GROUPE BANQUE MONDIALE UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE OUEST AFRICAINE (UEMOA) PROGRAMME D’ÉVALUATION DU SECTEUR FINANCIER Janvier 2022 NOTE TECHNIQUE SYSTEMES ET SERVICES DE PAIEMENT ET FINTECH Rédigé par L'équipe chargée des paiements et Fintech a mené Département Finance, ses travaux en décembre 2021 et janvier 2022, Compétitivité et Innovation dans le cadre du Programme d'évaluation du Banque mondiale secteur financier (PESF), dirigé par Pierre-Laurent Chatain et Jean Michel Lobet (Banque mondiale) et Romain Veyrune et Silvia Iorgova (FMI). Cette note technique a été préparée par Dorothee Delort et Prof. Mariachiara Malaguti pour la partie juridique. 1 TABLE DES MATIERES LISTE DES ABREVIATIONS ET SIGLES............................................................................................ 3 I. RESUME ANALYTIQUE ....................................................................................................... 4 II. INTRODUCTION ...............................................................................................................10 III. PAIEMENTS ET FINTECH DANS L’UEMOA .....................................................................11 1. ETAT DES LIEUX DES PAIEMENTS DANS LA ZONE UEMOA ..............................................................11 1.1. Utilisation des moyens de paiement ............................................................................11 1.2. Utilisation de la monnaie électronique .......................................................................12 1.3. Impact du COVID-19 sur les paiements de détail ...................................................17 1.4. Recommendations ..............................................................................................................18 2. CADRE JURIDIQUE DES PAIEMENTS......................................................................................................19 2.1. Situation actuelle..................................................................................................................19 2.2. Recommandations ...............................................................................................................23 3. INFRASTRUCTURE DES PAIEMENTS ......................................................................................................25 3.1. Les systèmes de paiement régionaux et leur surveillance.......................................25 3.2. Recommandations ................................................................................................................28 4. PAIEMENTS DE DÉTAIL ..........................................................................................................................30 4.1. Paiements des Gouvernements .........................................................................................30 4.4. Envoi de fonds des travailleurs migrants ......................................................................32 4.3. Recommandations ..................................................................................................................34 5. FINTECH..................................................................................................................................................35 5.1. Activité des Fintech dans la zone UEMOA .................................................................36 5.2. Cadre juridique Fintech .....................................................................................................40 5.3. Fondations de l’écosystème Fintech : Digital ID et Open Banking ...................41 5.4. Recommandations ................................................................................................................42 LISTE DES ABREVIATIONS ET SIGLES BRI Banque des Règlements Internationaux BRVM Bourse Régionale des Valeurs Mobilières CPSS/CPMI Comité sur les systèmes de paiement et de règlement, maintenant Comité sur les paiements et infrastructures de marché (Comittee on payement and settlement systems, maintenant Comittee on payments and market infrastructures) CREPMF Conseil Régional de l'Epargne Publique et des Marchés Financiers EFCB Etablissement financier à caractère bancaire EME Emetteur de monnaie électronique FMI Fonds monétaire international IMF Infrastructure des Marchés Financiers (financial market infrastructures) FSP Fournisseurs de services de paiement GAB Guichet Automatique de Banque GAFI Groupe d’actions financières GIM-UEMOA Groupement Interbancaire Monétique de l’UEMOA LBC/FT Lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme MF Ministère des finances OTM Opérateur de téléphonie mobile PESF Programme d’Evaluation du Secteur Financier PFMI Principes pour les infrastructures des marchés financiers (Principles for financial market infrastructures) PME Petites et moyennes entreprises RTGS Règlement brut en temps réel (en anglais Real Time Gross Settlement) SFD Système Financier Décentralisé SICA-UEMOA Système Interbancaire de Compensation Automatisé de l’UEMOA SNP Système National de Paiement SPI Système de Paiements Instantanés STAR-UEMOA Système de Transfert Automatisé et de Règlement de l’UEMOA TPE Terminaux de Paiements électroniques 3 I. RESUME ANALYTIQUE 1. L’Union Economique et monétaire ouest africaine (UEMOA) a établi des bases solides pour son système régional de paiement, qui ont contribué à l’essor des paiements électroniques et de l’inclusion financière dans la région. Le Système de Transfert Automatisé et de Règlement (STAR-UEMOA) est un système de règlement brut en temps réel (RTGS) opéré par la BCEAO. Il est au cœur du système régional de paiement, puisque tous les systèmes de compensation y déversent leurs soldes pour un règlement en monnaie centrale. Comprenant 145 participants à fin 2021, essentiellement des banques et des établissements financiers 1 , STAR- UEMOA a traité près de 1,5 million de transactions pour une valeur totale de 677 342 milliards de FCFA, soit une augmentation moyenne sur les 5 dernières années de 15 pour cent en volume et 8 pour cent en valeur des opérations traitées. Les autres systèmes de paiement systémiques de la région sont SICA-UEMOA, le système automatisé de compensation des paiements de détail (ACH), également géré par la BCEAO, et GIM-UEMOA, la plateforme interbancaire monétique régionale qui traite les opérations sur cartes. La BCEAO a mis en place une fonction de surveillance des paiements qui prend en compte les responsabilités des autorités telles que définies dans les standards internationaux et qui a pour objectif d’accroitre la conformité des systèmes de paiement régionaux avec les Principes pour les Infrastructures des Marchés Financiers (PFMIs). La BCEAO a également développé en 2006 un cadre règlementaire solide pour l’émission de la monnaie électronique (voir le chapitre sur le cadre juridique), qui a permis l’essor des comptes et des transactions à partir de comptes de monnaie électronique (de 63 à 129 millions de comptes entre 2018 et 2021 et de 23,8 à 66.9 millions actifs sur la même période, soit une progression de 37,7 pour cent à 51.5 pour cent du taux d’activité). 2. Des avancées notables ont été enregistrées en matière d’inclusion financière grâce au développement de la monnaie électronique, ce qui a permis à la région de rattraper la moyenne subsaharienne. Le taux d’accès à un compte a progressé très significativement entre 2014 et 2018 (données Findex). 2,3 Cette évolution permet au taux d’accès au compte dans la plupart des pays de la région de se rapprocher de la moyenne observée en Afrique sub-saharienne (42,6 pour cent), alors qu’en 2014 les taux dans les pays de l’UEMOA (à l’exception de la Cote d’Ivoire) étaient bien inférieurs à la moyenne sub-saharienne. Ce rattrapage est largement attribuable aux comptes de monnaie électronique, qui ont très fortement progressé entre 2014 et 2018, pour se trouver dans la majorité des pays (à l’exception du Niger) à p arité ou au-dessus de 1 Les participants éligibles au système sont : la BCEAO, les banques et établissements financiers, le Dépositaire Central / Banque de Règlement de la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM), le Groupement Interbancaire Monétique de l’UEMOA (GIM-UEMOA) et la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD). 2 Définition Findex de l’accès au compte : pourcentage de répondants adultes de plus de 15 ans déclarant disposer d’un compte (à leur nom ou avec une autre personne) dans une banque ou un autre type d’institution financière ou déclarant avoir utilisé personnellement des services de monnaie électronique au cours des 12 derniers mois. 3 Passant de 15,4 à 42,3 pour cent au Sénégal et de 14,4 à 43,2 pour cent au Burkina par exemple, avec une progression moindre à 41,3 pour cent en Côte d’Ivoire ou le taux était déjà de 34,3 pour cent en 2014 (Findex 2014 et 2018) la moyenne observée en Afrique sub-saharienne (20.9 pour cent).4 Cette forte progression est à porter au crédit du cadre règlementaire mis en place pour la monnaie électronique et des politiques ambitieuses d’inclusion financière et de modernisation des paiements de détail développés par la Banque Centrale et l’émergence d’un marché ouvert et dynamique, avec l’arrivée de nouveaux entrants émetteurs de monnaie électronique et entreprises de technologie financière (Fintech). 3. Malgré ces progrès importants, la numérisation des paiements se heurte encore à la prédominance des espèces et reste notamment entravée par le manque d’interopérabilité ainsi que par la non-disponibilité des paiements instantanés.5 Le projet de mise en place d'une plateforme pour l’interopérabilité régionale et pour les paiements instantanés n’est pas encore effectif.6 La possibilité de transférer des fonds entre comptes bancaires et comptes de monnaie électronique et entre comptes de monnaie électronique auprès de différents émetteurs n’est pas généralisée et est conditionnée à l’existence d’accords commerciaux. Les commerçants ne peuvent pas encore bénéficier du crédit immédiat des transactions sur leur compte 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. 4. L’utilisation des espèces reste très importante 7 même si l’acceptation des paiements électroniques progressent. Ce sont majoritairement les grands commerces (chaines de supermarchés, certaines pharmacies, stations-service) qui acceptent les paiements électroniques et même si l’arrivée de nouveaux acteurs comme Wave a contribué à une certaine diffusion des paiements par QR code aux petits commerçants, les moyens d’acceptation des paiements électroniques innovants sont généralement peu répandus. Par ailleurs, malgré les efforts des autorités pour numériser les paiements des Gouvernements, accentués par la pandémie de COVID- 19, on observe encore une prédominance des espèces dans les programmes d’aide sociale. La part des adultes ayant émis ou reçu un paiement électronique a fortement progressé entre 2014 et 2018, mais reste encore limitée.8 Le paiement de factures à partir d’un compte est inférieur à la moyenne sub-saharienne de 7,7 pour cent, tout comme la réception d’un salaire sur un compte dans le secteur privé et le paiement par carte. 5. Si la monnaie électronique a joué un rôle fondamental dans l’évolution des paiements dans la sous-région, son modèle économique demeure fragile et doit évoluer. Le modèle économique de la monnaie électronique était jusqu’à présent largement fondé sur une rémunération des émetteurs de monnaie électronique et des agents lors du retrait d’espèces (cash- 4 Passant par exemple de 3,1 à 33 pour cent au Burkina, 6,2 à 31,8 pour cent au Sénégal, 1,4 à 21,5 pour cent au Togo. 5 Le Comité des paiements et des infrastructures de marché (CPMI) définit un paiement instantané comme un paiement pour lequel la transmission du message et la disponibilité des fonds au bénéficiaire se font en temps réel ou presque en temps réel sur une base aussi proche que possible de 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 (CPMI, 2016). 6 Interopérabilité entre les différents réseaux d’émission de monnaie électronique, et entre les comptes bancaires et les portefeuilles de monnaie électronique. 7 En 2020, la circulation fiduciaire s’est établie à 9.215,7 milliards de FCFA ou 23 pour cent de M2, en hausse de près de 19 pour cent par rapport à 2019. 8 Aux alentours de 30 pour cent au Benin, Togo et Mali et de de 40 pour cent au Burkina, Sénégal et Cote d’Ivoire. 5 out), ce qui n’est pas soutenable si le paiement marchand se développe et que les espèces restent dans l’écosystème dans le contexte d’une économie numérique. L’arrivée de nouveaux acteurs émetteurs de monnaie électroniques non-bancaires et n’émanant pas des opérateurs Telecom (tels que Wave) a exercé une pression à la baisse sur les tarifs pour les émetteurs de monnaie électroniques traditionnels, notamment ceux issus des opérateurs Telecom qui n’ont pas d’activités complémentaires sources de revenus. Cette pression sur les prix profite aux utilisateurs mais réduit les marges de l’activité d’émission de monnaie électronique, avec notamment des répercussions sur les agents. Pour continuer son développement, l’utilisation de la monnaie électronique doit être élargie à des usages pour l’instant encore peu développés dans la région, comme le paiement marchand ou le paiement de facture, et être accompagnée de services à valeur ajoutée, notamment pour les commerçants (accès au crédit, services de gestion de la comptabilité ou des stocks). 6. Plusieurs Trésors nationaux ont également fait part à la Banque Centrale de leur intention d’émettre de la monnaie électronique. Ces Trésors entendent mieux servir des populations qui ont un accès limité aux services financiers numériques, mais aussi accélérer la disponibilité des fonds encaissés par le secteur public.9 La BCEAO a développé un Guide pour la digitalisation des paiements visant à accompagner les États dans cette démarche. Ces initiatives pourraient introduire des distorsions de concurrence en cas d’exclusivité, c’est-à-dire dans l’hypothèse où les bénéficiaires de prestations sont tenus d’avoir leur portefeuille de mo nnaie électronique auprès du Trésor et non auprès des émetteurs de monnaie électronique déjà présents sur le marché. Les Trésors nationaux auront moins de raisons d’émettre leurs propres portefeuilles de monnaie électronique quand la plateforme d’interopérabilité sera disponible, qui leur permettra de transférer des paiements sur les comptes de monnaie électronique des bénéficiaires et d’encaisser sans délais les fonds qui leur sont destinés. La mise en place de la plateforme d’interopérabilité devrait donc s’accompagner d’un soutien technique aux Trésors pour leur permettre d’utiliser toutes les fonctionnalités relatives aux paiements numériques offerts par les systèmes régionaux de paiement. 