S�RIE : SANT�, NUTRITION et POPULATION




L'Assurance maladie en
Afrique francophone
Am�liorer l'acc�s aux soins et lutter
contre la pauvret�

Gilles Dussault, Pierre Fournier, Alain Letourmy, �diteurs


L'Assurance maladie en
Afrique francophone


S�rie : Sant�, Nutrition et Population




L'Assurance maladie en
Afrique francophone :
Am�liorer l'acc�s aux
soins et lutter contre
la pauvret�

Gilles Dussault, Pierre Fournier,
Alain Letourmy, �diteurs




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Washington, DC

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ISBN-13 : 978-0-8213-6617-2 DOI : 10.1596/978-0-8213-6617-2

                                                                 Sommaire




Avant-propos                                                                     ix


Remerciements                                                                   xiii


Acronymes                                                                        xv


R�sum�                                                                          xvii


Introduction                                                                      1



Partie 1         Assurance maladie et financement de la sant�

1   Assurance maladie : Un cadre g�n�ral d'analyse en vue de son implantation
    dans les pays d'Afrique francophone                                          13

    Alain Letourmy


2   Aspects pratiques du montage et du fonctionnement de l'assurance maladie en
    Afrique francophone                                                          53

    Alain Letourmy


3   Expansion des programmes gouvernementaux d'assurance maladie obligatoire en
    Afrique du l'Ouest � Possibilit�s et contraintes                             89

    Alexander Preker, Edit Velenyi


4   Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me
    de financement                                                              149

    Guy Carrin, Chris James, David Evans


5   Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux    163

    Jacky Mathonnat, Martine Audibert

                                                                                  v

vi � Sommaire



Partie 2        Couverture du risque maladie : �tat des lieux

6  Couverture du risque maladie en Afrique francophone : �tat des lieux,
   d�fis et perspectives                                                         197

   Jean-Pierre Sery, Alain Letourmy


Sous-partie 2.1 L'assurance maladie obligatoire

7  L'assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours  229

   Alain Letourmy, Oumar Ouattara


8  La couverture du risque maladie en Afrique francophone : �tude compar�e
   des projets de couverture universelle des soins en C�te d'Ivoire et au Gabon  263

   Jean-Pierre Sery


9  R�forme du financement de la sant� au Kenya : �valuation de la proposition
   d'assurance maladie                                                           285

   Guy Carrin, Chris James, Ole Doetinchem


Sous-partie 2.2 Les mutuelles

10 Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique                            311

   Pascal N'diaye


11 Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro assurance maladie    331

   Bruno Galland



Partie 3        L'expansion de la couverture

Sous-partie 3.1 Les relations de l'assurance maladie avec l'offre
                    de soins

12 Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services :
   Une interaction dynamique                                                     353

   Bart Criel, Pierre Blaise, Daniel Ferette


13 L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue                      373

   Eric de Roodenbeke

                                                                        Sommaire �vii



Sous-partie 3.2 Protection sociale, assurance maladie et lutte
                     contre la pauvrete

14 La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret�      401

   Slim Haddad, Florence Morestin


15 Les fonds d'equit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant�
   des plus pauvres en Afrique ?                                                  431

   Mathieu Noirhomme, Jean-Marc Thom�



Partie 4        Perspectives

16 L'assurance maladie obligatoire : Transition vers la couverture universelle
   et �valuation de la performance                                                455

   Guy Carrin, Chris James


17 Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone                501

   Pierre Fournier, Caroline Tourigny


18 Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit�
   et relation positive vis-�-vis de la croissance                                521

   Pascal Brouillet


Pr�sentation des �diteurs et contributeurs                                        549


                                                 Avant-propos



Cet ouvrage para�t au moment o� les pays africains s'appr�tent �
adopter une strat�gie r�gionale pour un financement de la sant� plus
�quitable, plus efficient et plus p�renne1. Cette d�cision survient alors
que le constat est fait que l'atteinte des Objectifs du Mill�naire pour le
D�veloppement en sant� exigera des ressources financi�res beaucoup
plus importantes que celles dont les pays disposent actuellement. Il ne
suffira pas d'augmenter les sommes disponibles pour la prestation de
services de sant�, mais aussi et surtout assurer que ces fonds soient
allou�s et d�pens�s de fa�on efficiente. Les pays devront d'abord
appliquer l'engagement, pris collectivement � Abuja en 2001, de con-
sacrer 15% du budget national � la sant�. Pour la plupart, cela ne suf-
fira pas � couvrir les besoins minimaux identifi�s par la Commission
Macro�conomie et Sant� (2000), et ils devront mobiliser l'aide
ext�rieure. Cela s'impose d'autant plus que la majorit� des pays de la
r�gion font face � la fois au poids des maladies transmissibles, notam-
ment le SIDA, le paludisme et la tuberculose, ainsi qu'au fardeau
croissant des maladies chroniques pour lesquelles la capacit� de
r�ponse des services de sant� n'est pas encore en place.
   Si la mobilisation des fonds est incontournable, il est tout aussi
imp�rieux qu'elle s'accompagne d'un renforcement des syst�mes de
sant�. Les pays, et leurs partenaires internationaux, doivent s'attaquer




1A l'occasion de la 56 �me session du Comit� r�gionale pour l'Afrique
de l'Organisation mondiale de la sant�, 28 Aout � 1 Septembre 2006 �
Adis Abeba.

                                                                        ix

x � Avant-propos



aux probl�mes d'organisation et gestion des services de sant�. Les
d�fis sont grands et les solutions sont connues, mais pas facilement
appliqu�es : les plus importants sont : (1) pallier � la fragmentation des
syst�mes de sant�, en g�rant de fa�on holistique leurs diff�rentes com-
posantes, en particulier les sous-syst�mes des ressources (humaines,
financi�res et technologiques) et de prestation des soins et services
(promotionnels, pr�ventifs, curatifs et de r�habilitation), tout en
r�alisant les programmes de sant� prioritaires. Il faut s'attaquer
particuli�rement � la crise des personnels de sant�, en nombre nettement
insuffisant, distribu�s de fa�on d�s�quilibr�e, et d�bord�s par des
charges de travail toujours plus grandes, souvent dans des mauvaises
conditions de travail et de r�mun�ration, conduisant � la d�motiva-
tion, � l'abandon du secteur ou m�me � l'immigration; (2) renforcer
les capacit�s institutionnelles et humaines des services au niveau local,
assurer l'implication ad�quate des communaut�s dans la gestion de
leurs probl�mes de sant�, et reconna�tre les r�les d'autres acteurs tels
que les ONG et le secteur priv�; (3) renforcer le r�le de leadership
des gouvernements, promouvoir le dialogue et l'harmonisation des
interventions des partenaires et donateurs en appui � la mise en oeuvre
des politiques et plans nationaux de sant�; (4) renforcer la capacit� de
gestion pour une utilisation plus efficiente des ressources pour la pro-
duction de r�sultats tangibles en termes de couverture sanitaire et
d'am�lioration de l'�tat de sant� des populations, et pour que les ser-
vices atteignent ceux qui en ont le plus besoin.
   Ce dernier point est particuli�rement critique : les pays doivent
mieux d�penser les ressources qu'ils consacrent � la sant�. Comme le
r�sument Preker et Velenyi dans cet ouvrage, les pays doivent s�rieuse-
ment se pencher sur les questions suivantes au moment d'utiliser leurs
ressources : pour qui acheter? Que faut-il acheter? De qui acheter? �
quel prix acheter? Comment payer? Cela veut dire d�penser sur les
interventions dont le rapport co�t-efficacit� a �t� bien �tabli, et mieux
aligner les d�penses et les besoins, ce qui exige un meilleur ciblage des
plus pauvres. On constate que les services sont proportionnellement
plus utilis�s par les fractions plus ais�es de la population, pour des
raisons d'acc�s physique plus facile, parce qu'elles sont mieux infor-
m�es et plus nanties. Des efforts importants seront requis pour mieux
servir ceux qui sont actuellement exclus, et l'assurance est un m�canisme
qui peut jouer un r�le d�terminant � cet �gard.

                                                        Avant-propos � xi



   En plus de contribuer � am�liorer l'acc�s aux soins et services de
sant�, la couverture du risque maladie par l'assurance peut jouer un
r�le important dans la lutte contre la pauvret�. Comme l'indiquent
plusieurs contributions � ce livre, les cons�quences �conomiques de la
mauvaise sant� peuvent avoir un effet majeur d'aggravation de l'ap-
pauvrissement, surtout chez les populations d�j� d�munies ou celles
vivant tout juste au dessus du seuil de pauvret�, emp�chant ainsi les
premi�res de sortir de leur �tat, et entra�nant les secondes dans la pau-
vret�. Le manque � gagner engendr� par la mauvaise sant� qui
emp�che de travailler, ou pire, le d�c�s pr�matur� du pourvoyeur de
ressources pour la famille, de m�me que les co�ts directs et indirects
des soins, ponctionnent des ressources d�j� tr�s limit�es au d�triment
d'autres besoins fondamentaux cr�ant un endettement dont il devient
difficile de sortir. L'assurance offre une protection sociale � peu de
frais � ceux qui ont des revenus r�guliers et peut �tre rendue accessible
aux plus pauvres � travers des subventions dont les co�ts sont aussi
abordables.
   Les auteurs de l'Assurance maladie en Afrique francophone font
donc oeuvre utile en proposant un �tat des lieux de la couverture du
risque maladie par l'assurance dans les pays francophones de la R�gion.
Ils montrent clairement que les populations, y compris les plus pau-
vres, consacrent une partie importante de leurs faibles revenus aux
soins, sans pour autant avoir la garantie d'un acc�s continu, ni celle
d'obtenir des soins de qualit�. Le probl�me se pose donc de savoir
comment faire en sorte que ces ressources, m�me faibles, soient mieux
utilis�es. Ce livre montre que dans plusieurs pays, des efforts sont faits
en ce sens : la plupart encouragent le d�veloppement des assurances
communautaires, certains ont commenc� � �tendre l'assurance maladie
obligatoire, d'autres envisagent m�me le passage � l'assurance pour
tous. Les r�sultats de ces efforts ont �t� modestes � ce jour, du fait
m�me de la faible capacit� financi�re des m�nages et des �tats.
   Mais au-del� de l'obstacle financier, il y a aussi le manque de
familiarit� des populations et des gouvernements avec les diverses
strat�gies de financement, dont l'assurance peut �tre un des piliers. La
mise en commun des ressources est une strat�gie efficace de couverture
du risque maladie et de pr�vention des effets appauvrissants de la
mauvaise sant�. De nombreux pays plus riches l'ont adopt�e, en
g�n�ral au prix d'efforts sur de longues p�riodes. La mise en place de

xii � Avant-propos



ce type de protection exige � la fois des comp�tences techniques
avanc�es, non encore disponibles dans la plupart des pays africains, et
un fort soutien de la part des populations. Ce soutien, comme
l'exp�rience des pays riches l'indique, n'est acquis qu'apr�s de longues
ann�es de plaidoyer et d'appui des dirigeants politiques, tant du
secteur de la sant�, que d'autres secteurs-cl� comme les finances, la
fonction publique et la planification. Dans le contexte africain actuel,
l'appui financier et technique des partenaires internationaux demeure
n�cessaire.
   Nous recommandons aux d�cideurs et � leurs partenaires de lire
attentivement les chapitres qui tirent les le�ons des exp�riences inter-
nationales sur les conditions de r�ussite de la mise en place d'une cou-
verture assurantielle efficace, celle qui offre un acc�s �quitable � des
services de qualit�, au moment o� ils sont requis. Nous recomman-
dons aussi la lecture des chapitres qui font le bilan des exp�riences
concr�tes men�es dans les pays. Il y a beaucoup � apprendre des succ�s
et �checs pass�s, et c'est justement ce que la nouvelle strat�gie
africaine pour le financement de la sant� cherche � faire. Nous avons
maintenant une id�e claire de ce qu'il faut faire, mais comme toujours
le grand d�fi sera celui de la mise en oeuvre. Un premier pas sera la
mobilisation des professionnels qui ont commenc� � s'investir dans le
d�veloppement de l'assurance sous ses diverses formes. Avec eux, il
faudra mobiliser le soutien des populations pour des r�gimes de soli-
darit� d'un type nouveau pour elles, en construisant la confiance sans
laquelle ces m�canismes ne pourront pas �tre p�rennis�s. Les condi-
tions de cette confiance sont une gestion professionnelle, transparente
et int�gre, un encadrement l�gal et institutionnel appropri�, et pen-
dant encore un bon nombre d'ann�es, un appui financier et technique
soutenu.
   Les pays africains doivent se doter de strat�gies de financement de
la sant� efficaces selon leur r�alit� �conomique, sociale et culturelle; il
faut que leurs efforts soient soutenus par les partenaires au d�veloppe-
ment, pour qu'ensemble nous contribuions � assurer aux Africains ce �
quoi tous les citoyens du monde ont droit, un acc�s �quitable aux soins
de sant� de qualit�.

Lu�s Gomes Sambo
M�decin, Sp�cialiste de sant� publique
Directeur r�gional de l'Organisation mondiale de la sant� pour l'Afrique

                                              Remerciements



La publication de cet ouvrage doit beaucoup � l'appui de plusieurs
organisations, tout autant qu'aux contributions de nombreux col-
l�gues, � qui nous exprimons toute notre reconnaissance. Nous tenons
� remercier :

� L'Institut multilat�ral d'Afrique, ses directeurs qui nous ont appuy�
  (Michel Dessart, Michael Bauer, Karin Millet) et le personnel qui a
  facilit� la r�alisation des ateliers et autres activit�s qui ont conduit �
  la production de cet ouvrage (Bonita Freeman, Im�ne Kechine,
  Warda Grais) ;

� La Banque mondiale (Alex Preker, Mark Ingebretsen, Paola Scal-
  abrin) qui ont soutenu ce projet et facilit� sa r�alisation ;

� Les gouvernements fran�ais, n�erlandais, le R�seau de recherche en
  sant� des populations du Qu�bec, qui ont fourni une aide financi�re
  � diverses �tapes de ce projet ;

� L'Organisation mondiale de la sant� pour sa collaboration technique
  soutenue ;

� Le R�seau ESPAP du Coll�ge des Economistes de la sant� et son
  Secr�taire G�n�ral, Philippe Ulmann qui a �t� un alli� pr�cieux
  depuis 2004, et les membres de son �quipe, Diane Maugeis de Bour-
  guesdon et Hassan Serrier;

� Les �valuateurs, dont les commentaires et suggestions nous ont
  beaucoup aid� : Jean-Jacques de Saint-Antoine (Banque mondiale),
  Miloud Kaddar (OMS-Gen�ve), Laurent Aventin (minist�re des


                                                                        xiii

xiv � Remerciements



   Affaires �trang�res � Paris), Maryam Bigdeli (OMS Cambodge),
   Bruno Boidin (Universit� de Lille I), Yves-Antoine Flori  (Univer-
   sit� de Bordeaux II) , G�rard Foulon (UEMOA), Christian Gericke
   (Universit� de Technologie de Berlin), Pierre Pigeon (Groupe
   Mutuelle Sociale Atlantique - Saintes), Herv� d'Oriano (minist�re
   des Affaires �trang�res � Paris) ;

� Nous souhaitons exprimer des remerciements tout particuliers � nos
   coll�gues et amis Africains des 15 pays qui ont particip� aux travaux
   qui ont inspir� ce livre. Ils sont pr�s d'une centaine et se recon-
   na�tront sans que nous ayons besoin de les nommer tous. C'est � eux
   que ce livre est d�dicac�.


                          Gilles Dussault, Pierre Fournier, Alain Letourmy

                                              Acronymes



AfD :    Agence fran�aise de d�veloppement
ALD :    Affection de longue dur�e
AMO :    Assurance maladie obligatoire
AMU :    Assurance maladie universelle
AMV :   Assurance maladie volontaire
ASACO : Association de sant� communautaire
CERMES : Centre de Recherche � M�decine, maladie, sciences et
        soci�t� �
CES :    Coll�ge des �conomistes de la Sant�
CIDR :   Centre International D�veloppement et Recherche
CMU :    Couverture maladie universelle
CNRS :  Centre National de la Recherche Scientifique
CSCOM : Centre de sant� communautaire
CSSP :  Centre de soins de sant� de pr�fecture
ESPAD :  �conomie de la Sant� dans les Pays en D�veloppement
FNMF :  F�d�ration nationale de la Mutualit� fran�aise
GS :    Garantie sant�
IMA :   Institut multilat�ral d'Afrique
IMF :   Institution de Microfinance
IPM :   Institution de pr�voyance maladie
MAE :    Minist�re des Affaires �trang�res (France)
NHS :   National Health Service (Service national de sant�
        britannique)
OMS :    Organisation mondiale de la sant�
ONG :    Organisation non gouvernementale
PED :    Pays en d�veloppement


                                                             xv

xvi � Acronymes



PIB :      Produit int�rieur brut
RAM :      R�gime d'assurance maladie
RAMUS :    R�seau d'appui aux mutuelles de sant�
SAMV :     Syst�me d'Assurance Maladie Volontaire
UTM :      Union technique de la mutualit� malienne
VIH :      Virus immunod�ficitaire humain
WBI :      Institut de la Banque mondiale
WTP :      Willingness to pay (volont� � payer)

                                                         R�sum�

                                 Diane Maugeis de Bourguesdon,
                              Hassan Serrier et Philippe Ulmann




PARTIE 1 : ASSURANCE MALADIE ET FINANCEMENT DE LA SANT�

La premi�re partie de l'ouvrage est consacr�e � une pr�sentation
g�n�rale des probl�matiques de l'assurance maladie et du financement
de la sant� dans les pays d'Afrique francophone.
   Le chapitre 1 de Letourmy, qui constitue une sorte d'introduction �
l'ouvrage montre que la promotion de l'assurance maladie en Afrique
de l'Ouest vise l'introduction d'une activit� de services nouvelle dans
ces pays. Pour mener sa d�monstration, l'auteur rappelle les principes
g�n�raux de l'assurance, puis les conditions particuli�res de son fonc-
tionnement pour la couverture du risque de maladie. Pour tenir
compte des particularit�s du terrain, il pose les questions de la
demande d'assurance en Afrique de l'Ouest, des populations �ligibles
et du panier de soins � couvrir. Enfin, en fonction de la vari�t� des
formes possibles d'organisation de l'activit�, Letourmy analyse les
possibilit�s d'offre d'assurance maladie. Vu l'�troitesse du march�
potentiel, ce sont les formes solidaires qui retiennent l'attention,
qu'elles soient obligatoires ou volontaires.
   Dans le chapitre 2, Letourmy aborde la question du montage pratique
de r�gimes d'assurance maladie obligatoire et de mutuelles de sant� qui
constitue un d�fi pour les pays d'Afrique de l'Ouest. Il doit respecter


                                                                    xvii

xviii � R�sum�



certains principes g�n�raux et permettre l'exercice de fonctions tech-
niques n�cessaires � la bonne marche de l'assurance. Ces principes et ces
fonctions sont d�crits en tirant les enseignements d'exp�riences con-
cr�tes. Les diff�rences entre r�gimes obligatoires et volontaires sont
examin�es. La question du choix entre ces deux formes de couverture
est pos�e. La mise en place de contrats avec les formations de soins est
pr�sent�e comme une d�marche in�vitable pour les r�gimes ou les
organisations de micro assurance. Enfin, Letourmy recense les facteurs
de succ�s de la d�marche de montage, en s'interrogeant en particulier
sur le r�le de l'�tat.
   Dans le chapitre 3, Preker et Velenyi passent en revue le r�le r�cent
des programmes gouvernementaux d'Assurance Maladie Obligatoire
(AMO) comme une des sources alternatives de financement des ser-
vices de sant� en Afrique. Des d�penses directes et une aide des dona-
teurs importantes ont pouss� les pays d'Afrique � exp�rimenter l'assu-
rance priv�e volontaire et les programmes gouvernementaux d'AMO.
Mais ces pays se heurtent � de nombreuses difficult�s concernant les
trois fonctions fondamentales du financement de la sant� (collecte de
fonds, gestion des risques et achat), mais aussi l'environnement institu-
tionnel, la structure organisationnelle des fonds d'assurance maladie et
les caract�ristiques de gestion des fonds d'assurance maladie dans les
pays � faibles revenus. Les auteurs reviennent ensuite sur l'historique
du r�le de l'�tat : peu engag� initialement, l'�tat a progressivement
d�velopp� une mainmise sur le financement des soins de sant�, puis
s'est peu � peu d�gag� avec le retour du N�olib�ralisme dans les ann�es
90. Aujourd'hui l'�tat a un nouveau r�le d'intendance. Avec l'introduc-
tion d'un syst�me public d'AMO, beaucoup de gouvernements
esp�rent pouvoir fournir un meilleur acc�s aux soins de sant�,
am�liorer la protection financi�re face au co�t de la maladie et �tre
plus � l'�coute des besoins des populations. L'AMO est introduite soit
pour une petite frange de la population qui peut se permettre de payer,
soit pour une frange plus large de la population en subventionnant la
prime des pauvres. Les auteurs d�taillent ensuite les difficult�s sp�ci-
fiques aux pays � faibles revenus dont les gouvernements doivent tenir
compte dans leurs choix relatifs au financement des soins de sant�. Une
gamme de d�cisions doit �tre prise � l'�gard de quatre aspects de l'envi-
ronnement institutionnel pour l'assurance maladie publique : le cadre
l�gal, les instruments de r�gulation, les proc�dures administratives et
les coutumes et pratiques formelles ou informelles. En ce qui concerne

                                                              R�sum� � xix



les structures organisationnelles, l'int�r�t doit se porter sur la forme
organisationnelle, le r�gime de motivations et le degr� d'int�gration
verticale/horizontale par rapport � la diff�rentiation du nouveau sys-
t�me. Dans un syst�me d'assurance maladie fonctionnant bien il existe
beaucoup d'interactions et de compl�mentarit� entre les niveaux dif-
f�rents de gestion (macro ou d'intendance, meso ou de gouvernance,
micro, du m�nage ou de l'individu) et simultan�ment une division
claire des responsabilit�s et de l'imputabilit�. Les auteurs concluent sur
les controverses qui entourent toujours l'introduction de programmes
publics d'AMO dans le monde. C'est pourquoi l'approche multiforme
combinant divers instruments semble avoir plus de chances d'atteindre
les objectifs fix�s, � savoir mobiliser des ressources pour payer pour les
services n�cessaires, prot�ger les populations contre le risque financier
et d�penser judicieusement sur les prestataires.
   Dans le chapitre 4, Carrin, James et Evans �tudient la transition vers
la couverture universelle � travers le syst�me de financement. La cou-
verture universelle suppose un acc�s �quitable et une protection contre
le risque financier, et repose �galement sur la notion de financement.
Pour l'instaurer, il faut faire des choix � propos des trois �l�ments qui
constituent le syst�me de financement des services de sant� : collecte
des fonds, mise en commun des ressources, et achat. Les pays qui ont
atteint la couverture universelle ont mis en place des syst�mes de pr�-
paiement qui reposent soit sur la fiscalit�, soit sur un r�gime d'assu-
rance maladie obligatoire, soit sur les deux � la fois. La transition vers
la couverture universelle peut prendre plusieurs ann�es, voire plusieurs
dizaines d'ann�es. Elle peut �tre acc�l�r�e ou facilit�e par : une forte
croissance �conomique ; l'essor du secteur structur� ; un personnel
qualifi� capable d'administrer un syst�me national ; l'adh�sion de la
soci�t� au principe de solidarit� ; la bonne gestion des affaires
publiques ; et la confiance que la population fait au gouvernement. Il
est rare que la totalit� des d�penses de sant� soient couvertes par le
pr�paiement. La plupart des syst�mes pr�voient donc, � un degr� ou �
un autre, la participation aux frais ou la r�mun�ration � l'acte par les
particuliers. Aucun syst�me de financement n'est meilleur que les
autres en toutes circonstances. Quel que soit le type de m�canisme
retenu, des choix importants doivent �tre faits concernant l'efficacit�
administrative et la transparence, la stabilit� du financement, l'�quit�,
la mise en commun et l'achat. Le choix entre les diff�rents m�canismes
de financement se fait en fonction du contexte structurel, qui permet

xx � R�sum�



de s'appuyer ou non sur les institutions existantes. La situation
�conomique est �galement un facteur important. Un syst�me bas� sur
l'imp�t semblera tr�s indiqu� quand l'�conomie est solide et la crois-
sance forte. Par contre, un syst�me d'assurance maladie obligatoire
semblera mieux convenir en p�riode prolong�e de restrictions budg�-
taires. Pour conclure, les auteurs expliquent que le pr�paiement, la
mise en commun des ressources et la r�partition des risques sont les
principes de base pour garantir l'acc�s aux services et la protection
financi�re. La couverture universelle n'est r�alisable que s'il existe des
institutions qui mettent en commun les fonds vers�s � l'avance et qui
s'en servent pour fournir les services de fa�on efficiente et �quitable.
Les pouvoirs publics ont �galement un r�le important � jouer.
   Dans le chapitre 5, Mathonnat et Audibert se posent la question du
choix des instruments de financement ext�rieur (aide projet, aide pro-
gramme, affectation, aide budg�taire globale) mobilisables pour
apporter une aide au secteur de la sant�, et des enjeux sous-jacents.
Une revue de la litt�rature r�cente concernant les effets de l'aide sur la
croissance permet aux auteurs d'apporter un premier �clairage sur la
probl�matique. Les auteurs �tudient ensuite les avantages et incon-
v�nients des diff�rents instruments de financement ext�rieur. L'affec-
tation de l'aide au secteur de la sant� est sujette � des critiques dont un
argument essentiel concerne la fongibilit�. Ce raisonnement semble
toutefois plus pertinent dans les pays � revenu interm�diaire en
Afrique Sub-Saharienne et hors Afrique. Bien que vivement contest�e,
l'aide projet pr�sente plusieurs avantages qu'il semble important de ne
pas oublier. L'aide programme est pr�f�rable � l'aide projet lorsqu'il
s'agit d'intervenir au niveau des fonctions essentielles de sant�
publique ou lorsqu'il s'agit de r�formes institutionnelles ou organisa-
tionnelles qui vont au-del� de quelques structures. L'aide budg�taire
globale, elle, se pr�sente sous la forme d'un appui budg�taire non
cibl�. Son efficacit� peut �tre remise en question si les institutions
locales sont faibles, si elle ne s'accompagne pas d'une conditionnalit�
sectorielle ou encore lorsque le financement des d�penses de sant� au
moment appropri� n'est plus assur�. Les auteurs se demandent ensuite
s'il est pr�f�rable de financer l'appui au secteur de sant� par des dons
ou par des pr�ts. En th�orie un financement par pr�ts est plus efficient
qu'un financement par don car il poss�de un pouvoir incitatif. Mais
aucune �tude empirique ne confirme cet argument. A ces effets directs
viennent s'ajouter des effets macro-�conomiques. L'aide serait plus

                                                             R�sum� � xxi



volatile que les recettes fiscales, ce qui aurait pour cons�quence des
r�percussions n�gatives sur le financement budg�taire des d�penses de
sant�. Par ailleurs, l'impact des dons sur la mobilisation des recettes
fiscales diff�re de celui des pr�ts. L'aide sous forme de dons tend �
entra�ner une baisse des recettes fiscales, et le fl�chissement est plus
prononc� dans les pays o� les institutions sont les plus faibles. Il est
n�cessaire d'int�grer dans le choix d'un instrument d'aide au secteur
sant� une r�flexion approfondie sur les incitations. La conditionnalit�
� ex-post � est globalement pr�f�r�e � la conditionnalit� � ex-ante �.
Il appara�t toutefois judicieux plut�t que d'abandonner un proc�d� au
profit de l'autre d'effectuer un dosage entre ceux-ci.



PARTIE 2 : COUVERTURE DU RISQUE MALADIE : �TAT DES LIEUX

La seconde partie de l'ouvrage permet de dresser un �tat des lieux du
financement de la sant� dans les pays d'Afrique francophone. Apr�s un
chapitre introductif pr�sentant un bilan des diff�rents syst�mes de
couvertures d'assurance maladie, une premi�re sous-partie est con-
sacr�e � l'assurance maladie obligatoire et la seconde aux mutuelles.
   Dans le chapitre 6, Sery et Letourmy r�alisent une photographie
actuelle des syst�mes de couverture maladie existant en Afrique fran-
cophone. Dans cette r�gion, l'environnement ne permet pas une
mobilisation interne des ressources financi�res, ce qui pousse les �tats
� recourir � l'aide ext�rieure et � mettre � contribution les populations
de mani�re importante. Les syst�mes de couverture maladie en
vigueur dans les pays africains francophones sont divers mais ne sont
pas tr�s d�velopp�s. Les r�gimes obligatoires ne couvrant que 15 �
30 % de la population africaine, les autres couches de la population
n'ont d'autres choix que de recourir aux syst�mes de couverture spon-
tan�s. Le mouvement mutualiste a ainsi enregistr� des avanc�es nota-
bles dans certains pays comme le Mali et le S�n�gal, mais se heurte
toujours � certaines difficult�s comme la faiblesse du niveau de
financement du secteur ou le b�n�volat des administrateurs des
mutuelles. Les gouvernants souhaitent instaurer une couverture uni-
verselle pour favoriser une plus grande dispersion du risque et ainsi
�largir la taille des r�gimes d'assurance � l'�chelle nationale. La C�te
d'Ivoire et le Gabon ont d�cid� de retenir l'option de l'assurance
obligatoire, car selon eux le citoyen a les capacit�s financi�res pour

xxii � R�sum�



s'acquitter d'une cotisation d'assurance, et de plus une telle assurance
� l'�chelle nationale pourra permettre de r�duire la fraude sur les
r�gimes existants. Tous les autres pays de la zone ont pr�f�r� faire la
promotion des syst�mes de pr�paiement des soins, dans la perspective
de l'extension de la couverture sociale � toute la population. Pour y
arriver, diverses strat�gies ont �t� mises en place, comme l'�largisse-
ment du mouvement mutualiste par la cr�ation de nouvelles mutuelles
dans d'autres zones du pays, ou encore l'am�lioration de l'environ-
nement institutionnel des mutuelles dans les pays o� le mouvement
conna�t une forte expansion. Bien que de nombreux obstacles se
dressent face au d�veloppement des programmes d'assurance maladie,
et que certains doutent de leur capacit� de lutte contre la pauvret�, ces
programmes restent souhaitables en Afrique francophone pour des
questions d'�quit� et d'accessibilit� aux soins. Pour conclure, Sery et
Letourmy listent les �l�ments permettant � l'assurance de se d�velop-
per dans un environnement institutionnel favorable, parmi lesquels on
trouve : favoriser l'articulation des diff�rentes formes de finance-
ment ; encourager des mesures sp�cifiques de lutte contre la pau-
vret� ; privil�gier la progressivit� dans la mise en oeuvre de la couver-
ture universelle.


Sous-partie 2.1 : Assurance maladie obligatoire

Dans le chapitre 7, Letourmy et Ouattara analysent la mise en place
d'un r�gime d'assurance maladie obligatoire (AMO) au Mali afin d'il-
lustrer les difficult�s que connaissent bon nombre de pays d'Afrique
de l'Ouest pour concr�tiser une d�marche de protection sociale. Ils
pr�sentent tout d'abord l'origine et les orientations de ce processus.
L'initiative d'un r�gime d'AMO est n�e d'un constat d'insuffisance de
la couverture maladie existante au Mali. Le dispositif l�gal de couver-
ture maladie est caract�ris� par une s�rie d'exemptions des tarifs qui
concernent l'ensemble de la population coupl�e � une s�rie d'exemp-
tions cat�gorielles. Mais les auteurs montrent que ce dispositif l�gal
n'est pas toujours appliqu� dans la r�alit�. L'�tendue pratique de la
couverture correspondant aux dispositions l�gales a entra�n� le
d�veloppement de r�gimes d'assurance organis�s par des mutuelles,
de r�gimes d'entreprise et de quelques exp�rimentations associant le
secteur public de soins comme le syst�me de r�f�rence �vacuation et
les exp�riences locales de fonds de solidarit�. Le fonctionnement du

                                                               R�sum� �   xxiii



dispositif l�gal et des exp�rimentations am�nent les auteurs � �tablir
trois constats relatifs � la couverture qui incitent au changement : l'in-
efficacit� du dispositif l�gal, les exclusions qu'il engendre, l'iniquit� et
parfois l'inefficience associ�es aux dispositifs priv�s. Le projet d'AMO
s'inscrit au Mali dans une perspective de couverture universelle selon
laquelle l'assurance obligatoire concerne le secteur formel, les
mutuelles le secteur informel et le Fonds d'Assistance M�dicale
(FAM) la population r�siduelle indigente. Les auteurs nous pr�sentent
ensuite le contenu du projet et sa gestion. Il a �t� lanc� en 1995. Une
�tude a �t� men�e en 1997 mais n'a pas �t� suivie d'effets imm�diats,
ni pour l'AMO, ni pour le FAM. Il a fallu 5 ans environ pour que le
projet soit repris. L'ensemble des rapports produits permet d'avoir
une id�e de l'architecture et des caract�ristiques du r�gime, tels que
les effectifs de b�n�ficiaires qui ont �t� estim�s autour de 1 500 000
personnes en avril 2003 et autour de 1 680 000 fin 2003. Dans une
derni�re partie, Letourmy et Ouattara pr�sentent quelques �l�ments
de r�flexion concernant la faisabilit� de la d�marche, le jeu des acteurs
(pouvoirs publics, partenaires sociaux, prestataires de soins, organ-
ismes de protection sociale et acteurs ext�rieurs) autour du projet
d'AMO et la coh�rence politique du projet. En conclusion, les auteurs
insistent sur l'importance d'amener les acteurs sur des positions com-
munes.
   Dans le chapitre 8, Sery pr�sente deux projets de couverture uni-
verselle en cours d'implantation en C�te d'Ivoire et au Gabon. L'Assu-
rance Maladie Universelle ivoirienne et la Couverture M�dicale
G�n�ralis�e gabonaise sont bas�es sur des orientations strat�giques se
rejoignant sur de nombreux points : une assurance maladie obligatoire,
contributive pour tous les actifs et non contributive pour les personnes
�conomiquement faibles, qui ambitionne de couvrir l'int�gralit� de la
population sans discrimination de nationalit� ; un ticket mod�rateur
obligatoire et modulable ; un panier de soins essentiels pouvant �tre
�toff� au fur et � mesure de l'�volution du profil �pid�miologique ; une
harmonisation de la nomenclature et de la tarification des actes dans le
service public de sant� ; une gestion centralis�e et autonome des m�dica-
ments ; un syst�me ouvert ; un financement assur� selon le m�canisme
du tiers payant, au nom de la responsabilit� et de la solidarit� ; un contr�le
et une analyse permanents des co�ts, de la qualit� et de la quantit� et
de l'effectivit� des prestations servies. L'institution d'un r�gime de
couverture universelle vise � favoriser l'accessibilit� financi�re de l'offre

xxiv � R�sum�



de soins, � stimuler le d�veloppement du secteur priv� et � favoriser
l'�quit� dans l'acc�s aux soins. C'est au niveau du cadre institutionnel que
les deux r�gimes se diff�rencient dans leur approche. Dans le syst�me
ivoirien, trois organismes de gestion sont cr��s. Ce sont : la Caisse
Sociale Agricole (CSA), la Caisse Nationale d'Assurance Maladie
(CNAM) et le Fonds National de R�gulation (FNR). Afin d'op�rer une
d�concentration des t�ches qui incombent � ces trois organismes, dif-
f�rentes structures ont �t� con�ues : au niveau central, les Services Cen-
traux ; au niveau d�partemental, les D�l�gations ; et au niveau local, les
Services Locaux de Sensibilisation. L'approche gabonaise cherche quant
� elle, � renforcer l'existant pour l'amener � g�rer efficacement le nou-
veau r�gime. La couverture universelle va �tre dirig�e par trois structures
de protection sociale : la Caisse Nationale de S�curit� Sociale (CNSS), la
Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) et une nouvelle caisse
d�nomm�e Couverture M�dicale des Agents Publics (CMAP). Sery
insiste enfin sur l'importance d'adopter une d�marche participative tout
au long du processus afin de recueillir et de mobiliser l'adh�sion des pop-
ulations, de capter leurs attentes et leurs int�r�ts.
   Le chapitre 9, de Carrin et al. traite de la r�forme du financement de
la sant� au Kenya visant � mettre en place un Fonds National d'Assu-
rance Maladie (FNAM). Ils �valuent tout d'abord la performance
� attendue � de ce fond et pr�sentent ensuite les r�actions des dif-
f�rentes parties prenantes. Les objectifs en mati�re de financement de
la sant� sont la g�n�ration, l'utilisation optimale des ressources, et
l'accessibilit� financi�re pour tous. Afin d'�valuer les performances
attendues du FNAM, les auteurs d�finissent des indicateurs propres �
chacune des 3 grandes fonctions du financement de la sant� � savoir la
collecte de fonds, leur mise en commun et l'achat. Pour la collecte de
fonds c'est le taux de couverture des populations et la m�thode de
financement qui sont �valu�s ; pour la mise en commun des fonds, la
fragmentation de la mise en commun du risque et la gestion des fonds
sont estim�es ; enfin pour la fonction d'achat, il s'agit du contenu de la
police d'assurance, des m�canismes de paiement au prestataire et de
l'efficacit� administrative. A travers l'analyse des rapports publi�s par
les m�dias et d'autres d�clarations, les auteurs r�sument ensuite les
pr�occupations majeures de plusieurs organisations non gouverne-
mentales et groupes d'int�r�t. Ainsi les Organisations de Gestion des
Services de Sant� (HMO) craignent que l'introduction de ce syst�me
n'engendre une baisse de leurs activit�s. Le potentiel de corruption, le

                                                           R�sum� �  xxv



mauvais usage des cotisations recueillies au moyen de l'assurance ma-
ladie et le risque de r�duction des emplois sont �galement point�s du
doigt. La F�d�ration des Employeurs Kenyans craint de voir sa con-
tribution � l'assurance maladie des employ�s augmenter. L'Association
Nationale des Enseignants du Kenya, l'Association Nationale des
Infirmi�res du Kenya et l'Association M�dicale du Kenya �voquent le
r�le futur des allocations m�dicales pour les fonctionnaires et les
enseignants. La structure de gestion du nouveau syst�me inqui�te
l'Organisation Centrale des Syndicats, l'Association des Industries du
Kenya et l'Association M�dicale du Kenya. Les bailleurs de fonds sont
quant � eux pr�occup�s par la p�riode de transition vers l'assurance
universelle et la lenteur du processus de consultation des partenaires
cl�s. En d�finitive, malgr� toutes ces pr�occupations, il semble que la
plupart des partenaires autres que les HMO soutiennent le projet de
loi. Les auteurs concluent en insistant sur la n�cessit� d'une p�riode
de transition d'une dur�e de plus d'une d�cennie. De plus, des objec-
tifs importants devraient �tre reconnus d�s le d�part de fa�on � ce que
des progr�s constants vers une couverture universelle efficace de la
population puissent �tre planifi�s et r�alis�s.


Sous-partie 2.2 : Les mutuelles

Dans le chapitre 10, N'Diaye dresse l'�tat des lieux en 2003 du
d�veloppement des mutuelles de sant� dans les onze pays membres du
r�seau � Concertation sur les mutuelles de sant� en Afrique � : B�nin,
Burkina Faso, Cameroun, C�te d'Ivoire, Guin�e, Mali, Mauritanie,
Niger, Tchad et Togo. L'analyse de l'�volution r�cente de ces syst�mes
d'assurance maladie (SAM) montre que la situation est tr�s variable
d'un pays � l'autre en ce qui concerne le nombre de structures
mutualistes : important au S�n�gal ou au Mali, encore limit� au Tchad
et en Mauritanie. L'auteur nous expose ensuite les rapports existants
avec les prestataires et les partenaires des mutuelles : la majorit� des
structures fonctionnelles ont re�u � la fois un appui financier et un
appui technique, au moment de leur cr�ation et par la suite, de la part
des acteurs externes principalement (ONG, partenaires du d�veloppe-
ment), En revanche le partenariat inter-mutualiste est peu r�pandu
puisqu'il concerne moins de la moiti� des SAM. Les r�gimes propos�s
par les SAM pr�sentent quant � eux de nombreuses similitudes : adh�-
sion volontaire avec cotisation forfaitaire individuelle ou familiale

xxvi � R�sum�



dont la valeur, bien que faible compte tenu des ressources, appara�t
certainement surestim�e en regard des prestations per�ues. Si les
garanties offertes sont propres � chaque structure, quelques traits
communs peuvent cependant �tre d�gag�s : garantie unique, au pre-
mier Franc, avec un co-paiement et un syst�me de tiers payant ; acc�s
limit� aux prestataires de soins conventionn�s ; panier de soins rela-
tivement identique selon les SAM, avec une large part au petit risque.
En ce qui concerne le nombre d'adh�rents, il reste inf�rieur au millier
dans la quasi-totalit� des SAM bien qu'il ait doubl� par rapport au
moment de leur cr�ation. En plus de leur activit� d'assurance maladie,
plus de 60 % des SAM fonctionnels exercent d'autres activit�s, dont
principalement la micro-finance et l'offre de soins. L'auteur �voque
enfin les difficult�s rencontr�es par les SAM pour leur d�veloppe-
ment : principalement le faible recouvrement des cotisations ; le
probl�me de formation du personnel, de fid�lisation des adh�rents et
de communication. Plusieurs voies de r�flexion sont propos�es pour
garantir la p�rennit� des SAM : l'effort devrait �tre port� sur une
extension de la taille des SAM au lieu d'une multiplication des petites
structures, ainsi que sur une plus grande professionnalisation du per-
sonnel et une implication effective des adh�rents. Cependant, malgr�
un impact encore limit� au niveau des populations, le d�veloppement
des mutuelles para�t aujourd'hui incontestable, ce dont t�moigne la
dynamique � l'oeuvre actuellement dans plusieurs pays.
   Le chapitre 11 de Galland propose une r�flexion sur le pouvoir
d'achat des m�nages � faible revenu et leur volont� � payer dans le
cadre des syst�mes d'assurance maladie � adh�sion volontaire
(SAMV). Il analyse tout d'abord les contributions des m�nages � tra-
vers les �tudes men�es dans quatre pays d'Afrique de l'Ouest (B�nin,
Guin�e, Mali et Ghana) et remarque que l'obligation d'adh�sion de
tous les membres � charge de l'unit� familiale n'y est jamais respect�e.
L'auteur se base ensuite sur une �tude r�alis�e dans la banlieue de
Dakar au S�n�gal pour comparer les intentions de cotisation avec les
revenus d�clar�s par les m�nages, et dont les r�sultats montrent que le
taux d'allocation tend � d�cro�tre avec l'augmentation des revenus.
L'auteur tire enfin quelques enseignements de ces observations. Tout
d'abord si on recherche une port�e significative des mutuelles, on doit
privil�gier les zones pr�sentant des sources de revenus diversifi�es et
en croissance �conomique stable, et tenter de proposer diff�rentes
garanties bien que ce soit souvent difficile � faire accepter dans les

                                                            R�sum� � xxvii



SAMV � gestion mutualiste. En ce qui concerne les comportements
des m�nages, ils semblent se heurter � un seuil de cotisation, au-del�
duquel ils ont tendance � diminuer le nombre d'inscrits. Un �quilibre
doit donc �tre trouv� entre l'attractivit� d'un produit d'assurance et
son co�t. Selon les conclusions des �tudes pr�c�dentes, les garanties
les plus compl�tes permettant d'obtenir les taux de p�n�tration les
plus �lev�s correspondent � une prime d�passant 2 % du revenu
moyen de la population cible. Par ailleurs la r�gle de l'adh�sion
obligatoire de toutes les personnes � charge de l'unit� familiale permet
de contr�ler l'anti-s�lection mais peut avoir un effet n�gatif sur
l'adh�sion. Cependant diff�rentes solutions existent pour r�soudre ce
probl�me comme l'adh�sion automatique de groupes homog�nes. La
r�duction du co�t des prestations, par la n�gociation avec les
prestataires ou la promotion d'une offre de soins plus efficiente, est de
nature � augmenter la port�e des SAMV. Enfin il faut faire la distinc-
tion entre la � capacit� contributive � d'un m�nage, et sa volont� �
payer : la premi�re est d�termin�e par le niveau de ressource du
m�nage, et la seconde par la d�cision d'utiliser ou non tout ou partie
de cette capacit� pour l'assurance maladie. Il semble que les contribu-
tions des m�nages seraient plus repr�sentatives de leur capacit� con-
tributive. Ce serait notamment le cas pour les m�nages adh�rant
depuis de nombreuses ann�es et l'ayant d�cid�, pour qui l'utilit� de
l'assurance maladie est �vidente.



PARTIE 3 : L'EXPANSION DE LA COUVERTURE

La troisi�me partie de l'ouvrage �voque l'expansion de la couverture,
en particulier au travers des relations avec l'offre de soins (premi�re
sous-partie) puis du point de vue de la protection sociale et de la lutte
contre la pauvret�.


Sous-partie 3.1 : Les relations de l'assurance maladie
avec l'offre de soins

Dans le chapitre 12, Criel, Blaise et Ferette se penchent sur l'interac-
tion entre les mutuelles de sant� en Afrique et la qualit� des soins.
C'est la qualit� des soins telle qu'elle est per�ue par les adh�rents qui
constitue un facteur important dans la d�cision d'adh�rer � une

xxviii � R�sum�



mutuelle. Une spirale se met en place lorsque les formations sanitaires
se trouvent en difficult� : la qualit� per�ue par les adh�rents diminue,
le nombre d'adh�sions d�cro�t, les ressources se rar�fient et la qualit�
continue donc de chuter. Pour am�liorer la qualit� des soins il faut
tout d'abord r�ussir � la d�finir. La qualit� est relative, �volutive et
dynamique, et pr�sente un grand nombre de d�terminants dont les
poids diff�rent selon les points de vue. Comme le contexte est tr�s
mouvant, les acteurs s'engagent dans un processus d'ajustement per-
manent de l'importance relative des attributs de qualit�. Les mutuelles
ont plusieurs leviers � leur disposition pour contribuer � am�liorer la
qualit� des soins : un levier financier, en apportant aux services de
sant� des ressources suppl�mentaires et plus stables dans le temps ; un
levier contractuel, en incluant des exigences de qualit� dans ses con-
ventions avec les formations sanitaires ; un levier de contrepouvoir, en
faisant respecter les droits de leurs membres et en sanctionnant les
abus ; un levier de porte-parole enfin, en repr�sentant les usagers dans
les d�bats et enjeux de politique de sant�. Mais dans la r�alit�, les
effets de ces leviers sont limit�s. En effet, il n'y a pas assez d'adh�rents
pour que le levier financier soit puissant. L'efficacit� du levier con-
tractuel n�cessite diff�rentes conditions : pluralit� de dispensateurs
entre lesquels la mutuelle fera jouer la concurrence ; capacit�
juridique pour les formations sanitaires de conclure des conventions
avec des mutuelles ; possibilit� pour la mutuelle d'obtenir, le cas
�ch�ant, l'ex�cution forc�e de la convention par un recours au syst�me
judiciaire. L'exp�rience du projet PRIMA en Guin�e Conakry a mon-
tr� notamment que le dialogue peut se briser entre adh�rents et
prestataires si ces derniers n'ont pas eu une formation adapt�e. Il est
�videment difficile dans ce cas de lancer une dynamique d'accroisse-
ment de la qualit� des soins.
   Le chapitre 13, traite des probl�matiques qui �mergent dans les rela-
tions entre assureur et h�pital dans les pays pauvres. L'auteur se ques-
tionne en premier lieu sur le choix par l'assureur de la population desti-
nataire des soins. Deux approches compl�mentaires existent : l'une est
centr�e sur l'identification de populations-cibles, l'autre sur l'identifi-
cation de pathologies-cibles. Ces deux visions, qui servent des objectifs
d'�quit� d'une part, de sant� publique d'autre part, doivent �tre
appr�hend�es conjointement � partir d'une bonne connaissance de la
situation sanitaire et sociale par les assureurs et les pouvoirs publics.
L'assureur doit ensuite opter entre plusieurs priorit�s non exclusives

                                                              R�sum� � xxix



concernant l'achat des prestations � l'h�pital, � savoir : financer les
soins en rapport avec les strat�gies de sant� publique ; couvrir les gros
risques ; garantir la mission de service public essentiel de sant� de
l'h�pital ; contribuer � la formation des professionnels de
sant� ; assurer le transport des malades vers l'h�pital ; choisir l'h�pital
en fonction de son efficience, de son statut priv� ou public, de son
niveau de soins ; moduler le panier de soins selon le niveau de soins de
l'h�pital. Puis l'auteur aborde la question du mode de paiement �
verser � l'h�pital, dans un contexte o� l'assureur couvre une population
de petite taille. La combinaison d'un paiement � l'acte et d'un
paiement par capitation semble �tre une solution int�ressante
puisqu'elle associe l'incitation � la qualit� de l'un avec le maintien d'un
service public essentiel de sant� gr�ce � l'autre. Le point de vue de
l'h�pital est aussi important � envisager, puisque le syst�me de
paiement a des cons�quences �videntes sur sa tr�sorerie et sa factura-
tion. En dernier lieu de Roodenbeke s'interroge sur le montant du
financement. Bien qu'actuellement une large part soit assum�e par les
subventions, cela ne doit pas emp�cher la mise en route d'un syst�me
de paiement par l'assureur ; une solution temporaire pourrait �tre le
partage du financement entre assureur et �tat : l'assureur couvre les
petits risques, et les gros risques sont financ�s par les subventions.
Enfin la mise en place du ticket mod�rateur s'av�rerait efficace dans le
cadre du petit risque pour r�duire la sur-utilisation de soins de pre-
mi�re intention. En guise de conclusion, l'auteur rappelle le probl�me
de la qualit� et le r�le potentiel que l'assureur pourrait jouer dans sa
r�gulation, gr�ce � la contractualisation d'une part, et au contr�le
m�dical d'autre part. Et il souligne que la mission de l'assurance
s'inscrit avant tout dans une logique d'am�lioration de la sant�.


Sous-partie 3.2 : Protection sociale, assurance maladie
et lutte contre la pauvret�

Dans le chapitre 14, Haddad et Morestin s'interrogent sur la contribu-
tion de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret�, visant les
m�nages pauvres mais aussi les m�nages vuln�rables risquant de passer
sous le seuil de pauvret�. Pour �tudier le r�le de l'assurance de protec-
tion contre l'appauvrissement li� aux d�penses directes de sant�, les
auteurs ont proc�d� par simulation en confrontant 3 situations fictives.
La situation initiale correspondant � une absence d'assurance est com-

xxx � R�sum�



par�e � deux sc�narios : a) assurance communautaire aux param�tres
similaires � ceux habituellement pratiqu�s ; b) m�me assurance, avec
subvention de l'adh�sion des m�nages pauvres. L'�tude des sc�narios
confirme que les d�penses de sant� sont sources d'appauvrissement des
m�nages, tant en termes d'incidence que d'intensit�, et ce ph�nom�ne
est plus important dans les zones rurales et mal desservies. En outre, il
appara�t que l'assurance ne permet pas de prot�ger les m�nages vul-
n�rables. Cette analyse permet aux auteurs de tirer quelques enseigne-
ments pouvant guider les strat�gies publiques. Au final, l'assurance n'a
qu'une faible influence sur la r�partition globale entre acteurs des flux
financiers de sant�. Par ailleurs la prime repr�sente une d�pense
importante, qui n'est pas toujours compens�e par les remboursements,
ce qui peut inciter les m�nages � ne pas adh�rer. Quand la participation
� l'assurance repr�sente un sacrifice financier trop lourd la subvention
de l'adh�sion s'av�re justifi�e. La conception de politiques cibl�es sur
les m�nages vuln�rables est frein�e par la difficult� � identifier ces
m�nages. Enfin, les auteurs insistent sur le fait que l'assurance seule ne
peut �tre une solution � la crise du financement des syst�mes de sant�.
   Le chapitre 15, de Noirhomme et Thom�, dans lequel les auteurs
proposent une alternative � la gratuit� universelle des soins en Afrique
actuellement pr�n�e au niveau international pour permettre l'acc�s
aux soins des plus pauvres : les Fonds d'�quit� semblent pr�senter un
certain nombre d'avantages, et ont rencontr� un succ�s �vident au
Cambodge o� cette initiative a pris forme. Les fonds d'�quit� cam-
bodgiens permettent ind�niablement une am�lioration de l'acc�s aux
soins pour les plus pauvres et constituent un frein aux d�penses de
sant� irrationnelles. Cependant ces progr�s vont de pair avec la r�ali-
sation de certaines conditions : s�paration des r�les des diff�rents
acteurs, avec notamment un financeur ext�rieur suffisamment impor-
tant, ad�quation des prestations financi�res et sanitaires au contexte
local et aux besoins de la population pauvre. En outre, le probl�me de
l'identification de la population b�n�ficiaire doit �tre envisag� ; il est
pr�f�rable d'�tablir a priori une d�finition pr�cise des crit�res d'inclu-
sion, et de choisir un mode d'identification passive des individus �
l'h�pital. Noirhomme et Thom� retracent ensuite leurs propres
exp�riences en Afrique. Au Mali, deux Fonds d'Assistance M�dicale
ont �t� cr��s, mais ils n'ont eu qu'un impact tr�s limit� en termes
d'effectif sur la prise en charge des patients b�n�ficiaires. Malgr� la
forte implication initiale des acteurs locaux et l'amplitude du projet

                                                            R�sum� �   xxxi



(17 structures pilotes) en Mauritanie, les fonds d'indigence n'ont pas
rencontr� le succ�s escompt�. Ce n'est qu'� Madagascar que l'exp�ri-
ence, toute r�cente, semble porter ses fruits puisqu'un nombre signifi-
catif d'hospitalisations a concern� les b�n�ficiaires du fonds d'�quit�.
Les auteurs dressent un bilan des le�ons tir�es de ces exp�riences
africaines, qu'ils comparent � celles du Cambodge. Ils confirment la
n�cessit� d'un budget significatif et l'importance de la diff�renciation
des acteurs comme conditions incontournables de la r�ussite des fonds
d'�quit�. L'�chec relatif de ces structures en Afrique est aussi
attribuable � la faiblesse de la coordination et du suivi local. Et cela
impose de ce fait l'identification au d�part d'un acteur-moteur et d'un
organe de pilotage comp�tents. Une autre difficult� porte sur l'identi-
fication de la population-cible qui pour des raisons socio-culturelles
est souvent r�duite aux seuls individus exclus et ne couvre pas l'ensem-
ble des pauvres. Quelques aspects positifs ont pu n�anmoins �tre
d�gag�s : la bonne repr�sentativit� des personnalit�s influentes dans
l'organisation des fonds d'�quit� mauritaniens et malgache, et la v�ri-
table fonction d'assistance sociale cr��e � Madagascar. N�s jusqu'alors
d'initiatives d�velopp�es localement, les fonds d'�quit� font actuelle-
ment partie de programmes nationaux initi�s par le gouvernement au
Kenya et � Madagascar. Cette nouvelle approche pourrait permettre
une s�curisation du financement des fonds, ainsi que leur int�gration �
des syst�mes d'assurance maladie.



PARTIE 4 : PERSPECTIVES

La quatri�me et derni�re partie de l'ouvrage est consacr�e aux per-
spectives du financement de l'assurance maladie dans les pays
d'Afrique francophone.
   Dans le chapitre 16, Carrin et James s'int�ressent au passage � la cou-
verture universelle par l'Assurance Maladie Obligatoire (AMO). Pour
cela, les auteurs r�sument les diff�rentes phases de transition que 8
pays, b�n�ficiant d'un r�gime d'AMO suffisamment document�
(Autriche, Belgique, Costa Rica, Allemagne, Isra�l, Japon, R�publique
de Cor�e et Luxembourg), ont travers�es avant d'atteindre la couver-
ture universelle. Ils notent que dans tous les pays �tudi�s, le mouve-
ment vers une couverture totale par l'AMO a �t� r�alis� de fa�on pro-
gressive, avec une extension syst�matique de la couverture durant la

xxxii � R�sum�



p�riode de transition. Le niveau de revenu, la structure de l'�conomie,
la r�partition de la population, la capacit� de gestion et le niveau de
solidarit� parmi les membres de la soci�t� sont autant de facteurs qui
peuvent acc�l�rer cette p�riode de transition. La performance d'un
r�gime d'AMO peut �tre �valu�e en termes de � financement de la
sant� � pur, et en fonction de l'objectif final d'un syst�me de sant�. Les
objectifs de sant�, de r�activit� aux attentes de la population, et
d'�quit� dans les contributions financi�res sont utilis�s comme bases de
la structure d'analyse adopt�e. Dans tout syst�me de services de sant�,
il y a quatre grandes fonctions reli�es entre elles : fourniture des ser-
vices, cr�ation des ressources n�cessaires au financement, administra-
tion g�n�rale et supervision du syst�me. S'agissant de financement par
l'AMO, il y a trois sous-fonctions corr�l�es : recouvrement des cotisa-
tions, mise en commun des risques et achat de services. Les indicateurs
de performance propos�s sont classifi�s selon ces sous-fonctions. Les
auteurs d�montrent l'importance de la bonne conception et du r�al-
isme des politiques d'AMO en particulier au niveau de quelques
param�tres : couverture de la population, m�thodes de financement,
niveau de fragmentation, composition de la mise en commun du
risque, panier de soins, m�canismes de paiement des fournisseurs et
efficacit� administrative. Afin d'identifier les secteurs n�cessitant des
ajustements ou des am�liorations, des indicateurs de performance
devront �tre utilis�s, tels que le pourcentage de population couverte
par groupe, le ratio de cotisations pay�es d'avance, l'existence et le bon
fonctionnement de m�canismes de contr�le, l'existence de contrats
bien faits et leur mise en oeuvre, et enfin le pourcentage des d�penses
consacr�es aux co�ts administratifs. Selon les auteurs, un syst�me
AMO performant tel qu'ils l'ont d�crit peut non seulement contribuer
� une plus grande justice dans le financement et � une meilleure r�ac-
tivit�, mais aussi au but ultime d'un meilleur �tat de sant� pour toute la
population.
   Dans ce chapitre 17, Fournier et Tourigny d�crivent les relations
entre assurances et prestataires de soins en Afrique subsaharienne
francophone. Afin de situer le contexte dans lequel elles se d�velop-
pent, les auteurs tracent un bref �tat des lieux de la situation de l'offre
de soins, en revenant sur ces principales caract�ristiques : l'effort mis
sur l'extension g�ographique, la prise en compte de la qualit� per�ue
par la population et du montant des co�ts comme d�terminants
majeurs de l'utilisation des structures de soins, l'accessibilit� aux

                                                            R�sum� � xxxiii



m�dicaments, et enfin la forte expansion du secteur priv�, dont on
craint qu'elle ne soit au d�triment de l'offre publique. Apr�s ces
quelques pr�cisions, les auteurs exposent les relations entre assureurs
et offreurs de soins au travers d'exp�riences locales rapport�es et/ou
issues de la litt�rature, en distinguant trois situations diff�rentes :
l'assureur est �tabli, cherche � s'�tablir, est �troitement li� avec l'of-
freur. Dans le premier cas, les difficult�s rencontr�es concernent la
reconnaissance des b�n�ficiaires, le respect de la tarification, le con-
tr�le m�dical et la disponibilit� et la qualit� de l'offre. Quand l'as-
sureur cherche � s'�tablir, c'est l'offre de soins d�j� existante qui est
d�terminante pour la r�ussite de son installation. Enfin la situation
encore peu r�pandue o� offre et assurance sont associ�es, fait preuve
de r�sultats convaincants. Il est enfin int�ressant de s'interroger sur les
r�percussions que peuvent avoir les assurances maladie sur les presta-
tions de soins. Si manifestement elles sont rarement � l'origine d'une
am�lioration de l'offre, on note cependant quelques initiatives
ponctuelles encourageantes. En revanche le rapport de forces quasi
perp�tuel entre assureurs et prestataires constitue certainement un
frein important au d�veloppement des assurances maladies en Afrique
subsaharienne. La r��quilibration des rapports en faveur des assureurs
peut passer par leur regroupement afin d'augmenter leurs moyens
techniques et financiers. En conclusion, Fournier et Tourigny insis-
tent sur les liens particuli�rement �troits qui unissent assurance mal-
adie et offre de soins en Afrique subsaharienne, et donc sur la n�ces-
sit� de toujours associer l'assurance aux strat�gies d'am�lioration du
syst�me de soins. Ils proposent dans ce cadre quelques pistes de r�flex-
ion, comme la cr�ation de r�seaux assurantiels et l'int�gration de la
fonction de prestations de soins � celle d'assurance.
   Le chapitre 18 de Brouillet explore, en s'appuyant sur la litt�rature,
les liens complexes qu'entretient la sant� avec les facteurs du
d�veloppement : croissance, lutte contre la pauvret� et les in�galit�s,
et r�duction de la vuln�rabilit�. L'auteur analyse tout d'abord les liens
entre la croissance et les d�terminants sociaux du d�veloppement. La
croissance ne profite pas toujours aux pauvres, qui sont enferm�s dans
des � trappes � pauvret� � par une r�partition in�gale des actifs
(�conomiques ou en capital humain), par des opportunit�s plus faibles
et par les d�faillances du march�. L'assurance maladie se pr�sente d�s
lors comme un bon instrument de lutte contre les in�galit�s : d'une
part elle poss�de un r�le protecteur plus marqu� pour les pauvres en

xxxiv � R�sum�



�vitant les difficult�s �conomiques li�es � la maladie ; d'autre part elle
permet une am�lioration de l'�tat de sant� en augmentant l'acc�s aux
soins. Le choix des politiques d'aide est primordial car les ressources
doivent �tre utilis�es de fa�on appropri�e et efficiente pour permettre
une augmentation des r�sultats de sant�. Les politiques d'aide de ces
15 derni�res ann�es ont �t� souvent critiqu�es pour leurs r�sultats
d�cevants. Deux approches ont alors �merg�. La premi�re pr�conise
de r�server les ressources l� o� l'environnement est le plus favorable,
ce qui pose des probl�mes �thiques. La seconde est centr�e sur la lutte
contre la pauvret� en obligeant les pays d�sireux d'obtenir un all�ge-
ment de la dette de formuler une strat�gie de lutte contre la pauvret�
pr�sent�e dans le Document Strat�gique de R�duction de la Pauvret�.
L'impact de l'aide externe sur la r�duction de la pauvret� est temp�r�
en Afrique. La palette des interventions doit �tre �largie. La produc-
tion par le priv� de biens publics ou de services � forte externalit� peut
�tre efficiente. Le secteur de la micro-assurance pr�sente des avan-
tages pour les agences d'aide mais doit, pour �tre efficace, s'appuyer
sur d'autres instruments, comme les prestations d'assistance cibl�es,
ou des syst�mes d'assurance maladie � sociale �.

                                                 Introduction

                                                      Gilles Dussault




Cet ouvrage est le fruit de plusieurs rencontres : d'abord celle d'un
sujet, celui de la couverture du risque maladie par l'assurance, avec un
nouveau public. En effet, si les questions d'assurance maladie font par-
tie depuis longtemps du d�bat public dans les pays riches, ce n'est pas
toujours le cas dans les pays les plus pauvres, parmi lesquels se retrou-
vent la plupart des pays francophones d'Afrique. En 2000, l'Institut de
la Banque mondiale (WBI), qui offrait depuis quelques ann�es des for-
mations sur le th�me du financement de la sant�, mais en anglais et en
espagnol seulement, a commenc� � r�pondre aux besoins des pays
francophones dans ce domaine et � aborder la question de l'assurance.
Il y avait d�j� dans ces pays un mouvement de d�veloppement des
mutuelles de sant�, soutenu principalement par le Bureau Internatio-
nal du travail (BIT), et par les coop�rations fran�aise et allemande. Au
m�me moment, les gouvernements de C�te d'Ivoire et du Gabon
exprimaient leur intention de mettre en place une couverture uni-
verselle et plusieurs autres pays manifestaient un int�r�t pour
l'assurance. Une demande d'information et de formation �tait donc en
voie d'�mergence.
   Une seconde rencontre fut celle de WBI avec l'Institut multilat�ral
d'Afrique (IMA), qui � partir de 2002, se sont associ�s pour offrir une
s�rie d'ateliers et de visioconf�rences, et organiser une conf�rence
r�gionale en 20041, �v�nement qui fut aussi l'occasion d'�tablir une
collaboration fructueuse avec le Coll�ge des �conomistes de France
(dont le Secr�taire-g�n�ral, Philippe Ulmann est l'�me dirigeante du
processus d'�dition de cet ouvrage). Ces deux organismes ont cherch�

                                                                       1

2 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



et obtenu l'appui de l'Organisation mondiale de la Sant�2 (OMS), du
BIT3, et du gouvernement fran�ais qui sont devenus des partenaires
dans un effort pour rendre disponible au plus grand nombre des con-
naissances de base sur l'assurance maladie, ses diverses modalit�s, les
avantages et inconv�nients de chacune, les conditions de leur mise en
oeuvre et de leur p�rennisation. Ceci a �t� fait dans un esprit d'aide
aux pays pour faire des choix �clair�s, dans un domaine o� les d�ci-
sions ont une port�e � long terme et doivent donc �tre prises avec
grand soin. En aucun temps, les activit�s men�es n'ont fait la promo-
tion d'un m�canisme d'assurance au d�triment des autres; elles ont
plut�t cherch� � rendre les participants capables de d�cider par eux-
m�mes des options les plus r�alistes pour leur pays.
   La troisi�me rencontre a �t� celle d'un petit groupe de chercheurs
et formateurs qui ont su mettre en commun leurs expertises diverses
et travailler en synergie pendant ces quatre derni�res ann�es. La plu-
part font partie des auteurs de ce livre. Le noyau initial �tait form� de
Idrissa Diop, Alain Letourmy, Pierre Fournier et Gilles Dussault, aux-
quels se sont joints plusieurs collaborateurs4 au fil du temps, dont
plusieurs sont maintenant des leaders du d�veloppement de la couver-
ture du risque maladie dans leur pays et dans la r�gion.
   Une quatri�me rencontre enfin, entre ces formateurs et un public
de professionnels issus du milieu de la sant�, de la s�curit� sociale, des
finances, de l'�ducation, qui se sont r�unis physiquement et virtuelle-
ment � plusieurs reprises pour approfondir leur compr�hension des
m�canismes assurantiels de couverture du co�t des services de sant�,
comme strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins en Afrique fran-
cophone. Au-del� des liens d'amiti�, ils ont nou� des liens profession-
nels qui demandent � �tre maintenus et renforc�s, par la mise en place
�ventuelle d'un r�seau africain francophone de professionnels de
l'assurance maladie.
   C'est � ces coll�gues africains que s'adresse d'abord ce livre,
puisqu'ils en sont en partie les auteurs � travers le travail de collecte
d'information et d'analyse de situation qu'ils ont poursuivi en notre
compagnie. Au-del� de ce groupe d�j� connu, nous souhaitons rejoin-
dre un plus vaste public de d�cideurs et de professionnels int�ress�s �
mieux comprendre comment la mise en place de l'assurance maladie
est possible dans un contexte de ressources limit�es.
   Nous visons trois objectifs qui nous semblent compl�mentaires:
(1) pr�senter de mani�re accessible les concepts fondamentaux de

                                                          Introduction � 3



l'assurance du risque maladie, (2) faire un �tat des lieux de l'assurance
maladie en Afrique francophone, pour mieux appr�cier le chemin par-
couru et les difficult�s rencontr�es, et (3) � la lumi�re de cette analyse,
susciter une r�flexion sur ses perspectives de d�veloppement et sa con-
tribution potentielle � l'extension de la couverture du risque maladie.
Le premier objectif, de nature p�dagogique, vise � combler un vide
dans la litt�rature professionnelle, en offrant une pr�sentation simple,
mais sans concession aucune � la rigueur scientifique, des principes
fondamentaux de l'assurance maladie et des m�canismes de sa mise en
place et de sa gestion. Cette introduction � la question de l'assurance
maladie est �crite en ayant � l'esprit les conditions dans lesquels les
pays d'Afrique sub-saharienne doivent envisager la mise en place de
l'assurance.
   Le second objectif permet de faire une premi�re synth�se des
avanc�es, laborieuses � ce jour, de l'assurance maladie dans les pays de
langue fran�aise au Sud du Sahara. La base d'information utilis�e est
principalement une s�rie de rapports r�alis�s par des �quipes de travail
de 15 pays, r�unies � l'initiative de WBI et de l'IMA, de F�vrier 2002 �
Juin 2005 ; elle inclut aussi les inventaires des micro assurances sant�
r�alis�s par La Concertation5 et diverses �tudes publi�es et non pub-
li�es. Le dernier objectif d�coule de la volont� de bien examiner les
conditions dans lesquelles la couverture des risques �conomiques li�s �
la mauvaise sant� peut �tre �largie dans la zone concern�e, tant en
analysant les exp�riences en cours dans les autres pays de la r�gion,
qu'en r�fl�chissant sur les facteurs critiques de cette extension.



ATTEINTE DES OBJECTIFS DE SANT� EN AFRIQUE :
R�LE DE L'ACC�S AUX SOINS

La communaut� internationale s'est engag�e, � l'occasion de l'Assem-
bl�e du Mill�naire des Nations Unies en Septembre 2000, � atteindre
huit objectifs dits � objectifs de d�veloppement pour le Mill�naire �
(ODM). Au moins trois d'entre eux sont exprim�s en termes de r�sultats
de sant� � atteindre : en prenant pour base de r�f�rence l'ann�e 1990,
r�duire de deux tiers la mortalit� des enfants de moins de 5 ans d'ici
2015, r�duire de trois quarts la mortalit� maternelle, et inverser la ten-
dance en mati�re de propagation du VIH/SIDA et du paludisme.
� l'�chelle mondiale, des progr�s ont �t� accomplis, gr�ce � l'am�liora-

4 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



tion significative des conditions de vie dans certaines r�gions, notam-
ment en Chine et en Inde6. L'Afrique toutefois n'est pas sur la voie d'at-
teindre ces trois objectifs, et certains pays ont m�me vu leurs indicateurs
de sant� se d�t�riorer, ce qui en fait une r�gion qui requiert une atten-
tion particuli�re de la part des organisations qui se sont engag�es �
soutenir l'atteinte des OMD. Si on consid�re aussi les autres probl�mes
de sant� non couverts par les OMD, comme les autres maladies trans-
missibles7, les maladies chroniques et les traumatismes r�sultant d'acci-
dents de la route et du travail, qui sont en rapide croissance, le fardeau
de maladie de la r�gion appara�t comme le plus lourd de toutes les
r�gions du monde. Paradoxalement, c'est en Afrique qu'on retrouve les
syst�mes de soins les moins d�velopp�s et les plus d�pourvus � tous
points de vue : ressources financi�res, �quipements, infrastructures,
consommables, personnel. Pourtant, il est bien d�montr� que les prob-
l�mes que visent les OMD peuvent �tre radicalement att�nu�s par un
acc�s � des interventions peu complexes et peu co�teuses comme la vac-
cination, la r�hydratation orale, la surveillance pr�natale et l'accouche-
ment assist�, la promotion de pratiques comme l'usage de pr�servatifs
ou de moustiquaires impr�gn�es. Pour ne citer qu'un seul exemple de
manque criant de ressources pour offrir ces services, mentionnons celui
du personnel qualifi�. Il y a des variations consid�rables entre les
grandes r�gions du monde du nombre de m�decins, infirmiers, sages-
femmes par 1000 habitants. L'Afrique sub-saharienne se d�tache nette-
ment des autres r�gions de faible et moyen revenu qui ont des effectifs
de deux � presque trois fois plus �lev�s. Quant aux r�gions plus riches,
de l'Am�rique du Nord et de l'Europe, elles ont des rapports personnel
de sant�/population jusqu'� onze fois plus �lev�s8. Bien que ses besoins
soient proportionnellement, plus grands que ceux des autres r�gions
l'Afrique a les ressources en personnel de sant�, un des intrants critiques
pour l'acc�s aux soins, de loin les plus faibles.



FINANCEMENT DES SERVICES DE SANT� ET ACC�S AUX SOINS

Aussi longtemps que l'acc�s � des soins de qualit�, en temps opportun,
ne sera pas am�lior�, la situation sanitaire en Afrique ne pourra que
stagner ou m�me se d�t�riorer. Une telle am�lioration requiert qu'on
consacre plus de fonds aux services de sant�, et qu'on alloue ces fonds
de mani�re plus efficiente.

                                                          Introduction � 5



   C'est en Afrique qu'on observe les d�penses de sant� les plus faibles :
en 2002, les d�penses totales par personne en Afrique, �taient de moins
de 10$ dans 10 pays, entre 10 et 20$ dans 20 pays et plus �lev�es dans
16 autres pays, pour lesquels des donn�es �taient disponibles (Kirigia et
al.)9. Alors que la d�pense de sant� moyenne �tait en 2004 de 32$ en
Afrique, elle �tait de 63$ en Asie, 218$ en Am�rique latine, et 3088$
dans les pays de l'OCDE10. Comme c'est en Afrique qu'on trouve les
plus faibles pourcentages de d�penses publiques consacr�es � la sant�,
c'est aussi l� que les contributions des m�nages, par le paiement direct,
sont les plus �lev�es. C'est dire que la question du financement de la
sant� se pose � la fois en termes de volume de ressources disponibles et
d'origine de ces ressources. Dans un contexte o� les services gratuits
sont insuffisants, et o� la majorit� des populations n'a pas les ressources
pour payer les services priv�s (ou m�me payer les co�ts indirects des
services publics, comme le transport ou les frais aux usagers), l'acc�s
aux soins est forc�ment limit�. Comment alors penser atteindre les
OMD, sans s'attaquer � la question du financement de la sant� ? Car,
ce sont les ressources financi�res rendues disponibles pour la sant�,
permettant l'acc�s aux autres ressources permettant de construire une
offre de soins adapt�e aux besoins des populations.



LE R�LE DE L'ASSURANCE

Les fonds pour la sant� en Afrique viennent principalement de trois
sources : le budget de l'�tat, les contributions directes des popula-
tions, l'aide internationale. Contrairement � la plupart des autres
r�gions du monde, le recours aux diverses modalit�s d'assurance pour
mobiliser des fonds et prot�ger contre les effets appauvrissants de la
mauvaise sant�, n'est pas tr�s r�pandu. Des r�gimes d'assurance obli-
gatoire couvrent les employ�s du secteur public ou les salari�s des
entreprises de grande taille dans certains pays, mais cela ne repr�sente
jamais qu'une fraction minime de la population, compte tenu du faible
d�veloppement du secteur formel de l'emploi. Des r�gimes d'assu-
rance volontaire communautaire sont apparus depuis une quinzaine
d'ann�es, mais encore l�, la population couverte est minime, ne d�pas-
sant jamais les 10 %, et surtout n'offrant qu'une couverture de servi-
ces limit�e. L'assurance volontaire commerciale est quasi inexistante
et n'a pour le moment que peu de probabilit� de d�veloppement,

6 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



compte tenu de la faible capacit� contributive des populations.
Sachant que le processus d'extension de la couverture du risque mal-
adie en est un de long terme, et que la plupart des pays qui sont par-
venus � assurer une couverture universelle l'ont fait par �tapes, sou-
vent en recourant � plusieurs strat�gies compl�mentaires, dont
l'extension de l'assurance, il nous est apparu opportun de nous
pencher sur l'�volution r�cente de l'assurance maladie et sur sa possi-
ble contribution � l'objectif d'am�lioration de l'acc�s aux soins. Notre
choix de fixer l'attention sur l'Afrique francophone part du point de
vue qu'au-del� de former une communaut� linguistique sp�cifique,
l'Afrique francophone se distingue du reste de l'Afrique par des tradi-
tions administratives et juridiques qui lui sont propres. Elles sont en
partie h�rit�es du pass� colonial de ces pays, et, en partie, auto-
g�n�r�es, mais le r�sultat est que les questions de financement ne sont
pas abord�es de la m�me mani�re, ni toujours avec le m�me langage.
Les principes fondamentaux de l'assurance sont les m�mes partout,
tout comme les concepts de base de l'�conomie de la sant�, mais l'ap-
proche du financement de la sant�, les pr�f�rences des populations
pour une modalit� ou une autre, leur disposition � consid�rer l'assur-
ance comme un m�canisme acceptable, peuvent �tre d�termin�s par
ce cadre g�n�ral que constitue la communaut� linguistique.



STRUCTURE DE L'OUVRAGE

Nous avons organis� les chapitres de cet ouvrage en fonction des
objectifs �nonc�s plus haut.
   La premi�re partie propose une introduction aux notions fonda-
mentales de la th�orie de l'assurance comme elle s'applique au risque
maladie (Letourmy) et un autre sur la place de l'assurance maladie
dans le financement de la sant� (Preker et Velenyi). Dans le m�me
ordre d'id�es, Carrin, James et Evans font un tableau g�n�ral des voies
vers la couverture universelle, et Mathonnat et Audibert, soul�vent
quant � eux le r�le de l'aide ext�rieure dans ce processus. Cette partie
plus conceptuelle, est suivie d'une autre plus empirique dans laquelle
sont pr�sent�es des exp�riences r�centes en mati�re d'assurance mala-
die obligatoire (cas du Mali, par Letourmy et Ouattara, ceux du
Gabon et de la C�te d'Ivoire, par S�ry, et du Kenya, par Carrin et

                                                         Introduction � 7



coll�gues) et d'assurance volontaire, principalement autour du
d�veloppement des mutuelles de sant� (Ndiaye, Galland). Un chapitre
portant sur la situation g�n�rale de la couverture du risque maladie en
Afrique francophone (S�ry, Letourmy) ouvre cette partie.
   La troisi�me partie traite de l'expansion de la couverture du risque
et de ses effets attendus sur la relation avec l'offre de soins, dans sa
dimension qualitative (Criel et coll�gues), ou encore dans un secteur
o� elle est moins d�velopp�e, celui des soins hospitaliers (de Rooden-
beke). Une autre dimension importante est explor�e, celle de l'effet de
l'expansion de la couverture sur la r�duction de la pauvret� (Haddad
et Morestin, Noirhomme et Thom�).
   Une derni�re partie traite des perspectives et des enjeux que
soul�ve l'objectif d'aller vers la couverture universelle du risque ma-
ladie dans le contexte Africain. Carrin et James pr�sentent les le�ons
qu'on peut tirer, pour la transition vers la couverture universelle, des
exp�riences de pays qui ont des r�gimes d'assurance maladie obliga-
toire arriv�s � une telle maturit�. Les options sont diverses, depuis la
mise en place de r�gimes couvrant des populations diff�rentes qui en
viendront � se compl�ter et � couvrir la population enti�re, jusqu'� la
mise en place d'embl�e d'une couverture g�n�rale, quitte � r�duire le
paquet de services couverts. Les approches multi r�gimes soul�vent
des probl�mes d'�quit�, � moins qu'une r�gulation forte oblige les
r�gimes � offrir une couverture minimale comparable. La solution du
passage rapide � l'universalit�, elle, soul�ve le probl�me de la disponi-
bilit� des services, et de la capacit� de l'offre de soins � satisfaire la
demande que l'acc�s financier ne manquera pas de cr�er (Fournier et
Tourigny). Le dernier chapitre (Brouillet) pose la question plus
g�n�rale de la contribution de l'assurance � la r�duction de la pauvret�
et de la place que les agences d'aide lui accordent ou m�me devraient
lui accorder.



PRINCIPAUX MESSAGES

Cet ouvrage ne cherche pas � d�courager les promoteurs de l'assu-
rance maladie en Afrique, en d�gageant une impression g�n�rale que
son expansion n'est pas chose facile et peut prendre du temps dans un
contexte o� les ressources financi�res et techniques sont limit�es, et

8 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



o� l'offre de soins est de tr�s loin insuffisante pour r�pondre � la crois-
sance de la demande que l'assurance stimulerait. Notre objectif est
plut�t de jeter un regard aussi lucide que possible sur l'�tat des lieux,
sur les contraintes � surmonter, sur les pr�cautions � prendre, et sur
les efforts � faire en termes de d�veloppement des capacit�s requises.
� cet �gard, il faut prendre en compte les exigences techniques et
administratives du bon fonctionnement des r�gimes assurantiels :
l'Afrique francophone devra se doter d'une masse critique d'actuaires,
d'�conomistes de la sant� sp�cialistes des questions de financement, de
gestionnaires de l'assurance, de m�decins-conseil, sans qui la mise en
place de r�gimes couvrant des populations importantes est impossible.
Cela suppose des programmes de formation qui pr�parent des cadres
d�j� form�s qui prendront des responsabilit�s dans ce processus d'ex-
pansion, et surtout qui pr�pareront la rel�ve qui devra assurer la
p�rennit� des r�gimes. Bien que le livre ne se soit pas appesanti sur le
sujet, il est clair que toute vell�it� d'expansion de l'assurance qui ne
serait pas accompagn�e d'un processus de renforcement de l'offre de
soins aux plans autant quantitatif que qualitatif, non seulement serait
vou�e � l'�chec, mais cr�erait des conditions d�favorables � l'assurance
pour des ann�es � venir.
   Les messages � retenir donc, sont que l'assurance maladie peut jouer
un r�le dans l'expansion de la couverture du risque ; que le m�canisme de
l'assurance volontaire, bien qu'il se d�veloppe dans la plupart des pays,
ne permet que des avanc�es modestes et exige beaucoup de temps pour
prendre de l'ampleur ; que l'assurance obligatoire offre des perspectives
plus encourageantes, mais limit�es du fait des difficult�s de sa mise en
place en dehors du march� du travail formel, qui ne repr�sente que 15-
20 % de la population active ; que l'assurance soul�ve un probl�me
d'�quit�, du fait de l'exclusion des plus pauvres qui ne peuvent assumer
les primes ; qu'en toutes circonstances, des principes fondamentaux d'or-
ganisation et de gestion doivent �tre respect�s, pour la survie de quelque
r�gime; que les capacit�s techniques doivent �tre disponibles, de m�me
qu'une offre de soins ad�quate.
   Nous esp�rons donc faire oeuvre utile en pr�sentant aux d�cideurs,
aux responsables des politiques, aux professionnels de sant�, un
ouvrage qui saura les aider � bien s'engager dans ce d�bat sur l'assu-
rance maladie, qui ne manquera pas de se faire ces prochaines ann�es.

                                                        Introduction � 9



NOTES

 1. Voir Actes du colloque : http://www.ces-asso.org/Pages/ESPAD-
ColloqueWBI-IMA-CES.html


 2. Guy Carrin et Jean Perrot de l'OMS Gen�ve, Saidou Barry, Sey-
dou Coulibaly, de l'OMS Afrique.


 3. Christian Jacquier, Christine Bockstal (Programme BIT/STEP).


 4. Parmi eux : Oumar Ouattara, Innocent Gakwaya, Jean-Pierre
S�ry, Abdoulaye Nti�ma, Kada� Abatcha qui ont jou� un r�le de forma-
teur ou facilitateur � diverses occasions.


 5. La Concertation entre les acteurs de d�veloppement des mutuelles
de sant� en Afrique est un r�seau de partage d'exp�riences, de comp�-
tences et d'informations sur le d�veloppement des mutuelles de sant� en
Afrique qui fonctionne depuis 1999. La Concentration a produit en 2004
un inventaire des mutuelles dans 11 pays francophones d'Afrique
(www.concertation.org/atelier/forum2004/Plenieres/Inventaire03.pdf)


 6. World Bank, Global Monitoring Report 2005 : From Consensus
to Momentum, Washington, The World Bank, 2005 ; World Health
Organization, Health and the Millennium Development Goals,
Geneva, WHO, 2005


 7. Trypanosomiase, leishmaniose, filariose, dracunculose, trachome,
l�pre, schistosomiase, etc.


 8.     Joint Learning Initiative, 2004. Human Resources for
Health : Overcoming the Crisis, Cambridge, Harvard University Press,
p. 29.


 9. La portion publique de ces d�penses �tait de moins de 10$ dans
29 pays, entre 10 et 30$ dans 5 autres et de plus de 30$ dans 12 pays
(J.M. Kirigia, et al., 2005. An Overview of Health Financing Patterns
and the Way forward in the WHO African Region, Organisation mon-
diale de la Sant�, Bureau r�gional pour l'Afrique, non publi�.

10 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



10. Source : Banque mondiale, Donn�es et Statistiques, http://
wbln0018.worldbank.org/EXT/French.nsf/DocbyUnid/FCA23E372
C13546B85256D870053BE54?Opendocument

                                                        PARTIE 1

                     Assurance maladie
 et financement de la sant�

Chapitre 1: Assurance maladie : un cadre g�n�ral d'analyse en vue de
son implantation dans les pays d'Afrique francophone
   Alain Letourmy

Chapitre 2: Aspects pratiques du montage et du fonctionnement de
l'assurance maladie en Afrique francophone
   Alain Letourmy

Chapitre 3: Expansion des programmes gouvernementaux
d'Assurance-maladie obligatoire en Afrique du l'Ouest � Possibilit�s
et contraintes
   Alexander Preker et Edit Velenyi

Chapitre 4: Atteindre la couverture universelle : le d�veloppement du
syst�me de financement
   Guy Carrin, Chris James et David Evans

Chapitre 5: Aide ext�rieure au secteur de la sant� � choix des
instruments et enjeux
   Jacky Mathonnat et Martine Audibert


                                                                          CHAPITRE 1



     Assurance maladie : Un cadre g�n�ral
       d'analyse en vue de son implantation
        dans les pays d'Afrique francophone

                                                                   Alain Letourmy




   R�sum� : La promotion de l'assurance maladie en Afrique de l'Ouest vise
   l'introduction d'une activit� de services nouvelle dans ces pays. On rappelle ici
   les principes g�n�raux de l'assurance, puis les conditions particuli�res de son
   fonctionnement pour la couverture du risque de maladie. Pour tenir compte des
   particularit�s du terrain, on pose les questions de la demande d'assurance en
   Afrique de l'Ouest, des populations �ligibles et du panier de soins � couvrir.
   Enfin, en fonction de la vari�t� des formes possibles d'organisation de l'activit�,
   on analyse les possibilit�s d'offre d'assurance maladie. Vu l'�troitesse du march�
   potentiel, ce sont les formes solidaires qui retiennent l'attention, qu'elles soient
   obligatoires ou volontaires.




INTRODUCTION

L'assurance maladie appara�t aujourd'hui, dans les pays � faible revenu,
comme une technique susceptible de favoriser l'atteinte de nombreux
objectifs (Letourmy A. et al., 2005). Pour ceux qui veulent am�liorer
le financement et le fonctionnement du secteur de la sant�, l'assurance
maladie va faciliter l'acc�s aux soins, en r�duisant la part du paiement
direct des services, et solvabiliser du m�me coup la demande aux


                                                                                        13

14 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



formations de sant�. Dans le cadre de la lutte contre la pauvret�
(Holzmann, Jorgensen, 2000), l'assurance maladie est un �l�ment cen-
tral de la r�duction de la vuln�rabilit� des populations et de limitation
de la pauvret� iatrog�ne. La cr�ation de branches d'assurance maladie
est aussi un moyen d'�tendre les syst�mes de protection sociale. Dans
la mesure o� l'assurance maladie repr�sente un financement issu des
m�nages, la repr�sentation de ceux-ci au niveau de la gestion et de la
gouvernance des organismes est un facteur de diffusion de la d�mo-
cratie. Enfin, l'assurance maladie doit participer de l'extension du
march� des assurances que certains voient comme un levier de
d�veloppement des march�s financiers.
   Au-del� des objectifs vis�s, il faut prendre conscience de ce que la
mise en place de l'assurance maladie repr�sente une innovation tech-
nique et institutionnelle tr�s importante dans la plupart des pays �
faible revenu. On y observe sans surprise que la diffusion de l'assu-
rance maladie se heurte � de nombreux facteurs �conomiques, sociaux
et politiques et il importe de rep�rer ces obstacles pour tenter de les
franchir. Autrement dit, la mise en �vidence de bonnes pratiques en
mati�re de promotion, de construction et de d�veloppement de
l'assurance maladie devrait �tre la pr�occupation des personnes en
charge de responsabilit�s au sein des secteurs concern�s et de ceux qui
les appuient. Dans cette perspective, r�fl�chir au cadre d'analyse de
l'activit� d'assurance maladie dans le contexte des pays d'Afrique de
l'Ouest ne constitue pas une d�marche superflue.
   On se propose ici de rappeler dans un premier temps les caract�ris-
tiques fondamentales de l'activit� d'assurance maladie. Puis, on
esquisse une pr�sentation du contexte dans lequel l'assurance maladie
est appel�e � se d�velopper. On aboutit enfin � une focalisation de
l'analyse sur l'activit� d'assurance maladie dans un cadre non mar-
chand, qui appara�t comme la principale voie de d�veloppement de
l'activit� dans les pays consid�r�s.



CARACT�RISTIQUES G�N�RALES DE L'ACTIVIT�
D'ASSURANCE MALADIE

Quatre aspects de l'assurance maladie retiendront ici l'attention.
D'abord, deux types de questions qui d�coulent de son caract�re pro-
prement assurantiel : les bases probabilistes de l'activit� et les

                                                     Assurance maladie � 15



probl�mes d'information associ�s au march� des assurances. Puis, ce
qui repr�sente v�ritablement sa sp�cificit� au sein des assurances, la
n�cessaire relation des assureurs avec les prestataires de soins. Enfin,
on examinera certaines des cons�quences de cette relation pour la ges-
tion du risque et la viabilit� des r�gimes.


Les bases probabilistes de l'activit�

Comme tout dispositif d'assurance, l'assurance maladie fait r�f�rence
� la notion de risque. D'une fa�on g�n�rale, le risque qualifie la possi-
bilit� d'incidence impr�visible d'un �v�nement dont les cons�quences
sont dommageables pour une personne (sinistre). On lui associe une
probabilit� de perte mon�taire pour la personne, suite � l'occurrence
de l'�v�nement ind�sirable. L'assurance offre � la personne expos�e au
risque de couvrir tout ou partie de de la perte mon�taire, en con-
trepartie du paiement r�gulier d'une prime. Elle repr�sente l'engage-
ment d'une indemnisation, dont le mode de calcul est d�termin� ex-
ante. Cette indemnisation va intervenir en cas de sinistre, selon les
conditions fix�es par la garantie du contrat propos� par l'assureur.
   Le m�canisme repose d'une part sur le besoin ressenti par la personne
de se prot�ger face au risque. Ce besoin induit une demande de protec-
tion qui est plus ou moins substantielle selon le risque per�u, les possibi-
lit�s d'att�nuation des cons�quences du dommage ou le niveau de revenu.
D'autre part, l'assureur peut faire une offre de protection, dans la mesure
o� il est capable de mutualiser les risques, c'est-�-dire de compenser sur
un exercice la r�alisation de sinistres � forte indemnisation pour certaines
personnes, par la r�alisation de sinistres � faible indemnisation ou par
l'absence de sinistres pour d'autres. En d�pit du caract�re al�atoire de la
perte individuelle, la moyenne des pertes mon�taires individuelles a une
limite finie lorsque le nombre d'assur�s tend vers l'infini et que les risques
sont ind�pendants. Cette limite d�termine la prime actuarielle qui sert de
base � l'offre de l'assureur (loi des grands nombres). En outre, dans les
m�mes conditions, la somme des pertes individuelles (centr�e et r�duite)
tend vers une loi normale (th�or�me central limite), ce qui permet �
l'assureur d'appr�cier le niveau de r�serves souhaitable pour la viabilit� de
son activit� (Henriet D. , Rochet J. Ch., 1991).
   Ces rappels �l�mentaires indiquent d'abord que les effectifs de
personnes dispos�es � payer une prime constituent une donn�e essen-
tielle pour le bon fonctionnement de l'assurance. C'est un param�tre

16 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



fondamental en mati�re de mutualisation du risque et de viabilit� de
l'activit�. Par ailleurs, l'ind�pendance des risques est �galement �
prendre en consid�ration. En cas d'�pid�mie, de catastrophe
naturelle, les r�sultats g�n�raux �voqu�s ci-dessus ne sont plus va-
lables. Plus g�n�ralement, tout risque n'est pas assurable, dans la
mesure o� l'appr�ciation de la perte associ�e est tr�s incertaine.
Enfin, la capacit� d'estimation de la perte mon�taire et de la proba-
bilit� d'occurrence du sinistre est �videmment indispensable pour
mener � bien l'activit�, bien qu'il ne soit pas toujours ais� de d�ter-
miner ces �l�ments au moment de son lancement ou en fonction de
l'�volution du contexte.
   On peut alors comprendre que la pratique de l'assurance doive
composer avec les conditions r�elles d'occurrence du risque et de son
co�t et c'est bien cette adaptation qui est au coeur du m�tier. Con-
cr�tement, l'assureur cherchera en permanence des parades � la taille
des effectifs, � l'augmentation du risque, � l'incidence de sinistres
entra�nant des pertes hors normes. A l'assurance directe seront ajout�s
des m�canismes visant � partager le co�t du risque entre divers op�ra-
teurs. La r�assurance permettra de se d�charger d'une partie du risque
sur un assureur plus robuste, la co-assurance organisera un partage de
l'indemnisation entre plusieurs op�rateurs. Le partage du risque sera
�galement envisag� avec les assur�s eux-m�mes. Cela en liaison
directe avec les probl�mes d'information inh�rents � l'activit�.


Les probl�mes d'information associ�s au march� de l'assurance

La nature contractuelle de la relation entre assureur et assur� est �vi-
dente et, au minimum, trois clauses consubstantielles aux contrats1
expriment cette relation. En premier lieu, les deux parties s'entendent
sur un objectif commun : la protection de la personne contre les con-
s�quences d'un sinistre. Ensuite, elles s'accordent sur un principe de
r�ciprocit� qui s'applique � des devoirs et � des droits. La garantie
repr�sente l'engagement principal de l'assureur et le versement de la
contribution celui de l'assur�. L'assureur est en m�me temps fond� �
contr�ler la r�alit� de l'occurrence du risque � couvrir et l'assur� �
exiger l'application stricte de la garantie. En cas de litige, il doit exister
une instance susceptible de r�gler le conflit sur le plan du droit. Ce
recours est pr�vu ex-ante et constitue le troisi�me �l�ment contractuel
de la relation entre r�gime et assur�.

                                                    Assurance maladie � 17



   Dans le cadre de l'adh�sion � des r�gimes priv�s commerciaux
volontaires, les traits contractuels de l'assurance sont explicites. Pour
les r�gimes publics obligatoires, les aspects contractuels sont
implicites, mais il n'y a pas de contrat au sens juridique du terme, on
est plut�t dans le domaine du � contrat social �. Pour les r�gimes
priv�s � but non lucratif volontaires (mutuelles) les assur�s adh�rent
d'abord � un organisme avant de contracter une police d'assurance.
Toutefois, les aspects contractuels de l'adh�sion sont explicites et ont
un caract�re juridique.
   Du point de vue de l'�conomie, le contrat d'assurance, explicite ou
non, se caract�rise par une asym�trie d'information entre les deux par-
ties. Deux formes d'asym�trie sont � prendre en consid�ration, l'une
relative � l'�tat d'exposition au risque de l'assur�, que l'assureur con-
na�t imparfaitement ; l'autre � l'action de l'assur� par rapport au risque
que l'assureur ne peut ma�triser.
   On parle de s�lection adverse (ou d'anti s�lection) lorsque la
demande d'assurance est la cons�quence directe d'un niveau de risque
�lev�, connu de l'assur�, mais pas de l'assureur. De fa�on plus
g�n�rale, les �conomistes ont pris l'habitude d'utiliser la notion de
s�lection adverse pour traiter de toutes les relations d'agence avec
asym�trie d'information, lorsque les caract�ristiques de l'Agent sus-
ceptibles d'avoir un effet sur la relation sont imparfaitement connues
du Principal. Une solution est pour ce dernier de mettre en place des
m�canismes obligeant l'agent � la r�v�lation de cette information2.
   On parle d'al�a moral ou hasard moral, lorsque le fait d'�tre assur�
augmente le risque en raison d'une plus grande n�gligence de la per-
sonne. L� aussi les �conomistes ont pris l'habitude d'utiliser la notion
de hasard moral de fa�on plus g�n�rale, pour traiter de toutes les rela-
tions d'agence avec asym�trie d'information. Il y a hasard moral
lorsque la d�cision de l'Agent qui affecte le bien-�tre du Principal
n'est pas parfaitement observable par ce dernier. Le Principal cherche
alors � agir � son profit sur l'action de l'Agent par le biais d'incitations.
Dans le cas de l'assurance, l'incitation passe par un partage du co�t du
risque. L'assureur impose une franchise ou un co-paiement � l'assur�
pour stimuler sa vigilance en mati�re d'exposition au risque.
   Les probl�mes li�s � l'information mettent en question les r�sultats
de la th�orie micro�conomique qui reposent sur une hypoth�se d'in-
formation parfaite. Ainsi l'�quilibre concurrentiel des march�s d'as-
surance n'est pas automatiquement atteint en cas de s�lection adverse

18 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



ou de hasard moral et un �quilibre de march� n'est pas forc�ment un
optimum. De m�me, les contrats avec asym�trie d'information ne sont
pas forc�ment optimaux ou efficaces. Ainsi, le march� des assurances
fournit un prototype de march� imparfait, ce qui justifie la recherche
d'optimum de second rang, �ventuellement l'intervention de l'�tat.
   En pratique, assur�s et assureur vont essayer d'obtenir le contrat le
plus int�ressant et vont d�velopper des comportements strat�giques,
qui peuvent entra�ner le d�ficit de l'activit� pour l'assureur ou l'exclu-
sion d'une partie des personnes potentiellement assurables. L'inter-
vention du r�gulateur devient alors l�gitime, par exemple au profit des
assur�s, en cas de s�lection des risques par l'assureur, jug�e excessive
au regard du besoin d'assurance de la population. Sym�triquement,
l'assureur sera autoris� � introduire un d�lai de carence entre le
moment o� l'assur� commence � cotiser et celui o� il peut b�n�ficier
de la garantie ou encore � appliquer des franchises particuli�res,
lorsque le niveau de risque de certaines cat�gories d'assur�s est �lev�,
pour faciliter l'�quilibre technique de l'assurance. Par exemple, la
franchise appliqu�e aux jeunes conducteurs est admise en assurance
automobile.


La relation avec les prestataires de soins

La sp�cificit� de l'assurance maladie tient � ce qu'elle est fond�e sur
l'identification de la maladie � un risque assurable. La d�marche para�t
aller de soi, mais elle peut se r�v�ler assez difficile � mettre en oeuvre en
pratique. L'assimilation de la maladie � un risque ne souffre pas de con-
testation, mais ne suffit pas � fonder son � assurabilit� �. Il faut qu'une
d�finition objective de la situation de maladie permette la reconnais-
sance de l'occurrence et de la nature du sinistre, pour servir de base � la
construction d'un contrat et la mise au point d'une garantie. La ques-
tion du constat objectif de l'incidence d'un risque et de la nature du
sinistre se retrouve pour toutes les formes d'assurances, qu'elles s'ap-
pliquent � des biens ou � des personnes. Face � de nombreux risques,
l'assureur tend � avoir la ma�trise enti�re de sa r�solution et ce sont ses
experts qui sont charg�s d'attester que tel accident ou sinistre est inter-
venu, puis de chiffrer ses cons�quences pour l'assur�.
   La situation de maladie, du fait de l'urgence qu'elle cr�e et de la
repr�sentation li�e � la souffrance et la mort qu'elle v�hicule, pose deux
types de probl�mes � cet �gard. D'une part, elle est d'abord ressentie et

                                                   Assurance maladie � 19



reconnue par la personne elle-m�me. Si cette reconnaissance ne peut
�tre consid�r�e comme la d�finition objective de l'incidence du risque,
elle donne lieu g�n�ralement au recours � un th�rapeute. Celui-ci pres-
crit un traitement qui constitue un des co�ts entra�n�s par la maladie.
D'autre part, il est admis qu'une d�finition objective de la maladie est
disponible lorsqu'il y a recours � la m�decine et �nonciation d'un diag-
nostic. M�me s'il a ses propres m�decins experts, l'assureur ne peut
g�n�ralement pas faire autrement que de s'en remettre a priori au
th�rapeute que la personne a consult� pour produire le diagnostic
m�dical et prescrire un traitement. Il lui conf�re alors un pouvoir tr�s
important qui est de participer � la fois au constat du sinistre et d'en
fixer une partie des cons�quences financi�res. De ce fait l'assurance
maladie se distingue d'embl�e de la couverture d'autres risques par le
r�le privil�gi� qu'elle donne au prestataire de soins et par le potentiel
de conflits ou de tensions qui en d�coule.
   Un premier type de conflit renvoie � la n�cessit� pour l'assureur de
lever une s�rie d'ambigu�t�s, qui sont en fait consubstantielles � la
maladie elle-m�me. Le r�sultat est que l'assureur ne va pas consid�rer
que toute situation de maladie donne lieu au d�clenchement de la
garantie, ni que toute intervention m�dicale, justifi�e du point de vue
de la sant� � des fins de pr�vention ou de traitement, correspond � une
situation de sinistre couvert par la garantie (voir encadr� 1).
   Un deuxi�me type de conflit d�coule de la situation triangulaire entre
assureur, assur� et prestataire, qui rend plus complexe la gestion des
probl�mes d'information et, plus g�n�ralement, la gestion du risque.


La gestion du risque maladie et la viabilit� de l'assurance maladie

L'�quilibre de l'activit� d'assurance d�pend de la mise en oeuvre des
diverses techniques de gestion du risque destin�es � contr�ler l'�cart
qui va intervenir entre le co�t du risque estim� et le co�t du risque r�el.
   Cet �cart provient :

� des al�as associ�s aux ph�nom�nes morbides, � la survenue d'�pid�mies
   ou d'accidents collectifs par exemple ;

� de l'augmentation du co�t des soins qui peut intervenir au cours
   d'un exercice sans avoir �t� enti�rement anticip�e

� des comportements strat�giques des assur�s et des professionnels.

20 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




   Encadr� 1 : Exemples de la diff�rence entre situation de maladie et risque
   couvert par l'assurance maladie.

   Ces exemples correspondent � des pratiques r�elles, dans des circonstances parti-
   culi�res qui seront revues plus loin. En premier lieu un certain nombre de situations
   de maladie av�r�e pourront �tre exclues par l'assureur du b�n�fice de la garantie. Il
   s'agira par exemple de maladies co�teuses, telles que les affections � VIH ou plus
   g�n�ralement les maladies chroniques qui n'ont qu'une possibilit� de stabilisation et
   aucune chance de gu�rison. Dans ce cas, l'exclusion est �ventuellement justifi�e par
   le souci de viabilit� de l'activit� d'assurance.
       En deuxi�me lieu, toute une s�rie d'actes m�dicaux pourront �tre consid�r�s par
   l'assureur comme hors du champ d'intervention de l'assurance maladie, car ils visent
   la r�paration de situations qui ne correspondent qu'imparfaitement � la conception
   de la maladie comme �v�nement al�atoire ind�sirable. En fait les situations exclues
   seront provoqu�es par les personnes elles-m�mes et, r�sultant de leur volont�, ne
   seront pas assimilables � un risque subi. L'exemple classique est celui de la chirurgie
   esth�tique, dont la plupart des r�gimes d'assurance maladie estiment qu'elle rel�ve
   de la d�cision individuelle et pas de l'occurrence d'un risque. De m�me les actes qui
   sont pr�visibles seront exclus ou mal couverts : actes programmables, pathologies
   li�es de fa�on inexorable au vieillissement (cas des lunettes).
       En troisi�me lieu, l'assureur refusera de prendre en consid�ration les actes et les
   th�rapies dont l'utilit� et l'efficacit� ne sont pas reconnues. Par exemple, dans les
   pays d�velopp�s, toute une s�rie de th�rapies douces, ou encore la cure de psy-
   chanalyse, pourront �tre rejet�es. Dans les pays en d�veloppement, c'est tout le
   champ des th�rapies traditionnelles qui sera en d�bat.



La gestion du risque doit r�soudre le dilemme de l'assurance maladie
qui est de ma�triser le risque et, en m�me temps, de contribuer �
faciliter l'acc�s aux soins. Elle repose sur un suivi rigoureux des si-
nistres et des soins qu'ils entra�nent et sur une analyse des prestations
servies. On se contentera ici d'�voquer les moyens de limiter les com-
portements strat�giques des assur�s et des professionnels.
   La s�lection adverse et le hasard moral constituent en effet des fac-
teurs de mise en p�ril des r�gimes d'assurance maladie. Ils sont justi-
ciables de traitements diff�rents, qui impliquent plus ou moins les
professionnels de soins. En outre, la gestion du risque doit aussi pren-
dre en compte le comportement des professionnels de sant�, qui, pris
individuellement, n'ont pas pour vocation de contribuer � l'�quilibre
de l'activit� d'assurance.
   La s�lection adverse dispara�t lorsqu'on supprime la libert� de choisir
l'adh�sion � l'assurance maladie. Les r�gimes obligatoires, de type

                                                                  Assurance maladie � 21




      Enfin, une partie des actes de pr�vention sont traditionnellement exclus,
   puisqu'ils ne correspondent pas � une intervention cons�cutive � un �tat morbide.
      Ces exemples montrent � la fois les limites que l'assurance impose � l'assimila-
   tion de la maladie � un risque assurable, ce qui se comprend du point de vue de la
   viabilit� de l'activit� elle-m�me, et le caract�re arbitraire, voire scandaleux de cer-
   taines exclusions.
      Par exemple, on comprend que les affections � VIH ne puissent relever d'un
   risque assurable, mais c'est bien un cas dans lequel l'intervention de l'assurance
   maladie prend tout son sens, car les co�ts des soins d�passent la capacit� finan-
   ci�re individuelle. S'agissant de chirurgie esth�tique, il convient de rappeler la faible
   distance existant entre des interventions dont la n�cessit� organique n'appara�t pas,
   celles qui deviennent pour un individu un besoin psychologique fort et celles qui
   rel�vent de la chirurgie r�paratrice d'un �tat non imputable � une personne et lui
   cr�ant des dommages (fente labiale du nouveau-n� par exemple). S'agissant des
   co�ts de sant� a priori pr�visibles, on peut aussi discuter en fonction de l'�tat des
   connaissances et il n'est pas forc�ment inefficient de ne pas attendre l'incidence
   d'un �tat pour l'am�liorer. La question de l'efficacit� des actes peut souvent �tre dis-
   cut�e, notamment dans des domaines comme celui de la maladie mentale o� la
   m�decine moderne n'a pas toujours d'excellentes performances et a tendance �
   exclure ce qui n'est pas acad�mique. Enfin, pour la pr�vention, il est �vident que l'as-
   sureur a int�r�t � l'encourager dans un grand nombre de cas. Il suffit de songer aux
   vaccinations et � toute la pr�vention primaire. Pour la pr�vention secondaire, il est
   discutable de prendre en charge des d�pistages de maladies qu'on ne sait pas
   soigner, mais l� aussi l'intervention pr�coce est souvent efficiente.




assurance sociale ou de type assurance de groupe en entreprise,
r�alisent automatiquement la compensation des risques. Ils cons-
tituent le meilleur antidote contre l'antis�lection. En cas d'adh�sion
volontaire, l'assureur a deux moyens classiques d'�viter que la sur-
repr�sentation des mauvais risques ne mette en danger son activit� : la
tarification s�lective fond�e sur une information m�dicale, la mise en
place d'un ticket d'entr�e plus ou moins �lev�.
   La possession d'une information sur l'�tat de sant� des assur�s est
pour l'assureur une ressource strat�gique, et il est pr�t � payer pour
l'obtenir. Au moment de l'adh�sion, l'assureur posera comme condi-
tion du contrat d'avoir une id�e de l'�tat de sant� de chaque assur�
potentiel, soit en lui faisant remplir un questionnaire m�dical o� l'as-
sur� engagera sa responsabilit� par rapport aux renseignements qu'il
fournit, soit en lui faisant passer un examen m�dical par un m�decin
agr��. Avec cette information, l'assureur pourra ajuster la prime au

22 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



risque, �ventuellement refuser d'assurer la personne (en cas de
pathologie particuli�re comme le VIH par exemple). Ainsi l'assureur
sera enclin � proposer des contrats diff�rents aux personnes deman-
deuses, selon leurs caract�ristiques de sant�. Mais, comme cela a �t�
annonc� de fa�on g�n�rale, il sera limit� dans cette d�marche par la
puissance publique. Celle-ci sera ici d'autant plus vigilante qu'il s'agit
de sant�.
   La s�lection adverse est combattue aussi par la mise en place non
s�lective d'un ticket d'entr�e, qui s'appliquera � tous les nouveaux
assur�s. Le ticket d'entr�e se pr�sente sous des formes diverses. Clas-
siquement, l'assureur impose une p�riode de stage (ou d�lai de carence)
de quelques mois o� l'assur� paie la prime ou la cotisation sans avoir
acc�s � la garantie. Cela �vite en principe que les personnes attendent
d'�tre malades pour adh�rer. Dans le cas particulier de la prise en
charge de la grossesse, une p�riode de stage de 9 mois est une des con-
ditions d'adh�sion dans la plupart des r�gimes volontaires. L'assureur
peut aussi faire payer un droit d'entr�e, destin� officiellement � couvrir
les frais d'enregistrement, mais qui peut s'av�rer dissuasif. Un autre
dispositif de type � ticket d'entr�e � est le suppl�ment de cotisation
impos�, lorsque la personne a attendu pour adh�rer, alors qu'elle avait
la possibilit� de le faire plus t�t. Par exemple, les fonctionnaires qui
repoussent l'adh�sion � une mutuelle apr�s leur date d'int�gration � la
fonction publique seront p�nalis�s. Enfin, pour combattre les com-
portements de passager clandestin, l'assureur utilisera la radiation,
lorsqu'une personne d�cide de ne plus cotiser sans motif valable. Elle
ne peut alors obtenir sa r�int�gration ult�rieurement.
   La question du risque moral est assez d�licate en assurance maladie et
cela explique qu'elle ait donn� lieu � des discussions conceptuelles,
autour de la relation entre assurance maladie et demande de soins.
L'al�a moral bien connu des assureurs, quel que soit le risque consi-
d�r�, d�signe une moindre pr�occupation � l'�gard du risque. Ainsi un
conducteur de voiture assur� serait moins attentif au risque d'accident
que celui qui doit payer par lui-m�me les r�parations. Une personne
assur�e contre la maladie n'aurait plus de raison de ne pas consulter et
elle pourra le faire pour un oui ou pour un non. L'assureur sera ainsi
amen� � prendre en charge toute une s�rie d'actes qui auraient �t�
�vit�s en cas de non assurance. La d�monstration de l'existence de ce
comportement est sujette � discussion. En effet, on retrouve ici ce qui

                                                    Assurance maladie � 23



a �t� dit de la difficult� de d�finir la maladie comme risque assurable.
Cette notion de hasard moral sous-entend qu'il y aurait des consulta-
tions m�dicales �vitables et des consultations l�gitimes, ce qui ne
repose sur aucune r�f�rence. Mais certains �conomistes (Pauly, 1968)
parlent aussi de hasard moral pour traiter de l'effet prix de l'assurance
sur la demande de soins. Il est incontestable que l'assurance maladie
est destin�e � abaisser la barri�re financi�re des soins. Le fait d'�tre
assur� ne se traduit pas seulement par une r�duction de la vigilance �
l'�gard du risque, dont le co�t est plus faible (hasard moral ex-ante), il
doit entra�ner, toutes choses �tant �gales par ailleurs, un recours plus
�lev� aux soins (hasard moral ex-post). Selon Pauly, trop d'assurance
entra�nerait ainsi une perte de bien-�tre en �liminant le r�le incitatif
du prix comme r�gulateur de la demande. On voit que le d�bat
entra�ne sur le terrain de l'�lasticit�-prix de la demande de soins et de
la substitution qui s'op�re entre une consommation de soins devenue
gratuite et la consommation d'autres biens et services.
   Quoi qu'il en soit, les r�gimes mettent en place des dispositifs des-
tin�s au d�part � limiter les effets du hasard moral. Ils reviennent tous
� responsabiliser l'assur�, en lui imposant une tarification rendant
compte de son recours effectif aux soins ou un partage du co�t du
risque. Dans les assurances priv�es, la tarification ajust�e selon le
niveau de risque constat� constitue une r�ponse au hasard moral ex-
post. Le prix de l'assurance vient se substituer au prix des soins
comme r�gulateur du comportement. Cette pratique qui s'apparente �
un syst�me de bonus/malus met en question la fonction de l'assurance
comme facilitateur de l'acc�s aux soins.
   Le partage prend �ventuellement plusieurs formes : la franchise
pr�voit la prise en charge du co�t au-del� d'un certain montant, le
ticket mod�rateur ou co-paiement laisse au malade la charge d'une
partie de chaque co�t m�dical, le plafond limite le montant total du
remboursement � un certain montant. Ces dispositifs, d�finis en
amont du recours aux soins, reviennent � limiter le risque r�ellement
couvert, puisqu'ils r�alisent un partage du risque plus favorable �
l'assureur.
   Ils sont plus ou moins efficaces pour r�guler la charge financi�re de
l'assureur et ont des cons�quences variables pour l'assur� en cas de
maladie. Leur caract�re aveugle et inique peut alors �tre critiqu�.
Aveugle, parce qu'ils vont s'appliquer � toutes les situations de maladie

24 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




   Encadr� 2 : Le risque moral ex-post

   Les �conomistes de la sant� ont raffin� la notion de hasard moral, bien connue des
   assureurs. Ils distinguent les comportements de n�gligence par rapport au risque
   (hasard moral ex-ante) de la surconsommation li�e � l'existence de l'assurance, qui
   r�duit ou �limine l'effet prix (risque moral ex-post). Pauly a �mis l'id�e que le risque
   moral ex-post diminuait le gain que l'assurance apporte � la collectivit� (Pauly, 1968).
   A �tat de sant� donn�, un assur� va d�penser plus qu'un non assur� et, selon Pauly,
   le bien-�tre collectif s'en trouve r�duit. L'origine de la perte de bien-�tre vient de ce
   que la d�pense est support�e par l'ensemble des assur�s qui voient leurs primes
   augmenter. Chacun gagne individuellement, mais l'allocation des ressources est
   contestable du point de vue collectif.
       Cette analyse repose d'une part sur un constat empirique consensuel : les
   assur�s consomment plus que les non assur�s ; d'autre part sur une hypoth�se : il
   existe une demande de soins, caract�ris�e, comme pour la plupart des autres biens
   et services par une �lasticit�-prix n�gative. Le constat empirique relatif � l'effet de
   l'assurance est en fait plus complexe que la simple augmentation de la d�pense. Elle
   peut aussi entra�ner une augmentation du prix des soins et une am�lioration de la
   qualit� (Bardey et al., 2002). Or, la r�duction de bien-�tre �voqu�e par Pauly ne prend
   en compte que l'effet volume et repose sur l'�quivalent mon�taire de la satisfaction
   tir�e de la consommation. Il faut admettre que le niveau de la consommation de soins
   d�termine le niveau de consommation, mesurable par le surplus exprim� en mon-
   naie. Il faut aussi admettre que l'�lasticit� prix de la demande de soins est n�gative,
   ce qui a �t� v�rifi� empiriquement dans un grand nombre de cas, mais on sait aussi
   que la valeur de cette �lasticit� est sujette � d'importantes variations selon les
   �tudes. La perte de bien-�tre ne peut donc �tre �valu�e de fa�on consensuelle. Cor-
   r�lativement, les mesures � prendre pour r�duire l'effet du risque moral ex-post sont
   discutables. Le principe g�n�ral est que la couverture assurantielle compl�te est
   n�faste et qu'il faut imposer des co-paiements pour revitaliser l'effet-prix. En pra-
   tique, le ticket mod�rateur doit-il �tre appliqu� uniform�ment ou bien doit-il �tre




et peuvent r�guler l'acc�s aux soins au-del� des effets de l'al�a moral.
Inique car ils augmentent le co�t pour le malade et vont donc frapper
les assur�s les moins favoris�s.
   Dans les r�gimes d'assurance sociale, ces inconv�nients retiennent
l'attention et l'on y met en place des antidotes � l'iniquit� : en plafon-
nant le ticket mod�rateur sur une p�riode donn�e, en d�finissant de
fa�on diff�rentielle les co-paiements. On proposera aussi des tickets
mod�rateurs fond�s sur l `�tat de sant� ou sur les ressources de l'assur�.
Pour certaines pathologies, le ticket mod�rateur sera supprim�. Cela
sera classique dans le cas des pathologies chroniques, r�put�es longues

                                                                Assurance maladie � 25




  modul� selon le type de soins ? Certains avancent qu'il y a consensus pour dire que
  cette probl�matique s'applique mieux aux proth�ses dentaires qu'aux soins hospital-
  iers, dont le demande serait moins sensible aux prix (Bardey D. et al., 2002). On peut
  discuter ce genre de jugement.
      Le probl�me de fond li� au risque moral ex-post est la fa�on d'interpr�ter la � sur-
  consommation �. Pour Pauly, la responsabilit� du patient assur� est en cause. Pour
  d'autres �conomistes, la notion de demande de soins doit �tre analys�e de fa�on plus
  sp�cifique. En fait, la relation m�decin malade donne un poids important au m�decin et
  l'on est � nouveau dans une relation d'agence avec asym�trie d'information. Mais le
  hasard moral est alors le fait du m�decin. On va parler plut�t de demande induite. La
  responsabilit� serait plac�e du c�t� de l'offre et les mesures � prendre seraient de
  type � r�gulation des pratiques m�dicales �. Une litt�rature abondante a �t� con-
  sacr�e � la demande induite, sans que les tests �conom�triques aient �t� d�cisifs.
  Cette th�orie de la surconsommation est aussi plausible que la pr�c�dente et il est
  d'ailleurs int�ressant de poser la question de l'effet de l'assurance du patient sur la
  demande induite (Bardey D., Lesur R. , 2004). Cette approche d�bouche sur des
  mesures mixtes, combinant ticket mod�rateur et contr�le des prescriptions.
      Si l'on veut transposer ce d�bat dans les pays en d�veloppement, on doit pouvoir
  r�pondre � deux questions. En premier lieu, quand y a t-il sur-consommation ? En
  second lieu, comment b�n�ficier de l'apport de l'assurance comme facilitateur de
  l'acc�s aux soins sans ouvrir la porte � des exc�s de consommation ? Il faut admettre
  que personne n'a de r�ponse quant au niveau optimal de consommation de soins au
  sein d'une collectivit�. Il faut observer aussi que le probl�me des pays en d�veloppe-
  ment est la faiblesse de la consommation de soins m�dicaux et qu'on est tr�s loin de
  la situation des pays industrialis�s. Les questions li�es au risque moral doivent �tre
  prises au s�rieux lorsqu'on met en place l'assurance maladie en Afrique de l'Ouest.
  La d�pense de soins doit n�anmoins �tre encourag�e, eu �gard aux besoins sani-
  taires des populations. Toute la question est de savoir si l'on est dans une probl�ma-
  tique de demande ou dans une probl�matique de besoins.




et co�teuses. Cela revient � d�finir une option d'assurance dite par
exemple en France � r�gime des affections de longue dur�e � (ALD).
Pour les ALD, les soins sont gratuits, mais ils ne le sont pas pour les
pathologies intercurrentes, qui ne sont pas suppos�es �tre li�es � l'af-
fection chronique (cas de la rhinopharyngite du diab�tique). De m�me
pour certaines personnes justifiant de faibles ressources, le ticket mo-
d�rateur sera supprim�, ces droits �tant r�vis�s chaque ann�e.
  Le comportement des professionnels fait partie aussi des �l�ments qui
imposent une gestion rigoureuse du risque. L'existence de comporte-
ments d'assur�s conduisant � une surconsommation de soins en cas

26 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d'assurance correspond �ventuellement aux possibilit�s d'ententes
explicites ou implicites avec le prestataire de soins. Mais, d'une
mani�re g�n�rale, le prestataire dont les actes sont pris en charge par
un r�gime d'assurance est, comme l'assur� lui-m�me, tent� de ne pas
restreindre sa d�marche. Il est plus enclin � prescrire et � faire revenir
le patient, d�s lors qu'il sait que celui-ci est bien couvert financi�re-
ment. Ce que les �conomistes appellent la � demande induite de
soins � n'est, sur le fond, pas diff�rente du hasard moral et renvoie
d'ailleurs � un probl�me d'asym�trie d'information. Le comportement
du prestataire peut �tre autonome et la surconsommation se faire �
l'insu du malade assur�. L'entente est �galement possible et, � la li-
mite, prendre une forme frauduleuse, prestataire et assur� se
partageant le montant factur� ill�galement au r�gime. Face � ce type
de pratique, l'assureur se doit de contr�ler les d�penses qui sont � sa
charge. Il le fera en mettant en place un suivi tr�s pr�cis des actes et un
contr�le m�dical effectu� par un m�decin conseil attach� au r�gime.
   La gestion du risque est un facteur essentiel de viabilit� de l'assu-
rance maladie, mais l'assureur ne peut exclure les situations exception-
nelles d'indemnisation et il doit �tre capable d'y faire face. Pour cela, il
met en r�serves tout ou partie des exc�dents d'exploitation des exerci-
ces b�n�ficiaires. Le montant des r�serves varie selon le type d'orga-
nisme. Lorsque l'assurance est obligatoire et b�n�ficie de la garantie de
l'�tat, on admet qu'il est suffisant de disposer de trois mois de presta-
tions. En assurance volontaire, il est plut�t conseill� de disposer de 9
mois � un an de prestations. En r�gle g�n�rale, la marge de solvabilit�
d'un assureur est impos�e par les pouvoirs publics dans le cadre de la
r�glementation des assurances et il convient � la tutelle de produire les
estimations adapt�es au risque maladie dans chaque contexte national.
L'assureur dispose aussi d'outils contribuant � garantir sa solvabilit� en
cas d'al�a. Par exemple, il pourra adh�rer � un fonds susceptible de lui
pr�ter des ressources de tr�sorerie en cas de besoin. Il aura aussi pu se
pr�munir contre l'�ventualit� d'indemnisations �lev�es li�es � des situa-
tions particuli�res en c�dant une partie du risque � un organisme de
r�assurance. Cette disposition ne cr�e �videmment pas de ressources,
puisque la cotisation de r�assurance sera incluse dans la prime pay�e
par l'assur�. Mais elle acquiert un caract�re indispensable lorsque l'as-
sureur ne peut r�unir qu'un effectif modeste de contributeurs ou qu'il
inclut dans la garantie la couverture de soins techniques hospitaliers qui
peut entra�ner une indemnisation unitaire consid�rable.

                                                   Assurance maladie � 27



LE CONTEXTE DE L'AFRIQUE DE L'OUEST

Au moment de lancer l'assurance maladie en Afrique de l'Ouest, un
constat s'impose. Le march� de l'assurance y est tr�s �troit (Thierry J.-
Ph., 2005). Corr�lativement, le segment de l'assurance maladie ne con-
cerne que tr�s peu de compagnies et seulement une frange tr�s ais�e de
la population dans la plupart des pays. Du point de vue de l'offre, la
prudence est de mise. Les assureurs ne travaillent qu'avec des profes-
sionnels lib�raux ou avec des cliniques ou h�pitaux ext�rieurs et pro-
posent des contrats dont les niveaux de primes excluent d'embl�e 95 %
de la population. D'une fa�on g�n�rale, cette assurance ne concerne
que quelques entrepreneurs, quelques employ�s du secteur des services
ou les personnels �trangers expatri�s. La demande effective est donc
extr�mement r�duite. S'il est utile de s'interroger sur la demande
potentielle et la population �ligible � l'assurance maladie, c'est pour
envisager une offre alternative � celle du secteur priv� de l'assurance.


Quelle demande d'assurance maladie en Afrique de l'Ouest ?

L'�tat de sant� des populations africaines ne fait pas douter de l'impor-
tance du risque r�el de maladie dans ces pays. Faut-il alors, en appli-
quant les principes de la d�cision individuelle en avenir incertain,
associer la demande d'assurance maladie en Afrique de l'Ouest � une
tr�s faible aversion pour le risque de la part des populations ?
   On observe parall�lement que le recours aux soins primaires dans le
secteur public est lui-m�me tr�s faible (environ 0,3 contact par per-
sonne et par an), alors que le prix des services impos� par le recouvre-
ment des co�ts, ne semble pas un facteur dissuasif. La demande de
services ne refl�te donc pas non plus le besoin de soins, tel qu'on peut
l'appr�cier par l'incidence de la maladie ou la mortalit�.
   L'analyse de la demande d'assurance maladie doit int�grer la faible
propension � se soigner, alors que la morbidit� appellerait une
fr�quentation �lev�e des formations de sant�. Les africains de l'Ouest
sont peut-�tre risquophiles, ils sont de toute fa�on conscients de l'ap-
port limit� de la garantie de l'assurance maladie, lorsque les presta-
tions de soins sont m�diocres. Prix de l'assurance, aversion pour le
risque et prestations d�sir�es constituent le triptyque � prendre en
consid�ration pour analyser la demande. La notion de volont� � payer
permet une approche globale de celle-ci.

28 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



La volont� � payer des populations en mati�re d'assurance maladie
L'analyse de la volont� � payer peut se d�velopper en pr�tant autant
attention aux param�tres classiques de la demande (prix, revenu) qu'�
des facteurs qualitatifs ou consubstantiels � la mentalit� des popula-
tions concern�s.
   Dans le cas de l'assurance maladie dans les pays en d�veloppement,
on peut dire que la volont� � payer a au moins quatre composantes qui
renvoient :

� aux ressources effectives des m�nages eu �gard aux tarifs des
   assureurs ;

� � leur conception de la pr�voyance ;

� � la priorit� donn�e � la couverture du risque maladie ;

� � l'appr�ciation qu'ils font de l'offre de soins, en termes d'accessi-
   bilit�, de confiance, de qualit� per�ue.


Les ressources mobilisables pour l'assurance Il existe un niveau de
prime au-del� duquel aucune demande substantielle ne se manifeste,
m�me lorsque la population cible a des ressources r�guli�res. On peut
le voir en fonction de l'�chec des � low cost options � en Afrique du
Sud (Letourmy A., 2005) et la faible diffusion de l'option priv�e de
l'UTM (Union technique de la mutualit� malienne). Toutefois, la
demande d'assurance maladie ne d�pend pas que des ressources mon�-
taires des populations. En tout cas, la relation n'est pas simple. On a des
exemples de mutuelles rurales qui s'adressent � des populations plut�t
pauvres et qui se sont surtout d�velopp�es apparemment gr�ce � des
cat�gories de revenu interm�diaire (mutuelles du Borgou au B�nin).
Autrement dit, l'impression pr�vaut que, dans certains contextes, les
m�nages les plus riches estiment pouvoir payer les prestataires en cas de
maladie, alors que l'assurance est trop ch�re pour les pauvres.
   L'analyse de l'�lasticit� revenu de la demande d'assurance maladie
est difficile � �tudier, car les outils d'enqu�te qui permettent de le faire
dans les pays d�velopp�s sont difficiles � transposer dans des contextes
o� les ressources ne sont pas seulement mon�taires et o� les �changes
donnent une place importante au troc. Les enqu�tes aupr�s des
m�nages sont n�anmoins utiles pour indiquer la part que les m�nages
consacrent � la sant�. Cette d�pense couvre toute une s�rie de postes,

                                                     Assurance maladie � 29



qui ne sont pas destin�s � �tre int�gr�s dans une garantie d'assurance,
mais elle donne le plus souvent une place de choix au m�dicament,
dont la prise en charge peut relever en partie de l'assurance. On
observe ainsi que les m�nages d�pensent de 7 � 10 % de leur budget
en soins assurables. On peut alors supposer qu'ils ne seront pas pr�s �
aller au-del� de ce seuil et qu'il est plus r�aliste d'envisager une contri-
bution de l'ordre de 5 % des ressources, ce qui est d'ailleurs un chiffre
usuel dans le cadre des r�gimes publics. Ce ratio donne une id�e de la
faiblesse des primes envisageables et ensuite de l'�tendue de la
garantie qui peut �tre propos�e dans des pays ou une r�mun�ration
mensuelle de FCFA 400 est usuelle.



La pr�voyance, la conception du risque
et la hi�rarchie des risques sociaux

La pr�voyance ne fait pas partie des valeurs qui sont syst�matique-
ment int�gr�es dans la culture des populations des pays en d�veloppe-
ment. Cela pourrait s'expliquer � la fois par la duret� des conditions de
vie qui y pr�valent et par la relative bri�vet� de la dur�e de vie
moyenne. D'une part, il faut consacrer tous ses efforts � survivre ou �
faire vivre les siens � court terme. D'autre part, la probabilit� de prof-
iter d'une quelconque �pargne des ressources est faible. Aussi peut-on
parler de pr�f�rence pour le pr�sent ou de faible incitation � investir �
moyen ou long terme.
   Cette disposition ne facilite pas l'acceptation du concept de risque,
dans la mesure o� la conception du risque oblige � se projeter dans
l'avenir et � envisager un ensemble de possibles au sein duquel existent
des �v�nements d�favorables. De fait on a pu relever, au sein de popu-
lations rurales, un certain nombre de r�ticences � accepter qu'une
situation n�faste ait une certaine probabilit� de survenir et en partic-
ulier l'id�e qu'il �tait mal�fique de faire cette hypoth�se. En ce sens, et
pour certains groupes, l'assurance porterait malheur au lieu d'avoir une
fonction de compensation des cons�quences d'un sinistre. Par exemple,
l'adh�sion � l'assurance maladie g�n�rerait une atteinte � la sant� et
serait donc peu recommandable. Le refus de concevoir le risque
comme fait objectivable n'est pas forc�ment le produit d'une repr�sen-
tation du malheur, mais il indique que l'assurance contre un risque
social ne va pas de soi et exige donc une sensibilisation particuli�re

30 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



dans certains contextes. En ce sens, une partie de la population des
pays concern�s n'est pas risquophobe.
   Pour les populations qui ont une activit� �conomique au sein du
secteur formel, on n'observe pas un tel rejet de l'assurance. En
revanche, il existe des priorit�s dans l'assurance contre les risques, qui
renvoient aussi au contexte culturel et social des pays en d�veloppe-
ment. Par exemple, en Afrique de l'Ouest, les fonctionnaires vont sys-
t�matiquement privil�gier la couverture du risque vieillesse et du
risque alimentaire plut�t que le risque maladie. Cette attitude renvoie
souvent � la faiblesse des pensions l�gales et aux dysfonctionnements
constat�s dans le service de pensions ou dans le paiement de la solde.
Dans la mesure o� le fonctionnement des r�gimes de retraite des
fonctionnaires et de la tr�sorerie publique peuvent s'am�liorer, elle ne
devrait pas emp�cher une �volution des pr�f�rences. En revanche,
l'int�r�t marqu� des m�nages pour la couverture des risques sociaux
particuliers que sont la survenue d'un mariage, d'un bapt�me, d'un
d�c�s a peu de chances de dispara�tre � court terme. Cela signifie que,
lorsque les m�nages sont pr�ts � �pargner ou � s'assurer, ils vont sou-
vent pr�f�rer le faire pour se pr�munir d'une rupture de ressources
dans ces situations plut�t qu'en cas de maladie.
   Le risque maladie fait l'objet d'une perception diff�rentielle, aussi
bien en termes de population que de contenu. Cela signifie par exem-
ple que l'assurance n'a pas le m�me int�r�t en ville et en milieu rural,
en secteur formel et en secteur informel ; ou encore que certains
risques tels que le risque obst�trical ou le petit risque sont valoris�s
diff�remment selon les contextes.

L'appr�ciation de l'offre Le faible recours des populations au secteur
public de soins (soins de base et soins hospitaliers de tous niveaux) est
observ� de fa�on r�currente en Afrique de l'Ouest. Il a �t� montr� � de
multiples reprises que la qualit� des services �tait le facteur d�termi-
nant de la fr�quentation. Cela �tant, l'offre de services de soins n'est
pas homog�ne au sein d'un m�me pays et l'on observe que la disposi-
tion des populations � s'assurer augmente consid�rablement d'un
endroit � l'autre, lorsque l'appr�ciation des formations de sant� est
bonne. Selon que l'assurance maladie donne acc�s � des �tablisse-
ments appr�ci�s ou non de la population, elle fait l'objet d'une atten-
tion plus ou moins marqu�e3. R�ciproquement, l'impossibilit� de

                                                    Assurance maladie � 31



trouver, dans une zone donn�e, des formations pris�es par la popula-
tion est un facteur de faible diffusion ou de rejet de l'assurance4.
   La qualit� des prestations auxquelles l'assurance donne acc�s est un
pr�requis de l'assurance, au sens o�, sans elle, il n'y aura pas de
demande. Mais la qualit� ne doit pas �tre d�finie selon les crit�res uti-
lis�s pour �valuer les soins dans les pays industrialis�s. Ce qui est en
cause est la qualit� telle qu'elle est per�ue par les usagers. A cet �gard,
trois �l�ments sont importants :

� l'accueil des malades par les personnels ;

� la disponibilit� du m�dicament ;

� la somme demand�e dans les formations en contrepartie des soins.


   Le premier �l�ment est particuli�rement sensible � l'h�pital (Jaffr�
Y., Olivier de Sardan J.P., 2003) o� les patients arrivent en tr�s mau-
vais �tat et ne font pas forc�ment l'objet de consid�ration de la part
du personnel. Les familles sont tr�s pr�sentes et pallient les insuffi-
sances du service rendu (en mati�re d'h�bergement et de nourriture
notamment), mais ont rarement acc�s � une information correcte sur
la situation de leur parent. Le m�dicament constitue un objet privi-
l�gi� de la relation des populations aux soins m�dicaux et sa non
disponibilit� est consid�r�e comme un facteur de mauvaise prise en
charge. En outre certaines cat�gories de personnel ont leur propre
stock de produits qu'ils monnayent aux patients. Enfin, alors que la
tarification des �tablissements est en principe adapt�e aux ressources
locales, les personnels demandent des suppl�ments pour traiter les
malades, quand ils ne font pas du paiement pr�alable une condition
de prise en charge.
   Dans ces conditions, la pr�f�rence des populations pour le secteur
priv� est g�n�rale dans les pays en d�veloppement quand celui-ci
existe et est abordable. Le secteur priv� caritatif est souvent tr�s pris�,
en raison de la qualit� de l'accueil, relativement personnalis�, et de
l'absence de surtarification (Letourmy A., 1999). Corr�lativement, le
rejet du secteur public est tr�s fr�quent pour les raisons �voqu�es ci-
dessus. Malgr� tout, il n'est pas syst�matique. Ainsi, en Guin�e
foresti�re les mutuelles se sont d�velopp�es en s'appuyant sur les
h�pitaux publics.

32 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



La demande en termes de prime et de couverture

Niveau de la prime et modalit�s de paiement Si les ressources mobili-
sables pour adh�rer � l'assurance maladie sont faibles, l'am�nagement
des modalit�s de paiement de la prime permettent d'envisager le
recrutement d'effectifs plus importants. La demande d'assurance
refl�te comme partout l'adaptation du produit � la cible.
   L'exp�rience montre qu'en Afrique de l'Ouest on peut construire
une couverture minimale pour un groupe, si la disponibilit� des
m�nages qui le composent est de 500 FCFA par mois. On observe
que, selon que la prime d�passe ou non ce niveau, une partie plus ou
moins importante du groupe sera exclue. Les modalit�s de paiement
constituent une variable d'ajustement essentielle entre le niveau de la
prime et les ressources mobilisables. La mise en place d'une formule
de cotisations collectives, dites solidaires, permet de combiner les
m�canismes de solidarit� traditionnelle avec l'exigence de contributi-
vit�. Selon cette formule, c'est le versement du montant total des coti-
sations d'un groupe, qui ouvre les droits pour toutes les familles qui le
composent, ind�pendamment de la mani�re dont ce montant a �t�
obtenu. En pratique, cela permet � certaines familles, momentan�-
ment g�n�es, de continuer � adh�rer � un r�gime, gr�ce � une avance
faites par les autres, mais sans que le r�gime ait � y voir. Lors du verse-
ment suivant, la famille d�bitrice r�gularisera sa situation � l'�gard du
groupe.
   La saisonnalisation du paiement permet aussi de tenir compte du
moment des rentr�es d'argent. Il s'agit d'organiser le paiement de la
cotisation lorsque les m�nages vendent leurs produits. Ce dispositif
est particuli�rement adapt� aux m�nages ruraux vivant de cultures de
rente, telles que le coton, le riz ou le caf�. Ainsi la cotisation sera
pay�e une fois ou deux fois dans l'ann�e et pas tous les mois comme
dans la plupart des r�gimes des pays d�velopp�s. Cela pose �videm-
ment le probl�me de la gestion de l'argent et de son placement pour
l'organisme gestionnaire. Lorsque l'assurance est mise en place dans
un cadre int�gr� o� des formules de cr�dit fonctionnent, le couplage
du paiement de la cotisation avec le remboursement du cr�dit est sou-
vent organis�.

S'assurer pour couvrir quel risque ? La couverture offerte par l'assu-
rance maladie peut �videmment �tre variable d'un r�gime � l'autre.
Mais dans le contexte des pays pauvres, elle correspond � un mode

                                                      Assurance maladie � 33



nouveau de financement qui pr�sente un int�r�t particulier par rap-
port aux autres formes existant dans ces pays. Ce sont en effet les li-
mites du paiement direct qui ont fortement incit� � faire la promotion
de l'assurance, pour ouvrir l'acc�s des populations � l'ensemble de la
palette de soins, en particulier aux soins les plus co�teux dispens�s en
milieu hospitalier. Selon cette conception, largement partag�e par les
experts, l'assurance maladie abaisse la barri�re financi�re des soins et
dans la mesure o� la fr�quence des recours aux soins co�teux est assez
faible, la viabilit� des r�gimes est plus facile � atteindre. Avec cet argu-
mentation, c'est le gros risque qui doit �tre atteint de fa�on privil�gi�e
gr�ce � l'assurance. Corr�lativement on peut dire que l'assurance ma-
ladie offre un financement sp�cifique, le paiement direct restant val-
able pour l'acc�s aux soins primaires.
   En Afrique de l'Ouest, cette conception se heurte d'une part aux
attentes des personnes elles-m�mes et d'autre part aux conditions
empiriques d'application du paiement direct. Les populations sont
int�ress�es par l'assurance � partir du moment o� elle leur permet d'ac-
c�der aux formations de sant� les plus proches et elles n'acceptent de
payer une cotisation que s'ils en voient concr�tement le retour d'in-
vestissement. Les soins hospitaliers sont pour elles un �v�nement rare et
elles savent qu'en cotisant uniquement pour se pr�munir du gros risque,
elles ont une probabilit� forte de cotiser plusieurs ann�es sans obtenir
de prestations. Par ailleurs, l'�valuation de l'Initiative de Bamako a
montr� que le paiement direct excluait beaucoup de personnes et on
peut en d�duire que la couverture du petit risque pr�sente �galement de
l'int�r�t. Le dilemme � gros risque versus petit risque � ou l'opposition
� experts contre population � n'ont donc probablement pas lieu d'�tre.
La flexibilit� de l'assurance maladie est une de ses qualit�s et l'on n'a pas
de raisons s�rieuses de limiter son application au financement des soins
co�teux. En pratique, les mutuelles couvrent tout ou partie du petit
risque dans la majorit� des cas et, moins souvent, le gros risque5.
   Toutefois, il faut tirer les cons�quences de la nature du risque � cou-
vrir pour d�finir la garantie et mettre en place une gestion du risque
assez rigoureuse. Si la prise en charge du petit risque par l'assurance
est attractive, elle conduit � une cotisation relativement �lev�e. Il y a
un danger de faible viabilit� des r�gimes, si l'on ne place pas de garde-
fous � l'acc�s aux soins et au m�dicament (tickets mod�rateurs, fran-
chises). Les populations doivent donc aussi �tre inform�es de ce dan-
ger et en assumer les cons�quences.

34 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




La population � �ligible � � l'assurance maladie

L'analyse de la demande potentielle d'assurance maladie conduit �
appr�cier la possibilit� de mettre en place l'assurance maladie de fa�on
diff�rente selon les groupes de population. En outre, tous les types de
r�gime ne sont pas adapt�s aux diverses cat�gories et l'assurance ma-
ladie a un int�r�t variable selon la protection existante.
   Les salari�s du secteur moderne et les fonctionnaires sont a priori
�ligibles � l'assurance maladie, dans la mesure o� ils b�n�ficient de
revenus r�guliers qui sont au-dessus de la moyenne du pays. Ils se di-
sent g�n�ralement int�ress�s, pour eux-m�mes et leurs familles, par
une couverture en cas de besoin de soins. Il est aujourd'hui admis dans
de nombreux pays de la r�gion qu'ils doivent �tre assujettis � des
r�gimes obligatoires, lorsque ce n'est pas d�j� le cas.
   Toutefois, la situation de ces deux cat�gories n'est pas identique, ni
par rapport � l'assurance maladie en g�n�ral, ni par rapport � l'assu-
rance maladie obligatoire.
   Les fonctionnaires constituent dans chaque pays un ensemble
bien circonscrit, relevant d'un employeur unique. Leur demande
d�pend de la protection maladie dont ils disposent, en th�orie et en
pratique. Souvent, l'�tat accorde � ses agents des prestations ma-
ladie non contributives, dont le prototype est la couverture partielle
de la couverture des frais d'hospitalisation (S�n�gal, Mali). Si cette
couverture est effective, la demande d'assurance va correspondre �
des prestations compl�mentaires (S�n�gal). Si la couverture ne se
traduit pas par une v�ritable prise en charge des d�penses (Mali),
l'assurance obligatoire est attendue et, lorsqu'il faut du temps pour
sa mise en place, les fonctionnaires s'organisent par groupes et sont
alors int�ress�s par une assurance volontaire de type mutualiste
(Mali, Burkina).
   Les employ�s du secteur priv� constituent un ensemble moins
homog�ne et d'ailleurs plus difficile � circonscrire que les agents de
l'�tat. La limite entre secteur priv� de l'�conomie formelle et secteur
priv� informel est assez floue et la demande d'assurance maladie est
diff�rente selon que l'on consid�re les grandes entreprises, les petites
entreprises bien recens�es par l'administration et les entreprises con-
nues, mais �chappant au contr�le administratif. Les employ�s des
grandes entreprises sont int�ress�s par l'assurance maladie, lorsqu'ils

                                                   Assurance maladie � 35



ne disposent pas d�j� d'une couverture maladie, contributive ou non,
dans le cadre professionnel. Cette couverture peut prendre la forme
d'un acc�s privil�gi� � un centre de sant�, voire � une clinique, qui
font partie de l'entreprise ; ou d'une subvention de l'employeur � une
caisse sociale interne g�r�e par les d�l�gu�s du personnel et destin�e �
couvrir toute une s�rie de risques sociaux ; ou d'une prise en charge
directe par l'employeur des frais en cas de maladie (Mali, Guin�e).
L'existence de cette � couverture maison � n'incite pas � chercher une
autre forme de protection. Dans un certain nombre de cas, � la cou-
verture maison � prend d'ailleurs la forme d'un r�gime d'assurance
organis� par l'employeur et les employ�s ne sont pas int�ress�s �
obtenir une autre forme d'assurance (mutuelle, assurance obligatoire),
� moins qu'elle soit beaucoup plus avantageuse. On peut comprendre
qu'en pratique, ces � r�gimes maison � constituent plut�t un frein �
l'implantation de l'assurance maladie obligatoire pour tout le secteur
priv�.
   Dans les petites entreprises, la demande d'assurance maladie est
conditionn�e par l'attitude de l'employeur. Certains employeurs peu-
vent favoriser l'adh�sion de leurs employ�s � des mutuelles inter-
professionnelles, mais, d'une fa�on g�n�rale, les employ�s de ce seg-
ment du secteur priv� seront rarement attir�s par l'assurance maladie,
sauf � avoir re�u une information ext�rieure (Mali). On observe
d'ailleurs que, lorsqu'il existe un r�gime obligatoire au niveau national,
de nombreux employeurs se soustraient � l'obligation en ne d�clarant
pas leur personnel (exemple : IPM pour les stations services).
   Dans le milieu des artisans, commer�ants ou autres travailleurs
ind�pendants, qui constitue une frange ais�e qui rel�ve autant de
l'ensemble pr�c�dent que du secteur informel urbain, le m�me type
de constat est faisable. Rares sont les � petits patrons � qui seront
enclins � donner une protection maladie � leurs employ�s, dans la
mesure ou ceux-ci travaillent g�n�ralement dans un cadre qui ne
respecte pas le code du travail. Pour eux-m�mes, artisans et com-
mer�ants sont plut�t attentistes en mati�re d'assurance maladie,
m�me si certains groupes professionnels ont �t� associ�s au
d�veloppement mutualiste dans divers pays. Lorsqu'ils sont inform�s
de la possibilit� d'adh�rer � des r�gimes volontaires, ils pr�f�rent
v�rifier comment le syst�me fonctionne avant de cotiser eux-m�mes.
On observe ainsi une croissance assez lente des mutuelles d'artisans

36 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



(Mali) ou bien une adh�sion tardive (Mutuelle de l'UNACOIS au
S�n�gal).
   Plus on consid�re des personnes appartenant au secteur informel,
plus l'expression de la demande d'assurance maladie est tributaire de
l'existence d'une de forme coh�sion sociale et de facteurs ext�rieurs.
Le principal facteur de r�v�lation de la demande est l'acc�s � l'infor-
mation qui peut �tre donn� dans le cadre des campagnes de sensibili-
sation organis�es par exemple par les projets de d�veloppement
mutualiste.
   On note ainsi une demande �manant de groupes de femmes d�j�
organis�es dans des petites structures de micro cr�dit, d'associations
diverses ou de professions qui ont pu aussi �tre contact�es par
des promoteurs de mutuelles (au B�nin : les zemidjans, taxis en
mobylette).
   En milieu rural, la demande d'assurance maladie est essentielle-
ment d�pendante des efforts faits pour la r�v�ler. Les villages o� sont
cr��es des mutuelles font en r�alit� partie de projets exog�nes. On
observe d'ailleurs que la demande issue de personnes vivant dans un
village n'entra�ne pas une demande �quivalente dans le village voisin.
Des facteurs locaux tels que le centre de sant� d�sign� pour le service
des prestations ou la personnalit� des responsables traditionnels sont
alors les principaux d�terminants de la demande, alors que les
param�tres �conomiques (ressources) de celle-ci ou le niveau du
risque semblent �quivalents. L'adh�sion du milieu rural peut �tre faci-
lit�e par des conditions li�e � l'activit� �conomique : groupement de
producteurs en cas de culture de rente ou incitation d'une entreprise
li�e aux exploitants (cas du coton). Enfin, la relation avec les pays du
Nord par le truchement des �migrants (Mali, S�n�gal) peut �tre un
facteur d'augmentation de la demande d'assurance maladie.



