COVID-19 Suivi des Impacts Burkina Faso Personnes Déplacées Internes Bulletin No.1 — Vague Mai 2021 MESSAGES CLES • Bien que les ménages non déplacés aient souffert pendant la pandémie, les résultats socio-économiques des personnes déplacées ont souvent été pires. • L'insécurité alimentaire est très prononcée parmi les personnes déplacées internes (PDI). Quatre ménages déplacés sur dix sont en situation d'insécuri- té alimentaire grave, contre un ménage sur dix pour la population non dépla- cée. Pour les deux échantillons en présence, celui des PDI tout comme l'échantillon national, l'insécurité alimentaire est plus élevée pour les mé- nages ruraux comparés aux ménages urbains. • Les problèmes liés à l’accès aux aliments de base sont beaucoup plus im- portants pour les ménages déplacés : 23,3% des ménages déplacés n'ont pas pu accéder à au moins un des trois produits alimentaires de base, contre 3,2% pour le reste de la population. Les personnes déplacées vivant hors d’un camp ont le plus souffert par rapport aux personnes déplacées résidant dans les camps. Le manque de ressources financières reste le principal défi pour l'accès à la nourriture. • Les résultats en matière d'emploi se sont améliorés parallèlement à l'assou- plissement des mesures barrières liées à la COVID-19. La semaine précé- dant la collecte des données, huit répondants sur dix (80,3%) étaient employés à l'échelle nationale contre seulement cinq personnes sur dix (52,0%) pour les PDI. Cela reflète les difficultés pour les personnes déplacées à accéder aux activités génératrices de revenus. Le taux d'emploi est légèrement plus élevé pour les PDI hors camp (53,2%) par rapport aux PDI qui vivent dans un camp (48,5%). Le lieu de résidence (urbain/rural) semble n'avoir au- cune corrélation avec la situation d’emploi. • Pour tous les sous-groupes en présence, la plupart des répondants ont vu leurs revenus chuter au cours de la dernière année. Bien que plus de trois ménages burkinabés sur cinq (61,9%) à l'échelle nationale aient vu leurs revenus diminuer, ce ratio était encore plus élevé pour les Burkinabés déplacés internes, dont quatre sur cinq (83,1%) ont signalé une baisse de leurs revenus. • Les personnes déplacées internes vivant dans un camp sont plus susceptibles de dépendre de l'aide, tandis que celles vivant hors d'un camp sont plus susceptibles de s'engager dans des activités non agricoles. • Bien que les PDI soient beaucoup plus susceptibles de déclarer avoir besoin de soins de santé que les ménages non déplacés (60% contre 46%), très peu (moins de 4%) indiquent qu'ils n'ont pas été en mesure d'accéder aux soins de santé en cas de besoin. CONTEXTE Cette note présente les résultats du premier tour de l'Enquête Téléphonique à Haute Fréquence Figure 1: Répartition de la population des PDI selon le milieu de résidence sur les déplacés internes au Burkina Faso (BFA HFPS- IDP), administrée entre le 03 et le 23 Mai 2021. L'enquête a été conçue pour évaluer l'impact de la Pandémie de la Covid-19 sur les Personnes Déplacées à l'Intérieur (PDI) de leur propre pays. L'enquête a été menée conjointement pour les déplacés internes et le reste de la population (non déplacée) du pays, permettant une évaluation des poten- tielles différences dans la façon dont la pandémie a affecté les déplacés et les non déplacés 1. La base de sondage utilisée pour les déplacés internes est la base de données du CONASUR, un ensemble de données administratives qui est continuellement mis à jour par le gouvernement du Burkina Faso2. Au total, 1 581 ménages ont été tirés lors de ce premier passage et 1 156 ménages ont été interviewés avec succès, pour un taux de réponse de 73,1 %. Pour la popula- tion non déplacée, un échantillon de ménages a été tiré de l'EHCVM 2018/2019 et l'enquête a été menée avec succès auprès de 1 971 ménages au cours de ce passage 3. Pour les deux sous-populations, les poids de l'échantillon ont été ajustés pour corriger la non-réponse. Trois modules principaux ont été administrés au cours de l'appel. Il s ’agit de l’Accès aux services de santé ; de l’Emploi et revenu ; et de l’accès aux produits alimentaires de base et sécurité alimentaire. Dans cette note, la population dépla- cée fait référence à la population de l'échantillon CONASUR, tandis que la population nationale fait référence à la population de l'échantillon EHCVM. 