Macroéconomie, Commerce et Investissement Baromètre économique de la CEMAC Mai 2024 2024 VOL. 6 Tchad République centrafricaine Cameroun Guinée équatoriale Gabon République du Congo Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Macroéconomie, Commerce et Investissement Baromètre économique de la CEMAC 1 Mai 2024 Le Baromètre économique de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC) est une publication semestrielle de la Banque mondiale qui présente un aperçu des évolutions récentes et des perspectives économiques de la région), ainsi que des principales priorités de développement et de réforme dans la région, suivi d’un bref diagnostic de chacun des pays. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 2024 1 Le Baromètre économique semestriel de la CEMAC a été préparé par une équipe du Pôle d’expertise en Macroéconomie, Commerce et Investissement de la Banque mondiale composée de Robert Johann Utz (Économiste en chef), Djeneba Doumbia (Économiste), Erick Tjong (Économiste), Amina Coulibaly (Économiste principale), Vincent VOL. 6 Belinga (Économiste principal), Demet Kaya (Économiste principale), Marilyne Youbi (Économiste), Pierre Mandon (Économiste), Diderot Guy D’Estaing Sandjong Tomi (Économiste), Sonia Barbara Ondo Ndong (Économiste), Francis Ghislain Ngomba Bodi (Économiste), Claudia Noumedem Temgoua (Économiste), et Chris Belmert Milindi Katindi (Consultant en contrat de longue durée), sous la direction de Sandeep Mahajan (Manager de programmes) et avec l’appui d’Irene Sitienei et Ifeoma Clementina Ikenye (Assistantes de programme). Le rapport a été approuvé par Cheick Fantamady Kante (Directeur pays). Cette édition fait référence aux informations disponibles au 1er avril 2024. Veuillez contacter Djeneba Doumbia (ddoumbia@worldbank.org) et Erick Tjong (etjong@worldbank.org) pour toute question ou commentaire. SECTION 1— Évolution récente, perspectives économiques et principaux défis de développement dans la région de la CEMAC SECTION 1 — Évolutions récentes 3 I. Evolutions économiques récentes et perspectives dans la CEMAC la production d’hydrocarbures et de la demande Tableau 1 - CEMAC 2023 intérieure. Le Gabon a connu un ralentissement du Population, millionsa 63 taux de croissance du PIB qui est passé de 3,0 pour cent en 2022 à 2,3 pour cent en 2023, à cause d’une PIB, milliards USD courantsa 111,8 baisse de la production de bois et de manganèse, PIB par habitant, USD courantsb 3466 dans un contexte de coûts élevés du carburant et de perturbations de la circulation ferroviaire causées Taux de pauvreté au seuil international 31,1 par des glissements de terrain. À l’inverse, le (2,15 USD)a Cameroun, qui présente un niveau de diversification Taux de pauvreté - revenu intermédiaire 56,2 économique relativement plus élevé et une de la tranche inférieure (3,65 USD)a plus faible dépendance aux hydrocarbures, est Taux de pauvreté - revenu intermédiaire 81,5 l’économie dont la croissance a été la plus rapide de la tranche supérieure (6,85 USD)a de la région CEMAC au cours des trois dernières Espérance de vie à la naissance, annéesc 59,4 années, la croissance moyenne de son PIB se situant à 3,4 pour cent sur la période 2021-2023 (3,3 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et pour cent de croissance en 2023). données officielles. (a) Total pour la CEMAC. (b) Moyenne pondérée pour la CEMAC. Les positions extérieure et budgétaire de la région (c) Moyenne simple pour la CEMAC. se sont détériorées en 2023 dans un contexte de baisse des cours du pétrole et des recettes La croissance dans la Communauté économique et pétrolières. La baisse des cours internationaux des monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) a ralenti matières premières, en particulier du pétrole, a eu et est tombée à 1,7 pour cent en 2023, contre un impact négatif sur la performance de la CEMAC 3,1 pour cent en 2022. Ce ralentissement de la en matière d’exportations entre 2022 et 2023. Au croissance régionale a entraîné une croissance cours de cette période, les cours du pétrole brut négative du revenu par habitant qui est passé de ont baissé, passant de 97,1 USD à 80,8 USD. En 0,44 pour cent à -0,33 pour cent. La croissance conséquence, selon les estimations, l’excédent du de 1,7 pour cent pour l’ensemble de la région de compte courant a diminué, tombant à une moyenne Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) la CEMAC ne représente que la moitié du taux de 2,2 pour cent du PIB en 2023, contre 5,9 pour de croissance observé dans la région de l’Union cent du PIB en 2022. Selon les estimations, les économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) réserves brutes de la CEMAC ont diminué à 4,8 en 2023 et est inférieure au taux de croissance mois d’importations en 2023 (contre 5,2 mois moyen de 2,9 pour cent pour l’ensemble de l’Afrique en 2022). La baisse des recettes provenant des subsaharienne. La croissance négative en Guinée matières premières a également eu un impact sur équatoriale et la moindre croissance au Gabon la situation budgétaire de la région. Cependant, une constituent un facteur important expliquant la faible augmentation des recettes non pétrolières a permis croissance observée au niveau régional. Après à la région de maintenir ses recettes budgétaires avoir connu deux années de reprise, l’économie à un ratio moyen stable de 21,2 pour cent du PIB équato-guinéenne est retombée en récession entre 2022 et 2023. En moyenne, les recettes tirées avec un taux de croissance du PIB réel estimé à des ressources naturelles représentaient encore -5,8 pour cent en 2023 (contre 3,8 pour cent en 46 pour cent des recettes totales dans la zone 2022), principalement à cause d’une baisse de CEMAC, ce qui met en évidence la forte exposition 4 SECTION 1 — Évolutions récentes des finances publiques et de l’économie dans son les recettes publiques et à améliorer l’efficacité, ensemble à la volatilité des marchés des matières la gouvernance et le ciblage des dépenses premières. La dépendance aux hydrocarbures publiques. Les mesures visant à renforcer la est particulièrement forte en Guinée équatoriale, gestion de la dette et à rationaliser les dépenses où les matières premières représentent 88 pour consacrées aux subventions aux carburants et cent des recettes publiques. Les recettes fiscales aux exonérations fiscales, en les redirigeant vers représentaient en moyenne 9,6 pour cent du PIB dans des investissements dans les infrastructures, la CEMAC. En comparaison, les pays de l’UEMOA ont le capital humain et des programmes ciblés de recouvré des impôts à hauteur de 14,0 pour cent du protection sociale, restent importantes. PIB, ce qui souligne la nécessité de renforcer les efforts de mobilisation des recettes intérieures dans L’inflation, en hausse depuis fin 2021, a la CEMAC. Ces efforts permettraient à la région de commencé à fléchir au second semestre 2023, se doter d’une source de recettes plus solide et plus dans un contexte de resserrement continu de durable et d’un espace budgétaire plus large. la politique monétaire adoptée par la Banque des États d’Afrique Centrale (BEAC - la banque Parallèlement, en 2023, les dépenses publiques ont régionale) et de baisse des cours de la plupart augmenté dans la plupart des pays de la CEMAC, des matières premières. Pour soutenir le réduisant l’espace budgétaire et apportant des régime de change et contenir les pressions défis en termes de maitrise de la dette publique. inflationnistes, le taux directeur de la BEAC a été Les dépenses totales dans la CEMAC ont augmenté maintenu à 5,0 pour cent depuis mars 2023 après pour atteindre une moyenne de 20,1 pour cent une augmentation cumulée de 175 points de base du PIB en 2023 contre 18,3 pour cent en 2022, et de novembre 2021 à mars 2023. En comparaison, l’excédent budgétaire a diminué à 1,1 pour cent du les taux directeurs ont été également relevés PIB contre 2,9 pour cent pendant cette période. Les dans la zone UEMOA, mais sont restés inférieurs, pressions budgétaires restent particulièrement à 3,25 pour cent. Par ailleurs, la BEAC a mis fin fortes en République centrafricaine (RCA) où le déficit à ses injections hebdomadaires de liquidités en budgétaire était de 3,5 pour cent du PIB. La dette mars 2023, après les avoir progressivement publique moyenne dans la région a augmenté pour réduites à partir de juin 2021. Dans ce contexte, atteindre 52,8 pour cent du PIB en 2023, contre 51,5 en septembre 2023, l’inflation moyenne (en pour cent en 2022. La République du Congo est le glissement annuel) dans la région CEMAC est pays où les pressions pour réduire le ratio dette/ tombée à 4,7 pour cent, ce qui représente une Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) PIB sont les plus fortes ; ce ratio aurait atteint 96,0 baisse par rapport aux 6,3 pour cent enregistrés pour cent en 2023. Le ratio dette/PIB du Gabon en décembre 2022. La baisse de l’inflation (70,5 pour cent) était juste au-dessus du critère de peut également être attribuée aux tendances convergence de la dette de la CEMAC qui est de favorables observées dans la reprise de la chaîne 70,0 pour cent du PIB. Pour pouvoir réaliser leurs d’approvisionnement mondiale. Bien que cette aspirations respectives en matière de développement tendance soit encourageante, l’inflation reste – qui exigent d’importants investissements dans supérieure à la cible régionale de 3,0 pour cent. les routes et l’énergie, les services publics et les En comparaison, en décembre 2023, l’inflation domaines sociaux – tout en garantissant la viabilité globale dans l’UEMOA était inférieure à 2,4 pour budgétaire et de la dette, les pays de la CEMAC cent. Parallèlement, le taux de change effectif réel pourraient adopter des réformes visant à augmenter (TCER) de la plupart des pays de la CEMAC s’est SECTION 1 — Évolutions récentes 5 déprécié ces derniers mois en raison de la baisse de économies de la CEMAC contribue davantage l’inflation dans la région, indiquant une amélioration au chômage et à la pauvreté dans la mesure où de la compétitivité des prix.2 cette industrie à forte intensité de capital ne peut pas créer suffisamment d’emplois ni générer La CEMAC continue de faire face à des taux de équitablement des revenus pour l’ensemble de la pauvreté élevés, persistants et stagnants, résultant main-d’œuvre. de l’insuffisance de la croissance économique, du manque d’opportunités d’emploi et de la rapidité de À l’avenir, la région de la CEMAC peut s’attendre l’expansion démographique. En 2023, environ 31,1 à une croissance modérée, mais avec une pour cent de la population de la région vivait avec faible réduction de la pauvreté et confrontée moins de 2,15 USD par jour (mesuré en parité de à d’importants risques baissiers. Un taux de pouvoir d’achat, PPA, de 2017). En comparaison, dans croissance régional moyen de 2,5 pour cent la région de l’UEMOA, la proportion de personnes est prévu pour 2024 et devrait être suivi d’une vivant dans l’extrême pauvreté était relativement plus légère hausse en 2025-2026. Le taux de pauvreté faible, à 23,4 pour cent en 2023. Les taux de pauvreté dans la région, au seuil de 2,15 USD par jour varient considérablement dans la CEMAC, allant de (PPA de 2017), devrait baisser légèrement pour 2,8 pour cent au Gabon à 65,9 pour cent en République atteindre 30,9 pour cent en 2024-2025 (contre centrafricaine. En ce qui concerne les autres seuils de 31,1 pour cent en 2023). Parallèlement, la pauvreté, 56,2 pour cent de la population de la CEMAC trajectoire baissière de l’inflation devrait persister vivait avec moins de 3,25 USD par jour tandis que tout au long de 2024 et au-delà. Les risques 81,5 pour cent avaient un revenu quotidien inférieur à pesant sur les perspectives économiques de 6,85 USD en 2023. Selon les projections, en l’absence la région sont orientés à la baisse. Une baisse d’une reprise robuste de la croissance économique plus forte des cours des matières premières et d’une participation économique plus substantielle, réduirait l’espace budgétaire. Le resserrement il est peu probable qu’une baisse significative des des conditions financières mondiales ou niveaux de pauvreté se produise. régionales sur une plus longue période, des perturbations plus importantes du commerce La réduction de la pauvreté exige également des mondial et une demande mondiale plus faible efforts accrus afin de promouvoir l’emploi et les que prévu pourraient saper la croissance dans la compétences professionnelles dans les pays de la région. Des risques de poussées inflationnistes CEMAC, où près d’un jeune sur quatre ne travaille persistent également, notamment sur la scène Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) pas, n’étudie pas et ne suit pas de formation. Le internationale avec la guerre en cours en chômage – en particulier au Gabon et au Congo, où Ukraine et le récent conflit au Moyen-Orient. une personne sur cinq est sans emploi –, l’informalité Au niveau régional, il existe également des et le manque d’opportunités économiques pour les risques importants à surveiller, notamment les jeunes constituent de risques sérieux pour les moyens catastrophes climatiques et les perturbations de subsistance et la stabilité sociale dans une région environnementales, l’insécurité persistante dont la population est jeune et en croissance rapide. dans des régions de pays tels que la République Le manque de compétences de la main-d’œuvre est centrafricaine, le Tchad et le Cameroun, et les une cause de chômage et compromet la croissance tensions géopolitiques au Sahel. des activités des entreprises. La forte dépendance à l’égard de l’industrie pétrolière dans de nombreuses 2 La baisse du taux de change effectif réel (TCER) d’un pays indique qu’il y a une dépréciation de la monnaie nationale par rapport au panier de devises de ses partenaires commerciaux tandis qu’une augmentation du TCER indique une appréciation. 6 SECTION 1 — Évolutions récentes La croissance du PIB réel dans la CEMAC est …alors qu’en moyenne le PIB par habitant a connu passée de 3,1 pour cent en 2022 à 1,7 pour cent en une croissance négative dans la région en 2023. 