QUELLE OFFRE D'ASSURANCE MALADIE
POUR L'AFRIQUE DE L'OUEST ?

Le contexte des pays d'Afrique de l'Ouest indique que le d�veloppe-
ment de l'activit� d'assurance maladie, aussi souhaitable soit-il, se
heurte � une s�rie d'obstacles �conomiques et sociologiques. Il est �vi-
dent que les compagnies priv�es ne sont pas pr�tes � proposer une offre

                                                   Assurance maladie � 37



de produits adapt�e � la demande potentielle d'une fraction importante
de la population. En Afrique de l'Ouest aujourd'hui, l'offre d'assurance
maladie ne peut �tre que non marchande, ce qui a des implications sur
les caract�ristiques techniques de l'activit�. Pour autant, un large choix
est ouvert pour ce qui est de l'organisation celle-ci.


Le choix de l'assurance solidaire

Parler d'assurance non marchande introduit l'id�e que le profit des
organismes ne doit pas �tre le moteur du d�veloppement. Le principe
d'efficacit� ne doit pas pour autant �tre oubli� et l'activit� doit �tre
capable de d�gager des exc�dents compte tenu de la n�cessit� de cons-
tituer des r�serves. La question est d'am�liorer l'offre du point de vue
de l'�quit� en �largissant la population qui peut y avoir acc�s � l'assu-
rance maladie. La voie � explorer correspond � une perspective plus
solidaire de l'assurance maladie ou, si l'on veut, plus sociale6. Mais
l'association entre solidarit� et assurance ne va pas de soi.

Assurance et solidarit� Pour les th�oriciens de l'assurance, les m�ca-
nismes de l'assurance rel�vent, du point de vue technique, d'une
approche diff�rente des m�canismes de solidarit�. Les m�canismes de
solidarit� correspondraient � une modalit� de couverture des dom-
mages d�clench�e apr�s r�alisation du sinistre, sans qu'aient �t� mises
de c�t� les ressources n�cessaires, ni d�fini le montant de l'indemnisa-
tion. Les m�canismes assurantiels correspondent au contraire � une
estimation pr�alable du montant des dommages et � un pr�-paiement.
Les m�canismes de solidarit� peuvent �tre mobilis�s au sein de
r�seaux particuliers (famille et proches, communaut�, groupe profes-
sionnel), alors que l'assurance est une activit� relavant d'un organisme
ad hoc r�alisant la compensation des risques.
   Cette distinction est importante, mais l'opposition est excessive.
Historiquement, les caisses de solidarit� ont �volu� dans le sens d'un
recueil pr�alable des ressources et ont introduit � cette occasion le
principe d'une cotisation � selon les moyens �. C'est ce principe qui a
�t� repris � la fois dans les r�gimes volontaires des mutuelles et dans
l'assurance sociale obligatoire. L'assurance solidaire se caract�rise ainsi
par un souci de redistribution, plus ou moins important selon les
modalit�s de d�finition des cotisations.

38 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   L'id�e de solidarit� s'accorde avec les valeurs attach�es � la sant�,
qui interviennent souvent dans le d�bat:

� le caract�re inacceptable de l'exclusion en cas de maladie et de mau-
   vaise sant� ;

� la repr�sentation n�gative des m�canismes de march� appliqu�s � la
   sant� ;

� l'opposition entre l'individualisme d'une part, les conceptions de
   sant� publique et les consid�rations d'�thique d'autre part.


Toutefois, sur ces points, la notion d'int�r�t collectif reste non consen-
suelle, si bien que les acteurs de terrain auront � g�rer de fa�on pragma-
tique le probl�me des indigents, se r�soudront � donner aux prestataires
priv�s motiv�s par le profit une place non n�gligeable et tiendront
compte de toute fa�on de toute une s�rie d'int�r�ts particuliers. En
d'autres termes, la solidarit� associ�e � l'assurance maladie a un carac-
t�re restreint d�s lors que la contributivit� est le principe essentiel de
l'adh�sion ou de l'assujettissement. Qu'il s'agisse de r�gimes volontaires
ou obligatoires, l'assurance maintient une diff�rence entre ceux qui
paient la cotisation et qui acqui�rent des droits et ceux qui ne paient pas
et qui rel�vent ailleurs d'autres formes de protection. La diff�rence dis-
para�t uniquement lorsque l'assurance maladie r�alise la couverture uni-
verselle et que les r�gimes sont �quivalents.

Sp�cificit� de l'assurance solidaire En th�orie, l'assurance solidaire va
se caract�riser par une volont� de non exclusion et par une tarification
susceptible de favoriser la redistribution. En outre, elle va tabler sur le
sens de la responsabilit� des adh�rents.

   Non exclusion L'assurance maladie solidaire ne cherche pas � �carter
les mauvais risques. Elle va s'interdire la s�lection, proposer syst�ma-
tiquement une garantie vie enti�re et ne pas ajuster la cotisation au
risque individuel. Autrement dit, toute personne payant sa cotisation
peut adh�rer et rester adh�rent, aux conditions propos�es � l'ensemble
des membres. En pratique, la non exclusion � l'entr�e doit �tre com-
patible avec l'�quilibre de gestion du r�gime. Si les personnes ne sont
pas exclues, elles ne seront prises en charge que dans le cadre de la
garantie, qui op�re n�cessairement des choix, en particulier vis-�-vis
de certaines pathologies co�teuses. Dans le m�me esprit, le r�gime

                                                    Assurance maladie � 39



devra contrer la s�lection adverse avec les proc�dures s'appliquant �
tous (p�riode de carence) sans emp�cher l'adh�sion.

   La tarification La formule usuelle pour l'assureur consiste � tarifer la
prime selon le risque individuel, c'est-�-dire � ajuster la prime au
risque estim� pour une personne. En pratique, le risque n'est pas
ajust� � chaque personne, mais � des groupes homog�nes en termes de
niveau de risque. Des facteurs comme l'�ge, le sexe, les conditions
d'exposition professionnelle, la pr�sence d'une pathologie chronique
ou d'un facteur de risque pour ces pathologies seront des variables
permettant de constituer les groupes, de fa�on plus ou moins sophis-
tiqu�e. La formule la plus simple d'application de ce principe consis-
tera � augmenter la prime avec l'�ge.
   Dans le cadre de l'assurance solidaire, ce mode de tarification, qui
p�nalise les personnes les plus fragiles, sera �cart� au profit d'une tari-
fication au risque moyen ou d'une tarification selon le niveau de
ressources. Dans le premier cas, la redistribution horizontale (entre
malades et bien portants) est plus importante et dans le second, on
introduit une redistribution verticale (entre riches et pauvres) qui joue
� plein si l'occurrence du risque est correctement r�partie entre les
cat�gories de revenu.
   Ces modalit�s de tarification ne doivent pas p�naliser l'�quilibre du
r�gime et �tre consensuelles. Cela implique d'une part que l'�volution
des cotisations doit suivre le co�t du risque, ind�pendamment du
mode de tarification, d'autre part que les membres acceptent le
partage du co�t du risque associ� � celle-ci. D�s lors que les adh�rents
refusent de payer plus que ce qu'ils estiment �tre leur niveau de
risque, ils rejettent le principe de solidarit�, mais s'exposent du m�me
coup aux fluctuations de leur cotisation correspondant � leur
morbidit�.


La responsabilit� des adh�rents

L'assurance maladie solidaire doit faire face au risque moral et, � ce
titre, l'organisme gestionnaire doit mettre en oeuvre les proc�dures de
co-paiement d�j� �voqu�es. Mais la contrepartie du principe de soli-
darit� est que les membres d'un r�gime sont conscients de l'int�r�t col-
lectif et ne doivent recourir aux soins qu'� bon escient. Dans ce sch�ma
id�ologique la limitation, voire la suppression, des co-paiements est

40 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l�gitime. C'est ce qui explique la possibilit� de r�gimes volontaires
compl�mentaires aboutissant � la suppression de ceux-ci7. En pratique,
la responsabilit� des adh�rents ne peut s'exercer qu'au sein de petits
groupes et n'est plus observable d�s que la taille des r�gimes augmente.
Comme l'assurance tire sa viabilit� des effectifs couverts, on peut dire
que les r�gimes solidaires doivent accepter les principes de gestion
usuels de l'assurance et amener leurs adh�rents � la mod�ration en
recourant aux incitations mon�taires et au contr�le m�dical.


Les choix d'organisation

Si les pays d'Afrique de l'Ouest ne peuvent d�velopper l'assurance mala-
die que sous la forme de r�gimes solidaires, ils ont le choix entre des poli-
tiques centr�es sur les r�gimes obligatoires ou sur des r�gimes volon-
taires. Ils peuvent aussi moduler les options d'organisation de ces
r�gimes. On rappelle dans l'encadr� 3, les principaux types d'organisation
de l'assurance maladie. On pr�sente ensuite les principales options rela-
tives � l'organisation de r�gimes obligatoires et volontaires.

L'assurance publique obligatoire L'assurance maladie publique � carac-
t�re obligatoire na�t de l'initiative du pouvoir �tatique et est cens�e
contribuer au bien-�tre g�n�ral, m�me lorsqu'elle ne s'applique qu'�
une fraction de la population. Dans tous les cas de figure, elle par-
ticipe de la construction d'une couverture universelle et a des implica-
tions politiques et soci�tales importantes. Si, d'un point de vue tech-
nique, elle met en oeuvre les principes de l'assurance et fait mettre en
pratique les m�canismes �voqu�s ci-dessus, sa gestion rel�ve d'une
cat�gorie interm�diaire, qui se nourrit autant de gestion du risque que
de gestion politique.
   Les consid�rations politiques interviennent � trois niveaux au moins
pour d�finir l'architecture des r�gimes : au niveau de la d�finition de la
couverture, de la liaison entre cotisation et garantie et en vue d'op�rer
une redistribution entre cat�gories de m�nages. La couverture rel�ve le
plus souvent d'une couverture compl�te, au sens o� tous les niveaux de
la pyramide de soins font l'objet d'une prise en charge. En revanche
elle se veut basique, au sens o� ce sont les soins dispens�s dans le
secteur public qui seront privil�gi�s. L'ajustement des ressources au
risque et � la garantie est indirect, dans la mesure o� les cotisations

                                                    Assurance maladie � 41



seront fond�es sur les revenus salariaux, seront d�pendantes de la
masse salariale et de l'�tat g�n�ral de l'�conomie, alors que les d�penses
refl�teront bien le recours aux services, donc plut�t les besoins de la
population contraints par l'offre disponible. Enfin, la redistribution
op�rera par le mode de d�termination des cotisations individuelles,
proportionn�es aux ressources. Les hauts salaires paieront plus que les
bas salaires, ce qui provoquera en principe une redistribution verticale,
si les niveaux de consommation sont �quivalents.
   Les probl�mes des r�gimes publics d�coulent de l'incidence de ces
consid�rations politiques sur les param�tres techniques. La r�gulation
de la d�pense sera souvent le premier probl�me � r�gler, car les
d�penses auront une tendance naturelle � cro�tre plus vite que les
ressources, surtout en p�riode de croissance moyenne ou basse. L'in-
fluence de l'�tat sur les r�gimes se traduira alors souvent par des ori-
entations de rationnement. L'organisation des r�gimes obligatoires est
souvent hi�rarchis�e, avec une tendance forte � la centralisation en cas
de r�gime de S�curit� sociale. Toutefois, la d�l�gation de la gestion �
des organismes ad hoc de type caisse centrale (voir encadr� 4) g�r�s
paritairement pourra contrebalancer cette tendance, sans forc�ment
donner de solution en mati�re de r�gulation.
   Toute une s�rie de questions se greffent sur la gestion des r�gimes
publics qui sont g�n�ralement un �l�ment central des syst�mes de
sant�. La question de la tarification, l'�quilibre entre secteurs public et
priv�, le financement des h�pitaux et les r�formes impliquent toujours
les r�gimes publics en premi�re ligne.
   Les configurations observables les mieux repr�sent�es sont les
suivantes:

� R�gime d'assurance maladie public obligatoire centralis�, dont la
   gestion est effectu�e par une Caisse d'assurance maladie, dont la
   gouvernance est le plus souvent professionnelle dans les faits, car les
   repr�sentants des assur�s qui peuvent �tre les d�tenteurs du pouvoir
   sont des professionnels de la gestion des organismes d'assurance
   sociale ;

� R�gime d'assurance maladie public obligatoire d�centralis� : on a
   cette fois des caisses locales autonomes et la gouvernance reste �
   dominante professionnelle, bien que la participation des repr�sen-
   tants des assur�s soit plus forte

42 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




  Encadr� 3 : La vari�t� des r�gimes d'assurance maladie


  R�gimes publics et priv�s
  On parle de r�gimes publics dans le cas de r�gimes organis�s par l'�tat, mais dont la
  gestion revient soit � l'administration soit � des mandataires priv�s. Les r�gimes
  priv�s sont au contraire des r�gimes cr��s suite � une initiative priv�e et g�r�s dans
  un cadre priv�, mais avec des objectifs variables, � but lucratif ou non.

  R�gimes compl�mentaires
  L'assurance au premier franc signifie que l'assureur intervient d�s qu'une d�pense
  de soins correspondant au risque couvert est � la charge de l'assur�. Les r�gimes
  obligatoires privil�gient ce type d'intervention, sauf lorsqu'une franchise est impos�e
  sur certains types de soins pour contrer les effets de l'al�a moral. Les garanties qu'ils
  proposent correspondent � un panier de soins de base, en principe complet en ter-
  mes de niveaux de soins (primaire, secondaire et tertiaire), mais �ventuellement li-
  mit� en termes de prise en charge financi�re, la couverture du niveau tertiaire (soins
  hospitaliers sp�cialis�s) �tant en principe sup�rieure � celle du niveau primaire.
      La compl�mentarit� offerte par les r�gimes volontaires peut correspondre � trois
  types diff�rents d'intervention. La premi�re consiste � couvrir les co-paiements lais-
  s�s par les r�gimes obligatoires. Cette forme de compl�mentarit� permet aux
  assur�s d'avoir une meilleure couverture, mais elle annule l'effet recherch� au
  niveau du r�gime obligatoire (contrecarrer l'al�a moral). Comme il s'agit de r�gimes
  volontaires auxquels les groupes les plus favoris�s pourront plus facilement adh�rer,
  cette compl�mentarit� introduit un �l�ment d'iniquit� dans les r�gimes obligatoires.
  Le deuxi�me type de compl�mentarit� consiste � proposer des prestations que les
  r�gimes obligatoires ne couvrent pas. Par exemple, si les soins dentaires sont exclus
  d'un r�gime obligatoire, un r�gime volontaire pourra proposer une garantie qui les
  couvre. Cette compl�mentarit� n'a pas d'effet sur les caract�ristiques des r�gimes
  obligatoires, mais elle ne va profiter qu'aux cat�gories qui peuvent ou veulent
  adh�rer aux r�gimes volontaires. Enfin, le troisi�me type de compl�mentarit� con-
  siste � offrir des prestations �ventuellement incluses dans la garantie des r�gimes
  volontaires, mais � rendre possible le service de ces prestations par des prestataires
  exclus des conventions du r�gime obligatoire. Par exemple, lorsqu'un r�gime obliga-
  toire n'intervient que dans le cas de soins d�livr�s par le secteur public, un r�gime
  volontaire peut offrir � ses adh�rents l'acc�s au secteur priv�. A nouveau cette com-
  pl�mentarit� ne modifie pas les caract�ristiques du r�gime obligatoire, mais elle ne
  va profiter qu'aux plus favoris�s. Si elle intervient dans une situation de mauvaise
  qualit� du service public de soins, elle introduit une couverture � � deux vitesses �,
  particuli�rement in�quitable.

  R�gimes obligatoires et volontaires
  Les r�gimes obligatoires sont le plus souvent le r�sultat d'une initiative �tatique. His-
  toriquement les premiers r�gimes obligatoires d'assurance maladie ont �t� cr��s par

                                                                Assurance maladie � 43




l'�tat et li�s au statut de travail salari� des personnes (r�gimes de S�curit� sociale
de type bismarckien). Le principe est que toutes les personnes salari�es doivent �tre
assur�s en �tant affili�s � une caisse agr��e (unique ou non). Les r�gimes de S�cu-
rit� sociale illustrent cette situation. Mais l'obligation peut aussi d�couler du contrat
de travail, sans que l'�tat ait impos� l'affiliation de tous les salari�s. On a ainsi des
r�gimes d'entreprises, r�serv�s aux employ�s d'une m�me compagnie. Ces formules
existent pour une couverture au premier franc, lorsqu'il n'y a pas de protection ma-
ladie publique, comme dans les pays en d�veloppement. Elles existent aussi, dans les
pays industrialis�s, en compl�ment des dispositifs l�gaux de S�curit� sociale. Les
r�gimes compl�mentaires d'entreprise comprennent en g�n�ral plusieurs branches
et la protection maladie est coupl�e avec des formules de pr�voyance. Par opposi-
tion on parle de r�gimes volontaires, lorsque l'adh�sion rel�ve du libre arbitre de
chacun. Les exemples traditionnels de r�gimes volontaires sont fournis par les
mutuelles, par les institutions de pr�voyance et par les dispositifs priv�s propos�s
par les compagnies commerciales d'assurance. Dans les pays en d�veloppement, on
utilise le terme de micro-assurance de sant� pour d�signer des r�gimes volontaires
mis en place au sein de petits groupes ou de communaut�s8. Les r�gimes d'assu-
rance cr��s � l'initiative des formations de sant� et int�gr�es � elles sont aussi des
r�gimes volontaires.

R�gimes autonomes et r�gimes int�gr�s
Par r�gime autonomes ou ind�pendants, on d�signe les r�gimes qui sont inclus dans
des organismes qui n'ont qu'une seule activit� �conomique, l'activit� d'assurance. Ils
repr�sentent la majorit� des r�gimes d'assurance maladie. Ils r�alisent la s�paration
payeur/fournisseur de soins et, � ce titre, doivent n�gocier avec des formations pour
le service des prestations en nature.
    Les r�gimes int�gr�s sont ceux qui font partie d'organismes dont l'activit�
�conomique principale est autre que l'activit� d'assurance. Par exemple, c'est le cas
lorsque l'offre de soins organise un r�gime d'assurance maladie comme prolonge-
ment du service propos�. On notera d'ailleurs qu'on peut aussi avoir une offre int�-
gr�e � un r�gime d'assurance maladie, dans le cas de certaines mutuelles. Un autre
exemple classique est l'int�gration de l'assurance dans une entreprise de services
financiers : micro-assurance int�gr�e � la micro finance ou � bancassurance �.
(Letourmy A. et A., 2003)

R�gimes � gouvernance professionnelle et � gouvernance profane
La gouvernance d�signe l'organisation du pouvoir et fixe le processus de d�cision. Il
existe des r�gimes dont la gouvernance est profane. Ce sont les repr�sentants des
assur�s, de la communaut� cible qui ont le pouvoir de d�cision. On peut parler aussi
de gouvernance participative. Mais le mod�le classique en assurance correspond �
une gouvernance professionnelle. C'est une ONG, une administration ou encore la
technostructure salari�e qui exercent les fonctions de d�cision.

44 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




  Encadr� 4 : Caisse d'assurance publique

  Dans le cas des r�gimes obligatoires, l'organisation de caisses publiques d'assu-
  rance maladie constitue la modalit� d'implantation la plus r�pandue. L'obligation con-
  duit plus facilement � une taille de population �lev�e, ce qui pr�sente un certain
  nombre d'avantages. En mati�re de gestion du risque, on n'a pas � se pr�occuper
  d'anti-s�lection. En revanche, le hasard moral a des effets qu'il est peut-�tre moins
  facile � contrer. Pour y faire face, la mise en place d'un contr�le proc�dural est
  in�vitable et conduit � la mise en place d'un service administratif de m�decine, dit de
  contr�le (ou m�decins conseils).
      La s�curit� financi�re des r�gimes est a priori garantie, dans la mesure o� c'est
  l'�tat qui en a la responsabilit�. Si l'engagement de l `�tat est effectif, il prendra le cas
  �ch�ant les mesures qui permettent au r�gime de payer les prestations en cas de dif-
  ficult� de tr�sorerie et il entreprendra les r�formes n�cessaires si l'�quilibre des
  comptes est durablement menac�. Le corollaire de cet engagement est la mise en
  place d'un contr�le externe du fonctionnement de la caisse.
      Il n'est pas tr�s simple de dire � qui revient la d�cision dans les caisses publiques.
  En th�orie, l'�tat a la tutelle du r�gime et il a en fait la possibilit� d'imposer � la caisse
  de prendre les mesures qu'il juge utiles. Toutefois, cette participation � la d�cision
  n'intervient pas de mani�re continue et les caisses sont g�n�ralement dirig�es par
  un conseil d'administration qui d�l�gue la d�cision courante � des professionnels. En
  outre, au sein de ce conseil, un noyau de dirigeants compos� g�n�ralement de mem-
  bres issus des groupes socio-professionnels concern�s par le r�gime (salari�s,
  agriculteurs, professions lib�rales) supervise le fonctionnement courant. Ces per-
  sonnes sont des administrateurs permanents qu'on doit aussi consid�rer comme des
  professionnels, m�me s'ils sont th�oriquement cens�s repr�senter les assur�s.
  Aussi vaut-il mieux parler de gouvernance professionnelle, ce qui pose un probl�me
  de confiance des assur�s et de contr�le des objectifs du r�gime.
      Une caisse publique est en position de faire pression sur l'offre de soins pour
  obtenir le type de services offerts par la garantie du r�gime. Elle tire cet avantage de
  la taille de la population couverte et de sa proximit� avec les pouvoirs publics qui
  entretiennent une relation hi�rarchique ou tut�laire avec l'offre de soins.
      Les r�gimes obligatoires se caract�risent par la possibilit� qu'ils ont d'offrir un
  service d'assurance �quitable et d'op�rer une redistribution entre groupes d'assur�s.
      En mati�re de gestion, rien ne garantit la rigueur et la qualit� au sein des caisses
  publiques. Au contraire les exemples ne manquent pas de gaspillage et de d�tourne-
  ment de ressources � diff�rents niveaux de l'organisation.

                                                   Assurance maladie � 45



L'assurance maladie volontaire

Les principales configurations observables Les configurations obser-
vables les mieux repr�sent�es sont les suivantes:

� Mutuelles de sant� f�d�r�es : il s'agit de r�gimes priv�s volontaires,
   dont la gouvernance est th�oriquement profane ;

� Ensemble de r�gimes priv�s volontaires sans lien entre eux issus
   d'exp�rimentations : (micro-assurance, mutuelles isol�es, r�gimes
   d'assurance maladie int�gr�s � l'offre, � une institution financi�re),
   dont la gouvernance est g�n�ralement � dominante professionnelle
   (en cas d'int�gration), mais avec une participation des assur�s (micro
   assurance et mutuelles isol�es).

Mutuelle de sant� Les mutuelles de sant� repr�sentent une forme d'im-
plantation tr�s r�pandue de r�gimes volontaires. De par leur mode de
constitution, elles sont menac�es par la s�lection adverse et n'ont pas
forc�ment la possibilit� d'atteindre une taille de population con-
s�quente. Il s'ensuit que le montage de mutuelles doit traiter avec atten-
tion le probl�me de la sensibilisation des adh�rents potentiels et se
traduire par une grande prudence au niveau de la couverture propos�e.
   En th�orie, la gouvernance d'une mutuelle est profane par d�fini-
tion, ce qui doit faciliter la confiance des adh�rents et le contr�le des
objectifs. En pratique, la croissance (donc le succ�s d'une mutuelle)
rend plus difficile le maintien de ce principe. L'organisation de la d�ci-
sion se rapproche alors de celle d'une caisse publique, mais le pouvoir
laiss� � l'assembl�e g�n�rale constitue tout de m�me une particularit�
importante.
   Comme dans tout r�gime d'assurance, l'�quilibre d'une mutuelle
est soumis au hasard moral. A c�t� des mesures relevant de la gestion
du risque, un contr�le de l'acc�s aux soins et des d�penses doit y �tre
mis en place. Ce contr�le peut �tre qualifi� de relationnel dans les
petits groupements, car il est fond� sur la connaissance mutuelle que
les adh�rents ont les uns des autres. Avec la croissance des effectifs, les
mutuelles n'�chappent �videmment pas au contr�le proc�dural.
   La s�curit� financi�re et la qualit� de gestion sont � organiser et, en
cette mati�re, l'autonomie de la mutuelle est compl�te. En principe le
promoteur est a priori conscient du probl�me et doit s'employer � le
r�gler. En pratique, c'est la comp�tence des responsables qui va �tre

46 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'�l�ment d�terminant. En ce qui concerne la gestion, les formations
donn�es aux administrateurs doivent leur permettre d'avoir une vision
correcte des t�ches � accomplir et, sinon de les r�aliser eux-m�mes, de
les confier � des professionnels qu'ils seront en mesure de contr�ler.
En ce qui concerne la s�curit� financi�re, le processus de f�d�ralisa-
tion donne une solution satisfaisante, avec la mise en place d'un fonds
de garantie et d'une caisse de r�assurance.
   Les mutuelles sont soumises � un double contr�le externe. D'abord
celui qui leur est impos� par les dispositifs l�gaux et r�glementaires et
qui les oblige � faire certifier leurs comptes. Ensuite, par le truche-
ment de la tutelle �tatique.
   La pression d'une mutuelle sur l'offre de soins est a priori faible,
dans la mesure o� ses effectifs sont modestes. Elle augmente avec la
f�d�ralisation. On note toutefois que l'ind�pendance par rapport � l'of-
fre est essentielle et permet le d�veloppement de contrats qui sont effi-
caces s'ils sont nou�s dans un environnement propice, o� existent
notamment des possibilit�s de recours juridique. La relation des
mutuelles avec l'offre de soins n�cessite g�n�ralement une aide experte,
car les responsables mutualistes ne sont ni des sp�cialistes des questions
m�dicales, ni des connaisseurs des co�ts de production des soins.
   L'�quit� associ�e aux mutuelles est partielle car elle d�coule d'une
solidarit� restreinte. La redistribution est g�n�ralement faible, sauf s'il
y a la possibilit� de fixer des cotisations en portion des ressources des
assur�s, ce qui est assez rare dans les pays pauvres.

R�gimes d'assurance maladie int�gr�s � l'offre La population couverte
par ce type de r�gime est plus ou moins importante. Elle est en fait
limit�e � la zone de chalandise de l'�tablissement. Ainsi elle sera faible
pour un centre de sant� et �ventuellement importante pour un h�pi-
tal. Le probl�me de s�lection adverse menace un r�gime de ce type,
comme les mutuelles, mais il peut �tre plus facilement ma�trisable
dans la mesure o� les prestataires de soins contr�lent l'assurance.
   La gestion du r�gime doit �tre ind�pendante de celle de la forma-
tion de soins sur le plan de la comptabilit�, mais elle doit aussi b�n�-
ficier de l'int�gration. Il y a d'une part un gain �quivalent � un effet
d'�chelle, d'autre part un appui au d�marrage de la mutuelle, car la
structure de gestion est d�j� en place.
   En mati�re de s�curit� financi�re et de n�cessit� de contr�le externe,
les probl�mes sont minor�s, du fait de l'int�gration. L'�tablissement de

                                                    Assurance maladie � 47



soins a tout int�r�t � ce que la mutuelle apporte un suppl�ment d'acti-
vit� et de ressources et non des difficult�s suppl�mentaires.
   Le r�gime est soumis a priori au hasard moral, mais il y a l� un r�le
positif de l'�tablissement qui est capable de ma�triser la demande et de
soigner les assur�s en proportion de leurs probl�mes de sant�.
   Le r�gime ne peut �videmment exercer aucune pression sur l'offre,
puisque celle-ci est dominante. Cela sugg�re que le r�gime est peu
efficient du point de vue de la collectivit�, car il va fonctionner au
profit de la formation de soins. On peut imaginer que les m�mes
prestations pourraient �tre offertes � un niveau de cotisation moindre.
   La qualit� des soins est, pour le r�gime, un atout li� � l'int�gration.
En fait il d�pend de la formation de soins. Si la qualit� est insuffisante,
le r�gime n'attirera aucun cotisant.
   Dans ce type de r�gime fonctionnant sur une base territoriale et
avec une cotisation g�n�ralement forfaitaire, les conditions d'�quit� et
de redistribution sont faibles mais a priori limit�es.



CONCLUSION : LES POLITIQUES RELATIVES AU CHAMP
DE L'ASSURANCE MALADIE

Compte tenu des conditions � remplir pour d�velopper l'assurance
maladie, il est difficile de renvoyer � une d�marche standardis�e de
d�finition des populations �ligibles. En pratique, la d�cision doit
plut�t relever d'une approche pragmatique, qui tire parti des opportu-
nit�s locales et qui tienne compte des contraintes dont il est provi-
soirement difficile de s'affranchir. Ce jugement s'appuie sur l'histoire
des syst�mes d'assurance maladie qui ont �t� mis en place dans les
pays industrialis�s. M�me si des principes g�n�raux y ont �t�
appliqu�s, il faut remarquer qu'ils se sont appuy�s sur la l�gitimit� de
l'�tat, sur un appareil de soins efficace selon les normes de l'�poque et
sur une croissance �conomique relativement dynamique. Cela �tant,
l'extension aux diff�rentes cat�gories de population s'est faite sur une
dur�e longue et a b�n�fici� de la maturation que les populations ont
effectu�e en adh�rant � des dispositifs solidaires volontaires, comme
les mutuelles.
   Dans la plupart des pays en d�veloppement, les politiques tireront
profit de s'appuyer sur un cadre national, en lan�ant toute une s�rie

48 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d'exp�rimentations locales ou bien circonscrites qui auront valeur de
test aupr�s de la population. Si l'objectif de couverture universelle,
c'est-�-dire de couverture maladie appliqu�e � tous les r�sidents du
territoire, est d�fendable sur le long terme, il para�t assez peu r�aliste
d'envisager que l'assurance maladie permette d'atteindre l'universalit�
dans des d�lais courts. Le principe de contributivit� laissera toujours
de c�t� une frange plus ou moins importante de la population en-
dehors de l'assurance et certaines cat�gories apparemment solvables
obtiendront de retarder leur adh�sion. Les politiques devront donc
toujours int�grer un volet relatif � l'exclusion.



NOTES

 1. Sur la notion de clause contractuelle, voir Brousseau (1993.)


 2. Une variante de comportement de s�lection adverse consiste � ne
s'assurer que lorsqu'on a besoin de compenser une perte et � cesser de
cotiser lorsque le sinistre a peu de chances de se produire (free rider ou
passager clandestin).


 3. Voir le cas des mutuelles du Borgou au B�nin et la mutuelle de
Bwamanda (Criel 1999)


 4. Situation de la mutuelle K�n�ya Sow au Mali (Letourmy 2005)


 5. Voir le chapitre 10 , consacr� � l'Inventaire de la Concertation
dans cet ouvrage.


 6. La conception d'une assurance solidaire correspond � ce que l'on
d�signera en anglais comme Social Health Insurance. En fran�ais, par-
ler d'assurance sociale renvoie � l'assurance publique obligatoire. L'of-
fre dont il est question ici englobe � la fois des r�gimes publics
(g�n�ralement obligatoires) et des r�gimes priv�s volontaires � but non
lucratif.


 7. Le syst�me fran�ais est caract�ristique de cette g�n�rosit� qui
d�clenche l'incompr�hension des sp�cialistes de l'assurance.

                                                             Assurance maladie � 49



 8. Sur la micro-assurance de sant�, voir Dror et et Jacquier, (1999 )
et Letourmy et Letourmy (2003)




BIBLIOGRAPHIE

La bibliographie qui suit est r�duite par rapport au nombre de publi-
cations int�ressantes sur le sujet. On a privil�gi� les textes en fran�ais
et ajout� quelques r�f�rences qui n'ont pas �t� cit�es dans le texte,
notamment sur les mutuelles de sant� et la micro-assurance. On trou-
vera de toute fa�on des bibliographies volumineuses dans un certain
nombre de documents r�f�renc�s ci-dessous.

Bardey, D., A. Coufinhal, et M. Grignon. 2002. � Trop d'assurance peut-il �tre n�faste ?
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Brousseau, E. 1993. L'�conomie des contrats : Technologies de l'information et coordination
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                                                                         CHAPITRE 2



                       Aspects pratiques du montage
        et du fonctionnement de l'assurance
                  maladie en Afrique francophone

                                                                  Alain Letourmy




   R�sum�: Le montage pratique de r�gimes d'assurance maladie obligatoire et de
   mutuelles de sant� constitue un d�fi pour les pays d'Afrique de l'Ouest. Il doit
   respecter certains principes g�n�raux et permettre l'exercice de fonctions tech-
   niques n�cessaires � la bonne marche de l'assurance. Ces principes et ces fonc-
   tions sont d�crits ici en tirant les enseignements d'exp�riences concr�tes. Les dif-
   f�rences entre r�gimes obligatoires et volontaires sont examin�es. La question du
   choix entre ces deux formes de couverture est pos�e. La mise en place de contrats
   avec les formations de soins est pr�sent�e comme une d�marche in�vitable pour
   les r�gimes ou les organisations de micro-assurance. Enfin, on recense les fac-
   teurs de succ�s de la d�marche de montage, en s'interrogeant en particulier sur
   le r�le de l'�tat.

Dans ce chapitre, on amorce une r�ponse � un certain nombre de
questions pratiques pos�es par l'implantation et le fonctionnement
initial de r�gimes d'assurance maladie. On se situe en aval de d�cisions
proprement politiques comme le choix du financement assurantiel de
la sant� ou le choix de r�gimes obligatoires ou volontaires. Il s'agit de
trouver des dispositions concr�tes pour traduire les notions g�n�rales
pr�sent�es dans le chapitre pr�c�dent et pour tenir compte des
m�canismes g�n�raux qui ont �t� expos�s. On rappelle d'abord les
traits distinctifs de l'assurance obligatoire et de l'assurance volontaire.


                                                                                       53

54 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Puis, on pr�sente les aspects principaux du montage d'un r�gime
obligatoire et d'une mutuelle de sant�. Enfin, on revient sur deux
points importants pour le bon fonctionnement des r�gimes : la con-
tractualisation avec les prestataires de soins et le r�le de l'�tat.



ASSURANCE OBLIGATOIRE ET ASSURANCE VOLONTAIRE :
TRAITS DISTINCTIFS

Pour aborder la question de l'implantation concr�te de r�gimes obli-
gatoires et volontaires, il est utile d'avoir en m�moire les traits pra-
tiques qui distinguent ces dispositifs. Le tableau 1 ci-dessous les
pr�sente sommairement, sachant que le mode d'adh�sion est � la base
des diff�rences indiqu�es.
   La diff�rence entre ces deux types de r�gimes provient moins de la
mise en oeuvre des principes et des techniques de l'assurance maladie
que de la relation entre les acteurs qui les font fonctionner : adh�rents,
gestionnaires, prestataires de soins et �tat.
   Par exemple, l'attestation des droits des b�n�ficiaires, la gestion du
risque, les modalit�s de contractualisation avec les prestataires, le
paiement des prestations font l'objet de mesures tr�s voisines. En
revanche, la n�cessit� pour les r�gimes volontaires de rassembler des
effectifs importants implique qu'ils d�veloppent une v�ritable activit�
de marketing, qui n'a pas lieu d'�tre au sein d'un r�gime obligatoire.
De m�me, leur caract�re priv� et leur ind�pendance impliquent la
mise en place de m�canismes de s�curit� financi�re sp�cifiques tr�s
rigoureux. Pour les r�gimes publics, l'�quilibre doit �tre un imp�ratif,
mais l'existence d'une garantie �tatique cr�e une situation tr�s parti-
culi�re et r�duit de fait la responsabilit� des gestionnaires. Dans ce
cas, il s'agit moins de mettre en place des dispositifs sp�cifiques de
s�curit� financi�re (syst�me de garantie, r�assurance) que de veiller �
la bonne gestion dans un contexte relativement s�curis�. La tentation
de n�gliger les principes de contr�le des droits et de surveillance des
comportements des professionnels de soins est grande et doit �tre
contr�l�e. Aussi les r�gimes obligatoires doivent-ils faire l'objet d'un
montage qui permette un suivi strict de la gestion courante et qui se
traduise par un bon �quilibre entre la n�cessit� de la r�gulation �ta-
tique et la d�centralisation des fonctions de gestion.

  Tableau 1 : Traits pratiques distinguant r�gimes obligatoires et volontaires d'assurance maladie

                                        R�gime obligatoire                                     R�gime volontaire

   M�canismes de gestion du risque      �   Elimination de l'antis�lection                    �  P�riode de stage et contr�le de l'antis�lection
                                        �   Hasard moral appelant des m�canismes de           �  Hasard moral appelant des m�canismes de
                                            co-paiement et un contr�le m�dical                   co-paiement et un contr�le m�dical
                                        �   N�cessit� d'un suivi du risque                    �  N�cessit� d'un suivi du risque
   S�curit� financi�re                  �   Constitution de r�serves gr�ce au d�lai de        �  Constitution de r�serves gr�ce au d�lai de carence
                                            carence                                           �  Besoin d'une garantie de tr�sorerie
                                        �   Garantie de l'�tat (tr�sorerie et exploitation)   �  Besoin de r�assurance
   Modalit�s de gestion et              �   Centralisation usuelle, caisse publique           �  Organisation et gestion d�centralis�es
   d'organisation                       �   D�centralisation et d�l�gation de gestion         �  Op�rateurs priv�s � but non lucratif r�gis par une
                                            possibles                                            l�gislation sp�cifique,
                                        �   Tutelle et r�gulation de l'�tat                   �  F�d�ralisation
                                                                                              �  Gouvernance : adh�rents ou ONG ou administration
   Champ d'application en termes        �   Prioritairement : salari�s du secteur moderne,    �  Salari�s du secteur moderne, agents de la Fonction
   personnels                               agents de la Fonction publique                       publique
                                        �   Autres cat�gories selon le contexte               �  Secteur informel, milieu rural
   Nature de la garantie                �   Assurance au premier franc                        �  Assurance au premier franc ou compl�mentaire
                                        �   Panier de base couvrant l'ensemble des besoins    �  Panier de soins adapt� aux attentes des adh�rents
   Relation avec les prestataires       �   Contractualisation avec les prestataires publics  �  Contractualisation avec les prestataires s�lectionn�s
                                            de r�gle
                                        �   Contractualisation avec les prestataires priv�s
                                            selon le contexte
   R�le de l'�tat                       �   Initiative, l�gislation                           �  L�gislation
                                        �   R�gulation                                        �  Tutelle et contr�le
                                        �   Tutelle                                           �  Facilitation du d�veloppement et du fonctionnement

55

56 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



MODALIT�S DE CONSTRUCTION ET D'IMPLANTATION
D'UN R�GIME OBLIGATOIRE D'ASSURANCE MALADIE

Il serait pr�somptueux d'indiquer, en toute g�n�ralit�, comment con-
struire un r�gime obligatoire d'assurance maladie. L'exemple des pays
industrialis�s montre qu'il y a divers chemins pour y arriver, selon le
contexte national et les rapports de force entre acteurs concern�s
(Letourmy A., 2003). Il montre aussi que la cr�ation d'un r�gime
obligatoire est l'ouverture d'un grand chantier qu'il convient de suivre
en permanence, en faisant �voluer les institutions qui lui sont
attach�es, les modes de gestion et les param�tres de l'assurance elle-
m�me. En outre, les montages de r�gimes de S�curit� sociale effectu�s
pour couvrir des risques tels que la vieillesse, les maladies profession-
nelles et les accidents du travail ou encore la famille dans les pays
d'Afrique de l'Ouest � l'image des dispositifs fran�ais ou plus
g�n�ralement bismarckiens n'ont gu�re �t� concluants. Ainsi une
�tude (Foirry et al., 2000) sugg�re que l'extension de la couverture au
risque maladie dans les pays � faible revenu n'a pas forc�ment int�r�t �
�tre r�alis�e � partir des r�gimes existants.
   Ces �l�ments plaident en faveur de d�marches originales adapt�es
aux pays qui veulent se lancer dans l'entreprise. On ne cherchera ici
qu'� d�gager les principes de construction et d'implantation des
r�gimes obligatoires. On essaiera de concilier deux id�es : l'importance
du r�le de pilote qui revient � l'�tat et le respect des m�canismes d'as-
surance maladie au niveau de la gestion courante. Apr�s avoir pr�sent�
les principes g�n�raux de construction et les fonctions essentielles d'un
r�gime obligatoire, on �voquera les facteurs de succ�s du montage.



Aspects g�n�raux du processus de construction et d'implantation
d'un r�gime obligatoire d'assurance maladie

La d�cision de rendre obligatoire l'adh�sion de la population ou d'une
fraction de celle-ci � un r�gime d'assurance maladie obligatoire revient
exclusivement � l'�tat. Elle entra�ne son engagement sur la p�rennisa-
tion du r�gime. Il en r�sulte que la construction et l'implantation du
r�gime donnent n�cessairement lieu � un processus de pilotage par les
pouvoirs publics. Pour cela, ceux-ci ne peuvent �viter de constituer une
�quipe de projet et d'effectuer un suivi politique du processus.

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 57



   L'�quipe de projet peut �tre un bureau existant d�j� au sein du mi-
nist�re comp�tent et qui va consacrer tout son temps au processus.
Cette contrainte de disponibilit� am�nera plut�t le minist�re � cr�er
une cellule en son sein (option retenue par exemple en C�te d'Ivoire
avec la Cellule d'ing�nierie de protection sociale, cr��e pour piloter la
mise en place de l'AMU) ou bien une mission ad hoc plac�e � l'ex-
t�rieur (solution envisag�e au Mali pour la mise en place de l'assu-
rance maladie obligatoire au sein du secteur de l'�conomie formelle).
L'�quipe aura de toute fa�on un mandat exclusivement technique, �
distinguer de l'action politique qui revient au minist�re lui-m�me ou
de celle d'�ventuelles commissions que le minist�re cr�erait pour
l'aider dans ses d�cisions ou pour faire le lien entre les divers acteurs
qu'il faut consulter � l'occasion de la cr�ation du r�gime.
   Le processus doit �tre de toute fa�on l'occasion d'�changes et de con-
certation permanents de l'�quipe de projet et de sa r�f�rence politique
(minist�re charg� de la mise en place du r�gime) avec divers acteurs :

� le groupe cible qui fait l'objet du r�gime

� les professionnels et les �tablissements de sant� concern�s (secteur
   public et priv�)

� les administrateurs du r�gime lorsqu'ils apparaissent explicitement
   avec un r�le pratique.


   L'apparition des administrateurs du r�gime est li�e � la mise en
place des textes l�gislatifs cr�ant le r�gime. L'analyse du processus de
mise en place d'un r�gime obligatoire montre que ces textes n'ont pas
de raison d'�tre produits d'embl�e, en particulier tant que l'�quipe de
projet n'a pas bien avanc� dans sa mission technique. Aussi ces admi-
nistrateurs peuvent-ils �tre ignor�s dans un premier temps. On notera
d'ailleurs que la pr�cipitation en mati�re l�gislative risque d'�tre un
handicap pour le montage du r�gime.
   Le processus de construction et d'implantation du r�gime peut �tre
d�fini comme le d�roulement simultan� d'une d�marche technique et
d'une d�marche socio-politique qui se nourrissent mutuellement. La
premi�re comprend notamment une collecte d'information, des
analyses, des �tudes, des simulations. La seconde se compose d'op�ra-
tions de communication, d'organisation de d�bats et �videmment de
prises de d�cisions.

58 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   On comprend alors que le processus va s'�taler sur une dur�e assez
longue (quelques ann�es), variable selon la situation de d�part et le
caract�re novateur de la r�forme.
   Par exemple, le degr� d'acceptation du groupe cible vis-�-vis de
l'assurance maladie obligatoire peut ne pas �tre tr�s �lev�, sauf si l'ex-
istence de r�gimes volontaires a pu le pr�parer utilement � l'adh�sion
en lui montrant les avantages de l'assurance. L'existence d'autres dis-
positifs d'assurance sociale d�j� mis en place par l'�tat pour la m�me
population cible peut aussi �tre un facteur qui va influencer la
longueur du processus. Si ces r�gimes fonctionnent bien, la cr�ation
de l'assurance maladie peut �tre rapide, car il suffit de mettre en place
une nouvelle branche qui b�n�ficiera des moyens et des proc�dures
d�j� �prouv�s. A l'inverse, si ces r�gimes fonctionnent mal, l'assur-
ance maladie a peut-�tre int�r�t � �tre b�tie sur des bases nouvelles.
Cela sera plus long et entra�nera �ventuellement des conflits de com-
p�tence. Enfin, il faut avoir en t�te qu'un r�gime d'assurance maladie
doit n�cessairement �voluer dans le temps et se donner les moyens de
le faire aussi harmonieusement que possible. Le soin que mettra
l'�tat � mettre en place les conditions d'�volution du r�gime est un
�l�ment de la longueur de la phase initiale de sa construction et de
son lancement.
   Pour donner une id�e des aspects du processus de construction et
d'implantation, on s'attachera d'abord � d�finir le contenu d'une pre-
mi�re phase technique type qui m�ne jusqu 'au stade l�gislatif. Cette
phase initiale comprend :

1� l'explicitation des grandes orientations du r�gime. Elle se fait tradi-
tionnellement en utilisant un certain nombre de r�f�rences existantes,
qu'on trouve avec des exemples �trangers ou d'autres r�gimes existant
dans le pays. Elle proc�de aussi � des cadrages d�mographique, g�o-
graphique et macro�conomique de l'assurance obligatoire.
   Il s'agit notamment de circonscrire la population couverte et de
d�finir les ayants droit. Il s'agit aussi d'orienter le r�gime en termes de
soins m�dicaux couverts. Quel panier de biens et services retenir ?
Quels prestataires, publics ou priv�s ? Seront-ils conventionn�s ?

2� l'analyse de la faisabilit� des options les plus pertinentes dans la si-
tuation de cr�ation du r�gime. Elle donne lieu � une esquisse des
param�tres du r�gime et de son architecture institutionnelle. Des
questions comme la centralisation ou la d�centralisation de l'organisa-

                          Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 59



tion du r�gime, comme la d�finition des organismes gestionnaires,
comme l'impact macro�conomique admissible du pr�l�vement ou
comme les conditions de conventionnement des prestataires sont
trait�es � ce niveau et analys�es en envisageant diverses options.
   La r�alisation d'une �tude actuarielle est classique � ce stade. Il s'agit
de pr�ciser le niveau de la cotisation et le degr� de viabilit� du r�gime.
Deux remarques s'imposent � ce sujet. Lorsque la population assujettie
est bien circonscrite, l'apport de l'�tude actuarielle est int�ressant. C'est
le cas lorsque d'autres risques ont �t� couverts par un r�gime obligatoire
et que l'assurance maladie constitue une extension de la protection
sociale. Inversement, lorsque la population � couvrir est mal d�finie
(crit�re d'�ligibilit� flou, absence d'information sur les ayants droit), l'�-
tude produit des chiffres entach�s d'une grande incertitude et elle doit
�tre renouvel�e ult�rieurement. En second lieu, la situation financi�re
de l'assurance maladie est d�pendante de la fr�quentation des forma-
tions de soins et du co�t des biens et services. S'il n'existe pas de
r�f�rence s�rieuse dans le pays pour estimer ces param�tres, l'�tude
actuarielle produit une information sujette � controverses, qui peut
ralentir le processus. Par exemple, si l'�tude conduit � fixer la cotisation
� un niveau assez �lev�, certains acteurs pourront en prendre pr�texte
pour repousser le lancement du r�gime. Ainsi l'int�r�t de l'�tude actua-
rielle au tout d�but du processus doit �tre appr�ci� soigneusement.
Lorsque le r�gime fonctionne et qu'il produit des chiffres de fr�quenta-
tion et de co�t du risque, la situation est tr�s diff�rente.

3� l'analyse des fonctions techniques et la premi�re d�termination des
principaux param�tres : niveau des cotisations, champ de la couver-
ture en termes de population et de prestations.
   C'est la prolongation de la d�marche pr�c�dente, mais on va envi-
sager plus concr�tement l'organisation des fonctions techniques. A
partir de l'�valuation des effectifs de b�n�ficiaires, des choix faits sur le
panier de biens et services couverts, de donn�es relatives � la tarifica-
tion et de pr�visions de recours aux soins, le niveau de cotisation peut
�tre calcul�.


Les fonctions de base � assigner au r�gime

Quatre grandes fonctions doivent �tre remplies par un r�gime obliga-
toire et doivent donc �tre pr�vues par les textes qui le cr�ent :

60 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� L'�tablissement des droits des personnes qui doivent �tre assur�es

� La fixation et la collecte des cotisations

� La mobilisation des ressources collect�es en vue du paiement des
   prestations

� Le paiement des prestataires qui sont impliqu�s dans la distribution
   du panier de biens et services garanti.


   Ces quatre fonctions peuvent �tre exerc�es par des acteurs ou insti-
tutions distinctes. Il convient alors de pr�voir la coordination de ces
acteurs ou de ces institutions. Ainsi l'existence d'autres r�gimes de
S�curit� sociale peut �tre un atout, d�s lors que ces r�gimes ont d�j�
pr�vu le recensement des b�n�ficiaires et organis� la collecte de coti-
sations sociales. Mais les organismes correspondant ne sont pas n�ces-
sairement les meilleurs pour g�rer le risque maladie. Une institution
particuli�re pourra alors �tre cr��e, � moins que la gestion du risque
maladie soit confi�e � un op�rateur ayant d�j� une comp�tence dans la
relation avec les prestataires de soins. On voit alors qu'il faudra coor-
donner ces diff�rents organismes1.
   L'�tablissement des droits renvoie � l'ensemble des personnes qui
sont oblig�es de s'assurer de par la d�cision publique de cr�er le r�gime.
La base de l'exercice de cette fonction est l'identification univoque des
personnes qui vont cotiser et de leurs ayants droit. Elle est r�alis�e � tra-
vers l'immatriculation des assur�s qui cotisent, sous la forme d'un
num�ro unique et portable, au sens o� ils le conserveront dans tout dis-
positif d'assurance maladie, m�me en cas de changement de r�gime.
   Les droits doivent �tre rendus visibles pour un tiers (en particulier
pour les prestataires de soins) et vont se mat�rialiser par une carte
d'assur� sur laquelle vont figurer les �l�ments n�cessaires � la prise en
charge de l'assur� et de ses ayants droits. La carte est, au minimum,
une carte en papier renforc� sur laquelle figurent les identit�s et les
photos des b�n�ficiaires, ainsi que les dates de validit� des droits. Au
mieux, c'est une carte � puce contenant ces informations et,
�ventuellement d'autres en relation avec les recours aux soins et l'�tat
de sant� des personnes assur�es.
   Les droits sont d�finis par les dispositions g�n�rales du r�gime, qui
fixent notamment le d�lai de carence, dur�e pendant laquelle l'assur�

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 61



va cotiser sans pouvoir pr�tendre aux prestations, ainsi que les condi-
tions de prise en charge (ou tickets mod�rateurs). Ils sont d�finis aussi
par les dispositions particuli�res qui s'appliquent � tel ou tel assur�.
Par exemple, l'exemption du co-paiement en cas de longue maladie ou
en fonction d'une caract�ristique de l'assur� (�ge, exemption sp�ciale,
etc.) fait partie de l'ensemble des dispositions sp�ciales qui seront
mentionn�es sur le document attestant les droits de l'assur�.
   Les b�n�ficiaires sont d�finis par les textes relatifs au r�gime. C'est
g�n�ralement le ou les conjoint(e)s quand ils (elles) ne sont pas
directement assur�(e)s, les enfants jusqu'� l'�ge l�gal (18 ans ou 20 ans
en g�n�ral, sauf s'ils sont �tudiants et/ou eux-m�mes assur�s directe-
ment). Il est rare que les ascendants soient ayants-droit dans le cadre
d'un r�gime d'assurance maladie obligatoire.
   La visibilit� des droits est d'abord au profit de l'assur�, pour lui per-
mettre de b�n�ficier des garanties du r�gime, notamment lorsqu'il a
recours � un prestataire conventionn�. Mais c'est aussi un moyen de
contr�le pour le r�gime et pour ces prestataires ayant pass� des con-
trats avec lui. Les fraudes consistent le plus souvent � faire valoir des
droits que l'on n'a pas, soit avec la complicit� d'un prestataire de soins,
soit avec celle d'un v�ritable assur�, soit en falsifiant le document
valant attestation de droits. Ce type de fraude entra�ne en principe
l'exclusion du r�gime (ou de la convention) du ou des coupables.
   C'est � partir de l'identification des assur�s et des b�n�ficiaires que
le r�gime est en mesure d'effectuer le suivi des recours aux soins et des
d�penses, qui est essentiel pour g�rer le risque maladie.
   La fixation de la cotisation r�sulte en g�n�ral d'une alchimie subtile
lorsqu'il s'agit d'assurance maladie obligatoire. La relation de la cotisa-
tion au risque n'est pas le seul �l�ment � prendre en consid�ration et des
facteurs comme l'importance du pr�l�vement, soit pour les employeurs,
soit pour les cotisants, peuvent �tre d�terminants. Ainsi, la charge en
termes de co�t salarial ou le rapport entre la cotisation et les ressources
du m�nage sont aussi importants que les �l�ments techniques d�coulant
du risque maladie lui-m�me pour d�terminer le niveau de cotisation.
Toutefois, les cotisations doivent assurer l'�quilibre du r�gime, apr�s
imputation d'un chargement de gestion. En Afrique francophone, le
taux de chargement de 20 % est couramment admis.
   Les proc�dures permettant la collecte des cotisations sont fonda-
mentales pour le bon fonctionnement d'un r�gime. Elles peuvent �tre

62 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



assez vari�es, selon que les cotisations sont individualis�es ou non.
Lorsque les cotisations sont individualis�es et li�es � la r�mun�ration
du travail (salaire) ou � une prestation sociale (pension de retraite), le
pr�l�vement � la source, au moment du paiement du salaire ou de la
pension constitue le moyen le plus simple de collecter la part due par
l'assur�. Celle-ci est compl�t�e par la part due par l'employeur, qui
r�gle le tout de fa�on r�guli�re, tous les mois ou tous les trimestres.
En cas d'individualisation, mais lorsque la cotisation est li�e � un
revenu non salarial (professions ind�pendantes), le pr�l�vement � la
source est plus difficile � mettre en place et il est d'usage de collecter
les cotisations � l'occasion de la collecte de l'imp�t qui porte sur les
m�mes �l�ments. Lorsque les cotisations ne sont pas individualis�es, la
collecte doit se faire lorsque le flux de ressources correspondant �
l'assiette est connu. C'est le cas lorsque des cotisations sont li�es � la
valeur d'une r�colte ou d'un revenu d'activit� non salariale2.
   Les m�canismes de la collecte conditionnent le traitement des
impay�s. En cas de pr�l�vement � la source, la r�action en cas d'im-
pay� peut �tre rapide et, par exemple, entra�ner une opposition du
r�gime lorsqu'il y a une liquidation d'entreprise. De toute fa�on, le
traitement des impay�s doit constituer un service particulier au sein
du r�gime, pour des raisons � la fois incitatives et pratiques.


Les facteurs de succ�s

Il existe des conditions g�n�rales3 favorables � l'implantation de l'assu-
rance maladie obligatoire. Du c�t� des assur�s, les ressources mobili-
sables au sein d'un groupe (niveau de revenu par t�te), son potentiel de
d�veloppement �conomique, le statut des cotisants (salariat notam-
ment) sont des facteurs positifs. Du c�t� des prestataires de soins, la
pr�sence de prestataires sur tout le territoire et la qualit� des services
sont particuli�rement importants. Enfin, la cr�dibilit� des pouvoirs
publics, au niveau du centre et de la p�riph�rie et la capacit� de l'�tat �
justifier la cr�ation du r�gime conditionnent l'acceptation de l'assu-
rance par la population. L'obligation d'adh�sion et le pr�l�vement,
impos�s par l'�tat, doivent avoir une contrepartie pour la population
concern�e : la qualit� et l'efficience du service rendu par le r�gime en
termes d'acc�s aux soins. Le r�gime obligatoire doit finalement
recueillir l'adh�sion de toutes les parties concern�es : assur�s, cotisants,

                          Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 63



prestataires de soins, gestionnaires. Faute de quoi, il appara�tra comme
une d�cision �tatique au profit de groupes particuliers et une forme de
client�lisme. Il entra�nera des r�actions de rejet, qui mettront en p�ril
son efficacit�. Par exemple, certains prestataires de soins s'estimeront
contraints d'accepter des conventions iniques et ne dispenseront pas
des services de niveau suffisant ; certains employeurs refuseront de
cotiser car ils estimeront que les prestations sont inexistantes.
   Mais la d�cision d'implantation d'un r�gime doit tenir compte des
forces et des faiblesses pratiques de l'assurance maladie, qui renvoient
� des facteurs comme :

� Les caract�ristiques de la population assur�e : sa taille, sa solvabilit�

� Les dispositions de bonne gestion : comp�tences, rigueur, etc.

� L'existence de m�canismes de s�curit�

� La mise en place et l'efficacit� d'un contr�le externe, notamment de
   l'�tat

   On peut classer les facteurs pratiques de succ�s en facteurs struc-
turels, fonctionnels et institutionnels.

   Les facteurs structurels de succ�s. Les facteurs structurels se situent au
niveau de l'architecture du r�gime, c'est-�-dire des �l�ments relatifs �
la population assujettie, � la cotisation, au contenu de la garantie qu'il
offre et � son organisation en termes institutionnels.
   La population assujettie doit �videmment �tre solvable et identifi-
able. Elle doit accepter cet assujettissement et il doit exister un degr�
de redistribution au sein des groupes qui la composent, s'il existe
d'importantes disparit�s de ressources notamment. L'objectif d'�galit�
de traitement doit �tre vis�. Ce point doit �tre trait� en liaison avec le
m�canisme de cotisation et avec le nombre d'ayants droit.
   Le niveau de la cotisation doit �tre en rapport avec le niveau de
ressources de la population assujettie. En clair, la cotisation demand�e
� un m�nage ne doit pas repr�senter un pourcentage trop important
du revenu disponible (moins de 10 %). Lorsque l'obligation d'assu-
rance est li�e au statut professionnel, la question du partage de la coti-
sation entre l'assur� et l'employeur doit �tre pos�e et r�solue de fa�on
consensuelle.

64 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   La nature des prestations et leur efficacit� en termes de sant�
publique sont un facteur de succ�s. Le choix du panier de biens et
services et les conditions d'acc�s � ce panier doivent concilier les
attentes de la population, les exigences de viabilit� du r�gime et l'effi-
cacit� en termes de r�sultats de sant�. L'exemple des IPM du S�n�gal
est int�ressant � cet �gard. Les employ�s des entreprises ont g�n�rale-
ment souhait� pouvoir consulter des m�decins lib�raux et se procurer
des m�dicaments sous forme de sp�cialit�s dans les officines priv�es.
Le niveau de cotisation doit �tre adapt� � cette exigence, faute de quoi
le r�gime est en p�ril, les prestataires ne sont plus pay�s et refusent les
soins aux assur�s (Letourmy, 1997).
   L'organisation institutionnelle du r�gime est d�finie d'abord par le
degr� de centralisation de la gestion. Celle-ci est-elle exerc�e en direct
par l'administration de l'�tat ou un mandat de gestion a-t-il �t� donn�
� un op�rateur ad hoc ou existant ? Quels sont les statuts des gestion-
naires ? La gestion est-elle participative ? Sous quelle forme : pari-
tarisme, repr�sentation directe des assur�s, etc. ?

   Les facteurs fonctionnels de succ�s. Les facteurs fonctionnels de succ�s
renvoient � la performance du r�gime vis-�-vis des fonctions qu'il
exerce. Indiquons quelques questions cruciales :

� Collecte des cotisations : A-t-on mis en place un contr�le des con-
   tributeurs et un traitement �quitable des impay�s ?

� �tablissement des droits : les conditions d'immatriculation donnent-
   elles acc�s � l'ensemble de la population assujettie (connaissance des
   ayants droit) ? La visibilit� et la portabilit� des droits sont-elles suf-
   fisantes pour que la garantie ait une validit� correcte et conforme aux
   objectifs annonc�s lors de la cr�ation du r�gime ? Les fraudes
   peuvent�elles �tre d�tect�es et donner lieu, �ventuellement, � exclu-
   sion ? Le suivi des b�n�ficiaires d�coule-t-il de l'�tablissement des
   droits, gr�ce � l'informatique notamment ?

� Mobilisation des ressources : les modes d'affectation des ressources
   du r�gime sont-ils corrects, l� o� l'on a besoin des fonds ? La cotisa-
   tion d'assurance maladie va-t-elle � l'assurance maladie ? La sou-
   plesse d'utilisation des ressources est-elle suffisante ? Y a-t-il une
   bonne ad�quation de l'allocation des ressources avec le parcours du

                          Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 65



   malade (ou b�n�ficiaire) ? Autrement dit, l'argent suit-il le malade ?
   La tr�sorerie de la caisse centrale ou celle des caisses d�centralis�es
   ou d�concentr�es sont-elles assur�es ?

� Paiement des prestataires : Comment la contractualisation avec les
   prestataires est-elle r�alis�e ? Y a-t-il un dispositif de tiers payant ?
   La r�gularit� des paiements est-elle assur�e ? Comment le co-
   paiement est-il r�gl� par l'assur� : au moment des soins, a posteriori
   par pr�l�vement automatique effectu� par le r�gime, par paiement
   de l'assur� au r�gime ?

� Gestion du risque et gestion courante : quelle est la nature du sys-
   t�me d'information permettant d'�tablir et de suivre le co�t du
   risque (voir encadr� 1) ? Quelles sont les proc�dures participant au
   contr�le des b�n�ficiaires et des prestataires ? Comment les proc�-
   dures mises en place concourent-elles � une gestion rigoureuse et
   transparente ?

   Les facteurs institutionnels de succ�s. Ils sont relatifs � la pertinence et �
la continuit� de l'action de l'�tat. Lors du processus de cr�ation, l'�tat
doit prendre en charge la sensibilisation de tous les acteurs concern�s :
assur�s, cotisants, prestataires, gestionnaires. Il doit r�gler les aspects
juridiques et politiques de la cr�ation du r�gime : argumentaire poli-
tique, loi et d�crets, m�canismes de financement, etc.
   Il doit ensuite proc�der � l'organisation pratique du r�gime, � l'or-
ganisation et � la mise en fonctionnement de la tutelle (d�signation du
minist�re charg� de la tutelle, des organes de liaison entre la tutelle et
le r�gime). Il doit veiller � la r�gulation de la d�pense et � l'�volution
du r�gime, en faisant varier si n�cessaire le niveau des cotisations et
celui des prestations. Il doit exiger un compte rendu r�gulier de la ges-
tion courante, pour r�agir vite aux probl�mes �ventuels.
   Enfin, le comportement des pouvoirs publics � l'�gard du r�gime
obligatoire doit �tre exemplaire. Ils doivent respecter la mission du
r�gime, ne pas lui imputer des charges indues, traiter le plus vite pos-
sible le d�ficit �ventuel et assurer la disponibilit� de tr�sorerie. Sur ces
questions, l'observation des r�gimes obligatoires des pays industria-
lis�s constitue une source d'enseignements int�ressants pour les pays
d'Afrique de l'Ouest, � d�faut de fournir des mod�les � suivre.

66 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




   Encadr� 1 : Suivi du risque

   Le suivi du risque consiste � relever les caract�ristiques des sinistres et � analyser
   leur occurrence. Il suppose la mise en place d'un syst�me d'information destin� �
   analyser les sinistres. Ce syst�me sera d�duit de la garantie offerte et tous les types
   de soins (nature et identit� de la formation prestataire) correspondant � cette
   garantie.
       En pratique, on rel�vera le volume de la consommation de chaque acte de soins
   inclus dans la garantie et la d�pense correspondante. Le principal objectif de ce
   relev� d'informations est d'�valuer le risque moyen r�el, son co�t et son �volution.
   Autant que possible, le relev� de l'ensemble de la d�pense de soins, c'est-�-dire
   aussi des sommes d�pens�es en-dehors de la couverture maladie, sera effectu�
   simultan�ment. L'int�r�t de cette information est fondamental pour avoir les moyens
   de modifier facilement la garantie. Toutefois, le co�t du syst�me permettant ce relev�
   en continu peut �tre prohibitif. Un dispositif d'enqu�te ponctuelle ad hoc pourra alors
   lui �tre pr�f�r�.
       Un objectif second (et en fait aussi important que le premier) sera d'utiliser l'infor-
   mation sur la d�pense pour rapporter le risque aux caract�ristiques des assur�s,
   c'est-�-dire de r�pondre � la question : qui consomme quoi ? Le probl�me pos� par la
   production de ce type de donn�e est d'abord son co�t, qui d�coule de la mise en
   place d'un dispositif de recueil et d'enregistrement assez complet. Un aspect acces-
   soire, mais entra�nant dans certains contextes de grandes difficult�s, est la n�cessit�
   de la confidentialit� des informations d'origine m�dicale. Elle peut entra�ner des r�ti-
   cences de la part des soignants � produire l'information et aussi des contraintes
   l�gales pour le stockage des donn�es.
       Les retomb�es du suivi du risque sont importantes pour le r�gime. En premier lieu
   le suivi permet de calculer et d'analyser le ratio prestations/cotisations ou taux de




MODALIT�S DE MONTAGE D'UNE MUTUELLE ET D�VELOPPEMENT
DES R�GIMES VOLONTAIRES

Comme pour le montage de r�gimes d'assurance maladie obligatoire, il
est hasardeux d'indiquer de fa�on rapide comment on peut monter une
mutuelle ou, plus g�n�ralement, un r�gime d'assurance maladie volon-
taire. De fait, la variabilit� des exp�riences rang�es sous les labels de
mutuelle de sant� ou de micro-assurance de sant� rend un peu illusoire
la mise en �vidence de modalit�s standard de montage d'organismes
dont les traits communs sont parfois difficile � pr�senter de fa�on
unifi�e (Letourmy A. et A., 2003). Ces dispositifs visent des groupes de
populations souvent issus du secteur de l'�conomie informelle. Le con-
texte joue un r�le d�terminant pour configurer l'organisme � mettre en

                                 Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 67




   sinistralit�, qui conditionne l'�quilibre technique du r�gime. Ce taux ne doit �tre ni
   trop �lev�, ni trop bas. S'il est trop �lev�, disons sup�rieur � 85 %, le r�gime doit avoir
   des frais de gestion tr�s contr�l�s et les chances d'obtenir un exc�dent sont plus
   faibles. Si le taux est trop faible, c'est en g�n�ral que la cotisation a �t� fix�e � un
   niveau incorrect par rapport au risque. Sans doute cette situation contribue-t-elle �
   fournir des ressources au r�gime, en vue d'autres utilisation que la couverture du
   risque (r�serves, gestion plus souple, autres d�penses en faveur des assur�s, etc.),
   mais elle constitue aussi un frein � l'adh�sion. L'utilisation de l'information tir�e du
   suivi sera donc d'abord une adaptation de la tarification au risque.
      L'autre utilisation de l'information issue du suivi du risque sera le rep�rage des
   comportements strat�giques des assur�s, qui se traduisent par une consommation
   volumineuse, dont la justification n'appara�t pas de prime abord. Cette analyse
   d�bouche sur une r�vision des param�tres de gestion du risque qui visent � limiter
   ces comportements (voir ci-dessous). �ventuellement, des alliances entre assur�s et
   prestataires pourront �galement �tre mises en �vidence. Le caract�re frauduleux de
   ces relations entra�nera le d�congestionnement des formations de sant� et l'exclu-
   sion des assur�s ind�licats.
      Si le r�gime le souhaite et a les moyens de d�velopper un syst�me d'information
   performant, le suivi du risque s'int�grera dans un dispositif de � managed care �, per-
   mettant la seule prise en charge des services efficients. Pour cela, le r�gime devra
   au pr�alable passer des conventions d�taill�es avec les prestataires et fixer aux
   assur�s des r�gles de recours aux soins tr�s pr�cises. A chaque �pisode de soins
   correspondra en principe un plan de prise en charge correspondant � l'�tat des tech-
   niques disponibles localement. Le syst�me de suivi du risque sera configur� de fa�on
   � v�rifier que ce plan est bien respect�.




place. Par ailleurs, les mutuelles ou organismes de micro-assurance sont
le fruit d'initiatives tr�s diverses, le statut des diff�rents promoteurs
imprime aussi sa marque au processus de montage. Enfin, il faut tenir
compte du fait que peu de mutuelles se montent sans un appui ext�rieur,
qu'il vienne de l'�tranger ou du pays lui-m�me (ONG locales). La
m�thodologie de l'op�rateur d'appui constitue un autre facteur de va-
riabilit� qu'il est difficile de neutraliser, mais qui est d�terminant.
   Deux aspects du montage des mutuelles vont retenir l'attention.
D'abord on s'int�ressera � la conduite d'un projet individualis� de
mutuelle de sant�. On a choisi ici de privil�gier l'entr�e par la
d�marche d'appui pour donner un aper�u de cette question de mon-
tage d'une mutuelle (Letourmy, 2000b). Ensuite on traitera de la poli-
tique de d�veloppement de la mutualit�.

68 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



La conduite d'un projet de montage de mutuelle de sant�4

On consid�re ici le montage d'une mutuelle ou d'un organisme de
micro-assurance de sant� comme un projet auquel collaborent un
op�rateur et le groupe qui doit b�n�ficier du r�gime volontaire d'as-
surance. Cette orientation est particuli�rement adapt�e aux pays
d'Afrique de l'Ouest, o� il s'agit de faire la promotion de concepts
comme l'assurance ou la mutualit� qui sont des innovations tech-
niques et sociales pour les groupes auxquels on s'adresse. On ne
pr�jugera pas de la nature de l'op�rateur, ni de son origine, ni des ca-
ract�ristiques du groupe � mutualiser. En s'attachant � analyser le
processus de montage au prisme de la d�marche d'appui, on pourra
mettre en �vidence ses �tapes essentielles et les activit�s qui s'y rat-
tachent. M�me si une mutuelle ou un organisme de micro-assurance
se montent sans aucun appui, elles ont � parcourir ces �tapes et r�ali-
ser ces activit�s.
   Il est utile de distinguer diff�rentes phases au sein du processus de
montage d'une mutuelle de sant�, dans lequel le r�le d'un op�rateur
d'appui est important. Pour fixer les id�es, on en retiendra quatre :

   1) une phase d'analyse de la situation initiale

   2) une phase de lancement du projet

   3) une phase de d�veloppement

   4) une phase de transfert.


   Phase 1: l'analyse de la situation initiale. Cette phase consiste � analyser
la situation de d�part en fonction de la pr�sence, de l'implication et des
relations de 5 types d'acteurs qui vont forc�ment participer au mon-
tage, � des titres et � des moments divers :

   1� Les mutualistes pressentis

   2� Les prestataires de soins li�s � la mutuelle

   3� Les financeurs du projet

   4� Les op�rateurs d'appui

   5� Les acteurs de l'environnement, administratif et politique
        principalement.

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 69



Cette phase d'analyse initiale d�bouche quant � elle sur une d�cision :
est-il ou non pertinent de lancer le projet de cr�ation de mutuelle ?

  Phase 2: le lancement du projet. La phase de lancement regroupe
toutes les op�rations destin�es � appr�cier la faisabilit� du montage et
� pr�parer le montage proprement dit5.
  Elle suppose l'existence d'un promoteur susceptible de mener les
�tudes et d'�tablir les relations qui caract�risent cette phase. Le pro-
moteur est celui qui souhaite la cr�ation de la mutuelle, en fonction de
motivations diverses. La phase de lancement comprend notamment :

� l'identification de la (ou des) population(s) cible(s) en fonction des
  besoins estim�s ou exprim�s, de la capacit� contributive, de la sensi-
  bilit� aux principes mutualistes de divers groupes sociaux

� le rep�rage �ventuel de leaders au sein de cette (ces) population(s)
  cible(s)

� l'inventaire de l'offre disponible, en mettant l'accent sur la qualit�
  des services dispens�s, les tarifs pratiqu�s, les conditions d'une future
  collaboration avec des mutuelles

� l'analyse du contexte administratif et politique (l�gislation, promo-
  teurs publics �ventuels, politique de sant�, etc.).

� l'analyse de la viabilit� de la cr�ation de mutuelles et des conditions �
  remplir pour le lancement (�tude de faisabilit�).


  A partir de ces �l�ments, le promoteur doit �tre en mesure de
d�finir un projet qui peut �tre plus ou moins extensif (micro projet ou
programme de d�veloppement multicentrique) et de contenu variable
(par exemple : mise en place d'une offre de soins mutualiste, mise en
place d'un financement et d'une offre, mise en place d'une formule
assurantielle), de concevoir un dispositif d'appui, d'estimer les co�ts
de l'appui et le budget externe correspondant, de proposer un calen-
drier et un chemin de d�veloppement.
  La phase se cl�t avec l'identification (�ventuellement n�cessaire)
des op�rateurs d'appui et des financeurs, puis avec la mise en forme du
projet. Dans certaines situations, le promoteur va jouer � la fois un
r�le d'op�rateur d'appui et de financeur. Par exemple les syst�mes de
micro-assurance mont�s au Bangladesh par de grandes ONG entrent

70 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



dans cette cat�gorie (Letourmy A. et A., 2003). A notre connaissance,
dans les projets mont�s en Afrique de l'Ouest, les r�les d'op�rateur et
de bailleur de fonds sont tenus par des acteurs diff�rents.
  Cette phase de lancement du projet n�cessite un certain nombre
d'�tudes et de contacts qui impliquent g�n�ralement les futurs op�ra-
teurs d'appui.

  Phase 3 : le d�veloppement. La phase de d�veloppement constitue le
coeur du processus de montage et repr�sente le moment o� les dif-
f�rentes formes d'appui sont essentielles. Elle commence avec l'affine-
ment du projet : ach�vement de la formation initiale des responsables,
d�finition plus pr�cise de sc�narii de prestations/cotisations, engage-
ment �ventuel de n�gociations avec les prestataires existant.
  Un certain nombre d'op�rations sont � r�aliser tr�s t�t :

� d�finition pr�cise des prestations et des cotisations par un travail
  commun entre op�rateurs d'appui et responsables ;

� mise en place de proc�dures minimum de fonctionnement �
  d�l�guer aux responsables � partir d'une formation l�g�re : proc�-
  dures d'adh�sion, mise en conformit� avec la l�gislation, organisa-
  tion de l'acc�s aux prestations ;

� mise en place des bases du fonctionnement statutaire (Assembl�e
  G�n�rale constitutive, bureau, textes statutaires) ;

� d�finition d'un programme d'information et de sensibilisation des-
  tin� � accro�tre les effectifs, qui doit �tre r�alis� majoritairement par
  les responsables mutualistes.

� mise en place d'outils de gestion et d'un syst�me d'information,
  principalement par l'op�rateur d'appui.


  Le d�veloppement de la mutuelle se r�alise avec un appui impor-
tant destin� � :

� faciliter l'apprentissage des responsabilit�s et de l'utilisation des ou-
  tils par les �lus, au respect des proc�dures statutaires ;

� produire les r�sultats d'activit�, les pr�senter r�guli�rement et les
  analyser ;

� maintenir les relations avec les prestataires et l'administration ;

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 71



� accompagner la mont�e en charge de l'organisation (emploi de per-
  sonnels, notamment r�mun�r�s par la mutuelle) ;

� �valuer le processus et le corriger �ventuellement.


  Chemin faisant, des d�marches sont � entreprendre pendant cette
phase, en vue de :

� transf�rer petit � petit � la mutuelle tous les co�ts de fonctionnement
  ("internalisation" des co�ts pris en charge par le projet)

� donner une s�curit� � la mutuelle (organisation d'un fonds de
  garantie par exemple)

� donner un contenu formel au mouvement (constitution d'unions de
  mutuelles, f�d�ralisation)

� obtenir des pouvoirs publics une attention plus grande ou une recon-
  naissance (production d'un code sp�cifique par exemple).


  Phase 4: le transfert. Le projet de mutuelle arrive � sa fin lorsque l'on
est au niveau :

� de l'explicitation des conditions de viabilit�, � travers � l'internalisa-
  tion6 � de tous les co�ts ;

� du contr�le de l'existence de toutes les comp�tences requises au sein
  de la mutuelle ;

� de la mesure de l'impact du d�veloppement mutualiste.


  Le montage d'un syst�me de garantie devra �tre finalis�. Il est
souhaitable aussi que les bases d'un mouvement mutualiste (f�d�ra-
tion) aient �t� pos�es. Le transfert peut s'accompagner de la mise en
place de formes de parrainage qui maintiendront le lien avec l'op�ra-
teur d'appui.
  En Afrique de l'Ouest, peu de mutuelles sont arriv�es � ce niveau
d'�volution. Par exemple, l'UTM, apr�s six ans de fonctionnement,
est autonome techniquement, mais pas financi�rement. Les mutuelles
b�ninoises appuy�es par le CIDR depuis une dizaine d'ann�es, envi-
sagent le transfert apr�s une derni�re p�riode de d�veloppement
financ�e par la Coop�ration suisse.

72 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



D�finir une politique de d�veloppement de la mutualit�

Il faut adapter le sch�ma pr�c�dent � chaque contexte et notamment
au cadre dans lequel s'inscrit chaque projet : s'agit-il d'un projet isol� ?
D'un projet con�u au niveau d'une r�gion ? d'un projet d'ambition
nationale ? Cela fait aborder la d�finition d'une politique de promo-
tion des mutuelles ou de la micro-assurance de sant�. En fonction des
observations qu'on peut faire en Afriquee francophone, on peut
retenir trois types de politiques de d�veloppement.
   La premi�re rel�ve d'une d�marche ascendante. Il existe dans le
pays une s�rie d'initiatives de cr�ation de mutuelles, donnant lieu �
des projets ind�pendants. L'id�e est de structurer ces projets pour
donner plus de solidit� au d�veloppement de la mutualit� de sant�.
   Il faut en effet rappeler que les petits organismes ne sont pas viables
et n'ont pas par eux-m�mes les moyens de leur croissance. Une
mutuelle isol�e a toutes les chances de p�ricliter, si elle n'est pas sub-
ventionn�e durablement. Un projet local, m�me r�gional a peu
d'avenir, si ces diverses composantes ne se r�unissent pas d'une fa�on
ou d'une autre. Le probl�me crucial est de se mettre ensemble pour
disposer d'outils communs donnant plus de force � chaque �l�ment,
en lui co�tant un minimum de ressources. Les outils communs les
plus utiles sont :

� une caisse de r�assurance

� un service de communication

� un service de formation

� un service de contr�le de gestion

� un service de contr�le m�dical.


   Aucune mutuelle isol�e n'a les moyens de se payer ces services et
n'en a d'ailleurs qu'une utilisation partielle. Il s'agit alors de se f�d�rer
et de cr�er des unions ou des f�d�rations qui auront elles la possibilit�
de cr�er ces outils communs. Il existe plusieurs exemples de f�d�ralisa-
tion de mutuelles �l�mentaires : en Guin�e, l'Union des Mutuelles de
Guin�e foresti�re, au B�nin, l'Alliance des Mutuelles de sant� du Bor-
gou, au S�n�gal, les coordinations g�ographiques de Dakar et de

                        Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 73



Thi�s. Ces entit�s ont commenc� � se doter d'outils communs, mais
ne disposent pas de l'ensemble �voqu� ci-dessus.
   Les unions de mutuelles ont aussi un r�le de repr�sentation poli-
tique, plus ou moins important selon l'attitude des pouvoirs publics.
On peut noter que dans plusieurs pays (Guin�e, B�nin) la mise en
place de plate-forme de repr�sentation r�unit des projets diff�rents,
appuy�s par des bailleurs ou des op�rateurs vari�s.
   La deuxi�me politique de d�veloppement consiste � appliquer une
d�marche descendante. Il s'agit alors de cr�er une structure centrale
de d�veloppement, de la doter des outils communs cot�s et de la
charger de la promotion des mutuelles dans le pays. L'exemple typique
est celui du Mali o� l'Union technique de la Mutualit� malienne
(UTM) a illustr� le mod�le d'agence de d�veloppement de la mutua-
lit� propos� dans ce pays. L'UTM est � la fois structure d'appui au
d�veloppement, lieu d'h�bergement des outils communs et de d�fini-
tion de la strat�gie de d�veloppement et repr�sentation des mutuelles
adh�rentes. C'est une entit� mutualiste de droit priv�, ind�pendante
de pouvoirs publics, mais c'est l'acteur principal du d�veloppement
des mutuelles de sant� dans le pays.
   La d�marche descendante (du centre vers la p�riph�rie) peut impli-
quer directement l'�tat, qui va jouer alors le r�le de l'agence de
d�veloppement. Cette configuration s'observe au Rwanda o� c'est
l'administration de la sant� qui sensibilise les populations, les aide �
cr�er et � g�rer les mutuelles locales (Musango L. , 2005).
   Enfin, certains pays adoptent une d�marche hybride, avec une action
descendante men�e par l'�tat et une action ascendante renvoyant aux
promoteurs priv�s. La Guin�e illustre ce cas de figure. Le minist�re de
la Sant� a lanc� des mutuelles couvrant le risque obst�trical et a forte-
ment incit� certaines communaut�s � cr�er leur mutuelle en liaison
directe avec les formations publiques de soins. Parall�lement, des pro-
grammes de d�veloppement sont appuy�s par des op�rateurs ext�rieurs
(Guin�e foresti�re, Fouta Djallon) et ont commenc� � se structurer.
   Sans porter de jugement sur l'int�r�t respectif de ces d�marches, il
faut remarquer que les conditions de leur r�ussite, c'est-�-dire de la
mutualisation du plus grand nombre sont diff�rentes. La d�marche
ascendante prend du temps et pose des probl�mes relationnels entre
diff�rents projets. La d�marche descendante apporte d'embl�e une
structuration au mouvement et une repr�sentation politique homog�ne,

74 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



mais elle est plus co�teuse et demande un appui financier ext�rieur
continu.



LA CONTRACTUALISATION ENTRE LES R�GIMES D'ASSURANCE
MALADIE ET LES FORMATIONS DE SOINS

Quelle que soit la nature d'un r�gime d'assurance maladie, il n'a de
sens que s'il ouvre � ses membres l'acc�s � des formations de soins.
Cette ouverture peut se faire par deux voies.
   La premi�re consiste pour le r�gime � avoir un lien exclusif avec
une offre de services. En fait il y a deux situations sym�triques : le
r�gime cr�e son offre (centre de sant�, clinique, h�pital) ou le r�gime
est cr�� par l'offre (assurance int�gr�e � un �tablissement), qui sont ici
�quivalentes7.
   La seconde voie consiste � travailler avec une offre autonome et �
passer avec les prestataires correspondants des contrats d�finissant les
conditions d'acc�s des assur�s. C'est cette d�marche de contractualisa-
tion qu'il s'agit maintenant d'aborder8. Il faut rappeler toutefois que
les deux voies qui viennent d'�tre indiqu�es ne sont pas exclusives
l'une de l'autre. Un r�gime peut pour partie donner acc�s � une offre
de soins � maison � (c'est-�-dire dont il est propri�taire) et, pour par-
tie, passer des contrats avec des prestataires ind�pendants.


La relation avec l'offre : de l'accord au contrat

Le point de d�part du contrat est l'accord effectif (ou envisag�) entre
un r�gime et une formation de sant�. Cet accord repose sur une
volont� commune de partenariat, c'est-�-dire un objectif partag� et
l'id�e que chacun va trouver avantage � la collaboration. Le constat
apparaissant � la n�gociation de l'accord ou au moment de sa mise en
oeuvre est que des probl�mes subsistent ou sont anticip�s. C'est
g�n�ralement le r�gime qui va proposer une proc�dure de traitement
de ces probl�mes, car, � ce moment, soit il est plus d�pendant de la
formation que l'inverse car il a besoin de fournir des prestations de
sant�, soit il est en position de force car il est d�j� � un stade avanc� de
d�veloppement. Cette solution est un contrat n�goci� et �crit
engageant les deux parties.

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 75



   Le contrat comporte une s�rie de clauses qui supposent un environ-
nement particulier pour que sa mise en oeuvre soit effective et durable.
   En premier lieu, il faut qu'existe un syst�me d'information qui va
permettre le suivi des clauses contractuelles. Ce syst�me reposera sou-
vent en partie sur un partage de donn�es entre prestataires de soins et
assurance.
   En deuxi�me lieu, il faut que le contrat donne l'occasion d'une �va-
luation qui permettra de v�rifier son adaptation aux objectifs com-
muns et sp�cifiques chaque partenaire.
   Enfin, il faut qu'un environnement juridique (g�n�ral ou particulier
� la sant�) permette un recours de chaque partie en cas de litige et de
conflit. On doit insister sur cet environnement qui scelle la valeur
juridique du contrat. En situation de litige non susceptible de r�gle-
ment, la sanction sera plus ou moins � la discr�tion du r�gime selon le
rapport de forces. Au minimum, le r�gime ne travaillera plus avec le
prestataire. Mais s'il en a les moyens, le r�gime obtiendra le change-
ment du comportement du prestataire et poursuivra la relation.


Le contenu du contrat : variantes possibles

Le contenu du contrat va varier en fonction des objectifs du payeur et
des possibilit�s qu'il a de les faire reconna�tre par les formations de
soins.
   Le contrat simple va organiser le tiers-payant, fixer la tarification et
mettre en place les proc�dures de reconnaissance des b�n�ficiaires. Il
ne met pas en cause le fonctionnement des formations de soins, ni ses
modalit�s de r�mun�ration. Il l'oblige �ventuellement � �tablir un cir-
cuit de gestion particulier pour les b�n�ficiaires. Ce type de contrat
n'a pas pour vocation d'am�liorer les services rendus par la formation
de sant�.
   Lorsqu'il y a une ambition commune d'am�liorer les prestations, le
contrat va �tre un vecteur commode de ce projet. On construira ainsi
des contrats avec des clauses de qualit�. Par exemple, la formation s'en-
gagera � rendre le m�dicament disponible ou bien de rembourser le
b�n�ficiaire si celui-ci doit acheter en-dehors de la formation les pro-
duits prescrits. Pour g�n�raliser la d�marche, une charte de qualit� sera
annex�e au contrat et devra �tre respect�e par les deux parties. La
proc�dure de contractualisation avec plusieurs formations publiques et
priv�es engag�e au Mali par l'UTM illustre cette approche. L'hygi�ne,

76 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'accueil du malade, la disponibilit� du m�dicament faisaient partie de
la charte, en contrepartie d'un appui des mutuelles aux formations de
soins.
   Un autre type de contrat va engager plus avant les deux parties dans
le partage du risque. Il s'agit alors d'�tablir un mode de tarification qui
incite les assur�s et le prestataire � une prise en charge efficiente. Par
exemple, une mutuelle pourra n�gocier un tarif � la capitation avec un
centre de sant� (cas de la mutuelle de Nouna au Burkina Faso). Il y a
une garantie de ressources pour le centre. En contrepartie, l'acc�s aux
soins est gratuit et la gestion du risque est tr�s simple pour la
mutuelle. Un autre exemple est le contrat pass� au B�nin entre les
mutuelles du Zou et un centre de sant� de r�f�rence (Ouess�). Apr�s
une �tude des co�ts de production, des tarifs forfaitaires sont �tablis
pour la prise en charge des mutualistes. On �value ensuite l'avantage
des deux parties. On a ai ainsi observ� un gain pour le centre et une
disparition de la surtarification pour les mutualistes. Le contrat est
bien � gagnant-gagnant �.
   Il reste que la contractualisation n'a de sens que dans la dur�e.


Le devenir des contrats entre mutuelles et formations de sant�

Deux des contrats cit�s ci-dessus illustrent une d�marche de mutuelles
face � des �tablissements qui, de leur propre chef, n'auraient pas cher-
ch� � passer des contrats avec des payeurs de soins. De ce point de vue,
on peut dire qu'ils repr�sentent une �volution impos�e � l'offre, qui ne
peut �tre durable que si le rapport de force est favorable aux
mutuelles. Les suites des relations entre l'UTM ou les mutuelles b�ni-
noises et les formations partenaires indiquent que les conditions de la
contractualisation doivent �tre am�lior�es dans un certain nombre de
pays.
   Au Mali, les mutualistes sont satisfaits des services re�us dans les
centres de sant�, mais ont quelques motifs d'insatisfaction dans les
h�pitaux. En particulier, l'accueil qui leur est r�serv� n'est pas tou-
jours excellent et, surtout, les m�decins ont tendance � prescrire les
m�dicaments sous la forme de sp�cialit�s, qui ne sont pas couvertes
par la garantie. A l'insatisfaction des mutualistes, les professionnels
r�pondent que les personnes assur�es ont des exigences tr�s fortes et
demandent des privil�ges qu'il ne serait pas �quitable de leur accorder.
Sur la question du refus de prescrire des m�dicaments sous forme

                        Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 77



g�n�rique, c'est encore l'expression d'une m�fiance des m�decins �
l'�gard de ces produits qui pr�vaut. Les tensions ne sont pas faciles �
apaiser, dans la mesure o� les mutualistes ne sont pas assez nombreux
et ne repr�sentent pas une part de client�le suffisante dans les h�pi-
taux. La solution serait l'interm�diation des autorit�s sanitaires, mais
celles-ci h�sitent apparemment � affronter les m�decins hospitaliers.
   Au B�nin, le changement de m�decin-chef dans le centre de
r�f�rence a �t� fatal au contrat. Les agents de sant� ont repris leurs
habitudes de facturation parall�les et ont fait mauvais accueil aux
mutualistes. Le dispositif d'�valuation du contrat est tomb� en d�su�-
tude. Les mutuelles n'ont plus eu que la possibilit� d'�viter le centre.
A nouveau, les effectifs des mutuelles et la difficult� de mobiliser les
autorit�s sanitaires ont montr� que le rapport de force �tait d�favo-
rable � l'une des parties du contrat et que celui-ci ne pouvait �tre pro-
long� dans les m�mes conditions, en d�pit de son int�r�t.
   L'importance de l'environnement des contrats constitue la le�on
principale de ces exemples. D�s lors que la contractualisation se
heurte � des attitudes et � des comportements hostiles au sein des for-
mations de sant�, il importe que l'environnement juridique et institu-
tionnel puisse fournir les moyens de r�soudre les conflits qui apparais-
sent. Si les pouvoirs publics ne s'impliquent pas dans la d�marche, il
faut du temps aux mutuelles pour cr�er un rapport de forces favorable.
Cela fait comprendre d'une part que la sensibilisation � la d�marche
doit aller au-del� des parties int�ress�es (payeurs et prestataires de
soins) ; d'autre part que les autorit�s de sant� soient d'autant plus effi-
caces pour accompagner la contractualisation qu'elles se dotent
d'outils et de personnes comp�tentes. L'id�e qui se r�pand de monter
au sein du Minist�re charg� de la sant� d'une cellule d'appui � la con-
tractualisation va dans ce sens.



LES RELATIONS PRATIQUES DE L'�TAT AVEC L'ASSURANCE MALADIE

Les relations de l'�tat avec les r�gimes d'assurance maladie sont de
deux ordres. D'une part, l'�tat est en charge de d�finir une politique
de financement en donnant � l'assurance maladie une place plus ou
moins importante, en imposant la cr�ation de r�gimes obligatoires et
en faisant la promotion de r�gimes volontaires. D'autre part, lorsque
des r�gimes sont cr��s, l'�tat doit accompagner leur fonctionnement

78 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



et leur d�veloppement. C'est en ce sens qu'on peut parler des relations
pratiques de l'�tat avec l'assurance maladie, pour les diff�rencier des
premi�res qui rel�vent du choix.
   Ces relations pratiques sont essentielles pour plusieurs raisons. La
premi�re est que la p�rennisation des r�gimes d'assurance maladie
n'est pas seulement une question technique et d�pend de fa�on signi-
ficative des acteurs et des institutions qui en seront les promoteurs et
les supports. Cette remarque ne vise pas � minimiser l'importance des
aspects techniques de l'assurance maladie, ni des formations qui sont
organis�es pour faire conna�tre les probl�mes pos�s par sa mise en
place et les solutions g�n�ralement pr�conis�es pour les r�soudre. Sur
ces points, les pays africains doivent b�n�ficier d'un transfert de
savoir-faire et plusieurs disposent d�j� d'un vivier de professionnels
susceptibles de g�rer les r�gimes obligatoires ou volontaires. Il reste
que ces ressources humaines doivent �tre mobilis�es dans des institu-
tions et en fonction de principes d'organisation qui r�sultent de l'in-
teraction de nombreux acteurs. L'histoire des r�gimes d'assurance
maladie des pays du Nord est l� pour attester de la complexit� et de la
longueur du processus. De m�me les difficult�s rencontr�es par les
r�gimes obligatoires ou volontaires des pays en d�veloppement pour
atteindre un niveau de fonctionnalit� et d'efficacit� correct sugg�rent
le poids de rapports sociaux et l'importance du jeu d'acteurs qui se
d�roule autour de l'assurance maladie.
   Une deuxi�me raison pour traiter du r�le de l'�tat comme partie
prenante du processus de d�veloppement de l'assurance maladie est
qu'il y repr�sente, dans tous les cas de figure, un acteur important,
voire fondamental. C'est � peu pr�s �vident lorsqu'il s'agit de r�gimes
publics � caract�re obligatoire ; ce l'est peut-�tre moins lorsqu'on
parle de r�gimes priv�s volontaires, comme ceux qui sont organis�s
par les mutuelles de sant�. Il est d'ailleurs n�cessaire de tirer toutes les
cons�quences de ce que le r�le de l'�tat est variable selon le type de
r�gime, public ou priv�, tant du point de vue des fonctions que l'ad-
ministration doit assurer que de la fa�on de les exercer. Dans les pays
industrialis�s, on peut dire que ce r�le est aujourd'hui assez bien codi-
fi�, car il y a eu plusieurs d�cennies de relations entre l'�tat et les
r�gimes d'assurance maladie publics ou priv�s. La situation est assez
diff�rente dans les pays en d�veloppement et particuli�rement en
Afrique de l'Ouest.

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 79



   C'est pr�cis�ment la troisi�me raison de traiter du r�le pratique de
l'�tat, pour s'int�resser � la sp�cificit� des pays africains. La question
se pose en effet de l'adaptation de l'organisation de l'assurance ma-
ladie aux soci�t�s des pays en d�veloppement. Constater que l'�tat ne
con�oit pas son r�le de la m�me mani�re que dans les pays du nord
d�bouche sur deux types de consid�rations : d'une part des consid�ra-
tions de type normatif qui conduisent � s'interroger sur les con-
s�quences de cette diff�rence, en termes d'efficacit� du fonction-
nement de l'assurance maladie ; d'autre part, des consid�rations plus
analytiques, visant � comprendre pourquoi il en est ainsi et quelle rela-
tion de l'�tat � l'assurance maladie est coh�rente avec l'organisation
sociale et politique des pays africains.
   Par rapport � un r�gime d'assurance maladie, l'�tat a plusieurs
domaines possibles d'intervention dans les pays en d�veloppement. Ils
ont trait :

� � la cr�ation du r�gime

� � la d�finition de sa configuration

� � l'appui � sa mise en place

� � son fonctionnement � et sa r�gulation

� � la tutelle et au contr�le


Le r�le en mati�re de cr�ation et de d�finition
de la configuration d'un r�gime

En vue de la cr�ation d'un r�gime, l'�tat peut prendre des initiatives
et �tre en quelque sorte le promoteur d'un produit, d'un dispositif
d'assurance ou d'un organisme qui en sera le support.
   Il doit aller plus loin, en d�finissant la configuration originelle des
r�gimes obligatoires. Dans ce cas, il fixera les param�tres fondamen-
taux de ce r�gime, en indiquant quelles seront les personnes couvertes,
les risques couverts et la garantie. Par exemple, il assignera au r�gime
l'objectif de couverture des seules personnes officiellement actives qui
cotiseront, de leurs enfants et conjoints qui seront leurs ayant droits,
des retrait�s de cette cat�gorie qui continueront � cotiser et de leurs
ayants droit. Il limitera les prestations du r�gime � la prise en charge

80 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



des soins hospitaliers avec h�bergement et imposera un co-paiement
par jour d'hospitalisation. Il pourra aussi indiquer selon quelle organi-
sation sera g�r� le r�gime, comment les cotisations seront collect�es et
comment seront r�mun�r�s les prestataires de soins qui passeront
convention avec le r�gime.
   Pour les r�gimes volontaires son r�le d'initiateur est discut�. L'�tat
intervient en tout cas tr�s activement en Guin�e et au Rwanda. Au
S�n�gal, il a aussi un r�le de pilotage assez important.


Le r�le d'appui � la mise en place

La mise en place d'un r�gime d'assurance maladie demande de suivre
une d�marche dans laquelle l'appui de l'�tat est important.
   En premier lieu, il s'agit de fixer dans la loi les caract�ristiques du
r�gime. Pour un r�gime obligatoire, il s'agira d'une loi cadre, comme,
par exemple, la loi ivoirienne portant cr�ation de l'AMU, puis de
d�crets d'application. Pour les r�gimes volontaires, le cadre l�gislatif et
r�glementaire renverra soit � un corpus g�n�ral existant (par exemple,
un code des assurances), soit � des dispositions particuli�res (par exem-
ple un code de la mutualit� comme celui du Mali). Le cadre l�gislatif et
r�glementaire est un �l�ment essentiel pour la mise en place et le
d�veloppement d'un r�gime. Il fixe les droits et obligations respectifs
des assur�s et des organismes assureurs, �vitant ainsi que la d�marche
contractuelle qui va �tre mis en oeuvre entre eux se d�veloppe de fa�on
incoh�rente et au d�triment de l'une des parties. Des questions comme
l'agr�ment des organismes gestionnaires, la viabilit� financi�re du
r�gime, les obligations d'information des assur�s ou de comptes-rendus
aux cotisants et aux pouvoirs publics ne sont d�finies syst�matiquement
que dans ce cadre, ce qui indique bien le caract�re strat�gique de cette
fonction r�galienne de fixation du Droit dans ce domaine. En outre, la
promulgation de textes juridiques est en soi un �l�ment de promotion
des r�gimes d'assurance maladie. C'est la manifestation la plus directe
de la volont� d'encourager le financement assurantiel de la sant�. Mani-
festation qui peut d�couler d'un engagement de campagne �lectorale,
comme en C�te d'Ivoire, mais qui peut aussi repr�senter un signe fort
comme dans le cas du Mali, o� le code de la Mutualit� a �t� l'expression
claire d'une incitation � d�velopper des mutuelles de sant�.
   L'�tat a aussi la possibilit� de fournir des ressources �conomiques aux
r�gimes qui se mettent en place et cette mise � disposition de moyens

                          Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 81



est un �l�ment d'incitation et de faisabilit� du projet. La d�marche la
plus directe consiste � subventionner le r�gime. Dans le cas d'un r�gime
obligatoire, l'�tat va pr�voir des lignes budg�taires permettant d'ef-
fectuer les divers investissements qui vont permettre de rendre le
r�gime fonctionnel (C�te d'Ivoire). La dur�e de vie de ces lignes est
variable et fait partie des param�tres qui auront �t� d�finis au moment
du lancement. Ainsi l'�tat peut adopter le principe d'une dotation per-
manente au r�gime, mais il peut aussi envisager que le r�gime soit
autonome et ne fournir qu'une subvention de montage de l'institution.
Dans le cas d'un r�gime volontaire, le second cas de figure est com-
mun�ment envisag�, mais certaines situations peuvent entra�ner un sou-
tien sous forme de fourniture de locaux gratuits et de personnel mis �
disposition (Mali). A c�t� de l'appui financier direct, l'�tat peut utiliser
l'outil fiscal pour favoriser le fonctionnement et le d�veloppement d'un
r�gime. Cette utilisation correspond � la reconnaissance de l'utilit�
publique de l'assurance maladie et consiste � donner aux assur�s un
avantage qui est en m�me temps un manque � gagner pour l'�tat. Pour
les r�gimes obligatoires, les cotisations seront enti�rement ou partielle-
ment d�ductibles du revenu des personnes. Pour les r�gimes volon-
taires, la cotisation ou la prime ne seront pas tax�es, ce qui permettra de
fournir le service d'assurance � un prix moindre.
   En dernier lieu, l'action facilitatrice de l'�tat va s'exercer au niveau
des relations entre les r�gimes et les prestataires de soins. En d'autres
termes, l'�tat peut jouer un r�le d�cisif dans le processus de contrac-
tualisation entre les organismes d'assurance et les professionnels et les
formations de sant�. Cette action est diff�rente selon qu'il s'agit de
prestataires de soins du secteur public ou du secteur priv�, de r�gimes
obligatoires ou volontaires.
   Dans le cas d'un r�gime obligatoire, le secteur public des soins peut
difficilement ne pas passer convention avec l'assureur et le r�le de
l'�tat est apparemment simple. Il reste toutefois aux pouvoirs publics
� avoir une action coh�rente et �quilibr�e � l'�gard d'institutions qui
sont, plus ou moins directement, sous son autorit�. En revanche la
relation du r�gime obligatoire avec les prestataires de soins priv�s peut
�tre facilit�e par l'interm�diation des pouvoirs publics, qui peut
notamment accorder aux professionnels des avantages financiers s'ils
acceptent de passer convention avec un r�gime.
   Dans le cas d'un r�gime volontaire, c'est l'intervention de l'�tat
aupr�s des professionnels du secteur public des soins qui peut constituer

82 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



son apport essentiel. Alors que ces derniers peuvent refuser les exigences
du r�gime volontaire, s'il est de statut priv�, l'�tat peut appuyer ce
r�gime lorsque ses exigences vont dans le sens de la politique qu'il veut
mettre en oeuvre au sein des formations publiques. L'exemple type est
celui de l'interm�diation de l'�tat entre les mutuelles et les agents des
formations publiques qui refusent de respecter la tarification n�goci�e ou
d'atteindre le niveau de qualit� des services que les mutualistes attendent.


L'intervention de l'�tat sur le fonctionnement des r�gimes,
les r�les de r�gulation, de tutelle et de contr�le

L'�tat peut �tre le gestionnaire d'un r�gime, soit directement, soit
indirectement � travers une d�l�gation � un op�rateur public ou priv�.
Il intervient alors dans le fonctionnement courant du r�gime, de fa�on
plus ou moins �tendue.
   Il a aussi la possibilit�, sans intervenir vraiment dans le fonction-
nement d'un r�gime, de le r�guler en modifiant sa configuration ou
son mode d'organisation. On retrouve l� les fonctions exerc�es lors de
la cr�ation du r�gime.
   De toute fa�on, l'�tat a en g�n�ral un droit de regard global sur les
r�gimes auxquels l'autorisation de fonctionner a �t� donn�e, en
r�f�rence aux textes l�gislatifs et r�glementaires qui les r�gissent. La
tutelle de l'�tat peut n�anmoins �tre plus ou moins �tendue. Au mini-
mum, il s'agit de v�rifier a priori la conformit� aux textes de la confi-
guration et du fonctionnement d'un r�gime et sa viabilit�. Cette
proc�dure tut�laire se concr�tise au moment de donner l'agr�ment au
r�gime. Mais il s'agit ensuite de v�rifier que les engagements pris �
l'�gard des assur�s sont tenus et que la gestion du r�gime est conforme
aux normes l�gales. La tutelle prend alors la forme de proc�dures de
r�glement du contentieux et de contr�le a posteriori.
   L'action de l'administration publique en mati�re de gestion des
r�gimes volontaires fait d�bat. L� o� elle para�t efficace (Rwanda), elle
n'est pas contestable. Si elle limite la participation sociale, elle est
probablement nuisible.


Relations avec l'offre de soins

La nature, obligatoire ou volontaire, d'un r�gime d'assurance maladie
influence ses relations avec l'offre de soins. Un r�gime obligatoire a en

                           Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 83



g�n�ral une certaine capacit� de pression sur les producteurs de soins,
li�e � sa taille et � son caract�re public. En revanche, un r�gime volon-
taire priv� isol� a peu de chances de peser sur un h�pital qui refuse les
conditions contractuelles que le r�gime souhaite obtenir. C'est
pourquoi les r�gimes priv�s ont plus de mal � passer des conventions
avec les �tablissements du secteur public et pourquoi ils ont int�r�t �
se regrouper, par exemple dans un syst�me f�d�ral, comme ce qui est
la r�gle pour les mutuelles.
   La qualit� des prestations de soins est un enjeu consid�rable pour
les r�gimes d'assurance maladie, obligatoires ou volontaires. A cet
�gard, la possibilit� qu'a un r�gime de proc�der � une s�lection des
prestataires conventionn�s est le moyen qu'elle a de peser sur la qua-
lit� des soins. Cette s�lection se pr�sente diff�remment pour les deux
types de r�gimes, dans la mesure o� les formations de soins parte-
naires doivent accepter certaines formes de contr�le de la qualit� par
les r�gimes d'assurance. Les r�gimes priv�s peuvent n'avoir qu'un
choix r�duit et �tre amen�s � �carter certaines formations publiques,
peu enclines � modifier leurs pratiques, ou priv�es, peu dispos�es �
baisser leurs tarifs. Les r�gimes publics sont a priori mieux plac�s,
mais, � la r�flexion, ils sont soumis aussi � des contraintes difficiles �
g�rer. En premier lieu, leur caract�re obligatoire peut les obliger �
offrir des prestations sur un territoire �tendu et ils n'auront pas
partout la possibilit� de choisir leurs prestataires. En second lieu, leur
caract�re public rend difficile d'�carter les prestataires publics de
l'ensemble des formations conventionn�es, ce qui suppose qu'ils aient
la capacit� de demander aux �tablissements publics d'am�liorer leurs
services, si ceux-ci m�contentent les assur�s. La m�diation ou l'appui
des pouvoirs publics devrait leur �tre acquis en l'esp�ce. L'exp�rience
montre qu'il n'en est pas toujours ainsi, ce qui signifie que les r�gimes
obligatoires se trouvent p�nalis�s face � un secteur public de soins
impossible � faire �voluer.
   Les relations des r�gimes avec l'offre de soins sont d'autant plus har-
monieuses que des comp�tences techniques existent en leur sein pour
n�gocier avec les professionnels de sant�. Les comp�tences requises
sont m�dicales et m�dico-�conomiques de fa�on � pouvoir appr�cier
non seulement les techniques et les protocoles de soins, mais aussi leurs
co�ts de production et la r�mun�ration que demandent les �tablisse-
ments. La mise en place au sein d'un r�gime (ou d'une union ou
f�d�ration de r�gimes) d'une �quipe de m�decins conseils constitue la

84 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



meilleure d�marche pour le doter de ces comp�tences. Cette �quipe
sera d'autant plus efficace qu'elle disposera d'un syst�me d'information
extensif, qui lui permettra de comparer les pratiques, d'expliquer les
facteurs de variabilit� et d'opposer aux plus m�diocres prestataires les
r�sultats obtenus par les meilleurs (benchmarking).
  Avant m�me d'aborder les questions de qualit� et d'efficience, les
r�gimes devront �tre � m�me d'�viter les abus et d'op�rer un contr�le
des prestations et des factures pr�sent�es par les producteurs de soins.
A nouveau les m�decins conseils seront indispensables et devront sou-
vent op�rer au sein m�me des �tablissements. Les r�gimes obligatoires,
qui sont le plus souvent � la t�te d'un budget de gestion plus con-
s�quent que les r�gimes volontaires seront relativement privil�gi�s
pour mener � bien ces missions. Comme pr�c�demment, il faut tout de
m�me indiquer : premi�rement que la constitution d'unions techniques
et de f�d�rations repr�sente pour les r�gimes priv�s (et/ou d�central-
is�s) la d�marche permettant d'acqu�rir ces moyens de contr�le ; deu-
xi�mement que le fait de faire partie du secteur public peut constituer
une contrainte pour les r�gimes obligatoires en mati�re de contr�le des
pratiques d'acteurs b�n�ficiant de protections � divers niveaux.



CONCLUSION

Si les r�gimes obligatoires et volontaires ont des conditions dif-
f�rentes de fonctionnement et d'organisation, la compl�mentarit� des
deux formules doit probablement �tre retenue pour d�finir une poli-
tique de couverture maladie de la population. Les r�gimes obligatoires
ne peuvent �tre mis en place que dans des contextes particuliers, o� les
r�gimes volontaires sont plus ad�quats. Mais ceux-ci pr�sentent des
limites techniques et financi�res qui interdisent qu'ils r�alisent � eux
seuls la couverture universelle.
  Les r�gimes volontaires constituent de ce point de vue une �tape
importante. Ils permettent un apprentissage de l'assurance maladie
pour la population et repr�sentent et forme transitoire indispensable
en vue de la g�n�ralisation de la couverture maladie. Sur ce point, les
pays pauvres ont peut-�tre quelques le�ons � tirer de l'histoire dans
les pays industrialis�s.
  Il reste que la promotion des r�gimes volontaires, et notamment
des r�gimes � gestion participative comme ceux des mutuelles de sant�

                         Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 85



est, pour un gouvernement, un choix politique non anodin. Elle
donne une plus grande place � la soci�t� civile et fait �merger de celle-
ci des leaders qui peuvent faire valoir leur l�gitimit� en fonction de
l'efficacit� de leur action de terrain.



NOTES

  1. Le chapitre 7 sur l'assurance maladie obligatoire au Mali dans le
pr�sent ouvrage illustre ce point


  2. Cette situation �tait pr�vue en C�te d'ivoire pour l'AMU


  3. Voir par exemple Ensor T. (1999), Bennett S. et al. (1998)


  4. Sur divers points trait�s ici, on se reportera � Huber G. et al.
(2003), ILO/STEP (2000 et 2001), Waelkens M.P. et B. Criel (2004)


  5. Voir sur la question de la faisabilit� : ILO/STEP (2005)


  6. Il y a internalisation quand l'agent �conomique qui g�n�re les
co�ts est aussi celui qui les supporte. Il y a externalisation dans le cas o�
ce sont d'autres agents qui supportent ces co�ts.


  7. La cr�ation d'une offre mutualiste a �t� observ�e au B�nin (projet
appuy� par la Coop�ration fran�aise) et au Mali (projet du CIDR �
Mopti). La cr�ation d'une mutuelle adoss�e � l'offre renvoie au � mo-
d�le � de Bwamanda (Criel B. 1999)


  8. Voir MIRE (1995) pour un aper�u de la d�marche de contractua-
lisation engag�e dans les syst�mes de sant� europ�ens il y a une dizaine
d'ann�es




BIBLIOGRAPHIE

La bibliographie qui suit est r�duite par rapport au nombre de publications
int�ressantes sur le sujet. On a privil�gi� les textes en fran�ais et ajout�

86 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



quelques r�f�rences qui n'ont pas �t� cit�es dans le texte, notamment sur les
mutuelles de sant� et la micro assurance. On trouvera de toute fa�on des bib-
liographies volumineuses dans un certain nombre de documents r�f�renc�s ci-
dessous.

Bennett, S., A. Creese, et R. Monash. 1998. � Health insurance schemes for people
    outside formal sector employment �. ARA Paper 16. Gen�ve : World Health
    Organization, Division de l'analyse, recherche et �valuation.

Brouillet, P., M. Wade, M. Kambe, et M. Ndao. 1997. � Le d�veloppement des sys-
    t�mes de pr�voyance volontaire du risque maladie : Emergence des mutuelles de
    sant� en Afrique �. L'Enfant en milieu tropical 228 : 40�54.

Carrin, G. 2001. � L'Assurance maladie : Un chemin parsem� d'obstacles pour les pays
    en d�veloppement �, dans J.D. Rainhorn et J.M. Burnier, La sant� au risque du
    march� : incertitudes � l'aube du XXI� si�cle. Paris : Nouveaux Cahiers de l'IUED,
    PUF, pp. 199�214.

Criel, B., et al. 1999. � The Bwamanda hospital insurance scheme : Effective for whom
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Dror, D. M., et A. S. Preker. 2003. R�assurance sociale : Stabiliser les micro-assurances de
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    Eschborn, Deutsche Gesellschaft f�r Technische Zusassurance Maladiemenarbeit
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Musango, L. 2005. Les mutuelles au Rwanda, Clermont-Ferrand. Communication au
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                              Aspects pratiques du montage et du fonctionnement � 87



STEP/CIDR. 2001. Guide de suivi et d'�valuation des syst�mes de micro-assurance de sant�,
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Waelkens, M.-P., et B. Criel. 2004. Les Mutuelles de Sant� en Afrique Sub-Saharienne.
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   Publique, Institut de M�decine Tropicale, 176p.


                                                                       CHAPITRE 3



                         Expansion des programmes
gouvernementaux d'assurance maladie
          obligatoire en Afrique de l'Ouest :
                            Possibilit�s et contraintes1

                                     Alexander S. Preker, E.V. Velenyi




R�sum� : La r�alisation des objectifs de d�veloppement pour le Mill�naire
relatifs � la sant� (ODM) exigera la mobilisation d'importantes ressources
financi�res additionnelles pour le secteur de la sant�, une meilleure gestion du
risque financier et une meilleure utilisation des rares ressources disponibles, en
plus d'avoir � s'attaquer aux d�terminants intersectoriels de la maladie. Il
existe maintenant des interventions connues et accessibles pour faire face �
beaucoup d'aspects de la crise du VIH/SIDA, ainsi qu'au d�fi continu pos� par
le paludisme et d'autres maladies infectieuses. Mais le co�t pour les m�nages est
impr�visible et peut appauvrir m�me les familles � revenu moyen qui ne sont
pas assur�es ; par ailleurs, beaucoup d'interventions sont inefficaces. Des
ressources additionnelles pourraient �tre mobilis�es en augmentant la part du
financement gouvernemental allou�e au secteur de la sant�. Mais l'�largisse-
ment de l'assiette fiscale pourrait avoir des r�percussions macro �conomiques
n�gatives dans beaucoup de pays � faible revenu et augmenter la part du
secteur de la sant� dans le financement aux d�pens des d�penses publiques con-
sacr�es � d'autres programmes parmi lesquels certains peuvent aussi contribuer
� l'am�lioration des �tats de sant�. Ces deux aspects sont difficiles � r�aliser poli-
tiquement. Ce chapitre passe en revue le r�le r�cent des programmes gouverne-
mentaux d'assurance maladie obligatoire comme une des sources alternatives de


                                                                                      89

90 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   financement dans le cadre d'une approche de financement des services de sant�
   en Afrique � partir de plusieurs sources. La recherche ayant servi � l'�labora-
   tion de ce chapitre est bas�e sur une �tude plus extensive entreprise par la
   Banque mondiale et portant sur les programmes gouvernementaux d'assurance
   maladie obligatoire dans les pays � faible revenu.



VUE D'ENSEMBLE

La r�alisation des objectifs de d�veloppement pour le Mill�naire con-
cernant la sant� (ODM) exigera la mobilisation d'importantes
ressources financi�res additionnelles pour le secteur de la sant�, une
meilleure gestion du risque financier et une meilleure utilisation des
rares ressources pour des soins de sant� efficaces, en plus d'avoir �
s'attaquer aux d�terminants intersectoriels de la maladie et d'avoir �
am�liorer la performance des syst�mes de prestation de service. Bien
qu'en soi l'am�lioration du financement ne r�ponde pas aux d�fis
institutionnels, organisationnels et de gestion li�s � une meilleure per-
formance du syst�me de sant�, elle peut y contribuer significativement
en assurant que les facteurs financiers ne soient pas une contrainte et
qu'il y ait un environnement stimulant une bonne performance.


Performance des syst�mes de sant� et financement
de la sant� en Afrique subsaharienne

Bien que le 20�me si�cle ait �t� le th��tre de plus grandes avanc�es en
mati�re de r�sultats de sant� que toute autre moment de l'histoire, les
am�liorations en Afrique ont �t� plus lentes que dans n'importe quelle
autre r�gion. En fait, certains des pays de cette r�gion ont connu une
d�gradation. Pour dix-neuf pays africains, le taux de mortalit� chez les
moins de cinq ans s'est en r�alit� accru, et l'esp�rance de vie dans la
r�gion a chut� entre 1980 et 2000 (Banque mondiale, 2004). Actuelle-
ment, beaucoup de pays africains sont loin d'atteindre la plupart des
indicateurs fix�s par les objectifs de d�veloppement pour le Mill�naire
(Wagstaff et Claeson, 2004 ; OMS AFRO 2003). L'esp�rance moyenne
de vie en Afrique subsaharienne est aujourd'hui au m�me niveau que la
moyenne mondiale de 1950, avec quelques pays comme la Sierra
Leone pr�sentant m�me des niveaux plus bas.

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 91



   Faire face � ces probl�mes exige plus d'argent et une meilleure pro-
tection contre le risque financier. La corr�lation entre un revenu plus
�lev�, des d�penses de sant� plus �lev�es et de meilleurs r�sultats de
sant� est bien connue. Toutefois, les grandes variations si on �tudie la
corr�lation entre le taux de mortalit� chez les moins de cinq ans
(U5MR) et les d�penses publiques de sant� par personne qui indique
qu'un accroissement des d�penses � bien que tr�s n�cessaire � est en
soi insuffisant pour r�aliser de bons r�sultats de sant� (ESA NHA
Network, 2001; Banque mondiale 2003). Il est aussi n�cessaire de s'as-
surer que les rares ressources sont d�pens�es sur des services de sant�
efficaces et r�pondent aux d�fis de sant� les plus critiques auxquels
sont confront�s les m�nages (Soucat, Van Lerberghe et al., 2002). Il
est n�cessaire d'entreprendre des actions parall�les qui r�pondent �
d'autres d�terminants intersectoriels importants de la mauvaise sant�.
� cet �gard, les syst�mes de sant� de beaucoup de pays d'Afrique sub-
saharienne (ASS) fonctionnent mal (OMS, 2000)2.


�tat actuel des programmes gouvernementaux
d'assurance maladie obligatoire (AMO) en Afrique

Les d�penses directes de sant� des m�nages repr�sentent toujours
jusqu'� 80 pour cent de l'ensemble des d�penses de sant� dans beau-
coup de pays africains, avec des m�canismes d'assurance formels
demeurant rudimentaires dans la plupart des pays de la r�gion. L'aide
des donateurs � avec la volatilit� et la fongibilit� qui lui sont associ�es
� constitue souvent une part significative de l'ensemble des ressources
publiques des pays � faible revenu, atteignant parfois jusqu'� 50 pour
cent ou plus des ressources totales disponibles dans quelques pays �
faible revenu. C'est dans ce contexte que quelques pays ont commenc�
� exp�rimenter l'assurance priv�e volontaire (bas�e sur les commu-
naut�s et les entreprises) et les programmes gouvernementaux
d'assurance maladie obligatoire (Preker et Carrin, 2005; Preker,
Scheffler et Bassett, 2006). Cela en compl�ment � d'autres formes de
financement de la sant� comme les paiements directs, l'aide des dona-
teurs, le financement par le budget de l'�tat et l'assurance maladie
volontaire.
   Historiquement, l'Afrique de l'Est a h�rit� de syst�mes de finance-
ment de la sant� qui sont plus proches du mod�le national de S�curit�

92 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Sociale britannique. La plupart des pays comptent sur le financement
public d'un r�seau de services de sant� appartenant � l'�tat et g�r� par
lui. R�cemment quelques pays dans cette sous-r�gion, comme le
Ghana, le Kenya, le Nigeria et la Tanzanie, ont mis en place des pro-
grammes nationaux gouvernementaux d'assurance maladie pour une
partie de leur population. En Afrique Australe, des pays comme
l'Afrique du Sud, la Namibie et le Zimbabwe ont d�j� une longue tra-
dition en mati�re d'assurance maladie volontaire pour la partie de leur
population travaillant dans le secteur formel. En Afrique de l'Ouest, le
mod�le national de S�curit� Sociale est aussi pr�dominant bien qu'il
existe des petits fonds mutuels d'assurance maladie dans beaucoup de
pays. De plus, la plupart des pays de l'Afrique de l'Ouest envisagent
une certaine forme de syst�me gouvernemental d'assurance maladie
pour �tendre la protection financi�re � une plus grande partie de la
population.
   Les premi�res esquisses de programme national d'assurance mal-
adie ont �t� lanc�es au Nigeria d�s 1962 et au Kenya en 1965. Le pre-
mier programme obligatoire africain a vu le jour au Kenya en 1966.
Suite � ces premi�res exp�riences, d'autres pays africains ont com-
menc� � envisager la possibilit� de mettre sur pied des programmes
gouvernementaux d'assurance maladie obligatoire. Le premier Pro-
gramme National d'assurance maladie au Nigeria a �t� introduit dans
les ann�es 1980. Le Ghana3 a mont� son premier programme en 1985.
La Tanzanie a commenc� � pr�parer un d�but de programme au
milieu des ann�es 1990. L'Ouganda a entrepris des �tudes de faisabi-
lit� portant sur l'extension du syst�me de paiement par anticipation
pour les employ�s des secteurs tant formels qu'informels. Bien que
faibles en termes de couverture, la Guin�e, la C�te d'Ivoire le Kenya,
le Mozambique, l'Afrique du Sud et la Tanzanie ont tous aujourd'hui
des programmes qui couvrent une petite partie de leur population.
Quelques pays comme le Nigeria et le Ghana en sont aux premi�res
�tapes de mise en oeuvre, tandis que d'autres � notamment en Afrique
de l'Ouest comme au Cap Vert, au Mali et au S�n�gal � ont mis sur
pied des comit�s parlementaires qui doivent �laborer une nouvelle
l�gislation sur l'assurance maladie qui devra �tre mise en oeuvre plus
tard (Carrin, Korte et al., 2003; minist�re de la Sant�, 2003; minist�re
F�d�ral de la Sant� du Nigeria, 2004; Preker, Rose et al., 2004;
Thomas et Gilson, 2004).

                      L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 93



POINTS ESSENTIELS

Comme indiqu� ci-dessus, les pays � faible revenu comptent souvent
lourdement sur le financement public et les paiements directs pour
financer les soins de sant�. Dans les toutes premi�res �tapes du
d�veloppement �conomique, le rapport entre les paiements par anti-
cipation et les paiements directs au niveau du financement de la sant�
est souvent aussi bas que 20 : 80 en faveur des d�penses directes. Pour
les pays � revenu �lev� ces proportions sont compl�tement invers�es,
� l'avantage des paiements par anticipation qui d�sormais repr�sen-
tent 80 %. Les pays sur une trajectoire optimale de d�veloppement
progresseront du rapport 20 : 80 � celui de 80 : 20. Malheureuse-
ment, beaucoup de pays � faible revenu en �tat de d�liquescence en
Afrique sont sur une trajectoire de d�veloppement sub-optimal plus
lente conduisant vers un ratio de 40 : 60 plut�t que 80 : 20. Sans un
changement significatif dans les politiques et dans la mise en oeuvre,
ce ph�nom�ne fera qu'une grande part des d�penses totales de sant�
continuera � provenir des d�penses directes, laissant ainsi beaucoup
de m�nages expos�s � l'appauvrissement et la privation financi�re,
malgr� le niveau �lev� de d�penses publiques consacr�es aux soins de
sant�.
   Dans beaucoup de pays o� le d�veloppement est sous-optimal,
une grande partie du financement gouvernemental vient des dona-
teurs plut�t que de sources int�rieures de financement, rendant ainsi
ces pays vuln�rables aux financements ext�rieurs, � la volatilit� des
flux financiers et � la fongibilit� sans addition nette dans les
ressources financi�res. En outre, dans beaucoup de ces pays faible-
ment performants en termes de revenus, une grande partie des
d�penses directes se font sous la forme de paiements informels dans
le secteur public et de d�penses dans le secteur priv�, exposant ainsi
les m�nages aux co�ts du march� local, quels que soient leurs
niveaux.
   Beaucoup de raisons expliquent pourquoi les d�cideurs, dans leur
tentative d'am�liorer le financement de la sant� par l'introduction
d'une assurance maladie volontaire ou publique et obligatoire, �prou-
vent des difficult�s � r�aliser des progr�s sur le chemin d'un
d�veloppement optimal qui ferait passer les proportions de finance-
ment de 20 : 80 � 80 : 20.

94 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  Un premier lot de questions porte sur le comportement des trois
fonctions fondamentales du financement de la sant� (collecte de fonds,
gestion des risques financiers et achat de services aupr�s des fournisseurs)
dans les situations de faible revenu. En ce qui concerne l'efficacit� en
mati�re de collecte de fonds, les pays qui tentent d'introduire des dis-
positifs d'assurance maladie font face aux d�fis suivants dans la mobilisa-
tion de ressources financi�res ad�quates � partir des contributions des
m�nages :

� Inscription

  � Recensement incomplet des populations (limitant la capacit�
     d'identifier des membres potentiels)

� Choix

  � Vaste secteur informel (limitant la partie de la population que l'on
     peut obliger � se joindre � un programme obligatoire; d'autres
     doivent �tre incit�s � se joindre)

� Niveau de Paiement par anticipation

  � Faible taux de participation des travailleurs au secteur formel
     (limitant les contributions qui peuvent �tre retir�es � la source
     dans le cadre d'un programme obligatoire pour les employ�s)

  � Le manque de familiarit� avec l'assurance et l'aversion au risque
     (limitant la volont� de payer)

  � Une grande partie de la population occupant des emplois mal
     pay�s ou au-dessous du seuil de pauvret� avec des demandes con-
     currentes pour les rares ressources du m�nage (limitant la capa-
     cit� de payer)

� Progressivit� des contributions

  � Manque de donn�es pr�cises sur le revenu (limitant l'information
     pouvant �tre utilis�e pour mettre en place des �chelles de
     paiements progressifs)

  Pour ce qui est de l'efficacit� dans la gestion du risque financier, les
pays essayant de mettre sur pied des dispositifs d'assurance maladie

                         L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 95



font face aux d�fis suivants en mati�re de redistribution efficace et
�quitable des ressources :

� Taille et nombre de bassins de risque

  � Croissance spontan�e de beaucoup de petits fonds (limitant la
     taille et augmentant le nombre de bassins volontaires)

  � Diversit� sociale en termes d'emploi, domicile et autres facteurs
     sociaux locaux (limitant la taille et augmentant le nombre de
     bassins volontaires)

  � Manque de confiance dans les programmes gouvernementaux ou
     nationaux (limitant la taille et le nombre de bassins obligatoires)

  � Faible capacit� de gestion et faible capacit� institutionnelle (limi-
     tant la taille et le nombre de bassins obligatoires)


� Partage du Risque

  � Seule une faible part de la marge fiscale disponible est allou�e au
     secteur de la sant� (limitant les ressources publiques disponibles
     pour subventionner des groupes de population inactifs)

  � Le manque de solidarit� sociale nationale (limitant la volont� d'ef-
     fectuer des subventions crois�es des riches vers les pauvres, des
     bien portants vers les malades et des travailleurs vers les ch�meurs
     et autres personnes inactives)

� Couverture

  � Existence de syst�me national de sant� pour le grand public (limi-
     tant le besoin de fournir une couverture universelle aux popula-
     tions ou un ensemble complet de services par le biais de l'assu-
     rance)

  Dans le cas d'allocation des ressources et d'achat efficaces, les pays
essayant de mettre sur pied des dispositifs d'assurance maladie font face
aux d�fis suivants quand ils veulent d�penser leurs rares ressources :

� Pour qui acheter ?

  � Le manque de bonnes donn�es sur l'importance de l'adh�sion
     (limitant la capacit� d'identifier les groupes vuln�rables)

96 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� Que faut-il acheter ?

   � Le manque de bonnes donn�es sur la rentabilit� (limitant la
     capacit� d'obtenir de bons rapports qualit�-prix)

� De qui acheter ?

   � Le secteur ambulatoire est domin� par les fournisseurs priv�s et le
     secteur des hospitalisations par les h�pitaux publics (limitant ainsi
     le choix de fournisseurs)

� Comment payer ?

   � La faible capacit� en mati�re de gestion et en mati�re institution-
     nelle (limitant la sophistication des syst�mes de paiement bas�s
     sur la performance et op�rationnels)

� � quel prix acheter ?

   � Le manque de bonnes donn�es sur les co�ts (limitant la trans-
     parence dans les prix charg�s par les fournisseurs publics et priv�s)

   Le deuxi�me lot de questions a trait � l'environnement institution-
nel dans lequel �voluent les fonds d'assurance maladie dans les pays �
faibles revenus. La capacit� institutionnelle est souvent faible, le cadre
l�gal sous-jacent incomplet, les outils de r�gulation inefficaces ou non
appliqu�s, les proc�dures administratives rigides et les coutumes et
pratiques informelles et difficiles � changer.
   Un troisi�me lot de questions touche � la structure organisation-
nelle des fonds d'assurance maladie dans les pays � faibles revenus.
Dans des pays o� il y a beaucoup de petits fonds communautaires, il y
a � la fois un probl�me d'�chelle et de port�e de la couverture en ter-
mes d'assurance et des prestations qui peuvent �tre fournies. Bien
qu'en th�orie beaucoup de programmes gouvernementaux d'assu-
rance maladie aient le statut d'agences semi-autonomes, ils souffrent
souvent des m�mes structures d'incitation hi�rarchiques et rigides que
les syst�mes de sant� appartenant � l'�tat et g�r�s par lui. C'est parti-
culi�rement vrai dans les pays o� les structures d'assurance ont, au fil
du temps, fait l'acquisition des vastes r�seaux de leurs propres four-
nisseurs, sapant ainsi les b�n�fices d'une s�paration entre fournisseur
et acheteur. Dans d'autres pays, les fonds d'emploi multiple ne profi-
tent souvent pas des pressions comp�titives, mais souffrent de tous les

                      L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 97



d�fauts des bassins de risque et des dispositions d'achat fragment�s
(l'�chec des march�s d'assurance, les fortes d�penses d'administration,
l'asym�trie de l'information etc.).
   Un quatri�me lot de questions touche aux caract�ristiques de ges-
tion des fonds d'assurance maladie dans les pays � faibles revenus. La
capacit� de gestion est souvent faible en termes d'intendance, de gou-
vernance et de services aux clients). Il y a peu d'employ�s poss�dant
des comp�tences en gestion de syst�mes d'assurance obligatoire. Les
assureurs de sant�, agents � la fois du gouvernement, des services de
sant� et des fournisseurs, doivent servir beaucoup de ma�tres en m�me
temps. Cela g�n�re des motivations et des structures de r�compense
contradictoires. Et finalement, les outils de gestion n�cessaires au bon
fonctionnement d'un programme d'assurance maladie manquent sou-
vent en termes de technologie de l'Information, de communications
et autres syst�mes n�cessaires pour assurer l'efficacit� de la gestion
financi�re, de la gestion des ressources humaines, la tra�abilit� des
informations de sant�, les analyses de l'utilisation, etc).



OPTIONS DE R�FORME

Les cinq objectifs techniques suivants sont souvent cit�s comme
motifs par les pays essayant d'introduire des r�formes d'assurance
maladie : (a) protection financi�re contre le co�t de la maladie ;
(b) couverture des populations ; (c) acc�s aux soins de sant� requis ;
(d) fonction de march� du travail ; et (e) lissage de la consommation
non-m�dicale.
   En r�alit�, cependant, les motifs sous-jacents de la plupart des
d�cideurs sont un tableau complexe d'objectifs politiques et sociaux en
plus de consid�rations �conomiques et techniques �nonc�es. Il y a
souvent des motivations politiques et id�ologiques cach�es. Les
r�formes d'assurance maladie font souvent partie d'une tentative plus
large de r��quilibrer le r�le relatif de l'�tat et des acteurs non-
gouvernementaux dans le financement de la sant�. Le fait qu'il y ait
presque toujours des gagnants et des perdants est une partie inh�rente
de r�formes qui impliquent la redistribution des ressources d'une par-
tie de la soci�t� � une autre. Les r�formes de l'assurance maladie
impliquent toujours une telle redistribution en termes de transfert de

98 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




  Encadr� 1 : Motifs sous-jacents � la r�forme
  Les m�canismes de financement existant font face � des probl�mes dont les suivants
  que les pays esp�rent surmonter par l'introduction d'un syst�me public d'assurance
  maladie obligatoire (Preker et Dror 2003, Preker et Carrin 2005), (Preker et Langen-
  brunner 2005, et Preker, Scheffler et Bassett 2006) :

  �  L'inad�quation du syst�me actuel de g�n�ration de revenus pour mobiliser suf-
     fisamment de ressources afin de financer le secteur de la sant� par une combi-
     naison de subventions du gouvernement, de paiements par les utilisateurs et
     d'aide internationale. D'abord, la capacit� des gouvernements � mobiliser des
     fonds gr�ce � la fiscalit� est tr�s limit�e lorsque les revenus sont faibles en raison
     d'une pl�thore de raisons qui seront pass�es en revue plus tard. Dans certains
     pays, aussi peu que 5 pour cent du produit int�rieur brut passent par le tr�sor.
     Deuxi�mement, l'allocation budg�taire faite par l'�tat au secteur de la sant� est
     souvent faible � typiquement moins de 5 pour cent des revenus totaux du gou-
     vernement dans la plupart des pays les plus pauvres de la r�gion. Finalement, les
     minist�res de la Sant� ne re�oivent souvent qu'une petite partie des fonds allou�s
     par le gouvernement au secteur de la sant� � dans certains cas, moins de 50 pour
     cent de l'enveloppe budg�taire vis�e.
         Dans le cas des paiements directs, la plupart de ces fonds sont collect�s
     directement par des fournisseurs priv�s ou comme des paiements informels
     illicites au personnel travaillant dans les h�pitaux publics et les cliniques. La
     capacit� et la volont� de payer ne se traduisent pas par des ressources addition-
     nelles qui peuvent �tre utilis�es pour financer des services publics. Quand les
     patients sont � court d'argent pendant un �pisode de maladie, c'est l'h�pital pu-
     blic et la clinique qui doivent absorber le co�t. Malgr� les efforts pour garantir
     plus d'engagement � moyen terme de la part des donateurs, les flux d'aide restent
     extr�mement volatiles et impr�visibles. Puisque l'argent est fongible, les flux
     d'aide se substituent souvent aux sources domestiques de financement plut�t
     que de les compl�ter. L'accroissement net est donc souvent faible. M�me quand
     l'argent des donateurs fournit des ressources financi�res compl�mentaires mar-
     ginales, les priorit�s changeantes de la communaut� des bailleurs de fonds inter-
     nationaux ont en grande partie emp�ch� la plupart des programmes de recevoir
     un financement durable � moyen terme en provenance de sources externes.
     Finalement, le financement par les donateurs externes est souvent associ� � des
     conditions rigoureuses qui doivent �tre respect�es avant que les d�caissements
     ne soient autoris�s et � des proc�dures de passation de march�s compliqu�es.
     Cela rend les flux de revenus tr�s volatiles m�me apr�s que le financement a �t�
     enti�rement garanti.

                          L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest    � 99




� Inad�quation des dispositions courantes de financement � assurer une protec-
  tion financi�re contre le co�t de la maladie. En principe, l'acc�s libre et universel
  aux services publics financ�s par les recettes g�n�rales devrait �tre capable de
  prot�ger les individus face au co�t �lev� de la maladie. Depuis la D�claration
  d'Alma Ata sur la � Sant� Pour Tous en l'An 2000 � en 1978, beaucoup de pays ont
  essay� de garantir l'acc�s aux services de sant� de base et � une protection
  financi�re contre les effets appauvrissants de la maladie en encourageant les
  pays � mettre sur pied et � g�rer des services de sant� financ�s par l'�tat sous la
  responsabilit� de leurs Minist�res de la Sant� ou des autorit�s locales dans le
  cas des syst�mes de prestation d�centralis�s. Malheureusement, dans le cadre
  de cette politique, des contraintes de ressource ont bient�t forc� la plupart des
  pays � r�duire le paquet de services de base � sa plus simple expression de telle
  sorte que la majorit� de la population, y compris les pauvres, a d� chercher � se
  soigner en payant directement, m�me pour des conditions de base pour
  lesquelles elle est cens�e avoir droit � recevoir des soins gratuitement. En outre,
  m�me dans le cas o� les services sont disponibles, les contraintes de ressources
  m�nent souvent � une d�t�rioration tellement forte de la qualit� des soins fournis
  que les patients pr�f�rent chercher � se soigner chez des prestataires priv�s bien
  qu'ils aient droit � des soins gratuits dans les institutions publiques.
      L'extension de la couverture par des m�canismes de financement volontaire
  (qu'ils soient communautaires ou mis en place par des entreprises priv�es) s'est
  jusqu'ici r�v�l�e d�cevante bien qu'elle semble profiter aux populations qui
  joignent de tels syst�mes. Dans la plupart des cas, le paiement par les usagers ne
  prot�ge pas les individus contre les effets d'appauvrissement engendr�s par des
  �pisodes catastrophiques ou des maladies chroniques

� Inad�quation des m�thodes d'allocation des ressources dans les principaux
  syst�mes de prestations de services des minist�res de la Sant�. Malgr� des tenta-
  tives r�centes d'introduire des m�canismes de paiement bas�s sur la performance,
  l'achat strat�gique de services prioritaires et d'autres formes de nouvelles tech-
  niques de gestion du secteur public dans le cadre d'un financement int�gr� et de
  syst�mes de prestation fournis par les services publics, les r�sultats de ces
  r�formes ont �t� d�cevants en raison de leur d�tournement par la bureaucratie. En
  fin de compte, le d�tournement par la bureaucratie m�ne � un recul.

� Rigidit�s institutionnelle, organisationnelle et administrative. Dans le cadre du
  financement int�gr� et des syst�mes de prestations de services de sant�, les
  d�cideurs esp�rent voir surmonter ces rigidit�s par un m�canisme d'agence dans
  le financement.

100 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



ressources financi�res du plus ais� au pauvre, des individus sains qui
contribuent, mais ne procurent pas d'avantages � ceux qui sont en moins
bonne sant� et ont besoin des avantages que procure le syst�me, et de
la population active qui est capable de donner une partie de ses
revenus pour couvrir les segments inactifs de la population qui pour-
raient avoir � compter provisoirement ou dans le moyen terme sur des
subventions crois�es. Finalement, les r�formes de l'assurance maladie
impliquent des changements majeurs au niveaux institutionnel, orga-
nisationnel et administratif pour g�rer des ressources financi�res
significatives vers�es au secteur de la sant�. G�rer l'argent signifie le
pouvoir. Les r�formes de l'assurance maladie menacent souvent les
anciennes parties prenantes qui contr�laient ces ressources dans l'an-
cien syst�me, les rempla�ant par de nouvelles parties prenantes qui
contr�lent le syst�me d'assurance. Il n'est, par cons�quent, pas �ton-
nant de voir que de telles r�formes font souvent face � une forte
r�sistance de la bureaucratie en place qui se sent menac�e et sont
accompagn�es d'un vigoureux plaidoyer de la part des nouveaux cen-
tres de pouvoir qui ont le plus � gagner.


Changement de la perception du r�le de l'�tat

Avant de regarder des options sp�cifiques pour r�former le finance-
ment de services de sant� dans la r�gion Afrique, il est utile de passer
en revue la nature des r�formes qui ont eu lieu dans d'autres domaines
du secteur public et des entreprises publiques au cours des 20
derni�res ann�es. Une fa�on de comprendre les options pour la
r�forme des finances publiques est de voir les diff�rents syst�mes
d'incitations dans lesquels la collecte de revenus peut �tre r�alis�e.
Des cellules budg�taires (des d�partements du gouvernement), des
unit�s autonomes, des unit�s d'entreprise et des unit�s privatis�es sont
quatre modalit�s organisationnelles communes qui couvrent ces sys-
t�mes d'incitations dans le secteur de la sant�4. Le secteur public �
proprement parler se trouve au centre (d'habitude le minist�re des
Finances ou le Tr�sor). � l'ext�rieur de ce secteur public central, la
collecte des revenus peut aussi �tre effectu�e dans le secteur public
plus large par diff�rentes formes d'agence comme les fonds nationaux
d'assurance. Finalement, une partie des revenus peut �tre collect�e
directement par le secteur priv�. Les m�canismes utilis�s pour g�rer
les risques et d�penser des fonds sur les services qui profitent au public

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 101



peuvent �tre consid�r�s de la m�me mani�re que ces dispositifs de col-
lecte des revenus.
   Le secteur public � proprement parler est caract�ris� par une rigi-
dit� dans les processus hi�rarchis�s, les processus de commande et de
contr�le. Le secteur public plus large se distingue par la flexibilit� re-
lative du r�gime de gestion financi�re et par la libert� donn�e aux ges-
tionnaires dans le recrutement et les promotions. Ce secteur peut
inclure des agences � but sp�cial, des agences autonomes et, � la li-
mite, des entreprises publiques. Au-del� du secteur public se trouve le
domaine du march� et de la soci�t� civile. Les services peuvent �tre
fournis par des organisations � but lucratif ou non, ou par des organi-
sations communautaires. Les motivations � produire des services plus
efficaces sont plus �lev�es quand on se d�place vers la p�riph�rie o� la
prestation de services est plus efficace


R�les gouvernementaux et non gouvernementaux dans le
financement des soins de sant�

Le financement de la sant� refl�te ce cadre de compr�hension des
finances publiques en g�n�ral. Encore une fois, le secteur public �
proprement parler se trouve au centre. Les pays qui ont des syst�mes
de financement qui utilisent le secteur public � proprement parler
pour toutes les trois sous-fonctions de financement � la collecte des
revenus, la gestion du risque et les d�penses � comptent sur des
processus hi�rarchis�s, des processus de commande et de contr�le.
L'argent rassembl� par le Tr�sor ou le Minist�re des Finances est alors
transf�r� directement � un autre minist�re (le minist�re de la Sant� ou
des Affaires Sociales). Le contr�le est hi�rarchique et direct. L'�quit�
et l'efficacit� dans la collecte des revenus refl�tent la structure fiscale
g�n�rale et la composition des revenus consolid�s.
   Aucune technique sp�cifique n'est utilis�e pour g�rer le risque fi-
nancier. La redistribution repose sur les subventions crois�es indi-
rectes qui ont lieu par le biais du syst�me fiscal consolid�. En con-
s�quence, les pays qui ont des syst�mes de taxation progressifs auront
un financement progressif de leur secteur sant�. Ceux avec des sys-
t�mes de taxation r�gressifs, comme c'est souvent le cas dans les pays �
faible niveau de revenus, auront un financement r�gressif du secteur
sant�. Les politiques sectorielles sont impuissantes face � l'in�quit�
structurelle sous-jacente au syst�me fiscal. La part des revenus totaux

102 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



du gouvernement allou�s au secteur de la sant� d�pend de n�gocia-
tions politiques complexes entre les nombreux minist�res et les
agences publiques qui sont en concurrence pour l'ensemble des
ressources fiscales consacr�es au secteur public. Dans les pays � faible
niveau de revenus, le secteur de la sant� est souvent en mauvaise posi-
tion de n�gociation face aux minist�res de la D�fense, de l'�nergie, de
l'Agriculture des Entreprises Publiques, etc.
   En plus d'�tre financ� par de tels m�canismes publics � proprement
parler, le secteur de la sant� dans beaucoup de pays est aussi financ� par
une certaine forme d'assurance publique qui est organis�e sous la forme
d'une agence fonctionnant avec des fonds d'assurance maladie semi-
autonomes ou fonctionnant comme une entreprise. Bien que les
retenues salariales puissent �tre collect�es en m�me temps que les imp�ts
sur le revenu, elles sont souvent pr�sent�es comme des cat�gories
explicites sur les fiches de salaires des employ�s du secteur formel et peu-
vent m�me avoir une structure de contribution diff�rente de celle du sys-
t�me fiscal g�n�ral. Dans beaucoup de pays le syst�me de retenues sala-
riales pour les retraites et l'assurance maladie est compl�tement s�par�
du syst�me fiscal g�n�ral avec un syst�me de collecte et une administra-
tion parall�les. Dans certains cas, il y a des subventions crois�es
explicites. Dans d'autres cas, ces processus sont cach�s et ne sont pas
enti�rement pris en compte explicitement. Il y a un grand d�bat relatif �
l'inclusion ou la non-inclusion d'un tel financement dans le budget.
   Finalement, le financement peut aussi provenir directement des
m�nages sous la forme d'assurance maladie priv�e ou de paiements
directs aux prestataires, contournant ainsi tous les m�canismes inter-
m�diaires de pr�-paiement. Les m�canismes utilis�s pour g�rer les
risques et d�penser des fonds sur les services qui profitent au public
peuvent �tre consid�r�s de la m�me mani�re que ces dispositifs de col-
lecte des revenus.
   Typiquement les pays dont le secteur sant� est domin� par des
m�canismes de Service National de Sant� comptent plus sur des moti-
vations hi�rarchiques pour toutes les trois fonctions de financement �
la collecte des revenus, la mise en commun des risques et l'allocation
des ressources/l'achat de services. Les dispositifs de financement bas�s
sur l'assurance maladie gouvernementale obligatoire ont tendance �
incorporer des motivations hi�rarchique, d'agence et du march� � tra-
vers les trois fonctions de financement, tandis que l'assurance maladie
volontaire priv�e compte beaucoup plus sur les pressions du march�

                        L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 103



et, dans une moindre mesure, sur les mandats du gouvernement qui
d�l�guent certaines fonctions du secteur public au secteur priv�.
Finalement, les d�penses directes des m�nages sont plus expos�es aux
pressions du march� bien que les structures des honoraires et une par-
tie du comportement des prestataires puissent toujours �tre un peu
r�gul�es par le secteur public.
   Comme dans le cas des r�formes du secteur public, la r�cente
r�forme dans le financement des soins de sant� a cherch� � s'�loigner
du centre du cercle pour aller vers des contrats plus libres avec des
organisations publiques et priv�es pour le financement des soins de
sant�. L'autonomie accrue ou la � corporisation � � cr�ant un d�place-
ment du centre du cercle vers les extr�mes � exigent les m�canismes
de responsabilit� qui reposent sur un contr�le indirect plut�t que
direct. Ces m�canismes de contr�le indirects reposent souvent sur
l'information, la r�glementation et les contrats. Jusqu'o� les pays peu-
vent pousser les activit�s vers les environnements d'incitations dans
les cercles ext�rieurs d�pend de la nature des services impliqu�s et leur
capacit� � cr�er la responsabilit� pour des objectifs publics � travers
des m�canismes indirects comme la r�glementation, les contrats et
l'information. D'habitude le gouvernement veut conserver la respon-
sabilit� sur les d�cisions strat�giques que l'on mettrait d'habitude dans
la fonction d'intendance et l'environnement institutionnel, tandis que
la responsabilit� de choisir la meilleure structure organisationnelle, les
dispositifs de gestion et les infrastructures peut, sans risque, �tre
d�l�gu�e aux agences publiques ou au secteur priv�.