7. Le cadre juridique régissant les paiements en zone UEMOA n’est plus adapté, bien que des instructions aient été adoptées pour tenter de suivre les évolutions du marché. Ce cadre avait été établi début 2000, à une époque où le marché avait des caractéristiques différentes de celles que l’on observe aujourd’hui. Certaines innovations en matière de paiement, notamment en ce qui concerne les opérateurs non financiers et les produits numériques, ne s'y trouvent pas mentionnées et ne sont par conséquent pas règlementées. Ceci crée un vide juridique et des traitements potentiellement discriminatoires entre opérateurs exerçant les mêmes activités. Les prestataires de services de paiement ne font pas l'objet d'une réglementation homogène au titre d’une catégorie autonome et uniforme. A ce jour la loi bancaire s'applique aux banques et aux Etablissements Financiers à Caractère Bancaire (EFCB). Le Règlement n° 15/2002 sur les systèmes de paiement s'applique, par conséquent, surtout aux banques et aux EFCB, ainsi qu’aux systèmes 9 Dans la situation actuelle, en l’absence d’une plateforme d’interopérabilité pour les transactions en monnaie électronique il existe un délai entre le paiement par l’usager et la mise à disposition des fonds au Trésor public par le teneur de compte émetteur de monnaie électronique. de paiement dans lesquels les membres sont soit des banques, soit des EFCB. Les autres catégories de fournisseurs de services non-bancaires ne sont pas couvertes par la législation. De la même façon, le Règlement n° 15/2002 réglemente les chèques, les ordres de paiement électroniques et, bien que dans une moindre mesure, les cartes bancaires ; là encore, il ne couvre donc qu’une seule partie du marché. 8. Un écosystème Fintech dynamique émerge dans certains pays de la région. La BCEAO a mené en 2020 une enquête sur les Fintech qui a fait apparaitre une diversité d’acteurs, avec un total de 175 entreprises de technologies financières, qui ont été réparties en trois catégories d’activités, des intégrateurs de systèmes d'information (qui conçoivent et adaptent l'architecture des systèmes d’information d'une entreprise), des agrégateurs de solutions numériques (qui gèrent, de façon externalisée, diverses fonctions pour les prestataires de services financiers), et des fournisseurs de plateformes numériques (qui mettent à la disposition des institutions financières, une technologie, un logiciel ou un service). L’essentiel des activités menées par les FinTech de l’Union porte sur l'offre de services financiers numériques (71 pour cent), notamment le paiement, le transfert rapide d’argent, le retrait et 16 pour cent sur le développement de plateforme numérique. 10 Certaines FinTech en partenariat avec les banques et les IMF permettent une extension de l’offre de services financiers ou des services à valeur ajoutée aux clients. 9. Pourtant, le cadre juridique actuel ne régule pas les Fintech. Ce vide juridique, en plus d’être perçu comme limitant et perturbateur par l’ensemble des acteurs et n’est pas en ligne avec les éléments développés par la Banque mondiale et le FMI dans le cadre du Bali Fintech agenda.11 Le projet de loi bancaire actuellement à l’étude prévoit néanmoins de réguler les FinTech exerçant des activités de paiement, de crédit et de collecte de dépôts et définit les modalités de contrôle des Fintech. La BCEAO a créé un comité Fintech interne chargé notamment de définir des orientations stratégiques pour le développement des FinTech et d'analyser les tendances et les enjeux en matière de réglementation et de supervision. Le Comité de Stabilité Financière de l’UMOA (CSF-UMOA) qui réunit l’ensemble des régulateurs du secteur financier sert pour l’instant de cadre d’échange et de concertation entre régulateurs sur la question des FinTech. Un Bureau de Connaissance et de Suivi des FinTech a également été créé auquel les Fintechs peuvent s’adresser pour échanger avec le régulateur, mais il ne constitue pas une structure formelle de concertation de place avec les acteurs de l’écosystème Fintech. La Banque Centrale a indiqué considérer la crypto-monnaie comme un actif financier spéculatif, avec les risques associés à une forte volatilité, des cyberattaques sur les plateformes d’échanges et de transactions, des levées de fonds frauduleuses, au possible contournement du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT). La Banque Centrale n’a en revanche pas encore développé de règlementation sur les cryptoactifs, alors qu’il ressort de plusieurs études internationales que dans les marchés émergents, beaucoup se tournent vers les cryptoactifs pour 10 Cette plateforme doit inclure core banking, b2b support technologique, cybersécurité, e-KYC, banque mobile. 11 Cet agenda contient un ensemble de 12 éléments politiques visant à aider les pays membres à exploiter les avantages et les opportunités des progrès rapides de la technologie financière qui transforment la fourniture de services bancaires, tout en gérant les risques inhérents. 7 préserver leur épargne, envoyer et recevoir des fonds et effectuer des transactions commerciales ; dans l’Union, le Togo, figure au 9ème rang mondial en termes d’adoption globale des cryptoactifs en 2021.12 S’agissant de la monnaie digitale de Banque Centrale, la BCEAO indique avoir pour ambition, à l’instar d’autres banques centrales, de profiter pleinement des innovations technologiques dans les domaines monétaire et des paiements et a entrepris des réflexions sur les enjeux et les opportunités de l’émission d’une monnaie digitale de banque centrale dans l’Union . Ces réformes doivent s’accompagner de mesures visant à renforcer les systèmes d’identification ainsi que les concepts d’open banking.13 Tableau 1: Principales recommandations en matière de paiements numériques Recommandations Responsable Priorité Cadre juridique Réviser le règlement n° 15/2002 de façon à couvrir le système de BCEAO CT paiement de l'UEMOA dans son ensemble. Développer la législation spécifique pour les paiements et l’innovation BCEAO MT financière évoquée dans le projet de loi bancaire, confiant de manière explicite à la BCEAO le pouvoir de surveillance sur le système de paiements dans toutes ces parties. Infrastructure Finaliser l’interopérabilité et la mise en place des paiements instantanés BCEAO CT Formaliser le rôle du CONOBAFI comme Conseil Régional des BCEAO MT Paiements Mener une réflexion stratégique sur l’évolution de STAR et SICA BCEAO MT Faire évoluer la fonction de surveillant en liaison avec les innovations et BCEAO MT évolutions dans les systèmes, moyens et services de paiement Paiements de détail Développer une stratégie régionale pour l’acceptation des paiements BCEAO/États CT électroniques par les commerçants. Mener une analyse d’impact et une concertation sur l’émission de BCEAO/Trésors CT monnaie électronique par les Trésors nationaux. Renforcer la collecte des données sur les couts des envois de fonds des BCEAO MT travailleurs migrants (remittances) et de mener des initiatives visant 12 Voir le rapport Chainalysis, 2021. 13 De manière générale, les systèmes d’identification collectent et valident les données d’identité au moyen d’un processus d’enregistrement, puis fournissent aux personnes des identifiants (tels que des certificats, des cartes ou d’autres documents d’identité) qu’elles peuvent utiliser pour s’authentifier ou vérifier des attributs d’identité spécifiques à l’intention d’un tiers qui doit s’appuyer sur leurs revendications d’identité ou d’attribut (Initiative ID4D). spécifiquement les bénéficiaires pour les familiariser avec les services financiers numériques Mettre à jour l’étude de 2019 pour évaluer les progrès dans la BCEAO MT digitalisation des paiements des gouvernements dans un contexte post-COVID et mieux comprendre les points de blocage Fintech BCEAO/Ministères MT Développer la concertation sur la Fintech, avec les acteurs du secteur et et autorités les autres autorités. concernés Préparer un cadre réglementaire sur les cryptoactifs BCEAO MT Développer un cadre pour l’Open Banking qui contribue à l’inclusion BCEAO MT financière I = immédiat ; CT = court terme ; MT = moyen terme 9 II. INTRODUCTION 10. Cette note technique présente une évaluation des systèmes et services de paiement et Fintech dans l’UEMOA. La note technique fournit une description générale de la situation actuelle, des évolutions engagées ou envisagées, et formule des recommandations pour les mesures qui pourraient être considérées par les autorités, et plus particulièrement la Banque Centrale, pour atteindre leurs objectifs de politique publique en matière de paiements et de Fintech. 11. La note technique a été élaborée dans le cadre du Programme d’é valuation du secteur financier de l’UEMOA, mené virtuellement par la Banque mondiale et le FMI en janvier 2022. La note a été rédigée sur la base des données, documents et renseignements fournis par la BCEAO, ainsi que sur la base de documents publics, de travaux menés par la Banque mondiale et des informations rassemblées lors d’entretiens avec différents acteurs du secteur public ( BCEAO, CONOBAFI, Trésor de Cote d’Ivoire, Ministère de l'Economie Numérique et des Télécommunications du Sénégal) et du secteur privé (banques, émetteurs de monnaie électroniques, Fintech de différents pays de la région). 12. La mission a utilisé les standards internationaux en vigueur, notes d’orientation et bonnes pratiques existantes pour fournir un cadre à l’analyse contenue dans la présente note technique. Il s’agit notamment du cadre sur les aspects des paiements de l’inclusion financière (PAFI), élaboré conjointement par la Banque mondiale et le Comité des paiements et des Infrastructures des Marchés (CPMI), des Principes pour les Infrastructures des Marchés Financiers (CPMI-IOSCO), du Programme de Bali sur les technologies financières du Groupe de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, et du travail de la Banque mondiale sur les paiements instantanés. 13. Le rapport est organisé comme suit : après un état des lieux des paiements dans la zone UEMOA, la note présente le cadre juridique (III.2.) et l’infrastructure des paiements (III.3.), puis s’attache plus particulièrement aux paiements de détail (III.4.) et Fintech (III.5.). III. PAIEMENTS ET FINTECH DANS L’UEMOA 1. ETAT DES LIEUX DES PAIEMENTS DANS LA ZONE UEMOA 1.1. Utilisation des moyens de paiement 14. Malgré d’importantes évolutions en matière de paiements, l’utilisation des espèces reste très importante dans l’UEMOA. Les paiements de détail dans l’UEMOA reflètent un paradoxe commun à de nombreuses régions en développement, soit la coexistence de moyens de paiement bien établis et variés, y compris non-scripturaux, et une utilisation des espèces encore très dominante, impliquant des coûts importants pour l’économie de la région. En 2020, la circulation fiduciaire s’est établie à 9.215,7 milliards de FCFA ou 23 pour cent de C/M2, en hausse de près de 19 pour cent par rapport à 2019. 15. Au niveau des paiements scripturaux, c’est le chèque qui domine en montant, bien que sa part en volume tende à se réduire très lentement, ces dernières années, au profit du virement. La baisse progressive de l’utilisation de cet instrument de paiement, constatée depuis 2017, illustre la préférence des utilisateurs pour les virements, accentuée en 2020 quand la BCEAO a pris des mesures incitatives visant à privilégier les moyens de paiement électronique, dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19. Graphique 1: Utilisation des instruments de paiement scripturaux en volume et en valeur Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 16. L’utilisation des cartes de paiement en UEMOA reste très en-deçà de son potentiel Cependant sa progression sur ces 4 dernières années semble prometteuse, portée par une plus importante émission de cartes (plus 17 pour cent par an en moyenne sur les 4 dernières années) et un élargissement du nombre de TPE (+19 pour cent par an sur les 4 dernières années). Les cartes 11 sont utilisées principalement pour les opérations de retrait cash qui représentent plus de 90 pour cent des transactions contre uniquement 8 pour cent pour les paiements14. 17. Malgré ces progrès enregistrés dans l’émission des cartes, l’infrastructure d’acceptation reste insuffisante. L’infrastructure de paiement est inégalement répartie sur la région et les services proposés restent très limités voire basiques, quand ils sont opérationnels. Le nombre de GAB, et TPE reste très faible avec 3.763 GAB et 9.673 TPE sur l’ensemble de la région. La faible utilisation des cartes en dehors des retraits aux guichets automatiques doit certainement résulter, en plus de la forte culture du cash et du développement de l’utilisation de la monnaie électronique, de la politique des établissements bancaires qui n’ont pas réussi à asseoir un réseau de commerçants acceptants, de la politique de tarification mais également du manque de sensibilisation aux avantages ainsi que des incitations pour les consommateurs à utiliser le paiement par carte aux points de vente ou pour le commerce en ligne. Graphique 2 : Transactions par cartes en Graphique 3 : Emission de cartes nombre et en montant Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 1.2. Utilisation de la monnaie électronique 18. Depuis la mise en place par la BCEAO en 2006, complété en 2015, d'un cadre juridique pour la monnaie électronique, l’activité d’émission de monnaie électronique progresse régulièrement, en raison notamment de l’attractivité des services financiers adossés à la téléphonie mobile. Dans l’UEMOA, la monnaie électronique est définie comme étant une valeur monétaire représentant une créance sur l’établissement émetteur, qui est stockée sous une forme électronique y compris magnétique (compte mobile, carte prépayée). Elle est émise sans délai contre la remise de fonds d’un montant qui n’est pas inférieur à la valeur monétaire émise et acceptée comme moyen de paiement par des personnes physiques ou morales autres que l’établissement émetteur. Outre le canal USSD, les services adossés à la monnaie électronique sont 14 Source : BCEAO - Tableau de bord de la monétique interbancaire dans l’UEMOA année 2017 notamment accessibles via les TPE, les GAB, les applications mobiles ou internet ainsi que le QR15 Code et le NFC. Au 31 décembre 2021, on dénombre 44 16 initiatives d’émission de monnaie électronique comprenant 13 établissements de monnaie électronique, dont 9 sont des filiales de sociétés de téléphonie mobile, 18 partenariats entre des banques et des opérateurs de télécommunications17, 12 entre des banques et des prestataires techniques et un système financier décentralisé (SFD). e. 19. Bien que le nombre de comptes de monnaie électronique ait fortement progressé, la proportion des comptes actifs18 ne dépasse pas 45 pour cent. Cette proportion des comptes actifs est en recul par rapport à l’année précédente, où elle avait atteint 48 pour cent. L’évolution a la hausse du nombre de comptes de monnaie électronique est liée, d'une part, à la crise sanitaire provoquée par la COVID-19 qui a favorisé l'adoption par les populations des services financiers numériques, et, d'autre part, aux mesures prises par la Banque Centrale pour l'assouplissement des conditions d’ouverture des comptes au cours du 2ème trimestre 2020. Quant au faible taux d’activité, il peut s’expliquer par des opportunités d’utilisation limitées le plus souvent au retrait et au transfert, avec très peu de services de seconde génération (paiement marchant, accès à des produits d’épargne, de crédit ou d’assurance). Graphique 4 : Evolution des comptes de monnaie électronique, 2018-2020 Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 20. L’écosystème de la monnaie électronique reste dominé par les offres des banques et les Etablissement de Monnaie Electronique (EME), qui sont de plus en plus dynamiques. Ces derniers ont concentré 60 pour cent des ouvertures de comptes en 2020, alors que le nombre de comptes de monnaie électronique ouverts auprès du secteur de la microfinance reste négligeable. 