NW, Washington DC 20433 Telephone: 202-473-1000; Internet: www.worldbank.org Quelques droits réservés Ce travail est un produit du personnel de la Banque mondiale. Les constatations, interprétations et conclusions exprimées dans ce travail ne reflètent pas nécessairement les vues des directeurs exécutifs de la Banque mondiale ou des gouvernements qu'ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l'exactitude des données incluses dans ce travail. Les limites, les couleurs, les dénominations et les autres informations figurant sur une carte de ce travail n'impliquent aucun jugement de la part de la Banque mondiale concernant le statut juridique d'un territoire ou l'approbation ou l'acceptation de ces limites. Droits et autorisations Le contenu de cette œuvre est soumis au droit d'auteur. Étant donné que la Banque mondiale encourage la diffusion de ses connaissances, ce travail peut être reproduit, en tout ou en partie, à des fins non commerciales tant que la pleine attribution à ce travail est donnée. Attribution - Veuillez citer les travaux comme suit : Banque mondiale, 2020. Financement du logement en zone CEMAC : Vers un logement abordable pour tous. Banque mondiale, Washington D.C. Toutes les questions sur les droits et licences, y compris les droits subsidiaires, doivent être adressées à World Bank Publications, The World Bank Group, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA ; télécopieur : 202-522-2625 ; e-mail : pubrights@worldbank.org. 1 Remerciements Le Groupe de la Banque mondiale (GBM) tient à remercier les autorités du Cameroun, ainsi que les nombreuses institutions publiques et privées, régionales et nationales, qui ont aimablement contribué au présent rapport, notamment la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC) à la demande de laquelle les études ont été lancées. Le Groupe de la Banque mondiale tient également à remercier l’Affordable Housing Institute (AHI) et son partenaire FINACTU pour leur rôle majeur dans la recherche et la rédaction du rapport, ainsi que l'Agence française de développement (AFD), pour leur généreux soutien financier. La préparation du rapport a bénéficié d'un soutien supplémentaire de la Société financière internationale (SFI) dans le cadre de la fenêtre du programme de création des marchés du logement pour l’Afrique ASA. Enfin, le Groupe de la Banque mondiale adresse ses vifs remerciements aux membres de ses équipes qui ont dirigé et réalisé ce rapport. Cette étude a été conduite par une équipe de la Banque Mondiale supervisée par Mazen Bouri (Coordonnateur des programmes, Co-TTL, AFCC1) et Kiyotaka Tanaka (Spécialiste du secteur financier, Co- TTL, EA2F2). Les membres de l’équipe de base comprenaient aussi Simon Christopher Walley (Spécialiste Principal du Secteur Financier, ENFLT), Alphonsus Achomuma (Spécialiste senior du Secteur Financier, EA2F2), Joseph N. Besong (Spécialiste du Secteur Financier, EA2F2), Thierno Habib Han (Spéciale Senior finance du logement, CFGHF)). L'équipe reconnait également les commentaires et contributions fournis par les collègues du Groupe de la Banque mondiale, dont Bontje Marie Zangerling (Spécialiste Senior en Urbanisme, SAFU1), Serge Zelezeck (Consultant), Armel Jean-Louis Castets (Chargé des opérations senior, AFCRI), Loic Chiquier (Conseiller Senior, EFNDR), Alexandra Le Courtois (Spécialiste en Urbanisme, SAFU1). Fadwa Bennani (Spécialiste senior du Secteur Financier, GFCMW). Le design et la mise en forme du rapport ont été assurés par Odilia Hebga (Chargée des affaires extérieures, AFCC1). Salome Nadege Abomo Amougou, Antoinette Kounda Kiki et Aimé Bissama ont fourni les soutiens administratif et logistique. Enfin, l'équipe salue le soutien de l'équipe de direction de la Banque mondiale, notamment Elisabeth Huybens (Directrice régionale Afrique Ouest et Centre, EFI), Deborah Wetzel (Directrice de l’intégration régionale Afrique et Moyen-Orient), Abdoulaye Seck (Directeur des Opérations, AFCC1), Rashmi Shankar (Responsable d’équipe FCI, EA2F2), Mehita Sylla (Country Manager, CAFW4) et Korotoumou Ouattara (représentante résidente, AFMCG). 2 Table des matières Page Table des Illustrations ................................................................................................................................... 5 Liste des sigles, acronymes et abréviations .................................................................................................. 6 1. Objectifs de l’étude ............................................................................................................................... 7 2. Résumé analytique................................................................................................................................ 8 3. Contexte .............................................................................................................................................. 10 3.1 Facteurs économiques ................................................................................................................ 10 3.2 Facteurs démographique et niveau d’urbanisation.................................................................... 11 3.3 Déficit de logement..................................................................................................................... 11 4. L’Etat et les politiques de l’habitat ..................................................................................................... 12 4.1 Les agences et organisations publiques dans le secteur du logement ....................................... 13 4.1.1 Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat ............................................ 14 4.1.2 Ministère de l’Aménagement du Territoire et de la Délégation Générale aux Grands Travaux 14 4.1.3 La Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) ........................................................................... 15 4.1.4 Le Fonds National de l’Habitat (FNH) .................................................................................. 16 4.1.5 Société de Promotion Immobilière (SOPRIM)..................................................................... 16 4.1.6 Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains (AFAT) .............................................. 16 4.2 Analyse des politiques publiques de l’habitat ............................................................................ 17 5. Analyse de la chaine de valeur de l’offre ............................................................................................ 19 5.1 La question foncière.................................................................................................................... 19 5.2 Les promoteurs immobiliers ....................................................................................................... 21 5.2.1 SOPRIM ............................................................................................................................... 21 5.3 Grands programmes de logements de l’Etat .............................................................................. 22 5.4 Coûts de construction ................................................................................................................. 27 5.5 Construction écologique ............................................................................................................. 27 6. Analyse de la chaine de valeur de la demande ................................................................................... 29 6.1 Le secteur bancaire et les crédits hypothécaires ........................................................................ 29 6.2 Analyse de la Banque Congolaise de l’Habitat ............................................................................ 31 6.2.1 L’actionnariat de la BCH ...................................................................................................... 32 6.2.2 Analyse des emplois de la BCH ........................................................................................... 34 6.2.3 Analyse de la rentabilité de la BCH ..................................................................................... 36 3 6.3 La microfinance du logement ..................................................................................................... 39 7. Analyse et recommandations ............................................................................................................. 41 7.1 Analyse du pouvoir d’achat des ménages .................................................................................. 41 7.1.1 Selon le secteur d’activité ................................................................................................... 41 7.1.2 Selon les proportions de la population urbaine.................................................................. 42 7.2 Recommandations ...................................................................................................................... 43 7.2.1 Renforcer le secteur du logement à l’aide de réformes ..................................................... 43 7.2.2 Revoir le projet de loi sur le Fonds National de l’Habitat. .................................................. 44 7.2.3 Céder les logements construits sur le site de Mpila. .......................................................... 44 7.2.4 Développer des partenariats publics-privés à travers la SOPRIM ...................................... 45 7.2.5 Encourager le développement du secteur de la construction durable .............................. 46 7.2.6 Renforcer l’accès des banques commerciales aux ressources à long terme ...................... 46 7.2.7 Soutenir les ménages à revenus informels ......................................................................... 47 7.3 Conclusion ................................................................................................................................... 49 Annexe 1. La chaîne de valeur de l’habitat du Congo................................................................................. 51 Annexe 2. Projet de loi sur la promotion immobilière en République du Congo ....................................... 59 Annexe 3. Projet de loi portant sur le Fonds National de l’Habitat ............................................................ 65 Annexe 4. Détails de l’offre de financement à l’habitat de la Banque Congolaise de l’Habitat ................. 67 4 Table des Illustrations Figure 1 Evolution du taux d’inflation ......................................................................................................... 10 Figure 2 Logements de la Résidence du Clairon à Brazzaville .................................................................... 22 Figure 3 La résidence Flamboyant à Brazzaville.......................................................................................... 24 Figure 4 Logements sur le site Mpila, situé en périphérie de Brazzaville ................................................... 25 Figure 5 Logements construits à Kintélé ..................................................................................................... 26 Figure 6 Comparaison des prix d’un sac de ciment dans la CEMAC ........................................................... 27 Figure 7 Simulation EDGE ........................................................................................................................... 28 Figure 8 Evolution des encours des crédits logements au Congo. ............................................................. 30 Figure 9 Structure des fonds propres de la BCH (en millions de FCFA) en 2016 ........................................ 33 Figure 10 Structure des ressources de production de la BCH en 2017 (FCFA millions et en %) ................. 33 Figure 11 Structure du total actif de la BCH en 2016 et 2017 (FCFA millions) ........................................... 34 Figure 12 Composition du Produit Net Bancaire de la BCH (FCFA millions) en 2016 ................................. 36 Figure 13 Formation du résultat net de la BCH en 2017 (en millions de FCFA).......................................... 37 Figure 14 Analyse comparative du frais généraux d’exploitation (FCFA millions) de la BCH en 2016 ....... 38 Tableau 1 Analyse de la chaine de valeur du logement au Congo. .............................................................. 9 Tableau 2 Echelons de paiement définis par la SOPRIM ............................................................................ 22 Tableau 3 Aperçu des programmes de logements de la SOPRIM .............................................................. 24 Tableau 4 Part de marché des banques en termes de ressources et emplois en 2017 ............................. 29 Tableau 5 Benchmark des participations de l’État et performances de différentes banques de l’habitat 32 Tableau 6 Structure des encours crédits sains de la BCH sur le total de l’encours crédit (FCFA millions) . 35 Tableau 7 Tableau de sinistralité du portefeuille crédits de la BCH vs données marché ........................... 36 Tableau 8 Benchmark des frais généraux d’exploitation de la BCH en 2016 à ceux d’autres banques ..... 39 Tableau 9 Analyse d’accessibilité au logement selon le secteur d’activité et les conditions d’emprunt (8% sur 10 ans) ................................................................................................................................................... 41 Tableau 10 Demande solvable et conditions de prêt disponibles sur le marché ....................................... 42 Tableau 11 Prérogatives des acteurs privés et publics dans le cadre d'un partenariat public-privé ......... 45 Tableau 12 Régimes d’épargne offerts par la BCH ..................................................................................... 67 5 Liste des sigles, acronymes et abréviations AFAT Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains APEMF Association Professionnelle des Etablissements de Microfinance BCH Banque Congolaise de l'Habitat BECTC Bureau d’Etudes et de Contrôle des Travaux Cadastraux BEAC Banque des États de l'Afrique Centrale BHT Banque de l'Habitat de Tunisie BIDC Banque d’Investissement et de Développement de la Cédéao BOAD Banque Ouest Africaine de Développement CDCo Crédit du Congo CEMAC Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale CFC Crédit Foncier du Cameroun CGIDD Canback Global Income Distribution Database COBAC Commission Bancaire de l'Afrique Centrale COGETIM Congolaise de Gestion et de Transaction Immobilière CRRH Caisse Régionale de Refinancement Hypothécaire DGAFCT Direction Générale des Affaires Foncières, du Cadastre et de la Topographie EDGE Excellence in Design For Greater Efficiencies EMF Etablissement de Microfinance FCFA Franc CFA FMI Fonds Monétaire International FNH Fonds National de l'Habitat LCB La Congolaise de Banque MUCODEC Mutuelle Congolaise d’Epargne et de Crédit PEL Plan Epargne Logement PIB Produit Intérieur Brut PNB Produit Net Bancaire PND Plan National de Développement PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement PPA Partité Pouvoir d’Achat PPP Partenariat Public-Privé SFI Société Financière Internationale SNAT Schéma National d’Aménagement du Territoire SNHLM Société Nationale des Habitations à Loyer Modéré SOPRIM Société de Promotion Immobilière SOPROGI Société de Promotion et des Gestion Immobilière UEMOA Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest VEFA Vente en Etat Futur d’Achèvement VRD Voirie et Réseau Divers 6 1. Objectifs de l’étude Cet état des lieux du logement abordable en République du Congo s’inscrit dans le contexte d’une étude régionale sur le financement du logement au sein des pays de la zone de la CEMAC et est réalisée pour le compte de la Banque mondiale. Ce projet s’intitule : CEMAC - Feuille de Route Stratégique pour le Financement du Logement Abordable et Étude de Faisabilité d'un Mécanisme Régional de Refinancement des Prêts Hypothécaires. Au cours de ce projet, notre équipe a dressé six diagnostics nationaux et un diagnostic régional, qui s’applique à l’ensemble de la zone CEMAC. Chacun des six pays de la région a fait l’objet d’une analyse approfondie des enjeux locaux liés au secteur du logement et de consultations auprès des principaux acteurs et institutions du secteur. L’état des lieux présenté ci-dessous est la première étape de ce projet et forme le point d’ancrage d’une feuille de route stratégique pour le financement du logement abordable ainsi que pour une étude de faisabilité d’un mécanisme régional de refinancement hypothécaire. Ce rapport vise à établir un examen détaillé du secteur du logement en République du Congo, à évaluer les efforts