D'un engagement minimaliste

Ce d�bat et les changements r�cents de points de vue sur le r�le appro-
pri� de l'�tat dans le financement des soins de sant� ne sont pas nou-
veaux. Depuis le d�but de l'histoire �crite, le pendule s'est balanc�e
dans les deux sens entre une forte mainmise de l'�tat dans le finance-
ment des soins de sant� (le financement exclusif par le gouvernement �
proprement parler) et une approche minimaliste (le secteur priv�).
   Dans l'antiquit�, les individus ont utilis� des rem�des maison et des
gu�risseurs priv�s quand ils �taient malades. Cependant, d�s le deuxi�me
mill�naire A.J., il est prouv� qu'Imhotep, un m�decin, pr�tre et fonction-
naire � la cour en Egypte antique, a propos� un syst�me de soins de sant�
fournis par l'�tat avec des gu�risseurs pay�s par la communaut�5.

104 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Cette premi�re exp�rience de services organis�s de sant� n'a pas
surv�cu � l'�preuve du temps. Le Code Hammurabi (1792�50 A.J.) a fix�
un syst�me de paiement direct d'honoraires, bas� sur la nature des
services rendus et la capacit� de payer du patient6. Pendant les trois
mille ann�es qui ont suivi, l'engagement de l'�tat dans les soins de
sant� a tourn� principalement autour de la mise en application des
r�gles de r�mun�ration pour des blessures personnelles et la protec-
tion de la confr�rie m�dicale autonome7.
   Au mieux le financement, l'organisation et la fourniture de services
de sant� �taient limit�s aux cours des rois, des empereurs et � d'autres
nobles qui pouvaient avoir un m�decin parmi leurs employ�s pour
leur utilisation personnelle et pour leurs troupes au moment de la
bataille. Les masses se d�brouillaient avec gu�risseurs locaux, sages-
femmes, rem�des naturels, apothicaires et charlatans.


. . . � une mainmise de l'�tat

� la diff�rence de ces premi�res exp�riences8, les gouvernements ont
jou�, pendant la plupart du vingti�me si�cle, un r�le central autant
dans le financement que dans la prestation de services de sant�.
Aujourd'hui, la plupart des pays riches ont r�alis� l'acc�s universel aux
soins de sant� par un m�lange de financement public et priv� et de
dispositifs de prestation de services.
   Les partisans d'un tel engagement du secteur public dans les soins de
sant� ont d�fendu leur approche par des raisons autant philosophiques
que techniques. Dans la plupart des soci�t�s, on consid�re qu'offrir des
soins aux malades et aux handicap�s est une expression de valeurs
humanitaires et philosophiques.
   Mais il n'est pas n�cessaire de recourir aux principes ou arguments
moraux sur l'�tat providence pour garantir l'intervention collective
dans le domaine de la sant�. Le si�cle pass� est riche d'exemples mon-
trant comment le secteur priv� et les forces du march� n'ont pas r�ussi
� garantir l'efficacit� et l'�quit� dans le secteur de la sant�.
   La th�orie �conomique fournit suffisamment de justification pour
un tel engagement, pour des raisons aussi th�oriques que pratiques
pour garantir :

� l'efficacit� � comme il existe d'importantes imperfections du march�
   dans le secteur de la sant� (asym�tries de l'information ; biens

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 105



   publics; externalit�s positives et n�gatives; d�formation ou pouvoir
   monopolistique sur le march� de beaucoup de prestataires et pro-
   ducteurs; absence de march�s fonctionnels dans certains secteurs; et
   pr�sence fr�quente de co�ts de transaction �lev�s)9.

� �quit� � comme les individus et les familles �chouent souvent dans leur
   tentative de se prot�ger ad�quatement contre les risques de maladie et
   d'incapacit� sur une base volontaire pour des raisons culturelles (d�ci-
   sions bas�es sur le court terme) et des faiblesses caract�ristiques de l'as-
   surance maladie priv�e (le risque moral et la s�lection adverse)10.


   En grande partie inspir�s par le Service de Sant� National britan-
nique (NHS) et pour �viter les insuffisances connues des march�s
d'assurance, plusieurs pays � revenus faibles et interm�diaires ont
introduit, au cours des quelques d�cennies pass�es, des syst�mes de
soins de sant� int�gr�s verticalement et financ�s par l'�tat.


. . . et � un retour au N�olib�ralisme des ann�es 1990

Pendant les ann�es 1980 et 1990, le pendule a commenc� � se balancer
dans la direction oppos�e. Pendant l'�re Reagan-Thatcher11, le monde
a �t� t�moin d'une volont� croissante d'exp�rimenter des approches de
march� dans les secteurs sociaux (sant�, �ducation et protection
sociale). Ce fut le cas m�me dans des pays comme la Grande-Bretagne,
la Nouvelle-Z�lande et l'Australie � les bastions historiques de l'ap-
proche bas�e sur l'�tat providence dans la politique sociale.
   Comme pour la mont�e de l'implication de l'�tat, le r�cent
refroidissement vis-�-vis de l'engagement de l'�tat dans le finance-
ment des soins de sant� et l'enthousiasme pour des solutions priv�es a
�t� motiv� par des arguments tant id�ologiques que techniques.
   L'imp�ratif politique qui a accompagn� la lib�ralisation dans
beaucoup d'anciens �tats socialistes et les chocs �conomiques en
Asie de l'Est et en Am�rique Latine ont certainement contribu� �
g�n�rer un sens global de l'urgence de r�former la bureaucratie inef-
ficace et d�mesur�e, et d'�tablir des gouvernements plus petits et
plus responsables12.
   Il serait cependant trop facile de bl�mer l'id�ologie et la crise
�conomique pour la pouss�e r�cente dans les tentatives de r�former le
financement de soins de sant� en exposant la bureaucratie publique

106 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



aux forces du march� concurrentiel, r�duisant les effectifs du secteur
public et augmentant le financement par le secteur priv�13.
   En fait, l'approche de l'�tat-providence a �chou� dans sa tentative
de r�pondre aux besoins de sant� des populations � travers le monde14.
D'o� le dilemme de d�cideurs dans le monde entier : bien que l'en-
gagement de l'�tat dans le secteur de la sant� soit vraiment n�cessaire,
il est typiquement contraint par l'�chec de l'offre de services par le
secteur public15.


. . . vers un nouveau r�le d'intendance pour l'�tat

Aujourd'hui, les gouvernements r��valuent partout quand, o�,
comment et dans quelle mesure intervenir ou s'il faut laisser agir les
forces du march� par la demande des patients.
   Le consensus grandissant est que faire face � ce probl�me exige une
meilleure int�gration entre les r�les de l'�tat et du secteur priv� et
leurs capacit�s respectives. Dans la plupart des pays, cela signifie
r��quilibrer un m�lange d�j� complexe de r�les publics et priv�s dans
le financement du secteur de la sant�16.
   Pour am�liorer l'efficacit� ou l'�quit�, les gouvernements peuvent
faire des choix parmi une vaste gamme d'actions. Celles-ci incluent :

� l'information pour encourager des changements de comportement
   n�cessaires � l'am�lioration des r�sultats de sant�

� la politique et la r�glementation pour influencer les activit�s des
   secteurs public et priv�

� mandater ou acheter des services de prestataires publics et priv�s

� les subventions pour payer des services directement ou indirectement

� les services pr�ventifs et curatifs (production interne).


   Dans beaucoup de pays, pour des raisons autant id�ologiques que pour
la faible capacit� du public � traiter l'asym�trie de l'information, la con-
clusion de contrats et les probl�mes de r�gulation, les gouvernements
essayent souvent de trop faire � particuli�rement en termes de subven-
tions publiques pour des services de production interne � avec trop peu de
ressources et peu de capacit� � r�pondre aux attentes dans ces secteurs.

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 107



   Parall�lement � un tel financement et une telle production par le
secteur public, les m�mes gouvernements bien intentionn�s ne r�us-
sissent souvent pas � :

� d�velopper des politiques efficaces, rendre disponible l'information
   sur l'hygi�ne personnelle, les styles de vie sains et l'utilisation appro-
   pri�e des services de sant�, et r�glementer et signer des contrats avec
   les prestataires disponibles du secteur priv�

� s'assurer qu'un financement additionnel est mobilis� � partir d'autres
   sources ;

� fournir des subventions cibl�es pour s'assurer que les populations
   pauvres ne sont pas exclues ; et

� financer des biens publics sujets � d'importantes externalit�s dans les
   cas o� la volont� de payer des consommateurs est sous-optimale.



Voies de la R�forme en Afrique de l'Ouest

Beaucoup de pays d'Afrique de l'Ouest font face � des pressions finan-
ci�res croissantes, d�clench�es par des engagements dans des pro-
grammes mondiaux, des co�ts m�dicaux croissants, des p�nuries dans
les syst�mes d'intrants et des appels pour l'�limination de redevances
pay�es par les utilisateurs, pour n'en mentionner que quelques-uns. La
volatilit� du financement fourni par les donateurs et la marge fiscale
limit�e ont contribu� � accro�tre le scepticisme envers la confiance
excessive port�e aux solutions du gouvernement central et ont rendu
urgent le besoin de garantir une source de financement plus durable
pour le secteur de la sant� (Beattie, Doherty et al. 1998 ; Banque mon-
diale, 2004 ; OMS, 2005). En outre, des transformations politiques et
socio-�conomiques � travers l'Afrique Subsaharienne ont commenc� �
sensibiliser les gouvernements sur la n�cessit� d'�tre plus attentifs aux
besoins de leurs citoyens. En cons�quence, beaucoup de gouvernements
essayent d'am�liorer la performance de leur secteur sant� (OMS, 2000)
en introduisant un syst�me public d'assurance maladie obligatoire dans
l'espoir que ceci pourra leur permettre de fournir un meilleur acc�s aux
soins de sant� demand�s, d'am�liorer la protection financi�re face au
co�t de la maladie et d'�tre plus sensible aux attentes des populations.

108 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Dans la d�marche de d�veloppement tendant � �tendre le finance-
ment par pr�-paiement en Afrique de l'Ouest, aucun m�canisme
unique ne va probablement fournir la solution � tous les d�fis poli-
tiques rencontr�s dans le financement des services de sant�. C'est
plut�t par une approche bas�e sur plusieurs piliers et combinant divers
m�canismes de financement et divers dispositifs op�rationnels que
l'on a plus probablement des chances de r�ussir.
   La plupart des pays ont d�j� essay� de faire le saut qui permet de
passer d'une absence de financement collectif � la couverture uni-
verselle en introduisant un mod�le de service de sant� national qui
promettait de payer tout pour tout le monde. Dans la plupart des cas,
cette approche n'a pas fonctionn� (Abel-Smith, 1986). Cela a eu pour
r�sultat de cr�er une situation o� l'argent public a �t� l�g�rement
saupoudr� � tant de personnes qu'� la fin personne n'a acc�s � des
services ad�quats, m�me au niveau des soins de sant� de base.
   Deux approches alternatives sont � la base des r�cents efforts d'expan-
sion de la couverture sanitaire par des m�canismes bas�s sur l'assurance.
Dans la premi�re approche, l'assurance maladie obligatoire est intro-
duite pour une petite frange de la population qui peut se permettre de
payer, et pour laquelle il est facile pour les employeurs de collecter des
imp�ts � la source; il s'agit d'habitude de fonctionnaires et d'employ�s du
secteur formel. Dans le cadre de ce mod�le, les pauvres et les employ�s
percevant de faibles revenus dans le secteur informel continuent � �tre
couverts par le biais d'un acc�s aux h�pitaux publics et aux cliniques
ambulatoires subventionn�s. Bien qu'� premi�re vue cette option semble
favoriser les riches dans la mesure o� seuls ceux qui sont formellement
employ�s ou qui ont la capacit� de payer peuvent y participer, elle lib�re
l'argent public pour subventionner les soins des pauvres et des employ�s
du secteur informel. Elle permet donc un ciblage indirect des ressources
budg�taires limit�es disponibles au Minist�re de la Sant�, s'il n'y a
aucune subvention indirecte importante pour les assur�s ou des conces-
sions fiscales r�gressives. Le Nigeria, la Tanzanie et le Mozambique ont
r�cemment introduit de tels syst�mes d'assurance maladie. La Guin�e et
le Mali sont en train de consid�rer des r�formes semblables
   Dans la deuxi�me approche, l'assurance maladie obligatoire est
introduite pour une frange plus large de la population en payant pour
ou en subventionnant la prime des pauvres et des employ�s du secteur
informel percevant de faibles revenus. Cela permet une expansion plus

                      L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 109



rapide de la couverture, en utilisant les ressources qui sont lib�r�es par
la partie de la population qui contribue pour subventionner la prime
des pauvres et des employ�s du secteur informel percevant de faibles
revenus plut�t que les prestataires de service qu'ils utilisent. L'avan-
tage de cette approche consiste en ce qu'elle permet de fa�on plus
directe d'atteindre les m�nages pauvres que les subventions � l'offre
d�crites dans l'exemple pr�c�dent. Le Ghana a r�cemment introduit
un tel syst�me d'assurance maladie.


Dispositifs de mise en oeuvre

Le succ�s ou l'�chec dans le financement des soins de sant� d�pendent
souvent autant des contraintes pendant la mise en oeuvre que des choix
entre des facteurs publics ou priv�s. Il y a de nombreux exemples de sys-
t�mes de financement public et priv� qui fonctionnent bien mais il y a
aussi de nombreux exemples de syst�mes de financement tant public que
priv� qui ne fonctionnent pas bien. Comprendre � ce qui � marche bien
et � pourquoi � dans des contextes diff�rents est important, mais com-
prendre � comment � et � avec quel degr� de r�ussite � le programme
est mis en oeuvre est encore plus important. Pendant la mise en oeuvre
d'un nouveau programme d'assurance maladie obligatoire ou pendant
l'extension d'un programme existant, des options politiques et des dis-
positifs institutionnel, organisationnel et administratif efficaces sont
n�cessaires pour chacune des dimensions d�crites dans le tableau 1 ci-
dessous.


Les fonctions du financement

La collecte des revenus, leur mise en commun et les d�penses peuvent
�tre effectu�es par le secteur public central, des agences du secteur
public et le secteur priv�. Plusieurs facteurs rendent les options poli-
tiques du financement des soins de sant� en Afrique Subsaharienne et
dans d'autres pays � faibles revenus diff�rentes de celles des pays �
revenus interm�diaires ou �lev�s. Les d�cideurs qui songent � intro-
duire l'assurance maladie publique obligatoire doivent �tre pr�ts � faire
face � ces diff�rences pendant la mise en oeuvre (Carrin, 2004 ; DFID,
2002 ; Griffin, 1996 ; Hsiao, 1995 ; Preker 2006, � venir ; Schieber,
1997 ; Banque mondiale, 2004) .

110 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 1 : Dispositifs de mise en oeuvre pour les programmes publics d'Assurance
maladie obligatoire

Fonctions du financement

M�canismes de collecte des revenus
�  Niveau de paiement par anticipation (int�gral ou partiel avec un un peu de partage
   des co�ts ou un co-paiement)
�  Degr� de progressivit� (�lev� ou taux fixe)
�  Affectation des revenus (g�n�rale ou contributions cibl�es)
�  Choix (obligatoire ou volontaire)
�  Inscription (Sans restriction ou restrictions dans l'admissibilit�, les p�riodes d'attente
   et les possibilit�s de changement de r�gime)

Mise en commun des revenus et partage des risques
�  Taille (petit ou grand)
�  Nombre (un ou plusieurs)
�  �galisation de risque (de riche � pauvre, sain � malade, et lucrativement employ� �
   inactif)
�  Couverture (de base ou suppl�mentaire, de substitution, ou duplicative)
�  �valuation du risque (�valuation bas�e sur groupe / communaut� ou individu)

Les dispositifs d'Allocation des Ressources et d'Achat (RAP) � proprement parler
�  Pour qui acheter (membres, pauvres, malades, autre ? )
�  Quoi acheter, sous quelle forme et que doit-on exclure (question 2 sur l'offre) ?
�  De qui acheter [public, priv�, organisation non gouvernementale] (question 1 sur l'offre) ?
�  Comment payer [ � quels m�canismes de paiement utiliser] (question 2 sur les
   motivations) ?
�  � quel prix [ � prix du march� concurrentiel, prix fix�s, prix subventionn�s] (question 1
   sur le march�) ?

Environnement Institutionnel

�  Cadre l�gal
�  Instruments de r�gulation
�  Proc�dures administratives
�  Coutumes et pratiques



Collecte des Revenus

Une grande partie des populations des pays � faibles revenus vit souvent
en milieu rural ou est employ�e dans le secteur informel, ce qui limite
ainsi significativement la capacit� des gouvernements � collecter des
taxes ou des imp�ts sur les salaires (Banque mondiale, 2003). La taille de
l'�conomie informelle varie de 78 pour cent dans les soci�t�s agricoles
rurales � 61 pour cent dans les zones urbaines, et 93 pour cent dans les
nouveaux secteurs d'emploi (Charmes, 1998). La volont� et la capacit�
des individus � m�me les pauvres � de payer pour des soins de sant� sont

                             L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest     � 111



Tableau 1 (suite)

Structures organisationnelles

�   Formes organisationnelles (configuration, �chelle et port�e des fonds d'assurance ? )
�   Le syst�me de motivation (du public au priv� en termes de hi�rarchies ou agence ou
   motivations de march�s dans les droits de d�cision, la responsabilit� financi�re, la
   responsabilit� et la couverture des fonctions sociales ? )
�   Les liens (niveau d'int�gration horizontale et verticale ou s�paration entre prestataire
   et acheteur ou fragmentation)

Attributs de gestion

�   Niveaux de gestion (intendance, gouvernance, gestion hi�rarchique, services aux clients)
�   Habilet�s de gestion
�   Motivations de gestion
�   Outils de gestion (ressources financi�res, humaines, information sanitaires)




                                                               �quit� (essentiellement impact
Indicateurs de R�sultat Possibles  Efficience                          sur la pauvret�)

Protection financi�re
Envergure
Consommation du m�nage
Acc�s � services m�dicaux
Effets de march� du travail

Adapt� de Preker et Langenbrunner (�diteurs), 2005


beaucoup plus grandes que la capacit� de leur gouvernement � mobili-
ser des revenus par la taxation, y compris les imp�ts sur les salaires. Il
n'est pas �tonnant que dans la plupart des pays d'Afrique Subsaharienne
la part relative des d�penses de sant� financ�e directement par les
m�nages puisse atteindre 60 � 80 pour cent (OMS, 2002; OMS, 2004).
   Des choix importants doivent �tre effectu�s pour faire face � ces
contraintes pendant la conception et l'administration du syst�me de
collecte des revenus pour un programme gouvernemental d'assurance
maladie obligatoire. En termes du niveau de pr�-paiement, un choix
doit �tre fait entre un pr�-paiement int�gral et un pr�-paiement par-
tiel avec un peu de partage des co�ts ou un co-paiement. Le pr�-
paiement int�gral fournit une meilleure protection financi�re, mais
peut �tre associ� au risque moral et � une perte d'efficacit�. Les
co-paiements et le partage des co�ts peuvent limiter l'utilisation
excessive, mais ils sapent la protection financi�re fournie par cette
m�thode. De m�me, des d�cisions doivent �tre prises quant aux

112 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



niveaux de subventions crois�es allou�es aux populations � faibles
revenus pour une subvention partielle ou totale de leurs primes.
   De la m�me mani�re, des choix doivent �tre effectu�s en termes de
la progressivit� du niveau des contributions. Un programme de con-
tributions fortement progressif am�liore l'�quit�, mais n�cessite des
informations sur le revenu r�el qui souvent ne sont pas disponibles. �
ses niveaux inf�rieurs, un m�canisme progressif pourrait toutefois ne
toujours pas �tre accessible pour les indigents ou les populations dont
les revenus sont tr�s faibles tandis qu'� ses niveaux sup�rieurs il peut
�tre excessivement co�teux. Pour cette raison, beaucoup de pays fixent
un plancher et un plafond. Aux seuils inf�rieurs, les m�nages dont les
revenus sont faibles sont exempt�s de contributions (l'�tat peut payer
� leur place) et aux seuils sup�rieurs il peut y avoir un plafond. Une
prime bas�e sur un taux fixe est r�gressive, mais beaucoup plus simple
� g�rer. Des subventions et des exemptions peuvent �tre utilis�es pour
s'assurer que les pauvres ne sont pas omis. Il faut aussi tenir compte
dans les choix politiques du fait que la collecte de revenus peut �tre
bas�e sur des revenus g�n�raux non affect�s (appel� un pr�l�vement
d'assurance maladie dans des pays comme l'Australie) ou sur un imp�t
sur les salaires affect� � la sant� comme en Allemagne ou en France.
   La possibilit� de choisir de devenir membre ou pas et celle de choisir
entre diff�rents r�gimes (s'il y en a plusieurs) sont d'autres �l�ments
importants que l'on doit consid�rer en concevant le syst�me de collecte
des revenus. L'adh�sion obligatoire avec des primes d�duites � la source
par les employeurs est une fa�on de forcer tous ceux qui devraient
payer � contribuer. Mais dans des pays avec une petite participation de
main-d'oeuvre formelle, la p�n�tration d'une telle adh�sion obligatoire
peut �tre tr�s faible. En outre, cette formule repose sur le fait que les
employeurs d�clarent leurs employ�s, ce que plusieurs ne font pas �
cause de la responsabilit� fiscale que cela implique. L'adh�sion obliga-
toire avec une collecte � la source ne conf�re donc pas une plus grande
couverture lorsque l'on est confront� � de faibles niveaux de revenus.
L'adh�sion volontaire repose sur la volont� et la capacit� de payer. Les
membres doivent vouloir adh�rer et cette formule d'assurance doit
prouver sa valeur. Elle repose sur la confiance que les primes pay�es
aujourd'hui m�neront � des b�n�fices demain.
   � de faibles niveaux de revenus, les m�nages pauvres des zones rurales
peuvent ne pas avoir confiance en un programme d'assurance national �
cause des exp�riences n�gatives pass�es, ou ils peuvent pr�f�rer prendre

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 113



le risque de ne pas �tre couvert par une assurance. L'inscription peut �tre
ouverte � tout moment � tous ceux qui sont �ligibles ou il peut y avoir des
restrictions quant � l'admissibilit� (l'employ� et sa famille proche) ou une
p�riode d'attente (l'�cart de temps entre l'inscription et le moment o� les
r�clamations peuvent �tre faites) ou des limites sur les possibilit�s et la
fr�quence des changements de plans d'assurance.


Mise en commun des revenus

La mise en commun des revenus collect�s pr�sente un autre lot de
probl�mes lorsque le niveau de revenu est faible. A de faibles niveaux
de revenus, l'urgence de satisfaire les besoins imm�diats d�passe sou-
vent le souci pour l'avenir (OIT, 2002; Banque mondiale, � venir). Les
individus sont plus int�ress�s � payer pour des soins dont ils sont cer-
tains qu'ils auront besoin dans les mois � venir (risques pr�visibles ou
non assurables) que pour un �v�nement incertain qui pourrait se
mat�rialiser dans l'avenir. Il n'est pas �tonnant que le pourcentage des
d�penses totales de sant� qui se fait par le canal d'une forme de pr�-
paiement soit faible dans les pays � faibles revenus. Et les m�nages
dont les revenus sont faibles et qui sont expos�s aux chocs financiers
li�s au co�t de la maladie tombent souvent au-dessous du seuil de pau-
vret�. Toutefois, l'exp�rience montre que dans des pays comme le
Ghana, la Tanzanie, l'Afrique du Sud et en Afrique de l'Ouest, les
contributions des m�nages peuvent �tre canalis�es avec succ�s � tra-
vers des m�canismes d'assurance et que des subventions gouverne-
mentales peuvent �tre utilis�es pour aider � payer les primes pour les
pauvres afin qu'ils ne soient pas exclus du processus.
   Des choix importants doivent �tre faits � l'�gard de la conception et
de l'administration des pools de revenus et les dispositifs de partage
des risques. L'�galisation des risques peut �tre r�alis�e de diff�rentes
fa�ons dont trois pr�dominent dans le financement des soins de
sant� � par des subventions, par l'assurance et par l'�pargne. L'effet de
ces trois instruments de financement sur les objectifs politiques li�s �
l'�galisation des risques d�pend de l'instrument utilis�. Par exemple
les subventions peuvent �tre un meilleur instrument pour atteindre
l'�quit�, tandis que l'assurance peut �tre une meilleure protection
contre des variations de d�penses, et l'�pargne peut �tre un meilleur
instrument de lissage des revenus. Des politiques qui visent � r�aliser
des objectifs d'�quit� peuvent �tre plus efficacement mises en oeuvre

114 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Graphique 1 : Options pour l'�galisation des risques

                  Subsides                                                Assurance


                                                                              $
                    $

                                                                                     $

  Ressources  $                                      Ressources




                  Pauvre               Riche                             Risque      Risque
                                                                           faible     �lev�

                                      Revenu                                         Risque


                                              �pargne


                                                    $


                                                                     $

                          Ressources




                                            Productive           Nonproductive



                                                                     Age




par des subventions dans le cadre de la fonction de collecte des
revenus que par l'utilisation de l'assurance et de l'�pargne dans le
cadre des fonctions de d�penses ou de mise en commun des revenus.
Les politiques qui visent � r�aliser la protection financi�re peuvent
�tre plus efficaces pour la r�alisation de la protection contre les varia-
tions de d�penses dans le cadre de la fonction de mise en commun des
revenus que les subventions et l'�pargne dans le cadre de la fonction
de collecte de revenus ou celle de d�penses. Finalement, les politiques
qui visent � r�aliser le lissage des revenus au cours du cycle de vie peu-
vent �tre plus efficaces lorsque l'on utilise l'�pargne plut�t que des

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 115



subventions et l'assurance dans le cadre des fonctions de mise en com-
mun des revenus ou de collecte.
   Cependant, dans les dispositifs de financement de la sant�, ces trois
instruments de financement et sous-fonctions sont souvent fusionn�s
dans les m�mes dispositifs organisationnels. Pire que cela, dans cer-
tains pays, le financement de la sant�, les pensions et d'autres b�n�-
fices li�s � la protection sociale sont tous fondus en un seul dispositif
de s�curit� sociale, sans essayer de faire correspondre les instruments
aux objectifs ou distinguer la fonction de financement dans laquelle ils
pr�sentent la plus forte probabilit� d'�tre efficaces. Des preuves s'ac-
cumulent d�sormais � l'effet que l'utilisation de cette approche de
� taille unique � engendre d'importants probl�mes pendant la mise en
oeuvre et emp�che l'atteinte d'objectifs politiques sp�cifiques. En
outre, � de faibles niveaux de revenus o� il existe d'importantes con-
traintes en termes d'espace fiscal disponible pour le secteur de la
sant�, les ressources qui peuvent �tre utilis�es pour des subventions
peuvent �tre assorties de contraintes draconiennes. Dans le cadre
d'une approche de financement des soins bas�e sur plusieurs piliers,
les m�nages profiteraient de la mise en place de plusieurs m�canismes
de financement qui, ensemble, permettraient d'atteindre les objectifs
d'�quit�, de gestion du risque et de lissage des revenus.
   La taille et le nombre de bassins affectent le niveau d'�galisation du
risque qui peut avoir lieu dans n'importe quel bassin donn�, et la
probabilit� de s�lection adverse et d'autres probl�mes inh�rents aux
march�s d'assurance. Mieux vaut quelques grands bassins qu'une mul-
titude de petits bassins.
   Mais quelques grands bassins peuvent aussi �tre pr�f�rables � seul
bassin fonctionnant comme un monopsone, et qui devient souvent
insensible aux changements dans les besoins et dans les attentes des
consommateurs. Et la fonction de mise en commun peut fournir une
couverture primaire compl�te, ou elle peut fournir une couverture
partielle suppl�mentaire, de substitution et duplicative. Ces points
sont importants puisqu'ils affectent le co�t du paquet de biens et ser-
vices qui sera fourni et, par cons�quent, le montant de la prime.
   Les �valuations du risque peuvent �tre bas�es sur l'exp�rience du
groupe ou de la communaut� ou sur les profils de risque individuels.
Bien que dans le pass�, il y ait eu une pr�f�rence pour des primes
bas�es sur le groupe et la communaut� pour �viter d'imposer un
fardeau financier excessif � ceux qui sont per�us par les assureurs

116 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



comme souffrant de profils de morbidit� �lev�s ou de s�lection
adverse. Quelques pays, comme les Pays-Bas, essayent de surmonter
ces probl�mes en subventionnant les fortes primes individuelles bas�es
sur le risque. Cela �limine la motivation pour les assureurs de s'en-
gager dans la s�lection adverse et rend les primes d'assurance accessi-
bles aux individus souffrant de maladies chroniques et on�reuses. De
telles subventions pour des fortes primes individuelles bas�es sur le
risque ne traitent pas du probl�me de risque moral ; mais ce probl�me
ne serait pas plus important dans le cadre de ce m�canisme que dans
celui d'un programme dont les taux seraient bas�s sur le groupe ou la
communaut�, ou dans le cadre d'un acc�s � un syst�me national de
sant� gratuite. Un des inconv�nients de cette approche dans des situa-
tions de faibles revenus est qu'elle est tr�s exigeante en donn�es, don-
n�es qui peuvent ne pas �tre disponibles.


D�penses (Allocation des ressources ou achat)

Finalement, les �tudes sur l'incidence des avantages des d�penses de
sant� lorsque les niveaux de revenu sont bas montrent qu'elle est sou-
vent pro-riches m�me dans les pays o� d'importants efforts ont �t�
effectu�s pour cibler les d�penses publiques sur les pauvres (Castro-
Leal, Dayton et autres, 2000; Gwatkin, 2002; Banque mondiale,
2004). Sans recours � l'assurance, les seuls moyens pour les structures
sanitaires d'augmenter leurs revenus est d'imposer le paiement aux
utilisateurs. De facto, cela donne aux groupes � revenus �lev�s un
meilleur acc�s aux infrastructures sanitaires subventionn�es par l'�tat.
Malgr� ses ressources publiques limit�es, l'Afrique pr�sente les biais
les plus prononc�s de d�penses pro-riches (Gwatkin, 2001).
   La gestion efficace et efficiente des rares ressources des services de
sant� est une partie importante de l'histoire des programmes publics
d'assurance maladie obligatoire. L'exp�rience a montr� que sans une
politique claire de d�penses et des m�canismes de paiement efficaces
de tels m�canismes ne sont pas tr�s diff�rents (dans la r�alisation des
objectifs sous-jacents) du financement par le budget central du gou-
vernement. Les pauvres sont souvent omis.
   Le passage d'une situation o� le secteur public recrute son personnel
et produit � lui-m�me � des services, � une situation d'achat strat�gique
aupr�s de fournisseurs non gouvernementaux � la sous-traitance � a �t�
r�cemment au centre d'un vif d�bat sur le financement collectif des

                      L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 117



soins de sant�. Le principe sous-jacent est qu'il est n�cessaire de s�parer
les fonctions de financement de la production de services pour am�lio-
rer la performance du secteur public et sa responsabilisation. Cette
exp�rience est maintenant en cours d'extension au secteur de la sant�, et
notamment aux programmes publics d'assurance maladie obligatoire
dans beaucoup de pays pauvres.
   Au cours du passage d'une situation de budg�tisation passive dans le
secteur public � une situation d'achat strat�gique ou de contractualisa-
tion de services chez des prestataires non-gouvernementaux, les
d�cideurs et les managers doivent se poser cinq questions fondamen-
tales : pour qui acheter, que doit-on acheter, de qui acheter, comment
payer et � quel prix ? Pour s'attaquer � ces questions, ils sont forc�s de
s'interroger sur le r�le des questions organisationnelles, institution-
nelles et administratives dans la performance des d�penses publiques
de sant�, questions qui seront discut�es dans les sections suivantes.


Environnement institutionnel

Beaucoup de pays d'Afrique sont confront�s : (a) � de s�v�res con-
traintes �conomiques, avec une croissance annuelle par personne aussi
faible que 0,5 � 1,2 pour cent pour la moiti� de l'Afrique (Banque
mondiale, 2003) ; (b) � des conflits et/ou une instabilit� politique, avec
26 conflits qui ont �clat� entre 1963 � et 1998, affectant plus de 60
pour cent de sa population (Banque mondiale, 2004), ce qui d�tourne
du secteur de la sant� les rares ressources et perturbe les services ; (c) �
l'absence de bonne gouvernance, avec le plus faible score du monde
en mati�re d'index r�gional d'Evaluation Institutionnelle et Politique
de Pays (CPIA)18 ; (d) � une corruption g�n�ralis�e (Hodess, Banfield
et autres, 2001) ; (e) � une quasi-absence de m�canismes formels de
protection sociale pour les populations vuln�rables (OIT, 2001) ; et,
(f) � une capacit� inad�quate de r�gulation et de surveillance du
secteur de la sant� qu'il soit formel ou informel.
   Une gamme de d�cisions doit �tre prise � l'�gard de quatre aspects
de l'environnement institutionnel pour l'assurance maladie publique.
Ceux-ci incluent : le cadre l�gal, les instruments de r�gulation, les
proc�dures administratives et les coutumes et pratiques formelles ou
informelles.
   Un indice compos� qui capture le niveau de gouvernance, les capa-
cit�s administratives et les capacit�s de gestion est le CPIA19 de la

118 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




  Encadr� 2 : Limites associ�es aux principaux m�canismes de financement
  des soins de sant�

  Aucun m�canisme de financement ne va � lui seul vraisemblablement int�grer tous
  les objectifs, de l� le besoin d'une approche bas�e sur plusieurs piliers

  �  La Fiscalit� : En partie sous l'influence de l'h�ritage id�ologique colonial et en
     partie par �tatisme post-colonial ou socialisme, les pays africains ont, entre les
     ann�es 1960 et les ann�es 1980, mis un accent plus important sur des services de
     sant� fournis et financ�s par l'�tat. Cependant, la d�pendance sur la taxation n'a
     pas �t� une r�ussite, �tant donn�e le faible niveau de revenus recueillis, qui est
     typiquement au-dessous de 15 % en ASS. Malgr� la croissance �conomique et
     des budgets de sant� am�lior�s, le financement public reste secondaire par rap-
     port aux d�penses priv�es et s'�l�ve, � aussi peu que 20 � 30 % des totales
     d�penses de sant� du Nigeria, 40 % au Ghana et 42 % au Kenya (OMS, 2004).

  �  Subventions et Aide des Donateurs : L'aide �trang�re au secteur de la sant� en
     Afrique est d�j� exceptionnellement �lev�e compar�e � d'autres r�gions. Une
     moyenne de 35 % des d�penses du secteur de la sant� est financ�e par l'aide des
     donateurs, avec des niveaux atteignant 50 % et plus dans le cas de certains pays,
     comme le Mozambique (Banque mondiale, 2003). Bien qu'une telle aide soit
     absolument n�cessaire � court terme, les d�cideurs ont commenc� � reconna�tre
     le besoin urgent de commencer � construire et renforcer les organisations et les
     institutions qui sont n�cessaires pour garantir un financement plus durable pour
     l'avenir (Beattie, Doherty et autres, 1998 ; Banque mondiale, 2004 ; Heller, 2005 ;
     OMS, 2005).

  �  Assurance maladie Publique Obligatoire : �tant donn� que l'Assurance Maladie
     Obligatoire (AMO) est bas�e sur les retenues salariales, les flux de revenu d�pen-
     dent fortement de la part de l'emploi dans le secteur formel, qui est typiquement
     faible en Afrique Subsaharienne (ASS) (Charmes, 1998; Blunc, Canagarajah et
     autres, 2001; Djankov, 2003). Des enqu�tes sur les m�nages dans certains pays
     entre 1997 et 1999 montrent que les moyennes nationales sur l'emploi dans le
     secteur formel en proportion de la main-d'oeuvre totale s'�l�vent � 17 % au
     Mozambique et � 27 % au Kenya, avec de forte diff�rence entre les villes et les
     campagnes (Banque mondiale, 1996). Aujourd'hui, dans la plupart des pays de
     l'ASS, l'AMO est limit�e au secteur public et au secteur priv� formel, ce qui peut
     cr�er des probl�mes d'�quit� (Griffin et Shaw, 1996 ; Hsiao, 1997 ; OIT, 2001). Les
     d�ductions � la source, consid�r�es comme un autre fardeau fiscal, g�n�rent
     typiquement une r�sistance des syndicats et des employ�s, par exemple au Nige-
     ria et en Tanzanie, etc. (Cutler et Zeckhauser, 2000 ; OIT, 2001). Les contributions,
     combin�es � d'autres imp�ts, peuvent �tre prohibitives ou entra�ner des distor-
     sions o� la crainte qu'un tel fardeau fiscal excessif poussent les individus vers

                        L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest    � 119




  l'informel est r�elle et peut ainsi cr�er des distorsions sur le march� du travail
  (OIT, 2001; Banque mondiale, � venir). Si elle n'est pas contr�l�e par des mesures
  de retenue des co�ts et des m�canismes de paiement aux prestataires, l'AMO est
  associ�e � une escalade des co�ts et � un biais accru de la prestation de servi-
  ces vers le curatif. Le d�veloppement d'un syst�me d'AMO est un processus
  intensif en ressources qui exige un important renforcement institutionnel, organi-
  sationnel et administratif (Griffin et Shaw, 1996 ; Banque mondiale, 2004). Les pays
  d'Afrique Subsaharienne qui se sont embarqu�s dans des r�formes d'AMO ont
  pass� des ann�es ou des d�cennies de pr�paration pour cr�er un environnement
  favorable � l'introduction de ce m�canisme.
      L'expansion de l'AMO � une couverture universelle (c'est-�-dire l'assurance
  maladie nationale) est une strat�gie � long terme, qui exige une conception tech-
  nique solide, une bonne capacit� de mise en oeuvre et de bonnes habilet�s poli-
  tiques (Abel-Smith, 1986; OIT, 2001). Le succ�s � long terme d�pend de la stabilit�
  politique et est sensible � la croissance �conomique, ce qui malgr� les tendances
  positives r�centes, laisse cet instrument vuln�rable � de tels chocs exog�nes.

� Assurance maladie Priv�e : M�me si la prolif�ration du financement communau-
  taire (mutuelles) par exemple au Ghana, au S�n�gal et en Tanzanie17 (Banque
  mondiale, 2003), indique que l'on consid�re le financement de la sant� par les
  communaut�s comme un premier pas important vers le paiement par anticipation
  et la mise en commun des risques, des limitations telles que les faibles niveaux de
  participation, le risque financier �lev�, la d�pendance envers les subventions
  gouvernementales et l'exclusion des plus d�munis font qu'il est n�cessaire d'a-
  grandir les bassins de risque par le biais d'une augmentation proportionnelle ou la
  jonction de diff�rents m�canismes par la r�assurance ou en les connectant par
  motivations dans le syst�me de s�curit� sociale (Arhin-Tenkorang, 2001; Jakab et
  Krishnan, 2004). L'assurance commerciale priv�e s'est �tendue, ce qui implique
  une plus grande volont� et une plus grande capacit� de payer pour l'assurance
  (Preker, 2006 � venir). Cet instrument est per�u comme favorisant les riches, se
  concentrant sur les soins curatifs et for�ant une escalade des co�ts. L'assurance
  commerciale priv�e sert autant comme assurance primaire que comme compl�-
  ment aux avantages re�us par d'autres moyens.
� Redevances pay�es par les usagers20 : Une d�pendance excessive envers les
  redevances pay�es par les utilisateurs, jusqu'� 70 % dans certains cas, a des
  effets d'appauvrissement significatifs pour les soci�t�s o� 50 � 70 % de la popula-
  tion vit au-dessous du seuil de pauvret� (Banque mondiale, 2001; OMS, 2004). Des
  d�penses directes �lev�es peuvent avoir des effets catastrophiques sur les non-
  pauvres (Wagstaff, Watanabe et autres, 2001). Les redevances pay�es par les
  utilisateurs sont un moyen r�gressif de mobilisation des ressources. Cette for-
  mule fait renoncer aux avantages que procure le partage des risques et n'incite
  pas � am�liorer l'efficacit� dans la production des services de sant�.

120 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Banque mondiale (Banque mondiale, 2003), qui classe les pays. Ces
chiffres laissent voir que le Nigeria et le Kenya sont particuli�rement
pr�dispos�s � l'�chec. Cependant, les gouvernements ont de plus en plus
montr� leur engagement � am�liorer la gouvernance, comme le refl�te
les DSRP qui incluent des mesures sp�cifiques pour am�liorer l'environ-
nement r�gulateur et cibler explicitement l'am�lioration de la gouver-
nance et la r�duction de la corruption comme mesures prioritaires pour
stimuler la croissance. Les documents de politique des pays, comme le
� Nigeria National Economic Empowerment Development Strategy
(NEEDS, 2004) � pr�sentent la gouvernance comme principale priorit�
de leur ordre du jour pour atteindre la croissance �conomique et le
d�veloppement social (Federal Government of Nigeria, 2004).
   L'Indicateur de Gouvernance Compos� du GRICS classe la per-
formance selon 6 dimensions (Kaufmann, Kraay et autres, 2003).
Parmi les pays �tudi�s, certains des plus performants, compar�s au
point de r�f�rence r�gional, sont l'Afrique du Sud, le S�n�gal et le
Ghana. La Tanzanie et le Mozambique se trouvent sur la m�diane tan-
dis que le Nigeria et le Kenya restent en bout de peloton. Cependant,
les engagements en faveur d'une am�lioration de la gouvernance ont
apport� des am�liorations et ainsi, avec le temps, on s'attend � ce que
cela am�liore la faisabilit� et la p�rennit� de l'AMO.


Structures organisationnelles L'introduction de l'AMO en Afrique
exige non seulement un renforcement des institutions existantes, mais
aussi la cr�ation de nouvelles structures organisationnelles. Des d�ci-
sions relatives � plusieurs variables doivent �tre prises � cet �gard : la
forme organisationnelle, le r�gime de motivation et le degr� d'int�-
gration verticale/horizontale par rapport � la diff�rentiation du nou-
veau syst�me.
   La forme organisationnelle se rapporte principalement au nombre
et � la taille des organisations qui seront utilis�es. L'�ventail des
options varie entre deux extr�mes. D'une part, il peut y avoir un fonds
d'assurance maladie unique qui alloue l'argent � un seul r�seau de
prestataires (appartenant parfois au syst�me d'assurance maladie lui-
m�me). Cela conduit � une situation de monopsone-monopole. �
l'autre extr�me, il peut y avoir beaucoup de fonds plus petits qui ach�-
tent des services d'un plus large �ventail de fournisseurs (public et
priv�). Cela m�ne � un environnement comp�titif plus ouvert. Entre
ces extr�mes, il existe plusieurs options qui peuvent impliquer un seul

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 121



acheteur et plusieurs prestataires ou plusieurs acheteurs et un seul
prestataire.
   Dans son essence, le r�gime de motivations fait r�f�rence aux
marges de d�cision de ceux dirigent les organisations. Les managers
du fonds d'assurance maladie ont le droit de prendre des d�cisions
portant sur la gestion financi�re, les ressources humaines, l'infrastruc-
ture, les syst�mes d'information etc. De telles d�cisions sont-elles
prises au centre par le minist�re de la Sant� ou par un d�partement
d'un autre minist�re central ? D'autres aspects importants du r�gime
de motivations touchent au degr� d'exposition au march�. S'il y a plus
d'un fonds et plus d'un prestataire, leur permet-on d'entrer en com-
p�tition ? Parfois, m�me quand il y a plus d'un fonds et plus d'un
prestataire, on ne leur permet pas de rivaliser. Qui d�cide de ce que
l'on fera des profits et qui est responsable des d�ficits ? Quels sont les
dispositifs mis en place pour amener les int�ress�s � rendre compte ?
Comment traite-t-on les prestations sociales (explicitement ou de
fa�on indirecte) ?
   Troisi�mement, les fonds d'assurance maladie peuvent int�grer ou
fragmenter les fonctions de sous-financement des soins de sant� d'une
multitude de fa�ons (Londono et Frenk, 1997). D'un c�t�, en termes
d'int�gration verticale, tout le financement de la sant� (la collecte, la
mise en commun des revenus et l'achat) et la prestation de services
peuvent �tre enti�rement int�gr�s dans le cadre d'une seule entit�
d'assurance. Cela se produit quand le syst�me d'assurance collecte lui-
m�me ses primes et poss�de ses propres prestataires. Beaucoup de
Fonds nationaux d'Assurance maladie sont configur�s de cette fa�on.
De tels fonds se comportent de mani�re tr�s semblable � un minist�re
de la Sant� unifi� ou � une S�curit� Sociale nationale. Dans d'autres
cas, il peut y avoir plusieurs degr�s de s�paration des fonctions d'achat
et de prestation ou la s�paration entre les sous-fonctions de collecte
des revenus, de mise en commun de ces revenus et d'achat qui seraient
confi�es � diff�rentes organisations. Les fonds d'assurance maladie qui
sont model�s sur les fonds de maladie allemands ou hollandais ont
souvent ce type de diff�rentiation fonctionnelle.


Attributs de gestion

Finalement, il y a des aspects de la gestion d'un syst�me d'assurance
maladie qui diff�rent beaucoup de la gestion d'un service national de

122 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




   Encadr� 3 : Mod�le de transition du financement de la sant�

   � Le pluralisme structur� � est un mod�le centriste qui transmet la recherche d'un
   terrain d'entente entre les dispositions extr�mes qui ont g�n� la performance des
   syst�mes de sant� (Londono et Frenk, 1997). `Le pluralisme' �vite les extr�mes que
   sont le monopole dans le secteur public et l'atomisation dans le secteur priv�. `Struc-
   tur�' �vite les extr�mes des proc�dures de commande-et-contr�le autoritaires dans
   le gouvernement et l'absence anarchique de r�gles du jeu transparentes pour cor-
   riger des �checs du march�.
       Dans ce mod�le, la modulation (c'est-�-dire l'intendance) est la mission centrale
   du minist�re de la Sant�, qui se retire de la fourniture directe de services de sant�
   (s�paration entre le financement et la fourniture de services). Le financement est la
   fonction principale des instituts de S�curit� sociale, qui doit �tre graduellement
   �tendu pour couvrir toute la population (l'assurance maladie nationale). La fonction
   articulation21 (Londono et Frenk, 1997 ; Chernichovsky 2002) est rendue explicite en
   favorisant l'�tablissement ` d'organisations pour l'articulation des services de sant�'
   (la cr�ation d'agences), qui ex�cutent une s�rie d'activit�s cruciales, y compris l'in-
   scription de populations dans des plans de sant� en �change d'une capitation
   ajust�e au risque, de la sp�cification de paquets explicites de b�n�fices ou d'inter-
   ventions, de l'organisation de r�seaux de prestataires afin de structurer les choix des
   consommateurs, la conception et la mise en oeuvre de motivations aux prestataires
   par des m�canismes de paiement et la gestion de la qualit� des soins. Finalement, la
   fonction prestation est ouverte au pluralisme (contractualisation; partenariats public-
   priv�s) qui serait adapt� aux besoins diff�rentiels des populations urbaines et rurales
   (Preker, Velenyi et al., � venir).



sant� en termes de niveau de gestion (l'intendance, la gouvernance, la
gestion hi�rarchique, les services aux clients), d'habilet�s de gestion,
de motivations et d'outils de gestion n�cessaires (ressources finan-
ci�res et humaines, information sanitaire) (Allen, 2002). Lors de
l'�tude des besoins de gestion d'un syst�me d'assurance maladie, il est
utile de faire la distinction entre quatre niveaux de gestion diff�rents,
dont chacun a un objectif sp�cifique :

� Niveau macro ou d'intendance (gestion de politiques strat�giques et
   d'institutions au niveau national, provincial/d'�tat ou r�gional du
   syst�me de soins de sant�) (Saltman et Ferroussier-Davis, 2000 ;
   Organisation Mondiale de la Sant�, 2000).

� Niveau meso ou de gouvernance (gestion ex�cutive de grandes
   organisations ou de r�seaux de programmes de sant�, d'h�pitaux et
   de cliniques publics,) (Wilson, 1989; Williamson, 1991 ; Milgrom et

                              L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest      � 123



  Roberts, 1992 ; Osborne et Gaebler, 1993) (Pointer et Orlikoff,
  2002) (Pointer et Orlikoff, 1999 ; Orlikoff et Totten, 2001).

� Niveau micro ou op�rationnel (gestion hi�rarchique des services aux
  clients)

� Niveau du m�nage ou de l'individu (gestion clinique des patients)


  Dans un syst�me d'assurance maladie fonctionnant bien il y a
beaucoup d'interaction et de compl�mentarit� entre ces niveaux dif-
f�rents de gestion, et simultan�ment une division claire des respon-
sabilit�s et de l'imputabilit�. Ceci est aussi vrai dans les pays �
revenus faibles et interm�diaires. Dans des syst�mes d'assurance
maladie fonctionnant mal, il y a des lacunes et des chevauchements
importants. Ainsi, les cat�gories d�crites ci-dessus ne sont pas
mutuellement exclusives, ni n�cessairement d'importance �gale aux
diff�rents niveaux du syst�me de soins de sant�. Au niveau macro, les




Graphique 2 : Type et objectifs de gestion


                            Type                    Objectifs

                            � Pilotage              � Politiques/Strat�gies

                            � Gouvernance           � Coordination

                            � Direction             � Production

                            � Gestion clinique      � Soins et services




Graphique 3 : Type et cibles de gestion


                      Macro               Meso               Micro             M�nages
   Type de gestion    Institutionnel      Organisationnel    Op�rationnel      Individus

   Pilotage


   Gouvernance


   Direction


   Gestion clinique

124 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



dirigeants d'un grand syst�me national d'assurance maladie peuvent
�tre submerg�s par des d�cisions de niveau micro associ�es � un
grand nombre de travailleurs de la sant� qui sont des fonctionnaires,
ou � des probl�mes d'acquisition de fournitures ou de gestion des
d�p�ts nationaux de m�dicaments. Au niveau micro, les cliniciens et
les directeurs d'installations locales peuvent �tre submerg�s par les
t�ches suppl�mentaires impos�es par les proc�dures bureaucratiques
excessives qui ont peu de liens avec les soins cliniques qu'ils essayent
de fournir aux patients ou avec la gestion locale de la structure sani-
taire dans laquelle ils travaillent.
   Comme dans le cas de services de sant�, il y a plusieurs approches
diff�rentes � la gestion des programmes d'assurance maladie :

� Gestion par commande hi�rarchique et contr�le dans le secteur pu-
   blic central

� Application dans le secteur priv� des m�thodes modernes de gestion
   des �coles de commerce; et

� Nouvelle gestion du secteur public hors du secteur public central
   (secteur public dans son sens large)


   Ces styles de gestion tirent leurs origines des diff�rentes approches
au r�le des secteurs public et priv� d�crites plus t�t (Preker et Hard-
ing, 2003). Les fronti�res entre les trois styles de gestion sont souvent
rendues floues avec le secteur public adoptant des techniques de la
gestion moderne et le secteur priv� exer�ant un certain niveau de
commande et de contr�le.
   Des bonnes pratiques de gestion de l'assurance maladie dans le
contexte d'aujourd'hui reposent sur une gamme d'outils de gestion
qui n'�taient pas disponibles aux g�n�rations pr�c�dentes de ma-
nagers (Rose, 2000). Cela inclut la disponibilit� de la technologie de
l'information qui permet aux managers d'avoir acc�s � en temps
r�el � � des donn�es et � de l'information fiables et d'utiliser la r�gle-
mentation et les contrats comme de puissants instruments de gestion.
Par-dessus tout, cela signifie la capacit� de surmonter les probl�mes,
de penser avec cr�ativit� � des solutions et utiliser l'information et la
technologie plut�t que d'en �tre un otage (Rasiel, 1999; Rasiel et
Friga, 2001).

                      L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 125



FAISABILIT� D'UNE EXTENSION DES PROGRAMMES PUBLICS
D'ASSURANCE MALADIE OBLIGATOIRE

Les programmes publics d'assurance maladie obligatoire ont connu
un regain d'int�r�t dans la R�gion Afrique au cours de ces derni�res
ann�es (Griffin et Shaw, 1996). La majeure partie ce cet int�r�t tire
son origine de la transition vers l'urbanisation v�cue par les soci�t�s
rurales des pays de la r�gion Afrique transition dans laquelle les dis-
positifs traditionnels de partage des risques ne sont plus per�us
comme ad�quats. Ceci a conduit � un changement d'orientation qui a
vu le passage de m�canismes informels peu �tendus comme l'�pargne
familiale et la micro-assurance � des programmes publics plus globaux
d'assurance maladie obligatoire (Bailey 2004). Malgr� cette �volution,
la majorit� des populations rurales, continue � �tre exclue de ces pro-
grammes (OIT, 2001 ; Banque mondiale, 2004). La vitesse de diffu-
sion peut prendre des d�cennies, selon le rythme de croissance
�conomique, la formalisation de l'�conomie et les am�liorations en
mati�re de gouvernance, de capacit�s institutionnelles et de capacit�s
de gestion (Griffin et Shaw, 1996 ; Ensor, 1999 ; OMS, 2005).
   Pour mieux comprendre le r�le et l'influence de facteurs qui peu-
vent faire r�ussir ou �chouer l'assurance maladie, Griffin et Shaw
(1996) ont d�velopp� une m�thodologie22 pour �valuer et classer la
faisabilit� de l'assurance maladie dans quarante-sept pays d'Afrique
Subsaharienne. Cet exercice r�gional de recherches exploratoires a
g�n�r� des valeurs variant entre �3 et +3 pour les pays de l'Afrique
Subsaharienne. En ce qui concerne les pays �tudi�s dans ce livre, le
Mali et l'Afrique du Sud se sont le mieux class�s avec une valeur de +2;
le Ghana, le Nigeria et le S�n�gal ont obtenu +1; le Kenya 0; le
Mozambique et la Tanzanie se retrouvant au bas de l'�chelle avec �1.
Les variables macro utilis�es pour calculer cet indice compos� et le
classement complet des pays d'Afrique Subsaharienne figurent dans le
tableau ci-dessous (Tableau 2).
   Une approche diff�rente a �t� utilis�e dans une �tude qui a com-
par� les syst�mes d'assurance maladie bas�s sur la s�curit� sociale qui
se sont d�velopp�s depuis les ann�es 1930 en Am�rique latine avec le
d�veloppement de l'assurance maladie dans l'Asie en transition.
   Dans le cadre de cette �tude, les r�sultats de l'indice de faisabilit�
d'Ensor ont port� sur un �chantillon de 78 pays � travers les sept r�gions

  Encadr� 4 : Ghana : Du syst�me �Cash and carry� � l'AMO hybride �
  Conception de m�canismes innovateurs pour �tendre la couverture

  Le chemin du d�veloppement menant du syst�me � cash and carry � (par le biais de
  m�canismes communautaires volontaires) � l'assurance sociale universelle obliga-
  toire est compatible avec le chemin de d�veloppement typique au financement de la
  sant� observ� ailleurs (Abel-Smith, 1988 ; Preker, 1998). Une telle �volution de tr�s
  petits bassins vers des bassins plus vastes refl�te une meilleure protection financi�re
  (Carrin, Zeramndini et al., 2001). L'�chec total des mesures destin�es � garantir le
  financement ad�quat de la sant� et les d�fis inh�rents au manque d'�quit� du recou-
  vrement des co�ts ont engendr� des initiatives communautaires pour combler
  l'�norme foss� en mati�re de protection sociale entre les individus couverts par des
  m�canismes formels et ceux sans protection et expos�s aux effets d'appauvrissement
  caus�s par le syst�me de paiement par les usagers (Arhin-Tenkorang, 1995).
      Cependant, ayant reconnu que le financement communautaire est une �tape
  essentielle, mais non suffisante � l'expansion de la protection sanitaire, le gouverne-
  ment a �labor� sa vision ultime. Un programme d'assurance maladie a �t� con�u
  pour assurer l'acc�s �quitable et universel pour tous les r�sidants du Ghana � un
  paquet de soins de sant� essentiels de qualit� acceptable. L'objectif, en termes de
  politiques, a �t� que � dans les cinq prochaines ann�es (2002 � 2006), chaque r�si-
  dant du Ghana soit membre d'un programme d'assurance maladie qui le prot�ge
  ad�quatement contre le besoin d'effectuer des paiements directs (OOPs) au point de
  traitement afin d'avoir acc�s � un paquet de biens et services pr�-d�finis et de qual-
  it� acceptable � (Minist�re de la Sant�, 2004). La conception est coh�rente avec le
  GPRS (Strat�gie de R�duction de la Pauvret� du Ghana), dont l'une des composantes
  principales est de fournir des soins financi�rement et mat�riellement accessibles �
  tous les r�sidants, avec un accent sp�cial sur les pauvres et les populations vul-
  n�rables. Ce lien illustre le fait que la m�thode de financement est per�ue comme un
  d�terminant essentiel de l'accessibilit� mat�rielle et financi�re aux soins de sant�.
      Le gouvernement s'est investi dans le d�veloppement d'un m�canisme hybride
  unique, qui r�pond le mieux au besoin de la population et r�duit la segmentation gr�ce �
  un concept innovateur (Minist�re de la Sant�, 2004). En cons�quence, le nouveau
  M�canisme de Mutuelle d'Assurance maladie de District (DMHIS) est une fusion des
  deux concepts � l'assurance sociale (SHI) traditionnelle pour le secteur formel et la
  mutuelle (MHO) traditionnelle pour le secteur informel. Le principe est de rendre l'as-
  surance maladie obligatoire, mais par le biais d'un syst�me de motivations plut�t que
  par des mesures punitives et de rendre possible le choix du m�canisme. Cette r�forme
  est une tentative d'�tendre les aspects positifs du financement communautaire � de
  plus grands segments de la population. Ceci est aussi compatible avec les recomman-
  dations internationales pour �tendre le financement communautaire au niveau national
  par des subventions accrues et bien cibl�es pour payer les primes des populations �
  faible revenu; expansion du bassin d'assur�s et utilisation de la r�assurance pour pro-
  t�ger contre les fluctuations de d�penses; utilisation de techniques de pr�vention effi-
  caces et de techniques de gestion de cas pour limiter les fluctuations; assistance tech-
  nique aux m�canismes locaux; et renforcement des liens avec les r�seaux formels de
  financement et de prestataires (Preker, Rose et al., 2004).


126

                               L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest   � 127




   Encadr� 5 : R�forme des combinaisons de Financement en Tanzanie

   En Tanzanie, un pays particuli�rement pauvre avec un petit secteur formel et une
   capacit� limit�e, le gouvernement s'est fortement investi dans la fourniture de servi-
   ces sociaux de base, comme le refl�te l'accent accru mis sur les services de soins
   de sant� primaires et les changements positifs d'orientation pour accro�tre l'acc�s
   aux pauvres des r�gions rurales. Cependant, ces fortes orientations font face aux
   obstacles repr�sent�s par le manque de ressources et les difficult�s de financement.
   Pour r�pondre � cette dissonance, le Gouvernement de Tanzanie (GOT) s'est embar-
   qu� dans de vastes r�formes du financement de la sant� pour am�liorer l'efficience
   et l'efficacit� dans l'utilisation des fonds. Le programme de financement des soins de
   sant�, qui comporte la mobilisation et l'allocation des ressources, inclut les domaines
   clefs suivants : 1. Renforcement du cadre budg�taire (Revue des D�penses
   Publiques, CMDT, Comptes Nationaux de la Sant�) ; 2. La mobilisation des ressources
   financi�res (augmentation du budget du GOT consacr� aux SSP, des fonds des dona-
   teurs, ainsi que l'utilisation d'instruments compl�mentaires incluant (i) le partage des
   co�ts par un syst�me de redevances pay�es par les usagers ; (ii) des fonds de sant�
   communautaire ; (iii) un Fonds national d'Assurance maladie � NHIF ; et (iv) la capi-
   talisation des pharmacies des h�pitaux et des fonds m�dicaux en boucle. (Banque
   mondiale, 2003).




Tableau 2. Classement de Faisabilit� selon Griffin et Shaw (1996)

                                                                       Score de Faisabilit� de
                                                                          l'AM dans l'�tude
   Variables Macro pour le Classement                                 R�gionale pour l'Afrique
          de la Faisabilit� de l'AM                 Mandataire             Subsaharienne

C�t� de        �   Densit� de la             �   Baisser les Co�ts    3 Zimbabwe
l'Offre            Population                    d'Administration     2 Mali, Afrique du Sud
               �   Population Urbaine        �   R�duire la s�lection 1 Ghana, Nigeria,
               �   Main-d'oeuvre dans            adverse et le Risque S�n�gal, Niger, Soudan,
                   l'Industrie ou le             Moral                  Za�re, Botswana
                   Secteur Formel            �   Engagement des       0 Kenya, C�te-d'Ivoire,
               �   Flux d'Aide � la              donateurs              Guin�e, Zambie
                   Sant�23

C�t� de la     �   Revenu par habitant       �   La volont� et la     Guin�e-Bissau,
Demande        �   D�penses Priv�es              capacit� de payer et Lesotho, Gambie,
                   M�dicales                     �lasticit�-revenu    Namibie
                                                 positive
               �   Offre de M�decins                                  -1 Mozambique,
                                             �   Capacit� du Secteur    Tanzanie, Ouganda
               �   Lits d'H�pital / 1,000
                                                 Priv�                -2 Malawi
                                                                      -3 Ethiopie

128 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



(Ensor, 1999)24. Bien que son �tude ait �tendu le cadre analytique quali-
tatif (Encadr� 6/ Tableau 3), il a utilis� une m�thodologie simplifi�e
d'analyse de faisabilit� adapt�e de celle de Griffin et Shaw (1996). Il a
class� les pays selon quatre des variables structurelles (la densit� de la




  Encadr� 6 : Facteurs qui d�terminent la faisabilit� et les possibilit�s de
  p�renniser l'assurance maladie (Ensor 1999)

  Les trois groupes de facteurs qui servent de variables explicatives pour pr�voir la
  faisabilit� et le caract�re durable de pr�senter l'assurance maladie sont :

  1. les dispositifs de transition qui incluent des facteurs comme la structure de
      l'�conomie et les tendances du march� de l'emploi (par exemple en raison de la pri-
      vatisation, l'urbanisation et du changement du poids relatif des secteurs public et
      priv� dans la prestation de services, etc) ; la r�cession �conomique et le d�clin dans
      la protection sociale suite � la transition ; probl�me de droit (universalit� nominale et
      probl�mes d'�carts entre les contributions et les avantages qu'elles procurent).

  2. les caract�ristiques structurelles qui d�terminent la faisabilit� pour un pays de
      collecter des revenus par le canal des retenues d'imp�ts � la source, comme la
      densit� de la population, la taille de la population urbaine et la proportion d'em-
      ploy�s servant dans le secteur industriel, le niveau de revenu (le produit int�rieur
      brut) et la croissance du revenu (le taux de croissance du produit int�rieur brut).
      Tandis que les trois premiers servent de mandataires pour la facilit� d'enre-
      gistrement et ainsi pour les d�penses administratives, les deux derniers repr�sen-
      tent l'accessibilit� et le caract�re durable. Pour �valuer la faisabilit� de la mise en
      oeuvre de l'assurance maladie, Ensor a utilis� les quatre premi�res de ces va-
      riables pour classer les pays en fonction de leur d�viation compos�e par rapport �
      la moyenne. (Voir les Variables de Score de Faisabilit� dans le Tableau 3).

  3. les caract�ristiques sp�cifiques aux pays qui incluent la capacit� d'emp�cher
      l'utilisation inopportune/frauduleuse de fonds, mesur�e par le degr� de contr�le,
      la comptabilit� et la capacit� d'effectuer des audits pour assurer le contr�le de la
      fraude; et, m�me quand les fonds sont utilis�s convenablement, des d�fis tech-
      niques, pouvant �tre regroup�s en trois grandes cat�gories, g�nent le succ�s des
      m�canismes adopt�s. Ce sont : (a) des questions administratives (par exemple, un
      m�canisme de collecte sous-d�velopp� et des co�ts administratifs excessifs) ; (b)
      gestion financi�re (par exemple, calcul actuariel inad�quat et d�s�quilibre entre
      les avantages per�us et les taux de contribution; investissement inopportun des
      r�serves avec de faibles taux de rendement sp�culatifs) ; et (c) achat inefficace,
      c'est � dire quand le fonds d'assurance joue la fonction limit�e de collecteur de
      contributions, agissant plut�t comme l'acheteur actif responsable de d�cisions
      avec de bons rapports qualit�-prix.

                          L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest     � 129



Tableau 3 : Les Facteurs de Faisabilit� de l'assurance maladie (Ensor 1999)

        Groupes         Facteurs de Faisabilit�              R�le / Importance

1. Dispositifs de       �  structure de l'�conomie           Contexte Global
transition              �  tendances du march� de            - Potentiel � Retardateurs ou
                           l'emploi                              Catalyseurs �
                        �  poids relatif des secteurs public
                           et priv�
                        �  r�cession �conomique et
                           programmes sociaux
                        �  probl�me de l'�cart entre les
                           contributions et les avantages
                           per�us

2. Caract�ristiques     �  FSV i : densit� de la population  D�terminants Fondamentaux
structurelles           �  FSV ii : taille de la population  - � Bloqueurs � Potentiels
Variables de Score de      urbaine                           �   Les trois premiers
Faisabilit� i-iv        �  FSV iii : proportion d'emplois        facteurs repr�sentent la
                           industriels                           faisabilit� administrative.
                        �  FSV iv : niveau de revenu         �   Les deux derniers
                           (produit int�rieur brut par           facteurs repr�sentent la
                           personne)                             faisabilit� financi�re et le
                        �  croissance �conomique                 caract�re durable.
                           (croissance du produit int�rieur
                           brut par personne)

3. Caract�ristiques     �  contr�le de la fraude             Cadre
sp�cifiques au pays     �  capacit� administrative           - � Aider � trouver des
                        �  gestion financi�re                    solutions �

                        �  achat                             �   Aspects Institutionnels et
                                                                 Organisationnels


population, le taux d'urbanisation de la population, le pourcentage de
main-d'oeuvre employ�e dans l'industrie et le revenu par habitant).
L'indice compos� a �t� tir� de la d�viation compos�e de la moyenne des
quatre variables. Un score plus �lev� sugg�re que l'assurance maladie
serait relativement facile � mettre en oeuvre, tandis qu'un score plus bas
sugg�re que ce serait extr�mement difficile et que ces pays feraient peut
�tre mieux d'abandonner l'id�e d'introduire l'assurance.
   Ensor a calcul� des scores de faisabilit� pour deux lots d'�chantil-
lons de pays (Tableau 5 colonnes a � b). Le premier lot a couvert 81
pays, incluant plus de pays � revenu interm�diaire et de pays industri-
alis�s hautement performants compar�s au deuxi�me lot, qui lui a cou-
vert 78 pays. Cette dissimilitude dans les types de pays composant les
deux lots est � l'origine des diff�rences dans les scores de faisabilit� des
pays �tudi�s dans les premier et deuxi�me classements. Essentielle-
ment, la plus forte moyenne et l'�cart-type plus faible ont rendu la

130 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



notation plus sensible et ont cr�� une plus grande dispersion des notes
comme illustr� ci-dessous, qui varient de 2 � � 4 (Tableau 4 colonne a).
Les deux variables macro qui, pour la plupart des pays, ont n�gative-
ment affect� l'�valuation �taient le revenu par personne et la part de la
main d'oeuvre employ�e dans l'industrie.
   En comparant les scores de faisabilit� pour l'ASS obtenus par Griffin
et Shaw � ceux d'Ensor, il est �vident que la plus grande homog�n�it� de
l'�chantillon r�gional et les variables macro additionnelles de demande
appliqu�es par Griffin et Shaw sont � la source de la majeure partie de la
diff�rence de score. En vertu d'une plus grande homog�n�it�, l'�valua-
tion r�gionale fournit un classement plus fin. Quant aux variables addi-
tionnelles portant sur l'offre, �tant donn� que le secteur priv� joue un
r�le de plus en plus important dans beaucoup de ces pays, l'omission de
ces variables biaiserait le classement � la baisse. De cela nous pouvons
conclure que, pour s'approcher d'une faisabilit� et d'une p�rennit�
r�elles, l'homog�n�it� de l'�chantillon et la composition de variables
macro utilis�es (par exemple l'inclusion de variables portant sur l'offre et
li�es au secteur priv�) doivent �tre soigneusement consid�r�es. On s'at-
tend � ce que ces aspects augmentent la validit� du score de faisabilit�.


Tableau 4 : Tableau Comparatif : Score de Faisabilit� de l'assurance maladie en Afrique
Subsaharienne (ASS). Colonnes a et b : (Ensor, 1999); Colonne c : (Griffin et Shaw, 1996)

                                              B
               A                Score de Faisabilit� pour l'AM                C
Score de Faisabilit� de l'AM en en ASS, �tude Globale, Sans les Score de Faisabilit� de l'AM en
      ASS, �tude Globale         pays hautement performants     ASS �tude R�gionale � Griffin
        (n = 81) � Ensor               (n = 78) � Ensor                   et Shaw

2 Afrique du Sud               1 Afrique du Sud                3 Zimbabwe
-1 Botswana, Namibie,          0 Botswana, C�te-d'Ivoire,      2 Mali, Afrique du Sud
   Ghana                          Ghana, Guin�e, Namibie,      1 Ghana, Nigeria, S�n�gal,
                                  Nigeria, Zambie,                Niger, Soudan, Za�re,
                                  Zimbabwe, Za�re                 Botswana

-2 S�n�gal, C�te-d'Ivoire,     -1 Kenya, S�n�gal               0 Kenya, C�te-d'Ivoire,
   Nigeria                                                        Guin�e, Zambie, Guin�e �
                                                                  Bissau, Lesotho, Gambie,
                                                                  Namibie

-3 �thiopie, Gambie, Guin�e,   -2 �thiopie, Gambie,            -1 Mozambique, Tanzanie,
   Kenya, Lesotho, Malawi,        Guin�e � Bissau, Lesotho,       Ouganda
   Ouganda, Zambie,               Malawi, Niger, Tanzanie,     -2 Malawi
   Zimbabwe, Za�re                Ouganda
                                                               -3 Ethiopie
-4 Guin�e � Bissau, Niger,
   Soudan, Tanzanie

                          L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest � 131



Tableau 5 : Classement de Faisabilit� Compos�

                        A              B            C             D            E
Pays               Lot Global 1   Lot Global 2 Lot R�gional   Compos�      Classement

Ghana                  �1              0            1              0            2
Kenya                  �3             �1            0             �4            5
Nigeria                �2              0            1             �1            3
Afrique du Sud           2             1            2              5            1
S�n�gal                �2             �1            1             �2            4
Tanzanie               �4             �2           �1             �7            6


   Le tableau ci-dessus classe les pays choisis selon un score compos�
bas� sur les trois classements de faisabilit� (Tableau 5).
   Le premier lot de score de faisabilit� pour l'Afrique Subsaharienne
tendrait � appuyer l'id�e que l'introduction de l'assurance maladie
dans les pays � faible revenu d'Afrique est une entreprise � haut risque
et, probablement, pr�matur�e. En r�alit�, comme on le voit, un cer-
tain nombre de pays africains � faible revenu se sont engag�s dans de
complexes r�formes d'assurance-maladie, y compris des composantes
d'assurance maladie priv�es et publiques obligatoires. Les cas qui se
pr�tent � l'introduction ou l'expansion de l'AMO sont le Ghana, le
Kenya, le Lesotho, le Malawi, le Mali, le Mozambique, le Nigeria, le
S�n�gal, la Tanzanie et la Zambie. Certains pays semblent avoir sur-
pass� l'allure attendue et la port�e des r�formes d'assurance-maladie.
Un exemple notable est celui du Fonds National d'Assurance maladie
(NHIF) de Tanzanie.
   M�me si on se retrouvait avec le classement le moins favorable, il
est possible de justifier que des pays se trouvant dans la queue gauche
de la distribution avec des scores de faisabilit� entre �4 et �2 veuillent
introduire l'assurance maladie.

� Leur d�veloppement socio-�conomique peut avoir permis d'intro-
   duire des r�formes plus complexes.

� Ils peuvent percevoir l'assurance maladie comme un instrument
   indispensable (in�vitable) qui exige une vision strat�gique � moyen
   ou � long terme et le renforcement des capacit�s et que l'on per�oit
   aussi comme moteur de d�veloppement par des renversements
   positifs qui proviendraient de la nature avant-gardiste de la
   r�forme.

132 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



CONCLUSION

Beaucoup de controverse entoure toujours l'introduction de pro-
grammes publics d'assurance maladie obligatoire dans le monde
entier. Les pays riches sont divis�s en trois camps � ceux qui comptent
toujours sur des dispositifs de financement hi�rarchiques, ceux qui
comptent sur une entente du type � agence � et ceux qui comptent sur
un syst�me bas� sur le march�. Ceux qui comptent sur un syst�me
national de S�curit� Sociale financ� hi�rarchiquement par l'imp�t
g�n�ral incluent des pays comme le Royaume-Uni, les pays nordiques,
l'Italie, l'Espagne, la Gr�ce, le Portugal, etc. Ceux qui comptent plus
sur un m�canisme d'agence d'assurance sociale financ� par un imp�t
sur les salaires incluent des pays comme l'Allemagne, la France, les
Pays-Bas, etc. Et ceux qui comptent plus sur un march� d'assurance
maladie priv�e financ� par des primes incluent des pays comme l'Ir-
lande, la Suisse et les �tats-Unis d'Am�rique.
   Au fil du temps, le pendule a balanc� dans les deux sens. La plupart
des pays d'Europe centrale et d'Europe de l'Est sont pass�s, � partir de
1990, d'un syst�me hi�rarchique bas� sur l'imp�t g�n�ral � un syst�me
d'agence d'assurance sociale financ� par un imp�t sur les salaires. Les
pays scandinaves, le Canada et l'Australie ont pour leur part suivi le
chemin inverse, passant du syst�me d'agence d'assurance sociale � celui
financ� par un imp�t g�n�ral. Les d�cideurs en Suisse et aux �tats-
Unis ont plusieurs fois essay� sans succ�s de passer de l'assurance ma-
ladie priv�e � un syst�me public d'assurance maladie obligatoire.
   La communaut� des donateurs internationaux reste �galement
partag�e. Il y a ceux qui pr�conisent fortement l'approche consistant �
mettre en place un syst�me d'assurance maladie, ceux qui sont assis
sur la touche et ceux qui s'y opposent fortement. Dans certains cas o�
les d�cideurs proposent des syst�mes publics d'assurance maladie
obligatoire dans des pays � faible revenu ou � revenu interm�diaire,
certains donateurs essayent d'�touffer le d�veloppement de tels pro-
grammes. Et il existe aussi des cas o� certains autres donateurs
essayent d'encourager des pays � faible revenu � adopter une telle
politique contre leur volont�
   Ces positions extr�mes sont probablement circonvenues. Le sys-
t�me public d'assurance maladie obligatoire pourrait plut�t �tre, pour
des pays � faible revenu comme en Afrique de l'Ouest, une com-
posante importante d'une nouvelle approche de financement des soins

                       L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 133



de sant� reposant sur plusieurs m�thodes. Il est probable qu'aucun
m�canisme n'ait de chance de r�ussir tout seul � garantir l'atteinte de
tous les objectifs d'un syst�me de financement de la sant� : mobiliser
des ressources pour payer les services n�cessaires, prot�ger les popula-
tions contre le risque financier et d�penser judicieusement sur les
prestataires. Une approche multiforme combinant divers instruments
� comme des subventions, des m�canismes d'assurance, de l'�pargne
contractuelle et des paiements par les usagers � a plus de chances de
r�ussir � atteindre ces objectifs.



NOTES

 1. Traduit de l'Anglais par Aly B. Sy


 2. Classement G�n�ral selon la Performance : S�n�gal � 59 ; Ghana
� 135; Kenya � 140 ; Tanzanie � 156 ; Mali � 163 ; Afrique du Sud �
175 ; Mozambique � 184 ; Nigeria � 187 (OMS 2000).


 3. Rappel : Le Ghana aspire � devenir un pays � revenu interm�di-
aire (PRSP). Cela va de pair avec des aspirations de S�curit� sociale
dans un cadre de revenu interm�diaire. D'autres pays hautement per-
formants en terme de processus de PRSP et des pays avec un niveau
plus �lev� de sensibilit� sociale inh�rente ont aussi adopt� le syst�me
d'assurance maladie obligatoire comme une option dans le cadre de la
r�forme du syst�me de sant�.


 4. Voir A.S. Preker et A. Harding (�diteurs). 2001. Innovations in
Health Service Delivery : Corporatization in the Hospital Sector
Washington : Banque mondiale. Dans d'autres parties du secteur pu-
blic, de telles unit�s autonomes et incorpor�es sont aussi diff�remment
mentionn�es sous les vocables d'agences publiques ou d'ex�cution,
d'organisations publiques ind�pendantes (OPI), d'organisations non
gouvernementales quasi-autonomes (ONGQA) et d'entreprises
publiques (EP). Il n'y a aucune distinction fonctionnelle standard entre
ces diff�rentes modalit�s organisationnelles.


 5. Les Papyri sont d'antiques tablettes d'argile �gyptiennes. J. K.
Mason et R. A. McCall Smith. 1987. Law and Medical Ethics, 2�me

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A History of Medicine, traduit et �dit� par E.B. Krunbhaar, 2�me
�dition.


  6. Dans ce c�l�bre code l�gal cun�iforme de la premi�re Dynastie
babylonienne, 9 des 282 lois portent sur les services de gu�risseurs. Les
lois 215-17 et 221-23 traitent des lois r�gissant les honoraires devant
�tre per�us pour certains services; les lois 218-20 traitent des p�nalit�s �
infliger au gu�risseur dans le cas de r�sultats th�rapeutiques insatis-
faisants et de mort. C. B. Chapman. 1984. Physicians, Law, and Ethics.
New York : New York University Press, pp. 4�5.


  7. Le contr�le de l'adh�sion et du secret, refl�t� dans le Serment
d'Hippocrate, �tait caract�ristique de toutes les professions. British
Medical Association (BMA). 1984. Handbook of Medical Ethics Lon-
dres : BMA, p. 6.


  8. Aujourd'hui, les �tats-Unis, le Mexique et la Turquie sont les
trois exceptions dans l'Organisation de Coop�ration et de D�veloppe-
ment �conomique (OCDE) o� l'acc�s universel n'a pas encore �t�
garanti. Pour un examen de l'introduction de l'universalit� dans
l'OCDE, voir A.S. Preker. 1989. The Introduction of Universality in
Health Care. Londres : IIHS.


  9. Pour une discussion compl�te voir R.G. Evans,. 1984. Strained
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10. Pour une discussion plus exhaustive voir Barer, L. M., T. E. Get-
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1996 World Development Report : From Plan to Market, ch. 8. New
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13. Un des premiers essais faisant �tat de cette approche a �t� publi�
par A. Enthoven. 1978 � Consumer Choice Health Plan, � New Eng-
land Journal of Medicine 298 (12) : 650�58 et 298 (13) : 709�20 ;
A. Enthoven.1988. Theory and Practice of Managed Competition in
Health Care Finance New York : North Holland.


14. Organisation Mondiale de la Sant�, 1999. Rapport mondial sur la
sant� Gen�ve : OMS, 1999 Organisation Mondiale de la Sant�, 1996.
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UNICEF. 1999, State of the World's Children. New York : UNICEF.


15. Pour un examen des probl�mes des services de sant� des anciens
�tats socialistes, voir A.S. Preker et R.G.A. Feachem 1996. Market
Mechanisms and the Health Sector in Central and Eastern Europe,
Technical Paper Series No. 293 Washington : Banque mondiale.


16. La plupart des �conomistes de la sant�, m�me ceux favorisant une
approche de march� plus comp�titive, reconnaissent que le gouverne-
ment doit jouer un r�le significatif dans le secteur de la sant�. Pour une

136 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



revue r�cente et excellente sur ce sujet voir T. Rice. 1998, The Eco-
nomics of Health Reconsidered Chicago : Health Administration
Press. Pour une discussion plus d�taill�e sur la th�orie et les �l�ments
empiriques sur les r�les du public et du priv� dans le financement des
services de sant�, voir P. Musgrove. 1996. Public and Private Roles in
Health : Theory and Financing Patterns. Washington : Banque mon-
diale, et G. Schieber (�diteur). 1996. Innovations in Health Financing
Washington : Banque mondiale.


17. Un succ�s en mati�re de Financement Communautaire : Par
exemple, en Tanzanie, les Fonds de Sant� Communautaire (FSCs) ont
�t� mis sur pied pour puiser dans le bassin que repr�sente la contribu-
tion des communaut�s, am�liorer le partage des risques et l'acc�s et
donner plus de responsabilit� aux m�nages dans les d�cisions de
financement de la sant�. On s'attendrait � ce que ces fonds accroissent
le financement pour la prestation de service, am�liorent l'efficacit� et la
qualit� (m�dicaments et fournitures m�dicales). Le Fonds de Sant�
Communautaire (FSC) a �t� con�u en 1995 et a fait l'objet d'une phase
pilote dans la Zone de l'Igunga en 1996. La phase pilote a fait voir un
usage impropre des m�dicaments, a donn� la voix au pauvre dans la
prestation des soins et a amen� les prestataires � �couter les clients.
Apr�s deux ans, la phase pilote a �t� �tendue � 9 autres districts. Une
�valuation a recommand� une nouvelle extension au reste des districts.
Le FSC est dans la ligne de mire des r�formes du secteur de la sant� et
de celles r�formes des administrations locales. L'adh�sion des m�nages
n'a pas d�pass� 30 %, 60 % auraient �t� un seuil id�al. Cependant, ce
m�canisme est une source potentielle prometteuse de mobilisation des
ressources en Tanzanie. L'exp�rience de mise en oeuvre a r�v�l� une
capacit� accrue en termes d'injection d'une plus grande quantit� de
fonds dans le syst�me. Capacit� de mobilisation des ressources : Entre
1996 et 2002, 1.2 milliards de Tshs ont �t� collect�s par le FSC et le
Conseil de l'Igunga a eu � g�rer environ 500 millions. En moyenne,
cela se traduit par 40 millions de Tshs par an, ce qui, additionn�s aux
contributions �quivalentes, a permis d'atteindre 80 millions. Ceci est
substantiel en termes de flux de ressources pour un district. La couver-
ture de 18 % pourrait �tre augment�e � 45 % dans l'Igunga, �tant
donn� son admissibilit� pour la subvention globale de 150Ko (pour sa
population de 300,000). Avec cette expansion, les revenus pourraient
atteindre 198 millions. Cet accroissement effectivement enregistr� a

                        L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest� 137



augment� la qualit� des soins au niveau du district (fournitures, r�habil-
itation, formation en gestion et en planification, rationalisation de
l'utilisation par l'introduction d'�l�ments de prix au niveau primaire,
etc.). La responsabilisation est une autre fonction centrale. Le partage
des risques et l'�quit� ont aussi �t� des th�mes centraux. Le FSC de l'I-
gunga a montr� la voie pour un syst�me durable de soins de sant� au
niveau du district. Il a �t� reconnu par les autorit�s l�gislatives, les
administrateurs, les managers, la communaut� et les leaders commu-
nautaires. Le FSC est un outil de d�centralisation du processus d�ci-
sionnel et de gestion des services de sant� au-del� du niveau du district,
rendant des soins de sant� �quitables, efficients et efficaces aux commu-
naut�s desservies. Dans le cadre du PRS, l'extension du FSC � plus de
districts est un des indicateurs de la matrice de politiques du PRS.
Ainsi, il contribue significativement � la strat�gie de r�duction de la
pauvret� �labor�e par le gouvernement. Cependant, le FSC n'est pas
sans probl�mes. Une faible couverture des conseils (33 %) et une faible
adh�sion des m�nages (6 %) est loin du seuil de 60 % estim� par le
minist�re de la Sant� en 1995. Quelques questions abord�es ont �t� :
des organes du FSC non fonctionnels, faible niveau de collecte des
redevances � payer par les utilisateurs, mobilisation inad�quate des
communaut�s et plaidoyer insuffisant, nombreux d�fis en mati�re de
gestion et faiblesse de l'appui externe.


18. Politique de Pays et �valuation Institutionnelle (CPIA) : l'index
CPIA comprend 20 indicateurs r�partis en 4 grandes cat�gories : ges-
tion �conomique, politique structurelle, politique pour l'inclusion
sociale et l'�quit�, gestion du secteur public et institutions. Les pays
sont �valu�s selon leur performance actuelle dans chacun de ces crit�res
de performance, par une note allant de 1 (niveau le plus bas) � 6 (niveau
le plus �lev�). Cet index est mis � jour annuellement.


19. Le CPIA et l'Indicateur de Gouvernance Compos� GRICS sont
deux �l�ments compos�s servant � illustrer les performances des pays
�tudi�s en mati�re d'institutions et de gouvernance tant en termes de
niveau que de tendances.


20. Par exemple, la Tanzanie a introduit en 1993 le syst�me de
paiement par les usagers dans les h�pitaux du Gouvernement avec l'ob-
jectif de collecter des revenus additionnels pour l'�cart caus� par l'alloca-

138 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



tion insuffisante fournie par le gouvernement, am�liorer la disponibilit�
et la qualit� des soins, renforcer le syst�me de r�f�rence et rationaliser
l'utilisation mais aussi am�liorer l'�quit� et l'accessibilit�. L'absence
d'�tudes de co�t pour la fourniture de services de sant� a aggrav� le
probl�me qui consistait � �tablir des prix r�alistes. L'�valuation n'�tait
bas�e sur aucune �tude r�aliste de co�ts (Banque mondiale 2003). Au
Kenya, le syst�me de paiement par les utilisateurs �tait bas� sur l'hy-
poth�se que la majorit� des gens avaient la capacit� de payer pour les
soins au lieu et au moment du traitement. Ceci, cependant, n'est pas fais-
able dans un pays o� 56 % de la population vit au-dessous du seuil de
pauvret�. Le niveau �lev� de d�penses pay�es directement par les utilisa-
teurs, qui inclut le partage des co�ts, a support� et a renforc� la pauvret�
dans les m�nages kenyans. Dans ce contexte de pauvret�, il est n�cessaire
de r�duire le fardeau des d�penses de sant� des m�nages, d'assurer
l'�quit� et l'acc�s aux soins et d'am�liorer la qualit� des services. La
r�forme d'assurance maladie propos�e doit assurer que les Kenyans
payent de petites contributions r�guli�res au Fonds National d'Assu-
rance Maladie (NSHIF) avant d'�tre malade et non pas au point de
service (Carrin et James 2003 ; Carrin et Korte 2003).


21. L'articulation correspond � ce que Chernichovsky (2002) appelle
� l'organisation et la gestion de la consommation de soins � (fonction
OMCC).


22. La m�thode a not� la performance de chaque pays pour les huit
variables macro. Pour chaque caract�ristique, un pays a re�u +1 si la
valeur �tait un �cart-type au-dessus ou �1 si c'�tait un �cart-type au-
dessous de la valeur moyenne pour l'Afrique Subsaharienne. Avec un
poids �gal pour toutes les variables, le score maximal possible qu'un
pays pourrait obtenir �tait +8, tandis que le minimum �tait �8.


23. Les flux de capital pourrait se r�f�rer � l'aide des donateurs mais
incluent l'investissement domestique et international, etc. Pour le
Nigeria, les flux de capital domestique et l'implication du secteur priv�
sont tout aussi appropri�s.


24. Les Cara�bes sont inscrites s�par�ment de l'Am�rique latine
(LAC) contrairement � la classification de la Banque mondiale.

                            L'assurance maladie obligatoire en Afrique de l'Ouest      � 139



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        Atteindre la couverture universelle :
               Le d�veloppement du syst�me de
                                                              financement

                              Guy Carrin, Chris James, David Evans




   R�sum� : Pour assurer la couverture universelle dans les pays qui n'y sont pas
   encore parvenus, il faudra d�velopper le pr�paiement tout en reposant moins
   sur les paiements directs et la participation financi�re des usagers. Cela peut
   �tre fait par un syst�me de financement par l'imp�t plus �tendu et plus
   �quitable, un r�gime d'assurance maladie obligatoire, ou les deux � la fois. Les
   principales d�cisions � prendre lors de la transition pour mieux assurer les fonc-
   tions de financement de la sant� � collecte des fonds, mise en commun des
   ressources, achat ou prestation des services-sont indiqu�es ici.




QU'EST-CE QUE LA COUVERTURE UNIVERSELLE
ET COMMENT Y PARVENIR ?

La couverture universelle1 signifie que tous les individus, au moment
o� ils en ont besoin, ont acc�s � des soins adapt�s et d'un co�t abor-
dable, qu'il s'agisse de la promotion de la sant�, de la pr�vention, du
traitement ou de la r�adaptation2. Elle suppose donc un acc�s �quitable
et une protection contre le risque financier. Elle repose �galement sur la
notion de financement �quitable : la contribution est proportionnelle
� la capacit� de payer, ind�pendamment du fait qu'on soit malade ou


                                                                                     149

150 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



non. Il en r�sulte qu'une grande part du financement doit provenir de
contributions anticip�es et mises en commun, plut�t que de frais et
d'honoraires factur�s au malade quand il consulte les services3.
   Pour instaurer la couverture universelle, il faut faire des choix �
propos de chacun des trois �l�ments dont se compose le syst�me de
financement des services de sant� :

� collecte de fonds : les contributions financi�res au syst�me doivent �tre
   collect�es de mani�re �quitable et rationnelle ;

� mise en commun des ressources : les contributions sont regroup�es afin
   que les d�penses de sant� soient r�parties entre tous les cotisants, et
   non � la charge de chacun d'eux quand il est malade (ce qui suppose
   un certain degr� de solidarit� sociale) ; et,

� achat : les cotisations sont utilis�es pour acheter ou fournir des
   prestations adapt�es et efficaces.


   Les pays qui ont atteint la couverture universelle ont mis en place
des syst�mes de pr�paiement qui reposent soit sur la fiscalit�, soit sur
un r�gime d'assurance maladie obligatoire4. Dans le syst�me fond� sur
l'imp�t, les recettes fiscales g�n�rales sont la principale source de
financement, et l'�tat utilise les fonds pour fournir ou acheter les
services de sant�. Dans le syst�me d'assurance maladie obligatoire, les
contributions �manent des salari�s, des travailleurs ind�pendants, des
entreprises et de l'�tat. Dans les deux cas de figure, les cotisations
sont mises en commun et seuls ceux qui en ont besoin b�n�ficient des
prestations. Les risques financiers li�s aux probl�mes de sant� de la
population dans son ensemble sont r�partis entre tous les cotisants, et
la mise en commun des fonds remplit donc une fonction d'assurance.
Dans un syst�me bas� sur l'imp�t, l'assurance est implicite (en
g�n�ral, le contribuable ignore quelle proportion de ses imp�ts sert �
financer les services de sant�), tandis que dans un syst�me d'assurance
maladie obligatoire, elle est explicite (les cotisants savent combien ils
versent pour la sant�). Mais dans les deux syst�mes, les fonds sont
g�n�ralement utilis�s pour acheter ou assurer les services en faisant
appel � la fois � des prestataires publics ou priv�s. En r�gle g�n�rale,
les contributeurs individuels ont droit � un ensemble sp�cifique de
prestations ; dans les syst�mes de financement par l'imp�t, les
enveloppes de prestations sont �galement fonction du type de services

 Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 151



disponibles ou du moment auquel ils peuvent �tre utilis�s, mais elles
ne sont pas toujours d�finies en d�tail.
   Les pays ont tr�s souvent un syst�me de financement mixte, o� cer-
tains groupes sont couverts par l'assurance maladie obligatoire et le reste
de la population par les recettes fiscales g�n�rales. Dans presque tous les
syst�mes, les individus ou les m�nages paient encore directement une
partie des services dont ils b�n�ficient (honoraires ou participation finan-
ci�re pour les consultations, m�dicaments, examens, hospitalisation,
etc.), mais ces paiements repr�sentent g�n�ralement une faible propor-
tion des d�penses de sant� totales, alors qu'ils sont bien plus importants
dans les pays qui n'ont pas encore la couverture universelle.



TRANSITION VERS LA COUVERTURE UNIVERSELLE

Au d�but de la transition, la couverture est encore partielle, et les
groupes les plus pauvres sont souvent les moins bien prot�g�s. Les
frais et les honoraires dont doivent s'acquitter les m�nages quand ils
utilisent les services restent tr�s importants. Dans les �tapes suivantes,
il faudra passer du paiement direct au paiement anticip�, en combi-
nant �ventuellement diff�rentes formules de pr�paiement, pour
prot�ger la population des risques financiers tout en r�unissant suf-
fisamment de fonds pour fournir les services. Le pr�paiement peut
prendre la forme d'assurance maladie communautaire, de r�gime de
type coop�ratif, d'assurance par l'entreprise, d'autres formes d'assu-
rance priv�e, et d'une assurance maladie obligatoire pour certaines
cat�gories de personnes. Presque toutes les formules n�cessiteront le
maintien d'un financement plus ou moins important par l'imp�t
(Graphique 1). Les m�canismes en place au stade interm�diaire ne
dispara�tront pas n�cessairement une fois que la couverture uni-
verselle sera atteinte. Ils peuvent m�me se r�v�ler d'importants
m�canismes institutionnels sur lesquels s'appuyer. Par ailleurs, dans
chacun des m�canismes de la couverture universelle, on peut recourir
� l'assurance maladie priv�e pour financer les services qui ne font pas
partie de l'enveloppe universelle de prestations.
   L'un des probl�mes cruciaux de la transition est la fragmentation entre
une multitude de petites caisses. Elles sont parfois si petites qu'elles
courent un risque financier ou font faillite quand plusieurs adh�rents ont
besoin de soins co�teux en m�me temps. Les responsables politiques

152 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



doivent s'assurer d�s les premi�res �tapes qu'il existe des m�canismes
structurels � ou mesures de p�r�quation du risque � pour transf�rer les
fonds des caisses pour lesquelles le risque est faible, � celles qui sont plus
expos�es. En outre, quand les caisses fonctionnent selon des crit�res g�o-
graphiques ou sont autoris�es � n'assurer que les personnes favoris�es ou
en bonne sant�, certaines sont plus riches que d'autres ; d'o� des in�ga-
lit�s d'acc�s aux services, contre lesquelles l'�tat se doit d'agir en r�gle-
mentant l'affiliation aux caisses.



RAPIDIT� DE LA TRANSITION

Quel que soit le m�canisme de financement qu'un pays d�cide
d'adopter, la transition vers la couverture universelle peut prendre
plusieurs ann�es, voir plusieurs dizaines d'ann�es. Il s'est ainsi �coul�
36 ans au Japon entre la promulgation de la premi�re loi sur l'assu-
rance maladie et celle qui a institu� la couverture universelle. Il a fallu
aussi beaucoup de temps au Royaume-Uni pour instaurer un syst�me
universel bas� sur l'imp�t.
   La rapidit� du passage � la couverture universelle d�pend de
plusieurs facteurs. Parmi ceux qui ont tendance � acc�l�rer la transi-
tion figurent : une forte croissance �conomique, la population ayant
alors les moyens de cotiser davantage au syst�me de financement de la
sant� ; l'essor du secteur structur�, qui facilite l'estimation des revenus
et le pr�l�vement des cotisations ; et un personnel qualifi� capable
d'administrer un syst�me national. Les autres �l�ments qui facilitent la
transition sont l'adh�sion de la soci�t� au principe de solidarit�, la
bonne gestion des affaires publiques et la confiance que la population
fait au gouvernement.



DEGR� DE PR�PAIEMENT

Il est rare que la totalit� des d�penses de sant� soient couvertes par le
pr�paiement. La plupart des syst�mes pr�voient, � un degr� ou � un
autre, la participation aux frais ou la r�mun�ration � l'acte par les par-
ticuliers ; cette formule aide par ailleurs � �viter la surconsommation
(m�dicaments, examens, hospitalisations). Il est primordial que les

 Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 153



Graphique 1 : La transition vers la couverture universelle


                                                                       Couverture
                                                                       universelle

                                                                   � Financement par l'imp�t
                                                                   � Assurance maladie obligatoire
                                                                   � Combinaison de financement par
                                                                     l'imp�t et de divers types
                                                                     d'assurance maladie
                             Etapes interm�diaires
                                de la couverture

                               � Combinaison d'assurance maladie
                                 communautaire, de r�gimes de type
                                 comp�ratif ou d'assurance par l'entreprise,
                                 d'autres formes d'assurance priv�e, de
                                 l'assurance maladie obligatoire pour certains
        Absence de               groupes et du financement par l'imp�t
    protection financi�re

 � paiement direct des soins



paiements directs lors de la prestation des services ne repr�sentent pas
une d�pense telle qu'ils r�duisent l'acc�s aux soins ou exposent les
malades � d'importants risques financiers.
   A titre d'illustration, la Graphique 2 indique le degr� de pr�paiement
dans les 30 pays de l'Organisation de coop�ration et de d�veloppement
�conomiques (OCDE), qui tous ont d�j� instaur� ou sont en voie d'in-
staurer la couverture universelle. Comme on le voit, � l'exception de
trois d'entre eux, tous couvrent la majeure partie de leurs d�penses de
sant� par le paiement anticip� et la mise en commun des ressources, et
dans 21 d'entre eux la part du pr�paiement d�passe 70 %.



QUEL(S) M�CANISME(S) DE FINANCEMENT
LES PAYS DOIVENT-ILS CHOISIR ?

Il n'y a pas de syst�me de collecte des contributions meilleur que les
autres en toutes circonstances ou qui pr�sente de nets avantages du
point de vue des r�sultats sanitaires, de la r�ponse aux besoins des
patients et de l'efficience. D'ailleurs, 15 des pays de l'OCDE ont un
syst�me o� l'assurance maladie obligatoire domine, 12 ont un syst�me
fond� sur l'imp�t et 3 un syst�me mixte.
   Il faut cependant faire des choix importants quel que soit le type de
m�canisme retenu.

154 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� Efficacit� administrative et transparence. Le financement par l'imp�t se
  distingue souvent par son efficacit� concernant la perception des
  recettes, car les fonds passent directement du minist�re des finances
  � celui de la sant�, pour �tre ensuite affect�s aux services de sant� ou
  aux districts du pays. En revanche, l'assurance maladie obligatoire
  peut s'av�rer une m�thode de financement plus transparente, car les
  m�nages et les entreprises cotisent directement et b�n�ficient d'un
  ensemble de prestations pr�d�fini. Quand il existe plusieurs caisses
  d'assurance, les particuliers peuvent �tre en partie libres de s'affilier �
  celle de leur choix. Mais dans les pays pauvres o� le secteur non
  structur� est tr�s important, il est difficile de savoir combien les gens
  gagnent et, par cons�quent, de pr�lever les imp�ts et les cotisations �
  l'assurance maladie. Il est important en ce cas de trouver les moyens
  de collecter les contributions de fa�on plus efficace et plus �quitable.

� Stabilit� du financement. Aucun syst�me ne pr�sente un net avantage
  de ce point de vue. Les syst�mes fond�s sur l'imp�t tirent leur
  revenu d'un vaste ensemble de sources, le d�bat de politique
  g�n�rale portant souvent sur le pourcentage des recettes qu'il con-
  vient d'allouer � la sant�. A l'inverse, dans les syst�mes d'assurance
  maladie obligatoire, il s'agit plut�t d'�viter de d�pendre exclusive-
  ment des retenues sur les salaires, en recourant par exemple � des
  subventions de l'�tat.

� Equit�. Aucune m�thode ne semble l'emporter sur les autres dans tous
  les cas. Dans les syst�mes fond�s sur l'imp�t, l'�quit� du financement
  d�pend du caract�re plus ou moins progressif ou r�gressif de la fisca-
  lit�. Dans les syst�mes d'assurance maladie obligatoire, la question est
  de savoir si les cotisations sont les m�mes pour tous les assur�s ou si
  elles varient selon le revenu. Dans le premier cas, la m�thode est
  r�gressive. Autre point important : tous les assur�s b�n�ficient-ils de la
  m�me enveloppe de prestations ? L� encore, dans les syst�mes de
  financement par l'imp�t comme dans les syst�mes d'assurance ma-
  ladie obligatoire, la situation est parfois �quitable, parfois non. Quel
  que soit le type de syst�me, il faut donc choisir avec soin les m�thodes
  qui vont permettre de collecter �quitablement les contributions et de
  garantir un acc�s �quitable aux services.

� Mise en commun. Les deux types de syst�me pr�sentent des risques de
  fragmentation des ressources s'il n'y a pas de r�glementation. Dans

 Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 155



   les syst�mes bas�s sur l'imp�t, la fragmentation sera g�ographique,
   surtout quand il y a une grande d�centralisation. Dans les syst�mes
   d'assurance maladie obligatoire, ce sont les caisses qui sont fragmen-
   t�es, l'affiliation pouvant se faire d'apr�s des crit�res autres que le
   lieu de r�sidence, par exemple la profession. Dans les deux syst�mes,
   il doit exister des mesures de p�r�quation du risque pour rem�dier
   aux disparit�s et faire en sorte que les caisses peu nanties offrent la
   m�me gamme de services de sant� que les caisses plus riches.


   Achat. Tous les syst�mes de financement de la sant� font face � des
probl�mes similaires : fournir les services de sant� ou les acheter,
d�finir les prestataires et choisir les m�canismes de financement. Le
fait que l'�tat joue un r�le crucial dans la collecte des contributions ne
signifie pas n�cessairement qu'il doit assurer les prestations. La plu-
part des syst�mes allient plusieurs m�thodes de prestation de services
faisant appel � la fois aux prestataires publics et aux prestataires priv�s
� but lucratif ou non lucratif. De la m�me fa�on, les deux types de sys-
t�me utilisent plusieurs m�thodes pour acheter les soins en dehors du
secteur public, le principal objectif �tant d'inciter les dispensateurs �
fournir des prestations bien adapt�es et de grande qualit�.
   Les responsables politiques qui souhaitent conduire leur pays vers la
couverture universelle doivent donc prendre d'importantes d�cisions
concernant les modalit�s de collecte et de mise en commun des


Graphique 2 : Taux de pr�paiement dans les pays de l'OCDE

                          14

                          12

                          10
             pays
                 de        8
                                                              13
                           6

                   Nombre  4                                           7

                           2                      4
                                 3
                                        2
                                                                                1
                           0
                                40%�    50%�      60%�        70%�     80%�    90%+
                                50%     60%       70%         80%      90%

                                                Taux de pr�paiment*

      * D�penses de sant� prises en charge par le syst�me de financement de la couverture uni-
      verselle par rapport aux d�penses de sant� totales (OMS, 2005).

156 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



contributions, de prestation ou d'achat des services, quel que soit le
syst�me de financement pour lequel ils optent. Leur pr�f�rence pour
tel ou tel m�canisme d�pendra sans doute de l'histoire de celui-ci ainsi
que des contraintes et des possibilit�s sociales, �conomiques et poli-
tiques. L'un des facteurs d�cisifs est le contexte structurel, qui permet
de s'appuyer ou non sur les institutions existantes. Par exemple, quand
un pays a d�j� un syst�me de financement par l'imp�t qui fonctionne
bien, il peut �tre judicieux de poursuivre dans cette voie. A l'inverse, s'il
existe depuis longtemps des mutuelles de sant� ou des caisses maladie
priv�es, le pays d�cidera peut-�tre de s'appuyer sur cette base. Quoi
qu'il en soit, une bonne gestion des affaires publiques et une forte volont�
politique d'entreprendre les r�formes n�cessaires sont essentielles.
   La situation �conomique est un autre facteur important. Un syst�me
bas� sur l'imp�t semblera tr�s indiqu� quand l'�conomie est solide et
la croissance forte, car on peut alors compter durablement sur les
finances publiques. Par contre, un syst�me d'assurance maladie obli-
gatoire semblera mieux convenir en p�riode prolong�e de restrictions
budg�taires, car il permet de mettre d'autres acteurs � contribution et
d'affecter d'embl�e les ressources financi�res qui en r�sultent � la
sant�. Cette option peut toutefois avoir des effets n�gatifs sur l'em-
ploi, surtout dans les pays � faible revenu (si le financement de l'assu-
rance maladie obligatoire d�pend trop des retenues sur les salaires), et
la gestion peut poser probl�me (notamment l'enregistrement et le
pr�l�vement des cotisations des travailleurs ind�pendants et des tra-
vailleurs du secteur non structur�).
   Quelle que soit la fa�on dont les fonds sont collect�s, il faut prendre
des d�cisions �clair�es sur les moyens de les mettre en commun et de
s'en servir pour acheter ou fournir les services. C'est en partie pour
cette raison qu'on trouve une si large gamme de m�canismes struc-
turels dans les pays qui ont instaur� la couverture universelle.



LE D�FI POUR LES PAYS � BAS REVENUS

Il est certain que les pays � bas revenus comme ceux de l'Afrique
subsaharienne sont confront�s � un d�fi particulier. D'un c�t� la cou-
verture universelle se pr�sente g�n�ralement comme un objectif pri-
mordial dans ces pays. De l'autre, les contraintes �voqu�es ci-dessus

 Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 157



sont tellement lourdes pour ces pays qu'il ne sera pas facile d'avancer
rapidement (voir Encadr� 1). En plus particulier, l'ajustement et/ou
la mise en place des institutions, y compris les m�canismes pour la
collecte des contributions, demanderont une attention permanente
de la part des d�cideurs nationaux. En effet, une le�on primordiale de
l'histoire des m�canismes de financement dans les pays avanc�s est
que, dans la plupart des cas, l'�tat est rest� un acteur actif aussi bien
dans le d�veloppement des institutions que dans le financement ou
co-financement de la couverture universelle. N�anmoins, ces
d�cideurs nationaux ne devraient pas �tre seuls dans le d�veloppe-
ment du syst�me de financement. L'�largissement de la couverture
pourrait �tre facilit� par un engagement financier soutenu de la part
des donateurs. Egalement, les d�cideurs peuvent s'appuyer sur les
institutions existantes au niveau des communaut�s. Par exemple, dans
un certain nombre de pays � bas revenus, des r�gimes locaux d'assu-
rance pourraient bien jouer un r�le dans le d�veloppement graduel
de la couverture universelle. Finalement, la formation de partenariats
entre l'�tat, les communaut�s et les donateurs pourrait constituer un
support consid�rable pour ces pays confront�s � diverses contraintes
et � des probl�mes de formulation de sc�narios appropri�s pour le
d�veloppement de la couverture universelle.



CONCLUSION

Le choix d'un pays pour un syst�me de financement doit �tre guid�
par la recherche de la meilleure mani�re d'atteindre la couverture
universelle, en tenant compte de sa situation pr�sente. Le pr�-
paiement, la mise en commun des ressources et la r�partition des
risques sont les principes de base pour garantir l'acc�s aux services et
la protection financi�re. La couverture universelle n'est r�alisable
que s'il existe des institutions qui mettent en commun les fonds ver-
s�s � l'avance et qui s'en servent pour fournir les services (promotion
de la sant�, pr�vention, traitement et r�adaptation) de fa�on
efficiente et �quitable. Les pouvoirs publics doivent jouer un r�le
important en orientant le processus tout en conservant un certain
pragmatisme pendant la transition afin de r�pondre aux changements
sociaux ou �conomiques.

158 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




  Encadr� 1 : L'Institut National de Pr�voyance Sociale du Cap Vert (INPS) :
  20 ans apr�s sa cr�ation, les d�fis restent importants5

  En 2002, les d�penses totales de sant� au Cap Vert repr�sentaient 4.5 % du PIB (en-
  viron 29 millions US$), soit une d�pense moyenne par habitant de 65 US$. 82 % des
  d�penses �taient publiques : 54 % par le Minist�re de la sant� (MS), 28 % par la s�cu-
  rit� sociale (INPS), et le financement priv�, incluant les d�penses personnelles
  repr�sentait 18 % (1.1 % des d�penses totales des m�nages). La proportion du
  budget de l'�tat consacr� � la sant� �tait de 7 %. Le financement par l'aide ext�rieure
  s'�levait � 16 %, le deuxi�me plus important d'Afrique. Ces donn�es sugg�rent que la
  part publique des d�penses de sant� n'est que peu extensible, alors les contributions
  des m�nages pourraient vraisemblablement augmenter.
     L'INPS a �t� cr�� il y a une vingtaine d'ann�es pour couvrir les salari�s du secteur
  priv�. Avec les � ayant droits �, on estime qu'environ 30 � 40 % de la population du
  Cap Vert est couverte par l'INPS. Il y a actuellement 98.516 b�n�ficiaires dans le sys-
  t�me, y compris 4.000 pensionn�s. L'INPS se finance par une taxe de 8 % sur les
  salaires, partag�e entre l'employeur et l'employ�.
     La caisse d'assurance maladie conna�t un d�ficit croissant : la d�pense moyenne
  par b�n�ficiaire est de 28.000 ECV6 (240 US$), dont presque la moiti� est consacr�e aux
  remboursements des m�dicaments. Les hospitalisations viennent en seconde position
  avec 27 %. Le paiement est par forfait : les affili�s utilisent les �tablissements publics,
  pour lesquels l'INPS contribue � hauteur de 100 millions de ECV, dont 60 millions vers�s
  au Tr�sor et 40 millions vers�s directement aux h�pitaux. Le montant de ce transfert
  n'a pas �t� actualis� depuis plus de dix ans, de sorte que le MS subventionne main-
  tenant fortement les services de sant� au profit des b�n�ficiaires de l'INPS. Enfin, les
  �vacuations sanitaires vers le Portugal repr�sentent 12 % du budget. L'INPS contracte
  des fournisseurs priv�s pour des services de soins dentaires, de physioth�rapie et
  autres. L'INPS est le principal financier des m�dicaments, selon un syst�me du tiers
  payant (les pharmacies priv�es facturent l'INPS directement). Beaucoup de non
  assur�s ou de fonctionnaires7 utilisent frauduleusement des cartes d'affili�s.
     On estime que plus de 95 % de la population ne paient pas d'honoraires aux �ta-
  blissements de sant�, mais paient seulement un � ticket mod�rateur � symbolique de
  50 ECV. M�me avec un faible niveau de recouvrement, les honoraires comptent pour
  15.5 pour cent des revenus de l'h�pital de Praia par exemple, en comparaison aux 5.6
  pour cent qui sont obtenus de l'INPS et des 2.4 pour cent obtenus d'assurances
  priv�es.

  Les principales causes de la crise financi�re
  Bien que la d�pense totale de sant� du gouvernement du Cap Vert soit cons�quente,
  le syst�me de services publics conna�t une s�rieuse crise financi�re. Les causes

Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 159




  principales sont : (i) un d�ficit croissant � l'INPS, qui a atteint 13 millions US$ en 2002
  (compar� � un budget de 8 millions US$ la m�me ann�e), (ii) un taux tr�s �lev� et en
  croissance rapide de d�penses en m�dicaments, et (iii) une augmentation de la
  demande des soins, li�e � la transition �pid�miologique et � une croissance des
  revenus personnels.

  Quelques pistes de solution . . .
  Une assurance universelle �largirait le partage du risque et r�duirait les cas de
  fraude. Les salari�s du priv� �tant d�j� couverts, l'objectif est donc d'�tendre la cou-
  verture aux fonctionnaires et au secteur informel. L'informatisation des cartes de
  protection sociale permettrait aussi un meilleur suivi des patients. Une meilleure ges-
  tion des produits pharmaceutiques permettrait des �conomies substantielles, et ainsi
  d'�tendre la couverture du risque maladie � d'autres cat�gories professionnelles.
  Pour contenir les d�penses de m�dicaments, l'INPS a mis en place un syst�me de
  vignettes. Une loi qui permettrait de moduler le taux de remboursement des m�dica-
  ments (entre 20 et 60 %) a �t� vot�e, ainsi qu'une liste plus restrictive de m�dica-
  ments essentiels remboursables. Une autre loi est en pr�paration pour l'affiliation
  des professions lib�rales sur la base d'un forfait fix� selon leurs activit�s.
      Une informatisation ambitieuse des principaux h�pitaux a �t� lanc�e, ce qui devrait
  permettre de mieux g�rer le paiement des hospitalisations. Enfin, une augmentation
  des contributions des usagers, tout en prot�geant les plus pauvres, pourrait g�n�rer
  de nouveaux revenus et favoriser une am�lioration du panier de services.
      En somme, apr�s 20 ans, une partie importante de la population (le secteur priv�
  et leurs ayants droit) est couverte par une assurance maladie obligatoire (AMO),
  mais il reste environ un tiers de la population qui n'a pas de couverture. Le r�gime
  AMO souffre de dysfonctionnements majeurs, nomm�ment une utilisation abusive
  par les adh�rents et des individus autres que les ayants droit et l'AMO ne paie pas le
  prix r�el des hospitalisations. Le public se trouve � financer l'AMO du secteur priv�.
  Une d�marche visant � rendre l'AMO universelle aiderait � r�gler ces probl�mes.

  Sources:

  �   Banque mondiale. 2004. Cape Verde : Development Policy Review, Document
      interne

  �   Vinard, P. 2003. Etude sur le financement des services de sant�, Praia : Minist�re
      de la Sant�, R�publique du Cap Vert.

  �   Whitehouse, E., INPS : diagnosis and reforms (non dat�, non-publi�)

160 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



NOTES

Ce chapitre est bas� sur une note non-officielle de l'OMS, notamment
G. Carrin, C James et D Evans (2005). Les auteurs tiennent �
remercier A. Akal, D. Bayarsaikhan, T. Evans, A. Kebe, J. Kutzin, B.
Sabri, H. Salehi, J. Kirigia, M. Skold et E. Villar pour leurs commen-
taires et suggestions. Les opinions exprim�es dans le pr�sent chapitre
sont celles des auteurs et ne refl�tent pas n�cessairement la position
officielle de l'Organisation mondiale de la Sant�.


 1. Ici la notion de'couverture universelle' est �quivalente � celle
de'couverture sant� universelle'.

 2. Voir le document d'information � � Financement durable de la
sant�, couverture universelle et syst�mes de s�curit� sociale � sur lequel
s'appuie la r�solution adopt�e par l'Assembl�e mondiale de la Sant�
(r�solution WHA58.33), www.who.int/health_financing.

 3. Voir le r�sum� technique pour d�cideurs n�2 sur la conception des
syst�mes de financement de la sant� en vue de r�duire les d�penses de
sant� catastrophiques (Ke Xu et al., 2005).

 4. Ici la notion d'assurance maladie obligatoire est �quivalente � celle
de l'assurance maladie sociale.

 5. Note pr�par�e par St�phane Legros, Institut de la Banque mondiale

 6. US$ 1 = 117ECV

 7. Il y a approximativement 44.000 fonctionnaires au Cap Vert, qui,
avec leurs d�pendants, repr�sentent approximativement un tiers de la
population totale. Ces personnes ont acc�s aux �tablissements publics
(soins et m�dicaments) sans aucune charge si ce n'est un co-paiement
symbolique.



BIBLIOGRAPHIE

Carrin, G., C. James, et D. Evans. 2005. � Atteindre la couverture universelle : le
    d�veloppement du syst�me de financement �, dans R�sum� technique pour d�cideurs,

Atteindre la couverture universelle : Le d�veloppement du syst�me de financement � 161



    nr.1. Gen�ve : World Health Organization, Department of Health Systems
    Financing.

World Health Organization. 2005. Comptes nationaux de sant�. Gen�ve : World Health
    Organization, Department of Health Systems Financing.

Xu, K., D. Evans, G. Carrin, et A. M. Aguilar-Rivera. 2005. � Syst�mes de finance-
    ment de la sant� : Comment r�duire les d�penses catastrophiques �, dans R�sum�
    technique pour decideurs, nr.2. Gen�ve : World Health Organization, Department of
    Health Systems Financing.


                                                                          CHAPITRE 5



Aide ext�rieure au secteur de la sant� �
               Choix des instruments et enjeux

                                   Jacky Mathonnat, Martine Audibert




R�sum� : Le d�veloppement de l'assurance maladie fait l'objet d'un int�r�t
croissant de la part des pays africains (�tats et soci�t� civile) et de leurs parte-
naires au d�veloppement. Il y a un assez large consensus pour consid�rer que
l'appui � la mise en place et � l'extension de l'assurance maladie obligatoire et
volontaire est un domaine dans lequel l'aide internationale devrait s'engager
plus qu'elle ne le fait actuellement. Par ailleurs, l'�largissement comme la
p�rennisation de l'assurance maladie sont tributaires de l'efficacit� et de l'effi-
cience des structures de soins et du syst�me de sant� dans son ensemble. Or ce
dernier b�n�ficie depuis le d�but de la d�cennie d'un volume d'aide ext�rieure
en notable augmentation. Ce chapitre se propose ainsi d'examiner certaines
grandes questions soulev�es par l'utilisation des principaux instruments de
financement ext�rieur (aide projet, aide programme, affectation, aide budg�-
taire globale) mobilisables pour apporter une aide au secteur de la sant�, et ce
plus particuli�rement dans le contexte des pays d'Afrique au sud du Sahara.
    Il appara�t qu'il n'y a pas un instrument de financement � privil�gier. Chacun
poss�de ses avantages et ses inconv�nients. Il convient donc d'�tre tr�s pragma-
tique. Les avantages et les inconv�nients de chaque instrument d�pendront de la
sp�cificit� de chaque projet ou programme et de nombreux �l�ments contextuels. Il
est essentiel de choisir entre les diff�rents instruments � l'issue d'une analyse
soign�e des objectifs de l'action envisag�e dans leur environnement interne (propre
au secteur de la sant�) et externe (au-del� du secteur). Il convient d'accorder la
plus grande attention au cadre macro-�conomique, au processus de pr�paration et
d'ex�cution budg�taire et � la qualit� des institutions, �l�ments qui auront une

                                                                                    163

164 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   incidence forte sur les r�sultats des politiques ou des interventions soutenues par
   l'aide. Enfin, la question du financement de l'aide � la sant� par dons ou par pr�ts
   ne peut �tre ignor�e dans le cadre d'une r�flexion sur le financement de la sant� et
   l'espace budg�taire dans une perspective de moyen et long terme.
       Dans les pays africains, la fongibilit� est probablement assez faible pour le
   secteur sant� dans son ensemble. De ce fait, m�me si la non affectation de l'aide
   est ce vers quoi il faut tendre, son affectation y conserve un int�r�t probable-
   ment plus grand que dans la plupart des autres secteurs. Le recours � un
   � swap � pr�sente de nombreux avantages, mais seulement l� o� le cadre insti-
   tutionnel et l'environnement macro-�conomique forment un contexte favorable
   � la mise en place de ce type d'approche.
       Il est n�cessaire d'int�grer dans le choix d'un instrument d'aide au secteur
   sant� une r�flexion approfondie sur les incitations qui, du point de vue de cha-
   cune des parties prenantes, seront g�n�r�es directement ou implicitement par la
   formule retenue. C'est une dimension fondamentale de la probl�matique du
   financement ext�rieur de la sant�, � la fois pour le succ�s des interventions et
   pour leur p�rennit�.



INTRODUCTION

Le d�veloppement de l'assurance maladie fait l'objet d'un int�r�t
croissant de la part des pays africains (�tats et soci�t� civile) et de leurs
partenaires au d�veloppement. Il y a un assez large consensus pour
consid�rer que l'appui � la mise en place et l'extension de l'assurance
obligatoire et volontaire est un domaine dans lequel l'aide interna-
tionale devrait s'engager plus qu'elle ne le fait actuellement. Par
ailleurs, l'�largissement comme la p�rennisation de l'assurance mal-
adie sont tributaires de l'efficacit� et de l'efficience des structures de
soins et du syst�me de sant� dans son ensemble. Or ce dernier b�n�fi-
cie depuis le d�but de la d�cennie d'un volume d'aide ext�rieure en
notable augmentation. Cette �volution est largement due � la mise en
oeuvre des strat�gies de r�duction de la pauvret� en liaison avec l'ini-
tiative en faveur des pays pauvres tr�s endett�s (IPPTE) d'une part, et
� la croissance des ressources au titre des Fonds globaux d'autre part.
Ce chapitre se propose ainsi d'examiner un ensemble de questions
soulev�es par l'utilisation des principaux instruments de financement
ext�rieur (aide projet, aide programme, affectation, aide budg�taire

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 165



globale) mobilisables pour apporter une aide au secteur de la sant�, et
ce plus particuli�rement dans le contexte des pays d'Afrique au sud du
Sahara.
   Ce chapitre s'articule comme suit. La section suivante pr�sente la
grille d'analyse retenue. Puis nous rappelons bri�vement certaines
conclusions de la litt�rature relative aux effets de l'aide sur la crois-
sance parce qu'elles pr�sentent des �clairages tr�s utiles pour la prob-
l�matique du choix des instruments de financement en appui au
secteur sant�. Nous nous interrogeons ensuite sur les avantages et les
inconv�nients d'une aide directement cibl�e (affect�e) et d'une aide
non cibl�e (non affect�e) sur le secteur sant� en accordant une atten-
tion particuli�re � la question de la fongibilit�. Quelle que soit la
forme de l'aide, il y aura des activit�s � financer dans le cadre de pro-
jets ou de programmes. Les avantages et les inconv�nients de l'aide
projet et de l'aide programme sont examin�s ainsi que les questions
sp�cifiques concernant le recours � l'aide budg�taire globale en appui
au secteur sant�. On se demandera ensuite s'il est globalement
pr�f�rable de financer l'aide � la sant� par des dons1 ou par des pr�ts
en consid�rant la probl�matique de l'espace budg�taire. La derni�re
section traite de questions soulev�es par la conditionnalit� et
l'�valuation de l'aide dans le domaine de la sant�.



APPROCHE ET GRILLE D'ANALYSE

On peut consid�rer que l'aide au secteur de la sant� poursuit trois
grands objectifs que l'on qualifiera d'objectifs interm�diaires, l'objec-
tif final �tant une am�lioration de la sant� de la population : (i) fournir
un financement (utilis� � des fins vari�es, i.e. construction d'infra-
structures, achat d'�quipements, de consommables, de m�dicaments,
paiement de salaires, subvention de la demande de services, de l'assu-
rance, etc.), (ii) transmettre des connaissances et le savoir-faire, et
(iii) impulser ou accompagner des changements dans la politique de
sant� et/ou dans l'organisation et le fonctionnement des syst�mes
de sant�. Cette aide vise � apporter des �l�ments de solutions � des
probl�mes de production de services, de productivit�, d'efficacit�,
d'efficience et de r�ponse aux besoins de la population et des adminis-
trations en charge des syst�mes de sant�.

166 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Les instruments d'aide peuvent �tre regroup�s en trois grandes
cat�gories selon qu'ils d�bouchent sur :

� des ressources directement affect�es � des � composantes � du
   secteur sant�, qu'elles soient envisag�es en termes de fonctions, de
   structures ou d'activit�s ;

� des ressources affect�es au secteur de la sant� dans son ensemble ;

� des ressources allou�es au budget g�n�ral, en vue de financer le
   secteur sant�.


   L'aide peut prendre la forme de projet, de programme ou d'aide
budg�taire globale.
   Cette grille d'analyse peut s'appliquer � chaque instrument de
financement propre aux diff�rents bailleurs bilat�raux ou multi-
lat�raux2, que cet instrument soit mis en oeuvre de fa�on ind�pen-
dante ou de mani�re plus coordonn�e dans des dispositifs complexes
de coop�ration, comme par exemple l'initiative PPTE, les Strat�gies
de r�duction de la pauvret�, les � C2D �, etc.
   Des approches relativement nouvelles, comme la passation de con-
trats de performance avec des O.N.G., ou bien le financement aupr�s
du Tr�sor de diff�rents fonds eux-m�mes destin�s � financer des inter-
ventions dans le secteur sant� se rattachent � ces trois cat�gories et
rentrent dans cette grille d'analyse.3
   Bien qu'il y ait des effets g�n�riques qui sont plus ou moins consub-
stantiels � chaque instrument de financement, leurs avantages et leurs
inconv�nients d�pendront de la sp�cificit� de chaque projet ou pro-
gramme et de nombreux �l�ments contextuels. On en donnera trois
exemples.

(i) L'intervention financ�e par l'aide concerne-t-elle ou non des fonc-
     tions essentielles de sant� publique ? Ces fonctions comprennent
     notamment la surveillance des �pid�mies, le suivi et la supervision
     des structures de premier niveau, le d�veloppement des ressources
     humaines et celui des fonctions d'administration g�n�rale, telles
     que l'organisation d'un syst�me de r�f�rence, la mise en place
     d'une strat�gie de financement par exemple. Hormis la surveil-
     lance des �pid�mies, ces fonctions sont g�n�ralement trop n�-
     glig�es au regard de leur importance pour l'efficience des syst�mes
     de sant�. La plupart d'entre elles se rattachent � la cat�gorie des

         Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 167



      � biens publics �, avec de fortes externalit�s, par opposition aux
      biens priv�s (chirurgie cardiaque par exemple). Le choix d'un
      instrument d'aide n�cessitera de recourir � des approches analy-
      tiques issues de la th�orie de l'agence pour voir de quelle mani�re
      l'instrument peut inciter les agents � agir dans un sens conforme
      ou non aux objectifs du principal pour l'exercice de ces fonctions.

(ii) S'agit-il d'appuyer sur financement ext�rieur des objectifs institu-
      tionnels dans un contexte de raret� des ressources ? Dans ce cadre,
      le choix d'une modalit� d'aide sera influenc� par le r�gime de ma-
      nagement public dans lequel elle va se situer. Il conviendra notam-
      ment de regarder si on est en pr�sence d'un syst�me centralis�,
      d�concentr�, d�centralis� � traditionnel � sans m�canisme de
      march� avec un secteur public plus ou moins isol� du secteur priv�
      (ce que l'on observe encore dans de nombreux pays africains), ou
      bien si l'aide se situe dans un contexte de � nouveau mode de ma-
      nagement du secteur public �. Dans ce cadre, la r�gulation hi�rar-
      chique par la norme et le contr�le c�de progressivement du terrain
      devant la r�gulation par les contrats et par l'introduction de
      m�canismes de march�, avec recherche d'une articulation entre
      secteur public et secteur priv� (cf. par exemple Perrot et De Roo-
      denbeke, 2005 ; Preker, 2005). Ce que l'on appelle la r�forme
      organisationnelle des h�pitaux � et qui est une composante essen-
      tielle de la r�forme du secteur hospitalier (Preker et Harding,
      2003 et De Roodenbeke, 2005) � en est une illustration.

(iii) Quelles sont les caract�ristiques du processus d'�laboration et
      d'ex�cution budg�taire ? Quels sont les taux d'ex�cution des
      d�penses de fonctionnement et d'investissement du secteur
      sant� ? Si les capacit�s budg�taires de l'�tat sont faibles, on ne
      s�lectionnera pas une architecture de financement ext�rieur
      exigeante en mati�re de gestion budg�taire. On regardera �gale-
      ment si le budget est ex�cut� selon un plan de gestion de tr�-
      sorerie ou non (`cash budget') et si les d�penses class�es comme
      prioritaires sont effectivement prot�g�es ou soumises � l'arbitrage
      plus ou moins discr�tionnaire du minist�re des finances.


   Ces situations diff�rentes appelleront des r�ponses diff�rentes dont
on donnera des exemples plus loin.

168 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



QUELQUES ENSEIGNEMENTS UTILES ISSUS DES �TUDES
RELATIVES AUX EFFETS DE L'AIDE SUR LA CROISSANCE

La litt�rature r�cente sur les effets de l'aide sur la croissance fournit
des indications qui contribuent � mieux cerner la probl�matique du
choix d'un instrument d'aide au secteur sant�.
   Rappelons tr�s bri�vement l'�volution de la r�flexion de ces derni�res
ann�es. En 1998, la Banque mondiale publie � Assessing Aid �, une
�tude sur l'�valuation de l'aide qui aura un grand retentissement (Banque
mondiale, 1998)4. Il en ressort notamment que l'inefficacit� de l'aide
pour promouvoir la croissance, plus encore dans les pays � faible revenu5
que dans les autres, r�sulterait des mauvaises politiques des pays
receveurs et de la faiblesse de leurs institutions. Il conviendrait donc de
r�allouer l'aide en faveur des pays les plus pauvres poursuivant de bonnes
politiques. En d'autres termes, il devrait y avoir une s�lectivit� des pays
b�n�ficiaires de l'aide fond�e sur l'adoption d'une conditionnalit� ex-
ante, elle-m�me bas�e sur la qualit� des politiques �conomiques.
   Par la suite, les fondements m�thodologiques de cette �tude ont �t�
fortement critiqu�s, � la fois sur le plan de l'approche du contexte
macro-�conomique de l'efficacit� de l'aide et sur celui de l'analyse
�conom�trique car des facteurs importants (tels que les chocs com-
merciaux ext�rieurs et les chocs climatiques, l'instabilit� politique,
etc.) n'�taient pas pris en consid�ration.
   De nouvelles �tudes ont ainsi montr� que l'efficacit� de l'aide
d�pend de facteurs li�s au climat (Dalgaard et al., 2001) et que l'aide a
un effet d'autant plus important que la qualit� initiale des politiques
�conomiques est faible et que les pays sont plus vuln�rables aux chocs
climatiques et �conomiques externes (Chauvet et Guillaumont, 2004),
l'aide permettant alors de compenser l'effet n�gatif de ces chocs sur la
croissance6. Il est de plus sugg�r� que la vuln�rabilit� nuit sensible-
ment � la qualit� des politiques �conomiques. Ce r�le de la vuln�rabi-
lit� structurelle est naturellement important du point de vue des
questions trait�es ici.
   Mais d'autres travaux r�cents (Easterly, Levine et Roodman, 2004 ;
Rajan et Subramanian, 2005) sugg�rent que m�me dans les pays qui
suivent de bonnes politiques, il n'y a pas de corr�lations positives
robustes entre l'aide et la croissance en longue p�riode. Il semble y
avoir plus d'�vidences d'un impact positif de l'aide en courte p�riode
(Clemens, Radelet et Bhavani, 2004). Deux types d'explications, que

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 169



l'on doit garder � l'esprit pour le choix d'un instrument d'aide � la
sant�, sont avanc�s pour essayer de comprendre les raisons de l'insuf-
fisante efficacit� de l'aide en longue p�riode.

� en se focalisant sur des �l�ments assez faciles � fournir (constructions,
   �quipements, salaires, etc.), le processus d'octroi et de mise en oeuvre
   de l'aide a n�glig� la question des incitations, bonnes et mauvaises,
   qui accompagnent ou n'accompagnent pas l'aide ext�rieure. On
   devra donc ici se poser la question de savoir ce que les diff�rents types
   d'instruments de financement utilisables pour l'aide au secteur sant�
   incitent les parties prenantes et les b�n�ficiaires � faire et � ne pas
   faire. De nombreux travaux ont montr�, en d�pit des larges zones
   d'ombre qui subsistent, que la question des incitations est absolu-
   ment fondamentale pour l'efficience des syst�mes de sant�. L'impact
   potentiel des types d'aide sur l'efficience du secteur sant� est donc
   bien un point cl� � prendre en consid�ration dans le choix des instru-
   ments de financement �tant donn� que l'on se situe dans un contexte
   de raret� des ressources, que ce soit au niveau sectoriel ou au niveau
   macro-�conomique (espace budg�taire), ou bien au niveau du rem-
   boursement des soins par les sch�mas d'assurance par exemple.

� en second lieu, l'aide peut affaiblir les institutions et les capacit�s du
   pays b�n�ficiaire par de multiples canaux. Par exemple, elle peut
   conduire � une faible mobilisation des ressources fiscales, ce qui fait
   qu'elle n'a, in fine, pas d'impact positif net sur le budget ; elle peut
   favoriser la corruption, le laxisme, une culture de d�pendance7. Mais
   a contrario, elle peut �galement favoriser l'adoption de r�formes et
   leur mise en oeuvre en les rendant politiquement soutenables par la
   neutralisation des groupes d'opposition.

   Ajoutons que des travaux ont montr� la volatilit�8 et l'impr�visibilit�
de l'aide (�carts importants entre les engagements et les d�caisse-
ments ; Bulir et Hamman, 2001) et que ces �l�ments agissent n�gative-
ment sur la croissance �conomique.
   Par ailleurs, un assez large consensus se d�gage de la litt�rature
empirique � l'effet que l'aide contribue peu � l'adoption de r�formes
�conomiques dans les pays qui ne se les sont pas appropri�es.
   On mesure ais�ment l'int�r�t de ces r�sultats lorsqu'on s'interroge
sur le choix d'une modalit� d'aide au secteur sant� dans les pays
africains dont la tr�s grande la majorit� appartient � la cat�gorie des

170 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Pays � faible revenu (PFR) et des pays les moins avanc�s (PMA), et
sont donc des pays � vuln�rables �. Ces r�sultats font par ailleurs �cho
� ceux de plusieurs travaux qui montrent qu'il n'y a pas, globalement,
d'effets statistiquement solides des d�penses de sant� (publiques et
priv�es) sur les indicateurs de sant� et par voie de cons�quence qu'il ne
suffit pas d'augmenter les d�penses publiques ou l'aide � la sant� pour
am�liorer l'�tat de sant� (cf. par exemple Audibert, Mathonnat et al.,
2003 et Banque mondiale, 2004).
   En bref, les �l�ments qui pr�c�dent conduisent � souligner quatre
points qui nous semblent particuli�rement importants pour la probl�-
matique du choix d'un instrument de financement en appui � la
sant� : (i) manifestement, l'efficacit� de l'aide est conditionn�e par de
multiples caract�ristiques propres � chaque pays, mais l'importance du
contexte macro-�conomique est cruciale ; (ii) la question des incita-
tions v�hicul�es, compte tenu du contexte, par les instruments d'aide
est primordiale ; (iii) d'une part les instruments de financement
ext�rieur auront un effet potentiel sur la qualit� des institutions (sur
l'organisation du secteur, sur les structures de soins, sur la r�forme
organisationnelle en cours ou projet�e, etc.), et d'autre part, sym�tri-
quement, la qualit� des institutions r�troagira sur les r�sultats attendus
des diff�rents instruments de financement; (iv) les effets � long terme
d'un instrument de financement peuvent �tre tr�s diff�rents de ses
effets � court terme.



L'AFFECTATION DE L'AIDE AU SECTEUR SANT�

Le principe de l'affectation (ciblage ou encore � earmarking �) consiste �
r�server certaines ressources sp�cifiques au financement exclusif de cer-
taines d�penses ou cat�gories de d�penses pr�alablement d�finies. L'af-
fectation vise d'une part � soustraire les fonds concern�s du champ d'ap-
plication de proc�dures budg�taires et d�cisionnelles per�ues comme
trop contraignantes (ou comme facteurs d'al�as dans les calendriers de
d�penses), et d'autre part � minimiser les risques d'arbitrages d�favo-
rables � la sant� lors de l'ex�cution du budget. L'affectation permet alors
de prot�ger ou � s�curiser � certaines d�penses et d'en favoriser une
meilleure gestion9. Par nature, l'aide � des projets ou programmes et
l'aide sectorielle � la sant� sont affect�es. Il en est aussi de m�me par

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 171



exemple de l'appui budg�taire apport� par l'Union europ�enne pour la
fraction r�serv�e au financement de lignes budg�taires th�matiques.
   Les critiques de l'affectation s'articulent principalement autour de
deux cat�gories d'arguments qui se combinent souvent : elle est inutile
ou inefficace, voire contre-productive.
   Lorsque le gouvernement et ses partenaires ext�rieurs se sont
engag�s d'un commun accord sur un programme d'interventions et
qu'ils ont sinc�rement l'intention de l'ex�cuter comme pr�vu10, il n'y a
pas lieu de chercher � prot�ger le financement des d�penses con-
cern�es. Elles seront n�cessairement financ�es en temps voulu
puisque chacun respectera ses engagements. Si des facteurs exog�nes
surviennent, qui ont un caract�re de force majeure, mettant le gou-
vernement dans l'incapacit� de respecter sa signature, l'affectation ne
peut rien y changer. Dans le premier cas de figure, elle est inutile,
dans le second, elle est inefficace.
   Un argument essentiel de la critique repose sur la question de la
fongibilit�. L'aide ext�rieure affect�e, qu'il s'agisse de l'aide projet ou
de l'aide sectorielle, lib�re des ressources que le gouvernement va
utiliser pour financer d'autres d�penses que les d�penses initialement
pr�vues.
   Prenons un exemple sans doute un peu caricatural. Un gouverne-
ment souhaite appuyer financi�rement le d�veloppement de l'assurance
maladie et construire un centre de conf�rences. Il n'a pas les ressources
n�cessaires pour financer l'ensemble. Il sollicite un bailleur qui accepte
de contribuer au financement du d�veloppement de l'assurance par un
projet ou une aide sectorielle pr�cis�ment affect�e � ces op�rations, mais
ce bailleur refuse de participer au financement du centre de con-
f�rences. Cet apport lib�re des ressources budg�taires dont le gouverne-
ment va pouvoir disposer pour financer le centre de conf�rences. C'est
le principe m�me de la fongibilit�. � partir de l�, m�me si les d�penses
pr�vues pour l'extension de l'assurance sant� ont bien �t� effectu�es, il
est donc difficile d'affirmer qu'elles l'ont �t� gr�ce � l'aide affect�e. En
effet, si le d�veloppement de l'assurance �tait la r�elle priorit� du gou-
vernement, il aurait de toute fa�on �t� financ� : l'aide aura donc en fait
permis la construction du centre de conf�rences.
   Au-del� de cet exemple, la question est alors de savoir si l'aide affec-
t�e � l'assurance (cet exemple) ou au secteur sant� dans son ensemble,
n'incite pas le gouvernement � diminuer son effort propre dans ce

172 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



domaine. Dit en d'autres termes, l'aide affect�e � la sant� sera-t-elle
additionnelle ou substituable au financement de ce secteur sur
ressources nationales ? Si elle est totalement substituable, elle est
totalement fongible et donc l'affectation, quelle qu'en soit la forme,
est inutile et inefficace. On voit donc que le strict respect de l'affecta-
tion de l'aide projet ou de l'aide programme ou encore de l'aide secto-
rielle ne suffit pas � s'assurer que les fonds affect�s ont effectivement
financ� les d�penses pr�vues, car affectation stricte et fongibilit� peu-
vent coexister.
   L'existence ou non de la fongibilit� est donc essentielle dans la
probl�matique de l'affectation et de l'interpr�tation des informations
que l'on collecte en s'interrogeant sur la � tra�abilit� � de la d�pense
de sant� au titre de l'aide. S'il y a fongibilit�, les bailleurs ne financent
pas ce qu'ils croient financer ; ils financent des priorit�s non r�v�l�es
du gouvernement. On en mesure les implications pour l'�valuation
des effets de l'aide.
   Par ailleurs, l'affectation pr�sente des inconv�nients (qu'elle soit
efficace ou non). Si les affectations sont nombreuses, il leur est
reproch� � juste titre d'enlever de la coh�rence au budget national, de
cr�er des enclaves budg�taires d�structurantes, a fortiori si les fonds
affect�s sont g�r�s sur un compte d'affectation sp�ciale (CAS) extra-
budg�taire11. Enfin l'affectation peut conduire � une d�mobilisation
du pouvoir politique et cr�er un environnement pr�judiciable au
financement des d�penses r�currentes, probl�me dont l'acuit� sera
particuli�rement aigu� lorsque les projets ou programmes financ�s par
l'ext�rieur seront termin�s. Cela se v�rifie pour de nombreuses inter-
ventions dans le secteur sant� comme dans les autres.
   Notons ici que s'il n'y a pas une forte volont� du gouvernement de
financer les d�penses r�currentes, aucun instrument de financement
ne permet de s'en assurer ex-ante. Une solution consiste � en faire une
conditionnalit� dans un autre programme de financement ext�rieur,
tel que, par exemple, le financement d'un DSRP (Document de
strat�gie de r�duction de la pauvret�).
   Il est parfois avanc� que le ciblage des fonds de contrepartie sur les
d�penses r�currentes des secteurs sociaux est une mani�re assez effi-
cace d'en assurer le financement. Mais en fait, ces fonds, qui sont la
contrepartie en monnaie locale d'une aide en devises ou en nature12,
certes desserrent la contrainte de tr�sorerie de l'�tat, mais ils sont
confront�s � des probl�mes d'affectation-fongibilit� d'une part et

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 173



d'arbitrages au titre de la r�gulation budg�taire d'autre part, iden-
tiques � ceux des autres instruments de financement.
   Que sait-on de la fongibilit� dans le secteur sant� ? Le fait que
l'aide y soit � un certain degr� fongible para�t difficilement con-
testable. Mais dans quelle mesure l'est-elle ?
   Les �tudes �conom�triques sur la fongibilit� de l'aide en g�n�ral,
incluant l'aide � la sant�, ne fournissent pas de rep�res suffisamment
solides pour pouvoir trancher (cf. notamment Feyzioglu, Swaroop, Zhu,
1999, ainsi que Devarajan, Rajkumar, Swaroop, 1999). L'�tude de
Devarajan et al. montre que les pr�ts concessionnels au secteur de la
sant� n'ont pas d'impact statistiquement significatif sur les d�penses
publiques de sant� (coefficient de 0,26 et de 0,66). En d'autres termes,
rien ne permet de dire qu'ils accroissent les d�penses publiques de sant�,
contrairement � l'�ducation par exemple o� 98 % de l'aide affect�e
(pr�ts) se traduit par une augmentation des d�penses dans le secteur. Et �
notre connaissance, aucune �tude n'a port� sur des sous secteurs, comme
par exemple les soins de base ou le secteur hospitalier. Soulignons par
ailleurs que s'il existait des r�sultats issus d'un large �chantillon de don-
n�es sur l'aide affect�e � une composante du secteur sant�, ces r�sultats,
aussi robustes puissent-ils �tre �conom�triquement, laisseraient subsister
d'importantes zones d'ombre d'un point de vue op�rationnel. En effet,
en nous interrogeant sur la fongibilit� de l'aide � un sous-ensemble du
secteur sant�, nous souhaiterions pouvoir r�pondre � deux
questions : (i) un euro suppl�mentaire d'aide accord�e aux soins de sant�
de base (par exemple) se traduit-il par un euro suppl�mentaire de
ressources disponibles pour ce sous-ensemble ? Si ce n'est pas le cas �
imaginons par exemple une augmentation de 0,8 euro seulement � les 20
centimes restants ont-ils b�n�fici� du fait de la fongibilit� aux secteurs
autres que la sant� ou bien � d'autres d�penses de sant�, telles que les
soins hospitaliers tertiaires par exemple ? Ces deux questions sont, on le
voit, fondamentales. Mais en fait, il est impossible d'avoir une r�ponse
rigoureuse sur laquelle fonder des d�cisions. Il y a � cela deux raisons.
Tout d'abord, (i) on ne dispose pas d'une base de donn�es appropri�e
concernant l'affectation de l'aide � chaque secteur, les dons n'�tant pas
inclus dans les donn�es disponibles, lesquelles ne portent que sur les
pr�ts concessionnels13 et (ii) il y a encore moins d'information sur l'aide
aux diff�rentes composantes du secteur sant�. Pays par pays, un travail
sur place peut permettre de collecter les donn�es n�cessaires. Mais tant
que l'on ne disposera pas d'un �chantillon de quelques dizaines de pays,

174 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'analyse �conom�trique restera fragile. En second lieu, les missions de
l'h�pital sont souvent assez mal d�finies dans de nombreux pays � faible
revenu, et lorsqu'elles le sont, elles ne sont g�n�ralement pas respect�es
puisque les syst�mes de r�f�rence sont d�faillants, avec une importante
partie de l'activit� des h�pitaux relevant davantage d'une structure de
premier niveau que d'une structure hospitali�re. Dans ce cas, l'interpr�-
tation des r�sultats serait donc aventureuse14.
   Vu l'impossibilit� pour l'instant de conduire des �tudes empiriques
pleinement satisfaisantes, que peut-on penser de la fongibilit� de
l'aide � la sant� ? Il appara�t que la situation se pr�sente diff�remment
selon le niveau de d�veloppement des pays et selon le montant de
l'aide qu'ils per�oivent en pourcentage de leur PIB ou par rapport �
leur revenu par habitant.
   Dans les pays africains � faible revenu, (la tr�s grande majorit� d'en-
tre eux), o� le niveau de l'aide est plus important que dans les autres
pays, plus encore pour ce qui concerne les dons, le financement
int�rieur de la sant� est domin� par les d�penses salariales (entre 60 et
80 % des d�penses courantes). Les budgets d'investissement reposent
sur l'aide ext�rieure dans des proportions souvent plus �lev�es. De ce
fait, les gouvernements n'ont qu'une marge de manoeuvre tr�s limit�e
pour financer de nouveaux projets, qu'il s'agisse d'op�rations avec un
fort contenu en d�penses courantes ou de d�penses d'investissement.
Ces actions sont donc tr�s d�pendantes de l'aide ext�rieure. En con-
s�quence, il est assez logique de consid�rer que la plupart � ce qui
implique des exceptions, et il en est de notables � des aides affect�es �
la sant� sont assez largement additionnelles et non substituables � des
d�penses financ�es sur ressources internes. Il faudrait distinguer selon
les types de d�penses, mais il est assez peu probable par exemple que
le soutien sur financement ext�rieur � un dispositif d'assurance ma-
ladie vienne se substituer � un financement national, a fortiori s'il s'ac-
compagne d'un volet institutionnel.
   Il en est �galement de m�me pour une aide aux h�pitaux de second
et troisi�me niveaux, la fongibilit� y �tant probablement plus r�duite
dans certains pays que pour les soins de base. On avancera en ce sens
deux arguments compl�mentaires. Tout d'abord, depuis plus de
quinze ans la r�flexion sur l'efficience des politiques de sant� a conduit
� mettre tr�s fortement l'accent sur le premier niveau de la pyramide
sanitaire, ce qui fait que, en g�n�ral, les gouvernements sont enclins �
ne pas ou � peu augmenter les d�penses hospitali�res financ�es sur

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 175



ressources nationales au-dessus du district. Cette tendance s'est pro-
bablement accrue avec l'adoption des Objectifs du Mill�naire pour le
D�veloppement en mati�re de sant�. En second lieu, il y a maintenant
un large consensus pour consid�rer que le secteur hospitalier a sou-
vent besoin d'une r�forme institutionnelle abordant ces questions non
pas dans une logique de structure, mais dans une logique syst�mique
et de � capacity building �. Les r�formes organisationnelles vont dans
ce sens. Or, pour des raisons techniques, de capacit�s administratives
et manag�riales, ainsi que pour des raisons politiques (les r�formes
institutionnelles sont politiquement risqu�es), les gouvernements des
pays � faible revenu sont r�ticents � s'y engager sans le soutien de
partenaires ext�rieurs.
   Ces diff�rents �l�ments conduisent ainsi � penser que la fongibilit�
de l'aide affect�e au secteur de la sant� n'est sans doute pas inexistante,
naturellement, mais que logiquement elle doit �tre assez faible. Ainsi
dans la majorit� des pays africains, il ne semble donc pas y avoir d'ar-
guments appelant � une disqualification par principe de l'affectation
de l'aide � la sant� sous pr�texte de fongibilit�15. Mais s'agissant des
pays � revenu interm�diaire en Afrique au sud du Sahara16 et hors de
l'Afrique, la fongibilit� de l'aide � la sant� devrait �tre plus impor-
tante. En effet, les budgets de la sant� y sont normalement moins
d�pendants du financement ext�rieur et les capacit�s locales � d�finir
et conduire des r�formes institutionnelles y sont g�n�ralement plus
�lev�es17. Ceci implique alors de porter un regard beaucoup plus
r�serv� sur le bien-fond� de l'affectation de l'aide dans ces pays.