15 Instruction n°002-03-2021 relative à la norme applicable au QR code pour les paiements interopérables dans les Etats membres de l’Union Monétaire Ouest Africaine, entrée en vigueur en mars 2021 16 contre 38 à fin 2019. 17 A fin 2020, seules 9 EME étaient en activité, 3 EME agréés en Côte d’Ivoire n’avaient pas démarré leurs activités au terme de l’année 2020. 18 Il s’agit des comptes ayant effectué au moins une transaction au cours des 90 derniers jours. 13 Les encours de la monnaie électronique sont également en constante augmentation et ont atteint près de 557 milliards à fin 2020 (+36 pour cent par rapport à 2019). Ces encours sont intégralement couverts par les fonds cantonnés par les EME dans les comptes ouverts dans les livres des établissements de crédit de l’Union. Ces tendances ont sensiblement amélioré l'accès aux services financiers de base pour les populations mal desservies. 21. Le réseau de distribution a également connu une forte augmentation. Le réseau de distribution a bénéficié d’un doublement des points de services en trois ans, atteignant plus d’un million d’unités, mais dont seulement 57 pour cent sont actifs. L'indicateur du nombre de points de services financiers via la téléphonie mobile est basé sur la déclaration globale des acteurs, tenant compte de tous les partenariats avec les points multi-services. Dans le but de disposer d’une meilleure visibilité sur le maillage du territoire par les institutions financières et non financières et d’une amélioration de la qualité des données d'inclusion financière, il a été décidé de mettre en place un système de géolocalisation. Ce projet est toujours en cours. A fin 2020, les EME concentrent environ la moitié de ce réseau de distribution (+25 pour cent en un an), constitué des GAB, de sous-distributeurs et d’agents distributeurs. 22. A l’instar du réseau de distribution, les transactions en monnaie électronique ont également progressé de manière significative. Celles-ci ont été multipliées par 4,75 en volume et par plus de 3,5 en valeur, en l’espace de 5 ans. Cette croissance a été inégale dans les différents pays de l’Union et varie d’un pays à l’autre. Le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Bénin enregistrent à eux 4 plus de 85 pour cent des transactions en volume et en valeur. En termes d’usage, les opérations liées aux espèces représentent plus de 65 pour cent du total des transactions. Il s’agit des opérations de versement et retrait d’espèces (cash-In et cash out), suivies des transferts de personne à personne, des transferts intra-UEMOA et de rechargement téléphonique. Graphique 5 : Evolution des transactions en monnaie électronique en nombre et en valeur Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 Graphique 6 : Répartition des transactions par usage en valeur en 2020 Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 23. Néanmoins, l’utilisation de la monnaie électronique dans les pays de l’UEMOA s’avère limitée par rapport à son potentiel de développement. Dans 5 pays de la région, la part de la population qui a émis ou reçu un paiement électronique en 2018 est inférieure à la moyenne sub-saharienne de 34.4 pour cent. Le paiement de factures à partir d’un compte et le paiement par carte de débit/crédit sont inferieurs dans tous les pays de la zone UEMOA à la moyenne sub- saharienne (respectivement 7.7 pour cent et 7.5 pour cent). La réception d’un salaire du secteur privé sur un compte est inférieure à la moyenne sub-saharienne de 5.7 pour cent dans tous les pays à l’exception de la Cote d’Ivoire. 15 Tableau 2 : Accès a/utilisation d’un compte de transaction19 dans la zone UEMOA Benin Burkina Cote Senegal Mali Niger Togo Guinee Afrique d’Ivoire Bissau sub- saharienne Compte , 20 38.5 43.2 41.3 42.3 35.4 15.5 45.3 23.5 42.6 2018 Compte, 16.6 14.4 34.3 15.4 20.1 6.7 18.3 7 34.2 2014 Compte de 18.1 33.0 34.1 31.8 24.4 8.7 21.5 13.8 20.9 monnaie électronique, 2018 Compte de 2.0 3.1 24.3 6.2 11.6 3.9 1.4 1.5 11.6 monnaie électronique, 2014 Paiement 28.5 38.9 38.3 39.5 31 13 31.3 20.2 34.4 électronique émis ou reçu, 2018 Paiement 8.2 8.3 29.6 11.7 15.2 5.4 6.9 5.8 26.9 électronique émis ou reçu, 2014 Paiement de 3.7 3 7.5 7.4 4.2 1.6 5.6 2.8 7.7 facture à partir d’un compte, 2018 Réception de 3.1 6.0 4.5 3.8 3.1 na 3.6 3.4 5.7 salaire secteur privé sur un compte, 2018 Paiement 6.0 3.8 na 5.1 4.7 na 5.3 na 7.5 par carte de débit/crédit Source : Global Findex Database, 2018. 1.3. Impact du COVID-19 sur les paiements de détail 24. La pandémie de la COVID-19 a accéléré la numérisation de certains flux de paiement, dans l’UEMOA comme dans le reste du monde. Selon les dernières statistiques du Red Book de la Banque des Règlements Internationaux (BRI) analysées par le CPMI, les consommateurs au niveau mondial ont accru leur utilisation des instruments de paiement numériques et sans contact à un rythme sans précédent. La valeur totale des paiements numériques21 a fortement augmenté tant dans les économies avancées que dans les économies émergentes et en développement (EMDE). Un relatif recul de l’utilisation des espèces et des paiements par cartes au profit des autres formes de paiements numériques est probablement dû à une combinaison de tendances en cours et de développements liés au COVID-19 (travail à domicile; fermeture temporaire de magasins, d’hôtels et de restaurants; certains commerçants refusant les paiements en espèces; essor du commerce électronique; croissance des paiements numériques de personne à personne et pour le paiement des prestations des gouvernements). Ainsi la part des paiements sans contact dans le total des transactions par carte a augmenté en 2020 à son taux le plus élevé depuis 2015, d’autant que les banques et les sociétés émettrices de cartes ont dans de nombreux pays relevé leurs limites de valeur pour les paiements par carte sans contact en réponse à la pandémie. Cette tendance à l’augmentation des paiements numériques se manifeste également dans l’UEMOA, même si les valeurs demeurent inferieures au moyennes observées dans d’autres régions du monde. 25. Dans le même temps, et comme dans les épisodes de stress précédents, la valeur des espèces en circulation a augmenté. Même dans les pays ou en tant que moyen de paiement, les espèces ont perdu du terrain au profit des méthodes de paiement numériques et sans contact en 2020, la demande d’espèces en tant que réserve de valeur a augmenté. Il n’est pas clair à ce jour si la pandémie aura un effet prolongé sur la thésaurisation des espèces. Des recherches antérieures montrent que la thésaurisation des espèces ralenti après la fin d’une crise ou d’une période d’incertitude. 26. La BCEAO a mis en place des mesures pour favoriser l'utilisation des paiements électroniques dans un contexte de pandémie mondiale. Depuis le début de la crise, les autorités de l'UEMOA ont incité la population à limiter les contacts physiques en faisant plus de place à l'usage des paiements numériques. Plusieurs mesures ont été prises dans le but de réduire les coûts des transactions de monnaie électronique. Celles-ci comprenaient la gratuité des transactions de petits montants (moins de XOF 5,000) adossées à la monnaie électronique (transferts, paiements marchands et règlement de factures), le relèvement des plafonds de 19 Un compte de transaction est défini comme un compte (y compris des comptes de monnaie électronique/prépayés) détenu auprès d’une banque ou autre prestataire de services de paiement agréé et/ou réglementé, qui peut être utilisé pour effectuer et recevoir des paiements et stocker de la valeur (PAFI, 2016). 20 Définition Findex de l’accès au compte : pourcentage de répondants adultes de plus de 15 ans déclarant disposer d’un compte (à leur nom ou avec une autre personne) dans une banque ou un autre type d’institution financière ou déclarant avoir utilisé personnellement des services de monnaie électronique au cours des 12 derniers mois. 21 Ces paiements comprennent les virements effectués via les services bancaires en ligne, une application bancaire mobile ou un virement automatisé. 17 rechargement du porte-monnaie électronique et l’assouplissement des conditions d’ouverture des comptes de monnaie électronique. D’autres mesures ont concerné la réduction des frais appliqués aux paiements par carte bancaire, aux virements de la clientèle traités par l’intermédiaire du système interbancaire de compensation automatisé dans l’UEMOA (SICA-UEMOA) et aux opérations de retraits aux guichets automatiques du réseau du GIM-UEMOA. 1.4. Recommendations 27. Le modèle économique de l’émission de la monnaie électronique, qui reposait principalement sur la tarification du retrait des espèces (cash-out), doit évoluer. Une analyse par la BCEAO de la tarification des services financiers numériques dans l’UEMOA22 fait ressortir les conclusions suivantes : le service d'achat de crédit téléphonique est gratuit dans tous les pays ; le chargement du porte-monnaie électronique ou dépôt (cash-in) n’est pas facturé par les émetteurs de monnaie électronique, à l’exception de ceux de la Côte d’Ivoire 23 ; sont facturés (avec des différence en fonction des pays) le retrait d’espèces (cash-out), le transfert domestique et le paiement de factures ; le paiement marchand est gratuit pour le client, une commission étant payée par le commerçant à l'émetteur de monnaie électronique. L’objectif de la numérisation des transactions et de l’économie étant de limiter le recours aux espèces, un modèle économique basé sur la tarification du passage aux espèces ne semble pas adapté au développement d’un écosystème qui limiterait l’utilisation des espèces. 28. Le marché de l’émission de la monnaie électronique, jusqu’à présent dominé par les émetteurs de monnaie électronique issus d’opérateurs de téléphonie mobile, doit s’adapter à l’arrivée de nouveaux acteurs qui bousculent le marché. C’est notamment le cas de la société Wave, qui en partenariat avec la banque UBA est entrée sur le marché sénégalais en 201624, en Côte d’Ivoire en 2020, au Mali et Burkina en 2021. Wave a contribué à une pression à la baisse des tarifs, dans un marché très sensible au prix, en proposant des transactions à des coûts inferieurs a ceux des autres émetteurs (1 pour cent pour les transferts d’argent et gratuits pour le reste des prestations, factures, dépôt et retrait d’argent). Ces tarifs pratiqués par Wave ont amené les autres émetteurs de monnaie électroniques (comme Orange Sénégal) à revoir leurs tarifs à la baisse. Wave, qui a une ambition régionale, entend baser son développement sur le paiement marchand et facture 1 pour cent au commerçant, et a déjà mis en place des pilotes. A ces nouveaux entrants Fintech pourrait s’ajouter une nouvelle catégorie d’émetteurs de monnaie électronique si les Trésors étaient autorisés à émettre de la monnaie électronique. Dans ce contexte de pression sur la tarification des services de base, les émetteurs de monnaie électronique cherchent à ajouter d’autres services, à valeur ajoutée. 29. Comme dans d’autres pays en développement, le paiement marchand, et l’acceptation des paiements électroniques par les commerçants sont peu répandus et doivent faire l’objet 22 Entre juin et décembre 2020 23 Qui perçoivent un timbre de 100 FCFA, pour les dépôts dont les montants sont supérieurs à 5.000 FCFA 24 Wave a obtenu le 15 avril 2022 l'agrément en qualité d'émetteur de monnaie électronique au Sénégal. d’une stratégie de développement volontariste et coordonnée. Le développement du réseau d’acceptation n’est pas allé au-delà des chaines de supermarché, stations-services, pharmacies, hôtels, agences de voyage pour les cartes. De nouveaux entrants comme Wave cherchent à promouvoir l’acceptation des paiements mobiles par les commerçants et leur chaine de valeur (fournisseurs et salariés) mais les barrières à l’acceptation des paiements électroniques par les commerçants sont nombreuses. Parmi les plus communément citées par les acquéreurs (banques, émetteurs de monnaie électronique et Fintech) figurent : l’absence d’interopérabilité et de paiements instantanés ; l’absence de documents pour l’enregistrement des commerçants ; les plafonds de transactions en monnaie électronique ; le manque de communication institutionnelle sur les paiements numériques et la protection du consommateur ; les coûts pour les commerçants pour l’acceptation des paiements numériques, notamment par cartes (infrastructure TPE et commission facturée au commerçant). La filière de l’acquisition commerçants est peu développée et peu spécialisée, notamment car il n’existe pour le moment pas de statut juridique pour ces services de paiement. 30. Il est recommandé de mener un diagnostic sur l’acceptation des paiements électroniques par les commerçants pour mieux connaitre les obstacles, notamment en matière de couts et tarification, s’adapter à leurs attentes et définir des incitations appropriées. Ce diagnostic permettrait également d’identifier les mesures à prendre pour faciliter l’enrôlement des commerces informels pour l’acceptation des paiements numériques et de déployer une campagne institutionnelle de sensibilisation des marchands sur les avantages des services financiers numériques, surtout si à l’acceptation des paiements s’ajoutent d’autres services financiers. 31. Après les politiques visant à favoriser l’accès au compte, des efforts concertés avec d’autres acteurs et autorités doivent porter sur la généralisation de l’utilisation. Outre le soutien à l’acceptation des paiements électroniques par les commerçants et le déploiement d’un écosystème commerçant, différentes actions peuvent être envisagées. Les paiements électroniques ne se développeront que par la combinaison de mesures proactives telles que une application stricte par tous les gouvernements de la zone UEMOA des textes existants mais non respectés (tel que la désincitation à payer en espèces pour plus de 100,000 FCFA), voire des mesures supplémentaires incitatives et répressives pour combattre le paiement en espèces ; des politiques fiscales souples pour les marchands accepteurs des paiements numériques (suppression ou abaissement de la TVA sur les paiements numériques) ; autoriser la facturation des retraits d’espèces auprès des GAB. 2. CADRE JURIDIQUE DES PAIEMENTS 2.1. Situation actuelle 32. La première réforme règlementaire du secteur des paiements dans l'UEMOA date de 2002. Elle a transformé en profondeur le cadre légal du système de paiement de l'UEMOA, sachant 19 qu'à l'époque les activités de paiement étaient principalement des activités bancaires et donc les règles ont pérennisé ce contexte. Le Règlement n° 15/2002 est, à ce titre, la référence essentielle. Il a été adopté avec pour objectif de veiller au bon fonctionnement des nouveaux systèmes de paiement à l’époque fraîchement établis (STAR et SICA). Au moment de l'adoption du règlement, le secteur financier était essentiellement composé d'établissements bancaires, lesquels constituaient également les principaux fournisseurs de services de paiement, conformément à la Loi-cadre portant sur la réglementation bancaire (Loi-cadre), qui incluait les activités de paiement parmi les activités bancaires et les permettait exclusivement aux banques et aux « établissements financiers à caractère bancaire (EFCB) ». Aussi le Règlement n° 15/2002 a été rédigé en ayant à l’esprit les établissements bancaires comme principales catégories d'établissements régulés par la loi bancaire, et en deuxième lieu les EFCB, nonobstant l’article 131 de la Loi Cadre qui habilite les organismes relevant des systèmes financier décentralisés (SFD), c’est-à-dire des institutions dont l'objet principal est d'offrir des services financiers à des personnes qui n'ont généralement pas accès aux opérations des banques et des EFCB, à promouvoir l’utilisation des cartes et d’autres instruments et procédés de paiement électronique. 