et les actions menées en faveur de l’habitat abordable au niveau national, à identifier les lacunes et les faiblesses du secteur et à proposer des recommandations ainsi qu’une feuille de route stratégique. L’étude s’organise comme suit : • Analyse du contexte économique et démographique du pays et des dynamiques urbaines. • Analyse des politiques publiques de l’habitat et des acteurs publics impliqués dans le secteur • Analyse de la chaîne de valeur du logement, qui porte sur l’évaluation de l’écosystème du logement. Cette approche tente de réunir la totalité des aspects du secteur logement, permet d’établir une cartographie détaillée des acteurs clés dans le secteur du logement (question foncière, programmes de logements publics, promotion immobilière, secteur de la construction, secteur bancaire et crédits hypothécaires, microfinance) et d’identifier leurs rôles actuels et potentiels au sein de l'écosystème. Un marché immobilier résidentiel prospère résulte du fonctionnement des deux chaînes de valeur. • Analyse du pouvoir d’achat des ménages en fonction des prix du logement sur le marché, des conditions de crédits hypothécaires disponibles et des revenus des ménages • Propositions de recommandations adaptées au contexte et local et pensées dans le but de promouvoir le développement du logement abordable dans le pays. 7 2. Résumé analytique Malgré de nombreuses interventions de l’Etat congolais dans le secteur du logement en matière de production et de financement du logement, plus d’un foyer sur deux n’a pas accès à un logement décent. L’écosystème du logement au Congo connait de nombreuses faiblesses. Plus de 90% des logements du Congo sont construits via l’auto-construction. Le déficit de logement actuel nécessite la construction d’un minimum de 15 000 logements par an, bien au-delà de la production actuelle. L’Etat intervient directement dans le secteur à travers la Société de Promotion Immobilière (SOPRIM) et les grands projets de construction financés principalement par le gouvernement chinois. Plus de 1 000 appartements ont été construits à travers ces programmes, mais ils restent vacants faute de politiques claires pour l’attribution ou la vente de ces logements. Le crédit hypothécaire reste peu développé malgré la présence de la Banque Congolaise de l’Habitat. Les banques commerciales manquent d’accès en ressources longues et n’octroient que des crédits à court terme et moyen terme. Ces crédits relativement chers restreignent les capacités de paiement des ménages acquéreurs. Quant à la Banque Congolaise de l’Habitat, celle-ci opère telle une banque commerciale et octroie peu de prêts hypothécaires. Un Fond National de l’Habitat est alimenté par une taxe parafiscale prélevée sur les salaires des employés du secteur privé mais ne finance toujours pas le secteur du logement, faute de décret d’application. Un projet de loi est en cours de validation mais celui-ci reste vague (cf. 6.2.2 bénéficiaires, niveaux de revenus, etc.) et risque de ne pas remplir ses objectifs si des moyens de financement efficaces ne sont pas mis en œuvre. Le secteur privé et notamment les promoteurs immobiliers sont peu impliqués dans le secteur de l’habitat. Le secteur privé ne contribue ni à la promotion immobilière (offre de logement), ni aux financement de l’habitat à travers les banques commerciales (demande en logement). De nouveaux mécanismes devraient être encouragés et initiés afin de valoriser les ressources du secteur privé et de l’Etat. Dans cette optique, la création de partenariats publics-privés stratégiques pourrait être envisagée. Certaines contraintes structurelles limitent le développement du secteur à la fois au niveau de l’offre et de la demande. Le manque d’accès à des terrains titrés et des parcelles abordables restent un réel frein à l’investissement dans l’immobilier. Les services de base sont également insuffisamment développés. Le manque en infrastructure de base représente un coût additionnel, qui se répercute sur le prix final des logements. Par ailleurs, selon la loi congolaise, l’hypothèque doit être réinscrite chaque année auprès du cadastre, et ce pour toute la durée du prêt. Cette inscription est coûteuse et de nombreux ménages ont finalement recours à des crédits à la consommation afin d’éviter ce type de coûts supplémentaires. Le tableau ci-dessous illustre les 16 étapes de la chaine de valeur du logement au Congo en vert, orange et rouge en fonction du degré de priorité d’intervention. 8 Propriété Infrastructures Aménagement Configuration Evaluation du Constructi Vente/ Gestion de base du site du site risque on Transmissi et architecture on L’accès au Rarement L’aménage La Peu de Le coût Peu Absence titre foncier disponible. ment du configuration promoteurs des d’entreprises d’organisme est un site pose du site et immobiliers matéri immobilières compétent problème peu de l’architecture acceptent de aux est sont dédiées en matière Offre majeur. problèmes. des maisons prendre le relative au marché du de gestion du ne sont pas risque de ment logement parc de problématiq vente. élevé. abordable. logement ues. (collecte des frais de gestion et de maintenance ). L’accès Peu de Pas de Les ménages La clôture du Les banques L’hypothèqu Faible informel à la banques subvention ne disposent prêt ne pose manquent e doit être capacité de propriété est offrent des actuellement pas de la pas de de enregistrer réalisation de très répandu. crédits disponible malgré documentati problème ressources au cadastre l’hypothèque logements. le prélèvement on requise majeur mais a longues. chaque . Demande sur les salaires. pour des couts année. souscrire à élevés. un crédit hypothécaire . Eligibilité Commercialisatio Subvention Souscription Clôture du prêt Financement Services de Recouvrement n prêt Tableau 1 Analyse de la chaine de valeur du logement au Congo. Source : Affordable Housing Institute, 2019 Des interventions sont nécessaires en matière d’offre et de demande en logement afin de renforcer le secteur de l’habitat. Les ressources de l’Etat doivent être mieux valorisées et utilisées de manière stratégique afin d’agir sur les aspects critiques et les défaillances de l’écosystème du logement. L’Etat doit aussi encourager le secteur privé à s’impliquer et contribuer davantage au fonctionnement du secteur afin de devenir un acteur clé. Enfin, les ressources du secteur privé devraient être utilisées comme effet de levier afin d’atteindre les objectifs définis. 9 3. Contexte 3.1 Facteurs économiques La République du Congo est un pays riche en ressources naturelles et dispose de la 4ème réserve de pétrole d’Afrique subsaharienne et d’un territoire national recouvert à près de 60% de forêts tropicales. Cependant, le pays est confronté à des difficultés économiques depuis la chute des prix du pétrole en 2014. Le secteur pétrolier est au cœur de la politique économique du Congo. Le pétrole représente environ un tiers du produit intérieur brut (PIB) du pays, deux tiers de ses recettes fiscales et plus de 80 pour cent de ses exportations.1 La croissance économique a notamment fortement ralenti passant de 7,9% en 2014 à 5,3% en 2015 avant d’entrer en récession (-2,8 pour cent en 2016, -1,8 pour cent en 2017). Une analyse conjointe de la soutenabilité de la dette réalisée par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale en avril 2018 a abouti à la conclusion selon laquelle le Congo était surendetté. Alors que les cours mondiaux du pétrole se sont quelque peu redressés au cours de l’année écoulée et que des efforts ont été faits pour stabiliser la situation budgétaire, deux années de contraction économique (2016-2017) ont été suivies d’une légère reprise, de 1,6 pour cent, en 2018. Avec l’approbation d’un programme triennal avec le Fonds monétaire international (FMI) le 11 juillet 2019 suite à la restructuration de la dette avec la Chine, la croissance du PIB réel devrait se stabiliser autour de 2.2 pour cent pour 2019. Le Congo, comme tous les pays de la zone CEMAC, a pour monnaie le Franc CFA (FCFA). Le FCFA est indexé sur l’Euro selon une parité fixe,2 qui permet aux pays de la sous-région de jouir d’une stabilité monétaire. Le Congo connait une inflation plutôt stable et basse qui se situe aujourd’hui à environ 1%. Figure 1 Evolution du taux d’inflation Source : Trading Economics, 2019 1 Stratégie de partenariat Banque Mondiale – Congo, Novembre 2019 2 1 USD = 591 FCFA & 1 EUR = 655 FCFA 10 La courbe des taux d’intérêt des emprunts de l’Etat3 n’est pas disponible pour la République du Congo. L’Etat congolais n’a eu recours qu’à une seule émission sur les dix dernières années en 2016, pour un montant de 129 milliards FCFA (218 millions USD) sur 5 ans à un taux de 5,5%. Une inflation stable corrélée à des taux faibles des bons du trésor peuvent avoir un impact positif sur le marché du logement, car les crédits hypothécaires peuvent être délivrés à des taux raisonnables. Face à une croissance démographique et urbaine importante, l’accès au logement pour tous demeure un enjeu majeur au Congo. 3.2 Facteurs démographique et niveau d’urbanisation En République du Congo, 60% de la population vit en ville. Brazzaville et Pointe Noire sont les deux principaux centres urbains du Congo. C’est un des pays les plus urbanisés de la région avec plus de la moitié de sa population nationale concentrée dans seulement deux villes, Pointe Noire, le poumon économique du Congo et Brazzaville, capitale administrative.4 L’urbanisation en République du Congo s’est couplée au développement de l’habitat informel et de nombreux quartiers précaires sous-équipés et établis dans des zones à risque.5 3.3 Déficit de logement Le déficit de logement actuel nécessite la construction d’un minimum de 15 000 logements par an selon le Ministère de la Construction, de l’Urbanisme de l’Habitat. Le boom pétrolier de 2004 à 2014 a favorisé l’amorce de plusieurs programmes de logements publics. Mais depuis la récession et la crise pétrolière qui a frappé le pays en 2015, les investissements étatiques dans l’immobilier résidentiel se sont taris et les projets sont à l’arrêt.6 La construction de logements au Congo s’effectue principalement par des particuliers. L’auto- construction est le principal mode d’accès au logement. Il est estimé que l’auto-construction représente 90% du parc de logements sur le territoire congolais (soit 248 000 logements). La part de l’Etat est donc estimé à seulement 10% du parc de logements.7 3 Courbe des taux de rendement 4 The World Bank (2017) Republic of Congo. Poverty Assessment Report. Education, Jobs and Social Protection for a Sustainable Reduction of Poverty. 5 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 6 www.adiac-congo.com/content/quelle-politique-du-logement-au-congo-brazzaville-89087 7 11 http://www.vox.cg/des-logements-sociaux-pour-qui/ 4. L’Etat et les politiques de l’habitat L’Etat congolais est le principal acteur du secteur du logement et peu de projets sont conduits par le secteur privé. La politique du gouvernement est mise en œuvre grâce aux différentes directions et organismes sous la tutelle du Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat. A l’échelle nationale, le Congo a développé plusieurs visions gouvernementales pour le développement du pays au cours des années 2000. Les programmes « Nouvelle Espérance » (2002-2009) et « Chemin d’Avenir » (2009 - 2016), axés sur le développement et l’amélioration de conditions de vie des citoyens congolais couvrent des thématiques concernant l’aménagement des villes et l’habitat mais aussi la construction d’infrastructures de base et l’électrification du pays.8 Des projets, tels que l’accélération de la municipalisation et le renforcement de l’administration territoriale décentralisée, font partis des programmes qui ont été amorcés. De ces grandes orientations ont résulté plusieurs Plan National de Développement (PND) dont un récemment défini pour la période 2018-2022. En matière de logement, ce plan fait état des projets et des réformes du Congo pour améliorer l’accès au logement dans le pays sur les quinze dernières années. Ce plan revient notamment sur la création de la Société de Promotion Immobilière (SOPRIM), sur les projets de densification et de rénovation urbaine, sur la création de la banque de l’habitat, le lancement de programmes de logement privés et publics et la réforme du foncier de 2009. Le plan identifie et reconnait les principaux freins qui subsistent et limitent la portée de ces actions9 : o L’absence de politique cohérente de l’habitat o Le non-respect des normes en matière d’urbanisme et de construction o Le coût élevé des matériaux de construction o Les difficultés liées à l’accès à la propriété foncière Ce plan précise cinq grands axes stratégiques pour l’amélioration du logement à l’échelle nationale : o La mise en application des dispositions de la réforme foncière. o L’adoption d’un nouveau plan directeur pour les principales villes du Congo o La viabilisation et assainissement des espaces villageois o La création d’un fonds pour l’habitat o Le recentrage des missions de la Banque pour l’Habitat autour des projets immobiliers Cependant, les modalités de mise en place de ces réformes et les moyens alloués à ces programmes ne sont pas définis. Outre ces grandes orientations, le gouvernement a lancé en 2005 un projet de construction de 10 000 logements dits « sociaux » (appartements ou villas individuelles) sur plusieurs sites. Ces projets ont fait face à plusieurs difficultés qui ont induit des retards dans la construction (expropriation et déplacement des ménages occupant les terrains,10 manque de financement suite à la crise économique). 8 ONU-Habitat (2012), Profil urbain de Pointe-Noire 9 République du Congo (2018), Plan National de Développement, Cadre Stratégique de Développement 10 https://www.jeuneafrique.com/23904/economie/immobilier-congolais-cherchent-prix-vraiment-mod-r-s/ 12 En 2019, le Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat prévoit de réactualiser la Stratégie Nationale de l’Habitat de 1992 et s’engage à faire voter au parlement plusieurs réformes afin d’améliorer l’accès au logement, de promouvoir le logement abordable et de corriger certaines faiblesses du système actuel (notamment au sujet du Fonds National de l’Habitat). A l’échelle locale, de nouveaux schémas directeurs pour Brazzaville et Pointe Noire ont récemment été conçus pour remplacer les précédents plans d’urbanisme locaux datant des années 1980 et devenus obsolètes. Ces schémas serviront d’outils administratifs et de plan d’action pour les vingt prochaines années. De nombreux acteurs locaux ont contribué à l’élaboration de ces schémas, tels que les pouvoirs publics et des membres de la société civile. A l’heure actuelle, ces plans d’aménagement sont en attente de ratification au parlement.11 Ces schémas possèdent plusieurs axes stratégiques qui varient en fonction de besoins et des défis urbanistiques de Pointe Noire et Brazzaville. Ils redéfinissent également l’affectation des sols et contribuent à développer une véritable vision urbaine.12 Ces nouveaux plans représentent une opportunité pour le secteur de l’habitat et insufflent un nouvel élan aux pouvoirs publics en matière de programmes de logement. 4.1 Les agences et organisations publiques dans le secteur du logement L’Etat congolais intervient dans le secteur du logement à la fois au niveau de l’offre (production, construction de logements) et de la demande (financement du logement), laissant peu de place pour le développement d’un secteur privé. L’Etat prélève une taxe parafiscale de 2% sur les salaires des travailleurs du secteur privé afin de financer le Fonds National de l’Habitat. En revanche, ce Fonds National de l’Habitat, destiné à la Banque Congolaise de l’Habitat, ne peut être reversé faute de mécanismes juridiques et de normes légales lui permettant d’être transféré. Ces fonds ne sont pas utilisés et restent dans les caisses du Trésor Public. En théorie, l’Etat congolais a mis en œuvre un système tripartite, qui repose sur la collaboration de ses acteurs pour apporter des solutions à la problématique du logement et aborder les enjeux du secteur sous plusieurs angles. Ce système présente de nombreuses similitudes avec le modèle camerounais (un promoteur immobilier public, un aménageur public ainsi qu’une banque publique de l’habitat). Cette configuration se retrouve dans plusieurs pays de la région CEMAC. 1. L’Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains (AFAT) viabilise et aménage les terrains destinés à la construction. 2. La Société Nationale de Promotion Immobilière (SOPRIM) agit en tant que promoteur immobilier public et construit des habitations. 