AIDE PROJET ET AIDE PROGRAMME

On s'interrogera ici sur les principaux inconv�nients et avantages
respectifs de l'aide projet et de l'aide programme en appui au secteur
sant�.


L'aide projet

Depuis le milieu des ann�es 90 au moins, l'aide projet en g�n�ral a fait
l'objet de nombreuses critiques. Il lui est reproch� : de cr�er, via les
unit�s de mise en oeuvre des projets, des �lots bureaucratiques qui con-
tribuent au d�membrement des capacit�s administratives des �tats ; de

176 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



capter les fonctionnaires les plus comp�tents en offrant des niveaux de
salaire (beaucoup) plus �lev�s que ce que peut se permettre l'adminis-
tration ; de favoriser la recherche de rente et le patronage ; d'�tre con-
tr�l�e par les bailleurs, ce qui r�duit l'appropriation des projets qui
sont partiellement mais assez souvent redondants ; de traduire au sein
d'un m�me domaine des orientations et des approches parfois contra-
dictoires ou � tout le moins non coordonn�es ; de constituer des
enclaves budg�taires avec des circuits financiers parall�les et des effets
pervers pour le processus budg�taire ; d'engendrer des distorsions de
priorit� ; d'ignorer g�n�ralement ou de sous-estimer grossi�rement les
co�ts r�currents futurs ; d'�tre l'objet de d�caissements longs, trop sou-
vent tardifs � l'issue de contr�les tatillons qui surchargent les adminis-
trations ; d'engendrer des co�ts de transaction prot�iformes ; d'avoir
une durabilit� qui ne survit gu�re � l'ach�vement du projet ; de diffi-
cilement permettre d'�tablir, au-del� du projet, un dialogue avec les
autorit�s de mani�re � tirer les enseignements des r�ussites et des
�checs pour les int�grer ult�rieurement dans le processus de d�cision
publique.
   La liste est longue, on le voit, et les critiques fortes qui d�bouchent
sur un constat g�n�ral de faible efficacit�. Le constat est, pour certains
auteurs, renforc� par l'argument vu ci-dessus selon lequel l'aide est
fongible et, par cons�quent, que le financement par projet n'a pas de
raison d'�tre. Nous avons exprim� plus haut des r�serves sur cette
analyse s'agissant de l'aide au secteur sant�.
   Mais ceci dit, l'aide projet pr�sente plusieurs avantages que certains
� effets de mode � ne doivent pas conduire � occulter. Le reconna�tre
n'est pas pour autant nier la validit� des critiques pr�c�dentes.
   En premier lieu, l'aide projet se veut au cas par cas une r�ponse
appropri�e � un cadre budg�taire d�faillant en termes de pr�paration
et de mise en oeuvre des actions. La mise en place de cellules de pro-
jets autonomes a pour but d'am�liorer l'ex�cution des projets en per-
mettant de s'affranchir des contraintes administratives budg�taires
jug�es paralysantes ou inutilement lourdes. En second lieu elle vise, �
travers diff�rentes modalit�s18, � assurer un transfert de connaissances
et de savoir-faire qui se propose de renforcer les capacit�s administra-
tives et gestionnaires du b�n�ficiaire, et dont les effets devraient
perdurer au-del� de la fin du projet. L'efficacit� de la coop�ration
technique a toutefois fait l'objet de nombreuses critiques sans pour
autant nier ses apports et ses succ�s (Berg et Fukuda-Parr, 1993).

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 177



   De ce fait, l'aide projet conserve un int�r�t r�el pour financer des
interventions limit�es dans les �tats o� les institutions sont de qualit�
m�diocre, ou lorsqu'il s'agit d'un domaine innovant ou dans lequel les
acteurs nationaux n'ont pas suffisamment de maitrise. Mais ces inter-
ventions doivent �tre relativement ind�pendantes de l'environnement
institutionnel sectoriel et extra sectoriel car l'aide projet n'est pas un
instrument adapt� aux r�formes de politiques et aux r�formes institu-
tionnelles. L'aide projet est par exemple appropri�e pour la r�habilita-
tion d'un h�pital, la formation du personnel d'un district, le renforce-
ment manag�rial d'une direction centrale ou r�gionale de la sant�,
l'appui � la gestion d'un r�seau de mutuelles, etc. Mais, si le cadre
budg�taire est de qualit�, avec une efficience raisonnable, si les capa-
cit�s humaines sont l� ou peuvent �tre assez facilement mobilis�es et si
le gouvernement s'est bien appropri� la n�cessit� de financer les acti-
vit�s devant faire l'objet de l'aide projet, alors elle est moins perti-
nente. Elle ne l'est pas non plus pour les op�rations complexes, a for-
tiori si elles comportent un volet institutionnel lourd.


L'aide programme.

L'aide programme pr�sente en premier lieu l'avantage de r�duire le
risque d'incoh�rence li�e � la mise en oeuvre de plusieurs projets
ind�pendants et de limiter les co�ts de transaction. Mais si le gouverne-
ment n'est pas dans le si�ge du pilote, les effets pervers de la non appro-
priation sont identiques � ceux de l'aide projet. Toutefois, m�me si le
programme est totalement sous le contr�le du gouvernement, la com-
plexit� de la mise en oeuvre, de la gestion et du contr�le des multiples
activit�s et projets formant le programme peut d�passer ses capacit�s
administratives et manag�riales et conduire � une inefficacit� de l'aide.
   L'aide programme est pr�f�rable � l'aide projet lorsqu'il s'agit d'in-
tervenir au niveau des fonctions essentielles de sant� publique (avec
fortes externalit�s positives) ou lorsqu'il s'agit de r�formes institution-
nelles ou organisationnelles qui vont au-del� de quelques structures.
C'est par exemple le cas lorsqu'une r�forme impliquera de rendre
explicite et de prot�ger les fonctions sociales de l'h�pital, qu'il s'agisse
de la production de biens publics et de biens avec externalit� positive
ou d'all�ger les barri�res � l'acc�s aux soins pour les plus pauvres
d'autre part. Autres exemples : lorsqu'il s'agit de r�organiser un mi-
nist�re, de rendre fonctionnel le syst�me de r�f�rence ou bien encore

178 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



de r�former le statut et le mode de gestion des h�pitaux pour les
exposer � des m�canismes de march�. Ces domaines d'intervention
exigent une strat�gie sectorielle et une aide principalement sous forme
de programme, car la juxtaposition de projets d�finis s�par�ment, mis
en oeuvre et g�r�s par des entit�s ind�pendantes, risque de conduire �
des inefficiences techniques et allocatives et � des incoh�rences sys-
t�miques et strat�giques.


De l'aide programme traditionnelle � l'approche sectorielle
(Swap, Sector Wide Approach).

Dans la deuxi�me moiti� des ann�es 90, la n�cessit� s'est progressive-
ment impos�e d'int�grer la sant� dans les strat�gies de r�duction de la
pauvret�, d'articuler express�ment les politiques de sant� et les
r�formes macro-�conomiques et budg�taires tout en cherchant �
am�liorer l'efficacit� de l'aide. L'une des cons�quences en a �t� un
int�r�t croissant pour l'approche sectorielle et notamment les � Swap �.
   L'approche swap est orient�e vers l'obtention de r�sultats, d'une
part en recherchant la plus grande coh�rence entre les politiques, les
programmes et les budgets, et d'autre part en am�liorant l'efficacit� de
l'aide ext�rieure. Par-del� une grande diversit� de contenus, les swaps
sant� pr�sentent, comme tous les swaps, plusieurs caract�ristiques
fondamentales que l'on r�sumera tr�s bri�vement.
   Il s'agit d'un engagement formel de coop�ration sectorielle entre le
gouvernement et l'ensemble (ou certains) de ses partenaires ext�rieurs
autour d'un programme. Le programme est d�clin� en axes d'interven-
tions, sous-programmes et activit�s. Certaines activit�s prennent la
forme de projets. Le leadership et le pilotage du programme sont
assur�s par le gouvernement ou par une entit� le repr�sentant19. Il y a
une vision partag�e des objectifs, de la strat�gie et des priorit�s de sant�
concernant les domaines qui font l'objet du swap20. Un cadre budg�-
taire (financement et ex�cution des d�penses), unique et coh�rent, est
mis en place. Toutes les actions ainsi que les financements sectoriels
des bailleurs engag�s dans le swap s'inscrivent dans la strat�gie et dans
le cadre budg�taire d�finis. Des efforts r�els (avec des r�sultats patents
dans plusieurs pays21) sont faits pour harmoniser les proc�dures des
bailleurs et utiliser le plus possible les proc�dures du gouvernement
pour la mise en oeuvre du programme et les d�caissements de fonds22.
Le programme est �valu� globalement par le gouvernement et ses

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 179



partenaires ext�rieurs selon des modalit�s et des crit�res qui devraient
�tre d�finis d'un commun accord.
   L'existence d'un swap n'implique pas le recours � des modalit�s type
de financement, bien que conceptuellement, une aide budg�taire
globale (cf. ci-dessous) d'une part, ainsi qu'un fonds commun (� pool-
ing �) d'autre part, s'inscrivent davantage dans la logique intrins�que
de l'approche swap que les autres formules envisageables (aide projet
ou aide programme conventionnelle).
   La pertinence ou non d'un swap pour l'appui au secteur sant� va
d�pendre de plusieurs facteurs : d'un environnement macro-�conomique
relativement stable li� � une politique macro-�conomique prudente,
rigoureuse et soutenable ; de l'existence ou non d'un cadre de d�penses �
moyen terme (CDMT) r�aliste23 ; de la qualit� du processus budg�-
taire ; des capacit�s de gestion et d'administration du minist�re de la
sant� au niveau central et aux niveaux d�centralis�s ; du r�le � et c'est un
point souvent n�glig� � que le minist�re des finances est susceptible de
jouer de facto dans la coh�rence de l'ex�cution du swap par ses �ventuels
arbitrages budg�taires s'il s'av�rait que l'�tat rencontre des difficult�s
globales de financement pour ex�cuter comme pr�vu les d�penses
inscrites au budget, tous secteurs confondus.
   Le principe d'une approche de type swap para�t bien adapt� � un pro-
gramme d'intervention dans le secteur sant� comprenant plusieurs axes
ou dimensions requ�rant la coordination de multiples partenaires
ext�rieurs, notamment lorsqu'il s'agit d'entreprendre une r�forme insti-
tutionnelle cons�quente. Mais dans les pays o� les capacit�s administra-
tives et manag�riales sont faibles, une assistance technique appropri�e
est requise sous peine d'aller au devant de s�rieuses d�convenues.



AIDE BUDG�TAIRE GLOBALE

Dans le cadre de notre propos, l'aide budg�taire cibl�e sur le secteur
sant� renvoie aux probl�matiques d�j� examin�es de l'affectation et de
l'aide programme. L'aide budg�taire globale se pr�sente, elle, sous la
forme d'un appui budg�taire non cibl�. Elle desserre la contrainte
budg�taire globale et elle est donc par nature non affect�e. Elle offre
une souplesse pr�cieuse pour le financement des politiques de sant�
comportant un important volet de r�formes institutionnelles. Mais
nous pensons qu'il est peu probable que le passage de l'aide projet �

180 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



un programme financ� par un appui budg�taire global accroisse
r�ellement l'efficacit� de l'intervention des bailleurs dans le secteur
sant� si les capacit�s institutionnelles locales sont faibles24. Or dans la
majorit� des pays africains, les capacit�s requises sont g�n�ralement
tr�s insuffisantes en quantit� et en qualit�. Il serait donc imprudent de
financer dans ces �tats une r�forme de la politique ou du syst�me de
sant� d'envergure sur une aide budg�taire globale sans l'appuyer par
une assistance technique adapt�e. C'est aussi ce que nous soulignions
plus haut pour les swaps.
   De m�me, peut-on �mettre des doutes sur l'efficacit� de l'aide
budg�taire globale si elle ne s'accompagne pas d'une conditionnalit�
sectorielle de r�sultats dans le cadre d'un dialogue entre gouverne-
ment et bailleurs.
   Par ailleurs, on sait que l'un des avantages de l'aide budg�taire
globale est de renforcer th�oriquement la pr�visibilit� du financement
des interventions, qu'il s'agisse du financement ext�rieur ou int�rieur,
et de s'accompagner d'un d�caissement rapide. Cela facilite l'ex�cu-
tion coh�rente du (des) programme(s). La question �pineuse et cru-
ciale de la concordance entre le calendrier des d�caissements des
bailleurs et celui des besoins de financement de la politique de sant�
para�t ainsi r�gl�e. Les co�ts de transactions sont de plus limit�s.
   Mais en fait, le financement des d�penses de sant� au moment
appropri� n'est pas pour autant syst�matiquement assur�25. C'est ce
que l'on peut observer lorsque les d�penses budg�taires s'effectuent
dans le cadre d'un plan de gestion de tr�sorerie dit � cash budget �
(Mathonnat, 2005). Les accords avec le FMI pr�voient g�n�ralement
un certain rythme d'ex�cution des d�penses publiques compte tenu
des objectifs fix�s pour les grands �quilibres macro-�conomiques
(solde budg�taire, compte courant, cr�dit au Gouvernement et indi-
rectement inflation), avec un volume global de d�penses conditionn�
par le volume global de ressources disponibles. Si � un moment donn�
les ressources du tr�sor sont insuffisantes pour r�gler les d�penses, le
minist�re des finances proc�de � des arbitrages dans le cadre de la
r�gulation budg�taire. Et m�me si l'aide budg�taire globale en liaison
avec la politique de sant� (ou � devant permettre � de financer des
interventions dans le secteur de la sant�) a �t� d�caiss�e par les
bailleurs, il n'y a pas de garantie absolue que les d�penses correspon-
dantes soient financ�es, m�me si elles sont class�es comme priori-
taires. En effet, dans ce contexte de raret� des ressources, ces d�penses

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 181



vont se trouver en concurrence avec d'autres d�penses prioritaires. Or
on sait que le pouvoir de n�gociation et la capacit� de plaidoyer du
minist�re de la sant� vis-�-vis du minist�re des finances sont faibles
dans un grand nombre de pays d'Afrique. Il en va de m�me s'il n'y a
pas de probl�me de tr�sorerie, mais si le plafond mensuel ou
trimestriel de d�penses publiques fix�es dans l'accord avec le FMI est
d�pass� (Mathonnat, 2005). Cela soul�ve donc la question de la pro-
tection des d�penses de sant� prioritaires � laquelle la cr�ation d'un
compte d'affectation sp�ciale n'apporte pas une r�ponse pleinement
satisfaisante.
   Enfin, ces derni�res analyses confirment qu'il peut �tre risqu� d'en-
gager un vaste programme de r�forme dans le secteur sant� reposant
sur le financement ext�rieur, et n�cessitant une progression coordon-
n�e de multiples interventions �manant de plusieurs bailleurs, si le
cadre budg�taire est faible, ou bien si un programme de r�formes de la
pr�paration et de l'ex�cution des d�penses publiques n'est pas en cours
pour s'attaquer aux dysfonctionnements les plus p�nalisants pour la
progression des r�formes. Cela dit, il est vrai qu'un r�el engagement
politique au plus haut niveau peut permettre au cas par cas de r�gler
certains de ces probl�mes. Mais il s'agit plus d'exp�dients que de solu-
tions. L'efficacit� de l'aide � la sant�, plus particuli�rement dans les
pays africains, n'est pas seulement une affaire sectorielle : elle est
�troitement d�pendante des r�formes en mati�re de gestion des
d�penses publiques, et en amont de celles-ci, du r�alisme avec lequel
les documents de strat�gie de lutte contre la pauvret� et les cadres de
d�penses � moyen terme (CDMT) auront �t� pr�par�s. Or on cons-
tate tr�s fr�quemment une tendance � la surestimation des ressources
et � la sous-estimation des d�penses.



FINANCEMENT DE L'AIDE AU SECTEUR SANT�
ET ESPACE BUDG�TAIRE

Une des premi�res questions � se poser est de se demander s'il est
pr�f�rable de financer l'appui au secteur sant� par des dons ou par des
pr�ts. La question est sans objet pour certains bailleurs multilat�raux
comme la Banque mondiale, la Banque africaine de d�veloppement, la
Banque asiatique de d�veloppement par exemple, qui ne peuvent
statutairement accorder de dons ou ne peuvent le faire que de mani�re

182 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



tout � fait marginale. Mais la question du choix entre dons et pr�ts est
susceptible d'avoir des cons�quences directes et indirectes sur le volume
et l'efficacit� de l'aide au secteur de la sant�.
   Les pr�ts programmes ou projets peuvent inciter les b�n�ficiaires �
adopter des comportements plus performants que les dons en raison
de l'obligation de remboursement qui s'y attache. Les dons au con-
traire, consid�r�s comme des ressources gratuites d'un strict point de
vue financier, peuvent conduire � des comportements moins judicieux
et distiller, � tort, s'ils sont globalement abondants et si les projets sont
nombreux, le sentiment pernicieux d'une � contrainte budg�taire
douce �. Si on s'en tient l�, il est pr�f�rable d'accorder l'aide au
secteur sant� sous forme de pr�ts. On peut ensuite discuter du degr�
de concessionnalit�. Il doit �tre �lev� dans la tr�s grande majorit� des
�tats d'Afrique au sud du Sahara qui sont des pays � faible revenu. La
situation est diff�rente dans les pays � revenu interm�diaire o� l'on
peut envisager des emprunts aux conditions du march�.
   Mais la validit� de l'argumentation d�pend de la diff�rence que les
�tats b�n�ficiaires font en r�alit� dans leur comportement entre les
deux types de financement. � notre connaissance, il n'existe pas d'�l�-
ments empiriques qui permettent d'affirmer qu'en g�n�ral les op�ra-
tions d'aide � la sant� financ�es par des pr�ts font l'objet d'un com-
portement plus efficient que celles qui sont financ�es par des dons. Au
demeurant, depuis la fin des ann�es 90, l'adoption de l'initiative PPTE
et les multiples annulations de dette ont probablement contribu� �
brouiller les �ventuelles diff�rences de comportements induites par les
dons et les pr�ts. L'Initiative d'All�gement de la Dette Multilat�rale
(IADM)26 prise par le G8 en juin 2005 au sommet de Gleneagles et
concernant l'annulation de la dette envers l'IDA, le FMI et le Fonds
Africain de D�veloppement renforcera probablement cette tendance.
   Au-del� de ces impacts potentiels directs, on doit s'interroger sur les
effets de type macro-�conomiques que l'ensemble des dons, tous
secteurs confondus, peut avoir sur le financement ext�rieur et int�rieur
du secteur sant�, por rapport � ceux que peuvent avoir l'ensemble des
pr�ts. Ces effets potentiels indirects empruntent des canaux de trans-
mission qui rel�vent de la probl�matique de l'espace budg�taire27.
   Des �tudes empiriques r�centes sugg�rent que l'aide est beaucoup
plus volatile que les recettes fiscales, et que cette instabilit� est plus
forte pour les dons que pour les pr�ts (Bulir et Hamman, 2001). Cette
instabilit� plus grande est donc davantage susceptible, toutes choses

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 183



�tant �gales par ailleurs, d'avoir des r�percussions n�gatives sur le
financement budg�taire des d�penses publiques de sant�.
   Par ailleurs, l'impact des dons sur la mobilisation des recettes fis-
cales diff�re de celui des pr�ts. Une �tude faite sur un �chantillon de
plus de cent pays en voie de d�veloppement sur une p�riode de trente
ans montre que l'aide sous forme de dons tend � entra�ner une baisse
des recettes fiscales, et que le fl�chissement est plus prononc� dans les
pays o� les institutions sont les plus faibles28 (Gupta et al., 2005). Or
dans nombre de pays africains, pr�cis�ment, elles sont faibles. Ces
r�sultats ont trois cons�quences pour notre propos.
   Premi�rement, les dons cr�ent, toutes choses �tant �gales par
ailleurs, une situation qui peut �tre p�nalisante pour les d�penses
publiques de sant� si la contraction des recettes fiscales induite par les
dons est sup�rieure au service de la dette qui r�sulterait des pr�ts. Il en
d�coule qu'un important financement sur dons au niveau macro�-
conomique peut comparativement contracter l'espace budg�taire �
moyen terme et induire � in fine � un moindre financement public
global du secteur sant�.
   En second lieu, ces r�sultats n'impliquent toutefois pas n�cessaire-
ment que les pr�ts doivent �tre pr�f�r�s aux dons pour l'aide au
secteur sant�. Mais par contre, ils sugg�rent que les apports sous
forme de dons, s'ils sont importants, doivent s'accompagner d'un ren-
forcement institutionnel et d'un CDMT r�aliste, avec en amont, une
strat�gie volontariste de mobilisation des recettes publiques internes.
Or nous avons vu plus haut que l'aide �tait relativement impr�visible,
ce qui fragilise les CDMT. Cela t�moigne � nouveau de la d�pendance
de l'efficacit� de l'aide � la sant� envers l'environnement macro-
�conomique d'une part et, d'autre part, envers la qualit� globale des
institutions, notamment de celles qui ont trait aux finances publiques.
On a observ� depuis longtemps que de bons programmes dans le
secteur de la sant� peuvent donner des r�sultats tr�s d�cevants lorsque
la gestion financi�re et administrative g�n�rale est mauvaise.
   La troisi�me implication nous ram�ne � l'affectation. Si les recettes
fiscales tendent � diminuer lorsque les dons augmentent, cela signifie,
ici encore toutes choses �tant �gales par ailleurs, que le pourcentage de
l'aide dans le financement des d�penses publiques totales augmente, et
que par voie de cons�quence, le risque de fongibilit� diminue. Il y a
donc l� un argument qui affaiblit la position de rejet par principe d'une
�ventuelle affectation de l'aide � la sant�, d'autant que l'affectation est

184 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



la moins critiquable lorsque les institutions sont faibles, ce qui est assez
souvent le cas dans les pays africains qui re�oivent le plus de dons. Ceci
n'est en rien un plaidoyer en faveur de l'affectation de l'aide � nous
consid�rons que la non affectation doit rester le principe, et donc que
l'appui budg�taire non affect� est ce vers quoi il faut tendre � mais ces
questions doivent �tre examin�es sans dogmatisme et au cas par cas.
   Enfin, soulignons que dans plusieurs pays africains, les apports
d'aide massifs dont b�n�ficie le secteur de la sant� soul�vent des pro-
bl�mes aigus de capacit� d'absorption. �tats et bailleurs sont conscients
de la gravit� des probl�mes qui en d�coulent car ils peuvent miner les
efforts faits depuis plusieurs ann�es pour am�liorer l'efficience des
syst�mes de sant� qui se trouveront alors fragilis�s lorsque le repli de
l'aide ext�rieure, in�luctable lorsque seront �puis�s les flux issus du
traitement de la dette, se produira. Ce dernier point renvoie aux ques-
tions institutionnelles.



CONDITIONNALIT� ET �VALUATION DE L'AIDE AU SECTEUR SANT�

La conditionnalit� traditionnelle, dite conditionnalit� � ex-ante �, a
�t� largement critiqu�e pour de nombreuses raisons tenant globale-
ment � son inefficacit� (y compris au nom de la fongibilit�) et au fait
qu'elle induisait des effets pernicieux, freinant paradoxalement les
processus de r�formes qu'elle �tait sens�e favoriser. Il y a aujourd'hui
un assez large consensus, � la fois dans les milieux acad�miques et dans
les milieux professionnels du d�veloppement, pour consid�rer qu'il
convient de lui pr�f�rer une conditionnalit� � ex-post �, reposant sur la
performance plut�t que sur l'engagement d'op�rer des changements
de politique ou de processus. Cette conditionnalit� de performances
pr�sente trois avantages majeurs (Adam et al., 2004) : elle favorise
l'appropriation des programmes par le gouvernement qui acquiert de
ce fait une libert� de choix pour les instruments � utiliser et voit se
r�duire les co�ts de transaction ; elle permet une meilleure coordina-
tion des donateurs en �vitant des divergences de conditionnalit� sur
les instruments ; et enfin elle facilite une r�ponse flexible et progres-
sive des bailleurs aux r�sultats constat�s.
   Ceci dit, s'agissant de l'aide � la sant� dans la majorit� des pays
africains, il nous semble qu'une attitude tr�s pragmatique doive
pr�valoir. La conditionnalit� ex-ante ne doit pas �tre syst�matiquement

        Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 185



�cart�e, bien qu'une conditionnalit� de performances soit ce vers quoi
il faille s'orienter chaque fois o� cela para�t raisonnable. Mais en
g�n�ral, il semble pertinent de rechercher de mani�re tr�s �clectique,
au cas par cas, un dosage judicieux de conditionnalit� ex-ante et de
conditionnalit� sur les r�sultats.
   En premier lieu, certains �tats ne sont pas toujours en mesure
d'identifier le(s) � bon(s) � instrument(s) pour atteindre les objectifs
voulus, notamment dans le cas d'une r�forme institutionnelle. La
vraie question n'est donc pas ici l'existence ou non d'une condition-
nalit� sur les instruments, mais de savoir s'il y a une adh�sion r�elle de
l'�tat � l'instrument propos� pour qu'il y ait internalisation et appro-
priation. En second lieu, le minist�re de la sant� peut avoir besoin
d'une conditionnalit� sur les instruments pour lutter contre des forces
politiques ou divers groupes d'int�r�ts hostiles aux projets ou au pro-
gramme devant b�n�ficier de l'aide ext�rieure. Ce peut �tre le cas
lorsque le ministre de la sant� souhaite utiliser certains �l�ments de
conditionnalit� dans ses � n�gociations � avec le minist�re des
finances, ou bien pour convaincre son administration ou un Premier
ministre de la n�cessit� d'entreprendre certaines actions auxquelles il
adh�re, en tant que ministre, mais dont il sait qu'elles susciteront des
hostilit�s bureaucratiques ou politiques. Cela est particuli�rement vrai
lorsqu'un programme comporte un important volet de r�forme insti-
tutionnelle, quelle qu'elle soit (r�organisation de la carte sanitaire ou
red�finition des missions de l'h�pital, changement dans les modes de
r�gulation du syst�me, etc.), ou touche � des domaines sensibles
comme la sant� de la reproduction. En t�moignent tr�s concr�tement
des projets financ�s par des bailleurs multilat�raux et bilat�raux o� fi-
gurent des �l�ments de conditionnalit� sur des instruments qui n'ont
pas �t� demand�s par les bailleurs . . . mais qui ont �t� exig�s par le
ministre de la sant�.
   Ceci �tant, dans le prolongement de la r�flexion sur la condition-
nalit� de l'aide � la sant�, se situe la question fondamentale de
l'�valuation des effets de l'aide ext�rieure dont le secteur sant� a b�n�-
fici�. On se limitera ici � de br�ves remarques soulignant d'une part
des �l�ments de plaidoyer en faveur de l'�valuation et d'autre part en
attirant l'attention sur des points de m�thode.
   Consid�rons par exemple des programmes d'aide qui veulent d�velop-
per l'assurance maladie pour (entre autres) augmenter la demande de
soins et pour utiliser les dispositifs assuranciels afin d'am�liorer la qualit�

186 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



des soins hospitaliers. Parce que les ressources en cause ont souvent un
co�t d'opportunit� �lev� dans les pays africains o� les syst�mes de sant�
sont sous-financ�s, et parce que l'h�pital joue un r�le central dans l'effi-
cience globale du syst�me de sant�, il y a l� une premi�re raison impor-
tante pour accorder la plus grande attention � l'�valuation rigoureuse de
ces aides. La deuxi�me tient � ce que ces �valuations ont sous plusieurs
aspects une nature de bien public (national, r�gional ou global), et
qu'elles sont g�n�ralement susceptibles de g�n�rer de tr�s importantes
externalit�s, d'une part pour la sph�re sp�cifique d'intervention du pro-
gramme �tudi� et d'autre part pour l'ensemble du secteur sant� (exter-
nalit�s syst�miques). Il est donc fondamental qu'elles soient bien con-
duites et que les r�sultats en soient tr�s largement diss�min�s. De plus,
ces caract�ristiques justifieraient que le co�t des �valuations ne soit pas
seulement support� par le bailleur qui finance le programme, mais aussi
par l'�tat et par l'ensemble des bailleurs qui seront des b�n�ficiaires
potentiels des externalit�s produites par l'�valuation. Mais certains
auront probablement tendance � se comporter en passager clandestin,
non pas en ne diffusant pas les r�sultats de leurs propres �valuations,
mais en ne leur accordant pas co�teuses suffisamment de moyens alors
que les �valuations sont souvent assez co�teuses29.
   Pour ces raisons, il conviendrait d'inclure syst�matiquement dans
les programmes nationaux de sant� (ou dans les swap) des pays
africains30, l'�valuation d'une s�lection d'interventions rigoureuse-
ment choisies sur la base de leur externalit�s potentielles et de leur
contenu en bien public, et de les conduire selon des m�thodes
rigoureuses. Leur financement devrait �tre assur� par le budget
g�n�ral. Mais elles pourraient �tre financ�es par un pool de bailleurs
et par l'�tat sur un compte d'affectation sp�ciale si le risque est fort de
voir leurs cr�dits tronqu�s par la r�gulation budg�taire. Elles pour-
raient �ventuellement �tre ins�r�es dans la conditionnalit�.
   Souvent, l'�valuation de l'aide � la sant� repose sur l'analyse de l'�vo-
lution de variables et d'indicateurs jug�s pertinents pour les structures
(ou les cibles) touch�es par le projet/programme d'aide (�valuation dite
� r�trospective �). Mais cette approche � avant/apr�s � ne suffit
g�n�ralement pas � fournir des r�ponses totalement convaincantes sur
les effets de l'aide. Encore trop peu d'�valuations sont assez rigoureuses
sur le plan m�thodologique pour v�ritablement �clairer sur l'impact de
l'aide � la sant�, notamment lorsqu'il s'agit d'interventions avec un

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 187



important volet institutionnel, d'interventions visant � �largir l'acc�s
aux soins ou � am�liorer la qualit� des soins. S'il est souvent d�licat de
proc�der � des �valuations randomis�es, il est essentiel d'�tablir un ou
des groupes de contr�le form�(s) de structures ext�rieures au pro-
gramme et dont les valeurs des indicateurs pertinents seront vraisem-
blablement similaires � celles que l'on aurait observ�es dans les struc-
tures expos�es au programme si elles ne l'avaient pas �t�. On acquiert
ainsi une id�e beaucoup plus rigoureuse de ce qui se serait pass� dans les
structures cibles si elles n'avaient pas �t� int�gr�es dans le programme.
Il est alors possible de comparer l'�volution des indicateurs pertinents
dans les structures expos�es au programme avec celles qui ne l'ont pas
�t�, ce qui donne une bien meilleure appr�ciation de l'impact de l'aide
qu'une comparaison avant/apr�s le programme. Mais pour limiter les
biais de s�lection, l'�valuation doit �tre soigneusement pr�vue avant la
mise en place du programme d'aide afin de d�terminer la composition
des groupes de contr�le. Ce type d'�valuation tend � se d�velopper � des
efforts notables sont faits � mais il reste, autant que l'on puisse en juger,
encore insuffisamment r�pandu dans le domaine de la sant�.



CONCLUSION

Il ressort des analyses qui pr�c�dent qu'il n'y a pas un instrument de
financement � privil�gier en mati�re d'aide au secteur de la sant�.
Chacun poss�de ses avantages et ses inconv�nients. Il convient donc
d'�tre tr�s pragmatique.
   Bien qu'il y ait des effets g�n�riques qui sont assez consubstantiels �
chaque instrument de financement, les avantages et les inconv�nients
de chacun d�pendront de la sp�cificit� de chaque projet ou pro-
gramme et de nombreux �l�ments contextuels. Il est naturellement
essentiel de choisir entre les diff�rents instruments � l'issue d'une
analyse soign�e des objectifs de l'action envisag�e, mais aussi de son
environnement interne (propre au secteur sant�) et externe (au-del�
du secteur). Dans la d�marche de choix, il convient par ailleurs d'ac-
corder la plus grande attention au cadre macro-�conomique, au
processus de pr�paration et d'ex�cution budg�taire et � la qualit� des
institutions, �l�ments qui auront une incidence forte sur les r�sultats
des politiques ou interventions soutenues par l'aide.

188 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Dans les pays africains, la fongibilit� est probablement assez faible
pour le secteur sant�, plus encore pour le secteur hospitalier et pour les
d�penses de recherche et d�veloppement. De ce fait, m�me si la non
affectation est ce vers quoi il faut tendre, l'affectation de l'aide dans le
secteur sant� y conserve un int�r�t probablement plus grand que dans la
plupart des autres secteurs. Ind�pendamment des autres critiques for-
mul�es � l'encontre de l'aide projet, l'argument de la fongibilit� ne peut
donc pas �tre utilis� pour �carter radicalement cet instrument dans l'ap-
pui au secteur sant�, contrairement � ce que le courant dominant de la
litt�rature sur l'efficacit� de l'aide tend � sugg�rer de mani�re g�n�rale.
   En revanche, la pr�f�rence doit �tre accord�e � l'aide programme
lorsqu'il s'agit d'appuyer des r�formes institutionnelles cons�quentes.
L'insertion de l'aide � la sant� dans un swap pr�sente de nombreux
avantages, mais l� o� le cadre institutionnel et l'environnement
macro-�conomique forment un contexte favorable � ce type d'instru-
ment, ce qui n'est pas le cas dans tous les pays.
   La question du financement de l'aide � la sant� par dons ou par
pr�ts ne peut �tre ignor�e dans le cadre d'une r�flexion sur finance-
ment qui int�gre la probl�matique de l'espace budg�taire dans une
perspective de moyen et long terme.
   Enfin, il convient d'insister sur la n�cessit� d'int�grer dans l'analyse
pr�sidant au choix d'un instrument d'aide � la sant� une r�flexion
soign�e sur les incitations qui, du point de vue de chacune des parties
prenantes (minist�re, structures d�centralis�es, prestataires de ser-
vices, bailleurs, etc.), seront g�n�r�es directement ou implicitement
par la formule retenue. C'est une dimension fondamentale de la
probl�matique du financement ext�rieur de la sant�, � la fois pour le
succ�s des interventions et pour leur p�rennit�. C'est sans doute l'une
des grandes le�ons qui se d�gagent depuis quelques ann�es des �tudes
th�oriques et empiriques sur l'efficacit� de l'aide au d�veloppement
d'une part et sur la r�forme des syst�mes de sant� d'autre part.



NOTES

  1. Voir �galement Burnside et Dollar, 2000.


  2. Revenu int�rieur brut per capita < 765$ en 2003. Classification
Banque mondiale.

          Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 189



  3. Chocs commerciaux � long terme et � court terme mesur�s
respectivement par la tendance des termes de l'�change et par l'instabi-
lit� des exportations.

  4. En novembre 2005, le FMI a cr�� une Facilit� de protection con-
tre les chocs exog�nes (FCE). � Les chocs ext�rieurs peuvent nuire
gravement aux pays � faible revenu, surtout � ceux dont l'�conomie est
peu diversifi�e et qui n'ont gu�re les moyens de constituer des r�serves.
L'exp�rience r�cente montre que l'aide ext�rieure peut �tre efficace
apr�s un choc, � condition d'�tre d�caiss�e rapidement. En outre, elle
doit �tre accompagn�e de politiques d'ajustement bien con�ues
(. . .) ; Bulletin du FMI, 16 janvier 2006, p. 5.

  5. Les dons de mat�riel biom�dical, lorsqu'on ne se soucie pas d'en
pr�voir les modalit�s de maintenance, en sont un bon exemple.

  6. Les justifications sont les m�mes pour l'aide � la balance des
paiements lorsqu'elle est affect�e, par exemple, � l'importation
d'�quipement chirurgical.

  7. Ce qui n'est pas toujours le cas et renvoie � la question de l'appro-
priation des projets et programmes par le pouvoir central ou d�centralis�.

  8. Les CAS doivent �tre int�gr�s au budget ; les CAS extrabudg�-
taires sont � proscrire.

  9. Le concept est donc diff�rent de l'apport que le gouvernement
doit effectuer en compl�ment (� en contrepartie �) de l'apport d'un
bailleur pour un projet donn�.

10. C'est le cas des deux �tudes pr�cit�es comme le mentionnent les
auteurs.

11. Le type de base de donn�es qui vient d'�tre �voqu� pr�sente les
caract�ristiques d'un bien public global avec externalit�s positives du
point de vue des organismes bilat�raux et multilat�raux de d�veloppe-
ment, ce qui en justifierait un financement commun par les bailleurs.

12. A fortiori si l'apport ext�rieur est express�ment coupl� � un apport
national (� matching funds �).

190 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



13. En Afrique subsaharienne : Afrique du Sud, Botswana, Cap Vert,
Gabon, Ile Maurice, Swaziland.


14. Ce qui n'est pas toujours le cas (Gabon et Swaziland par exemple).


15. Homologues, dialogues sur les politiques, avis lors des commis-
sions auxquelles participent les bailleurs dans le cadre des projets et
programmes, formations, etc. . . .


16. Il y a donc � appropriation � par le gouvernement.


17. Id�alement, le swap devrait couvrir la totalit� des activit�s et du
financement du secteur sant�. Mais dans la pratique, la plupart des
swaps se limitent aux d�penses publiques et � certains domaines jug�s
fondamentaux. Ils vont capter tout ou partie de programmes existants,
mais les nouvelles interventions seront obligatoirement int�gr�es dans
l'accord.


18. Ghana, Tanzanie, Mozambique, Ouganda pour ne citer que
quelques exemples.


19. Suite au Forum de haut niveau de Rome en f�vrier 2003, les
bailleurs bilat�raux et multilat�raux se sont engag�s � harmoniser leurs
politiques et leur proc�dure afin de renforcer l'efficacit� de l'aide et de
r�duire les co�ts de transactions pour les pays b�n�ficiaires en vue
d'une meilleure contribution � la r�alisation des Objectifs du Mill�naire
pour le D�veloppement. Ces engagements ont �t� r�affirm�s lors du
Forum de haut niveau tenu � Paris en mars 2005. L'harmonisation
porte notamment sur les approches et dispositions en mati�re de notifi-
cation, de gestion budg�taire financi�re et de passation de march�s.


20. Beaucoup p�chent par un exc�s d'optimisme en mati�re de
ressources publiques mobilisables, ce qui conduit � une ex�cution erra-
tique des d�penses publiques, d�sarticulant la coh�rence interne des
politiques sectorielles.


21. Ceci vaut �galement pour les swaps.


22. Et quand bien m�me il y aurait affectation.

       Aide ext�rieure au secteur de la sant� � Choix des instruments et enjeux � 191



23. L'IADM vise a lib�rer des ressources pour favoriser l'atteinte des
OMD dans les pays qui ont ou qui vont atteindre le point d'ach�ve-
ment de l'initiative PPTE.

24. On utilise commun�ment l'expression d' � espace fiscal � �
laquelle est la traduction litt�rale, mais conceptuellement fausse de
� fiscal space � � pour d�signer des questions qui rel�vent en fait de l'e-
space budg�taire et non du seul espace fiscal au sens strict.

25. La qualit� des institutions a �t� mesur�e par l'indice moyen de
corruption du Guide international du risque pays (GRICS).

26. Mais a-t-on �valu� les co�ts directs et indirects (externalit�s n�ga-
tives) de la non-�valuation et des �valuations � rapides � ?

27. Tous les programmes nationaux de sant� pr�voient de nombreuses
�valuations, mais elles sont encore trop souvent n�glig�es, faute d'une
r�elle volont� et de moyens appropri�s.

28. Voir (Letourmy A., B.D. Diakit�., 2003) et les �tudes r�alis�es en
2001 et 2003 sur l'ensemble de ces dispositions l�gales (Cissoko D.,
C.A.T. Ciss� . 2001 ; Traor� K., 2003a et b).

29. Selon le d�cret 311 (juin 2002). La liste des maladies en question
est fix�e par un arr�t� conjoint des Minist�res charg�s de la Sant�, de la
Solidarit� et des Finances. Dans le m�me ordre d'id�es, toute une s�rie
d'examens sont gratuits

30. Selon le d�cret 44 de 1968. Une atteinte morbide ou un accident
entra�nant des soins co�teux correspondent a priori � cette d�finition,
mais le secours ne peut d�passer 50 000 FCFA par trimestre.



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                                                          PARTIE 2

            Couverture du risque
       maladie : �tat des lieux

Chapitre 6 : Couverture du risque maladie en Afrique francophone :
�tat des lieux, d�fis et perspectives
  Jean-Pierre S�ry et Alain Letourmy


2.1. L'Assurance Maladie Obligatoire

Chapitre 7 : L'assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un
processus en cours
  Alain Letourmy, Oumar Ouattara

Chapitre 8 : La couverture du risque maladie en Afrique francophone
� �tude compar�e des projets de couverture universelle des soins en
C�te d'Ivoire et au Gabon
  Jean-Pierre S�ry

Chapitre 9 : R�forme du financement de la sant� au Kenya : �valua-
tion de la proposition d'assurance-maladie
  Guy Carrin, Chris James, Ole Doetinchem


2.2 Les mutuelles

Chapitre 10 : Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique
francophone
  Pascal N'Diaye

Chapitre 11 : Contribution des m�nages � faibles revenus � la micro
assurance maladie
  Bruno Galland


                                                                          CHAPITRE 6



                    Couverture du risque maladie
en Afrique francophone : �tat des lieux,
                                             d�fis et perspectives

                                       Jean-Pierre Sery, Alain Letourmy




 R�sum� : Ce chapitre est une contribution � l'analyse de la revue globale du
 r�le de l'assurance maladie en Afrique subsaharienne. S'inscrit dans le cadre
 des travaux de recherche men�s actuellement par la Banque mondiale sur
 l'analyse des forces, des faiblesses et du r�le potentiel futur de l'assurance ma-
 ladie dans les pays � faible revenu.
    Ce chapitre s'inspire des diff�rentes contributions pr�sent�es lors du colloque
 qui s'est tenu � Paris du 28 au 30 Avril 2004, sous l'�gide de l'Institut de la
 Banque mondiale, sur le th�me � l'am�lioration de l'acc�s aux services de sant�
 en Afrique francophone : le r�le de l'assurance �. Il vise notamment � d�gager
 et � analyser les principaux messages � retenir sur la couverture du risque
 maladie en Afrique francophone, en termes de conditions de d�veloppement de
 l'assurance et de son extension, en particulier aux populations les plus vul-
 n�rables. Le pr�sent document a essay� de pr�senter la photographie actuelle des
 syst�mes de couverture maladie existant en Afrique francophone. L'objectif vis�
 �tait de rechercher et de confronter la volont� des �tats d'am�liorer la structure
 du financement de l'acc�s aux soins de sant� avec les �cueils que ne manqueront
 pas de rencontrer les r�formes envisag�es.
    Les diff�rents syst�mes de couverture maladie en vigueur dans les pays
 africains francophones sont vari�s dans leurs formes et leurs contenus. Les sys-
 t�mes de couverture obligatoire, bien que disposant d'une ant�riorit� historique,



                                                                                   197

198 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  n'ont pas un grand impact �conomique et social : ils couvrent, dans les meilleurs
  des cas, 30% de la population et leur contribution au financement global du
  secteur n'est gu�re sup�rieure � 20%. Quant aux syst�mes de couverture volon-
  taire, bien qu'ils soient handicap�s par un environnement institutionnel d�favo-
  rable, ils exercent une certaine attractivit� aupr�s des populations qui y recourent
  de fa�on spontan�e pour s'assurer contre les petits risques. Le taux de p�n�tration
  des organisations mutualistes est quelquefois remarquable puisqu'il atteint 30 %
  dans certains pays comme le B�nin et le Burundi.
     Il est de plus en plus manifeste que les pays africains francophones veulent
  accorder un r�le primordial aux m�canismes assurantiels pour �tendre la cou-
  verture maladie � une plus grande frange de la population. Ces options de
  socialisation du risque maladie � une grande �chelle leur apparaissent comme
  des n�cessit�s absolues pour sortir de l'�tau � �trangleur � du financement des
  services de sant� par l'imp�t et l'aide internationale ; cette aide atteignant par-
  fois jusqu'� 70 % des besoins couverts (PHR PLUS, 2001). Toutefois, si l'am-
  bition d'instaurer l'assurance est l�gitime de par les effets b�n�fiques que les
  pays africains peuvent en tirer aux plans macro et micro �conomiques, les gou-
  vernants devraient cependant prendre la mesure des d�fis importants que
  soul�ve l'instauration de l'assurance maladie, surtout si celle-ci vise, comme
  c'est le cas de plus en plus dans les pays, la couverture universelle.
     L'assurance en effet ne peut s'accommoder d'un environnement institution-
  nel d�favorable. Si les promoteurs des projets sont en droit de demander
  logiquement des contributions aux b�n�ficiaires, il faudrait dans le m�me
  temps, garantir la disponibilit� et la qualit� de l'offre, car l'assurance cr�e des
  relations clients fournisseurs qui imposent aux parties des droits et des obliga-
  tions. Par ailleurs, il est louable politiquement de proposer l'assurance � toute la
  population, mais l'assurance ayant un co�t �conomique, que fait-on de la
  grande majorit� de la population vivant en-dessous du seuil de pauvret�
  absolue ?
     Toutes ces interrogations n'ont pas pour but de pousser les �tats � reculer
  devant les difficult�s. Au contraire, elles visent � les sensibiliser et � leur faire
  prendre les dispositions utiles en vue de cr�er les conditions de succ�s des pro-
  grammes en cours. Ils doivent le faire en mobilisant toutes les parties prenantes
  sans coloration politique pour monter des programmes d'assurance consensuels,
  culturellement et �conomiquement acceptables pour les populations. A cet �gard,
  le r�le des partenaires du d�veloppement est d�terminant dans l'apport d'appuis
  techniques � la formulation, au suivi et � l'�valuation des politiques nationales

                         Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 199



   de financement de la sant�. Les besoins des pays africains dans ce domaine sont
   importants en raison de la complexit� de gestion et de la technicit� de la t�che.



CONTEXTE D'IMPLANTATION DES R�GIMES
DE COUVERTURE MALADIE

Les populations africaines rencontrent de nombreux probl�mes pour
acc�der aux services de sant�. Les infrastructures sanitaires sont sou-
vent d�ficientes et les populations rurales et d�favoris�es y ont diffi-
cilement acc�s. Le r�seau public souffre d'une insuffisance de moyens
budg�taires, en particulier pour l'achat d'�quipements et de m�dica-
ments essentiels, ainsi que du manque de formation et de motivation
des travailleurs. Les services de sant� sont essentiellement fournis par
des structures et du personnel du secteur public. Les minist�res de la
Sant� ne disposent pas des outils n�cessaires pour am�liorer leur ges-
tion des partenariats entre les secteurs public et priv�, ce qui entra�ne
un niveau peu satisfaisant de soins et l'incertitude quant � la qualit� et
� la possibilit� d'am�liorer les performances.
   Les normes de sant� ne sont la plupart du temps pas atteintes et
l'esp�rance de vie � la naissance est faible, tandis que la mortalit�
infantile et celle des enfants de moins de 5 ans sont �lev�es. L'esp�-
rance moyenne pond�r�e de vie en bonne sant� � la naissance est de
45,8 ans (Sabri 2002). Le mauvais �tat de sant� est �galement d� au
recours limit� aux services de sant�, � la fois pour des raisons cul-
turelles et des raisons d'inaccessibilit� financi�re et g�ographique �
l'offre de soins. En outre, il y a une absence de politique de planifica-
tion et de programmation sanitaires de sorte qu'on assiste � une r�par-
tition g�ographique in�quitable de l'offre de soins. Les grandes
agglom�rations urbaines concentrent le plus grand nombre d'infra-
structures m�dicales au d�triment des zones rurales o� en g�n�ral on
observe un taux d'accessibilit� g�ographique notoirement faible. Dans
certains pays comme la C�te d'Ivoire, le taux d'accessibilit� g�o-
graphique aux structures de soins a �t� estim� � 18% en zone rurale
contre plus de 60 % en zone urbaine.
   La m�diocrit� des normes de sant� s'explique �galement par la
qualit� des d�terminants socio-�conomiques, comme le revenu, le

200 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



logement, l'�ducation et l'environnement. Ces pays dans leur grande
majorit� sont class�s parmi les pays � faible revenu avec des revenus
par habitant compris entre 200 et 400 dollars US. Seuls deux pays
�mergent avec des revenus par t�te d'habitant sup�rieurs � 600 US$. Il
s'agit de la C�te d'Ivoire (US$ 660 en 2001) et du Gabon (US$ 3 360
en 2001). Par ailleurs, la situation est rendue plus compliqu�e par l'in-
stabilit� politique dans les pays d�chir�s par la guerre civile et les con-
flits politiques (C�te d'Ivoire, Burundi, Guin�e, etc.)
   Tout cet environnement ne milite pas en faveur d'une mobilisa-
tion interne de ressources financi�res significatives. Les �tats, en
effet, ne disposent pas des ressources n�cessaires pour faire face �
l'immensit� des besoins sanitaires. Le secteur informel et rural est
pr�pond�rant notamment dans l'agriculture et l'�levage, cela r�duit
consid�rablement les capacit�s des gouvernements � collecter des
ressources fiscales tr�s importantes. Celles-ci ne d�passent gu�re
10 % du Produit National Brut (Preker 2004). Avec cela, il est �vi-
dent que les �tats ne peuvent couvrir par les ressources internes les
d�penses publiques de sant�. Les efforts de financement consentis
actuellement repr�sentent entre 4 et 6 % du PIB (OMS 2003). Le
recours � l'aide ext�rieure s'impose donc � ces �tats au point qu'ils
en sont largement d�pendants, cette aide atteignant parfois jusqu'�
70 % des besoins couverts. Dans ces conditions, ce serait utopique
de demander aux gouvernants de se conformer aux recommanda-
tions de la Commission macro�conomie et sant� de l'OMS qui con-
sid�re qu'il faut d�penser US$ 34 par t�te pour garantir la fourniture
des services de soins de sant� essentiels. Seuls quelques rares pays
peuvent se permettre de r�aliser cet objectif. Il s'agit du Gabon (127
US$ par habitant en 2001) et la C�te d'Ivoire (41 US$ en 2001 apr�s
avoir atteint US$ 54 en 1998). Les autres pays, avec leur niveau de
dotations budg�taires actuelles et leurs autres ressources, ne
sauraient supporter ce surco�t financier. Cela fait que ces pays fer-
ment les yeux sur ce qui est souhaitable pour une meilleure sant� des
populations en se concentrant sur ce qui est possible, compte tenu de
l'environnement �conomique d�favorable qui pr�vaut dans ces pays.
   Face � cette situation de d�s�quilibre entre les ressources affect�es � la
sant� et l'immensit� des besoins � couvrir, les populations sont souvent
mises � contribution de fa�on significative pour faire face � leurs

                        Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 201



d�penses de sant�. Selon le Rapport mondial sur la sant� en 2003, les
m�nages supportent la plus grande part du financement global de la
sant� (entre 60 et 80 % du financement total de la sant�), d�montrant
ainsi leur capacit� et leur volont� de se prendre en charge pour la couver-
ture des frais de sant�.
   Les contributions des m�nages sont collect�es � travers plusieurs
sources dont l'analyse d�taill�e indique que les paiements directs vien-
nent en t�te, suivis des assurances sociales et des assurances priv�es.
La part des paiements non assurantiels est �lev�e, parce que la
majorit� de la population a recours soit aux services publics de soins
qui sont subventionn�s et qui sont les plus importants en terme quan-
titatif, soit au paiement direct du co�t des actes des praticiens du
secteur priv�. En payant directement de leurs poches, sans possibilit�
de remboursement par une tierce partie, ils sont expos�s au risque
d'appauvrissement quand on sait que le co�t des actes du secteur priv�
est plus �lev� que ne le permet la capacit� contributive des patients.
Cette situation est �tay�e par des �tudes r�centes qui indiquent que les
m�nages voient leurs revenus descendre en dessous du seuil de pau-
vret� du fait du paiement direct des soins.
   Par ailleurs, on observe une r�partition in�galitaire de la charge de
financement de la sant� entre les diff�rentes couches socioprofession-
nelles. En effet, l'�vasion fiscale qui a largement cours dans les pays
profite aux riches et aux classes moyennes, en outre du fait du caract�re
r�gressif de la fiscalit�, les m�nages � hauts revenus ne contribuent pas
proportionnellement � leur niveau de revenu. Par ailleurs, comme si les
gouvernants voulaient davantage favoriser les classes ais�es, les m�ca-
nismes d'allocation de ressources budg�taires aux diff�rents secteurs
d'activit�s creusent davantage les �carts entre les riches et les pauvres.
Sur le montant total des subventions que les gouvernants apportent aux
d�penses publiques de sant�, seulement 10 % reviennent au quintile le
plus pauvre, contre 30 % pour le quintile le plus riche. A titre com-
paratif, on note avec regret que ces m�mes dispositions discrimina-
toires ont �galement cours sous d'autres cieux, notamment en Europe
de l'Est et en Asie, m�me si les proportions y sont beaucoup plus
raisonnables (plus de 25 % au profit des riches contre 12 % pour les
pauvres en Europe de l'Est et 20 % pour les riches contre 18 % pour
les pauvres en Asie).

202 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



FAIBLE IMPLANTATION DES R�GIMES D'AASURANCE

Les diff�rents syst�mes de couverture maladie en vigueur dans les pays
africains francophones sont de formes et de contenus tr�s vari�s. Il y a
en effet des syst�mes de couverture obligatoire (explicites et/ou
implicites) et des syst�mes de couverture volontaire et des syst�mes de
couverture �tatiques, professionnels et communautaires. Ce sont des
syst�mes qui ne sont pas encore tr�s d�velopp�s pour des raisons que
nous �voquerons plus loin. Les populations couvertes par l'ensemble
des syst�mes existants, toutes formes confondues, repr�sentent 15 �
30 % de la population totale du pays.


Champ d'application restrictif des r�gimes obligatoires

Protection s�lective des �lites

Dans la presque totalit� des pays francophones au sud du Sahara, il a
exist� tr�s t�t, d�s les ind�pendances, des r�gimes obligatoires de cou-
verture des soins.
  Les personnes qui b�n�ficient des r�gimes d'assurance obligatoire
repr�sentent 2 � 30 % de la population selon les pays. Les pays qui
enregistrent les taux les plus �lev�s sont le Gabon (29 %) et le Togo
(23 %). Les pays � faible implantation sont le B�nin (2,95 %) et la
Guin�e (3 %).
  Les b�n�ficiaires de ces r�gimes se recrutent parmi les �lites que sont
les salari�s et/ou les fonctionnaires et leurs familles. Il faut cependant
relativiser les taux de couverture des r�gimes obligatoires qui sont
plut�t th�oriques que r�els. Car les dispositions r�glementaires qui
cr�ent les prestations ne sont pas effectives dans leur application, en rai-
son soit des difficult�s de tr�sorerie de l'�tat qui n'arrive pas � assurer sa
contribution, soit de l'insuffisance m�me des textes cr�ateurs du droit,
qui ne sont pas toujours suivis de mesures d'accompagnement.
  Les prestations servies ne sont pas toujours du go�t des b�n�ficiaires
dans la mesure o� non seulement elles ont �t� impos�es par l'�tat au

Tableau 1: Taux de couverture des syst�mes l�gaux (2004)

              Cote d'ivoire   B�nin    Burundi   Gabon   Guin�e  Tchad  Togo

Population
  couverte         6 %       2,95 %     10 %      29 %    3 %   3,95 %  23,2 %

                        Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 203



moment de la cr�ation de ces r�gimes mais de plus, elles n'ont pas
connu d'�volution notable depuis leur cr�ation. En effet depuis l'aube
des ind�pendances, c'est-�-dire plus de 40 ans apr�s, les prestations
servies restent toujours limit�es aux soins hospitaliers et aux soins
ambulatoires publics. Ces prestations n'�tant pas tr�s attractives pour
les b�n�ficiaires, ceux-ci ont �t� oblig�s de souscrire soit � une assu-
rance compl�mentaire soit carr�ment � une assurance de substitution
aupr�s des compagnies d'assurance priv�e (c'est le cas des fonction-
naires et agents de l'�tat en C�te d'Ivoire et au Gabon). Cette situation
aboutit � une double imposition dans la mesure o� les int�ress�s font
face � la fois aux cotisations du r�gime obligatoire et aux cotisations des
r�gimes compl�mentaires et/ou des r�gimes de substitution.
   Ces r�gimes l�gaux de couverture maladie n'ont pas toujours de
personnalit� juridique propre puisque dans la plupart des pays, les
organismes de gestion du risque sont des services centraux de l'�tat.
Dans ce cas, l'�tat est fortement impliqu� tant dans le financement
que dans l'administration. Certes, les b�n�ficiaires sont quelquefois
mis � contribution, mais cela est insignifiant au regard de la contribu-
tion totale de l'�tat qui correspond dans certains pays comme le Togo,
le Gabon, la C�te d'Ivoire, au 4/5 du co�t des prestations. Il y a
cependant quelque rares cas o� en lieu et place des services centraux
de l'�tat, ce sont des �tablissements publics qui ont �t� cr��s avec une
certaine autonomie de gestion mais toujours sous le contr�le de l'�tat.


Faible impact de l'assurance sur le d�veloppement de la sant�

Selon de nombreuses litt�ratures sur la question, il ne faut pas accorder
� l'assurance obligatoire plus d'importance qu'elle ne peut en avoir en
r�alit�. Car au regard du tableau de financement global de la sant� dans
la plupart des pays africains francophones, la part du financement
g�n�r�e par l'assurance est la plus faible parmi les sources de finance-
ment du secteur. En effet, selon des �tudes de cas r�alis�es dans 6
pays : S�n�gal, Burundi, Gabon, C�te d'Ivoire, Rwanda, Tunisie, (OMS
2003), les d�penses publiques de sant� repr�sentent la part la plus
importante du financement total de la sant� dans trois cas (Tunisie,
S�n�gal et Burundi), tandis que dans les trois autres pays (C�te d'Ivoire,
Gabon, Rwanda), les d�penses priv�es viennent en t�te avec une part
pr�pond�rante pour les paiements directs et une faible part pour les
d�penses pr�pay�es (20 % des d�penses priv�es). Cette tendance est

204 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d'ailleurs g�n�rale dans toute l'Afrique puisque l'ensemble des contri-
butions des m�nages (assurance, paiements directs) repr�sente 58 % des
d�penses totales de sant� contre 42 % au titre des d�penses publiques.
   A titre de comparaison, on note que la m�me proportion est
observ�e au plan international. En effet, les d�penses totales de sant�
dans le monde (3,8 milliards de dollars internationaux soit environ 4
pour cent du PNB des pays en d�veloppement) sont financ�es princi-
palement par les m�nages � hauteur de 68 % dont 40 % au titre des
assurances. Les d�penses publiques ne contribuent qu'� concurrence
de 32 % (Carrin 2004). Toutefois, si les efforts de contribution des
m�nages dans les deux sph�res g�ographiques sont pratiquement
comparables, il y a lieu de noter la grande iniquit� qui existe dans la
r�partition du poids de la charge de la maladie entre les pays riches et
les pays pauvres. En effet, tandis que les pays en d�veloppement sup-
portent 90 % du poids de la maladie dans le monde, seulement 11 %
des d�penses mondiales de sant� y sont affect�es. (Preker 2004)
   La faiblesse relative de la part de l'assurance dans le financement
global de la sant� en Afrique francophone s'explique par le fait que
l'implantation de l'assurance maladie se heurte � des difficult�s d'or-
dre structurel, institutionnel et culturel. Au plan structurel, il faut
indiquer que le secteur formel est insuffisamment d�velopp�. On
estime � 10 % la capacit� de taxation dans les pays africains (Preker
2004), cela est nettement insuffisant pour accro�tre les ressources fis-
cales et permettre � l'assurance de g�n�rer des ressources. Du point de
vue institutionnel, c'est la faiblesse des capacit�s de gestion, le manque
de ressources, la qualit� de l'offre de soins et le manque d'incitations
du personnel de sant�. Enfin, les facteurs culturels ne favorisent pas
une bonne perception du risque li� � la sant�. Ce qui fait que le
recours aux soins de sant� modernes n'est pas syst�matique, les popu-
lations pr�f�rant les soins traditionnels.
   La combinaison de tous ces facteurs ne permet pas � l'assurance
maladie obligatoire d'�tendre son champ d'application personnel au-
del� de l'�lite qui compose les administrations publiques et les grandes
entreprises. C'est pourquoi, dans la plupart des pays o� elle est instau-
r�e, l'assurance maladie obligatoire en tant que r�gime autonome de
couverture maladie ne couvre en moyenne que 3 � 6 % de la popula-
tion, ce qui explique sa faible perc�e et partant sa faible contribution
au financement global de la sant� (20 %).

                           Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 205



Tableau 2 : Taux d'implantation de l'assurance volontaire (2004)

                  Cote d'ivoire  B�nin     Burundi   Gabon     Guin�e  Tchad  Togo

Assurances
  priv�es               3 %         0,6 %   0,1 %      6 %      0,1 %  0,4 %  0,2 %
Mutuelles
  de sant�            0,1 %      29,15 %      0        0        0,1 %    1 %  0,4 %
Syst�mes de
  pr�paiement         0,9 %           0      20 %      0         0       0     0




Emergence du mouvement mutualiste

Pour pallier aux insuffisances des r�gimes obligatoires, les populations
africaines recourent de plus en plus aux syst�mes de couverture spon-
tan�e que sont les mutuelles de sant� et les autres syst�mes de pr�-
paiement des soins. L'assurance volontaire concerne les associations
de financement communautaire de la sant� et les assurances commer-
ciales. Le niveau de couverture des r�gimes volontaires se situe
pratiquement dans la m�me fourchette (1 � 30 %) que les r�gimes
obligatoires (voir tableau 2).
   Ce tableau montre que dans certains pays comme la C�te d'Ivoire et
le Gabon, le secteur des assurances commerciales est relativement plus
prosp�re que le secteur priv� non lucratif. Par contre, dans les autres
pays notamment le B�nin et le Burundi, les organisations mutualistes ou
les syst�mes de pr�financement des soins viennent en premi�re ligne.
   Ces diff�rences peuvent trouver des justifications dans la structure
des �conomies nationales. Les pays comme la C�te d'Ivoire et le
Gabon sont class�s parmi les pays � revenu interm�diaire, ce qui signi-
fie que l'�conomie est forte et par cons�quent, les citoyens b�n�ficient
d'un pouvoir d'achat qui leur permet d'acheter les produits de l'assu-
rance priv�e inaccessible au citoyen moyen des pays � faible revenu.


La mutualit�, un mouvement en plein essor

Les mutuelles ont une place de choix dans les m�canismes de prise en
charge sanitaire des populations dans la mesure o� les r�gimes d'as-
surance maladie obligatoire ne couvrent qu'une infime partie des po-
pulations africaines, c'est � dire le secteur formel (15 � 30%). Les
autres couches de la population qui constituent dans certains cas 85%

206 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



de la population n'ont d'autre choix que de recourir aux syst�mes de
couverture spontan�s.
   L'essor des mutuelles a �t� r�cemment d�montr� par les conclu-
sions de l'Inventaire r�alis� en 2004 dans onze pays d'Afrique du
Centre et de l'Ouest par la Concertation entre les acteurs du
d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique. Selon cet Inven-
taire, le nombre d'organisations mutualistes recens�es s'�l�ve � 619
dont 366 fonctionnelles ; la population couverte est estim�e � plus
d'un million et demi de b�n�ficiaires dont plus de 200 mille
adh�rents.
   Cet Inventaire montre que la dynamique mutualiste n'est pas uni-
forme dans tous les pays enqu�t�s. Plusieurs r�alit�s sont observables:

� Certains pays sont en avance dans la formulation de politiques (C�te
   d'Ivoire, S�n�gal, Mali) ;

� D'autres le sont dans la taille des syst�mes (Mali) ;

� D'autres dans le nombre et la diversit� des formes (S�n�gal, Burkina
   Faso, Guin�e), tandis que

� D'autres observent un d�veloppement assez lent (Niger, Tchad,
   Togo, Mauritanie, Cameroun)


La mutualit� : une dynamique d'extension
de la protection sociale

En Afrique subsaharienne, le secteur informel et les indigents appa-
raissent comme les parents pauvres des syst�mes de protection sociale
existants puisqu'ils ne b�n�ficient pas des m�canismes formels,
comme ceux reconnus au secteur moderne, pour assurer leur prise en
charge sociale. Face � ce vide institutionnel, les syst�mes spontan�s de
couverture apparaissent comme un facteur d'att�nuation des �carts de
couverture entre le secteur formel et le secteur informel et une alter-
native cr�dible aux difficult�s et/ou insuffisances relev�es dans le fonc-
tionnement des r�gimes l�gaux (financements parall�les, corruption).
Cet �tat de fait a entra�n� quelquefois dans certains pays des superpo-
sitions de couvertures puisque les b�n�ficiaires de la couverture l�gale
se retrouvent �tre les m�mes que ceux qui ont adh�r� aux syst�mes de
couverture volontaire (C�te d'Ivoire, Togo).

                       Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 207



Impact de la mutualit� sur le d�veloppement de la sant�

Les atouts. Le mouvement mutualiste a enregistr� des avanc�es nota-
bles dans certains pays comme le Mali et le S�n�gal. Dans ces pays, les
avanc�es se sont traduites par :

� l'augmentation significative des recettes des prestataires ;

� l'am�lioration du taux de fr�quentation des formations sanitaires ;

� l'augmentation des garanties ;

� la rationalisation des soins ;

� des initiatives communautaires pour garantir la capacit� contributive ;

� l'amorce d'un dialogue amorc� avec les prestataires ;

� des strat�gies novatrices d'articulation de l'assurance maladie avec
   des activit�s g�n�ratrices de revenus ;

� la promotion de l'�quit� ;


   Au Mali notamment, la mutualit� a obtenu des acquis ind�niables
gr�ce au soutien de l'�tat qui en a fait une composante � part enti�re
du programme d�cennal de d�veloppement sanitaire et social. L'appui
de l'�tat malien s'est concr�tis� par l'adoption d'un code de la mutua-
lit� et la mise en place d'une structure fa�ti�re : l'Union Technique de
la Mutualit� (UTM).

Les limites. Cependant, de mani�re g�n�rale, les mutuelles de sant� ne
font pas assez d'effort pour attirer les clients (leur vendre l'assurance),
am�liorer l'administration (la formation du personnel). De plus, elles
sont confront�es � des difficult�s tenant notamment � la faiblesse du
niveau de financement du secteur, au b�n�volat des administrateurs
des mutuelles. La question de la faiblesse du niveau de financement
des organisations mutualistes doit �tre �tudi�e en ayant � l'esprit qu'il
existe des liens tr�s �troits entre la capacit� contributive, les revenus et
les montants allou�s � l'assurance maladie. En effet, parmi les nom-
breux facteurs qui influencent les taux de p�n�tration des syst�mes
d'assurance maladie, la capacit� contributive tient une place impor-
tante. Les droits d'adh�sion et les cotisations que les membres d'une
mutuelle acceptent de payer proviennent des revenus. Or souvent ces

208 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



revenus sont instables du fait de la d�gradation constante de la situa-
tion �conomique de beaucoup de r�gions rurales africaines, (coton,
caf�). La cons�quence d'une telle situation est le fait que l'on observe
une forte sensibilit� de la contribution pour l'assurance maladie � la
variation des revenus. Par exemple, selon des �tudes de cas r�alis�es
en Guin�e, si les prix des cultures fluctuent, il y a syst�matiquement
une variation des taux d'adh�sion ; cela explique que l'adh�sion aux
organisations mutualistes est fortement corr�l�e aux performances
�conomiques du secteur car l'on a observ� que le taux de p�n�tration
est tr�s faible dans les zones � croissance n�gative ; par contre, les
taux de p�n�tration initiaux et de croissance interne sont �lev�s dans
les zones � forte croissance (Galland 2004).
   Par ailleurs, il faut �galement tenir compte du caract�re h�t�rog�ne
du secteur informel qui comprend des groupes de personnes riches et
d'autres tr�s pauvres. C'est pourquoi, la plupart des programmes d'as-
surance ciblant le secteur informel sont volontaires en raison des
nombreuses difficult�s pratiques qu'il y a pour instituer des modalit�s
d'adh�sion obligatoire parmi les populations du secteur. Dans ce cas,
les principaux d�fis � relever sont la volont� d'adh�rer et de rester
dans le plan d'assurance et de trouver les moyens de faciliter l'enre-
gistrement de nouveaux adh�rents.
   Tous ces facteurs concourent � l'instabilit� des revenus qui p�se
lourdement sur le d�veloppement et la p�rennit� des syst�mes d'assu-
rance maladie � adh�sion volontaire. Il convient donc d'avoir une
bonne connaissance de la distribution des revenus des m�nages en vue
d'estimer des taux de p�n�tration en fonction du montant des
garanties propos�es. Ce qui n'est pas souvent le cas dans les pays o�
l'on s'empresse de mettre en place des programmes d'assurance sans
une �tude de faisabilit� v�ritable.
   Au total, il est apparu � l'�vidence que les programmes d'assu-
rance volontaire ne peuvent assurer leur p�rennit� en raison de leur
faible taille qui ne leur permet pas d'avoir une large dispersion du
risque sur un grand nombre d'adh�rents. La difficult� est de trouver
le niveau appropri� des cotisations � lever. Par ailleurs, un autre fac-
teur limitant est le fait culturel qui ne permet pas aux populations
cibles de prendre conscience des principes de l'assurance.

                       Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 209



APPROCHES DIVERSES VERS LA COUVERTURE UNIVERSELLE

Objectifs des r�formes en cours

Tous les acteurs du syst�me � savoir (gouvernements, prestataires,
ONG, secteur priv�, et surtout les communaut�s, les m�nages et les
individus) sont conscients que les probl�mes du financement de la
sant� constituent des enjeux importants par rapport � la viabilit� des
syst�mes de sant� et par rapport � l'�quit� et la r�duction de la pau-
vret�. C'est pourquoi, ils accordent une attention prioritaire au r�le de
l'assurance dans les r�formes en cours, en raison de l'incidence des
m�canismes assurantiels sur le d�veloppement des r�gimes de sant� et
sur la r�alisation de leur objectif, � savoir garantir l'�quit� de la contri-
bution financi�re, favoriser la mobilisation de ressources addition-
nelles, promouvoir l'efficience et l'efficacit� de l'offre de soins.
   L'ambition affich�e dans les diff�rentes r�formes est de concevoir
des politiques et des strat�gies capables de conduire � de v�ritables
am�liorations de la performance du syst�me de soins, tant au plan de
l'am�lioration de la sant� que de la protection financi�re des individus
et des m�nages et de leur satisfaction vis-�-vis des services offerts.
   L'imp�t tout seul n'arrive pas � financer les d�penses publiques de
sant� qui, de plus en plus, sont couvertes par les contributions des
m�nages. Au d�part, ces contributions �taient principalement le pro-
duit du recouvrement du co�t des actes, traduisant ainsi la participa-
tion des populations au financement des soins de sant�. Cependant,
tr�s vite, on s'est rendu compte des limites du recouvrement direct des
co�ts des actes et pour y pallier, la tendance dans ces pays a et� le
recours aux m�canismes d'assurance comme alternative au finance-
ment actuel de la sant�. L'option assurantielle est per�ue comme une
strat�gie pour mobiliser davantage de ressources en jouant sur la soli-
darit� du grand nombre devant le risque maladie individuel.


La mobilisation de ressources additionnelles

Comme cela a �t� dit plus haut, les ressources affect�es aux d�penses
nationales de sant� ne sont pas suffisantes pour couvrir l'ensemble des
besoins exprim�s ou potentiels. Dans ce cadre, l'assurance ne joue pas

210 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



un r�le d�terminant, essentiellement en raison de sa faible implanta-
tion. Le d�fi que veulent relever les gouvernants dans les facteurs de
progression vers la couverture universelle est de favoriser une plus
grande dispersion du risque de mani�re � �largir la taille des r�gimes
d'assurance, autant que faire se peut, � l'�chelle nationale. Ce faisant,
ils escomptent engranger de ressources additionnelles pour le secteur
de la sant�, afin d'avoir un niveau de financement du secteur trois �
quatre fois plus important que les ressources actuelles et qui leur per-
mettrait d'approcher les normes de l'OMS selon lesquelles il faut au
moins 34 dollars US par t�te pour assurer aux populations un paquet
minimum de soins. Aussi, le niveau de financement attendu devrait-il
permettre d'am�liorer l'efficience et l'efficacit� de l'offre de soins
pour r�pondre � l'attente des populations qui sont de plus en plus
exigeantes par rapport � la qualit� des prestations servies.


Am�liorer la gouvernance d�mocratique du secteur

L'une des fonctions de l'assurance est de favoriser la d�mocratie afin que
les populations b�n�ficiaires s'approprient les programmes tant au niveau
du contenu technique que des conditions de leur viabilit�. Cela se traduit
pour l'assurance volontaire, par la recherche de bases communautaires
fond�es sur la responsabilit�, l'autonomie et la participation. Pour l'as-
surance obligatoire, la recherche de la d�mocratie commande la partici-
pation des repr�sentants des assur�s � la gestion et la garantie par l'�tat
de sa non immixtion dans le choix des dirigeants des institutions.


Promouvoir l'�quit� et lutter contre la pauvret�

La justification officielle des r�formes du financement de la sant� est
la volont� des gouvernants de permettre � toutes les couches sociopro-
fessionnelles du pays d'acc�der � un paquet minimum de soins. Cela
en raison du fait que les r�gimes de couverture existants ne favorisent
que l'�lite �conomique et politique alors que les couches exclues
repr�sentent entre 80 et 90 % de la population. En outre, les m�ca-
nismes d'allocation budg�taire dans le secteur de la sant� sont dis-
criminatoires vis-�-vis des pauvres. Les dotations budg�taires allou�es
aux secteurs primaire et secondaire sont moins importantes que les
cr�dits affect�s au secteur tertiaire. Cette situation d�coule de la struc-
ture de la pyramide sanitaire qui se caract�rise par un afflux de

                       Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 211



ressources humaines, techniques et financi�res dans les grandes
agglom�rations urbaines au d�triment des zones rurales qui para-
doxalement sont les plus peupl�es et les plus expos�es au risque.
   Ce sont donc des consid�rations de justice sociale qui sont � la base de
la cr�ation des r�gimes universels. Cependant, il conviendrait de veiller �
ce que les m�canismes institu�s dans les programmes participent efficace-
ment � la lutte contre la pauvret�. Car il ne suffit pas de d�clarer un
r�gime universel pour combattre la pauvret� m�me si l'assurance par ses
effets de redistribution peut aider le pauvre � r�duire le co�t individuel de
sa prise en charge. La possibilit� d'infl�chir la pauvret� par l'assurance
doit �tre mat�rialis�e par des m�canismes appropri�s qui garantissent
effectivement la r�duction de la pauvret�. Par exemple, l'assurance doit
pouvoir r�pondre � la situation de pauvret� absolue (indigents), participer
� la gestion du risque de pauvret� en ciblant les groupes vuln�rables et en
r�duisant la probabilit� de perte de leur capacit� productive (secteur de
l'�conomie informelle). L'�tat pour sa part, doit se r�soudre � r�guler le
syst�me de fa�on � pr�server l'�quit�, la viabilit� et l'�galit� de tous les
citoyens devant le service social public. Cette assertion n'est pas une �vi-
dence dans les diff�rents pays o� souvent on assiste � une interf�rence des
pouvoirs publics dans la gestion des organismes de s�curit� sociale
notamment an niveau de la nomination des organes dirigeants.


Strat�gies mises en oeuvre dans les r�formes

Les approches vers l'universalit� de la protection varient d'un pays � un
autre. Certes, tous les pays ressentent la n�cessit� d'�largir le champ
d'application des r�gimes de couverture actuels sinon � toute la popula-
tion, du moins � la grande majorit� qui en est exclue. Mais le contexte
politique et social de chaque pays influenc� par le rapport des forces en
pr�sence a emmen� les diff�rents pays � adopter des strat�gies modul�es.
Ainsi, pendant que certains pays optent carr�ment pour la couverture
universelle gr�ce aux m�canismes de l'assurance obligatoire, d'autres, les
plus nombreux, ont opt� pour une progressivit� dans la mise en oeuvre de
la couverture universelle en privil�giant les approches communautaires.


Extension de la couverture par l'assurance sociale obligatoire

Quelques rares pays � revenu interm�diaire ont choisi l'option d'aller
directement � la couverture universelle. Il s'agit notamment de la

212 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



C�te d'Ivoire et du Gabon. Ces deux pays ont cr�e respectivement
depuis 2001 et 2004 des r�gimes d'assurance maladie obligatoire. Les
personnes couvertes sont tous les r�sidents du pays. Chaque personne
assujettie paie une contribution selon ses moyens et b�n�ficie de
prestations �gales pour tous. Sur le plan institutionnel, il y une dif-
f�rence d'approche ente les deux pays. Alors que le Gabon veut cons-
truire le nouveau syst�me en l'int�grant � l'organisme de pr�voyance
sociale existant (la Caisse Nationale de S�curit� Sociale) qui devra
cependant �tre restructur�e, la C�te d'Ivoire quant � elle, prend le
contre-pied en cr�ant ex-nihilo trois nouveaux organes de gestion qui
sont : la caisse nationale de l'assurance maladie couvrant le secteur
formel et informel, la caisse sociale agricole couvrant le secteur agri-
cole et le fonds de l'assurance maladie qui est charg� de la gestion de
la tr�sorerie de l'ensemble du syst�me.
   Les deux pays justifient l'option de l'assurance obligatoire comme
facteur de progression vers la couverture universelle par deux
consid�rations essentielles :

(1) Le citoyen moyen a les capacit�s financi�res pour s'acquitter
     d'une cotisation d'assurance. Cette assertion peut se v�rifier au
     regard de certaines donn�es comme le PIB par habitant des deux
     pays, qui selon le Rapport 2003 de l'OMS sur la sant� dans le
     monde, �tait l'un des plus �lev� de la r�gion (660 dollars US pour
     la C�te d'Ivoire et 3,340 dollars US pour le Gabon) et les per-
     formances relatives r�alis�es par les compagnies d'assurance
     priv�e qui sont plus prosp�res dans les pays � revenu interm�di-
     aire que dans les pays � revenu faible. Dans ces deux pays en effet,
     le taux de p�n�tration de l'assurance priv�e est plus �lev� que
     dans les autres pays de la r�gion : 3 � 6 % contre un peu plus de
     1 % dans les autres pays.

(2) L'assurance maladie obligatoire � l'�chelle nationale va permettre
     de r�duire la fraude sur les r�gimes existants dans la mesure o�
     chaque citoyen aura la possibilit� d'avoir une couverture dis-
     tincte. Les fraudes constat�es par exemple en C�te d'Ivoire sur les
     r�gimes de couverture sectorielle existants comme la Mutuelle de
     fonctionnaires et les mutuelles d'entreprises ont �t� estim�es �
     30 % (Rapport d'activit�s 2000 Mutuelle G�n�rale des Fonction-
     naires) ; cela parce que la carte d'assur� du fonctionnaire et du

                       Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 213



     salari� �tait utilis�e par tous les proches des b�n�ficiaires alors
     qu'ils n'y ont pas droit selon les textes.

(3) Les promoteurs de l'assurance obligatoire universelle critiquent
     souvent les r�gimes sectoriels existants comme ne pouvant
     assurer efficacement l'�quit� dans l'acc�s aux soins et le finance-
     ment de la sant�. Selon eux, un gouvernement responsable ne
     peut politiquement continuer � favoriser ind�finiment une frange
     de la population, f�t-elle l'�lite politique et sociale, au d�triment
     de la grande majorit�, la plus laborieuse d'ailleurs puisque travail-
     lant dans les secteurs les plus porteurs de l'�conomie nationale
     comme l'agriculture et l'informel. En mettant donc en place un
     r�gime universel, les gouvernants de ces pays veulent corriger une
     injustice sociale et �galement promouvoir des m�canismes de
     redistribution entre les riches et les pauvres, entre les diff�rentes
     g�n�rations et entre les malades et les biens portants.


Extension par l'assurance communautaire

Contrairement � la C�te d'Ivoire et au Gabon, tous les autres pays de
la zone ont pr�f�r� faire la promotion des syst�mes de pr�paiement
des soins dans la perspective de l'extension de la couverture sociale �
toute la population. Ces pays qui sont parmi les pays � revenu faible
ont d�cid� de capitaliser les acquis des organisations mutualistes qui
selon eux s'ins�rent assez bien dans l'environnement culturel des po-
pulations b�n�ficiaires. En proc�dant ainsi, il s'agit de faire preuve de
pragmatisme pour tenir compte de ce qui existe et qui est la cr�ation
des communaut�s plut�t que d'en faire table rase et y substituer des
institutions centralis�es dont on n'est pas s�r qu'elles puissent rencon-
trer l'adh�sion des populations et contribuer r�ellement au d�veloppe-
ment de indicateurs de sant�.
   Pour arriver � cela, des strat�gies diverses ont �t� d�velopp�es par
les pays. Ces strat�gies comprennent :

� l'�largissement du mouvement mutualiste par la cr�ation de nouvelles
   mutuelles dans d'autres zones du pays (Guin�e, Burundi, Togo) ;

� l'am�lioration de l'environnement institutionnel des mutuelles dans
   les pays o� le mouvement conna�t une forte expansion. Il s'agit ici de

214 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   doter les mutuelles d'un cadre r�glementaire (B�nin, Mali) ou
   d'am�liorer les relations avec l'offre de soins par la mise en oeuvre
   d'une politique de contractualisation (Tchad, Burundi, B�nin).


   Toutes ces mesures visent � am�liorer les capacit�s techniques des
mutuelles de sant� en vue de faire face � une demande qui sera de plus
en plus exigeante.


Extension par la promotion simultan�e des deux syst�mes

Si le mouvement mutualiste gagne du terrain surtout dans le secteur
informel, certains pays ne perdent pas de vue que l'assurance obliga-
toire peut prosp�rer dans des secteurs d'activit�s particuliers comme
le secteur structur� de l'�conomie. Le S�n�gal l'a compris en faisant
cohabiter les deux r�gimes d'assurance (Voir Encadr� 1), � savoir le
r�gime de l'assurance obligatoire mis en oeuvre par les Institutions de
Pr�voyance Maladie (IPM) qui op�rent au niveau des entreprises, et le
r�gime des mutuelles de sant� qui couvre le secteur informel et les
ind�pendants. Les IPM couvrent 10 % de la population s�n�galaise et
repr�sente 40% de l'ensemble des assur�s du pays. Ce sont des acquis
notables qui ont permis de constituer une source importante de
financement de la sant� (50 � 60 % des honoraires des m�decins, 50 %
du chiffre d'affaires des pharmaciens). Cependant les IPM restent
confront�es � des difficult�s qui fragilisent leur �quilibre financier. On
peut citer notamment l'absence de contr�le m�dical qui entra�ne des
fraudes, le recours syst�matique aux structures sanitaires du priv� et
l'absence de solidarit� financi�re entre elles. Ces difficult�s sont
d'ailleurs � la base des revendications des syndicats qui demandent la
mise en place d'une caisse nationale d'assurance maladie obligatoire
en lieu et place des IPM.


Protection des groupes vuln�rables

Quelques rares pays ont �t� sensibles au sort des personnes d�fa-
voris�es en leur offrant des m�canismes particuliers de prise en charge
sociale. Le cas le plus patent est celui du Mali et � un degr� moindre
celui du Burundi. Au Mali, par exemple, les autorit�s ont en vue la
mise en place du Fonds d'Assistance M�dicale (FAM). Les b�n�fi-
ciaires du FAM (5% de la population) sont les indigents et les personnes

                           Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 215



qui sont dans une incapacit� temporaire d'avoir des revenus. Les ser-
vices fournis sont les frais hospitaliers et ambulatoires. Le financement
est assur� par l'�tat, les collectivit�s territoriales et les bailleurs de
fonds. L'exp�rience du FAM est � encourager au regard des r�sultats
qu'il a obtenus dans d'autres contr�es comme au Laos et au Cam-
bodge. Dans ces pays, les FAM ont permis d'avoir un taux d'hospitali-
sation de 30 � 40 % parmi les populations r�ellement pauvres.




  Encadr� 1 : �volution du processus d'extension de la protection sociale
  au S�n�gal1*

  Le paysage de la protection sociale au S�n�gal il y a dix ans comprenait trois ensem-
  bles relativement �tanches :

  1)   Un syst�me l�gal de protection sociale couvrant les travailleurs salari�s du
       secteur priv�, et les agents fonctionnaires de l'�tat ainsi que leurs personnes �
       charge (entre 12 % et 17 % de la population).

  Ce syst�me l�gal �tait organis� de la mani�re suivante :


                                                               Agents de l'�tat/
   Branches                 Salari�s du secteur priv�           fonctionnaires

   Prestations familiales   Caisse de s�curit�                 Direction de la Solde
     et risques               sociale (CSS)                      et des Pensions
     professionnels
   Retraite                 Institution de Pr�voyance          Fonds national de
                              Retraite du S�n�gal (IPRES)        retraite du S�n�gal
                                                                 (FNR)
   Maladie                  Instituts de Pr�voyance            Direction de la Solde
                              Maladie (IPM)                      et des Pensions

  2)   Les travailleurs de l'�conomie informelle et du monde rural (70 � 80 % de la
       population) qui ne b�n�ficiaient d'aucune forme de protection sociale orga-
       nis�e mais �taient cependant pour la plupart inclus dans des r�seaux d'en-
       traide traditionnels.

  3)   Les indigents (personnes sans ressources soit 10 � 20 % de la population totale)
       qui pour la plupart ne b�n�ficiaient pas de protection sociale (les dispositifs
       d'assistance sociale n'intervenant que de mani�re ponctuelle et non concert�e).

  Depuis 1995 on assiste au d�veloppement de quatre types de syst�mes :

  1)   Des mutuelles de sant� dans le secteur formel : Mutuelles d'entreprises au pre-
       mier Franc couvrant des salari�s travaillant dans des entreprises du secteur

216 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




        formel et qui ne sont pas �ligibles � la couverture offerte par les IPM (comme
        les journaliers). Exemple : Mutuelle de Sant� des travailleurs des M�ches
             Darling (Dakar), Mutuelle de sant� de la SOCOCIM (Soci�t� Ouest
        Africaine de Ciment, Rufisque) ; Mutuelles syndicales qui peuvent soit com-
        pl�ter les r�gimes existants (mutuelles d'agents de l'�tat comme la Mutuelle
        de sant� de l'UDEN (Union d�mocratique des enseignants) ou la Mutuelle de
        sant� du SUDES (Syndicat unique et d�mocratique des enseignants du S�n�-
        gal)), soit intervenir au premier Franc, soit jouer sur les deux tableaux comme
        la mutuelle des volontaires et des contractuels de l'�ducation (MVCE) qui
        intervient au premier franc pour les volontaires (ces derniers ne b�n�ficient
        pas de la couverture maladie des agents de l'�tat fonctionnaires) et est com-
        pl�mentaire pour les contractuels (nombre marginal de membres).

  2)    Des syst�mes de micro-assurance sant� (mutuelles de sant�) organis�s le plus
        souvent sur une base g�ographique (village, quartier). Exemple : Wer Werl�
        (Thi�s), Bok Faj (Kaffrine), And Faju (Ouakam, Dakar), Oyofal paj (Kaolack).

  3)    Des syst�mes de micro-assurance sant� (mutuelles de sant�) organis�s par des
        r�seaux d'�pargne et de cr�dit pour leurs membres. Exemple : MECIB/Pamecas
        (Mutuelle d'�pargne et de Cr�dit d'Icotaf Boubess au S�n�gal, Dakar).

  4)    Des mutuelles de sant� professionnelles de travailleurs de l'�conomie
        informelle g�r�es par des groupements professionnels ou f�d�rations de pro-
        ducteurs. Exemple: mutuelle de l'UNCAS (Union Nationale des Coop�ratives
        Agricoles du S�n�gal)

      Tous ces syst�mes sont mus par un objectif similaire : prodiguer une couverture
  financi�re face aux risques de maladie et de maternit� (par le pr�-paiement des coti-
  sations et le partage des risques) et am�liorer l'acc�s aux soins des personnes ne
  disposant jusqu'alors d'aucun syst�me de protection sociale en sant� ou d'une cou-
  verture tr�s insuffisante.
      Par leur existence, leur participation � des r�seaux (unions et f�d�rations de
  mutuelles comme l'UMSD), leurs n�gociations avec l'offre de soins et les collectivit�s
  locales, ces syst�mes parviennent � attirer l'attention sur la n�cessit� d'�tendre la
  protection sociale � un nombre plus important de personnes, et � mobiliser un ensem-
  ble de partenaires (l'�tat, les partenaires sociaux, les partenaires du d�veloppement)
  et de ressources autour de la probl�matique d'extension de la protection sociale. Tr�s
  t�t l'�tat s�n�galais a montr� un r�el int�r�t pour ces exp�riences en cr�ant une cel-
  lule d'appui au d�veloppement des mutuelles, la CAMICS, devenue depuis Cellule
  d'Appui au Financement de la Sant� et au Partenariat (CAFSP), dont l'une des fonc-
  tions est d'accompagner la conception et la mise en place de mutuelles par diverses
  actions : formation, �tudes de faisabilit�, etc. Ce d�veloppement progressif de parte-
  nariats et d'articulations (entre SPSC � Syst�me de Protection Sociale � Base Com-
  munautaire � , avec des mutuelles du secteur formel, avec l'offre de soins, avec les
  municipalit�s, etc.) permet �galement aux syst�mes d'�tre moins cloisonn�s et de

                         Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 217




participer � la construction progressive d'un syst�me de protection sociale de plus en
plus coh�rent.
   Malgr� cette �volution positive il semble que l'extension de la protection sociale
ne puisse pas uniquement s'appuyer sur un d�veloppement progressif des syst�mes
de micro-assurance ou mutuelles de sant�. A cela au moins deux raisons :

1)   Ces syst�mes ont des difficult�s � s'�tendre sur le plan g�ographique et �
     accro�tre la taille des populations couvertes. M�me si ces syst�mes parvien-
     nent localement � offrir une couverture de protection sociale en sant� qui
     r�pond aux besoins de leurs membres, ils ne parviennent pas � s'�tendre �
     d'autres zones ou d'autres cat�gories socio-professionnelles, en grande partie
     en raison de capacit�s de gestion trop faibles (gestion non professionnelle).

2)   La capacit� contributive des membres �tant g�n�ralement limit�e, la couver-
     ture l'est �galement en l'absence de subventions, avec une concentration sur
     un seul risque, la sant�, � l'exclusion d'autres risques comme le d�c�s, la
     retraite, la perte de revenu . . .

   En outre ces syst�mes ne remplissent pas pour l'instant d'autres fonctions
habituellement remplies par les r�gimes de s�curit� sociale comme celles de la soli-
darit� entre hauts et bas revenus (puisque les cotisations dans le cadre de ces sys-
t�mes sont tr�s souvent forfaitaires).
   De nouvelles pistes d'extension de la protection sociale � l'�conomie informelle
se dessinent au S�n�gal ; elles s'appuient sur ces syst�mes de protection sociale �
base communautaire tout en essayant d'en d�passer les limites.

Acc�l�ration du processus et conception de syst�mes d'envergure nationale
Au S�n�gal, on assiste depuis deux ans � une multiplication d'�v�nements et d'initia-
tives qui prouvent que l'extension de la protection sociale est aujourd'hui au coeur
des pr�occupations non plus seulement d'un minist�re (celui de la sant�) et d'un petit
nombre de promoteurs mais d'un ensemble d'acteurs et d'institutions, notamment :

Minist�re de la Femme, de la Famille du D�veloppement Social, Minist�re de la Fonc-
tion Publique, du Travail, de l'Emploi et des Organisations Professionnelles, Minist�re
de l'agriculture et de l'hydraulique, Minist�re de la Sant� et de la Pr�vention M�di-
cale, Minist�re des Finances / Direction des Assurances ; Partenaires
sociaux ; SPSC, unions de mutuelles, autres organisations de la soci�t� civile ; Parte-
naires au d�veloppement . . .

Des �v�nements marquants . . .
En mai 2003, est adopt�e la Loi sur les mutuelles de sant� au S�n�gal, mais le d�cret
devant lui donner application n'a pas encore �t� sign� � ce jour. Une r�flexion est
actuellement en cours, avec l'appui du Bureau International du Travail (BIT), en vue
d'�laborer un cadre l�gal sur les mutuelles de sant� dans les huit pays de l'UEMOA.
Dans ce cadre, le Gouvernement s�n�galais souhaite rouvrir la r�flexion sur le projet
de d�cret d'application et, si n�cessaire, sur la loi.

218 � L'Assurance maladie en Afrique francophone




        En 2003 est �galement cr�� le Cadre national de concertation sur le d�veloppe-
  ment des mutuelles de sant�. Il s'agit d'un groupe de r�flexion et d'�changes com-
  prenant des repr�sentants du Minist�re de la sant�, des promoteurs, des unions de
  mutuelles de sant�.
        En 2003 �galement, est cr�� le Comit� National du Dialogue Social (CNDS) qui
  est charg� de mettre en oeuvre la charte nationale sur le dialogue social adopt�e le
  22 novembre 2002. Le CNDS consid�re l'extension de la protection sociale comme
  une priorit� absolue permettant de renforcer la coh�sion sociale et a, � ce titre, mis
  en place une commission ad hoc charg�e de la protection sociale. Cette commission
  appuie notamment la mise en place d'un syst�me de protection sociale pour les tra-
  vailleurs du secteur des transports routiers (actuellement au stade de l'�tude de fai-
  sabilit�).
        En avril 2004, la Campagne mondiale sur la s�curit� sociale et la couverture pour
  tous est lanc�e au S�n�gal.
        En d�cembre 2004, les travailleurs du secteur des transports routiers regroup�s
  au sein du Syndicat National des Travailleurs des Transports Routiers du S�n�gal
  (SNTTRS) inscrivent parmi les objectifs de leur plateforme de revendications la ques-
  tion de la protection sociale. Ces revendications se concr�tisent par le lancement de
  l'�tude de faisabilit� mentionn�e plus haut.
        En juin 2004 est adopt�e la Loi d'Orientation Agro-Sylvo Pastorale (LOASP) ; elle
  pr�voit la d�finition et la mise en place d'un syst�me de protection sociale pour les
  ruraux (article 14) et le soutien de ce r�gime par l'�tat (y compris soutien financier)
  dans les cinq premi�res ann�es qui suivent le d�but de son fonctionnement ; un plan
  de mise en oeuvre de ce r�gime doit par ailleurs �tre d�fini par l'�tat en concertation
  avec les organisations professionnelles agricoles dans les deux ans qui suivent la
  promulgation de la loi, � savoir avant juin 2006 (article 15).

  Mis en coh�rence au sein de la SNPS . . .
  Ces �v�nements sont en outre depuis peu (fin 2005) int�gr�s dans le cadre logique de la
  Strat�gie nationale d'extension de la protection sociale et de gestion des risques
  (SNPS/GR) � la conception de laquelle un grand nombre d'acteurs ont particip�. L'ob-
  jectif principal de la SNPS/GR est l'adoption d'une vision politique globale, int�gr�e et
  concert�e de protection sociale qui permettra d'accro�tre l'acc�s aux instruments de
  gestion des risques et aux syst�mes de protection sociale chez les groupes vuln�rables
  les plus pauvres mais �galement aupr�s des autres cat�gories sociales � risque. Con-
  cr�tement elle vise � �tendre les instruments de protection sociale en faisant passer le
  taux de couverture en assurance maladie de 20 % � 50 % de la population en 2015 par la
  cr�ation � de nouveaux r�gimes mieux adapt�s aux besoins prioritaires des travailleurs
  du secteur non formel �. La mise en oeuvre de la SNPS/GR sera financ�e dans le cadre
  du nouveau Document de Strat�gie de R�duction de la Pauvret�.

  . . . et � travers la conception de syst�mes d'envergure nationale
  Ces �v�nements et la SNPS d�bouchent aujourd'hui sur des actions concr�tes : la
  conduite d'�tudes de faisabilit� pour la mise en place de r�gimes de protection

                              Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 219




  sociale pour les transporteurs routiers d'une part, et pour les personnes vivant de
  l'agriculture d'autre part. Les populations cibles concern�es sont importantes et
  r�parties sur l'ensemble du territoire s�n�galais: 400 000 personnes pour les trans-
  porteurs routiers (et leurs familles), pr�s de 5 millions de personnes pour les person-
  nes vivant de l'agriculture (et leurs familles).
      La conception de ces nouveaux syst�mes pose diff�rentes questions: celle de
  l'organisation de syst�mes de protection sociale d'envergure nationale, touchant des
  populations de l'�conomie informelle aux revenus divers, aux formes d'organisations
  vari�es ; celle de la contractualisation avec l'offre de soins (l� encore � une �chelle
  nationale) ; celle du financement de ces r�gimes (cotisations, taxes, subventions
  externes, etc.) ; celle du caract�re automatique ou volontaire de ces r�gimes ; celle
  de leur gestion technique (d�l�gation de gestion, montage de structures de gestion
  professionnelles) ; etc. Fond�s sur la confiance des populations car s'appuyant a pri-
  ori sur un certain nombre d'organisations pr�existantes (syndicats et Groupement
  d'Int�r�t Economique de transporteurs, mutuelles de sant� en milieu rural, coop�ra-
  tives de producteurs) ces syst�mes seront vraisemblablement plus viables que les
  syst�mes de petite taille (autres sources de financement, r�elle capacit� de n�gocier
  avec l'offre de soins, r�elles capacit�s de gestion, etc.) et capables d'offrir une pro-
  tection sociale plus compl�te � une population plus importante.

  Sources
  BIT/STEP & CNDS : 2005. Etude pour la mise en place d'un syst�me de protection maladie dans
      le secteur des transports routiers. Pr�sentation du syst�me et des principes de d�l�gation
      de gestion. Dakar, S�n�gal, d�cembre 2005. Rapport provisoire.

  BIT/STEP : 2005. R�flexion pr�alable � la mise en place d'un r�gime de protection sociale pour
      les � ruraux �, d�cembre 2005. Synth�se interm�diaire.

  Loi no2003-14 relative aux mutuelles de sant�, adopt�e le 16 mai 2003.

  Loi no2004-16 portant loi d'orientation agro-sylvo-pastorale, adopt�e le 25 mai 2004.

  Strat�gie nationale de protection sociale et de gestion des risques, rapport provisoire, octobre
      2005.




LES D�FIS DE LA COUVERTURE UNIVERSELLE

Des d�fis majeurs se dressent en effet sur le chemin de d�veloppe-
ment des programmes d'assurance maladie. La surestimation de la
capacit� administrative du pays, les contraintes de l'environnement
institutionnel et macro�conomique, l'importance de l'�conomie
informelle qui limite les capacit�s de taxation, les mod�les de r�forme
structurelle qui vont � l'encontre de la culture nationale ou n'en tien-
nent pas compte et la sous-estimation des � forces en jeu � repr�sen-
tent certains des obstacles qui s'opposent � une r�forme efficace de la

220 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



sant� dans de nombreux pays. En attendant, les insuffisances du
secteur public dues au manque de ressources financi�res continuent
de se multiplier dans la r�gion. Parmi les autres facteurs pertinents, il
convient de citer par exemple la d�gradation persistante de la qualit�
de l'offre de soins et le taux �lev� de pauvret� notamment dans les
zones rurales et p�riurbaines. Dans la presque totalit� des pays de la
zone, l'on constate une p�nurie de personnel qualifi�, l'insuffisance
de l'offre et le mauvais entretien du mat�riel, la d�t�rioration de l'in-
frastructure et une r�orientation des pr�f�rences et de la demande de
services de sant� priv�s.
   Par ailleurs, la plupart des pays en d�veloppement doivent faire face
� une pauvret� r�currente. Les taux de pauvret� relative ou absolue ne
sont pas reluisants. Par exemple dans certains pays comme la C�te
d'Ivoire, le taux de pauvret� relative et le taux de pauvret� absolue ont
�t� estim�s par des enqu�tes sur les m�nages de1998, respectivement �
33 % et 10 %. Le taux de pauvret� relative s'est m�me aggrav� du fait
de la guerre. Il est aujourd'hui de 44 % selon le rapport 2005 du
PNUD sur le d�veloppement humain en C�te d'Ivoire. Cela veut dire
que les populations sont trop pauvres pour financer des soins de sant�
qui ne leur apparaissent pas toujours comme �tant leurs besoins prio-
ritaires � cot� de l'�ducation, la nourriture et d'autres besoins sociaux
comme les fun�railles et les bapt�mes. En tout �tat de cause, les popu-
lations ne peuvent affecter � leurs d�penses de sant� plus de 2 % de
leurs ressources disponibles alors que le co�t moyen des prestations
sanitaires s'�l�ve lui � 5 % de ces ressources (Galland, 2004)
   Dans ce contexte, l'assurance peut-elle jouer un r�le de protection
efficace et durable contre les risques financiers li�s � la maladie ? Cer-
tains experts n'h�sitent pas � r�pondre par la n�gative, mettant en
doute la capacit� de l'assurance � lutter efficacement contre la pau-
vret�. Certes, l'exp�rience empirique indique que l'absence de couver-
ture maladie expose � une certaine vuln�rabilit�, donc constitue un
terreau fertile pour la pauvret�, mais au stade actuel des investigations,
il existe tr�s peu d'analyses sur le r�le protecteur du syst�me de sant� �
pr�server les individus contre les chocs financiers li�s � la maladie.
   En d�finitive, la couverture maladie quelle que soit sa forme, est
souhaitable en Afrique pour des questions d'�quit� et d'accessibilit�
aux soins. Il convient cependant de ne pas perdre de vue que des fac-
teurs tels la faiblesse de la capacit� contributive, la pauvret� r�currente

                        Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 221



et la disponibilit� de l'offre de soins constituent des entraves � l'adh�-
sion volontaire des populations � des programmes d'assurance ; m�me
si par ailleurs, la demande et la volont� d'acheter des produits d'assu-
rance existe. C'est pourquoi, la tendance � proc�der � des r�formes
structurelles plut�t qu'� r�organiser sur une base progressive ou
graduelle le mod�le existant pourrait rendre difficile la mise en place
effective de r�formes.



CONCLUSION

Les programmes d'assurance maladie en Afrique francophone peuvent
produire des effets b�n�fiques pour l'�tat et pour les populations.
Pour les �tats, il s'agit de faire en sorte que le co�t unitaire des soins
soit r�duit, la productivit� et l'efficience de services de sant� soient
assur�es et surtout que des ressources additionnelles en provenance
des m�nages soient mobilis�es pour am�liorer quantitativement et
qualitativement l'offre de soins. Quant au contribuable, par l'assu-
rance, il peut r�duire la barri�re financi�re � l'accessibilit� financi�re
de l'offre de soins et ainsi disposer d'une meilleure sant� pour con-
tribuer � la cr�ation des richesses nationales.
   Toutefois, ces nobles id�aux ne peuvent �tre atteints par l'assurance
qu'� la condition que celle-ci b�n�ficie d'un environnement institu-
tionnel favorable. Les �l�ments constitutifs de cet environnement
pourraient �tre les suivants :


En ce qui concerne l'assurance obligatoire :


� capacit� contributive et adh�sion de la population pour atteindre des
   effectifs suffisants ;

� rapport de forces favorable avec les prestataires ;

� action �clair�e de l'�tat : ajustement souple des recettes et des
   d�penses, codification, tutelle, r�gulation, facilitation ;

� croissance �quitable ;

� am�liorer la gouvernance dans le secteur de sant� ;

222 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� d�velopper les synergies entre la soci�t� civile, le secteur public et les
  bailleurs de fonds ;

� ma�trise par les r�gimes de la complexit� de la technique de gestion
  du risque, du contr�le et s�curit� financi�re.


En ce qui concerne les mutuelles de sant�

� une situation juridique claire qui d�finisse les marges de manoeuvre
  (sortir de la marginalit� et de l'action strictement ponctuelle) ;

� des r�gles �conomiques et prudentielles qui garantissent l'emploi des
  fonds ;

� une bonne articulation avec les autres structures du syst�me de sant�
  et d'�pargne ou micro assurance.


  Des exp�riences d'articulation entre les mutuelles et les institutions
de micro finance existent dans certains pays comme le S�n�gal. Ces
formules doivent �tre appliqu�es dans les autres pays pour les nom-
breux avantages qu'elles procurent et qui sont :

� la s�curisation des fonds de l'assurance ;

� la confiance instaur�e entre les membres et l'institution de micro
  finance ;

� la garantie d'une gestion professionnalis�e ;

� l'utilisation par l'assurance des canaux de diffusion de l'institution de
  micro finance ;

� l'exp�rience de l'institution de micro finance lui donne plus de con-
  fiance pour n�gocier avec l'offre de soins ;

� la cotisation demand�e par l'assurance est diminu�e.


  Ces facteurs (cadre juridique, d�mocratie, r�gles �conomiques et
contractuelles), s'ils sont combin�s, doivent permettre aux mutuelles
de contribuer au d�veloppement du syst�me de sant�. Par sa
dynamique de p�n�tration des populations cibles, le mouvement
mutualiste peut s'imposer comme un acteur important pouvant influ-
encer positivement les politiques nationales de sant�, l'organisation de

                       Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 223



la solidarit�. Dans cette perspective, l'�tat devrait �galement promou-
voir la synergie des investissements publics entre la sant� (soins pri-
maires et hospitalisation) et le d�veloppement des infrastructures, la
formation, etc.


Favoriser l'articulation des diff�rentes formes de financement

La mise en place dans les pays africains de plusieurs r�gimes d'assu-
rance maladie avec des modalit�s diff�rentes pose le probl�me de leur
articulation. Face � la raret� des ressources tant humaines que finan-
ci�res, il importe pour les pays africains promoteurs de plans d'assu-
rance maladie � vocation universelle de favoriser l'articulation entre les
diff�rentes formes de financement de la sant�. Il existe dans ces pays
des populations fragment�es qui ont des m�canismes de protection
propres � chacune d'elles. Il y a soit les formules de pr�paiement, les
formules de financement communautaire, l'aide sociale et les assu-
rances sociales par l'imp�t ou la parafiscalit� et les assurances commer-
ciales. Dans tous ces m�canismes, il y a une interp�n�tration popula-
tionnelle, c'est pourquoi, l'�tat devrait veiller � ce qu'il n'y ait pas de
superposition de couverture, donc possibilit� de double imposition.


Promouvoir des mesures sp�cifiques de lutte contre la pauvret�

Les solutions sp�cifiques pour faire face au probl�me de la pauvret�
existent dans certains pays. Ce sont :

� Cr�ation d'un fonds de sant� pour les pauvres, qui recevra directe-
   ment les dotations sans transiter par un fonds g�n�ral qui risque
   d'�tre � d�tourn� � par l'�lite. (Ghana)

� Cr�ation d'un fonds pour les non assur�s dans lequel est transf�r�e
   une partie des cotisations obligatoires des assur�s.

� Permettre au secteur formel de payer plus pour recevoir des presta-
   tions compl�mentaires couvrant une gamme plus large de patholo-
   gies que celles fournies dans le paquet minimum de services.

� Mise en oeuvre de v�ritables politiques de protection sociale en
   faveur de la r�duction et la gestion du risque en �laborant une
   meilleure articulation avec les documents de strat�gies de r�duction
   de la pauvret�. (DSRP)

224 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Privil�gier la progressivit� dans la mise en oeuvre
de la couverture universelle

L'exp�rience internationale montre que la transition vers un syst�me
universel est aussi importante que le but final et qu'il faudrait user de
flexibilit� pour parvenir � terme � la couverture universelle. A cet
effet, l'assurance volontaire pourrait jouer un r�le effectif dans la p�ri-
ode de transition de par sa capacit� de mobilisation des communaut�s,
sa proximit� et son ant�riorit� dans le processus de couverture sociale.
Par ailleurs, l'�tat doit �tre interpell� puisque sa bonne gouvernance
est requise notamment dans la formulation et la mise en oeuvre d'une
strat�gie nationale de financement de la sant�, dans le financement de
la mise en oeuvre de la politique de couverture universelle et dans le
monitoring de la performance en mati�re de couverture universelle.
   En outre, il faut se convaincre de ce que l'objectif d'atteindre la
couverture universelle est un long processus qui se construit de
mani�re progressive tant dans l'�largissement de son champ d'applica-
tion personnel que mat�riel. Des �tudes de cas tir�es des exp�riences
de la R�publique de Cor�e, de la Tha�lande et de la Malaisie confir-
ment cette assertion (Carrin, 2004). Dans ces pays en effet, il est
important de noter que les choix en mati�re de syst�me et la transition
vers la couverture universelle tiennent compte d'un certain nombre de
constatations bas�es sur le r�alisme et sur les conditions sp�cifiques �
chaque pays.



NOTE

 1. Cette note a �t� produite par plusieurs membres du BIT / STEP
sous la supervision de Christine Bockstal coordinatrice du BIT / STEP
pour l'Afrique.




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    formes de financement �. Communication au Colloque � L'am�lioration de l'ac-
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                          Couverture du risque maladie en Afrique francophone � 225



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2.1. L'Assurance maladie obligatoire


                                                                        CHAPITRE 7



L'assurance maladie obligatoire au Mali :
         Discussion d'un processus en cours

                                    Alain Letourmy, Oumar Ouattara




R�sum� : Le Mali s'est engag� depuis plusieurs ann�es dans la mise en place
d'une assurance maladie obligatoire pour les salari�s des entreprises du
secteur formel, les salari�s contractuels de l'�tat et pour les fonctionnaires. Le
processus correspondant est loin d'�tre achev� et il serait pr�somptueux d'en
tirer des enseignements d�finitifs. Il est n�anmoins instructif de l'analyser
dans son �tat actuel, car il illustre bien les difficult�s de toutes sortes,
�conomiques, politiques et sociales, que connaissent bon nombre de pays
d'Afrique de l'Ouest pour concr�tiser une d�marche de protection sociale. Au-
del� du besoin incontestable de couverture maladie et du projet que ce besoin
justifie, il faut en effet s'interroger sur les facteurs qui facilitent sa r�alisa-
tion ou qui freinent son avancement.
   On se propose ici, dans une premi�re partie, de d�crire la couverture maladie
existante au Mali et d'indiquer l'orientation de la politique men�e pour
l'am�liorer, en particulier par la mise en place d'un r�gime d'assurance maladie
obligatoire (AMO). Puis, on pr�cisera le contenu du projet lui-m�me, dans son
�tat actuel, ainsi que les �tapes de son d�roulement. Enfin, on livrera quelques
�l�ments d'analyse destin�s � mieux comprendre la dur�e du processus.




                                                                                   229

230 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



L'ORIGINE ET L'ORIENTATION DU PROCESSUS DE CR�ATION D'UN
R�GIME D'ASSURANCE MALADIE OBLIGATOIRE

Pourquoi une assurance maladie obligatoire ?

A l'origine du processus de cr�ation d'un r�gime d'assurance maladie
obligatoire pour les salari�s du secteur priv� et les fonctionnaires, il y a
un constat d'insuffisance de la couverture maladie existante au Mali. Il
est utile de d�crire celle-ci dans ses grandes lignes, d'abord pour justi-
fier plus pr�cis�ment le projet, ensuite pour mieux comprendre le
processus lui-m�me.
   La couverture maladie au Mali sera pr�sent�e en consid�rant dans un
premier temps l'ensemble des dispositions l�gales qui concernent soit
l'ensemble de la population, soit des cat�gories particuli�res. Mais
comme ce dispositif l�gal s'est r�v�l� peu efficace, il a induit des initia-
tives diverses de protection maladie, qui l'ont compl�t� ou se sont
enti�rement substitu�es � lui. Elles constituent un second volet de la cou-
verture existante, qui n'am�liore pas la situation de fa�on satisfaisante.


Le dispositif l�gal de couverture maladie

Le dispositif l�gal de couverture maladie comprend des mesures qui
s'appliquent � toute la population et des mesures ciblant des cat�-
gories particuli�res1.

Le dispositif qui s'applique � toute la population Le recouvrement des
co�ts r�git l'acc�s aux soins au Mali et la couverture maladie de la
population se d�finit d'abord par une s�rie d'exemptions du paiement
des tarifs. La tarification des soins publics et communautaires, qui
d�termine les sommes demand�es � la population, ne correspond,
quant � elle, qu'� une partie des co�ts de production. Ainsi elle par-
ticipe d�j� implicitement d'une forme de couverture maladie, l'autre
partie des co�ts �tant de la responsabilit� du financement public.
   Les personnes atteintes d'un certain nombre de maladies, � affec-
tions chroniques � caract�re social � peuvent recevoir des soins gra-
tuits ou partiellement gratuits dans le secteur public (les m�dicaments
sp�cifiques et les examens paracliniques ne sont pas pay�s)2.
   En cas de situation exceptionnelle dont les cons�quences pour la
personne d�passent ses ressources propres, le secours national peut
�tre d�clench� de fa�on ponctuelle et non permanente3.

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 231



   Il est �galement possible que toute personne en difficult� soit dis-
pens�e de paiement. A cet effet, les maires et les pr�fets peuvent
d�livrer des certificats d'indigence (certificats � soins gratuits �) aux
personnes sans ressources pour se faire soigner dans les formations
publiques. La d�livrance du certificat vaut engagement de paiement.
   Enfin, le service hospitalier public est tenu d'apporter des soins
d'urgence � toute personne pr�sente sur le territoire national sans
exiger de paiement pr�alable4. Le paiement est exigible ensuite aupr�s
de la personne ou de l'�tat si elle n'est pas solvable.


Le dispositif r�serv� � des cat�gories particuli�res Il existe d'abord
toute une s�rie d'exemptions cat�gorielles qui donnent aux personnes
correspondantes un acc�s gratuit � certains services de soins. Ces
exemptions r�sultent principalement de la politique de sant� publique
ou de la politique des ressources humaines dans le secteur de la sant�.
   Dans le cadre du programme �largi de vaccination (PEV), tous les
enfants peuvent �tre vaccin�s gratuitement dans les centres publics
contre les maladies suivantes : coqueluche, variole, tuberculose, diph-
t�rie, t�tanos, poliomy�lite, typho�de. Par ailleurs, les examens sont
gratuits pour les enfants de 0 � 14 ans, les �l�ves et �tudiants, les sol-
dats pendant la dur�e l�gale de leur formation de base. Le personnel
socio-sanitaire, leurs conjoints, leurs enfants, leurs p�res et m�res
b�n�ficient de la gratuit� de l'ensemble des examens y compris les
actes de radiologie et de scanner5.
   Les femmes enceintes ayant besoin d'une c�sarienne sont �gale-
ment prises en charge gratuitement depuis 2005.
   Les personnes de plus de 60 ans b�n�ficient de tarifs r�duits (50 %)
dans les formations publiques ; cette mesure ne s'applique pas aux
familles6. Il existe enfin une carte � vieillesse � d�livr�e par la Maison
des a�n�s ou par les Collectivit�s territoriales qui donne un acc�s gra-
tuit � certaines formations publiques et communautaires. Il faut en
faire la demande et elle donne droit � la gratuit� de consultation et � la
dispense de 10 % des frais de m�dicaments.
   A c�t� des exemptions cat�gorielles, il existe des dispositions
attach�es � certains statuts professionnels. Deux d�crets ont fix� les
conditions de prise en charge des fonctionnaires dans les �tablisse-
ments hospitaliers publics. La r�gle g�n�rale est le paiement de 80 %
des frais d'hospitalisation (hospitalisation signifiant occupation d'un
lit) par l'administration de r�f�rence d'un fonctionnaire qui a recours

232 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� ce type de soins. Cette disposition ne s'applique pas aux familles et le
statut g�n�ral de la Fonction publique ne pr�voit rien pour les soins
ambulatoires : consultations, m�dicaments, examens.
   Certains fonctionnaires de statut particulier (Forces de s�curit� et
Forces arm�es) ont un acc�s � des dispensaires ou infirmeries propres.
Les Forces arm�es disposent m�me d'un service de sant� complet,
avec des personnels propres (m�decins, infirmiers). L'h�pital de Kati
est la r�f�rence pour les soins de troisi�me niveau. Ce service est
ouvert aux familles des militaires7. Les soins li�s � la grossesse et � l'ac-
couchement sont donc en principe assur�s pour ces fonctionnaires et
leurs familles.
   Les accidents du travail et les maladies professionnelles n'ont
aucune reconnaissance juridique pour les fonctionnaires civils. En
revanche, pour les militaires, les cons�quences des blessures de guerre
donnent lieu � prestations.
   Les salari�s relevant du Code du travail8, y compris les salari�s con-
tractuels de l'�tat9 b�n�ficient :

� d'une part de la m�me disposition que les fonctionnaires pour la
   prise en charge de l'hospitalisation. C'est l'entreprise concern�e
   (donc l'�tat pour ses contractuels) qui paie les 80 %.

� d'autre part des prestations pr�vues par le code de Pr�voyance sociale,
   au titre des r�gimes � Prestations familiales �, � R�paration et pr�ven-
   tion des accidents du travail et maladies professionnelles � et � Pro-
   tection contre la maladie � et de l'assistance sanitaire et sociale organ-
   is�e par l'Institut National de Pr�voyance Sociale (INPS).


   Les assur�s sociaux correspondant et les membres de leur famille
re�oivent gratuitement des prestations de m�decine d'entreprise
(R�gime de protection contre la maladie) et de m�decine de caisse
(Action sanitaire et sociale) dans les centres m�dicaux de l'INPS
(centres m�dicaux interentreprises : CMIE, protection maternelle et
infantile : PMI, centres dentaires infantiles : CDI) ou les infirmeries
d'entreprise (IE). Ces prestations consistent en consultations m�di-
cales, octroi de m�dicaments de premi�re n�cessit�, analyses m�dicales
et examens de radiologie (radio pulmonaire).
   Le dispositif de l'INPS est financ� par une contribution des
employeurs au titre des trois premiers r�gimes : respectivement 8 %
pour le r�gime � Prestations familiales �, 1 � 4 % (en moyenne 2 %)

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 233



pour le r�gime � R�paration et pr�vention des accidents du travail et
maladies professionnelles � et 2 % pour le r�gime � Protection contre
la maladie �. L'INPS d�livre les prestations gr�ce � un ensemble de
structures de soins, auxquelles il fournit des moyens de fonction-
nement : personnel pay� par lui, dotation de m�dicaments, dotation
de mat�riel et de fluides. L'appareil de soins de l'INPS utilise un mon-
tant de ressources fix� chaque ann�e sous la forme d'un budget soumis
au Conseil d'Administration. Il y a en tout 14 CMIE, 3 PMI et 1 CDI.
   Les prestations servies aux affili�s � l'INPS sont de nature pr�ven-
tive et curative. Les formations de sant� de l'INPS effectuent d'abord
les services correspondant � la m�decine du travail. Elles intervien-
nent aussi en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles
pour donner les soins de leur niveau. Les soins de niveau sup�rieur
correspondant � ce type de sinistre sont dispens�s dans les h�pitaux ou
donnent lieu � �vacuation. Dans tous les cas, l'INPS paie les factures
ext�rieures. Les formations de l'INPS effectuent aussi le suivi des
grossesses et les accouchements des femmes salari�es, �ventuellement
des femmes de salari�s, si leurs moyens le permettent. De m�me, les
salari�s et leurs familles peuvent recevoir au sein de ces formations les
soins de premier niveau et des m�dicaments ou des examens, dans la
mesure de la disponibilit� des moyens.


L'application du dispositif l�gal

Le dispositif qui s'applique � toute la population La prise en charge
des pathologies lourdes est effective, mais n'intervient qu'en milieu
hospitalier, souvent � des stades avanc�s de la maladie. Pour le VIH-
Sida, les soins sont gratuits.
   Le secours aux indigents est peu op�rant. Le certificat d'indigence
ne donne aucune couverture et ceux qui les d�livrent ne paient pas les
formations. Des cas de fraudes ont �t� signal�s, si bien que de nom-
breuses structures de soins refusent leur acc�s aux indigents certifi�s.

Le dispositif r�serv� � des cat�gories particuli�res Les exemptions sont
en principe appliqu�es et les cat�gories touch�es b�n�ficient g�n�rale-
ment, dans le secteur communautaire, des avantages pr�vus dans les
formations publiques. Dans les centres de sant� communautaires
(CSCOm) et les structures publiques de premier niveau, la tarification
appliqu�e aux moins de 18 ans est la moiti� de la tarification g�n�rale.

234 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Les enfants scolaris�s et les �tudiants b�n�ficient de conditions priv-
il�gi�es d'acc�s. Le PEV fonctionne. La tarification r�duite est
appliqu�e aux personnes �g�es dans les CSCom. En revanche, la Carte
vieillesse est tr�s peu diffus�e.
   La prise en charge de frais d'hospitalisation des fonctionnaires est
consid�r�e comme insignifiante et elle ne donne lieu qu'� des verse-
ments faibles aux h�pitaux. De nombreux fonctionnaires ignorent
d'ailleurs cette disposition.
   Le service de sant� des Arm�es est a priori fonctionnel, mais de
qualit� disparate ; la couverture du m�dicament reste probl�matique,
notamment pour les familles.
   Pour les salari�s relevant du Code du travail, il y a un acc�s s�lectif
aux CMIE, DE et IE du fait des limites des moyens qui leur sont
allou�s. En revanche, les CMIE s'ouvrent de plus en plus � une clien-
t�le ext�rieure aux affili�s de l'INPS et qui paie les prestations. Cet
apport de ressources ne semble pas profiter aux affili�s car, d'une
fa�on g�n�rale, les salari�s ou les employeurs d�noncent les insuffi-
sances de ce dispositif.



La couverture priv�e et les dispositifs compl�mentaires

L'�tendue pratique de la couverture correspondant aux dispositions
l�gales a entra�n� le d�veloppement d'une couverture priv�e et
quelques exp�rimentations en secteur public.

Les r�gimes d'assurance volontaire organis�s par des mutuelles Les
mutuelles se sont d�velopp�es dans le cadre l�gal d�fini par l'�tat (loi
n�96-022 du 21 f�vrier 1996 et d�crets 136 et 137 du 2 mai 1996). Ce
d�veloppement permet � des salari�s ou � des fonctionnaires d'adh�rer
volontairement � des r�gimes d'assurance maladie. Il s'agit soit de
r�gimes ad hoc, soit de r�gimes fond�s sur le produit de l'Union tech-
nique de la mutualit� malienne (UTM), d�sign� comme � Assurance
maladie volontaire � (AMV). La gestion de ce produit est externe aux
mutuelles de base. Ce produit a un co�t acceptable pour les employ�s :
440 FCFA par mois et par personne pour un acc�s en tiers payant aux
formations publiques et communautaires avec des tickets mod�rateurs
de 40 % en ambulatoire et de 25 % pour l'hospitalisation. L'adh�sion
familiale est obligatoire. Il existe une option donnant acc�s au secteur

  L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 235



priv�, mais elle est beaucoup plus on�reuse (5 826 FCFA). Cette solution
mutualiste est actuellement accessible dans les r�gions de Bamako,
Koulikoro, Sikasso, Kayes, S�gou et Mopti. Certaines mutuelles, qui
diffusent le produit AMV de l'UTM, organisent aussi une prise en
charge � un co�t privil�gi� dans certaines formations de sant�, sans qu'il
y ait un dispositif d'assurance.
  La couverture fournie au total par les mutuelles ne correspond
encore aujourd'hui qu'� une population de taille r�duite. Environ
35 000 personnes sont couvertes par une assurance. En outre pr�s de
20 000 personnes ont un acc�s privil�gi� � une formation de sant�.

Les r�gimes d'entreprise Le dispositif de l'INPS a �t� con�u dans l'at-
tente d'un r�gime d'assurance maladie10. Les textes sont assez flous et
ne pr�cisent pas si c'est l'employeur, l'employ� ou l'INPS qui inter-
vient financi�rement en cas de maladie et selon quel partage. Selon
l'Article 36 du Code de Pr�voyance sociale, toute entreprise doit
assurer � ses travailleurs un service m�dical et sanitaire destin�, � en
attendant l'institution d'un R�gime d'Assurance Maladie, � dispenser
des soins aux travailleurs et le cas �ch�ant � leur famille �.
  Certaines entreprises priv�es commerciales et certains anciens
�tablissements publics maintenant privatis�s ont ainsi mis en place une
couverture � maison �, � partir du constat d'insuffisance radicale du
dispositif l�gal. Diff�rents mod�les sont observables et d'ailleurs se
combinent au sein de certaines entit�s:

A) Le Fonds social de l'entreprise (5 % des b�n�fices selon la loi)
     prend en charge une partie des soins des employ�s et de leurs
     familles, au m�me titre que d'autres d�penses sociales (naissances,
     mariages, d�c�s, etc.). Le Fonds est g�n�ralement g�r� par un
     Comit� pilot� par des repr�sentants syndicaux. Il d�cide
     annuellement des sommes allou�es � la couverture maladie et de
     la nature des prestations. Ce dispositif est souvent con�u comme
     compl�mentaire des prestations de l'INPS. Certains Fonds pren-
     nent en charge des �vacuations. Souvent il y a un plafond par
     employ�, c'est-�-dire pour lui et ses ayants-droit, si l'on admet
     que cette notion soit d�finie dans ce cadre tr�s souple.
        Il n'y a pas de r�gle g�n�rale pr�cisant quelles prestations sont
     offertes par les dispositifs articul�s sur le Fonds social, si bien que,
     au sein d'une m�me entreprise, il peut y avoir des disparit�s entre

236 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



    �tablissements localis�s dans des r�gions diff�rentes. En outre la
    gestion du Fonds a tendance � �tre opaque et la couverture
    d�pend du b�n�fice de l'entreprise.

B) L'employeur prend lui-m�me en charge une partie des d�penses
    de soins et finance une dotation annuelle � cet effet. La � Caisse
    maladie de l'entreprise � paye une partie des frais hospitaliers et
    ouvre une enveloppe pour le remboursement des m�dicaments.
    Un ticket mod�rateur est r�cup�r� sur le salaire. La gestion est
    assur�e par le service social sous contr�le de la direction des
    ressources humaines. Ce type de r�gime est non contributif pour
    les employ�s et le montant allou� pour les prestations est � la dis-
    cr�tion de l'employeur. La gestion est a priori plus claire et est
    sous contr�le du contributeur.

C) L'employeur incite � la cr�ation d'une mutuelle � adh�sion volon-
    taire qui diffuse le produit AMV de l'UTM. Le r�gime est con-
    tributif et ses prestations sont d�finies. A ce jour, 26 entreprises
    sont couvertes par ce produit mutualiste.

D) L'employeur souscrit un contrat de groupe aupr�s d'une compa-
    gnie d'assurance priv�e. Le paiement de la prime est partag� entre
    l'employeur (majoritaire) et l'employ�. Il existe �ventuellement
    plusieurs garanties au sein de l'entreprise (encadrement et per-
    sonnel d'ex�cution). Les garanties couvrent les ayants-droit de
    l'employ� et sont plafonn�es par famille. Le co�t de ces contrats
    est tr�s �lev�, mais l'acc�s au secteur priv� est autoris�.

E) L'entreprise a son propre appareil de soins qu'il met � disposition
    de son personnel et des familles. Ce mod�le est adapt� � des situ-
    ations particuli�res de d�ficit total d'offre publique ou priv�e dans
    le voisinage. La mine d'or de Sadiola illustre ce mod�le difficile-
    ment r�plicable.

Les exp�rimentations associant le secteur public de soins

A) Le syst�me de r�f�rence �vacuation

    Pour permettre une meilleure r�f�rence en cas de grossesse �
    risque, plusieurs centres de sant� de cercle ont organis�, en cr�ant
    une caisse de solidarit�, un partage du co�t d'�vacuation et de prise
    en charge entre la malade, l'association gestionnaire du centre de

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 237



     sant� communautaire qui envoie la malade et le centre de sant� de
     cercle. Le syst�me de caisses de solidarit� pour la prise en charge
     des grossesses obst�tricales est aujourd'hui diffus� depuis 1995 �
     une vingtaine de cercles (21) et il donne satisfaction11. Le partage
     tripartite est variable d'un cercle � l'autre. Un objectif est d'associer
     les communes au financement des caisses de solidarit�. Un autre est
     de transformer les caisses en mutuelles couvrant le risque obst�tri-
     cal. Le dispositif demande une participation directe du malade et sa
     gestion est le plus souvent r�alis�e au niveau du cercle par le
     m�decin-chef et son �quipe. Son extension � d'autres risques
     (risque chirurgical) a �t� mise en oeuvre dans un certain nombre de
     cercles.

B) Exp�riences locales de fonds de solidarit�

     Pour les plus pauvres, certaines ONG, associ�es au centre de cercle
     et aux collectivit�s territoriales, ont mont� des fonds locaux de soli-
     darit�. L'exp�rience de S�lingu�, r�pliqu�e � plus grande �chelle �
     Bougouni est repr�sentative de ce dispositif, qui a servi de mod�le
     pour r�fl�chir � un Fonds national, qui sera �voqu� ci-dessous.
         A S�lingu� (commune de 70 000 habitants), le Fonds d'assis-
     tance m�dicale est aliment� par les communes associ�es au centre,
     par le centre sur les b�n�fices du m�dicament et par des subven-
     tions issues de MSF-Luxembourg, qui a men� l'exp�rimentation
     (MSF-Luxembourg, 2000). A Bougouni, c'est l'�quipe de cercle de
     la direction r�gionale de l'action sociale qui est le pilote de
     l'op�ration et l'exp�rience associe le cercle et les communes.


Les enseignements � tirer du fonctionnement
du dispositif l�gal et des exp�rimentations

L'observation du fonctionnement du dispositif l�gal d�bouche sur un
constat assez accablant. Ni les exp�rimentations, ni les solutions
priv�es individuelles ne semblent la solution de remplacement id�ale.
Trois constats relatifs � la couverture existante incitent au change-
ment : l'inefficacit� du dispositif l�gal, les exclusions qu'il engendre,
l'iniquit� et parfois l'inefficience associ�es aux dispositifs priv�s.
   Le dispositif l�gal est relativement extensif en th�orie, mais il est de
toute fa�on complexe. Il est �clat�, car rel�ve de nombreux textes
(statuts des personnes, codes, d�crets). Son fonctionnement n'est pas

238 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



vraiment coh�rent, notamment parce que l'�tat ne finance pas les dis-
positifs non contributifs qu'il a mis en place et ne veille pas au respect
des mesures qu'il a �dict�es (tarification, secours aux indigents). Les
lacunes de la couverture l�gale ne viennent pas uniquement de l'im-
pr�cision des textes. C'est leur application qui est probl�matique. L'in-
formation des personnes est en cause, mais aussi les comportements.
Beaucoup ignorent certaines des dispositions qu'ils pourraient
mobiliser, celles-ci tombent en d�su�tude. Le manque de ressources
clairement affect�es p�nalise certains aspects de la couverture. Il n'y a
pas de m�canisme v�ritablement assurantiel. Le plus proche, celui de
l'INPS, ne d�finit pas clairement un risque, ni une garantie. La contri-
bution est de toute fa�on insuffisante. Le r�sultat est que la couverture
maladie l�gale se r�duit � tr�s peu de choses. Des cat�gories a priori
solvables sont sans protection et sont alors confront�es au co�t de la
protection individuelle ou au co�t des soins lorsqu'un �v�nement
grave survient.
   La couverture l�gale engendre des exclusions pour raison finan-
ci�re : les indigents sont touch�s en premier, mais aussi des fonction-
naires ou des salari�s incapables de r�gler des factures ou d'avoir acc�s
� une couverture priv�e. Les dispositifs priv�s palliatifs ne corrigent
que partiellement ce d�faut. L'AMV de l'UTM reste inaccessible �
beaucoup, en raison de sa tarification individuelle. La raret� des
ressources produit une discrimination, notamment dans l'acc�s aux
CMIE. Certaines cat�gories sont vues comme nettement privil�gi�es :
personnel de l'INPS, des grandes entreprises, personnels de sant�,
forces arm�es.
   Enfin, certains dispositifs priv�s sont inefficients (r�gimes maison
avec plafond individualis�). Leurs co�ts de gestion semblent �lev�s.
Les assurances volontaires mutualistes n'offrent pas un acc�s au
secteur priv�, car les prix demand�s ne sont pas n�gociables et con-
duisent � des garanties ch�res.


L'assurance maladie obligatoire dans une perspective
de couverture universelle

L'�tat de la couverture existante incite � d�velopper des dispositifs
d'envergure suffisante, qui soient coh�rents et qui assurent une base
de protection contre la maladie � un co�t raisonnable. Il n'y a pas de
raison que les salari�s et les fonctionnaires ne b�n�ficient pas de cette

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 239



base, d�s lors que des sommes non n�gligeables sont affect�es � cet
objectif sans grand r�sultat pour les salari�s et que les fonctionnaires
semblent int�ress�s par l'assurance volontaire mutualiste. La forme
qu'il convient de donner � cette couverture est assez �vidente, d�s lors
que le principe du paiement des soins par les malades est maintenu.
L'assurance obligatoire constitue alors la modalit� de financement et
de couverture sociale la plus adapt�e au secteur de l'�conomie
formelle et m�rite donc d'�tre d�velopp�e.
   Mais le projet d'AMO ne peut �tre isol� de la politique d'ensemble
en mati�re de couverture maladie. Il a pris la suite du programme de
d�veloppement des mutuelles dont on a rappel� ci-dessus la place dans
le dispositif existant et qui a entra�n� une couverture au premier franc
d'employ�s du secteur priv� et de fonctionnaires. L'AMO est donc
destin�e � s'articuler aussi avec le dispositif inaugur� par la politique
de la mutualit�.
   L'AMO suppose le versement d'une contribution r�guli�re ouvrant
les droits aux assur�s. Elle ne peut, de ce fait, s'appliquer aux person-
nes sans ressources ou � faibles ressources. L'assurance maladie obliga-
toire ne peut pour l'instant r�gler ni le probl�me d'acc�s des indigents,
ni celui des groupes du secteur informel. Pour les seconds, la solution
mutualiste doit continuer � �tre d�velopp�e. Pour les premiers, un dis-
positif d'assistance s'impose. Ce dispositif doit reposer sur la solidarit�
la plus large possible, donc d�pendre d'un financement direct de
l'�tat. Il n'est pas envisageable que ce financement soit utilis� pour
payer les cotisations des indigents � l'assurance obligatoire. Un tel sys-
t�me p�naliserait sans raison les cat�gories interm�diaires, qui n'y
seraient pas �ligibles et qui ne peuvent pas non plus �tre affili�es sans
pr�caution � un dispositif contributif obligatoire.
   Dans ces conditions, la mise en place d'un dispositif d'assistance sp�-
cifique para�t s'imposer. L'id�e d'un Fonds d'assistance m�dicale (FAM),
relativement autonome par rapport au budget national, pr�sente l'avan-
tage d'identifier un payeur particulier pour les indigents et d'obliger �
mettre en place une proc�dure rigoureuse de reconnaissance de l'�ligi-
bilit�. De fait, ce Fonds n'a pas pour vocation � prendre en charge les
frais de soins de tous ceux qui n'ont pas de ressources r�guli�res. Si la
population �ligible au Fonds �tait trop importante, c'est le principe du
recouvrement des co�ts qu'il faudrait sans doute r�viser.
   Le projet d'AMO s'inscrit ainsi au Mali dans une perspective de
couverture universelle selon laquelle l'assurance obligatoire concerne

240 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



le secteur formel, les mutuelles le secteur informel et le FAM la popu-
lation r�siduelle indigente. On peut alors comprendre que le projet
d'AMO ait toujours �t�, comme on le verra, associ� au projet de FAM.
Mais on s'attendrait aussi � ce qu'il prenne en compte la r�alit� des
mutuelles de sant�.



LE CONTENU DU PROJET ET SA GESTION

Une gestion par � coups, reposant sur plusieurs �tudes

Si la mise sur agenda du projet d'AMO � en fait du double projet
AMO et FAM � a �t� relativement rapide, lorsqu'on compare la situa-
tion du Mali � celle des pays voisins, elle ne s'est pas traduite par une
gestion politique continue. On peut estimer que le projet a �t� lanc�
fin 1995, dans le cadre d'un ensemble de r�formes institutionnelles
concernant le secteur de la sant�. Le Programme de d�veloppement
sanitaire (PDS) a fourni le cadre programmatique dans lequel le projet
d'AMO a �t� lanc�. L'ensemble des r�formes �tait pilot� sur le plan
technique par un groupe de personnalit�s nationales (dit � groupe ad
hoc �), auquel une certaine autonomie �tait donn�e par rapport au
Minist�re charg� du secteur. On notera � cette occasion que le mi-
nist�re charg� � l'�poque du Travail et de la Fonction publique, qui
avait la tutelle de l'INPS et de la Caisse de Retraite du Mali (CRM),
principales institutions de protection sociale maliennes pour le secteur
priv� et la Fonction publique, �tait un peu � distance du suivi tech-
nique du projet.
   Une premi�re �tude de faisabilit� sur le sujet a �t� r�alis�e en 1997
(Letourmy A., 1997). Elle a proc�d� � une estimation globale de la
population �ligible et du co�t technique du r�gime, pour des paniers de
soins plus ou moins g�n�reux, incluant ou non l'acc�s au secteur priv�.
Elle a pos� le probl�me de l'affiliation des retrait�s du secteur priv� et
de la Fonction publique. Une estimation de la cotisation a �t� faite
pour divers paniers de soins, selon qu'on admet ou non une diff�rence
de cotisations entre actifs et retrait�s. Pour l'organisation institution-
nelle du r�gime, plusieurs formules ont �t� propos�es. Cette �tude n'a
pas �t� suivie d'effets imm�diats, ni pour l'AMO, ni pour le FAM �
propos duquel le m�me type d'estimation globale avait �t� faite.
Cependant, un projet de loi avait �t� pr�par� par le groupe ad hoc. Il

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 241



n'a jamais �t� repris � son compte par le gouvernement, ni soumis � la
repr�sentation populaire.
   Il a fallu attendre 5 ans environ pour que le projet soit repris. La situ-
ation avait chang� au niveau des attributions minist�rielles, avec la cr�a-
tion d'un minist�re en charge des affaires sociales qui �taient jusqu'ici
de la responsabilit� du minist�re charg� de la sant�. Le Minist�re du
D�veloppement Social, de la Solidarit� et des Personnes �g�es
(MDSSPA), avec sa Direction Nationale de la Protection Sociale et de
l'�conomie Sociale (DNPSES), qui �tait d�j� la tutelle des mutuelles de
sant�, devenait le pilote naturel des projets relatifs � la couverture mal-
adie. Deux d�marches ont alors �t� men�es simultan�ment.
   D'une part, le gouvernement malien a fait une requ�te pour obtenir
l'assistance technique du BIT, en vue de l'�laboration d'une politque
nationale sectorielle de s�curit� sociale. Le BIT a retenu le Mali
comme terrain privil�gi� (avec le Honduras et Sri lanka) dans le cadre
de son initiative d'extension de la protection sociale. Le BIT a ainsi
financ� trois �tudes � vis�e diagnostique sur la situation de la protec-
tion sociale dans le secteur priv�, le secteur public et le secteur
informel, que le MDSSPA a pilot�es en 2003 (Traor� K. 2003a et b,
Ouattara O. et coll. 2003). Ces �tudes ont donn� lieu � une restitution
et � un d�bat en mars 2003. L'objectif de l'intervention �tait d'amener
le MDSSPA � proposer un plan d'action en mati�re d'extension de la
protection sociale. Dans ce cadre, le BIT a financ� � la fin de l'ann�e
2003 une �tude sp�cifique sur l'AMO (Audibert J., Ciss� M. 2004), qui
avait pour objet d'analyser les diff�rents param�tres li�s � l'instaura-
tion d'une branche d'assurance maladie. Cette �tude a proc�d� � une
�valuation de la population �ligible, du niveau de cotisation pour un
certain panier de soins, mais n'a pas propos� de sc�narii diff�rents
d'organisation institutionnelle. Elle a n�anmoins envisag� que l'INPS,
la CRM et l'UTM soient parties prenantes de la gestion de l'AMO.
   D'autre part, le MDSSPA, qui avait install� un Conseil d'orienta-
tion de la protection sociale, pr�sid� par le Ministre du d�veloppe-
ment social et rassemblant les acteurs concern�s, a repris le projet
d'AMO et de FAM, qui avait �t� lanc� � la fin des ann�es quatre-vingt-
dix. Dans le cadre du Programme de d�veloppement du secteur sani-
taire et social (PRODESS I), le minist�re a produit d�but 2003, les
termes de r�f�rence d'une �tude de faisabilit�, formul�s dans des ter-
mes voisins de ceux de l'�tude de 1997, mais en insistant sur la pro-
duction de sc�narii relatifs � l'organisation institutionnelle du r�gime

242 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



et en demandant l'actualisation des donn�es recueillies six ans plus t�t.
Cette deuxi�me �tude de faisabilit� sur l'AMO et le FAM a �t� r�alis�e
en mars � avril 2003 (Letourmy A., Diakit� B.D. 2003) et a donn� lieu
en avril � une concertation nationale qui a permis de discuter ses
analyses et ses propositions.
   On observe donc une intense activit� de r�flexion et d'�tudes sur le
sujet en 2003 et la production de documents qui ont envisag� dif-
f�remment le montage de l'AMO, pour des paniers de soins non
�quivalents, mais sur la m�me population.
   En 2004, le MDSSPA a d�sign� deux experts nationaux pour faire la
synth�se des divers travaux r�alis�s et des d�bats auxquels ils avaient
donn� lieu. Ils ont travaill� avec le Conseil d'orientation cit� plus haut
et ont propos� un sch�ma d'organisation institutionnelle pour l'AMO
et le FAM (Ciss� M., Sissouma I. 2005). En fonction du rapport de ces
deux experts nationaux, le MDSSPA a programm� la suite du proces-
sus : r�alisation d'une �tude dite institutionnelle qui �tait cens�e
analyser le sch�ma propos� et en tirer les cons�quences pratiques,
notamment en termes de co�t et d'investissement ; r�alisation d'une
�tude dite technique qui �tait cens�e pr�ciser les param�tres et les �l�-
ments quantitatifs des deux dispositifs : effectifs concern�s, taux de
cotisation, panier de soins.
   Ces �tudes ont �t� effectu�es en juillet et octobre 2005. Elles
doivent donner lieu � un deuxi�me d�bat national en 2006 avant que
le projet ne passe v�ritablement dans une phase op�rationnelle : pro-
duction de la loi, d�signation d'organismes et de personnes ayant
directement en charge le projet.


Les caract�ristiques du r�gime

L'ensemble des rapports produits (�tudes et synth�se des experts
nationaux) permet d'avoir une id�e des caract�ristiques et de l'archi-
tecture institutionnelle du futur r�gime d'AMO. Il subsiste n�anmoins
quelques incertitudes sur divers points, principalement le panier de
soins inclus dans la garantie et la nature des op�rateurs de la gestion
courante. Ces incertitudes seront sans doute lev�es apr�s les d�bats
pr�vus en 2006.
   A partir des documents disponibles12, on peut donner des estima-
tions vraisemblables de la population � couvrir et des taux de cotisa-
tion correspondant aux paniers de soins envisag�s.

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 243



   La population assujettie � l'AMO est constitu�e des salari�s du
secteur formel, des contractuels de l'�tat, des retrait�s ayant exerc�
ces emplois, des fonctionnaires et des retrait�s de la fonction publique.
Les b�n�ficiaires de la garantie sont les �pouses et les enfants de moins
de 18 ans des personnes assujetties. La difficult� de l'estimation de la
population � couvrir tient d'une part � ce qu'une partie des personnes
travaillant pour un employeur ne sont pas connues de l'organisme
r�gissant la s�curit� sociale (INPS) et sont de ce fait assimil�es � des
travailleurs du secteur informel13 ; d'autre part � ce que les ayants-
droit ne sont pas connus avec pr�cision, car l'INPS ne les recense pas
syst�matiquement. Les rapports r�alis�s en 2003 ont donn� les
chiffres figurant dans le tableau.
   Les effectifs de b�n�ficiaires (assur�s et ayants droit) ont �t� estim�s
autour de 1 500 000 personnes en avril 2003 et autour de 1 680 000 fin
2003. La r�alisation de l'AMO devrait donc permettre de donner une
couverture maladie � 14 ou 15 % de la population malienne.
   La garantie et le panier de soins n'ont pas �t� envisag�s de la m�me
fa�on dans les deux �tudes. Dans la premi�re, le panier de soins est
limit� � des prestations servies dans le secteur public sans copaiement.
Dans la seconde, la possibilit� d'acc�s au secteur priv� a �t� offerte et
des tickets mod�rateurs ont �t� fix�s.
   Il s'ensuit forc�ment des diff�rences dans les niveaux de cotisation.
La premi�re �tude a calcul� un taux de cotisation indiff�renci� com-
pris (selon les hypoth�ses d'effectifs) entre 3,1 et 5,2 %. Puis en fixant
le taux de cotisation des retrait�s � 1 % de la pension, elle a calcul� un
taux pour les actifs compris entre 3,7 et 6,3 %. Le partage entre
employeur et employ� n'a pas �t� d�termin�. La seconde �tude a
estim� � 1,11 % la cotisation des retrait�s et � 7,75 % celle des actifs,
r�partie � hauteur de 5,17 % pour les employeurs et 2,58 % pour les


Tableau 1 : Estimation des effectifs de cotisants au r�gime d'AMO (2003)

Cat�gorie                              Estimation avril 2003       Estimation fin 2003

Actifs salari�s                              154 000                    155 100
Retrait�s INPS                                37 960                     35 128
Total secteur priv�                          191 960                    190 228
Fonctionnaires civils                         36 769                     44 058
Forces arm�es et s�curit�                     14 213                     16 198
Retrait�s CRM                                 29 729                     29 310
Total secteur public                          80 711                     89 566
Total                                        272 671                    279 794

244 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



employ�s. Dans les deux cas, le pr�l�vement effectu� sur le revenu
mensuel a �t� jug� supportable.
  L'architecture institutionnelle a �t� pr�cis�e dans le rapport de syn-
th�se des experts du MDSSPA. Quatre grands principes ont �t�
retenus pour la mise en place de l'AMO :

� on ne cr�e qu'un seul r�gime pour les salari�s et les fonctionnaires,
  actifs et retrait�s : cela signifie surtout l'unicit� des garanties ou, en
  d'autres termes, l'absence de diff�rence dans les paniers de soins
  offerts � tous les b�n�ficiaires. Les m�mes formations de soins seront
  conventionn�es. Les conditions d'acc�s � celles-ci et au m�dicament
  (actes pris en charge, tickets mod�rateurs) seront identiques. Il y
  aura solidarit� compl�te entre salari�s et fonctionnaires, actifs et
  retrait�s.