2023… Figure 1. Croissance du PIB réel, 2019-2026 Figure 2. Croissance du PIB réel par habitant dans les pays de la CEMAC (en pourcentage), 2022-2024 7,0 4,0 6,0 2,0 5,0 0,0 4,0 -2,0 3,0 -4,0 2,0 -6,0 1,0 -8,0 0,0 -10,0 -1,0 n d A o le n ng ha ou bo RC ria -2,0 Tc Co Ga er to m ua p. -3,0 Ca Ré Eq ée 2019 2020 2021 2022 2023e 2024p 2025p 2026p in Gu CEMAC UEMOA 2022 2023e 2024p Tout en restant positif, le solde extérieur de la La baisse des recettes provenant des matières CEMAC s’est détérioré dans un contexte de baisse premières et l’augmentation des dépenses ont des cours et des recettes du pétrole. contribué à réduire l’espace budgétaire dans la zone CEMAC. Figure 3. Cours du pétrole (axe droite) et situation Figure 4. Situation budgétaire (% du PIB), 2019-2026 extérieure (axe gauche), 2019-2026 15 100 25 4 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 90 10 2 80 20 5 70 0 60 15 0 50 -2 40 10 -5 -4 30 20 -10 5 -6 10 -15 0 0 -8 2019 2020 2021 2022 2023e 2024p 2025p 2026p 2019 2020 2021 2022 2023e 2024p 2025p 2026p Solde du compte courant (% du PIB) - CEMAC Dépenses totales - CEMAC (axe gauche) Recettes totales - CEMAC (axe gauche) Solde du compte courant (% du PIB) - UEMOA Solde budgétaire - CEMAC (axe droite) Balance commerciale (% du PIB) - CEMAC Solde budgétaire - UEMOA (axe droite) Balance commerciale (% du PIB) - UEMOA Solde budgétaire - Critère de convergence Cours du pétrole brut (USD/baril) (axe droite) de la CEMAC (axe droite) Recettes pétrolières - CEMAC (axe droite) SECTION 1 — Évolutions récentes 7 En conséquence, les pays de la CEMAC sont Depuis fin 2021, la BEAC exerce une politique confrontés à un défi important, celui de contenir les monétaire de resserrement, maintenant le taux dépenses et la dette publiques. directeur à 5,0 pour cent depuis mars 2023. Figure 5. Dette publique (% du PIB), 2019-2026 Figure 6. Evolution des taux directeurs en Afrique de l’ouest et centrale et dans l’UE, 2020-2023 80 5,5 70 5,0 4,5 60 4,0 50 3,5 40 3,0 2,5 30 2,0 20 1,5 10 1,0 0 0,5 2019 2020 2021 2022 2023e 2024p 2025p 2026p 0,0 janv.-20 avr.-20 juil.-20 oct.-20 janv.-21 avr.-21 juil.-21 oct.-21 janv.-22 avr.-22 juil.-22 oct.-22 janv.-23 avr.-23 juil.-23 oct.-23 CEMAC UEMOA Dette - Critère de convergence de la CEMAC UEMOA CEMAC BCE Le taux de change effectif réel des pays de la CEMAC En septembre 2023, l’inflation était à 4,7 pour cent, a baissé en moyenne ces derniers mois, reflétant ce qui représente une baisse par rapport aux 6,3 la dépréciation du FCFA par rapport au panier de pour cent enregistrés en décembre 2022. devises des partenaires commerciaux. Figure 7. Taux de change effectif réel USD-FCFA, Figure 8. Inflation moyenne dans la CEMAC 2020-2024 (pourcentage), 2020-2023 10 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 120 8 115 6 110 4 105 2 100 0 95 -2 janv.-20 avr.-20 juil.-20 oct.-20 janv.-21 avr.-21 juil.-21 oct.-21 janv.-22 avr.-22 juil.-22 oct.-22 janv.-23 avr.-23 juil.-23 90 Inflation structurelle 2020T1 2020T2 2020T3 2020T4 2021T1 2021T2 2021T3 2021T4 2022T1 2022T2 2022T3 2022T4 2023T1 2023T2 2023T3 2023T4 2024T1* Inflation énergétique Inflation alimentaire Inflation globale dans la CEMAC Critère de convergence de la CEMAC - Inflation TCER, CEMAC TCER, UEMOA Inflation globale dans l'UEMOA 8 SECTION 1 — Évolutions récentes Néanmoins, l’inflation continue de peser sur Il est essentiel de promouvoir l’inclusion et la les ménages, d’autant que près d’un tiers de la participation économique dans la CEMAC, où un population vit dans l’extrême pauvreté. jeune sur quatre ne travaille pas, n’étudie pas et n’est pas en formation. Figure 9. Pourcentage de la population vivant dans la Figure 10. Indicateurs d’emploi dans la CEMAC et pauvreté dans la CEMAC et dans l’UEMOA, 2023 dans l’UEMOA 80 90,0 84,2 81,5 70 80,0 60 70,0 56,2 54,5 50 60,0 40 50,0 40,0 30 31,1 30,0 23,4 20 20,0 10 10,0 0 Informalité Jeunes ni en emploi, Chômage 0,0 (% de l'emploi total) ni en études, (% population âgée Moins de Moins de Moins de ni en formation +15 ans) (% des jeunes) 2,15$/jour 3,65$/jour 6,85$/jour CEMAC UEMOA CEMAC UEMOA Sources : Autorités nationales, Bruegel, OIT, Banque mondiale et calculs des services de la Banque mondiale. Remarques : Les chiffres indiquent des moyennes pondérées pour la CEMAC et l’UEMOA, basées sur la part des pays dans le PIB de chaque région. Les données sur la pauvreté ne sont pas disponibles pour tous les pays et toutes les périodes et sont basées sur des prévisions immédiates et des prévisions basées sur les données réelles des enquêtes nationales auprès des ménages pour le Cameroun (2014), la République centrafricaine (2021), le Tchad (2018), le Congo (2011) et le Gabon (2017). Les données sur l’emploi sont basées sur des estimations de 2023 (les données sur l’informalité datent de 2018 pour le Congo, 2017 pour le Gabon, 2014 pour le Tchad et 2008 pour la RCA, et ne sont pas disponibles pour la Guinée équatoriale). Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) II. Principaux défis de développement et priorités de réforme pour la CEMAC Même si la reprise économique devrait se poursuivre énergie, un meilleur accès au financement et des au cours des prochaines années dans la CEMAC, processus commerciaux et fiscaux plus efficaces, en moyenne, les niveaux de croissance attendus ne afin de stimuler la croissance du secteur privé et pourront se traduire en une amélioration significative la création d’emplois. du niveau de vie. La CEMAC est confrontée à plusieurs défis de développement. Pour les résoudre, il serait Le renforcement de la gouvernance économique nécessaire d’atteindre des capitaux humain, physique et des institutions et l’amélioration des capacités et institutionnel plus forts (Tableau 2). Il est essentiel et de l’efficacité de l’action publique sont d’améliorer l’environnement des affaires, avec de essentiels pour l’offre de services publics, la meilleures routes, un meilleur approvisionnement en conception et la mise en œuvre de politiques SECTION 1 — Évolutions récentes 9 favorables à la croissance et à la gestion des Dans tous les pays d’Afrique centrale, la ressources, ce qui créerait un environnement plus promotion de la participation économique propice aux activités du secteur privé. Cependant, des et de la création d’emplois constitue un défi faiblesses en matière de gouvernance persistent dans social et économique majeur. La plupart des les pays de la CEMAC, notamment en termes d’état de économies de la région dépendent fortement des droit et de lutte de la corruption, comme le montrent industries extractives. Cependant, ces industries les Indicateurs mondiaux de gouvernance de la créent moins d’emplois que les secteurs à plus Banque mondiale. Bon nombre des pays de la CEMAC forte intensité de main-d’œuvre. Environ 47 se situent dans le tercile3 inférieur de leurs groupes pour cent de la main-d’œuvre de la région est de revenus respectifs, ce qui indique des défis plus employée dans le secteur agricole dans lequel importants en matière de gouvernance par rapport la productivité et les revenus sont plus faibles, à leurs pairs et la nécessité d’améliorer la qualité ce qui fait que la création de richesse reste institutionnelle. insuffisante. Par ailleurs, la part des emplois dans l’industrie et les services a progressivement Un secteur privé dynamique est un moteur de augmenté par rapport à l’agriculture, ce qui croissance à travers ses contributions à la création pourrait être un premier signe d’un changement d’emplois, la production de biens et de services et structurel. Conformément à cette tendance, de la génération de revenus. Dans le contexte de la nombreux pays de la CEMAC connaissent une CEMAC, il est essentiel de renforcer le secteur privé diminution de la contribution de l’agriculture pour parvenir à la diversification économique qui est au PIB au profit d’une augmentation de celle de autant souhaitée que nécessaire. Cependant, dans l’industrie.4 Par contre, la région fait toujours de nombreux pays de la CEMAC, la faiblesse de la face aux défis d’assurer la sécurité alimentaire gouvernance et des institutions, ainsi que des défis et d’accroître la production agricole. De plus, une en termes de concurrence font que l’environnement grande partie de la population dépend d’emplois des affaires est difficile. En revanche, la région informels pour gagner leur vie. En moyenne, 90 CEMAC a eu une performance relativement bonne en pour cent des emplois sont dans l’informel au termes d’afflux d’Investissements directs étrangers Cameroun, au Tchad et au Congo, une situation (IDE) reçus en 2022, ce qui constitue un levier qui empêche les travailleurs d’accéder au crédit, important pour le secteur privé. Cependant, il existe aux prestations de protection sociale et aux droits de grandes disparités entre les pays. Bénéficiant du travail. Pour éviter les risques que poserait Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) d’investissements dans le pétrole et d’autres une éventuelle crise sociale liée au manque de matières premières, la région a attiré des flux nets participation économique et transformer ces d’IDE équivalant à 3,8 pour cent du PIB en 2022, soit risques en des opportunités, les gouvernements plus que l’UEMOA avec ses 3,0 pour cent et l’Afrique de la région pourraient promouvoir des subsaharienne avec ses 1,5 pour cent en moyenne. investissements ciblés axés sur la promotion Cependant, la plupart des pays de la CEMAC se de l’entrepreneuriat et des compétences situent dans le tercile moyen de leurs groupes de professionnelles adaptées aux besoins du marché, revenus respectifs, ce qui signifie qu’il y a plus d’effort ainsi que d’autres mesures visant à stimuler la à fournir pour créer un environnement plus propice croissance et la diversification économique. aux affaires pour attirer les capitaux étrangers et faciliter les activités des entrepreneurs nationaux. 3 Le tercile, indiqué dans le tableau 2 (en bas), fait référence à la position du pays par rapport à d’autres pays de la même catégorie de revenus. Si le pays se trouve dans le tercile supérieur, cela signifie que, pour un indicateur économique donné, il fait partie des pays ayant les meilleurs indicateurs de son groupe. Des explications supplémentaires sont fournies dans le tableau 2. 4 Entre 2020 et 2022, l’emploi dans l’industrie est passé de 15,1 à 15,5 pour cent (du total des emplois) au Cameroun et de 9,1 à 9,6 pour cent au Tchad. L’emploi dans les services est passé de 41,5 à 42,4 pour cent au Cameroun, de 45,0 à 45,6 pour cent au Congo et de 30,8 à 31,4 pour cent en Guinée équatoriale. 10 SECTION 1 — Évolutions récentes Le renforcement du capital humain, à travers des est inquiétant de constater que la performance politiques visant à une main-d’œuvre en bonne du Cameroun, la plus grande économie de la santé et qualifiée, est une condition essentielle région, est en baisse. En termes de classement, pour une croissance plus durable et plus inclusive. le pays est passé du 95e rang sur 160 pays en Les résultats en matière de capital humain dans la 2018 au 134e en 2023. Pour développer leurs CEMAC, notamment en ce qui concerne l’éducation activités, améliorer la circulation des personnes et la santé, ne se sont pas améliorés de manière et des marchandises dans la région et au-delà significative au cours de la dernière décennie et et créer davantage d’emplois, les entreprises restent en moyenne faibles.5 Un enfant né aujourd’hui ont besoin d’un approvisionnement en électricité dans la région CEMAC n’aura une productivité qui ne stable et abordable. Elles ont également besoin sera que de 37 pour cent de la productivité qu’il aurait de réseaux routiers et ferroviaires fiables et de eue s’il avait bénéficié d’une éducation complète et ports efficaces. Il n’est pas possible de parvenir de soins de santé complets. Ce taux de productivité à une croissance durable et une diversification est de 40 pour cent en Afrique subsaharienne. Les économique sans des investissements plus dépenses d’éducation dans la région, qui représentent solides et des dépenses plus efficaces consacrées en moyenne 2,3 pour cent du PIB, sont inférieures à au développement, à la modernisation et à celles de l’Afrique subsaharienne (4,1 pour cent du l’entretien du capital physique de la CEMAC. PIB). La deuxième phase (2021-2025) du Programme de réformes économiques et financières de la CEMAC L’économie numérique offre des opportunités (PREF-CEMAC II) a intégré le capital humain comme transformatives en termes de productivité, de un domaine prioritaire. Il est nécessaire d’investir croissance, de diversification économique et de davantage et d’améliorer la qualité des dépenses création d’emplois. Cependant, la région CEMAC dans l’éducation et la santé, ainsi que de développer fait face à plusieurs défis, notamment l’accès et le des systèmes de protection sociale adaptatifs et coût de la connectivité et de faiblesses en termes réactifs aux chocs pour mieux protéger les personnes de compétences numériques, d‘infrastructure, de vulnérables et renforcer le capital humain, l’inclusion réglementations et de politiques de concurrence. sociale et l’égalité des sexes. Bien que l’utilisation d’Internet ait augmenté dans la CEMAC, elle reste inférieure à la moyenne L’amélioration de la qualité et de l’accès aux de 36 pour cent en Afrique subsaharienne dans Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) infrastructures de base restent essentiels pour de nombreux pays de la région, y compris stimuler le commerce et l’activité économique dans la la République centrafricaine et le Tchad, où CEMAC. De graves déficits d’infrastructures persistent seulement 10,6 pour cent et 17,8 pour cent de dans la région alors que la plupart des pays la population utilisent Internet, respectivement. membres sont confrontés à de sérieux défis en ce Le prix de la connectivité mobile à large bande qui concerne l’élargissement de l’accès à l’électricité uniquement de données est supérieur à l’objectif et l’amélioration de la performance en matière de mondial de 2 pour cent du Revenu national processus douaniers, de ports et de réglementation brut (RNB) par habitant dans tous les pays de commerciale. Les pays de la CEMAC sont classés la CEMAC à l’exception du Gabon. La réduction au 109e rang en moyenne à l’Indice de performance des coûts de connectivité dans la région, logistique de la Banque mondiale en 2023, indice qui l’amélioration des politiques de concurrence et compare la logistique commerciale dans 139 pays. Il de l’environnement réglementaire numérique 5 De légères améliorations de l’Indice de capital humain (ICH) sont constatées pour le Cameroun, le Tchad et la République du Congo pour lesquels on dispose de données pour 2010 et 2020 : L’ICH y est passé de 0,36 en 2010 à 0,37 en 2020, en moyenne. Les données ne sont pas disponibles pour la Guinée équatoriale. SECTION 1 — Évolutions récentes 11 et le développement des infrastructures et des coopération internationale. Le premier pilier, compétences