3. Le Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) finance à la fois les opérations de constructions et les crédits hypothécaires des acquéreurs. Aujourd’hui, ces institutions éprouvent des difficultés à collaborer ensemble efficacement. Ces institutions développent des projets indépendamment les unes des autres, favorisant un fonctionnement en silo. Plus de 1 000 logements ont été construits et financés grâce à un prêt de l’Etat 11 http://www.adiac-congo.com/content/urbanisme-brazzaville-et-pointe-noire-dans-vingt-ans-83210 12 http://www.adiac-congo.com/content/urbanisme-brazzaville-et-pointe-noire-dans-vingt-ans-83210 13 chinois mais ces logements sont vacants depuis plusieurs années, faute d’accord sur les modalités de distribution de ces logements. 4.1.1 Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat Le Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat est responsable de la mise en œuvre des orientations du gouvernement congolais en matière de logement. La stratégie nationale de logement est en cours de réfection et de réactualisation. La dernière stratégie nationale date de 1992. Bien que l’Etat ne parvienne qu’à construire 100 logements par an, le Ministère estime qu’afin de résorber le déficit de logements, un minimum de 15 000 logements par an devront être construits à l’échelle du territoire. Le Ministère dispose de plusieurs instruments et de mécanismes pour mettre en place sa politique de logement depuis 2008 et depuis la dissolution de la Société de Promotion et des Gestion Immobilière (SOPROGI). En effet, cet organe a donné naissance à plusieurs entités : • La Société Nationale de Promotion Immobilière, le promoteur immobilier public du Congo ; • La Banque Congolaise de l’Habitat, principal pourvoyeur de financements à l’habitat et de crédits hypothécaires ; • Le Fonds National de l’Habitat (FNH), qui par une taxe mensuelle prélevée sur les salaires du secteur privé, alimente la Banque Congolaise de l’Habitat ressources financières ; Certains instruments, tel que le Fonds National de l’Habitat, font l’objet de réforme dans le cadre de la nouvelle stratégie nationale du logement. Le Ministère souhaite également préciser les critères de définition d’un logement « social » pour aboutir à un véritable socle commun inscrit dans la loi. Un nouveau code de l’urbanisme et une nouvelle loi foncière sont actuellement examinés au parlement. 4.1.2 Ministère de l’Aménagement du Territoire et de la Délégation Générale aux Grands Travaux Le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux agit telle une agence de suivi et d’exécution des grands travaux pour l’ensemble des grands projets d’infrastructures, y compris les programmes publics en matière de logement. La politique de logement est établie par le gouvernement et le Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat qui transfert le dossier de programme au Ministère de l’Aménagement du Territoire et des Grands Travaux avec les termes de référence et le montage initial du projet. Le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux initie l’appel d’offre (ce ministère est aussi en charge des marchés publics) et sélectionne les meilleures offres, conjointement avec le ministère de tutelle. Une fois les travaux finis, le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux remet le projet au ministère de tutelle. A ce jour, le Ministère de l’Aménagement du Territoire et des Grands Travaux a participé à trois grandes opérations de logements à Brazzaville : Le projet de la Résidence Flamboyant (200 logements) et le projet du site de Mpila (960 logements) et le site de Kintélé (600 logements). De nouveaux projets de logements en partenariats public-privé sont en discussion. Le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux se substituer à l’AFAT ou la SOPRIM et l’Etat, de facto, met en concurrence ces différentes agences publiques. 14 4.1.3 La Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) La Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) a été créée en 2008, sur le modèle de le Banque de l’Habitat en Tunisie (BHT), comme outil de financement du logement pour le Congo. La BCH a été créée simultanément avec d’autres structures étatiques censées encadrer le développement de l’habitat au Congo (Société de Promotion Immobilière, Fonds National de l’Habitat, etc.). La BCH a développé plusieurs produits pour le financement du logement13 dont un Plan Epargne Logement, un Crédit Epargne Logement, un Crédit Immobilier Direct ainsi que des prêts destinés à la rénovation de logement. Des détails supplémentaires concernant les produits de financement à l’habitat proposés par la BCH sont disponibles en annexe. Malgré une gamme relativement diversifiée de produits destinés à l’habitat, la BCH manque de ressources longues pour proposer réellement ces produits. La BCH propose un Plan Epargne Logement (PEL) de 4 à 6 ans avec un taux de rémunération de 3,5% ainsi que trois régimes d’épargne de huit catégories avec pour plafond 180 000 FCFA (304 USD). La BCH accorde des crédits à des taux d’intérêt de 6,5% sur 5 ans (sur les PEL seulement) alors que les banques commerciales congolaises offrent des taux à 14%. Les produits à l’habitat proposés par la BCH étaient prévus d’être adossés au Fonds National de l’Habitat (FNH). En revanche, les fonds du FNH n’ont jamais été reversés et ni alloués à la BCH faute de structure adéquate et de législation en place. La BCH, supposée financer des produits de crédit à l’habitat via ce fonds, ne peut donc développer ses activités car elle ne perçoit pas les ressources du FNH. La BCH fonctionne aujourd’hui telle une banque commerciale et se finance via les dépôts qu’elle reçoit et propose des crédits à la consommation. L’encours des crédits hypothécaires de la BCH est de 20% du total des prêts mais ces crédits s’apparentent à des crédits à la consommation par leurs conditions (ils ne dépassent pas 5 ans). Les taux de sinistralité de la BCH sur tous types de crédits sont de 30%. La BCH accorde également des crédits immobiliers (ou crédits à la construction) pour les promoteurs immobiliers. Elle finance les promoteurs immobiliers et attribue les fonds en fonction de l’avancement des travaux. Aujourd’hui, La BCH est à la recherche de financements et de nouvelles ressources en attendant l’apport du FNH. Elle cherche également à développer des partenariats avec d’autres acteurs pour mettre en œuvre deux programmes de logement et contribuer au développement d’une offre de logement plus abordable. En effet, la BCH souhaiterait construire un programme de 20 000 logements et de 600 logements (prix fixé à environ 500 USD par mètre carré soit 295 000 FCFA, coût du terrain exclu) 14 . Des partenariats entre la BCH et des entreprises d’Etat chinoises sont en cours de négociations. Ces projets bénéficient d’une garantie de l’Etat congolais. 13 Banque Congolaise de l’Habitat, http://www.bch.cg/ 14 D’après nos entretiens, il est possible que l’Etat mette à disposition des terrains pour des projets de logements de grande envergure. Les logements seraient donc subventionnés (coût du foncier à la charge de l’Etat). Le projet est en cours de développement de fait que les prix, la superficie et les bénéficiaires de ces logements n’ont pas encore été déterminés. 15 4.1.4 Le Fonds National de l’Habitat (FNH) Le Fonds National de l’Habitat fait partie des instruments développés par le gouvernement congolais pour la mise en place d’une politique nationale de logement et prend la forme d’un prélèvement sur les salaires du secteur privé à hauteur de 2%. Dans le but de contribuer au financement du logement abordable au Congo, le FNH est censé financer la Banque Congolaise de l’Habitat, elle-même responsable d’accorder des prêts hypothécaires grâce à ces ressources. En revanche, depuis sa création il y a 10 ans, le FNH n’a jamais été déboursé ni alloué à la BCH faute de structure et de législation en place. Près de 13 milliards FCFA (22 millions USD) destinés à financer l’habitat se trouvent aujourd’hui au Trésor public. Un projet de loi destiné à créer une entité capable de distribuer les fonds du FNH (environ 3 milliards FCFA par an soit 5 millions USD) est en cours de préparation. La BCH compte sur ces fonds pour développer son offre de produits financiers destinée au financement de l’habitat. Le volet commercial des activités de la banque est de plus en plus important. 4.1.5 Société de Promotion Immobilière (SOPRIM) La Société de Promotion Immobilière (SOPRIM), anciennement Société de Promotion et des Gestion Immobilière (SOPROGI), s’appuie sur les orientations des politiques gouvernementales pour définir ses programmes et projets et intervient sur les volets qui concernent l’habitat, le logement et l’aménagement des espaces. Seul promoteur immobilier public, la SOPRIM a exécuté des programmes de logement dans plusieurs départements et sites du Congo et offre également plusieurs modèles d’habitations. Le parc immobilier de logement social et de « logement économique amélioré » se compose de villas de plain-pied, d’appartements, de duplex et d’immeubles type R+1, disponibles selon différents modes d’accession (location-vente, vente comptant ou vente étalée).15 Les logements de la SOPRIM s’adressent à plusieurs types de clientèles. La SOPRIM propose une offre de logement de haut/moyen standing, subventionnée par l’Etat (aménagement du site et mise à disposition du terrain) et de logement dit « économique ». Les proportions des différents types de logements pour un programme sont les suivantes : 70% de logements dits « sociaux » et 30% de logements dits « économiques ». La majorité des logements construits par la SOPRIM restent cependant onéreux pour les ménages congolais moyens et vont à une population aisée, employée dans le secteur privé. La SOPRIM gère son « parc ancien » de 311 logements autofinancés via des formules de location ou location-vente. Le nouveau parc construit depuis 2005 est toujours en cours d’exécution et comprend environ 3000 logements. 4.1.6 Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains (AFAT) L’Agence foncière pour l’aménagement des terrains (AFAT) est un organisme public responsable de la viabilisation et de l’aménagement des terrains. L’AFAT est sous la tutelle du Ministère des Affaires Foncières du Congo et a pour mission de pallier au manque d’infrastructure des terrains prêts à accueillir des projets de construction de tous types. L’AFAT obtient les terrains par don, attribution ou 15 https://soprimcongo.wordpress.com/ 16 achat et dispose d’une réserve d’environ 700 hectares de terres titrées sur l’ensemble du territoire. Elle vend ces terrains viabilisés aux particuliers ou à des promoteurs immobiliers. Créée en 2011, elle n’est réellement active que depuis 1 an et vient tout juste d’achever son premier projet : la viabilisation et l’aménagement de 3 hectares de terres à Brazzaville, près de l’aéroport. Les prix de vente de L’AFAT sont fixés à 30 000 FCFA (50 USD) par mètre carré. La classe moyenne et aisée congolaise a majoritairement bénéficié de ce programme : des parcelles de 500 mètre carré se sont vendues pour la somme de 15 millions FCFA (25 345 USD). L’AFAT souhaite se positionner en acteur incontournable de l’aménagement et de la viabilisation des terrains au Congo. Elle souhaite également agir en tant que régulateur des travaux de viabilisation dans lesquels elle ne serait pas directement impliquée (au Congo, les travaux d’aménagement se partagent entre le ministère de tutelle, l’AFAT et le secteur privé). L’AFAT demande une redevance de 5 000 FCFA soit 8,45 USD par mètre carré (redevance maximum, initiative en cours d’expérimentation) dans le cas où les promoteurs immobiliers n’utiliseraient pas les services de viabilisation de l’AFAT, qui joue tout de même un rôle de contrôle et de suivi dans la viabilisation. L’AFAT a bénéficié d’un financement de l’Etat pendant 3 ans mais doit aujourd’hui trouver de nouvelles ressources financières afin de se positionner en organisme viable et rentable, d’où la redevance. Si le terrain a initialement été acquis par l’AFAT via une donation, le prix de vente de ce terrain ne tiendra pas compte des coûts d’acquisition du foncier et sera donc moins cher. 4.2 Analyse des politiques publiques de l’habitat Les programmes de logement de l’Etat congolais font face à de nombreuses difficultés. En dépit des ressources investies, les résultats de ces programmes restent aujourd’hui très limités. Malgré un crédit16 obtenu de l’Etat chinois pour la construction de près de 1 000 logements, ceux-ci restent inhabités par manque de directives et de véritable politiques de distribution ou de vente pour ces logements. Les logements issus de ce type de programmes sont souvent coûteux et ne répondent pas à la demande de logement des ménages congolais. Il existe un écart important entre le pouvoir d’achat des ménages congolais et les logements à la vente disponibles sur le marché immobilier (les prix des logements à la Cité du Clairon peuvent atteindre 91 millions de FCFA, soit 153 800 USD alors que le salaire moyen varie entre 50 000 et 200 000 FCFA soit 85 à 340 USD).Afin d’être employées de manière efficace et d’avoir de réelles répercussions dans la promotion du logement abordable, les ressources de l’Etat devraient principalement cibler les foyers à faibles revenus. Bien qu’une taxe sur les salaires soit prélevée depuis plusieurs années, le Fonds National de l’Habitat n’existe pas. Un projet de loi est actuellement en cours de rédaction et devrait clarifier les mécanismes de redistribution du Fonds National de l’Habitat. Encadré 1. Analyse du projet de loi sur le Fonds National de l’Habitat Les ressources du Fonds National de l’Habitat devaient initialement être attribuées à la Banque Congolaise de l’Habitat, mais il serait préférable de rediriger les ressources de ce fonds à toute banque désirant participer au secteur du financement de l’habitat et développer des produits destinés à de telles activités de financement. Cela permettrait d’ouvrir ce secteur à la compétition. 16 Crédit à rembourser sur 20 ans (15 ans auxquels s’ajout ent 5 ans de délais pour le début de remboursement). 17 Un nouveau projet de loi est en cours de rédaction et a pour objectif de développer un mécanisme d’attribution du Fonds National de l’Habitat. Un document préliminaire a été transmis à notre équipe mais cette ébauche présente quelques lacunes. Avant ratification, les éléments suivants devraient être précisés et définis : - Qui sont les ménages bénéficiaires de ce fonds ? Quels seront les salaires et les niveaux de revenus éligibles à l’accession aux financements ? - La loi doit agir comme vecteur d’opportunités pour le secteur privé. Les financements devraient se partager entre la Banque Congolaise de l’Habitat et le secteur bancaire privé, désirant devenir acteur du secteur du financement de l’habitat. - La loi doit avoir pour mission l’amélioration des systèmes de financement de l’offre. Elle doit également s’assurer que les prix des logements restent accessibles aux foyers ciblés. Ces mesures doivent être mises en œuvre afin d’éviter les difficultés rencontrées par des organismes similaires, tel que le Crédit Foncier du Cameroun, au sein duquel les cotisations des travailleurs alimentent des crédits destinés à la diaspora camerounaise et aux ménages les plus aisés. 18 5. Analyse de la chaine de valeur de l’offre L’analyse de la chaine de valeur de l’offre cherche à évaluer le processus de développement, de construction et de vente d’un logement. Actuellement au Congo, la chaine de valeur de l’offre fait face à plusieurs difficultés liées au foncier, au manque d’investissement du secteur privé et aux risques de logements invendus qui freinent des investissements dans le secteur. En raison de la faible participation du secteur privé dans le développement de logement formel, la Société de Promotion Immobilière et le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux jouent un rôle prépondérant dans le secteur du logement. Les deux organismes ont signé des accords avec des entreprises étrangères afin de déléguer la construction de logements. Une analyse détaillée de la chaine de valeur de l’offre est présentée en annexe. 