33. Le Règlement n°15/2002 contient des dispositions conformes aux normes internationales mais il ne couvre que les systèmes utilisés par les établissements bancaires. Le Règlement n° 15/2002 inclut des règles assurant l'irrévocabilité, la protection contre les procédures d'insolvabilité et reconnaît le caractère obligatoire des systèmes de règlement, le rôle des archives électroniques et la validité légale des virements électroniques. Il inclut, par conséquent, tous les éléments exigés par les normes internationales. Cependant, il ne s'applique pas aux systèmes composés par des établissements non bancaires. Le Règlement n° 15/2002 réglemente aussi les instruments de paiement mais de manière incomplète. Le Règlement n° 15/2002 consacre un bon nombre de ses dispositions aux chèques et aux lettres de change. Il réglemente également de façon exhaustive la question des virements électroniques, mais laisse de côté les prélèvements et autres types de transferts, tels que ceux émanant d'instruments de paiement innovants. Les cartes bancaires, elles aussi, ne font l'objet d'une régulation qu'en cas de fraude. 34. Une deuxième étape de la reforme a eu lieu en 2015 avec l’adoption de l’Instruction N°008-05-2015 (08/2015) régissant les conditions et modalités d’exercice des activités des émetteurs de monnaie électronique, qui s’est substitué à la précédente Instruction 01/2006. L’Instruction n°008-05-2015 fixe les conditions d’octroi de l’agrément aux établissements de monnaie électronique (EME) et d’autorisation d’exercer les activités d’émission de monnaie électronique pour les systèmes financiers décentralisés. Elle permet aux banques et aux établissements financiers de paiement habilités par la loi portant réglementation bancaire d’exercer l’activité d’émission de monnaie électronique à condition d’en informer la BCEAO deux mois avant le démarrage de cette activité. En outre, elle précise le dispositif de contrôle et de supervision de ces activités des établissements émetteurs. L’Instruction n°008-05-2015 couvre aussi les distributeurs et sous-distributeurs, ainsi que des prévisions sur les tiers operateurs techniques. L’Instruction permet aux EME de conclure des accords de partenariat avec un ou plusieurs opérateurs techniques. L’activité de ces partenaires doit se limiter au traitement technique de la monnaie électronique ou à sa distribution, sous la responsabilité de l’émetteur, tandis que la responsabilité de l’émission de monnaie électronique ne peut être externalisée auprès d’un opérateur technique. D’autre part, un EME peut recourir, dans les limites de son agrément ou autorisation d’exercice, aux services d’une ou de plusieurs personnes morales ou physiques, dénommées distributeurs, en vue de la commercialisation des services liés. Les EME demeurent responsables, à l’égard de leurs clients et des tiers, des opérations réalisées par leurs distributeurs, dans le cadre de la fourniture de services pour lesquels ils ont été mandatés. A ce titre, ils sont responsables de l’intégrité, de la fiabilité, de la sécurité, de la confidentialité et de la traçabilité des transactions réalisées par chacun de leurs distributeurs. 35. Bien que le succès de la monnaie électronique et des services financiers numériques dans les économies en développement s’appuie sur les réseaux d'agents, aucune disposition du Règlement n° 15/2002 ne réglemente le recours aux agents, tandis que l’Instruction n°008- 05-2015 utilise l’expression « distributeurs », qui peut poser question au niveau de l’interprétation. Le droit civil fait généralement la distinction entre les distributeurs et les agents. Néanmoins, l’instruction n°008-05-2015 incluant des dispositions concernant les « distributeurs » de monnaie électronique, cette disposition pourrait, dans son ensemble, couvrir la réglementation relative aux agents. Même dans ce cas, l’instruction réglemente exclusivement les EME, tandis qu’une règlementation plus générale et qui puisse s’appliquer à tout instrument de paiement serait nécessaire pour éviter l’arbitrage règlementaire. Le cadre réglementaire sur l’émission de la monnaie électronique n’aborde pas non plus la transparence, la protection du consommateur ou la résolution de conflits de façon générale et dument articulée. D’autre part, tandis que l'instruction n°008-05-2015 comprend une disposition sur la protection des données personnelles, ainsi qu’une disposition sur les relations avec la clientèle, y compris les mécanismes de résolution de conflits, ces dispositions ne sont pas dupliquées dans les autres mesures25. 36. Les conditions exigées pour entreprendre une activité de services de paiement varient selon le type d'organisme qui les fournissent, introduisant ainsi un risque d'arbitrage réglementaire. S'il s'agit d'un établissement bancaire, la loi bancaire les autorise à offrir des services de paiement sur la base d’une licence bancaire générale. S'il ne s'agit pas d'un établissement bancaire, l'organisme devra satisfaire plusieurs conditions selon l'activité qu'il souhaite entreprendre et s'il souhaite offrir des services de paiement. Ainsi, une licence de catégorie 5 (établissements financiers de paiement), comme pour les EFCB, sera exigée si l'organisme souhaite pratiquer toutes les activités de paiement (Instruction n° 011-12/2010/RB relative au classement, aux opérations et à la forme juridique des établissements financiers à caractère bancaire, article 8). Si l'activité de paiement se restreint à l'émission de monnaie électronique, le fournisseur de services de paiement devra solliciter une licence au titre d’émetteur de monnaie électronique. L'existence de règles spécifiques et autonomes pour les différents établissements fournissant des services de paiement, notamment si elles sont adoptées à des moments différents et en fonction des évolutions progressives du marché, présente le risque que 25 Il convient toutefois de noter que les aspects réglementaires généraux relatifs à la transparence, la protection du consommateur ou la résolution de conflits sont traités par les textes communautaires adoptés par la Commission de l’UEMOA ainsi que par le droit national de chaque Etat. 21 les conditions applicables aux opérateurs fournissant les mêmes services diffèrent, avec des effets préjudiciables à leur concurrence. 37. La BCEAO a adopté une instruction sur la surveillance des infrastructures de marché, des prestataires de services de paiement et des moyens de paiement. En 2021, la BCEAO a adopté une instruction relative à la surveillance des Infrastructures de Marchés Financiers (IMF), distinguant celles d'importance systémique de celles qui ne le sont pas (Instruction n° 001-03- 2021). Comme l'exigent les standards internationaux, les infrastructures systémiques sont soumises à des standards plus stricts que celles non systémiques. L’Instruction elle-même contient une définition de la surveillance basée sur le statut de la BCEAO, c’est-à-dire une fonction exercée par la BCEAO visant à promouvoir l'efficience et la sécurité des IMF ainsi que des moyens et des services de paiement. L'Instruction contient également des dispositions relatives aux prestataires de services de paiement et aux moyens de paiement. Tandis que les infrastructures systémiques sont surveillées par la BCEAO sur la base d'un système de désignation, celles non systémiques sont assimilées aux dispositifs de traitement des moyens et des services de paiement. A cette fin, l’Instruction contient une série de principes de surveillance concernant la base juridique, le cadre de gestion des risques et la gouvernance, ainsi que la mise en œuvre de la surveillance des IMF, des dispositifs de traitement des moyens et des services de paiement. Cependant, cette Instruction doit nécessairement s’appliquer sur la base du cadre légal existant, et souffre par conséquent des limites décrites du cadre juridique, notamment en ce qui concerne les acteurs non financiers. 38. La BCEAO a également adopté d’autres textes pour contribuer au développement des paiements numériques mais certains aspects demeurent absents. Une des évolutions concerne l’Instruction sur les codes de réponse rapide (QR). La principale fonction de l'Instruction (Instruction n° 002-03-2021) est d'introduire un standard d'interopérabilité, c’est-à-dire la norme N CONOBAFI 1503 : 2021 établie par le Comité Ouest Africain d’Organisation et de Normalisation Bancaire et Financière. Cette mesure favorise en fait la communication entre les systèmes. Cependant, il ne saurait suffire à lui seul à garantir l'interopérabilité en tant que principe général de l'ordre juridique. De la même façon, alors que le Règlement 15/2002 contient des prévisions sur la signature et la preuve électronique aux fins de sécuriser les systèmes de paiement, et que le CONOBAFI a statué sur une norme technique pour l’identification des personnes utilisant les services financiers numériques, l’UEMOA ne dispose pas encore de règles spécifiques et harmonisées sur l'identité numérique. Les technologies innovantes et la digitalisation nécessitent des outils plus affinés pour valider l'identité des utilisateurs de moyens de paiement., mais il n'existe actuellement aucun cadre législatif uniforme pour l’identité numérique. 39. Une réforme de la Loi Bancaire est en cours afin de renforcer le cadre réglementaire des paiements. Cependant, elle renvoie à une loi postérieure pour la plupart des aspects. En ce qui concerne les paiements, les modifications prévues introduisent des définitions générales de services et de moyens de paiement, ainsi que de compte de paiement. De plus, elle introduit la catégorie des « établissements de paiement » aux côtés des établissements de crédit et des EME. Ces entités sont soumises à la supervision de la Commission Bancaire de l’UEMOA. Ces amendements montrent l'intention d’inclure dans la réglementation aussi la catégorie générale de prestataires de services de paiement. Cependant, à la suite des modifications envisagées, la loi bancaire ne réglementera pas les établissements de paiement ni les services et moyens de paiement, dont la réglementation est au contraire déléguée selon la formulation actuelle à une autre loi. Le projet de loi bancaire ne contient que quelques prévisions sur les activités autorisées et interdites à toutes les entités soumises au contrôle de la Commission bancaire. 2.2. Recommandations 40. La modernisation du cadre légal du système de paiement de l'UEMOA initiée au début des années 2000 n’a pas été complètement achevée. Les efforts déployés par la BCEAO pour accompagner le rythme du marché sont avérés, et doivent être salués. Pour autant, la rapidité des avancées technologiques sur le marché, les lois sur les systèmes de paiement de « nouvelle génération » et l'objectif d’intensifier l'utilisation des paiements électroniques exigent des réformes plus poussées. Le contexte actuel, qui voit entrer sur le marché des acteurs non financiers offrant des services diversifiés, parfois fragmentés par rapport à des activités spécifiques non directement d’intermédiation dans le transfert d'argent (initiateurs, agrégateurs) et avec des modèles d’affaire spécifiques, justifie de revoir le cadre dans son ensemble et de reconsidérer les catégories de services et la régulation du marché actuellement en vigueur. 41. Les prestataires de services de paiement ne font pas l'objet d'une réglementation au titre d’une catégorie autonome et uniforme. La réglementation concernant les fournisseurs de services de paiement ne repose pas sur leurs activités de paiement. En général, les acteurs qui ne sont pas qualifiés comme banque ou EFCB ne bénéficient pas du même traitement que les banques et les EFCB réglementés par la loi bancaire, lorsqu'ils fournissent les mêmes services. Des dispositions générales couvrant l’activité de prestation de services de paiement, par des établissements bancaires ou non bancaires, et définissant des conditions en matière de licences/autorisation ainsi que les procédures, permettrait d'assurer une certaine cohérence. La situation actuelle faite de dispositions éparses constitue un frein à la concurrence et à l'efficacité et rend difficile la bonne surveillance des risques, ce qui pourrait entamer la stabilité financière. Ainsi, les banques, EFCB, établissements de monnaie électronique, IMF (y compris les coopératives), La Poste et tout autre organisme concerné devraient faire l'objet d'une réglementation pour le type d'activité qu'ils fournissent et chacun devrait être traité sur un pied d'égalité au regard de l'offre de ces services spécifiques. Dans la mesure ou certains opérateurs non financiers proposent des services qui ont un impact sur l'intermédiation des paiements, tout en ne rentrant pas strictement dans la définition de service de paiement, une refonte des activités à inclure dans la réglementation (et par conséquent le contrôle des autorités) s'impose.26 26 L'UEMOA suit une voie proche de celle de l'Union européenne (UE), qui a d'abord régulé les activités de paiement comme des activités bancaires, puis en parallèle a régulé les EME, et enfin a pris conscience de la nécessité d'une régulation générale des services de paiement. Sans supprimer la réglementation spécifique aux EME, l'UE a donc adopté une directive sur les services de paiement et a aligné la réglementation des EME sur celle des prestataires de paiement en général (Directive PSD). Enfin, elle a étendu la définition de « service de paiement » également à des activités (continued) 23 42. Dans la perspective d'une réglementation homogène couvrant la catégorie générale des prestataires de services de paiement, il convient également de distinguer pour les fournisseurs de services de paiement 27 ce qui relève des activités principales, de l'externalisation ou du recours à des agents (organisme fournissant des services au nom et pour le compte de l'ordonnateur). En particulier, il conviendrait de disposer d’un ensemble de normes homogènes pour les agents de paiement, qui puisse aussi inclure des catégories différentes d’agents selon leurs activités, leurs obligations, et les formes de protection des utilisateurs finales. En sus, outre la réglementation spécifique sur les réseaux d’agents, il est également nécessaire de réglementer les questions relatives à l’externalisation et les conséquences de son utilisation sur les risques liés aux activités de paiement. 