numériques contribueraient à améliorer axé sur l’amélioration de la politique budgétaire, l’adoption de la technologie numérique, stimulant vise à améliorer la mobilisation des recettes ainsi la croissance et l’emploi. non pétrolières, à renforcer les capacités des administrations fiscales et à améliorer la qualité Le changement climatique constitue un autre défi et l’efficacité des dépenses publiques. L’adoption de développement majeur pour la région CEMAC des réformes structurelles prévues et en cours qui est très vulnérable aux chocs climatiques et aux contribuerait à renforcer la diversification catastrophes naturelles, mais dont les pays figurent économique et à stimuler le développement du parmi les moins bien préparés à faire face à ces secteur privé, à améliorer le climat des affaires chocs. En particulier, le Tchad (185e économie sur dans la région et à développer des formes 185) et la République centrafricaine (184e) se classent alternatives de financement. Le renforcement au bas de l’indice Notre Dame (ND-GAIN) qui reflète de l’intégration régionale exige la modernisation la vulnérabilité d’un pays au changement climatique des infrastructures en appui à la production, au ainsi que son degré de préparation à améliorer sa commerce et à la diversification économique. Les résilience. Comparé à celui des pairs de leur groupe institutions de la CEMAC et les États membres ont de revenus, l’indice ND-GAIN des pays de la CEMAC se progressé dans la mise en œuvre du programme situe dans le tercile inférieur (Tableau 2), soulignant de réformes, notamment avec l’élaboration d’une davantage la nécessité d’une stratégie régionale stratégie régionale d’inclusion financière, d’un d’adaptation au changement climatique. L’adaptation projet de politique industrielle régionale et des au changement climatique et l’atténuation du politiques qui contribuent à l’amélioration de la changement climatique exigeraient des réformes productivité et à l’expansion des industries locales politiques fortes ainsi que le renforcement (textile, agro-industrie, bois et construction). des institutions et des capacités. De plus, des Onze projets d’intégration prioritaires de la financements considérables, avec la participation du CEMAC définis dans le cadre du PREF-CEMAC secteur privé, seraient nécessaires pour apporter II, couvrant entre autres les corridors de une réponse au défi du changement climatique. Par transport régionaux, la production d’énergie et exemple, près de 4,4 milliards USD seront nécessaires l’interconnexion en matière d’énergie, le capital dans plusieurs secteurs pour que la République du humain et la diversification économique, devraient Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Congo puisse honorer ses Contributions déterminées à terme contribuer à renforcer les échanges, à au niveau national (CDN) pour 2030.6 accroître l’offre d’une énergie stable, à améliorer la connectivité via la fibre optique, et à permettre L’accélération de la mise en œuvre des réformes la mise en place de centres d’excellence pour le en cours dans le cadre du PREF-CEMAC II renforcement des capacités humaines. Le dernier contribuerait à apporter une réponse à certains rapport de suivi du programme montre que 59 des grands défis de développement de la région. pour cent des actions prévues avaient été mises Le PREF-CEMAC II repose sur cinq piliers, à en œuvre à la fin du troisième trimestre 2023, savoir (i) la politique budgétaire, (ii) la politique contre 56 pour cent au premier trimestre 2023 et monétaire et le système financier, (iii) les réformes 42 pour cent au troisième trimestre 2022. structurelles, (iv) l’intégration régionale et (v) la 6 Les contributions déterminées au niveau national sont des engagements pris par les membres de l’Accord de Paris dans le cadre d’un plan d’action visant à atténuer le changement climatique et à s’y adapter. 12 SECTION 1 — Évolutions récentes Tableau 2. Indicateurs de développement dans la CEMAC LÉGENDE En (1) Tendance des indicateurs de 2020 à 2022 :a ↑ = Stable ↓ En baisse augmentation Tercile Tercile Tercile (2) Position dans le groupe de revenus :b TS TM TI supérieur moyen inférieur (a) Le tableau montre l’évolution de la valeur des indicateurs sur une période de trois ans de 2020 à 2022, à l’exception de l’indice ND-GAIN et l’indice de performance logistique, pour lesquels les données sont présentées dans différentes années. La valeur peut augmenter, baisser ou rester stable. (b) De plus, pour chaque indicateur structurel, la position du pays dans son groupe de revenus est établie sur la base de la valeur de son indicateur 2022. Le pays peut appartenir au tercile supérieur (pays avec des scores plus élevés dans le groupe de revenu), au tercile moyen (pays avec des scores moyens dans le groupe de revenu) ou au tercile inférieur (pays avec des scores plus faibles dans le groupe de revenu). Remarque : Les cellules vides dans le tableau signifient qu’il n’y pas eu suffisament de données disponibles pour évaluer la tendance ou établir à quel tercile le pays appartient. Revenu intermédiaire de la Revenu intermédiaire de la Faible revenu tranche supérieure tranche inférieure Guinée Gabon Cameroun Congo RCA Tchad Équatoriale Indicateurs structurels (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) SECTEUR PRIVÉ Investissement direct étranger, ↓ TM ↓ TM = TM ↓ TI = TI ↑ TS entrées nettes (% du PIB) Industrie (y compris bâtiment et travaux publics), valeur ajoutée (% ↑ TS ↑ TS ↑ TM ↑ TS = TM ↑ TS du PIB) Services, valeur ajoutée (% du PIB) ↓ TI ↓ TI ↓ TM ↓ TI = TM ↓ TI Agriculture, foresterie et pêche, ↓ TM ↓ TI = TM ↓ TI ↑ TM ↓ TM valeur ajoutée (% du PIB) Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) INFRASTRUCTURES Formation brute de capital fixe (% du ↓ TI TI = TI ↑ TI ↓ TI ↓ TM PIB) Accès à l’électricité (% de la = TI = TI = TI ↑ TM ↑ TI ↑ TI population)c Indice de performance logistique de la ↑ TI ↓ TI ↓ TM = TI TS BM. Rang : Sur 139 paysd CAPITAL HUMAIN ET NUMÉRISATION Dépenses publiques en matière ↓ TI ↑ TI ↓ TM ↓ TM ↓ TI ↑ TM d’éducation, total (% du PIB) Production par heure de travail (PIB constant en USD internationaux de ↓ TS ↓ TM ↓ TI ↓ TI ↓ TI ↓ TI 2017 en PPA) Utilisateurs d’Internet (% de la ↑ TI ↑ TI ↑ TM ↑ TI ↑ TM population) SECTION 1 — Évolutions récentes 13 Revenu intermédiaire de la Revenu intermédiaire de la Faible revenu tranche supérieure tranche inférieure Guinée Gabon Cameroun Congo RCA Tchad Équatoriale Indicateurs structurels (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) (1) (2) CHANGEMENT CLIMATIQUE Indice ND-GAIN sur la vulnérabilité et la préparation au changement = TI ↓ TI ↑ TI = TI = TI = TI climatiquec EMPLOI Emploi dans l’agriculture (% de = TS = TS ↓ TS ↓ TM = TS ↓ TS l’emploi total) Emploi dans l’industrie (% de l’emploi ↑ TI ↑ TI ↑ TM ↑ TM ↑ TI ↑ TM total) Emploi dans les services (% de ↑ TM ↑ TI ↑ TM ↑ TM ↑ TI ↑ TI l’emploi total) GOUVERNANCE Classement par centile parmi tous les pays (classement allant de 0 (le plus bas) à 100 (le plus élevé)) Capacité à se faire entendre et ↑ TI ↑ TI = TI ↑ TI = TM ↓ TI redevabilité Stabilité politique et absence de ↑ TM ↑ TM ↑ TI ↑ TS = TI ↓ TM violence / terrorisme Efficacité du gouvernement ↑ TI ↓ TI ↑ TI ↓ TI ↓ TI ↑ TM Qualité des réglementations ↑ TI ↑ TI = TI = TI = TI ↑ TM État de droit ↓ TI ↓ TI ↑ TI ↑ TI ↓ TI ↑ TM Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Lutte contre la corruption ↓ TI ↓ TI = TI ↑ TI ↓ TI ↓ TI (c) Les informations rapportées sur l’accès à l’électricité et l’indice de GAIN-ND ont trait à 2021, 2020 et 2019. La valeur de 2021 est utilisée pour placer les pays dans un tercile au sein de son groupe de revenus. (d) Les informations rapportées l’indice de performance logistique (IPL) de la BM ont trait à 2023, 2018 et 2016. La valeur de 2023 est utilisée pour placer les pays dans un tercile au sein de son groupe de revenus. Credits: Edouard TAMBA on Unsplash 14 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 15 SECTION 2— Evolution récente et perspectives économiques Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) par pays 7 7 Cette section est basée sur les Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté de la Banque mondiale réalisées lors des Assemblées annuelles de 2024 pour les six pays de la CEMAC. Ces publications offrent un aperçu des développements récents, des prévisions des principales variables macroéconomiques et de la pauvreté au cours de la période 2024-2026, et présentent une discussion des défis critiques à la croissance économique, à la stabilité macroéconomique et à la réduction de la pauvreté dans chaque pays. Les Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté pour les 147 pays couverts sont publiés deux fois par an pour les Assemblées de printemps et annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Les publications pour l’Afrique subsaharienne peuvent être consultées à travers le lien suivant : https://www.worldbank.org/en/publication/macro-poverty-outlook/mpo_ssa. 16 Cameroun Tableau 1 2023 Population, millions 28,8 PIB, milliards USD courants 48,2 PIB par habitant, USD courants 1 646,1 Taux de pauvreté au seuil international 23,0 (2,15 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 46,7 tranche inférieure (3,65 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 76,0 tranche supérieure (6,85 USD)a Coefficient de Ginia 42,2 Taux de scolarisation, primaire (% brut)b 110,7 Espérance de vie à la naissance, annéesb 60,3 Émissions totales de GES (mtCO2e) 134,6 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) Valeur la plus récente (2021), PPA de 2017. (b) WDI pour la scolarisation (2022) ; Espérance de vie (2021). Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) La croissance réelle du Cameroun s’est ralentie, passant de 3,6 pour cent en 2022 à 3,3 pour cent en 2023. La réduction de la pauvreté reste lente, avec 23,0 pour cent de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté international de 2,15 USD en PPA par personne par jour. Un assainissement budgétaire soutenu a permis de maintenir le déficit à l’équivalent de 0,8 pour cent du PIB en 2023. Malgré des perspectives favorables à moyen terme, les risques à venir comprennent la volatilité des cours des matières premières et la persistance de la crise sécuritaire dans certaines régions. La faible croissance par habitant, combinée au niveau élevé des prix des produits alimentaires et de l’énergie, pourrait aggraver la pauvreté. SECTION 2 — CAMEROUN 17 Contexte et défis Le Cameroun est la plus grande économie de la région de la CEMAC, représentant 45 pour cent du PIB de la région et 63 pour cent des réserves de change régionales en 2023. Il s’agit également de l’économie la plus diversifiée de la région. Cependant, le secteur pétrolier continue de représenter l’équivalent de 2,2 pour cent du PIB et 18,4 pour cent des recettes fiscales, ce qui fait que le pays reste vulnérable aux chocs des cours du pétrole. Les pressions dues à l’endettement du Cameroun se sont intensifiées, appelant à des politiques budgétaires prudentes et à une meilleure gestion de la dette. Le modèle de développement actuel ne semble pas en mesure de répondre à l’ambition du Cameroun de devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici à 2035, étant donné que les institutions de gouvernance se sont détériorées, le capital humain reste faible et l’environnement des affaires est défavorable, dans un contexte où la menace du changement climatique prend de l’ampleur. Le paysage de l’emploi fait ressortir des tendances inquiétantes, notamment en ce qui concerne les jeunes, avec la moitié de la population en âge de travailler qui est soit au chômage, soit désengagée du monde du travail. Le secteur informel, qui représente plus de 85 pour cent de l’emploi total, est en train de se réorienter de l’agriculture vers des activités informelles urbaines, appelant à un développement urbain. La productivité, notamment celle du secteur agricole, est à la traîne par rapport à celle de pays similaires, à cause du coût élevé des intrants, du manque de financement et de la sous-utilisation des technologies innovantes. Le Cameroun n’a pas réussi à réduire l’extrême pauvreté au cours des deux dernières décennies. Les données de l’enquête auprès des ménages collectées en 2021/22 indiquent que 23,0 pour cent de la population vit en dessous du seuil de pauvreté extrême international de 2,15 USD en PPA par personne par jour. Le taux d’extrême pauvreté est resté au même niveau depuis 2001, baissant de seulement 0,9 point Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) de pourcentage entre 2014 et 2021. La population vivant dans la pauvreté extrême a augmenté de plus de 2 millions en nombre depuis 2001 et dépasse désormais les 6 millions. Les inégalités restent fortes, avec un coefficient de Gini de 42,2 en ce qui concerne la consommation, indiquant de grandes disparités de niveau de vie entre les régions et les milieux urbain et rural. En outre, la fragilité est prévalente, 6 des 10 régions du Cameroun étant affectées par des conflits, y compris les retombées des conflits sévissant dans les pays voisins. Le changement climatique menace également les perspectives de réduction de la pauvreté du Cameroun, compte tenu de la dépendance du pays envers les ressources naturelles comme le montre le fait que 4 travailleurs sur 10 ont l’agriculture comme activité principale. 