1 Plus d'informations sur l'enquête téléphonique à haute fréquence Covid-19 sur la population non déplacée peuvent être trouvées ici. 2 Plus d'informations sur CONASUR peuvent être trouvées ici. 3 Plus d'informations sur l'enquête EHCVM peuvent être trouvées ici. 1 Burkina Faso • COVID-19 Suivi des Impacts – PDI Étant donné que l'échantillon des PDI n'inclut aucun ménage de la région de Ouagadougou 4, dans cette note, les statistiques sur les zones urbaines excluent les citadins de la capitale pour l'échantillon national, de sorte que les échantillons PDI -urbain et na- tional-urbain représentent la population urbaine qui vit en dehors de la métropole Ouagadougou. Les estimations de l'enquête téléphonique à haute fréquence Covid-19 sur les personnes déplacées au Burkina Faso indiquent qu'une forte proportion des ménages de personnes déplacées vivent en zone urbaine (55,6%) (Figure 1). Ceci est différent de la répartition spatiale de la population au niveau national (en excluant Ouagadougou), qui est principalement concentrée dans les zones rurales. Dans l'ensemble, la grande majorité de la population (81,22%) vit en milieu rural 5. Au Burkina Faso, la plupart des personnes déplacées vivent à l'extérieur d'un camp et seulement un ménage de personnes déplacées sur quatre en dehors de Ouagadougou vit dans des camps. 4 Selon les données du CONASUR, peu de ménages déplacés vivent à Ouagadougou. Pour cette raison, la strate de Ouagadougou a été exclue de l'échantillon. Pour plus d'informations sur les stratégies d'échantillonnage, voir la note sur la méthodologie d'enquête. 5 Le pourcentage de la population vivant en milieu urbain passe à 68,3% si Ouagadougou est inclus dans l'échantillon. ACCÈS AUX ALIMENTS DE BASE ET SÉCURITÉ ALIMENTAIRE Concernant la sécurité alimentaire, plusieurs questions Figure 2: Échelle d'expérience de l'insécurité alimentaire ont été posées aux répondants pour savoir si leur mé- nage a eu des problèmes d'argent ou d'autres ressources au cours des 30 derniers jours, et comment ces problèmes ont af- fecté la capacité du ménage à satisfaire ses besoins alimen- taires de base. En analysant ces questions, il a été possible de calculer l'échelle d'expérience de l'insécurité alimentaire (FIES). L'insécurité alimentaire est très prononcée parmi les PDI par rapport au reste de la population (Figure 2). Environ quatre mé- nages déplacés sur dix sont en insécurité alimentaire sévère, contre 'un ménage sur dix pour le reste de la population : en effet, près de 80% des Burkinabés déplacés internes sont en insécurité alimentaire modérée ou sévère, soit près de 50 points de pourcentage de plus que la population non déplacée, un ré- sultat qui vaut largement pour les déplacés internes vivant dans un camp comme ceux vivant en dehors d’un camp. La combinaison des ménages en insécurité alimentaire modérée et de ceux en insécurité alimentaire sévère montre clairement que l'insécurité alimentaire est plus présente dans les zones rurales. Figure 3: Ménages qui n'ont pas pu accéder à au moins 1 des 3 produits La disponibilité des aliments de base a été une préoccu- alimentaires de base pation importante pendant la Covid-19. Compte tenu des habitudes alimentaires, l'enquête a demandé si les mé- nages avaient accès à trois aliments de base pour les zones urbaines (maïs en grain, riz importé et riz local) et pour les zones rurales (maïs en grain, sorgho et mil) 6. Les défis liés à la disponibilité alimentaire