� on ne cr�e pas de superstructure publique de gestion, de type caisse
  centrale du Mali, en charge des principales fonctions de l'AMO

� il n'y a pas de concurrence entre les organismes en charge de l'AMO,
  notamment du point de vue de la gestion. L'affiliation des assur�s �
  un organisme ne se fait pas au libre choix, les entreprises commer-
  ciales d'assurance sont �cart�es de la gestion.

� on s�pare la gestion courante des salari�s et des fonctionnaires (actifs
  et retrait�s) en les affiliant obligatoirement � un organisme de ges-
  tion distinct.

� on cr�e un organisme central de r�gulation de l'AMO, en charge de
  l'ex�cution d'une s�rie de fonctions : d�finition du principe d'imma-
  triculation des b�n�ficiaires (cl�s d'identification), gestion globale du
  risque, surveillance et r�alisation de la p�r�quation du fonctionnement
  des organismes gestionnaires, appui technique aux organismes ges-
  tionnaires, n�gociation du conventionnement des prestataires de
  soins, service de contr�le m�dical, centralisation des donn�es et pro-
  duction des statistiques du r�gime, recherche en vue de l'am�lioration
  de l'AMO.

� la gestion technique de l'AMO (immatriculation, service des presta-
  tions) est confi�e � deux organismes de gestion : l'INPS pour les
  salari�s et la CRM pour les fonctionnaires. Ces organismes
  per�oivent directement les cotisations d'AMO de leurs affili�s

  L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 245



  respectifs et s'organisent pour le service des prestations, sous le con-
  tr�le de l'organisme central de r�gulation.

� la possibilit� de contractualisation avec l'UTM est ouverte aux
  organismes de gestion d�sign�s, pour l'ex�cution de certaines fonc-
  tions de gestion technique qui sont � pr�ciser, notamment pour la
  CRM.


  Le rapport qui a �t� produit en vue d'�tudier la faisabilit� et les
cons�quences de ce sch�ma (Letourmy A., 2005) a propos� une orga-
nisation plus d�taill�e des relations entre les organismes qui sont
impliqu�s. Il a d�fini les fonctions de chacun, analys� les cons�quences
du montage et �valu� les co�ts de fonctionnement et d'investissement.
En fonction du refus qui avait �t� exprim� par la CRM de passer un
contrat de sous-traitance de gestion avec l'UTM, l'�tude a envisag�
deux situations, avec ou sans l'UTM dans le montage. Lorsque
l'UTM est introduite dans le montage, c'est pour g�rer l'AMO des
militaires en activit� et retrait�s, selon la pr�conisation du minist�re.
L'introduction de l'UTM r�duit assez nettement le co�t de l'in-
vestissement, en particulier pour ce qui concerne la formation des
personnels qui assureront la gestion. En revanche, compte tenu des
diff�rences de r�mun�ration des personnels de la CRM (grille du
secteur public) et de l'UTM (organisme priv�), le co�t de fonction-
nement du dispositif associant l'UTM est plus �lev�.
  Il restera au gouvernement malien � faire un certain nombre de
choix avant de produire la loi sur l'AMO et de la mettre en oeuvre. Il
devra notamment choisir le montage institutionnel qui lui convient le
mieux et, en fonction des r�sultats de l'�tude technique, d�terminer le
panier de soins, le partage de la cotisation entre employeurs et
employ�s et le niveau des co-paiements. On voit donc que la mise en
place effective de l'AMO prendra encore quelques mois.



�L�MENTS DE DISCUSSION

La d�marche entreprise au Mali montre que la mise en place d'un
r�gime d'assurance maladie s'�tale assez facilement dans la dur�e,
alors m�me qu'il existe un besoin de couverture et, en particulier, une
n�cessit� d'am�liorer rapidement le fonctionnement et le financement

246 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



du secteur par une plus grande mutualisation des ressources. Le Mali
n'est pas forc�ment un cas particulier et de nombreux pays ont mis du
temps avant de mettre en place le ou les r�gimes obligatoires dont la
justification avait apparemment fait l'objet d'un consensus.
  Il est instructif de centrer la discussion sur la dur�e du processus,
mais en posant plusieurs s�ries de questions, qui sont �galement
importantes pour analyser d'autres aspects de celui-ci. Un premier
ensemble d'interrogations est relatif � la faisabilit� de la d�marche. On
con�oit qu'il faille r�unir les conditions favorables � la cr�ation d'un
r�gime pour qu'il soit lanc� et lanc� vite. Si elles ne pr�existent pas, il
faut du temps pour que le contexte change. Cela peut expliquer la
dur�e observ�e.
  Une deuxi�me s�rie de question renvoie au jeu des acteurs qui s'im-
pliquent dans la construction des institutions qu'il faut associer � un
RAMO : sont-ils capables de s'accorder sur une organisation de
l'AMO, compte tenu des enjeux que celle-ci r�v�le ? Sinon, le proces-
sus va ralentir, voire s'enliser.
  Enfin, on peut s'int�resser � la coh�rence politique du projet, c'est-
�-dire l'inscription de la politique men�e dans le cadre plus g�n�ral
des orientations donn�es au secteur de soins et au secteur de la protec-
tion sociale, puisque l'AMO participe de ces deux logiques. Si la poli-
tique de l'AMO n'est pas totalement en coh�rence avec les politiques
(ou l'absence de politiques) en mati�re de sant� et de protection
sociale, on peut comprendre qu'elle ait des difficult�s � se mettre en
place.


La faisabilit� du projet

L'analyse de la faisabilit� d'un r�gime d'assurance maladie obligatoire
se situe � plusieurs niveaux. On distinguera ici un niveau de faisabilit�
g�n�rale ou contextuelle, et un niveau de faisabilit� sp�cifique ou
technique.


Faisabilit� g�n�rale

La faisabilit� g�n�rale appr�cie surtout la pertinence d'ensemble du
projet. Elle renvoie aux caract�ristiques du terrain, en tant qu'elles
vont constituer soit des contraintes irr�ductibles, soit des facteurs de
succ�s, en fonction de la nature de la d�marche. L'AMO doit con-

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 247



cerner un effectif de population cons�quent, mobiliser des ressources
pr�lev�es sur la richesse produite, offrir en contrepartie des services de
soins qui vont amener les b�n�ficiaires � un recours plus �lev� � la
m�decine et, autant que possible, adapt� � leurs besoins de sant�. Par
rapport � la situation d'un pays o� la couverture maladie est peu
d�velopp�e, c'est une innovation majeure qui a plus ou moins de
chances d'�tre accept�e. Elle s'implantera plus facilement si l'identifi-
cation des assujettis est simple, si le niveau de cotisation est support-
able en fonction des ressources des personnes ou de son incidence sur
le co�t du travail, si le versement des contributions peut �tre r�alis� de
fa�on r�guli�re et si la qualit� des prestations de soins est av�r�e.
   A partir de ces exigences, on peut essayer d'appr�cier ex ante la
probabilit� de r�ussite d'un projet. L'hypoth�se est que cette probabil-
it� va varier selon les valeurs d'un certain nombre d'indicateurs des
caract�ristiques du terrain, qui sont cens�es influencer l'offre ou la
demande d'assurance ou bien l'ad�quation de l'activit� nouvelle avec
l'organisation et l'�conomie nationales. Pour comparer la situation de
diff�rents pays en termes de pertinence d'un projet d'AMO, des
experts ont formul� des crit�res g�n�raux traduisibles sous la forme de
scores. Selon les m�thodes pr�conis�es dans les travaux les plus sou-
vent cit�s (Griffin et Shaw, 1996 ; Ensor, 1999), le Mali a un bon score
et il n'est donc pas d�conseill� a priori d'implanter des r�gimes
d'AMO concernant les travailleurs du secteur formel.
   Dans le m�me registre de faisabilit� g�n�rale de l'AMO, on peut
s'int�resser plus pr�cis�ment � la question de la p�rennit� du disposi-
tif, puisqu'un r�gime obligatoire est destin� � durer et � �tre �tendu �
une population toujours plus large. Dans le cas pr�sent d'un r�gime
public relatif � des employ�s du secteur de l'�conomie formelle, la
durabilit� financi�re va d�pendre de l'�volution du march� du travail,
des tendances de l'�conomie et de la capacit� de ma�trise de la
d�pense couverte. Pour le Mali, si l'on se r�f�re aux estimations faites
pour les �tudes cit�es, entre 1997 et 2003, la part de la population
active du secteur formel a d� nettement augmenter, le nombre de
retrait�s ayant cr� plus mod�r�ment (tableau 2). Quant � la r�gula-
tion de la d�pense, on peut ne pas y pr�ter attention dans un premier
temps. Le recours aux soins se situe � un niveau faible au Mali et les
�l�ments qui montrent que la consommation des personnes assur�es
est plus �lev�e que celle de la population (donn�es UTM) ne sont pas
inqui�tants.

248 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 2 : Comparaison des estimations de cotisants � l'AMO en 1997 et en 2003

Cat�gorie                            Estimation 1997            Estimation 2003

Actifs salari�s                          60 000                     154 000
Retrait�s INPS                           27 914                     37 960
Total secteur priv�                      87 914                    191 960

Fonctionnaires civils                    34 000                     36 769
Forces arm�es et s�curit�                                           14 213
Retrait�s CRM                            21 646                     29 729
Total secteur public                     55 646                     80 711

Total                                    143 560                    272 671




Faisabilit� technique

Mais la faisabilit� n'est pas qu'une question de contexte, elle d�pend aussi
de la gestion quotidienne de la garantie et des b�n�ficiaires, de la capacit�
de l'appareil de soins � d�livrer effectivement les prestations garanties.
  En 1997, la capacit� technique de gestion de l'assurance maladie au
Mali �tait pratiquement nulle. On notera � cet �gard que les compa-
gnies priv�es d'assurance ont �t� jusqu'� ce jour tr�s timides pour
d�velopper cette branche d'activit� et n'ont donc pas constitu� un
p�le de comp�tence significatif dans le pays. Avec le d�veloppement
des mutuelles et la cr�ation de l'UTM, la situation a chang�. La mon-
t�e en charge de l'UTM a �t� appuy�e par l'assistance technique
fran�aise et les mutuelles fran�aises et belges, si bien que l'UTM est
reconnue comme un acteur dot� d'une comp�tence professionnelle en
assurance maladie, m�me si elle g�re un peu moins de 40 000 b�n�fi-
ciaires. En revanche les organismes retenus � ce jour comme op�rateurs
de gestion dans le sch�ma institutionnel du Minist�re (INPS, CRM)
n'ont aucune exp�rience en gestion d'assurance maladie. Leur gestion
du risque � vieillesse � a fait l'objet d'audits cons�cutifs � leurs r�sul-
tats techniques et leur organisation a d� �tre revue dans la d�cennie
80 � 90. Divers aspects de leur activit� doivent encore �tre am�lior�s,
comme on le verra ci-dessous. La faisabilit� technique du projet en
termes de gestion est donc conditionn�e par la construction ex nihilo
d'une comp�tence au sein de ces deux organismes.
  Il est difficile d'admettre que l'appareil de soins est un facteur tr�s
positif de faisabilit� de l'implantation de l'AMO. Il n'est pas inutile de
rappeler que, dans les ann�es 80, lorsque les fonctionnaires de l'�duca-
tion nationale ont cr�� leur mutuelle (MUTEC), ils ont renonc� �

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 249



mettre en place une assurance maladie volontaire et ont pr�f�r� cr�er
leur propre centre de soins � Bamako pour offrir une prestation de
sant� � leurs adh�rents. La situation a bien chang� et l'appareil de
soins s'est d�velopp�, en connaissant diverses r�formes, qui donnent
sur le papier une image correcte de l'offre en structures publiques et
communautaires. Il reste que ces structures sont in�galement fr�quen-
t�es, ce qui sous-entend qu'elles sont de qualit� in�gale (Fournier P. et
allii, 2002 ; Audibert M., de Roodenbeke E., 2005). L'implantation de
l'AMO sur tout le territoire ne sera donc pas automatiquement
�quitable.
   Les probl�mes li�s � l'offre de soins renvoient � des caract�ristiques
d'organisation ou � des comportements. Ainsi la tarification officielle
sert de base au recouvrement des co�ts, sachant que les associations
qui g�rent les centres de sant� communautaires et les h�pitaux ont
une certaine latitude pour la d�finir. La tarification conna�t de fait une
certaine variabilit�. En outre il y a de toute fa�on des �carts entre le
tarif officiel et celui qui est appliqu� selon les d�clarations des usagers.
Ici intervient le comportement des agents de sant�, qui demandent
plus que ce qui est affich� et qui tirent pr�texte de certaines p�nuries
pour faire payer des suppl�ments. Les agents du secteur public de
soins portent une grande responsabilit� dans l'insuffisance de la cou-
verture l�gale et ils sont syst�matiquement critiqu�s : service non
accompli pour cause d'absence, racket, orientation des personnes sol-
vables vers le secteur priv�.
   En outre certaines cat�gories d'assur�s auront � r�gler un probl�me
sp�cifique d'offre de soins pour �tre dans les m�mes conditions que
l'ensemble des b�n�ficiaires. C'est le cas des militaires qui vont devoir
le plus souvent consulter dans leurs propres structures de base, dont
on sait qu'elles n'ont pas les moyens d'offrir des services du niveau des
centres de sant� communautaire.


Faisabilit� et volont� politique

Les difficult�s �voqu�es sur le plan de la faisabilit� technique se r�sol-
vent d'autant plus facilement qu'il existe une volont� politique pour
cela. Plus g�n�ralement, la volont� politique est reconnue comme un
facteur essentiel de faisabilit� de projet � contenu institutionnel. Au
Mali m�me, la politique de la mutualit� a b�n�fici� au d�part de l'en-
gagement du Pr�sident de la r�publique, ancien pr�sident de la

250 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



MUTEC. La rapidit� avec laquelle un pays est capable d'atteindre la
couverture universelle est expliqu�e par l'engagement politique asso-
ci� � la d�marche. Le cas exemplaire de la Cor�e vient le rappeler.
   Malheureusement, la volont� politique se mesure mal et s'exprime
diff�remment selon le contexte. La pers�v�rance des autorit�s mali-
ennes � l'�gard du projet d'AMO sugg�re qu'il existe bien une volont�
politique, mais la dur�e du processus fait penser qu'elle ne suffit pas �
r�soudre les tensions institutionnelles qui apparaissent ou � arbitrer
entre des orientations contradictoires. Ce jugement va �tre illustr� par
les deux autres s�ries de questions retenues pour la discussion.


Le jeu des acteurs autour du projet d'assurance maladie obligatoire

Divers acteurs sont impliqu�s dans le projet d'AMO : des acteurs �ta-
tiques dans les minist�res concern�s, les partenaires sociaux (syndicats
des employeurs et d'employ�s), les professionnels de sant�, les orga-
nismes de protection sociale, les acteurs ext�rieurs. Pour chacun
d'eux, il n'y a pas que des avantages � mettre en place l'AMO.


Les pouvoirs publics

Il existe un certain nombre de minist�res concern�s par l'AMO et l'on
peut donc se demander si le pilotage du projet tient assez compte de
cette multiplicit�14. La cr�ation du minist�re du d�veloppement social,
qui a dans ses attributions la protection sociale et la solidarit� et est
logiquement le ma�tre d'ouvrage du projet, aurait d� faciliter le
processus. Mais l'AMO porte sur les salari�s du secteur priv� et sur les
fonctionnaires, qui constituent une population relevant, pour de nom-
breuses questions, du minist�re du travail et de la Fonction publique.
Il faut rappeler que ce dernier (ou en tout cas celui qui avait les attri-
butions que ce minist�re a aujourd'hui) avait la tutelle de l'INPS et de
la CRM, pressentis comme gestionnaires de l'AMO. Il est toujours un
peu en retrait par rapport au pilotage du projet actuel, mais il reste
l'interlocuteur privil�gi� des syndicats ouvriers et �tait jusqu'ici le
minist�re correspondant du BIT sur le plan international.
   Le minist�re de la sant� �tait, au lancement des premi�res �tudes en
1996, le ma�tre d'ouvrage du projet d'AMO et de FAM, sachant que
l'action sociale, les relations avec le milieu communautaire impliqu�
dans la sant� et avec les mutuelles de sant� relevaient d'une de ses

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 251



directions. Il avait aussi la responsabilit� du financement direct des pro-
jets inscrits dans le PDS et le PRODESS I. La cr�ation d'un nouveau
minist�re lui a fait perdre de l'influence, mais il a gard� la gestion finan-
ci�re du PRODESS. Le minist�re du d�veloppement social est donc,
dans une certaine mesure, d�pendant de celui la sant�, tout en se faisant
le promoteur d'institutions qui doivent n�gocier avec les prestataires de
soins du secteur public, dont la gestion revient au minist�re de la sant�.
   Cette situation n'est pas grave en th�orie si les minist�res mettent
en place une collaboration dynamique. En pratique, il n'y a pas de dif-
ficult� de communication entre eux, mais, en l'absence d'inter-
minist�rialit� forte, encadr�e par une volont� politique au niveau
sup�rieur, les relations ne sont pas toujours efficaces. D'un c�t�, le
d�caissement du budget du PRODESS au profit de la protection
sociale n'est pas syst�matique, de l'autre le minist�re du d�veloppe-
ment social n'a pas un contact structur� avec les professionnels de
sant� sur les th�mes de la protection sociale. L'exemple de l'effort
public en faveur des mutuelles de sant� est int�ressant � cet �gard.
   Enfin, le minist�re de l'�conomie et des finances n'intervient dans
la r�flexion sur l'organisation que par sa participation au Comit�
d'orientation de la protection sociale. Mais on sait qu'il est en dernier
ressort un d�cideur important sur la question des montants de cotisa-
tions et de prestations qui seront en jeu. L'impression pr�vaut aujour-
d'hui qu'il est assez indiff�rent � l'AMO, ce qui n'est pas forc�ment
favorable � l'acc�l�ration du processus.
   Ces �l�ments font penser qu'on a, au sein des pouvoirs publics, des
acteurs non accord�s sur l'AMO, moins en raison d'int�r�ts divergents
que du manque d'incitation � produire une logique commune


Les partenaires sociaux

La position des partenaires sociaux sur l'AMO est ambivalente. D'une
part, l'AMO est consid�r�e par le patronat et par les deux syndicats de
travailleurs comme une bonne id�e et m�me une n�cessit�. D'autre
part, il y a pour chacun d'eux des limites � l'int�r�t du projet. Les
entreprises redoutent principalement une augmentation des cotisa-
tions sociales et la faiblesse du service que rendra l'AMO. Du c�t� des
syndicats on rel�ve d'abord des positions assez fermes sur la nature des
futurs op�rateurs de gestion de l'AMO. Ils ont l'habitude des orga-
nismes existants, ils voient mal toute organisation alternative, ce qui a

252 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



amen� notamment l'un d'eux � soutenir le principe de l'exclusion
d'une gestion sous-trait�e � l'UTM.
   Mais patronat et syndicats sont d'autant moins enclins au change-
ment que les dispositifs de couverture sociale mis en place dans les
plus grandes entreprises sont le r�sultat d'accords locaux qui seraient
menac�s par le lancement d'un r�gime obligatoire. On a dit, dans la
premi�re partie de ce texte, que le fonctionnement de ces dispositifs,
les montants financiers qu'ils mobilisent, les modalit�s pratiques de
leur gestion et leur efficacit� �taient assez difficiles � appr�cier. Tout
laisse penser pourtant qu'ils satisfont les partenaires sociaux et qu'ils
constituent un �l�ment favorable de leur relation. Pourquoi changer
s'il est certain que certaines cat�gories de salari�s b�n�ficient de
prestations non n�gligeables qu'ils ne sont pas s�rs de retrouver dans
l'AMO ? Il existe aussi chez les fonctionnaires des cat�gories pri-
vil�gi�es par la situation actuelle, comme les agents du secteur de la
sant�. Il est av�r� qu'ils ne paient pas tous les soins dispens�s en
secteur public, pour eux-m�mes et leurs proches, au-del� des disposi-
tions l�gales. L'incapacit� dans laquelle ils se sont trouv�s de monter
une mutuelle sectorielle de sant� illustre d'ailleurs la diff�rence avec
les autres cat�gories de fonctionnaires.


Les prestataires de soins

Pour les professionnels de soins, l'argument d'une plus grande sol-
vabilit� de la demande associ�e � l'AMO n'est pas d�cisif. En fait, il
faut r�aliser que l'AMO n'a pas que des avantages pour eux, d�s lors
qu'elle va d�clencher des proc�dures de contr�le des tarifs pratiqu�s et
des services rendus.
   On sait par exemple que le produit d'assurance de l'UTM �voqu�
plus haut pose quelques difficult�s de diffusion et que des adh�rents
de mutuelles se plaignent de certains h�pitaux publics. Ceux-ci, cens�s
soigner les mutualistes dans les conditions contractuelles qui ont �t�
n�goci�es, ne remplissent pas leur engagement : refus du tiers payant
notamment. L'intervention du Ministre de la sant�, d�j� sollicit�e sur
ce point, a donn� des r�sultats. Mais, apr�s avoir obtemp�r� quelque
temps, les agents hospitaliers sont revenus � des pratiques non con-
formes avec les contrats n�goci�s par l'UTM. Dans le cadre de
l'AMO, la pression du minist�re pourrait �tre continue et plus forte.

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 253



   En outre, l'�volution du syst�me de soins au Mali met en lumi�re
l'�mergence d'un secteur priv� lib�ral, qui n'est pas, pour l'instant,
vraiment dans l'attente de l'AMO. La multiplication des cabinets et
cliniques priv�es � Bamako et dans quelques grandes villes est corr�l�e
avec l'observation d'un plus grand nombre de dysfonctionnements du
secteur public hospitalier. Il est notoire qu'un nombre accru de
m�decins et de cadres param�dicaux (infirmiers, sages femmes)
partage leur temps entre activit�s publique et priv�e. La premi�re est
n�glig�e au profit de la seconde, qui permet l'exploitation de niches
r�mun�ratrices o� l'exercice est peu contr�l�. L'AMO n'est probable-
ment pas viable en conventionnant ces praticiens et elle va demander
au contraire une am�lioration des services de l'h�pital public. Les
int�r�ts d'une partie des professionnels sont menac�s. Les pharma-
ciens lib�raux devraient �tre plus unanimement en faveur de l'AMO,
mais la perspective de ne d�livrer que des g�n�riques aux assur�s so-
ciaux ne les enthousiasme pas forc�ment. Il est donc probable que les
corps professionnels sont partag�s quant � l'int�r�t de l'AMO. Le fait
qu'ils n'aient �t� associ�s que marginalement aux d�bats ne contribue
pas � faire �voluer la situation.


Les organismes de protection sociale

L'attitude des deux organismes de protection sociale � l'�gard de
l'AMO est diff�rente. L'INPS ne manifeste pas un d�sir fort de par-
ticiper � sa gestion. Cela peut s'expliquer par plusieurs facteurs. En
premier lieu, l'AMO repr�sentera pour l'Institut un effort consi-
d�rable d'organisation qu'il n'a pas envie d'accomplir, car il sait qu'il
devra de toute fa�on mettre la branche vieillesse en r�forme. En deu-
xi�me lieu, la l�gitimit� de son appareil de soins devrait �tre mise en
question. Les effectifs de personnel correspondant sont pl�thoriques.
Il faudrait g�rer leur reconversion. En outre, l'INPS a un r�gime
� maison � tr�s g�n�reux et son personnel n'a rien � gagner avec
l'AMO. En dernier lieu, l'INPS a une gestion exc�dentaire, en raison
de la faiblesse des prestations de la branche famille et de la branche
accidents du travail et maladies professionnelles. La r�forme de la
branche vieillesse obligera sans doute � revoir les cotisations corres-
pondantes, mais la mise en place d'une branche maladie aurait le
m�me effet. Il n'y a pas lieu pour l'INPS d'anticiper le changement.

254 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   La CRM d�sire au contraire obtenir la gestion de l'AMO et ne
souhaite pas la partager. S'agit-il de montrer qu'elle peut se d�velop-
per et afficher de bons r�sultats de gestion dans un domaine vierge ?
Dans la situation de d�ficit chronique que conna�t la caisse, il est diffi-
cile de comprendre cet enthousiasme, � moins de faire l'hypoth�se
qu'un flux de ressources suppl�mentaire correspondant aux cotisations
de l'AMO pourrait faciliter la gestion quotidienne de la tr�sorerie de
l'organisme.


Les acteurs ext�rieurs

Les acteurs ext�rieurs ont une position particuli�re dans le processus.
Ils jouent un r�le dans le financement des �tudes et des programmes,
mais n'interviennent pas dans les relations entre les acteurs nationaux
et laissent �videmment les d�cisions aux responsables techniques ou
politiques. Leur implication dans le financement refl�te les orienta-
tions qu'ils choisissent pour d�finir l'aide, ainsi que les �valuations
qu'ils font des propositions venues du pays. Dans le cas du Mali, la plu-
part des bailleurs ont appuy� les initiatives en faveur du d�veloppement
de l'assurance maladie, mais ils ne se sont pas forc�ment concert�s
pour apporter un appui coh�rent au projet. Ils n'ont pas non plus voca-
tion � r�soudre les tensions institutionnelles qu'ils observent. La ques-
tion est peut-�tre d'�viter qu'ils en produisent involontairement. Or,
les partenaires du d�veloppement sont souvent attach�s � appuyer un
ou deux acteurs nationaux. Dans un projet comme l'AMO o� l'interac-
tion de nombreux acteurs est n�cessaire, la fragmentation de l'aide et la
non coordination des bailleurs peut se r�v�ler contreproductive.


La coh�rence du projet d'assurance maladie obligatoire
avec les politiques connexes

AMO et politiques de sant�

Le d�veloppement de l'assurance maladie est justifi� par la faible
mutualisation des ressources existant au niveau du financement des
soins. La politique de recouvrement des co�ts appliquant les principes
de l'Initiative de Bamako s'est traduite par un partage du financement
entre l'�tat et les usagers et chacun reconna�t aujourd'hui la part
importante du paiement direct des m�dicaments et des services par les

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 255



usagers. La mise en place (sous des formes diverses) de l'assurance
maladie est d'abord une r�action efficiente � l'obligation de paiement
faite aux usagers des soins, quel que soit le secteur auquel ils
s'adressent (public, communautaire et �videmment priv�). Plus le
paiement s'impose et plus l'assurance est l�gitime. Or, la tendance
observ�e au Mali, comme dans de nombreux pays � faible revenu, est
d'�tendre le champ des prestations de soins gratuites pour l'usager
dans le secteur public.
   La mise en avant d'objectifs sp�cifiques de sant�, portant sur cer-
taines affections ou conditions de sant�, justifie un effort particulier
relatif aux cibles qui ont �t� d�finies. Cet effort est encourag� par la
possibilit� plus grande d'obtenir une aide ext�rieure et l'on assiste
ainsi � une sorte de � reverticalisation � de l'action dans certains
domaines. L'affichage des objectifs du mill�naire est li� � cette ten-
dance. Au Mali, les domaines du VIH/SIDA et de sant� de la m�re et
de l'enfant sont concern�s au premier chef. Selon la volont� du chef
de l'�tat, traduite dans divers arr�t�s du Minist�re, les soins donn�s
aux personnes atteintes du VIH sont cens�s �tre d�livr�s gratuitement
(2004) et la prise en charge des c�sariennes doit �tre sans frais pour les
femmes (2005).
   Sans doute faudrait-il regarder de pr�s la r�duction exacte du co�t
support� par les patients en l'absence de ces mesures : jusqu'� quel
point les affections opportunistes sont-elles trait�es gratuitement ?
Les prescriptions ou l'hospitalisation cons�cutives � un accouchement
avec complications rentrent-t-elles dans l'exemption ou ne s'agit-il
que des frais stricts des interventions chirurgicales ? etc. Mais il n'en
reste pas moins que c'est une partie importante des situations dans
lesquels le recours aux soins entra�ne une charge financi�re impor-
tante qui sont vis�es. Certes la prise en charge de certains traitements
co�teux par des r�gimes d'assurance n'est pas simple � concevoir pour
les malades atteints par le VIH (Ouattara O. et al., 2005), mais l'exten-
sion de la gratuit� � des actes de co�t moyen ou faible pose la question
radicalement : que devient l'apport de dispositifs assurantiels dans ces
domaines ? De m�me, la complication obst�tricale a souvent �t� con-
sid�r�e, dans un contexte de partage des co�ts, comme un des
domaines o� l'assurance est pertinente. Elle a donn� lieu dans
plusieurs pays voisins (Mauritanie, Guin�e) au d�veloppement de l'ap-
proche assurantielle (forfait obst�trical, MURIGAs). La politique de
gratuit� r�duit � l'�vidence les situations dans lesquelles les usagers

256 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



pourraient voir un int�r�t � se couvrir. Au Mali, l'existence des caisses
de solidarit� (�voqu�e plus haut) est directement mise en question par
les nouvelles mesures : en principe, elles n'auraient plus � prendre en
charge que le transport qui est, dans le cadre du partage actuel, pay�
pr�cis�ment par malade. De ce fait, l'int�r�t de constituer des caisses
est r�duit et le projet de les transformer en mutuelles, en �largissant
leur domaine d'intervention � tout un ensemble d'�vacuations, change
de nature. On peut donc dire que la politique de gratuit� met en p�ril
certaines exp�riences organis�es de solidarit� et fait reculer le
d�veloppement de l'assurance maladie volontaire.
   Pour l'AMO, l'effet de la gratuit� est un peu diff�rent et va porter
sur le contenu de la garantie propos�e. Plus les soins en secteur public
sont gratuits, plus la population assujettie va demander � b�n�ficier de
prestations justifiant mieux la cotisation obligatoire. Le panier de
soins couvert sera donc orient� plus nettement vers l'acc�s au secteur
priv�. On peut alors pressentir que la position des employ�s qui b�n�-
ficient de r�gimes d'entreprises donnant d�j� acc�s au secteur priv�
peut �tre importante pour orienter la future loi sur l'AMO. Une pres-
sion en faveur de dispositions d'opting out sera in�vitable15. De toute
fa�on, cette orientation implique une s�rieuse r�flexion sur la faisabi-
lit� financi�re de l'AMO et le lancement de n�gociations tarifaires
d�licates avec les professionnels lib�raux. On sent bien ici le retard
que le processus pourrait subir.


AMO et politiques de protection sociale

La politique g�n�rale de protection sociale du pays conditionne aussi
le processus de l'AMO. Elle est orient�e aujourd'hui � la fois par le
souci d'augmenter le potentiel de financement de l'�conomie ma-
lienne et le maintien de la comp�titivit� des entreprises.
   Sur le premier point, le gouvernement s'int�resse aux organismes
sociaux dans la mesure o� la gestion de risques longs leur donne une
capacit� de financement de l'�conomie qui renforcerait celle des �ta-
blissements financiers locaux, assez peu dynamiques dans leur soutien
� l'investissement local. Le Programme de D�veloppement du Secteur
Financier (PDSF) a entrepris d'�tudier cette question et a focalis� son
attention sur les deux organismes gestionnaires de la protection
sociale, l'INPS et la CRM. La situation des r�gimes de retraite g�r�s
par ces deux organismes n'est pas bonne : d�ficit chronique pour

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 257



l'INPS compens� par les exc�dents des autres r�gimes, d�ficit struc-
turel non compens� pour la CRM. Le besoin d'une r�forme profonde
des caract�ristiques des deux r�gimes vieillesse et de l'organisation de
leur gestion est �vident. La remise � plat des cotisations, l'am�liora-
tion de certains aspects de la gestion (recouvrement des cotisations et
syst�mes d'information notamment) sont in�vitables. Le lancement de
l'AMO et le fait de confier pr�cis�ment sa gestion � ces deux orga-
nismes ne tombent donc pas tr�s bien. D'ailleurs la plupart des acteurs
appr�ciant les aspects financiers du lancement de l'AMO sont scep-
tiques � l'�gard de l'int�r�t de l'AMO, voire oppos�s � son lancement.
Les uns mettent en avant la difficult� de g�rer le risque maladie dans
un contexte de faible contr�le des agents de sant� et des usagers, les
autres consid�rent que l'INPS et la CRM n'ont pas la comp�tence
requise.
   Sur le second point (comp�titivit� des entreprises), il faut prendre
en consid�ration le taux de cotisation actuel, 22 ou 23 % selon le type
d'activit�. Proposer une augmentation de 6 ou 7 % est impensable et il
faut donc que le lancement de l'AMO soit inscrit dans la remise � plat
du syst�me de protection sociale en faisant divers arbitrages. Notam-
ment, pour l'INPS, des arbitrages relatifs au financement ou au co�t
des risques actuellement couverts, comme la famille, les maladies pro-
fessionnelles et les accidents du travail et la protection contre la ma-
ladie : les prestations effectives dans le cadre de ces branches sont
actuellement tr�s faibles et il faudrait se demander � quel niveau les
situer. Surtout la question des CMIE est clairement li�e au d�veloppe-
ment de l'AMO : les 2 % qui financent leur activit� devraient basculer
dans la cotisation de l'AMO (Letourmy, Diakit� 2003 ; Audibert,
Ciss� 2004).
   On voit bien que le projet d'AMO perturbe sur deux points la poli-
tique de protection sociale : en risquant de disperser l'effort de
r�forme des organismes gestionnaires des retraites, en risquant d'aug-
menter le co�t de la main d'oeuvre.
   Un autre point d�licat est l'effet de l'AMO sur le d�veloppement
des mutuelles et l'UTM. La politique nationale de la mutualit� a con-
duit � mettre en place (avec l'appui de la Coop�ration fran�aise et des
mutuelles fran�aises) et � d�velopper (avec notamment l'appui
des mutuelles chr�tiennes de Belgique, de l'Agence fran�aise de
D�veloppement et du PRODESS) l'UTM et ses activit�s. Le produit
d'AMV b�n�ficie � 26 000 personnes environ, salari�s d'entreprises et

258 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



fonctionnaires. Il s'agit d'assurance volontaire au premier franc,
puisqu'il n'y a pas � ce jour d'autre protection maladie digne de ce
nom au Mali. Le lancement de l'AMO transforme radicalement la si-
tuation, puisque l'assurance volontaire au premier franc n'aura plus le
m�me int�r�t pour les salari�s et les fonctionnaires. Par ailleurs,
l'UTM est charg�e du d�veloppement de la mutualit� au sein du
secteur informel et cette action est un pur investissement dont la
rentabilit� est lointaine. La seule fa�on de ne plus d�pendre de sub-
ventions ext�rieures (�trang�res ou nationales) est pour l'UTM de
d�velopper l'AMV, qui est aujourd'hui nettement b�n�ficiaire.
   Le lancement de l'AMO implique la reconversion de l'AMV au
niveau de l'assurance compl�mentaire, qui constitue au Mali un
march� tr�s �troit, m�me si les pouvoirs publics lancent le d�bat sur la
protection maladie compl�mentaire d'entreprise. La perspective de
g�rer partiellement l'AMO devait donner � l'UTM les moyens de
poursuivre son action au sein du secteur informel. La faible probabi-
lit� que l'INPS ou la CRM lui sous-traite une partie de la gestion la
fait dispara�tre. Une cons�quence in�luctable du montage institutionnel
propos� est bien la disparition programm�e de l'UTM, en fonction de
la mise en place de l'AMO.
   Le choix du montage institutionnel risque donc de p�naliser la poli-
tique nationale de la mutualit� et renvoyer le d�veloppement des
mutuelles dans le secteur informel � des formules peu efficaces, sans
vision globale, ni appui structur�. Cette �volution doit �tre assum�e
par les d�cideurs. Cela explique leur souci de donner un r�le � l'UTM
en leur faisant g�rer l'AMO pour les militaires (Letourmy A., 2005)



CONCLUSION

La discussion centr�e sur la question de la relative lenteur du proces-
sus de mise en place de l'AMO au Mali montre l'intrication du projet
avec des probl�matiques propres � d'autres secteurs et concernant des
acteurs tr�s divers. Le fonctionnement du secteur public des soins,
l'�volution du syst�me m�dical, les politiques de sant�, de protection
sociale, de mutualit� et m�me l'�largissement du march� financier
apparaissent comme des facteurs interf�rant avec le montage de l'as-
surance obligatoire dans le secteur de l'�conomie formelle. Dans ces
conditions, la dur�e du projet semble secondaire par rapport � la

   L'Assurance maladie obligatoire au Mali : Discussion d'un processus en cours � 259



n�cessit� d'amener tous les acteurs influents sur des positions com-
munes, qui respectent les objectifs d'extension de la couverture ma-
ladie justifiant la d�marche.
   La volont� politique qui a �t� introduite comme facteur de faisabi-
lit� correspond au souci permanent de ma�triser les tendances qu'ont
les uns ou les autres � refuser d'aller vers une position commune. Il est
probable qu'elle doit s'exprimer par une communication forte rap-
pelant les objectifs et la l�gitimit� du projet. Il semble aussi qu'elle
doit �tre associ�e � un pouvoir suffisant de contrecarrer les d�rives
corporatistes. Il reste � d�terminer � quel niveau se situe ce pouvoir au
Mali et � lui confier le pilotage politique du projet.



NOTES

  1. Voir (Letourmy, Diakit� 2003) et les �tudes r�alis�es en 2001 et
2003 sur l'ensemble de ces dispositions l�gales (Cissoko, Ciss� 2001 ;
Traor�, 2003a et b).


  2. Selon le d�cret 311 (juin 2002). La liste des maladies en question
est fix�e par un arr�t� conjoint des minist�res charg�s de la Sant�, de la
Solidarit� et des Finances. Dans le m�me ordre d'id�es, toute une s�rie
d'examens sont gratuits


  3. Selon le d�cret 44 de 1968. Une atteinte morbide ou un accident
entra�nant des soins co�teux correspondent a priori � cette d�finition,
mais le secours ne peut d�passer 50 000 FCFA par trimestre.


  4. Loi hospitali�re de juillet 2002


  5. Selon le d�cret 311


  6. Selon le d�cret 95 relatif aux personnes �g�es


  7. Art 26 et 27 de la loi n�95-041 du 20 avril 1995 portant statut
g�n�ral des militaires (Cissoko 2001)


  8. Article L1 de la loi n�92-020 du 2 septembre 1992 portant Code
du travail (Cissoko 2001)

260 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  9. Code de Pr�voyance sociale : loi n�99-041 du 12 ao�t 1999 et
d�cret d'application n�110/PGRM du 6 juin 1963


10. A propos de l'INPS, on peut ajouter qu'il a �t� cr�� un r�gime
volontaire � l'INPS de fa�on � permettre l'affiliation � l'institut de cat�-
gories nouvelles non salari�es. La population vis�e �tait celle des pro-
fessions lib�rales. Ce nouveau dispositif aurait conf�r� aux personnes
acceptant de cotiser les m�mes droits que ceux des salari�s. Mais les
d�crets d'application n'ont pas �t� pris � ce jour, si bien que ce r�gime
n'est pas fonctionnel.


11. Voir l'�tude r�alis�e pour l'UNICEF (B. Criel et al. 1998)


12. A l'exception du rapport final dit technique r�alis� fin 2005


13. Par exemple les travailleurs saisonniers sont mal connus. Il
faudrait les inclure, � condition que la future loi ne pose pas de limites
trop strictes sur la dur�e de cotisation.


14. On laissera de c�t� ici des minist�res comme celui de l'Adminis-
tration territoriale ou de la D�fense qui sont parties prenantes du pro-
jet, mais paraissent moins actifs dans le jeu institutionnel


15. Les personnes assujetties � l'AMO chercheront � avoir la possibi-
lit� de garder leur couverture, donc de ne pas cotiser � l'AMO au motif
qu'ils cotisent d�j� pour une garantie sup�rieure. Si la loi retient cette
possibilit�, les ressources de l'AMO seront moindres et ce seront les
assur�s les mieux pay�s qui ne cotiseront pas. Sur ce point, la mise en
place de l'AMO au Maroc est pleine d'enseignements.




BIBLIOGRAHIE

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    Solidarit� et des Personnes �g�es, ron�ot�.

Letourmy, A., et B. D. Diakit�. 2003. � �tude pour la mise en place de l'assurance mal-
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    priv� au Mali �. Bamako : Minist�re du D�veloppement Social, de la Solidarit� et
    des Personnes �g�es et Bureau International du travail, ron�ot�.

------. 2003. � Diagnostic national des syst�mes de protection sociale du secteur pu-
    blic au Mali �. Bamako : Minist�re du D�veloppement Social, de la Solidarit� et
    des Personnes �g�es et Bureau International du travail, ron�ot�.




TEXTES DE LOI CIT�S

R�publique du Mali, D�cret n�44 portant r�glementation des secours en R�publique
    du Mali, 1968.

R�publique du Mali, D�cret n�243 fixant le r�gime de la r�mun�ration des actes m�di-
    caux et de l'hospitalisation dans les formations sanitaires, 1983.

R�publique du Mali, D�cret n�311 fixant le r�gime de la r�mun�ration des actes m�di-
    caux et de l'hospitalisation dans les �tablissements publics de sant�, 2002.

R�publique du Mali, Loi n�02-050 portant loi hospitali�re, 22 juillet 2002.

R�publique du Mali, Code de Pr�voyance Sociale : loi n�99-041 du 12 ao�t 1999 et
    d�cret d'application n�110/PGRM du 6 juin 1963.

                                                                        CHAPITRE 8



       La couverture du risque maladie en
Afrique francophone : Etude compar�e
   des projets de couverture universelle
des soins en C�te d'Ivoire et au Gabon

                                                               Jean-Pierre Sery




R�sum� : La C�te d'Ivoire et le Gabon consacrent � peine 7 % de leurs
ressources publiques aux d�penses de sant�. En outre, les populations ne b�n�fi-
cient d'aucun m�canisme appropri� de couverture m�dicale m�me si en th�orie
on d�nombre entre 10 et 29 % de personnes couvertes respectivement pour la
C�te d'Ivoire et le Gabon.

   Les gouvernements des deux pays ont lanc� depuis 2001 des projets majeurs
d'institution de la couverture m�dicale au profit de l'ensemble des populations.
Les deux projets qui se d�nomment Assurance Maladie Universelle pour la
C�te d'Ivoire et Couverture M�dicale G�n�ralis�e pour le Gabon pr�sentent des
caract�ristiques communes : r�gimes obligatoires, fond�s sur les solidarit�s pro-
fessionnelles, contributifs pour tous les actifs et non contributifs pour les person-
nes �conomiquement faibles. Des diff�rences notables apparaissent cependant
entre les deux projets au niveau du cadre institutionnel. Le projet gabonais
veut s'appuyer sur les organismes de pr�voyance sociale existants pour admi-
nistrer la Couverture M�dicale G�n�ralis�e. La seule cr�ation nouvelle con-
cerne la Caisse M�dicale des Agents de l'�tat. Quant � la C�te d'Ivoire, elle
fait table rase des institutions de pr�voyance sociale en cr�ant ex-nihilo trois
nouveaux organismes : la caisse nationale de l'assurance maladie pour le
secteur priv� et les ind�pendants, la caisse sociale agricole pour le secteur agri-


                                                                                     263

264 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   cole dont le financement est assur� par des pr�l�vements sur la vente des pro-
   duits et le Fonds de R�gulation qui g�re la tr�sorerie commune.
       Les exp�riences ivoiriennes et gabonaises sont assez int�ressantes en ce sens
   qu'elles essaient d'apporter une solution radicale au probl�me de l'acc�s aux
   soins des populations africaines notamment celles qui sont les plus d�favoris�es.
   Cependant de nombreux d�fis devront �tre relev�s. Car, la surestimation de la
   capacit� administrative du pays, les contraintes de l'environnement institu-
   tionnel et macro�conomique, l'importance de l'�conomie informelle qui limite
   les capacit�s de taxation, les mod�les de r�forme structurelle qui vont �
   l'encontre de la culture nationale ou n'en tiennent pas compte et la sous-
   estimation des � forces en jeu � repr�sentent certains des obstacles qui s'opposent
   � une r�forme efficace de la sant�.



INTRODUCTION

Pr�sentation g�n�rale des deux pays

La C�te d'Ivoire et le Gabon sont deux pays � revenu interm�diaire.
Les revenus par t�te d'habitant de ces pays sont parmi les plus �lev�s
de la zone franc (610 US$ en 2002 pour la C�te d'Ivoire et 3120 US$
en 2002 pour le Gabon)


D�mographie

Les deux pays se diff�rencient notablement au niveau de la d�mogra-
phie. En 2002, la population de la C�te d'Ivoire �tait estim�e � 16,8
millions et a cr� � un rythme annuel de 1,9 %. Tandis que pour la
m�me ann�e, la population du Gabon s'�levait � 1,3 millions d'habi-
tants et a cr� � un rythme annuel de 2,2 %.


Financement de la sant�

Les d�penses totales de sant� sont relativement �lev�es dans les deux
pays.
   Pour la C�te d'Ivoire, ces d�penses correspondaient � 6,2 % du PIB
en 2001, le m�me niveau que cinq ans plus t�t (graphique 1), toutefois,
la d�pense totale par habitant est pass�e de 48US$ en 1997 � 41US$ en

                                               La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 265



2001, apr�s avoir atteint 54US$ en 1998. En 2001, les d�penses
publiques repr�sentaient respectivement 16 % et 6 % des d�penses de
sant� totales et des d�penses publiques totales. Les d�penses priv�es
constituaient donc 84 % des d�penses totales, et se composaient respec-
tivement de paiements directs faits par les usagers (89,7 % en 2001) et
des paiements effectu�s aux assurances priv�es (10,3 % en 2001).
              Quant au Gabon, les d�penses totales de sant� se sont �lev�es � 3,6 %
du PIB en 2001, enregistrant une hausse de 0,7 % par rapport � 1997



Graphique 1

                                    C�te d'Ivoire � Total des d�penses de sant� en % du PIB, 1997 � 2001
                                     Rapport sur la sant� dans le monde � Fa�onner l'avenir, 2003, OMS


            2001                                                                                                                            6.2 %


            2000                                                                                                                            6.2 %


            1999                                                                                                                              6.3 %


            1998                                                                                                                                6.4 %


            1997                                                                                                                            6.2 %



Graphique 2

                                                    C�te d'Ivoire � Indicateurs des comptes nationaux de sant�, 1997 � 2001
                                                       Rapport sur la sant� dans le monde, 2003 � Fa�onner l'avenir, OMS


            100

                                                                                   89.7
             90                                                  87  88.1 88.1 89.2
                                                    84.684
                                        81 80.8  80
             80


             70


             60


             50


 Pourcentage 40


             30

                 19 19.220
             20
                             15.4 16
                                                                                           1311.9 11.9 10.8 10.3
             10
                                                                                                                   5.4 5.9 6.4 5.3  6             6
                                                                                                                                         2.6 3.1      2.1 3.2

              0
                 D�penses publiques     D�penses priv�es        Paiements directs en       Assurances priv�es     D�penses publiques     D�penses de sant�
                 g�n�rales de sant�      de sant� en % du         % des d�penses           par pr�paiement en      g�n�rales de sant�     financ�es par des
                  en % du total des     total des d�penses        priv�es de sant�          % des d�penses          en % du d�penses    ressources ext�rieures
                 d�penses de sant�            de sant�                                      priv�es de sant�           publiques         en % des d�penses
                                                                                                                                           totales de sant�


                                                                  1997       1998      1999     2000      2001

266 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



(graphique 3). Toutefois, les d�penses totales par habitant ont diminu�
de 4US$ entre 1997 et 2001, glissant de 131US$ � 127US$. Au cours de
la m�me p�riode, la part des d�penses priv�es de sant�, constitu�es
uniquement de paiements directs par les usagers, a fortement augment�,
passant de 34,4 % en 1997 � 52,1 % en 2001. Les d�penses publiques de
sant� repr�sentaient 7,3 % des d�penses publiques totales en 2001
(graphique 4).




Graphique 3

                                       Gabon � Total des d�penses de sant� en % du PIB, 1997 � 2001
                                    Rapport sur la sant� dans le monde, 2003, � Fa�onner l'avenir, OMS


            2001                                                                                                                              3.6 %


            2000                                                                                                                    3.3 %


            1999                                                                                                                           3.5 %


            1998                                                                                                                                  3.7 %


            1997                                                                                                         2.9 %




Graphique 4

                                                        Gabon � Indicateurs des comptes nationaux de sant�, 1997 � 2001
                                                       Rapport sur la sant� dans le monde, 2003 � Fa�onner l'avenir, OMS

                                                                           100  100  100  100  100
            100


             90


             80


             70   65.666.8 64.9


             60

                                                                 52.1
                                50.2                        49.8
             50                       47.9


 Pourcentage 40
                                             34.4       35.1
                                                  33.2

             30


             20


             10                                                                                               7.4    7.5
                                                                                                        5.9              7.2 7.3
                                                                                                                                    3.7   4  4.6
                                                                                                                                                  1.3  1.8
              0
                    D�penses publiques          D�penses priv�es             Paiements directs en         D�penses publiques          D�penses de sant�
                     g�n�rales de sant�          de sant� en % du              % des d�penses              g�n�rales de sant�          financ�es par des
                     en % du total des          total des d�penses             priv�es de sant�             en % du d�penses        ressources ext�rieures
                     d�penses de sant�                de sant�                                                  publiques             en % des d�penses
                                                                                                                                       totales des sant�


                                                                 1997       1998     1999      2000     2001

                     La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 267



CONTEXTE DES R�FORMES

Comme la plupart des autres pays africains de la zone franc, le Gabon et
la C�te d'Ivoire avaient appliqu� tr�s t�t des politiques sociales hardies
en accordant aux populations la gratuit� des soins dans les formations
sanitaires publiques. En ce qui concerne le Gabon notamment, les lois
sociales ont plac� ce pays pendant longtemps en premi�re ligne des pays
africains ayant b�ti une politique de protection sociale ambitieuse. Cette
politique r�pondait au souci des nouveaux �tats de cr�er des infrastruc-
tures de base n�cessaires au d�collage �conomique et social du pays.
Malheureusement, la gratuit� des soins devint rapidement illusion face �
un double ph�nom�ne : (i) la croissance des co�ts de facteurs et dans le
m�me temps, (ii) la r�duction drastique des ressources publiques. De
sorte qu'on a assist� � une d�gradation continue des infrastructures, des
�quipements et des mat�riels dans l'ensemble des formations sanitaires,
� une p�nurie des m�dicaments et � la d�motivation du personnel. Dans
de telles conditions, les syst�mes de couverture existants ne peuvent
conna�tre que des dysfonctionnements, non seulement dans la rationali-
sation de la distribution des soins aux b�n�ficiaires, mais �galement dans
la p�rennit� du financement des prestations servies.


Les dysfonctionnements des syst�mes existants

La couverture sociale m�dicale au Gabon et en C�te d'Ivoire couvre
respectivement 29 % et 6 % de la population (Sery, 2004). Ces taux de
couverture auraient pu �tre plus �lev�s si les quelques r�gimes existants
ne connaissaient pas un certain nombre de dysfonctionnements (finance-
ment inadapt�, non application des dispositions l�gales pr�vues, fraude).
Alors que dans un pass� lointain, les prestations pr�vues en faveur des
fonctionnaires et agents de l'�tat dans les deux pays �taient effective-
ment couvertes par les organismes publics existants, aujourd'hui, aucun
de ces organismes ne fournit les prestations prescrites par la loi.
   Au Gabon, la couverture du risque maladie des agents publics et des
indigents ne b�n�ficie d'aucune organisation et d'aucun financement
appropri�s. Le paquet de services couverts est aujourd'hui r�duit et les
consultations ne sont plus prises en charge m�me dans les structures
publiques. Cela a pouss� les fonctionnaires � ne pas fr�quenter la
majorit� de ces structures.

268 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  Quant aux fonctionnaires ivoiriens, ils b�n�ficient th�oriquement
des dispositions l�gales et r�glementaires qui leur accordent des se-
cours maladie, mais dans la pratique, tous les actes m�dicaux prescrits
dans le public sont soumis au recouvrement total des co�ts. L'incon-
v�nient de la politique de recouvrement des co�ts est qu'elle demande
� des usagers de payer d�sormais des services qui �taient jusque l� gra-
tuits et dont la qualit� n'est pas garantie. C'est d'ailleurs pour se sortir
de cette impasse que les fonctionnaires et agents de l'�tat ont pr�f�r�
mettre en place une structure mutualiste de prise en charge de leurs
soins de sant�.
  Les salari�s du secteur priv� dans les deux pays semblent mieux
lotis. Les conventions collectives en vigueur leur accordent en effet
des syst�mes de garantie dont le financement est majoritairement � la
charge de l'employeur dans le cadre de la m�decine d'entreprise (4/5
du co�t). Mais � ce niveau, il faut noter que la seule contribution
patronale ne permet pas de couvrir des prestations de sant� de qualit�.
En effet les prestations servies ne sont, dans la plupart des cas, que des
soins de premi�re n�cessit� qui de ce fait n'exercent pas d'attrait sur le
personnel. C'est pourquoi, en lieu et place de la m�decine d'entre-
prise, les entreprises de grande taille pr�f�rent s'en remettre aux com-
pagnies d'assurances priv�es pour la gestion de la couverture maladie
de leurs personnels. Les financements des contrats d'assurance sont
assur�s sur la base de la r�gle de 20/80 entre le salari� et l'employeur.
Dans les deux pays, le secteur des assurances priv�es est relativement
prosp�re comparativement aux pays � faible revenu de la zone franc.
Les taux de couverture des populations par les assurances priv�es sont
compris entre 3 % pour la C�te d'Ivoire et 6 % pour le Gabon alors
que dans les autres pays, le taux le plus �lev� est inf�rieur � 1 % de la
population (Sery, 2004). Cependant, il faut reconna�tre que l'assu-
rance priv�e mettra du temps avant d'�largir son taux de p�n�tration
et sa contribution au financement total de la sant� en raison de son
co�t prohibitif discriminant pour une grande partie de la population.


La part pr�pond�rante des m�nages dans le financement de la sant�

Face � l'essoufflement de l'�tat pour assurer convenablement le
financement des d�penses publiques de sant�, les m�nages constituent
les principaux pourvoyeurs de fonds des d�penses nationales de sant�
dans les deux pays.

                    La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 269



  En C�te d'Ivoire, les d�penses de sant� du pays sont financ�es
majoritairement par le secteur priv� (63,1 % dont 55 % pour les
paiements directs des m�nages et 12,9 % pour les assurances et les sys-
t�mes de pr�paiement). La part de l'�tat repr�sente 46,9 % dont
14,4 % au titre de l'aide ext�rieure. Si la part de l'�tat est inf�rieure �
celle des m�nages, c'est parce que, tr�s t�t, l'�tat de C�te d'Ivoire a
encourag� des formes de financement alternatif du secteur de la sant�
qui visent � impliquer formellement les populations dans le finance-
ment et la gestion des formations sanitaires publiques. La premi�re
�tape de la r�forme a consist� en la mise en oeuvre du recouvrement
des co�ts des actes de sant� de fa�on partielle avec les m�dicaments en
1987 et la g�n�ralisation � tous les actes m�dicaux en 1994. La poli-
tique de tarification a eu un m�rite, c'est celui de cr�er une tradition de
co�t dans un contexte o� la gratuit� des soins �tait g�n�ralis�e. Cette
tradition qui est maintenant admise par les populations a �t� un facteur
d�terminant pour stimuler le programme d'assurance maladie autofi-
nanc�e qui a vu le jour par le vote de la loi du 9 octobre 2001 portant
institution et fonctionnement de l'assurance maladie universelle. Le
pays ne pouvait en effet entreprendre une large promotion de l'assu-
rance maladie sans imposer tout d'abord une participation des utilisa-
teurs aux co�ts dans les �tablissements d'�tat, plus sp�cialement les
h�pitaux.
  Au Gabon, les d�penses de sant� support�es par les m�nages
correspondaient � 52,1 % des d�penses totales de sant� en 2001. Les
m�nages sont particuli�rement mis � contribution puisqu'ils sont
oblig�s d'affecter 30 � 40 % de leurs ressources aux seules d�penses de
sant�, selon une �tude de la Banque mondiale. Les populations qui ont
une activit� r�mun�ratrice sont oblig�es de mutualiser le risque en
cr�ant des tontines ou des mutuelles de sant�. Ayant pris conscience
du poids de la maladie sur les revenus des m�nages, le gouvernement
gabonais a adopt� en 1995 une ordonnance portant orientation de la
politique de sant� en R�publique Gabonaise. Cette ordonnance fixe
un certain nombre de priorit�s telles que :

� la protection des groupes de population vuln�rables tels que les
  malades mentaux, les handicap�s et les personnes �g�es.

� la cr�ation d'un service public de sant� diversifi� faisant intervenir
  plusieurs acteurs et dont l'efficacit� implique une v�ritable coordina-
  tion au niveau des investissements et une recherche syst�matique des
  compl�mentarit�s.

270 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� la red�finition des m�canismes de financement du service public de
   sant� afin d'assurer � tous l'�quit� des contributions � l'effort de sant�
   et l'�galit� des conditions d'acc�s aux soins. Cette red�finition
   implique une r�forme institutionnelle de la protection sociale. Dans
   cette heureuse perspective, le gouvernement vient de lancer le projet
   de couverture universelle des soins dont le but est d'accorder � chaque
   citoyen gabonais un acc�s � des soins de sant�.


   La pr�sente contribution a pour but de pr�senter les caract�ris-
tiques des projets de couverture universelle en cours d'implantation
en C�te d'Ivoire et au Gabon, en passant en revue les objectifs pour-
suivis et les m�canismes institu�s.
   Dans la premi�re partie, nous aborderons les objectifs vis�s par les
nouveaux syst�mes de couverture universelle notamment, au regard
de leur impact attendu sur la mobilisation de ressources nouvelles,
l'am�lioration de l'accessibilit� aux soins, l'�quit� dans le financement
et la qualit� des services de sant�. Dans la deuxi�me partie, les m�ca-
nismes techniques institu�s par les diff�rents r�gimes d'assurance ma-
ladie seront pass�s en revue pour d�terminer leurs caract�ristiques.
Dans une troisi�me et derni�re partie, la m�thodologie d'implantation
des diff�rents syst�mes de couverture sera pr�sent�e.



LES OBJECTIFS VIS�S PAR LES PROJETS
DE COUVERTURE UNIVERSELLE

Les r�gimes ivoiriens et gabonais de couverture universelle des soins
pr�sentent globalement des caract�ristiques communes. De l�g�res
diff�rences apparaissent au niveau du cadre institutionnel :


Orientations strat�giques

Les concepteurs des projets ivoirien et gabonais de couverture uni-
verselle des soins ont fix� des orientations strat�giques qui se rejoignent
sur les points suivants :

� Une assurance maladie obligatoire, contributive pour tous les actifs
   et non contributive pour les personnes �conomiquement faibles.

                    La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 271



� Une assurance maladie qui ambitionne de couvrir l'enti�ret� de la
   population sans discrimination de nationalit� ;

� Un ticket mod�rateur obligatoire et modulable ;

� Un panier de soins essentiels pouvant �tre �toff� au fur et � mesure
   de l'�volution du profil �pid�miologique ;

� Une harmonisation de la nomenclature et de la tarification des actes
   dans le service public de sant� ;

� Une gestion centralis�e et autonome (public, parapublic et militaire)
   des m�dicaments ;

� Un syst�me ouvert (le recours � une assurance compl�mentaire
   ind�pendante est libre) ;

� Un financement assur� selon le m�canisme du tiers payant, au nom
   de la responsabilit� (tout b�n�ficiaire de prestation est un con-
   tribuable du syst�me) et de la solidarit� (l'ensemble de la collectivit�
   nationale contribue pour les plus d�munis) ;

� Un contr�le et une analyse permanents des co�ts, de la qualit�, de la
   quantit� et de l'effectivit� des prestations servies.


Objectifs sp�cifiques

L'institution de r�gime de couverture universelle des soins vise � terme
� cr�er un syst�me de sant� bas�, non pas sur la subvention de l'offre de
services de sant�, mais plut�t cr�ant des demandes de soins appropri�s.
Cette approche vise � r�aliser les objectifs sp�cifiques suivants :

� Favoriser l'accessibilit� financi�re de l'offre de soins ;

� Stimuler le d�veloppement du secteur priv� ;

� Favoriser l'�quit� dans l'acc�s aux soins.


Am�liorer l'accessibilit� financi�re de l'offre de soins

La mise en commun des ressources de la collectivit� pour faire face
aux d�penses individuelles de sant� va permettre de r�duire le co�t de
prise en charge des soins de sant�. Car, en l'absence de m�canismes de

272 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



financement socialis� de la sant�, l'offre de soins est tr�s co�teuse
pour la grande majorit� des populations. Les produits d'assurance
maladie, tr�s peu d�velopp�s, sont vendus tr�s chers. En C�te
d'Ivoire, le co�t de l'assurance priv�e varie entre 300 et 600 dollars US
par an et par t�te. Cela en raison, d'une part, des frais de prise en
charge qui sont assez �lev�s (15 � 36 %) et, d'autre part, de la faible
proportion des personnes assur�es (3 %).
   L'assurance maladie � vocation universelle est attendue avec beau-
coup d'espoir parce qu'elle peut entra�ner une r�duction significative
du co�t de prise en charge des soins de par sa capacit� � constituer un
grand pool de risques et partant op�rer une plus grande dispersion du
risque. En outre, si des mesures de conventionnement avec les
prestataires de soins sont pr�vues, elles devraient permettre de plafon-
ner le co�t global des prestations assur�es. Tous ces m�canismes, s'ils
sont judicieusement appliqu�s pourraient entra�ner une plus grande
utilisation des services de sant� puisque les barri�res financi�res
imm�diates qui sont l'une des raisons de la d�saffection des services de
sant� par les populations n'existeraient plus. En instituant le tiers
payant, l'assurance d�barrasse le b�n�ficiaire de tout souci imm�diat
d'acc�s aux soins. La d�pense nationale de sant�, bien que notoire-
ment plus �lev�e que celle des pays de la sous r�gion, ne peut masquer
la faible utilisation des services de sant� par les citoyens : en moyenne
moins d'une consultation par habitant et par an.


D�velopper le secteur sanitaire priv�

Depuis que la tarification des services et le recouvrement de leur co�t
sont devenus une pratique courante dans le secteur public, les m�nages
sont plus port�s � s'int�resser � des moyens alternatifs de payer les
soins qu'ils re�oivent. C'est ainsi qu'ils se d�portent naturellement vers
le secteur priv� de la sant� o�, � co�t �gal, les prestations sont de
meilleure qualit� par rapport aux services �tatiques. Avec la cr�ation de
l'assurance maladie, cette pratique va s'accentuer car toutes les struc-
tures de soins seront mises en comp�tition pour donner des soins de
qualit� aux assur�s. Les deux projets pr�voient une convention tarifaire
qui sera �tablie avec l'ensemble des prestataires de soins, qu'ils soient
du secteur public, du secteur priv� ou du secteur traditionnel. De ce
point de vue, les prestataires priv�s ont un avantage dans la comp�ti-
tion en raison de leur savoir-faire et de la qualit� de leurs prestations.

                    La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 273



Ceci va obliger les structures publiques � am�liorer leurs performances
pour tenter de capter la client�le et surtout la fid�liser. Pour ce faire,
elles devront repenser notamment la politique de tarification des soins
m�dicaux pour rapprocher celle-ci du co�t unitaire des actes pratiqu�s
surtout dans les �tablissements tertiaires. En effet, si ces �tablissements
peuvent mobiliser des ressources importantes du fait de l'assurance, ils
pourront d�pendre moins des subventions de l'�tat ; celui-ci pourra
alors faire une r�-allocation �quitable des ressources d�gag�es vers les
populations les plus d�munies notamment celles du secteur primaire et
secondaire.


Favoriser l'�quit� dans l'acc�s aux soins

Les syst�mes de couverture existants, comme cela a �t� dit plus haut,
favorisent les �lites. De ce point de vue, ils ne peuvent avoir qu'un
faible taux de p�n�tration (entre 10 et 30 % de la population). Ces sys-
t�mes excluent donc au moins 70 % de la population. En instituant la
couverture universelle, les autorit�s des deux pays veulent non seule-
ment lutter contre la pauvret� en am�liorant la sant� de tous les
citoyens mais elles veulent �galement lutter contre l'exclusion sociale,
d'autant que les personnes exclues des r�gimes l�gaux ont d�montr�
quelquefois leur capacit� et leur volont� � se prendre en charge (dans
le secteur informel et le secteur communautaire en C�te d'Ivoire
notamment). Si les nouveaux r�gimes de couverture instituent des
m�canismes de redistribution pertinents, la g�n�ralisation de la cou-
verture peut se r�aliser sans beaucoup d'accros.



LES PRESTATIONS ASSUR�ES

L'�tendue des prestations que vont couvrir les nouveaux r�gimes varie
d'un pays � un autre. En C�te d'Ivoire, la gamme des prestations
offertes par le r�gime l�gal de base est tr�s ouverte ; elle comprend
non seulement toutes les prestations de la pyramide sanitaire publique
mais �galement les prestations du secteur priv�. Les prestations qui
sont exclusivement en nature comprennent :

� les consultations m�dicales

� les soins dentaires

274 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� les analyses biologiques

� les m�dicaments

� les actes chirurgicaux

� l'hospitalisation


   Dans le cas ivoirien, l'on a pr�f�r� le choix d'une gamme de presta-
tions �tendue � toute la pyramide sanitaire au d�triment de quelques
pathologies s�lectives. Ce choix est expliqu� par le souci d'�viter le
ph�nom�ne de la s�lection adverse des risques, qui consisterait pour le
malade ou pour le prestataire � ne se faire consulter ou � ne prescrire
que les services assur�s. L'option prise par les concepteurs ivoiriens
laisse au r�gime compl�mentaire une part bien mince, ce qui n'est pas
de nature � permettre � ce r�gime compl�mentaire d'�tre attractif aux
yeux des potentiels b�n�ficiaires.
   Le Gabon a, semble t-il, per�u ce risque puisqu'il pr�conise un
panier de soins restreint au d�part et qui sera �toff� au fur et � mesure
de la mont�e en charge du nouveau r�gime. C'est une attitude de pru-
dence qui peut �viter les conflits avec les organismes de prise en
charge existants qui verraient mal de se voir d�pouiller brutalement
des contrats qu'ils avaient d�j� en portefeuille. Cette prudence n'a pas
�t� observ�e dans le cas ivoirien, ce qui cr�e une hostilit� ambiante
autour de l'assurance maladie universelle.



LES B�N�FICIAIRES

Les b�n�ficiaires sont les personnes r�sidentes dans les pays. Le crit�re
de la nationalit� n'est pas discriminant. Cependant, au-del� des id�olo-
gies, il faut s'attendre aux effets pervers des flux migratoires entre les
pays concern�s et leurs voisins. Si ceux-ci n'ont pas de r�gime d'assu-
rance maladie chez eux, leurs ressortissants en perp�tuelle migration
peuvent �tre tent�s de b�n�ficier des prestations du pays d'accueil sans
remplir les conditions de r�sidence. Dans le cas ivoirien qui est directe-
ment concern� par le ph�nom�ne de l'immigration (26 % d'immigr�s),
certaines dispositions ont �t� pr�vues dans la loi. Les b�n�ficiaires fe-
ront l'objet d'une proc�dure d'immatriculation. Le choix d'un identif-

                     La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 275



iant num�rique individualisant chaque assur� et ayant droit a �t� fait.
C'est un identifiant unique qui sera utilis� par l'assur� dans tous ces rap-
ports avec autrui ; il �vitera ainsi d'�tre la source de conflits entre dif-
f�rentes administrations voulant faire pr�valoir leur propre syst�me
d'immatriculation de leurs administr�s. La question de l'immatricula-
tion est apparemment anodine, mais dans la pratique m�rite une atten-
tion particuli�re ; en effet il n'est pas pratique de tenir des registres
bas�s sur les seuls �l�ments patronymiques qui de surcro�t offrent peu
de possibilit� de gestion et de contr�le. Il faudra pour se faire, se r�f�rer
� des donn�es d'�tat civil fiables, parce que ces donn�es permettront aux
gestionnaires du r�gime d'assurance maladie de se livrer � des tris et
analyses fort utiles non seulement pour la gestion du r�gime, mais
�galement pour en retirer de pr�cieuses informations pour la conduite
d'une politique de sant� publique. On doit indiquer �galement que le
concept de b�n�ficiaire est g�n�ralement disjoint des obligations des
acteurs en mati�re de financement. Ainsi un salari� ne peut �tre p�nalis�
pour son admission aux prestations si son employeur s'est affranchi de
ses obligations en mati�re de versement des cotisations.



FINANCEMENT

Le financement d'un r�gime d'assurance maladie d�pend largement
des cat�gories de b�n�ficiaires mais �galement du contrat social
impuls� par le gouvernement. Les syst�mes ivoirien et gabonais sont
essentiellement contributifs : ils reposent sur les cotisations des b�n�-
ficiaires assises sur les revenus du travail.


La contribution du secteur moderne

Les ressortissants du secteur moderne en C�te d'Ivoire sont estim�s �
559.638 personnes en 2000 avec la r�partition suivante : secteur public
106.227 et secteur priv� 453.411. (Caisse g�n�rale de retraite des agents
de l'�tat et Caisse Nationale de Pr�voyance Sociale, 2002). Ces person-
nes paieront des cotisations dont la base de calcul varie selon des
tranches de revenus. Un plafond est fix� au-del� duquel aucune cotisa-
tion n'est pay�e (voir tableau 1). La d�termination des tranches trouve
sa justification dans les notions de solidarit� et d'attractivit� ; dans le

276 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



          Tableau 1 : Ventilation des cotisations du r�gime ivoirien par tranche
          de revenu

          Tranche mensuelle de revenu salari�              % de cotisation

          Jusqu'� 300.000                                        6
          De 300.001 � 500.000                                   3
          De 500.001 � 1.000.000                                 1
          De 1.000.001 � 3.000 .000                             0,5
          Au-del� de 3.000 .000                                  0




secteur public, les 72 % des agents ayant un salaire mensuel de moins
de 300.001 FCFA repr�sentent 51 % de la masse salariale. La cotisation
est partag�e entre le salari� et l'employeur ; les �tudes de faisabilit� ont
propos� que le partage soit � part �gale : 50 % pour chaque partie.
   L'�tude de cas du projet gabonais ne dispose pas encore de toutes
les donn�es quantitatives puisque le projet est toujours en cours
d'�laboration. Toutefois, selon les estimations, les cotisations seraient
fix�es comme suit :

� Pour les travailleurs du secteur priv� et parapublic, la couverture sera
   financ�e par une double cotisation, patronale et salariale dont le taux
   et l'assiette sont d�termin�s par d�cret. Les propositions tournent
   autour de 4 % pour les travailleurs et 6 % pour les employeurs.

� En ce qui concerne les agents publics de l'�tat, leur couverture ma-
   ladie est financ�e par une double cotisation, patronale et salariale
   fix�e � 4 % pour les employ�s et 6 % pour les employeurs.


 Tableau 2 : Ventilation des contributions forfaitaires du r�gime ivoirien par cat�gories
 de cotisants.

  Cat�gories de cotisants                               Montant annuel de la cotisation

  Personnels des cultes                                             25.000
  Demandeurs sociaux                                                12.000
  Enfants de 0 � 5 ans                                                   0
  El�ves des �coles primaires                                          500
  Enfants de 6 � 12 ans non scolaris�s                                 500
  El�ves des �tablissements secondaires                              2500
  Enfants de 13 � 18 ans non scolaris�s                              2500
  Etudiants                                                          7500
  Aides familiales de 19 � 21 ans                                   12.000

                   La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 277



La contribution des ind�pendants et des �tudiants

Pour les travailleurs ind�pendants, les deux r�gimes fixent des cotisa-
tions forfaitaires proportionnelles aux chiffres d'affaires. Le projet
ivoirien d�termine avec pr�cision la grille des contributions for-
faitaires comme l'indique le tableau 2 ci-dessous.


La contribution pour les personnes indigentes
et �conomiquement faibles

Concernant, les personnes reconnues comme indigentes (terminolo-
gie ivoirienne) ou ayant un pouvoir �conomiquement faible (termi-
nologie gabonaise), leurs prestations seront financ�es par le budget
g�n�ral de l'�tat. Dans le cas gabonais, la pr�cision d'une taxe de soli-
darit� nationale est apport�e.


La contribution des retrait�s

En l'absence de donn�es fournies par le projet gabonais, seule la con-
tribution des retrait�s de C�te d'Ivoire a pu �tre �tudi�e. Les retrait�s
de C�te d'Ivoire, selon les sources officielles fournies par les deux
organismes de gestion, la Caisse g�n�rale de retraite des agents de
l'�tat et la caisse nationale de Pr�voyance Sociale pour le secteur
priv�, sont au nombre de 109.684 personnes en 2002, dont 43.969
pour le secteur public et 65.715 pour le secteur priv�. Le taux de cal-
cul des cotisations est de 2 % ; le pr�l�vement sera effectu� sur les
pensions de retraite par les diff�rentes caisses.


La contribution du secteur agricole

Ce point de l'�tude n'int�resse que le cas ivoirien en raison de l'impor-
tance du secteur agricole dans l'�conomie nationale. Ce secteur est
tellement important que les autorit�s ivoiriennes ont d�cid� de cr�er
un r�gime sp�cial pour les agriculteurs, r�gime qui, comme on le verra
dans la partie organisation, sera administr� par la caisse sociale agri-
cole. Le r�gime gabonais n'accorde pas un statut particulier au secteur
agricole. Les effectifs des actifs de plus de 15 ans exer�ant dans le
secteur agricole ivoirien ont �t� estim�s en 2002 � 3.551.401 personnes

278 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 3 : Effectifs du secteur agricole en C�te d'Ivoire

Cat�gories de ressortissants                                                  Nombre

Agriculteurs actifs de produits d'exportation du groupe 1 :                    997.200
Agriculteurs actifs de produits d'exportation du groupe 2 :                     84.002
Autres agriculteurs actifs ind�pendants                                      1.004.803
Salari�s agricoles                                                             214.633
Travailleurs � la t�che                                                         43.753
Aide familiale et apprentis de + de 15 ans                                   1.207.010
Total                                                                        3.551.401



selon le Renseignement General de la Population et de l'Habitat de
1998 (voir tableau 3).
   Les ressortissants du secteur agricole paieront des cotisations dont
l'assiette varie en fonction de la nature des productions. L'assiette pro-
pos�e est d�termin�e comme suit :

� sur le prix CAF des produits agricoles d'exportation du groupe 1
   (caf�, cacao, anacarde, coton fibre)

� sur le prix CAF des produits agricoles d'exportation du groupe 2
   (ananas, banane, mangue, papaye, coco, palmier � huile, canne �
   sucre, h�v�a, tabac)

� sur le revenu des autres actifs du secteur.


   Les b�n�ficiaires seront identifi�s par leur groupement d'appartenance.
   Le taux de base de calcul des cotisations propos� est indiqu� dans le
tableau 4 ci-dessous.
   Dans le cadre de la ma�trise m�dicalis�e des d�penses, tous ces m�ca-
nismes de financements seront compl�t�s par le paiement d'un ticket
mod�rateur, que ce soit dans le r�gime ivoirien ou dans celui du Gabon.
Ce ticket mod�rateur dans le projet ivoirien sera uniquement � la charge
des b�n�ficiaires utilisant les prestations du secteur secondaire et du


Tableau 4 : Ventilation des cotisations du secteur agricole ivoirien par nature de produits

Assiettes                                                              Cotisation

Valeur CAF des produits d'exportation du groupe 1                         5 %
Valeur CAF des produits d'exportation du groupe 2                         2 %
Agriculteur au revenu annuel inf�rieur � 600.000 FCFA        Forfait annuel = 30.000 FCFA

                      La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 279



secteur tertiaire. Il y a donc une exemption du ticket mod�rateur pour les
personnes qui utilisent les prestations du niveau primaire. C'est une
mesure d'�quit� dans la mesure o� cette disposition favorise les popula-
tions rurales qui n'ont acc�s qu'aux infrastructures sanitaires de base.
Quant au r�gime gabonais, le ticket mod�rateur est exigible de tout
usager, ind�pendamment de la nature et de la qualit� des soins sollicit�s.



ORGANISATION

C'est au niveau du cadre institutionnel que les deux r�gimes se dif-
f�rencient dans leur approche. Pendant que le projet ivoirien fait table
rase des structures existantes pour cr�er ex nihilo des nouveaux orga-
nismes de gestion, l'approche gabonaise au contraire, veut renforcer
l'existant pour l'ammener � g�rer efficacement le nouveau r�gime.


Le cadre institutionnel ivoirien

Le statut juridique des organismes de gestion

La loi n�2001-636 du 9 octobre 2001, portant institution, organisa-
tion et fonctionnement de l'Assurance Maladie Universelle fixe l'or-
ganisation g�n�rale du syst�me. Trois organismes de gestion sont
cr��s. Ce sont : la Caisse Sociale Agricole (CSA), la Caisse Nationale
d'Assurance Maladie (CNAM) et le Fonds National de R�gulation
(FNR).
   La CSA est charg�e de la gestion du risque maladie et maternit� au
profit des ressortissants du secteur agricole. La CNAM prend en
charge les ressortissants des autres secteurs : formel, informel,
ind�pendant et rural non agricole. Quant au FNR, c'est un organisme
commun aux deux r�gimes, charg� du recouvrement des cotisations et
de la gestion des ressources de l'assurance maladie.
   Le l�gislateur a donc opt� pour un sch�ma organisationnel fond�
sur la s�paration des m�tiers. Les organismes cr��s sont, aux termes de
l'article 14 de ladite loi, des institutions de pr�voyance sociale. Leur
statut juridique, d�fini par la loi n�99 � 476 du 2 ao�t 1999 portant
d�finition, organisation et fonctionnement des institutions de pr�-
voyance sociale, leur conf�re la pleine autonomie et un statut juridique

280 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



de droit priv�. Les conseils d'administration de ces organismes ont
une composition tripartite (employeurs, travailleurs et �tat). Les
directeurs g�n�raux et les pr�sidents des conseils d'administration
sont nomm�s par les diff�rents conseils.


La d�concentration des activit�s

La nouvelle loi soumet les trois organismes � l'obligation d'op�rer une
d�concentration des t�ches qui leur incombent. Il a donc �t� proc�d�
� la r�partition de t�ches conceptuelles et des t�ches op�rationnelles
entre les diff�rents niveaux. En tenant compte du d�coupage adminis-
tratif adopt� par l'administration territoriale, trois types de structures
ont �t� d�gag�s :

� Au niveau central : les Services Centraux ;

� Au niveau d�partemental : les D�l�gations ;

� Le niveau local : les Services Locaux de Sensibilisation.

La s�paration entre les activit�s op�rationnelles et celles relatives � la
conception et au contr�le Pour permettre � la d�concentration d'at-
teindre son objectif (qui est de se rapprocher le plus possible des
assur�s) les activit�s op�rationnelles sont confi�es aux structures
d�concentr�es. Les services centraux, d�gag�s des t�ches op�ra-
tionnelles disposent d'un environnement propice � la r�flexion, � la
conception et au contr�le des activit�s des structures d�concentr�es.

Les relations entre les institutions Le Fonds National de l'Assurance
Maladie Universelle, la Caisse Sociale Agricole et la Caisse Nationale
d'Assurance Maladie concourent ensemble � la r�alisation du m�me
objectif : la prise en charge des soins m�dicaux de tous les r�sidents.
Ces trois organismes �tablissent n�cessairement des relations sur les
plans technique, financier, comptable et informatique.

� Au plan technique

   Les caisses et le Fonds d�finissent ensemble un cadre formel en vue
   d'une information mutuelle et d'une harmonisation des d�cisions
   pour une bonne gestion du R�pertoire National. Les caisses g�rent le
   fichier des b�n�ficiaires et le fichier des prestataires de soins. Le Fonds
   proc�de au paiement des prestations aux professionnels de la sant� et

                    La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 281



  aux �tablissements sanitaires, sur ordonnancement des caisses. Les
  caisses re�oivent en retour les informations relatives aux paiements.
  Le Fonds �labore le budget annuel des prestations de chaque caisse en
  pr�sence du Directeur G�n�ral de la caisse concern�e.

� Au plan financier et comptable

  Le Fonds tient la comptabilit� de l'ensemble du syst�me en individu-
  alisant la comptabilit� des institutions et les documents comptables
  de fin d'exercice. Le Fonds g�re �galement la tr�sorerie des deux
  caisses. Un budget de fonctionnement et d'investissement est mis
  chaque ann�e � la disposition de chaque caisse par le Fonds. A la fin
  de l'exercice, les ressources non utilis�es sont revers�es au Fonds.


Le cadre institutionnel du r�gime gabonais

La couverture universelle d�nomm�e Couverture M�dicale G�n�ralis�e
(CMG) va �tre g�r�e par trois structures de protection sociale. Ce sont
deux structures d�j� existantes : la Caisse Nationale de S�curit� Sociale
(CNSS), la Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) qui seront
r�habilit�es, et une nouvelle caisse d�nomm�e Couverture M�dicale des
Agents Publics (CMAP) qui aura en charge la couverture des agents
publics de l'�tat conform�ment � l'orientation du nouveau statut
g�n�ral de la fonction publique.

� Seraient affili�s � la CNSS : les travailleurs salari�s de droit priv� des
  secteurs parapublic et priv� et des collectivit�s locales, la main d'oeu-
  vre non permanente de l'�tat et des Collectivit�s locales, ainsi que
  les gens de maison ;

� Seraient affili�es � la CNGS : les �tudiants et les personnes ayant un
  faible pouvoir d'achat.

� Seraient affili�s � la CMAP : les agents publics de l'�tat et des collec-
  tivit�s locales.


  Les organismes de gestion de la CMG sont plac�s sous l'autorit�
d'une Commission de contr�le (sorte de Conseil d'Administration)
avec une repr�sentation paritaire employeurs / employ�s. La Com-
mission de contr�le est plac�e sous la pr�sidence rotative d'un de ses
trois groupes � d'actionnaires � que sont, selon le cas, l'�tat, le secteur

282 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



priv� et les travailleurs salari�s, � raison de deux repr�sentants par
groupe. Chaque Caisse aura sa commission de contr�le diff�rente du
Conseil d'administration de l'organisme.



M�THODOLOGIE D'IMPLANTATION DES DEUX R�GIMES

Dans les deux cas, il reste vrai que le syst�me d'assurance maladie a �t�
impuls� par le gouvernement. Mais en le faisant, le gouvernement ne
faisait que r�pondre � l'attente des populations qui �taient deman-
deuses depuis de longues ann�es d'un syst�me de couverture maladie �
l'instar des autres prestations comme la retraite, les accidents de
travail et les allocations familiales. C'est pourquoi la mise en oeuvre
conceptuelle et organisationnelle du projet proc�de d'une d�marche
participative, gage de la r�ussite d'une initiative d'une telle ampleur
qui, assur�ment, va entra�ner un bouleversement positif dans le mode
de vie des populations. Cette approche participative est permanente
tout au long du processus et permet de recueillir et de mobiliser
l'adh�sion des populations, de capter leurs attentes et leur int�r�t. En
C�te d'Ivoire comme au Gabon, des concertations ont �t� organis�es,
qui ont regroup� les organisations professionnelles et syndicales de
tous les secteurs d'activit�s r�pertori�s. Ces concertations auxquelles
ont �galement pris part les �lus et l'administration territoriale, ont �t�
renforc�es par les services techniques des d�partements minist�riels
en charge du dossier. Les prestataires de sant� (m�decins, pharma-
ciens, chirurgiens-dentistes, tradipraticien) � travers leurs organisa-
tions (ordres, syndicats et associations) ont �galement particip� � ces
s�ances de prise de d�cision.



CONCLUSION

Le d�bat aujourd'hui en Afrique, concerne moins la question de savoir
s'il y a lieu de rendre les soins m�dicaux payants que celle de savoir
comment faire en sorte que le produit de leur tarification contribue
davantage � rendre les services de sant� plus efficaces, plus �quitables et
plus viables. Au coeur de la question, il y a la n�cessit� de trouver des
voies acceptables pour capter des ressources que les familles africaines
peuvent et acceptent g�n�ralement de payer. Et parmi ces voies, l'as-

                    La couverture du risque maladie en Afrique francophone � 283



surance maladie autofinanc�e appara�t comme l'instrument pouvant
mieux favoriser l'�quit�, g�n�rer des ressources nouvelles pour rendre
efficaces et efficients les services de sant�. Ce syst�me repr�sente
aujourd'hui le seul outil dont disposent les gouvernements africains
pour �chapper � la pratique co�teuse des subventions g�n�rales pour
les soins hospitaliers, lib�rant ainsi des fonds pour financer des pro-
grammes de sant� publique ainsi que la mise en place de services de
soins pr�ventifs et primaires dont b�n�ficient les pauvres.
   Les gouvernements ivoirien et gabonais ont lanc� une r�forme
ambitieuse de modernisation et de d�mocratisation de leurs syst�mes
de protection sociale, par la mise en place d'un syst�me efficace et effi-
cient de couverture maladie qui couvrira l'ensemble de la population.
Un tel syst�me devrait constituer une r�ponse concr�te et novatrice
aux grands d�fis de la lutte contre la pauvret� et l'exclusion sociale.
Car les deux pays connaissent un taux d'exclusion sociale �lev� (entre
90 et 70 %). Ce noble objectif est apparemment r�alisable si on con-
sid�re les atouts �conomiques dont disposent les deux pays :

(i) des ressources �conomiques importantes qui, si elles sont bien
     distribu�es au plan de l'�quit�, peuvent supporter le poids finan-
     cier du nouveau syst�me (le Gabon et la C�te d'Ivoire font partie
     des pays � revenus interm�diaires) ;

(ii) pour le Gabon, la taille de la population qui n'est pas tr�s grande
     peut constituer un atout dans la mesure o� l'identification des
     adh�rents et, par cons�quent, une meilleure connaissance de
     leurs habitudes de consommation pourraient s'en trouver plus
     facilit�es.


   Cependant, les promoteurs dans les deux camps seraient bien avis�s
de s'entourer des conditions de faisabilit� socio�conomique suffisantes
pour garantir la p�rennit� du r�gime. A cet �gard, la modernisation de
l'offre de soins s'impose car les consommateurs seront de plus en plus
exigeants pour la qualit� des prestations. En outre, une certaine pru-
dence devrait �tre observ�e dans l'�tendue des prestations � couvrir et le
mode de management qui devrait plus se rapprocher des m�thodes de
gestion du priv� pour s'assurer de l'efficacit� technique et de la trans-
parence n�cessaire � la bonne ex�cution d'un projet de telle envergure.
En effet, la surestimation de la capacit� administrative du pays, les con-
traintes de l'environnement institutionnel et macro�conomique, l'im-

284 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



portance de l'�conomie informelle qui limite les capacit�s de taxation,
les mod�les de r�forme structurelle qui vont � l'encontre de la culture
nationale ou n'en tiennent pas compte et la sous-estimation des � forces
en jeu � repr�sentent certains des obstacles qui s'opposent � une
r�forme efficace de la sant�.



BIBLIOGRAPHIE

Bi-yongo, G. 2004. Assurance maladie au Gabon. Rapport � la conf�rence internationale
    sur la couverture du risque maladie en Afrique francophone. Paris : Avril.

World Bank, The Economist Intelligence Unit. 2003. Profil du Gabon. Washington,
    DC. : World Bank.

World Bank, The Economist Intelligence Unit. 2003. Profil de la C�te d'Ivoire. Wash-
    ington, DC. : World Bank.

                                                                       CHAPITRE 9



 R�forme du financement de la sant� au
       Kenya : �valuation de la proposition
                                           d'assurance maladie

                        Guy Carrin, Chris James, Ole Doetinchem




  R�sum� : Depuis son accession � l'ind�pendance en 1963, le Kenya a connu de
  nombreux changements en mati�re de politiques de financement de la sant�.
  R�cemment, un important travail pr�paratoire a �t� effectu� en vue d'instau-
  rer une nouvelle Loi sur l'assurance maladie qui, si elle est accept�e, conduirait,
  apr�s une p�riode de transition, � la mise sur pied d'un syst�me universel d'as-
  surance-maladie au Kenya. Une des principales caract�ristiques de la Loi
  envisag�e est qu'elle assure aux pauvres l'acc�s aux soins de sant� en leur
  offrant un statut de membre � part enti�re du syst�me d'assurance maladie.
  Dans cet article, nous �valuons la performance `attendue' du Fonds d'Assurance
  maladie qui serait mis en place si la Loi �tait adopt�e. Nous pr�sentons aussi un
  aper�u de la mani�re dont la r�forme serait financ�e et les r�actions initiales des
  diff�rentes parties prenantes impliqu�es dans cette r�forme.




INTRODUCTION

Depuis son ind�pendance en 1963, le Kenya a surtout financ� son sys-
t�me de sant� principalement � partir des imp�ts, mais ensuite il a
graduellement introduit une s�rie de changements en mati�re de poli-
tiques de financement de la sant�. Le syst�me de paiements directs


                                                                                    285

286 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



avait aussi �t� instaur�, mais avait, par la suite �t� aboli pour des raisons
d'�quit� sociale. Cependant, les paiements directs de services de sant�
ont �t� introduits de fa�on plus formelle en 1989. Ces paiements
directs existent toujours aujourd'hui et leur impact sur l'acc�s aux soins
a fait l'objet de nombreuses �tudes empiriques. Un Fonds national
d'Assurance Hospitali�re (FNAH) a aussi �t� introduit en 1965 ; ce
fonds n'�tait obligatoire que pour les employ�s du secteur formel et le
paquet de services qui lui �tait associ� a �t� reconnu comme inad�quat.
Toutefois, en novembre 2004, une nouvelle r�forme du syst�me de
financement de la sant�, comprenant la mise en place d'un Fonds
National d'Assurance-maladie (FNAM) destin� � couvrir toute la
population, a �t� soumise au Parlement.
   La mise en oeuvre d'un FNAM bien g�r� et efficace repr�sente un
formidable d�fi. L'objectif principal n'est rien d'autre que de permet-
tre � toutes les couches de la population, y compris les pauvres, d'ac-
c�der � un paquet de services de sant� relativement complet. De plus,
tout paiement direct additionnel pour des soins couverts par l'assu-
rance (i.e. co-paiements) ne devrait pas engendrer des frais cata-
strophiques pour les m�nages ou les rendre pauvres.
   Dans ce chapitre, l'accent est mis sur les principales caract�ristiques
conceptuelles du FNAM envisag�, �valuant ainsi les performances
attendues du fonds de m�me que son financement et son organisation
Les r�actions initiales de certaines parties prenantes et les d�fis
inh�rents � la mise en oeuvre sont aussi bri�vement explor�s Avant
d'effectuer cette analyse, nous faisons d'abord un survol des initiatives
de r�forme du financement de la sant� au Kenya.



R�FORME DU FINANCEMENT DE LA SANT� AU KENYA

L'introduction de paiements directs par les utilisateurs

Les paiements directs, ou `le partage des co�ts' comme on dit habituelle-
ment au Kenya, n'avaient pas �t� pris en compte dans les politiques
discut�es entre 1963 et 1989. Le syst�me de financement de la sant�
reposait alors principalement sur les revenus fiscaux. Toutefois, vers la fin
des ann�es 1980, le partage des co�ts a commenc� � susciter beaucoup
d'attention au niveau des politiques. En 1989, les politiques d'ajustement
structurel et de s�v�res contraintes budg�taires du gouvernement ont

                             R�forme du financement de la sant� au Kenya � 287



men� � l'introduction de paiements directs pour les consultations
externes et les hospitalisations dans les structures sanitaires publiques.
Cependant, les enfants de moins de cinq ans et les personnes atteintes de
maux sp�cifiques ont �t� exempt�s de ces paiements. De plus, les soins de
sant� sont demeur�s gratuits dans les dispensaires (Dahlgren, 1991).
Suite � de v�h�mentes protestations, la politique de paiements directs
par l'utilisateur a �t� remani�e en 1990 pour �liminer ces frais au niveau
des consultations externes uniquement. Cette mesure fut, plus tard,
�limin�e en raison de la r�action des partenaires au d�veloppement.
Plusieurs �tudes ont montr� l'impact n�gatif des paiements directs sur
l'utilisation des services de sant� au Kenya. Une �tude sur l'utilisation
des services de sant� au Kibwezi, une r�gion rurale pauvre, a r�v�l� que
la fr�quentation des services de consultation externe a de nouveau aug-
ment� apr�s le retrait des frais d'adh�sion (Karanga et autres, 1995).
Dans le m�me ordre d'id�es, une �tude sur les comportements en
mati�re de fr�quentation des structures sanitaires publiques dans les dis-
tricts de Kisumu et Embu a montr� que, pour les consultations externes,
la fr�quentation avait baiss� de 50 % durant la p�riode initiale de partage
des co�ts en 1989; par la suite, le niveau de fr�quentation est remont� de
41 % suite � la suspension des frais d'inscription aux consultations
externes (Mwabu et autres, 1995). Les r�sultats des recherches sur l'im-
pact des paiements directs sur la fr�quentation des centres de r�f�rence
pour les maladies sexuellement transmissibles (MTS) confirment les
r�sultats empiriques ci-dessus; durant la p�riode de paiements directs, la
fr�quentation masculine a chut� de 40 % � la Clinique de Traitement
Sp�cial des MTS de Nairobi pour ensuite remonter quand ces paiements
ont �t� suspendus, m�me si ce n'est qu'� 64 % du niveau de fr�quenta-
tion obtenu pendant la p�riode ayant pr�c�d� l'introduction de
paiements directs (Mo�se et al., 1992). Les m�canismes d'exemption
n'ont aussi pas �t� particuli�rement efficaces (Bitr�n, Giedion 2003).
   Cependant, la situation fiscale au Kenya est rest�e probl�matique, et
le Gouvernement a d�cid� de r�introduire la tarification des soins en
1992. Au courant des effets n�gatifs sur l'utilisation, le Gouvernement a
introduit ces honoraires graduellement, d'abord dans les h�pitaux
nationaux et provinciaux et ensuite dans les h�pitaux de district et les
centres de sant�. Les tarifs devraient �tre pay�s seulement quand un
traitement efficace �tait vraiment disponible. L'utilisation des services
de consultation externe dans les h�pitaux a baiss� m�me si ce n'est que
modestement, � savoir de 6 % par rapport � la p�riode o� les honoraires

288 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



avaient �t� suspendus. Cette modeste r�duction a �t� non seulement
attribu�e au lien entre honoraires et traitement efficace, mais aussi � de
meilleures r�gles d'exemption (Collins et al.1996). Cependant, le co�t
des soins reste un probl�me important : 40.5 % des m�nages n'ayant pas
eu acc�s aux services de sant� ont cit� des difficult�s financi�res comme
la raison principale de ce ph�nom�ne (Xu et al., 2005).
   Le syst�me de paiements directs par l'utilisateur a �t� maintenu
jusqu'� ce jour. Toutefois, en juin 2004, le Ministre de la Sant� a
�nonc� une d�claration de politique, stipulant que les soins de sant�
dans les dispensaires et les centres de sant� seraient gratuits pour tous
les citoyens et que seuls des droits d'inscription minimaux seraient
per�us dans les structures sanitaires publiques.


Int�r�t pour l'assurance-maladie

Cependant, l'�v�nement le plus significatif depuis l'introduction des
politiques de paiements directs par l'utilisateur en 1989 a �t� l'int�r�t
port� par le gouvernement � l'assurance-maladie comme m�thode de
financement de la sant� et la possibilit� de sa mise en place au Kenya. Le
but d'un tel syst�me est d'assurer � tout kenyan l'acc�s aux soins externes
et aux hospitalisations et de r�duire significativement les d�penses de
sant� financ�es directement par les m�nages, particuli�rement les plus
pauvres. D�j� en mai 2002, un Groupe de travail inter-sectoriel avait �t�
mis en place pour pr�parer une strat�gie nationale et une l�gislation qui
seraient les pr�misses de la pr�paration du Fonds National d'Assurance
Maladie du Kenya (FNAM) (Minist�re de la Sant�, 2003 ; Mboya et al.,
2004). Apr�s une s�rie de d�bats sur les politiques et les d�lib�rations que
cela engendre au Parlement, ce dernier a pass� le Projet de loi sur le
FNAM le 9 d�cembre 2004. Cependant, le Pr�sident, que l'on s'at-
tendait � voir ratifier le projet de loi suite � son acceptation par le Par-
lement, a d�cid� que ce projet avait toujours besoin d'amendements et l'a
renvoy� au Parlement pour faire l'objet de d�bats.
   Il est important de noter que le Kenya dispose d�j� d'un syst�me l'as-
surance hospitalisation dans le cadre du Fonds national d'Assurance hos-
pitali�re vieux de 40 ans (FNAH), qui oblige tous les employ�s salari�s et
leurs d�pendants � s'assurer et � effectuer des contributions mensuelles
obligatoires. La nouvelle Loi sur le FNAM repr�sente cependant un for-
midable d�fi pour le syst�me de financement de la sant� au Kenya, dans
la mesure o� son principe est la couverture universelle. C'est l'ancien

                              R�forme du financement de la sant� au Kenya � 289



FNAH qui sera modifi� pour devenir ce nouveau Fonds. Un autre d�fi
important est l'am�lioration drastique de la protection financi�re fournie
par le biais de l'assurance-maladie. En effet, bien qu'il ait atteint environ
7 millions de b�n�ficiaires, le FNAH ne couvrait seulement que la partie
`h�bergement' des d�penses d'hospitalisation. C'est-�-dire qu'un indi-
vidu assur� dans le cadre du FNAH devait malgr� tout payer de sa poche
les frais de traitement, le diagnostic et les produits pharmaceutiques. On
comprend, par cons�quent, que la protection financi�re fournie par le
FNAH �tait tr�s limit�e.



PRINCIPALES CARACT�RISTIQUES DU FNAM

Pour �valuer le FNAM propos�, des documents portant sur les poli-
tiques du gouvernement kenyan ont fait l'objet d'un examen minutieux,
notamment le � Sessional Paper on National Social Health Insurance in
Kenya � (Minist�re de la Sant� 2004a) et le � Draft National Social Health
Insurance Fund Bill � (Minist�re de la Sant� 2004b). Dans les r�f�rences,
ces documents seront respectivement appel�s � Document de Session �
et � Esquisse de Projet de loi �. Sauf indication contraire, les donn�es
utilis�es dans cette section proviennent d'un de ces deux documents.


�valuation des performances attendues

Nous introduisons un cadre conceptuel, qui devra aider � suivre et
�valuer les progr�s accomplis dans la mise en place d'un syst�me
d'assurance-maladie (Carrin et James, 2005). Nous pr�sentons une br�ve
synth�se de ce cadre, puis nous l'appliquons au FNAM du Kenya. On
notera au passage que nous �valuons les performances attendues du nou-
veau FNAM plut�t que celles du FNAH existant. Cette �valuation est en
grande partie bas�e sur une s�rie de six rapports techniques (RMTs) con-
s�cutifs � des missions consultatives effectu�es par l'OMS, la GTZ, le
BIT, la KfW et DFID (2004). Ces rapports contiennent les suggestions
techniques formul�es par les conseillers ayant particip� � ces missions.
   La performance d'un syst�me d'assurance maladie (AM), ou en fait de
n'importe quel type de syst�me de financement de la sant�, peut �tre
�valu�e en termes du degr� de r�alisation d'une couverture universelle :
garantir � tous l'acc�s aux services de sant� � un co�t accessible. En fait,
l'Organisation Mondiale de la Sant� (OMS) a d�j� d�clar� que � le but

290 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



du financement de la sant� est de rendre les fonds disponibles, tout en
cr�ant les motivations financi�res ad�quates pour les prestataires, cela
afin de s'assurer que tous les individus ont acc�s � des soins de sant�
publique et � des services m�dicaux personnels efficaces � (OMS,
2000 : 95). Ainsi, nous �valuons les performances attendues du FNAM
durant ses premi�res ann�es de mise en place en fonction des objectifs de
financement de la sant� suivants : G�n�ration de ressources (en quantit�
suffisante et de fa�on durable), utilisation optimale des ressources, acces-
sibilit� financi�re aux services de sant� pour tous.
   L'�valuation des performances par rapport � ces objectifs de
financement de la sant� se fait par le canal de l'analyse des
performances r�alis�es pour les 3 grandes fonctions du financement
de la sant� � la collecte de fonds, leur mise en commun et l'achat
(OMS 2000 ; Kutzin 2001) � analyse dans le cadre de laquelle les
questions li�es aux performances et les indicateurs qui leurs sont asso-
ci�s sont sp�cifi�s pour chacune des fonctions.
   La collecte de fonds est le processus par lequel le syst�me de sant� re�oit
de l'argent de la part des m�nages, des entreprises, du gouvernement et
d'autres organisations incluant les donateurs (OMS 2000 : 95). Par d�fi-
nition, ce concept est li� � la g�n�ration de ressources, mais aussi � l'ob-
jectif de rendre les soins de sant� financi�rement accessibles � tous. Les
principales dimensions de la performance dans la collecte de fonds
sont : le taux de couverture des populations et la m�thode de
financement.
   La mise en commun des fonds est l'accumulation et la gestion de ces
revenus pour r�partir le risque entre tous les membres du bassin de
b�n�ficiaires ; et ainsi �viter que des personnes ne supportent le risque
sur une base individuelle (OMS 2000 : 96). Ce concept est tr�s proche
de l'accessibilit� financi�re universelle. Cependant, il est aussi associ� �
la g�n�ration de ressources (dans la mesure o� la p�rennit� du syst�me
d'AM d�pend du type de personnes qui en sont membres et l'utilisation
optimale des ressources (� travers le degr� de bonne gestion des fonds).
Les principales dimensions de la performance de la mise en commun
des fonds sont : la composition du (ou des) fonds, la fragmentation
de la mise en commun du risque et la gestion des fonds.
   L'achat est le processus par lequel ces contributions mises en com-
mun sont utilis�es pour payer les prestataires afin qu'ils fournissent
une gamme sp�cifique ou non de services de sant�. (OMS 2000 : 97).
Pour une utilisation optimale des ressources, il est important d'utiliser

                                   R�forme du financement de la sant� au Kenya � 291



de meilleures techniques d'achat. Les principales dimensions de la
performance sont : le contenu de la police d'assurance, les m�can-
ismes de paiement au prestataire et l'efficacit� administrative.
   Appliquer ce cadre au FNAM peut aider les d�cideurs autant dans
l'�valuation des performances attendues que dans le suivi des progr�s
dans la mise en oeuvre. Le tableau 1 r�capitule la relation entre les
performances des fonctions de financement de la sant� et la r�alisation
des objectifs de financement de la sant� (avec un � X � indiquant
l'existence d'une forte corr�lation). Dans la section suivante, les
performances dans les fonctions de financement de la sant� sont
�valu�es � l'aide d'indicateurs facilement mesurables.

Application � la r�forme de l'assurance maladie propos�e au Kenya

Collecte des revenus

   1. Taux de couverture des populations Le FNAM propose d'inscrire sys-
t�matiquement toute la population au cours d'une p�riode de transition,
et pr�voit initialement d'atteindre un taux de couverture universelle
neuf ans apr�s la mise en oeuvre. Ce qui veut dire que les d�cideurs


Tableau 1 : Fonctions de financement de la sant� et objectifs

Performance dans les fonctions
  de financement de la sant�                Objectifs de financement de la sant�

                                     G�n�ration                               Accessibilit�
                                   de ressources       Utilisation optimale    financi�re
                               (suffisante et durable)     des ressources       pour tous

COLLECTE DES REVENUS                     X                                         X
1. Taux de couverture
  des populations                        X                                         X
2. M�thode de finances                   X                                         X


MISE EN COMMUN
   DES RISQUES                           X                       X                 X
3. Composition des fonds                 X                                         X
4. Fragmentation des fonds                                                         X
5. Gestion des fonds                                             X


ACHAT                                                            X                 X
6. Panier de prestations
  de soins de sant�                                              X                 X
7. M�canismes de paiement
  des prestataires                                               X
8. Efficacit� administrative                                     X

292 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



kenyans reconnaissent que la collecte des revenus chez les travailleurs
ind�pendants est moins �vidente que chez les salari�s, m�me si
l'exp�rience internationale sugg�re que tabler sur une p�riode de neuf
ans rel�ve aussi d'un grand optimisme (Carrin, James 2005). Des rapports
de mission techniques (RMTs) (OMS, GTZ, BIT, KfW et DFID 2004),
ont pr�vu des transitions plus graduelles vers une couverture uni-
verselle, avec des niveaux de couverture atteignant 60 % � 80 % neuf
ans apr�s la mise en oeuvre. Assurer la prise en compte rapide de tous
les pauvres est toutefois per�u comme une priorit� importante dans le
document de Session, m�me s'il y a toujours un d�bat sur la meilleure
fa�on de financer l'assurance-maladie.

   2. M�thode de financement Cette proportion devrait �tre proche de
100 %, avec un financement du FNAM provenant des contributions
des membres et du gouvernement pour couvrir la part des pauvres. Le
niveau des contributions sera �tabli de fa�on � ce que le FNAM puisse
couvrir le co�t total d'un paquet complet de services dans toutes les
structures publiques, priv�es et caritatives (dans 11 h�pitaux priv�s
plus chers, les membres financeront les co�ts additionnels directe-
ment de leurs poches ou en prenant une assurance priv�e suppl�men-
taire). Ceci est en r�action � la protection financi�re limit�e fournie
actuellement par le FNAH, protection qui ne couvre presque unique-
ment que les co�ts d'h�bergement.
   Suite � la mise en oeuvre du FNAM, on s'attend � un changement
radical dans la structure des d�penses totales de sant�, changement qui
verra 75 % des d�penses totales de sant� effectu�es par le canal du
FNAM et du Minist�re de la Sant�, ceci en comparaison aux 44 % de
2002 (OMS 2005 : Tableau de l'Annexe 5). L'ancien pourcentage est
comparable avec la part moyenne des d�penses publiques globales
dans 27 pays ayant des syst�mes d'assurance maladie bien r�d�s (Car-
rin, James, 2005).
   En m�me temps, les arrangements concernant les contributions ont
aussi �t� sensibles aux soucis g�n�r�s par les effets d�favorables
significatifs sur l'emploi et le conformisme, avec des plafonds sur les
contributions et des honoraires fixes plus bas pour les personnes � charge
issues de m�nages plus vastes (RMT No 6). Il a �t� sugg�r� de consid�rer
des p�nalit�s pour l'auto-r�f�rence et des honoraires d'enregistrement
minimaux de 10 � 20 KSh au niveau des malades en consultation externe
pour aider � neutraliser le comportement de hasard moral potentiel.

                             R�forme du financement de la sant� au Kenya � 293



  En 2003, des paiements directs �lev�s de services de sant� ont con-
duit 10 % des m�nages utilisant les services de sant� � faire face � des
d�penses catastrophiques (Xu et al. 2005). Cette �tude a aussi d�mon-
tr� que le FNAH n'avait pas eu d'impact significatif dans la r�duction
des d�penses catastrophiques et avait seulement offert une protection
financi�re limit�e, l'acc�s le plus faible se retrouvant chez les pauvres,
les personnes �g�s plus de 60 ans et les patients avec des maladies
chroniques. En incluant tous les pauvres et en fournissant un paquet de
services plus complet, on s'attend � ce que le FNAM am�liore l'acc�s et
soit plus efficace dans la r�duction des d�penses catastrophiques.



Mise en commun des fonds

  3. Composition de la mise en commun des risques Actuellement, l'adh�sion
au FNAH est obligatoire pour tous les employ�s et leurs d�pendants,
mais volontaire pour les travailleurs ind�pendants. Avec le nouveau
FNAM, l'adh�sion sera, en principe, obligatoire. Cependant, pendant la
p�riode de transition, la couverture ne sera pas obligatoire pour les tra-
vailleurs ind�pendants. On envisage de mettre en place des politiques
permettant d'assurer que ce ne seront pas seulement des travailleurs
ind�pendants pr�sentant des risques �lev�s qui vont s'inscrire dans le
programme. Par exemple, les organisations communautaires sont cen-
s�es remplir un r�le dans le recrutement des groupes d'individus dans
leurs localit�s.
  Pour les employ�s du priv� et, dans une mesure moindre, les fonc-
tionnaires, la raison principale qui emp�chera au taux de couverture
d'atteindre imm�diatement 100 % sera la non-conformit�. Jusqu'ici, peu
d'employeurs � l'ext�rieur de Nairobi ont sembl� s'�tre conform�s.
Des mesures pour am�liorer le respect de la r�glementation ont �t�
discut�es sur la base de l'am�lioration du processus d'�change d'infor-
mations avec les autorit�s responsables de l'inscription des entreprises
pour les inscriptions et avec celles responsables des recettes fiscales
pour la collecte des contributions. De plus, des inspecteurs ont �t�
employ�s au niveau des succursales du FNAH et les anecdotes rappor-
tent que la conformit� s'est am�lior�e. Pour les travailleurs ind�pen-
dants et leurs personnes � charge, les objectifs de couverture �taient
initialement de 60 % au bout de cinq ans, bien qu'une analyse sub-
s�quente ait montr� un rythme de mise en oeuvre plus graduel.

294 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Les personnes � charge seront obligatoirement assur�es, comme
c'est d�j� actuellement le cas avec le FNAH, avec l'obligation, pour
tout individu ayant d�pass� un certain �ge, d'avoir sa propre carte
d'adh�rent. Cela aidera aussi � combattre la fraude.

   4. Fragmentation de la mise en commun des risques Le FNAM fonc-
tionnera comme un fonds unique, avec le m�me paquet de services
offert � tous ses membres. De cette fa�on, on �vite une fragmentation
des fonds. On s'attend � ce que les Organisations de Gestion des Ser-
vices de Sant� (HMOs) continuent � jouer un r�le important, mais
diff�rent, dans le financement du syst�me de sant�, en fournissant une
assurance maladie suppl�mentaire.
   Malgr� l'unicit� du fonds, on peut tout de m�me faire face � une
fragmentation implicite dans la mesure o� il pourrait exister des dif-
f�rences dans les services re�us � cause de variations potentielles dans
la qualit� des prestations fournies. En effet, dans le cas du FNAH exis-
tant, l'adh�sion et l'acc�s aux services de sant� sont plus faibles dans
les provinces pauvres et g�ographiques plus recul�es (Xu et al. 2005).
Afin de limiter les disparit�s entre les services offerts dans les struc-
tures publiques et priv�es, les structures publiques continueront,
pendant quelques ann�es, � �tre partiellement subventionn�es par le
Minist�re de la Sant� pour couvrir des d�penses de personnel et de
gros investissements d'infrastructure.
   Les m�canismes de paiement des prestataires pourraient aussi con-
tenir des incitations � maintenir et am�liorer la qualit�, dans la mesure
o� le niveau de paiement est li� � la qualit�. Des efforts sont entrepris
au niveau du FNAH, par le canal de son nouveau D�partement
d'�valuation des Standards et de la Qualit�, pour d�finir la qualit� des
services de sant�, la contr�ler et l'�valuer.

   5. Gestion du fonds Le r�le des succursales locales est actuellement tr�s
limit�, le traitement des r�clamations �tant finalis� au niveau central et la
disponibilit� de donn�es pour la surveillance et l'ex�cution �tant tr�s
limit�e. Par ailleurs, il y a eu tr�s peu de discussions sur les politiques
destin�es � s'assurer que les succursales locales s'engagent activement
dans le plaidoyer pour acc�l�rer la couverture et recruter des fournisseurs
qui peuvent fournir des services de sant� de qualit� sur la base de taux de
r�mun�ration accept�s mutuellement. La d�centralisation a �t� promue
et il a �t� mentionn� que les succursales locales seraient en mesure de
traiter les r�clamations avec un degr� d'autonomie respectable.

                            R�forme du financement de la sant� au Kenya � 295



Cependant, une d�finition claire des responsabilit�s des succursales
locales en mati�re de gestion est toujours n�cessaire.


Achat

  6. Paquet de services offerts Un paquet de services standard complet
est en cours de d�veloppement pour chacun des cinq niveaux du sys-
t�me de sant� du Kenya. Ce paquet est � la fois li� aux intrants et aux
diff�rents types de services. Pour certains services, notamment les
soins de longue dur�e, les patients pourraient aussi avoir � payer,
m�me si le montant � payer est cependant plus modique que celui
pay� actuellement. L'exclusion de certains services, comme les pro-
th�ses orthop�diques et le temps de conservation des corps � la
morgue, ont aussi �t� envisag�s (Kimani et al. 2004). Les services li�s
au VIH/SIDA et la tuberculose seront inclus, mais comptabilis�s
s�par�ment et potentiellement co-financ�s initialement par des
m�canismes externes et des organisations non gouvernementales. Les
soins pr�ventifs prodigu�s dans les structures sanitaires seront aussi
inclus, m�me si d'autres services pr�ventifs et de promotion de la
sant� resteront sous la coupe du Minist�re de la Sant�. En g�n�ral, les
exclusions ou des niveaux plus �lev�s de co-paiements semblent �tre
bas�es purement sur une politique de contr�le des co�ts plut�t aussi
que sur la consid�ration de crit�res explicites d'efficacit� et d'�quit�.
  Qui plus est, � ce jour, aucune �valuation d�taill�e des co�ts n'a
encore �t� effectu�e (les estimations de co�ts ont jusqu'ici �t� bas�es
sur la r�mun�ration des prestataires et sur les co�ts totaux aux dif-
f�rents niveaux de services). Ceci est n�cessaire si on veut s'assurer
que le paquet de services peut �tre offert aux niveaux de r�mun�ration
indiqu�s. Il y aura aussi une certaine variation dans le paquet de
services offert dans la mesure o� toutes les infrastructures sanitaires ne
seront pas imm�diatement capables de fournir tous les services com-
pris dans le paquet.
  Une participation active de la population dans la gestion du
FNAM, ainsi qu'un Tribunal d'Appels, �taient initialement pr�vus
dans la structure du FNAM. Au cours de r�centes discussions, il est
apparu que l'implication active de la population n'est plus per�ue
comme strictement n�cessaire. Nommer un m�diateur ind�pendant a
aussi �t� envisag�. Une plus grande sensibilisation de la population
aux avantages que conf�re l'adh�sion est en cours. On devrait aussi

296 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



expliquer � la population qu'ultimement, le paquet de services offerts
d�pendra des contraintes financi�res du gouvernement, des entre-
prises et des m�nages et devra refl�ter un consensus social.

   7. M�canismes de r�mun�ration des prestataires On a propos� un taux
de r�mun�ration journalier fixe par malade hospitalis� (paiement jour-
nalier). Envisager des taux r�duits apr�s les premiers jours, afin de
d�courager les s�jours excessifs, pourraient aussi �tre consid�r�. Pour
les consultations externes, un montant forfaitaire par visite (le
paiement au cas) sera pay� aux prestataires. Des niveaux maxima de
r�mun�ration des prestataires et le besoin d'autorisation sp�ciale pour
le traitement � l'�tranger ont aussi �t� discut�s dans le cadre du con-
tr�le des d�penses. Les niveaux exacts de r�mun�ration sont toujours
en cours de discussion, avec des suggestions, bas�es sur l'�tude de cer-
taines structures sanitaires choisies, allant de 1500 � 2500 KSh par
jour pour les malades hospitalis�s et de 100 � 400 KSh par visite en
consultation externe. Ces taux �taient bas�s sur l'�valuation des
besoins financiers du moment rapport�s par des h�pitaux gouverne-
mentaux et caritatifs avec un financement suppl�mentaire pour des
services de meilleure qualit� et de meilleures infrastructures sanitaires.
Des r�ductions du niveau des honoraires pourraient aussi �tre
consid�r�es � court terme pour les structures sanitaires incapables de
fournir le paquet complet de services.
   Ces m�canismes initiaux de paiement des prestataires ont �t� choisis
sur la base de leur simplicit� sur le plan administratif et de leur ressem-
blance avec les pratiques courantes, les m�thodes plus complexes du
type DRGs (� Diagnosis-related groups �) devant �tre consid�r�es plus
tard. Le niveau de r�mun�ration d�pendra du type de prestataire et
couvrira le co�t total du traitement � c'est-�-dire incluant le co�t des
m�dicaments et ne permettant pas le pr�l�vement d'honoraires suppl�-
mentaires � � moins que cela ne soit explicitement sp�cifi� (i.e. plus
faible r�mun�ration, par exemple, pour les soins de longue dur�e).
   Les deux m�thodes incitent � traiter les patients au plus faible co�t
possible dans la mesure o� cela augmente le revenu net de l'h�pital.
Ceci est avantageux pour l'efficacit� mais pourrait mener � l'applica-
tion de traitement de moins bonne qualit� pour �conomiser de l'argent
(par exemple, en n'utilisant pas les meilleurs intrants n�cessaires). On
peut r�pondre au potentiel pervers de cette incitation en accr�ditant et
en renouvelant les contrats des prestataires seulement s'ils adh�rent �

                            R�forme du financement de la sant� au Kenya � 297



des directives de qualit� claires et nettes. L'adh�sion � un jeu de stan-
dards de sant� d�finis dans les crit�res utilis�s par le FNAH pour l'ac-
cr�ditation des h�pitaux et par le Mod�le de Qualit� du Kenya [Kenya
Quality Model] (Mboya, Adelhardt 2003) li�e � la mesure dans laquelle
le SBP est fourni, sera utilis�e pour d�terminer les niveaux de rem-
boursement pour des diff�rents prestataires.

   8. Efficacit� administrative Les d�penses administratives et les
r�serves ne pourront pas exc�der 8 % des d�penses totales du FNAM.
Qui plus est, les investissements dans de nouvelles structures sanitaires
et des �quipements co�teux ne sont pas envisag�s dans le FNAM.
Cette d�cision est, en partie, une r�ponse � la critique principale
port�e au FNAH qui, dans le pass�, consacrait plus de 25 % de son
budget � l'administration et 53 % aux investissements. La limite de
8 % semble raisonnable au vu de l'exp�rience internationale : les
d�penses administratives ont r�cemment repr�sent� en moyenne
4.2 % des d�penses de sant� dans des syst�mes d'assurance maladie
�tablis, mais pourraient �tre plus �lev�es durant les ann�es initiales,
comme ce fut le cas en R�publique de Cor�e.


Financement du FNAM

Suite aux estimations initiales portant sur les montants requis pour
financer le FNAM et sur toutes les diff�rentes sources de financement
possible, il y a eu beaucoup de d�bats sur les niveaux exacts de contri-
bution de ces diff�rentes sources. Les premiers estim�s �taient cen-
tr�es sur l'importance des surplus durant les premi�res ann�es et les
fortes contributions gouvernementales. Plus r�cemment, suite � la
pr�sentation de la premi�re mouture du projet de Loi sur le FNAM au
Parlement, les questions majeures qui se sont d�gag�es �t� li�es aux
contributions pr�cises attendues des employ�s et de leurs employeurs,
et le potentiel de remboursement des co�ts engendr�s par les visites
des patients dans des h�pitaux priv�s relativement co�teux.


Mise en oeuvre graduelle

Les rapports techniques r�cents pr�voyaient une transition plus
graduelle vers une couverture universelle que les estimations initiales
du Document de Session. Cette transition graduelle est aussi plus

298 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



conforme � l'exp�rience internationale. Elle correspond aussi aux
opinions exprim�es dans d'autres �tudes (Njeru et al, 2004). Cela
signifierait non seulement une couverture incompl�te de la population
pendant la transition, mais aussi que les infrastructures publiques de
sant� continueraient � recevoir des subventions (d�croissantes) du
Minist�re de la Sant�. Tout ceci implique que les contributions du
gouvernement et des autres membres participant au FNAM pour-
raient �tre fix�es � des niveaux plus bas que pr�vu initialement.


Contributions tir�es des revenus fiscaux du gouvernement

Le Document de Session a soulign� que les imp�ts pr�alablement
affect�s au FNAM devrait contribuer � hauteur de 11 milliards de
KSH (chiffres de 2001). Cependant, il n'a pas encore �t� �tabli que
ceci �tait une option financi�rement r�alisable. Les bailleurs de fonds
internationaux ont aussi exprim� leurs inqui�tudes face au niveau des
revenus fiscaux requis et � l'impact global de la taxation sur la crois-
sance �conomique. A la lumi�re de cet aspect et face � une mise en
oeuvre plus graduelle et � l'analyse initiale que des surplus importants
seraient probablement d�gag�s durant les premi�res ann�es suivant la
mise en oeuvre, on a explor� la possibilit� de contributions plus faibles
du gouvernement. En m�me temps, on a per�u comme imp�ratif le
maintien d'une contribution gouvernementale dans la mesure o� les
contributions des salari�s ne seraient pas enti�rement en mesure de
subventionner les pauvres.


Contributions des employ�s et de leurs employeurs

Les projections initiales des sources potentielles de financement du
FNAM �taient bas�es sur l'hypoth�se que les allocations pour frais
m�dicaux fournies aux fonctionnaires et aux enseignants pourraient
�tre remises dans le FNAM. Cependant, suite � l'opposition des
groupes concern�s par cette harmonisation salariale des alternatives
bas�es sur le paiement d'une contribution l�g�rement plus �lev�e ont
aussi �t� analys�es. Il a aussi �t� sugg�r� de fixer un plafond aux contri-
butions dans la mesure o� des individus gagnant des revenus �lev�s
paieraient des montants probablement plus �lev�s que ce qui leur serait
n�cessaire pour s'assurer sur le march� priv�. Bien que la fixation d'un

                             R�forme du financement de la sant� au Kenya � 299



plafond aux contributions soit une option pragmatique pour garantir la
participation des individus � revenu �lev�, un compl�ment d'analyse est
n�cessaire pour sp�cifier un plafond appropri�.


Remboursement aux patients ayant eu recours
� des h�pitaux priv�s co�teux

Pour maximiser les choix offerts aux assur�s, il a �t� sugg�r� que la
possibilit� soit donn�e aux patients souhaitant se faire traiter dans un
des onze h�pitaux priv�s et co�teux de le faire, �tant entendu que le
FNAM ne rembourserait que jusqu'� hauteur du montant pay� dans
les structures sanitaires publiques, caritatives ou priv�es. Ces patients
combleraient la diff�rence de co�ts en payant directement de leurs
poches ou en contractant une assurance priv�e suppl�mentaire.


Projections financi�res : faisabilit� de diverses
options de contribution

Diff�rentes options de financement ont �t� explor�es � l'aide de
SimIns, un mod�le de simulation de programme d'assurance maladie.
A la suite de critiques faites � propos des estimations du Document de
Session initial, ces simulations ont surtout �t� centr�es sur les mon-
tants que le gouvernement et les autres bailleurs potentiels devraient
d�gager dans le cadre d'une mise en oeuvre graduelle du FNAM. Le
tableau 2 illustre les contributions attendues du gouvernement en
fonction de diff�rents niveaux de contribution des salari�s et d'un sc�-
nario de mise en oeuvre plus r�aliste.
  Les r�sultats des simulations montrent que les contributions gou-
vernementales peuvent �tre inf�rieures � ce qui est recommand� par le
Document de Session pour les premi�res ann�es de mise en oeuvre du
FNAM. Ceci est obtenu en donnant seulement une autonomie partielle
aux structures sanitaires publiques et en fournissant une couverture plus
limit�e aux travailleurs ind�pendants (dont les contributions sont par-
tiellement subventionn�es par les salari�s). Au cours des ann�es
suivantes, les contributions exig�es du gouvernement devront atteindre
des niveaux compatibles avec les estimations du Document de Session,
ce gouvernement �tant probablement oblig� de faire des arbitrages plus
difficiles au niveau des allocations entre la sant� et les autres secteurs.

300 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Organisation du FNAM

Le Projet de loi sur le FNAM exigera un r�ajustement de la struc-
ture organisationnelle de l'assurance. Une composante clef de cette
structure est un Conseil d'Administration r�form� comprenant des
repr�sentants de la soci�t� civile, et qui nomme un Pr�sident-
Directeur G�n�ral (PDG) responsable de la d�finition de la vision
d�taill�e et de la strat�gie du FNAM. Le PDG r�pond au Conseil
d'Administration.
  Plusieurs nouveaux d�partements ont aussi �t� propos�s. D'abord,
en plus du Bureau de Contr�le rendant compte au PDG, un nouveau
D�partement des Fraudes et Enqu�tes est propos� qui aura comme
responsabilit� de contr�ler les activit�s financi�res du FNAM. Il ren-
dra directement compte au Conseil d'Administration et devra �tre
�tabli comme une entit� ind�pendante de fa�on � renforcer les
capacit�s de contr�le du Conseil d'Administration et d'assurer la
transparence et la responsabilisation du FNAM. Deuxi�mement, un
nouveau d�partement de Contr�le devrait appuyer l'actuel d�partement
des Finances. Bien que la t�che de pr�paration du budget annuel con-
tinue � �tre assur�e par le d�partement des Finances, le d�partement
de Contr�le devra se focaliser sur la mise en oeuvre de proc�dures
pour v�rifier la r�partition du budget entre les diff�rents d�parte-
ments du FNAM et, ainsi, aider � transformer le FNAM en une
organisation fonctionnant selon la m�thode de gestion par objectifs.
Troisi�mement, on propose la mise en place d'un nouveau d�parte-
ment de Technologie de l'information dans la mesure o� une plus grande
informatisation du FNAM est une t�che essentielle non seulement
pour les op�rations, mais aussi pour l'�valuation des contrats et de la
qualit�. Quatri�mement, on recommande la cr�ation d'un nouveau
d�partement de Marketing pour d�velopper et mettre en oeuvre la
strat�gie de communications du FNAM. Cinqui�mement, un
d�partement des Prestations et de la Qualit� d�finira : (i) les standards
de services disponibles pour les membres du FNAM aux diff�rents
niveaux du syst�me de soins ; et (ii) les crit�res pour �valuer la qualit�
des prestations dans les structures sanitaires. Finalement, un d�parte-
ment des Contrats crucial pour les n�gociations sur les m�thodes et les
niveaux de paiement des prestataires de services de sant� a aussi �t�
sugg�r�.

                                       R�forme du financement de la sant� au Kenya � 301



Tableau 2 : Appui exig� du gouvernement pour diff�rents niveaux de contributions du
secteur salari� (sc�nario : accroissement mod�r� de la population)

Sc�nario d'accroissement de la population

Couverture                                           Ann�es apr�s la mise en oeuvre

                                          +1 an    +2 ans      +3 ans      +6 ans      +10 ans

Couverture de toute la population         26 %     34 %        45 %         53 %         62 %
Couverture des populations
   exempt�es                              12 %     20 %        30 %         30 %         30 %

Contributions exig�es du gouvernement

(Milliard deKSh, prix de 2004, avec % des d�penses publiques globales entre parenth�ses)

Contributions
  Employ� /
  employeur
  (% du salaire)                           Ann�es apr�s la mise en oeuvre

                         +1 an          +2 ans         +3 ans             +6 ans          +10 ans

2.9 % + 2.9 %         2.1 (0.69 %)   5.6 (1.77 %)  11.3 (3.41 %)     16.1 (4.24 %)    30.3 (6.70 %)
3.5 % + 3.5 %         0.5 (0.17 %)   3.9 (1.23 %)    9.4 (2.84 %)    13.7 (3.61 %)    27.3 (6.03 %)
4.5 % + 4.5 %         0.0 (0.00 %)   1.0 (0.32 %)    6.3 (1.90 %)      9.8 (2.58 %)   22.4 (4.95 %)
moins provision
   pour les ART *             �1.0           �1.6            �2.4              �3.9              �6.6

* dans ce sc�nario, le non-pauvre paie un co-paiement de 50 % pour le traitement anti-r�troviral. Les
pauvres, cependant sont enti�rement couverts.



R�ACTIONS INITIALES � LA PROPOSITION D'ASSURANCE MALADIE

Parties prenantes autres que le Gouvernement

Plusieurs organisations non gouvernementales et groupes d'int�r�t
ont �mis leur avis sur la proposition initiale concernant le syst�me
d'assurance maladie. Bien qu'une �tude bas�e sur des entretiens
formels ou des groupes de discussion n'ait pas encore �t� conduite,
l'analyse des rapports publi�s par les m�dias et d'autres d�clarations
r�sume les pr�occupations majeures de ces parties prenantes.
   Les Organisations de Gestion des Services de Sant� (HMOs) ont soulev�
un grand nombre de probl�mes, notamment que l'introduction de ce
syst�me causerait une baisse de leurs activit�s. Une analyse quantitative
permettant de confirmer ou d'infirmer ces all�gations n'a pas encore �t�
faite. Cependant, il est important de noter que l'une des cons�quences
de la loi sur le syst�me d'assurance maladie serait de permettre aux

302 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



HMO et autres compagnies d'assurance de vendre de l'assurance
maladie suppl�mentaire (non obligatoire). Ces produits seraient des-
tin�s aux personnes pr�tes � payer pour des services am�lior�s
(g�n�ralement en termes de meilleures infrastructures plut�t que de
qualit� des soins cliniques) de pr�f�rence au paquet de services propos�
par le syst�me d'assurance maladie. En fait, l'assurance maladie suppl�-
mentaire pourrait �tre vendue � une partie bien plus grande de la popu-
lation que celle actuellement couverte par les HMO. A part cette
crainte de baisse des activit�s, une des pr�occupations encore plus fer-
mement exprim�es est le potentiel de corruption et le mauvais usage des
cotisations recueillies au moyen de l'assurance maladie.
   Certaines HMO ont �voqu� le risque de r�duction des emplois en
raison de l'augmentation des co�ts de main d'oeuvre r�sultant des
fortes contributions exig�es des employeurs. Cette pr�occupation jus-
tifie clairement la n�cessit� de proc�der � une �tude quantitative. La
demande finale de main d'oeuvre d�pendra en particulier des co�ts
relatifs de la main d'oeuvre et du capital, de leur taux de substitution
au sein des secteurs de l'�conomie du Kenya et du niveau et de la
croissance de l'�conomie. Toutefois, une telle analyse devrait �gale-
ment tenir compte de l'am�lioration de la productivit� d�coulant
d'une main d'oeuvre en meilleure sant�.
   La F�d�ration des Employeurs Kenyans craint de voir sa contribution �
l'assurance maladie des employ�s augmenter. Une telle pr�occupation
n'est justifi�e que si les employeurs maintiennent leurs contrats
actuels avec les compagnies d'assurance priv�es ou les HMO malgr�
l'introduction de la Loi sur le FNAM, vu que les avantages de ces con-
trats n�goci�s pourrait souvent faire double emploi avec ceux du nou-
veau syst�me. De tels contrats pourraient �tre maintenus mais ajust�s
et plus centr�s sur l'assurance maladie suppl�mentaire. Ainsi,
l'augmentation de la quote-part de l'employeur est peu probable.
N�anmoins, la F�d�ration s'inqui�te de la transition vers ce nouveau
syst�me, et il en est de m�me pour beaucoup d'employ�s qui craignent
que le paquet de services offert par leur assurance maladie actuelle ne
soit r�duit. Il est donc conseill� que la l�gislation du nouveau syst�me
d'assurance maladie accorde une p�riode de transition au cours de
laquelle les contrats pourraient �tre ajust�s � cette nouvelle situation.
   Un autre point important �voqu� a �t� le futur r�le des allocations
m�dicales pour les fonctionnaires et les enseignants. Ce point a �t�

                            R�forme du financement de la sant� au Kenya � 303



particuli�rement soulev� par l'Association Nationale des Enseignants
du Kenya (ANEK), l'Association Nationale des Infirmi�res du Kenya
et l'Association M�dicale du Kenya. Les allocations m�dicales consis-
tent en des sommes forfaitaires qui sont destin�es � couvrir les
d�penses affect�es aux soins m�dicaux et effectu�es par ces employ�s
et leurs familles. En th�orie, une fois le FNAM op�rationnel, de telles
allocations ne seront plus n�cessaires vu que ces employ�s et leurs
familles b�n�ficieront des avantages de cette nouvelle assurance
maladie. Mais de mani�re pratique, ils sont plut�t consid�r�s comme
un salaire suppl�mentaire dont la d�duction du salaire net affecterait
gravement le pouvoir d'achat de ces groupes. Le gouvernement, ayant
reconnu ce fait, a d�cid� de ne pas d�duire ces contributions du salaire
net. N�anmoins, le gouvernement en tant qu'employeur des fonction-
naires et enseignants contribuera au syst�me en payant la quote-part
des ces employ�s.
   La structure de gestion du nouveau syst�me a �t� � plusieurs
reprises soulev�e comme probl�me par l'Organisation Centrale des
Syndicats, l'Association des Industries du Kenya et l'Association
M�dicale du Kenya, notamment en ce qui concerne la nature du pou-
voir de d�cision du prochain Conseil d'Administration du FNAM.
Ces partenaires pr�f�rent la structure selon laquelle le Conseil d'Ad-
ministration est largement autonome et contr�le la gestion du sys-
t�me, ayant � sa t�te un Directeur Ex�cutif r�pondant directement �
ce Conseil. En d'autres termes, la gestion et le contr�le directs des
fonds et des op�rations seraient assur�s par une vari�t� de partenaires
au travers de leurs repr�sentants au sein du Conseil d'Administration.
   Par une d�claration du Groupe de Travail des Partenaires pour la
Lutte contre le VIH/SIDA (GTPLV), les bailleurs de fonds ont �gale-
ment exprim� leur avis sur la loi propos�e pour l'instauration du
FNAM. Leur premi�re pr�occupation concerne la p�riode de transi-
tion vers l'assurance universelle. Les bailleurs ont exprim� la n�cessit�
d'une p�riode de 15 ans pour permettre l'inclusion syst�matique des
populations pauvres et du secteur informel. Il est � noter qu'une telle
p�riode de transition est coh�rente avec le � sc�nario de mise en oeuvre
progressive �. Selon le GTPLV, cette politique de transition devrait
aussi veiller � assurer l'acc�s effectif des populations pauvres aux
services de pr�vention. La seconde inqui�tude rel�ve de la lenteur du
processus de consultation des acteurs cl�s, y compris les contribuables,

304 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



les employeurs, la soci�t� civile et les prestataires de services de sant�
priv�s. En d�finitive, de m�me que pour les HMOs, l'�ventualit� d'une
augmentation des contributions d'assurance maladie ou des taxes au
d�triment de la croissance �conomique a �t� relev�e.
   Deux autres parties prenantes importantes, l'Association M�dicale
Chr�tienne du Kenya et la Commission Catholique pour la Sant� et la
Vie Familiale, ont exprim� leur satisfaction g�n�rale concernant le
projet de loi en indiquant qu'il s'alignait avec leur propre vision d'un
syst�me de sant� ad�quat pour tous. Bien que les pr�occupations
�mises par les autres parties prenantes et pr�sent�es dans cette section
demeurent, l'analyse des informations recueillies au niveau des m�dias
r�v�le que la plupart des partenaires autres que les HMO soutiennent
le projet de loi.


Discussions en cours au niveau du Gouvernement et du Parlement

Comme dans les pays qui ont proc�d� � de telles r�formes dans le
pass�, de longues discussions au sein du Gouvernement et du Par-
lement concernant le contenu et la proposition de mise en oeuvre de la
loi pourraient avoir lieu. Un des objectifs principaux fait l'unanimit� :
assurer que tous les Kenyans aient un acc�s abordable aux soins de
sant�. Cependant, de longues discussions au sein du Gouvernement se
poursuivent et portent sur les �tapes de mise en oeuvre du syst�me,
l'inclusion des populations pauvres et l'allocation des recettes fiscales
du gouvernement au financement du FNAM, de m�me que la d�fini-
tion du paquet de services offert par le FNAM.
   Un domaine soulevant de nombreux d�bats est la proposition d'une
contribution financi�re du Gouvernement au FNAM pour inclure les
pauvres et subventionner enti�rement leurs contributions � l'assu-
rance. M�me si des projections financi�res ont �t� faites, montrant les
contributions probables du gouvernement qui pourraient �tre requi-
ses au fil du temps, une question cruciale a �t� de savoir si le gou-
vernement devrait attendre que la situation macro-�conomique du
pays s'am�liore, ou si l'allocation consacr�e � la sant� dans le budget
global du gouvernement devrait �tre accrue. Une autre question
importante est de d�cider si le Gouvernement devrait d'abord
am�liorer la qualit� des infrastructures sanitaires et augmenter l'in-
vestissement consacr� � ces infrastructures avant de commencer �
contribuer au FNAM (Kimani et al., 2004 ; Njeru et al. 2004).

                             R�forme du financement de la sant� au Kenya � 305



D�FIS DE LA MISE EN OEUVRE

En plus de s'assurer que le FNAM est bien con�u, sa mise en oeuvre
ainsi que les changements organisationnels exig�s ont besoin d'�tre
pris en consid�ration. Dans une certaine mesure, la mise en oeuvre est
facilit�e par les le�ons tir�es de l'exp�rience du FNAH, bien qu'il soit
imp�rieux que le FNAM soit vu comme une nouvelle orientation poli-
tique en raison des nombreuses critiques faites au FNAH par plusieurs
parties prenantes. Lancer le FNAM sous forme de projet pilote dans
une ou plusieurs r�gions repr�sentatives a �t� sugg�r� comme une
fa�on d'�valuer de nouvelles proc�dures avant qu'elles ne soient intro-
duites sur une plus grande �chelle. Il a aussi �t� conseill� de mettre en
place des groupes de travail pour chacune des t�ches fondamentales
du FNAM comme pour la qualit� et les contrats; la publicit� et l'�du-
cation; la formation en gestion et les technologies de l'information ; et
le suivi et �valuation.
   Ces groupes de travail ont maintenant �t� mis en place et ont com-
menc� � explorer plus en d�tail comment les diff�rents aspects de con-
ception du FNAM doivent �tre mis en oeuvre. Le groupe de travail
sur la qualit� et les contrats, par exemple, a commenc� � �valuer l'ac-
cr�ditation des structures de sant� dans des zones choisies selon des
m�thodes d'�valuation des standards de qualit� et des standards en
mati�re de paquets de services offerts. Par contre, le groupe n'a pas
�valu� le niveau du prix des services et celui des remboursements. De
m�me, dans le groupe de travail sur la formation en gestion et les
technologies de l'information, la pr�paration pour la mise en oeuvre a
produit des r�sultats mitig�s. Des progr�s ont �t� accomplis en
mati�re de formation du personnel du FNAH et de processus
d'inscription, mais les r�sultats sont moins encourageants en ce qui
concerne les t�ches comme l'identification des pauvres, la collecte des
revenus dans des succursales locales et d'autres questions de gestion.
   La mise en oeuvre d'un syst�me d'assurance maladie touchant
l'ensemble du pays repr�sente un d�fi majeur. Les questions de faisabi-
lit� �conomique et d'acceptabilit� politique continuent � faire l'objet de
discussions, avec les parties prenantes faisant part de leurs inqui�tudes
face � tel ou tel aspect de la conception de la proposition d'assurance
maladie soumise au Parlement kenyan � la fin de l'ann�e 2004. Il est
important de reconna�tre que pour des raisons �conomiques, sociales,
politiques et organisationnelles, une p�riode de transition bien

306 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



pr�par�e sera n�cessaire. Au vu de l'exp�rience internationale en
mati�re de mise en oeuvre de syst�mes d'assurance maladie, une telle
p�riode pourrait probablement durer plus d'une d�cennie. Cependant,
des objectifs importants comme ceux li�s � l'acc�s aux services de sant�,
y compris le besoin d'�viter l'appauvrissement d� aux paiements
directs, devraient �tre reconnus d�s le d�part de fa�on � ce que des pro-
gr�s constants vers une couverture universelle efficace de la population
puissent �tre planifi�s et r�alis�s.



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                                  R�forme du financement de la sant� au Kenya � 307



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2.2. Les mutuelles


                                                                     CHAPITRE 10



             Le d�veloppement des mutuelles
                                            de sant� en Afrique

                                                                  Pascal N'diaye




R�sum� : La Concertation entre les acteurs de d�veloppement des mutuelles de
sant� en Afrique est un r�seau de partage d'exp�riences, de comp�tences et d'in-
formations1. Au nombre de ses activit�s prioritaires, figure le syst�me de suivi
du d�veloppement des mutuelles de sant�. Ce suivi se r�alise notamment par la
r�alisation d'un Inventaire (tous les trois ans), qui vise � donner une photogra-
phie actualis�e de la situation des syst�mes d'assurance maladie (SAM) et
mesurer l'�volution du mouvement.
   L'Inventaire 2003 a touch� les 11 pays membres du r�seau (B�nin, Burkina
Faso, Cameroun, C�te d'Ivoire, Guin�e, Mali, Mauritanie, Niger, S�n�gal,
Tchad et Togo). Coordonn� par le si�ge de la Concertation bas� � Dakar, il a
impliqu� tous les acteurs de terrain : promoteurs et points focaux de la Concer-
tation, structures d'appui, organisations f�d�ratives des mutuelles, etc.
   Au total, 622 SAM ont �t� r�pertori�s dans les 11 pays. Ces SAM pr�sen-
tent une diversit� d'approche, tant pour les cibles, le processus de mise en place et
le mode de gestion. Bien que la majorit� des SAM soient de cr�ation r�cente
(58 % � partir de 2000), le nombre de SAM fonctionnels observe une crois-
sance exponentielle. En effet, ce nombre double pratiquement tous les trois ans.
Il est pass� de 76 en 1987 � 199 en 2000 et 366 en 2003.
   De plus en plus de structures s'int�ressent � l'appui au d�veloppement des
SAM. Cette implication contribue favorablement � ce d�veloppement. La
mutualit� en Afrique s'inscrit d�sormais dans les strat�gies et politiques
nationales de protection sociale et des strat�gies novatrices d'articulation de l'as-
surance maladie avec des activit�s annexes des groupes cibles sont exp�riment�es.

                                                                                    311

312 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



      Il n'en demeure pas moins que des d�fis se posent encore avec beaucoup
   d'acuit� pour assurer leur viabilit�. Bien que la cotisation soit relativement
   accessible (les 2/3 demandent moins de 300 FCFA par mois et par b�n�ficiaire),
   la taille des SAM est encore faible et le recouvrement des cotisations est difficile.
   Les prestations prises en charge concernent notamment les m�dicaments
   g�n�riques, les soins de premier niveau, les accouchements simples, les c�sari-
   ennes et la petite hospitalisation (dans plus de la moiti� des SAM fonctionnels).



INTRODUCTION

La Concertation entre les acteurs de d�veloppement des mutuelles de
sant� en Afrique est un r�seau de partage d'exp�riences, de comp�tences
et d'informations. � travers son activit� de suivi, la Concertation vise les
objectifs suivants : (1) Disposer d'une photographie actualis�e de la situa-
tion des syst�mes d'assurance maladie ; (2) Mesurer l'�volution du mou-
vement mutualiste au regard des Inventaires pr�c�dents ; (3) Analyser les
performances et la contribution dans l'acc�s aux soins de sant�.
   L'Inventaire de 2003, qui a r�pertori� 622 syst�mes d'assurance
maladie, s'est int�ress� aux questions suivantes :

� l'existence d'autres formes d'assurance maladie que les mutuelles de
   sant� ;

� l'articulation ou int�gration d'autres activit�s (offre de soins, micro-
   finance, fili�res, etc.) ;

� la part de mutuelles de sant� fonctionnelles, en projet, en gestation,
   en difficult� ;

� la population cible, porte d'entr�e et type de clients auxquels les sys-
   t�mes d'assurance maladie s'adressent et les types d'acteurs impliqu�s
   dans l'accompagnement ;

� les caract�ristiques des diff�rents syst�mes (mode d'adh�sion, nom-
   bre d'adh�rents et de b�n�ficiaires) ;

� les paquets de prestations, niveau de recours, attractivit� des presta-
   tions, mode de paiement ;

� les relations avec les prestataires et autres partenaires ;

� le syst�me de gestion et fonctionnement (participation des membres)

                           Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 313



�VOLUTION QUANTITATIVE DES MUTUELLES (1997 � 2003)2

Plusieurs formes d'assurance maladie existent dans les pays ; elles se
donnent souvent le nom de mutuelles de sant� (9 cas sur 10). Dans l'In-
ventaire, le terme g�n�rique � syst�me d'assurance maladie (SAM) � a
�t� utilis� pour regrouper toutes ces formes.
   Le tableau 1 montre l'�volution depuis le premier Inventaire de
1997 (qui avait servi de base � l'organisation de l'atelier d'Abidjan sur
les � strat�gies d'appui aux mutuelles de sant� en Afrique � (Juin 1998),
qui a conduit � la mise en place de La Concertation. On observe un
d�veloppement assez lent dans la majorit� des pays couverts (Tchad,
Togo, Mauritanie, Niger, et Cameroun), tandis que d'autres (Mali,
S�n�gal, Burkina Faso) ont un d�veloppement assez rapide.
   Le tableau 2 donne une vue d'ensemble des organismes recens�s
par l'Inventaire, par pays et selon le degr� de fonctionnalit� des SAM,
le S�n�gal appara�t nettement comme le pays o� le nombre est le plus
�lev�, environ 150. Ensuite viennent la Guin�e, le Burkina et le Mali
autour de 100, puis le B�nin, le Cameroun et la C�te d'Ivoire autour
de 50. Le Niger, le Tchad, le Togo et la Mauritanie pr�sentent un
tableau plus modeste, indiquant un d�veloppement des mutuelles de
sant� � plusieurs vitesses.
   Le tableau 3 montre que les SAM fonctionnels sont des organismes
jeunes : 54 % ont tenu leur assembl�e g�n�rale (AG) constitutive
depuis 2000 et seulement 12 % avant 1996. L'analyse par pays indique
que les 11 pays n'ont pas eu la m�me histoire.