18 SECTION 2 — CAMEROUN Évolution récente La reprise économique du Cameroun s’est ralentie en 2023, le PIB réel augmentant de 3,3 pour cent, contre 3,6 pour cent en 2022. Une performance économique plus faible a été observée dans les secteurs primaire, secondaire et tertiaire dans un contexte d’assainissement budgétaire, d’inflation domestique plus élevée et de multiples sources de fragilité, y compris des conflits dans certaines régions du pays. Alors que le secteur des services a continué à soutenir la croissance économique en 2023, tout comme au cours des trois dernières décennies, la croissance du secteur a ralenti par rapport à 2022 en raison de la baisse des activités du secteur des transports à la suite de l’augmentation des prix des carburants à la pompe en février 2023.L’inflation a augmenté à 7,4 pour cent à la fin de l’année 2023, contre 6,3 pour cent en 2022, principalement en raison de la hausse des prix intérieurs du carburant, malgré le resserrement des politiques monétaires et le fléchissement de l’inflation mondiale. Malgré l’amélioration de la balance des services et des revenus, le solde du compte courant s’est légèrement détérioré, atteignant l’équivalent de 3,6 pour cent du PIB alors qu’elle s’élevait auparavant à 3,5 pour cent. Cette détérioration est due à l’aggravation du déficit commercial provoquée par la baisse des exportations de pétrole et de gaz. Les efforts d’assainissement budgétaire menés en 2023 ont réduit le déficit budgétaire à l’équivalent de 0,8 pour cent du PIB, contre 1,1 pour cent en 2022, réduction qui a été soutenue par la réduction des subventions aux carburants, une baisse des dépenses d’investissement et une amélioration du recouvrement des impôts. La dette publique a baissé pour atteindre l’équivalent de 41,9 pour cent du PIB en 2023, contre 45,3 pour cent en 2022. Néanmoins, le Cameroun est resté exposé à un risque élevé de surendettement, bien que ses niveaux d’endettement soient viables. En 2023, la Banque des États d’Afrique Centrale (BEAC) a maintenu une politique monétaire restrictive pour contenir l’inflation et soutenir le régime de change. Bien Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) que le système bancaire camerounais soit resté solide, il subsiste des vulnérabilités, notamment un ratio de prêts non performants de 15,3 pour cent en 2023 et une forte exposition aux obligations souveraines. La réduction progressive des subventions aux carburants libèrera un espace budgétaire supplémentaire pour les dépenses en faveur des pauvres, mais pourrait entraîner des pressions inflationnistes sur le court terme. Les impacts correspondants seront atténués par les incitations fiscales en faveur de l’agriculture et le relèvement du salaire minimum, même si l’effet de cette dernière mesure sur la réduction de la pauvreté pourrait être faible en raison de la forte prévalence de l’emploi informel. Perspectives La croissance du PIB réel du Cameroun à moyen terme, projetée à 4,0 pour cent en 2024 et à 4,5 pour cent en moyenne en 2025-2027, serait tirée par l’amélioration de l’approvisionnement en énergie et par un programme solide d’investissement public. SECTION 2 — CAMEROUN 19 La mise en service du barrage hydroélectrique de Nachtigal et l’achèvement des lignes de transmission depuis la centrale électrique de Memve’ele à la fin de 2023 fourniront 420 MW supplémentaires pour atténuer les pénuries d’approvisionnement en énergie et stimuler les activités dans le secteur manufacturier. En outre, le secteur de la construction bénéficierait directement de l’important programme d’investissement public prévu à moyen terme, avec un effet d’entraînement prévu sur les autres secteurs de l’économie. Le déficit du solde du compte courant devrait se réduire progressivement sur le moyen terme, grâce au maintien des cours des matières premières à un niveau élevé, à l’essor du GNL en 2025 et aux efforts d’exportation du gouvernement. Sur le moyen terme, l’inflation devrait baisser de 7,0 pour cent en 2024 à 4,9 pour cent d’ici 2026, soutenue par la modération de l’inflation des prix à l’importation, l’amélioration de la production industrielle induite par un meilleur approvisionnement en énergie et le resserrement de la politique monétaire de la BEAC. D’après les projections, le déficit budgétaire devrait rester inférieur à 1 pour cent du PIB, soutenu par des mesures visant à accroître les recettes et à graduellement réduire les dépenses courantes, en particulier les subventions aux carburants. Ces mesures devraient compenser l’augmentation prévue des dépenses d’investissement qui sont nécessaires pour accélérer les projets d’investissement. Les projections indiquent que la dette publique devrait diminuer pour atteindre l’équivalent de 35,5 pour cent du PIB d’ici à 2026, tirée par une meilleure gestion de la dette. Cependant, la faiblesse de la croissance par habitant pourrait exacerber la pauvreté : le taux de pauvreté au seuil international de 2,15 USD en PPA par personne par jour devrait atteindre 25,0 pour cent d’ici à 2026 selon les projections, ce qui voudrait dire qu’environ 8 millions de Camerounais seraient dans la pauvreté. En outre, selon les projections, les prix des produits alimentaires devraient augmenter plus rapidement Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) que ceux des autres biens. En réaffectant les économies budgétaires réalisées à partir de la réduction des subventions aux carburants à des dépenses productives, y compris des investissements dans les programmes sociaux et le capital humain, il serait possible d’apporter des appuis aux pauvres et aux vulnérables sur le court terme. Toutefois, pour réduire la pauvreté de façon durable, il faudra accélérer une croissance économique qui crée davantage d’emplois. Les perspectives sont soumises à des risques tels que la volatilité des cours des matières premières, les crises sécuritaires en cours dans certaines régions, l’incertitude de l’appui budgétaire provenant des bailleurs extérieurs, les fluctuations des taux de change qui ont un impact sur la dette et les subventions aux carburants, ainsi qu’une plus grande fréquence des catastrophes en rapport au climat. 20 SECTION 2 — CAMEROUN Figure 1 / Cameroun: Croissance du PIB réel et Figure 2 / Cameroun: Taux de pauvreté réel et projeté contributions à la croissance du PIB réel et PIB réel par habitant Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (FCFA constant) 9 90 800 000 Pourcent, points de pourcentage 80 700 000 4 70 600 000 60 500 000 50 -1 400 000 40 300 000 30 -6 200 000 20 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 10 100 000 Exportations Importations 0 0 Variation des stocks 2007 2014 2021 Écart statistique Formation brute de capital fixe Taux de pauvreté au seuil international Consommation privée Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche inférieure Consommation publique Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche supérieure PIB réel PIB réel par hab. Source : Banque mondiale. Source : Banque mondiale. Remarque : voir le Tableau 2. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Credits: Youssouf NCHETKOU NDAM on Unsplash SECTION 2 — CAMEROUN 21 Tableau 2 / Cameroun: Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage sauf indication contraire) 2021 2022 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché 3,3 3,6 3,3 4,0 4,2 4,6 constants Consommation privée 3,5 3,6 1,7 2,4 2,5 2,6 Consommation publique 3,4 5,1 0,2 0,5 0,6 0,0 Formation brute de capital fixe 7,9 3,2 5,1 8,4 9,0 9,1 Exportations, biens et services 3,2 10,1 10,1 10,0 9,9 9,9 Importations, biens et services 9,0 7,3 7,8 9,7 9,9 10,0 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs 3,3 3,6 3,3 4,0 4,2 4,6 constants Agriculture 4,1 4,3 4,7 5,0 5,6 5,6 Industrie 4,1 4,2 4,5 4,8 5,4 5,4 Services 2,7 3,1 3,5 3,9 3,8 3,9 Inflation (indice des prix à la consommation) 2,5 6,3 7,4 7,0 5,7 4,9 Solde du compte courant (% du PIB) -3,8 -3,5 -3,6 -3,3 -3,4 -3,0 Solde budgétaire (% du PIB) -2,9 -1,1 -0,8 -0,7 -0,8 -0,7 Recettes (% du PIB) 14,2 15,9 16,0 16,1 16,1 16,3 Dette (% du PIB) 47,3 45,3 41,9 40,1 38,8 35,5 Solde primaire (% du PIB) -1,9 -0,3 0,2 0,2 0,0 0,0 Taux de pauvreté au seuil international 23,0 22,9 23,9 24,8 25,2 25,0 (2,15 USD en PPA de 2017) a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (3,65 46,7 46,3 47,7 48,3 48,4 48,4 USD en PPA de 2017)a,b Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (6,85 76,0 75,6 76,5 77,0 77,0 76,7 USD en PPA de 2017)a,b Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 1,8 1,4 1,5 1,5 1,8 1,7 Émissions de GES liées à l’énergie (% du total) 7,3 7,4 7,6 7,8 8,1 8,4 Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. Les données sur la pauvreté sont exprimées en PPA de 2017, contrairement aux éditions précédentes qui étaient exprimées en PPA de 2011, entraînant des changements majeurs. Voir pip.worldbank.org (a) Calculs basés sur l’ECAM-V de 2021. Données réelles : 2021. Prévision immédiate : 2022-2023. Les prévisions concernent la période de 2024 à 2026. (b) Projection utilisant la méthodologie de micro-simulation. 22 République Centrafricaine Tableau 1 2023 Population, millions 5,7 PIB, milliards USD courants 2,6 PIB par habitant, USD courants 460,3 Taux de pauvreté au seuil international 65,7 (2,15 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 85,8 tranche inférieure (3,65 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 96,2 tranche supérieure (6,85 USD)a Coefficient de Ginia 43,0 Taux de scolarisation, primaire (% brut)b 110,7 Espérance de vie à la naissance, annéesb 53,9 Émissions totales de GES (mtCO2e) 55,9 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) Valeur la plus récente (2021), PPA de 2017. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) (b) WDI pour la scolarisation (2017) ; Espérance de vie (2021). Selon les estimations, la croissance économique a atteint 0,9 pour cent en 2023, contre 0,5 pour cent en 2022. Les vulnérabilités structurelles de la RCA, aggravées par les chocs extérieurs, continuent de mettre les finances publiques à rude épreuve et de nuire à la croissance, à la sécurité alimentaire et aux efforts de réduction de la pauvreté, appelant à des réformes macro-budgétaires audacieuses. En 2023, les deux tiers de la population vivaient dans la pauvreté extrême, avec des projections indiquant qu’une augmentation d’un point de pourcentage se produira au cours des deux prochaines années à cause d’une croissance par habitant négative. SECTION 2 — RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 23 Contexte et défis Depuis 2020, les vulnérabilités macroéconomiques et budgétaires de la RCA ont été exacerbées par une série de chocs exogènes (regain de l’insécurité et de la violence, pandémie de COVID-19 et invasion de l’Ukraine par la Russie). Ces chocs ont mis à rude épreuve les finances publiques, augmenté les pressions inflationnistes, ont compromis la sécurité alimentaire et ont ralenti les efforts de réduction de la pauvreté. En outre, les chocs climatiques, notamment les sécheresses et les inondations, continuent de poser des menaces pour une situation humanitaire déjà alarmante, en particulier dans les zones enclavées. Au 31 décembre 2023, le nombre total de personnes déplacées internes (PDI) était estimé à 511 803, alors qu’environ 754 421 personnes étaient enregistrées comme réfugiés dans les pays voisins. Le secteur privé continue de se heurter à des conditions peu attrayantes pour la conduite des affaires et des coûts d’emprunt élevés. Les opportunités d’emploi restent très peu nombreuses, alors que la main-d’œuvre augmente. Il sera essentiel pour les autorités nationales de soutenir les efforts qu’elles mènent pour promouvoir une croissance plus inclusive et plus résiliente. Ces efforts comprennent l’amélioration de l’environnement des affaires et de la gouvernance des entreprises publiques de manière à attirer les investissements privés, l’amélioration de la mobilisation de recettes en vue de restaurer la viabilité budgétaire et la rationalisation des subventions non ciblées afin de créer de l’espace pour des dépenses sociales plus importantes. Évolution récente La croissance économique était estimée à 0,9 pour cent en 2023, soit une légère augmentation par rapport aux 0,5 pour cent de 2022, et ce résultat tient à l’insuffisance de l’approvisionnement en carburant et du niveau très moyen de la performance agricole. Cette insuffisance de l’approvisionnement en carburant a contribué à la hausse des prix des transports et à la perturbation du commerce et de la production locale. La production de diamants, l’une des matières premières d’exportation les plus importantes du pays, a chuté de 6,7 pour cent entre Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 2022 et 2023 à la suite de la baisse de la demande internationale de diamants naturels induite par la forte hausse de la demande en diamants synthétiques. En revanche, la reconversion des mineurs artisanaux du secteur du diamant à celui de l’or et une hausse relative du cours de l’or ont contribué à stimuler la production d’or. La production officielle de bois d’œuvre et de bois scié aurait augmenté en 2023, tirée par l’amélioration des conditions sécuritaires, la signature de contrats avec des partenaires bilatéraux clés, et un léger rebond des cours internationaux des grumes et du bois scié. Les coupures d’électricité à répétition ont continué à freiner le secteur industriel, tandis que le secteur des services a souffert de la hausse des prix des transports. Malgré la hausse des coûts des transports, l’inflation a chuté de 5,6 pour cent en 2022 à 3,0 pour cent en 2023, son niveau le plus bas depuis 2021. Les fortes contraintes budgétaires induites par le manque de croissance et les prix élevés des transports ont réduit le pouvoir d’achat des ménages, ont aggravé l’insécurité alimentaire et ont ralenti les efforts de réduction de la pauvreté. La pauvreté reste généralisée, avec environ 65,9 pour cent de la population vivant dans la pauvreté extrême en 2023 (c’est-à-dire en dessous du seuil de pauvreté international de 2,15 USD par personne et par jour, PPA 2017). Le taux de 24 SECTION 2 — RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE pauvreté extrême devrait augmenter d’un point de pourcentage au cours des deux prochaines années à cause d’une croissance par habitant négative. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a maintenu une politique monétaire restrictive en 2023, afin de contenir les pressions inflationnistes et appuyer la viabilité extérieure du régime de change. Le taux directeur de la BEAC a été maintenu à 5 pour cent après une augmentation cumulée de 175 points de base entre novembre 2021 et mars 2023. Les injections de liquidités hebdomadaires ont pris fin au début de l’année 2023 et la BEAC a intensifié ses opérations d’absorption de liquidités. Les indicateurs de solidité financière de la RCA restent globalement adéquats, bien que le ratio des prêts non performants se soit détérioré et se soit établi à 16,4 pour cent en 2023, contre 15,5 pour cent en 2022. Malgré des améliorations continues en 2022, le solde budgétaire global est resté structurellement déficitaire. Les pénuries de carburant au cours du dernier trimestre 2023 ont entrainé une baisse des recettes fiscales recouvrées sur le pétrole et ont freiné les récents efforts de recouvrement fiscal. Les efforts de mobilisation des recettes intérieures (MRI), notamment la mise en œuvre de la nouvelle taxe sur les communications électroniques, combinés à la modération des dépenses courantes et à l’augmentation du financement sur dons extérieurs, ont permis de réduire les soldes budgétaires globaux en 2023. La dette publique a augmenté pour atteindre l’équivalent de 55,7 pour cent du PIB en 2023, prenant la forme d’émissions d’obligations intérieures nettes. En 2023, la dette intérieure devrait atteindre l’équivalent de 21 pour cent du PIB, selon les estimations. Les rendements sur trois ans des obligations émises ont oscillé autour de 11 pour cent, un des pourcentages les plus élevés de la CEMAC. Le déficit du solde du compte courant s’est amélioré pour atteindre l’équivalent de 9 pour cent du PIB en 2023, principalement grâce à une amélioration de 14,4 pour cent des termes de l’échange. Toutefois, le manque de compétitivité, associé aux chocs des cours des matières premières et à la faiblesse des liens avec les chaînes de valeur mondiales, a continué de peser sur la position extérieure. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Perspectives En termes de perspectives à moyen terme, la performance économique devrait s’améliorer graduellement mais est vulnérable aux vents contraires. D’après les projections, la croissance du PIB réel devrait se redresser petit à petit pour atteindre 1,3 pour cent en 2024, avant de s’établir à une moyenne de 1,8 pour cent en 2025-2026, en partie à cause de l’effet de base et sous réserve du deuxième décaissement de l’appui budgétaire de la Banque africaine de développement (BAD) et de la mise en œuvre des ajustements politiques visant à ouvrir la voie à un meilleur approvisionnement en carburant. L’inflation devrait dépasser le plafond régional en 2024 et rester élevée sur le moyen terme. Le niveau de pauvreté devrait rester élevé à cause du déclin des revenus par habitant, du niveau relativement élevé des prix des produits alimentaires et de la faiblesse de la reprise économique. Le solde budgétaire global devrait s’améliorer progressivement de 2024 à 2026, à condition que les efforts de comptabilisation et de gestion de la dette se poursuivent, notamment en SECTION 2 — RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 25 ce qui concerne l’amélioration du recouvrement des impôts et taxes, en particulier la TVA, et de diverses recettes à travers un système de compte unique du Trésor (CUT). Dans ces circonstances, les recettes intérieures pourraient, pour la première fois, retrouver leur niveau d’avant-guerre en 2026. D’après les projections, le pays devrait rester exposé à un risque élevé de surendettement extérieur et de surendettement global, même si la dette publique devrait rester viable. De même, le solde du compte courant devrait s’améliorer mais rester significativement déficitaire. La balance des paiements devrait afficher un déficit de financement équivalant à environ 1 pour cent du PIB par an sur le moyen terme, déficit qui serait couvert par un financement-relais provenant du marché régional, de décaissements d’appui budgétaire éventuels provenant des bailleurs, et de décaissements au titre du programme FEC en cours du FMI. Les risques pesant sur les perspectives restent baissiers et comprennent : (i) une inversion des acquis en matière de sécurité qui pourrait compromettre la croissance économique et la sortie de la fragilité ; (ii) la persistance des pressions sur les prix des produits alimentaires et des transports qui pourraient ralentir les efforts de réduction de la pauvreté ; (iii) l’incapacité à mettre en œuvre les réformes politiques audacieuses et convenues dans le cadre du programme FEC, qui pourrait retarder les décaissements attendus, freiner l’appétit des bailleurs à accorder un appui budgétaire et conduire à une éventuelle accumulation d’arriérés. Figure 1 / République centrafricaine : Croissance du Figure 2 / République centrafricaine : Taux de PIB réel et contributions à la croissance du PIB réel pauvreté réel et projeté et PIB réel par habitant Pourcent, points de pourcentage Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (FCFA constant) 5 120 300 000 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 4 3 100 250 000 2 80 200 000 1 60 150 000 0 -1 40 100 000 -2 20 50 000 -3 -4 0 0 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2008 2015 2022 Taux de pauvreté au seuil international Exportations nettes Formation brute de capital fixe Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche inférieure Consommation publique Consommation privée Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche supérieure PIB (prix du marché) PIB réel par hab. Source : Banque mondiale. Source : Banque mondiale. Remarque : voir le Tableau 2. 26 SECTION 2 — RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 2 / République Centrafricaine : Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage sauf indication contraire) 2021 2022 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché 1,0 0,5 0,9 1,3 1,7 1,9 constants Consommation privée 1,3 0,0 1,2 3,3 2,5 2,7 Consommation publique -3,8 -8,2 3,5 -4,5 -4,4 -1,9 Formation brute de capital fixe -15,9 -4,5 -1,5 0,2 9,8 3,2 Exportations, biens et services -5,3 2,6 9,0 5,2 9,0 5,4 Importations, biens et services -11,5 -5,5 5,5 7,3 9,9 5,5 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs 1,5 1,0 0,9 1,3 1,7 1,9 constants Agriculture 2,7 2,2 2,3 2,5 2,9 3,1 Industrie -1,7 -3,9 -0,5 1,3 1,8 2,1 Services 2,2 2,4 0,5 0,3 0,6 0,9 Inflation (indice des prix à la consommation) 4,3 5,6 3,0 4,7 4,6 3,8 Solde du compte courant (% du PIB) -11,1 -12,7 -9,0 -7,7 -6,7 -5,4 Solde budgétaire (% du PIB) -6,0 -5,3 -3,5 -3,1 -1,8 0,1 Recettes (% du PIB) 13,7 12,3 14,4 13,9 16,1 18,2 Dette (% du PIB) 48,6 54,2 55,7 55,6 54,5 50,7 Solde primaire (% du PIB) -5,7 -4,9 -2,9 -2,2 -0,9 0,9 Taux de pauvreté au seuil international 65,7 65,3 65,9 66,2 66,8 67,3 (2,15 USD en PPA de 2017) a,b Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (3,65 85,8 85,6 86,2 86,1 86,7 87,1 USD en PPA de 2017)a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (6,85 96,2 96,1 96,4 96,4 96,5 96,7 USD en PPA de 2017)a,b Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 0,6 0,1 0,0 -0,1 0,0 0,0 Émissions de GES liées à l’énergie (% du total) 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4 0,4 Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. Les données sur la pauvreté sont exprimées en PPA de 2017, contrairement aux éditions précédentes qui étaient exprimées en PPA de 2011, entraînant des changements majeurs. Voir pip.worldbank.org (a) Calculs basés sur 2021-EHCVM. Données réelles : 2021. Prévision immédiate : 2022-2023. Les prévisions concernent la période de 2024 à 2026. (b) Projection utilisant la méthodologie de micro-simulation. 27 Tchad Tableau 1 2022 Population, millions 18,3 PIB, milliards USD courants 13,2 PIB par habitant, USD courants 722,4 Taux de pauvreté au seuil international (1,9 USD)a 30,8 Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche 62,8 inférieure (3,2 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche 88,8 supérieure 5,55 USD)a Coefficient de Ginia 37,4 Taux de scolarisation, primaire (% brut)b 90,4 Espérance de vie à la naissance, annéesb 52,5 Émissions totales de GES (mtCO2e) 121,1 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) La donnée la plus récente Ecosit 4 (2018/2019), 2011 PPA. (b) WDI pour la scolarisation (2017) ; Espérance de vie (2021). Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) L’économie du Tchad s’est avérée résiliente malgré la guerre qui sévit au Soudan voisin. Le taux de croissance de son PIB en 2023 est estimé à 4,1 pour cent (1 pour cent par habitant), soutenu par une plus grande production pétrolière et des investissements publics. L’amélioration de la production agricole a ramené l’inflation à 4,1 pour cent. Bien que le taux de pauvreté ait baissé, 5,5 millions de personnes vivent toujours dans la pauvreté extrême. Les facteurs de risque baissier comprennent l’incertitude liée à la transition politique, l’instabilité régionale, l’insécurité et les chocs climatiques. 28 SECTION 2 — TCHAD Contexte et défis La croissance économique du Tchad a été volatile et faible, reflétant le manque de diversification économique du pays et sa dépendance envers le secteur pétrolier qui représente environ 85 pour cent de ses exportations et 56 pour cent de ses recettes fiscales. Le Tchad fait également partie des pays les plus vulnérables au changement climatique. Le secteur agricole, principal secteur d’emploi, a souvent été victime des effets négatifs de l’insuffisance des pluies, ainsi que des inondations fréquentes qui, conjuguées aux conflits et aux déplacements, ont conduit à une insécurité alimentaire chronique. La situation sécuritaire reste précaire avec les menaces d’activité de Boko Haram dans la région du lac Tchad, la rébellion armée du FACT dans le nord et l’escalade des tensions intercommunautaires. Selon le Haut-Commissariat aux Réfugiés, à la fin de l’année 2022, le Tchad comptait sur son sol près de 1 million de déplacés involontaires, dont 593 000 réfugiés et près de 400 000 personnes déplacées internes. Depuis le 15 avril 2023, la guerre au Soudan a provoqué un afflux massif de réfugiés soudanais et de rapatriés tchadiens dans l’est du Tchad. Le nombre de nouveaux arrivants était estimé à environ 496 834 à la fin du mois de décembre 2023. Outre les défis humanitaires, la guerre au Soudan a induit une augmentation des dépenses (essentiellement militaires) et une pénurie de biens. Évolution récente Malgré la crise humanitaire en cours, déclenchée par la guerre au Soudan, l’économie du Tchad est en passe d’enregistrer sa performance la plus forte, quoiqu’encore modeste, depuis 2014, avec un taux de croissance du PIB estimé à 4,1 pour cent (1 pour cent par habitant) en 2023. Cette croissance est soutenue par la production pétrolière, qui devrait augmenter de 4,4 pour cent. D’après les estimations, le PIB Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) non pétrolier devrait croître de 4,1 pour cent (contre 2 pour cent l’année précédente), sous l’impulsion des investissements publics. Après s’être redressé des effets des inondations de 2022, le secteur agricole devrait contribuer à la croissance à hauteur de 1,6 point de pourcentage (ppt), suivi par les secteurs des services (1,4 ppt) et de l’industrie (1 ppt). L’investissement, qui essentiellement d’origine publique, est le principal moteur de croissance du côté de la demande, contribuant à la croissance à hauteur de 7 ppt. En revanche, l’investissement privé devrait chuter face à la hausse des taux d’intérêt et aux effets d’éviction. L’essor des investissements publics (+195,9 pour cent) a entraîné une forte augmentation de la demande intérieure (+9,5 pour cent). Cette forte augmentation, combinée aux autres importations destinées aux opérations humanitaires en faveur des réfugiés soudanais, ont à leur tour entrainé une augmentation des importations les à un niveau de loin supérieur aux exportations (importations +16 pour cent contre exportations +2,9 pour cent), ce qui a entraîné un déficit du solde du compte courant équivalant à 2,4 pour cent du PIB en 2023. SECTION 2 — TCHAD 29 L’inflation est retombée à 4,1 pour cent en 2023, sous l’effet de base d’une forte inflation en 2022 et de la décélération de l’inflation alimentaire (4,8 pour cent) entraînée par l’amélioration de la production agricole. L’insécurité alimentaire demeure un problème significatif malgré ces améliorations, avec environ 2,1 millions de personnes (soit 11,5 pour cent de la population) en situation d’insécurité alimentaire sévère en décembre 2023. Le taux de pauvreté extrême devrait diminuer de 1 point de pourcentage pour atteindre 29,9 pour cent en 2023 ; néanmoins, environ 30 pour cent de la population (5,5 millions de personnes) continuent de vivre dans la pauvreté extrême. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a maintenu sa politique monétaire restrictive en 2023 afin de contenir les pressions inflationnistes et appuyer la viabilité extérieure du régime de change. Le taux directeur de la BEAC a été maintenu à 5 pour cent après une augmentation cumulée de 175 points de base entre novembre 2021 et mars 2023. Le Tchad a conservé un excédent budgétaire équivalant à 1,3 pour cent du PIB en 2023, soit l’équivalent d’un déficit budgétaire non pétrolier de 15,8 pour cent, et une baisse par rapport à l’excédent budgétaire équivalant à 5 pour cent du PIB en 2022. Malgré une forte croissance des recettes fiscales, soutenue par les mesures de numérisation de l’administration fiscale et un pic des recettes pétrolières, l’excédent budgétaire a diminué, reflétant la forte augmentation des investissements publics. D’après les estimations, le montant de la dette publique totale devrait retomber à l’équivalent de 44,8 pour cent du PIB en 2023, contre 47,4 pour cent en 2022. Perspectives En 2024, la croissance devrait ralentir à 2,7 pour cent (0,4 pour cent par habitant) à la suite d’une baisse attendue de la production pétrolière et d’une baisse attendue des investissements publics par rapport aux niveaux de 2023. Au cours de la période 2025- Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 2026, le taux de croissance devrait atteindre, en moyenne, 3,1 pour cent (0,1 pour cent par habitant), à mesure que de nouveaux gisements de pétrole seront mis en service. D’après les projections, la croissance du PIB non pétrolier devrait atteindre environ 3,5 pour cent sur la période 2024-2026. Les mesures gouvernementales visant à lutter contre l’insécurité alimentaire devraient atténuer l’inflation alimentaire, les projections indiquant qu’elle retombera à 3,9 pour cent en 2024, avant de s’établir, en moyenne, à 3,3 pour cent sur la période 2025-2026. Étant donné qu’elle a peu de liens avec les populations pauvres et vulnérables, la croissance tirée par le secteur pétrolier ne devrait conduire à une réduction de la pauvreté que si elle est accompagnée de réformes structurelles significatives. De plus, le maintien des restrictions sécuritaires, la faible couverture en protection sociale et la crise en cours au Soudan limiteront la réduction de la pauvreté. Le taux de pauvreté extrême devrait augmenter de 0,5 point de pourcentage en 2024, ce qui veut dire qu’une 30 SECTION 2 — TCHAD tranche supplémentaire 263 671 personnes tomberont dans la pauvreté extrême. Reflétant la baisse des cours du pétrole et les niveaux toujours élevés des dépenses publiques, le solde budgétaire devrait devenir déficitaire, à hauteur de l’équivalent de 1,4 pour cent du PIB en 2024, et restera déficitaire jusqu’en 2026. Le ratio dette publique/PIB devrait retomber à 41,6 pour cent en 2025 et se stabiliser sur le moyen terme. Le déficit du solde du compte courant