43. Il est donc recommandé de remplacer le Règlement n° 15/2002 par un nouveau texte pour une approche coordonnée et complète des systèmes et services de paiement. Au niveau de son contenu, le nouveau texte devrait inclure des règles générales concernant les systèmes de compensation, le caractère définitif, l'insolvabilité, le nantissement, applicable à tous les systèmes et pas uniquement à ceux auxquels participent les banques. Il devrait également comprendre un régime d'autorisation pour tous les prestataires de services de paiement et tous les systèmes de paiement, quelle que soit leur nature ; des règles en matière de distribution, telle que l'externalisation et les agents ; des règles pour les services innovants (y inclus ceux d’initiation ou agrégation), y compris par les entités non-financières. Il est également recommandé d’inclure dans le nouveau texte la réglementation des agents et de l’externalisation des services dans une manière qui puisse s’étendre aux distributeurs de l’Instruction 8/2015 et en considérant la nécessité d’avoir des normes qui s’appliquant aux différents acteurs ne générant pas d’arbitrage règlementaire, ainsi que garantissant la sécurité des transferts par tous les opérateurs. Le nouveau texte devra également prévoir des règles sur la protection des utilisateurs, y compris de leur donnés personnelles (ou référence devrait être faite à la législation en vigueur en ces domaines une fois que celle-ci sera en place). Afin de limiter les risques d'insolvabilité et d'assurer la stabilité financière du système, les règles sur l’irrévocabilité, le caractère définitif et la protection contre l'insolvabilité devraient couvrir tous les systèmes, que les participants soient des établissements bancaires ou non bancaires. 44. S'il n’était pas possible de regrouper toutes les règles nécessaires dans un seul instrument, il faudrait néanmoins assurer autant que possible la cohérence des règles. Le Règlement n° 15/2002, comme il a été mentionné, doit être modernisé. D'autre part, la fragmentation actuelle de la législation décrite ci-dessus, bien justifiée par l'évolution historique du marché et l'articulation de différentes compétences, entraîne un risque d'arbitrage réglementaire, en plus de laisser certains aspects non réglementés pour le moment. Le fait que la spécifiques, telles que celles des initiateurs et des agrégateurs, et a inséré des règles dites de « banque ouverte » pour permettre le transfert de données entre opérateurs jugés nécessaires à la fourniture du service (Directive PSD2). 27 Pour les établissements de crédit, cette préoccupation est prise en compte par la Circulaire n°04-2017/CB/C sur la gestion des risques dans les établissements de crédit et compagnies financières ; cette circulaire prévoit des dispositions sur l'externalisation en ses articles 33 à 36 (principes généraux en matière d’externalisation, contrat de prestations, évaluation du prestataire, gestion des risques liés à l'externalisation). réforme de la Loi Bancaire laisse la réglementation des établissements de paiement à une loi distincte, donne l'occasion de réfléchir à l'opportunité d'adopter un texte unique contenant l'ensemble de la réglementation pertinente. Dans le cas où cela ne serait pas possible du fait de l'articulation de la législation dans l'UEMOA et de la distinction entre instruments centralisés et instruments d'uniformisation des réglementations nationales (dans le cas, par exemple, où à la fois la modernisation du Règlement n° 15/2002 est nécessaire pour les aspects de fonctionnement du marché et une nouvelle loi au sujet de l'autorisation de la prestation de services et éventuellement de la gestion des systèmes de paiement doit être adoptée), il faut tout de même veiller à ce que la régulation du secteur soit la plus homogène possible et mette en place des normes uniformes dans toute l'Union. 45. le Règlement n°15/2002/CM/UEMOA ne fournit pas une base solide a la fonction de surveillance de l’écosystème de paiements de la BCEAO. Afin que l'écosystème des paiements soit régulé de manière homogène, en particulier à la lumière de l’articulation de compétences au sein de l’UEMOA, il est recommandé qu'en plus d'un ensemble de règles cohérentes et articulées concernant les différents éléments du système, les fonctions de surveillance de l'écosystème par la BCEAO soient également renforcées, et que la flexibilité nécessaire soit garantie pour intervenir en fonction de l'évolution du marché. Il est donc recommandé que le projet de loi bancaire fasse clairement référence au pouvoir de surveillance de la BCEAO tel qu'il est actuellement régi par le Règlement de surveillance (Art. 4) afin d'éviter toute divergence éventuelle entre des textes législatifs de nature différente au sein de l'UEMOA. Les fonctions de surveillance de la BCEAO et les fonctions de supervision de la Commission Bancaire devraient en particulier être coordonnées, afin qu'il n'y ait pas de chevauchement d'activités ou qu'au contraire certaines questions restent non réglementées, ou que des standards incohérents soient appliquées. 46. Afin que l'écosystème des paiements soit correctement régulé et que la sécurité juridique soit garantie pour les transferts numériques, les réformes juridiques devraient également s'étendre à des secteurs voisins qui ont également un impact sur les paiements. La digitalisation nécessite qu'il y ait des règles générales allant encore plus loin que celles strictement relatives aux services de paiement. Parmi celles-ci, en plus des réglementations sur la protection des données déjà mentionnées, il faut inclure celles sur l'identité numérique, qui ont également un impact direct sur le niveau de résilience à la cybercriminalité. Il est recommandé qu'en plus des réformes spécifiques relatives aux paiements, d'autres réformes ne visant pas spécifiquement l'écosystème des paiements mais qui ont un impact décisif sur son efficacité et surtout sa sécurité, comme sur la protection des données et la reconnaissance et la protection de l'identité numérique, soient pris en considération. 3. INFRASTRUCTURE DES PAIEMENTS 3.1. Les systèmes de paiement régionaux et leur surveillance 25 47. L’UEMOA dispose de solides bases de systèmes de paiement pour ses paiements de détail. STAR-UEMOA (RTGS opéré par la BCEAO) est au cœur du système régional de paiement, puisque tous les systèmes de compensation et de règlement s’y règlent en monnaie de banque centrale. Comprenant 145 participants à fin 2021, essentiellement des banques et des établissements financiers, STAR-UEMOA a traité près de 1,48 millions de transactions pour un montant global de 677,342 milliards de FCFA, soit une augmentation moyenne sur les 5 dernières années de 15 pour cent en nombre d’opérations traitées et 8 pour cent en montants. Outre STAR, l’UEMOA dispose également de deux systèmes de paiement de détail SICA-UEMOA (Système Interbancaire de Compensation Automatisé dans l’UEMOA), et GIM-UEMOA (Groupement Interbancaire Monétique). Ces systèmes règlent tous les deux sur une base de règlement net différé dans STAR-UEMOA. Les échanges interpays au sein de l’UEMOA représentent 8 pour cent de la valeur globale des opérations traitées dans STAR-UEMOA, en baisse de 5 pour cent par rapport à 2019. Cette baisse s’explique par le ralentissement des échanges intracommunautaires induit par les mesures restrictives prises par les Autorités publiques afin de limiter la propagation de la COVID-19. Graphique 7 : Volumes et valeurs traités par STAR-UEMOA Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 48. SICA-UEMOA est un système automatisé de compensation des paiements de détail (ACH), géré par la BCEAO. Les paiements traités dans SICA-UEMOA sont principalement constitués des virements de moins de 50 millions de FCFA, chèques, prélèvements, lettres de change et billets à ordre. A l’issue du processus de compensation, les soldes par participant calculés par SICA-UEMOA sont réglés dans STAR-UEMOA. SICA-UEMOA comptait, à fin décembre 2020, 145 participants, constitués de banques, de la BCEAO ainsi que les Trésors Publics du Bénin, du Burkina, de la Côte d'Ivoire, de la Guinée-Bissau, du Mali, du Niger et du Sénégal. Il a traité près de 25.4 millions de transactions pour un montant global de 64 Millions de FCFA, soit une augmentation moyenne sur les 5 dernières années de 22.72 pour cent en nombre d’opérations traitées et 4,76 pour cent en montants. A l’instar de STAR-UEMOA, SICA-UEMOA a également connu une baisse des transactions interpays de 1,79 pour cent en 2019 à 1,23 pour cent en 2020. Graphique 8 : Volumes et valeurs traités par SICA-UEMOA Source : graphique Banque mondiale sur la base de données BCEAO, 2022 49. Créé en 2003, GIM-UEMOA est la plateforme monétique régionale28 pour les transactions par cartes. Au 31 décembre 2020, le GIM-UEMOA est constitué de 144 Institutions, composées de la BCEAO, de banques (80 pour cent des banques de l'Union), d’établissements de monnaie électronique, d’institutions de microfinance et de trésors publics nationaux, répartis entre les 8 pays. La plateforme interbancaire monétique régionale a enregistré 14.2 millions de transactions pour une valeur de 10,6 milliards de FCFA. 50. Depuis 2015, la BCEAO a entrepris plusieurs initiatives pour renforcer la sécurité de ses systèmes de paiement et leur mise en conformité avec les PFMIs . Celles-ci ont permis l'instauration de critères d'accès non discriminants à ces systèmes, l’introduction de nouvelles dispositions permettant de préciser la vocation du Fonds Régional de Garantie du règlement des soldes de compensation SICA-UEMOA et la mise en place d’un dispositif permettant la participation à SICA-UEMOA et à STAR-UEMOA, via une banque partenaire, des Systèmes Financiers Décentralisés (SFD). 51. La BCEAO a également mise en place une fonction de surveillance des paiements, en ligne avec les responsabilités des autorités définies dans les PFMIs. Cette fonction de surveillance des paiements s’appuie sur des outils développés par la Banque Centrale, notamment un cadre et un guide pratique de surveillance des services de paiement adossés à la monnaie électronique ; un cadre et un guide pratique de surveillance des services de transfert rapide d’argent ; un cadre et un guide pratique de surveillance des chèques et des cartes ; des guides pratiques de surveillance des infrastructures des marchés financiers d’importance systémique ; un dispositif de veille technologique en vue de la collecte et de l'analyse des meilleures pratiques, 28 Services de « switching » des transactions monétiques (compensation et règlement) et de « processing » à travers l’infogérance et le traitement technique par délégation des produits et services électroniques (services à valeur ajoutée) pour le compte de ses membres. 27 standards, produits, solutions et risques émergents concernant les moyens et les services de paiement dans l’Union. Au titre du renforcement de la cyber résilience des Infrastructures de Marchés Financiers, le surveillant des paiements a élaboré un guide sur les bonnes pratiques pour la sécurisation des plateformes de raccordement des participants aux infrastructures des marchés financiers gérées par la BCEAO ainsi qu’un guide d'évaluation de la conformité des plateformes, qui retrace l'ensemble des points de contrôle permettant à un participant de faire l'autoévaluation de la conformité de ses plateformes de raccordement. L'émergence d'acteurs non bancaires impliqués dans l’offre de services de paiement basée sur les nouvelles technologies va renforcer l’importance du dispositif de veille technologique, afin que la Banque Centrale puisse mener à bien sa surveillance du marché des paiements. 52. Le surveillant des paiements de la BCEAO s’appuie également sur un cadre de coopération avec d’autres autorités. Le contrôle sur place des émetteurs de monnaie électronique est effectué par la Commission Bancaire de l’UMOA, conformément à son programme de contrôle annuel défini sur la base de son approche de supervision basée sur les risques. La BCEAO a développé un cadre de coopération avec les Autorités nationales de Régulation des Télécoms, un Protocole d'entente entre la BCEAO et le CREPMF pour la surveillance du Dépositaire Central / Banque de Règlement (DC/BR) de la BRVM a été signé le 05 novembre 2021 et un cadre d’échange entre la BCEAO et les Ministères en charge de l’économie numérique est en cours d’élaboration. Ce dispositif de coopération pourrait être complété avec la formalisation du rôle du CONOBAFI29 comme Conseil Régional des Paiements. 3.2. Recommandations 53. A ce jour le système régional de paiement de l’UEMOA n’a pas réalisé son objectif d’interopérabilité et n’offre pas les paiements instantanés. Or l’interopérabilité et les paiements instantanés ont largement contribué dans d’autres régions du monde à l’essor des transactions électroniques et notamment à l’acceptation des paiements électroniques par les petits commerçants. La BCEAO a pris la décision stratégique de développer et d’héberger le futur système d’interopérabilité des services financiers numériques dans l’UEMOA. Depuis 2017, la BCEAO a initié, en partenariat avec la Fondation Bill & Melinda GATES et la Banque Africaine de Développement (BAD), un projet visant la mise en place d’une infrastructure de paiement instantané permettant les échanges de « compte à compte », quels que soient le type de compte (bancaire, non bancaire), l'instrument, le service et les canaux utilisés, ainsi que l'intégration de tous les prestataires de services financiers. Le déploiement des nouveaux services, basés sur des transactions instantanées et irrévocables, devrait contribuer à la réduction des coûts et des délais 29 Le CONOBAFI est une Association à but non lucratif et d'utilité publique dont le siège est fixé à Dakar, créé par la BCEAO en coopération avec les Associations professionnelles des banques et établissements financiers des Etats de l'UMOA et les structures de régulation du secteur financier. Il a pour mission d'apporter des réponses adéquates aux questions liées à l'activité bancaire et financière d'ordre organisationnel et normatif et d’œuvrer dans le sens de l'interbancarité. des transactions, à la maîtrise des risques liés à la compensation et au règlement des opérations ainsi qu’à la promotion de l'inclusion financière des populations. 54. L’introduction de la fonctionnalité paiements instantanés pourrait avoir un impact sur les autres systèmes de paiement régionaux de l’UEMOA (y inclus le RTGS STAR et SICA). Un Système de Paiements Instantanés (SPI) peut être le catalyseur pour d’autres changements importants dans les systèmes de paiement nationaux ou régionaux 30 . Dans la mesure ou les systèmes de paiements instantanés fonctionnent en général sur la base d’un règlement en temps réel, les systèmes RTGS sont poussés à s’adapter. En particulier, les heures d’ouverture des systèmes RTGS peuvent être étendues et certaines banques centrales examinent l’option d’une ouverture 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 pour faciliter le règlement des transactions de paiement instantanés. Cette évolution peut avoir des implications importantes en ressources, pour la gestion des changements techniques, et également sur les processus de résolution des entités financières31. L’utilisation croissante d’ISO 20022 dans les paiements peut par ailleurs offrir aux banques commerciales une plus grande flexibilité dans le choix des canaux de paiement (entre banques correspondantes, RTGS et SPI). La décision de nombreux SPI d’adopter ISO 20022 peut également inciter les institutions financières et les clients/utilisateurs finaux à modifier leurs systèmes internes pour être en mesure de l’utiliser. 55. Dans un contexte de mise en place des paiements instantanés, STAR-UEMOA et SICA demeurent au cœur du système régional de paiement, et une réflexion stratégique doit être engagée sur son évolution. Cette réflexion stratégique doit viser à renforcer la sécurité et l’efficience de STAR-UEMOA, qui assure le règlement final en monnaie centrale de tous les systèmes de paiement de détail de l'UEMOA, en liaison avec les évolutions technologiques observées dans les systèmes de paiement. La convergence des systèmes de paiement de détail de l’Union vise à accroître leur efficience. Elle pourrait être mise en œuvre à travers plusieurs options à examiner telles que le transfert des virements et les prélèvements traités dans SICA-UEMOA vers le système de paiement instantané ou une intégration des deux systèmes. 