           Tableau 1 : Situation globale des SAM fonctionnels

                                   1997             2000        2003

           B�nin                         11          23           43
           Burkina Faso                   6          26           36
           Cameroun                      18          20           22
           C�te d'Ivoire                             29           36
           Guin�e                         6          27           55
           Mali                           7          22           56
           Mauritanie                                              3
           Niger                          6          12           12
           S�n�gal                       19          29           87
           Tchad                          3            4           7
           Togo                0 + 8 projets           7           9
           TOTAL                         76         199          366

314 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 2 : Situation globale (2003)

                        Fonctionnels   En gestation    En projets       En difficult�     TOTAL

B�nin                        43              8               5                               56
Burkina Faso                 36             34              17                4              91
Cameroun                     22              6               9                2              39
C�te d'Ivoire                36              1                                3              40
Guin�e                       55             36              10              10             111
Mali                         56             16               3                4              79
Mauritanie                    3                              4                                 7
Niger                        12              3               2                1              18
S�n�gal                      87             36              17                9            149
Tchad                         7                                                                7
Togo                          9              2              14                               25
TOTAL                       366            142              78              33             622


Tableau 3 : Chronologie des SAM fonctionnels (N = 366)

                    % de SAM ayant tenu      % de SAM ayant collect�           % de SAM ayant
                      l'AG constitutive        les 1�res cotisations         servi des prestations
P�riode              pendant la p�riode         pendant la p�riode            pendant la p�riode

Avant 1990                 4,7 %                      4,9 %                          4,4 %
1990 � 1994                4,3 %                      4,3 %                          3,5 %
1995                       3,2 %                      2,3 %                          2,3 %
1996                       4,4 %                      4,0 %                          3,2 %
1997                       7,3 %                      6,3 %                          5,5 %
1998                       8,2 %                      6,0 %                          5,5 %
1999                      14,3 %                     12,0 %                          8,7 %
2000                      16,6 %                     18,3 %                         17,4 %
2001                      15,7 %                     16,3 %                         17,2 %
2002                      15,5 %                     19,2 %                         19,5 %
2003*                      5,8 %                      6,3 %                         12,8 %

* l'ann�e 2003 doit �tre consid�r�e comme incompl�te, car l'Inventaire n'a port� que sur les six
premiers mois


    Six pays avaient au moins un SAM avant 1990 (Burkina, Cameroun,
C�te d'Ivoire, Niger, S�n�gal et Togo). Au Niger et au Togo,
l'organisme existant n'en a pas suscit� beaucoup d'autres et ces pays ne
font pas aujourd'hui partie de ceux o� l'assurance maladie commence
� avoir sa place. Au Cameroun et en C�te d'Ivoire, d'autres SAM ont
�t� cr��s de 1990 � 2000 et ces pays ont atteint � cette date un effectif
proche de celui de 2003. Au Burkina, le mouvement de cr�ation a �t�
assez lent jusqu'en 2000. Mais, depuis 2001 l'effectif de SAM a �t�
multipli� par deux. Au S�n�gal enfin, la croissance a �t� plus forte
qu'ailleurs et le nombre de SAM a �t� multipli� par 3 depuis 1999.

                        Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 315



   Le B�nin et le Mali ont eu leurs premiers SAM � partir de 1995 et
ont connu une croissance assez r�guli�re des effectifs, avec un rythme
de cr�ation plus fort dans le second pays. Le mouvement a d�but� en
Guin�e � partir de 1999 et une dizaine d'organismes s'y est cr��e par
an (sauf en 2001). Enfin, on peut consid�rer que le Tchad et la Mauri-
tanie n'ont pas encore vraiment d�marr� de fa�on significative.
   Certains SAM ont collect� des cotisations et servi des prestations
avant d'avoir tenu l'AG constitutive. Certains ont m�me indiqu� une
date de d�but des prestations ant�rieure � la date de collecte des cotisa-
tions ! Globalement, l'�cart entre l'AG constitutive et la collecte des
cotisations est inf�rieur � 12 mois pour une majorit� de SAM, de m�me
que l'�cart entre le service des prestations et la collecte des cotisations.



L'ENVIRONNEMENT DES MUTUELLES DE SANT�

L'environnement dans lequel se d�veloppent les mutuelles de sant� dans
les diff�rents pays joue certainement un r�le pr�pond�rant. Les facteurs
qui contribuent au d�veloppement des mutuelles de sant� : l'implication
des acteurs, un grand effort dans l'atteinte de groupes sans protection
sociale, des strat�gies novatrices d'articulation de l'assurance maladie
avec des activit�s annexes des groupes cibles
   La mise en place des mutuelles de sant� a �t� principalement le fait
des communaut�s � la base. Jusqu'� la fin des ann�es 1990, elles se sont
d�velopp�es sur une simple base de mise en commun des ressources pour
prendre en charge des prestations. Aucune base scientifique ne semblait
orienter le choix des prestations et les cotisations n'�taient g�n�ralement
pas fix�es avec une p�riodicit� et un montant institutionnalis�s. C'�tait la
solidarit� spontan�e appliqu�e dans un contexte et un cercle restreint de
personnes ayant les m�mes affinit�s notamment sociales. Ces formes
d'organisation n'avaient d'ailleurs pas une activit� principale de prise en
charge de soins de sant�. En cas de maladie, les membres pouvaient
b�n�ficier des services au cas par cas, sur un forfait d�termin� de mani�re
consensuelle et ne couvrant pas forc�ment le besoin.
   Suite � l'atelier d'Abidjan, des organismes d'aide au d�veloppement se
sont de plus en plus int�ress�s dans l'appui � la mise en place des
mutuelles de sant�, avec des prestations en rapport avec la contribution
et avec une forte pr�dominance de la prise en charge des maladies par les
organisations communautaires. Au d�part, tr�s peu de ces organismes

316 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



avaient des activit�s de terrain et ils se limitaient � fournir des ressources
financi�res aux groupes qui souhaitaient exp�rimenter ces initiatives.
   Plus tard, la plupart des SAM fonctionnels ont �t� cr��s en impli-
quant diff�rentes cat�gories d'acteurs dont les principaux sont les
structures de soins, l'administration locale, les ONG et les partenaires
du d�veloppement. Globalement, les pouvoirs publics seraient plus
pr�sents au moment de la cr�ation (63 %3), de m�me que les institu-
tions et professionnels de soins (58 %). L'ensemble des acteurs
externes (ressortissants �trangers, partenaires du d�veloppement,
ONG et organismes �trangers) est cit� quant � lui dans 79 % des cas.
   Les SAM fonctionnels ont re�u un appui initial, en nature ou en
argent et un apport technique. Le tableau 4 montre la nature de l'appui.
Il indique aussi que cet appui est r�duit aujourd'hui et concerne notam-
ment l'appui technique. En effet, les structures d'appui ont d�velopp�
les connaissances sur les mutuelles de sant� et produit de nombreux
outils m�thodologiques pour accompagner les initiatives et donner les
comp�tences aux g�rants. Une activit� d'accompagnement se pratique
�galement, surtout en mati�re de formation en mise en place, gestion et
suivi-�valuation. Il est plus rare que ces organismes interviennent dans
la logistique (principalement la production de carnets de membres, si
c'est le cas), la construction ou l'�quipement de si�ges, encore moins sur
les salaires. Ceci fait que les mutuelles de sant� sont encore principale-
ment g�r�es par des volontaires ou b�n�voles, ce qui r�duit la disponi-
bilit� de ces g�rants et a un impact sur la performance.


Partenariat

Bien que la collaboration avec les organismes d'appui au secteur de la
sant� et les d�partements minist�riels en charge de ces questions soit
forte, le partenariat inter-mutuelle semble encore faible. En effet, plus
de la moiti� des SAM n'appartiennent � aucun r�seau, un tiers indi-


Tableau 4 : Appui aux SAM fonctionnels (N = 366)

Type d'appui                                       % de SAM ayant re�u un appui

Appui initial financier ou en nature                         68 %
Appui actuel financier ou en nature                          54 %
Appui technique ext�rieur initial                            73 %
Appui technique ext�rieur actuel                             58 %
Relations avec syst�mes d'assurance �trangers                9,9 %

                              Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 317



quant qu'ils font partie d'une Union ou d'une F�d�ration de mutuelles,
surtout au S�n�gal, de C�te d'Ivoire, du Mali et de Guin�e. Dans les
autres pays, les SAM semblent �tre des organismes �voluant isol�ment.
    S'agissant d'appartenance � un r�seau d'�conomie sociale, les SAM
du B�nin et du Togo d�passent largement la moyenne. Mais l'apparte-
nance � un tel r�seau reste modeste pour l'ensemble des SAM (un sur
10 environ).
    Cet isolement est compens� par l'int�gration de l'assurance maladie
dans une organisation plus large (233 SAM fonctionnels, soit 64 %).

� association, coop�rative                                  : 29 %

� institutions de micro-finance (IMF)                       : 4 %

� ONG                                                       : 15 %

� autre organisation communautaire                          : 1 %

� structure sanitaire                                       : 12 %

� syndicat                                                  : 4 %

� autre organisation sans pr�cision                         : 35 %


    De ce point de vue, les situations du Cameroun, du Burkina, de la
Guin�e et du Tchad tranchent avec celles des autres pays : presque tous
les SAM de ces pays appartiendraient � des organisations plus larges.

Tableau 5 : Structuration des SAM* (N = 366)

                      SAM appartenant �
                       une Union ou une            SAM appartenant �               SAM
                         F�d�ration                    un r�seau              n'appartenant �
                        de mutuelles               d'�conomie sociale         aucune structure

B�nin                    5        11,6 %             15       34,9 %            23       53,5 %
Burkina Faso             4        11,1 %              0           0             32       88,9
Cameroun                 2         9,1                0           0             20       90,9
C�te d'Ivoire           16        44,4                1        2,8              19       52,8
Guin�e                  18        32,7                1        1,8              36       65,5
Mali                    25        44,6                3        5,4              28         50
Mauritanie               0           0                0           0               3       100
Niger                    0           0                1        8,3              11       91,7
S�n�gal                 52        59,8                9       10,3              26       29,9
Tchad                    0           0                1       14,3                6      85,7
Togo                     0           0                4       44,4                5      55,6
Total                  122         33 %              35        9,6 %           209       57,1 %

* les pourcentages se rapportent aux effectifs de SAM fonctionnels de chaque pays ou de l'ensemble

318 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



N�anmoins, la nature de l'organisation � m�re � est assez disparate. Il
n'est pas s�r que la notion d'appartenance � une organisation plus large
ait �t� comprise partout de la m�me fa�on. En outre, les libell�s � autre
organisation �, � association et coop�rative �, � ONG �, qui sont les
plus fr�quents, ne renseignent pas vraiment sur l'activit� de ces organi-
sations. On observe en m�me temps que peu de structures sanitaires et
encore moins d'institutions de micro-finance � h�bergent � des SAM
fonctionnels.



CARACT�RISTIQUES G�N�RALES DES R�GIMES PROPOS�S
PAR LES SAM

Adh�sion et cotisations

Dans la majorit� des SAM fonctionnels, l'adh�sion est volontaire (9
fois sur 10) et 74,9 % d'entre eux font payer un droit d'entr�e, indi-
viduel ou familial, selon le mode d'adh�sion.
   Les syst�mes de cotisation sont assez disparates ; 60 % des SAM
utilisent le forfait, individuel ou familial. La modulation selon les
ressources ou la taille de famille est appliqu�e dans un peu plus d'un
tiers des cas. La cotisation forfaitaire est la seule solution pratique
pour la plupart des SAM qui n'ont pas la connaissance du niveau de
ressources des personnes et ne peuvent l'utiliser comme r�f�rence
pour la d�termination d'une cotisation en fonction de ces ressources.
   Le mode de paiement de la cotisation varie d'un SAM � l'autre et
les p�riodicit�s mensuelles et annuelles sont les plus fr�quentes, cette
modalit� correspondant souvent aux SAM ciblant des populations
vivant d'une culture de rente.
   Le recouvrement des cotisations se fait presque toujours par
paiement direct des adh�rents (315 SAM, soit 86 %). Le pr�l�vement
� la source est pratiqu� dans 14 % des SAM fonctionnels et dans 3,6 %
des cas, les cotisations sont pay�es par un tiers.
   On constate par ailleurs que deux tiers des SAM qui ont une cotisa-
tion individuelle mensuelle demandent moins de 300 FCFA ; que plus
de 60 % des SAM qui ont une cotisation familiale annuelle demandent
moins de 6 000 FCFA (soit un effort mensuel inf�rieur � 500 FCFA).
Ces chiffres indiquent clairement que les SAM sont, en majorit�,
adapt�s � des populations � faibles ressources.

                       Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 319



   Les chiffres relatifs aux cotisations per�ues et aux prestations ver-
s�es, aussi imparfaits soient-ils, permettent de donner une estimation
du co�t de l'assurance maladie des SAM d'une part, de la contribution
au financement du secteur des soins d'autre part.
   En utilisant le montant moyen des cotisations per�ues par un SAM et
le montant moyen des prestations vers�es, on peut �valuer � 2 316 808 182
FCFA et � 904 614 750 FCFA les montants correspondants pour les 366
SAM inventori�s. Le nombre de b�n�ficiaires en 2003 a �t� estim� pour
ces 366 SAM � l'int�rieur d'une fourchette {1 722 396 � 1 728 252} en
prenant le chiffre brut et � l'int�rieur d'une fourchette {866 322 �
886 086} en ne consid�rant que les b�n�ficiaires � jour de leurs cotisations.
   A partir de l�, on peut retenir que les 366 SAM per�oivent 2 317
millions de FCFA de cotisations et versent 905 millions de FCFA de
prestations � 1 million de b�n�ficiaires. Le co�t individuel de l'assu-
rance maladie des SAM serait ainsi de 2 317 FCFA par an ou
193 FCFA par mois, la contribution annuelle des SAM � la d�pense de
soins individuelle serait de 905 FCFA.
   On peut aussi calculer un ratio de sinistralit� pour les SAM qui ont
fourni � la fois le montant des prestations vers�es et le montant des coti-
sations per�ues. On constate alors, au-del� de quelques chiffres aber-
rants parmi les 15 % de SAM qui ont un ratio sup�rieur � 1, qu'une
majorit� de SAM se situe en-dessous de 0,6. Si l'on admet qu'un ratio
correct doit avoisiner 80 %, cela pourrait indiquer une surestimation
globale des cotisations. Le ratio moyen est de 0,71, mais il est � tir� � la
hausse � par les chiffres suspects qui ont �t� mentionn�s.


Les garanties offertes par les SAM fonctionnels

Chaque SAM a sa propre garantie et il est difficile de comparer dans le
d�tail les prestations propos�es par tous les SAM fonctionnels. Un
certain nombre de traits caract�risent n�anmoins l'ensemble.

a)   On note d'abord que les SAM offrent majoritairement une
     garantie au premier franc : 215 sur 366, soit 59 %. Un garantie
     compl�mentaire est offerte par 67 SAM (18,3 %) et une garantie
     mixte (au premier franc pour certaines prestations, compl�men-
     taire pour d'autres) par 77 (21,0 %).

b) Majoritairement, les SAM ne donnent pas le choix entre plusieurs
     garanties : 233 (69,5 %) ont une seule garantie. Les 102 SAM

320 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   (30,5 %) qui proposent diff�rentes options diff�rencient l'acc�s
   au secteur public et au secteur priv�.

c) On peut penser aussi que les SAM donnent une place relative-
   ment modeste � la pr�vention, si l'on consid�re que 37 % seule-
   ment incluent des prestations non individualis�es.

d) Les garanties des SAM laissent dans moins d'un quart des cas
   seulement (82 SAM, 22,4 %) le libre choix du prestataire de
   soins. La disposition g�n�rale est l'acc�s limit� aux prestataires
   conventionn�s (275 SAM, 75,1 %).

e) Pour donner une id�e du panier de soins constituant la garantie,
   nous avons class� les prestations par fr�quence d�croissante
   (tableau 6). On constate que le m�dicament g�n�rique, les soins de
   premier niveau, les accouchements simples, les c�sariennes et la
   petite hospitalisation, sont pr�sents dans le panier de soins de plus
   de la moiti� des SAM fonctionnels. Les soins plus sp�cialis�s,
   l'hospitalisation, la chirurgie et le transport en ambulance figurent
   dans 30 � 50 % des paniers. Ce r�sultat refl�te la pr�f�rence
   g�n�ralement donn�e par les populations au m�dicament d'abord,
   aux soins les plus fr�quents (y compris ceux li�s � la grossesse)
   ensuite et corr�lativement la moindre demande de prise en charge
   de soins hospitaliers et sp�cialis�s.

f) La prise en charge des d�penses de soins par les SAM est le plus sou-
   vent partielle : 278 SAM fonctionnels (76 %) ont impos� un co-
   paiement, mais 84 (24 %) couvrent l'int�gralit� du co�t des actes
   inclus dans la garantie. Le co-paiement est d�fini le plus souvent par
   un ticket mod�rateur. Mais, pour certaines prestations, il existe
   quelques plafonds de prise en charge et plus rarement des franchises.
   Les tickets sont situ�s le plus fr�quemment entre 30 � 39 % ou �
   plus de 50 %. Globalement, on peut dire que les adh�rents ont, dans
   une majorit� de SAM, plus de 30 % de la d�pense � leur charge.

g) Les garanties offertes par les SAM fonctionnels pr�voient dans une
   majorit� de cas un syst�me de tiers-payant. Pr�s de 7 SAM sur 10
   payent � la place du patient b�n�ficiaire ; quelques � uns combinent
   tiers-payant et remboursement, selon les prestations. En-dehors du
   paiement du ticket mod�rateur, le d�bours n'est impos� syst�ma-
   tiquement au patient que par moins de 2 SAM sur 10.

                             Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 321



Tableau 6 : Classement des prestations selon leur fr�quence dans les garanties des SAM
fonctionnels (N = 366)

Prestations                                             Nombre de SAM         Pourcentage

M�dicaments g�n�riques                                        285               77,9 %
Accouchement simple de 1er niveau                             212               57,9 %
C�sarienne                                                    201               54,9 %
Soins ambulatoires de 1er niveau                              197               53,8 %
Petite hospitalisation                                        185               50,5 %
Consultations pr�natales de 1er niveau                        176               48,1 %
Accouchement avec complications                               166               45,4 %
Hospitalisation m�dicale                                      162               44,3 %
Chirurgie                                                     159               43,4 %
Autres consultations pr�ventives                              151               41,3 %
Soins ambulatoires de 2�me niveau                             143               39,1 %
Transport en ambulance                                        136               37,2 %
Consultations pr�natales de 2�me niveau                       119               32,5 %
Echographie                                                   119               32,5 %
Sp�cialit�s m�dicamenteuses                                   111               30,3 %
Prise en charge de maladies chroniques 2�me niveau             92               25,1 %
Gyn�cologie                                                    85               23,2 %
Prise en charge de maladies chroniques 1er niveau              82               22,4 %
Soins dentaires                                                76               20,8 %
Ophtalmologie                                                  73               19,9 %
Autre                                                          71               19,4 %
Examens de laboratoire                                         60               43,7 %
Transport avec moyens locaux                                   57               15,8 %
Lunettes                                                       39               10,7 %
Proth�se dentaire                                              38               10,4 %
Examens radiologiques                                          19                5,2 %




Tableau 7 : �volution de la garantie des SAM fonctionnels depuis la cr�ation (N = 366)

                                    Nombre de SAM           Pourcentage

�volution de la garantie                 197                   53,8 %
Dont : am�lioration                       82                   22,4 %
       r�duction                           8                    2,2 %
non r�ponse                              107                   29,2 %
Pas d'�volution                          155                   42,3 %
Non r�ponse                               14                    3,8 %

322 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



h) Dans plus de la moiti� des SAM fonctionnels, il y a eu une �volu-
      tion de la garantie depuis la cr�ation (tableau 7). Dans pr�s de la
      moiti� des cas, ce serait une am�lioration.

   Les SAM fonctionnels prennent parfois en charge des personnes
qui ne sont ni cotisantes, ni ayants-droit. C'est le cas pour 67 d'entre
eux (18,4 %). On a ici une mesure de la solidarit� externe des SAM,
puisque les personnes qui b�n�ficient de la prise en charge sans con-
tribution sont des personnes d�sign�es comme pauvres ou indigentes.


Les effectifs des SAM fonctionnels

Les adh�rents

Les deux tiers des SAM fonctionnels (66,1 %) ont r�pondu � la ques-
tion relative au nombre de personnes ayant pay� leur droit d'adh�sion
� la cr�ation. Au d�part, ce sont 82 376 personnes qui ont constitu� la
base de ces organismes, ce qui correspond � un effectif moyen de 340
personnes. Sur la base de cette information, on voit que 95,5 % des
SAM fonctionnels avaient, � leur cr�ation, moins de 1 000 adh�rents
et 4,5 % 1000 ou plus.
   Aujourd'hui les SAM fonctionnels qui ont r�pondu (79,2 %) ont
202 485 adh�rents, ce qui correspond � un effectif moyen de 698 per-
sonnes. Cela �tant, la quasi totalit� des organismes (9 sur 10) compte
un nombre d'adh�rents inf�rieur au millier.


Les b�n�ficiaires

Les effectifs de b�n�ficiaires des SAM fonctionnels sont pr�sent�s
dans le tableau 8. On notera que les SAM ayant r�pondu aux 3 ques-
tions correspondant aux effectifs de b�n�ficiaires sont respectivement
221 (60,4 %), 321 (87,7 %) et 291(79,5 %).


Tableau 8 : Effectifs des b�n�ficiaires des SAM fonctionnels (N = 366)

                        Effectifs � la cr�ation     Effectifs 2003        Effectifs � jour
                        (bornes inf�rieure et    (bornes inf�rieure et  (bornes inf�rieure et
                             sup�rieure)             sup�rieure)            sup�rieure)

Nombre total            629 916        645 236  1 519 994    1 525 362  688 784     704 568
Taille moyenne d'un
  SAM fonctionnel          2 850         2 920      4 706        4 722    2 367        2 421
M�diane                      290           294        632          678      253          271

                        Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 323



   On note une progression importante des effectifs et de la taille
moyenne des SAM entre le moment de la cr�ation et aujourd'hui,
puisque le nombre de b�n�ficiaires est multipli� par 2,4 environ et la
taille moyenne par 2,2. Toutefois, si l'on consid�re les effectifs des
b�n�ficiaires � jour de leurs cotisations, la progression appara�t assez
modeste : gain de 10 % pour les effectifs et r�duction de la taille
moyenne des SAM.
   Si l'on veut une estimation d'ensemble pour les 366 SAM inven-
tori�s, on peut multiplier le nombre de SAM fonctionnels par la taille
moyenne d'un SAM. On obtient ainsi un nombre de b�n�ficiaires
compris entre :

� 1 043 100 et 1 062 720 � la cr�ation

� 1 722 396 et 1 728 252 aujourd'hui

� 866 322 et 886 086 aujourd'hui et � jour des cotisations.


   L'Inventaire a �galement r�v�l� :

� l'importance des petits organismes de moins de 1000 personnes
   (79 %) � la cr�ation

� l'�volution favorable de la taille des SAM mesur�e � partir du nombre
   de b�n�ficiaires d�clar� (72 % de SAM de moins de 1 000 personnes)

� l'�volution plus modeste de la taille mesur�e au nombre de b�n�ficiaires
   � jour de leurs cotisations (76 % de SAM de moins de 1 000 personnes).



Les conventions pass�es avec les prestataires

Les relations entre SAM et prestataires de soins ne donnent lieu � des
conventions �crites que pour 233 SAM (63,7 %). Il s'agirait de con-
ventions orales pour 65 SAM (17,8 %) et il n'y a pas de conventions
pour les 58 autres (15,9 %).



ACTIVIT�S ANNEXES DES MUTUELLES DE SANT�

Plus de 60 % des SAM fonctionnels ont une ou plusieurs activit�s
autres que l'assurance maladie, sans qu'ils consid�rent que l'assurance

324 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



soit exerc�e dans une organisation plus large. C'est au Cameroun, en
Guin�e et au Burkina que l'association d'activit�s autres est la plus
fr�quente.
   La micro finance et l'offre de soins sont les activit�s associ�es les
plus r�pandues (17 et 14 %) lorsqu'il y a une seule activit�. On note
que les autres assurances ne concernent que 6 % des SAM. La micro
finance est cit�e aussi en plus d'autres activit�s que l'assurance, si bien
que 121 SAM (33 %) ont, en tout, cette activit� en association avec
l'assurance maladie. Le type de micro finance pratiqu� est assez rudi-
mentaire. Il s'agit le plus souvent de � petit cr�dit � et les SAM ne
sauraient �tre v�ritablement consid�r�s comme des IMF ; 9 SAM
fonctionnels seulement ont d�clar� faire partie d'une organisation
plus large dont l'activit� �tait la micro finance.
   Par contre 54,2 % des SAM en gestation d�clarent organiser d'autres
activit�s et c'est la micro finance qui est le plus souvent cit�e : par 20 %
des SAM lorsqu'il y a une seule activit� et 12,7 % lorsqu'il y en a
plusieurs. 95 % des SAM en projet ont ces activit�s autres que l'assurance
maladie : micro finance (9,1 % en solo et 22,1 % avec d'autres activit�s)
et offre de soins (24,7 %) surtout. Ces r�sultats vont dans le m�me sens
que ceux obtenus pour les SAM fonctionnels. Toutefois, ils n'indiquent
pas que la tendance � l'association d'activit�s soit plus forte pour les SAM
en gestation et en projet, notamment lorsqu'il s'agit de micro cr�dit.



PROBL�MES ET CONTRAINTES DES SAM

L'�nonc� par les SAM des probl�mes qu'ils rencontrent est important
pour am�liorer le d�veloppement de l'assurance maladie. L'Inventaire
a montr� que plusieurs d�fis se posent encore au mouvement :

� Formation et ma�trise des techniques (surtout de gestion)

� Appui encore n�cessaire pour l'am�lioration du taux de recouvrement

� Probl�mes logistiques et de fonctionnement

� Communications

� Relations avec les prestataires

� Performance des mutuelles de sant�

� Taux de p�n�tration

                        Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 325



   Le recouvrement des cotisations concerne les deux tiers des SAM et
appara�t comme le probl�me le plus difficile � r�soudre. Les questions
de formation � la gestion et de communication, les probl�mes de ges-
tion, d'adh�sion et de fid�lisation viennent ensuite. Les relations avec
les prestataires et les items li�s � la gestion du risque ne resortent pas
de l'enqu�te avec des fr�quences tr�s �lev�es (10 � 15 %). Les pro-
bl�mes relationnels externes (avec les autorit�s, les f�d�rations) ou
internes sont moins cit�s.



SYNTH�SE DES ENSEIGNEMENTS DE L'INVENTAIRE
ET RECOMMANDATIONS

Il est clair que le d�veloppement des mutuelles de sant� n�cessite des
efforts continus, du temps et des moyens en rapport avec les ambitions
affich�es. Le travail des structures d'appui est important. Mais un
effort accru est requis dans la professionnalisation de la gestion qui
semble insuffisant au regard des r�ponses apport�es au questionnaire
de l'Inventaire et du taux de non r�ponse pour cause de non disponi-
bilit� des informations. Le transfert de savoir-faire aux acteurs
impliqu�s dans le fonctionnement des mutuelles de sant� devrait �tre
acc�l�r�. Dans ce sens les structures d'appui gagneraient � miser sur
les structures nationales d'appui pour p�renniser les actions.
   On peut aussi, en conclusion, se poser une s�rie de questions :

� Quelle est la place du mouvement dans le dispositif de la protection
   sociale des pays concern�s ?

� En tant qu'acteur de l'�conomie sociale, quels sont les d�fis face aux
   objectifs et mutations de la protection sociale au niveau mondial
   (campagne mondiale d'extension de la protection sociale, mondiali-
   sation des services, assurance maladie obligatoire, etc.) ?

� Quelle est l'articulation possible et souhait�e avec les programmes et
   r�seaux mondiaux ?


   L'Inventaire fournit de nombreuses informations, dont il convient
de tirer des enseignements pour l'action de terrain. L'assurance ma-
ladie est en soi un sujet complexe. Sa mise en place dans le cadre
d�centralis� et participatif de syst�mes � base communautaire ou pro-

326 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



fessionnelle est d�licate et le d�veloppement des organismes inven-
tori�s est r�cent.
   Les r�sultats pr�sent�s incitent � tirer quatre s�ries d'enseigne-
ments de l'Inventaire, relatifs aux modalit�s de constitution des SAM,
aux orientations techniques des r�gimes qu'ils offrent, au fonction-
nement courant des SAM, et � l'impact et � la viabilit� des orga-
nismes.On peut les traduire en recommandations � l'endroit des
promoteurs, des bailleurs et des op�rateurs d'appui.


Les modalit�s de constitution des SAM

S'il existe quelques organismes r�unissant plus de 10 000 adh�rents,
on doit s'interroger sur les r�sultats relatifs aux effectifs des SAM
inventori�s et se d�clarant fonctionnels : 9 organismes sur 10 ont
moins de 1000 adh�rents, 8 organismes sur 10 couvrent moins de
1000 personnes et environ la moiti� des SAM a moins de 650
b�n�ficiaires. On a l� une bonne illustration du terme de � micro
assurance �, mais la situation n'en est pas pour autant satisfaisante en
termes de viabilit� des r�gimes que les SAM proposent.
   Les modalit�s de constitution des SAM expliquent probablement le
petit nombre de personnes couvertes par les organismes. On note que
la taille de la population cible qu'ils se donnent est souvent faible. Elle
est caract�ris�e surtout par sa localisation dans un milieu (rural ou
urbain), sans qu'on puisse en d�duire que l'assurance maladie s'adresse
� des groupes particuliers ou qu'elle vise une diffusion territoriale
assez �tendue. On sent que les figures de la mutuelle de village ou de
la mutuelle de quartier sont tr�s bien repr�sent�es dans ce processus.
Ainsi, il n'appara�t pas que la cr�ation des SAM ait �t� accompagn�e
de la recherche de groupes cibles dot�s d'une bonne coh�sion profes-
sionnelle ou inscrits dans l'espace, de fa�on � b�n�ficier, par exemple,
d'une r�partition rationnelle de l'�quipement (district, r�gion). Si de
nombreux SAM d�clarent appartenir � une organisation plus large,
celle-ci renvoie plut�t � un statut (association, ONG) qu'� une activit�
structurante. Inversement, l'assurance maladie est souvent associ�e,
dans les SAM fonctionnels, � d'autres activit�s, majoritairement la
micro finance ou l'offre de soins, mais d'importance limit�e.
   L'impression pr�vaut qu'une multitude de groupes sans identit�
�conomique ou sociologique affirm�e s'est engag�e dans l'assurance
maladie, aussi bien que dans d'autres activit�s susceptibles d'am�liorer

                         Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 327



leurs conditions d'existence, mais � petite �chelle et de fa�on isol�e. On
comprend qu'il ne soit pas facile qu'ils trouvent des formes de connexion
entre eux, d�s lors qu'il n'existe pas, dans l'environnement, de structures
fa�ti�res d�j� constitu�es et susceptibles de leur fournir un mode de
structuration. Sans doute faut-il nuancer cette interpr�tation et envisager
que d'autres dynamiques sont � l'oeuvre (mutuelles professionnelles,
d�veloppement organis� dans le cadre d'une politique nationale, mise en
place de coordinations g�ographiques), mais elles ne semblent pas
majoritaires. De m�me on peut admettre que le processus de constitu-
tion des SAM varie fortement d'un pays � l'autre, d'apr�s les histoires et
le niveau de d�veloppement tr�s diff�rents observ�s dans l'Inventaire.


Un passage � l'�chelle encore lent mais urgent

Il est probablement n�cessaire d'avoir plus d'ambition dans le mode
de constitution des SAM et de se projeter un peu dans l'avenir pour
atteindre des effectifs garantissant un minimum de viabilit�.
   Certes, il est assez facile d'identifier des petits groupes int�ress�s par la
micro assurance et de mettre en place un dispositif standard de cr�ation
de SAM, afin d'obtenir des organismes fonctionnels en deux ou trois ans.
Mais cette d�marche tourne court lorsque les SAM restent isol�s et n'ont
qu'un faible potentiel de croissance. Il serait donc l�gitime de � voir plus
grand � au d�part, de sensibiliser des populations cibles plus nombreuses
et non limit�es � un village ou un quartier, et d'envisager aussi les condi-
tions de la mise en r�seau ou de l'union de plusieurs SAM voisins,
lorsqu'il ne semble pas possible d'�viter une approche un peu fragmen-
t�e. Dans ce processus, une implication plus forte et plus durable d'ac-
teurs externes dans l'appui semble n�cessaire, par exemple dans le cadre
de jumelages entre organismes des pays du Nord et du Sud.


Les orientations techniques des r�gimes offerts par les SAM

S'il y a une grande variabilit� des caract�ristiques techniques des
r�gimes d'assurance maladie propos�s par les SAM, quelques ten-
dances fortes ressortent des r�sultats de l'Inventaire.
   En premier lieu, l'adh�sion volontaire, individuelle ou familiale, est
dominante, mais, en outre, un nombre important de SAM d�clarent
imposer le respect de crit�res statutaires, ce qui limite d'embl�e leur popu-
lation cible. Les cotisations demand�es sont faibles et majoritairement

328 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



forfaitaires, collect�es le plus souvent par versement direct des adh�rents.
En moyenne, moins de 200 FCFA sont demand�s par personne couverte
et par mois, ce qui constitue une offre particuli�rement bien adapt�e aux
ressources de la majorit� des pays concern�s.
   Ce niveau de cotisation ne peut s'accommoder d'une garantie tr�s
compl�te et conduit automatiquement � des prestations servies par les
formations du secteur public de soins. Peu de SAM de l'Inventaire
offrent l'acc�s au secteur priv� et se sont constitu�s au sein du secteur
de l'�conomie formelle.
   La couverture du petit risque, incluant la prise en charge du
m�dicament sous forme g�n�rique, ainsi que le suivi de la grossesse et
de l'accouchement sont le plus souvent retenus par les SAM. La
d�pense de m�decine sp�cialis�e et le risque hospitalier sont moins
souvent couverts. Sans doute faut-il voir l� le r�sultat des souhaits
exprim�s par les adh�rents, peu enclins � envisager la probabilit� de
recours � l'h�pital et � mesurer le co�t qui lui est associ�.
   Orient�es ainsi vers la couverture du petit risque, les garanties des
SAM les exposent a priori � une forte sinistralit� et la fr�quence de la
tarification � l'acte t�moigne en m�me temps d'un faible partage du
risque avec les prestataires de soins. Pour pallier cette vuln�rabilit�,
beaucoup d'entre eux limitent leur engagement financier. S'ils offrent
le plus souvent un syst�me de tiers-payant, ils imposent assez syst�ma-
tiquement des tickets mod�rateurs relativement �lev�s. Il n'est donc
pas �vident qu'ils r�ussissent � proposer des produits attractifs et qu'ils
abaissent de fa�on suffisante la barri�re financi�re d'acc�s aux soins. La
g�n�rosit� des SAM semble limit�e et, corr�lativement, peu d'entre
eux ouvrent leurs prestations � des personnes qui ne contribuent pas.
   L'acc�s aux soins est encadr� par les conventions que les SAM
passent avec les formations de soins. Mais le contenu de celles-ci, qui
sont cens�es garantir la qualit� des soins aux adh�rents, est difficile �
appr�cier au vu de l'information recueillie. En tout cas, il ne semble pas
tr�s novateur pour ce qui concerne les conditions tarifaires obtenues.
Le remplacement du paiement � l'acte semble difficile � n�gocier,
encore plus avec les formations priv�es qu'avec celles du secteur public.


Le fonctionnement courant des SAM

L'Inventaire t�moigne de l'implication des repr�sentants des
adh�rents dans le fonctionnement courant des SAM, � travers la mise

                       Le d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique � 329



en place des organes et des proc�dures statutaires classiques. Il reste
que l'implication des adh�rents eux-m�mes intervient surtout pour les
choix initiaux relatifs aux prestations ou au niveau de cotisation et est
plus limit�e lorsqu'il s'agit des d�cisions � caract�re strat�gique et des
perspectives d'avenir des organismes.
   L'Inventaire r�v�le un d�ficit global d'outils de suivi des SAM � la
disposition des responsables et une tendance � l'abandon de ceux mis
en place au d�part. On peut faire l'hypoth�se d'une focalisation des
responsables sur le probl�me de la collecte des cotisations et de la ren-
tr�e des ressources. Il s'ensuit une sous-estimation de la gestion du
risque et des aspects relationnels du fonctionnement des SAM. De
fa�on un peu surprenante, les SAM ne pr�sentent pas les rapports avec
l'offre de soins comme l'un des probl�mes principaux qu'ils ont �
r�soudre.


L'impact et la viabilit� des mutuelles de sant�

L'Inventaire confirme l'impact tr�s limit� des SAM, en termes de
population couverte et de contribution � la d�pense de soins des
m�nages adh�rents. En moyenne, les SAM prendraient en charge 900
FCFA de soins par personne et par an. Cet apport financier tr�s faible
est la cons�quence du niveau de cotisation et des effectifs rassembl�s,
qui obligent � une gestion prudente pour maintenir l'�quilibre
technique et la fonctionnalit� des organismes.
   Les ratios de sinistralit� indiquent qu'une majorit� de SAM fonc-
tionnels sont en-de�� des fr�quences de recours aux soins correspon-
dant au niveau de cotisation impos�. Plusieurs interpr�tations sont
possibles : surestimation volontaire de la cotisation, chargement
excessif des co-paiements ou processus d'apprentissage de la consom-
mation qui n'est pas achev� pour les b�n�ficiaires.
   Aussi, peu de SAM ont r�alis� des b�n�fices suffisants pour con-
stituer des r�serves qui les mettent � l'abri d'accidents conjoncturels, et
l'adh�sion � des syst�mes de garantie ou de r�assurance est assez rare.
   On constate quand m�me la dynamique � l'oeuvre dans plusieurs
pays et la croissance globale des effectifs de b�n�ficiaires, qui est assez
significative. Il est probable que, dans l'ensemble des 11 pays, on
compte entre un million et un million et demi de personnes couvertes
par les SAM. Par ailleurs, la croissance du nombre des organismes
fonctionnels t�moigne d'une diffusion certaine du concept. S'il reste �

330 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



s'interroger sur l'efficacit� d'un mode de d�veloppement qui passe
plus par la cr�ation de nouveaux SAM que par l'extension de ceux qui
existent, la r�alit� des progr�s de l'assurance maladie et des mutuelles
est incontestable.
   Les mutuelles de sant� contribuent effectivement � am�liorer
l'acc�s aux soins de sant� pour les populations exclues des syst�mes
traditionnels de protection sociale. La Concertation participe � la
capitalisation des exp�riences et � fournir les informations de base
pouvant d�montrer la plus value des organisations mutualistes dans le
syst�me de sant� des pays en Afrique.



NOTES

  1. La Concertation sur les mutuelles de sant� en Afrique � BP 414,
Dakar � S�n�gal. E-mail : concemut@sentoo.sn ou pascalnd@sentoo.sn
� Page web : http://www.concertation.org � La Concertation est
appuy�e techniquement et financi�rement par 11 partenaires : le Bureau
international du Travail (BIT) � travers son programme STEP, l'Agence
des �tats-Unis pour le d�veloppement international (USAID), � travers
ses programmes PHRplus et AWARE/RH, la coop�ration allemande
(GTZ) � travers son projet Assurance maladie, l'Association Interna-
tionale de la Mutualit� (AIM), l'Alliance Nationale des Mutualit�s Chr�-
tiennes (ANMC), Solidarit� Mondiale (WSM) et l'Union Nationale des
Mutualit�s Socialistes (UNMS) tous trois de Belgique, le R�seau d'appui
aux mutuelles de sant� (RAMUS), la Mutualit� de la Fonction Publique
(MFP) et la Mutuelle de l'�ducation Nationale (MGEN) de France.


  2. Toutes les donn�es pr�sent�es dans ce chapitre proviennent des
Inventaires produits par La Concertation, et disponibles sur son site
Internet (www.concertation.org)


  3. Si l'on ajoute les personnalit�s politiques et civiles, on atteint le
score de 71 %.

                                                                    CHAPITRE 11



            Contribution des m�nages � faibles
revenus pour la micro-assurance maladie

                                                                 Bruno Galland




  R�sum� : Ce chapitre pr�sente les r�sultats d'une �tude transversale r�alis�e
  sur 4 syst�mes de micro assurance maladie d'Afrique de l'Ouest ayant en com-
  mun de proposer une couverture du risque hospitalier.
     Les montants des contributions effectu�es sont compar�s aux revenus mon�-
  taires annuels des m�nages. On observe une remarquable constance du taux
  d'allocation qui se situe autour de 2 %. Les cons�quences op�rationnelles de ce
  r�sultat sont discut�es.
     La deuxi�me partie du chapitre vise � d�terminer si cette contribution est le
  reflet d'une limite de la capacit� contributive des m�nages ou traduit leur faible
  propension � payer.




INTRODUCTION

La port�e des syst�mes d'assurance maladie � adh�sion volontaire
(SAMV) est g�n�ralement en dessous des attentes de leurs promoteurs.
  De multiples facteurs sont invoqu�s pour expliquer leurs faibles
taux de p�n�tration :

� Facteurs culturels ou sociaux : l'absence d'une culture de pr�voyance,
  le refus de la pr�voyance comme mesure d'�vitement de la survenue
  de la maladie, les limites des dispositifs de solidarit�, la segmentation


                                                                                   331

332 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   des espaces d'entraide, la confiance � accorder aux instances de
   gouvernance.

� Facteurs li�s � l'offre de soins : l'accessibilit�, le prix et la qualit� des
   prestations.

� Facteurs �conomiques et financiers portant sur le pouvoir d'achat, la
   capacit� contributive des populations ou l'accessibilit� financi�re de
   la cotisation.


   A ce jour le poids relatif de ces diff�rents facteurs dans la d�cision et
le niveau d'adh�sion et de contribution n'est pas connu.
   Les contraintes financi�res des populations � faibles revenus mon�-
taires �tudi�es (inf�rieures � 100 $ par personne et par an) sont sou-
vent exprim�es par les m�nages pour expliquer leur non-adh�sion � un
syst�me d'assurance maladie volontaire sans toujours convaincre les
offreurs de services qui comparent volontiers les montants de cotisa-
tion demand�s � d'autres d�penses qu'ils jugent moins indispensables.
   Le pr�sent travail apporte des �l�ments d'information et de r�flexion
sur le pouvoir d'achat des m�nages et leur volont� � payer pour s'assurer
contre le risque maladie. La premi�re partie est consacr�e � l'analyse des
contributions des m�nages pour les SAMV dans diff�rents pays
d'Afrique de l'Ouest (B�nin, Guin�e, Mali et Ghana). Les intentions de
cotisation sont souvent recherch�es pour choisir un montant de cotisa-
tion acceptable par les futurs adh�rents. La deuxi�me partie de ce docu-
ment compare les intentions de cotisation avec les revenus d�clar�s par
les m�nages dans le cadre d'une �tude r�alis�e par l'ONG ENDA
GRAF dans la banlieue de Dakar au S�n�gal. En troisi�me partie, les
enseignements tir�s de la connaissance des contributions possibles de la
population �tudi�e aux SAMV sont pr�sent�s. Les r�sultats des �tudes
de cas sont discut�s en quatri�me partie : on a cherch� � analyser dans
quelle mesure, le niveau de contribution observ� traduit un manque de
ressources ou une faible volont� � anticiper des d�penses incertaines.
   La meilleure connaissance du niveau de contribution des m�nages
pour se pr�munir contre le risque maladie, poursuit trois objectifs :

� Politique, dans le n�cessaire plaidoyer pour une r�duction de la
   charge pesant sur les usagers des syst�mes de soins.

� Strat�gique, dans l'�laboration des politiques de financement de l'of-
   fre de soins.

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 333



� Op�rationnel, dans la d�termination des sites d'implantation des
  SAMV les plus appropri�s et le positionnement de la cotisation.



LES CONTRIBUTIONS DES M�NAGES CONSTAT�ES
DANS LES SAMV PROMUS OU �TUDI�S PAR LE CIDR

Pr�sentation des �tudes de cas

Cette partie pr�sente les contributions r�ellement effectu�es par des
m�nages � des SAMV ayant en commun de cibler les actifs du secteur
informel aux revenus modestes et de proposer des garanties compara-
bles, � savoir les pathologies peu fr�quentes et co�teuses (hospitalisations
m�dicales, interventions chirurgicales, pathologies gyn�cologiques et
obst�tricales), � l'exclusion des soins ambulatoires.
  Quatre �tudes de cas ont �t� s�lectionn�es :

1.   Le programme conduit par le CIDR au B�nin dans le Borgou et le
     d�partement des Collines : il a d�marr� son premier exercice en
     mars 1995 et concerne les villageois producteurs de coton (d�parte-
     ment du Borgou) ou d'anacarde (d�partement des Collines). Vingt
     cinq mutuelles inter-villageoises couvraient 17 500 b�n�ficiaires en
     2002 � 2003.

2.   Le programme appuy� par le CIDR en Guin�e Foresti�re. Le
     premier exercice a d�but� en juillet 2000. Dix huit mutuelles vil-
     lageoises couvraient environ 8 500 b�n�ficiaires pour l'exercice
     2002 � 2003.

3.   Un programme d'articulation entre un syst�me de microfinance
     et de micro-assurance, men� par le CIDR � Mopti au Mali et qui
     a d�marr� son premier exercice en janvier 2002. Le public cible
     est ici constitu� par les femmes de la ville membre de Ny�ta
     Musow, une institution de microfinance. Pour l'exercice 2003,
     750 femmes ont fait adh�rer 2 500 b�n�ficiaires.

4.   Un programme men� initialement par l'h�pital de N'Koranza au
     Ghana. Ce programme a d�marr� en 1992. Une �tude de cas a �t�
     r�alis�e par le CIDR en 2002 afin d'�tudier les particularit�s d'un
     syst�me mutualiste � gestion non mutualiste classique.

334 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Tous les syst�mes apportent des garanties (prestations hospitali�res
� l'exclusion des soins ambulatoires) et un niveau de s�curit� compara-
bles : au Ghana et en Guin�e les prestations couvertes sont prises en
charge � 100 % sans ticket mod�rateur1. Au Mali, les montants for-
faitaires rembours�s couvrent de l'ordre de 80 � 90 % des d�penses
effectu�es.
   La qualit� per�ue des soins est consid�r�e comme acceptable dans les
4 syst�mes pendant la p�riode �tudi�e : au B�nin et � N'Koranza au
Ghana les SAMV couvrent les prestations d'h�pitaux priv�s sociaux
catholiques. En Guin�e et au Mali, les mutuelles ont pu n�gocier des
conditions d'accueil et de prises en charge des malades qui ont r�duit de
fa�on tr�s significative les pratiques d�viantes de certains agents de sant�.
La disponibilit� en m�dicament a pu �tre assur�e dans tous les h�pitaux.
   Certains auteurs mentionnent l'existence d'un ph�nom�ne d'ap-
prentissage de la consommation de soins chez les adh�rents. La
volont� � payer pourrait alors augmenter avec le temps ainsi que la
perception de l'utilit� du service rendu par le SAMV. Le nombre d'an-
n�es, durant lesquelles les m�nages ont eu la possibilit� d'adh�rer, est
de 10 ans pour le Ghana, 7 ans pour le B�nin, 3 ans pour la Guin�e et
un an pour le Mali. Dans notre �chantillon, on peut admettre qu'au
moins pour trois des 4 �tudes de cas (Ghana, B�nin et Guin�e), les
m�nages ont eu le temps de faire l'apprentissage du produit.


Taux d'inscription chez les m�nages adh�rents

Bien que l'adh�sion de tous les membres � charge de l'unit� familiale
soit la r�gle fix�e par les 4 SAMV, on observe dans les 4 �tudes de cas
un nombre d'inscrits par m�nage inf�rieur au nombre moyen de per-
sonnes � charge estim� dans la population cible (Ghana, B�nin, Mali)
ou chez les familles mutualistes (Guin�e). Le taux d'inscription le plus
faible est enregistr� avec le SAMV de N'Koranza au Ghana (47 %).


Contributions des m�nages constat�es

Les montants de cotisation dans trois des 4 cas �tudi�s pour des
garanties similaires au B�nin, � Mopti au Mali et au Ghana varient de
2.1 � 2.6  par personne et par an. Le montant de la cotisation exprim�
en Euros est plus faible en Guin�e (1,1 ) en raison des tarifs des

     Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 335



Tableau 1 : Pr�sentation des cas

Pays                                                      Ghana        Mali       Guin�e        B�nin

                                                        N'Koranza     Mopti      Foresti�re

Ann�e d'observation                                      2002        2003         2003          2002
Nombre de personnes � charge
de l'unit� familiale**                                       7           6             8.98       7,5
Nombre de membres inscrits
par unit� familiale                                      3,31          3,5          7,19        6,05
Taux d'inscription*                                        47 %         58 %         764 %         81 %
Contribution moyenne constat�e
par unit� familiale et par an                            7,25            9           8,1        14,5 
Montant de la cotisation moyenne
par personne couverte par an                               2,2         2,6           1,1          2,4 
Montant de la cotisation correspondant
� l'inscription de tous les membres
de l'unit� familiale (b)                                 15,2         15,1          10,2           18 
Ecart a/b : cotisations vers�es/
cotisation appel�es                                        47 %         58 %          76.4 %       81 %
Revenus annuels moyens estim�s
par m�nage***                                             293          630           564         ND
Contributions des m�nages en pourcentage
de leurs revenus = taux d'allocation.                      2,5 %       1,4 %         1,4 %       ND
Part du revenu � allouer pour inscrire tous
les membres de la famille                                  5,2 %       2,4 %         1,8 %       ND

* Pour calculer le taux d'inscription, le nombre moyen de personnes � charge chez les mutualistes
n'�tant pas toujours connu, on s'est r�f�r� au nombre moyen de personnes � charge par unit�
familiale pour le public cible. L'�tude r�alis�e en Guin�e a montr� un �cart faible (4.37%) entre la taille
des unit�s familiales mutualistes 8.98 et non mutualistes 9.39.
** L'unit� familiale correspond selon les cas � la famille monogame (mari, �pouse, et enfants) ou
polygame. Dans tous les cas, les autres personnes � charge (grands-parents ou autres) ont �t�
comptabilis�es.
*** Les ressources en nature, importantes chez les m�nages ruraux n'ont pas �t� valoris�es.



services de sant� tr�s inf�rieurs � ceux pratiqu�s dans les trois autres
pays2. Exprim�e en Euros, le montant de la cotisation vers� par famille
et par an varie de 7.25  au Ghana � 14.5  au B�nin.


Cotisations vers�es et cotisations appel�es

Les cotisations annuelles vers�es par les m�nages ont �t� compar�es
au montant th�orique de la cotisation correspondant � l'adh�sion de
tous les membres des personnes � charge du m�nage (cotisation par
personne et par an x nombre moyen de personnes � charge de l'unit�
familiale).

336 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   L'�cart entre le montant de la cotisation vers�e et celui correspon-
dant � l'inscription de tous les membres de la famille varie d'un sys-
t�me � l'autre : 47 % en Guin�e et 19 % au B�nin.


La part des ressources affect�es au paiement de la cotisation
dans les revenus en Guin�e, au Mali et au Ghana

On a cherch� � exprimer la part que repr�sentent les cotisations
annuelles vers�es � l'AMV dans les revenus des unit�s familiales. La
r�partition des revenus des adh�rents, leur �volution dans le temps et
la variation de ces revenus d'une ann�e sur l'autre sont des �l�ments
caract�ristiques de la situation socio�conomique des actifs du secteur
informel concern�s par ces �tudes de cas, agriculteurs pour la plupart.
A d�faut de pouvoir disposer de donn�es sp�cifiques sur les revenus
des adh�rents, ceux connus pour la population cible ont �t� pris
comme base d'analyse.
   Dans trois des �tudes de cas pr�sent�es, l'estimation des revenus de
la population cible a �t� effectu�e comme suit :
   Au Ghana, une �tude avait �t� r�alis�e par l'�quipe du projet avant
le lancement du produit d'assurance en 1992. Le revenu moyen estim�
a �t� index� en fonction du taux d'inflation observ� sur une p�riode de
10 ans. A d�faut de disposer de donn�es actualis�es, on a donc
consid�r� que les revenus n'avaient pas �volu� en Cedis constants.
   La m�me m�thode a �t� appliqu�e en Guin�e. Les enqu�tes de base
ont �t� r�alis�es dans chaque village en 2000, permettant de situer un
revenu mon�taire moyen par famille et par an.
   Au Mali, les revenus ont �t� estim�s � partir d'une enqu�te r�alis�e
en 1997, aupr�s des femmes membres de l'institution de microfinance
Nyeta Musow. Ils ont �t� index�s sur le taux d'inflation. On notera
que cette estimation n'a pas int�gr� l'augmentation probable de ces
revenus, li�e � l'acc�s au microcr�dit propos� par l'institution de
microfinance Nyeta Musow.
   Au B�nin, l'absence de donn�es initiales suffisamment fiables sur
les revenus des m�nages a rendu impossible une estimation cr�dible
de leurs revenus.
   Les r�sultats obtenus fournissent un premier enseignement : dans
aucun des trois syst�mes �tudi�s, la cotisation vers�e n'a d�pass� plus
de 2.5 % des revenus mon�taires annuels estim�s alors que la cotisa-
tion demand�e par les SAM repr�sentait entre 1.8 % et 5.2 % de ces

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 337



revenus. C'est en limitant le nombre d'inscrits que les m�nages n'ont
pas allou� plus de 2,5 % de leurs revenus.


Evolution du montant de la contribution � l'AMV
de N'Koranza au Ghana

L'�volution du montant de la contribution des unit�s familiales
adh�rents au SAMV de N'Koranza au Ghana a �t� analys�e en fonc-
tion du montant de la cotisation appel�e par les SAM et du revenu
mon�taire annuel du public cible sur une p�riode de 7 ans.
   De 1996 � 2002, les revenus des m�nages exprim�s en C�dis con-
stants ont progress� de + 50 %. Durant la m�me p�riode, le montant
de la cotisation par personne et par an a augment� de + 80 %. La con-
tribution des m�nages n'a augment� que de 57 % et les m�nages
adh�rents ont r�duit de 13 % le nombre moyen d'inscrits.
   C'est en 2002 que la taux d'allocation des revenus des m�nages au
SAMV, 2.5 %, a �t� le plus �lev� de la p�riode consid�r�e, alors que le
montant de la cotisation correspondant � l'inscription de tous les
membres de la famille aurait repr�sent� 5.2 % de leur revenus.



LES INTENTIONS DE COTISATIONS EN FONCTION DES REVENUS
DES M�NAGES DANS LA BANLIEUE DE DAKAR AU S�N�GAL

Des donn�es fiables sur les revenus des publics des SAMV font sou-
vent d�faut. C'est pourquoi les promoteurs de syst�mes d'assurance
maladie utilisent le plus souvent les intentions de cotisations de leurs
futurs membres, pour positionner le montant de la cotisation.
   On a cherch� � comparer les intentions de cotisation avec les
revenus d�clar�s par les m�nages. Pour ce faire, on a utilis� les r�sul-
tats d'une enqu�te en janvier 2004 r�alis�e au pr�s de 300 m�nages � la
demande d' ENDA GRAF, dans le cadre du programme d'appui aux
mutuelles de sant� qu'il conduit dans les quartiers populaires de la
banlieue de Dakar. Cette enqu�te avait pour objectif de conna�tre les
revenus des m�nages, leur distribution ainsi que les intentions de coti-
sations � un SAMV. Il a donc �t� possible de calculer la part que
repr�sentent les intentions exprim�es par les futurs adh�rents en
pourcentage de leurs revenus. L'exploitation de 300 questionnaires
donne les r�sultats suivants :

338 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 2 : Distribution des revenus dans les quartiers de Pikine et Guinaw rail

A                            B                C                 D            E (D/C)

                                                        Intention de
                      Revenu par an    Revenus par         contribution Taux
Revenus                  par m�nage      famille et par    par famille et  d'allocation
  en Fcfa                en Euros        an en FCFA        par an          exprim�
< 500 000             < 760            226 222          9 400            4,2 %
500 001�1 000 000     760�15,20        743 429          20 743           2,8 %
1 000 001�1 500 000   1 520�2 280-     1 282 706        23 153           1,8 %
1 500 001�2 000 000   2 290�3 050      1 789 891        18 809           1,1 %
2 000 001�3 000 000   3 060�4 570      2 345 357        37 371           1,6 %
3 000 001�4 000 000   4 590�6 100      3 302 294        14 929           0,5 %
4 000 001�7 000 000   6 110�10 067     5 207 909        19 255           0,4 %

Source : Enqu�te ENDA GRAF janvier 2004


   Quatre constats peuvent �tre tir�s des r�sultats figurant dans le
tableau 2 :

1.    Les intentions de cotisations repr�sentent un montant que l'en-
     qu�t� d�clare �tre pr�t � payer sachant qu'il ne conna�t pas encore
     le service apport�3 par le SAMV. On lui demande souvent d'es-
     timer un montant de cotisation par personne et par mois ou par
     an alors que le r�pondant n'a pas toujours les moyens d'appr�cier
     le poids que repr�sentera le paiement de la cotisation pour
     l'ensemble des membres de son m�nage.

2.   Le taux d'allocation tend � d�cro�tre avec l'augmentation des
     revenus :
          Il est nettement plus �lev� (sup�rieur � 4,2 %) pour les
     m�nages les plus modestes disposant de moins de 500 00 FCFA
     de revenus annuels, et moins de 2 % pour les revenus sup�rieurs �
     la m�diane estim�e � 870 000 FCFA par m�nage et par an.
          On peut comprendre que, pour des m�nages plus pauvres,
     plus expos�s � des difficult�s financi�res en cas de maladie, l'at-
     tractivit� de l'assurance maladie soit plus forte. Peut-on pour
     autant attendre que les m�nages les plus pauvres affectent une
     part plus importante de leurs revenus pour une d�pense qui reste
     al�atoire, alors qu'ils parviennent moins que les autres � faire face
     � des d�penses obligatoires ?

3.   Le montant moyen de cotisations d�clar�es par les m�nages de la
     tranche m�diane des revenus est de 2,2 %.

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 339



4.   Le questionnaire demandait aux enqu�t�s de choisir le type de
     soins qu'ils souhaitaient voir �tre pris en charge par le SAMV. Les
     r�sultats montrent qu'il n'existe pas de corr�lation entre le taux
     d'affection des ressources � l'assurance maladie, repr�sentant l'ef-
     fort que la famille est pr�te � effectuer pour r�duire ses difficult�s
     financi�res et l'�tendue de la garantie choisie par l'enqu�t�. Ce
     constat s'explique par le fait que les enqu�t�s n'ont pas d'�l�ments
     d'appr�ciation du service rendu qui n'�tait pas d�fini au moment
     de l'enqu�te. Ce ratio de 2.2 % d'intention d'affectation des
     ressources n'est donc pas li� � un type de couverture particulier
     (petit ou gros risque).




LES ENSEIGNEMENTS TIR�S DES �TUDES DE CAS

Le niveau de contribution des m�nages � faibles ressources

Lorsque le montant de la cotisation augmente plus rapidement que le
taux d'inflation (Ghana), les unit�s familiales observ�es tendent �
r�duire le nombre d'inscrits, ce qui laisserait supposer l'existence d'un
seuil qu'elles ne pourraient ou ne voudraient d�passer.
   Lorsque le montant de la cotisation baisse en valeur constante (en
Guin�e), le taux d'inscription a tendance � augmenter.
   Pour la population prise en compte dans les �tudes de cas, � savoir
des familles � revenus irr�guliers (non salari�s) et modestes (moins de
700 /m�nage et par an ou moins de 100  par personne et par an),
lorsque l'assurance propos�e ne couvre que les gros risques (avec
accouchements) � l'exclusion des soins ambulatoires, les familles
allouent rarement plus de 2 % (+/� 25 %) de leurs revenus annuels au
paiement de la prime.
   Ce ratio de 2 % est un point de rep�re pour pr�voir la contribution
des m�nages � un syst�me de micro-assurance maladie proposant des
garanties limit�es aux gros risques.
   Il est probable que ce ratio soit plus faible pour les m�nages urbains
dans la mesure o� ils disposent de moins de ressources en nature et
ont davantage de d�penses incompressibles � financer (dont celles de
nourriture et de logement). Dans la ville de Mopti au Mali, les
femmes n'ont pas affect� les 2.4 % de leurs revenus n�cessaires pour

340 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



inscrire toutes les personnes dont elles avaient la charge. Leur contri-
bution n'a pas d�pass� 1.4 % de leurs revenus estim�s.
   Des �tudes compl�mentaires sont � effectuer pour savoir quelle
part de leurs revenus les m�nages sont pr�ts � affecter � l'assurance
maladie pour des garanties plus compl�tes, incluant les soins ambula-
toires ou les soins sp�cialis�s par exemple.


Applications op�rationnelles

La prise en compte du facteur �conomique qu'est le pouvoir d'achat,
influe sur les choix des zones d'implantation, le positionnement des
produits, le nombre de garanties propos�, les modalit�s d'adh�sion et
la n�gociation avec les prestataires.


Cons�quence sur le choix des zones d'implantation
de syst�mes d'assurance

Un pouvoir d'achat minimum est n�cessaire pour d�velopper des
SAMV. Dans de nombreux pays d'Afrique, les revenus mon�taires des
populations rurales sont susceptibles de varier fortement d'une ann�e
� l'autre, en particulier s'ils proviennent de cultures de rente dont les
prix sont soumis � de fortes fluctuations.
   Si une port�e significative des mutuelles est recherch�e, la
sensibilit� de la contribution des m�nages � la variation de leurs
revenus mon�taires invite � privil�gier des zones pr�sentant des
sources de revenus diversifi�es et en croissance �conomique stable.


Cons�quence sur le positionnement
des couples cotisations/prestations

La plupart des promoteurs ou des op�rateurs de syst�mes de micro-
assurance, observe des �carts importants entre les intentions d'adh�-
sions ou de cotisations � un syst�me de micro-assurance et les contri-
butions r�elles constat�es. Parmi les multiples raisons qui peuvent �tre
invoqu�es, l'existence d'un seuil dans le niveau de contribution des
populations cibles doit �tre prise en compte. Malgr� le souci de ces
promoteurs d'impliquer les mutualistes dans le choix du co�t et de
l'�tendue des garanties couvertes, on observe souvent une tendance
compr�hensible � privil�gier l'�tendue de la garantie, l'attractivit� du

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 341



produit, au d�triment de son accessibilit� au plus grand nombre. De
sorte que le produit propos� d�passe souvent le niveau de contribution
acceptable par une grande partie de la population-cible.
  Lorsque le produit est en phase de conception avec les int�ress�s,
une connaissance de la structure des revenus et de leur distribution,
permet d'appr�cier la part de la population cible qui pourrait accepter
de payer la cotisation demand�e. Elle est constitu�e des m�nages pour
lesquels la cotisation n'exc�derait pas 2 � 2.5 % de leurs revenus
annuels. Un �quilibre doit �tre trouv� entre l'attractivit� d'un produit
d'assurance et son co�t. Selon les conclusions de ce travail, les
garanties les plus compl�tes, correspondant � une prime d�passant
2 % du revenu moyen de la population cible, ne permettraient
d'obtenir les taux de p�n�tration les plus �lev�s.


Cons�quence sur la diversification
de produits propos�s par des SAMV

Bien qu'elle ne soit pas toujours facile � faire accepter dans les SAMV
� gestion mutualiste, la possibilit� de proposer diff�rentes garanties est
souhaitable pour s'adapter � la dispersion des intentions de cotisation
au sein d'un public cible et donner la possibilit� � des m�nages �
revenus modestes d'avoir un niveau de couverture minimum compati-
ble avec leurs ressources.


Du choix des modalit�s d'adh�sion en fonction du niveau
de contribution acceptable par les m�nages

La r�gle de l'adh�sion obligatoire de toutes les personnes � charge
d'une unit� familiale est un moyen souvent recommand� pour con-
tr�ler l'anti-s�lection. Elle peut avoir un effet n�gatif sur les taux
d'adh�sion, lorsque les m�nages candidats n'ont pas une � capacit�
contributive � ou une propension � payer suffisante pour faire adh�rer
toutes leurs personnes � charge. Les r�ductions du taux unitaire de la
cotisation accord�es aux familles nombreuses ne suffisent pas toujours
� maintenir le montant de la cotisation en dessous du seuil de contri-
bution acceptable par ces familles. Des solutions alternatives sont �
proposer. Parmi elles, l'adh�sion automatique de groupes homog�nes
(enfants scolaris�s, membres d'un m�me groupe d'entraide ou socio
professionnel ou d'une institution de micro finance) peut �tre une

342 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



strat�gie pour couvrir progressivement le plus possible de personnes
d'une unit� familiale.


Niveau de contribution acceptable et n�gociation
du prix des prestations de soins � la charge des usagers

La r�duction du co�t des prestations, par la n�gociation avec les
prestataires ou la promotion d'une offre de soins plus efficiente, est de
nature � augmenter la port�e des SAMV. La connaissance du niveau
de contribution acceptable par des adh�rents potentiels � un SAMV
peut �tre utilis�e dans la n�gociation des tarifs avec les prestataires.
   Lorsqu'elle est connue, la distribution des familles en fonction de
leurs revenus mon�taires donne des indications pr�cieuses pour
estimer le co�t des prestations dont la mutualisation est possible par
un pr�l�vement de moins de 2 % des revenus des m�nages, en fonc-
tion du taux de p�n�tration souhait�.
   Par exemple, un co�t moyen d'une hospitalisation m�dicalis�e de
20 000 FCFA avec une fr�quence d'hospitalisation de 5 % et un ticket
mod�rateur de 30 % induit une prime technique de 20 000 * (1 � 30 %)
* 5 % = 700 FCFA et une cotisation totale de +/� 900 FCFA/personne
et par an, frais de gestion compris. En appliquant un seuil de contribu-
tion de 2 % des revenus mon�taires, cette garantie seule serait accessible
aux m�nages dont les revenus des membres seraient sup�rieurs � 45 000
FCFA ou 270 000 FCFA pour une famille de 6 personnes � charge.



DISCUSSION

Dans quelle mesure les contributions constat�es ou les intentions
exprim�es traduisent-elles la capacit� maximale des m�nages � l'assu-
rance maladie volontaire ? Lorsque les m�nages n'adh�rent pas � un
SAMV est-ce parce qu'ils ne le veulent pas ou parce que le manque de
ressources ne leur permet pas de le faire ?
   Les �conomistes avanceront que cette contribution exprime la
fonction d'utilit� que les m�nages accordent � l'assurance maladie. Ils
en d�duiront que l'assurance maladie est peu attractive ou qu'elle
occupe une place marginale dans les priorit�s des m�nages �tudi�s.
D'autres mettront en avant l'aversion pour le risque qui influerait
n�gativement sur la volont� des m�nages � contribuer � l'AMV. Ils

    Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 343



s'appuieront sur les d�clarations parfois entendues en milieu rural
selon lesquelles � pr�voir la maladie, c'est provoquer sa survenue �.
Ces deux facteurs interviennent s�rement pour expliquer le faible taux
d'allocation des ressources constat� ou exprim�.
   Le libre arbitre des chefs de m�nages s'exerce en effet dans l'affec-
tation des ressources disponibles. La d�cision d'adh�rer et le montant
allou� sont fonction des priorit�s d�finies par chacun. Pour autant, le
niveau de contribution d'un m�nage � faibles ressources n'est pas
illimit�.
   On peut ainsi difficilement imaginer que la contribution d'un
m�nage � l'AMV d�passe le niveau de d�penses qu'ils effectuent pour
leur sant�. Or celui-ci a �t� estim�4 dans une fourchette de 5 % pour
les d�penses courantes ou occasionnelles et jusqu'� 10 ou 12 % si on
inclue les d�penses exceptionnelles qui endettent souvent cette cat�-
gorie de la population ou l'obligent � d�capitaliser.
   On obtient un deuxi�me point de rep�re qui situerait le niveau de
contribution en dessous de 10 % des revenus mon�taires annuels des
m�nages pour une garantie compl�te. Si les garanties propos�es ne
couvraient que les soins ambulatoires ou que les d�penses exception-
nelles, le risque couvert par l'AMV serait plus proche de 5 %. Un
niveau de contribution de 5 % supposerait que le m�nage serait pr�t �
allouer volontairement le m�me montant pour l'assurance maladie que
celui qu'il effectue pour ses d�penses de sant�. Or les garanties pro-
pos�es sont le plus souvent s�lectives et rarement couvertes � 100 %.
   Parmi le public concern� par ces �tudes de cas, c'est le plus souvent
l'obligation de la d�pense qui conduit � la mobilisation des ressources.
Par cons�quence, il semble hasardeux de retenir comme possible un
niveau de contribution de 5 % pour une d�pense qui est rarement
consid�r�e comme obligatoire.
   Dans cette derni�re partie on a cherch� � montrer pourquoi le
niveau de cotisation constat� pouvait raisonnablement refl�ter le
niveau de cotisation qu'il �tait possible d'obtenir de cette cat�gorie de
population, compte tenu de leurs ressources plut�t que de leur
volont� � payer.
   On est parti du constat que parmi les m�nages adh�rents dans les 4
syst�mes �tudi�s, aucun n'inscrivait la totalit� des personnes dont ils
avaient la charge.
   A N'Koranza au Ghana, les � Fields workers �, charg�s des adh�-
sions des b�n�ficiaires5, acceptaient que le m�nage n'inscrive qu'une

344 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



partie de leurs membres. Les fiches tenues par le SAMV permettent
d'identifier les membres du m�nage inscrits. Si le nombre d'inscrits
reste constant en moyenne, on observe souvent une modification des
b�n�ficiaires d'une ann�e � l'autre au sein d'un m�me m�nage. La per-
ception d'un risque potentiel (une grossesse, une maladie chronique)
constitue probablement un facteur de s�lection des b�n�ficiaires.
Pourtant, sur une p�riode de 10 ans, on peut poser l'hypoth�se que
tous les membres d'une famille ont pu �tre expos�s � l'un ou l'autre
des risques pris en charge par le SAMV, de sorte que le m�nage aurait
int�r�t � les inscrire tous. La variation des inscrits d'une ann�e sur
l'autre traduit la recherche d'utilit� maximale.
   Dans le Borgou au B�nin, les mutualistes s'acquittent d'une cotisa-
tion forfaitaire par tranche. Cette formule a �t� retenue afin d'inciter
le m�nage � faire adh�rer le plus de membres possible. Cette mesure
d�cid�e par les mutualistes apr�s une premi�re ann�e de tests de dif-
f�rentes modalit�s (cotisation au prorata du nombre d'inscrits, cotisa-
tion forfaitaire quel que soit le nombre d'inscrits) a eu un impact fort
sur le nombre moyen d'inscrits par membre adh�rent. Un taux
d'inscription de 100 % n'a cependant pas pu �tre atteint.
   A Mopti au Mali, apr�s l'annonce du montant unitaire de la cotisa-
tion, les femmes ont demand� la possibilit� d'inscrire les enfants de
moins de 16 ans, r�sidents sur place, l'inscription des autres membres
du m�nage et de leur mari restant facultative. Cette facilit� leur a �t�
accord�e � l'issue du deuxi�me exercice. Sur une taille moyenne de
m�nage estim� � 6, les femmes n'ont inscrit en moyenne que 3.5
membres. Moins de 20 % d'entre elles ont inscrit leur mari.
   En Guin�e Foresti�re, l'adh�sion de tous les membres de la famille
est de r�gle. Les mutualistes ont demand� que les familles nombreuses
puissent b�n�ficier d'une r�duction. Un taux de 10 % a �t� retenu.
Mais ces familles se plaignent toujours du montant �lev� de la cotisa-
tion. C'est dans ce pays que le taux d'inscription est le plus �lev� et
que la part allou�e pour inscrire tous les membres de la famille est la
plus faible (1.8 %).
   Pourquoi les m�nages n'inscrivent-ils pas toutes les personnes dont
ils ont la charge ?
   Les contributions des m�nages enregistr�es par les SAMV sont
fonction � la fois de leur niveau de ressources et de leur volont� � payer
le montant demand�. Le niveau de ressources d�termine une � capacit�

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 345



contributive � th�orique qui peut se d�finir comme �tant la part des
revenus mon�taires qu'un m�nage peut affecter � l'assurance maladie,
tout en continuant � faire face aux autres besoins fondamentaux (nour-
riture, logement, �ducation, transport . . .). Il s'agit d'un concept nor-
matif qui d�termine un seuil qu'il sera difficile au m�nage de d�passer,
sans r�duire ses autres d�penses qu'il juge incompressibles.
   La volont� � payer caract�rise la d�cision d'un m�nage d'utiliser ou
non tout ou partie de sa � capacit� contributive � pour l'assurance
maladie. Elle refl�te la priorit� accord�e au SAMV par rapport �
d'autres d�penses. C'est l� qu'interviennent la fonction d'utilit�,
l'aversion pour le risque et le libre arbitre de l'adh�rent potentiel.
   Trois arguments conduisent � consid�rer que les contributions con-
stat�es seraient d'avantage repr�sentatives de la capacit� contributive
des m�nages que de leur propension � payer.

   1- Pour les m�nages ayant pris la d�cision d'adh�rer et adh�rant
   depuis de nombreuses ann�es, l'utilit� de l'assurance maladie peut
   �tre consid�r�e comme acquise (ce serait le cas � N'Koranza au
   Ghana). Le niveau de contribution exprimerait leur � capacit�
   contributive �.

La fonction d'utilit� est caract�ris�e par un ensemble de facteurs et de
d�terminants qui peuvent se r�sumer ainsi :

� Le d�terminant �conomique : c'est ici le montant de la cotisation
   que doit finalement payer l'adh�rent qui est en jeu (taux unitaire,
   modalit�s d'adh�sion) par rapport au service apport�.

� Le d�terminant technique : il regroupe les facteurs directement li�s �
   la conception des produits. L'�tendue, le niveau de couverture des
   prestations de soins vont directement influer sur l'attractivit� des
   produits propos�s par le SAMV. La d�finition des modalit�s d'adh�-
   sions et de cotisations : p�riode, paiement fractionn� ou non, col-
   lecte active ou passive des cotisations, r�gles d'inscription impos�es,
   peuvent �galement avoir une influence sur la d�cision finale
   d'adh�rer ou non � un SAMV.

� Le d�terminant institutionnel : il met en jeu l'organisation de la gou-
   vernance. Elle influe sur la confiance qu'auront les adh�rents dans le
   SAMV dans laquelle l'information et les relations entre les respons-
   ables du SAMV joueront un r�le important.

346 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Par rapport aux d�terminants influen�ant la propension � payer : tous
les syst�mes �tudi�s apportent des garanties (prestations hospitali�res �
l'exclusion des soins ambulatoires) et un niveau de s�curit� compara-
ble : au Ghana et en Guin�e les prestations couvertes sont prises en
charge � 100 % sans ticket mod�rateur6. Au Mali, les montants for-
faitaires rembours�s couvrent de l'ordre de 80 � 90 % des d�penses
effectu�es.
   La qualit� per�ue des soins est consid�r�e comme acceptable dans
les 4 syst�mes. On pose l'hypoth�se que, pour les garanties propos�es,
ce facteur ne varie pas en fonction du b�n�ficiaire � inscrire.
   Le d�terminant principal influen�ant la volont� � payer une cotisa-
tion, est la probabilit� de survenue du risque parmi les membres du
m�nage. Mais les prestations prises en charge portant sur le gros
risque (prestations hospitali�res, m�dico-chirurgicales), la survenue
du risque peut �tre consid�r�e comme possible pour tous les membres
du m�nage. L'opportunit� de b�n�ficier des services du SAMV existe
pour tous les membres de l'unit� familiale.
   Si on consid�re que les m�nages adh�rents ont int�r�t � inscrire tous
les membres de la famille afin d'�tre � l'abri de d�penses exception-
nelles, alors on peut poser l'hypoth�se que le montant de la cotisation
pay�e est un indicateur direct de leur � capacit� contributive � pour les
services propos�s plut�t que de leur volont� � payer. La limitation du
nombre d'inscrits par titulaire exprimerait le niveau de cette capacit�.

   2- L'�cart entre les intentions de cotisations et les contributions
   r�ellement effectu�es par les m�nages d�clarant les ressources les
   plus faibles

Les intentions de cotisations peuvent �tre consid�r�es comme des
indicateurs indirects de la volont� � payer, de la perception de la
fonction d'utilit� et de l'aversion pour le risque. Dans cette hypoth�se,
l'�cart entre les intentions de cotisations et les contributions r�elle-
ment consenties plaiderait en faveur d'une limitation de leur pouvoir
d'achat. Or on a vu que les m�nages les plus pauvres se d�clarent pr�ts
� consacrer proportionnellement une part plus importante de leurs
revenus que les plus riches. Chez eux, la perception de l'utilit� de l'as-
surance maladie serait forte, alors que dans la r�alit�, l'assurance mal-
adie volontaire a de la difficult� � attirer ces m�nages � plus faibles
revenus.

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 347



   3- La variation des effectifs d'adh�rents en fonction de la situation
   �conomique des zones d'implantation des mutuelles.

Dans les r�gions agricoles o� les cultures de rentes pr�dominent, le
prix de vente des productions ou la qualit� des r�coltes ont une inci-
dence directe sur le niveau des adh�sions qui fluctuent d'une ann�e
sur l'autre. Cette observation a �t� faite en Tanzanie dans la R�gion de
Mbeya (caf�), au Kenya (caf� et th�), au B�nin (coton).



CONCLUSION

Un faisceau de pr�somptions am�ne � situer le niveau de contribution
possible des m�nages � faibles revenus autour de 2 % de leurs
ressources mon�taires annuelles. Selon les r�sultats de ce travail, si le
d�terminant �conomique de l'adh�sion ne saurait seul expliquer la
faible port�e des SAMV, il constitue un facteur important.
   Plus d'informations sont n�cessaires pour pr�ciser les poids relatifs
du niveau du pouvoir d'achat par rapport � d'autres facteurs qui d�ter-
minent la d�cision d'adh�rer � un SAMV. Ce constat invite � pour-
suivre la recherche dans la conception de produits de micro assurance
qui tiennent compte de l'h�t�rog�n�it� des moyens financiers des
publics cibles des SAMV et de leur volont� � payer pour les services
propos�s. Il invite �galement � concevoir des strat�gies globales de
financement des services de sant� qui auront pour objectif de deman-
der � la population cible des tarifs de prestations, dont la couverture
par un SAMV puisse �tre compatible avec � sa capacit� contributive �
individuelle et collective.



NOTES

  1. Au Ghana, un service de � mise en observation � est payant. Au
B�nin certaines mutuelles ont commenc� � instituer un co-paiement
sous forme de franchise apr�s la p�riode �tudi�e.


  2. Le tarif forfaitaire global pour une intervention chirurgicale
majeure �tait de 15  � l'h�pital pr�fectoral et de moins de 25  �
l'h�pital r�gional de N'Z�r�kor�.

348 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



 3. L'enqu�t� connaissait parfois le type de garanties couvertes, mais
n'a pas encore pu appr�cier l'utilit� du service offert par le SAMV.


 4. Les Services de Sant� et la Population CIDR/GTZ


 5. B�n�ficiaires = membres titulaires + ayant droit inscrits sur la carte


 6. Au Ghana, un service de � mise en observation � est payant. Au
B�nin certaines mutuelles ont commenc� � instituer un co-paiement
sous forme de franchise.




D�FINITION DE CERTAINS TERMES UTILIS�S

B�n�ficiaires : Le titulaire et les ayants-droit inscrits sur la carte qui
  peuvent b�n�ficier des prestations du SAMV.

Adh�rents : Titulaire de la carte d'adh�sion qui s'acquitte de la coti-
  sation pour lui et ses ayants-droit.

Taux de p�n�tration : Rapport entre le nombre de b�n�ficiaires
  du SAMV et le nombre d'habitants dans la zone de recrutement du
  SAMV (public cible).

Taux d'adh�sion des m�nages/familles : Rapport entre le nombre
  des m�nages/familles adh�rentes et le nombre de m�nages/familles
  dans la zone de recrutement de la mutuelle (public cible)

Taux d'inscription : Rapport entre le nombre moyen de b�n�ficiaires
  inscrits par m�nage-famille mutualiste et le nombre moyen de
  membres de ces m�mes m�nages-famille.

Taux d'affectation des ressources (ou taux d'allocation) : Il exprime
  le montant des cotisations pay�es � un SAMV en pourcentage de
  leurs revenus annuels mon�taires des unit�s familiales.

L'unit� familiale : Ensemble des personnes � charge d'une famille
  monogame ou polygame.

Personnes � charges : Mari, �pouse(s), enfants vivant sous le m�me
  toit, autres personnes (parents ou autres).

   Contribution des m�nages � faibles revenus pour la micro-assurance maladie � 349



BIBLIOGRAPHIE

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    D�partement des Collines. Rapport d'activit�.

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Galland, B. 2002. Modes de collaboration entre des prestataires de soins et des syst�mes d'assu-
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    de Recherche (www.cidr.org/Modes-de-collaboration-entre-des.html).

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    dans le cadre de l'institution financi�re Nyeta Mussow Rapport d'�tude de faisabi-
    lit� : Rapports d'activit�s


                                                        PARTIE 3

                                       L'expansion
                             de la couverture


3.1. Les relations de l'assurance maladie avec l'offre de soins

Chapitre 12 : Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans
les services : une interaction dynamique
   Bart Criel, P. Blaise, D. Ferette

Chapitre 13 : L'assureur face � l'h�pital : questions pour un dialogue
   �ric de Roodenbeke



3.2. Protection sociale, assurance maladie et lutte contre
la pauvret�

Chapitre 14 : La contribution de l'assurance aux politiques de lutte
contre la pauvret�
   Slim Haddad, F. Morestin

Chapitre 15 : Les Fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer
l'acc�s aux soins de sant� des plus pauvres en Afrique ?
   M. Noirhomme, J.-M. Thom�

3.1. Les relations de l'assurance maladie
                     avec l'offre de soins

                                                                      CHAPITRE 12



                    Mutuelles de sant� en Afrique
                         et qualit� des soins dans les
   services : Une interaction dynamique

                            Bart Criel, Pierre Blaise, Daniel Ferette




R�sum� : La qualit� per�ue des soins est un �l�ment important dans la d�cision
des m�nages africains � adh�rer ou non � une mutuelle de sant�. En effet, l'ex-
p�rience empirique nous montre qu'il y a trois facteurs cl�s dans la d�cision
d'adh�rer � une mutuelle de sant� : la capacit� des m�nages � payer les contri-
butions, la confiance que les gens ont dans la gestion du syst�me, et la qualit� de
l'offre dans les structures auxquelles la mutuelle de sant� donne acc�s.
    Nous faisons l'hypoth�se qu'une mutuelle de sant� peut aussi constituer un
levier pour am�liorer la qualit� de l'offre. D'abord via un levier financier : une
mutuelle de sant� peut apporter aux services de sant� de nouvelles ressources
financi�res. Ensuite, il y a un levier contractuel : le contrat �tabli entre la
mutuelle de sant� et le service de sant� peut constituer un moyen pour peser sur
la qualit� de l'offre. Un dernier levier finalement est celui du militantisme des
mutualistes qui vont veiller � ce que tout se passe comme convenu. Aujourd'hui,
les donn�es validant ou pas cette hypoth�se restent encore . . . fragmentaires.
    Un obstacle de taille auquel nous faisons face dans l'�tude de l'interaction
entre mutuelles de sant� et qualit� des soins est la difficult� de d�finir cette
derni�re. Patients et prestataires per�oivent et d�finissent la qualit� des soins de
fa�on diff�rente.
    Nous proposons que la qualit� des soins est un concept socialement construit
dans un contexte donn�. L'interaction entre mutuelles de sant� et prestataires de



                                                                                    353

354 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   soins, avec l'espace d'�change et de dialogue que cette interaction implique, con-
   stitue une opportunit� pour arriver localement � une d�finition plus consensuelle
   de ce qu'est la qualit� des soins. Il convient d'explorer les modalit�s pour g�rer un
   tel processus interactif et d'�tudier ses effets sur la qualit� des soins.




INTRODUCTION : POURQUOI LA QUALIT� DES SOINS EST-ELLE SI
IMPORTANTE POUR UNE MUTUELLE DE SANT� EN AFRIQUE ?

Le probl�me de l'acc�s aux soins en Afrique Sub-Saharienne est s�rieux.
Les syst�mes de sant� africains sont en crise. Apr�s leur ind�pendance,
les �tats ont r�duit leur contribution au financement des services de
sant�, si bien qu'aujourd'hui les patients doivent financer de leur poche
la plus grosse part du co�t des soins. Un �norme probl�me d'acc�s fi-
nancier aux soins se pose donc. Comme les mutuelles de sant�1 ont pour
raison d'�tre de faciliter cet acc�s, leur d�veloppement �tait attendu et
souhait�. Dans plusieurs pays d'Afrique, le concept de mutuelle est
compris, il s�duit et int�resse la population2. Pourtant, tant en Afrique
de l'Est qu'en Afrique de l'Ouest, leur d�veloppement a �t� moins
rapide qu'esp�r� par leurs promoteurs. Le pourcentage de la population
cible qui y adh�re est faible3, de m�me que la part de la d�pense de sant�
des m�nages qu'elles prennent en charge.
   Une revue de la litt�rature4 a permis de d�gager les causes de la
faible couverture des syst�mes de mutualisation du risque maladie.
Elle a fait appara�tre toute une s�rie de facteurs dont trois semblent
particuli�rement importants dans la d�cision d'adh�rer ou non � une
mutuelle de sant�5. Ce sont :

1.    La capacit� des m�nages � payer les cotisations � la mutuelle.
      M�me si on ne prend pas en compte les indigents6, une part non
      n�gligeable de la population rencontre des difficult�s pour
      cotiser, soit lorsqu'elle ne b�n�ficie pas de revenus stables, soit
      lorsqu'il s'agit de familles nombreuses.

2.    La confiance qu'ont les gens dans les promoteurs et le syst�me de
      gestion de la mutuelle. Certaines ont �t� g�r�es de fa�on calami-
      teuse et des souvenirs subsistent.

3.    Enfin et surtout, la qualit� des soins telle qu'elle est per�ue par les
      adh�rents.

           Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 355



   Que ce dernier facteur soit d�terminant ne nous �tonnera point.
Adh�rer � une mutuelle de sant�, c'est d�cider d'�changer le paiement
r�gulier de cotisations � la mutuelle contre la prise en charge par
celle-ci de tout ou partie des frais de recours aux soins. C'est pr�fi-
nancer, de fa�on solidaire, le co�t de soins de sant�. Cela n'a de sens
que si ce qui doit �tre financ� en vaut la peine, a une valeur suffisante,
c'est-�-dire si les soins ont une qualit� suffisante. Une mutuelle ne
conna�tra le succ�s que dans des r�gions o� la qualit� des soins est
per�ue comme satisfaisante et o� la population cible a une confiance
suffisante dans la dispensation des soins7.



LA CRISE DES SYST�MES DE SANT� AFRICAINS : LA SPIRALE
DE D�GRADATION DE LA QUALIT� DES SOINS

Dans les pays o� l'�tat a la responsabilit� � la fois de l'organisation et
du financement des services de sant�, la limitation des moyens budg�-
taires disponibles a eu des retomb�es directes sur l'efficacit� des ser-
vices de sant� et la qualit� des soins d�livr�s. L'application � certains
pays de plans d'ajustement structurel a encore aggrav� la situation8.
Beaucoup de formations sanitaires ont cess� d'�tre fonctionnelles ou ne
re�oivent pas les moyens correspondant � la mission qui leur est impar-
tie, et une spirale de d�gradation se met en place. Echaud�s par une
qualit� de services insuffisante, les usagers h�sitent � recourir aux soins,
privant ainsi les services de sant� des recettes qui leur parviennent nor-
malement le plus rapidement : les participations personnelles qu'ils
paient. De plus, le manque de confiance dans les services de sant�
provoque le recours � des alternatives souvent dommageables, comme
les th�rapies traditionnelles ou les circuits illicites de d�livrance des
m�dicaments tels que les pharmacies � trottoir � ou � par terre �. Les
patients consultent tardivement, avec d�s lors un �tat de sant� aggrav�
et un besoin de soins plus lourds. Lorsqu'ils finissent par s'adresser aux
services de sant�, ceux-ci ont encore plus de difficult�s � prendre en
charge les traitements.
   Lorsque la population n'a plus confiance dans le syst�me de soins,
cr�er une mutuelle n'a gu�re de sens. Ainsi, avant de lancer une
mutuelle de sant�, il faut remettre � niveau la qualit� des services de
sant�, renforcer l'offre de soins pour pouvoir ensuite relancer la
demande9. Et vice-versa, quand une mutuelle de sant� est lanc�e, la

356 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Graphique 1 : Lien mutuelle-qualit�

                                     QUALIT� DES SOINS



                   La qualit� des soins              La mutuelle comme
                   comme condition de                levier pour la qualit�
                   succ�s de la mutuelle             des soins



                                          SYST�ME
                                        MUTUALISTE




qualit� des soins est au centre de ses pr�occupations (voir graphique).
Si les adh�rents sont m�contents de la qualit� des soins, m�me une
mutuelle bien construite, bien g�r�e et qui a bien d�marr�, verra son
effectif stagner voire r�gresser. Elle doit donc prendre des initiatives
pour am�liorer cette qualit� des soins, en collaboration avec les
prestataires.



MAIS QUE SIGNIFIE : � AM�LIORER LA QUALIT� � DES SOINS ?

Les diff�rents acteurs du syst�me de sant� ont leur conception de la
qualit�, privil�giant les dimensions qui sont, � leurs yeux, essentielles10.
Si on se place dans l'optique du patient, ce sera son niveau de satisfac-
tion personnelle11. Apr�s l'acc�s g�ographique � la formation sanitaire,
le patient sera surtout sensible � la qualit� de l'accueil et de la relation
avec le prestataire (�coute et respect), au d�lai d'attente pour obtenir
rendez-vous et soins, � la qualit� du cadre et l'agr�ment du cabinet de
consultation, au caract�re ad�quat de l'information fournie. Sur la base
de leurs exp�riences personnelles ou de celles de leurs connaissances et
en parlant autour d'eux, les patients se forgent une opinion et sont plus
ou moins satisfaits. Cette opinion positive ou n�gative pour subjective
qu'elle soit, aura des cons�quences sur le recours aux soins, la sant�
financi�re du syst�me de soins, et la volont� des m�nages d'affecter une
part de leurs ressources au financement des soins.
   Le professionnel privil�giera la conformit� du traitement aux indica-
tions de la science g�n�ralement admise (evidence based medicine) et
aux meilleures pratiques (le regard et la vision de ses pairs). Les ges-
tionnaires seront soucieux de la conformit� des soins � des standards
d�finis pour la prestation de service ou le traitement (au niveau micro).

           Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 357



� un niveau plus �lev�, ils se pr�occuperont aussi de la r�alisation des
objectifs fix�s dans le cadre de la politique de sant� ou des programmes
verticaux. La relation co�t/efficacit� sera un crit�re d�cisif pour une
bonne qualit� des soins.
   Etant donn� ces diff�rences d'optiques que nous avons �videmment
pouss�es � la caricature, Lohr12 a pu constater qu'il existait une cen-
taine de d�finitions de la qualit�. Si les d�finitions de la qualit� sont si
nombreuses, il sera difficile d'avoir une vision unique de ce qu'il faut
faire pour l'am�liorer, et m�me seulement pour la mesurer. Mais �
d�faut de trouver cette d�finition, il est possible de faire un relev� des
composantes de la qualit�, des d�terminants auxquels les divers acteurs
reconnaissent une certaine importance. Ainsi la qualit� n'appara�t pas
comme une variable dichotomique. On n'est pas dans le � tout ou
rien �. Par rapport � divers d�terminants, on atteint un niveau plus ou
moins �lev�. Pris isol�ment, aucun de ces d�terminants n'est un indi-
cateur complet de la qualit�. Il faut donc se r�soudre � regrouper dif-
f�rents d�terminants pour constituer un cadre d'analyse de la qualit�
acceptable pour les divers acteurs du syst�me de sant�. Il pourrait ainsi
comporter la plupart des �l�ments suivants, exprim�s de mani�re plus
concr�te :

� satisfaction des patients et en particulier qualit� de la relation avec le
   prestataire

� accessibilit� (dans le temps et financi�re)

� efficacit�

� s�curit� du traitement

� rapport co�t/efficacit�

� continuit� . . . .


   Pour que pareil cadre puisse �tre utile � des fins de mesure et d'�va-
luation, une pond�ration des diff�rents d�terminants doit �tre d�finie.
Vu les visions propres � chacun des acteurs, on risque de se retrouver
avec un nombre encore plus grand de grilles d'analyse de la qualit� . . . ,
sauf si les divers acteurs admettent la n�cessit� de s'accorder sur des
pond�rations et priorit�s. L'exercice est d�licat car la notion de qualit�
est utilis�e dans des perspectives parfois oppos�es pour d�fendre cer-
tains int�r�ts propres. Ainsi, lorsqu'ils d�finissent la qualit� d'une

358 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



mani�re qu'ils sont les seuls � bien ma�triser (la conformit� � la science,
aux preuves scientifiques), les prestataires tentent de se pr�server une
certaine autonomie professionnelle. Au contraire, lorsqu'ils mettent
l'accent sur l'aspect co�t/efficacit� et d�finissent des normes pour une
fourniture de soins efficiente, les gestionnaires (autorit�s sanitaires,
gestionnaires d'institutions, de programmes et aussi mutuelles) enten-
dent r�duire la sph�re de libert� des prestataires pour influencer leur
comportement.
   Lorsque les patients d�sirent une relation avec le prestataire
empreinte d'�coute et de respect, un vrai dialogue, un acc�s rapide et
un accueil dans des locaux agr�ables, tout ceci peut aller � l'encontre
du souci des gestionnaires de rationaliser et standardiser le processus
de soins et de ma�triser les co�ts. Lorsque la mutuelle recherche
aupr�s des formations sanitaires un meilleur rapport co�t/qualit� pour
les soins � ses adh�rents, celles-ci pourront y voir un danger13. Les
enjeux de pouvoir sont bien pr�sents dans la recherche de la qualit�
des soins. Des risques de conflits de pouvoir se profilent donc. Sou-
vent le dialogue entre deux acteurs d�bouchera sur la confrontation.
   Tous les d�terminants de la qualit� que nous avons cit�s ont cepen-
dant du sens et une certaine importance. Tous les acteurs soucieux de
maintenir le syst�me en conviendront. Ce qui cr�e probl�me, c'est
leur importance relative et le choix des priorit�s. En fait, la qualit�
suppose la pr�sence d'un peu de chacun des attributs pr�cit�s. Ainsi les
gestionnaires ne peuvent ignorer l'importance de l'aspect humain et
relationnel de la fourniture de soin. De m�me, les professionnels ne
peuvent n�gliger le poids des contraintes �conomiques sur le finance-
ment de leurs activit�s et la n�cessit�, pour une plus grande efficience,
d'une certaine standardisation des proc�dures.
   Il reste donc aux acteurs � s'entendre, en fonction d'une analyse du
contexte, sur l'importance � conf�rer � chaque attribut de la qualit�, et
sur les priorit�s dans les actions � mener. Comme la vie et le contexte
social sont tr�s mouvants, les acteurs d�sireux de garantir ou am�liorer
la qualit� des soins s'engageront, en fait, dans un processus d'ajuste-
ment permanent de l'importance des attributs de qualit�. Plus ce
processus sera participatif et d�bouchera sur une vision partag�e, plus
il y a de chances que les acteurs s'impliquent dans les actions visant �
am�liorer la performance par rapport � un attribut donn�. Le proces-
sus devant conduire � un �quilibre entre les valeurs des divers protago-

           Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 359



nistes, il y aura aussi un �quilibre dans les actions � mener, celles
souhait�es par chacun des acteurs du syst�me de soins d�pendant pour
leur mise en oeuvre d'une certaine contribution des autres. Le ren-
forcement de la pr�sence d'un attribut de qualit� n'a pas n�cessaire-
ment pour cons�quence une d�gradation au regard d'un autre. Mais
comme les ressources pour des actions visant � am�liorer diff�rents
indicateurs sont limit�es, l'�nergie et les moyens utilis�s pour
am�liorer un attribut ne sont plus disponibles pour am�liorer un
autre.
   La qualit� des soins est donc un concept construit par rapport � un
contexte donn� et donc tr�s �volutif. Les acteurs partent d'un �tat
donn� de la qualit� et veulent faire bouger les choses, dans une direc-
tion qui est bonne d'abord pour eux, mais probablement aussi pour
d'autres. Notons en passant que cette vision dynamique de la qualit�
se heurte � certaines pratiques visant � garantir la qualit� via une
accr�ditation des prestataires et structures de sant�. Ainsi, l'accr�dita-
tion, c'est parfois tout ou rien : le prestataire satisfait ou non � des
conditions fix�es. Si elle est obtenue une fois pour toutes, elle peut
engendrer un certain immobilisme : � Nous avons eu ce label, et
maintenant qu'on nous laisse tranquille �. Et on oublie les exigences
auxquelles il fallait satisfaire ! En fait, pour maintenir la comp�tence
des professionnels �galement, il faudrait mettre en place un processus
continu et participatif pour rester en phase avec l'�volution des bonnes
pratiques. Une accr�ditation devrait donc � se m�riter tous les jours �.
   Nous avons ainsi montr� le caract�re relatif, �volutif, dynamique de
la recherche d'am�liorations par rapport � divers attributs de la qualit�
des soins.



QUE PEUT FAIRE UNE MUTUELLE DE SANT� ?

Comme ses membres souhaitent des soins de qualit�, elle va naturelle-
ment s'efforcer de n�gocier avec les prestataires une am�lioration de
cette qualit� des soins. Elle fournira aussi � ses membres une informa-
tion utile pour qu'ils recourent aux soins de fa�on avis�e (respect des
r�gles et conventions), dialoguent et interagissent efficacement avec
les prestataires (bonnes attitudes, bonnes questions, bonne m�moire
de ce qui a �t� dit par le prestataire). Elle peut jouer le r�le d'un inter-
m�diaire inform�, actif et comp�tent entre patients et prestataires.

360 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Dans les pays africains, l'�troitesse des moyens financiers des sys-
t�mes publics de sant� et la faible capacit� de paiement d'une grande
partie de la population et de ses syst�mes d'assurance imposent des
limites aux normes et objectifs de qualit� qu'ils se fixent. Une grande
part des traitements conformes aux indications de la science des pays
occidentaux ne peut pas �tre pay�e par les populations, les �tats, ni
par des syst�mes de protection sociale ou d'assurances encore em-
bryonnaires. Dans ces pays, la qualit� et les bonnes pratiques sont d�finies
de fa�on moins pr�cise et moins exigeante pour les prestataires. Les
structures pour en suivre le respect sont encore embryonnaires.
Les usagers des syst�mes de soins ont donc moins de garanties. De
plus, les autorit�s sanitaires organisent et g�rent des services publics
de soins parfois d�ficients. Elles sont en situation d�licate lorsqu'elles
soutiennent la d�finition de normes auxquelles leurs services publics
de sant� ne satisfont pas. Et que peuvent-elles r�aliser de fa�on effi-
cace si elles ne disposent pas de l'information et de la capacit� admin-
istrative suffisante ?
   Dans pareil contexte, les initiatives de mutuelles de sant� visant �
garantir ou am�liorer la qualit� des soins semblent n�cessaires et bien-
venues. Les mutuelles de sant� peuvent contribuer � am�liorer la qua-
lit� des soins par leur dialogue et leurs relations avec les prestataires
de soins gr�ce aux leviers14 que nous allons d�crire. Nous �voquerons
aussi ce qu'elles peuvent faire en relation avec les autres acteurs15.


Un levier financier

La mutuelle de sant� apporte aux services de sant� des ressources sup-
pl�mentaires et plus stables dans le temps, qui leur permettent
d'am�liorer la qualit� des soins lorsque leurs insuffisances sur le plan
de la qualit� r�sultent d'une insuffisance de moyens financiers. En
rendant leur demande de soins plus solvable, elle permet � ses
adh�rents un recours aux soins plus fr�quent. Elle augmente ainsi le
chiffre d'affaires des prestataires de soins, qui peuvent donc s'engager
davantage dans une activit� mieux financ�e. Par exemple, un recours
aux soins plus �lev� de la part des mutualistes a augment� les recettes
du centre de sant� dans le projet Prima en Guin�e16. Si les services de
sant� ne disposent pas d'un financement suffisant, et que l'apport de la
mutuelle est cons�quent, ce levier peut �tre fort.

            Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 361



Un levier contractuel

Si la mutuelle prend en charge uniquement les soins d�livr�s par les
formations sanitaires avec lesquelles elle a conclu une convention, elle
pourra, dans cette convention, inclure certaines exigences quant � la
qualit� des soins fournis. Par exemple une mutuelle prenant en charge
les m�dicaments n�gociera avec les prescripteurs et pharmacies qui
ont pass� une convention avec elle, diverses dispositions pour encou-
rager la prescription de m�dicaments g�n�riques essentiels. Ce faisant,
elle am�liorera l'accessibilit� des soins et procurera une valeur ajout�e
� ses membres.


Un levier de contrepouvoir vis-�-vis des prestataires de soins

Gr�ce � la capacit� des membres de la mutuelle de se d�fendre, leurs
droits seront mieux respect�s et les abus seront sanctionn�s. Les
adh�rents � la mutuelle sont mieux inform�s au sujet des probl�mes
d'acc�s aux soins, des soins d�livr�s par les formations sanitaires et de
leurs co�ts. Plus s�rs de leur bon droit, ils peuvent se montrer plus
exigeants et exprimer leur point de vue avec davantage de force. Par
ailleurs, les membres des mutuelles ne sont plus isol�s, soumis. Ils ont
des canaux et relais d'information (l'Assembl�e G�n�rale de la mutuelle
ou le contact avec des d�l�gu�s). Ils peuvent d�cider d'adopter des com-
portements communs dans la relation avec les prestataires de soins17. Avec
la mutuelle, ils ont des moyens (financiers et humains) pour d�fendre un
point de vue commun au nom d'un groupe important d'adh�rents.


Un levier de porte-parole comp�tent des usagers
dans les d�bats et enjeux de politique de sant�

Enfin, les r�unions de � la Concertation �18 nous ont sugg�r� un qua-
tri�me levier. Ensemble, les mutuelles de sant� pourraient exprimer avec
comp�tence la voix des usagers, dans les d�bats de politique de sant� et
particuli�rement par rapport � la qualit� des soins. Porteur de valeurs de
solidarit�, participation, d�mocratie, un ensemble de mutuelles de sant�
pourrait contribuer � �clairer certains d�bats et enjeux strat�giques dans
diff�rents pays d'Afrique de l'Ouest. Par cette participation aux d�bats,
les mutuelles de sant� b�n�ficieront d'une l�gitimit� de repr�sentants des
usagers et d'un cr�dit renforc� dans leur pays.

362 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



DES LEVIERS PUISSANTS ; EN FAIT, PAS SI PUISSANTS QUE CELA !

En th�orie, la mutuelle de sant� peut donc mettre en oeuvre de puis-
sants leviers pour am�liorer la qualit� des soins. Certains promoteurs
des mutuelles de sant� ont m�me eu l'espoir qu'il suffise de mettre en
place une mutuelle de sant� pour que la qualit� des soins s'am�liore.
La litt�rature existante concernant les exp�riences de mutuelles de
sant� est trop limit�e pour valider ou infirmer cette vision th�orique.
Il y a, � notre connaissance, peu d'exp�riences bien document�es qui
d�crivent un impact sur la qualit� des soins. Quelle est l'explication de
cela ? Certes, il n'est pas simple de mesurer l'�volution de la qualit�
des soins � partir de l'apparition de la mutuelle de sant� et du fait de
son action. Mais le peu de litt�rature peut s'expliquer par le manque
d'exp�riences concluantes. A d�faut de litt�rature, il est tout de m�me
possible d'expliquer, sans trop de risque d'erreur, pourquoi l'influence
actuelle des mutuelles de sant� sur la qualit� des soins reste limit�e.
Quelle est l'efficacit� r�elle des diff�rents leviers ?


Le levier financier

� ce jour, le taux de p�n�tration des mutuelles de sant� au niveau de la
population cible reste faible19 et l'apport de ressources suppl�men-
taires pour les formations sanitaires reste donc assez marginal. Le
levier financier a donc des effets limit�s. Seul un d�veloppement plus
rapide du nombre d'adh�rents permettra d'y rem�dier. Pour y arriver,
on peut envisager diverses voies :

� se d�velopper en s'appuyant sur des organisations existantes ayant
   une base de membres assez large comme, par exemple, les syndicats.

� essayer d'en arriver � une obligation de s'affilier plus pressante au
   sein des groupes cibles.

� obtenir un appui plus consid�rable de l'�tat ou de partenaires finan-
   ciers pour convaincre les adh�rents potentiels que ce serait une
   erreur de ne pas devenir membre d'une mutuelle de sant�.


Le levier contractuel

Son efficacit� est li�e � certaines conditions :

            Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 363



� une pluralit� de prestataires entre lesquels la mutuelle fera jouer la
   concurrence. Mais en beaucoup d'endroits, il n'y a pas toujours
   plusieurs formations sanitaires dans le cadre des services de sant� mis
   en place par les �tats20.

� la capacit� juridique pour les formations sanitaires de conclure des
   conventions avec des mutuelles. Dans des services de sant� publics,
   toute la capacit� juridique ne reste-t-elle pas concentr�e � la direc-
   tion du minist�re de la sant� ou de la r�gion ?

� la possibilit� pour la mutuelle d'obtenir, le cas �ch�ant, l'ex�cution
   forc�e de la convention par un recours au syst�me judiciaire.


   De mani�re plus fondamentale, il n'est pas facile pour une mutuelle de
sant� d'arriver � introduire dans des conventions des objectifs d'am�lio-
ration de la qualit�. Pour qu'elle puisse n�gocier avec les prestataires
concernant la qualit� des soins, il faut que ceux-ci lui reconnaissent une
certaine comp�tence en la mati�re. Or si les prestataires comprennent
l'int�r�t d'une mutuelle comme instrument technique de pr�paiement
des soins, ils ne la per�oivent pas encore comme un instrument de
promotion de la qualit� des soins, dans l'int�r�t de ses adh�rents. Pour
beaucoup, une mutuelle est d'abord un instrument financier, qui pro-
gressivement, au fur et � mesure de son d�veloppement pose des exi-
gences plus pr�cises pour un paiement direct ou un remboursement
(composantes de la prestation, conditions pour la prise en charge). La
mutuelle est cr�dible lorsqu'elle demande que soient d�finies des r�gles
plus pr�cises et transparentes pour la participation personnelle des
usagers21. Ainsi une des premi�res retomb�es de la cr�ation d'une
mutuelle en Guin�e a �t� la disparition des suppl�ments illicites r�clam�s
par les infirmiers et agents du centre de sant�22. Ceci a malheureusement
engendr� une certaine m�fiance des agents � l'�gard de la mutuelle.
   Une d�finition trop sommaire des prestations de soins dans le sys-
t�me de recouvrement des co�ts ne facilite pas le suivi et l'�valuation
de la d�pense par la mutuelle de sant�. Par contre, si la mutuelle arrive
dans la convention � d�finir ce que doit payer tout usager pour divers
types de soins, elle pourra par la suite imposer des conditions de prise
en charge de plus en plus pr�cises. Et ces conditions pourront avoir un
effet sur la qualit� du service rendu aux adh�rents. On ne peut sous-
estimer la difficult� de capter dans des conventions les diff�rentes
dimensions de la qualit�. Capter les intrants est encore relativement

364 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



facile. Par contre, capter le processus et les r�sultats des soins offerts
aux mutualistes est bien plus difficile.
   A sa cr�ation, la mutuelle ne dispose d'ailleurs pas imm�diatement
des comp�tences et de l'organisation pour s'occuper de la qualit� des
soins : la priorit� est la mise en place d'une bonne administration et
d'un circuit administratif efficace pour l'inscription des membres, la
collecte des cotisations, la v�rification des droits � la prise en charge,
le remboursement. La priorit� pour la mutuelle est de construire une
capacit� de gestion administrative solide. Dans la n�gociation avec les
prestataires, la priorit� est de mettre en place un processus, un flux
administratif qui tienne la route. Une bonne ma�trise de tous ces
aspects est vitale pour la mutuelle. Par contre, lorsqu'elle s'avance sur
le terrain de la qualit� des soins, les prestataires rechignent, ne l'esti-
mant pas qualifi�e pour ce d�bat23. Des services de sant� cr��s et g�r�s
directement par le minist�re de la sant� n'admettront pas non plus
spontan�ment comme interlocuteurs les repr�sentants d'une simple
association d'usagers. Leur statut au sein d'un service public de sant�
leur fait l'obligation de traiter tous les usagers de la m�me mani�re24
et de servir l'int�r�t g�n�ral : pas question de prendre des engage-
ments sp�ciaux, privil�gi�s, au profit d'adh�rents � une mutuelle.
   Nous voudrions ci-apr�s illustrer toutes les difficult�s qu'ont les
repr�sentants de mutuelles de parler de qualit� avec les prestataires, les
techniciens, en nous r�f�rant au projet PRIMA en Guin�e Conakry. Face
� une remise en cause critique de la qualit� de leur offre, les prestataires
peuvent �prouver un malaise et peuvent m�me faire de la r�sistance.



LE PROJET PRIMA EN GUIN�E CONAKRY

L'exp�rience du projet PRIMA25 en Guin�e Conakry a �t� pour
l'�quipe de l'Institut de M�decine Tropicale d'Anvers une source
importante de nouvelles connaissances sur le ph�nom�ne des mutuelles
de sant� en Afrique. Le contexte �tait �videmment particulier : un
important projet de recherche, avec la pr�sence sur le terrain de
chercheurs de disciplines diverses rassemblant une �norme documen-
tation et �valuant de fa�on syst�matique les diff�rentes �tapes de la
mise en place d'une mutuelle de sant� .
   Et qu'est-ce qui a �t� constat� ?

           Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 365



� Rappelons d'abord que le facteur essentiel de la faible p�n�tration de
   la mutuelle �tait la perception de la faible qualit� des soins de pre-
   mi�re ligne d�livr�s par le centre de sant� proche des adh�rents.

   Comment y rem�dier ? Ce n'�tait pas simple26.

� Malgr� toute l'attention et l'�nergie investies par l'�quipe de
   recherche dans la pr�paration du lancement de la mutuelle (pr�para-
   tion qui a dur� environ un an avec une information et une sensibili-
   sation en profondeur), les prestataires �taient mal � l'aise par rapport
   aux changements intervenus � la suite de la cr�ation de la mutuelle
   de sant� et craignaient d'engager un dialogue avec elle.

   Les premiers constats �taient les suivants :

� Beaucoup d'agents de sant� estimaient que les mutualistes ont une
   attitude plus exigeante, plus revendicative.

� La premi�re cons�quence de la mutuelle a �t� la suppression de la
   perception de suppl�ments illicites (m�me s'il y avait une forme de
   compensation pour les agents sous la forme d'une augmentation des
   primes, certains se sentaient l�s�s).

� la mutuelle se faisait le relais du m�contentement des adh�rents par
   rapport � la qualit� des soins du centre de sant� (prestataires peu
   respectueux et peu attentionn�s, bons m�dicaments non disponibles
   ou non d�livr�s, pas de gu�rison rapide . . .). Certains agents refu-
   saient ces critiques.

   Si les prestataires reconnaissent27 l'int�r�t de la mutuelle comme
outil technique pour am�liorer l'acc�s aux soins par le pr�paiement, ils
ne la consid�rent pas comme un interlocuteur, un partenaire pour une
n�gociation visant � am�liorer l'offre de soins28. Elle n'a pas � deman-
der de � revoir l'organisation du travail, le circuit du malade, le dia-
logue avec les malades et la population �29. Confront�s aux critiques
des usagers concernant la qualit� des soins du centre de sant� lors de
la restitution des r�sultats de l'enqu�te, certains prestataires expri-
maient le sentiment que � la population n'y connaissait rien et n'avait
qu'� s'occuper de ses propres affaires �.
   Cette absence d'ouverture des prestataires a conduit � se demander si
le projet � a suffisamment pr�par� les agents de sant� � la situation et

366 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



tenu compte des contraintes et de la rigidit� du syst�me pour eux : ils
n'ont aucune marge de manoeuvre, et il n'est pas forc�ment bon de les
exposer au partenariat avec ses exigences30. Il aurait fallu former et
int�resser le personnel au dialogue, au partenariat, � la n�gociation avec
la population et les repr�sentants de la mutuelle. Ceci impliquerait aussi
des changements dans l'organisation du travail et les niveaux de prise de
d�cision. Il faut arriver � ce que les services de sant� se sentent plus
responsables vis-�-vis des usagers (cf. la notion d'� accountability �) et
que leur gestion soit plus transparente �31. Une �volution de la � culture
d'entreprise � du centre de sant� est n�cessaire et elle n'est possible
qu'avec l'aval des autorit�s sanitaires. Celles-ci doivent montrer la voie
et sans doute proc�der � certaines adaptations du cadre de fonction-
nement des centres de sant�.
   Pour que la mutuelle puisse jouer ce r�le de n�gociateur et de contre-
pouvoir une pr�paration intense des interlocuteurs est donc indispensa-
ble. D'abord, il faut lever la m�fiance et les craintes li�es au risque d'une
d�gradation du statut (disparition de certains avantages) et de la position
des professionnels (obligation de rendre compte). Il faut ensuite les con-
vaincre que la relation sera porteuse pour chacun (relation gagnant-gagnant
de v�ritables partenaires). Dans le cas d'esp�ce, il est probable que le
maintien de proc�dures �touffant l'initiative et la cr�ativit� n'int�ressait
qu'une minorit� d'agents. Mais la majorit� n'a pas per�u les change-
ments positifs qui auraient pu se produire : la dynamique s'est arr�t�e.
Le poids des appr�hensions, des logiques bureaucratiques, de la r�sis-
tance au changement a �t� sous-estim� dans ce projet, avec pour con-
s�quences qu'apr�s quelques avanc�es32, et malgr� une apparente bonne
volont�, le processus de dialogue s'est enlis�. Pour l'�viter, il aurait fallu
envisager une action durable de supervision des agents du centre de
sant�, avec un objectif de formation pour d�velopper leur cr�ativit�,
l'�coute active du patient, une meilleure perception de l'aspect relation-
nel dans le processus de soins. Les agents auraient r�alis� qu'il y a des
alternatives � l'observance stricte et rigide de normes et proc�dures
standardis�es, d'autres mani�res de bien faire leur m�tier. Ce dialogue �
propos de la qualit� leur serait apparu int�ressant et valorisant.


Le levier de contre-pouvoir

La capacit� collective des adh�rents de se poser en contre-pouvoir
par rapport aux prestataires de soins sera limit�e aussi longtemps que

           Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 367



la mutuelle ne repr�sentera qu'un pourcentage limit� des usagers. Il
ne suffit donc pas qu'une mutuelle apparaisse et manifeste sa volont�
d'am�liorer la qualit� des soins pour que les choses s'am�liorent : les
pressions exerc�es, le r�le de contre-pouvoir, ne conduisent pas
automatiquement � des changements de comportements des prestataires
dans la fa�on de d�livrer leurs services, leurs soins. Le r�alisme devrait
inciter la mutuelle � se pr�senter plut�t comme partenaire que
comme contre-pouvoir, un partenaire soucieux d'�tablir une
relation durable et profitable pour les deux. C'est particuli�rement le
cas de la discussion concernant la qualit� des soins. Une attitude
trop dure de contrepouvoir peut faire passer d'une logique de col-
laboration, de partenariat � une logique de confrontation. Une
mutuelle doit toujours veiller � ne pas perturber les prestataires
avec des peccadilles administratives, en se concentrant sur l'essen-
tiel. En principe, elle doit faciliter la vie et simplifier l'administra-
tion des formations sanitaires.


Un levier de porte-parole comp�tent des usagers
dans les d�bats et enjeux de politique de sant�

Ceci suppose que les mutuelles s'organisent pour travailler en r�seau,
en �vitant de disperser leurs efforts et en partageant les informations,
et donc . . . certaines �volutions par rapport � ce qui s'observe dans
diff�rents pays. La collaboration entre mutuelles est seulement en
train de s'y structurer. De plus, la qualit� des soins �tant un domaine
collat�ral � l'activit� des mutuelles de sant�, leur expertise en la
mati�re ne pourra se construire que progressivement. En revanche, la
capacit� d'une mutuelle de sant� � rassembler des donn�es chiffr�es, �
quantifier et � �valuer est un �l�ment important dans le contexte de
divers pays d'Afrique o� les donn�es sont rares. Elle donne aux
mutuelles de sant� une valeur appr�ciable. Il faudra certes y ajouter
une capacit� de bien communiquer, surtout avec les prestataires, mais
aussi avec les autorit�s sanitaires. Dans cette d�marche de qualit�, en
fait, les mutuelles de sant� d�fendront les int�r�ts de tous les usagers,
et pas uniquement de leurs adh�rents, ce qui est mieux per�u par les
prestataires lorsque les services publics de sant�, en raison de leur mis-
sion d'int�r�t g�n�ral, ont des difficult�s � imaginer un traitement plus
favorable pour les mutualistes.

368 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



LA MUTUELLE DE SANT�, ACTEUR DANS UN ENSEMBLE

Il ne suffit donc pas qu'une mutuelle s'int�resse � la qualit� des soins
des institutions fr�quent�es par ses adh�rents pour que la qualit� des
soins qu'elles dispensent s'am�liore. Des initiatives isol�es de la
mutuelle comportent leurs limites. Pour que le contexte devienne
favorable aux �volutions en mati�re de qualit�, la mutuelle soutiendra
les initiatives valables d'autres acteurs ayant un impact sur cette qua-
lit�. Elle stimulera des actions pour r�duire les blocages et la r�sistance
aux changements. Si elle n'est qu'un des acteurs parmi d'autres du sys-
t�me de sant�, elle est normalement bien plac�e pour sensibiliser,
faciliter, accompagner le changement. Les mutuelles de sant� s'ef-
forceront aussi, ensemble, de convaincre les autorit�s sanitaires de
mettre en route un processus d'am�lioration de la qualit� dans ses dif-
f�rentes dimensions, en associant tous les acteurs concern�s. Pour ce
faire, les autorit�s sanitaires peuvent recourir � des stimulants et autres
leviers. Dans un contexte devenu plus favorable, il sera plus facile aux
mutuelles de sant� de proposer aux formations sanitaires qui leur sont
proches des initiatives d'am�lioration de la qualit� en phase avec la
vision et le discours des principaux acteurs.



CONCLUSION

La qualit� des soins dispens�s dans les formations sanitaires accessi-
bles aux adh�rents des mutuelles de sant� est une condition indispen-
sable � leur d�veloppement. Malgr� les leviers dont elles disposent, les
mutuelles de sant� n'arrivent pas ais�ment, par leur action isol�e, �
influencer la qualit� des soins. L'espoir qu'il suffise de mettre en place
une mutuelle de sant� pour que la qualit� des soins s'am�liore est peu
r�aliste. Une relation de partenariat avec les formations sanitaires ne
se r�alise pas naturellement. Cela n�cessite un gros effort pour conva-
incre les prestataires qu'ils ont aussi � gagner dans un dialogue au sujet
de la qualit� des soins. Pour �tre vraiment efficace, l'action de la
mutuelle s'inscrira dans l'ensemble des interventions des divers
acteurs en faveur de la qualit�. Elle soutiendra les initiatives des autres
acteurs pour am�liorer la qualit� des soins et s'efforcera de les relayer
dans sa relation de proximit� avec les formations sanitaires. Et ce qui

            Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 369



est � gagner par cette � construction sociale permanente � de la qua-
lit�, c'est un renforcement de la confiance de chacun dans le syst�me
de soins. Alors, chaque acteur est gagnant, et le syst�me de soins entre
dans une spirale vertueuse de constante am�lioration.



NOTES

  1. Mutual Health Organisation. Pour saisir les nuances par rapport �
un concept proche (Community Health Insurance) voir M.P. Waelkens
et B. Criel (2004) pp 26 et suiv.


  2. C'est le cas pour le pays qui retiendra particuli�rement notre
attention, la Guin�e Conakry. Voir Criel, B., A. Noumou Barry et
F. Roenne (2002)


  3. Criel, B., A. Noumou Barry et F. Roenne (2002) pp. 7 et suiv.


  4. Pour les r�f�rences Criel, B., A. Noumou Barry et F. Roenne
(2002) pp 61


  5. Criel, B., A. Noumou Barry et F. Roenne (2002) pp. 61 et suiv.


  6. Pour les indigents, le m�canisme de la mutuelle de sant� est
inad�quat, sauf si l'�tat alloue une subvention importante � la mutuelle
pour leur prise en charge.


  7. Nous parlons bien de la qualit� per�ue : ainsi dans plusieurs pays,
les autorit�s sanitaires, confront�es au marketing agressif de l'industrie
pharmaceutique aupr�s des m�decins, rencontrent de grosses difficult�s
� convaincre la population que les m�dicaments g�n�riques essentiels
qui sont pris en charge par le syst�me de sant� public et les mutuelles
ne sont pas, en r�gle, de qualit� moindre.


  8. Voir le constat du rapport de la Commission pour l'Afrique (2005)
pp. 183 � 192

370 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



 9. C'est, par exemple, la vision qui ressort du Plan de D�veloppe-
ment sanitaire du Niger : le renforcement des services de sant� est la
priorit�.


10. Les r�flexions qui suivent concernant le concept de qualit� sont
inspir�es de travaux de P. Blaise, (2003).


11. Voir Criel, B., A. Noumou Barry et F. Roenne (2002) sur le Projet
Prima. Les usagers souhaitent d'abord que les m�dicaments n�ces-
saires, les � bons � m�dicaments soient disponibles pour eux-m�mes.
De fa�on plus g�n�rale, ils attendent seulement � une gu�rison
rapide �, de � retrouver rapidement la sant� �.


12. P. Blaise (2003) pp. 29


13. Le dialogue entre les groupes de mutuelles et les prestataires
�volue souvent vers la confrontation. Ainsi pour diverses raisons, dont
le fait que les mutualit�s g�rent elles-m�mes indirectement certaines
institutions, le corps m�dical belge a refus� de consid�rer les mutuelles
comme des interlocuteurs comp�tents en mati�re de qualit� des soins.
Les mutuelles n'ont �t� admises � d�battre de qualit� qu'� partir du
moment o� le l�gislateur a cr�� un cadre pour la promotion de la qual-
it� associant tous les acteurs.


14. Letourmy, A. (1998) ; Waelkens M.P., et B. Criel (2004) et
r�f�rences qui y sont cit�es p. 56.


15. Voir levier de porte-parole comp�tent des usagers dans les d�bats
et enjeux de politique de sant�.


16. Quatre fois plus �lev�es pour les membres de la mutuelle du pro-
jet PRIMA op. cit. p. 37.


17. Les infirmiers et agents de sant� n'ont plus la possibilit� d'exiger
des suppl�ments illicites. Projet PRIMA op. cit.


18. � La Concertation � est une plateforme d'�changes et de rencon-
tre des mutuelles de sant� en Afrique de l'ouest. Elle est appuy�e par

          Mutuelles de sant� en Afrique et qualit� des soins dans les services � 371



une dizaine d'organisations europ�ennes non gouvernementales, de
coop�ration bilat�rale et multilat�rales, http://www.concertation.org/


19. Waelkens M.P., et B. Criel (2004)


20. Dans le projet PRIMA, c'�tait le cas pour le centre de sant� de
Yend�.


21. Voir le projet de mutuelle de sant� pour les agents de l'�tat au
Niger : il est difficile pour une mutuelle de bien financer les soins de
premi�re ligne d�livr�s par les centres de sant� int�gr�s si les r�gles de
recouvrement des co�ts varient par district sanitaire. Ainsi pour
Niamey, il y a trois syst�mes de forfaits par �pisode de maladie, cou-
vrant ou non les m�dicaments. Les promoteurs du projet se sont
engag�s � n�gocier avec les autorit�s sanitaires des conditions permet-
tant une bonne prise en charge de ces soins par la mutuelle.


22. Leur importance �tait non n�gligeable : 22 % des recettes du
Centre de Sant�, le Projet PRIMA, Waelkens M.P., et B. Criel (2004)
pp. 116 et 117.


23. En Belgique, les m�decins se sont toujours refus�s � consid�rer les
mutuelles comme des partenaires pour g�rer la qualit� des soins. Ils ne
s'y sont r�solus que quand le l�gislateur a cr�� des instances pour la
promotion de la qualit� o� tous les acteurs �taient repr�sent�s, y com-
pris les mutuelles.


24. Waelkens M.P., et B. Criel (2004) pp. 220.


25. Projet de recherche sur le partage du risque maladie.


26. Le projet a permis un certain nombre d'am�liorations de la qua-
lit� des soins : disponibilit� d'une gamme �tendue de m�dicaments,
financement des transports de malades rendant les formations sani-
taires plus accessibles, recours plus rapide � la consultation, r�f�rence
plus rapide � l'h�pital. Mais ce n'�tait pas suffisant.

372 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



27. Waelkens M.P., et B. Criel (2004) Chap. 3 : La perception des
professionnels de la sant�.


28. Les prestataires du centre de sant� ne consid�rent pas non plus la
population comme un interlocuteur valable : � Une masse ignorante et
passive qu'il faut sans cesse encadrer, informer �duquer �.


29. Waelkens M.P., et B. Criel (2004) pp. 217.


30. Waelkens M.P., et B. Criel (2004) pp. 219.


31. Waelkens M.P., et B. Criel (2004) pp. 229.


32. Rappel : le projet a permis un certain nombre d'am�liorations de
la qualit� des soins : disponibilit� d'une gamme �tendue de m�dica-
ments, financement des transports de malades rendant les formations
sanitaires plus accessibles, recours plus rapide � la consultation,
r�f�rence plus rapide � l'h�pital.




BIBLIOGRAPHIE

Blaise, P. 2003. � Measuring quality �. Texte pr�sent� au s�minaire d'�pid�miologie de
     l'Institut de M�decine Tropicale : M�thodes en sant� publique Anvers (13 Mars).

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     Guin�e Conakry. Une exp�rience d'organisation de mutuelles de sant� en Afrique rurale.
     Anvers : Institut de M�decine Tropicale--M�thodes en sant� publique.

Letourmy, A. 1998. Etude pour une strat�gie d'appui aux mutuelles de sant�. Paris : Min-
     ist�re des Affaires Etrang�res.

Waelkens, M. P., et B. Criel. 2004. � Les Mutuelles de Sant� en Afrique Sub-
     saharienne �. HNP Discussion Paper. Washington, DC. : World Bank.

                                                                        CHAPITRE 13



                            L'assureur face � l'h�pital :
                         Questions pour un dialogue

                                                             Eric De Roodenbeke




R�sum� : Apr�s avoir pr�sent� un certain nombre de pr�alables relatifs au
financement, � l'autonomie hospitali�re et au r�le des pouvoirs publics, il est
possible d'engager un solide dialogue entre l'h�pital et l'assureur. Une fois les
pr�-requis �tablis, un cadre analytique permet de passer en revue les questions
essentielles que l'h�pital et l'assureur peuvent se poser lorsque l'assurance ma-
ladie est mise en place.
   Ainsi l'assureur doit se demander � quelle priorit� de sant� publique l'h�pi-
tal r�pond au mieux et dans quelle mesure l'h�pital est efficient et �quitable.
Mais l'h�pital joue aussi un r�le pour les �v�nements catastrophiques de sant�,
pour la fourniture de services publics et pour la formation : toutes ces dimen-
sions doivent �tre prises en compte par l'assureur pour mieux identifier les
b�n�ficiaires des prestations.
   Les h�pitaux offrent une large gamme de services qu'il faut consid�rer pour
d�terminer aupr�s de qui les acheter. La nature des services peut d�pendre du
niveau du prestataire dans la pyramide sanitaire mais aussi du statut de l'�tablisse-
ment tout en consid�rant la productivit� et non seulement les prix propos�s. Il est
aussi int�ressant de s'interroger sur le r�le de l'assurance en tant que prestataire.
   Les modes de paiement ont une influence sur la performance, pour cette rai-
son, leurs avantages et inconv�nients doivent �tre identifi�s. En relation avec le
mode de paiement, la tr�sorerie est une dimension qui ne peut pas �tre ignor�e.
   Quant au prix � payer, des pr�cautions sont n�cessaires lorsque l'on souhaite les
baser sur une estimation des co�ts alors que les syst�mes d'information sont


                                                                                      373

374 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   d�ficients. De plus il peut �tre int�ressant de jouer sur les marges pour favoriser des
   subventions crois�es. L'introduction du ticket mod�rateur doit �tre �valu�e en fonc-
   tion de sa capacit� � limiter l'utilisation excessive sans r�duire l'accessibilit�. Prendre
   en compte le r�le de la subvention est crucial si l'on cherche � atteindre plus de per-
   formance en jouant sur un m�canisme d'achat. Dissocier alors la subvention d'ex-
   ploitation de la subvention en capital conduit � adopter des strat�gies diff�rentes.
      Enfin, pour la r�gulation, il est important que l'h�pital et l'assureur puis-
   sent s'appuyer sur la contractualisation et le contr�le m�dical avant d'opter pour
   l'accr�ditation.


Compte tenu de l'importance du secteur hospitalier dans les d�penses
publiques de sant� et du r�le particulier que joue l'h�pital pour la
prise en charge des �v�nements catastrophiques de sant�1, il est
important de passer en revue les questions que l'assureur2 et l'h�pital3
doivent examiner dans la perspective de la mise en place d'une assu-
rance maladie. Cet ensemble de questions, propos� dans un cadre
logique, couvre le champ des pr�occupations de l'assureur afin de
d�terminer comment il peut mettre en place des r�ponses pour satis-
faire ses objectifs. L'enjeu de cet exercice est aussi de rechercher com-
ment utiliser l'h�pital au mieux de l'int�r�t des b�n�ficiaires tout en
favorisant l'am�lioration de sa performance.
   Si l'attteinte d'une couverture universelle peut constituer un objec-
tif ultime, il est important que les pays d�marrent un processus avec
une mont�e en charge progressive.
   Tout au long de cet expos�, on consid�rera que la recherche de l'in-
t�r�t g�n�ral guide les approches pour identifier les alternatives qui
devront �tre examin�es. Ce principe d'int�r�t g�n�ral est appliqu�
tant vis-�-vis de l'assureur que de l'h�pital, m�me si l'un comme
l'autre doivent aussi faire face � des contraintes de gestion pour
assurer leur viabilit�.
   Cependant pour s'engager en faveur du d�veloppement de l'assu-
rance, un certain nombre de pr� requis m�ritent une attention particu-
li�re. S'ils ne sont pas r�unis, formaliser les relations entre l'assurance et
le secteur hospitalier n'aura pas l'impact escompt�. Dans ce cas, il faudra
d'abord intervenir pour mettre en place les conditions minimales d'un
dialogue favorable entre les trois acteurs incontournables : les assureurs
qui financent les soins, les h�pitaux qui d�livrent des soins et les pouvoirs
publics qui r�gulent le syst�me.

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 375



QUEL ENVIRONNEMENT L�GAL ET INSTITUTIONNEL ?

En finan�ant des soins hospitaliers, les assurances peuvent participer �
l'am�lioration de leur efficience et de leur �quit�. Mais pour cela, il
faut un environnement l�gal et institutionnel r�pondant � un mini-
mum de crit�res favorables dans les domaines du financement, du
statut des h�pitaux et en ce qui concerne le r�le des pouvoirs publics.
De mani�re implicite, quelque soit le statut et le champ de comp�-
tence des acteurs publics et priv�s, il doit �tre possible de dissocier les
fonctions de financement, de production de service et de r�gulation
du syst�me. Ce qui importe c'est davantage l'accomplissement des
fonctions que le statut juridique de l'acteur qui les accomplit. Dans un
pays o� ces trois fonctions seraient entre les mains d'un m�me acteur,
il manquera les m�canismes essentiels pour favoriser les incitations
pouvant am�liorer l'efficience du syst�me de sant�.


Dans le domaine du financement

Il est indispensable que le financement s'inscrive dans un m�canisme
de tiers payant que celui-ci soit du fait d'une institution d'assurance
autonome ou de l'�tat jouant le r�le d'assurance maladie. L'un comme
l'autre peuvent �tre financ�s par des primes individuelles li�es � un
risque et/ou par des recettes fiscales mais l'assureur se comporte
comme un acheteur de services au b�n�fice de la population qu'il cou-
vre. L'assureur doit disposer d'une part significative du financement
de l'offre hospitali�re de mani�re � �tre consid�r� par le secteur hospi-
talier comme un interlocuteur important. Dans un premier temps,
cela peut s'exprimer pour une population limit�e, situ�e principale-
ment en milieu urbain acc�dant facilement aux services hospitaliers.
Cela peut aussi concerner certains risques, pour une population plus
large, mais qui serait alors couverte pour faire face au recours hospitalier.
   Ainsi, en tant qu'acheteur de service, l'assureur doit pouvoir :

� Participer � la d�cision sur la couverture des risques tout en s'in-
   scrivant dans un sch�ma national pr�cisant les risques devant �tre
   obligatoirement pris en charge.

� N�gocier avec les fournisseurs de soins afin d'acheter ce qu'il consi-
   d�re comme le mieux adapt� pour ses b�n�ficiaires.

376 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� Faire des choix dans le cadre de sa strat�gie, des conditions du
   march� et des pressions sociales qui s'exercent sur lui.


   Le terme d'assureur pris sous forme g�n�rique ne sp�cifie pas si une
ou plusieurs personnes morales prennent en charge cette mission.
Dans l'hypoth�se o� la couverture obligatoire est g�r�e par plusieurs
organismes, il est pr�f�rable qu'une f�d�ration puisse assurer le dia-
logue avec l'offre hospitali�re.


Dans le domaine du statut des h�pitaux

Les h�pitaux doivent disposer d'une autonomie minimale tant au
niveau de leur gestion que de leur gouvernance. Le statut peut varier
du priv� commercial au public en passant par le priv� non lucratif, et
l'autonomie ne doit pas obligatoirement �tre totale. Dans de nom-
breux pays, l'autonomie hospitali�re est limit�e quand la gestion des
ressources humaines est contrainte par les r�glementations applicables
aux fonctionnaires.
   Bien qu'une autonomie limit�e en r�duise sa port�e, il restera possi-
ble d'enclencher des m�canismes favorables � l'am�lioration de la
performance, du moment que les h�pitaux disposent d'une libert�
suffisante pour :

� Modifier leur offre de service afin de pouvoir s'adapter aux �volu-
   tions de la demande (gamme de services et de prestations, volume et
   modalit� de distribution).

� N�gocier les prix et modalit�s de paiement avec le tiers payant (sys-
   t�me de prix, niveaux des prix, modalit� de facturation, . . .)

� D�cider comment utiliser au mieux leurs ressources (facteurs de pro-
   duction, y compris le personnel, mais aussi orientation des investisse-
   ments mobiliers et immobiliers).


   Bien qu'autonomes, les h�pitaux peuvent appartenir � des organi-
sations f�d�ratives. L'existence de telles organisations est aussi
importante pour favoriser les relations entre l'assurance et le secteur
hospitalier. Ce n'est pas un pr� requis mais une condition addition-
nelle favorisant le succ�s d'un dialogue sectoriel entre assureurs et
h�pitaux.

                      L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 377



En ce qui concerne le r�le des pouvoirs publics

Que ce soit au niveau national ou d�centralis� (collectivit� territori-
ale), les pouvoirs publics ont une responsabilit� pour la tutelle et l'ac-
compagnement, comme pour la r�gulation du syst�me de soins de
sant�. En autorisant un tiers payant � acheter des services de sant�,
cela ne signifie pas pour autant que les services de sant� soient pro-
pos�s dans le cadre d'un march� libre. Les offreurs comme les
acheteurs doivent respecter un certain nombre de r�gles. Cependant,
appliquer les m�canismes issus du march� apporte de meilleurs r�sul-
tats que les autres syst�mes d'allocation des ressources.
   Ainsi pour rendre pleinement efficaces les m�canismes d'achat de
services, les pouvoirs publics doivent intervenir pour :

� D�finir le niveau d'�quit�, de solidarit� et d'�quilibre social qui doit
   �tre atteint dans le syst�me de sant�.

� �tablir des priorit�s pour les missions des h�pitaux en relation avec les
   priorit�s de sant� publique et les objectifs attendus dans un certain d�lai

� Financer les services de sant� en relation avec les priorit�s sociales et
   sanitaires.


   Il faut aussi garder � l'esprit que les analyses �conomiques sur l'effi-
cience et l'�quit� du syst�me de sant� prennent en compte de mani�re
globale l'offre hospitali�re afin de la comparer � celles des services de
soins de sant� primaire. Une telle approche masque un syst�me com-
plexe (Liu et Mills 2003) qui doit aussi �tre examin� pour am�liorer
l'efficience et l'�quit� des services hospitaliers. Dans un contexte
donn�, certaines alternatives peuvent se r�v�ler plus efficientes pour
un assureur que les mod�les �conomiques ne le montrent en opposant
soins hospitaliers et soins de sant� primaire. Cette approche revient �
dissocier l'acteur hospitalier, qui peut offrir une gamme de prestation,
de la production hospitali�re globale telle qu'elle peut �tre mesur�e �
un moment donn�. Le dialogue entre l'assureur et l'h�pital s'articule
sur la relation entre les acteurs.
   Les pr�-requis �nonc�s pr�c�demment permettent d'envisager
des solutions o� l'un comme l'autre peuvent s'adapter pour
am�liorer leur efficience. Cela exclut de vouloir faire table rase
de l'existant pour proposer une r�ponse, th�oriquement meilleure,

378 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



mais qui ignorerait la dynamique des organisations et des groupes
sociaux.



POUR QUI ACHETER ?

Si l'un des objectifs prioritaires d'une assurance maladie obligatoire est
de r�duire les in�galit�s dans l'acc�s aux soins, il sera alors n�cessaire de
veiller � favoriser les m�canismes pour corriger les disparit�s r�gionales
en privil�giant le financement des populations dans les r�gions mar-
qu�es par une sous-consommation de soins hospitaliers. Une attention
particuli�re peut aussi �tre port�e � des groupes sociaux qui fr�quentent
peu ou trop tardivement l'h�pital avec pour cons�quence surmorbidit�
et/ou surmortalit�. Une telle approche privil�gie le ciblage d'individus
ou groupes d'individus pour leur garantir un meilleur acc�s aux services
hospitaliers. L'assureur r�pond � la question pour qui acheter en inter-
venant plut�t du c�t� de la demande. Il s'inscrit dans une approche
ex-ante dans laquelle il garantit des soins pour une population dont les
individus sont identifi�s au d�part, qu'ils utilisent ou non les services
que l'assureur couvre.
   En relation avec les objectifs du mill�naire pour le d�veloppement
(OMD), il serait logique de donner priorit�s aux services de maladies
infectieuses ainsi qu'� ceux pour la m�re et l'enfant. Dans les pays en
d�veloppement caract�ris�s par une forte croissance d�mographique,
ces services regroupent entre la moiti� et deux tiers des utilisateurs de
l'h�pital. En abordant la question pour qui acheter en s'int�ressant
aux pathologies dont il faut r�duire l'impact, l'assureur va plut�t inter-
venir aupr�s de l'offre afin de s'assurer de la disponibilit� du service
pour la personne qui en a besoin. Son intervention est ex-post en
relation avec la consommation effective de certains services bien iden-
tifi�s. Des conditions additionnelles peuvent ensuite d�finir des
modalit�s diff�renciant les populations qui peuvent en b�n�ficier.
   Ces deux approches, davantage compl�mentaires que concurrentes,
s'appuient sur la connaissance de la situation actuelle de l'utilisation des
services hospitaliers pour permettre de cibler au mieux le couple popu-
lation et pathologies. En s'orientant dans cette direction, il est admis
implicitement que l'assureur doit participer aux objectifs prioritaires de
sant� d�cid�s par les pouvoirs publics. Le m�canisme d'assurance ne se
r�sume pas en une relation entre cotisant et b�n�ficiaire, comme cela

                      L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 379



serait le cas pour une assurance priv�e volontaire. Dans un syst�me d'as-
surance maladie obligatoire, le b�n�ficiaire ne choisit pas n�cessaire-
ment d'�tre prot�g� et il ne cotise pas obligatoirement. Ainsi la r�ponse
� la question pour qui faut-il acheter des soins ne se r�sume pas � ceux
qui sont en mesure de payer une cotisation. Dans certains pays, la cr�a-
tion d'une assurance maladie obligatoire s'appuie sur l'existence de popu-
lations solvables du secteur priv� formel ou public (fonctionnaires). Si
cela peut constituer un point de d�part historique, cela ne peut con-
stituer une strat�gie de d�veloppement en relation avec des objectifs
d'�quit� et de sant� publique dans un cadre d'int�r�t g�n�ral.
   Afin de mieux cerner les b�n�ficiaires d'une assurance maladie
obligatoire, en reprenant le double objectif d'accro�tre l'�quit� et de
mieux r�pondre aux priorit�s de sant� publique, l'assureur prendra en
consid�ration des crit�res additionnels pour d�cider des b�n�ficiaires
qu'il faut couvrir en priorit�.
   Pour augmenter l'�quit� du syst�me de soins hospitaliers, l'assureur
portera son attention sur :

� Les diff�rences g�ographiques : un effort particulier peut permettre
   de prendre en compte les populations �loign�es ou ayant un acc�s
   physique limit�

� Les diff�rences socio-�conomiques : des groupes sp�cifiques peuvent
   �tre cibl�s pour accro�tre leur utilisation des h�pitaux.

� Les diff�rences socio-d�mographiques : un effort particulier peut
   �tre fait pour inclure des groupes en fonction du genre et de l'�ge (en
   particulier pour la sant� maternelle et infantile)


   Pour mieux int�grer les priorit�s de sant� publique, l'assureur
portera son attention sur :

� La nature des maladies. Les principales maladies infectieuses con-
   stituent un exemple de cible pour le financement de l'offre en rendant
   la vaccination et les autres services utiles imm�diatement disponibles

� La nature des services de soins. En particulier en diff�renciant son
   intervention selon que le service r�ponde � des �pisodes aigus ou
   chroniques, ou de degr� d'urgence variable vis-�-vis du pronostic vital.


   L'assurance aura un impact maximal si les objectifs tiennent bien
compte de la situation actuelle. C'est pour cette raison qu'il est important

380 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



de pouvoir disposer d'une bonne connaissance de la situation de d�part et
des priorit�s poursuivies. Le choix des b�n�ficiaires pourra se faire ensuite
au travers de la grille de lecture : pathologie/population � �quit�/priorit�s
de sant� publique.



QUELLES PRESTATIONS ACHETER ?

R�pondre � la question : quelle prestation acheter ? Cela revient
implicitement � consid�rer que l'assureur mobilise ses ressources pour
financer la r�alisation de ces prestations. La r�ponse n'est cependant
pas simple car il doit passer en revue ce qu'il souhaite privil�gier car
des approches alternatives mais pas n�cessairement exclusives lui sont
offertes : (i) favoriser des activit�s prioritaires de sant� publique,
(ii) viser les services hospitaliers les plus efficients, (iii) couvrir les gros
risques, (iv) assurer les services publics essentiels, (v) participer � la
formation des professionnels de sant�, (vi) prendre en charge les �vacu-
ations. En se positionnant vis-�-vis de ces alternatives, l'assureur
p�sera de mani�re importante sur des aspects essentiels pour la per-
formance du syst�me de sant�.
   Dans les pays en d�veloppement, les h�pitaux sont rarement en
mesure de soigner les patients avec des r�sultats conformes � leurs
attentes l�gitimes en relation avec l'�tat actuel de la m�decine. Ainsi sou-
vent les pouvoirs publics devront contribuer � am�liorer l'offre hospita-
li�re pour que celle-ci soit en mesure d'offrir les prestations demand�es
dans des conditions permettant de les r�aliser avec succ�s. Cela implique
souvent d'investir pour renforcer l'outil de production tant au niveau
physique (mat�riel et locaux) qu'humain (comp�tences, qualit� et quan-
tit� des personnels) afin de le rendre cr�dible vis-�-vis des populations.
De tels investissements ne produisent leurs effets qu'au bout de plusieurs
ann�es, ainsi il est particuli�rement important de mettre en phase l'inter-
vention des pouvoirs publics pour renforcer la cr�dibilit� de l'offre hos-
pitali�re avec les prestations identifi�es par l'assureur comme prioritaire.


Renforcer le r�le de l'h�pital pour r�pondre aux priorit�s
de sant� publique ?

En lien avec les OMD sur la sant� maternelle et infantile, il serait
logique de renforcer le r�le que joue l'h�pital pour soutenir les services

                     L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 381



de base. Ainsi l'identification et le suivi des grossesses � risque peuvent
�tre privil�gi�s pour les populations r�sidant dans l'aire d'attraction des
h�pitaux. La capacit� de prendre en charge rapidement les �vacu�es
constitue une autre possibilit� pour mieux fixer l'activit� hospitali�re
sur ces priorit�s.
   Les maladies transmissibles constituent un second axe important
pour orienter l'activit� des h�pitaux en relation avec les OMD. Cela
concerne en particulier le paludisme pour les enfants de moins de 5
ans dont la mortalit� r�sulte souvent d'un recours trop tardif et de
l'absence de l'�vacuation des cas s�v�res pouvant uniquement �tre pris
en charge au niveau hospitalier.
   Enfin la lutte contre le sida constitue une grande priorit� pour
laquelle l'h�pital peut jouer un r�le essentiel. La mise de patients sous
anti r�tro viraux (ARV) et leur suivi clinique et psycho-social
mobilisent des ressources tr�s importantes. Les h�pitaux ont un d�fi �
relever afin d'organiser cette prise en charge. Pour l'assureur il s'agit
d'int�grer cette pathologie dans la strat�gie globale de financement
alors qu'actuellement des fonds sp�cifiques sont mobilis�s dans un
cadre particulier.
   Ce panorama rapide permet d'orienter le dialogue entre h�pital et
assureur sur les pathologies � prendre en charge afin de renforcer les
efforts pour obtenir des r�sultats sur les priorit�s de sant� publique en
lien avec les OMD.