devrait encore se détériorer pour atteindre l’équivalent de 3 pour cent du PIB en 2024 et en moyenne 3,1 pour cent sur la période 2025-2026, tiré par la modération des cours du pétrole. Ces perspectives sont sujettes à de multiples risques baissiers, y compris la baisse des cours du pétrole, l’instabilité politique lors des prochaines élections, une plus grande insécurité et les chocs climatiques. Un prolongement éventuel de la guerre au Soudan aggraverait la crise humanitaire, mettrait les finances publiques à rude épreuve et alourdirait les pressions inflationnistes. En outre, une escalade éventuelle des tensions entre le Tchad et le Soudan pourrait entraîner des problèmes de sécurité considérables. Figure 1 / Tchad : Croissance du PIB, balance du Figure 2 / Tchad : Taux de pauvreté réel et projeté et compte courant et solde budgétaire PIB réel par habitant 6 Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (FCFA constant) 4 100 450 000 90 400 000 2 80 350 000 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 0 70 300 000 60 -2 250 000 50 200 000 -4 40 150 000 30 -6 20 100 000 -8 10 50 000 -10 0 0 2011 2013 2015 2017 2019 2021 2023 2025 2021 2022 2023 2024 2025 2026 Taux de pauvreté au seuil international Solde budgétaire (% du PIB) Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche inférieure Solde du compte courant (% du PIB) Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche supérieure Croissance du PIB réel PIB réel par hab. Source : Banque mondiale. Source : Banque mondiale. Remarque : voir le Tableau 2. SECTION 2 — TCHAD 31 Tableau 2 / Tchad : Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage sauf indication contraire) 2021 2022 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché -1,2 2,8 4,1 2,7 3,3 2,9 constants Consommation privée 1,6 2,7 1,9 3,6 3,2 2,3 Consommation publique 3,7 -1,5 1,1 0,4 3,0 3,1 Formation brute de capital fixe -4,3 -6,1 62,8 -17,2 -2,1 -0,4 Exportations, biens et services -0,4 5,0 2,9 3,8 4,1 4,2 Importations, biens et services 5,1 2,0 16,0 -3,1 2,0 2,1 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs -1,2 2,8 4,1 2,8 3,3 2,9 constants Agriculture 6,2 2,0 5,0 3,1 3,4 3,3 Industrie -4,6 4,1 3,3 1,1 2,0 1,7 Services -4,3 2,3 4,1 3,9 4,4 3,5 Inflation (indice des prix à la consommation) 1,0 5,8 4,1 3,9 3,6 3,0 Solde du compte courant (% du PIB) -6,0 2,9 -2,4 -3,0 -3,3 -2,8 Solde budgétaire (% du PIB) -2,2 5,0 1,3 -1,4 -1,2 -2,1 Recettes (% du PIB) 16,3 23,5 27,1 22,3 22,6 21,8 Dette (% du PIB) 52,1 47,4 44,8 42,3 41,6 41,9 Solde primaire (% du PIB) -0,6 6,5 3,0 -0,5 -0,3 -1,2 Taux de pauvreté au seuil international - 30,8 29,9 30,4 30,8 30,9 (2,15 USD en PPA de 2017) a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (3,65 - 62,8 61,6 62,4 62,9 63,1 USD en PPA de 2017)a,b Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (6,85 - 88,8 87,8 88,4 88,7 88,7 USD en PPA de 2017)a,b Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 2,0 2,1 2,0 2,1 2,0 1,9 Émissions de GES liées à l’énergie (% du total) 1,2 1,2 1,2 1,2 1,2 1,2 Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. Les données sur la pauvreté sont exprimées en PPA de 2017, contrairement aux éditions précédentes qui étaient exprimées en PPA de 2011, entraînant des changements majeurs. Voir pip.worldbank.org (a) Calculs basés sur 2022-EHCVM. Données réelles : 2022. Prévision immédiate : 2023. Les prévisions concernent la période de 2024 à 2026. (b) Projection utilisant la méthodologie de micro-simulation. 32 République du Congo Tableau 1 2023 Population, millions 6,1 PIB, milliards USD courants 15,3 PIB par habitant, USD courants 2 506,0 Taux de pauvreté au seuil international 35,4 (2,15 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 59,1 tranche inférieure (3,65 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 83,5 tranche supérieure (6,85 USD)a Coefficient de Ginia 48,9 Taux de scolarisation, primaire (% brut)b 87,7 Espérance de vie à la naissance, annéesb 63,5 Émissions totales de GES (mtCO2e) 34,2 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) Valeur la plus récente (2011), PPA de 2017. (b) WDI pour la scolarisation (2018) ; Espérance de vie (2021). Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Alors que l’économie du Congo se redresse petit à petit, la croissance est restée modeste, estimée à 1,9 pour cent en 2023, tirée par les activités non pétrolières. La réforme en cours des subventions aux carburants aide à maintenir les excédents budgétaires, toutefois, elle a également contribué à une augmentation temporaire de l’inflation, qui, d’après les projections, devrait revenir à la cible de 3,0 pour cent d’ici à 2025. Les perspectives de croissance, même si elles se sont améliorées, restent vulnérables à l’instabilité de la production pétrolière, à la volatilité des cours du pétrole, aux retards de mise en œuvre des réformes structurelles et aux conditions météorologiques défavorables. SECTION 2 — RÉPUBLIQUE DU CONGO 33 Contexte et défis Entre 2015 et 2023, la croissance annuelle moyenne du PIB réel de la République du Congo a été de -1,9 pour cent, tandis que son PIB par habitant s’est cumulativement contracté de 32,3 pour cent. L’effondrement des cours du pétrole entre 2014 et 2016 a plongé l’économie dans une longue période de récession, suite à une réduction massive des dépenses publiques et à l’accumulation d’arriérés intérieurs envers les entreprises du secteur privé qui ont eu un impact sur l’investissement privé. La crise liée à la COVID-19 a exacerbé la récession économique. Le PIB par habitant est désormais retombé à ses niveaux du début des années 1970, 10 ans seulement après l’accession à l’indépendance. La baisse des niveaux de revenu par habitant depuis 2015 a fait augmenter l’incidence de la pauvreté extrême (moins de 2,15 USD en PPA par jour) de 33,5 pour cent en 2015 à 46,6 pour cent en 2022. À cause des niveaux élevés d’emprunts non concessionnels dans un contexte de dépendance envers des recettes pétrolières volatiles et des insuffisances en matière de gouvernance, le pays a été classé en situation de « surendettement » et sa dette a été jugée non viable en 2017, avec un ratio dette/PIB qui est passé de 42,3 pour cent en 2014 à 103,5 pour cent en 2020. La hausse des cours du pétrole, l’amélioration de la gestion de la dette et les accords de restructuration de la dette ont contribué à restaurer la viabilité de sa dette au second semestre 2021, mais le Congo reste en situation de surendettement à cause de la restructuration et de l’audit en cours des arriérés intérieurs, ainsi que de l’accumulation récurrente d’arriérés extérieurs temporaires. La dépendance persistante envers les revenus pétroliers fait que l’économie est restée vulnérable à la volatilité des cours du pétrole et a affaibli les perspectives de croissance à long terme. Pour parvenir à un développement durable, le Congo doit, de toute urgence, déployer des efforts pour diversifier les actifs nationaux, en se concentrant sur le renforcement des institutions, le développement du capital humain et physique, et une exploitation plus équilibrée du capital naturel. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Évolution récente Tirée par le secteur non pétrolier, l’activité économique du Congo a augmenté de 1,9 pour cent en 2023, contre 1,5 pour cent en 2022, d’après les estimations. La croissance non pétrolière, estimée à 2,8 pour cent en 2023, avait une large base, stimulée par l’agriculture, l’industrie manufacturière (y compris les boissons, le sucre et le ciment) et les services (y compris la restauration et l’hôtellerie, les transports, et la poste et les communications électroniques). La performance du secteur pétrolier a, en revanche, été insuffisante, avec une production qui a baissé de 0,5 pour cent pour la quatrième année consécutive en 2023, à cause de défis techniques et de la maturation des champs pétroliers. Malgré une baisse des recettes pétrolières à la suite de la baisse des cours du pétrole et de la production pétrolière, le budget a été excédentaire en 2023. La discipline budgétaire et les réformes vigoureuses menées, telles que le relèvement de 30 pour cent des prix de détail des carburants depuis janvier 2023 et la nouvelle exigence de versement de dividendes par les entreprises publiques ont contribué à maintenir l’excédent budgétaire, estimé à 3,6 pour cent en 2023. La baisse des recettes d’exportation et l’augmentation 34 SECTION 2 — RÉPUBLIQUE DU CONGO des importations ont réduit l’excédent du solde du compte courant à l’équivalent de 2,1 pour cent du PIB en 2023, d’après les estimations. Le secteur bancaire reste solvable, mais la vulnérabilité aux prêts non performants (PNP) reste élevée. Les dépôts bancaires et les crédits au secteur privé étaient en hausse à la fin du mois d’août 2023 (en glissement annuel), et bien que le ratio prêts non performants / prêts bruts se soit amélioré à 17 pour cent à la fin du mois d’août 2023 (contre 19 pour cent un an auparavant), il reste élevé. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a maintenu sa politique monétaire restrictive en 2023 afin de contenir les pressions inflationnistes et appuyer la viabilité extérieure du régime de change. Le taux directeur de la BEAC a été maintenu à 5 pour cent après une augmentation cumulée de 175 points de base entre novembre 2021 et mars 2023. La croissance du PIB réel par habitant est restée négative en 2023 et l’incidence de la pauvreté a, par conséquent, légèrement augmenté pour atteindre 46,8 pour cent, d’après les estimations. L’ajustement des prix des carburants et l’augmentation de la demande intérieure ont fait grimper l’inflation à 4,3 pour cent en 2023. L’inflation alimentaire a ralenti en 2023 mais reste élevée à 4,3 pour cent, ce qui devrait continuer à affecter davantage les segments les plus pauvres de la population étant donné qu’ils consacrent généralement une part plus importante de leur budget familial à l’alimentation. Figure 1 / République du Congo : Croissance du Figure 2 / République du Congo : Taux de pauvreté PIB réel réel et projeté et PIB réel par habitant Variation en pourcentage Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (FCFA constant) 6 100 1 200 000 4 90 1 000 000 2 80 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 0 70 800 000 60 -2 50 600 000 -4 40 400 000 -6 30 20 -8 200 000 10 -10 0 0 2011 2013 2015 2017 2019 2021 2023 2025 -12 2019 2020 2021e 2022e 2023e 2024p 2025p 2026p Taux de pauvreté au seuil international Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche inférieure PIB pétrolier PIB non pétrolier PIB réel Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche supérieure PIB réel par hab. Source : Banque mondiale. Remarque : Le taux de croissance du PIB Source : Banque mondiale. Remarque : voir le Tableau 2. pétrolier en 2026 est projeté s’élever à -0,1. SECTION 2 — RÉPUBLIQUE DU CONGO 35 Perspectives L’économie congolaise devrait continuer à se redresser progressivement. La croissance du PIB devrait atteindre 3,5 pour cent en 2024 et une moyenne de 3,4 pour cent sur la période 2025-26. La croissance du secteur pétrolier (qui devrait s’élever en moyenne à 2,7 pour cent sur la période 2024-2026) sera principalement tirée par l’augmentation des investissements des compagnies pétrolières, notamment dans la maintenance des actifs, et l’exploitation de nouveaux champs pétroliers. La croissance du secteur non pétrolier (qui devrait, en moyenne, atteindre 3,9 pour cent sur la période 2024-2026) sera stimulée par la croissance de l’agriculture, de l’industrie non pétrolière et des services, soutenue par la poursuite de l’apurement des arriérés du gouvernement, l’augmentation progressive des dépenses sociales et des investissements publics, et la mise en œuvre de réformes relatives à la gouvernance et à l’environnement des affaires. La croissance sera, en outre, soutenue par le développement du secteur gazier, avec la production commerciale et l’exportation de gaz naturel liquéfié prévues démarrer en 2024. L’inflation devrait ralentir à 3,8 pour cent en 2024 et revenir à l’objectif de 3,0 pour cent de la BEAC d’ici à 2025. Le taux de pauvreté devrait légèrement diminuer pour atteindre 46,4 pour cent en 2024 et, en moyenne, 45,5 pour cent sur la période 2025-26, conformément à la croissance projetée du PIB par habitant. Le solde budgétaire devrait rester positif, alimenté par les prix cours du pétrole, l’augmentation de la production pétrolière, la commercialisation du gaz naturel, la réduction des subventions pétrolières directes aux entreprises publiques du secteur énergétique, et la discipline budgétaire. Même si les vulnérabilités en matière d’endettement restent élevées (avec un niveau élevé d’encours de la dette non concessionnelle et d’arriérés intérieurs), le ratio dette/PIB devraient baisser à 81 pour cent d’ici à 2026, grâce à une meilleure gestion de la dette et à une meilleure discipline budgétaire. Le solde du compte courant, actuellement excédentaire, devrait se détériorer pour devenir déficitaire d’ici à 2026, en raison de la baisse des recettes d’exportation de pétrole et de l’augmentation des importations destinées à soutenir l’investissement, y compris pour la croissance des activités économiques non pétrolières. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) La reprise économique reste fragile, les risques étant orientés à la baisse. Ces risques comprennent la volatilité des cours mondiaux du pétrole et l’instabilité de la production pétrolière, la persistance de la forte inflation alimentaire ou des pénuries de pétrole raffiné au Congo sous l’effet d’entraînement de conflits sévissant ailleurs, une demande mondiale plus faible que prévu, un nouveau resserrement des conditions financières mondiales ou régionales, des conditions météorologiques défavorables et des retards de mise en œuvre des réformes structurelles. 