5.1 La question foncière Les difficultés liées au foncier sont les premiers obstacles qui limitent les investissements dans le secteur immobilier. Bien que de nombreuses réformes eurent été menées, les litiges liés aux problèmes fonciers demeurent un risque réel. Une Politique Nationale Foncière a été promulguée en 2015 suite à la réforme foncière engagée en 2009. La réforme foncière a engendré la création de nouveaux organismes et de nouvelles institutions comme le Fonds National du Cadastre, l’Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains, le Bureau d’Etudes et de Travaux Cadastraux.17 Suite à la réforme foncière, un plan d’action a été défini et se décline en quatre orientations et quinze mesures phares. Sa mise en œuvre est soutenue par un plan d’investissement de 158 millions USD (84 milliards FCFA) sur la période 2017-2020.18 Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) est particulièrement impliqué dans l’assistance, l’appui technique et le renforcement des capacités. La mise en place du plan d’action s’est retrouvée ralentie par la crise économique de 2015 et les difficultés du ministère en charge pour collecter des financements. Cette réforme s’inscrit dans le cadre d’une stratégie économique visant à limiter la dépendance du Congo au secteur des hydrocarbures et à diversifier l’économie du pays (l’économie congolaise est fortement dépendante du secteur pétrolier dans la mesure où ce dernier pèse pour ~50% du PIB). Elle vise également à réviser les modalités de mise en valeur du foncier, à réduire le nombre de litiges liés au foncier et à développer les recettes fiscales foncières. Des projets de cadastre national et de guichet foncier unique sont également prévus. Après 10 ans, la mise en œuvre des réformes reste complexe et partiellement achevée.19 L’Etat est propriétaire d’une grande partie du territoire national et suit une politique de « constitution des réserves foncières ». Les forêts couvrent 69% du territoire national. La propriété foncière est établie 17 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 18 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 19 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 19 par l’immatriculation du terrain.20 Les départements et les communes sont les acteurs principaux du domaine foncier. Les dépôts d’immatriculation se font auprès des conservations qui gèrent le registre manuellement. Selon la Direction Générale des Impôts en 2017, moins de 10% des biens fonciers du Congo étaient immatriculés et titrés. A Brazzaville, la Conservation Foncière estime qu’environ 6% des parcelles cadastrées sont pourvues d’un titre de propriété. Les terrains qui dépendent du droit coutumier ne sont pas systématiquement immatriculés par leurs propriétaires et expliquent ces faibles proportions.21 Les droits fonciers coutumiers subsistent au Congo et disposent d’un régime spécifique et aménagé. Il est possible d’établir des certificats provisoires de propriété usant des droits coutumiers. Ces documents provisoires sont censés être transformés en titres fonciers sur un terrain immatriculé après décision d’une commission de constatation des droits coutumiers, qui se compose de représentants de plusieurs secteurs (urbanisme, cadastre, services techniques de la ville). Notons que les droits coutumiers sont reconnus par les services municipaux, qui octroient des « permis d’occuper », qui valident une transaction de terrain sujet au droit coutumier. Selon une étude récente conduite par la Banque mondiale, la participation des « opérateurs coutumiers » est décisive et quasi inévitable dans la gestion des transactions foncières, qui sont régulièrement scellées par un simple contrat de gré à gré entre individus. Il existe également différents documents attestant du permis d’occuper des particuliers, considérés comme des « titres précaires » par le législateur. Ces documents n’ont pas de valeur juridique mais sont acceptés par l’administration congolaise pour défendre la propriété d’un terrain. Les nombreux contentieux liés au foncier sont traités par l’administration territoriale. Suite à la réforme foncière nationale, de nombreuses mesures ont été adoptées pour pallier aux faiblesses du système foncier actuel mais l’impact de ces dispositions sur le secteur reste modéré. Un « registre foncier urbain » pour les villes de Pointe-Noire et de Brazzaville, un Projet de Cadastre National et de Système d’Information Cadastral sont est en cours d’élaboration. En matière d’immatriculation, les démarches restent longues et onéreuses. Elles se composent de 13 étapes et nécessitent plusieurs déplacements auprès de la conservation. Aussi, plusieurs agences publiques ont soutenu la mise en œuvre de la réforme foncière de 2009 : Le Fonds National du Cadastre, l’Agence foncière pour l’aménagement des terrains (AFAT), et le Bureau d’études et de contrôle des travaux cadastraux (BECTC). Depuis 2018, les étrangers ne disposent plus des mêmes droits d’accès à la propriété que les citoyens congolais. Selon la loi fixant les règles d’occupation et d’acquisition des terres et de terrains, l’article 3722 réserve « l’occupation et l’acquisition des terres du domaine rural (…) aux personnes physiques et morales de nationalité congolaise ». L’article 41 définit que le droit d’occuper et d’acquérir des terres fonctionne désormais par réciprocité pour les non-nationaux vivant au Congo de manière régulière. En effet, il est possible pour des particuliers étrangers d’acquérir un terrain si leur pays d’origine autorise également les ressortissants congolais à devenir propriétaire sur leur territoire : « Les personnes étrangères régulièrement établies au Congo peuvent acquérir en cas de réciprocité établie, des terres et 20 Loi numéro 17-2000 du 30 décembre 2000 portant sur le Régime de la propriété foncière. 21 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 22 Loi numéro 21-2018 du 13 juin 2018 fixant les règles d’occupation et d’acquisition des terres et des terrains. 20 terrains en zones urbaine et périurbaine, à l’exception de celles venant des pays qui interdisent aux ressortissants congolais l’acquisition des terres et terrains sur leur territoire ».23 Plus récemment, l’impôt foncier a été rendu obligatoire pour toute parcelle de terrain grâce à la loi des finances de 2019. Cette loi porte également sur les droits fonciers exceptionnels, les frais des travaux cadastraux au mètre carré sur les superficies des terres et terrains, la redevance sur les travaux d’aménagement fonciers des espaces des terres, l’amende sur l’occupation illégale du domaine de l’Etat, des collectivités locales et des établissements publics24. 5.2 Les promoteurs immobiliers Peu de promoteurs immobiliers privés sont présents au Congo. La Société de Promotion Immobilière et le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux jouent un rôle prépondérant dans le secteur. L’Etat souhaite aujourd’hui développer des Partenariats Public-Privé (PPP). Dans le secteur du logement, les partenariats public-privé permettent à l’Etat de réduire les risques liés à un projet immobilier résidentiel, en répartissant ces risques entre acteurs du secteur privé (promoteur immobilier) et acteurs du secteur public (agences publiques spécialisées dans le secteur du logement et de l’habitat). En règle générale, lors de la mise en place d’un dispositif de partenariat public-privé, l’Etat met à disposition un terrain provenant des réserves foncières et le promoteur immobilier prend à sa charge les aspects liés au financement du projet ainsi qu’à la construction et la vente des logements. Ce mécanisme permet à l’Etat d’éviter l’endettement et de répartir les risques en fonction des avantages comparatifs de chacun des partenaires. Une loi sur les partenariats public-privé est en cours de rédaction. 5.2.1 SOPRIM La SOPRIM est le promoteur immobilier de l’Etat congolais. Les logements de la SOPRIM visent trois clientèles distinctes à travers des programmes de haut et moyen standing, ainsi que des programmes de logements économiques. Les programmes de logements les plus économiques se vendent entre 9 millions FCFA (15 000 USD) et 32 millions FCFA (54 000 USD). Les prix de vente varient en fonction des revenus des ménages acquéreurs. Les projets de la SOPRIM bénéficient d’une garantie de l’Etat congolais. Depuis la crise économique de 2014 et 2015, les chantiers de plusieurs sites sont suspendus (cf. la phase 3 de la Résidence Clairon) et l’Etat n’apporte plus se garantie aux projets de logements. La SOPRIM dispose de plusieurs programmes et modèles de logement disponibles à la vente. La commercialisation des logements construits via un partenariat public-privé se font sur dossier et sont cédés en VEFA (vente en état futur d’achèvement). Les bénéficiaires des logements SOPRIM remplissent un formulaire « demande de logement » et signent un contrat de réservation avec la SOPRIM à la suite d’un premier versement d’acompte de 20% du prix de cession. En ce qui concerne les logements 23 Loi numéro 21-2018 du 13 juin 2018 fixant les règles d’occupation et d’acquisition des terres et des terrains. 24 http://www.ambacongofr.org/index.php/l-ambassade/actualites/256-domaine-foncier-l-impot-devient- obligatoire-pour-toute-parcelle-de-terrain 21 construits sur les fonds propres de la SOPRIM, ces logements sont répartis en théorie en trois catégories pour leurs commercialisations et leurs mises sur le marché:25 • Le premier lot est dédié aux fonctionnaires du service public • Le second est censé être alloué à la Société Nationale des Habitations à Loyer Modéré (SNHLM)26 sous forme locative assortie d’une promesse de vente. La somme des loyers personnalisés versée par les ménages sur une durée de 10 ans est considérée comme un acompte pour l’acquisition de ce logement. Le reste des mensualités payé par les ménages couvre le solde du prix du logement restant. • Enfin, le troisième lot revient à la SOPRIM qui est directement responsable de la commercialisation des unités de logement soit par paiement comptant soit par le versement d’un acompte puis par mensualités accompagné de garanties bancaires. La remise des clés et la transaction du solde final s’effectue devant notaire. La SOPRIM pratique également la vente sur plan en échelonnant les paiements tel que présenté ci-dessous.27 Tableau 2 Echelons de paiement définis par la SOPRIM Echelons de paiement (%) Etapes 20 Signature du contrat de réservation 15 Achèvement des fondations 35 Mise hors d’eau (gros œuvre, couverture, toiture, étanchéité) 15 Mise hors de terre 10 Achèvement équipement 5 Remise des clés Source : SOPRIM, 2019 5.3 Grands programmes de logements de l’Etat En 2005, le gouvernement congolais initie un vaste projet pour la construction de 10 000 logements sociaux (appartements ou villas individuelles) sur plusieurs sites. Plusieurs programmes de logements ont vu le jour mais l’objectif de 10 000 logements n’est pas atteint et de nombreux logements co nstruits sont vacants. Les deux organismes publics ayant principalement contribué à ces programmes sont la SOPRIM et le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux qui se sont associés à des constructeurs étrangers pour la réalisation de ces programmes. Le projet de 3000 logements, dont la construction par la SOPRIM a débuté en 2005, est toujours en cours d’exécution. La SOPRIM a réalisé plus de 900 logements en partenariats public-privé sur l’ensemble du territoire. Figure 2 Logements de la Résidence du Clairon à Brazzaville 25 SOPRIM, https://soprimcongo.wordpress.com/ 26 Ces trois lots sont une répartition théorique et ne suivent pas forcément ces modalités en pratique. En effet, la SNHLM est prévue dans les textes de loi, mais l’agence n’a finalement jamais été mis en place. 27 SOPRIM, https://soprimcongo.wordpress.com/ 22 Source : Affordable Housing Institute, 2019 Le tableau ci-dessous indique les différents programmes de construction sur tous le territoire, auxquels la SOPRIM a contribué depuis plusieurs années. 23 Tableau 3 Aperçu des programmes de logements de la SOPRIM Prix (en millions de FCFA et hors Unités de Unités de Type de Nombre de Superficie frais de Département Programmes logement logement logement chambres (m²) notaires/ prévues réalisées établissement de titre foncier) Pool Programme Immeuble De 3 à 5 De 112 à De 20 à 50 200 67 Kinkala R+1 (4 500 options) Pool Programme F3 et F4 De 2 à 3 De 116 à De 17,5 à 23,5 30 30 Kindamba 173 Kouilou Programme F4, F5 & F6 De 3 à 5 De 174 à N/a 152 61 de Diosso 236 Pointe Noire Camp IGET Immeuble De 1 à 3 De 77 à De 31 à 82 1000 96 R+4 (3 205 options) Brazzaville Cité du Immeuble De 3 à 5 De 111 à De 32 à 91 1000 210 Clairon R+4 (4 278 options) Brazzaville Jardins de F4, F5 & F6 De 3 à 5 De 80 à De 32 à 91 280 140 Bacongo 215 Source : SOPRIM, 2019 Comme évoqué ci-dessus, le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux a participé à la construction de plusieurs programmes de logements : - La Résidence Flamboyant (Fig. 3) compte 200 logements et a été construite dans le cadre d’un partenariat stratégique avec la Chine. Le programme, dont la construction date de 2010, avait pour objectif de moderniser et densifier le centre-ville de Brazzaville. La Résidence Flamboyant se compose d’appartements de type T3 et T4 vendus en moyenne entre 22 et 25 millions FCFA (37 185 et 42 255 USD) L’Etat congolais a contracté un emprunt auprès de l’Etat chinois et d’Exim Bank de 125 millions USD. L’Etat congolais a pris le risque de vente et a signé un partenariat avec la Congolaise de Gestion et de Transaction Immobilière (COGETIM) et la Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) afin faciliter la vente. Figure 3 La résidence Flamboyant à Brazzaville 24 Source : Affordable Housing Institute, 2019 - Le site du Mpila (Fig. 4) compte 963 logements et avait pour but de désengorger le centre-ville de Brazzaville. Le programme, financé par la Chine à hauteur de 400 millions USD, a été réalisé par une entreprise de construction chinoise. Le projet de logement est construit sur le site d’un ancien camp militaire. Aujourd’hui, aucun de 963 logements n’a été vendu suite à des difficultés d’approvisionnement de la zone en électricité et au relogement de sinistrés de l’incident de 2012. En effet, l’explosion d’un entrepôt militaire, au printemps 2012, a détruit environ 15 000 habitations, avoisinant le nouveau programme de logement du Mpila. Les enjeux liés au relogement des sinistrés et à l’attribution de ces logements sont importants et pourraient expliquer le retard observé dans la vente des logements. Aujourd’hui, le ministère évalue le marché de l’immobilier local et tente de déterminer les prix de vente des appartements en partenariat avec la Banque Congolaise de l’Habitat. Le ministère a reçu le terrain gratuitement et envisage de développer un mécanisme de critère et de plafond de salaire afin de sélectionner les futurs acquéreurs et bénéficiaires. Figure 4 Logements sur le site Mpila, situé en périphérie de Brazzaville 25 Source : Affordable Housing Institute, 2019 - Depuis 2010, à Kintélé (Fig 5.), à environ 20 kilomètres de Brazzaville, 600 villas ont été réalisées sur les 1 000 initialement prévues. L’Etat a financé ce projet de 75 hectares pour la construction de logements de 70 à 150 mètre carré. Ces logements étaient destinés à la classe moyenne congolaise. Les prix étaient définis comme « économiquement améliorés » bien que peu d’informations relatives aux prix de vente soient disponibles. Ces maisons de plain-pied ont finalement servi à reloger les sinistrés de l’explosion du printemps 2012. Ces logements ne sont toujours pas raccordés aux systèmes d’adduction d’eau et d’assainissement. Figure 5 Logements construits à Kintélé Source : Affordable Housing Institute, 2019 Les revenus générés par la vente des programmes cités ci-dessus devaient initialement servir de fonds de roulement afin de financer d’autres programmes de logements. Aujourd’hui, ces fonds sont conservés par la Banque Congolaise de l’Habitat et n’ont pas encore été utilisés. 26 Les prix de ces logements mentionnés ci-dessus sont élevés et se situent entre 17,5 millions et 91 millions FCFA (29 580 et 153 836 USD). Le salaire moyen mensuel des Congolais se situe entre 50 000 et 200 000 FCFA (soit 85 à 340 USD) selon le secteur d’activités et ne permettent pas d’accéder à ce type d’habitat. Selon nos estimations, aux conditions de crédit actuellement disponibles sur le marché (10 ans, 8%), le montant maximum d’achat d’un logement est de 8 millions FCFA (13 532 USD). Ces logements semblent ne bénéficier in fine qu’à une population aisée et nantie. La principale voie d’acquisition d’une maison au Congo reste l’auto construction, une pratique abordable et accessible au plus grand nombre. 