sont beaucoup plus importants pour les ménages déplacés. En effet, 23,3% des ménages déplacés n'ont pas pu accéder à au moins un des trois produits alimentaires de base, contre 3,2% pour le reste de la population (Figure 3). Ces défis sont particulièrement plus prononcés pour les ménages vivant dans les zones urbaines ; ce qui suggère que certains ménages ruraux peuvent dépendre de leur propre pro- duction agricole. Figure 4: Raisons de ne pas pouvoir accéder aux produits alimentaires de base Le manque de moyens ainsi que les augmentations de prix sont de loin les facteurs les plus prédominants limi- tant l'accès aux produits alimentaires de base (Figure 4). Le manque de moyens est plus prononcé pour les PDI (94,6%) comparés au reste de la population (71,8%). Les personnes déplacées vivant à l'extérieur des camps sont les plus susceptibles d'indiquer qu'elles ont des difficultés à accéder aux produits alimentaires de base. Bien que les non-PDI soient plus susceptibles de citer les augmen- tations de prix comme un facteur les limitant l’accès aux produits alimentaires de base, parmi les PDI, cette raison est la plus importante pour ceux dans les camps, qui sont également le groupe le plus susceptible d'observer des ruptures de stock de denrées alimentaires de base. 6 Les aliments sélectionnés par strate sont les aliments consommés par la majorité de la population de chaque strate selon les données de l'EHCVM 2018/19. 2 Burkina Faso • COVID-19 Suivi des Impacts – PDI EMPLOI ET REVENUS Les PDI ont une situation nettement moins Figure 5: Statut d'emploi du répondant (7 derniers jours) bonne sur le marché du travail. Au cours de la semaine précédant la collecte des données, huit répondants sur dix à l'échelle nationale (80,3%) avaient un emploi, contre seulement cinq répondants sur dix (52,0%) pour la sous-population des PDI (Figure 5). L'écart de 28 points de pourcentage entre les deux groupes illustre la situation difficile et pénible que connaissent les IPD, en particulier lorsqu'il s'agit pour eux d’accéder aux opportunités d’activités géné- ratrices de revenus. Bien qu'il n'y ait pas de différence entre les PDI urbaines et rurales, le taux d'emploi est plus élevé pour les PDI hors camp (53,2%) par rap- port aux PDI vivant dans les camps (48,5%), alors qu'il n'y a pas de différence significative entre les zones urbaines et rurales. Figure 6: Type d’occupation Sur dix PDI ayant un emploi, cinq sont propriétaires d'une entreprise non agricole (Figure 6), cependant, chez les non-PDI, c’est quatre actifs occupés sur dix qui le sont. Cet écart entre les deux groupes de per- sonnes sur la propriété des entreprises est à l’image de la concentration des PDI dans les zones urbaines et pour le fait que, l'accès à la terre est difficile. Il existe des différences importantes selon le lieu de résidence et selon que le ménage vit ou non dans un camp. Les personnes déplacées vivant dans les zones urbaines sont plus susceptibles d'être employées en tant que propriétaire d'une entreprise non agricole par rapport aux PDI vivant en milieu rural. De même, ceux qui vivent à l'extérieur d'un camp sont plus suscep- tibles d'être propriétaires d'une entreprise non agri- cole. Figure 7: Principale source de revenu du ménage Il existe une grande différence dans les sources de revenus des ménages entre les PDI et le reste de la population (Figure 7). Hors PDI, le reste de la popula- tion tire ses revenus principalement des entreprises non agricoles (37,6%) et des activités agricoles (26,1%). D'un autre côté, la plupart des personnes déplacées tirent leurs revenus de l'aide familiale et non familiale, y compris également des envois de fonds de l'étranger (57,1 %), tandis que les revenus des entreprises non agricoles (24,4 %) représentent la source la plus importante de revenus du travail. Les PDI vivant dans les camps sont plus susceptibles de dépendre de l'aide, tandis que