36 SECTION 2 — RÉPUBLIQUE DU CONGO Tableau 2 / République du Congo : Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) 2023 e 2022 e 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché 1,0 1,5 1,9 3,5 3,7 3,2 constants Consommation privée 11,5 5,0 4,9 4,9 5,0 5,1 Consommation publique 2,1 -5,0 0,6 1,8 1,6 1,6 Formation brute de capital fixe 14,0 10,0 8,6 8,6 5,6 5,4 Exportations, biens et services -1,0 -0,7 1,0 4,1 4,5 1,9 Importations, biens et services 25,0 5,9 8,9 8,5 7,0 5,0 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs 1,0 1,5 1,9 3,5 3,7 3,2 constants Agriculture 1,9 3,0 2,8 3,2 3,4 3,7 Industrie -3,3 -0,6 0,7 4,5 4,8 3,2 Services 2,0 3,1 2,9 3,1 3,2 3,4 Inflation (indice des prix à la consommation) 2,0 3,0 4,3 3,8 3,0 3,0 Solde du compte courant (% du PIB) 8,9 18,7 2,1 1,5 0,4 -0,7 Entrée nette d’investissements directs 0,3 0,5 4,1 4,5 4,7 4,8 étrangers (% du PIB) Solde budgétaire (% du PIB) 1,2 7,9 3,6 3,9 3,2 3,1 Recettes (% du PIB) 21,1 28,6 24,3 25,5 25,2 24,8 Dette (% du PIB) 92,1 86,6 96,0 91,3 85,9 81,0 Solde primaire (% du PIB) 3,1 10,2 6,4 6,6 5,8 5,7 Taux de pauvreté au seuil international 46,4 46,6 46,8 46,4 45,6 45,4 (2,15 USD en PPA de 2017) a,b Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (3,65 70,6 70,9 71,0 70,7 70,2 70,1 USD en PPA de 2017)a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (6,85 90,6 90,7 90,8 90,6 90,4 90,3 USD en PPA de 2017)a,b Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 3,2 3,2 3,3 3,4 3,4 3,3 Émissions de GES liées à l’énergie (% du total) 14,0 14,7 14,8 15,1 15,4 15,2 Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. Les données sur la pauvreté sont exprimées en PPA de 2017, contrairement aux éditions précédentes qui étaient exprimées en PPA de 2011, entraînant des changements majeurs. Voir pip.worldbank.org (a) Calculs basés sur 2011-ECOM. Données réelles : 2011. Prévision immédiate : 2012-2023. Les prévisions concernent la période de 2024 à 2026. (b) Projections utilisant la distribution neutre (2011) avec répercussion = 0,87 (Med (0,87)) basée sur le PIB par habitant exprimé en unités de monnaie locale constantes. 37 Gabon Tableau 1 2023 Population, millions 2,4 PIB, milliards USD courants 20,5 PIB par habitant, USD courants 8 414,1 Taux de pauvreté au seuil international (2,15 2,5 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 8,1 tranche inférieure (3,65 USD)a Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la 31,2 tranche supérieure (6,85 USD)a Cœfficient de Ginia 38,0 Taux de scolarisation, primaire (% brut)b 100,6 Espérance de vie à la naissance, annéesb 65,8 Emissions totales de GES (mtCO2e) 22,5 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) Valeur la plus récente (2011), PPA 2017. (b) Valeur WDI la plus récente (2021). Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) L’économie du Gabon a enregistré une croissance de 2,3 pour cent en 2023 contre 3,0 pour cent en 2022, grâce à une production pétrolière soutenue. Après le changement de régime survenu en août 2023, un retour à l’ordre constitutionnel à l’issue de la période de deux ans prévue pour la transition serait essentiel pour éviter le risque de sanctions ainsi que les potentiels impacts négatifs y relatifs sur l’investissement et la croissance. Par ailleurs, des réformes substantielles restent nécessaires pour stimuler la croissance, réduire la pauvreté, restaurer la stabilité budgétaire et renforcer la gouvernance. 38 SECTION 2 — GABON Contexte et défis Malgré ses abondantes richesses naturelles, au cours des dernières décennies, la faiblesse et l’irrégularité de la croissance du Gabon combinée avec la faible diversification de l’économie ont conduit à des niveaux de chômage élevés et à une pauvreté persistante dans le pays. Le mécontentement social face aux insuffisances en matière de gouvernance et aux soupçons de fraude électorale a contribué á créer les conditions favorables pour le coup d’état qui s’est produit au mois d’août 2023. Un gouvernement de transition a été rapidement mis en place, ainsi qu’un plan de deux ans pour le retour à un gouvernement élu. Le 9 mars 2024, soit après six mois de sanctions, le Gabon a été réintégré au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Les attentes du public à l’égard de la transition sont élevées, ce qui renforce les pressions sur les dépenses sociales et sur l’obtention de résultats rapides. Au cours des derniers mois, les autorités de la transition ont repris les recrutements dans la fonction publique, élargi les subventions aux carburants à la compagnie nationale en charge de la production d’électricité (S.E.E.G.) et ont rétabli les bourses d’études pour les élèves de l’enseignement secondaire. Ces décisions induisent un coût budgétaire non négligeable pour le pays dans un contexte où l’accès aux financements extérieurs est plus limité. Bien que des efforts soient actuellement déployés pour mobiliser davantage de recettes domestiques, la dépendance aux recettes pétrolières volatiles ainsi que le contexte actuel, dans lequel les conditions de financement sont plus strictes, exposent le budget de l’Etat à des risques importants. Pour assurer la viabilité budgétaire du pays, il serait donc essentiel de calibrer les pressions sur les dépenses par rapport à des objectifs réalistes de mobilisation des recettes domestiques et extérieures. La période de transition politique pourrait représenter une opportunité pour le Gabon de relancer la dynamique de réformes et d’adopter des mesures qui permettraient d’améliorer la gestion des ressources publiques, ainsi que la gouvernance des finances publiques. La promotion de l’accès au crédit et de l’entrepreneuriat, ainsi que le renforcement de l’aide sociale apportée aux plus vulnérables seraient également essentiels à l’accélération de la croissance et à une plus grande inclusivité économique. Ces objectifs ont été intégrés Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) dans le Plan National de Développement pour la Transition (PNDT), le nouveau plan de développement du pays actuellement en cours de préparation. Ce plan présente un ambitieux programme d’investissements ciblant des domaines-clés tels que les routes, l’énergie, la santé et l’éducation. Néanmoins, il sera important pour les Autorités de bien prioriser les investissements prévus afin de garantir la faisabilité et la viabilité budgétaire du PNDT. Mettre un accent plus important sur la création d’emplois sera également crucial pour parvenir à une croissance plus inclusive et réduire la pression exercée par la masse salariale sur les comptes publics. Pour garantir la réussite de la mise en œuvre du PNDT, une bonne coordination entre les agences et administrations publiques concernées, ainsi qu’une amélioration de la gestion des investissements publics sont également nécessaires. Evolution récente Selon les estimations de la Banque mondiale, l’économie gabonaise a enregistré une croissance de 2,3 pour cent en 2023, contre 3,0 pour cent en 2022. La contraction de la croissance SECTION 2 — GABON 39 s’explique essentiellement par une baisse de la production de bois et de manganèse, dans un contexte de coûts élevés du carburant et de perturbations de la circulation ferroviaire causées par des glissements de terrain. La production pétrolière a, quant à elle, augmenté de 3,7 pour cent, alimentée par l’exploitation de nouveaux champs pétrolifères, l’assouplissement des restrictions de l’OPEP+ et une demande mondiale soutenue. Du côté de la demande, la croissance a notamment été tirée par les investissements publics, les investissements du secteur pétrolier et par les exportations pétrolières et agricoles. Les investissements précédemment réalisés pour l’optimisation de la production des champs pétroliers existants ainsi que l’expansion de la production minière et de bois ont conduit à d’importants excédents commerciaux, compensant en partie le niveau élevé des importations dû en grande partie à la forte dépendance du pays aux importations alimentaires. En 2023, malgré l’augmentation des volumes d’exportations de pétrole, d’huile de palme et de caoutchouc, la baisse des cours du pétrole, combinée avec l’appréciation du dollar américain et la diminution des productions forestière et minière ont entraîné une diminution des exportations. Dans le même temps, les importations sont restées stables. Aussi, bien que restant élevé, l’excédent du compte courant a diminué pour atteindre 28,7 pour cent du PIB en 2023 selon les estimations de la Banque mondiale. Le déficit budgétaire a légèrement augmenté en 2023 pour atteindre 1,0 pour cent du PIB selon les estimations de la banque mondiale. De façon globale, les recettes publiques ont bénéficié de la hausse des recettes non pétrolières et notamment de la réduction des dépenses fiscales. Les dépenses publiques, quant à elles, ont augmenté du fait de l’organisation des élections, de l’accélération des travaux publics et du règlement des arriérés domestiques effectué à la fin de l’année 2023. La baisse des cours du pétrole et la suppression des subventions aux carburants pour les consommateurs industriels ont néanmoins réduit le coût budgétaire des subventions aux produits pétroliers. Alors que le pays poursuit les efforts pour éviter de nouvelles accumulations d’arriérés, les arriérés extérieurs accumulés à fin 2023 étaient estimés à 123 milliards de FCFA (soit 1,0 pour cent du PIB). La dette publique s’est élevée à 70,5 pour cent du PIB en 2023, dont 57,4 pour cent au titre de l’encours de la dette intérieure et extérieure, auxquels s’ajoutent d’autres composantes telles que les arriérés sur la TVA et sur les salaires, les instances de paiement au Trésor et les bons du Trésor. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) La Banque des États de l’Afrique Centrale (B.E.A.C.) a maintenu une politique monétaire restrictive, conservant le taux directeur à 5,0 pour cent. Le taux directeur a augmenté de 175 points de base entre fin 2021 et mars 2023. Dans le même temps, le volume des crédits distribués au secteur privé a augmenté de 14,2 pour cent en septembre 2023 (en glissement annuel), tiré par les secteurs du pétrole et des travaux publics. Le taux d’inflation est passé de 5,2 pour cent en janvier 2023 à 2,7 pour cent en octobre de la même année alors que dans le même temps, le taux d’inflation des produits alimentaires s’est situé à 4,7 pour cent. Bien que les exonérations fiscales et le plafonnement des prix sur certains produits alimentaires de base ont été élargis pour contenir la hausse du coût de la vie, les ménages restent significativement affectés par la hausse de la cherté de la vie dans le pays. Sachant que dans le même temps la croissance économique par habitant a été statique, ces différentes dynamiques se sont traduites par une augmentation du taux de pauvreté estimé à 35,2 pour cent en 2023. 40 SECTION 2 — GABON Figure 1 / Gabon : Croissance du PIB réel, du PIB réel Figure 2 / Gabon : Taux de pauvreté réels et projetés, pétrolier et du PIB réel non pétrolier et PIB réel par habitant Variation en pourcentage Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (millions FCFA constant) 15 40 3 35 3 10 3 30 3 25 3 5 20 2 2 15 0 2 10 2 5 2 -5 0 2 2017 2019 2021 2023 2025 -10 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023e 2024p2025p2026p Taux de pauvreté au seuil international Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche inférieure PIB pétrolier PIB non pétrolier PIB réel Taux de pauvreté - revenu intermédiaire de la tranche supérieure PIB réel par hab. Sources : Données officielles du gouvernement et calculs des Sources : Banque mondiale. Remarque : voir le Tableau 2. services de la Banque mondiale Perspectives La reprise économique devrait se poursuivre au Gabon, mais les risques sont cependant plus élevés du fait des évènements politiques récents. Selon les prévisions de la Banque mondiale, Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) la croissance du Gabon devrait atteindre 2,7 pour cent en moyenne entre 2024 et 2026. La croissance devrait principalement provenir des secteurs non pétroliers, notamment de l’exploitation de nouveaux gisements de fer et de manganèse, d’une plus grande production de bois et de la mise en exploitation de nouvelles industries de palmier à huile, de biodiesel et de gaz. La production de pétrole, quant à elle, devrait diminuer progressivement à partir de 2025 à mesure que les champs pétroliers arrivent à maturité. La récente annonce de la découverte de nouvelles réserves de pétrole et d’autres projets d’exploration à venir pourraient néanmoins inverser ce scénario. Les importations en termes réels devraient augmenter sur le moyen terme, tirées par les projets d’infrastructures et les investissements privés. Alors que les exportations de pétrole devraient diminuer graduellement à partir de 2025, les Autorités ont pour objectif de dynamiser les investissements de manière à stimuler les exportations d’autres matières premières, notamment pour ce qui est du manganèse, du fer et du bois. Les excédents du compte courant resteraient donc élevés, soutenus par d’importantes exportations de matières premières. SECTION 2 — GABON 41 La baisse de la production et des cours du pétrole affecterait les recettes budgétaires. Par ailleurs, la hausse de la masse salariale, le développement de grands projets d’infrastructures et l’augmentation des mesures d’aide sociale devraient exacerber les pressions sur les dépenses publiques, ce qui se traduirait par des déficits budgétaires sur la période 2024-2026 (soit en moyenne 4,9 pour cent du PIB, avec des déficits primaires non pétroliers en moyenne à hauteur de 12,0 pour cent du PIB non pétrolier). Les soldes primaires deviendraient ainsi négatifs, ce qui entrainerait une hausse de la dette publique. En l’absence de mesures fortes d’ajustement budgétaire, ces pressions pourraient conduire à une situation budgétaire ainsi qu’à un niveau d’endettement non viables. L’inflation au Gabon resterait inférieure au critère de convergence régional de 3,0 pour cent. Cependant, le taux de pauvreté devrait augmenter à 36,9 pour cent d’ici 2026 étant donné le niveau élevé du taux de chômage, le volume limité d’activités génératrices de revenus et l’insuffisance des programmes de protection sociale. Cette situation est exacerbée par le fait que l’économie gabonaise reste encore largement dominée par les industries extractives à forte intensité de capital qui ne créent pas suffisamment d’emplois et ne permettent pas une répartition suffisamment équitable des revenus. Parmi les risques baissiers, il est important de souligner ceux relatifs à tout choc sur les cours des matières premières, à la concurrence exercée par le pétrole russe sur les marchés asiatiques, au resserrement des conditions de financement et aux impacts de l’intensification de la guerre en Ukraine ou du conflit au Moyen-Orient. Les défis en termes de maîtrise des dépenses résultant de la hausse de la pression sociale ou encore de l’acquisition de nouvelles entreprises publiques pourraient conduire à une forte augmentation des déficits budgétaires et de la dette publique. Bien que les sanctions de la CEEAC aient été levées, un éventuel retard dans la sortie de la période de transition politique pourrait déclencher d’autres sanctions économiques sur le Gabon, affectant ainsi l’accès du pays aux marchés financiers régionaux. Aussi, Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) l’importance et la priorité données au calendrier politique dans la période de transition pourraient limiter la capacité des Autorités à adopter les réformes nécessaires à l’amélioration de la gouvernance dans le pays, à l’accélération de la transition vers une croissance basée sur l’emploi et à la réduction de la pauvreté. 