5.4 Coûts de construction Les coûts de construction pour les différents sites de logement construits par les agences du gouvernement se situent entre 280 000 et 350 000 FCFA au mètre carré (470 et 600 USD) pour les logements subventionnés. Il faut compter 800 000 FCFA au mètre carré (1 350 USD) pour les logements non-subventionnés. Les matériaux de construction ne sont pas produits localement ; Ils sont importés avec des coûts importants et ne bénéficient pas d’exonération de taxes. Seul le ciment est produit localement : quatre cimenteries ont été récemment construites, ce qui a contribué à la baisse des prix du sac de ciment, qui a été divisé par quatre (12 000 FCFA à 3 000 FCFA soit de 20 à 5 USD). Le prix du ciment au Congo est actuellement le moins élevé de la zone CEMAC. Figure 6 Comparaison des prix d’un sac de ciment dans la CEMAC 14000 12000 10000 8000 6000 4000 2000 0 RCA Gabon Tchad Guinée E. Cameroun Congo Kenya Source : Affordable Housing Institute, 2019 5.5 Construction écologique Les techniques de construction utilisées au Congo ne sont pas durables et consomment beaucoup d’énergie. Toutefois, l’utilisation de l’outil de simulation « Excellence Design For Greater Efficiencies » (EDGE), nous permet d’observer que des investissements de l’ordre de 1 300 USD par appartement, 27 pourraient améliorer l’ensemble de la construction et pourraient également répondre aux objectifs et aux critères fixés pour obtenir la certification EDGE pour des constructions durables et efficientes. Ces investissements incluent par exemple : la mise en place de panneaux solaires et d’appareils sanitaires qui conservent de l’eau. Ils permettraient aux ménages d’économiser environ 24 USD par mois sur leurs frais de consommation d’eau et d’électricité. L’amortissement et la rentabilité du coût engendré par ces travaux supplémentaires se réalisent sur 4 ans et demi. Les chiffres présentés ci-dessous sont issus de l’outil EDGE au cours d’une simulation de consommation énergétique pour un appartement type construit à Brazzaville. Figure 7 Simulation EDGE Source : EDGE, 2019 28 6. Analyse de la chaine de valeur de la demande L’analyse de la chaine de valeur de la demande cherche à évaluer la capacité des banques à octroyer des crédits hypothécaires à taux abordables et de long terme. En règle générale, le logement représente souvent le plus grand investissement d’un foyer. Cet investissement requiert des crédits à taux compétitifs afin d’amortir son coût sur la durée et de réduire les paiements mensuels. Actuellement au Congo, la chaine de valeur de la demande est encombrée d’obstacles au niveau de la souscription, du financement et de la réalisation de l’hypothèque. Ces problèmes cumulés font que les crédits hypothécaires ne sont disponibles qu’à seulement 2.8% de la population selon la base de données Global Findex. Une analyse détaillée de la chaine de valeur de la demande est présentée en annexe. 6.1 Le secteur bancaire et les crédits hypothécaires Le système bancaire congolais, considéré comme stable et en surliquidité avant la crise du pétrole, et le système financier ont été fortement fragilisés par la situation économique qui subsiste. Les arriérés accumulés par l’Etat ont entrainé une progression des créances en souffrance et ont induit une baisse des dépôts et des liquidités. Le nouveau Plan National de Développement annoncé en 2018 se concentre entre autre sur la consolidation du système financier en coopération avec la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC) et la Commission Bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC).28 Le système bancaire congolais comptait 11 banques29 en activités en 2017. Le tableau ci-dessus présente les parts de marché des banques en fonction des ressources qu’elles reçoivent et utilisent en 2017. Tableau 4 Part de marché des banques en termes de ressources et emplois en 2017 Banques Ressources Pourcentages Banques Emplois Pourcentages du marché du marché BGFIBANK 365 379 26,7 BGFIBANK 433 166 33 CDC 176 501 13,2 LCB 177 804 13,5 ECOBANK 170 841 12,8 CDC 141 683 10,8 LCB 169 011 12,6 BCI 118 724 9 SGC 113 824 8,5 SGC 105 967 8 BCI 108 707 8,1 ECOBANK 105 922 8 BSCA 105 128 7,8 BSCA 91 881 7 UBA 58 341 4,3 UBA 60 416 4,6 BPC 36 032 2,7 BCH 39 275 3 BCH 33 887 2,5 BPC 29 839 2,2 28 République du Congo (2018), Plan National de Développement, Cadre Stratégique de Développement 29 Banque Congolaise de l’Habitat (BCH), Banque Commerciale Internationale (BCI), Banque Espirito Santo Congo (BESCO), BGFIBANK CONGO (BGFI), Banque Postale du Congo (BPC), Banque Sino Congolaise pour l’Afrique (BSCA), Crédit du Congo, ECOBANK, Congolaise de Banque (LCB), Société Générale Congo (SGC), Banque UBA-Congo (UBA) 29 BESCO 3 303 0,2 BESCO 6 382 0,4 Volume des 1 331 954 100 Volume des 1 331 059 100 dépôts crédits Source : Rapport du système bancaire congolais, exercice 2017 Selon le bulletin des statistiques des coûts et des conditions de crédit au Congo, publié par la BEAC, les taux d’intérêts moyens pour les crédits à long terme varient de 4 à 12% pour les crédits d’équipement/investissement et les crédits immobiliers confondus. Les taux d’intérêts moyens pour les crédits à moyen terme varient de 10 à 17% pour les crédits à la consommation, les crédits immobiliers et les crédits d’investissement et d’équipement confondus. L’activité de crédit hypothécaire est très marginale au Congo et ne permet pas de résorber le déficit de logement existant. La forte hausse du crédit immobilier résidentiel sur la période 2009-2014 s’explique par le boom pétrolier avec une activité économique florissante couplée à la création de la Banque Congolaise de l’Habitat en 2008. La baisse importante des crédits immobiliers résidentiels depuis 2014 est due à une récession économique avec le choc pétrolier. Figure 8 Evolution des encours des crédits logements au Congo. 30,000 CFA 25,000 CFA 20,000 CFA 15,000 CFA 10,000 CFA 5,000 CFA - CFA 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 Source : BEAC, 2019 La crise a ainsi occasionné une vague de pertes d’emplois sans précèdent dans le pays causant un appauvrissement des ménages et par conséquent un amoindrissement des dépôts auprès des banques, dont la BCH. À titre d’exemple, Baker Hughes a licencié 85% de son personnel, Halliburton 45%, Schlumberger 47% dans la période de la crise (2014-2017). La Banque Congolaise de l’Habitat est l’institution phare, créée spécialement pour accorder de crédits pour faciliter l’accession à la propriété. Aujourd’hui, le manque de ressources à long terme et la situation du Fonds National de l’Habitat évoquée précédemment dans notre analyse, empêchent la BCH de jouer pleinement son rôle de prêteur pour des crédits hypothécaires et freinent ses activités. 30 D’autres banques commerciales proposent des crédits hypothécaires telles que La Congolaise de Banque (LCB) ou Ecobank, mais le poids du financement à l’habitat dans les activités des deux banques reste marginal comme décrit ci-dessous. La Congolaise de Banque (LCB) propose des crédits à 7,8% sur 10 ans (elle se refinance sur le marché CEMAC à hauteur de 6,6%). Selon la LCB, ces crédits ne sont destinés qu’à une clientèle aisée, capable de démontrer des preuves de revenus élevés et stables. Pour l’année 2018, le financement du logement représente seulement 1 milliards FCFA (1,69 millions USD) pour la LCB. Ecobank accorde des crédits hypothécaires sur 8 ans pour des montants plafonnés à 100 millions de FCFA (170 000 USD). Ecobank segmente sa clientèle par employeurs afin de proposer les produits les plus adaptés à chaque type de ménages et de revenus. Selon Ecobank, les produits pour le financement à l’habitat s’écoulent difficilement car les clients sont peu enclins à contracter des crédits hypothécaires face aux frais induits par ces types de prêt. Les frais de réinscription de l’hypothèque sur les registres du cadastre ainsi que des frais de notaires et d’acquisition de titres fonciers pouvant atteindre 15% du prix du bien agissent sur la décision des ménages. Les clients Ecobank optent pour des crédits à la consommation, aux conditions plus avantageuses (crédits plafonnés à 20 millions FCFA, soit 33 820 USD (sans besoin de garantie) pour financer leur achat ou leur projet d’auto construction. L’encours des crédits hypothécaires se situe entre 300 et 500 millions de FCFA (500 000 à 845 000 USD) sur un portefeuille de 8 milliards FCFA (13,5 millions USD), soit 6,25% du portefeuille total. Ecobank a également accordé des financements pour des projets de promotion immobilière mais ces crédits sont en souffrance : Sur 4 milliards FCFA (6 millions USD), 3 milliards (5 millions USD) sont des créances douteuses (soit 75%). La Société Générale propose un « Prêt Personnel Immobilier » à tout client titulaire d’un compte chèque et ayant domicilié ses revenus à la Société Générale. Le montant des mensualités et les taux d’intérêts sont personnalisés mais la durée du prêt peut s’étendre jusqu’à 10 ans.30 Le Crédit du Congo (CDCo) offre des emprunts immobiliers pour financer l’acquisition d’un bien immobilier ou sa construction. Le CDCo offre des prêts pour une durée maximum de 7 ans aux particuliers disposant d’un compte de dépôt et ayant domicilié leurs revenus au CDCo.31 Le développement des crédits hypothécaires est freiné par une loi obligeant les foyers à enregistrer leur hypothèque chaque année auprès du cadastre. Cette procédure a un coût : la réinscription de l’hypothèque est égale à 1% de la valeur de la propriété la première année et de 0,25% les années suivantes (à cela s’ajoute également des frais de notaire). Les coûts liés à la souscription d’une hypothèque sont élevés et dans ces conditions de nombreux foyers préfèrent emprunter des financements destinés à la consommation. 6.2 Analyse de la Banque Congolaise de l’Habitat La BCH fut créée en 2008 sur la base du modèle de la Banque de l’Habitat en Tunisie par les gouvernements congolais et tunisien suite à un accord cadre devant aboutir à la création d’une banque dédiée au financement du logement en République du Congo. Cette initiative émanait d’un besoin de 30 Société Générale Congo, https://societegenerale.cg/ 31 Crédit du Congo, http://www.creditducongo.com/ 31 logement sans cesse croissant au rythme de l’exode rural vers les principales villes et des réalisations de la Tunisie dans le domaine du logement, qui font d’elle un partenaire stratégique L’objectif assigné à la BCH est le financement des opérations visant le développement de l’habitat et de l’l’immobilier. À ce titre, l’État avait également créé, dans la même année, le FNH pour financer les activités de la BCH.32 À l’instar d’une banque classique, la BCH octroie ses crédits exclusivement sur la base des dépôt s de la clientèle avec un taux de couverture des crédits par les dépôts de 112% en 2017. La BCH a en effet été contrainte à cela en raison de l’accumulation des créances sur FNH au titre des taxes prélevées, devant lui revenir afin de financer son activité d’octroi de crédit. En effet, à sa création, il a été prévu que les ressources de la BCH proviennent des taxes collectées par le FNH. Les fonds collectés n’ont jamais été déboursés et alloués à la BCH, qui a ainsi dû développer ses mécanismes de collecte de dépôts des épargnants pour financer son activité d’octroi de crédits. 6.2.1 L’actionnariat de la BCH L’actionnariat de la BCH compte une participation majoritaire de l’État qui impacte fortement sa performance dans la mesure où les charges de personnel consomment la moitié du produit net bancaire (PNB) réalisé en 2016 (vs 33% pour la BHS et 32% pour la Banque de l’Habitat de Tunisie). À ce jour, la direction générale de la banque est assurée par un représentant de l’État tunisien, dans le but d’apporter son expertise sur la base des expériences réussies par la Banque de l’Habitat de Tunisie. Les crédits à l’Etat représentent 1,7% des encours de la BCH. Tableau 5 Benchmark des participations de l’État et performances de différentes banques de l’habitat CREDIT LIBELLES DE POSTES (FCFA FONCIER DU SOCIETE GENERALE BCH BH - TUNISIE BH - SENEGAL MILLIONS, 2016) CAMEROUN CONGO (CFC) PARTICIPATIONS DE L’ETAT 83,7% 75,0% 33,4% 17,7% 13% DEPOTS DE LA CLIENTELE 44 605 23 685 1 407 576 219 166 117 604 ENCOURS CREDITS CLIENTS 39 682 117 234 1 975 864 281 767 103 038 TAUX DE COUVERTURE 112% 20% 71% 78% 114% DEPOTS/CREDITS PRODUIT NET BANCAIRE 4 961 5 455 83 468 15 146 8 021 CHARGES DE PERSONNEL / 50% - 32% 33% 20% PRODUIT NET BANCAIRE CREDITS A L’ÉTAT 681 52 311 - - 693 RESULTAT NET - 2 438 - 1 668 + 24 932 + 5 793 -360 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo, 2017 32 Loi de finance 2008, République du Congo 32 Analyse des ressources de la BCH Les fonds propres de base de la BCH se sont progressivement dégradés du fait des pertes accumulées au fil des années pour s’établir à ~6,1 milliards FCFA (~10 millions USD) en 2016 soit 61% du capital social minimal exigé par la réglementation bancaire de 10 milliards FCFA (~16,9 millions USD). L’absence d’une quelconque subvention étatique paralyse le renforcement des ressources longues, limitées en 2017 à ~6,5 milliards FCFA (~10,9 millions USD) grâce au concours des provisions pour risques généraux (provisions de libre emploi, non règlementaires), qui n’est à peine que de 500 millions FCFA (~845 300 USD). Figure 9 Structure des fonds propres de la BCH (en millions de FCFA) en 2016 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo, 2017 La BCH dispose de ressources très limitées et peu adaptées pour développer sa production de crédit à l’habitat du fait de faiblesse des dépôts à terme, qui sont des ressources longues adaptées pour le financement du crédit immobilier. En effet celles-ci, ne représentent que 12% de l’ensemble des ressources et ne s’élèvent qu’à ~4,2 milliards FCFA en 2017 (~7,1 millions USD). Ces ressources sont extrêmement faibles comparées au déficit de logement annuel pouvant être estimé à ~104 milliards FCFA (~175,8 millions USD). Figure 10 Structure des ressources de production de la BCH en 2017 (FCFA millions et en %) 33 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo La faiblesse des dépôts à terme s’explique par le faible niveau du revenu des ménages. En effet, le niveau du SMIG est de 90 000 FCFA (180 USD) et le niveau de revenu moyen mensuel par ménage à la consommation (en parité de pouvoir d’achat) est de ~252 400 FCFA (505 USD) sachant que 94% des ménages urbains et 85% des ménages ruraux ont un revenu inférieur à cette moyenne.33 6.2.2 Analyse des emplois de la BCH L’actif total de la BCH reflète peu le niveau de l’activité d’une banque de l’habitat à cause de la faible proportion des créances à long terme malgré le poids important des crédits à la clientèle. En effet, le poids des crédits à la clientèle domine globalement sur 2016 et 2017 et s’élève à 57% respectivement sur les 2 exercices. Ainsi une analyse de la composition des crédits à la clientèle montre un faible niveau des crédits à long terme, limité à ~1,8 milliard FCFA (~ 3 millions USD) soit ~5,9% des crédits à la clientèle. Ce faible niveau est corrélé au manque criant de ressources longues, nécessaires pour financer les crédits à long terme. Figure 11 Structure du total actif de la BCH en 2016 et 2017 (FCFA millions) 33 Center for Affordable Housing in Africa, 2019 34 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo Les crédits au logements octroyés par la BCH sont pour la plupart des crédits moyen terme d’une durée moyenne de 5 ans, assortis à un taux de 6%. Tableau 6 Structure des encours crédits sains de la BCH sur le total de l’encours crédit (FCFA millions) LIBELLÉ POSTE (FCFA MILLIONS) 2016 POIDS (%) 2017 POIDS (%) VAR. (%) CRÉDITS À LONG TERME 838 2,5% 1 829 5,9% +118,3% CRÉDITS À MOYEN TERME 13 580 41,0% 9 769 31,6% -28,1% CRÉDITS À COURT TERME 11 887 35,9% 11 637 37,6% -2,1% AUTRES CRÉANCES 6 838 20,6% 7 691 24,9% +12,5% Source : Rapport du système bancaire en République du Congo Par ailleurs, il est important de noter que la BCH dispose aujourd’hui d’un excédent de ressources de long terme avec des dépôts à long terme s’élevant à ~4,2 milliards FCFA (~7 millions USD) en 2017 contre 1,8 milliards FCFA (~3 millions USD) de crédits à long terme. Cette situation s’explique entre autres par : • La faiblesse de la demande par des emprunteurs répondant aux conditions d’éligibilité et de solvabilité de la BCH notamment en matière de revenu régulier domicilié chez la banque et de garantie hypothécaire acceptable ; • Les problèmes liés aux titres fonciers rendant les hypothèques peu réalisables donc irrecevables ; Doing Business classe le Congo au rang de 177ème sur 189 en matière de difficulté 35 d’enregistrement des titres fonciers. Le portefeuille de crédit de la BCH est relativement sain avec un niveau de sinistralité en dessous de la moyenne nationale. En effet, en 2016 les créances en souffrance et créances douteuses de la BCH représentaient 15,4% alors que celles du secteur bancaire au Congo s’élevaient à 180 milliards FCFA (~304 millions USD), représentant seulement 5% du total des encours