Miser sur les services hospitaliers les plus efficients ?

Quand les ressources sont rares, se pr�occuper d'efficience appara�t
encore plus l�gitime. Une approche co�t/efficacit� permet de priv-
il�gier les �tablissements et/ou services qui fournissent les meilleurs
services dans le cadre d'une contrainte de co�t. Ainsi des travaux
ant�rieurs ont montr� (Banque mondiale 1994) que les h�pitaux de
district �taient d'un bon rapport co�t/efficacit� pour r�pondre aux
besoins de r�f�rence pour les pathologies les plus fr�quentes en
Afrique Sub-saharienne.
   Pour les services d'hospitalisation l'approche co�t/efficacit� pren-
dra en compte le r�le sp�cifique des h�pitaux de diff�rents niveaux
(district, r�gion, national). Pour les services ambulatoires, l'efficacit�
se mesurera au travers de l'ad�quation entre comp�tences et complexit�
des pathologies.

382 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   En favorisant une meilleure utilisation des services hospitaliers, on
participe � la recherche d'une am�lioration de la productivit� des
h�pitaux. De plus il peut �tre pr�f�rable de s'appuyer sur une struc-
ture existante plut�t que d'en d�velopper une nouvelle, m�me
lorsqu'il s'agit de proposer des soins de base. Ainsi pour une zone
donn�e, le co�t global pour les populations couvertes devrait guider le
choix de l'assureur. Compte tenu des caract�ristiques historiques de
l'offre de service, le choix devrait intervenir au niveau du district de
sant�. Un sch�ma national peut entra�ner des effets pervers car des
co�ts unitaires th�oriquement bas pour une alternative peuvent con-
duire � des co�ts globaux sup�rieurs du fait de duplication de struc-
tures insuffisamment utilis�es.
   Il r�sulte de ces r�flexions qu'il serait hasardeux d'�carter a priori
certains services hospitaliers mais qu'il est pr�f�rable d'aborder la
recherche de l'efficience au niveau du district en favorisant des solu-
tions visant � augmenter la productivit� des services existants, y com-
pris hospitaliers, plut�t que d'en cr�er de nouveaux.


Quelle place pour les gros risques pris en charge
en milieu hospitalier ?

Les gros risques peuvent ne pas �tre consid�r�s comme prioritaires car
ils ne touchent qu'une infime partie de la population. Mais pour les
individus concern�s ces gros risques constituent une priorit� majeure
car ils ne disposeront pas des ressources pour y faire face. La couver-
ture des gros risques, induit peu de risque de surutilisation, en revanche
pour limiter l'al�a financier sur la r�alisation du risque la population
couverte doit �tre importante. En choisissant de prot�ger contre le
petit risque, l'assureur doit faire face � une forte pression de surutilisa-
tion, mais il ma�trise son al�a financier avec une population de taille
moyenne. Pour orienter la strat�gie il faut aussi prendre en compte la
nature de la pathologie.
   Pour les pathologies aigues, le gros risque correspond le plus sou-
vent � des situations d'urgences dont le caract�re vital peut justifier
d'en faire une priorit� m�me si les co�ts sont �lev�s. Les exclure de la
couverture devient une pr�occupation �thique quand il existe une forte
probabilit� de pronostic favorable. Si la neuro-chirurgie est disponible
est ce que les riches seraient les seuls � en b�n�ficier alors que les plus
pauvres sont davantage touch�s par les accidents de circulation ?

                      L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 383



  Pour des maladies �volutives, la d�cision est plus difficile. Le co�t
de la prise en charge est �lev� et la demande augmente du fait de la
transition �pid�miologique. Les pays en d�veloppement ne peuvent
traiter toutes ces pathologies avec les derniers traitements disponibles.
En faisant des choix, il faudra exclure certaines pathologies bien que
constituant un gros risque du fait du co�t du traitement (cancer,
insuffisance r�nale, . . .). Le co�t du traitement en relation avec le
pronostic aidera un comit� national qui devrait �tablir une liste r�vis-
able des pathologies prises en charge par l'assurance.
  Si l'assurance vise � apporter de la protection et non pas seulement
une couverture de base alors les gros risques relevant de pathologies
aigues devraient �tre syst�matiquement couverts. Cette option peut
n�cessiter de pr�voir un syst�me de r�assurance si l'assureur intervient
au niveau d'un district ou pour une petite population. La couverture
du gros risque peut am�liorer significativement la r�f�rence vers
l'h�pital mais il faudra bien en pr�ciser les limites, soit par voie con-
tractuelle, soit par une r�glementation.


Financer l'offre hospitali�re de services publics
essentiels de sant� ?

Les h�pitaux fournissent des services de sant� aux individus mais aussi
pour la communaut�. Par certains aspects l'h�pital est comme un
service de lutte contre l'incendie. On esp�re ne pas en avoir besoin
mais sa pr�sence rassure la communaut�. Si l'h�pital, en tant qu'insti-
tution, peut �tre assimil� � un service public essentiel de sant�, toute
une partie de son activit� rel�ve d'une logique de consommation indi-
viduelle. Il faut donc pouvoir identifier la part des co�ts hospitaliers
qui rel�ve d'une logique individuelle et celle qui rel�ve du collectif.
  Les h�pitaux peuvent recevoir des subventions pour financer leur
mission de service public, mais en l'absence de comptabilit� analytique
dans la plupart des pays, il est difficile de v�rifier si ces ressources sont
bien mobilis�es pour la production de ces services. Une approche
pourrait consister � mobiliser les ressources publiques pour fiancer les
co�ts fixes alors que l'assurance financera plut�t les co�ts variables
pour le traitement sp�cifique � chaque individu.
  Il n'existe pas de r�gles pr�-�tablies pouvant garantir d'une bonne
r�partition du financement en fonction de la nature publique ou
priv�e de la prestation. Mais quand l'assurance n'est pas le seul

384 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



bailleur de l'h�pital, il devra �tre bien pr�cis� comment la dimension
de service public essentiel de sant� sera financ�e. L'h�pital sera
responsabilis� pour la mise en oeuvre de ces services et en particulier
les urgences et la permanence m�dicale qui l'accompagne.


Participer � la formation des professionnels de sant� ?

La formation des professionnels de sant� est une des missions de
l'h�pital. L'impact de cette mission sur les co�ts de fonctionnement
n'est pas bien identifi�. Le surco�t de la formation se mesure � la fois
par une moindre productivit� du personnel titulaire (temps consacr� �
l'encadrement) et une potentielle augmentation des co�ts de traite-
ment (les stagiaires prescrivent plus pour limiter les risques). Si insti-
tutionnellement, la fonction de formation n'est pas r�mun�r�e, il y a
un risque d'usage inappropri� des comp�tences : stagiaires faisant le
travail de titulaires et titulaires n'encadrant pas les stagiaires.
   On peut estimer que cette charge devrait �tre support�e par le
budget de l'�ducation nationale. Mais, dans un contexte d'insuffisance
chronique de ressources dans ce secteur, investir dans la formation
contribue � am�liorer la qualit� future des prestations. Cette remar-
que vaut aussi pour la formation continue qui permet d'am�liorer les
comp�tences des personnels.
   L'assureur doit r�fl�chir sur les modalit�s de prise en compte de l'ef-
fort fait par l'h�pital pour former les ressources humaines. Il peut con-
sid�rer que la formation fait partie des co�ts de production qu'il
finance en payant la prestation, mais il peut aussi favoriser la formation
en allouant des ressources sp�cifiques � l'h�pital pour la formation ini-
tiale et continue de son personnel.


Prendre en charge le transport pour acc�der � l'h�pital ?

M�me quand les soins sont gratuits, le transport peut exclure les pop-
ulations, le plus souvent pauvres, habitant dans les zones �loign�es.
L'absence de financement r�duit aussi la recherche de solutions pour
son organisation. Le r�flexe consistant � demander une ambulance
aupr�s de chaque centre de sant� ne participe pas � une gestion
rationnelle des ressources. Dans la majeure partie des cas, des trans-
porteurs priv�s pourraient assurer ces transports dans des conditions
acceptables si leur financement �tait assur�.

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 385



   Par ailleurs, pour des populations dispers�es, organiser le transport
vers des services hospitaliers ou financer des strat�gies avanc�es vers
les dispensaires renforce � la fois l'efficacit� des services de base et la
pertinence des r�f�rences.
   Pour les h�pitaux, si l'assurance prend en charge les transports, il
sera utile de voir s'il est pr�f�rable qu'il organise un service pour y
r�pondre ou si c'est plus judicieux de mobiliser un partenaire priv�.
Dans ce dernier cas de figure, il restera � r�glementer � minima les
conditions dans lesquelles s'effectuent les transports sanitaires.


Aupr�s de qui acheter les services hospitaliers ?

Si l'on choisit d'acheter des services hospitaliers de base pour les popu-
lations les plus isol�es, il est assez �vident que l'h�pital de district
constituera la r�ponse ad�quate. Mais compte tenu des combinaisons
de r�ponses possibles aux questions pr�c�dentes, il reste utile de s'in-
terroger sur le niveau de soins le plus appropri� pour l'assureur.
   Quelque soit le niveau de soins, la nature du statut de l'h�pital
doit aussi �tre pris en compte. Selon les pays, il y a plus ou moins
possibilit� de choix mais l'h�pital public est rarement en situation de
monopole. Enfin, il faut s'interroger sur l'int�r�t � privil�gier l'achat
aupr�s d'un tiers plut�t que de mettre en place soi-m�me une offre
de soins. Cette interrogation peut para�tre en partie contradictoire
avec les pr�alables institutionnels s�parant bien les fonctions d'as-
sureur de celles de prestataires. L'existence d'h�pitaux relevant de
caisses d'assurance maladie obligatoire pousse toutefois � revenir sur
cette question.


Quel niveau de soins pour quels services ?

Dans beaucoup de pays l'offre hospitali�re se d�cline th�oriquement
sur 3 niveaux, alors que dans les faits il existe deux niveaux pleinement
op�rationnels :

� Les h�pitaux assurant la r�f�rence des services de soins de sant� primaire. Il
   s'agit de l'h�pital de district qui appuie les services de sant� de base.
   Son r�le et ses fonctions sont largement document�s (OMS 1992) et
   sa contribution au syst�me de sant� a �t� �tudi�e depuis longtemps
   (OMS 1987, Banque mondiale 1994).

386 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� Les h�pitaux assurant la r�f�rence des services hospitaliers de premi�re ligne.
  De tels �tablissements peuvent �tre aussi bien class�s comme h�pitaux
  r�gionaux (CHR) ou d�nomm�s CHU ou h�pitaux nationaux (HN).
  Les services tr�s sp�cialis�s existants au niveau des CHU ou HN ne
  modifient pas fondamentalement leur fonctionnalit� dans le syst�me
  hospitalier, car ces services ne concernent qu'une activit� marginale
  dans la production de ces �tablissements.


  Pour l'assureur, cette distinction est importante car elle lui permet
d'adopter une strat�gie pour le financement des services de sant�. En
fonction du niveau, la nature des soins pris en charge ou l'importance
de la couverture peuvent varier. Cependant dans beaucoup de pays,
m�me une classification en 2 niveaux n'est pas toujours �vidente car
certains h�pitaux de niveau 1 d�passent � peine ce qu'offrent des dis-
pensaires renforc�s alors que certains �tablissements de niveau 2 sont
� peine sup�rieurs � un h�pital de district.
  Mais cette distinction n'est pas suffisante car, quelque soit le niveau
de soins, il existe des prestations que l'on peut qualifier de sp�cifiques
pour les h�pitaux, alors que d'autres ne le sont pas. Ainsi pour une
large part de l'activit� de diagnostic (imagerie, analyses, explorations,
avis sp�cialis� . . .) il y a une alternative entre l'h�pital et les cabinets
priv�s. Enfin certaines sp�cialit�s particuli�res peuvent n'exister qu'�
l'h�pital du fait des comp�tences requises et/ou de l'�quipement
n�cessaire. Un classement peut �tre �tabli pour mieux cerner ce qui
peut relever de qui. Ensuite l'assureur devra pr�ciser s'il accepte que le
prestataire de niveau sup�rieur d�livre des soins qui peuvent �tre
assur�s � un niveau inf�rieur. Si oui, la question du prix (voir infra)
deviendra essentielle pour influencer le lieu de production.


Quelle place donner au secteur priv� ?

La place du secteur priv� varie beaucoup d'un pays � l'autre, mais dans
tous les pays il existe une offre priv�e au niveau du district et dans les
grandes villes.
  Dans certains pays (Ghana, Cameroun, . . .) le secteur confession-
nel est important. Si les soins sont souvent reconnus de bonne qualit�,
les tarifs sont en g�n�ral plus �lev�s que dans le secteur public. Cela
peut s'expliquer par les subventions qui b�n�ficient moins au priv�
qu'au public. L� o� il existe une alternative entre le secteur public et le

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 387



secteur priv�, l'assureur ne devrait pas uniquement consid�rer le prix
des prestations mais aussi la productivit� des h�pitaux. Une premi�re
approche peut s'appuyer sur une comparaison de la productivit� globale
du facteur travail (personnel/activit�) et de la productivit� du capi-
tal mobilis� pour l'hospitalisation (taux d'occupation, dur�es de s�jour
et admissions). Lorsque la productivit� est sup�rieure dans le priv�, il
serait d�sastreux que la mise en place d'un syst�me d'assurance con-
duise � la faillite les h�pitaux avec la meilleure productivit� sous pr�-
texte que leurs tarifs sont plus �lev�s car non subventionn�s par
ailleurs.
   Le d�veloppement de l'assurance maladie obligatoire peut �tre
per�u comme une opportunit� pour les cliniques commerciales. Il sera
alors important de ne pas perdre de vue les objectifs de sant� publique
et d'am�lioration de l'�quit�. Il ne serait pas acceptable que le finance-
ment de l'assurance maladie obligatoire favorise l'augmentation des
profits sur les activit�s de sant�.
   Il n'est pas possible d'affirmer qu'une forme ou une autre de pro-
pri�t� favorise plus ou moins la performance globale des services
hospitaliers. Compte tenu des diff�rences dans leurs objectifs, les
comparaisons sont difficiles car elles reposent sur les crit�res choisis
en amont (Reisa 2002). Ainsi l'assureur ne devrait pas exclure a priori
un type d'�tablissement sur le crit�re de son statut, il devra examiner,
en fonction de la prestation et du mode de paiement, l'�tablissement
qui r�ponde le mieux aux besoins des assur�s. En se situant dans une
perspective � moyen terme, il peut avoir des politiques diff�rentes
pour l'achat de services selon l'importance qu'il accorde � la produc-
tivit� des �tablissements o� il se fournit.


La fourniture de services par l'assureur lui-m�me

Il est globalement impossible de d�montrer que des syst�mes de soins
int�gr�s sont plus performants que des syst�mes dans lesquels les
fonctions d'assurance et de fourniture de service sont s�par�es.
Cependant la faible qualit� des soins propos�s peuvent limiter le
d�veloppement de l'assurance maladie, comme en t�moigne certaines
exp�riences en relation avec le mouvement mutualiste (Audibert,
Mathonnat, de Roodenbeke, 2003). De plus proposer des soins peut
aussi se concevoir quand l'assureur souhaite r��quilibrer un march�
o� les offreurs sont en position trop dominante.

388 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Pour entrer dans le march� hospitalier les co�ts sont tr�s �lev�s et les
retours sur investissement sont longs. Dans les pays o� des organismes
d'assurance poss�dent des h�pitaux, le choix d'investissement a
rarement �t� guid� par la rationalit� �conomique, elle a plut�t r�pondu
� une logique de prestige alors que l'assureur disposait d'importants sur-
plus. La tendance actuelle est de dissocier la production de soins de la
pure fonction d'assurance afin d'�viter que l'assurance finance le d�ficit
structurel d'un h�pital au d�triment de la couverture des ayants droit.
   En revanche, il peut �tre tentant pour l'assureur de d�velopper des
services ambulatoires � faible co�t d'investissement mais qui peuvent
fortement concurrencer un h�pital dominant et ou se substituer � une
offre d�faillante. Sans pouvoir proposer une solution d�finitive, il sem-
ble pr�f�rable que cette alternative reste un instrument du dialogue
avec l'offre plut�t qu'une solution de premi�re intention. De plus le
contr�le m�dical sous la responsabilit� de l'assureur permet aussi de
n�gocier en des termes qualitatifs l'offre hospitali�re, cela peut con-
stituer une alternative pour faire face � un h�pital dominant.



COMMENT PAYER L'H�PITAL ?

Dotation budg�taire

Ce mode de financement pr�sente un int�r�t lorsque l'assureur inter-
vient pour la majeure part des ressources de l'h�pital. En effet en limi-
tant les ressources, sans pour autant r�duire ses missions ni le niveau
d'activit� attendu, l'h�pital recherche des gains de productivit�
pour d�velopper de nouvelles activit�s ou pour int�grer l'augmenta-
tion du prix de ses facteurs de production. Mais si la dotation n'est pas
mise en place avec une clause d'activit� minimale et que la concur-
rence est absente, alors elle induit des effets pervers : pas d'incitation �
l'innovation et � l'am�lioration de la qualit� et tendance � limiter l'ac-
tivit� si les co�ts de production augmentent. La dotation globale ne
facilite pas la comparaison entre �tablissements et la d�termination du
juste prix � payer.
   Dans le contexte des pays d'Afrique sub-saharienne o� l'assurance
maladie obligatoire n'est envisag�e que pour une population limit�e,
le principe de versement d'un financement global reviendrait � la
logique de capitation qui est d�crite ci-dessous.

                      L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 389



Paiement � l'activit�

Selon les pays les formules de paiement � l'activit� varient en fonction
de la nature des prestations couvertes et des modalit�s de paiement.
Dans tous les cas le paiement � l'activit� est reconnu comme ayant une
plus grande port�e incitative que les syst�mes de budget global.
   Pour les h�pitaux des pays en d�veloppement les formules de
paiement � l'activit� assurent le plus souvent une flexibilit� tant pour
la gestion de la tr�sorerie que pour les modalit�s d'achat que les fonds
de la subvention publique n'autorisent pas.
   Quelque soit le bar�me de prix, il est aussi important qu'il puisse y
avoir une incitation en fonction de la prestation d�livr�e pour �viter
que les h�pitaux en cherchant � r�duire les co�ts de production pour
augmenter leurs marges ne le fassent au d�triment de la qualit�.
   Ainsi, pour que cet instrument serve les objectifs de l'assureur, il
doit permettre :

� une n�gociation pour payer le minimum pour un certain niveau de
   qualit�

� de ne payer que les services d�livr�s aux assur�s sociaux (risque de
   surfacturation)

� d'�viter d'exclure les pauvres (implique de subventionner l'assureur
   qui couvre des populations qui ne cotisent pas)

� �tre simple � mettre en oeuvre (syst�me d'information souvent trop
   limit� pour s'engager au paiement par cas ou groupe homog�ne de
   malades � GHM).


   Si le syst�me de paiement selon l'activit� pr�sente de nombreux avan-
tages tant pour l'assureur que pour l'h�pital, il ne prend en compte
qu'une partie des missions de l'h�pital. Il faut un autre mode de finance-
ment, en particulier pour l'offre de services publics essentiels. De plus
pour des activit�s de soutien au syst�me tels que la formation ou la
supervision, il faut d�finir des param�tres sp�cifiques pour les financer.


Le syst�me par capitation

Ce syst�me, qui peut se combiner avec le paiement � l'activit�, incite
l'h�pital � enregistrer le plus de b�n�ficiaires possible. Cela peut �tre

390 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



un fort incitatif pour am�liorer la qualit� de service lorsque les patients
disposent d'alternatives et qu'ils ont l'initiative de leur enregistrement.
La capitation est particuli�rement recommand�e pour des prestations
qui impliquent un suivi et pour lesquels il y a peu d'incertitude sur les
co�ts. Le suivi pr�natal est un bon exemple de ce type de prestation
sous r�serve que le service rendu soit bien d�crit et que des prestations
additionnelles puissent �tre factur�es. En revanche pour couvrir une
population limit�e, y compris pour des gros risques, la capitation intro-
duit trop d'incertitudes tant du cot� de l'assureur que de l'h�pital : l'un
ou l'autre a de forte chance d'�tre perdant, � moins d'envisager des
m�canismes correctifs qui complexifient le montage.
   Si la concurrence est faible, la capitation peut entra�ner des effets
pervers car les h�pitaux n'auront pas int�r�t � d�velopper la qualit� de
service pour ce qui s'assimile � une rente. Pour faire face � de tels
comportements l'assureur doit pouvoir refuser de payer un service
jug� en dessous du niveau attendu.
   Dans tous les cas, un syst�me par capitation implique un contrat
entre assureur et h�pital pour pr�ciser les modalit�s de d�livrance du
service et de paiement. La capitation ne peut pas couvrir toutes les
activit�s de l'h�pital si l'on veut que le syst�me de paiement participe �
l'am�lioration de la performance hospitali�re.


Cons�quences du syst�me de paiement sur la tr�sorerie
et l'organisation de la facturation

Les h�pitaux disposent imm�diatement des ressources lorsque les
patients paient au point de service. Avec un tiers payant les h�pitaux
peuvent b�n�ficier d'une client�le additionnelle du fait de la r�duction
de la barri�re financi�re pour l'acc�s aux soins. Si les h�pitaux deman-
dent au patient de payer puis de se faire rembourser, cela pr�serve sa
capacit� de tr�sorerie mais dresse une barri�re � l'acc�s. Rien n'incite
non plus l'h�pital � renseigner promptement l'assureur qui voudra
contr�ler la r�alit� de la prestation. Pour le paiement � l'activit�, fac-
turer l'assureur est la seule alternative raisonnable dans les pays en
d�veloppement, mais cela impliquera que l'h�pital v�rifie si le patient
dispose d'une prise en charge. Il devra s'organiser pour suivre la fac-
turation aupr�s de l'assureur.
   Si le syst�me d'assurance est complexe (multiples organisations),
l'h�pital devra investir pour rendre performant son syst�me de

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 391



recouvrement des cr�ances. Le passage d'une situation, o� les ressources
sont per�ues directement au point de service, � un tiers payant qui r�gle
les factures avec un diff�r�, peut mettre en p�ril l'h�pital. Dans ce cas, il
importe que l'assureur verse un acompte p�riodique qu'il r�gularisera
avec la facturation. Le co�t de la mise en place d'un syst�me de factura-
tion devra �tre financ� soit au travers du recouvrement (prix du service
incluant cette charge) aupr�s de l'assureur, soit par une subvention.
   Le syst�me de capitation avec versement mensualis�, ajust� en
fonction de l'�volution des b�n�ficiaires, est celui qui assure la
meilleure tr�sorerie � l'h�pital, mais son application (cf. supra) restera
limit�e � certaines prestations.



QUEL PRIX PAYER ?

Si les prix sont administr�s, la seule marge de manoeuvre reposera sur
la possibilit� de remise ou de facturation de prestations suppl�men-
taires hors du cadre des prix administr�s.


Estimation du co�t des services ?

Il serait logique que l'assureur paie les services en fonction de ce qu'ils
co�tent. Une telle approche est une forte incitation pour am�liorer la
productivit�. Mais il ne faut pas minimiser la difficult� � estimer les
co�ts dans le contexte d'une indigence des services de gestion et de
faible fiabilit� des syst�mes d'information. S'il est particuli�rement
difficile d'�tablir le co�t par �pisode (Shepard et al. 2003), il est tou-
jours possible de conduire une �tude ponctuelle pour estimer le co�t
des principales activit�s d'un h�pital. Mais de telles �tudes sont davan-
tage adapt�es � la mise en place d'incitations � la performance au
niveau de l'�tablissement (Nusau 2003) que pour d�finir un syst�me
de prix applicable au niveau national.
   Dans un tel contexte, aligner brutalement les remboursements de
l'assurance sur le r�sultat d'un calcul de co�t peut avoir un impact
d�sastreux pour les h�pitaux, en particulier dans un contexte o� le
financement est largement mal identifi� et qu'il b�n�ficie de l'aide
internationale.
   L'introduction de l'assurance doit inciter � d�velopper des �tudes de
co�ts dans les h�pitaux, en adoptant une d�marche progressive d�butant

392 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



par une analyse plus syst�matique des co�ts variables directs (consomma-
bles) et indirects (fluides, entretien, . . .) puis des co�ts semi-variables
avec une attention particuli�re aux ressources humaines et enfin abor-
dant la ventilation des co�ts fixes (mobilier et immobilier). Dans la plu-
part des pays, l'investissement est actuellement essentiellement constitu�
par de l'apport direct soit de l'�tat (Budget Commun d'Investissement)
soit par les dons de certains bailleurs. Une p�riode de transition s'impose
avant que les investissements puissent �tre support�s par le financement
courant via la couverture de la charge de l'amortissement et du recours �
l'emprunt.
   Mais, m�me si l'estimation des co�ts des services se r�v�le difficile,
cela ne doit pas emp�cher de d�buter un syst�me de paiements. En
effet, l'assureur comme l'h�pital peuvent utiliser le syst�me de prix
pr�existant tout en suivant les cons�quences de l'intervention d'un tiers
payant. L'h�pital devra suivre de mani�re pr�cise son activit� et pos-
s�der une comptabilit� retra�ant l'�volution de ses recettes et d�penses
afin de mesurer l'impact de l'intervention de l'assureur. Pour l'assureur,
une analyse co�t/efficacit� permettrait de mieux affiner une strat�gie de
couverture entre niveau et type de prestataires et de prestations.


Politique de marge et logique de subvention crois�e

M�me si une analyse des co�ts permet d'identifier des prix de revient,
il n'est pas n�cessairement souhaitable que le tarif refl�te le co�t.
L'h�pital assure la prise en charge de gros risques et dans le cas d'une
assurance maladie qui ne couvre qu'un petit groupe de population,
payer au prix de revient peut impliquer des cotisations �lev�es qui ren-
dront l'assurance impopulaire. Pour la population non assur�e, si la
tarification est �tablie au niveau du prix de revient alors l'acc�s sera
quasi impossible et en tout cas il sera un puissant facteur de pauvret�
s'il oblige � vendre les biens et/ou l'outil de production. Un syst�me
de double tarif (assurance tarif�e au prix de revient et particuliers
payant un prix subventionn�) peut introduire des m�canismes pervers
poussant l'assurance � rembourser le particulier plut�t que de pro-
poser une prise en charge � un tarif prohibitif.
   Quand les tarifs incluent une marge positive sur les petits risques mais
repr�sentant une activit� importante et que les gros risques sont factur�s
bien en de�� du prix de revient alors l'h�pital pratique des subventions
crois�es entre les patients. Une telle approche implique que l'h�pital ne

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 393



soit pas exclu du remboursement pour les petits risques car sinon il aura
int�r�t � limiter les activit�s d�ficitaires du point de vue des tarifs pour se
placer sur le march� des soins non couverts par l'assurance.
   Avant de jouer sur les marges, il est utile de s'interroger aussi sur la
nature du service. Pour des services entrant dans les priorit�s de sant�
publique, la mise en place de marge positive peut augmenter l'iniquit�
d'acc�s. Ainsi la politique de tarification devrait combiner la notion de
risque et de nature de service pour optimiser l'impact des subventions
crois�s en faveur des gros risques et des activit�s prioritaires.


Que faire avec les subventions ?

Dans des pays o� la majeure partie des facteurs de production est sub-
ventionn�e, la politique tarifaire est souvent davantage li�e aux co�ts
des consommables qu'au prix de revient total de la production. La
mise � plat de tout le syst�me de subvention appara�t incontournable
pour pousser les h�pitaux vers plus de performance. Cependant, les
approches peuvent varier selon qu'il s'agisse de l'exploitation ou des
investissements.
   Une premi�re �volution possible serait de passer d'une subvention
d'exploitation pour les facteurs de production � une subvention sur la
production elle-m�me. Cette modalit� permet de subventionner les
gros risques afin que l'assureur paie les petits risques en relation avec
le prix de revient et b�n�ficie de tarifs inf�rieurs aux prix de revient
pour les gros risques. Dans ce cadre, les h�pitaux quelque soit leur
statut, devraient �tre subventionn�s du moment qu'ils peuvent justifier
d'une activit� pour ces risques. Il faut noter qu'en passant d'une sub-
vention des facteurs de production � une subvention sur la production,
l'�tat se rapproche de l'assureur. Comme lui, il ach�te des services �
l'h�pital et les questions �nonc�es pour l'assureur lui sont largement
applicables. Une p�riode de transition sera in�vitable pour passer
d'une modalit� � l'autre. A terme, il sera sans doute pr�f�rable que
l'ensemble des ressources transite par un seul canal, celui de l'as-
sureur. Cela semble n�cessaire pour plus de coh�rence et pour limiter
les co�ts de transaction.
   L'investissement rel�ve le plus souvent de l'autorit� du minist�re de la
sant� g�n�ralement avec une contribution des bailleurs internationaux.
Avec la d�centralisation, les communaut�s territoriales deviennent aussi
des acteurs. Enfin, l'h�pital attire aussi des financements priv�s car il

394 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



apporte une visibilit� imm�diate pour des acteurs en mal de reconnais-
sance sociale. Dans ce contexte, avant que l'assureur ne participe au
financement des investissements, il serait important qu'il y ait un r�gime
d'autorisation imposant un minimum de r�gles pour rationaliser les
investissements immobiliers (le lieu, la nature et les surco�ts induits). Les
�volutions des modalit�s de l'aide influenceront la strat�gie : l'aide
budg�taire favorise l'int�gration des investissements dans les relations
entre l'assureur et l'h�pital, l'aide directe sous l'autorit� du bailleur incite
� dissocier les strat�gies.


Le r�le du ticket mod�rateur

Le ticket mod�rateur, qui n'a pas besoin d'�tre important, r�duit sen-
siblement le risque de surutilisation en particulier pour les soins de
premi�re intention. Mais la mise en place du ticket mod�rateur doit
�tre simple pour en limiter la charge administrative. Le ticket mod�-
rateur peut �tre forfaitaire ou sous la forme d'une proportion du prix
du service. L'avantage d'un ticket mod�rateur forfaitaire est de peser
lourdement sur les soins de premi�re ligne, r�duisant ainsi le risque
d'utilisation excessive, et de peser faiblement sur des d�penses impor-
tantes. Cette approche doit aussi tenir compte des services jug�s pri-
oritaires d'un point de vu de sant� publique, pour lesquels on peut
privil�gier le risque de surutilisation au risque de sousutilisation.
  Pour les gros risques, et en particulier l'hospitalisation, des profes-
sionnels de sant� interviennent au pr�alable de la d�cision. Un ticket
mod�rateur pesant sur le patient n'aura qu'une port�e limit�e. Les
m�canismes d'incitation pour favoriser un usage rationnel de la cha�ne
de soins concernent davantage les professionnels et les institutions qui
les emploient. A ce moment, l'assureur peut intervenir par le biais du
contr�le m�dical et sanctionner ou encourager les professionnels et
institutions qui orientent au mieux les patients.



EN GUISE DE CONCLUSION : COMMENT R�GULER LES RELATIONS
ASSUREUR/H�PITAL ?

La faiblesse de la gestion des h�pitaux est un trait commun � la plupart
des pays (de Roodenbeke 2003) et les h�pitaux comme les pouvoirs

                       L'assureur face � l'h�pital : Questions pour un dialogue � 395



publics consacrent davantage d'�nergie aux proc�dures et la r�ponse au
quotidien qu'� la planification strat�gique et la recherche de l'usage
rationnel des ressources (minist�re de la sant� du Ghana 2003). Alors
que le manque de responsabilit� domine et que des pratiques de
paiements occultes sont fr�quentes, une profonde �volution est n�ces-
saire pour que les populations retirent ce qu'elles attendent du secteur
hospitalier. Un syst�me d'assurance, peut avoir un impact majeur pour
am�liorer l'efficience des h�pitaux s'il couvre une large part du
financement des �tablissements et s'il se comporte comme un v�ritable
acheteur (Preker et Harding 2003).
   Dans cette perspective il faut s'interroger sur la place qui doit �tre
r�serv�e � l'accr�ditation qui permet � l'acheteur de b�n�ficier d'une
garantie sur la qualit� de la prestation qu'il finance. Si l'accr�ditation
apporte un certain nombre de garanties, sa mise en oeuvre est com-
plexe et co�teuse (Shaw 2005). Ainsi il est peu probable que les pays
� faible revenu puissent d�velopper rapidement un v�ritable syst�me
d'accr�ditation de leurs h�pitaux, il convient donc d'�viter de faire
de l'accr�ditation un pr�alable � la mise en place de l'assurance
obligatoire.
   Historiquement, l'accr�ditation est assez r�cente. Dans de nom-
breux pays l'assurance maladie obligatoire l'a pr�c�d�e. Ainsi, plut�t
que de miser uniquement sur l'accr�ditation, il faut mieux favoriser
deux autres outils de r�gulation de port�e plus imm�diate.

� La contractualisation : elle est moins normative que l'accr�ditation
   tout en permettant de pousser les acteurs � atteindre des r�sultats
   accept�s en commun. La contractualisation ne se substitue pas � l'ac-
   cr�ditation mais elle peut se mettre en place plus facilement tout en
   lui pr�parant le terrain.

� Le contr�le m�dical : il joue un r�le important pour �viter les abus dans
   les relations entre les assureurs et leurs assur�s et avec leurs
   prestataires. Le contr�le m�dical doit �tre reconnu de mani�re � dis-
   poser d'un libre acc�s � l'h�pital et aux dossiers m�dicaux des
   patients. Il doit avoir un pouvoir de sanction.


   Enfin l'assureur ne doit pas r�duire son r�le � l'achat de prestations
m�dicales curatives, il peut aussi intervenir pour des activit�s de
pr�vention. Pour l'une comme l'autre, il ne peut pas s'int�resser qu'�

396 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'h�pital mais favoriser l'efficience d'ensemble du syst�me de sant�, en
consid�rant � la fois prix et qualit� en relation avec les prestations les
plus judicieuses pour r�pondre aux priorit�s de sant� publique.



NOTES

  1. Sous le terme d'�v�nement catastrophique de sant� on regroupe
les recours hospitaliers dont le co�t est insupportable pour le budget du
patient et de sa famille. Il peut s'agir de situations o� le pronostic vital
est imm�diatement en jeu, mais aussi de pathologies plus ou moins
longues dont le traitement est co�teux.


  2. Le terme d'assureur sera utilis� de mani�re g�n�rique pour
designer les acteurs qui interviennent pour couvrir le risque sant� pour
une population donn�e, en prenant en charge tout ou partie des frais
engag�s, pour donner les soins appropri�s aux individus qui en ont
besoin. Cet assureur est l'entit� qui met en oeuvre l'assurance maladie
obligatoire de toute ou partie de la population.s


  3. Le terme d'h�pital sera utilis� de mani�re g�n�rique pour
designer le secteur hospitalier dans son ensemble




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3.2. Protection sociale, assurance maladie
                et lutte contre la pauvret�


                                                                      CHAPITRE 14



          La contribution de l'assurance aux
    politiques de lutte contre la pauvret�

                                        Slim Haddad, Florence Morestin




R�sum� : Nous nous questionnons sur le r�le �ventuel de la micro-assurance de
sant� dans les strat�gies de lutte contre la pauvret� dans les pays en d�veloppe-
ment. A partir de donn�es collect�es au Burkina Faso, nous comparons l'appau-
vrissement mon�taire attribuable aux d�penses de sant�, dans la situation actuelle
d'absence d'assurance, avec deux sc�narios simul�s : a) assurance communautaire
aux param�tres similaires � ceux habituellement pratiqu�s ; b) m�me assurance,
avec subvention de l'adh�sion des m�nages pauvres.
   Les d�penses directes de sant� entra�nent dans la pauvret� les m�nages vul-
n�rables, et appauvrissent davantage les pauvres. Nos simulations montrent
que, lorsque les primes d'assurance restent modestes pour tenir compte de la
capacit� contributive des familles, la couverture par l'assurance communautaire
a un impact limit� sur les d�penses de sant�. Elle ne r�duit pas l'incidence de la
pauvret�, et n'a qu'un effet restreint sur le niveau de pauvret� des pauvres,
m�me lorsque leur adh�sion est subventionn�e. Nous observons �galement des
effets distributifs paradoxaux. La demande de soins restant contrainte par la
capacit� contributive (co-paiement), les m�nages les plus nantis, plus gros con-
sommateurs, sont les principaux b�n�ficiaires de l'assurance. Les m�nages
pauvres b�n�ficient d'une protection financi�re relative lorsque leur prime
d'adh�sion est subventionn�e. Les m�nages interm�diaires, au revenu proche de
la ligne de pauvret�, sont d�savantag�s par l'assurance.
   L'action sur la demande (assurance) n'apporterait donc qu'une contribution
limit�e aux strat�gies de lutte contre la pauvret�. Pour diminuer l'appauvrissement


                                                                                  401

402 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   mon�taire d� aux d�penses de sant�, elle est indissociable d'interventions sur l'offre
   visant � r�duire le co�t d'utilisation ou am�liorer l'efficacit� des services. Il est illu-
   soire de penser que la g�n�ralisation de l'assurance communautaire r�soudrait seule,
   sans remise en question du mod�le de tarification d�rivant de l'initiative de
   Bamako et sans une mobilisation significative de ressources additionnelles, la crise
   du financement des syst�mes de sant�.



INTRODUCTION

La micro-assurance de sant�, commun�ment d�sign�e par les expres-
sions � assurance de sant� � base communautaire � ou � mutuelle de
sant� �, constitue depuis une d�cennie l'une des alternatives les plus
promues par les acteurs de la coop�ration internationale pour
am�liorer et concilier �quit� d'acc�s aux soins et financement viable
des syst�mes de sant�. Une troisi�me finalit� est envisageable, m�me si
elle n'est pas, � proprement parler, la raison premi�re de l'assurance
sant� : une contribution � la lutte contre la pauvret�. En offrant une
protection contre le risque-maladie, l'assurance sant� s'inscrit en effet
dans une logique qui est celle des politiques de lutte contre la pauvret�
et des mesures de gestion du risque social visant � contrer la vuln�rabi-
lit�. L'assurance sant� pourrait ainsi l�gitimement trouver sa place dans
la panoplie d'interventions au service de la lutte contre la pauvret�.
   Ce travail aborde certains enjeux li�s � l'assurance-sant� telle qu'elle
est commun�ment envisag�e en Afrique subsaharienne. On y mettra en
lumi�re, en se fondant sur les r�flexions personnelles des auteurs et sur
des simulations r�alis�es � partir de donn�es d'une �tude r�alis�e au
Burkina Faso, le potentiel mais aussi les limites de la contribution de
l'assurance-sant� communautaire � la lutte contre la pauvret�.



MALADIE ET APPAUVRISSEMENT EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE

La g�n�ralisation de la tarification des services de sant� aux patients
constitue l'une des composantes majeures des r�formes mises en oeuvre
dans les pays de la r�gion. Les modalit�s de la tarification comme les
montants r�clam�s aux populations varient grandement, chaque pays
tentant, � sa mani�re, de concilier deux exigences antagonistes : maxi-
miser les recettes en provenance des usagers pour assurer un finance-

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 403



ment viable des services, dans des contextes o� les capacit�s de finance-
ment public sont limit�es ; et maintenir des tarifs abordables pour
accommoder des populations dont la capacit� contributive est limit�e.
   Quinze ans de recul et une quantit� impressionnante d'�tudes ont
d�sormais largement montr� les limites de ce mod�le. Premi�rement,
la contribution de la tarification au financement global des syst�mes
de sant� demeure, dans le contexte de l'Afrique subsaharienne du
moins, marginale, m�me si elle peut significativement contribuer au
financement du m�dicament et des consommables dans les services
p�riph�riques. Deuxi�mement, la tarification constitue une source
d'exclusion et, m�me lorsqu'elle s'accompagne de gains qualitatifs au
niveau des services et qu'elle est jug�e abordable par ses promoteurs,
la capacit� des m�nages � utiliser � et � utiliser ad�quatement � les
services de sant� demeure largement contrainte par leur capacit� con-
tributive. Certains sont ainsi exclus des soins de mani�re perma-
nente ; d'autres, selon les fluctuations de leur situation financi�re,
constituent le groupe des exclus temporaires. Dans ces contextes o� la
protection sociale est limit�e, voire inexistante, le recours aux soins
implique des sacrifices financiers, et les d�penses directes de sant� des
m�nages (DDSM) p�sent lourd dans le budget familial (Bloom and
Lucas 2000 ; Wagstaff 2001 ; McIntyre et al. 2006). Le fardeau des
d�penses de sant� est d'autant plus lourd qu'il peut affecter la consom-
mation d'autres biens n�cessaires, voire entamer le capital du m�nage
et ob�rer durablement sa capacit� de production. Les d�penses de
sant� sont alors dites catastrophiques1.
   Ces manifestations observ�es au niveau des m�nages ont d'impor-
tantes cons�quences distributives � l'�chelle de la population prise
dans son ensemble. L'appauvrissement attribuable aux d�penses
directes de sant� en est une. Pour l'illustrer, basons-nous sur un exem-
ple fictif compos� d'une population de six m�nages (graphique 1). La
position du m�nage par rapport � la ligne de pauvret� est repr�sent�e
par chaque cercle de gauche. Deux des six m�nages ont donc un
revenu annuel inf�rieur au seuil de pauvret�. Le revenu des m�nages 1
� 4 (M1 � M4) les place dans la cat�gorie des m�nages non pauvres. La
position du cercle sombre traduit le revenu r�siduel, une fois d�duites
les d�penses annuelles directes du m�nage pour l'achat de biens et
services de sant�. La distance verticale entre les deux cercles est fonc-
tion des d�penses de sant�. Celles-ci viennent r�duire la capacit� des
m�nages � satisfaire leurs besoins essentiels, et on peut consid�rer que

404 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Graphique 1 : Pertes de revenu reli�es aux d�penses directes de sant� des m�nages




                                                                        Non pauvres




                                                                        Pauvres




      1           2         3           4         5          6

                              M�nages                                    Revenu initial


                                                                         Revenu r�siduel



les m�nages s'appauvrissent d'un montant �quivalent � leurs d�penses
de sant� (Wagstaff et van Doorsaleer, 2003).
   M1 n'a rien d�pens� pour sa sant�. Son revenu r�siduel est �gal �
son revenu initial. M2, en revanche, a fait face � des d�penses de sant�.
Son revenu a �t� amput�, mais son revenu r�siduel est tel que le
m�nage appartient toujours � la cat�gorie des non-pauvres. M3 et M2
ont le m�me revenu initial, mais M3 fait face � davantage de d�penses.
Son revenu r�siduel le place d�sormais parmi les pauvres : c'est un
m�nage vuln�rable. M4 n'�tait pas pauvre, mais il �tait tr�s vuln�rable.
Une d�pense modeste l'a fait plonger sous la ligne de pauvret�. M5
�tait pauvre. Il n'a rien d�pens� et est toujours aussi pauvre. M6 est un
pauvre qui s'est davantage appauvri.
   Cet exemple fictif montre qu'une strat�gie de lutte contre la pau-
vret� a int�r�t � prot�ger les deux m�nages qui �taient originellement
identifi�s comme pauvres, mais aussi les m�nages vuln�rables, c'est-�-
dire ceux � risque d'appauvrissement. Originellement, un m�nage sur
trois �tait pauvre, mais, en raison de l'absence de protection effective
face au risque maladie, ils sont d�sormais deux sur trois. L'incidence
de la pauvret� (proportion de pauvres dans la population) est donc
pass�e de 33,3 % � 66,6 %, et l'appauvrissement mon�taire de court
terme2 attribuable aux d�penses directes de sant� peut �tre estim� par
l'augmentation absolue (+ 33 points de pauvret�) ou relative (+ 100 %)
de l'incidence de la pauvret�. En d'autres termes :

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 405



                         PIa = [PI(z)2 � PI(z)1] / PI(z)1

   PIa est l'appauvrissement mesur� en termes d'incidence de la pau-
vret� ; z est la ligne de pauvret� ; PI(z)1 et PI(z)2 sont les niveaux d'in-
cidence de la pauvret� avant et apr�s d�duction des d�penses de sant�.
   Un second indicateur, l'intensit� de la pauvret�, rend compte du
niveau de pauvret� des pauvres. L'intensit� de la pauvret� est
mesurable par l'�cart moyen entre le revenu des pauvres et la ligne de
pauvret�. L'appauvrissement mon�taire de court terme attribuable aux
d�penses directes de sant� peut donc �tre estim� sur la base de l'�cart
entre la pauvret� moyenne avant et apr�s prise en compte des
d�penses de sant� (Wagstaff et al., 2003). Cette mesure a l'avantage de
s'exprimer en unit�s mon�taires3 et de correspondre au co�t minimal
d'une strat�gie de protection financi�re des m�nages pauvres (Ravail-
lon, 1992), autrement dit au montant � investir pour ramener ces
m�nages au niveau de la ligne de pauvret�. En d'autres termes :

                                DIa = DI(z)2 � DI(z)1

   DIa est l'appauvrissement mesur� en termes d'intensit� de la pau-
vret� ; z est la ligne de pauvret� ; DI(z)1 et DI(z)2 sont les d�ficits de
pauvret� moyens avant et apr�s d�duction des d�penses de sant�.



ASSURANCE SANT� ET CONTRIBUTION
� LA LUTTE CONTRE LA PAUVRET�

Si elle assume bien son r�le, l'assurance devrait prot�ger les m�nages
vuln�rables contre le risque d'appauvrissement subs�quent au risque
maladie. Elle devrait aussi am�liorer l'acc�s aux soins des assur�s,
r�duire l'exclusion et favoriser l'utilisation des services. Ainsi, l'effet
positif de l'assurance devrait aussi concerner l'�tat de sant� des m�nages,
et par cons�quent leur productivit�, et, in fine, leur niveau de bien-�tre.
Ces hypoth�ses fond�es sur les principes m�mes de fonctionnement de
l'assurance semblent donc la d�signer comme un instrument naturel et
potentiellement efficace de lutte contre la pauvret�.
   En pratique toutefois, la r�alit� de cette contribution n'est pas encore
scientifiquement �tablie ni confirm�e par des donn�es probantes. Les
raisons semblent en �tre de trois ordres. La premi�re tiendrait au faible
nombre d'�tudes d'impact existantes. Les b�n�fices attendus des

406 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



micro-assurances sant� commencent � peine � �tre �valu�s. Longtemps
limit�s � leurs aspects intra-organisationnels (fonctionnement, viabilit�
financi�re), les travaux sur les effets des assurances tendent � n�gliger
l'analyse de leur performance en raison, semble-t-il, de pr�jug�s favo-
rables dans les milieux de recherche quant aux bienfaits de ces assu-
rances (Baeza et al. 2002). La seconde raison tient � l'in�gale qualit� scien-
tifique des �valuations disponibles et � leur validit� approximative. De
bonnes analyses d'impact requi�rent des devis d'�valuation robustes qui
sont complexes et co�teux � mettre en oeuvre de sorte que la plupart des
�tudes r�alis�es reposent sur des devis de type � post-test seulement �
ou � post-test avec groupes contr�le non �quivalents �, malheureuse-
ment peu robustes (Shadish, Cook & Campbell, 2002). L'usage restreint
de donn�es quantitatives limite �galement la robustesse des analyses et
des conclusions (Preker et al., 2001 ; Baeza et al., 2002 ; Ekman, 2004).
La perspective est g�n�ralement celle d'une analyse des client�les
assur�es plut�t que de populations cibles qui permettrait de juger de
l'efficacit� ou des impacts populationnels de l'introduction de l'assu-
rance (Baeza et al., 2002 ; Bennett, 2004). La validit� externe est enfin
expos�e aux limites inh�rentes � l'�valuation portant uniquement sur
des organisations assurantielles survivantes (en omettant celles qui
n'ont pu se maintenir) (Baeza et al., 2002). La troisi�me raison r�side
dans le fait que les �valuations disponibles sont peu concluantes. En
pratique, on sait peu de chose des impacts r�els de l'assurance sur le
revenu des m�nages et, a fortiori, sur l'incidence et l'intensit� de la pau-
vret�. Des travaux permettent d'avancer quelques r�sultats sur l'effica-
cit� de la fonction de protection financi�re des m�nages. Mais les r�sul-
tats ne sont pas toujours consistants et la majorit� des quelques �tudes
r�alis�es ne parvient qu'� r�v�ler de modestes incidences de la participa-
tion � l'assurance en termes d'all�gement du fardeau des d�penses de
sant� des m�nages (Ekman, 2004 ; Baeza et al., 2002). Plusieurs explica-
tions sont avanc�es � ce propos : couverture limit�e des risques et des
d�penses, restriction de la prise en charge aux d�penses directes pour les
biens et services de sant�, co�t des primes d'assurance, etc., mais leur
validation aurait requis des �tudes plus pr�cises.
   Les �valuations r�alis�es n'apportent donc qu'une assistance limit�e
pour la compr�hension des m�canismes par lesquels l'assurance com-
munautaire peut contribuer � la lutte contre la pauvret�. Pour autant,
cette contribution reste en principe plausible si l'assurance parvient �
offrir une protection financi�re suffisante aux m�nages.

         La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 407



   Revenons donc � notre population fictive de six m�nages et sup-
posons que chacun ait d�cid� d'adh�rer � une assurance communau-
taire (graphique 2). Le niveau du cercle gris� traduit le nouveau revenu
r�siduel du m�nage. M1 n'a toujours pas eu � d�penser pour l'achat de
biens et services de sant�. Il doit n�anmoins payer sa prime d'assurance
et il subit une perte de revenu correspondant au montant pay� pour la
prime. Son revenu r�siduel le place toujours au-dessus de la ligne de
pauvret�. M2 voit sa perte de revenu diminu�e, l'assurance prenant en
charge une partie de ses d�penses. Il subit n�anmoins une perte de
revenu correspondant aux primes pay�es et aux d�penses encourues
pour le recours aux soins et non rembours�es par l'assurance. Son
niveau de revenu r�siduel le place toujours au-dessus de la ligne de
pauvret�. M3 voit sa perte de revenu diminu�e pour les m�mes raisons.
L'assurance l'a efficacement prot�g� puisqu'elle l'a emp�ch� de plonger
sous le seuil de pauvret�. M4 fait aussi face � une perte de revenu
faisant suite au paiement de la prime d'assurance. L'assurance ne lui
�vite pas de passer sous la ligne de pauvret�, mais limite l'ampleur de
son appauvrissement. M5 s'appauvrit du montant des primes vers�es.


Graphique 2 : Pertes de revenu reli�es aux d�penses directes de sant� des m�nages
selon la couverture d'assurance




                                                                 Non pauvres




                                                                 LP




                                                                 Pauvres




                                                                        Revenu initial

       1        2        3        4        5         6                  Revenu r�siduel des
                                                                        m�nages non assur�s
                         M�nages
                                                                        Revenu r�siduel des
                                                                        m�nages assur�s

408 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Gr�ce � l'assurance, M6 voit sa perte de revenu diminu�e. Il continue
toutefois � faire partie des pauvres.
   Deux m�nages �taient pauvres au d�part. Ils sont trois, d�sormais.
Un seul des deux nouveaux pauvres aurait �t� efficacement prot�g� par
l'assurance. Notons donc que l'assurance ne permet pas une protection
financi�re efficace de la totalit� des non-pauvres. Son effet protecteur
d�pend de leur niveau de revenu initial, des param�tres assurantiels
(notamment le montant de la prime d'adh�sion) et, bien s�r, de la
nature et de l'intensit� des besoins de sant�. Plus un m�nage est ini-
tialement proche du seuil de pauvret�, moins l'assurance a de chance
de le prot�ger efficacement. Comme dans l'exemple illustr� par la
graphique 1, l'appauvrissement mon�taire de court terme attribuable
aux d�penses directes de sant� (incluant la prime d'assurance) peut �tre
estim� par l'augmentation absolue (+ 17 points) ou relative (+ 33 %) de
l'incidence de la pauvret�. L'assurance a r�duit l'appauvrissement
attribuable aux d�penses de sant� de 17 points (l'incidence de pauvret�
apr�s d�penses de sant� n'est plus que de 50 %, au lieu de 67 % en l'ab-
sence d'assurance). En termes relatifs, l'appauvrissement est diminu�,
gr�ce � l'assurance, de 50 % (l'augmentation de l'incidence de la pau-
vret� n'est � que de � +50 % alors qu'elle �tait auparavant de +100 %).
   Bien �videmment, l'assurance est incapable de faire transiter un
m�nage du statut de pauvre � celui de non-pauvre. Autrement dit, elle
n'a pas d'effet sur l'incidence de la pauvret�. C'est une limite intrin-
s�que qui la distingue des strat�gies de g�n�ration de revenu comme
le microcr�dit. Mais on l'a vu, elle peut r�duire les pertes de revenu
des m�nages pauvres. Notons toutefois que la prime d'assurance peut
op�rer une ponction substantielle sur le revenu des familles pauvres
dont le revenu disponible est souvent tr�s faible. Par cons�quent, plus
un m�nage pauvre est pauvre, plus grand est le sacrifice � accomplir
pour adh�rer � l'assurance et moins il risque d'�tre dispos� � s'assurer.
   Que pr�dirait le mod�le si une subvention ext�rieure permettait, par
exemple, de payer les primes de certains m�nages ? Supposons que la
prime des pauvres soit enti�rement subventionn�e. Rien ne changerait
pour les quatre premiers m�nages et M4 continuerait � traverser la
ligne de pauvret�. M5 et M6 verraient leur sort s'am�liorer. Le premier
ne subirait d�sormais plus aucune perte de revenu, et le second verrait
la sienne diminuer. En d�finitive, cette mesure n'aurait aucun effet sur
l'incidence de la pauvret�, mais elle aurait un impact tangible sur l'ap-
pauvrissement attribuable aux d�penses de sant�, mesur� en termes de

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 409



variation de l'intensit� de la pauvret�. Autrement dit, on am�liorerait
sensiblement le sort des m�nages pauvres, mais pas celui des m�nages
vuln�rables. Cela sugg�re d'embl�e que, pour r�pondre aux besoins de
ces derniers, il faudrait non seulement subventionner la prime des pau-
vres, mais aussi celle de tous les m�nages vuln�rables et �tendre ainsi le
ciblage des interventions publiques de protection � des non-pauvres.
  Afin d'initier l'exploration des pr�dictions du mod�le et des
�ventuels impacts de l'assurance sur la pauvret�, nous avons proc�d�
par simulations. L'objectif est de comparer une situation existante
marqu�e par l'absence d'assurance avec celle, simul�e, qui pr�vaudrait
en pr�sence d'une assurance comparable � celles que l'on observe
couramment en Afrique subsaharienne. Nous tenterons ainsi d'ap-
porter des �l�ments de r�ponse aux questions suivantes :

� en quoi l'assurance modifie-t-elle les flux financiers de sant� et, en
  particulier, l'origine et l'affectation des ressources mobilis�es pour le
  financement de la sant� ?

� quel serait l'impact de l'assurance sur le fardeau �conomique de la
  sant� pour les familles ? Quels groupes sociaux tireraient davantage
  profit de l'assurance ?

� quel effet cela aurait-il sur l'appauvrissement attribuable aux
  d�penses directes de sant� des m�nages (incidence et intensit� de la
  pauvret�) ?

� quels sont les avantages compar�s d'une bonification de l'assurance
  communautaire via la subvention des cotisations des pauvres ?


  Nous pr�sentons ces simulations dans les sections suivantes. Nous
utiliserons � cet effet une base de donn�es provenant d'une enqu�te
r�alis�e au Burkina Faso dans le cadre d'un partenariat de recherche
associant l'Association Burkinab� de Sant� publique et l'Universit� de
Montr�al (Haddad et al., 2004 ; Nougtara et coll., 2001).



CONTEXTE ET SC�NARIOS POUR LES SIMULATIONS

Le Burkina Faso a amorc�, depuis 1992, une r�forme du syst�me de
sant� qui s'inspire du mod�le de l'initiative de Bamako et des solutions
promues par les agences de coop�ration internationales. La r�forme

410 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



s'est traduite par une forte mobilisation de moyens. L'accessibilit� g�o-
graphique des services de premi�re ligne s'est g�n�ralement am�lior�e
dans le pays, y compris dans les zones rurales. Mais, comme ailleurs, les
barri�res � l'acc�s sont encore nombreuses, particuli�rement en zones
rurales o� se conjuguent pauvret� �conomique, solidarit�s locales trop
limit�es pour assister efficacement les familles, et prix relatif �lev� des
services de sant�. La tarification des services publics et l'accroissement
de la pauvret� ont renforc� les barri�res financi�res � l'acc�s aux soins,
et plus des deux tiers des m�nages �prouvent des difficult�s � assumer
les d�penses de sant� (Haddad et al. 2006).
   Les m�nages constituant la base de donn�es r�sident dans une zone
urbaine et deux zones rurales choisies pour leur capacit� � illustrer la
diversit� des milieux et des conditions de vie. L'assurance communau-
taire y �tait, au moment de l'�tude, quasi inexistante.
   Deux sc�narios sont consid�r�s pour les simulations. Le premier �
sc�nario A � consid�re l'introduction d'une assurance communautaire
couvrant 80 % des d�penses de consultations curatives et pr�ventives,
et 100 % des d�penses d'hospitalisation. Les param�tres assurantiels
ont �t� d�finis de mani�re � �quilibrer les recettes et les d�penses de
l'assurance, en postulant une excellente gouverne de l'organisation et
des frais g�n�raux minimaux. La prime d'adh�sion ainsi retenue est du
m�me ordre que celles habituellement pratiqu�es. Elle est fix�e �
1 000 francs CFA par �quivalent adulte soit, compte tenu des facteurs
d'�quivalence pratiqu�s au Burkina Faso, 1 000 francs par adulte et
500 francs par enfant. Les m�nages adh�rent en bloc, tous les mem-
bres de la famille sont assur�s. Un plafond de remboursement est fix�
� 100 000 FCFA par famille et par an. Aux fins de la d�monstration,
on suppose que tous les m�nages dont le revenu disponible4 est
sup�rieur ou �gal au montant de la prime adh�rent � l'assurance. Les
autres n'adh�rent pas. Le sc�nario B repose sur les m�mes param�tres
assurantiels. On suppose toutefois qu'une subvention ext�rieure est
octroy�e afin de prendre en charge les cotisations des familles dont le
revenu par t�te est inf�rieur au seuil de pauvret�.



M�THODES

Les donn�es disponibles portent sur divers attributs sociod�mo-
graphiques et �conomiques des m�nages, leur �tat de sant� et leur

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 411



consommation de biens et services de sant�. Les variables utilis�es pour
les simulations et les analyses sont le revenu des m�nages, leurs
d�penses de sant� (consommation totale de biens et services de sant�
par �quivalent adulte et en proportion du revenu du m�nage), leur
revenu r�siduel (revenu total d�duit des d�penses de sant�), leur revenu
disponible, leur habitat (rural � urbain) et l'�loignement de la forma-
tion sanitaire de premi�re ligne la plus proche.
   Les analyses visent � comparer les trois situations au regard de leur
impact sur le fardeau �conomique de la maladie et sur l'appauvrisse-
ment �conomique de court terme attribuable aux d�penses de sant�,
dans une population constitu�e par les m�nages de notre �chantillon.
Au Burkina Faso, la ligne de pauvret� est d�finie en termes de satisfac-
tion des besoins nutritifs de base. �tant donn� cette d�finition a
minima, l'hypoth�se selon laquelle les m�nages s'appauvrissent d'un
montant �quivalent � leurs d�penses de sant� est pertinente. La ligne
de pauvret� et la mesure du revenu (estim� par la consommation
annuelle totale par �quivalent adulte) sont �tablies par le Minist�re de
l'�conomie et des Finances (Institut National de la Statistique et de la
D�mographie 2000). La ligne de pauvret� �tait de 72 690 FCFA par
�quivalent adulte lors de l'enqu�te, r�alis�e en 1999.
   L'appauvrissement mon�taire de court terme attribuable aux d�penses
directes de sant� sera estim� en suivant la m�thode pr�sent�e dans l'in-
troduction, sachant toutefois que les valeurs ainsi calcul�es seront des
estim�s minimaux de l'appauvrissement r�el. Une estimation compl�te
aurait requis une �valuation des autres pertes de productivit� et des effets
de long terme de la maladie sur les composantes mon�taires et non mon�-
taires du bien-�tre du m�nage. Or, si les donn�es disponibles permettent
d'estimer pour chaque sc�nario, les d�penses directes des m�nages pour
leur sant� et la ponction que ces d�penses op�rent sur leur revenu, en
revanche, elles ne permettent pas de proc�der � une analyse pr�cise des
effets de la maladie sur la productivit� et la production des m�nages.



R�SULTATS


Situation actuelle

La d�pense de sant� moyenne par t�te est de 13 332 Francs CFA par an.
Les d�penses d'hospitalisation ne repr�sentent en moyenne que 3 % des

412 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d�penses de sant� des m�nages, leur important poids financier �tant
compens�, dans le calcul de la moyenne, par la raret� des �v�nements de
sant� n�cessitant une hospitalisation. Les in�galit�s verticales sont mar-
qu�es. Un quart des m�nages (432 sur 1602) n'a consomm� aucun bien
et service de sant� pendant une p�riode d'un an. Dans ce contexte o� la
quasi-totalit� des biens et services de sant� sont payants, les pauvres sont
sur-repr�sent�s parmi les m�nages non consommateurs. Les m�nages
tr�s pauvres repr�sentent 11 % de l'�chantillon, mais constituent 21 %
des non-consommateurs de soins. Moins d'un m�nage tr�s pauvre sur
deux a consomm� des biens et services de sant� tandis qu'ils sont quatre
sur cinq � l'avoir fait parmi ceux dont le revenu est sup�rieur au double
de la ligne de pauvret� (tableau 1).
   La consommation est donc tr�s �lastique au revenu et les �carts
entre strates, consid�rables. Comparativement aux d�penses de sant�
des m�nages tr�s pauvres, la d�pense de sant� moyenne par t�te est 30
fois sup�rieure dans les m�nages dont le revenu est sup�rieur au double
de la ligne de pauvret�. Ce rapport passe � 66 lorsqu'on consid�re les
d�penses d'hospitalisation. Il est probable que les familles pauvres
soient g�n�ralement oblig�es de renoncer � utiliser des services hospi-
taliers. La part du revenu disponible consacr� � la sant� progresse avec
le revenu, suivant ainsi la progression de la capacit� contributive. Ce
ratio serait vraisemblablement beaucoup plus �lev� chez les pauvres, si
leur consommation de soins �tait proportionnelle � leurs besoins r�els.
Les facteurs d'exclusion se concentrant en milieu rural, les m�nages les
plus �loign�s des formations sanitaires de premi�re ligne (distance du
domicile sup�rieure � 5 km) tendent � consommer nettement moins.


Flux financiers selon les diff�rents sc�narios

La graphique 3a pr�sente les principaux flux financiers entre parti-
culiers, prestataires et �ventuels tiers-payants. Ce travail �tant ax� sur les
d�penses des m�nages en rapport avec les biens et services de sant� con-
somm�s, les flux �ventuels entre �tat et prestataires n'apparaissent pas
dans ce graphique. La situation la plus simple est celle pr�valant dans la
situation de r�f�rence au moment de l'�tude (graphique 3b). Les trans-
actions ne concernent que deux acteurs, les prestataires de services et les
m�nages intervenant dans le recours aux soins5. La pr�sence d'un
assureur modifie les flux et les sources de financement du syst�me
(graphique 3c). Les paiements directs des m�nages dans le cadre du sc�-

      Tableau 1 : Fardeau des d�penses de sant� selon les caract�ristiques du m�nage (situation actuelle, en FCFA)

                                                                               Revenu       D�penses de                              Part du revenu disponible
                                                                      N        par t�te    sant� par t�te  Revenu r�siduel par t�te   consacr�e � la sant�

      M�nage ayant                                          Non       432      139 194              0             139 194                      0.0 %
      d�pens� pour sa sant�                                  Oui     1170      189 977         18 254             171 733                     21.8 %
      Accessibilit� des                              d(CS) < 5km     1152      212 211         16 149             196 072                     16.6 %
      formations sanitaires                        d(CS) > = 5km      450       84 306          6 120              78 186                     14.2 %
      Niveau de pauvret�                      Inf�rieur � 1/2 LP      170       23 703          1 043              22 660                     10.1 %
      du m�nage
                                         Sup � 1/2LP et inf � LP      432       53 807          3 075              50 732                     14.9 %
                                          Sup � LP et inf � 2 LP      495      102 762          7 766              94 996                     17.6 %
                                                 Sup�rieur 2 LP       505      404 481         31 699             372 807                     17.2 %
      Tous les m�nages                                     Total     1602      176 282         13 332             162 958                     15.9 %

      Revenu r�siduel : consommation annuelle totale d�duite de la consommation consacr�e � la sant�
      Revenu disponible : consommation annuelle d�duite de la valeur de la consommation alimentaire
      d(CS) : distance domicile � formation sanitaire




413

414 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



nario A diminuent d'un montant modeste : ils repr�sentent 17 076
FCFA en moyenne par t�te pour les m�nages utilisateurs, contre 18 254
FCFA en situation de paiement direct, la diff�rence repr�sentant les
d�penses rembours�es par l'assurance. Par ailleurs, les m�nages paient
une prime d'assurance (984 FCFA par t�te en moyenne)6. Pour les
m�nages qui, in fine, n'utiliseront pas les soins, le paiement de la prime
conduit � une perte de revenu nette. La moyenne des remboursements
effectu�s par l'assureur est de 860 Francs, op�rant au passage une redis-
tribution partielle du fardeau des d�penses, des utilisateurs vers les non-
utilisateurs. La graphique 3d r�f�re au sc�nario B. La subvention
publique r�duit substantiellement le paiement moyen effectu� par les
m�nages pauvres au titre des primes mais ne modifie pas les paiements


Graphique 3a : Acteurs et flux financiers dans le syst�me de soins : le mod�le


                                         Subventions
      �tat--Bailleur de fonds




         Primes

                                            Assurance


                                                                                       Financements
                  Versements directs




       M�nages                                                                    Prestataires
                                        Biens et Services


     Source : Adapt� de Evans (1995)



Graphique 3b : Acteurs et flux financiers dans le syst�me de soins : D�penses et
r�mun�rations moyennes (Francs CFA par t�te) � situation initiale


            Versements  directs                       Utilisateurs        18,254
                                                      Non  utilisateurs        0
                                                      Ensemble            13,332




        M�nages                                                                     Prestataires
                                        Biens et Services


     Source : Adapt� de Evans (1995)

           La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 415



Graphique 3c : Acteurs et flux financiers dans le syst�me de soins : D�penses et
r�mun�rations moyennes (Francs CFA par t�te) � Sc�nario A




                                             Assurance

   Utilisateurs        999                                              Utilisateurs       1,178
   Non utilisateurs    944                                              Non utilisateurs        0
   Ensemble            984                                              Ensemble             860
                                     Utilisateurs      17,076
                                     Non utilisateurs       0
                                     Ensemble          12,471




                                        Biens et Services
          M�nages                                                               Prestataires




Graphique 3d : Acteurs et flux financiers dans le syst�me de soins : D�penses et
r�mun�rations moyennes (Francs CFA par t�te) � Sc�nario B


                                             Utilisateurs        318

   �tat--Bailleur de fonds                   Non utilisateurs    532
                                             Ensemble            376




                                             Assurance

   Utilisateurs        682                                              Utilisateurs       1,178
   Non utilisateurs    463                                              Non utilisateurs        0
   Ensemble            622                                              Ensemble             860
                                     Utilisateurs      17,076
                                     Non utilisateurs       0
                                     Ensemble          12,471




          M�nages                                                               Prestataires
                                        Biens et Services



effectu�s pour r�mun�rer les prestataires. Les paiements directs des
m�nages aux prestataires ainsi que les remboursements accord�s par
l'assurance ne changent pas.
   Ces r�sultats invitent � examiner plus pr�cis�ment les variations des
d�penses de sant� induites par l'introduction de l'assurance. Pour la
majorit� des m�nages, les d�penses de sant�, prime d'assurance
incluse, varient peu (tableau 2). Parmi les m�nages connaissant une
variation significative de leurs d�penses de sant�, la d�pense se fait le

416 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 2 : Variations des d�penses de sant� par t�te par rapport � la situation actuelle
(pourcentage de m�nages concern�s)
(n = 1170 m�nages ayant eu des d�penses de sant�)

Variation                                    Sc�nario A              Sc�nario B

Diminution sup�rieure � 50 %                    1.0 %                     2.5 %
Diminution entre 20 et 50 %                     4.1 %                     4.6 %
Variation inf�rieure � � 20 %                  54.8 %                    73.8 %
Accroissement entre 20 et 50 %                 15.2 %                     8.4 %
Augmentation sup�rieure � 50 %                 24.9 %                    10.8 %
Ensemble                                      100.0 %                  100.0 %


plus souvent dans le sens d'une augmentation, ce qui semble a priori
paradoxal, mais, comme le montrent le tableau 3 et les graphiques 4a
et 4b, s'explique par le fardeau additionnel constitu� par la prime d'as-
surance sur deux types de m�nages.
   La premi�re cat�gorie de m�nages � perdants � est constitu�e des
non-consommateurs s'�tant assur�s et n'ayant pas b�n�fici� de la sub-
vention, soit tous les assur�s dans le sc�nario A (quel que soit leur
niveau de revenu, l'adh�sion � l'assurance repr�sente une augmenta-
tion de 1000 Francs de leur d�pense de sant�) ; et tous les assur�s non
pauvres dans le sc�nario B. Le sc�nario B prot�ge efficacement les
m�nages pauvres puisque leurs primes d'assurance sont subvention-
n�es, mais les m�nages des autres groupes de revenus continuent �
subir une perte financi�re en adh�rant � l'assurance. Les m�nages con-
sommateurs dont les d�penses rembours�es sont inf�rieures � 1000
francs par t�te constituent la seconde cat�gorie de perdants. Ils peuvent
�tre pauvres ou non pauvres dans le sc�nario A ; en revanche, cette si-
tuation ne concerne aucun pauvre dans le sc�nario B (graphique 4).
   L'analyse montre aussi que l'assurance n'induit pas une protection
financi�re uniforme : un grand nombre de m�nages paient davantage
pour leur sant� alors que quelques-uns seulement en b�n�ficient. On
assiste donc, comme c'est le cas habituellement avec toute forme d'assu-
rance, � une redistribution entre de gros consommateurs peu nombreux
et de faibles consommateurs plus nombreux. Il est essentiel toutefois de
noter que la redistribution ne s'op�re pas, comme pour un m�canisme
assurantiel offrant une couverture totale, exclusivement sur la base des
risques encourus, c'est-�-dire des besoins de sant�. En effet, lorsque la
demande est fortement contrainte par la capacit� contributive et qu'un
co-paiement subsiste, comme dans le sc�nario A, la redistribution
s'op�re non seulement sur la base des besoins, mais aussi, malheureuse-

                                                                          La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 417



Graphique 4 : Variation des d�penses de sant� par t�te selon le plan d'assurance
et le revenu

                                                                                     Sc�nario A: Variation des d�penses de sant� selon la consommation
                                                                                        initiale de biens et services de sant� et le revenu du m�nage
    A)                                                                 1500
      CF
        (F
          te�t                                                         1000


              par                                                       500


                                                                          0
                 penses�d
                                                                       �500
                         des
                                                                      �1000

                            iraitonaV                                 �1500
                                                                                                                                   0       0        0     0     0
                                                                      Revenu�te 18000  38000      58000    78000    98000    11800     13800   15800  17800 19800
                                                                          t
                                                                       par

                                                                                           A--Non Utilisateurs                        A--Utilisateurs




                                                                                     Sc�nario B: Variation des d�penses de sant� selon la consommation
                                                                                        initiale de biens et services de sant� et le revenu du m�nage
                                     A)                                1500
                                       CF
                                         (F
                                           te�t                        1000


                                               par                      500


                                                                          0
                                                  penses�d
                                                                       �500
                                                          des
                                                                      �1000

                                                             iraitonaV�1500
                                                                                                                                   0       0        0     0     0
                                                                      Revenu�te 18000  38000      58000    78000    98000    11800     13800   15800  17800 19800
                                                                          t
                                                                       par

                                                                                           B--Non Utilisateurs                        B--Utilisateurs



ment, sur celle de la capacit� contributive. Parce qu'ils sont les plus gros
consommateurs, ce sont les m�nages les plus nantis qui sont les princi-
paux b�n�ficiaires de l'assurance (tableau 3). Ainsi deux m�canismes de
redistribution coexistent ; l'un souhaitable et vraisemblablement pro-
gressif, qui permet de prot�ger les m�nages dont les besoins sont les plus
grands ; et l'autre, non souhaitable et assur�ment r�gressif, qui aboutit �
prot�ger davantage le bien-�tre des plus nantis. � moins de lever com-
pl�tement les iniquit�s verticales au sein du pool d'assur�s par le biais

418 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d'une suppression de toute forme de barri�re financi�re � l'acc�s, ces
m�canismes r�gressifs sont in�vitables. Ils peuvent �ventuellement �tre
minimis�s en manipulant de mani�re appropri�e les param�tres assu-
rantiels, mais ils ne pourront �tre totalement supprim�s. Le sc�nario B
en est une illustration. La subvention fait en sorte que les pauvres font
partie des � gagnants � aux c�t�s des m�nages les plus nantis (graphique
4). Dans le sc�nario B, les m�nages pauvres, dont la prime d'assurance
est subventionn�e, b�n�ficient, comme les m�nages les plus riches, d'une
l�g�re diminution de leurs d�penses de sant� (200 � 350 FCFA en
moyenne). Le sc�nario B prot�ge efficacement les pauvres. Il s'inscrit
donc bien dans une logique redistributive en leur faveur m�me si on
pourrait, l� aussi, argumenter que toutes les barri�res financi�res qu'ils
rencontrent n'�tant pas lev�es, les pauvres retireront moins d'avantages
de l'assurance que les m�nages plus nantis.
   Mais, pour les m�nages non-pauvres, la courbe rejoint exactement
celle du sc�nario A. La frange des m�nages interm�diaires, non �ligibles �
la subvention mais ne faisant pas partie des classes privil�gi�es, voit
d�penses de sant� par t�te augmenter et continueses � faire partie des
� perdants �. Ces m�nages constituent, dans le cas pr�sent, environ la
moiti� des familles de l'�chantillon. En ne s'int�ressant qu'aux m�nages
d�j� pauvres, le sc�nario B �choue donc � prot�ger les m�nages poten-
tiellement vuln�rables, dont le revenu par t�te se trouve juste au-dessus de
la ligne de pauvret�. Autrement dit, apr�s introduction d'un m�canisme
de protection des m�nages pauvres, le seul groupe d�savantag� dans
le syst�me d'assurance est celui des m�nages potentiellement vuln�rables.
Certes, la fraction de population que constituent ces m�nages perdants
variera d'une situation � l'autre selon la couverture assurantielle, les prix
des biens et services de sant� et la distribution du revenu dans la popula-
tion. Mais : (i) il restera une cat�gorie interm�diaire de m�nages qui ne
tirera pas autant d'avantages du montage assurance-contribution
publique cibl�e que les cat�gories situ�es aux deux extr�mes du spectre de
revenu ; et (ii) les m�nages dont le revenu est proche de la ligne de pau-
vret�, m�me assur�s, demeureront particuli�rement vuln�rables.


Effet des diff�rents sc�narios sur l'incidence
et l'intensit� de la pauvret�

Les graphiques 5a et b confirment fortement les pr�dictions du mo-
d�le et montrent que, dans la situation actuelle de paiement de l'ensem-

                                      La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 419



ble des d�penses de sant� par les m�nages, les d�penses de sant� sont
source d'appauvrissement des m�nages, tant en termes d'incidence
(elles cr�ent davantage de pauvres) que d'intensit� (elles appauvrissent
les pauvres). L'appauvrissement est consid�rablement plus marqu� en
zones rurales mal desservies o�, comme nous l'avons vu, se concen-
trent les facteurs d�favorables. La graphique 5c indique que la mise en
place d'un syst�me d'assurance ne r�duit pas l'incidence de la pau-
vret�, quelle que soit l'accessibilit� g�ographique des soins, ce qui fait
�cho � nos analyses ant�rieures de la variation des d�penses de sant�.
Aucune diff�rence n'appara�t entre le sc�nario A et le sc�nario
B. Autrement dit, l'assurance ne parvient pas � prot�ger les m�nages
vuln�rables, qui sont pr�cis�ment ceux qui risquent de passer sous la
ligne de pauvret�. Le graphique 5d montre que, si la prime des pau-
vres n'est pas subventionn�e, leur appauvrissement s'accro�t lorsqu'ils
contractent une assurance, quelle que soit l'accessibilit� g�ographique.
Cet appauvrissement est principalement attribuable � la prime d'assu-
rance dans des m�nages qui, en raison de leur faible capacit� contribu-
tive, consomment peu ou pas de biens et services de sant�. En
revanche, la subvention des primes des pauvres a quand m�me un effet




Graphique 5 : Appauvrissement attribuable aux d�penses directes de sant� des m�nages


 a. Situation actuelle: d�penses directes des m�nages pour leur sant�                  b. Situation actuelle: d�penses directes des m�nages pour leur sant�
    et appauvrissment--incidence de la pauvret� (tous les m�nages)                       et appauvrissment--incidence de la pauvret� (tous les m�nages)

                                         70%                                                                                20,000

                                         60%                                                                                17,500

                                                                                                                            15,000
                                         50%
                                                                                                                            12,500
                                         40%
                                                                                                                            10,000

                                         30%
                                              d(CS  5 km)                                                                    7,500
                                                             d(CS < 5 km)      Tous                                                 d(CS  5 km)    d(CS < 5 km)      Tous
  Avant DDMS                                      59%           34%            42%      Avant DDMS                                     16,528          9,234       11,664
  Apr�s DDMS: actuel                              63%           39%            47%      Apr�s DDMS: actuel                             18,352         10,712       13,257

                                   Avant DDMS                  Apr�s DDMS: actuel                                       Avant DDMS                  Apr�s DDMS: actuel




 c. Augmentation (en pourcentage) de l'incidence de la pauvret�                        d. Augmentation (en pourcentage) de l'incidence de la pauvret�
    attribuable aux d�penses directes des m�nages pour leur sant�                        attribuable aux d�penses directes des m�nages pour leur sant�
    (tous les m�nages)                                                                   (tous les m�nages)

                                    20%                                                                                  20%
                                    16%                                                                                  15%
                                    12%
                                                                                                                         10%
                                     8%
                                     4%                                                                                   5%
         Pourcentage augmentation'd                                                           Pourcentage
                                     0%                                                                   augmentation'd
                                           d(CS  5 km)                                                                    0%
                                                          d(CS < 5 km)         Tous                                             d(CS  5 km)     d(CS < 5 km)         Tous
  Actuel                                      7.6%           15.3%            11.8%    Actuel                                      11.0%           16.0%            13.7%
  Sc�nario A                                  8.4%           15.8%            12.4%    Sc�nario A                                  13.6%           18.7%            16.3%
  Sc�nario B                                  8.4%           15.8%            12.4%    Sc�nario B                                  10.2%           15.1%            12.8%

                                   Actuel          Sc�nario A           Sc�nario B                                      Actuel           Sc�nario A           Sc�nario B

420 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



positif sur la pauvret� : elle induit une l�g�re baisse de l'intensit� de la
pauvret� par rapport � la situation d'absence d'assurance.
   Quel que soit le sc�nario, l'intensit� et surtout l'incidence de la
pauvret� augmentent relativement plus apr�s des d�penses de soins
pour les populations proches des structures de soins que pour les popu-
lations �loign�es (graphiques 5c et d). Ce r�sultat en apparence para-
doxal s'explique par le fait que l'intensit� et, surtout, l'incidence de la
pauvret�, sont au d�part d�j� consid�rables dans les populations
rurales (voir graphiques 5a et b), et que la consommation de biens et
services de sant� des pauvres qui y vivent est tr�s faible. C'est donc
dans les zones rurales que doivent se concentrer des efforts soutenus
visant � r�duire les barri�res � l'acc�s aux soins des m�nages.


Sensibilit� des r�sultats � l'�lasticit� de la demande

En l'absence de donn�es pr�cises quant � l'effet de l'assurance sur la
demande de soins des m�nages dans chaque groupe de revenu, nos
analyses ont �t� faites en supposant une demande constante. Or, il est
probable que l'introduction de l'assurance aurait conduit les assur�s �
accro�tre leur demande. La prise en compte de ces augmentations
aurait modifi� les valeurs pr�dites par les simulations, notamment les
estim�s, sous assurance, des d�penses des m�nages, de leur revenu
r�siduel et de la part des d�penses de sant� dans leur revenu disponible.
Mais, � l'exception notable de la situation, hautement irr�aliste dans le
contexte, d'une couverture de l'ensemble des d�penses directes de
sant� par l'assurance, ces changements n'auraient pas modifi� le sens
des r�sultats des simulations ni les conclusions tir�es quant aux avan-
tages et aux inconv�nients des deux sc�narios. En effet, si la demande
sous assurance augmente, (i) la maladie et la prime �ventuellement
pay�e continuent � op�rer une ponction sur le revenu des m�nages et
donc � les appauvrir ; (ii) � couverture �gale, la d�pense par t�te du
m�nage, la part du revenu disponible consacr�e aux d�penses de sant� et
l'appauvrissement du m�nage ne peuvent, comme l'illustre le tableau 3,
qu'augmenter. Par cons�quent, la valeur de l'appauvrissement calcul�e
par des simulations � demande constante est un estim� minimal de
l'appauvrissement r�el entra�n� par l'introduction de l'assurance, et nos
r�sultats refl�tent la capacit� maximale que l'on peut attendre de l'assu-
rance dans la lutte contre la pauvret�.

       Tableau 3 : Variation de la demande de biens et services de sant� sous assurance et appauvrissement attribuable
       aux d�penses de sant�

                                                       D�penses                       Prime
                                            Revenu     directes de   Depenses      d'assurance       Revenu          Appauvrissment
                                             Initial      sant�     rembours�es       pay�e         r�siduel          attribuable
                                              (a)          (b)           (c)           (d)      (e = a � b � d + c)     (a � e)

       M�nage non assur�                      1000         80             0             0              920                 80
       M�nage assur�
          1 Demande constante                 1000         80            40             5              955                 45
          2 Demande augment�e de 50 %         1000        120            60             5              935                 65
          3 Demande augment�e de 100 %        1000        160            80             5              915                 85
       M�nage assur� avec prime subvention�e
          1 Demande constante                 1000         80            40             0              960                 40
          2 Demande augment�e de 50 %         1000        120            60             0              940                 60
          3 Demande augment�e de 100 %        1000        160            80             0              920                 80

       * : On suppose que le plan d'assurance rembourse 50 % des d�penses



421

422 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



DISCUSSION

Quelles strat�gies les pouvoirs publics pourraient-ils mettre en oeuvre
pour prot�ger les m�nages de l'appauvrissement li� aux d�penses
directes de sant� des m�nages ? Les r�ponses sont encore � trouver
tant les enjeux sont complexes. Les r�sultats pr�sent�s ici viennent
toutefois apporter certains �clairages quant aux principes pouvant
guider les strat�gies publiques de protection financi�re des m�nages et
de correction des iniquit�s.
   Nos simulations montrent que l'assurance modifie finalement peu la
r�partition globale entre acteurs des flux financiers de sant�, dont la
majorit� continue � peser sur les m�nages. La raison principale r�side
dans la couverture limit�e propos�e et, donc, dans l'ampleur des
d�penses non rembours�es par l'assurance. Dans les simulations effec-
tu�es, une partie des d�penses non couvertes est de type directement
m�dical, comme le m�dicament qui repr�sente une part importante des
d�penses de sant� des m�nages. Son inclusion dans les d�penses rem-
boursables aurait cependant impliqu� une hausse drastique du co�t des
primes d'adh�sion que la plupart des m�nages n'auraient vraisemblable-
ment pas accept�e. Par ailleurs, une autre part, souvent substantielle,
des d�penses li�es au recours aux soins, inclut des d�penses non m�di-
cales (transport vers les structures sanitaires, h�bergement) qui, sauf
exception, ne sont pas prises en charge par l'assurance.
   M�me si cette r�alit� est souvent omise dans les consid�rations sur les
assurances, la prime d'assurance est une d�pense de sant� additionnelle
dont le poids est d'autant plus lourd que le revenu est limit�. Or les
remboursements dont b�n�ficient les m�nages assur�s vont compenser
� peine, voire pas du tout, le montant de la prime. Et le paiement de la
prime va constituer une perte nette pour les familles qui ne seront pas
�ligibles � des remboursements. Ces constats ont des implications en
termes de comportement d'adh�sion des m�nages vis-�-vis de l'assu-
rance qui doivent �tre pris en compte en vue de l'application de mesures
concr�tes. En situation r�elle, l'impact mitig�, voire n�gatif, de l'adh�-
sion assurantielle en termes de protection financi�re des m�nages risque
d'inciter nombre d'entre eux � peser soigneusement leur d�cision d'adh�-
sion � l'assurance. Certains constats empiriques sur les exp�riences
mutualistes rel�vent que le b�n�fice de l'assurance pourrait �tre peu
per�u par les b�n�ficiaires, notamment pour les risques sant� rares
(Huber et al. 2003). La raret� de l'�v�nement l'emporterait ainsi sur les

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 423



b�n�fices potentiels de la couverture du risque, les assur�s �tant en fin
de compte r�ticents � renouveler leur adh�sion apr�s une premi�re p�-
riode au cours de laquelle ils n'ont pas b�n�fici� concr�tement des servi-
ces de l'assurance, m�me si elle couvre des risques dont on s'entend
pour reconna�tre la dangerosit�.
   Certains auteurs rappellent �galement que, si on postule un com-
portement rationnel des m�nages, ils n'adh�reront que si la prime n'ex-
c�de pas le montant de leurs d�penses habituelles de sant� (Waelkens
et Criel 2004) ; cel� pose probl�me si ces d�penses, en raison d'un
faible revenu, correspondent � une sous-utilisation des soins � situation
clairement identifi�e pour de nombreux m�nages pauvres dans notre
population d'�tude. Dans ces conditions, notre hypoth�se de travail selon
laquelle tous les m�nages dont le revenu disponible est suffisant pour
payer la prime adh�rent � l'assurance est sans doute maximaliste ; on
peut s'interroger sur la proportion de m�nages, notamment pauvres,
qui, en l'absence de subvention, s'assureraient r�ellement.
   Tel qu'anticip�, les simulations montrent que, m�me modeste, la
prime d'assurance op�re une ponction substantielle sur le revenu des
familles � faible revenu. Le sacrifice financier que repr�sente l'adh�sion
est d'autant plus lourd que le m�nage est pauvre, ce qui explique qu'on
observe, en pratique, une forte sous-repr�sentation des m�nages pau-
vres parmi les assur�s (Baeza et al. 2002). Ces sacrifices sont plus
importants encore en milieu rural o� nos r�sultats mettent en lumi�re
la co�ncidence de l'enclavement g�ographique et des poches de pau-
vret�, et confirment les observations r�v�lant une relation inverse entre
la participation � l'assurance et la distance � parcourir pour acc�der �
des formations sanitaires (Waelkens et Criel 2004).
   Ces observations justifient le choix de strat�gies destin�es � faciliter
l'adh�sion des m�nages rencontrant des difficult�s pour payer la prime.
La modulation du montant des primes, voire leur indexation au revenu
des m�nages, serait une strat�gie en principe envisageable. Mais, en
plus d'�tre techniquement difficile � mettre en oeuvre dans le contexte
de micro-assurances communautaires, son acceptation semble, au vu
des travaux de Diallo au S�n�gal, loin d'�tre assur�e (Diop et al. 2004).
Reste donc la subvention de l'adh�sion de ceux pour qui la participa-
tion � l'assurance repr�senterait un sacrifice financier trop lourd. Le
sc�nario B de nos simulations montre que la prise en charge des primes
d'assurance des m�nages pauvres a un effet protecteur pour ces
m�nages qui se traduit au niveau populationnel par une diminution de

424 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'intensit� de la pauvret�. Mais, l'effet protecteur de cette mesure
demeure limit�. Les d�penses de sant� des m�nages pauvres ne di-
minuent que modestement puisque la grande majorit� des d�penses de
sant� reste non couverte par l'assurance. Les pauvres s'appauvrisse-
ment moins, mais le gain demeure mod�r�.
   En revanche, comme nous l'avions anticip�, la subvention de la
prime des pauvres ne permet en aucune mani�re de limiter l'augmenta-
tion du nombre de nouveaux pauvres attribuable aux d�penses directes7.
Ni le sc�nario A � globalement d�favorable � tous les groupes de
revenus sauf le plus �lev� � ni le sc�nario B ne prot�gent les m�nages
vuln�rables qui, fragilis�s par leurs d�penses de sant� (encore accrues
par le paiement d'une prime d'assurance), risquent de grossir les rangs
des m�nages pauvres.
   Enfin, des effets d'ordre sociologique pourraient temp�rer le poten-
tiel de r�ussite de mesures visant � favoriser l'adh�sion des m�nages
pauvres � une assurance. Les travaux de recherche montrent que pau-
vres et riches sont sous-repr�sent�s parmi les assur�s (Baeza et al.
2002 ; Preker et al. 2001 ; Carrin 2002). Cette homog�n�it� socio-
�conomique assez marqu�e des assur�s (le plus souvent, les classes
moyennes rurales) �branle la conception de la micro-assurance comme
instrument potentiel de solidarit� et de redistribution du bien-�tre entre
groupes de revenu (Bennett 2004). Or la confiance semble jouer un r�le
important dans les comportements d'adh�sion, mais davantage comme
un int�r�t r�ciproque � s'associer que comme une attitude solidaire
(Carrin 2002). Cette hypoth�se reste � confirmer par des �tudes appro-
pri�es ; mais il est fort possible que les m�nages soient r�ticents � s'as-
socier, dans un syst�me de partage du risque comme l'assurance, �
d'autres m�nages n'ayant pas un revenu au moins aussi �lev� que le leur.
   La subvention des primes d'assurance de certains m�nages par un
agent de financement ext�rieur soul�ve �galement plusieurs questions.
Cet apport ext�rieur est indispensable, car les assurances-sant� co-
mmunautaires, telles qu'elles existent actuellement, caract�ris�es par une
capacit� limit�e de partage du risque et de redistribution, ne peuvent
assumer seules des exemptions en faveur des pauvres sans mettre en p�ril
leur viabilit� financi�re (Waelkens et Criel 2004). Mais les modalit�s d'une
subvention ext�rieure sont probl�matiques. Si celle-ci est assur�e par
un bailleur de fonds, la question de la p�rennit� du syst�me se pose
in�vitablement. Si celle-ci est assur�e par l'�tat, encore faut-il que

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 425



celui-ci en ait la capacit� financi�re et que la r�allocation de ressources
publiques au profit de l'assurance fasse la d�monstration de son
opportunit�.
   Par ailleurs, si la perspective de l'intervention �tatique est la lutte
contre la pauvret�, elle devrait prendre la forme d'une action globale,
d'ampleur nationale, pour �tre coh�rente et efficace. Parle-t-on alors
d'un soutien �tatique partiel � une n�buleuse d'initiatives micro-
locales ne couvrant pas syst�matiquement l'ensemble de la popula-
tion ou d'une forme de syst�me national de protection sociale ? Les
�tudes sugg�rent de mani�re r�currente, plus comme une attente que
comme un constat, que les micro-assurances communautaires peuvent
constituer une premi�re �tape vers des syst�mes nationaux de protec-
tion sociale en familiarisant la population avec le concept d'assurance
maladie et en poussant l'�tat � d�velopper ses capacit�s d'organisation
et de r�gulation du secteur (Huber et al. 2003). Cette mise en relation
des assurances communautaires avec le cadre national est jug�e
souhaitable afin de temp�rer leurs limites, dont le faible partage du
risque d� � leur petite taille et l'absence de redistribution entre
groupes de revenu en raison de leur absence de mixit� sociale (Carrin
2002). Quant � ce dernier point, on peut d'ailleurs supposer que seul
un syst�me public pourrait � imposer � aux m�nages des diff�rents
groupes de revenus d'adh�rer � un syst�me redistributif.
   Face � ces attentes importantes, force est de rappeler, comme Ben-
nett (2004), que la plupart des assurances-sant� � base communautaire
sont mises en place dans des situations o�, pr�cis�ment, les gouverne-
ments ont peu de capacit�s de r�gulation et n'inspirent � leur popula-
tion qu'une confiance limit�e, contraintes auxquelles nous ajoutons les
limites des budgets publics.
   Enfin, en ce qui concerne les subventions, le probl�me des m�nages
vuln�rables se pose avec acuit�. La d�signation des pauvres repose sur un
crit�re clair : la position du revenu par rapport � la ligne de pauvret� �
m�me si ce crit�re est �videmment arbitraire et m�me si l'identification,
en pratique, des m�nages pauvres n'est pas chose ais�e. Mais l'identifica-
tion des m�nages vuln�rables pose des d�fis autrement plus grands : la
probabilit� qu'un m�nage passe sous la ligne de pauvret� � la suite de ses
d�penses de sant� d�pend de son revenu initial, mais aussi de l'ampleur
de ses d�penses de sant�, impossible � anticiper en raison du caract�re
impr�visible du risque maladie et des co�ts qui y sont associ�s. Il peut

426 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



donc �tre difficile d'envisager des mesures de protection cibl�es des
m�nages vuln�rables. Ce constat am�ne � promouvoir des interventions
visant les barri�res � l'acc�s aux soins et les d�ficits d'opportunit�, paral-
l�lement � des mesures cibl�es sur des sous-groupes de la population.
Ainsi, dans notre exemple, la subvention de la prime d'assurance des pau-
vres a des effets positifs pour son groupe-cible (diminution de l'intensit�
de la pauvret�) ; mais elle est par nature incapable de r�pondre � d'autres
aspects de la pauvret�, li�s aux m�nages vuln�rables (groupe quasiment
impossible � d�limiter et donc � cibler) ou � la situation des m�nages des
zones isol�es (probl�me d'ordre structurel), auxquels seules des mesures
globales peuvent r�pondre.
   Diverses strat�gies sont envisageables pour lever les barri�res � l'ac-
c�s aux soins et pour assurer une protection efficace des m�nages con-
tre les risques financiers li�s � la maladie. Certaines strat�gies, comme
le soutien � la micro-assurance sant�, ciblent davantage la demande de
services. D'autres ciblent davantage l'offre pour am�liorer, par exem-
ple, l'accessibilit� g�ographique des services publics, renforcer l'acc�s �
des services de qualit�, diminuer les prix de leurs prestations, voire
organiser des syst�me d'exemption pour les pauvres. La tentation peut
�tre forte, en situation de contrainte budg�taire, de ne retenir qu'une
alternative. Ainsi, si l'�tat choisit de subventionner la demande (dans
notre exemple, les primes d'assurance des m�nages pauvres), cela peut
se traduire par une r�allocation des ressources publiques vers les assu-
rances plut�t que vers les structures sanitaires (Bennett, 2004). Or nous
avons montr� les limites d'un tel choix pour les suppos�s b�n�ficiaires,
et rien n'indique qu'il conduise � une meilleure efficience allocative.
   En conclusion, les limites mises en lumi�re par nos simulations ne
doivent pas conduire � d�consid�rer l'apport potentiel de la micro-
assurance sant� dans la lutte contre la pauvret�. Elles invitent simple-
ment � temp�rer l'engouement suscit� par cette forme d'assurance et �
poursuivre la recherche d'une part sur son potentiel de protection
financi�re des m�nages assur�s, d'autre part sur sa capacit� � rejoindre
les m�nages pauvres et vuln�rables. Nos r�sultats soulignent que la
responsabilit� de la lutte contre la pauvret� et l'appauvrissement li� � la
sant� ne doit en aucun cas �tre d�l�gu�e aux assurances seules : il faut
�viter de se priver de moyens d'action potentiellement efficaces en les
�rigeant en alternatives mutuellement exclusives ; deux modalit�s d'ac-
tion, l'une centr�e sur l'offre � l'acc�s g�ographique et la subvention de
l'offre de soins � l'autre, centr�e sur la demande � l'assurance sant� �

        La contribution de l'assurance aux politiques de lutte contre la pauvret� � 427



pourraient se conjuguer efficacement pour diminuer l'appauvrissement
mon�taire caus� par les d�penses de sant�.
   Ce que notre r�flexion et nos simulations montrent surtout, c'est
qu'il est illusoire de penser que la g�n�ralisation de l'assurance com-
munautaire sera susceptible de r�soudre la crise du financement des
syst�mes de sant�. Le discours sur l'assurance-sant� tend parfois �
v�hiculer cette vision et assumer plus ou moins implicitement qu'il
s'agit d'un m�canisme qui, une fois g�n�ralis�, permettra de garantir
un niveau de financement appropri�, sans que les inconv�nients de la
tarification ne p�sent trop fortement sur les usagers. Il s'agit, selon
nous, d'un voeu pieux ; une forme de reconditionnement du mod�le de
participation financi�re des communaut�s promu dans le cadre de l'ini-
tiative de Bamako. A supposer m�me que l'assurance couvre l'ensemble
de la population, nos simulations montrent que, dans un contexte de
pays africain pauvre, la contribution globale de l'assurance communau-
taire � la lutte contre la pauvret� comme au financement global des
services de sant� ne peut qu'�tre limit�e. De plus, une couverture totale
de la population ne peut �tre r�alis�e qu'� l'aide de mesures permettant
de rejoindre les pauvres. Dans ces conditions, l'assurance n'est pas une
solution miracle auto-g�n�ratrice de revenus ; au contraire, elle exige
des investissements suppl�mentaires. Il convient d'�viter une r�inter-
pr�tation hasardeuse du r�le de l'assurance-sant� communautaire. Sa
principale finalit� r�side dans la protection financi�re des assur�s con-
tre des d�penses catastrophiques. L'assurance-sant� n'est pas un instru-
ment visant � corriger les inconv�nients de la tarification, et elle ne
pourra se substituer aux �tats ou � la communaut� internationale pour
r�soudre la crise du financement des syst�mes de sant�. Une simple
r�ing�ni�rie du mod�le de financement d�rivant de l'initiative de
Bamako ne suffit pas ; dans les pays africains � faible revenu, la r�solu-
tion de la crise du financement passe in�vitablement, comme le souli-
gnait d�j� la Commission Macro�conomie et Sant� (2002), par une
mobilisation significative de ressources additionnelles.



NOTES

 1. Le seuil � partir duquel on consid�re que les d�penses deviennent
catastrophiques varie. Carrin (2002) propose un seuil correspondant �
40 % du revenu d�duit des d�penses alimentaires.

428 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  2. Sachant que l'appauvrissement ainsi mesur� est un estim� mini-
mal. Une estimation compl�te aurait requis une �valuation des autres
pertes de productivit� et effets de long terme sur les composantes
mon�taires et non mon�taires du bien-�tre du m�nage.


  3. Si l'�cart initial moyen entre le revenu des pauvres et la ligne de
pauvret� �tait de 1000 francs et qu'il est d�sormais de 1500 francs, alors
chaque pauvre s'est en moyenne appauvri de 500 francs.


  4. Revenu disponible = revenu total par t�te (calcul�, ici, en termes
d'�quivalents-adultes) moins la valeur de la consommation alimentaire
par t�te.


  5. Professionnels de sant�, �tablissements de soins, vendeurs de
m�dicaments, prestataires du secteur informel ainsi que l'ensemble des
acteurs �conomiques offrant des services tels que le transport,
l'h�bergement, qui seront consomm�s dans le cadre du recours aux
soins


  6. Le montant moyen est inf�rieur � la valeur de la prime propos�e,
car 25 des 1602 m�nages ont un revenu disponible inf�rieur � la valeur
de la prime et ne peuvent, de ce fait, adh�rer � l'assurance.


  7. En fait, l'incidence de la pauvret� attribuable aux d�penses
directes augmente l�g�rement dans les deux cas par rapport � la situa-
tion d'absence d'assurance ; le pr�l�vement op�r� par la prime faisant
de certains m�nages, dont le revenu se situait l�g�rement au-dessus de
la ligne de pauvret�, de nouveaux pauvres.




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                                                                      CHAPITRE 15



              Les fonds d'�quit�, une strat�gie
               pour am�liorer l'acc�s aux soins
 de sant� des plus pauvres en Afrique ?

                         Mathieu Noirhomme, Jean-Marc Thom�




R�sum� : L'Initiative de Bamako a g�n�ralis� la participation financi�re de la
population dans de nombreux pays en voie de d�veloppement. Dans un souci
d'�quit�, la plupart des gouvernements concern�s ont d�cr�t� la gratuit� des
soins pour les plus pauvres. Les r�sultats de cette politique ont �t� d�cevants. Les
structures de sant�, g�n�ralement sous-financ�es, ne peuvent se permettre d'oc-
troyer trop d'exemptions. Il en r�sulte une exclusion financi�re des plus pauvres,
entra�nant une d�gradation de leur statut sanitaire et socio-�conomique.
   Les fonds d'�quit� proposent une alternative : cr�er un fonds charg� de com-
penser les prestataires pour les soins qu'ils prodiguent aux plus pauvres. Cette
id�e simple peut stimuler l'acc�s des plus pauvres aux soins de sant� et renforcer
la viabilit� �conomique des formations sanitaires.
   Plusieurs exp�riences ont �t� d�velopp�es avec succ�s au Cambodge. Une poli-
tique nationale y est actuellement en pr�paration. L'approche a �t� r�cemment
introduite dans plusieurs pays africains, dont le Mali, Madagascar et la Mau-
ritanie. Un premier examen de ces jeunes exp�riences semble confirmer, parfois
a contrario, les le�ons d�gag�es au Cambodge. Des le�ons compl�mentaires s'en
d�gagent, telle la n�cessit� d'un acteur fort pour le lancement et le suivi du
mod�le ou l'introduction d'une fonction d'assistance sociale au sein de l'h�pital.




                                                                                   431

432 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



INTRODUCTION

Suite � l'Initiative de Bamako, de nombreux pays africains ont intro-
duit la participation de la population au financement des soins de
sant�, en compl�ment des ressources publiques. Cette contribution de
la population est destin�e au financement des m�dicaments, de primes
de motivation au personnel ou de frais de fonctionnement. Combin� �
une d�marche active d'am�lioration de la qualit� des soins, ce syst�me
a rencontr� un certain succ�s en terme d'augmentation de la fr�quen-
tation des structures et de leur cofinancement (Audibert and Mathon-
nat 2000 ; Litvack and Bodart 1993). Dans d'autres cas, le r�sultat
final a �t� beaucoup moins positif. D'un c�t�, le surco�t pour le
patient peut entra�ner une baisse de l'utilisation des services (Gilson
1997). D'un autre, les ressources d�gag�es se sont parfois r�v�l�es
insuffisantes pour relever le salaire des prestataires � un niveau d�cent.
Les pratiques de survie persistent alors, telles que les paiements de
dessous-de-table ou l'absent�isme (Ensor 2004 ; Ferrinho and Van
Lerberghe 2000). Il en r�sulte une incertitude au niveau du co�t d'une
hospitalisation pour le patient, aggrav�e par les frais de participation
tels le transport ou la nourriture. Le cumul de ces frais constitue une
barri�re financi�re � l'acc�s aux soins (Thompson and Witter 2000),
qui influe n�gativement sur l'itin�raire th�rapeutique du patient. Les
pauvres sont les premiers touch�s, en particulier quand leurs pro-
bl�mes de sant� requi�rent des soins hospitaliers.
   Dans un souci d'�quit�, la plupart des gouvernements ont d�cr�t� la
gratuit� des soins pour les plus pauvres. En l'absence de m�canisme de
compensation pour le prestataire, les r�sultats de cette politique d'exemp-
tion ont �t� d�cevants. Souffrant d�j� d'un sous-financement, les
structures de sant� ne peuvent se permettre d'octroyer trop d'exemp-
tions. Les pauvres, anticipant leur exclusion, retardent leur recours �
la structure de sant� publique (Russell 1996) ou optent pour des alter-
natives plus accessibles mais de moindre qualit�. Il en r�sulte une
d�gradation de leur statut sanitaire et socio-�conomique (Ranson
2002 ; Xu et al. 2003) : sanitaire en raison d'un traitement tardif ou de
mauvaise qualit�, et socio-�conomique en raison d'une spirale d'endette-
ment et de d�penses irrationnelles dans laquelle le m�nage est rapide-
ment absorb�. Le cercle vicieux se referme : la pauvret� devient une
cause de mauvaise sant�, qui elle-m�me intensifie l'appauvrissement
(Meessen et al. 2003 ; Wagstaff 2002 ; Whitehead et al. 2001).

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 433



   Peu de r�ponses ont �t� apport�es jusqu'� pr�sent. L'ampleur des
frais li�s � une hospitalisation d�passe la capacit� des m�canismes de so-
lidarit� traditionnels. Les syst�mes formalis�s de protection sociale, s'ils
existent, ne s'adressent pas aux plus pauvres. Les gouvernements enfin
ne sont pas en mesure de d�velopper des m�canismes de redistribution.



PRINCIPES DES FONDS D'�QUIT�, ET PRINCIPALES LE�ONS
DES EXP�RIENCES CAMBODGIENNES

Dans la communaut� internationale, des voix s'�l�vent actuellement
pour r�clamer un retour � la gratuit� universelle dans les soins de
sant� (Save the Children 2005). Cette option radicale a ses attraits et
ses limites. Ses conditions d'application doivent encore faire l'objet
d'investigations plus approfondies. Les fonds d'�quit�1 proposent une
alternative, mitigeant les effets n�gatifs de la participation financi�re
des usagers, tout en permettant leur maintien2. L'id�e est d'instaurer
un syst�me de tiers-payeur qui garantit aux prestataires de soins une
juste compensation pour les services offerts aux plus pauvres. Les
objectifs pour le patient se formulent selon deux dimensions :

� Dimension � sant� publique � : Am�liorer l'acc�s aux soins de sant�
   pour les plus pauvres.

� Dimension � protection contre la pauvret� � : Eviter les d�penses de
   sant� catastrophiques (les d�penses de sant� entra�nant les m�nages
   dans la mis�re).


   La transaction classique entre prestataire et patient (payant) tient �
deux fonctions principales : (1) d�livrance de soins de sant� par le
prestataire (2) en �change d'un paiement par le patient.
   Cette fonction de paiement n'est pas � la port�e des plus pauvres.
Le principe du tiers-payeur s'y substitue en la divisant en :

1) Identification des patients n�cessitant une assistance financi�re.
     Deux objectifs : (1) �viter de dilapider des ressources vers des
     patients non pauvres (erreur d'inclusion) et (2) �viter d'exclure
     des patients pauvres (erreur d'exclusion).

2) Paiement au prestataire des soins consomm�s par les patients
     identifi�s.

434 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   En augmentant la patient�le des structures de sant� support�es3, le
fonds d'�quit� contribue � la promotion de leur utilisation et con-
tribue de mani�re significative � leur financement. Il est donc �gale-
ment conforme aux objectifs des prestataires de soins et des autorit�s
sanitaires. Il offre en outre l'opportunit� de d�velopper des activit�s
d'assistance sociale plus �labor�es aupr�s des patients pauvres hospi-
talis�s, incluant la d�fense de leurs droits d'usagers.
   Les premi�res exp�riences syst�matiques de fonds d'�quit� ont vu le
jour au Cambodge en 2000 (Bitran et al. 2003 ; Hardeman et al.
2004 ; Jacobs and Price 2005). Le mod�le, initi� par des ONG inter-
nationales, s'est d�velopp� et compte aujourd'hui 16 implantations.
Le succ�s a conduit � un projet de politique nationale, supervis�e par
le Minist�re de la Sant� et support�e par des bailleurs de fonds inter-
nationaux. Le Cambodge reste � ce jour le terrain de r�f�rence en la
mati�re. Certaines le�ons s'en d�gagent, qui peuvent servir de cadre
pour l'analyse de l'approche dans d'autres pays.

� Le�on 1 : l'impact en termes d'augmentation de l'acc�s aux soins
   par les plus pauvres est reconnu. Il a �t� d�montr� par la triple obser-
   vation suivante : (1) une augmentation de l'utilisation totale des
   services de sant� ; (2) une confirmation du profil de pauvres des
   b�n�ficiaires de l'assistance (�chantillonnage al�atoire) ; (3) l'absence
   d'une diminution de l'utilisation par les patients payants. On
   consid�re donc que les patients suppl�mentaires n'avaient pas acc�s
   auparavant, en raison de leur incapacit� de payer.

� Le�on 2 : Pour un m�nage, l'importance des d�penses en soins de
   sant� peut �tre due en grande part au recours � un secteur priv�
   informel de qualit� douteuse, qui capture le patient et retarde son
   acc�s � l'h�pital. La protection apport�e par le fonds d'�quit� tient
   donc non seulement dans le financement des soins de sant�, mais
   �galement dans son action de pr�vention contre des d�penses de
   sant� irrationnelles et peu pertinentes par les plus pauvres. M�me si
   les preuves restent �parses, les acteurs de terrain sont convaincus que
   les fonds d'�quit� ont un impact important en termes de protection
   sociale.

� Le�on 3 : La s�paration des fonctions est un principe fondamental
   des fonds d'�quit�. L'id�e centrale est d'�viter les conflits d'int�r�t.
   Pour un programme avec financement ext�rieur, confier l'identification

   Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 435



 des pauvres � la population seule r�sulterait probablement dans une
 multiplication des erreurs d'inclusion (tous ont int�r�t � b�n�ficier de
 soins hospitaliers gratuits). Accorder la gestion du fonds au prestataire
 produirait un r�sultat similaire (tout patient suppl�mentaire, quel que
 soit son statut �conomique, repr�sentant un revenu suppl�mentaire
 pour le prestataire). Ce principe conduit � distinguer les fonctions d'a-
 gent de financement, d'acheteur, de prestataire, d' � identificateur � et
 de contr�leur. Par ailleurs, deux acteurs apparaissent comme par-
 ticuli�rement importants : (1) l'initiateur de l'approche (au Cambodge,
 souvent une ONG internationale) qui joue un r�le de moteur, d'arbi-
 trage et d'expertise et (2) le gestionnaire local du fonds qui, en plus de
 proc�der au paiement du prestataire, assure une identification � l'h�pi-
 tal, ainsi que l'accueil et le suivi des b�n�ficiaires.

� Le�on 4 : Les exp�riences cambodgiennes ont clairement d�montr�
  le besoin d'un financement (1) suffisant car le co�t des soins de
 sant� d�passe largement les capacit�s locales4 (contribution de la
 population, budgets nationaux) ; (2) ext�rieur � la structure de
 sant� pour �viter le conflit d'int�r�t expos� ci-dessus, et largement
 d�montr� par les �checs des politiques d'exemption classiques. C'est
 le rel�chement de la contrainte budg�taire qui a permis de prouver la
 performance de l'approche au Cambodge, et d'apporter les argu-
 ments n�cessaires pour convaincre les bailleurs de fonds de financer
 une strat�gie nationale. La recherche d'une efficacit� op�ra-
 tionnelle de l'approche a donc r�sult� en une relative p�rennit�
 financi�re, via la s�curisation du financement, dans un contexte
 international o� la corr�lation entre mauvaise sant� et pauvret� est de
 plus en plus reconnue (Gwatkin et al. 2004 ; The World Bank 2005).

� Le�on 5 : Concevoir un fonds d'�quit� ne se r�sume pas � une sim-
  ple fonction de paiement. Il faut d�velopper une vision syst�mique
  de l'acc�s aux soins int�grant, en plus de la probl�matique de l'ac-
  cessibilit� financi�re, les questions relatives aux barri�res li�es au
  prestataire (heures d'ouverture, qualit� des services), � la distance,
  aux choix des usagers (habitudes de sant�, perception de la qualit�
  des soins, peur de peser sur la famille). Il faut donc veiller � adapter
  le mod�le au contexte, en tenant compte des raisons de la (non-) per-
  formance des structures de sant�, des m�canismes de protection exis-
  tants (ex : solidarit� villageoise, syst�mes confessionnels) � ne pas
  d�truire, et des int�r�ts des parties en pr�sence (ex : cofinancement

436 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  du prestataire). La bonne compr�hension du contexte permet
  notamment d'adapter le paquet de b�n�fices qui va �tre offert aux
  personnes assist�es (voir Le�on 7). De la sorte, travailler � la r�duc-
  tion de la barri�re financi�re contribuera � lever d'autres barri�res,
  telles que la distance (via le financement du transport), ou la pression
  sociale (incertitude quant au co�t, peur de l'endettement).

� Le�on 6 : Les fonds d'�quit� visent une augmentation de l'utilisa-
  tion des services de sant�. Il est donc imp�ratif de s'assurer que les
  structures support�es (1) d�livrent des soins de sant� de qualit� et (2)
  acceptent les conditions du fonds d'�quit�. Dans le cas contraire,
  l'impact tant au niveau sanitaire que socio-�conomique pourrait �tre
  nul, voire n�gatif. Cela suppose que le fonds d'�quit� s'inscrive en
  compl�ment � un service de sant� qui fonctionne correctement et
  que les conditions qui le sous-tendent fassent l'objet d'un consensus
  entre l'op�rateur et le prestataire, qui sera ou non formalis� via un
  contrat.

� Le�on 7 : Le paquet de b�n�fices doit �tre d�fini en fonction des
  barri�res � l'acc�s aux soins de sant� qui sont vuln�rables � une
  intervention financi�re. Il s'agit donc de s'attaquer aux d�penses
  diverses qui, pour une raison ou une autre, emp�chent le patient
  d'acc�der aux soins de sant�. A ce titre, la quasi totalit� des ex-
  p�riences cambodgiennes ont inclus dans le paquet de b�n�fices (1) la
  totalit� des soins disponibles au niveau de l'h�pital de district et (2)
  le financement des frais de transport. D'autres ont �galement inclus
  d'autres frais non m�dicaux (nourriture, draps, etc.) et le finance-
  ment des frais de sant� � l'�chelon sup�rieur. Ce dernier point
  repr�sente cependant un surco�t important.

� Le�on 8 : Diff�rents mod�les d'identification ont �t� test�s.
  Plusieurs distinctions s'imposent. (1) Une premi�re distinction peut
  �tre faite entre pr�-identification (au domicile du m�nage, avant le
  besoin de soins de sant�) et identification passive (� l'h�pital, au
  moment o� le patient n�cessite des soins). L'exp�rience cambodgien-
  ne a montr� que commencer par la seule identification passive �tait
  une strat�gie intelligente de lancement d'un fonds d'�quit�. Elle
  permet un d�marrage rapide de l'approche, une souplesse dans la
  s�lection, et concr�tise le r�le du tiers-payeur au sein de l'h�pital. La

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 437



   pr�-identification, plus longue et plus on�reuse, est consid�r�e
   comme plus fiable (on observe les caract�ristiques au domicile
   m�me) et plus s�curisante pour le patient (garantie de prise en
   charge avant l'apparition du probl�me de sant�). Ces deux derniers
   points restent cependant � l'�tat de pr�somption. (2) D'autres dis-
   tinctions apparaissent au niveau du degr� de formalisation des outils
   (de l'absence de crit�res jusqu'au questionnaire cot�), et des acteurs
   inclus dans la pr�-identification (de la communaut� aux enqu�teurs
   form�s) avec des impacts diff�rents en terme de co�ts, de perfor-
   mance suppos�e, et de collecte d'information socio-�conomique sur
   les identifi�s. (3) Les crit�res d'identification varient d'une exp�rience
   � l'autre. Ils ont chaque fois �t� construits par une d�marche d'essai et
   erreur, en testant les crit�res sur un �chantillon de la population.
   Leur efficacit� semble similaire, ce qui plaide pour une adaptation
   des crit�res au contexte.

� Le�on 9 : Les exp�riences cambodgiennes ont produit des r�sultats
   op�rationnellement int�ressants, mais � qualit� scientifique moyenne.
   En terme d'apprentissage, l'une des erreurs a sans doute �t� de ne pas
   avoir, d�s le d�part, d�velopp� et standardis� une batterie d'indica-
   teurs et d'enqu�tes permettant de d�gager une �vidence scientifique
   irr�futable. Celle-ci est facile � collecter si organis�e d�s le d�part,
   beaucoup plus malais�e si l'on cherche � la rattraper par la suite.



EXP�RIENCES EN AFRIQUE

Fournir des subventions aux les soins de sant� des plus pauvres via un
tiers-payeur n'est pas une id�e neuve en Afrique. On retrouve une
logique similaire dans des m�canismes de solidarit� traditionnels (la
communaut� payant pour ses pauvres) et certaines actions support�es
par des organisations non gouvernementales ou confessionnelles.
Cependant, les fonds d'�quit� cambodgiens repr�sentent probable-
ment la plus vaste exp�rience de formalisation de cette logique de
tiers-payeur. La seule fa�on de savoir si le mod�le a du sens sur le con-
tinent africain passe par le d�veloppement et la documentation d'ex-
p�riences. Dans cet article, nous passons en revue trois approches
appliquant une logique semblable : au Mali, en Mauritanie et � Mada-
gascar5.

438 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



M�thodes

Depuis juillet 2003, l'auteur principal concentre ses activit�s de consul-
tant et de chercheur sur les fonds d'�quit�. Il intervient fr�quemment au
Cambodge, et offre un appui au d�veloppement de strat�gies similaires
en Afrique sub-saharienne. A ce jour, il a pu rassembler suffisamment
d'informations sur les exp�riences d�crites dans cet article. Toutes trois
ont b�n�fici� de l'appui direct d'un des deux auteurs. Le coauteur a con-
tribu� activement � la gen�se des premi�res exp�riences au Cambodge
et consacre une part importante de son travail sur le sujet.
   Outre les observations faites par les auteurs sur le terrain, cet article
a tir� parti de la litt�rature grise produite dans le cadre des trois pro-
jets, ainsi que des donn�es de routine rassembl�es par les op�rateurs
des fonds d'�quit�.


Contexte

Le Mali, la Mauritanie et Madagascar ont des structures de financement
des soins de sant� similaires � celle d�crite dans notre introduction. Un
syst�me de participation financi�re y est en place, avec une politique
officielle d'exemption pour les plus pauvres. Les r�sultats de cette poli-
tique d'exemption restent tr�s faibles, en raison du sous-financement
des prestataires et du manque d'organisation de l'identification des plus
pauvres. Le besoin est pourtant criant, comme en t�moigne l'ampleur
de la population vivant en dessous du seuil de pauvret�6. Dans les trois
pays, un syst�me de tarification � l'acte est appliqu�. Chaque interven-
tion, m�dicament, examens (et dans certain cas chaque nuit�e) est fac-
tur�e au patient7 (except� sur les deux projets maliens cit�s, o� un sys-
t�me de paiement au forfait est test�). D'autres frais, officieux ou
externes � la structure de sant�, alourdissent la facture. Cela entra�ne
une ins�curisation de tout patient par rapport au co�t des services.
Enfin, les m�canismes de protection existants sont pratiquement
impuissants pour faciliter l'acc�s aux soins des plus pauvres.
   Derri�re l'h�t�rog�n�it� des contextes humains, on retrouve donc
une m�me r�alit� : des syst�mes peu favorables aux plus pauvres. Les
le�ons cambodgiennes seraient-elles �galement r�plicables ? Il n'y a
tr�s probablement pas d'universalit�. Toutefois, la connaissance des
succ�s et erreurs des fonds d'�quit� cambodgiens devraient permettre
d'acc�l�rer le d�veloppement des exp�riences africaines.

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 439



Les interventions

Au Mali, des Fonds d'Assistance M�dicale ont �t� d�velopp�s dans
deux Centres de Sant� de R�f�rence, �quivalents � des h�pitaux de
district : � S�lingu� en 2001 et � Bougouni en 2003 (Ngwakum
2005 ; Tour� and Bor� 2004). Le mod�le retenu r�sulte d'un consen-
sus entre repr�sentants des autorit�s sanitaires et administratives,
soci�t� civile et l'ONG M�decins Sans Fronti�res (MSF) Luxem-
bourg. Les initiateurs ont cherch� � cr�er un mod�le participatif, avec
une d�pendance minimale par rapport aux acteurs externes � la zone
de sant�. Cela se manifeste tant au niveau du mod�le de fonction-
nement que des options de financement retenues.
   Le Fonds d'Assistance M�dicale (FAM) s'adresse � deux cat�gories
de patients : (1) les indigents, d�finis comme � toute personne sans
ressources, ne b�n�ficiant d'aucun soutien social8 � et (2) les pauvres
en difficult� de paiement. Les premiers b�n�ficient d'une exemption
de tous les frais m�dicaux aupr�s de la structure de sant� ; les seconds
de facilit�s de paiement via un syst�me de cr�dit � rembourser. Selon
les cas, les services propos�s peuvent s'�tendre au transport de
r�f�rence vers l'�chelon sup�rieur ainsi qu'� l'octroi de nourriture ou
de produits d'hygi�ne.
   Les fonctions principales du FAM sont assur�es par le personnel de
la structure de sant�. La formalisation des outils est minimale pour ne
pas rajouter de pression administrative. Seule une m�thode d'identifi-
cation passive lors de l'�pisode de maladie a �t� retenue. Lors de son
s�jour, tout patient en difficult� de paiement peut requ�rir l'assistance
du Service Social de l'h�pital. L'assistant social proc�de � un entretien
non structur� pour d�terminer l'�ligibilit� du candidat et �valuer ses
besoins. Le comptable de la structure de sant� se charge du paiement
des services. Une politique de cofinancement a �t� �rig�e, avec un
soutien de d�part de MSF. La supervision et la d�finition des orienta-
tions strat�giques sont confi�es � un comit� de gestion rassemblant les
diff�rentes parties en pr�sence.
   Malgr� des efforts importants d'appropriation par les acteurs locaux,
les exp�riences maliennes sont rest�es relativement modestes en termes
de r�sultats. Apr�s trois ann�es d'existence, le FAM de S�lingu� n'avait
support� que 2 % des patients hospitalis�s. Parmi eux, seuls 9 %
�taient consid�r�s comme indigents et int�gralement exempt�s de leurs
frais m�dicaux. Ceci est li� � une d�finition volontairement restrictive

440 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



de l'indigence. Parmi les 91 % restants, 60 concernaient des cr�dits en
attente de paiement, et 19 des cr�diteurs d�c�d�s. Sur la m�me p�ri-
ode, 57 % des ressources ont repos� sur les fonds de MSF, r�sultant
d'une faible r�ponse des sources de financement locales. Enfin, le
manque d'implication du Comit� de Gestion a r�duit les possibilit�s de
d�veloppement participatif et de contr�le social de l'approche, en lais-
sant les responsabilit�s entre les mains de l'assistant social et du comp-
table du centre de sant�.
   En Mauritanie, la GTZ (Gesellschaft f�r Technische Zusammenar-
beit) a initi� fin 2002 une r�flexion sur un syst�me de fonds d'indigence,
destin� � favoriser l'acc�s aux soins de sant� des plus pauvres dans les
r�gions des Hodh El Garbi et Hodh El Chargi. Celle-ci a pris la forme
d'un processus de concertation entre tous les acteurs concern�s9, dans
une volont� d'ancrage dans le contexte socioculturel, religieux et poli-
tique. Ce processus a entre autres donn� lieu � la cr�ation d'un d�cret
islamique national, une fatwa, visant � promouvoir les fonds d'indi-
gence. Les programmes ont d�marr� en juillet 2003, autour de 17 struc-
tures de sant� pilotes couvrant les trois premiers �chelons du syst�me
sanitaire. La GTZ s'est retir�e de ses programmes m�dicaux dans la
r�gion au m�me moment, laissant un budget de fonctionnement aupr�s
des autorit�s sanitaires r�gionales pour couvrir les frais de supervision.
   D'apr�s la d�finition ressortant d'un atelier de consensus, est con-
sid�r� comme indigent � tout m�nage dans l'incapacit� de satisfaire
un besoin alimentaire �l�mentaire �. Les membres des m�nages
retenus peuvent b�n�ficier de la gratuit� des soins aupr�s de la struc-
ture de sant� et des �chelons sup�rieurs jusqu'� l'h�pital r�gional,
ainsi que du transport de r�f�rence pour l'h�pital r�gional.
   Les principales fonctions sont d�centralis�es dans chaque zone
pilote � des comit�s d'indigence locaux. Un effort pr�alable de stan-
dardisation a �t� fait, � travers le d�veloppement d'outils de gestion
standards et la formation des comit�s d'indigence � leur utilisation.
Ces comit�s se composent principalement de notables, autorit�s
religieuses, administratives et agents de sant�. Ils b�n�ficient d'une
grande autonomie dans leur mode de fonctionnement. Leurs princi-
pales fonctions sont l'identification des indigents, la collecte et la ges-
tion des ressources financi�res, et le paiement de la structure de sant�.
   Le comit� �dite une liste d'indigents, bas�e sur sa connaissance de
la communaut� et sur son appropriation de la d�finition. Apr�s
approbation par les autorit�s sanitaires r�gionales et validation par

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 441



l'imam local, chaque membre des m�nages retenus re�oit une carte
d'indigence qui lui ouvre acc�s aux services du fonds en cas de ma-
ladie. Les individus non-identifi�s peuvent demander au comit� leur
affiliation lorsqu'ils recourent aux structures de sant� support�es.
   Le fonds g�r� par le comit� est aliment� par un financement mixte
provenant de l'�tat, des recettes de la structure de sant�, des com-
munes et de la population. La fatwa offre une source de financement
compl�mentaire, en autorisant le versement de la Zak�t10 dans le
fonds d'indigence. Les autorit�s sanitaires r�gionales sont charg�es de
superviser le fonctionnement des fonds d'indigence locaux.
   En pratique, les activit�s de support et de supervision depuis le
lancement des projets sont rest�es tr�s rares et peu structur�es. Apr�s
deux ans d'existence, aucun chiffre pr�cis n'�tait disponible concer-
nant les exp�riences de fonds d'indigence mauritaniennes. On les sait
cependant faibles, les b�n�ficiaires ne d�passant probablement pas
2 % des utilisateurs des structures de sant�. Ce chiffre est encore
inf�rieur au niveau des h�pitaux. Pass�e la cr�ation d'outils, les efforts
de standardisation sont rest�s des �v�nements isol�s : la formation des
comit�s n'a dur� qu'un jour, laissant toute flexibilit� aux comit�s sur
leurs objectifs et m�thodes de travail. D'une zone � l'autre, le fonds
d'indigence diverge, certains comit�s s'�tant m�me content�s d'�tablir
une liste d'indigents. Le financement des fonds d'indigence a princi-
palement pes� sur le budget de l'�tat et les revenus des structures de
sant�, diminuant la capacit� de prise en charge. Les ressources
d�gag�es par la fatwa sont rest�es tr�s maigres, malgr� la qualit� du
document. Cela tient probablement � la limitation de la sensibilisation
� une session orale d'information dans chaque zone de sant�, alors que
le syst�me de versement de la Zak�t r�pond � une tradition s�culaire.


   � Madagascar, la GTZ soutient le d�veloppement d'un fonds
d'�quit� � l'h�pital de district de Marovoay depuis janvier 2005. Il
couvre la population des deux districts administratifs de Marovoay et
Ambato Boeni (Noirhomme and Criel 2004). La r�flexion, d�but�e en
avril 2004, s'est faite en concertation avec les autorit�s sanitaires,
religieuses et administratives au niveau de la province et du district.
Les efforts de communication au niveau national visent � favoriser la
visibilit� de l'approche aupr�s des autorit�s d'Antanarivo.
   Le fonds d'�quit� vise une population vuln�rable mixte, compos�e
d'indigents (estim�s � 20 % de la population totale), de personnes en

442 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



difficult� temporaire de paiement (20 % suppl�mentaires, principale-
ment en p�riode de soudure) et de parturientes (quel que soit leur
statut socio-�conomique). Le paquet de b�n�fices comprend la totalit�
des soins � l'h�pital de Marovoay, les frais de transport du domicile �
l'h�pital pour le patient et un accompagnant, et la nourriture du
patient durant son hospitalisation.
   Les fonctions ont �t� r�parties entre diff�rents acteurs locaux. Deux
m�thodes d'identification se combinent. (1) Une pr�-identification,
conduite par des groupements oecum�niques constitu�s � cette occa-
sion dans chaque zone de sant�. Elle est ensuite valid�e par le comit�
de gestion du centre de sant� de la zone. (2) Une identification passive
au sein de l'h�pital, assur�e par des assistantes sociales pay�es par le
fonds d'�quit�. A ce stade, il n'y a pas de r�elle formalisation des
crit�res et proc�dures d'identification des groupements oecum�niques.
Dans un premier temps, l'objectif est de b�n�ficier de la connaissance
intrins�que que les religieux ont de leur population. Un bureau d'�tude
local contr�le ensuite les r�sultats de l'identification sur le terrain, et
d�termine de mani�re empirique une liste d'indicateurs de pauvret�
communs � tous les � vrais pauvres � identifi�s. Les assistantes sociales
tiennent �galement le r�le de gestionnaire local du fonds et d�fendent
les droits des patients aupr�s des autorit�s hospitali�res. L'exp�rience
est pilot�e par un bureau ex�cutif, compos� de repr�sentants de toutes
les parties concern�es. Ce bureau d�cide entre autres du paiement du
prestataire, apr�s pr�sentation des r�sultats par les assistantes sociales.
   Le financement p�se principalement sur la KfW (Kreditanstalt f�r
Wiederaufbau) et la GTZ qui prennent respectivement en charge les
frais d'hospitalisation et les frais administratifs. Le transport est financ�
par les communaut�s, via les groupements oecum�niques, et les frais de
nourriture par les budgets de l'�tat. Les estimations tablent sur un
budget annuel d'approximativement 30.000 euros pour une population
totale de 300.000 habitants, avec des taux d'hospitalisation variant
entre 7,5 et 15 �/�� pour les 20 % d'indigents permanents, et 7,5 �/��
pour les indigents temporaires, principalement durant les trois mois de
soudure. Ceci porterait le co�t de cette � assurance hospitalisation �
pour les plus pauvres � 10 centimes d'euro par habitant et par an.
   L'identification par les groupements oecum�niques s'est av�r�e
assez restrictive. Seuls 2 % de la population ont �t� identifi�s comme
indigents, alors que les projections tablaient sur une identification

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 443



pr�alable de 5 %. Celle-ci devrait s'�tendre, apr�s d�veloppement des
outils par le bureau d'�tude local. Les taux d'utilisation sur les six pre-
miers mois de l'approche sont satisfaisants : 12,5 % des hospitalisa-
tions ont concern� des b�n�ficiaires du fonds d'�quit�, auxquels se
rajoutent 1,7 % de patients b�n�ficiant de facilit�s de paiement. 40 %
de ces hospitalisations concernent des interventions chirurgicales. La
fonction d'accompagnement social semble s'�tendre aux non-
b�n�ficiaires, ce qui constitue une externalit� positive inattendue. Le
Bureau Ex�cutif suit r�guli�rement les indicateurs de performance et
veille � la coll�gialit� des d�cisions. Le financement des soins de sant�
est suffisant et satisfait le prestataire de soin. Par contre, les frais hors
bailleur externe posent probl�me : les capacit�s de contribution des
communaut�s pour le transport sont limit�es et r�duisent fortement
l'acc�s pour les populations les plus �loign�es, et les dotations en
nutriments ont �t� supprim�es des budgets de l'�tat.


Le�ons pr�liminaires des exp�riences africaines

Les mod�les d�crits dans cet article t�moignent de l'�mergence d'un
processus de r�flexion autour de l'acc�s aux soins des plus pauvres,
avec la recherche d'une alternative aux m�canismes d'exemption clas-
siques. Leurs r�sultats sont louables, mais mitig�s. Le nombre de
b�n�ficiaires reste faible dans les exp�riences maliennes et mauri-
taniennes. Marovoay affiche des r�sultats encourageants, mais sans
doute encore trop r�cents pour mener � conclusions.
   Les raisons sont � chercher dans les le�ons cambodgiennes, dont
certaines se confirment a contrario. Les exp�riences africaines nous
permettent d'en mettre de nouvelles en �vidence.

� Le�on 1 : Le Cambodge nous a aid�s � comprendre l'importance
   d'un financement suffisant. Au Mali et en Mauritanie, l'architec-
   ture institutionnelle a prim� sur une vraie ambition en termes de
   couverture. On le constate � travers : (1) l'absence d'estimation
   pr�alable du budget n�cessaire pour rencontrer les besoins en soins
   de sant�11 et (2) la focalisation sur les sources de financement locales,
   sans tenir compte de leur capacit� de contribution. Ceci a men� � un
   sous-financement structurel condamnant les interventions � des
   r�sultats insatisfaisants en termes de population assist�e. A noter qu'�

444 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  Marovoay �galement, les sources de financement locales se sont
  r�v�l�es peu fiables jusqu'� pr�sent12.
     Notre analyse est que trop de timidit� nuit aux fonds d'�quit�. Les
  besoins importants des plus pauvres requi�rent des moyens finan-
  ciers suffisants. Autant ces budgets sont modestes au regard d'un
  bailleur13, autant ils sont infinan�ables par les seules communaut�s
  locales. Pour un gouvernement ou un op�rateur, le premier objectif
  doit plut�t �tre la d�monstration de l'efficacit� de la strat�gie.
  L'exp�rience cambodgienne a montr� que cette �tape franchie, les
  bailleurs peuvent faire preuve d'un enthousiasme massif.

� Le�on 2 : Tout programme de d�veloppement demande suivi et coor-
  dination. L'assistance sociale ne fait pas exception. Ceci met en
  �vidence la n�cessit� d'un acteur-moteur qui lance l'approche et la
  maintienne sur les rails. Ce r�le doit se manifester non seulement au
  stade de formulation de l'approche, mais aussi lors de sa mise en
  oeuvre et de son �valuation. Lors de la formulation du programme, de
  ses objectifs et de ses outils, l'acteur-moteur doit mod�rer les d�bats,
  pour aboutir � un mod�le adapt� � son contexte et aux int�r�ts des par-
  ties en pr�sence. Ce r�le a �t� correctement rempli dans les trois
  exp�riences africaines. Lors de la mise en oeuvre, il s'agit de faciliter
  l'appropriation de l'approche par les acteurs locaux et de s'assurer que
  les op�rations sont coh�rentes avec le consensus d�gag� lors de la for-
  mulation. On ne retrouve que partiellement cette coh�rence en Mauri-
  tanie (de nombreux comit�s d'indigence se sont �cart�s du mod�le de
  base, sans que les autorit�s sanitaires interviennent) et au Mali (la plu-
  part des b�n�ficiaires ne sont pas des patients en incapacit� permanente
  de paiement). L'acteur-moteur peut enfin aider au stade de l'�valuation
  des r�sultats en contribuant � la d�finition et au suivi des indicateurs de
  performance, � l'identification des probl�mes, et � leur r�solution.
     Il est int�ressant de noter que l'identit� de cet acteur-moteur est
  consid�r�e comme l'un des principaux d�fis des projets pilotes �
  lancer � Madagascar et au Kenya (voir infra). La fonction ne doit pas
  n�cessairement �tre assum�e par des organisations ext�rieures de
  type ONG ou agences de coop�ration. Par contre les candidats
  doivent (1) avoir une expertise suffisante sur le sujet et le contexte
  local ; (2) faire preuve de neutralit� par rapport aux parties en
  pr�sence ; (3) avoir de bonne capacit� de n�gociation, ainsi que de
  (4) bonnes capacit�s d'analyse.

   Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 445



� Le�on 3 : L'absence d'un organe de pilotage comp�tent nuit � la
 performance d'un fonds d'�quit�. Cet organe peut comprendre, mais
 ne se limite pas �, l'acteur moteur �voqu� ci-dessus. En Mauritanie
 et au Mali, la quasi int�gralit� des r�les a �t� d�centralis�e respec-
 tivement aux comit�s d'indigence et au personnel de l'h�pital. Le
 manque de coordination induit un risque de faible mise en oeuvre des
 d�cisions14, de diversion des objectifs originaux et de mauvaise
  organisation de la collecte des donn�es. En cons�quence, dans les
  deux exp�riences, les d�cisions d'adaptation du mod�le et d'exten-
  sion de l'approche se prennent sur base d'impressions et de cro-
  yances plus que de faits soutenus par des r�sultats. En Mauritanie,
  cette d�centralisation excessive a men� dans certains cas � l'�mer-
  gence de programmes tellement diff�rents qu'ils ne conservent que
  peu de points de comparaison.
     Or, pour qu'une approche soit pilotable, il faut (1) que ces r�sul-
  tats soient objectivables, et (2) qu'elle reste conforme � certains
  principes de base. Cela n'exclut en rien l'adaptation du mod�le aux
  opportunit�s et contraintes locales. Un organe de pilotage peut
  veiller � assurer cet �quilibre n�cessaire entre d�centralisation et
  coordination. Son r�le est de tirer les le�ons des exp�riences et
  d'orienter les d�cisions en fonction des r�sultats. Cela suppose la
  d�finition d'indicateurs et l'organisation d'un syst�me de collecte de
  donn�es, comme nous en soulignions le besoin sur les fonds d'�quit�
  cambodgiens. On retrouve un tel organe sur l'exp�rience de
  Marovoay. La Mauritanie et le Mali en ont fait une �bauche mais sa
  mise en oeuvre a manqu� de formalisation et de rigueur.

� Le�on 4 : En Mauritanie, la d�faillance de certains comit�s a entra�n�
  l'�chec du fonds d'indigence sur leur zone de sant�. Au Mali, l'assis-
  tant social est souvent influenc� par des membres de l'h�pital, ou par
  certaines personnes importantes de la communaut�. Cela met en �vi-
  dence la n�cessit�, d�j� soulign�e au Cambodge, d'une diversification
  des acteurs. Leur choix doit d�pendre de (1) leur comp�tence et
  engagement � remplir la fonction et (2) leur absence de conflits
  d'int�r�ts et leur capacit� de r�sistance aux pressions. Il peut �tre
  int�ressant � cet �gard de (3) partager les responsabilit�s sur certaines
  fonctions, comme c'est le cas � Marovoay o� l'identification rel�ve des
  groupements oecum�niques, des assistantes sociales et du bureau
  d'�tude local. Cela permet d'�tablir des (4) m�canismes de contr�le

446 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  crois�s entre les acteurs, et dans certains cas de les d�douaner de cer-
  taines responsabilit�s par rapport � la communaut� � travers, par
  exemple, une fonction de supervision externe.
     Les exp�riences africaines ont de plus permis de souligner l'impor-
  tance des opportunit�s du contexte dans le choix des acteurs. Nous
  retenons particuli�rement (1) les chefs religieux en Mauritanie : dans
  une r�publique islamique, la fatwa qu'ils ont r�dig�e rec�le un poten-
  tiel en termes de communication et d'acceptabilit� de l'approche ;
  (2) les groupements oecum�niques charg�s de la pr�-identification �
  Marovoay, qui s'inscrivent dans une tradition de solidarit� entre les
  religions � Madagascar.

� Le�on 5 : Au Cambodge, les op�rateurs du Fonds d'Equit� se sont
  souvent vu reprocher leur focalisation sur les t�ches administratives,
  au d�triment des fonctions plus empathiques de suivi et de soutien
  des patients. A Marovoay, les assistantes sociales montrent qu'il est
  possible de d�velopper un vrai r�le d'assistance psychologique, y
  compris aux non-b�n�ficiaires. Cela tient tr�s probablement � leur
  statut. Elles sont (1) externes au personnel de l'h�pital et � sa hi�rar-
  chie, (2) pay�es par le fonds d'�quit� et (3) ont une fonction
  d'acheteur de services, ce qui leur donne un certain pouvoir de n�go-
  ciation. Bien que provisoires, ces r�sultats m�riteraient d'�tre suivis.

� Le�on 6 : L'identification s'av�re tr�s restrictive dans les trois
  exp�riences15. Les contraintes budg�taires peuvent apporter une
  explication partielle en Mauritanie et au Mali. Toutefois les faibles
  taux de pr�-identification dans l'exp�rience de Marovoay nous
  poussent � rechercher d'autres causes. L'organisation sociale en
  Afrique sub-saharienne rurale est souvent d�peinte comme forte-
  ment communautaire, et organis�e autour de traditions de solida-
  rit� familiale �largie. Cela expliquerait peut-�tre que l'�ligibilit� soit
  r�duite � l'indigence, elle-m�me assimil�e � l'exclusion sociale16. A
  contrario la communaut� se percevrait � tort ou � raison comme
  �galitaire, d'o� ses r�ticences � �tablir des distinctions en son sein.
  Quel qu'en soit la raison, la notion de pauvret� semble soit englober
  l'ensemble de la communaut�, soit se restreindre � quelques indi-
  vidus isol�s. Notre population cible se situe probablement entre les
  deux. Cela appelle � la cr�ation d'outils sp�cifiques, via la diversifica-
  tion des exp�riences d'identification en Afrique, et � l'application
  souple de la logique de fonds d'�quit�.

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 447



PERSPECTIVES � D�FIS FUTURS

Les exp�riences existantes de fonds d'�quit� ont toutes �t� d�velopp�es
localement. Au Cambodge, cela a conduit � un processus d'�mulation
entre acteurs de terrain qui a finalement abouti au d�veloppement d'un
programme national. Nous assistons actuellement � un mouvement
inverse dans d'autres contextes. A Madagascar (Noirhomme et al.
2005) et au Kenya, c'est le Minist�re de la Sant� qui s'appr�te � lancer
en 2006 des programmes pilotes dans des h�pitaux d�centralis�s, avec
le soutien financier de bailleurs internationaux.
   Cette approche du haut vers le bas, encore in�dite � notre connais-
sance, inscrit les fonds d'�quit� dans le cadre institutionnel �tatique.
Cela engendre de nouvelles questions et contraintes en termes de
capacit� de mise en oeuvre des op�rations sur les terrains pilotes, de
diversification des acteurs, et de modalit�s de financement. A ce stade,
seules les grandes lignes des programmes sont dress�es. Il en ressort
d�j� deux dimensions int�ressantes.
   La premi�re concerne la s�curisation financi�re des fonds d'�quit�.
Dans les exp�riences cambodgiennes, l'appui financier des agences
internationales appara�t comme une �tape interm�diaire, avant la
s�curisation des sources de financement via un programme national.
L'exp�rience de Marovoay table sur une m�me logique. Le pari n'est pas
gagn� d'avance. Cela demande � terme un engagement (1) politique des
minist�res concern�s, et (2) financier des bailleurs internationaux qui les
soutiennent. A Madagascar et au Kenya, cet engagement est pr�sent
d'entr�e de jeu. Les fonds d'�quit� y sont per�us comme un outil poten-
tiel de r�duction de la pauvret�, s'int�grant dans une r�flexion sur la
r�forme du financement de la sant�. Des r�sultats probants justifieraient
le maintien d'une ligne de financement sp�cifique.
   Cela demande toutefois de pouvoir mesurer les r�sultats et leurs
causes. Dans les deux pays, il a �t� d�cid� que les programmes d�cen-
tralis�s seraient � la fois similaires et diff�rents. Similaires car r�pon-
dant � des objectifs et principes de fonctionnement arr�t�s au niveau
central. Diff�rents car adapt�s aux contraintes et opportunit�s du con-
texte. Une approche du haut vers le bas repr�sente ici aussi un avan-
tage. Le pilotage au niveau national permet d'imposer une uniformi-
sation des indicateurs de suivi et m�thodes de collecte de donn�es.
Cela garantirait une comparabilit� qui devrait aider � identifier les
avantages strat�giques de chaque approche et � orienter les d�cisions

448 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



politiques futures. L'absence d'un tel syst�me reste la principale frus-
tration des d�cideurs et des scientifiques au Cambodge.
   L'int�r�t manifest� � Madagascar et au Kenya tient � la conscience
croissante des liens entre pauvret� et sant�. Les pr�occupations qui
innervent l'aide internationale ont de fait chang�. La lutte contre la
pauvret� est aujourd'hui centrale, tant dans les discours que les plans
d'action17. Les fonds d'�quit� s'inscrivent dans cette logique. Ils
offrent une strat�gie efficiente, simple � mettre en oeuvre et offrant
rapidement des r�sultats concrets. En ce sens, ils sont susceptibles de
s�duire d'autres gouvernements.
   Les fonds d'�quit� rec�lent de plus un potentiel encore inexploit� �
ce jour. L'un des principaux d�veloppements envisag� concerne leur
int�gration au sein d'un syst�me d'assurance maladie. Le fonds
d'�quit� ne paierait plus les soins de sant� consomm�s, mais les primes
d'assurances des patients les plus pauvres. Cela renforcerait la viabilit�
des assurances, et favoriserait l'�mergence de m�canismes d'assistance
sociale universelle. Le Rwanda par exemple avance vers un tel mod�le.
   Parall�lement, des fonds d'�quit� pourraient �tre �tablis pour des
cat�gories de patients sp�cifiques, telles que les patients souffrant du
SIDA ou de la tuberculose. Les maladies chroniques entra�nent en
effet des d�penses r�currentes susceptibles de plonger les m�nages
dans la pauvret�. Enfin, il y a d'�videntes synergies entre les fonds
d'�quit� et les autres programmes d'assistance sociale pour les plus
pauvres, tels que l'aide alimentaire ou les bourses scolaires. Ne peut-
on r�ver et imaginer une convergence vers un embryon de syst�me de
protection sociale ? L'avenir nous le dira.



REMERCIEMENTS

Les auteurs tiennent � remercier les autorit�s sanitaires, administra-
tives et religieuses des provinces et r�gions o� les exp�riences d�crites
se sont d�velopp�es. Ils remercient particuli�rement, pour leurs com-
mentaires sur une premi�re version du texte, Paul Ngwakum
(M�decins Sans Fronti�res Luxembourg au Mali), Dieter K�cher
(GTZ Madagascar), Ahmed Ould Aida (conseiller aupr�s de la GTZ
en Mauritanie), Wim Van Damme et Bruno Meessen (Institut de
M�decine Tropicale d'Anvers).