42 SECTION 2 — GABON Tableau 2 / Gabon: Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) 2021 2022 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché 1,5 3,0 2,3 3,0 2,3 2,8 constants Consommation privée -1,4 -0,3 3,2 5,6 2,3 4,7 Consommation publique 3,2 3,8 -1,5 -4,9 1,8 -4,8 Formation brute de capital fixe 9,2 8,3 -0,5 2,4 3,8 2,4 Exportations, biens et services -2,0 6,9 1,4 5,5 5,3 4,2 Importations, biens et services 3,5 8,3 -0,9 4,1 5,7 3,2 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs 2,9 3,3 2,3 3,0 2,3 2,8 constants Agriculture 11,2 9,4 2,1 3,6 5,5 6,6 Industrie 3,2 3,2 3,5 2,2 0,0 4,2 Services 1,4 2,4 1,5 3,3 3,1 1,1 Inflation (indice des prix à la consommation) 1,1 4,3 3,7 2,4 2,3 2,2 Solde du compte courant (% du PIB) 30,1 35,2 28,7 29,2 28,8 28,4 Entrées nettes d’investissements directs 2,1 4,6 5,5 5,4 5,0 5,4 étrangers (% du PIB) Solde budgétaire (% du PIB) -1,8 -0,8 -1,0 -3,8 -5,9 -5,0 Recettes (% du PIB) 14,7 20,4 22,9 20,0 18,8 18,1 Dette (% du PIB) 65,8 55,3 70,5 73,7 79,1 81,8 Solde primaire (% du PIB) 0,9 1,7 1,9 -0,7 -2,8 -1,7 Taux de pauvreté au seuil international (2,15 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 2,3 2,4 2,9 3,1 3,2 3,2 USD en PPA de 2017) a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (3,65 8,2 8,5 10,0 10,1 10,7 10,9 USD en PPA de 2017)a,b Taux de pauvreté au seuil des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (6,85 32,1 32,3 35,2 35,1 36,1 36,9 USD en PPA de 2017)a,b Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 4,5 2,5 -0,7 -0,2 0,1 0,8 Émissions de GES liées à l’énergie (% du total) 15,9 16,0 14,9 13,8 12,8 12,1 Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. Les données sur la pauvreté sont exprimées en PPA de 2017, contre en PPA de 2011 dans les éditions précédentes - entraînant des changements majeurs. Voir pip.worldbank.org (a) Calculs basés sur 2017-EGEP. Données réelles : 2017. Prévision immédiate : 2018-2023. Les prévisions sont pour la période de 2024 à 2026. (b) Projection utilisant la méthodologie de microsimulation. 43 Guinée Équatoriale Tableau 1 2023 Population, millions 1,7 PIB, milliards USD courants 12,1 PIB par habitant, USD courants 7 051,5 Taux de scolarisation, primaire (% brut)a 51,2 Espérance de vie à la naissance, annéesa 60,6 Emissions totales de GES (mtCO2e) 16,6 Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI), Analyses des perspectives macroéconomiques et de la pauvreté, et données officielles. (a) WDI pour la scolarisation (2019) ; Espérance de vie (2021). L’économie de la Guinée équatoriale s’est contractée d’environ 5,8 pour Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) cent en 2023, principalement à cause de la diminution de sa production d’hydrocarbures. Les soldes budgétaire et extérieur se sont détériorés à cause de la baisse des recettes d’exportations pétrolières. Selon les projections, l’économie devrait rester en récession à moyen terme. Les risques pesant sur les perspectives sont baissiers et comprennent une baisse plus prononcée que prévu de la production et des cours du pétrole, un resserrement prolongé des conditions financières mondiales, la perturbation des échanges dans le monde et une baisse de la demande des principaux partenaires d’exportation. 44 SECTION 2 — GUINÉE ÉQUATORIALE Contexte et défis En raison de la diminution des réserves pétrolières et de la baisse de l’investissement, l’économie de la Guinée équatoriale, dépendante au pétrole, s’est contractée pendant plus d’une décennie. Entre 2013 et 2023, le pays a enregistré une croissance moyenne négative de 4,2 pour cent par an. Le revenu national brut (RNB) par habitant est en baisse, se situant à 5 240 USD en 2022, soit 58 pour cent de moins que son niveau record de 2008. Des réformes structurelles sont nécessaires pour prévenir le déclin de l’économie à long terme en diversifiant les moteurs de croissance et en renforçant la viabilité budgétaire à travers des efforts de mobilisation des recettes intérieures et le renforcement de l’efficacité des dépenses publiques. Ces dernières années, la Guinée équatoriale a adopté des réformes visant à améliorer la gouvernance et l’environnement des affaires. Celles-ci incluent l’adoption d’ une loi de lutte contre la corruption en fin 2021, l’achèvement de l’audit des plus grandes sociétés publiques pétrolières et gazières, et la signature d’un décret instituant un compte unique du Trésor. Cependant, il persiste des lacunes dans la gouvernance des recettes tirées des industries extractives et dans l’environnement des affaires, ce qui entrave la capacité du pays à attirer des investissements et à créer des emplois pour réaliser une croissance durable et diversifiée. Des mesures sont également à prendre pour une meilleure protection et l’inclusion des pauvres. Malgré le statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure de la Guinée équatoriale, le niveau de vie y reste bas. Selon les estimations, l’espérance de vie à la naissance serait de 60,7 ans, ce qui est considérablement inférieur à la moyenne de 75 ans des pays du même groupe de revenu. Environ 40 pour cent des ménages ont connu au moins une journée sans électricité par mois. Le manque de données sur la pauvreté reste un défi pour une protection efficace des groupes vulnérables. Le rapport de la deuxième enquête nationale auprès des ménages, dont la publication est prévue en juin 2024, comblera les lacunes de connaissances sur la pauvreté et les inégalités, permettant ainsi de mettre en œuvre des politiques de protection sociale davantage fondées sur des données factuelles. Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Evolution récente Après deux années de reprise, l’économie équatoguinéene est retombée en récession avec un taux de croissance du PIB réel estimé à environ -5,8 pour cent en 2023 (contre environ 3,8 pour cent en 2022), en conséquence du déclin du secteur des hydrocarbures. La production d’hydrocarbures a baissé d’approximativement 19,0 pour cent en 2023 par rapport à 2022). La baisse de l’investissement a contribué à la contraction de la demande. Le déficit du compte courant s’est creusé à 1,6 pour cent du PIB (contre 1,0 pour cent du PIB en 2022) suite à la baisse des recettes d’exportation. La baisse de la production et des cours du pétrole a entraîné une baisse de 74 pour cent des recettes pétrolières au troisième trimestre 2023 (en glissement annuel). Selon les estimations, l’excédent budgétaire global a chuté à 7,3 pour cent du PIB en 2023, contre 13,0 pour cent en 2022, tandis que le solde budgétaire non pétrolier en 2023 est tombé à 26,4 pour cent du PIB, SECTION 2 — GUINÉE ÉQUATORIALE 45 contre 21,3 pour cent en 2022. Le ratio dette/PIB a diminué en 2023. Sur la période de 2019 à 2023, 572,2 milliards FCFA (soit 9,5 pour cent du PIB) sur les 1 382,5 milliards FCFA d’encours d’arriérés ont été payés aux entreprises de construction : en août 2023, l’encours des arriérés intérieurs envers les entreprises de construction représentait 7,9 pour cent du PIB. Les niveaux élevés de prêts non performants - 32 pour cent du total des prêts au quatrième trimestre 2023 - représentent une source de vulnérabilité pour le secteur bancaire. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a continué de resserrer sa politique monétaire pour contenir les pressions inflationnistes et appuyer le régime de change. Le taux directeur de la BEAC a été maintenu à 5 pour cent après une augmentation cumulée de 175 points de base entre novembre 2021 et mars 2023. Par ailleurs, la BEAC a mis fin à ses injections hebdomadaires de liquidités en mars 2023 après les avoir progressivement réduites à partir de juin 2021. Selon les estimations, l’inflation aurait diminué, passant de 4,9 pour cent en 2022 à 2,4 pour cent en 2023, notamment suite aux mesures de maîtrise prises par la BEAC, à l’accord sur l’importation de produits alimentaires de Serbie et à la réduction de certains droits d’importation. Selon l’Institut National de la Statistique, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 7,1 pour cent entre mars 2020 et septembre 2023, ce qui représente une perte moyenne du pouvoir d’achat des ménages de 4,5 pour cent. Figure 1 / Guinée Équatoriale : Finances publiques Figure 2 / Guinée Équatoriale : Indicateurs de pauvreté non-monétaire Pourcentage du PIB Pourcentage 50 250% 40 200% 30 150% Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) 20 100% 10 50% 0 0% Taux de mortalité Taux de mortalité Taux de mortalité -10 des enfants de moins maternelle attribuée aux de 5 ans (pour 1 000 (estimation lacunes en matière d'eau, naissances vivantes) modelisée d'assainissement et -20 pour 100 000 d'hygiène (par naissances vivantes) 100 000 habitants) p p p e 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 Guinée équatoriale par rapport à la moyenne régionale Solde budgétaire Recettes Dépenses Guinée équatoriale par rapport à la moyenne des pays à revenu intermédiaire Sources : Autorités nationales et Banque mondiale. Source : Banque mondiale. 46 SECTION 2 — GUINÉE ÉQUATORIALE Perspectives La Guinée équatoriale devrait rester en récession en 2024 (la croissance étant de –4,3 pour cent) à cause de la baisse de la production d’hydrocarbures et de la diminution de la demande intérieure. En l’absence d’importants efforts de diversification et de progrès dans les réformes structurelles, la baisse de la production d’hydrocarbures et la chute des cours des matières premières devraient continuer à affecter l’économie qui présentera une croissance moyenne négative de 3,5 pour cent en 2025-2026. La baisse des exportations entraînerait des déficits du compte courant à moyen terme. Bien qu’à un rythme plus lent, les importations diminueraient également à cause de la baisse des dépenses publiques due à l’insuffisance d’espace budgétaire. Selon les projections, le solde budgétaire devrait basculer en déficit en 2024- 2025, les réductions des dépenses publiques ne suffisant pas pour compenser la baisse plus importante des recettes des hydrocarbures. Les risques pesant sur les perspectives sont orientés à la baisse. Une baisse plus forte de la production ou du cours des hydrocarbures réduirait l’espace budgétaire et poserait un risque à la stabilité extérieure. La perturbation des échanges dans le monde affectant les prix des produits alimentaires à cause du conflit prolongé en Ukraine aggraverait l’insécurité alimentaire, en particulier chez les plus vulnérables, étant donné que le pays dépend fortement des importations alimentaires. Un nouveau resserrement des conditions financières mondiales et une baisse de la demande de la Chine et de l’Inde, les principaux partenaires d’exportation de la Guinée équatoriale, pourraient également entraver sa croissance. Les réserves d’hydrocarbures étant en déclin, il est ainsi nécessaire pour la Guinée équatoriale de passer à un nouveau modèle de croissance en instaurant les conditions nécessaires pour que le secteur privé puisse mener à bien ses activités dans les secteurs non pétroliers afin de revigorer la croissance. A terme, la mise en œuvre de la vision de diversification économique nécessitera des efforts pour faire progresser le programme d’action de gouvernance, faciliter les échanges ainsi qu’améliorer l’environnement des affaires et la gestion des finances publiques. Le renforcement du système de protection sociale contribuerait à protéger les plus vulnérables Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) et à combler les inégalités, d’autant plus que, selon les estimations, les dépenses sociales en Guinée équatoriale représentent 1,6 pour cent du PIB en 2022, ce qui est trois fois inférieur à la moyenne des pays de l’Afrique de l’ouest et centrale. SECTION 2 — GUINÉE ÉQUATORIALE 47 Tableau 2 / Guinée Équatoriale: Indicateurs des perspectives macroéconomiques et taux de pauvreté (variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire) 2021 2022 2023 e 2024 p 2025 p 2026 p Croissance du PIB réel à des prix du marché 0,3 3,8 -5,8 -4,3 -3,3 -3,6 constants Consommation privée -0,8 9,6 -5,7 -4,8 2,8 2,0 Consommation publique 5,2 -5,3 7,3 20,9 0,3 -6,2 Formation brute de capital fixe 37,4 -2,0 -38,0 -25,2 -11,4 -9,0 Exportations, biens et services 0,3 12,7 -3,7 -5,9 -8,2 -5,5 Importations, biens et services 8,5 19,0 -1,4 3,8 -3,3 -2,8 Croissance du PIB réel à des prix des facteurs 0,4 3,5 -5,8 -4,3 -3,3 -3,6 constants Agriculture 8,0 7,5 -9,1 -6,5 1,5 1,6 Industrie -5,9 3,1 -39,1 -23,1 -19,6 -14,8 Services 10,8 3,8 43,1 7,5 3,9 0,1 Inflation (indice des prix à la consommation) -0,1 4,9 2,4 4,0 2,5 2,2 Solde du compte courant (% du PIB) -2,1 -1,0 -1,6 -3,6 -4,2 -4,1 Entrées nettes d’investissements directs 5,2 5,6 4,5 3,4 2,5 1,9 étrangers (% du PIB) Solde budgétaire (% du PIB) 2,6 13,0 7,3 1,2 -2,4 -3,7 Recettes (% du PIB) 15,6 30,1 27,6 20,5 16,3 14,1 Dette (% du PIB) 43,4 39,3 36,6 32,6 32,3 34,8 Solde primaire (% du PIB) 3,7 14,2 8,7 2,4 -1,3 -2,6 Croissance des émissions de GES (mtCO2e) 22,0 12,3 -9,6 -5,6 -3,7 -2,3 Emissions de GES liées à l’énergie (% du total) 39,0 44,2 41,7 40,4 39,8 39,7 Baromètre économique de la CEMAC – Mai 2024 (Vol. 6) Source : Banque mondiale, Pôles mondiaux d’expertise Pauvreté et équité, et Macroéconomie, Commerce et Investissement. Données sur les émissions provenant du CAIT et de l’OCDE. Notes : e = estimation, p = prévision. L’ÉQUIPE Robert Johann Utz Djeneba Doumbia Erick Tjong Amina Coulibaly (Économiste en chef) (Économiste) (Économiste) (Économiste principale) Vincent Belinga Diderot Guy D Estaing Demet Kaya Marilyne Youbi (Économiste principal) Sandjong Tomi (Économiste principal) (Économiste) (Économiste) Pierre Mandon Sonia Barbara Ondo Ndong Francis Ghislain Claudia Noumedem Temgoua (Économiste) (Économiste) Ngomba Bodi (Économiste) (Économiste) Chris Belmert Milindi Katindi Sandeep Mahajan Hans Anand Beck (Consultant) (Manager de programmes) (Manager de programmes) Irene Sitienei Ifeoma Clementina Ikenye (Assistante de programme) (Assistante de programme) Macroéconomie, Commerce et Investissement