56. L’introduction de la fonctionnalité paiements instantanés, mais également l’essor des moyens et services de paiement innovants et des risques afférents (notamment les risques cyber 32 ) doivent être prise en compte par la BCEAO dans sa fonction de surveillant des paiements. Le surveillant doit bénéficier des ressources nécessaires pour continuer à accorder une attention particulière aux questions de risque, d’accès et de concurrence , notamment dans un marché où un seul système de paiements instantanés33 émerge. Ces préoccupations expliquent 30 Il faut prendre en compte le fait que ces changements ne concernent pas uniquement le système de paiement, mais peuvent également impliquer des investissements importants dans les systèmes internes des banques commerciales. 31 La planification de la résolution est généralement mise en place autour d’un « week-end », et cela devra être calibré dans un mode 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. 32 Voir la rapport dédié sur le risque cyber dans l’UEMOA 33 Ceci est particulièrement le cas lorsqu’il s’agit d’un système privé. 29 que, comme la BCEAO, d’autres banques centrales (zone euro, États-Unis et Suède) aient décidé de jouer un rôle actif dans la gouvernance et/ou le fonctionnement de leur SPI. Outre les aspects de gestion des risques, dans son rôle de catalyseur de la modernisation du marché des paiements, les taux d’adoption des SPI dans une juridiction donnée peuvent dépendre d’une série de facteurs, notamment le coût, les types de paiements dans la portée, la qualité des interfaces avec les utilisateurs, la communication auprès des utilisateurs, les limites de valeur pour les transactions individuelles. Les limites de valeur de transaction à l’échelle du système peuvent en effet avoir un impact sur l’utilisation des paiements instantanés. Des limites relativement basses peuvent être bénéfiques en termes de réduction du risque de fraude et de gestion des liquidités. Néanmoins, ils peuvent limiter l’expansion de l’utilisation des paiements instantanés, en particulier par les entreprises. Toutes ces problématiques bénéficieraient de d’une concertation au sein d’un Conseil Régional des Paiements incluant des représentants de toutes les entités concernées, du secteur public comme du secteur privé. 4. PAIEMENTS DE DETAIL 4.1. Paiements des Gouvernements 57. Une étude menée en 201934 sur les paiements des Etats dans l’UEMOA faisait ressortir une situation hétérogène dans la région en matière de digitalisation. Les niveaux de digitalisation variant selon les pays, mais également selon les segments (G2P, G2B, B2G, P2G, G2G), ou même la nature du flux de paiement au sein d’un même segment. L’étude concluait à un important niveau de digitalisation des salaires des agents des Etats (G2P) dans les pays de la région, a l’exception du Mali, mais a un faible niveau de digitalisation des programmes d’aide sociale des Etats (G2P), distribués majoritairement en espèces dans les 8 Etats. Le paiement des pensions de retraite (G2P) atteint un haut niveau de digitalisation au Burkina et en Côte d’Ivoire, mais un niveau beaucoup plus faible au Bénin, Mali, Niger et Sénégal. En ce qui concerne les paiements B2G, on constatait un important niveau de digitalisation au Burkina, mais un faible niveau de digitalisation, avec une prédominance de l’usage du chèque, au Bénin, Mali, Sénégal et en Côte d’Ivoire. En revanche, le faible niveau de digitalisation et la prédominance des espèces sont des traits communs aux 8 pays de la région pour les paiements P2G. Pour faire suite à cette étude, la BCEAO a diffusé un guide pour la digitalisation des paiements des Etats membres de L’UEMOA visant à aider les États dans leur démarche de digitalisation des paiements publics et proposant notamment une démarche méthodologique pour la digitalisation des paiements des États. Compte-tenu de l’importance de la digitalisation des paiements des Gouvernements dans la 34 Banque mondiale, Etat des lieux de la digitalisation des paiements des Etats dans l'UEMOA, Juillet 2019. L’étude dresse, pour chaque pays, la situation des flux de paiement des principales administrations publiques, collectrices ou émettrices de paiements. Les principaux moyens de paiements explorés portent sur les espèces, le chèque, le virement et la monnaie électronique (notamment mobile money). Le périmètre de l’étude porte sur les paiements de type Etat aux personnes (G2P) ; Entreprises à l’Etat (B2G) ; Personnes à l’Etat (P2G) ; entre différentes entités étatiques ou paraétatiques (G2G). modernisation du marché des paiements et de leur effet d’entrainement sur l’inclusion financière, l’étude de 2019 pourrait être renouvelée pour évaluer les progrès dans la digitalisation et mieux comprendre les points de blocage. Tableau 3 : Niveau de digitalisation des paiements des Etats dans l’UMOA 35 Niveau de digitalisation des G2P B2G P2G paiements (Exprimé en pour cent des valeurs) Benin (annee 2016) 84,62pour cent 0pour cent 0pour cent Burkina (année 2017) 95,78pour cent 72,91pour cent 3,79pour cent Cote d’Ivoire (année 2017) 97,57pour cent 13,02pour cent Non Disponible (ND) Mali (année 2017) 43,56pour cent 38,98pour cent Non Disponible (ND) 36Sénégal (année 2016) 24,70pour cent Non Disponible (ND) 8,40pour cent Source : Banque mondiale, 2019 58. Certains Trésors nationaux de la région envisagent de devenir eux-mêmes émetteurs de monnaie électronique. Ces actions ont comme objectif de contribuer à la digitalisation de leurs paiements et à leurs objectifs d’inclusion financière, et de réduire les couts associés au recours à des fournisseurs de services de paiement pour la digitalisation de leurs paiements. Les dispositions des articles 4, 42 et 131 du Règlement n°15/2002 du 19 septembre 2002 relatif aux systèmes de paiement dans les États membres de l’UEMOA offrent la possibilité aux Trésors publics de promouvoir l’utilisation des cartes de paiement et de retrait, du porte-monnaie électronique et du télépaiement. Le Règlement envisage aussi tout autre procédé et instrument moderne de paiement à naître, notamment par la constitution de groupements, en vue d’instituer des mécanismes et des instruments de virement électronique de dimension nationale ou régionale. 35 Sur la base des informations disponibles au moment de la réalisation de l’étude de 2019 précédemment citée. 31 C’est sur la base de ces dispositions que les Trésors de la Côte d’Ivoire et du Sénégal ont fait part à la BCEAO de leur intention de soumettre un dossier de demande d’autorisation pour l’émission de la monnaie électronique, afin d’ouvrir des portefeuilles de monnaie électronique aux bénéficiaires de prestations sociales. La Banque Centrale a préparé un Guide pour la constitution des dossiers pour l’émission de la monnaie électronique par les Trésors publics des Etats membres de l’UMOA qui comprend les conditions à remplir, notamment : émission en réseau fermé (l’émission doit uniquement se limiter aux bénéficiaires des allocations publiques de l’Etat (fonctionnaires, boursiers, retraités)) ; mise en place d’un dispositif de gestion des comptes inactifs ; protection des consommateurs (à travers la mise en place d’un dispositif de gestion des réclamations et d’écoute clients) ; publication, par tout canal approprié, de la tarification appliquée aux produits et services offerts ; protection des fonds des porteurs ; et exigences techniques. 4.4. Envoi de fonds des travailleurs migrants 59. L’Afrique de l’Ouest est un bénéficiaire important des envois de fonds des travailleurs migrants en Afrique subsaharienne. Les pays de l’UEMOA sont les pays bénéficiaires de la région qui connaissent la croissance la plus rapide37 des envois de fond, ceux-ci ayant doublé au cours de la dernière décennie pour atteindre environ 5,4 milliards de dollars en 2019. Si Le Nigeria reçoit la majeure partie des envois de fonds à destination de l’Afrique de l’Ouest avec 25 milliards de dollars estimés en 2019, le reste de l’Afrique de l’Ouest attire environ 11 milliards de dollars d’envois de fonds. Le Sénégal est le principal bénéficiaire des envois de fonds vers l’UEMOA, tant en termes de volume que d’importance pour l’économie nationale. Avec une exception pour le Sénégal et la Guinée-Bissau, les envois de fonds en provenance de l’Afrique subsaharienne représentent la plupart des flux entrants vers les pays de l’UEMOA, et certains corridors intrarégionaux sont très importants (notamment en provenance du Nigéria et du Ghana). La France, l’Italie et l’Espagne sont les principaux corridors d’envois de fonds interrégionaux vers l’UEMOA. Ce flux constant de financement est d’une importance vitale pour les nombreux pays de la région, en particulier pour le Sénégal et le Togo, où ils représentent entre 9 et 14 pour cent du PIB. Il est à noter que les envois de fonds vers le Mali, le Togo et la Guinée-Bissau ont connu une baisse au cours des deux dernières années, probablement en raison de la pandémie de la COVID-19. 37 En particulier le Sénégal, Burkina Faso et Togo. Graphique 9 : Evolution des envois de fonds des travailleurs migrants vers l’UEMOA38 Source : Banque mondiale, 2022 Graphique 10 : Envoi de fonds des travailleurs migrants vers l’UEMOA en pour cent du PIB Source : Banque mondiale, 2022 60. À l’exception du Bénin, les prix des envois de fonds pour l’UEMOA sont inférieurs à 5 pour cent, mais toujours supérieurs aux cibles des Objectifs de Développement Durable (ODD)39 de 3 pour cent. Le Bénin est le corridor de transfert de fonds le plus cher de l’UEMOA. Le coût de l’envoi de 200 dollars au Bénin a atteint 17,52 pour cent au 3ème trimestre de 2021, soit une augmentation de 5 points depuis la COVID-19. Dans d’autres pays de l’UEMOA, le coût des envois de fonds est resté en grande partie stable, avec des fluctuations mineures depuis l’apparition de la pandémie. Les frais de transaction représentent la majeure partie des coûts de transfert vers les pays de l’UEMOA. La monnaie électronique est l’instrument de paiement le moins cher pour la remise des fonds dans l’UEMOA et également la méthode de paiement la moins chère pour les envois de fonds à partir de l’UEMOA, tandis que les banques sont les plus chères. Les émetteurs de monnaie électronique offrent des prix nettement inférieurs dans les cibles des ODD 38 Banque mondiale, https://www.worldbank.org/en/topic/migrationremittancesdiasporaissues/brief/migration- remittances-data 39 L’ODD 17 souligne l’importance des partenariats pour le développement mondial et met l’accent sur la facilitation et le renforcement des liens financiers entre les pays. Les envois de fonds sont des transferts monétaires envoyés par des travailleurs vivant à l’étranger à leur famille dans leur pays d’origine. La capacité de trouver un emploi à l’étranger et d’envoyer de l’argent est essentielle pour bon nombre des personnes les plus défavorisées économiquement dans le monde (cible 17.3 des ODD https://datatopics.worldbank.org/sdgatlas/targets/#17.3). 33 de 3 pour cent, mais ils ne couvrent une part importante du marché que sur quelques marchés, tels que la Côte d’Ivoire, le Mali et le Sénégal. Les différences de coût par corridor s’expliquent principalement par les régimes de change et les corridors de l’UEMOA sont remarquablement moins chers que les autres corridors intrarégionaux en Afrique subsaharienne. 4.3. Recommandations 61. L’émission de monnaie électronique par les Trésors, dans un contexte ou le secteur privé offre déjà ce service, soulève certaines questions qu’il est important de traiter. Il n’est pas clair si les bénéficiaires de prestations sociales seront obligés de recevoir leurs prestations sur un compte de monnaie électronique du Trésor, ce qui constituerait une exclusivité susceptible de perturber les conditions de concurrence de l’émission de la monnaie électronique dans la zone. Il n’est pas clair non plus sur quels réseaux d’agents les Trésors pourraient s’appuyer pour atteindre les zones rurales, éloignées des locaux physiques des Trésoreries. Si les Trésors devaient être autorises à émettre de la monnaie électronique sur la base d’objectifs de politique publique, il conviendrait de mettre en place les conditions pour ne pas entraver la compétition et ne pas mettre en danger les acteurs du secteur privé qui rendent déjà ce service et ont permis de grand progrès en matière d’accès au compte et d’inclusion financière dans la région au cours des dernières années. Pour cela, il est recommandé de mener une analyse d’impact et une concertation sur l’émission de monnaie électronique par les Trésors nationaux. 62. Compte-tenu du poids des transferts d’argent des travailleurs migrants (remittances) dans le PIB de certains pays, de leur rôle de stabilisateur en période de crise, il est recommandé de renforcer la collecte des données sur les coûts des envois de fonds des travailleurs migrants et de mener des initiatives visant spécifiquement les bénéficiaires pour les familiariser avec les services financiers numériques. Les transferts de fonds jouent un rôle important dans le développement socio-économique des pays. Ils n’aident pas seulement à lisser la consommation, mais également à réduire l’impact des chocs économiques et à soutenir les activités de subsistance. Cet effet contracyclique a été particulièrement visible en 2020, année pendant laquelle les flux des transferts sont restés importants malgré l’impact économique de la COVID-19. Les flux des transferts de fonds officiels vers les pays à revenu faible et intermédiaire ont atteint 540 milliards de dollars en 2020, soit seulement 1,6 pour cent de moins que les flux de fonds enregistrés en 2019. Avec plus de 700 milliards de dollars de flux officiellement enregistrés vers les pays en développement en 2019, les envois de fonds internationaux constituent une source de revenus essentielle pour les familles vulnérables. Cependant, le marché des transferts de fonds fait face à des défis majeurs aussi bien du côté de la demande que de l’offre. Ces défis peuvent entrainer des coûts élevés des transactions et avoir un effet négatif sur les travailleurs migrants et leurs familles. Le G8 comme le G20 a donc inscrit dans leurs objectifs la réduction du coût moyen des envois de fonds40 et il est recommandé dans l’UEMOA de promouvoir la transparence sur les marchés d’envois de fonds afin de favoriser une concurrence saine entre les prestataires de services 40 de 5 points de pourcentage en 5 ans (objectif 5x5), de transferts ; et de développer des mesures d’éducation financière et de protection du consommateur pour aider les bénéficiaires à se familiariser avec les services financiers numériques. 5. FINTECH 63. Cette note reprend la définition large de la fintech utilisée dans le Bali Fintech Agenda (BFA) du FMI et de la Banque mondiale41. Le BFA utilise le terme fintech pour décrire les progrès technologiques qui sont à même de transformer la prestation des services financiers, en stimulant le développement de nouveaux modèles opérationnels, applications, processus et produits. Le terme Fintech s’applique tout autant à l’adoption de la technologie de manière transformatrice par les opérateurs historiques que pour désigner spécifiquement les nouveaux entrants. 