crédits. Le niveau de provisionnement de la BCH en 2016 était correct avec un taux de 42,2%, supérieur à celui du secteur bancaire au Congo de 25%34 en 2016. Tableau 7 Tableau de sinistralité du portefeuille crédits de la BCH vs données marché DONNÉES LIBELLÉ POSTE (FCFA MILLIONS) 31/12/2016 31/12/2017 VARIATION (%) MARCHÉ 2016 CRÉANCES EN SOUFFRANCE 6 539 4 168,0 -7,5% 180 110 TOTAL CRÉANCES CLIENTS BRUTES 42 439 39 275,0 -36,3% 1 376777 TAUX DE SINISTRALITÉ 15,4% 10,6% -4,8 pt 13% PROVISIONS 2 757 4 181 +51,7% 45 228 TAUX DE PROVISIONNEMENT 42% 100,3% +137,9% 25% Source : Rapport du système bancaire en République du Congo 6.2.3 Analyse de la rentabilité de la BCH La BCH a une structure de revenus d’une banque commerciale classique constituée principalement de la marge des opérations avec la clientèle et dans une faible mesure la marge sur opérations diverses. En effet, le PNB de la BCH s’est établit à ~5 milliards FCFA en 2016 (~8,4 millions USD) constitué à 75% de la marge des opérations avec la clientèle et 25% des opérations diverses. Les dépôts en plan d’épargne logement coûtent 3,5% sur 6 ans à la BCH alors que les crédits au logement sont proposés à un taux d’intérêt de 6% sur 5 ans. Ce niveau de PNB est négligeable représentant 3% de celui du secteur au Congo en 2016. Figure 12 Composition du Produit Net Bancaire de la BCH (FCFA millions) en 2016 34 Taux de provisionnement calculé en prenant compte des créances en souffrance et des créances douteuses 36 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo À titre de comparaison, la BCH est très performante par rapport au Crédit Foncier du Cameroun (CFC): en effet avec un actif total 4,5 fois inférieur à celui du CFC, elle réalise quasiment le même niveau de PNB que ce dernier. La BCH a un résultat net déficitaire légèrement aggravé entre 2016 et 2017 passant de ~-2,0 milliards à ~-2,4 milliards FCFA (~4 millions USD). Cette situation s’explique par les niveaux très importants des frais généraux (coefficient d’exploitation de 89% en 2016 et 105% en 2017) et du coût du risque (~1,7 milliards de FCFA). À titre de comparaison le résultat net de la BCH est largement déficitaire par rapport au CFC encore moins la Banque de l’Habitat du Sénégal qui a réalisé un résultat net de 6,3 milliards FCFA en 2017 (~2,8 millions USD) favorisé par un coefficient d’exploitation de ~71%35 et un coût de risque nul depuis 2012. Figure 13 Formation du résultat net de la BCH en 2017 (en millions de FCFA) 35 Coefficient d’exploitation = Frais généraux d’exploitation (frais généraux, charges de personnel, charges générales d’exploitation) rapportés au Produit Net Bancaire 37 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo Les frais généraux d’exploitation de la BCH s’élèvent en 2016 à 4,4 milliards FCFA (~7,4 millions USD) avec un coefficient d’exploitation de 89% et ~4,2 milliards FCFA (~7 millions USD) pour un coefficient d’exploitation de 105% en 2017. Ce niveau est largement supérieur par rapport au standard sectoriel de 60%. La figure ci-dessous illustre clairement le niveau élevé du coefficient d’exploitation de la BCH par rapport à d’autres banques de l’habitat analysées, exceptée le CFC avec une performance plus mitigée. Figure 14 Analyse comparative du frais généraux d’exploitation (FCFA millions) de la BCH en 2016 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo 38 Une analyse comparative par rapport aux banques similaires ressort une productivité de l’effectif de ~37 millions FCFA (65 530 USD), soit 2 fois meilleure que celle du CFC, mais encore loin derrière celle de la Banque de l’Habitat de Tunisie. Tableau 8 Benchmark des frais généraux d’exploitation de la BCH en 2016 à ceux d’autres banques BANQUE DE BANQUE DE LIBELLÉ POSTE BCH CFC L’HABITAT L’HABITAT SÉNÉGAL TUNISIE PRODUIT NET BANCAIRE 4 961 4 944 13 680 79 187 (FCFA MILLIONS) FRAIS GÉNÉRAUX D’EXPLOITATION (FCFA 4 400 6 166 7 158 34 545 MILLIONS) COEFFICIENT D’EXPLOITATION 89% 125% 52% 44% EFFECTIF 152 285 - 1844 PNB/EMPLOYÉ - 43 37 17 (FCFA MILLIONS) NOMBRE D’AGENCES 8 13 24 135 Source : Rapport du système bancaire en République du Congo La BCH affiche clairement sa difficulté à financer les besoins en logements au Congo avec des ressources limitées et peu adaptées. Les mesures à prendre pouvant renforcer ses capacités et l’appuyer pour mieux réussir dans sa mission de promotion du financement de l’habitat sont les suivantes : • La diversification des ressources de la BCH avec le recours à du financement de long terme ; • La réduction des frais généraux d’exploitation afin de nouer avec une rentabilité pérenne et durable ; • Le renforcement du dispositif de sélection et de gestion des risques permettant de réduire son coût du risque ; 6.3 La microfinance du logement Les zones urbaines de Pointe Noire et Brazzaville concentrent la majorité (71%) des établissements de microfinance du Congo. En 2013, la Direction Générale des Institutions Financières Nationales relevées comptait 30 établissements de microfinance (EMF) agrés, dont un réseau de plus de 30 points de service. Parmi ces 30 EMF, 20 font partie de la catégorie 1 et 10 font partie de la catégorie 2 défini par la 39 COBAC.36 Il existe depuis 2002 une Association Professionnelle des Etablissements de Microfinance (APEMF) au Congo.37 Encadré 2. Les Établissements de Microfinance (EMF) au sein de la zone CEMAC Dans la région CEMAC, le secteur de la microfinance est régulé par la Commission Bancaire de l’Afrique Centrale (COBAC) qui a établi trois catégories d’Établissements de Microfinance (EMF)38: • Catégorie 1 : Coopératives avec un minimum de 100 membres permanents, dont aucun ne peut être propriétaire de plus de 20% des actions. • Catégorie 2 : EMF qui acceptent les dépôts de la clientèle avec un capital minimum requis de 300 millions de FCFA (506 000 USD) • Catégorie 3 : EMF qui ne peuvent pas accepter les dépôts de la clientèle, avec un capital minimum requis de 150 millions de FCFA (253 000 USD) Les Mutuelles Congolaises d’Epargne et de Crédit (MUCODEC) se sont développées dans les années 1980 via le Crédit Mutuel, desservent principalement les milieux ruraux et reste les principaux établissements de microfinance du pays. Le modèle des MUCODEC définit une organisation mutualiste et une redéfinition des rôles dans laquelle les clients s’associent et deviennent propriétaires de la banque. En 2011, les MUCODEC disposaient de 110 milliards FCFA (185 millions USD) de dépôts avec des encours de crédits avoisinant 40 milliards FCFA (67 millions USD). Les MUCODEC se composent de 250 000 sociétaires dont 54 000 fonctionnaires.39 En 2013, les MUCODEC étaient à l’origine de 87% des crédits octroyés par le secteur de la microfinance contre 13% pour les autres EMF. En ce qui concerne les dépôts, le réseau MUCODEC détient 84% dépôts collectés contre 16% pour les EMF.40 Malgré la présence de nombreuses EMF au Congo, peu proposent des produits spécifiques au logement par manque d’accès en ressources long terme. Les ménages souhaitant investir dans le logement ont souvent recours à un crédit à la consommation ordinaire. 36 Portail Findev, République du Congo 37 Portail Findev, République du Congo 38 Règlement EMAC n° 01/02/CEMAC/UMAC/COBAC du 13 Avril 2002 “Relatif aux conditions de d’exercice et de contrôle de l’activité de Microfinance dans le CEMAC�. Les exigences ont été relevées en 2018 et les IMF ont jusqu'en 2021 pour s'y conformer pleinement, avec des augmentations annuelles. Voir Règlement COBAC EMF-R 2017/01 a 05. 39 https://cg.ambafrance.org/Les-Mucodec-un-modele-de 40 40 Portail Findev, République du Congo 7. Analyse et recommandations 7.1 Analyse du pouvoir d’achat des ménages Il existe peu de données disponibles concernant la distribution des revenus des ménages en Afrique centrale. Pour cette analyse, nous avons utilisé les informations de la base de données C-GIDD (Canback Global Income Distribution Database). Il n’est pas exclu que ces données contiennent quelques erreurs et/ou des incohérences. En revanche, nous considérons que ces données sont suffisamment fiables pour la réalisation de cette analyse. Seules les données relatives aux populations vivant en zones urbaines ont été prises en considération et ce pour deux raisons : (i) peu de logements formels sont construits en zone rurale ; (ii) cette étude se concentre principalement sur les zones urbaines de la République du Congo. Notre analyse s’appuie sur les prix des logements les moins chers en République du Congo. Ces logements sont souvent subventionnés par le gouvernement. Notons que ces logements sont rarement disponibles et correspondent à la meilleure option sur le marché. Aussi, les taux des crédits hypothécaires utilisés sont ceux du marché et des banques commerciales. 7.1.1 Selon le secteur d’activité Peu de données sont disponibles concernant la distribution des revenus des ménages au Congo. La Banque mondiale41 dispose en revanche d’informations sur les salaires moyens par type d’employeur et secteur d’activité. Afin de mener cette analyse, nous analysons les prix plafond des logements en fonction des salaires moyens de chaque secteur d’activité et des conditions de crédits hypothécaires sur le marché (10 ans, 8%). Par exemple, un individu employé dans le secteur de la construction (120 000 FCFA par mois soit 200 USD) peut théoriquement acquérir un logement au prix plafond de 4 millions FCFA (6 765 USD). Tableau 9 Analyse d’accessibilité au logement selon le secteur d’activité et les conditions d’emprunt (8% sur 10 ans) Salaire moyen mensuel Prix maximum d’achat Domaine d’activités FCFA USD FCFA USD Agriculture 50 000 85 1 700 000 2 875 Commerce 60 000 100 2 000 000 3 382 Autres services 75 000 127 2 500 000 4 227 Construction 120 000 200 4 000 000 6 764 Education/sante 130 000 220 4 400 000 7 440 Transport 130 000 220 4 400 000 7 440 Services 140 000 237 4 800 000 8 117 Production 150 000 254 5 000 000 8 454 41 République du Congo Rapport sur l’Analyse de la Pauvreté Education, Emplois et Protect ion Sociale pour une Réduction Durable de la Pauvreté, Mai 2017, Banque Mondiale 41 Administration 180 000 304 6 100 000 10 319 Mines 200 000 338 8 000 000 13 532 Source : Banque Mondiale 2017, Affordable Housing Institute 2019 Or, les prix des logements sur le marché formel sont plus élevés et en réalité aucun des niveaux de salaires détaillé ci-dessus ne permet d’accéder à un logement, aux conditions hypothécaires du marché. Afin de renforcer l’accès au logement, des initiatives en matière de financement (les conditions de crédits hypothécaires doivent être améliorées) et de construction de logement (les prix des logements doivent baisser) doivent être prises. 7.1.2 Selon les proportions de la population urbaine D’après les informations disponibles, il semblerait qu’aujourd’hui seulement 21% de la population urbaine dispose de revenus suffisants pour acquérir le logement le moins onéreux sur le marché, aux conditions hypothécaires actuelles. Le prix du logement le plus abordable sur le marché du logement au Congo est de 25 millions FCFA (soit 43 300 $ PPP). Les conditions des crédits hypothécaires sur le marché actuel, soit un taux d’intérêt à 8% sur 10 ans, ne bénéficient qu’aux ménages à hauts revenus. En ajustant les conditions de prêt (taux d’intérêt à 7% sur une durée de 20 ans) à l’aide d’une caisse de refinancement hypothécaire42, on observe que le pourcentage de la population urbaine avec un revenu moyen pouvant accéder à ce même logement atteint 36%. Tableau 10 Demande solvable et conditions de prêt disponibles sur le marché 42 Une Caisse Régionale de Refinancement Hypothécaire (CRRH) permettrait aux banques commerciales de la région CEMAC d’accéder à des ressources longues et d’octroyer plus de cr édits hypothécaires à des conditions d’emprunt avantageuses. Aujourd’hui, le manque de ressources à long terme pour les banques commerciales est un véritable obstacle au développement du crédit hypothécaire, dont la durée est actuellement plafonnée entre 7 et 10 ans. Une CRRH est susceptible de rallonger la durée d’un emprunt et d’étaler le remboursement de l’emprunt sur 20 ans afin de rendre le crédit plus abordable et accessible. 42 Eléments Conditions actuelles Conditions améliorées Prix du logement (FCFA) 25 000 000 25 000 000 Prix du logement ($ PPA) 43 300 43 300 Acompte 8 700 8 700 Montant du crédit 34 600 34 600 Taux d’intérêt 8% 7% Durée (années) 10 20 Paiement annuel (en $ PPA) 5 000 3 200 Paiement mensuel (en $ PPA) 417 267 Revenu annuel nécessaire (en $ PPA) 16 700 10 700 Revenu mensuel nécessaire (en $ PPA) 1 400 890 # de ménages urbains pouvant acquérir un 112 858 196 181 logement % de ménages urbains pouvant acquérir un 21% 36% logement Source : CGIDD & Affordable Housing Institute, 2019 Afin de rendre le logement accessible au plus grand nombre, une baisse des prix de ventes et une amélioration des conditions des crédits hypothécaires seraient nécessaires. 7.2 Recommandations 7.2.1 Renforcer le secteur du logement à l’aide de réformes Des réformes pourraient être envisagées afin de renforcer l’écosystème du logement et de remédier aux défaillances du secteur en ce qui concerne : - La gestion du foncier. Le Congo a initié plusieurs réformes destinées à améliorer et clarifier les conditions d’accès à la propriété foncière. Cependant, l’adoption et la mise en œuvre de ces réformes restent limitées et circonscrites à quelques initiatives. Le Congo doit poursuivre ses efforts sur les initiatives suivantes : o Numérisation des cadastres ; o Réduction du temps de résolution des litiges liés au foncier à travers des tribunaux spécialisés ; o Réduction des coûts d’enregistrement d’un bien immobilier. 43 o Droit des entités étrangères à posséder des terrains - La procédure de réinscription annuelle de l’hypothèque auprès du cadastre. Le développement du secteur des crédits hypothécaires est actuellement freiné par une loi obligeant les ménages à inscrire leur hypothèque chaque année auprès du cadastre. Cette procédure a un coût : la réinscription de l’hypothèque coûte à 1% de la valeur de la propriété la première année et 0,25% les années suivantes (à cela s’ajoute également des frais de notaire). Les coûts liés à la souscription d’une hypothèque sont élevés et dans ces conditions de nombreux ménages préfèrent emprunter des financements destinés à la consommation. L’Etat devrait mettre fin à l’obligation de réinscription de l’hypothèque afin de stimuler le marché des crédits à l’habitat. 7.2.2 Revoir le projet de loi sur le Fonds National de l’Habitat. Bien qu’une taxe sur les salaires soit prélevée depuis quelques années, la structure du Fonds National de l’Habitat n’existe pas encore. Un projet de loi est actuellement en cours de rédaction et devrait clarifier les mécanismes de redistribution du Fonds National de l’Habitat. Les ressources du Fonds National de l’Habitat devaient initialement être attribuées à la Banque Congolaise de l’Habitat, mais il serait préférable de mettre ces ressources à la disposition de toutes banques souhaitant développer des produits de financement du logement, ouvrant ainsi le secteur à la concurrence. Avant adoption du projet de loi, les éléments suivants devront être précisés : a. Qui seront les ménages bénéficiaires de ce fonds ? Quels seront les salaires et les niveaux de revenus des personnes éligibles aux financements ? b. La loi doit agir comme un vecteur d’opportunités pour le secteur privé. Les financements devraient être répartis entre la Banque Congolaise de l’Habitat et le secteur bancaire privé. c. La loi doit avoir pour mission l’amélioration des systèmes de financement de l’offre. Elle doit également veiller à ce que les prix des logements restent accessibles aux foyers ciblés. Ces mesures doivent être mises en œuvre afin d’éviter les difficultés rencontrées par des organismes similaires tel que le Crédit Foncier du Cameroun, au sein duquel les cotisations des travailleurs alimentent des crédits destinés à la diaspora camerounaise et aux ménages les plus aisés. 7.2.3 Céder les logements construits sur le site de Mpila. Le site du Mpila compte près de 900 logements et avait pour but de désengorger le centre-ville de Brazzaville. La construction de ce projet de logement s’est achevée en 2012. Le projet, réalisé par une entreprise de construction chinoise a été remis à l’Etat congolais. La vente et l’attribution des logements n’a toujours pas abouti : aujourd’hui, tous les logements du site de Mpila sont vacants. Le ministère évalue le marché de l’immobilier local et tente de déterminer les prix de vente des appartements en partenariat avec la Banque Congolaise de l’Habitat. Afin de mettre en valeur les ressources de l’Etat, le prix de vente des appartements ainsi que les conditions de revenus pour accéder à ces logements devraient être précisés. En effet, l’Etat pourrait 44 envisager la mise en place de plafonds de revenus pour les ménages acquéreurs afin de veiller à ce que ces logements subventionnés bénéficient aux ménages qui n’ont pas les capacités financières d’acquérir un logement au prix du marché. 