ceux qui vivent hors d'un camp sont plus susceptibles de s'engager dans des activités non agricoles. Le ralentissement économique dû à la Covid-19 s'est traduit par une réduction des revenus à l'échelle de l'économie toute entière (Figure 8). Dans tous les sous-groupes en présence, la plupart des répondants ont vu leurs revenus chuter au cours de la der- nière année. Bien que trois ménages burkinabés sur cinq (61,9%) à l'échelle nationale aient vu leurs revenus diminuer, ce sort était encore plus prononcé pour les Burkinabés déplacés interne, dont quatre sur cinq (83,1%) ont signalé une baisse de revenus. La réduction des revenus est encore plus fréquente pour ceux qui vivent dans un camp et pour ceux qui vivent dans les zones rurales. De plus, ce qui est vrai pour les PDI ne l'est pas nécessairement pour le reste de la population: au niveau national, il n'y a pas de différence significative dans les trajectoires de revenus des ménages ruraux et urbains. 3 Burkina Faso • COVID-19 Suivi des Impacts – PDI Figure 8: Variation des revenus par rapport à avril 2020 De toutes les analyses qui précédent, il est nécessaire pour le Gouvernement burkinabè d’accorder d'une attention particulière aux PDI lors de la conception des programmes sociaux pour contrer les effets socio- économiques de la COVID-19 au Burkina Faso. ACCÈS AUX SERVICES DE SANTÉ La demande en services de santé est significativement différente entre les populations nationales et les populations déplacées. En effet, six PDI sur dix ont déclaré avoir eu besoin des services de santé au cours des quatre semaines précédant l'enquête, contre cinq non-PDI sur dix (Figure 9). Cette différence est encore plus frappante en milieu urbain. De plus, les ménages déplacés vivant hors des camps ont plus déclaré avoir besoin de services de santé que les ménages vivant dans un camp. Les services de santé infantile sont de loin les services de santé les plus demandés (respectivement 68,4% et 63,3% chez les déplacés internes et les non déplacés internes), en particulier pour les ménages vivant dans un camp (79,8%). Malgré ce besoin relativement élevé en services de santé, très peu de répondants ont indiqué qu'ils ne pouvaient pas accéder aux soins de santé dont ils avaient besoin. Dans l'ensemble, les populations nationales et déplacées à l'intérieur du pays qui avaient besoin de services de santé ont toutes deux la même faible probabilité (un peu moins de 4%) d'indiquer qu'elles ont eu des difficultés à accéder à ces services. Alors que les déplacés internes urbains et ruraux semblent avoir un accès similaire aux soins de santé, la population rurale prise dans sa globalité est légèrement plus susceptible de signaler des problèmes d'accès aux soins de santé, et la population urbaine globale l'est légèrement moins. Et tandis que les personnes déplacées vivant dans les camps sont deux fois plus susceptibles de signaler des problèmes d'accès aux soins de santé que les personnes déplacées vivant en dehors des camps, cette différence est toujours très faible à moins de 3 points de pourcentage (Figure 10). Figure 9: Ménages ayant besoin de services de santé Figure 10: Ménages qui n'ont pas pu accéder aux services de san- té Cette note a été élaborée par Clarence Tsimpo Nkengne, Marco Tiberti et Marco Costantini de la Banque Mondiale , Harriet Mugera et Jeff Tanner de WB-UNHCR Joint Data Center on Forced Displacement (JDC) et Zakaria Koncobo de Institut National de la Statistique et la Demographie (INSD). L'équipe a bénéficié des com- mentaires utiles de Maja Lazic (UNHCR). La note a été préparée sous la direction de Bjorn Erik Gillsater (JDC), Johan A. Mistiaen (Banque Mondiale), Boureima Ouedraogo, and Jean Edouard Odilon Doamba (INSD). L’équipe reconnaît le soutien essentiel de CONASUR dans l’acces à de la base de sondage. Pour plus de détails, visitez http://surveys.worldbank.org/covid-19 ou http://www.insd.bf/n/ 4