64. Les technologies financières transforment le paysage mondial du secteur financier, offrant de nombreuses opportunités, mais elles présentent également des risques. Les technologies financières peuvent renforcer le développement, la concurrence, l’inclusion et l’efficacité du secteur financier. Mais cela peut aussi présenter des risques pour les consommateurs et les investisseurs ; la sécurité opérationnelle et la cybersécurité ; et la stabilité et l’intégrité financières. Exploiter les avantages de la fintech de manière responsable nécessite donc une position réglementaire et prudentielle équilibrée qui apporte confiance et clarté au marché et aux consommateurs et qui soit basée sur l’activité, proportionnée et neutre sur le plan technologique. En conséquence, une évaluation du marché fintech de l’UEMOA, l’élaboration de la feuille de route pour la réforme réglementaire et l’utilisation de la fintech pour combler le déficit de financement des PME et fournir des services aux clients sous-bancarisés de l’UEMOA ont été identifiés comme un sujet important dans ce PESF. 41 Bali Fintech Agenda, octobre 2018 35 Encadré 1: FMI-BM Bali Fintech Agenda Le Bali Fintech Agenda du FMI et de la Banque mondiale a été utilisé comme cadre analytique. 42La Banque mondiale, en collaboration avec le FMI, a lancé le Bali Fintech Agenda en réponse à la demande croissante des pays clients sur la façon de faire face à l’évolution rapide des technologies financières dans leurs juridictions, ainsi qu’aux appels à accroître la coordination internationale et le partage d’informations liées aux technologies financières. L’agenda Fintech de Bali fournit un ensemble de considérations de haut niveau aux décideurs politiques et à la communauté internationale pour exploiter les opportunités et gérer les risques posés par les technologies financières. Les considérations de haut niveau sont organisées en 12 éléments et quatre groupes : (i) Favoriser un environnement propice à l’exploitation des opportunités fintech ; ii) Renforcer le cadre d’action du secteur financier ; iii) Faire face aux risques et améliorer la résilience ; et iv) promouvoir la collaboration internationale. Principales considérations à l’intention des décideurs et de la communauté internationale : • Adhérer à la promesse de la fintech. • Permettre aux nouvelles technologies d’améliorer la prestation de services financiers. • Renforcer la concurrence et l’engagement en faveur des marchés ouverts, libres et contestables. • Promouvoir fintech pour favoriser l’inclusion financière et développer les marchés financiers. • Suivre de près l’évolution de la situation pour approfondir la compréhension des systèmes financiers en évolution. • Adapter le cadre réglementaire et les pratiques de supervision pour le développement harmonieux et la stabilité du système financier. • Préserver l’intégrité des systèmes financiers. • Moderniser les cadres juridiques pour mettre en place un paysage juridique favorable. • Assurer la stabilité des systèmes monétaires et financiers intérieurs. • Développer une infrastructure financière et de données robuste pour maintenir les avantages de la fintech. • Encourager la coopération internationale et l’échange d’information. • Renforcer la surveillance collective du système monétaire et financier international 5.1. Activité des Fintech dans la zone UEMOA 65. Le secteur des Fintech dans la zone UEMOA se caractérise par son hétérogénéité, sa diversité, et pour certains pays par son dynamisme. Le secteur est hétérogène avec des niveaux de développement très différents selon les pays, une grande diversité d’acteur s, intervenant dans le secteur bancaire et financier ainsi qu’une variété de produits et services financiers innovants. Plus de 70 pour cent des activités menées par les FinTech de l’Union porte sur l'offre de services financiers numériques (notamment le paiement, le transfert rapide d’argent et le retrait). Le reste focalise sur le développement de plateforme numérique (core banking, B2B support technologique, cybersécurité, e-kyc, banque mobile). Les résultats d’une enquête menée par la BCEAO dans l’UEMOA à fin 2021 a fait ressortir un total de cent-soixante-quinze (175) entreprises 42 Bali Fintech Agenda http://documents.worldbank.org/curated/en/390701539097118625/The-Bali-Fintech-Agenda- Chapeau-Paper de technologies financières. Ces entreprises interviennent principalement dans la fourniture de moyens et services de paiement, tels que la distribution de monnaie électronique, le transfert d’argent et l’agrégation de paiement. Elles proposent également des plateformes numériques pour le commerce électronique, la gestion de données et de flux financiers. Elles ont été réparties en trois grandes catégories suivant leurs domaines d’activités : i) les intégrateurs de systèmes d'information 43 (des structures qui conçoivent et adaptent l'architecture des systèmes d’information d'une entreprise, en mettant en place des interfaces entre les différentes solutions applicatives) ; ii) les agrégateurs de solutions numériques 44 (structures qui gèrent, de façon externalisée, diverses fonctions pour les prestataires de services financiers, telles que l’interopérabilité des paiements au niveau des distributeurs, des accepteurs et entre les institutions financières, ainsi que les bases de données client et les risques) ; iii) les fournisseurs de plateformes numériques45 (mettent à la disposition des institutions financières, une technologie, un logiciel ou un service, en support à leurs offres de services financiers). 66. Un Comité Fintech visant à promouvoir le développement de ce nouvel acteur dans l'UMOA a été créé au sein de la Banque Centrale. Il est chargé notamment de définir des orientations stratégiques favorables au développement des Fintech ainsi que d'analyser les tendances et les nouveaux enjeux en matière de réglementation et de supervision liés aux innovations technologiques. Le Comité Fintech doit aussi veiller à assurer la cohérence de son intervention avec les actions mises en œuvre par les Autorités de régulation et de supervision au niveau national (Autorité de régulation des télécommunications et de la Poste, Commission des données personnelles, Ministères en charge de l'économie numérique, etc.). Trois pôles ont été définis par le Comité Fintech aux fins de l’élaboration et du déploiement de son programme d’activités, à savoir : (i) la Connaissance et le Suivi des FinTech, (ii) la Réglementation et la Supervision, (iii) le Renforcement des Capacités et la Veille Technologique. La BCEAO a également mis en place un Bureau de Connaissance et de Suivi des FinTech qui vise à organiser les échanges entre ses acteurs et la Banque Centrale. Afin d’accompagner le développement des FinTech dans l’Union qui souhaitent mettre sur le marché des produits financiers innovants, s’appuyant sur l'utilisation des nouvelles technologies, le Bureau a en charge de recueillir et de traiter toute demande d’information, ou d’entretien avec le Régulateur ou d’avis sur les projets et sur tout sujet d’intérêt commun liés aux innovations technologiques et à la régulation du secteur financier. 43 Professionnel de l'informatique qui, à partir d’un existant, (i) développe l’architecture des systèmes d’information d'une entreprise (applications et des logiciels) ; (ii) interconnecte des systèmes de communication avec différentes solutions applicatives afin que ces dernières puissent s'échanger des informations ; (iii) et prend en charge la maintenance technique. 44 Entité qui offre un portail unique consolidant les informations sur les comptes qu’il possède dans différentes banques et affiche le solde et le détail des opérations liées à ces comptes. Les agrégateurs sont également appelés des prestataires de services d’information sur les comptes. 45 Entité qui conçoit et met à disposition d’une entreprise, une technologie, un logiciel ou une plateforme à une entreprise en vue de fournir des services financiers numériques, notamment pour la gestion de flux financiers (intermédiation, routage, etc.), la gestion de comptes pour le transfert d’argent entre utilisateurs, le paiement (factures, de masse, en ligne, biens et services, etc.) et l’approvisionnement de compte. 37 67. La BCEAO n’a pas encore développé de réglementation sur les cryptoactifs et a entrepris une réflexion sur la monnaie digitale de Banque Centrale46. Il ressort de plusieurs études internationales que dans les marchés émergents, beaucoup se tournent vers les cryptoactifs pour préserver leur épargne, envoyer et recevoir des fonds et effectuer des transactions commerciales ; dans l’Union, le Togo, figure au 9eme rang mondial en termes d’adoption globale des cryptoactifs en 202147. Concernant les crypto-monnaies, la Banque Centrale indique considérer la crypto-monnaie comme un actif financier spéculatif, compte-tenu de ses caractéristiques spécifiques, notamment l'absence de cours légal, l'utilisation de la cryptographie et le mode de fonctionnement décentralisé, avec des vulnérabilités importantes liées à la forte volatilité, aux risques de cyberattaques sur les plateformes d’échanges et de transactions, de levées de fonds frauduleuses, de contournement du dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) ; tous ces éléments de risque justifiant une approche prudente. S’agissant de la monnaie digitale de Banque Centrale, à l’instar d’autres banques centrales, la BCEAO indique avoir pour ambition de profiter pleinement des innovations technologiques dans les domaines monétaire et des paiements. A ce titre, sous l’égide du Comité FinTech, elle a entrepris des réflexions sur les enjeux et les opportunités de l’émission d’une monnaie digitale de banque centrale dans l’Union. Les travaux en cours visent notamment à analyser les avantages que la Banque Centrale pourrait tirer de l'utilisation d’une monnaie digitale, les conditions et les modalités d’émission, les impacts possibles des MDBC sur l’inclusion, l’intégrité et la stabilité du système financier de l’Union ainsi que sur la politique monétaire. 46 De nombreuses banques centrales explorent le potentiel d’une monnaie numérique de banque centrale de détail (CBDC de détail) qui offrirait aux consommateurs la même protection que les espèces aujourd’hui, tout en leur permettant d’effectuer des paiements sans avoir de billets de banque et de pièces physiques. Une enquête de la BRI de 2020 auprès de plus de 60 banques centrales (Boar et Wehrli (2021)) a montré que la pandémie a ajouté aux motivations des banques centrales à explorer des CBDC de détail, en particulier dans le but de donner accès à la monnaie de la banque centrale en cas d’urgence et de compléter les méthodes de paiement en espèces et en personne lorsque la distanciation sociale est requise. Des CBDC de détail ont été lancées aux Bahamas, dans les Caraïbes orientales et au Nigeria, et des projets pilotes de CBDC de détail sont en cours dans 14 autres juridictions. La question de savoir si une CBDC de détail, si elle est émise, changera l’utilisation de l’argent liquide sous sa forme physique, soit comme moyen de paiement, soit comme réserve de valeur, dépendra des décisions de la banque centrale quant à la conception de la CBDC et à la valeur perçue pour les ménages et les entreprises. 47 Voir le rapport Chainalysis, 2021. Carte 1 : Sandboxes, Innovations Hubs et Regtech Labs dans le monde 48 Source : Banque mondiale, 2020 48 How Regulators Respond to Fintech: Evaluating the Different Approaches—Sandboxes and Beyond, WBG 39 Graphique 11 : Prévalence des initiatives d’accompagnement règlementaire Fintech dans le monde Source : Banque mondiale et CGAP, “Innovation Facilitator Survey”. 2019 5.2. Cadre juridique Fintech 68. Le cadre juridique actuel développé par la BCEAO ne contient pas de règle spécifique relative aux institutions Fintech. Les règles qui sous-tendent le règlement des paiements dans l'UEMOA datant principalement du début des années 2000, elles ne contiennent pas de provisions prenant en compte spécifiquement les Fintech ou les produits numériques. Le règlement sur les EME, bien que réglementant la monnaie électronique, ne prend pas spécifiquement en compte les produits et acteurs Fintech. Les entreprises Fintech peuvent exercer des activités très diverses et utilisent des modèles commerciaux différents ceux des EME, avec notamment le recours à des plates-formes. Ces caractéristiques exigent des normes différentes de celles contenues dans l’Instruction EME. La législation en vigueur ne contient pas non plus de dispositions relatives aux cryptoactifs. 69. Le projet de loi bancaire contient une définition de la Fintech bancaire et soumet la catégorie à la supervision de la Commission Bancaire de l’UEMOA. Une Fintech bancaire exerce des activités bancaires au moyen de technologies innovantes. Elle est donc soumise à la loi bancaire car elle fournit des services bancaires. Les Fintech de paiement (qui ne sont pas définies par le projet de loi) devraient en principe être couvertes par la loi de paiements que prévoit la loi bancaire afin de réglementer de manière unitaire tous les services de paiement. Le projet de loi contient également une définition de laboratoire d'innovation financière. Selon le projet de loi, la BCEAO aura le pouvoir de mettre en place un laboratoire pour permettre aux entreprises proposant des produits financiers innovants de les tester dans un environnement protégé. Cette prévision nécessitera d’un règlement d'application. En revanche, le projet de loi ne contient aucune mention des cryptoactifs. On ne trouve aucune référence dans le projet au thème des cryptoactifs, ni aucune définition. La réforme de l'écosystème des paiements doit prendre en compte les aspects Fintech. En outre, l'accès au marché des produits et entreprises innovants doit être sécurisé afin de bénéficier pleinement à l'économie et à l'inclusion financière. En rendant les règles plus adaptées au numérique et plus sûres pour les consommateurs, il serait plus facile d’exploiter les synergies entre les start-ups hautement innovantes et les entreprises établies du secteur financier tout en faisant face aux risques associés. 70. Le Bali Fintech Agenda 2018 confirme qu’il est nécessaire moderniser les cadres juridiques pour fournir un paysage juridique favorable avec une plus grande clarté et certitude juridiques concernant les aspects clés des activités de fintech. Des cadres juridiques solides favorisent la confiance et la fiabilité des produits et services financiers. Cependant, cela est compromis lorsque les cadres juridiques ne parviennent pas à suivre le rythme de l'innovation fintech et de l'évolution des marchés financiers mondiaux. Un cadre juridique favorable peut être façonné en ayant des règles juridiques claires et prévisibles qui s'adaptent aux changements technologiques, adaptées aux circonstances nationales, en particulier dans des domaines tels que les contrats, la propriété des données, l'insolvabilité, la résolution et les paiements. Le cadre juridique devra tenir en considération aussi les aspects spécifiques du Fintech et les régler de façon consistante avec les principes généraux et lignes directrices existant en matière de surveillance de l’écosystème des paiements. Cela devra aussi inclure des réflexions sur l’opportunité de règlementer les cryptoactifs49. 