7.2.4 Développer des partenariats publics-privés à travers la SOPRIM La SOPRIM pourrait poursuivre ses activités en matière de logement, sans mobiliser de ressources supplémentaires, en jouant le rôle d’une agence publique en charge des partenariats public-privé dans le secteur du logement. En effet, les partenariats public-privé (PPP) constituent un moyen efficace de répartir les risques liés aux coûts des grands programmes de logement entre le gouvernement et les acteurs du secteur privé. Cependant, les contrats de partenariat public-privé dans le secteur du logement diffèrent de contrats de partenariat public-privé d’infrastructures classiques. Les négociations entre les promoteurs immobiliers et le gouvernement aboutissent rarement à des projets concrets. Ces projets devraient également faire l’objet d’appels d’offres, suivis d’un processus de sélection rigoureux et transparent. Les partenariats public-privé dans le secteur du logement peuvent revêtir plusieurs formes. Le tableau ci-dessous présente une structure simplifiée de partenariat public-privé au sein duquel le gouvernement met à la disposition du promoteur immobilier des terrains et fournit les infrastructures de base (eau, électricité, voirie). Le promoteur immobilier est, quant à lui, responsable du financement du projet et des risques liés à la construction et à la vente des logements. Le gouvernement peut également être impliqué dans le processus d’attribution des logements et le choix des bénéficiaires, notamment si les coûts du foncier et des infrastructures sont subventionnés. Tableau 11 Prérogatives des acteurs privés et publics dans le cadre d'un partenariat public-privé No. Coût de développement Gouvernement Promoteur immobilier privé 1 Terrains √ 2 Infrastructure √ 3 Plans des logements √ 4 Permis de construire √ 5 Financement √ 6 Construction √ 7 Risque lié à la vente √ 8 Garantie de performance √ 9 Critères de vente/bénéficiaires √ Source: Affordable Housing Institute, 2019 La SOPRIM pourrait jouer un rôle dans la mise en œuvre de PPP et superviser les étapes suivantes : - Sélectionner les terrains adéquats ; - Initier des appels d’offres afin de sélectionner les investisseurs et les promoteurs immobiliers ; 45 - Développer des critères de vente afin de veiller à ce que seuls les ménages cibles bénéficient d’un logement ; - Veiller à ce que les promoteurs immobiliers respectent leurs engagements contractuels et à ce que les logements soient vendus aux ménages initialement ciblés ; La SOPRIM restera ainsi un acteur du secteur de la construction abordable et ce en utilisant les ressources financières et techniques mises à disposition par le secteur privé. L’AFAT pourrait également participer au développement de PPP en collaborant avec la SOPRIM. L’expertise de l’AFAT en matière de viabilisation et d’aménagement des terrains sera utile et participera au succès de ces projets. 7.2.5 Encourager le développement du secteur de la construction durable Peu de logements sont construits de manière durable au Congo, bien que l’investissement nécessaire pour réduire la consommation énergétique de ces logements soit relativement faible et pourrait être amorti en quelques années. Les simulations EDGE montrent que l’investissement supplémentaire nécessaire pour satisfaire des critères de construction écologique et durable se situe entre 1 000 et 2 000 USD en fonction de pays de la zone CEMAC. Ces investissements permettraient entre autres aux ménages de réduire leur consommation d’eau et d’électricité et de réaliser d’importantes économies. Afin de promouvoir les techniques de construction durables, le Congo devrait mettre en place les programmes suivants : 1. Former les promoteurs immobiliers, les banques et les ménages aux bienfaits économiques, sociaux et environnementaux des matériaux et techniques de construction durable ; 2. Promouvoir l’utilisation de l’outil EDGE ; 3. Mettre en place des exonérations fiscales et des incitations financières destinées à promouvoir l’utilisation de techniques de construction durables par les acteurs du secteur privé ; 4. Veiller à ce que tous les programmes publics de logement suivent des pratiques durables ; 7.2.6 Renforcer l’accès des banques commerciales aux ressources à long terme La majorité des banques du Congo ont exprimé un manque d’accès aux ressources à long terme, phénomène qui les limitent dans leurs activités de prêt hypothécaire. En effet, les banques ont essentiellement recours aux dépôts pour financer leur portefeuille de prêts. Or, les dépôts clients sont constitués essentiellement de dépôts à vue (75%) et peu de dépôts à terme (18% contre 30% dans la zone UEMOA et 39% au Maroc). De plus, les règles prudentielles de la BEAC, et notamment le ratio de transformation, limitent la capacité des banques et des institutions de microfinance à déployer des ressources à court terme pour financer des crédits sur le long terme. Par conséquent, les crédits accordés par les banques sont de courte durée (souvent moins de 7 ans). Pour surmonter ces contraintes, une caisse régionale de refinancement hypothécaire pourrait être envisagée afin de soutenir les banques dans l’accès au marché des capitaux et à des ressources à long 46 terme. La monnaie unique et la nouvelle bourse commune43 de la région CEMAC favorise le développement d’une caisse régionale pour les 6 pays. A l’échelle nationale, aucun pays de la CEMAC ne dispose d’un volume de crédit hypothécaire suffisant pour créer un emprunt obligataire sur les marchés secondaires. En revanche, à l’échelle régionale, le volume agrégé des crédits hypothécaires des six pays de la CEMAC devient intéressant et exploitable. Une solution similaire existe aujourd’hui dans la zone UEMOA avec la Caisse Régionale de Refinancement Hypothécaire de l’Union Economique et Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (CRRH-UEMOA). Encadré 3. Le rôle d’une caisse régionale de refinancement hypothécaire Le rôle d’une caisse de refinancement hypothécaire (CRH) consiste à mettre à la disposition du système bancaire des ressources à long terme. Une CRH refinance les prêts acquéreurs au logement consentis par les établissements de crédit (généralement actionnaires de la caisse) en émettant des obligations sur le marché financier. Les créances correspondant aux prêts refinancés restent au bilan des établissements de crédit et sont nanties au profit de la CRH en garantie des billets. Ce mécanisme permettrait aux banques de pallier le manque de ressources à long terme et de proposer des crédits longue durée (par exemple 20 ans au lieu de 7 à 10 ans en moyenne actuellement dans la CEMAC) pour enfin étaler le remboursement du prêt et le rendre plus accessible. Ce type de caisse existe actuellement en France, au Nigeria, en Malaisie, au Kenya, etc. Une caisse de refinancement régionale hypothécaire (CRRH) joue un rôle similaire mais, au lieu de refinancer les institutions financières d’un unique pays, elle est capable de refinancer le système bancaire de plusieurs pays simultanément. Ceci est notamment possible lorsque les pays possèdent une monnaie unique. Une seule CRRH existe actuellement et se trouve dans la zone UEMOA. La CRRH-UEMOA est basée au Togo et a pour rôle de refinancer tous ses actionnaires dans les 8 pays de l’UEMOA. Elle compte aujourd’hui comme actionnaires la BOAD, la BIDC, Shelter Afrique, la SFI et 54 banques opérant dans la région. Aujourd’hui la CRRH a mobilisé 162 milliards FCFA (~273 millions USD) à travers 8 émissions obligataires, pour le refinancement de 35 banques actionnaires de l’espace UEMOA. Avec le soutien de la Banque mondiale, la CRRH-UEMOA a démarré ses activités de refinancement de prêts à l’habitat en 2017 sur ressources concessionnelles en faveur de ménages à faibles revenus. Le montant total du refinancement sur ressources concessionnelles s’élève aujourd’hui à 26 milliards FCFA (43,9 millions USD). 7.2.7 Soutenir les ménages à revenus informels De nombreux ménages au Congo sont employés au sein secteur informel et ne peuvent accéder au système bancaire traditionnel, et par extension, au crédit hypothécaire au logement. Les procédures de souscription d’hypothèque requièrent des preuves de revenus dont ne disposent pas les travailleurs du secteur informel. Or, ce segment du marché présente un potentiel important et des solutions peuvent être développées afin de leur proposer des produits de financement du logement adaptés : 43 La bourse du Cameroun et celle du Gabon ont fusionne en 2019 pour créer une bourse unique pour tous les pays de la CEMAC. 47 1. Développer des produits de microfinance à l’habitat afin de soutenir les ménages à revenus informels et/ou défavorisés. Bien que le secteur de la microfinance soit développé dans la région, peu de produits spécifiques au logement sont aujourd’hui disponibles. Les institutions manquent à la fois d’accès aux ressources longues et de capacités pour développer ces produits. Ces deux aspects doivent faire l’objet d’interventions afin de permettre le développement de ces nouveaux produits et de permettre aux ménages à revenus informels de bénéficier de crédits long terme. 2. Développer des produits épargne-logement. Les travailleurs du secteur informel ne peuvent actuellement contracter de crédit hypothécaire au sein du système bancaire formel faute de preuves de revenu. Les ménages du secteur informel sont perçus par le système bancaire comme un segment à risque. Or, la mise en place de compte épargne logement permettrait d’évaluer leur capacité de paiement à long terme. Les ménages épargnent un montant fixe chaque mois et démontrent ainsi la régularité de leurs revenus et de leur pouvoir d’achat. Après seulement 2 ans, l’épargne peut être convertie en apport initial et une relation de confiance a pu être établie entre l’institution financière et son client. Dans certains pays, des mesures incitatives complémentaires sont prises par l’Etat afin de soutenir l’épargne des ménages. 48 7.3 7.4 Conclusion Malgré de multiples interventions de l’Etat, le secteur du logement au Congo reste sous-développé en terme d’offre et de demande de logement. Les subventions de l’Etat ne parviennent pas à atteindre les salariés moyens et ces derniers ne peuvent accéder aux logements les moins onéreux sur le marché formel. La population urbaine congolaise opte pour la location ou l’auto construction. La crise pétrolière a eu un impact négatif majeur sur le secteur du logement, ce dernier étant particulièrement dépendant des ressources de l’Etat. La SOPRIM et la Banque Congolaise de l’Habitat ne reçoivent pas ou plus de financements de la part de l’Etat. Malgré plus de 600 millions de USD apportés par la Chine, seuls des logements de haut standing ont été construits et plus de 1 000 d’entre eux restent vides. La priorité de l’Etat devrait être la distribution de ces logements. Le secteur privé est peu impliqué dans le domaine de l’habitat et est pratiquement absent du secteur du logement abordable. Concernant l’offre de logement, des partenariats ont été structurés, sans grands succès, avec des promoteurs immobiliers étrangers afin de construire des projets de logement de grande envergure. Malheureusement, ces promoteurs ont démontré leur incapacité financière et technique à entreprendre de grands projets de logement. Les partenariats ne produisent pas les résultats escomptés, ne se concrétisent pas et finissent par échouer. En ce qui concerne la demande de logement, le secteur hypothécaire est peu développé. La Banque Congolaise de l’Habitat ne reçoit pas le Fonds National de l’Habitat et opère telle qu’une banque commerciale. Toutes les banques commerciales manquent de ressources longues et n’ont pas la capacité d’accorder des crédits en de nombre. Seuls les employés aisés du secteur formel ont accès à un crédit hypothécaire aujourd’hui. L’Etat doit travailler de concert avec le secteur privé sur des initiatives traitant de l’offre (promoteurs immobiliers) et de la demande (banques commerciales) en logement si celui-ci souhaite atteindre ses objectifs en matière d’habitat. Les ressources financières et les capacités techniques du secteur privé offrent un effet de levier important, qui doit être mobilisé à travers : - Des partenariats public-privé (PPP) correctement structurés s’appuyant sur des promoteurs immobiliers compétents, pouvant financer de grands projets et assumer les risques liés à la vente des logements construits. - L’ouverture du secteur hypothécaire aux banques commerciales en utilisant les cotisations des salariés pour subventionner seulement des crédits destinés aux foyers à faibles et moyens revenus. Les ressources de l’Etat doivent être quantifiées et optimisées afin s’assurer que ces ressources parviendront effectivement aux bénéficiaires ciblés. Ces ressources incluent : l’apport de terrains et la mise à disposition des réserves foncières, les financements apportés aux organismes de l’Etat (SOPRIM, FNH, Banque Congolaise de l’Habitat), les investissements dans les grands programmes de logements en partenariats avec la Chine et les exonérations d’impôts. 49 Le Fonds National de l’Habitat est alimenté par un cotisation prélevée sur les salaires des employés du secteur privé mais ne parvient pas à financer le secteur de l’habitat. Des mesures sont nécessaires et doivent être mise en œuvre afin d’assurer une redistribution efficace et équitable de fonds vers les besoins de la population congolaise à revenus modestes. Enfin, l’Etat devrait encourager la construction écologique. Bien que celle-ci ne soit pas pratiquée actuellement au Congo, des investissements mineurs dans la construction aujourd’hui pourraient mener a de grand bénéfices dans le long-terme à la fois pour les foyers et l’environnement. La crise économique pourrait être une opportunité et donner un nouvel élan réformateur afin d’optimiser les dépenses de l’Etat et d’utiliser le secteur privé comme effet de levier pour susciter des investissements dans le secteur du logement. 50 Annexe 1. La chaîne de valeur de l’habitat du Congo Chaîne de valeur de la demande Eligibilité Acteurs : Banque Congolaise de l’Habitat, banques commerciales Processus actuel : - Des revenus formels et un acompte initial sont requis afin de pouvoir souscrire à un prêt hypothécaire. La somme de l’acompte initial peut aussi être réunie à travers le plan épargne- logement de la Banque Congolaise de l’Habitat. - Les banques commerciales demandent également un titre foncier en règle afin d’octroyer un financement immobilier et une hypothèque. L’obtention d’un titre foncier est un processus long et coûteux qui mène à régulièrement des litiges. Ces contentieux retardent les procédures d’acquisition et la collecte de garanties pour les banques. Défis : - Les banques commerciales prêtent des financements à l’habitat principalement aux ménages aisés, disposant de revenus élevés, stables et d’une épargne importante. Commercialisation Acteurs : Banque Congolaise de l’Habitat, banques commerciales Processus actuel : - La Banque Congolaise de l’Habitat est l’acteur central du secteur de l’habitat et opère principalement à Brazzaville et Pointe Noire. - La Société Générale, le Crédit du Congo, La Congolaise de Banque et Ecobank proposent des crédits à l’habitat. Mais ces produits sont limités et ont peu de retombées sur les activités des banques commerciales. Défis : - Peu de projets de construction de logements sont actuellement en cours suite à la crise pétrolière et aux finances publiques qui s’amenuisent. La majorité des crédits octroyés sont destinés au financement des projets de logement en auto-construction. - Peu de produits destinés au financement de l’habitat sont disponibles sur le marché. Subvention Acteurs : Banque Congolaise de l’Habitat, Fonds National de l’Habitat Processus actuel : - Le Fonds National de l’Habitat (FNH), qui collecte une taxe mensuelle de 2% sur les salaires du secteur privé, est supposé alimenter la BCH en ressources à long terme à taux réduit. Le FNH collecte environ 3 milliards FCFA (5 millions USD) par an. - Un projet de loi est actuellement en cours de rédaction afin de mettre en œuvre des mécanismes de distribution du FNH. En revanche, cette loi reste vague et risque de contribuer à une attribution inefficace et peu ciblée des subventions. Défis : 51 - Depuis sa création il y a 10 ans, le FNH n’a jamais été alloué à la BCH et reste immobilisé dans les caisses du Trésor Public. Ne recevant pas les subventions du FNH, la BCH est limitée dans son rôle de préteurs de financements à l’habitat et a finalement diversifié ses activités. Elle se finance via des dépôts à vue et fonctionne telle une banque commerciale. Souscription Acteurs : Banque Congolaise de l’Habitat, banques commerciales Processus actuel : - Les clients doivent attester de revenus formels, constants et fiables auprès des créanciers. Défis : - Plus de 70 00044 congolais travaillent au sein du secteur informel et ne dispose pas de la documentation nécessaire (fiche de paie, contrat de travail) pour contracter un emprunt. Elle est donc exclue du processus de souscription et ne remplit pas les critères. Clôture du prêt Acteurs : Banques commerciales Processus actuel : - Les coûts de clôture du prêt sont particulièrement élevés et peuvent contribuer à une augmentation de 20% du prix de vente du logement. - L’hypothèque doit être enregistrée au cadastre chaque année à un coût de 1% du prix d’acquisition la première année et 0,25% les années suivantes jusqu’à la fin de l’hypothèque. Défis : - Le processus de clôture de l’hypothèque est onéreux au Congo et de nombreux foyers préfèrent accéder à des crédits à la consommation pour financer leurs achats de logement. Financement Acteurs : Banques commerciales, Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) Processus actuel : - Les banques se financent à partir des dépôts à vue et sont limitées dans leur rôle de préteur par le ratio de transformation. - Grâce à son produit épargne-logement, la Banque Congolaise de l’Habitat (BCH) accorde des crédits immobiliers à des taux subventionnés, autour de 6,5%. Défis : - Les banques commerciales sont limitées en ressources à longues. - Selon les textes de loi, la Banque Congolaise de l’Habitat est supposée recevoir les ressources collectées par la Fonds National de l’Habitat. A ce jour, aucun mécanisme n’a été mis en œuvre pour permettre ce transfert effectif de ressources. Un projet de loi est en cours d’élaboration et de rédaction. Service de prêt Acteurs : Banques commerciales, Banque Congolaise de l’habitat Processus actuel : 44 https://www.journaldebrazza.com/congo-73-mille-individus-sont-actifs-dans-le-secteur-informel/ 52 - La plupart des banques utilisent la domiciliation des salaires des clients afin de limiter les risques de défauts de paiement. En effet, chaque mois les banques prélèvent automatiquement les mensualités de remboursement du prêt sur les comptes bancaires des ménages. Défis : - Le service de prêt ne semble pas subir de problème majeur. Recouvrement Acteurs : Les banques commerciales, notaires, système judiciaire Processus actuel : - La mise en jeu de la garantie et le recouvrement de l’hypothèque sont des processus rapides, qui s’effectuent en six mois voire un an (maximum). Défis : - Bien que les saisies immobilières soient rapides et ne semblent poser de difficultés aux créanciers, la revente du bien après saisie semble plus complexe car les acquéreurs pour ces types de bien sont peu nombreux. 53 Chaîne de valeur de l’offre Foncier Acteurs : Ministère de l’Urbanisme, Ministère des Affaires foncières et du Domaine Public, Département, Commune, Ministère des Finances, Conservations des Hypothèques et de la Propriété Foncières, Direction Générale des Affaires Foncières, du Cadastre et de la Topographie (DGAFCT) Processus actuel : - L’Etat est propriétaire d’une grande partie du territoire national et suit une politique de « constitutions des réserves foncières ». - Selon la Direction Générale des Impôt en 2017, moins de 10% des biens fonciers du Congo étaient immatriculés et titrés. A Brazzaville, la conservation foncière estime qu’environ 6% des parcelles cadastrées sont pourvues d’un titre de propriété. Les terrains qui dépendent du droit coutumier ne sont pas systématiquement immatriculés par leurs propriétaires et ce qui explique ces faibles proportions.45 - Plusieurs établissements aux résultats mitigés ont soutenu la mise en œuvre de la réforme foncière de 2009 : Le Fonds National du Cadastre, l’Agence foncière pour l’aménagement des terrains (AFAT), et le Bureau d’études et de contrôle des travaux cadastraux (BECTC).46 Défis : - La législation concernant les modalités d’accès à la propriété foncière et les niveaux de gouvernance en matière de gestion foncière est ambigüe. De nombreux efforts ont été réalisés au cours des 15 dernières années afin de moderniser les institutions foncières congolaises mais les résultats sont limités. De nouvelles institutions existent mais sont peu dynamiques et réalisent peu de projets. Il semblerait que ces institutions aient besoin d’un accompagnement technique et de formation afin de mener à bien ces réformes. - Ces institutions manquent également de moyen, et cette situation se répercute sur le fonctionnement de ces organismes, sur la fiabilité des documents et la qualité des services rendus. - En matière d’immatriculation, les démarches restent longues et onéreuses. Elles se composent de 13 étapes et nécessitent plusieurs déplacements auprès de la conservation. Infrastructures de base Acteurs : Société Nationale d’Electricité, Société Nationale de Distribution d’Eau Processus actuel : - La distribution d’eau et d’électricité est aléatoire et certaines installations datent des années 1940. - Le niveau de couverture d’électricité sur l’ensemble du pays a connu une forte progression passant de 26,7% en 2005 à 44% en 2016.47 Mais les coûts d’accès élevés et un niveau de couverture qui reste faible empêchent une grande partie de la population congolaise d’être fournie en électricité.48 Dans son dernier Plan National de Développement pour la période couvrant 2018 à 2022, le 45 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 46 Bourguignon-Roger, Camille ; Rossignol, Aurélie (2018) Revue du secteur foncier en République du Congo. Banque mondiale, Washington, D.C. 47 République du Congo (2018), Plan National de Développement, Cadre Stratégique de Développement 48 The World Bank (2017), Republic of Congo. Poverty Assessment Report. Education, Jobs and Social Protection for 54 a Sustainable Reduction of Poverty. gouvernement congolais espère atteindre un niveau de couverture d’électricité de l’ordre de 60% pour 2022 grâce à une réforme du secteur et au développement des infrastructures électriques.49 - La Société Nationale d’Electricité fait face à des problèmes d’impayés, de connexion informelle au réseau électrique et aux compteurs. En 2011, 42,5% des ménages congolais étaient raccordés au réseau électrique mais seulement 30% s’acquittés du montant correspondant à leur consommation50. - Ces difficultés s’appliquent également à la Société Nationale de Distribution d’Eau. Bien que le réseau de distribution d’eau semble plus performant que le réseau d’électricité, en dix ans, l’accès à l’eau potable a augmenté de seulement 5 points de pourcentage, passant de 72% en 2005 à 77% en 201551. Seulement 56,5% des congolais ont accès direct à l’eau potable et le gouvernement congolais via son Plan National de Développement souhaite porter ce chiffre à 90% d’ici à 2022.52 Défis : - Les réseaux d’infrastructures sont obsolètes et subissent un manque de maintenance et d’entretien. - Nombreux problèmes d’impayés qui affectent le fonctionnement des services urbains. Aménagement du site Acteurs : Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux, Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains, Commission Technique de l’Urbanisme Processus actuel : - Le schéma national d’aménagement du territoire (SNAT) fixe les lignes directrices pour l’aménagement et du développement du territoire congolais. - Le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux et l’Agence Foncière pour l’Aménagement des Terrains (AFAT) se partagent la charge des aménagements de site et de la viabilisation des terrains. Défis : - L’AFAT exige une redevance de 5000 FCFA au m² (8,45 USD) pour toutes activités de viabilisation et d’aménagement des terrains qui s’effectuent sans sa participation. Cette redevance imposée par l’agence joue sur les prix du foncier et n’incite pas le secteur privé à s’impliquer dans des projets de construction. Configuration et design Acteurs : Architectes Processus actuel : - Une loi sur la copropriété existe depuis 2015 et permet le morcellement des titres de propriété ainsi que la construction d’ensemble d’immeubles. Les logements construits par l’Etat sont principalement des appartements et des immeubles.53 49 République du Congo (2018), Plan National de Développement, Cadre Stratégique de Développement 50 The World Bank (2017), Republic of Congo. Poverty Assessment Report. Education, Jobs and Social Protection for a Sustainable Reduction of Poverty. 51 The World Bank (2017), Republic of Congo. Poverty Assessment Report. Education, Jobs and Social Protection for a Sustainable Reduction of Poverty. 52 République du Congo (2018), Plan National de Développement, Cadre Stratégique de Développement 53 55 http://adiac-congo.com/content/assemblee-nationale-la-loi-sur-la-copropriete-passe-sans-convaincre-37223 Défis : - L’auto construction étant prédominante au Congo, les habitations individuelles et de plain-pied sont répandues. Evaluation du risque Acteurs : Banques commerciales - Les grands projets de construction de logements de l’Etat ont été financés par l’Etat chinois à travers une dette sur le long terme à faible taux (environ 600 millions USD destinés au le logement). - Les banques commerciales et la Banque Congolaise de l’Habitat ont financé des projets immobiliers avant la crise pétrolière mais possèdent des taux de sinistralités pour ce type de crédit de l’ordre de 75%. - Les compagnies d’assurance congolaises ont également investi dans l’immobilier (près de 20% de leur portefeuille), mais ont limité leurs placements depuis la crise pétrolière. - Avant la crise pétrolière, la SOPRIM recevait des ressources de l’Etat mais depuis le crise financière, l’Etat n’est plus en mesure de soutenir la SOPRIM. L’organisation fait appel aux banques commerciales pour l’obtention de financement. Défis : - Peu de promoteurs immobiliers professionnels sont présents dans le secteur du logement. - Les banques ont financé de nombreux projets de logement avant la crise. Ces derniers n’ayant pas abouti, la banque détient des taux de sinistralités élevés. - Les financements du gouvernement chinois n’ont pas contribué à la construction de logements abordables. Plus de 1 000 appartements de haut standing ont été construits. Ils restent vacants à ce jour. Construction Acteurs : Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux, SOPRIM, entreprises étrangères, particuliers Processus actuel : - La construction de logement au Congo s’effectue principalement par des particuliers. L’auto- construction et le principal mode d’accession à la propriété. Il est estimé que l’auto-construction représente 90% du parc du logement sur le territoire congolais (soit 248 000 logements). Le parc de logement de l’Etat est donc estimé à seulement 10%.54 - Peu de promoteurs immobiliers privés sont présents au Congo. La Société de Promotion Immobilière et le Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux sont les principaux acteurs en la matière. Les deux organismes ont signé des accords avec des entreprises étrangères pour déléguer la construction de logements. - Les coûts de construction pour les différents sites de logement construits par les agences du gouvernement se situent entre 280 000 et 350 000 FCFA au mètre carré (470 et 590 USD) pour les logements subventionnés. Il faut compter 800 000 FCFA au mètre carré ( 1 350 USD) pour les logements non-subventionnés. - Les matériaux de construction ne sont pas produits localement. Ils sont importés et ne bénéficient pas d’exonération de taxes. Seul le ciment est produit localement : 4 cimenteries ont été 54 http://www.vox.cg/des-logements-sociaux-pour-qui/ 56 récemment construites, ce qui a contribué à la baisse des prix du sac de ciment qui a été divisé par 4 (12 000 FCFA à 3 000 FCFA soit 20 à 5 USD). Défis : - Les contrats pour la construction de logement signés avec des partenaires étrangers ont manqué de rigueur, et ont conduit certains partenaires à ne pas respecter leurs engagements. Vente Acteurs : SOPRIM, Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux Processus actuel : - La SOPRIM est responsable de la vente de certains programmes de logements et propose plusieurs options pour l’acquisition d’un bien tel que la vente en état d’achèvement (VEFA) qui implique un premier paiement sur plan puis des paiements selon l’état d’avancement des travaux. La VEFA requiert également un acompte de la part des bénéficiaires. La SOPRIM offre également la possibilité d’acquérir un bien via paiement comptant ou par versement d’acompte puis de mensualités, le tout accompagné de garanties bancaires. Dans ces deux cas, la transaction pour le solde final et la remise des clés se font devant notaire.55 - La SOPRIM disposait de la garantie de l’état sur les projets immobiliers mais n’en bénéficie plus depuis la crise pétrolière. Défis : - Bien que subventionnés par l’Etat (VRD et foncier), certains logements vendus par la SOPRIM ne font pas l’objet de restrictions en matière d’attribution. Des mécanismes ciblant les attributions, tel qu’un plafond de revenus pour les acheteurs, sont inexistants. - Les logements de la SOPRIM et du Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux restent onéreux et ne bénéficient qu’aux ménages les plus aisées de la société congolaise. Gestion Acteurs : SOPRIM, la Congolaise de Gestion et de Transaction Immobilière Processus actuel : - La SOPRIM est responsable de la gestion du parc immobilier de l’Etat.56 Pour les projets construits par la Ministère de l’Aménagement du Territoire, et de la Délégation aux Grands Travaux, des partenariats avec la Congolaise de Gestion et de Transaction Immobilière ont été signés afin de déléguer la gestion des logements, notamment la Résidence du Flamboyant ou la Résidence du Clairon. - Il existe une loi sur la copropriété (2015-2016) pour la mise en place d’un syndicat de copropriétaires et la désignation d’un syndic de copropriété.57 55 SOPRIM, https://soprimcongo.wordpress.com/ 56 http://www.vox.cg/des-logements-sociaux-pour-qui/ 57 http://adiac-congo.com/content/assemblee-nationale-la-loi-sur-la-copropriete-passe-sans-convaincre-37223 57 58 Annexe 2. Projet de loi sur la promotion immobilière en République du Congo 59 60 61 62 63 64 Annexe 3. Projet de loi portant sur le Fonds National de l’Habitat 65 66 Annexe 4. Détails de l’offre de financement à l’habitat de la Banque Congolaise de l’Habitat D’après les informations disponibles sur le site internet de la Banque Congolaise de l’Habitat, l’offre bancaire destinée au financement du logement se compose de plusieurs produits de financement : - Le Plan Epargne Logement : Les clients de la BCH ont la possibilité de choisir un régime adapté à leurs situations, suivant les modalités indiquées dans le tableau ci-dessous. L’épargne constituée permet d’obtenir un « crédit anticipé au taux préférentiel » et de financer l’acquisition d’un logement neuf (construits par un promoteur immobilier agrée par la BCH) et ou l’auto construction58. Tableau 12 Régimes d’épargne offerts par la BCH Régime Régime 4 ans Régime 5 ans Régime 6 ans Catégories A 50 000 40 000 33 000 B 60 000 48 000 40 000 C 80 000 64 000 54 000 D 100 000 80 000 67 000 E 120 000 96 000 80 000 F 140 000 112 000 94 000 G 160 000 128 000 107 000 H 180 000 144 000 120 000 - Le Crédit Epargne Logement (qui bénéficie aux clients de la BCH qui possèdent un contrat épargne logement régulier et suffisamment approvisionné) et Le Crédit Immobilier Direct. Les clients doivent justifier d’un revenu mensuel capable de couvrir le remboursement du prêt contracté (la charge du remboursement doit être inférieure à 40% du revenu brut annuel), domicilier leurs salaires à la BCH, disposer d’un livret épargne logement et d’une déclaration fiscale sur le revenu de l’emprunteur, d’attestations de salaire du contractant et du garant et d’une promesse de vente.59 - Les prêts destinés à l’auto construction, la rénovation ou l’extension d’un logement nécessitent également un dossier composé de plusieurs justificatifs (propriété du terrain, plans, devis estimatif global, autorisation de bâtir, devis des travaux exécutés et restant à exécuter en cas de construction entamée).60 58 Banque congolaise de l’habitat, http://www.bch.cg/ 59 Banque congolaise de l’habitat, http://www.bch.cg/ 60 Banque congolaise de l’habitat, http://www.bch.cg/ 67