5.3. Fondations de l’écosystème Fintech : Digital ID et Open Banking 71. Les systèmes d’identification numériques sont appelés à jouer un rôle clé dans l’accès aux services financiers dans la région UEMOA. En permettant aux individus de répondre aux exigences de e-KYC, l’identification représente une porte d’entrée clé pour les services financiers numériques. En assurant l’unicité des personnes, des systèmes d’identification robustes permettent également de faciliter la lutte contre le blanchiment de fonds et le financement du terrorisme et d’assurer une interopérabilité entre systèmes, comme ceux mis en place pour la collecte d’impôts. Par ailleurs, des systèmes d’identification interopérable au niveau régional facilitent des transactions transfrontalières, ce qui est particulièrement important en Afrique de l’Ouest, avec des migrations intrarégionales importantes. 72. Les systèmes nationaux d'identification dans la majorité des pays de l'UEMOA ne sont pas en mesure de soutenir les objectifs d’accès aux services financiers numériques en raison de faibles taux de pénétration. Afin de bénéficier des avantages importants des systèmes d’identification unique robustes et fiables, six pays de la région 50 participent au programme 49 Notamment pour éviter des situations comme celle à laquelle a pu être confrontée une autre banque centrale régionale. 50 le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Niger et le Togo 41 régional d’identification unique pour l’intégration régional et l’inclusion (WURI)51. Le programme vise la mise en place des systèmes d’identification de base dans ces pays avec pour objectif de fournir une preuve d’identité unique à 100 millions d’individus d’ici 2028. Ces identifiants de base ou fondamentaux contribueront notamment dans chaque pays à la numérisation des services offerts par les secteurs public et privé, et à améliorer la distribution des prestations sociales. L’implication de la Commission de la CEDEAO et un système de gouvernance régionale assurent l’interopérabilité régionale des systèmes nationaux et cette interopérabilité des identifiants entre les pays augmentera l'accès aux services transfrontaliers et contribuera à promouvoir l'intégration économique régionale. La Banque Centrale a initié une étude sur l’opportunité d’un identifiant unique pour le secteur financier dans la zone, mais doit rapidement prendre une position afin de lever cet obstacle à l’utilisation des services financiers numériques. 73. La BCEAO a commencé des travaux sur la mise en place de l’Open Banking dans la région. L’Open Banking transforme les services financiers dans les économies avancées. En donnant accès aux données détenues par les banques, les systèmes d’Open Banking permettent aux Fintech et autres innovateurs d’accéder aux données des clients, notamment aux données sur leurs transactions, et d’utiliser ces données pour développer de nouveaux produits et services mieux adaptés aux besoins de ces clients. Pour les pays émergents et en développement, l’Open Banking renferme la promesse de promouvoir l’innovation et de réduire les coûts de manière à rendre plus économiques les services aux segments mal desservis et non couverts par les services bancaires, et à offrir des produits et services mieux adaptés à leurs besoins. 5.4. Recommandations 74. Il convient de mettre en place un cadre juridique qui permette à l’innovation dans le secteur financier de se développer tout en protégeant la stabilité financière et les usagers et en donnant à la Banque Centrale la flexibilité nécessaire pour adapter les mesures de surveillance à l'évolution du marché. Il est donc nécessaire de déterminer si de nouvelles manières de fournir des services nécessitent également une nouvelle règlementation et des règles spécifiques. Bien que les discussions et travaux soient toujours en cours au niveau international, il est notamment recommandé de mener une réflexion sur l'utilisation des technologies décentralisées (DLT), qui non seulement favorisent la désintermédiation, mais qui peuvent influer sur la régulation des relations peer-to-peer. De même, les paiements instantanés soulèvent des questions relatives à la finalité immédiate du paiement : bien que le phénomène soit essentiellement technique, l'immédiateté de la finalité juridique devrait au moins en principe correspondre à l'immédiateté technique. Ces innovations peuvent donc avoir des effets tant sur 51 En 2021, le projet WURI a vu des progrès importants dans chaque pays. Notamment, la Guinée a développé sa propre plateforme d’identification en adaptant l’outil open source MOSIP, sur la base duquel le pays a mené un projet pilote d'enregistrement d'environ 8 000 personnes qui sera élargi dans les prochains mois. Le Togo a promulgué une loi pour créer « e-ID Togo », a mise en place une nouvelle agence pour le développer et l'exploiter. Au Benin, plus de 90 pour cent de la population sont déjà enregistrés et le pays vise la distribution de justificatifs d’identité dans les mois à venir. les aspects réglementaires que sur ceux strictement juridiques connectés à l'exécution des paiements. 75. Il est également nécessaire d'entreprendre une réflexion sur les cryptoactifs et cryptomonnaies, dans la mesure où il y a déjà des utilisateurs dans la région. Entamer des travaux n’implique pas de s’engager dans un projet de cryptomonnaie ou de légaliser les cryptoactifs, mais de développer au sein de la Banque Centrale les capacités et une vision stratégique, puis de proposer un cadre réglementaire pour les cryptoactifs. En effet, la BCEAO doit assumer le rôle de propulseur de l'innovation ainsi que de garant de sa sécurité. Au-delà des considérations de stratégie et politiques sur ce point, également du point de vue des compétences établies par la législation, le rôle de la BCEAO doit être clairement défini, ou du moins il doit être incontesté que son rôle en ce sens relève de ses fonctions de surveillance. La BCEAO devrait pouvoir assumer clairement le rôle de facilitateur de la modernisation, afin de pouvoir réguler de manière adéquate les différents phénomènes d'innovation, qui concernent parfois des services ou des acteurs non financiers selon une conception classique des activités financières, même avec de nouvelles formes de réglementation telles qu’un laboratoire comme prévu par le projet de loi. 76. Pour la mise en place de l’Open Banking dans la zone UEMOA , il est recommandé de prendre en compte cinq éléments pour s’assurer que l’Open Banking contribuera à l’inclusion financière :1. Qui est tenu de partager les données et qui peut y accéder ? 2. Quels sont les types de données partagés ? 3. Quels sont les secteurs d’activité couverts (par exemple, les services bancaires uniquement ou les services publics de distribution d’eau et d’électricité et les télécommunications) ? 4. L’initiation des paiements est-elle autorisée ou non dans le système ? 5. Qui supporte les coûts afférents au système (notamment pour chaque donnée échangée et pour la mise en place de l’infrastructure pertinente) ? Selon une étude du CGAP52, les réponses qui seront apportées à ces questions détermineront dans une mesure importante la capacité du système à atteindre les objectifs d’inclusion financière. Par exemple, plus les participants requis de partager les données ou autorisés à y accéder seront nombreux, plus large sera la palette de nouveaux services pouvant être développés, et plus marquée pourrait être la concurrence. De même, plus la gamme des données éligibles sera large, plus il y aura de chances que des produits intéressant les personnes à faible revenu puissent être développés. 52 Octobre 2020, OPEN BANKING : COMMENT L A CONCEVOIR EN VUE DE L’INCLUSION FINANCIÈRE 43 ANNEXE 1 : Impact des paiements instantanés sur les RTGS sur la base de l’enquête du CPMI53 L’enquête du CPMI peut fournir des éléments intéressants pour la BCEAO sur l’impact potentiel de la mise en place des paiements instantanés sur STAR-UEMOA. Sur les volumes de transactions dans le RTGS La majorité des répondants à l’enquête ont indiqué qu’ils voyaient une marge de manœuvre limitée pour la migration des paiements des systèmes RBTR vers les SPI. Cela pourrait toutefois changer si les limites de transaction SPI sont augmentées, si les critères de participation sont élargis, si davantage de systèmes passent au règlement en temps réel et/ou si le coût relatif des transactions SPI diminue. Quelques juridictions (Hong Kong, Royaume Uni and Singapore) ont indiqué qu’elles n’avaient constaté aucune tendance observable dans les premières étapes de leur SPI suggérant qu’elles cannibalisaient les transactions des systèmes RTGS. Certaines juridictions considèrent qu’il est trop tôt pour évaluer l’ampleur de tout effet de substitution, car les SPI sont encore dans une « phase de montée en puissance ». D’autres juridictions (AR, IN, JP et KR) estiment que les deux systèmes visent différents types d’utilisateurs et sont donc peu susceptibles d’être considérés comme des substituts. Cependant, des preuves anecdotiques sur les cas d’utilisation de TARGET2 suggèrent que certains paiements (en particulier mt 103) et les paiements instantanés peuvent se substituer l’un à l’autre. Un petit nombre de répondants (par exemple AU et SE) constatent une migration naturelle d’une partie des paiements RBTR vers les SPI. Sur les heures d’ouverture du RTGS Les systèmes RTGS offrent le lieu de règlement interbancaire des opérations de paiement rapide et la fourniture de liquidités au SPI. Les implications pour les heures de fonctionnement du RTGS peuvent varier en fonction du choix du modèle de règlement dans le SPI. Si le règlement interbancaire d’un FPS (règlement SPI) a lieu en temps réel (ce qui est de plus en plus le cas pour le SPI), les heures de fonctionnement du RTGS devront peut-être être ajustées, mais il existe d’autres alternatives: − Lorsque le règlement SPI est effectué via les comptes RTGS de la Banque Centrale des participants, le système RTGS devra adopter des heures de fonctionnement similaires (presque) 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 au SPI pour prendre en charge le traitement continu des transactions SPI. − Alternativement, le règlement SPI peut se faire par le biais d’un système de règlement en temps réel « satellite ». Dans ce cas, le système satellitaire doit avoir les mêmes heures de fonctionnement (presque) 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 que le SPI, bien que le système RTGS de base n’ait pas besoin. − Lorsqu’un SPI du secteur privé effectue des règlements interbancaires (presque) 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 sur son grand livre privé, dont le processus repose sur l’existence de soldes dans un compte détenu par le SPI (ou son agent désigné) au système RTGS au profit de tous les participants au SPI, cela peut atténuer la nécessité d’allonger les heures d’ouverture du RTGS. Si le SPI utilise DNS, il peut également ne pas être nécessaire de modifier les heures de fonctionnement du système RTGS. Toutefois, cela entraînerait une accumulation du risque de règlement parmi les participants au SPI au cours de la période pendant laquelle le système RTGS est fermé et aucun règlement interbancaire ne peut avoir lieu. Plus généralement, les arguments en faveur de l’alignement des heures de fonctionnement du système 53 Source : CPMI, December 2021 RTGS et du SPI dépendront d’une série de facteurs, notamment : − La capacité de prévoir de manière fiable les transactions SPI, ce qui peut être plus facile sur les marchés où les limites de taille des transactions individuelles et/ou la valeur totale des transactions dans un SPI reste relativement faible. Plus la prévisibilité est grande, plus le cas d’extension et d’alignement des heures de fonctionnement est faible. − Les dispositifs de fourniture de liquidités, les conditions générales de liquidité sur le marché monétaire et l’utilisation concurrente potentielle de ces liquidités à d’autres fins (telles que le règlement de titres) en dehors des heures d’ouverture du RTGS. Entre autres choses, une demande de liquidité plus élevée à d’autres fins peut accroître les arguments en faveur de l’alignement des heures de fonctionnement entre un SPI et le système RTGS. Par exemple, en Australie, le service de règlement rapide de la RBA fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, 365 jours par an, bien que son système RTGS de base RITS ne le fasse pas. Un arrangement dans le système RTGS, ou un autre arrangement avec la Banque Centrale, peut encore être nécessaire pour qu’un participant puisse recharger les soldes du SPI au RTGS (et donc le niveau de liquidité disponible pour le participant sur le grand livre privé) en dehors des heures d’ouverture du RTGS. La disponibilité d’un large éventail de données sur les paiements serait une condition préalable à l’élaboration de prévisions fiables pour les transactions SPI. De nombreuses juridictions se caractérisent actuellement par une liquidité très abondante pour les banques. Si les conditions de liquidité se resserrent, la gestion de la liquidité sur RTGS deviendra plus urgente. Développements dans les paiements rapides de détail et implications pour les systèmes RTGS – Décembre 2021 19 − Les réponses à l’enquête suggèrent également que, compte tenu des modifications apportées aux heures de fonctionnement du système RTGS, il est important d’impliquer tous les participants. En effet, l’augmentation des heures d’ouverture entraînera des coûts opérationnels supplémentaires pour la Banque Centrale et les participants au RTGS. Enfin, il peut y avoir des synergies et des interactions potentielles entre les considérations relatives aux paiements rapides (nationaux) et celles relatives aux paiements transfrontaliers. Les heures d’ouverture prolongées d’un système RTGS pourraient faciliter les deux types de paiements, bien que les défis potentiels puissent différer selon le type de paiements qui utilisent la fenêtre étendue. Sur les dates de valeur L’introduction d’un traitement rapide des paiements 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, a des implications importantes pour la datation de la valeur des transactions. Les utilisateurs finaux s’attendent naturellement à ce qu’un paiement envoyé via un SPI ait la même date de valeur pour les aspects débit et crédit de la transaction, et que cette date corresponde au moment de la disponibilité des fonds pour le bénéficiaire. Cependant, cela n’est pas toujours réalisable dans la pratique. Par exemple, il y a aussi des moments où les comptes de règlement de PSP ne peuvent pas être immédiatement mis à jour en raison de restrictions sur le traitement du jour au lendemain. Une complexité supplémentaire dans les juridictions qui traversent les fuseaux horaires est qu’un paiement initié aujourd’hui dans un fuseau horaire peut être reçu le lendemain dans un autre fuseau horaire (ou vice versa), même si le traitement rapide du paiement réel est terminé en quelques secondes. Il y a aussi des cas où les banques ont exprimé des préoccupations quant à l’utilisation abusive possible du SPI par les entreprises clientes à des fins d’arbitrage d’intérêts. Les différences de fuseau horaire et les heures limites bancaires variables pour les accumulations d’intérêts sur les comptes clients offrent la possibilité pour les soldes au jour le jour de gagner des intérêts pour un jour donner plus d’une fois 45 (par exemple, si les fonds sont transférés d’une banque à une autre immédiatement après l’heure limite de calcul des intérêts de la première banque). Annexe 2 : Etude sur les envois de fonds des travailleurs migrants vers la zone UEMOA, sur la base des données Banque mondiale 47 49