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 449



NOTES

  1. � Fonds d'Equit� � ou � Health Equity Funds � est la d�nomina-
tion consensuelle utilis�e au Cambodge pour ce type de strat�gie, et qui
tend � s'imposer dans la litt�rature scientifique. Dans d'autres pays, elle
est d�nomm�e � fonds de solidarit� �, � Fonds d'Assistance Maladie �
(au Mali) ou � Fonds d'Indigence � (en Mauritanie).


  2. Un fonds d'�quit� est �galement envisageable dans un contexte de
gratuit� universelle des soins. En effet, les co�ts de participation (trans-
port, nourriture) subsistent, et peuvent repr�senter une barri�re finan-
ci�re pour les plus pauvres.


  3. Qui sont, dans l'int�gralit� des cas existants, des structures de
sant� publique.


  4. Les mod�les qui ont compt� sur ces seules sources locales ont
conduit � de s�v�res restrictions de l'acc�s aux soins.


  5. D'autres exp�riences existent ou vont �tre lanc�es prochainement
en Afrique. Elles restent rares. Notre s�lection est fonction de la dur�e
des exp�riences et de la disponibilit� des informations.


  6. Le pourcentage de la population vivant en dessous du seuil de
pauvret� (fix� � un dollar international par personne et par jour) est
estim� � 34.1 % au Cambodge, 25.9 % en Mauritanie, 49.1 % � Mada-
gascar et 72.8 % au Mali (The World Bank 2004).


  7. Ceci constitue une diff�rence entre ces trois pays et le Cambodge,
o� (officiellement) seul l'acte m�dical est factur�.


  8. Les concepteurs du FAM ont repris la d�finition formul�e en
1968 � l'attention des services sociaux �tatiques. Les acteurs locaux la
limitent aux orphelins, personnes �g�es isol�es, handicap�s et toute autre
personne vuln�rable dont l'identification est facile et n'appelle pas de
remise en question. Cette d�finition tente de pr�munir l'identificateur
des pressions sociales.

450 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  9. Trois grands volets ont marqu� ce processus de concertation :
(1) une s�rie de r�unions avec les autorit�s sanitaires, administratives et
religieuses ; (2) une recherche sur la probl�matique de l'indigence et de
l'acc�s aux soins et (3) un atelier de concertation ouvert � tous les
acteurs locaux concern�s, et destin� � jeter les bases d'un modus
operandi.


10. La Zak�t est un des m�canismes de solidarit� islamique, et un des
piliers de l'islam. Chaque musulman qui en a les moyens doit distribuer
2,5 % de son b�n�fice annuel aupr�s de pauvres qu'il conna�t. La par-
ticularit� de la fatwa est d'avoir d�li� le donateur de cette condition de
proximit�, en d�signant le fonds d'indigence comme destination
acceptable de la Zak�t au regard de l'islam.


11. Ou, � l'inverse, un plafonnement du nombre de patients que le
projet pourra supporter en fonction des ressources attendues (comme �
S�lingu� o� les b�n�ficiaires furent plafonn�s � 50 par an).


12. Nous trouvons un constat similaire au Cambodge : apr�s deux ans
d'existence, le Fonds d'Equit� de Kirivong montrait de faibles r�sultats
en termes d'acc�s � l'h�pital. Il s'est donc tourn� vers un bailleur
externe pour ce volet du financement. A noter que la population con-
tinue � financer les soins d�livr�s aux centres de sant�.


13. Les estimations de Marovoay � en ligne avec les exp�riences cam-
bodgiennes � peuvent nous en donner une id�e. Bien que l'utilisation
effective n'ait pas encore atteint les r�sultats escompt�s, l'estimation de
10 centimes d'euro par habitant semble r�aliste dans des conditions
similaires.


14. Ceci est particuli�rement flagrant en Mauritanie o� la fatwa est
rest�e lettre morte, et la plupart des outils d�velopp�s n�glig�s par les
comit�s.


15. En comparaison, dans de nombreuses exp�riences cambodgien-
nes, les listes de pr�-identification comptent pour 10 � 20 % de la popu-
lation totale, et les b�n�ficiaires du fonds d'�quit� pour 10 � 50 % des
hospitalisations.

    Les fonds d'�quit�, une strat�gie pour am�liorer l'acc�s aux soins de sant� ? � 451



16. Comme dans de nombreux cas o� seuls sont identifi�s le fou du
village, l'orphelin et la personne �g�e sans famille.


17. On la retrouve entre autres dans l'initiative en faveur des Pays
Pauvres Tr�s Endett�s, les Documents Strat�giques de R�duction de la
Pauvret� et les Objectifs du Mill�naire pour le D�veloppement.




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                                                            PARTIE 4

                                       Perspectives

Chapitre 16 : L'assurance maladie obligatoire : Transition vers
la couverture universelle et �valuation de la performance
   G. Carrin, C. James

Chapitre 17 : Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique
francophone
   P. Fournier, C. Tourigny

Chapitre 18 : Assurance maladie : facteurs de lutte contre l'inegalit� et
la vuln�rabilit� et relation positive vis-�-vis de la croissance
   Pascal Brouillet


                                                                       CHAPITRE 16



                                           L'assurance maladie
                         obligatoire : Transition vers
                                la couverture universelle
                 et �valuation de la performance

                                                 Guy Carrin, Chris James




R�sum� : L'Assurance Maladie Obligatoire (AMO) est une des m�thodes princi-
pales de financement de la sant�. Plusieurs pays � faible ou moyen revenus sont
actuellement int�ress�s par l'extension de la couverture de leur assurance maladie
existante � des groupes sp�cifiques pour couvrir �ventuellement la totalit� de leur
population. Pour les pays int�ress�s par ce genre d'extension, il est important de
comprendre ce qui caract�rise un r�gime AMO performant et combien de temps il
faut pr�voir pour passer d'une couverture incompl�te � une couverture universelle.
    Nous pr�sentons le concept de la couverture universelle et les diff�rentes voies
y menant, afin que les d�cideurs politiques gardent en perspective les options
autres que l'AMO pour le financement de leur syst�me de sant�. Nous
analysons �galement la transition vers la couverture universelle sur la base de
l'exp�rience de certains pays s�lectionn�s ayant d�velopp�s ou m�ris des r�gimes
AMO. Ensuite, nous proposons un cadre simple pour l'analyse des r�sultats du
r�gime AMO, sur la base des composantes de la couverture universelle et des
objectifs fondamentaux d'un syst�me de sant�. Des indicateurs de performance
sont pr�sent�s pouvant �tre utilis�s dans le suivi et l'�valuation des progr�s r�a-
lis�s lors de la mise en oeuvre de l'AMO. Finalement, nous soulignons le r�le
strat�gique du gouvernement dans la mise en oeuvre de l'AMO et pr�sentons
nos remarques conclusives dans la section cinq.


                                                                                   455

456 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



L'Assurance Maladie Obligatoire (AMO) est une des m�thodes princi-
pales de financement de la sant�. Trente pays ont �tabli le principe de
la couverture universelle par cette m�thode (Carrin et al. 2001).
Plusieurs pays � faible ou moyen revenu sont actuellement int�ress�s
par l'extension de la couverture de leur assurance maladie � des
groupes sp�cifiques, pour �ventuellement couvrir la totalit� de leur
population. Pour ces pays int�ress�s, il est important de comprendre
ce qui caract�rise un r�gime AMO performant, et combien de temps il
faut pr�voir pour passer d'une couverture incompl�te � une couver-
ture universelle.
   Nous analyserons la transition vers la couverture universelle sur la
base de l'exp�rience de quelques pays ayant d�velopp� un r�gime
AMO et discuterons des facteurs critiques qui peuvent acc�l�rer la
p�riode de transition. Nous proposerons ensuite un cadre simple pour
l'analyse des r�sultats du r�gime AMO, sur la base des composantes de
la couverture universelle et des objectifs fondamentaux d'un syst�me
de sant�. Des indicateurs de performance pour le suivi et l'�valuation
des progr�s de la mise en oeuvre de l'AMO seront pr�sent�s. Finale-
ment, nous soulignons le r�le strat�gique du gouvernement dans la
mise en oeuvre de l'AMO.
   Il existe essentiellement deux principales options pour arriver � la
couverture universelle. L'une o� les imp�ts sont la source principale de
financement des services de sant�, habituellement rendus par un r�seau
de contractants publics et priv�s, appel� Service National de la Sant�.
Deuxi�mement, il y a l'AMO, qui, en principe, implique une adh�sion
obligatoire de toute la population. Salari�s, travailleurs ind�pendants,
entreprises et gouvernement paient une contribution � une caisse
d'AMO. La base de contribution des salari�s et entreprises est nor-
malement le salaire. La contribution des travailleurs ind�pendants est
soit forfaitaire, soit bas�e sur un revenu pr�visionnel. Le gouvernement
peut apporter une aide � ceux qui, autrement, ne pourraient payer, tels
que les sans emploi ou les salari�s � bas salaires du secteur informel.
L'AMO a son propre r�seau de prestataires, travaille avec des
prestataires accr�dit�s publics et priv�s ou alors combine les deux.
Dans l'AMO, des fonctions (par exemple, les adh�sions, la collecte des
cotisations, les contrats et les remboursements des prestataires) peu-
vent �tre ex�cut�es par des institutions paragouvernementales ou non
gouvernementales, souvent connues sous le nom de Caisse Maladie.

                                           L'assurance maladie obligatoire � 457



   Quoiqu'il en soit, on remarque que certains pays utilisent une com-
binaison des deux principales options. C'est pourquoi il existe des sys-
t�mes mixtes de financement de la sant� pour lesquels une partie de la
population est couverte gr�ce au financement par l'imp�t, et d'autres
groupes sont couverts seulement par l'assurance maladie. Cette assu-
rance peut �tre fournie par un ou plusieurs syst�mes paragouverne-
mentaux d'assurance maladie qui fonctionnent selon les principes de
l'AMO. Comme alternative, on pourrait �galement envisager un sys-
t�me d'assureurs priv�s offrant un panier de prestations sp�cifiques, �
condition qu'ils soient soumis aux r�glementations gouvernementales.
   Il convient de noter qu'au sein m�me de chacune des options
d�crites ci-dessus, l'assurance maladie priv�e peut aussi jouer un r�le
compl�mentaire (Sekhri et Savedoff 2003). Celle-ci couvre normale-
ment des services de sant� suppl�mentaires qui ne sont pas couverts
par les paniers de prestations de base (de l'un des trois syst�mes d�crits
ci-dessus), permet une r�duction du temps d'attente ou couvre cer-
tains des co�ts relatifs au ticket mod�rateur. En r�alit�, aucun syst�me
de financement de la sant� n'est enti�rement financ� par les imp�ts,
par l'AMO ou par le syst�me mixte de financement d�crit plus haut.
   Ici, nous insistons sur le d�veloppement de l'AMO, surtout dans les
pays � revenus faibles et interm�diaires. Il sera suppos� que les questions
de faisabilit� de base ont �t� r�solues par les pays qui souhaitent adopter
ce choix. Ceci veut dire que le pays a analys� minutieusement les avan-
tages et les inconv�nients du financement par l'imp�t, de l'AMO et de
la combinaison des deux pour parvenir � la couverture universelle.
   En ce qui concerne l'AMO, un certain nombre de conditions doivent
�tre remplies et certaines questions clefs doivent �tre r�solues avant
qu'un pays ne s'embarque dans sa mise en place ou son extension. Ces
questions sont tout d'abord relatives au march� du travail. Si les tra-
vailleurs ind�pendants et ceux du secteur informel sont majoritaires, dans
quelle mesure peut-on les enregistrer et percevoir leurs cotisations ? De
plus, si les cotisations pr�lev�es sur les salaires sont suppos�es constituer
la majeure partie des contributions de l'AMO, vont-elles augmenter le
co�t du travail de telle fa�on qu'elles auront un impact n�gatif sur l'em-
ploi ? Y a-t-il un nombre suffisant de personnel administratif comp�tent
pour cr�er et g�rer les institutions de l'AMO ? Y aura-t-il un cadre
juridique qui d�terminera les objectifs de l'AMO pour le pays, les droits
et les devoirs des affili�s, les r�les et fonctions des organisations g�rant

458 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



l'AMO ? Y a-t-il une infrastructure sanitaire en place capable de fournir
les services de sant� faisant partie du panier de prestations offert par
l'AMO ? Et finalement, y a-t-il un consensus entre les diff�rentes parties
prenantes de la soci�t� (surtout les affili�s et les patients, les prestataires
de sant� et les employeurs, le Parlement et le Gouvernement) permettant
de respecter les r�gles de base d'un r�gime AMO ? (Normand, Weber
1994) Dans tous les cas, compte tenu des nombreuses t�ches de pr�para-
tion et de mise en oeuvre de l'AMO, les pays qui optent pour cette m�-
thode de financement auront sans doute besoin de passer par une p�riode
de transition. En nous basant sur l'exp�rience de pays ayant des r�gimes
AMO d�velopp�s, nous identifierons les facteurs importants de facilita-
tion qui peuvent �courter la p�riode de transition.



FACTEURS QUI AFFECTENT LA DUR�E
DE LA P�RIODE DE TRANSITION

Parvenir � la couverture universelle n'est pas un processus facile : les
pays qui ont un syst�me de couverture universelle ont souvent mis des
dizaines d'ann�es � le mettre en oeuvre. Si la d�cision se porte sur la voie
de l'AMO, plusieurs facteurs peuvent venir ralentir la d�marche vers la
couverture universelle. Pour �valuer les exp�riences de transition vers
la couverture universelle par l'AMO, nous utiliserons des donn�es sur
l'�volution de la l�gislation en mati�re d'assurance maladie dans 8 pays
b�n�ficiant d'un r�gime AMO suffisamment document� : Autriche, Bel-
gique, Costa Rica, Allemagne, Isra�l, Japon, R�publique de Cor�e
(RdC) et Luxembourg (European Observatory of Health Systems
2002 ; Cutler 2002 ; Miranda 1994 ; Moon 1998 ; et B�rnighausen et
Sauerborn 2002). Nous examinerons les diff�rentes formes d'organisa-
tion en place pendant la p�riode de transition dans ces pays et insis-
terons surtout sur le r�le des caisses maladie � enr�lement facultatif
durant les phases initiales de mise en oeuvre de l'AMO.
   La p�riode de transition a �t� d�finie comme �tant le nombre d'an-
n�es �coul�es entre le vote de la premi�re loi sur l'assurance maladie
et la derni�re loi pour la mise en oeuvre de la couverture universelle.
Les p�riodes de transition ont �t� de 79 ans en Autriche, 118 ans en
Belgique, 20 ans au Costa Rica, 127 ans en Allemagne, 84 ans en
Isra�l, 36 ans au Japon, 26 ans en RdC et 72 ans au Luxembourg, pour
une p�riode moyenne de transition de 70 ans. Notons que la loi finale au

                                           L'assurance maladie obligatoire � 459



Costa Rica a introduit le principe de la couverture universelle par
l'AMO plut�t que de fournir r�ellement une couverture maladie uni-
verselle. De m�me, au Japon, la loi de 1958 sur l'assurance maladie
obligatoire n'a �t� appliqu�e que trois ans plus tard.
   Ce n'est pas seulement la dur�e totale de la p�riode de transition
qui est importante. Il faut aussi prendre en compte l'�volution du
pourcentage de la population qui sera couverte pendant cette p�riode.
Il faut garder � l'esprit que l'extension de la couverture � certains
groupes de la population est plus difficile qu'� d'autres, par exemple,
les travailleurs occasionnels et les travailleurs ind�pendants. En
d'autres termes, l'extension de la couverture n'est pas n�cessairement
un simple accroissement lin�aire. La p�riode n�cessaire pour passer
par exemple de 25 % � 50 % de couverture peut prendre moins de
temps que celle n�cessaire pour passer de 50 % � 75 de %.
   Il a fallu 40 ans � l'Autriche (de 1890 � 1930) pour passer de 7 % � 60 %,
mais environ 36 (de 1930 � 1965 � 67) ont �t� n�cessaires pour couvrir
les agriculteurs et les fonctionnaires et atteindre 96 % de couverture. En
Allemagne, la couverture a augment� de 10 % � 50 % en 47 ans (de 1883
� 1930), mais 58 ann�es additionnelles ont �t� n�cessaires pour aug-
menter la couverture � 88 %, et inclure, entre autres, les travailleurs
ind�pendants. Au Costa Rica, il a fallu vingt ans pour atteindre un
niveau de couverture de 17 % (en 1961), mais seulement 5 ans pour dou-
bler cette couverture. Cette derni�re augmentation fut la cons�quence
imm�diate d'une loi vot�e en 1961 qui a introduit le principe de l'uni-
versalit�. Plus de 10 ans ont �t� quand m�me n�cessaires pour doubler �
nouveau la couverture de la population ; en 1978 elle s'�levait � 74 % et
� 83,4 % en 1991. Toujours au Costa Rica, des efforts sp�ciaux ont �t�
n�cessaires afin d'�tendre la couverture aux travailleurs ind�pendants et
� la population pauvre � bas salaires, et encore plus de temps pour faire
adh�rer syst�matiquement ces groupes de population.
   Certains pays ont mis plus de temps que d'autres pour d�velopper leur
r�gime. Nous r�sumons les diff�rentes phases que ces pays ont travers�es
durant leur transition vers la couverture universelle. Les phases d�crites
sont surtout celles comprises entre la premi�re loi relative � l'assurance
maladie et la derni�re loi stipulant la mise en oeuvre de la couverture
universelle, bien que nous d�crivons aussi les phases pertinentes ayant
pr�c�d� la premi�re loi sur l'assurance maladie, dans les cas pour lesquels
les informations �taient disponibles. Nous discutons ensuite des facteurs
qui ont facilit� la transition dans les pays s�lectionn�s.

460 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Allemagne

Trois phases graduelles de d�veloppement ont caract�ris� l'introduc-
tion, par Bismarck, de l'AMO dans tout le pays en tant que syst�me
complet d'assurance, en 1883 (B�rnighausen et Sauerborn 2002). En
effet, au 18�me si�cle et au d�but du 19�me si�cle, les lois pr�voyaient
les d�tails des r�gles d'organisation des caisses maladie volontaires. Ces
r�gles comprenaient les dispositions relatives aux contributions, aux
prestations, aux conditions d'acc�s et � la gestion de la caisse. Dans une
deuxi�me �tape, en 1843, les lois ont introduit la notion d'adh�sion
obligatoire. Les gouvernements locaux ont obtenu le droit de recon-
na�tre les caisses volontaires existantes et m�me d'introduire l'adh�sion
obligatoire � ces caisses. En 1849, il est aussi devenu possible de rendre
l'adh�sion obligatoire pour des groupes sp�cifiques de salari�s. Dans
un troisi�me temps, certaines lois ont �t� appliqu�es au niveau
national. La premi�re assurance maladie obligatoire date de 1854,
quand la couverture d'assurance maladie est devenue obligatoire pour
les mineurs. Ceci a constitu� une �tape importante dans la mesure o�
ce fut la premi�re loi couvrant un groupe professionnel sur tout le ter-
ritoire allemand, les mineurs �tant oblig�s de devenir membre d'une
des � caisses r�gionales d'assurance maladie de mineurs �.
   Une autre �tape cl� date de 1883, lorsque Bismark a introduit
l'AMO pour un nombre plus important de groupes professionnels.
Initialement, la loi sur l'assurance maladie de 1883 couvrait les tra-
vailleurs de certains secteurs industriels, des artisans et d'autres pro-
fessionnels choisis. Cette loi devait augmenter la couverture de l'as-
surance maladie de 5 % � 10 % de la population totale. Apr�s 1883,
l'approche graduelle vers la couverture universelle s'est poursuivie
par l'int�gration syst�matique de tous les groupes socioprofessionnels
� l'assurance obligatoire. La couverture de la population est pass�e de
37 % � 50 % entre 1910 et 1930. En 1950, l'assurance maladie cou-
vrait 70 % de la population. Une des derni�res lois vot�es a permis
l'adh�sion des artistes et journalistes au r�gime AMO en 1981. En
2000, 88 % de la population allemande avait adh�r� (European
Observatory of Health Systems 2000). La couverture de la population
par l'AMO n'est pas de 100 %, car au-del� d'un certain niveau de
revenu, il est possible de se retirer du r�gime et de s'assurer de fa�on
priv�e. Excluant la population assur�e de fa�on priv�e (9 % de la po-
pulation), 2 % de la population est couverte par des soins gratuits

                                          L'assurance maladie obligatoire � 461



offerts par le gouvernement (dont les policiers et les soldats), alors que
0,1 % de la population n'est pas assur�e.


Autriche

Une approche graduelle a �t� adopt�e comme en Allemagne. Un pre-
mier r�gime d'� Assurance Maladie et Accidents Industriels � pour les
travailleurs des entreprises a �t� �tabli en 1887 � 88. Il a �t� cr�� par
les premi�res dispositions r�glementaires obligeant les employeurs �
payer pour les soins hospitaliers et de sant� de leurs employ�s au
d�but du 19�me si�cle. En 1859, un Code Industriel a �t� mis en place
pour r�glementer la cr�ation de caisses b�n�voles et de caisses
coop�ratives d'assurance maladie. Toutefois, ces dispositions et r�gle-
mentations avaient �t� largement ignor�es jusqu'� ce moment. Puis
vint, en 1867, l'Acte Associatif qui a autoris� la cr�ation de caisses
associatives. En cons�quence, les caisses maladie et d'invalidit� des
associations de salari�s ont �t� respectivement cr��es en 1868 et 1873.
   Le syst�me initial de 1887 � 1888 a �t� �largi au d�but du 20�me si�-
cle par l'adh�sion syst�matique de toutes les cat�gories de travailleurs,
qu'ils soient salari�s, ouvriers ou agriculteurs. L'�largissement d�finitif de
la couverture a �t� r�alis� gr�ce aux lois sur l'assurance maladie des fer-
miers et des fonctionnaires, vot�es respectivement en 1965 et 1967. En
1980, le niveau de couverture de la population avait atteint 96 %.


Belgique

En 1851, une loi sp�ciale a officiellement reconnu les caisses maladie,
connues sous le nom de mutuelles de sant�. Ces caisses �taient cr��es
en fonction des diff�rents groupes professionnels et �taient plut�t de
petite taille. Plus tard, en 1894, une l�gislation plus large a cr�� les
bases juridiques de ces caisses pour environ un si�cle : un domaine
d'activit�s plus �tendue leur a �t� reconnu et elles ont pu b�n�ficier �
partir de ce moment de subventions gouvernementales. Par la suite,
des caisses mutuelles d'assurance � caract�re politique et id�ologique
commun se group�rent en alliances nationales ou syndicats.
   Jusqu'au d�but des ann�es 1940, l'adh�sion � ces mutuelles de sant�
�tait volontaire. Le 28 d�cembre 1944, un d�cret fut adopt� pour ren-
dre l'assurance maladie obligatoire pour tous les travailleurs salari�s.

462 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Une Caisse Nationale d'Assurance Maladie-Invalidit� (faisant partie
de l'Office National de la S�curit� Sociale) recevait les cotisations et
les distribuait aux mutuelles de sant� qui �taient charg�es de la gestion
de l'assurance obligatoire. Les phases importantes suivantes furent les
lois de 1964, 1965, 1967, 1968 et 1969, qui ont respectivement �tendu
l'assurance maladie obligatoire aux travailleurs ind�pendants (mais
seulement pour les risques de sant� majeurs), aux fonctionnaires et aux
invalides physiques, handicap�s mentaux et autres cat�gories non
assur�es.


Luxembourg

En 1901, l'assurance maladie obligatoire a �t� �tablie pour les tra-
vailleurs des secteurs industriel et manufacturier. Cette loi a �t� inspir�e
d'une loi vot�e en 1883 en Allemagne. L'assurance maladie s'est
d�velopp�e et, en 1903, 73 caisses maladie �taient actives. Plus tard, en
1925, une l�gislation fut introduite pour r�glementer le secteur de l'as-
surance maladie qui devenait de plus en plus complexe. Comme dans les
autres pays europ�ens, l'AMO s'est d�velopp�e apr�s la deuxi�me
guerre mondiale. Le premier groupe couvert fut les retrait�s. Puis en
1952, l'assurance maladie est devenue obligatoire pour les fonction-
naires et les autres salari�s du secteur public. En 1958, 1963 et 1964, des
lois rendant l'assurance maladie obligatoire pour les professions
ind�pendantes (hommes d'affaires, artisans, etc.), les agriculteurs et les
professions lib�rales (m�decins, architectes, avocats, etc.) ont �t� adop-
t�es. D�s 1973, toute la population �tait couverte par l'AMO.


Isra�l

Une premi�re caisse d'assurance maladie, le Kupat Holim Chalit
(Caisse Maladie g�n�rale) a �t� fond�e en 1911 par un petit groupe de
travailleurs agricoles. Plus tard, en 1920, cette caisse a �t� reprise par
le Histradut (La F�d�ration G�n�rale du Travail), et a constitu� une
de ses bases politiques. De m�me, trois autres caisses d'assurance ma-
ladie ont �t� cr��es. En 1948, 53 % de la population �tait couverte, la
majorit� (80 %) �tant assur�e par le Kupat Holim Chalit. Par la suite,
l'assurance maladie s'est �tendue de fa�on significative sans toutefois
�tre obligatoire. En 1995, 96 % de la population �tait assur�e. Cette
m�me ann�e, la loi sur l'Assurance Maladie Nationale fut vot�e,

                                         L'assurance maladie obligatoire � 463



confirmant le caract�re obligatoire de l'assurance et l'obligation pour
chaque r�sident d'adh�rer � l'une des caisses existantes.


Costa Rica

Ce pays a initi� son r�gime AMO par la cr�ation de la Caisse de S�cu-
rit� Sociale du Costa Rica (CSSC) en novembre 1941 (Miranda 1994).
Au d�but, les populations cibl�es �taient celles des zones urbaines
ainsi que celles de certaines zones productrices de caf�, avec en
principe une adh�sion obligatoire pour ces groupes. Une des carac-
t�ristiques importantes du r�gime �tait qu'au d�but, seuls les salari�s
pouvaient b�n�ficier de l'AMO. Toutefois, d�s 1944, lors de l'exten-
sion � d'autres zones, il y avait d�j� des pressions pour que toute la
famille de l'affili� soit couverte. Ce n'est qu'en 1956 que la couverture
familiale fut introduite de mani�re obligatoire, incluant la couverture
pour le conjoint l�gal ou en union libre, les enfants en-dessous de 12
ans et les parents s'ils �taient consid�r�s d�pendants de l'affili�.
   Un autre �v�nement important a eu lieu en 1960, lorsque la r�gle-
mentation a plus que doubl� le revenu maximum imposable. Jusqu'�
ce moment, l'AMO s'�tait concentr� sur la protection des travailleurs
� bas salaires. La r�glementation de 1960 a permis une augmentation
importante des cotisations et une extension des prestations de l'AMO.
De plus, en 1961, une loi a �t� vot�e dans le but d'�tendre l'AMO �
toute la population. La loi de 1961 impliquait que m�me les tra-
vailleurs ind�pendants et les indigents devaient �tre incorpor�s dans le
r�gime. En fait, le Parlement du Costa Rica avait fix� une p�riode de
10 ans pour atteindre une couverture nationale. Ce dernier objectif
n'avait toujours pas �t� atteint au d�but des ann�es 1990 et, 29 ans
apr�s la loi de 1961 seule 85 % de la population �tait effectivement
couverte par l'AMO.


Japon

L'AMO puise ses sources dans les premiers d�veloppements du sys-
t�me d'assurance maladie volontaire communautaire au d�but du
19�me si�cle. En 1835, le syst�me d'assurance maladie communautaire
(� Jyorei �, bas� sur des cotisations pay�es en grains de riz et des
prestations limit�es aux soins de base) a �t� �tabli dans la pr�fecture de
Fukuoka. Dans les d�cennies suivantes, ce type d'assurance maladie

464 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



mutuelle devient de plus en plus important. Durant les ann�es suivant
1930, le gouvernement encourage la reproduction du sch�ma de l'as-
surance maladie communautaire au niveau national. En 1934 � 45, 12
mod�les d'assurance maladie communautaires existaient d�j� dans
trois pr�fectures. En 1938, une loi plus g�n�rale de l' � Assurance
Maladie Nationale des Citoyens �, bas�e sur les principes du finance-
ment communautaire, mais avec des cotisations en num�raire, a �t�
pass�e et mise en oeuvre. Cette loi a �t� con�ue pour servir les besoins
des pauvres dans les villages ruraux mal desservis, les fermiers et les
travailleurs ind�pendants dans les communaut�s rurales ainsi que dans
les petites entreprises. Le r�gime �tait �galement g�r� sur une base
volontaire. Quoiqu'il en soit, cette loi a contribu� de fa�on significa-
tive � la couverture assurantielle, en augmentant le taux de couverture
de 2 % � 51,2 % de la population totale (Ogawa et al., 2003).
   En ce qui concerne les salari�s, une loi importante a �t� vot�e en
1922, instaurant l'assurance obligatoire pour certains groupes de tra-
vailleurs. C'�tait la premi�re loi vot�e relative � l'assurance maladie.
L'assurance maladie pour les salari�s et que l'� Assurance Maladie
Nationale des Citoyens � couvraient ensemble 60 % de la population
en 1945 (Ministry of Health and Welfare 2003a). Ces deux types d'as-
surance se sont ensuite graduellement �tendus � 90 % de la popula-
tion. La l�gislation, rendant l'assurance obligatoire pour tous, a �t�
finalement adopt�e en 1958 et mise en oeuvre en 1961.


R�publique de Cor�e

En 1963, la loi sur l'Assurance Maladie a �t� vot�e, lan�ant la
dynamique vers une couverture maladie universelle. Toutefois, l'assu-
rance maladie est rest�e facultative jusqu'en 1977. Plusieurs soci�t�s
d'assurance maladie facultatives se sont organis�es en tant que projets
pilotes, couvrant au plus 0,2 % de la population. � partir de 1977, l'as-
surance obligatoire a �t� progressivement �tablie pour les diff�rents
segments de la population. Cette m�me ann�e, l'assurance maladie des
salari�s � et leurs d�pendants � est devenue obligatoire (pour les com-
pagnies employant plus de 500 salari�s). En 1979, la couverture est
devenue obligatoire dans les compagnies employant 300 salari�s et
plus, et pour les fonctionnaires et les professeurs des �coles priv�es.
En 1981, la couverture a �t� �tendue aux entreprises employant au
moins 100 salari�s et en 1983, � celles employant au moins 16 salari�s.

                                         L'assurance maladie obligatoire � 465



Une autre �tape a �t� franchie en 1981, avec des programmes de
d�monstration pour les travailleurs ind�pendants dans les r�gions
rurales et urbaines. Finalement, en 1988, l'assurance maladie est de-
venue obligatoire sur tout le territoire pour les travailleurs ind�pen-
dants dans les r�gions rurales et en 1989, dans les r�gions urbaines.
   Dans tous les pays �tudi�s, le mouvement vers une couverture
totale par l'AMO a �t� r�alis� de fa�on progressive, avec une extension
syst�matique de la couverture durant la p�riode de transition. Les
arrangements organisationnels introduits pour arriver � cette exten-
sion ont toutefois �t� diff�rents dans chacun des pays. Ces arrange-
ments sont vari�s et vont de l'augmentation r�guli�re des adh�sions
aux diff�rentes caisses maladie, initialement g�r�es sur une base
volontaire, jusqu'� l'augmentation du nombre d'adh�sions suite � une
action gouvernementale (Tableau 1).


Facteurs d'acc�l�ration de la p�riode de transition
vers une couverture universelle

Certains facteurs peuvent en principe acc�l�rer le processus vers une
couverture universelle � travers l'AMO. Le niveau de revenu par habitant
lorsqu'il est plus �lev� peut augmenter la capacit� des entreprises et des
citoyens � assumer les cotisations pay�es d'avance au r�gime AMO. De
plus, les recettes fiscales ont tendance � augmenter en fonction de l'aug-
mentation des revenus, facilitant ainsi les subventions gouvernemen-
tales � l'AMO. La capacit� de payer les cotisations en avance sera plus
grande dans une situation de forte croissance �conomique (Ensor,
1999). Dans les huit pays �tudi�s, l'assurance maladie a d�marr� quand
le niveau de revenu �tait interm�diaire (Allemagne, 2237 US$ ;
Autriche, 2420 US$ ; Belgique, 1808 US$ ; Japon, 2140 US$) ou bas
(RdC, 209 US$). La croissance dans ces pays �tait soit �lev�e ou au
moins stable. Ces pays avaient d�velopp� une capacit� �conomique sub-
stantielle depuis le milieu du 19�me si�cle, facilitant ainsi l'�tablissement
du financement de l'AMO. Au Costa Rica, la croissance �conomique
des ann�es cinquante �tait assez �lev�e, atteignant jusqu'� 7 %, per-
mettant ainsi le renforcement du d�veloppement initial de l'AMO
(Miranda 1994). Au Japon, la croissance �conomique a �t� stable bien
que non spectaculaire, avec un taux d'environ 2,9 % entre 1920 et 1940.
Entre 1940 et 1961, le PIB a continu� de cro�tre, quoique � un taux
moyen modeste de 1,75 % par ann�e. En 1961, le PIB par habitant avait

466
     Tableau 1 : �tapes de transition de quelques r�gimes nationaux d'assurance maladie obligatoire (AMO)

                     Processus
                    de transition   �tapes importantes de l'extension de la couverture de l'assurance maladie obligatoire (AMO)

     Allemagne       1854 � 1988    1*. Caisses d'assistance volontaire (d�but-moiti� 19�me si�cle) �tablies
                                    2*. Adh�sion obligatoire � une caisse d'assurance maladie (1843) ; pour des groupes d'employ�s (1849).
                                    3. Premi�re loi vot�e au niveau national, rendant l'assurance maladie obligatoire pour les mineurs (1854).
                                    4. L'AMO devient un syst�me couvrant tout le pays (1883), avec une adh�sion syst�matique des diff�rents groupes
                                        socioprofessionnels (jusqu'� 1988).

     Autriche        1888 � 1967    1*. La fourniture des soins par les employeurs est r�gul�e (d�but-moiti� 19�me si�cle).
                                    2*. Cr�ation d'associations d'entraide autoris�es (1867).
                                    3. Syst�mes d'assurance maladie et accidents industriels (1887 � 8), avec une adh�sion syst�matique de diff�rents
                                        groupes socio�conomiques (jusqu'� 1967).

     Belgique        1851 � 1969    1. Les mutuelles de sant� de diff�rents groupes professionnels sont officiellement reconnues (1851).
                                    2. Caisses subventionn�s par le gouvernement (1894), avec des alliances nationales ou des syndicats entre les caisses.
                                    3. L'assurance maladie est rendue obligatoire pour tous les travailleurs salari�s (1944), avec une extension aux groupes
                                        non-couverts (1964 � 9).

     Luxembourg      1901 � 1973    1. Assurance maladie obligatoire pour les ouvriers des secteurs manufacturier et industriel (1901).
                                    2. Extension de la couverture aux retrait�s (apr�s la 2�me guerre mondiale), fonctionnaires/ autres secteurs publics
                                        (1952), autres groupes socioprofessionnels (1958 � 64).

     Isra�l          1911 � 1995    1. Caisses d'assurance maladie � Kupat Holim Chalit � pour certains travailleurs agricoles (1911).
                                    2. Trois autres caisses d'assurance maladie �tablies durant cette p�riode.

     Costa Rica      1941�19611     1. Caisse de s�curit� sociale � CSSC � principalement pour la population urbaine et certaines zones productrices de
                                        caf� (1941).
                                    2. Couverture obligatoire des familles des assur�s (1956).
                                    3. Augmentation des contributions et des b�n�fices (1960).
                                    4. Extension au reste de la population (1961), avec adh�sion syst�matique des non-membres sur une p�riode de 10 ans.
                                    5. Adh�sion r�elle de 83.4 % en 1991.

     Tableau 1 (Suite)

       Japon              1922 � 19581    1*. Syst�mes d'assurance maladie communautaire volontaire (AMCs) d�velopp�s (d�but du 19�me si�cle).
                                          2. Assurance obligatoire � Assurance maladie pour les employ�s � pour certains groupes de travailleurs s�lectionn�s
                                               (1922).
                                          3. AMCs r�pliqu�es au niveau national (1930 � 40), principalement pour les pauvres des zones rurales, les fermiers, les
                                               travailleurs ind�pendants et des petites entreprises, culminant en � Loi d'Assurance Maladie Nationale des
                                               Citoyens � (1938).
                                          4. Expansion simultan�e des deux syst�mes d'assurance maladie (1944 � 1958).

       RdC                1963 � 1989     1. Premi�re loi d'assurance maladie vot�e (1963), avec quelques projets d'assurance maladie volontaire en cours
                                               (1963 � 77).
                                          2. Obligatoire pour les travailleurs et les personnes � leur charge dans les entreprises de plus de 500 employ�s
                                               (1977) ; entreprises de plus de 100 employ�s (1981) ; entreprises de plus de 16 employ�s (1983).
                                          3. Extension � la population restante, tels les travailleurs ind�pendants (jusqu'� 1989).

     * Les �tapes accompagn�es d'un ast�risque ont pr�c�d� la premi�re loi �tablissant l'assurance maladie.
       1Il faut noter que dans le cas du Costa Rica, la couverture universelle n'a pas �t� atteinte suite � la loi de 1961. Au Japon, la couverture universelle par une assurance
       maladie obligatoire a �t� atteinte en 1961.




467

468 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



atteint 5150 US$, soit plus du double du niveau de 40 ans plus t�t. Le
taux annuel de croissance de la RdC �tait bien plus �lev�, � 13,3 %. En
1989, lorsque la couverture universelle a �t� atteinte, le PIB par habitant
avait plus que quadrupl� en 12 ans, atteignant 4994 US$.
   La structure de l'�conomie a aussi son importance, en particulier la
taille relative des secteurs formel et informel. Les pays pauvres ont
d'importants secteurs agricoles, manufacturiers et de services, et un
niveau �lev� d'emploi informel. Ces pays ont de fortes chances de
faire face � des difficult�s administratives dans l'�tablissement de l'im-
p�t sur le revenu et le pr�l�vement des cotisations car beaucoup de
travailleurs ne re�oivent pas un salaire d�clar�. Ceci rend difficile l'ap-
plication de la protection maladie au secteur informel de la popula-
tion, surtout lorsque le syst�me d'AMO repose de fa�on significative
sur les contributions des m�nages. Dans les pays analys�s, le secteur
formel de l'�conomie a cr� durant la p�riode de transition. Ceci leur a
permis d'augmenter le nombre d'adh�sions des travailleurs de fa�on
syst�matique. En Allemagne, par exemple, les travailleurs des secteurs
agricole et forestier �taient d�j� couverts � partir de 1911. En RdC, la
croissance �conomique �lev�e a rapidement modifi� la structure de
l'�conomie, et la croissance du secteur formel a jou� un r�le positif
dans le d�veloppement de l'AMO (Moon 1998).
   Troisi�mement, les co�ts administratifs sont influenc�s par la r�par-
tition de la population (Ensor, 1999) que l'on souhaite couvrir. La popu-
lation des zones urbaines, o� on trouve un minimum d'infrastructures
et de moyens de communication de qualit�, ainsi qu'une densit� �lev�e,
a plus de chance d'�tre servie par le r�gime d'AMO que la population
dispers�e des zones rurales. Le renforcement du secteur formel dans
les pays �tudi�s est corr�l� � l'urbanisation et � la densit� de la popula-
tion. Des �conomies sur les co�ts administratifs peuvent �tre r�alis�es
gr�ce � cette �volution, particuli�rement par une plus grande efficacit�
dans l'identification et l'enregistrement des cotisants � l'AMO et dans
le recouvrement des cotisations. Par exemple en RdC, la population
urbaine repr�sentait 36,6 % de la population totale en 1966, 3 ans
apr�s l'introduction de l'assurance maladie facultative et 48,4 % en
1975 , deux ans avant que l'AMO ne devienne obligatoire. En 1980, la
population urbaine s'�levait d�j� � 57,3 % (National Bureau of Statis-
tics 1980). Nous pensons que cette �volution a contribu� � la vitesse de
transition vers la couverture universelle en RdC.

                                            L'assurance maladie obligatoire � 469



   Un quatri�me facteur est la capacit� de gestion disponible. La mise en
place d'un r�gime AMO requiert une main-d'oeuvre suffisamment
qualifi�e ayant des capacit�s comptables, bancaires et informatiques.
L'�ducation secondaire et tertiaire devrait en principe r�pondre � cette
demande de formation. D'autres secteurs proches, tels que les services
financiers, d'autres services d'assurance et m�me les syst�mes commu-
nautaires d'assurance maladie existants, peuvent offrir du personnel
ad�quatement form�. Dans l'exp�rience allemande, les caisses faculta-
tives de secours qui ont pr�c�d� les lois initiales sur l'AMO � ont servi
de lieu d'apprentissage pour le d�veloppement des capacit�s de ges-
tion de l'assurance et en sciences actuarielles ainsi que pour la r�gula-
tion de l'assurance au niveau gouvernemental � (B�rnighausen et
Sauerborn 2002). Une interpr�tation similaire pourrait aussi �tre val-
able pour les autres pays dans lesquels les caisses volontaires fonction-
naient avant les premi�res lois officielles. En RdC, la disponibilit� de
cadres interm�diaires bien form�s a contribu� au d�veloppement de
l'AMO (Moon 1998).
   Un cinqui�me facteur est le niveau de solidarit� parmi les membres de
la soci�t�. On consid�re ici une soci�t� ayant un niveau de solidarit� �lev�
comme �tant une soci�t� dans laquelle les individus ont une propension
plus grande � soutenir les autres individus. Un syst�me de protection
financi�re totale requiert une quantit� significative d'interfinancement,
aussi bien des riches aux pauvres que des personnes � faibles risques �
celles � hauts risques. Chaque pays doit d�finir le niveau appropri� de so-
lidarit� qui permet l'interfinancement. Les d�cideurs politiques peuvent,
parfois, imposer la solidarit�, mais un degr� suffisamment �lev� de soli-
darit� dans la soci�t� est n�cessaire afin que l'interfinancement de l'AMO
puisse �tre durable. Les premiers syst�mes facultatifs en Allemagne peu-
vent �tre interpr�t�s comme des � mod�les d'apprentissage de la solida-
rit� � qui ont facilit� l'�tablissement ou la participation � de grands sys-
t�mes, ou qui ont suscit� le respect des dispositions obligatoires. La
solidarit� a �t� soutenue par l'�tablissement d'un important mouvement
de confiance des affili�s en la gestion des syst�mes volontaires.
   Enfin, il faut un appui du gouvernement pour lancer et orienter le
processus qui m�nera � un syst�me d'assurance maladie obligatoire
pour tous. Un �l�ment important est d'accorder aux diverses parties
prenantes de la soci�t�, et � la population dans son ensemble, le pou-
voir de s'exprimer dans le cadre de la mise en place des politiques

470 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



sociales. Un d�bat politique ouvert et une disponibilit� d'informations
financi�res am�neront une plus grande confiance de la population dans
le gouvernement et dans les autres organisations impliqu�es dans la
mise en oeuvre de l'AMO. Il est alors plus probable que les affili�s de
l'AMO, les prestataires et la population (� travers les associations pro-
fessionnelles et communautaires, par exemple) agiront de concert avec
les d�cideurs dans l'�laboration de l'AMO.
   Une forte capacit� d'administration g�n�rale de la part des gouverne-
ments est critique pour la mise en place d'un r�gime AMO. En Alle-
magne, Bismarck a fait le premier pas vers la couverture universelle en
1883, avec la loi sur l'Assurance Maladie, et s'est inspir� de l'expertise
acquise � partir des syst�mes volontaires des d�cennies pr�c�dentes.
Ce genre d'actions positives de la part du gouvernement n'�tait toute-
fois pas seulement motiv� par un int�r�t pour le bien-�tre populaire.
Les int�r�ts politiques y �taient souvent pour quelque chose. Il est
admis que Bismarck utilisa cette loi pour contrecarrer le poids poli-
tique des travailleurs et des syndicats afin de renforcer l'�tat allemand
(B�rnighausen, Sauerborn 2002). De m�me, en Autriche (Hof-
marcher, Rack 2001) et au Japon (Ministry of Health and Welfare
2003a) la mont�e des mouvements des travailleurs au d�but du 20�me
si�cle a donn� un coup de pouce � l'extension de l'AMO.
   Au lendemain de la deuxi�me guerre mondiale, les gouvernements
avaient planifi� d'importantes am�liorations de l'assurance maladie avec
� l'esprit l'int�r�t public. En Belgique, en Allemagne et en Autriche,
l'administration g�n�rale �tait b�tie en grande partie sur un consensus,
donnant voix aux partenaires concern�s et trouvant un �quilibre entre
leurs diff�rents int�r�ts. L'histoire de l'AMO en Belgique a �t� carac-
t�ris�e d�s le d�but par un consensus entre les salari�s et les employeurs.
En 1943, par exemple, un accord sur la Solidarit� Sociale a �t� sign�
entre les employeurs et les syndicats d'ouvriers. Cet accord a �t� le
pr�curseur du d�cret du 28 d�cembre 1944 qui a cr�� la S�curit� sociale
pour les travailleurs. Cet accord a aussi reconnu l'importance des caisses
d'assurance maladie dans le syst�me. Les organisations d'employeurs,
les syndicats d'ouvriers et les caisses d'assurance maladie continuent
d'�tre d'importantes parties prenantes dans la gestion de cet accord. Ils
sont maintenant rejoints par les associations de travailleurs ind�pen-
dants et repr�sent�s au conseil de gestion de l'agence d'AMO belge.

                                         L'assurance maladie obligatoire � 471



   Au Japon, la protection sociale a explicitement fait partie des poli-
tiques gouvernementales. En effet, la Constitution japonaise post-
guerre mondiale stipule que l'�tat � entreprendra de promouvoir et
d'�tendre la protection et la s�curit� sociale ainsi que la sant�
publique � (Ministry of Health and Welfare 2003b). Ainsi, cette cons-
titution apporte les bases de la cr�ation d'une s�curit� sociale dans le
Japon d'apr�s-guerre. N�anmoins, ceci ne veut pas dire que le gou-
vernement intervient unilat�ralement dans le domaine de la sant�. La
politique de la sant� est plut�t caract�ris�e par une attitude pragma-
tique du gouvernement. On peut se r�f�rer � � l'art de l'�quilibre en
mati�re de politiques de sant� �, l'�quilibre �tant atteint entre les
groupes d'int�r�ts bien �tablis, surtout le Minist�re japonais de la
sant� et de la protection sociale (avec des int�r�ts dans la gestion de la
sant�) et l'association m�dicale japonaise (dont les int�r�ts vont vers
l'autonomie professionnelle) (Ikegami, Campbell 1998).
   En Isra�l, 96 % de la population �tait couverte d�s 1990 (Cherni-
chovsky 1991), mais il y avait un m�contentement croissant envers le
syst�me, aussi bien de la part de la population que des prestataires
(files d'attente trop longues et paiements sous la table). De plus, la
plus grande caisse d'assurance maladie a d� faire face � d'importants
probl�mes financiers � cause de petites caisses engag�es dans des
op�rations d'�cr�mage de la client�le. Une Commission d'Enqu�te
�tatique a recommand�, en ao�t 1990, d'introduire une loi sur l'Assu-
rance Maladie Nationale, qui couvrirait tous les citoyens et d�termi-
nerait le cadre juridique du financement et de la fourniture de soins.
Un Institut National de Sant� collecterait les cotisations et les dis-
tribuerait sous forme de capitations individuelles aux diff�rentes
caisses. Cette loi a �t� vot�e en 1995 et a permis d'atteindre des objec-
tifs importants, i.e. octroyer � l'�tat la responsabilit� de fournir les
services de sant� � tous les r�sidents ; clarifier le droit de la population
aux soins ; instaurer une obligation d'accepter tous les assur�s quel
que soit le risque li� � leur maladie (Chernichovsky 1991). Il a �gale-
ment fallu que les hauts dirigeants du Histadrut et de la F�d�ration
Isra�lienne G�n�rale du Travail appuient la loi sur la couverture uni-
verselle qui entra�nait la s�paration de la caisse maladie de la F�d�ra-
tion du Travail et par laquelle les travailleurs syndicalis�s pouvaient
adh�rer � une autre caisse d'assurance maladie (Chinitz 1995).

472 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



CARACT�RISTIQUES D'UN R�GIME PERFORMANT

La mise en oeuvre d'un r�gime d'AMO exige une pr�paration substantielle
et une attention soutenue. (Normand, Weber 1994 ; Ron 1993). Les
probl�mes de conception de l'assurance maladie obligatoire dans le
contexte sp�cifique de l'Afrique subsaharienne ont aussi �t� analys�s
(Ron 2003).
   La performance d'un r�gime AMO � et en fait de tout autre syst�me
de financement de la sant� � peut �tre �valu�e en deux �tapes. Dans
une premi�re �tape, on peut �valuer la performance de l'AMO en ter-
mes de � financement de la sant� � pur : recouvrement des ressources
financi�res, allocation de ces ressources et garantie d'un panier de
prestations sp�cifiques. Alors que la couverture universelle est au cen-
tre des objectifs vis�s par les politiques de financement de la sant�, ses
composantes ont besoin d'�tre examin�es de plus pr�s. Par exemple, un
r�gime d'AMO qui couvre 80 % de la population, mais qui a un impact
positif limit� sur l'�tat de sant� global de la population, ne semble pas
�tre un r�gime bien performant. Ceci pourrait peut-�tre se produire si
le panier de prestations ne contient pas d'interventions efficientes ou si
l'acc�s est limit� � cause d'un ticket mod�rateur trop on�reux. Donc,
un tel r�gime couvre une grande partie de la population, mais n'offre
pas une couverture �lev�e des besoins de sant�.
   Dans une deuxi�me �tape, la performance d'un r�gime d'AMO doit
�tre �valu�e en fonction de l'objectif final d'un syst�me de sant�1. Pre-
mi�rement, la sant� est l'objectif premier ou directeur d'un syst�me de
sant� et l'�tat de sant� global de la population ainsi que la distribution
de l'�tat de sant� � travers la population sont importants. Toutefois, les
r�sultats qui ne sont pas li�s � la sant� sont aussi importants. La r�ac-
tivit� aux attentes (non�m�dicales) de la population et l'�quit� dans les
contributions financi�res sont aussi reconnues comme d'importants
objectifs du syst�me de sant�. Un financement �quitable est un objec-
tif important puisque les co�ts des soins de sant� peuvent �tre catas-
trophiquement �lev�s, avec des besoins en soins de sant� qui ne sont
souvent pas pr�visibles. La r�activit� aux anticipations de la popula-
tion est importante puisque la maladie ainsi que les soins m�dicaux
ont un effet particuli�rement marquant sur la dignit� et l'autonomie
des personnes (OMS, 2000). Ces trois objectifs sont utilis�s comme
base de la structure d'analyse adopt�e ici, m�me si l'inclusion de la
r�activit� et de l'objectif de contributions financi�res �quitables dans

                                                              L'assurance maladie obligatoire � 473



les objectifs des syst�mes de sant� a �t� critiqu�e. (Richardson et al.
2003).
   Un syst�me r�actif assure que les individus sont trait�s avec respect
et que le r�gime est suffisamment orient� vers le client. L'OMS dis-
tingue sept dimensions de la r�activit� : respect de la dignit� des per-
sonnes, de la confidentialit�, et de l'autonomie de faire des choix con-
cernant sa propre sant� ; � orientation client � dans la prestation des
services ; installations d'une qualit� ad�quate ; acc�s � des r�seaux soci-
aux de support ; possibilit� de choix du fournisseur sans distinction
entre les diff�rentes cat�gories de la population (OMS 2000). Les con-
tributions financi�res sont consid�r�es comme �quitables lorsque les
d�penses de sant� sont r�parties en fonction de la capacit� de payer
plut�t qu'en fonction des risques de maladie. Ces objectifs de r�acti-
vit� et d'�quit� concernant les contributions financi�res ont un impact
sur l'objectif primordial de la sant�, de la m�me fa�on qu'ils sont
importants en eux-m�mes.
   Dans la deuxi�me �tape de l'�valuation, les r�gimes d'AMO
devraient id�alement �tre �valu�s en fonction de ces objectifs. Plus
sp�cifiquement, l'AMO bien con�ue devrait �tre un moyen efficace de
r�aliser l'objectif d'�quit� des contributions financi�res, puisque
l'AMO partage les risques et acquiert des fonds en fonction de la
capacit� de payer. Mais l'AMO, comme tout autre r�gime de finance-
ment de la sant�, a un effet sur la distribution et l'�tat de sant� g�n�ral
de la population, en fournissant des ressources pour la sant� et en
d�cidant de la fa�on dont elles seront utilis�es. Finalement, un bon
r�gime d'AMO peut avoir un effet positif sur l'objectif de r�activit�,
en modifiant les incitatifs des prestataires de sant� (Graphique 1).
   Dans ce graphique, les fl�ches indiquent comment le succ�s de
l'AMO affecte les objectifs finaux du r�gime de sant� (la fl�che en
pointill� montre une relation plus faible), illustrant le lien entre la


Graphique 1 : Assurance maladie obligatoire � objectifs du financement et buts
du syst�me de sant�


                                 G�n�ration  de   ressources                  R�activit�
                                  (suffisantes &  p�rennes)


    Performance  des
  syst�mes d'assurance      Utilisation optimale  des ressources                         Sant�
   maladie obligatoire



                            Accessibilit�  financi�re   pour tous               Contribution financi�re �quitable

474 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



premi�re et la deuxi�me �tape de l'�valuation. Par exemple, la sant� et
l'�quit� d�pendent aussi de facteurs autres que le financement de la
sant�, tels le degr� de d�veloppement �conomique et un grand nom-
bre de caract�ristiques socio�conomiques et �pid�miologiques. De la
m�me fa�on, la r�activit� pourrait aussi d�pendre de facteurs autres
que le r�gime de financement de la sant�. Ainsi, il est n�cessaire
d'�tablir avec prudence des m�thodes capables d'isoler l'effet � net �
de l'AMO sur les objectifs du syst�me.
   Dans tout syst�me de services de sant�, il y a quatre grandes fonc-
tions inter-reli�es : prestation de services, cr�ation des ressources
n�cessaires (investissements et formation), financement, administra-
tion g�n�rale et supervision du syst�me (OMS 2000). S'agissant de
financement par l'AMO, il y a trois sous-fonctions inter-reli�es : recou-
vrement des cotisations, mise en commun des risques et achat de ser-
vices. Les indicateurs de performance propos�s seront classifi�s selon
ces sous-fonctions.
   Le recouvrement des cotisations est le proc�d� par lequel le syst�me
re�oit l'argent des m�nages, des entreprises, du gouvernement et
d'autres organisations y compris les bailleurs de fonds. La mise en com-
mun des risques est l'accumulation et la gestion de ces revenus afin
d'�taler les risques de paiement des soins parmi les membres du
groupe ; ainsi les individus ne supportent plus de risque sur une base
individuelle. L'achat est le proc�d� par lequel les contributions sont
utilis�es pour payer les prestataires. L'achat peut �tre soit passif, �tant
r�alis� selon des budgets pr�d�termin�s ou par le paiement des fac-
tures lorsqu'elles se pr�sentent, ou strat�gique, ce qui suppose une
recherche continue de meilleurs services.
   La Graphique 2 pr�sente ces probl�matiques cl� (dans les rectan-
gles) en relation avec les trois sous-fonctions de l'AMO.



INDICATEURS DE PERFORMANCE

Indicateurs relatifs au recouvrement des cotisations

Couverture de la population

Pour tout pays qui a choisi la voie de l'AMO, un des probl�mes �
r�soudre est le niveau de population � couvrir par le r�gime d'AMO.

                                                                   L'assurance maladie obligatoire � 475



Graphique 2 : Probl�matiques cl� des sous-fonctions du financement de la sant�

         Recouvrement des cotisations

                                                                                     Mise en commun des risques
 1. Couverture de la       2. M�thode de
    population                financement                                    3. Niveau de              4.   Composition de la
                                                                                fragmentation               mise en commun
                                                                                                            du risque




       G�n�ration de ressources
                                                                                                Accessibilit� financi�re
        (suffisante & p�renne)                   Utilisation optimale des
                                                       ressources                                     pour tous




                  5. Panier de prestations    6. M�canismes de paiements            7. Efficacit�
                     de soins de sant�           des founisseurs de services           administrative


                                                    Achat de services




Plus il est �lev�, plus grande est l'accessibilit� financi�re et plus les
revenus sont importants. Un indicateur de performance est donc le
pourcentage de population couverte par ce r�gime. Les pourcentages
�lev�s obtenus sont associ�s � une meilleure performance, toutes
choses �tant �gales par ailleurs. Les facteurs li�s � la structure
�conomique vont aussi influer sur le taux de couverture de la popula-
tion. Par exemple, il est plus facile de collecter les cotisations des
salari�s du secteur formel que des ind�pendants ou des agriculteurs.
Les �conomies qui comprennent de grands secteurs industriels,
miniers ou de services ont plus de chance d'avoir un pourcentage plus
�lev� de population couverte par l'AMO d�s le d�but.
   Afin de mieux comprendre l'�volution de ce ratio, nous proposons
d'ajouter des indicateurs relatifs aux diff�rentes cat�gories de population.
Au lieu de regarder simplement le pourcentage de population couverte, il
convient d'analyser la couverture par groupe de population : fonctionnaires (y
compris les enseignants, la police et le personnel militaire) ; salari�s des
entreprises publiques et priv�es ; professionnels ind�pendants ; tra-
vailleurs immigr�s et occasionnels, travailleurs agricoles et autres tra-
vailleurs ind�pendants ; fonctionnaires retrait�s et autres retrait�s ; cer-
tains groupes dans la population non active (�tudiants, handicap�s,
ch�meurs)2. D'autres groupes pourraient �tre pris en compte s'ils sont
importants dans le pays, par exemple les employ�s des entreprises ayant
un nombre minimum d'employ�s, comme ce fut le cas en RdC (Kwon

476 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



2003). On pourrait aussi suivre la couverture des diff�rentes cat�gories de
population cit�es ci-dessus par r�gion ou par province.
   Les indicateurs de performance de la couverture par groupe cible
refl�tent pourquoi une couverture �lev�e ou universelle sera difficile �
atteindre, en montrant que certaines cat�gories de population sont
plus faciles � couvrir que d'autres. Par exemple, une extension de la
couverture relativement facile � r�aliser est celle des personnes d�pen-
dantes. Au moment de l'introduction de l'AMO en Colombie en
1993, seulement 20,6 % de la population �tait affili�e � la s�curit�
sociale. Quatre ans plus tard, 53 % de la population avait adh�r�, une
partie significative de l'augmentation �tant expliqu�e par l'adh�sion
des membres des familles des travailleurs du secteur formel qui �taient
d�j� assur�s (Rossetti 2002).
   Ce n'est pas seulement la structure �conomique d'un pays qui
explique les taux de couverture. Les d�cideurs politiques peuvent fixer
l'ampleur des financements crois�s. L'�ligibilit� aux prestations est
g�n�ralement bas�e sur les cotisations au r�gime. Toutefois, le pour-
centage couvert peut exc�der le pourcentage de cotisants si le gou-
vernement cr�e des arrangements permettant de payer les cotisations
de certaines cat�gories de population, comme les plus pauvres, qui
autrement n'auraient pas pu se permettre l'adh�sion au r�gime d'as-
surance. Ceci implique un certain financement crois� puisque ces
paiements seront financ�s � travers les revenus des contributions fis-
cales et/ou les transferts de la part de ceux qui auront pay� leurs coti-
sations en totalit�. L'ampleur des financements crois�s d�pend du
niveau de solidarit� entre les membres de la soci�t�.


M�thodes de financement

Les m�thodes de financement de l'AMO sont importantes pour assurer
une protection financi�re contre les co�ts de la sant� et par l� m�me
une meilleure accessibilit� financi�re. Mais il est aussi important que
les m�canismes de paiement utilis�s pour les soins de sant� puissent
g�n�rer des revenus suffisants et de fa�on p�renne. Un premier indica-
teur de performance est le ratio des cotisations pay�es d'avance par rapport
au co�t total des prestations d'AMO. Les cotisations pay�es d'avance sont
pr�f�rables car elles am�liorent l'accessibilit� financi�re et offrent une
meilleure protection contre les cons�quences financi�res impr�vues
des soins (OMS 2000). Ce genre de protection est souhaitable lorsque

                                         L'assurance maladie obligatoire � 477



la population est peu dispos�e � prendre des risques et que le gou-
vernement a un souci d'�quit� sociale.
   Dans les pays � r�gime d'AMO, le niveau des cotisations pay�es
d'avance affecte l'accessibilit� au panier de prestations du r�gime. Ce
dernier peut �tre tr�s large, mais le ticket mod�rateur peut �tre telle-
ment cher que l'acc�s est compromis. Les cotisations pay�es d'avance
sont aussi pr�f�rables, car elles constituent une condition pr�alable �
la mise en commun des risques parmi la population.
   Un ratio plus �lev� de cotisations pay�es d'avance par rapport aux
co�ts assum�s par l'assur� et l'utilisation des services de sant� offerts
dans le cadre du panier de prestations indiquent un r�gime d'AMO
plus performant. Toutefois, le ratio des cotisations pay�es d'avance
peut �tre tr�s �lev� mais le panier de prestations tr�s restreint. Claire-
ment, ceci n'est pas id�al, car plusieurs m�nages peuvent encore avoir
� payer d'importantes factures de soins ou peuvent �tre simplement
incapables de payer, donc d'utiliser les services. C'est pourquoi un
ratio �lev� de cotisations pay�es d'avance par rapport aux co�ts du
panier de prestations de l'AMO est l'indication d'une bonne perfor-
mance seulement si, au m�me moment, les prestations offertes sont
compl�tes, i.e. soins externes (soins de sant� primaires, certains ser-
vices de sp�cialistes, m�dicaments essentiels) et soins hospitaliers
(dont les m�dicaments essentiels et les services auxiliaires comme les
tests de laboratoire) (Normand, Weber 1994),
   Aussi un niveau important de cotisations pay�es d'avance, combin� �
une mise en commun du risque peut entra�ner pour certains un droit �
plus de soins qu'ils n'en ont pay�s. � l'extr�me, ceci peut conduire � des
soins � gratuits � au moment de la consommation. La th�orie du risque
moral implique que les individus peuvent avoir une demande excessive
lorsque les prix sont subventionn�s. De plus, cet effet de risque moral
peut �tre accentu� par les fournisseurs qui encouragent une utilisation
excessive dans certaines situations. Certains soutiennent que le risque
moral n'est pas tr�s pr�sent dans le secteur de la sant�, car on devrait
s'attendre � ce que les individus pr�f�rent �tre en bonne sant� que
demander � �tre soign�s. Toutefois, le risque moral reste important,
puisqu'une fois qu'ils sont malades, les individus pourraient vouloir
obtenir le plus de soins possibles. Dans la litt�rature, ces diff�rents
types de risque moral sont appel�s respectivement ex-ante et ex-post.
L'�vidence empirique supporte le fait que le risque moral ex-post a plus
de probabilit� d'�tre significatif. (Zweifel, Manning 2000).

478 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Lorsqu'il n'existe pas de barri�res financi�res � la demande de soins de
sant� aux divers niveaux du syst�me, les m�nages peuvent �tre tent�s
d'�viter les �chelons inf�rieurs et demander � �tre soign�s dans des instal-
lations plus sp�cialis�es. De plus, il peut y avoir une mauvaise utilisation
du syst�me, par exemple, lorsque les produits pharmaceutiques prescrits
sont vendus � des fins mercantiles. Les solutions pour faire face aux com-
portements d�coulant du risque moral sont bas�es sur le maintien d'un
certain niveau de ticket mod�rateur. On pourrait aussi assigner � certains
prestataires une t�che de filtrage, par laquelle l'acc�s aux �chelons
sup�rieurs du syst�me ne sera donn� qu'en fonction des besoins. Imposer
des cotisations pay�es d'avance �lev�es � ceux qui ne respectent pas le
syst�me d'aiguillage vers les services appropri�s pourrait aussi renforcer
ce dispositif. Pour ces raisons, une maximisation compl�te (100 %) du
ratio de cotisations pay�es d'avance n'est pas n�cessairement la meilleure
politique. Dans la plupart des r�gimes d'AMO europ�ens, les tickets
mod�rateurs � hauteur de 30 % sont assez communs ; des tickets mo-
d�rateurs plus �lev�s ont m�me �t� observ�s dans le cas de certaines cat�-
gories de produits pharmaceutiques (Mossialos, Le Grand 1999).
   Par contre, il n'est pas possible d'identifier un ratio pr�cis vers lequel
s'orienter. En effet, la n�cessit� de prendre en compte le risque moral
peut diff�rer d'un pays � l'autre, amenant des niveaux variables de tickets
mod�rateurs et donc des ratios. De plus, le ratio peut d�pendre du
niveau de revenu de chaque pays. Par exemple, les pays � revenus �lev�s
peuvent d�cider d'introduire des niveaux plus �lev�s de ticket mod�ra-
teur pour certaines prestations, jugeant que l'accessibilit� financi�re est
assur�e pour la population. L'exp�rience internationale peut �tre utile
dans la formulation d'une recommandation, sauf qu'il n'y a pas de don-
n�es comparables sur les cotisations. Par contre, les donn�es relatives �
la participation du gouvernement aux d�penses g�n�rales de sant� sont
disponibles. On pourrait utiliser cette proportion comme une mesure
indirecte du ratio des cotisations pay�es d'avance. La moyenne de ces
ratios dans 27 pays est de 71,1 %, avec 16 pays ayant un ratio variant
entre 70 % et 91.9 % (Tableau 2). En termes de protection financi�re
contre les co�ts des soins, il est plus raisonnable d'utiliser la derni�re
proportion comme r�f�rence dans les pays pauvres.
   L'analyse de la diversit� des cotisations par groupes cibl�s est impor-
tante car elle indique la mani�re par laquelle le r�gime d'AMO
parvient � introduire une protection financi�re universelle. Les dif-
f�rences entre les groupes cibl�s peuvent �tre caus�es par les diff�rents

                                                 L'assurance maladie obligatoire � 479



Tableau 2 : Ratio des cotisations pay�es d'avance dans les r�gimes d'AMO, 2000

Ratio (%)                                      Pays

40 � 49.9   Chili (42.6 %)                  R�publique de Cor�e    Monaco (48.1 %)
                                            (44.1 %)

50 � 59.9   Yougoslavie (51 %)              Gr�ce (55.5 %)         Suisse (55.6 %)

60 � 69.9                                   Roumanie (63.8 %)      Pays-Bas (67.5 %)
            Costa Rica (68.4 %)             Autriche (69.7 %)      Pologne (69.7 %)

70 � 79.9   Belgique (71.2 %)               Lituanie (72.4 %)      Allemagne
            Hongrie (75.7 %)                Isra�l (75.9 %)        (75.1 %)

            Estonie (76.7 %)                Japon (76.7 %)         France (76 %)

            Slov�nie (78.9 %)                                      Bulgarie (77.6 %)

80 � 89.9   Mac�doine (84.5 %)              Croatie (84.6 %)
            Saint Marin (85.7 %)            Slovaquie (89.6 %)

90+         R�publique Tch�que (91.4 %)     Luxembourg (91.9 %)

Source : OMS (2002, Annexe Tableau 5).


niveaux d'assurance contract�es par ces groupes, par la fragmentation
du syst�me de mise en commun des risques entra�nant diff�rents
niveaux de protection financi�re, et par l'existence de m�canismes de
cotisations alternatifs, comme les r�gimes d'assurance communautaire.
   Il existe un risque s�rieux de voir les employ�s, et les autres tra-
vailleurs pouvant adh�rer facilement, b�n�ficier d'un ratio plus �lev�
de cotisations par rapport aux co�ts totaux des soins. Le d�fi pour les
r�gimes d'AMO est de d�velopper un plan par lequel les autres
groupes cibl�s adh�rent syst�matiquement au r�gime selon des condi-
tions similaires � celles des affili�s initiaux. Ceci conduira �ventuelle-
ment � des ratios similaires pour tous les groupes, avec une accessibilit�
financi�re aux prestations comparables.
   Une autre dimension de la performance est la protection contre des
d�penses d'urgence, mesur�e par le pourcentage de m�nages avec des
d�penses d'urgence. Alors que les cotisations pay�es d'avance sont
pr�f�rables aux paiements directs en termes d'am�lioration de l'accessi-
bilit� financi�re, ceci ne garantit pas que les cotisations demand�es
soient accessibles financi�rement pour tous. Les r�gimes d'AMO plus
performants minimisent le pourcentage des m�nages ayant � effectuer
des d�penses d'urgence3. Par exemple, si les cotisations sont trop
�lev�es pour un certain nombre de m�nages ou si les tickets mod�ra-
teurs pour certaines prestations sont trop �lev�s, ou simplement si cer-
taines prestations sont exclues du panier de prestations, alors les cotisa-
tions demand�es pour les soins de sant� pourraient ne pas �tre

480 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



accessibles financi�rement � tous. Les cotisations restent importantes
comme mesure d'accessibilit� financi�re ; l'analyse par groupe cibl� est
utile puisqu'elle montre dans quelle mesure le r�gime d'AMO est
�quitable. Les d�penses d'urgence constituent un probl�me plus impor-
tant parmi les groupes cibl�s plus vuln�rables, mais un r�gime d'AMO
performant pourrait limiter ces d�penses.
   Les indicateurs de performance que nous avons pr�sent�s mesurent
l'accessibilit� financi�re des cotisations, � travers l'analyse des cotisa-
tions pay�es d'avance et des d�penses d'urgence. Toutefois, les sources de
financement sont aussi importantes pour la mesure de l'�quit� d'un
r�gime d'AMO : il est important qu'elles g�n�rent des revenus suffisants
et de fa�on p�renne. La source primaire du financement d'un r�gime
d'AMO est constitu�e par les cotisations. Dans le cas des salari�s, elles
sont habituellement li�es au salaire et souvent pay�es en partie par l'em-
ployeur. Dans le cas des travailleurs ind�pendants, elles peuvent �tre
soit forfaitaires soit li�es au revenu. Les cotisations li�es au revenu sont
pr�f�rables pour des raisons d'�quit�, vu qu' elles sont bas�es sur la
capacit� de payer. Les cotisations forfaitaires, surtout dans un pays o� il
est tr�s difficile d'�valuer les revenus, peuvent �viter des pertes de temps
et faciliter la gestion. Une solution interm�diaire est d'avoir une s�rie de
tarifs forfaitaires comme alternative � des mod�les bas�s uniquement
sur les revenus ou sur une contribution forfaitaire unique. Ceci prend
en compte la capacit� de payer des individus sans trop augmenter les
co�ts administratifs et les pertes de temps.
   Il peut aussi exister une limite � ce que la soci�t� est pr�te � accepter
pour la poursuite de l'�quit�. Quand, dans un r�gime d'AMO, toutes
les cotisations sont mises en commun et que le panier de prestation est
universel, les diff�rences de cotisations entre les groupes peuvent
devenir si grandes qu'elles ne sont plus acceptables pour certains.
Alors, l'acceptabilit� et la p�rennit� d'un r�gime d'AMO pourraient
�tre compromises. Une des mani�res de reconna�tre les limites de la
solidarit� financi�re dans un r�gime est de d�terminer que le salaire,
sur lequel sont bas�es les cotisations, soit plafonn�. De cette fa�on, on
r�duira les diff�rences entre les niveaux de cotisations des diff�rents
groupes de salari�s. Les cotisations bas�es sur les salaires repr�sentent
une source de financement relativement p�renne, puisqu'elles cons-
tituent un montant fixe du revenu des salari�s. Par cons�quent, ce type
de cotisations est moins sujet aux arbitrages budg�taires annuels que

                                          L'assurance maladie obligatoire � 481



si les fonds provenaient des contributions fiscales. Toutefois, les mon-
tants g�n�r�s fluctueront en fonction de l'�tat de l'�conomie.
   Cependant, financer un r�gime d'AMO seulement par des cotisations
n'assure pas toujours des ressources suffisantes et stables. C'est le cas si les
d�cideurs politiques d�sirent couvrir une plus grande partie de la popula-
tion plut�t qu'uniquement ceux qui ont cotis�. En effet, les ch�meurs, les
retrait�s, les �tudiants et les pauvres ont aussi besoin d'une couverture
maladie. C'est pourquoi dans plusieurs r�gimes AMO, les cotisations
sont souvent compl�t�es par des subventions gouvernementales � travers la
taxation g�n�rale. Celles-ci peuvent assurer l'accessibilit� financi�re des
soins de sant� � un plus grand nombre de personnes et contribuer �
am�liorer l'�quit�. Certains critiquent ces subventions gouvernementales
car elles r�duisent l'ind�pendance du financement du r�gime d'AMO par
rapport au budget gouvernemental (Normand, Weber 1994).
   D'autres sources de financement sont les imp�ts sp�ciaux et les aides
ext�rieures. Des taxes sur la consommation de produits (comme le tabac ou
l'alcool) et d'activit�s nocifs peuvent aider � modifier les comportements
des consommateurs et couvrir certains co�ts de sant� occasionn�s par ces
produits ou activit�s. L'aide ext�rieure peut s'av�rer utile pour le finance-
ment de certaines t�ches sp�cifiques isol�es, comme par exemple la mise
en place d'un changement d'organisation du r�gime d'AMO, ou le co-
financement temporaire de la couverture de ceux qui ne peuvent pas
payer. Toutefois, ce n'est pas, par sa nature, une solution de long terme.
   Les tickets mod�rateurs peuvent aussi influencer les incitations des
consommateurs et jouent donc un r�le important pour limiter les
co�ts. Toutefois, en g�n�ral, les tickets mod�rateurs ne sont pas con-
sid�r�s comme g�n�rateurs de ressources pour le r�gime d'AMO. Au
lieu de cela, ce sont typiquement les prestataires des soins de sant� qui
re�oivent les revenus g�n�r�s par les tickets. Ceux-ci ont quand m�me
un impact sur le niveau des d�penses du r�gime d'AMO, car si les
d�penses des assur�s sont moindres, toutes choses �tant �gales par
ailleurs, le niveau des tickets mod�rateurs sera plus �lev�.


Indicateurs relatifs � la mise en commun du risque

Le degr� et la forme de mise en commun du risque est une autre dimension
sur laquelle, la performance de l'AMO peut �tre �valu�e. Dans les sys-
t�mes avec couverture universelle, les cotisations pay�es d'avance sont
combin�es � une r�partition des risques entre les affili�s. Les Comptes

482 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d'�pargne M�dicale sont l'exception, ceux-ci impliquant des cotisa-
tions mais limitant la mise en commun des risques4. Ceci offre une plus
grande protection contre les co�ts �lev�s des d�penses de sant� et
am�liore du m�me coup l'accessibilit� financi�re. Bien que les r�gimes
d'AMO � par d�finition � mettent en commun le risque, l'�tendue
r�elle de celle-ci peut varier grandement selon les pays. Ceci d�pend
non seulement de l'�tendue des cotisations pay�es par les usagers, mais
aussi du niveau de fragmentation de la mise en commun du risque. La
fragmentation se produit lorsqu'il y a trop de petits syst�mes de mise
en commun du risque (OMS 2000). Elle peut amener dans certains
segments de la population, particuli�rement dans les groupes � faible
revenu, une protection moins �lev�e. Les syst�mes de mise en commun
auxquels sont associ�es ces personnes recevront un montant moins
�lev� de cotisations, et offriront des paniers de prestations de sant�
moins g�n�reux et des restrictions dans l'acc�s. Une minimisation de la
fragmentation peut donc permettre une meilleure accessibilit� finan-
ci�re aux services de sant�. Toutefois, il est important de noter que la
fragmentation ne correspond pas simplement � l'existence de plusieurs
syst�mes de mise en commun du risque. Si un m�canisme appel� com-
pensation des risques, qui permet une rectification des ressources
disponibles mises en commun selon les divers risques des affili�s, est en
vigueur, la fragmentation peut �tre �vit�e. Dans la plupart des cas, les
r�gimes d'AMO �tablissent ce genre de compensation.
   Les questions � poser pour �valuer la performance de l'AMO sur cette
dimension, sont les suivantes. Y a-t-il mise en commun multiple des
risques ? Si oui, existe-t-il des m�canismes de compensation des
risques ? Les r�gimes AMO peuvent soit �tre compos�s d'une mise en
commun multiple des risques (caisses multiples), ou d'une mise en com-
mun unique des risques (caisse unique). Dans le cas d'une caisse unique,
toutes les op�rations financi�res y sont transig�es, tandis que pour les
syst�mes � caisses multiples, chaque mise en commun du risque a son
propre fonds de r�serves financi�res. Une caisse unique peut avoir des
bureaux dans plusieurs r�gions ou provinces, mais m�me dans cette si-
tuation, les gestionnaires sont responsables de l'ensemble des transactions
financi�res du syst�me. C'est le cas de l'Assurance Maladie Nationale �
Taiwan : le Bureau de l'Assurance Maladie Nationale (AMN) g�re le sys-
t�me en totalit� et est responsable des op�rations financi�res des six
bureaux r�gionaux. Les principales responsabilit�s de ces derniers sont le
traitement des adh�sions et l'analyse des plaintes (Chiang 1997).

                                        L'assurance maladie obligatoire � 483



   Il y a plusieurs raisons pour pr�f�rer les syst�mes � caisses multiples,
mais une caisse unique demeure la meilleure option pour limiter la
fragmentation en combinant les risques des affili�s dans un fonds com-
mun, tout en fournissant un panier de prestations identique � tous les
affili�s. Un r�gime � caisses multiples n'est pas synonyme de fragmen-
tation. Bien s�r, l'objectif des d�cideurs politiques d'offrir un panier de
prestations de sant� identique � tous les affili�s peut permettre la jonc-
tion n�cessaire entre les syst�mes de mise en commun. Ce ph�nom�ne
est connu sous le nom de compensation des risques, par lequel des sub-
ventions sont donn�es aux personnes � haut risque, � travers un � fonds
de solidarit� �. Ceci est n�cessaire afin d'assurer que les caisses
acceptent toutes les cat�gories de membres, dont ceux � haut risque.
Ainsi, les fonds de solidarit� re�oivent les ressources financi�res suf-
fisantes afin de couvrir les personnes � haut risque. De plus, l'incitation
� syst�matiquement rechercher des personnes � faible risque devrait
�tre r�duite. Les caisses ayant un niveau disproportionn� d'affili�s �
faible risque accumuleront plus facilement des surplus financiers, mais,
ceux-ci devront �tre r�partis avec les autres caisses par le m�canisme de
compensation des risques.
   Afin de mesurer la performance des r�gimes d'AMO en fonction de
cette dimension, il faut tout d'abord identifier si le syst�me de mise en
commun des risques est unique ou multiple. Ensuite, si le syst�me est
une caisse multiple, il faut d�terminer si des m�canismes de compen-
sation des risques sont en place. Deux formes de m�canismes de com-
pensation des risques peuvent �tre distingu�es : les dispositifs de r�gu-
lation des risques ou le partage ex-post des risques (van de Ven et al.
2002). Les dispositifs de r�gulation des risques cit�s peuvent �tre trou-
v�s dans plusieurs pays europ�ens (Allemagne, Belgique, Pays-Bas et
Suisse). Les dispositifs de r�gulation des risques sont utilis�s pour
estimer les d�terminants des d�penses de sant� : �ge, sexe, invalidit�,
revenu, statut d'emploi, r�gion (profil �pid�miologique, pr�domi-
nance rurale et urbaine), d�penses ant�rieures, utilisation ant�rieure
(informations provenant des diagnostics).
   Les caisses d'assurance ayant un nombre �lev� disproportionn�
d'affili�s avec une de ces caract�ristiques, provoquant ainsi une pro-
portion attendue plus grande d'affili�s � haut risque, peuvent recevoir
des subventions du fonds de solidarit�. Ceci aide � compenser l'impact
des profils de risque diff�rents, mais demeure imparfait puisque les
dispositifs de r�gulation des risques sont seulement des estimations

484 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



des d�penses de sant� individuelles. Les informations sur certaines
caract�ristiques sont plus facilement accessibles, tels l'�ge, le sexe et le
statut d'emploi du bassin de population de la zone couverte par la
caisse, ainsi que les caract�ristiques de la r�gion. Un r�gime d'AMO
devrait utiliser des donn�es sur les dispositifs de r�gulation des risques
qui ne sont pas on�reuses � obtenir, mais qui restent de bons indica-
teurs pr�visionnels des futures d�penses individuelles. Par exemple,
cinq sous-groupes d'�ge coupl�s � des indicateurs de sexe, du type de
r�gion (rurale ou urbaine) et de l'incidence de la malaria (faible,
moyen ou �lev�), r�sultent en 36 options sur lesquelles les subventions
aux caisses � haut risque peuvent se baser.
   Le r�gime d'assurance maladie universelle de la Colombie est un bon
exemple de m�canisme de compensation des risques entre syst�mes de
mise en commun du risque (Londo�o 2000 ; Savedoff 2000). Les per-
sonnes assur�es contribuent � hauteur de 12 % de leur salaire (le Regimen
Contributivo), � moins que leur salaire soit insuffisant et dans ce cas, le
r�gime renonce � la contribution (le Regimen Subsidiado). Tous les assur�s
peuvent s'affilier � la caisse d'assurance maladie de leur choix (Entitad
Promotora de Salud � EPS). Les charges pr�lev�es sur les salaires sont
pay�es directement aux caisses. Paral�llement, le gouvernement d�cide
du niveau de revenus d'assurance maladie auxquels chaque caisse a droit.
Ce revenu �quivaut � un montant identique pour toutes les personnes
(Unidad de Pago por capitaci�n � UPC), et est ajust� selon l'�ge et le sexe,
lesquels sont multipli�s par le nombre d'affili�s de la caisse. Les mon-
tants sont r�partis entre les caisses de fa�on � ce que les revenus totaux
d'une caisse couvrent les co�ts des services de sant� utilis�s par les affi-
li�s. Le m�canisme de compensation des risques s'effectue donc de la
mani�re suivante : (i) les caisses d'assurance maladie, percevant des
revenus de charges salariales qui exc�dent les revenus qui leur sont dus,
doivent remettre ce montant � exc�dentaire � au fonds de solidarit�
(Fondo de Solidaridad y Garantia � FOSYGA), (ii) la FOSYGA distribue
ensuite les montants nets qu'elle re�oit entre les caisses d'assurance ma-
ladie dont les charges per�ues sont moins �lev�es que les revenus.
   Le partage des risques ex-post implique le remboursement r�troac-
tif de certains co�ts des caisses d'assurance maladie par le fonds de so-
lidarit�. Par exemple, ceci peut �tre con�u pour couvrir des personnes
dont les co�ts se r�v�lent exceptionnellement �lev�s. Il est int�ressant
de noter que la limite extr�me du remboursement complet est un
r�gime de caisse unique.

                                         L'assurance maladie obligatoire � 485



   La responsabilit� financi�re des r�gimes � caisse unique ou multiple
a un effet important sur l'efficacit�. Les succursales d'un r�gime �
caisse unique n'ont aucune incitation � contenir leurs co�ts lorsqu'elles
n'ont aucune responsabilit� financi�re et que leurs d�penses sont
financ�es � partir des fonds centraux. Par contre, dans un r�gime �
caisses multiples, il peut exister une incitation � l'efficacit� pour chaque
caisse, lorsqu'elles conservent les revenus per�us des divers contribu-
teurs desquels sont soustraites les contributions au fonds de solidarit�.
Toutefois, le partage des risques ex-post r�duit cette incitation, alors
que les co�ts des caisses sont rembours�s par le fonds de solidarit�.
   Dans un r�gime � caisse unique, l'efficacit� peut �tre am�lior�e en
donnant des incitations financi�res aux succursales pour rendre la ges-
tion du travail le plus efficace possible, ou en donnant des contrats �
des fournisseurs efficaces. Que ce soit dans des r�gimes � caisses unique
ou multiples ayant une certaine d�l�gation financi�re, il est important
qu'il y ait des r�gles emp�chant les comportements qui vont � l'encon-
tre de la couverture des personnes � haut risque (�cr�mage de la clien-
t�le). De tels comportements sont ind�sirables, �tant donn� qu'ils aug-
menteront la fragmentation par l'exclusion des personnes � haut
risque. Un r�gime d'AMO pourrait introduire le principe d'une adh�-
sion ouverte � tous, par lequel la caisse d'assurance doit accepter toutes
les demandes d'inscription dans la zone g�ographique (van de Ven et
al., 2000), tout en mettant en place des r�gles strictes concernant les
primes � payer et la mise en place du ticket mod�rateur, afin de limiter
les comportements biais�s lors du choix des affili�s. Une raison plus
pragmatique dans le choix d'un r�gime est l'existence d'infrastructures
institutionnelles. Par exemple, en Belgique, le r�gime d'AMO � caisses
multiples s'est d�velopp� gr�ce aux mutuelles de sant� existantes, aux
racines sociales et politiques profondes de la soci�t�.
   L'assurance compl�mentaire doit aussi �tre consid�r�e. Celle-ci cou-
vre des services suppl�mentaires qui ne sont pas compris dans le panier
de prestations de sant� de l'AMO et qui ne sont pas consid�r�s essentiels,
tels les chambres priv�es dans les h�pitaux. Il peut aussi s'agir de certains
m�dicaments ou traitements r�put�s moins essentiels ou simplement
trop on�reux. Les temps d'attente peuvent ainsi �tre r�duits tout comme
le co�t de certains tickets mod�rateurs. Si les services suppl�mentaires
sont offerts par les caisses d'AMO elles-m�mes, il se peut que les person-
nes � haut risque soient exclues des r�gimes, dans le mesure o� ces
derniers sont con�us de mani�re � satisfaire les pr�f�rences des personnes

486 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



� faible risque. Il peut �tre pr�f�rable de laisser la fourniture de services
suppl�mentaires � des soci�t�s d'assurance maladie priv�es.
   Finalement, il peut exister une limite aux m�canismes de compensa-
tion des risques entre divers groupes de population, au moins tempo-
rairement. Par exemple, ce sera le cas des pays dans lesquels uniquement
le secteur formel de la population, serait capable de soutenir le finance-
ment d'un syst�me �quitable et complet de prestations de soins. Fournir
imm�diatement un panier identique � toute la population n�cessiterait
d'importants transferts de ressources du secteur formel � l'informel ainsi
que des subventions suppl�mentaires du gouvernement. Il pourrait donc
�tre tr�s difficile, � court terme, d'offrir un panier identique � tous. Dans
de telles circonstances, il pourrait �tre pr�f�rable � court terme de mettre
en place un r�gime � caisses multiples, tout en conservant l'objectif de
long terme d'un panier semblable pour toute la population. Afin d'at-
teindre l'objectif, les caisses d'un r�gime multiple devront �tre reli�es d�s
le d�but, afin que soient institutionnalis�s les m�canismes de compensa-
tion des risques.
   Tout comme il est essentiel de minimiser la fragmentation, il est
n�cessaire que la composition de chaque mise en commun du risque
soit repr�sentative de la population vis�e. Ceci pour assurer que cer-
tains groupes ne soient pas exclus et que, plus fondamentalement, la
mise en commun des risques soit p�renne. Par d�finition, un r�gime
de mise en commun des risques de type AMO ne pourrait pas �tre �
adh�sion volontaire ; l'adh�sion obligatoire permet d'emp�cher l'exo-
de potentiel de certains affili�s et est incontournable si les d�cideurs
politiques souhaitent aller vers l'universalit� de la couverture.
   L'unit� d'adh�sion ou d'enregistrement � l'AMO est g�n�ralement
soit l'individu, soit l'ensemble d'un m�nage. L'adh�sion d'un m�nage
complet est avantageuse �tant donn� que la couverture est �largie et
que la s�lection adverse est r�duite. Toutefois, un probl�me � consi-
d�rer est la fraude potentielle de la part de personnes qui ne con-
tribuent pas au r�gime, mais qui se disent membre d'un m�nage alors
qu'elles ne le sont pas. Afin d'�viter ceci, les m�nages et ses ayants
droits doivent �tre d�finis clairement. Une autre option est d'enre-
gistrer chaque membre de la famille individuellement et leur procurer
chacun une carte d'assurance maladie. Les diff�rentes options d'adh�-
sion peuvent impliquer divers niveaux de co�ts administratifs, les co�ts
les plus �lev�s d�coulant de l'enregistrement de la client�le. Cette

                                           L'assurance maladie obligatoire � 487



derni�re mani�re de faire pourrait �tre un investissement valable si les
cas frauduleux peuvent ainsi �tre r�duits de fa�on importante.
   Dans plusieurs pays pauvres, la mobilit� des salari�s et travailleurs
ind�pendants est tr�s importante. Ces migrants ne devraient pas �tre
exclus du r�gime pour autant. On doit par contre d�cider � quel
endroit ils devront s'enregistrer et payer leurs cotisations. Les salari�s
et travailleurs ind�pendants qui se d�placent de leur ville d'origine �
une autre ville pourraient en principe s'enregistrer � l'un ou l'autre
des endroits. Toutefois, peu importe l'endroit d'enregistrement, les
ayants droits du m�nage devraient �tre couverts. Ceci est particuli�re-
ment important dans le cas des familles des travailleurs ind�pendants
qui doivent contribuer une somme uniforme pour chaque membre du
m�nage. Cette pr�occupation est de moindre importance pour les
salari�s dont les contributions (et celles de leurs employeurs) garantis-
sent une couverture � l'ensemble du m�nage.


Indicateurs relatifs � l'achat de services

Une cinqui�me dimension de la performance concerne le panier de
prestations et son contenu. Les cotisations mises en commun sont uti-
lis�es pour acheter un panier de prestations, d�finies dans un contrat
liant l'AMO et les fournisseurs de soins de sant� de tous les niveaux du
syst�me. Ce panier devrait �tre le plus complet possible en tenant
compte des contraintes budg�taires du r�gime. De plus, ses sp�cifica-
tions devraient �tre bas�es sur les pr�f�rences de la soci�t� en ce qui a
trait � l'efficacit� et � l'�quit�, de telle sorte que les ressources soient
utilis�es de la meilleure mani�re possible. Plus fondamentalement
encore, il ne devrait pas exister de � sous-fourniture � de soins de
sant�, tout comme il ne devrait pas exister de � sur-fourniture �, ce
qui n'est ni dans l'int�r�t des affili�s, ni du r�gime d'AMO. Le con-
tr�le de la � sur � et � sous � fourniture repr�sente donc une t�che
importante dans la gestion de l'AMO.
   Les indicateurs de performance, ici, sont : l'existence et le bon fonction-
nement de m�canismes de contr�le (r�vision, informations sur les droits
des usagers, comit�s d'appr�ciation des actes m�dicaux, revue des
r�clamations), l'existence de contrats bien faits et leur mise en oeuvre. Des
m�canismes de contr�le devraient �tre mis en place pour assurer que le
panier de prestations de soins est bien re�u par les affili�s qui y ont

488 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



droit. En l'absence d'informations suffisantes sur les droits des usagers,
les affili�s du r�gime pourraient ne pas avoir acc�s � l'ensemble des
services auxquels ils ont droit. Ceci devrait �tre jumel� � des m�-
canismes de demandes de r�visions, de telle sorte que les patients peuvent
se plaindre, lorsqu'ils ont l'impression de ne pas avoir re�u les soins
ad�quats. M�me avec une connaissance compl�te de ses droits et une
accessibilit� totale aux m�canismes de r�vision, l'usager doit s'en
remettre au fournisseur de soins pour d�cider quel service il devrait
recevoir : il existe une asym�trie d'information. Ce ph�nom�ne est connu
comme le � probl�me de l'agent �, o� le fournisseur (� l'agent �) prend
la d�cision pour le compte de l'usager (� le principal �) (McGuire et al.
1988). Le probl�me de l'agent peut amener le fournisseur � ne pas
offrir aux patients les interventions m�dicales comprises dans le panier
de prestations m�me lorsqu'elles sont n�cessaires. Ce ph�nom�ne se
produira plus fr�quemment si, par exemple, le fournisseur a un budget
serr�. Un comit� d'appr�ciation des actes m�dicaux peut �valuer si les
fournisseurs ont offert les soins ad�quats.
   Une sur-production est aussi possible, particuli�rement lorsque le
fournisseur est pay� � l'acte. L'asym�trie d'information est encore
pr�sente ici entre les caisses d'assurance (le principal) et le prestataire
de soins de sant� (l'agent). Un comit� d'appr�ciation des actes m�di-
caux, par lequel les r�clamations d'assurance sont r�vis�es de mani�re
ind�pendante par du personnel de sant� appropri�, permet d'assurer
que les r�clamations faites par les prestataires sont justifi�es. Ces
m�canismes de contr�le � des m�canismes de demandes de r�vision,
des informations compl�tes sur les droits des prestataires, des comit�s
d'appr�ciation des actes m�dicaux et des revues des r�clamations �
sont une indication d'un panier de prestations bien mis en oeuvre et
donc de bonne performance.
   Bien que les m�canismes de contr�le soient importants, le contrat
entre le prestataire de soins et la caisse d'assurance doit d'abord �tre
bien con�u. (Perrot 2002) Ce n'est pas simplement ce qui est stipul�
dans le contrat, mais bien le potentiel de contestabilit� du contrat qui
importe. La n�cessit� de renouveler les contrats mettrait de la pres-
sion sur les fournisseurs pour offrir des soins de qualit� (Perrot 2002).
   Pour ce qui est du contenu du panier de soins, les d�cideurs poli-
tiques doivent d�cider de l'importance relative des crit�res d'efficacit�
et d'�quit�. Les crit�res suivants d'efficacit� et d'�quit� peuvent �tre
consid�r�s : (1) rentabilit�, (2) impact positif significatif sur la sant� /

                                        L'assurance maladie obligatoire � 489



conditions graves de sant� de l'individu, (3) �galit� de sant� durant la
vie, (4) r�duction de la pauvret�, (5) �quit� horizontale, i.e. � traite-
ment �gal � besoin �gal �, (6) responsabilit� collective ou individuelle.
Il est particuli�rement important que les substitutions possibles entre
l'�quit� et l'efficacit� soient connues et comprises. Par exemple, si une
intervention vise les conditions graves de sant�, mais n'est pas tr�s
rentable, le choix des d�cideurs politiques de l'inclure d�pendra du
poids qu'ils accordent aux crit�res. Le poids relatif donn� � chacun des
crit�res devrait refl�ter les pr�f�rences de la soci�t�. En d'autres mots,
certains peuvent pr�f�rer moins d'efficacit� en �change d'une plus
grande �quit�. Les d�cideurs politiques peuvent aussi refl�ter les
pr�f�rences de la soci�t� en mettant en oeuvre des tickets mod�rateurs
selon les niveaux de priorit� des interventions
   La fa�on de payer les prestataires individuels ou institutionnels peut
significativement affecter les co�ts et la qualit� des soins, et peut donc,
dans ce cas, contribuer � l'atteinte de l'utilisation optimale des
ressources. Il est impossible d'�tablir cat�goriquement quel m�ca-
nisme de paiement est meilleur car chacun a ses forces et faiblesses.
Pour chaque m�thode de paiement, nous faisons une br�ve descrip-
tion et proposers des param�tres de conception susceptibles d'assurer
une meilleure performance en terme de rentabilit� et de qualit� des
soins (Carrin, Hanvoravongchai 2003 ; Normand,Weber 1994 ; Wit-
ter et al. 2000).
   La r�mun�ration � l'acte est un m�canisme de paiement par lequel les
fournisseurs sont pay�s pour chaque acte fourni � un client. Sa principale
force est d'encourager la productivit�, ce pourquoi elle est aussi souvent
critiqu�e, puisqu'elle encouragerait une sur-production (demande
induite de l'offreur) non-appropri�e et une tendance � r�duire le temps
par activit� ou � d�l�guer � des personnes moins qualifi�es. De plus, les
co�ts administratifs seront �lev�s, �tant donn� les co�ts de facturation,
les frais de remboursement et les frais de contr�le et d'ajustement des
honoraires. La sur-production peut �tre contrecarr�e par une combinai-
son de r�mun�ration � l'acte � des budgets ou en ajustant la r�mun�ra-
tion apr�s qu'un certain niveau de soins soit d�pass� (Carrin, Hanvo-
ravongchai 2003). Des tickets mod�rateurs aux patients peuvent aussi
agir en contrepoids � la demande induite de l'offreur. La concurrence
entre les fournisseurs peut att�nuer les aspects n�gatifs d�crits ci-dessus,
�tant donn� que la mauvaise qualit� des soins am�nera les usagers �
choisir d'autres fournisseurs, bien que la capacit� des patients �

490 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



d�terminer ce qu'est un bon et un mauvais service de sant� soit limit�e
(Witter et al. 2000). Des mesures de contr�le, tels que l'utilisation de
comit�s d'appr�ciation des actes m�dicaux, peuvent aussi limiter la d�l�-
gation inappropri�e et le temps insuffisant pass� avec les usagers.
   La r�mun�ration � la journ�e pour des soins hospitaliers est simple et
peu co�teuse � administrer. Toutefois, elle peut �tre une incitation �
augmenter la dur�e du s�jour des patients et � accro�tre le nombre
d'admissions. L'effet sur la qualit� peut �tre n�gatif en l'absence de
concurrence ou de contr�le, puisque les h�pitaux ont int�r�t � r�duire
leurs facteurs de production afin de diminuer les co�ts. Afin de cr�er
une incitation � r�duire la dur�e du s�jour moyen � l'h�pital, la
r�mun�ration � la journ�e peut �tre progressivement diminu�e �
mesure que la dur�e du s�jour augmente. C'est le cas au Japon, o� le
tarif quotidien apr�s 90 jours est moins de la moiti� de celui des 14
premiers (Ikegami, Campbell 1999).
   La r�mun�ration au cas peut �tre utilis�e pour les soins ambulatoires
et pour les malades hospitalis�s, et est facile � administrer. Un exemple
connu est la m�thode de paiement � Diagnosis Related Group
(DRG) �, pour laquelle l'h�pital est pay� une somme fixe pour les
traitements selon le groupe dans lequel l'usager a �t� diagnostiqu�.
Ceci est bon pour le contr�le des co�ts puisque les fournisseurs sont
pouss�s � �tre plus efficaces, mais cet effet est annul� par l'incitation �
augmenter les admissions. De plus, cette m�thode incite les prestataires
� poser des diagnostics plus graves � et donc plus co�teux � et �
transf�rer les cas plus complexes � d'autres fournisseurs. Les groupes
diagnostiques doivent �tre clairement d�finis. Les m�canismes de con-
tr�le sont particuli�rement importants afin d'assurer que les patients
sont correctement diagnostiqu�s et que les cas compliqu�s ne sont pas
transf�r�s sans raison, mais ces mesures de contr�le sont co�teuses.
   La r�mun�ration � la capitation est celle o� les fournisseurs re�oivent
des paiements selon la taille de la population desservie ; elle peut �tre
utilis�e pour les soins ambulatoires et pour les malades hospitalis�s.
L'administration est facile, m�me lorsque les paiements sont ajust�s de
mani�re � refl�ter la morbidit� attendue de la population (mesur�e, par
exemple, par l'�ge et les structures socio�conomiques). Il n'y a pas
d'incitation � fournir des soins en exc�s. Ce contr�le am�lior� des co�ts
peut donner naissance au probl�me oppos�, soit une sous-production
de soins de sant�. Afin d'�viter la sous-production, une bonne m�thode
est d'appliquer la capitation � des groupes de prestataires individuels,

                                           L'assurance maladie obligatoire � 491



r�duisant l'incitation qu'aurait un prestataire unique � r�duire la pro-
duction. La concurrence entre les prestataires peut aussi aider � r�duire
ce probl�me, puisque les revenus des prestataires d�pendent du nom-
bre et du type de personnes servies.
   Les budgets, s'ils sont strictement mis en oeuvre, peuvent aider � con-
tr�ler les co�ts. Tout comme avec la capitation, il n'y a pas de lien entre
la quantit� et la composition des soins et les montants re�us par les
prestataires. Toutefois, la capacit� de contr�ler les co�ts totaux est li-
mit�e si le budget est insuffisant. De plus, lorsque les budgets ne sont pas
stricts, et comme ils sont souvent bas�s sur les co�ts historiques, il
n'existe pas d'incitation � minimiser les co�ts pour les fournisseurs, et il
peut m�me exister une incitation � les exc�der. Les transferts de cas sont
aussi probables, ainsi qu'une sous-production et des listes d'attente. Les
budgets doivent �tre vus comme �tant stricts et non bas�s sur les alloca-
tions historiques, mais plut�t sur la taille de la population et la morbidit�
attendue. Le contr�le est encore ici n�cessaire afin d'�viter la sous-pro-
duction et des transferts inappropri�s de cas. Tout comme avec la capita-
tion, un budget unique pour le syst�me int�gral de r�f�rence est possible,
mais pourrait �tre difficile � appliquer pour les m�mes raisons.
   Le salaire est une m�thode de r�mun�ration simple administrative-
ment, mais ne couvre que les co�ts du personnel. La sur-production
est peu probable, mais la sous-production l'est, puisque les salaires
peuvent amener une faible motivation personnelle. Ceci peut m�me
mener les prestataires � travailler aussi dans le secteur priv�.
   Un r�gime d'AMO ad�quat doit s'assurer que les fournisseurs sont
soumis � des incitations appropri�es afin que les ressources soient uti-
lis�es de mani�re optimale. Comme chaque m�thode a ses forces et
faiblesses (voir tableau 3), un m�lange de plusieurs m�thodes de
r�mun�ration serait pr�f�rable. Par exemple, � un salaire de base
pourrait �tre ajout�e une indemnit� sous forme de capitation et une
r�mun�ration � l'acte pour certaines interventions dont la production
�lev�e est jug�e hautement d�sirable, comme les immunisations.
   L'efficacit� administrative, enfin, est une autre dimension de la perfor-
mance de l'AMO. Les co�ts administratifs sont le r�sultat de la planifica-
tion, de la gestion, de la r�gulation et du recouvrement des fonds et du
traitement des r�clamations portant sur les dispositifs d'administration
(OECD, 2001). Certaines d�penses d'investissements peuvent aussi faire
partie des co�ts administratifs. Une certaine quantit� de fonds devrait
�tre conserv�e comme r�serve, afin de se pr�munir contre des co�ts

492 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



Tableau 3 : M�thodes de paiement des fournisseurs et effets de production attendus

M�thode de paiement     Sur/sous production Principales activit�s de contr�le

R�mun�ration � l'acte   Sur-production      Combiner avec budgets
                                            Ajuster les frais lorsqu'un certain niveau
                                            est d�pass�

R�mun�ration � la       Sur-production      R�duire les paiements quotidiens � mesure
journ�e (per diem)                          que la dur�e d'hospitalisation s'allonge

R�mun�ration au         Sur-production      S'assurer que les groupes de diagnostics
cas (DRGs)                                  sont clairement d�finis

R�mun�ration � la       Sous-production     Int�grer les syst�mes d'orientation
capitation

Budget                  Sous-production     Budgets stricts non bas�s sur les
                                            allocations historiques
                                            Int�grer les syst�mes d'orientation

Salaires                Sous-production     Salaires d�termin�s selon les performances



inattendus et des fluctuations dans les d�penses. Toutefois, associer une
meilleure performance � des co�ts administratifs moins �lev�s est sim-
pliste ; des informations compl�tes sur les droits des prestataires, des
revues des r�clamations, des m�canismes de demandes de r�vision et des
comit�s d'appr�ciation des actes m�dicaux, sont tout aussi importants
pour assurer une utilisation optimale des ressources, mais vont n�ces-
sairement accro�tre les co�ts administratifs.
   A ce niveau, un indicateur de performance est le pourcentage des
d�penses consacr�es aux co�ts administratifs. Nous sugg�rons un pourcentage
bas� sur l'exp�rience des r�gimes d'AMO arriv�s � maturit�. La part
moyenne des co�ts administratifs dans les d�penses de sant� �tait de
4,2 % pour une s�lection de r�gimes (Carrin et Hanvoravongchai, 2003),
la fourchette allant de 2 % (Japon) � 6,6 % (Suisse), quoique certains de
ces co�ts aient pu avoir �t� quelque peu sous-estim�s. Par exemple, en
France, o� seuls les co�ts centralis�s sont inclus dans les co�ts adminis-
tratifs. Ainsi, un pourcentage maximum de 6 � 7 % est recommand�
seulement lorsque le pays a atteint les derni�res �tapes de d�veloppe-
ment de son r�gime d'AMO. Avant cela, les performances peuvent �tre
contr�l�es, une baisse des co�ts administratifs �tant attendue � mesure
que le r�gime se d�veloppe. Une r�duction minimum de 0,1 % par
ann�e (bas�e sur l'exp�rience de pays de l'OCDE) pourrait �tre vis�e.
   Imposer des limites budg�taires sur les ressources est une fa�on simple
de contr�ler les co�ts administratifs. Par exemple, en Belgique, un
budget typique consiste en une portion fixe, qui est allou�e incondition-

                                          L'assurance maladie obligatoire � 493



nellement, et une composante variable qui est fonction de la perform-
ance de la caisse. De plus, l'exclusion de certaines interventions
fr�quentes peu co�teuses du panier de soins peut aider � r�duire les co�ts
administratifs, en �vitant les co�ts de transaction des remboursements. Si
de telles interventions satisfont les crit�res d'efficacit� et d'�quit�, elles
devraient �tre exclues uniquement si elles sont facilement accessibles
financi�rement et peuvent �tre pay�es, m�me par les plus pauvres.



R�LE DU GOUVERNEMENT DANS LE D�VELOPPEMENT DE L'AMO

Nous avons pass� en revue les facteurs importants qui facilitent la
transition vers une couverture universelle, ces enseignements �tant
tir�s du d�veloppement de r�gimes d'AMO dans quelques pays choi-
sis. L'administration g�n�rale a �t� identifi�e comme un facteur essen-
tiel ; sa premi�re fonction est de d�finir une strat�gie d'AMO claire et
coh�rente, qui doit viser les principales caract�ristiques de conception
du r�gime : (1) un calendrier pour la couverture syst�matique de la
population ou de groupes sp�cifiques de population, (2) la d�finition
des cotisants et des b�n�ficiaires, (3) les sources de financement,
(4) l'attribution des revenus et la m�thode de paiement des four-
nisseurs de soins, et (5) le cadre organisationnel et administratif. La
strat�gie doit ensuite �tre accompagn�e d'un projet de loi sur le
r�gime d'AMO. Ce dernier doit contenir les principes g�n�raux de la
couverture universelle par l'AMO, les caract�ristiques de conception
de base et la r�glementation. Le calendrier menant � l'�tablissement
du r�gime d'AMO devrait �tre pr�cis�, sp�cifiant quand la loi d'AMO
sera vot�e et le moment de la mise en oeuvre, qui, elle, demandera une
administration g�n�rale de qualit� de la part du gouvernement. Il fau-
dra assurer la disponibilit� de capacit�s administratives ad�quates, que
les soins inclus dans le panier soient disponibles, et que le d�veloppe-
ment du r�gime puisse �tre contr�l� et �valu�.



CONCLUSION

Les commentaires qui pr�c�dent soulignent le r�le d'administrateur
g�n�ral du gouvernement dans le lancement et le suivi de la transition
vers un r�gime d'AMO � couverture universelle. Un certain nombre de

494 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



facteurs ont �t� jug�s cruciaux pour faciliter la transition : le niveau des
revenus, la structure de l'�conomie, la distribution de la population, la
capacit� des pays � administrer le r�gime d'AMO et le niveau de soli-
darit� de la soci�t�. Il est aussi essentiel que les d�cideurs prennent ces
facteurs en compte et essaient de les utiliser comme leviers politiques.
L'am�lioration des capacit�s administratives et la stimulation de la soli-
darit� dans la soci�t� sont des facteurs qui peuvent �tre davantage
affect�s par une administration g�n�rale directe du gouvernement.
   Ainsi, il est clair que le d�veloppement d'un r�gime d'AMO dans un
pays particulier d�pend en grande partie des conditions socio-
�conomiques et du contexte politique. Il est donc important que les
politiques d'AMO soient bien con�ues et r�alistes, en particulier, au
niveau des param�tres de conception : couverture de la population,
m�thodes de financement, niveau de fragmentation, composition de la
mise en commun du risque, panier de soins , m�canismes de paiement
des fournisseurs et efficacit� administrative. Comme l'atteinte de la
couverture universelle peut prendre beaucoup de temps, durant la
p�riode de transition, un ensemble d'indicateurs de performance
devraient aussi �tre utilis�s afin d'identifier les secteurs n�cessitant des
ajustements et des am�liorations.
   La couverture universelle, qui est un acc�s s�curis� � des soins de
sant� ad�quats pour tous � un prix accessible, est l'objectif ultime d'un
r�gime d'AMO. Nous avons d�crit ce qui peut �tre fait afin d'attein-
dre ce but, en analysant le processus de transition et en d�taillant ce
qui caract�rise un r�gime d'AMO performant. Un tel r�gime d'AMO
peut alors non seulement contribuer � une plus grande justice dans le
financement et � une meilleure r�activit�, mais aussi au but ultime
d'un meilleur �tat de sant� pour toute la population.
   Nous remercions Jan van Lente, Jean Perrot et William Savedoff pour
leurs suggestions et commentaires et Manique Abayasekara pour son aide
technique.



NOTES

 1. L'OMS a d�fini les objectifs des r�gimes de financement de la
sant� ainsi : � Le but du financement de la sant� est de rendre des fonds
disponibles et �tablir des incitations financi�res pour les prestataires,

                                                L'assurance maladie obligatoire � 495



afin d'assurer que tous les individus ont acc�s � un syst�me de sant�
publique efficace et � des soins de sant� individuels � (OMS 2000).
      Un syst�me de financement de la sant� performant, et par le fait
m�me un r�gime d'AMO performant, devrait avoir les objectifs suivants :
g�n�rer des ressources suffisantes et p�rennes pour la sant� ; utiliser ces
ressources de fa�on optimale (en modifiant les incitatifs et en utilisant de
fa�on appropri�e ces ressources) ; Assurer une accessibilit� financi�re
pour tous.


 2. Les personnes d�pendantes sont incluses dans les diff�rentes
cat�gories.


 3. Les d�penses d'urgence sont d�finies par l'OMS comme �tant
40 % ou plus du revenu d'un m�nage, apr�s les d�penses de subsistance
(nourriture), Les d�penses de subsistance sont calcul�es comme les
d�penses alimentaires des m�nages pour lesquels la portion allou�e � la
nourriture par rapport aux d�penses totales du m�nage est � la m�diane
de tous les m�nages (Xu et al. 2003).


 4. Pour une discussion sur leur utilisation potentielle comme instru-
ment de financement de la sant�, voir Hanvoravongchai (2002).



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                        Offre de soins et assurance :
        Les enjeux en Afrique francophone

                                   Pierre Fournier, Caroline Tourigny




R�sum� : Le d�veloppement de l'assurance maladie en Afrique permettrait
une dissociation des fonctions de paiement et de dispensation des services qui est
au coeur de toutes les r�formes de sant�. En Afrique, l'assurance maladie se
d�veloppe selon diff�rentes modalit�s mais elles sont toutes indissociables de l'of-
fre de soins. Bien souvent cette derni�re, tr�s largement domin�e par le secteur
public, n'est pas de qualit� satisfaisante. L'absence de concurrence limite le
potentiel d'am�lioration de la qualit� attendue des ententes contractuelles entre
l'assureur et le prestataire. Ce chapitre synth�tise les exp�riences rapport�es et les
le�ons apprises durant le colloque � L'am�lioration de l'acc�s aux services de
sant� en Afrique francophone : le r�le de l'assurance � (Institut de la Banque
mondiale � Institut Multilat�ral d'Afrique � Coll�ge des �conomistes de la
Sant� � Paris, 28�29 avril 2004) en distinguant les diff�rentes formes d'as-
surances et situations de l'offre de soins. Il d�veloppe plus particuli�rement la
situation la plus fr�quente � savoir la mise en place de la micro assurance
volontaire dans un contexte d'offre quasi exclusivement publique. Actuellement,
la capacit� de l'assurance d'influencer la disponibilit� et la qualit� de l'offre des
soins est limit�e. Quelques strat�gies que les assurances pourraient utiliser pour
am�liorer l'offre de soins dans diff�rents contextes sont identifi�es et discut�es.
   L'assurance dans le domaine de la sant� pr�sente plusieurs avantages directs
du fait de la protection qu'elle conf�re aux assur�s et en tant que m�canisme de
financement. L'offre de soins est indissociable de ces avantages : la protection
contre le risque maladie n'est r�ellement effective que si les soins sont appropri�s


                                                                                     501

502 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  et de qualit�, et l'efficacit� d'un m�canisme de financement de la sant� n'a
  d'utilit� que si les autres composantes du syst�me de sant�, et en particulier le
  syst�me de soins, jouent convenablement leur r�le.
      La dissociation des fonctions de paiement des soins et de leur dispensation a
  �t� et demeure partout au coeur des r�formes de sant�. Ce n'est pas sous cet
  angle que la perspective des liens entre l'offre de soins et l'assurance sera
  d�velopp�e dans ce chapitre. Nous nous efforcerons plut�t de faire une synth�se
  des �l�ments empiriques apport�s par le colloque � L'am�lioration de l'acc�s aux
  services de sant� en Afrique francophone : le r�le de l'assurance �1 qui s'est cen-
  tr� sur l'�tat des lieux et l'extension de l'assurance maladie dans ses diff�rentes
  formes.
      Cette perspective sera d�velopp�e sous l'angle de l'extension de l'assurance
  maladie selon diff�rentes situations de l'offre de soins. Pr�alablement un bref
  tableau de la situation g�n�rale de l'offre de soins en Afrique au sud du Sahara
  (ASS) sera bross�. Ensuite nous regrouperons les exp�riences rapport�es, � l'oc-
  casion compl�t�es par des �l�ments probants de la litt�rature, selon trois cas de
  figure qui ne sont pas tous mutuellement exclusifs : (1) l'assureur est �tabli et
  ses exp�riences avec les prestataires de soins facilitent ou limitent ses op�rations,
  (2) l'assureur vise � s'�tablir et ses liens avec les prestataires sont d�terminants
  pour le d�marrage de l'assurance et (3) l'assureur et les prestataires ont des
  liens �troits qui peuvent aller jusqu'� l'int�gration. Pour terminer, nous ver-
  rons comment agir sur l'offre de soins avec les leviers qu'une assurance peut
  apporter.



LA SITUATION DE L'OFFRE DE SOINS EN ASS

Elle a connu des �volutions importantes. Les aspects qui seront suc-
cinctement mis en exergue dans cette section concerneront : l'exten-
sion de la couverture g�ographique, la disponibilit� des m�dicaments
essentiels, la qualit� des services, leurs co�ts et leurs liens avec l'utili-
sation. Nous n'aborderons pas les questions relatives � l'efficience des
soins ou � leur impact sur la sant�. Le r�le du secteur priv� constitue
�galement un enjeu important dans le d�veloppement de l'offre de
soins en ASS. Nous en discuterons dans la perspective plus g�n�rale
de la concurrence entre diff�rentes formes de l'offre, ou au contraire
de situations quasi monopolistiques.
  Il est clair que depuis les ind�pendances des progr�s consid�rables
ont �t� r�alis�s en mati�re de couverture des soins � tous les niveaux

              Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 503



de la pyramide sanitaire, et en particulier au niveau des soins de
premi�re ligne. Pour certains pays �tendus et � faible densit� d�mo-
graphique, cela constitue toujours la premi�re priorit� de d�veloppe-
ment du syst�me de soins2. Cette extension g�ographique a permis
dans certains cas de corriger des in�galit�s de couverture h�rit�es de
l'�poque coloniale3. Bien qu'elle ne constitue plus de fa�on univoque
la barri�re la plus importante � l'acc�s aux soins, l'accessibilit� g�ogra-
phie demeure un probl�me, � consid�rer en lien avec les co�ts et la
qualit� des soins (Noor et al. 2003).
   La qualit� des soins est devenue une pr�occupation quand les
investissements qui ont permis l'extension de la couverture n'ont pas
produit les effets attendus en termes d'utilisation des services de sant�.
Dans cette perspective, c'est vers la qualit� des soins per�ue et ses
dimensions culturelle et inter personnelle que l'attention s'est tourn�e
et qu'on a cherch� � la caract�riser (Haddad et al., 1998) et � la
mesurer (Haddad, Fournier, Potvin 1998). La qualit� technique (et son
impact sur la sant�) a toujours �t� d'actualit� dans les domaines o� ses
d�ficiences ont un effet imm�diatement n�faste et directement
attribuable sur la sant�, comme par exemple ceux des soins obst�tri-
caux et n�onataux (Kwast 1996, 1998). Avec ces deux aspects de la
qualit�, per�ue et technique (ou profane et professionnelle), on touche
deux dimensions centrales des services de sant� dont l'utilisation est la
charni�re : la perception de la qualit� des services par les populations
d�termine leur utilisation et leur qualit� technique rend cette utilisa-
tion efficace.
   Les co�ts des services de sant� sont devenus une pr�occupation
majeure quand on a institutionnalis� le transfert d'une partie des
charges du financement public au priv� et plus particuli�rement aux
malades. Ce tournant qu'incarne l'Initiative de Bamako (McPake,
Hanson, Mills 1993) a depuis �t� document� en termes de ses effets
g�n�ralement n�gatifs sur l'utilisation des services de sant� et sa con-
tribution � l'appauvrissement (Palmer et al., 2004). L� o� ils ont �t�
institutionnalis�s, l'abolition totale des paiements directs aux usagers
est toujours un sujet d'actualit� (Xu et al., 2006).
   S'il y a un domaine o� on note une am�lioration tangible, c'est celui
de la disponibilit� et de l'accessibilit� des m�dicaments essentiels. Les
initiatives de l'Organisation Mondiale de la Sant� (OMS) dans les
ann�es 70 � 80 sont � l'origine de cette situation. L'Initiative de Bamako
a d'une part capitalis� � partir des premiers acquis des politiques

504 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



nationales des m�dicaments essentiels, et d'autre part permis de
s�curiser le financement de l'acquisition des m�dicaments � partir du
recouvrement des co�ts. Il faut rappeler que la disponibilit� du m�dica-
ment est une composante majeure de la qualit� des soins per�ue par les
usagers.
   Le secteur priv� occupe une place de plus en plus importante en
ASS. Le vocable � secteur priv� � regroupe des modalit�s organisa-
tionnelles et des pratiques tr�s diverses : secteur priv� de la m�decine
moderne orient� vers la client�le ais�e, pratiques priv�es plus ou
moins l�gales de professionnels du secteur public, pratiques ill�gales,
secteur sans but lucratif et souvent confessionnel, secteurs coop�ratif
et communautaire, etc . . .
   On s'accorde pour reconna�tre que le secteur priv� occupe une
place grandissante en ASS, mais la contribution effective qu'il peut
apporter au syst�me de sant� n'est pas clairement �tablie, surtout pour
le priv� � but lucratif. D'une part on enregistre un plaidoyer vigoureux
pour le d�veloppement de ce secteur pour le b�n�fice de tous (Mills et
al. 2002 ; Prata, Montagu, Jefferys 2005) et d'autre part la qualit� des
services qui y sont produits est mal connue, et surtout elle semble dif-
ficile � am�liorer (Zwi, Brugha, Smith 2001).
   Il faut �galement mentionner, comme le montre Streefland (2005)
en Ouganda, que le d�veloppement du secteur priv� se fait parfois �
l'occasion de l'affaiblissement du secteur public et en d�tournant des
ressources du public vers le priv�4, ce qui a justement pour effet d'ac-
cro�tre l'affaiblissement du secteur public. Dans leur pr�sentation
d�taill�e du fonctionnement et des pratiques d'un centre de sant�
urbain public � Conakry (Guin�e), Diallo et Campel-Camara (2003)
d�crivent une situation analogue : les employ�s de ce centre (soignants
et non soignants) surfacturent � leur profit certaines cat�gories de
patients.
   En ASS, o� la majorit� de la population r�side en milieu rural, la
diversit� de l'offre est radicalement diff�rente selon que l'on se situe en
milieu urbain ou rural. En milieu urbain, l'offre de soins est diversifi�e
tant en termes des niveaux de soins que des secteurs d'activit�s des
prestataires. En milieu rural, l'offre est souvent exclusivement
publique5. De ce fait, les situations de concurrence y sont plut�t rares
et les incitatifs (souvent financiers) qui permettraient d'influencer l'of-
fre sont donc inop�rants. Une lecture de cette situation peut se faire
par le biais des �tudes portant sur l'utilisation des services de sant�. En

               Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 505



milieu urbain, les utilisateurs peuvent exercer leurs pr�f�rences, et
quand ils en ont les moyens, ils pr�f�rent se diriger vers le secteur priv�
o� l'accueil est meilleur, mais la qualit� technique inconnue voir dou-
teuse pour certains prestataires. En milieu rural, m�me si l'offre
publique est reconnue de mauvaise qualit�, les populations n'ont
g�n�ralement pas d'autre alternative que d'y recourir6. La diversit� des
situations de l'offre ne peut se r�sumer � ces deux extr�mes : dans les
villes de taille interm�diaires comme les capitales r�gionales, on assiste
� l'�mergence d'une offre priv�e lucrative qui pr�sente une am�liora-
tion qualitative notable et qui du fait du pouvoir d'achat limit� des po-
pulations, ne vise pas exclusivement la population tr�s nantie qui ne se
retrouve que dans les capitales nationales7. L'interrelation entre les dif-
f�rents secteurs se r�alise �galement par les influences qui s'exercent
sur les professionnels selon la situation de concurrence dans laquelle ils
se trouvent. Ma�ga et al. (2003) ont montr� qu'au Mali les comporte-
ments des prescripteurs du secteur public variaient selon qu'ils se trou-
vaient ou non en pr�sence d'une offre priv�e concurrente.



ASSURANCE MALADIE ET OFFRE DE SOINS

Cette section passera en revue les exp�riences entre les assurances et
les prestataires de soins, le r�le de la situation de l'offre de soins sur la
mise en place et le d�veloppement des assurances et les solutions pro-
pos�es ou exp�riment�es pour pallier aux difficult�s rencontr�es. Les
exp�riences rapport�es ici pr�sentent deux caract�ristiques limi-
tantes : d'une part elles font g�n�ralement �tat des difficult�s entre
l'assureur et les prestataires, les exp�riences positives rapport�es �tant
beaucoup plus rares et, d'autre part, ces situations ne sont rapport�es
que du point de vue des assureurs et non de celui des prestataires. Une
large part de ces exp�riences concerne la micro assurance, ce qui n'est
pas �tonnant vu l'engouement dont est l'objet cette innovation.


L'assureur est �tabli

Une partie importante des probl�mes rencontr�s rel�vent du non
respect du contrat entre l'assureur et le prestataire. Dans le cas de la
micro assurance, cette notion de contrat est souvent toute relative car
dans bien des cas, il n'a pas fait pas l'objet d'un document �crit8. Les

506 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



diff�rents probl�mes qui ont �t� recens�s rel�vent : (1) de la recon-
naissance des b�n�ficiaires et de leurs droits, (2) du respect (ou du non
respect) de la tarification, du contr�le des actes m�dicaux et des r�gles
de prescriptions, et (3) de la disponibilit� et la qualit� de l'offre.


Reconnaissance des b�n�ficiaires

Ce point est critique car un b�n�ficiaire qui ne peut faire valoir ses
droits lorsqu'il veut acc�der aux soins perdra confiance dans son assu-
rance et ce lien est fondamental.

� Au S�n�gal, on a rapport� que les assur�s de certains Instituts de
  Pr�voyance Maladie (IPM) se voient refuser la prise en charge de
  leurs soins ou de leurs ordonnances m�dicales par des fournisseurs
  vis-�-vis desquels les IPM ont des retards de paiements du fait de
  leurs difficult�s financi�res. (Diallo, Diongue et Wade, 2004).

� Au Togo, certaines structures sanitaires publiques refusent les attes-
  tations de prise en charge m�dicale des fonctionnaires et autres
  agents de l'�tat (Bawe et al. 2004). Il en est de m�me au Gabon o�
  les prises en charge d�livr�es par la CNGS (Caisse Nationale de
  Garantie Sociale) sont refus�es par les h�pitaux (Biyogo Bi-Ndong
  et al., 2004).


Tarification, contr�le des actes m�dicaux
et r�gles de prescriptions

� Au S�n�gal, les IPM remboursent les soins dispens�s dans le secteur
  priv� pour lesquels ils b�n�ficient de tarifs privil�gi�s. En l'absence
  de nomenclature g�n�rale des actes m�dicaux et d'un contr�le m�di-
  cal des actes, la situation est tr�s d�favorable pour les IPM qui sont
  confront�es � des pratiques de surprescriptions et de surconsomma-
  tion m�dicamenteuse qui mettent leur �quilibre financier en p�ril
  (Diallo et al., 2004)

� Au Mali, l'UTM (Union Technique de la Mutualit�) a de grandes diffi-
  cult�s � faire respecter les dispositions contractuelles qui pr�voient que
  les m�decins prescrivent des m�dicaments sous DCI (D�nomination
  Commune Internationale ou � m�dicaments g�n�riques �), et de ce
  fait envisage de cr�er prochainement plusieurs pharmacies mutualistes

              Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 507



   qui appliqueront le principe de substitution sur les ordonnances de
   m�dicaments de marque (Ouattara 2004). Toujours au Mali, on a rap-
   port� des situations o� les prestataires � d�tournent � les mutualistes
   qui sont une client�le solvable, des �tablissements publics vers des �ta-
   blissements priv�s pour lesquels ils ne disposent pas de couverture
   (Letourmy et al., 2005). Le Burundi envisage �galement de cr�er un
   r�seau de pharmacies mutualistes afin de contenir les co�ts du r�gime
   des agents publics et assimil�s (Nzohabonimana et al., 2004a). Au
   Rwanda, la Rwandaise d'Assurance-Maladie (RAMA) dispose d�j� de
   son r�seau de pharmacies mutualistes (Gakwaya et al., 2004).

� Au B�nin, les assureurs souhaitent standardiser les sch�mas
   th�rapeutiques et assurer un contr�le par un m�decin conseil (Affo
   et al., 2004), pratique aussi envisag�e par le Togo (Bawe et al., 2004).


Disponibilit� et qualit� de l'offre

Les faiblesses quantitatives et qualitatives de l'offre constituent une
contrainte majeure dans le fonctionnement des assurances sant� en
ASS, cette pr�occupation a clairement �t� formul�e dans le cas du
Burundi, du Tchad, du Rwanda, de la Mauritanie, du B�nin, du Mali,
du Gabon, de la C�te d'Ivoire et du Burkina Faso. Une revue exhaus-
tive des enjeux entourant le d�veloppement des mutuelles de sant� en
ASS �tablit le m�me constat (Waelkens, Criel 2004).

� Au Burundi, les in�galit�s de couverture g�ographique du r�seau
   public ne permettent pas aux assur�s r�sidant loin des grands centres
   de b�n�ficier des prestations couvertes par la Mutuelle de la Fonc-
   tion Publique. Cela a conduit ses op�rateurs � envisager de passer
   des conventions avec d'autres prestataires et en particulier priv�s
   (Nzohabonimana et al., 2004b).

� Au Tchad, o� les d�fis de couverture g�ographique demeurent con-
   sid�rables, l'offre publique limite l'effectivit� de l'assurance et on
   envisage �galement d'inclure les prestataires priv�s dans l'offre de
   soins assur�e (Kada�, Nouhou, Ndoundo 2004).

� Au Rwanda, on a essay� d'introduire des m�canismes de r�mun�ra-
   tion des prestataires bas�s sur la performance ou sur de nouvelles
   bases (capitation) pour inciter � l'am�lioration de la qualit� et de l'ef-
   ficience de l'offre de soins (Gakwaya et al., 2004).

508 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



L'assureur cherche � s'�tablir

Quand l'assureur cherche � s'�tablir, la disponibilit� et la qualit� de l'offre
de soins d�terminent en grande part la propension � s'assurer. Les �tudes
sur la disposition � payer les primes d'assurances qui ont inclus comme
facteur de contr�le l'offre de soins, montrent qu'elle constitue un facteur
d�terminant du montant d'argent que les populations sont pr�tes � payer
pour contracter une assurance sant�. Il en est bien entendu de m�me
pour d'autres variables, comme les revenus et d'autres caract�ristiques
des individus et des communaut�s. A Nouna, au Burkina Faso, plus la
distance qui s�pare le domicile du centre de sant� est grande, moindre est
la disposition � payer pour une prime d'assurance (Dong et al., 2004)9.
   Les �tudes qui ont port� sur les pr�f�rences des utilisateurs potentiels
des micro assurances de sant� ou qui ont analys� les difficult�s lors de
leur mise en oeuvre mettent toutes en relief l'importance de l'offre de
soins. Toujours � Nouna, De Allegri, Sanon et Sauerborn (2006) mon-
trent que les populations attendent de la mise en place d'une mutuelle de
sant� qu'elle conduise � des changements d'attitudes du personnel
de sant� (plus aimable, plus accueillant) dont elles reconnaissent par
ailleurs les comp�tences techniques. Les populations de cette zone sont
pr�tes � accepter que l'on �tablisse un syst�me de triage au premier
niveau (� gatekeeper �) mais elles refusent l'id�e de se voir imposer un
centre de sant� d�termin� comme unique porte d'entr�e, elles veulent
pouvoir recourir au centre de sant� de leur choix (De Allegri et al., 2005).
   Explorant diff�rentes dimensions de la confiance entre les assur�s
et le dispositif de protection qui leur est propos� au Rwanda, Schnei-
der (2005) rel�ve que le manque de confiance vis-�-vis des prestataires
est la principale raison de la d�cision de ne pas adh�rer � une micro
assurance de sant�.
   L'analyse de l'�chec de l'implantation d'une micro assurance de
sant� en Guin�e a montr� que les populations saisissaient bien l'int�r�t
pour elles d'adh�rer � cette assurance, qu'elles �taient pr�tes � payer les
primes demand�es, mais que la principale raison pour ne pas adh�rer
�tait la faible qualit� des soins disponibles (Criel, Waelkens 2003).



Assureur et prestataire sont �troitement li�s

Ces situations sont plut�t rares en ASS francophone mais elles ont �t�
�voqu�es � quelques reprises comme �tant une alternative � la pi�tre

             Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 509



qualit� de l'offre de soins disponible. Cette alternative n'est envisa-
geable que pour les services de type ambulatoire qui ne requi�rent pas
des investissements importants. Dans le cas des soins hospitaliers, il
est peu probable de voir cette option se d�velopper car les co�ts sont
trop importants pour les organismes assureurs (De Roodenbeke 2006)
  Il faut �galement noter que quelques pays disposent d'une m�decine
d'entreprise qui sans constituer une entit� de type � assureur/offreur
de soins �, s'y apparente. G�n�ralement il s'agit de situations o� des
dispositions l�gales exigent des entreprises qu'elles couvrent certaines
d�penses de sant� de leurs employ�s et dans certains cas, des entre-
prises pr�f�rent offrir directement ces services, plut�t que de les con-
tracter aupr�s de prestataires de soins ext�rieurs10. Ainsi en C�te
d'Ivoire o� cette disposition existe mais o� elle est in�galement
appliqu�e, certaines grandes entreprises disposent de structures de
soins accessibles aux employ�s (Ouegnin 2004).
  Outre la m�decine d'entreprise, on retrouve dans certains pays
d'ASS, des r�seaux, souvent modestes, d'�tablissements de soins qui
appartiennent � des syst�mes d'assurances obligatoires ou volontaires
qui couvrent une fraction limit�e de la population, g�n�ralement les
salari�s du secteur formel. Ainsi au Mali, l'INPS (Institut National de
Pr�voyance Sociale) dispose d'une quinzaine d'�tablissements (centres
de sant�, centres de protection maternelle et infantile) (Letourmy,
Ouattara 2006).
  On a rapport� plusieurs situations dans lesquelles assurance et
prestation de soins �taient li�s ou souhaitaient le devenir. En Guin�e
foresti�re o� l'on retrouve une association dynamique des mutuelles et
o� l'offre de soins limite son d�veloppement, � le r�seau mutualiste
est tent� par la recherche d'une offre priv�e alternative, voire par la
mise en place de ses propres formations de soins ou d'une pharmacie
dont l'approvisionnement serait autonome � (Letourmy et al., 2005).
  Au Mali, dans la R�gion de Mopti, la mutuelle K�n�ya So apr�s
plusieurs ann�es de fonctionnement, a d�cid� de cr�er son propre cen-
tre de sant� pour pallier � la mauvaise qualit� des soins (Letourmy,
Pavy-Letourmy 2003). Il faut mentionner que dans ce pays, le mouve-
ment mutualiste est n� � partir d'une mutuelle des enseignants qui a
cr�� son propre centre de sant� qui b�n�ficie d'une r�putation envi-
able et qui est ouvert au public.
  Au S�n�gal, dans les mutuelles communautaires qui offrent directe-
ment des services (donc permettent d'�viter les diff�rents obstacles li�s

510 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



au recours � un prestataire avec lequel la mutuelle a un contrat) on a not�
des niveaux de satisfaction et de confiance plus grands parmi les
adh�rents, ce qui se traduit par une meilleure disposition � payer. Ces
diff�rents points (confiance, satisfaction, disposition � payer) t�moignent
de processus d'interactions positifs entre les mutuelles qui offrent
directement des services et leurs adh�rents. Ce qui constitue des facteurs
potentiels de succ�s, et surtout de p�rennit� (Fournier et al., 2005).



D�FIS ET PERSPECTIVES

Cette section abordera la question des effets de l'assurance sant� sur
l'offre de soins, en particulier des conditions qui lui permettent ou lui
permettraient d'avoir un effet positif, et sur le point de vue des
prestataires vis-�-vis de l'assurance.
   Globalement, il ne semble pas que le d�veloppement de l'assurance
maladie en ASS ait contribu� � l'am�lioration de la qualit� des soins
(Waelkens, Criel 2004 ; Ekman 2004) mais ce type d'�vidence est diffi-
cile � �tablir et l'on en est r�duit � analyser des exp�riences ponctuelles
en sp�culant sur leur potentiel de g�n�ralisation. En principe, les sys-
t�mes d'assurance maladie sont en mesure d'am�liorer la qualit� des
soins via diff�rents leviers dont l'apport financier et la contractualisa-
tion mais dans la pratique ils s'av�rent faibles ou inop�rants (Criel et
al., 2006).
   Ba, Waelkens et Criel (2005) rapportent qu'en Guin�e o� un r�seau
de mutuelles s'est impliqu� directement dans l'offre de soins pour
contribuer � son am�lioration, ce r�seau a constitu� un stock de
m�dicaments aupr�s des formations sanitaires, car les ruptures de
stock constituaient un profond motif d'insatisfaction des mutualistes.
   Au B�nin, dans le cadre de la contractualisation, une mutuelle a
r�ussi pendant un temps limit� � faire adopter par un centre de sant�,
une tarification simplifi�e � l'�pisode qui a am�lior� la continuit� des
soins, et qui a satisfait les mutualistes (Letourmy 2006).
   Au Rwanda, des mutuelles qui ont atteint un nombre d'adh�rents
suffisant ont install� des agents au sein des formations sanitaires ; ces
derniers facilitent les d�marches des mutualistes, mais aussi permet-
tent d'�viter que des abus ou des fraudes soient commis (Musango,
Criel, Dujardin 2005).

              Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 511



   Outre ces interventions ponctuelles, le Rwanda pr�sente un cas
int�ressant o� l'intervention sur la qualit� est plus structur�e et de plus
grande envergure. Sa perspective est �galement inusit�e ; au lieu de
voir l'am�lioration de la qualit� des soins comme une cons�quence de
la contractualisation elle est consid�r�e comme � un moyen d'am�lio-
ration du syst�me de mutualisation d�nomm� Initiative pour la perfor-
mance �. Cette initiative avait pour objectifs d'am�liorer la productivit�
des services de sant� et elle comprenait une dimension de mesure de la
qualit� des services. Apr�s deux ann�es d'exp�rience cette initiative
s'est av�r�e avoir des effets positifs sur l'utilisation des services de sant�
par les mutualistes et �galement sur le taux d'adh�sion � la mutuelle des
nouveaux membres quand l'obstacle financier �tait lev� via l'octroi
d'un cr�dit bancaire (Musango et al., 2005).
   La perspective des prestataires sur leur r�le dans le d�veloppement
des mutuelles est peu ou mal document�e. Analysant les causes de
l'�chec de l'exp�rience mutualiste Maliando en Guin�e, en mettant
l'accent sur la perspective des prestataires, Criel et al. (2005) rappor-
tent que les professionnels de sant� comprennent bien les objectifs et
le fonctionnement de la mutuelle, mais que la situation de dialogue
avec les populations dans laquelle ils se retrouvent est � la fois inusit�e
et d�rangeante pour eux. Poussant un peu plus loin l'analyse, il s'av�re
que les professionnels acceptent l'augmentation de la charge de travail
induite par les relations particuli�res avec la mutuelle, mais les modifi-
cations du syst�me des primes et la diminution des possibilit�s de sur-
tarification semblent constituer les motifs d'insatisfaction plus
profonds qui les am�nent � une attitude peu collaboratrice avec les
promoteurs de la mutuelle.
   On a �galement rapport� que les mutualistes �taient plus exigeants
et que cela irritait les professionnels sans toutefois documenter le ca-
ract�re bien fond� de ces exigences (Criel et al. 2005 ; Schneider
2005 ; Hygea 2004).
   Au S�n�gal, quand les prestataires en liens avec des mutuelles com-
munautaires de sant� ont �t� invit�s � formuler des propositions rela-
tives au d�veloppement de ces mutuelles, ils ont d'abord recommand�
qu'elles am�liorent leurs bases financi�re et gestionnaire, et ensuite ils
ont mentionn� qu'ils devraient �tre impliqu�s plus fortement dans le
fonctionnement des mutuelles du fait de leur expertise m�dicale
(Hygea 2004).

512 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Au-del� des strat�gies ponctuelles ou plus larges de la part des
assurances pour am�liorer l'offre de soins et quelles que soient les atti-
tudes des prestataires, la question de fond tient dans les rapports
de forces entre prestataires et assurances11. Actuellement le rapport de
forces est g�n�ralement d�favorable aux assurances, car elles sont sou-
vent de petite taille et leurs capacit�s techniques sont limit�es. Dans
certains pays ou r�gions, on assiste � des regroupements des micro
assurances qui ont le potentiel de faire �voluer ce rapport de forces en
faveur des assureurs. Au S�n�gal et en Guin�e, des regroupements
r�gionaux de mutuelles se constituent soit pour favoriser l'�tablisse-
ment de conventions hospitali�res harmonis�es et obtenir des tarifs
pr�f�rentiels (R�gion de Thi�s au S�n�gal), soit pour mettre en com-
mun des ressources et d�velopper une meilleure capacit� d'interagir
avec les prestataires (R�gion de la Guin�e Foresti�re) (Ba et al., 2005).
C'est aussi une option que proposent Letourmy et Pavy-Letourmy
(2003) quand ils analysent la contribution potentielle de l'extension
des mutuelles sur le syst�me de sant�.
   Ces regroupements devraient avoir �galement pour effet d'am�liorer
les capacit�s techniques (administration, gestion financi�re, gestion du
risque) qui font cruellement d�faut au micro assurances et qui entravent
le d�veloppement du mouvement mutualiste.



CONCLUSION

En ASS, le d�veloppement de l'assurance maladie et l'offre de soins
sont indissociables. Leur interd�pendance est probablement plus forte
qu'ailleurs, car la diversit� de l'offre n'est pas suffisamment grande
pour que les effets de concurrence puissent jouer pleinement, et le
d�veloppement de l'assurance se fait en majeure partie via la micro
assurance qui ne dispose pas du poids et de l'expertise permettant de
jouer un r�le d�terminant dans l'am�lioration de l'offre de soins.
   Ce constat �tant �tabli, quelles sont les strat�gies les plus appro-
pri�es pour am�liorer la situation ? Il para�t in�vitable de devoir agir
soit simultan�ment sur les deux, soit de renforcer le poids des assu-
rances. Les initiatives qui, comme au Rwanda, associent les assureurs et
les prestataires sont de nature � g�n�rer simultan�ment des effets b�n�-
fiques pour le d�veloppement de l'assurance et sur l'offre de soins.

              Offre de soins et assurance : Les enjeux en Afrique francophone � 513



   Pour pallier au d�savantage du rapport des forces entre les
prestataires et les assureurs, au d�triment de ces derniers, deux voies
non exclusives se pr�sentent : renforcer le poids, les capacit�s tech-
niques et de n�gociation des assureurs par la cr�ation de r�seaux qui
constitueront des entit�s plus aptes � n�gocier avec les prestataires et
capables d'influer indirectement sur l'offre de services ; ou cr�er une
offre concurrente qui se limitera forc�ment aux soins peu on�reux et aux
m�dicaments. La cr�ation de pharmacies mutualistes, de cabinets de
soins d�pendant directement des assureurs est un mouvement qui se
dessine et qui pourrait avoir � moyen terme un effet b�n�fique sur l'of-
fre de soins publique et priv�e quand les assureurs deviendront un
acteur de poids dans le march� de la sant� en ASS.



NOTES

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www.ces-asso.org/docs/Colloque_WBI-IMA-CES-MAE-OMS_avril_
2004.pdf .


  2. Audibert et De Roodenbeke (2005) rapportent qu'au Mali, en
2002, 80 % des ressources du plan de d�veloppement sanitaire a �t�
consacr� � l'extension de la couverture sanitaire.


  3. Au Burkina Faso (anciennement Haute Volta), l'occupation de
l'espace � l'�poque coloniale s'est faite selon deux logiques diff�rentes
et parfois oppos�es : celle du colonisateur et celle de l'�glise catholique
et ces empreintes ont fortement marqu� l'organisation spatiale du sys-
t�me de soins (Meunier 1999).


  4. Pour cet auteur, en Ouganda, la diminution de ressources dans le
secteur public, qu'il qualifie de � contraction �, entra�ne des strat�gies de
survie du personnel de sant� parmi lesquelles des pratiques priv�es avec
des ressources publiques (essentiellement des m�dicaments). Il d�nomme
� puvate � (contraction de � public � et � private �) cet espace dans
lequel les professionnels combinent leurs diff�rentes pratiques.

514 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



  5. Ou � quasi publique � comme au Mali, o� le mouvement des cen-
tres de sant� communautaires est fortement encadr� par les pouvoirs
publics.

  6. Criel et Waelkens (2003), rapportent qu'apr�s la mise en place
d'une micro assurance de sant� en Guin�e, les adh�rents utilisent plus
les services publics de sant� qui sont les seuls disponibles, mais qu'ils
n'en sont pas satisfaits.

  7. Fournier et al. (2002) rapportent une situation au Mali o� dans
une capitale r�gionale, une sage femme install�e dans le secteur priv�
lucratif dispose d'un �chographe qu'elle utilise lors des consultations
pr� natales. Sa notori�t� est excellente, elle d�passe largement les li-
mites de la ville et sa client�le est consid�rable.

  8. N'Diaye (2006) rapporte que dans l'inventaire de 622 dispositifs
d'assurance maladie de 11 pays d'Afrique francophone, seulement 64 %
d'entre eux ont une convention �crite avec un prestataire, 18 % ont une
� convention orale � et 16 % n'en n'ont pas.

  9. En Inde, Mathiyazhagan (1998) a �tabli le m�me constat.

10. Il faut rappeler qu'en R�publique D�mocratique du Congo (ex-
Za�re), la m�decine d'entreprise jouait un r�le important dans l'offre de
soins. En milieu rural, les h�pitaux des entreprises foresti�res et
mini�res �taient parfois les seuls disponibles et dans certains cas ils cons-
tituaient la pi�ce ma�tresse du syst�me de soins du district destin� �
l'ensemble de la population (d�nomm� Zone de sant�).

11. Ce terme ne doit pas �tre exclusivement pris dans sons sens pro-
pre, les manifestations de bonne volont� et de collaboration entre
prestataires et assureurs existent et doivent �tre encourag�es. Comme
par exemple le fait que des repr�sentants des mutuelles si�gent sur les
Conseils d'administration des h�pitaux au Mali (Ba et al., 2005).



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    British Medical Journal 323 : 463�4.


                                                                       CHAPITRE 18



   Assurance maladie : Facteurs de lutte
         contre l'in�galit� et la vuln�rabilit�
                          et relation positive vis-�-vis
                                                     de la croissance

                                                                  Pascal Brouillet




R�sum� : Les politiques d'Aide Publique au D�veloppement (APD) ont connu
une forte �volution au cours des derni�res ann�es. Avec les Objectifs du Mill�naire
(ODM) retenus par la Communaut� internationale en Septembre 2000, l'ori-
entation de l'aide publique au d�veloppement, outre la poursuite des mesures en
faveur de la croissance, est d�sormais officiellement engag�e dans l'atteinte d'ob-
jectifs sociaux explicitement d�finis. Plus r�cemment, la lutte contre les in�galit�s
a �t� ajout�e � l'agenda des agences d'aide. Les interventions de l'APD dans le
secteur social disposent ainsi d'une l�gimit� �largie. L'impact des mesures sociales
sur la croissance fait n�anmoins toujours l'objet de d�bat. Ce chapitre vise, � tra-
vers l'examen de la litt�rature, � tracer des points de rep�res autour des relations
�conomiques entre les grands th�mes du d�veloppement (croissance, pauvret� et
in�galit�) et les interventions en sant�, en particulier avec le risque maladie. Il en
r�sulte que les interventions dans le secteur de la sant� offrent d�sormais des
opportunit�s favorables pour la croissance. L'assurance maladie � vocation sociale
a pour r�sultat, d'une part d'am�liorer l'acc�s aux soins et donc de contribuer aux
ODM, et d'autre part de r�duire la vuln�rabilit� de la maladie et ses con-
s�quences �conomiques sur les m�nages les plus pauvres et ainsi de lutter contre les
in�galit�s. Peu d�velopp�e dans les Documents Strat�giques de R�duction de la
Pauvret� (DSRP), cette strat�gie contrairement aux actions habituelles en faveur


                                                                                     521

522 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   de l'offre, est insuffisamment prise en compte par les agences d'aide. Destin�e �
   renforcer la demande des usagers et � renforcer la pression pour la fourniture
   d'une offre de qualit�, toute intervention en faveur de l'assurance maladie pose
   ainsi la question de la gouvernance du syst�me de sant�.



INTRODUCTION

Le r�le des politiques sociales dans les politiques de d�veloppement est
devenu une priorit� en raison de l'accent mis par la communaut� inter-
nationale sur la lutte contre la pauvret� � travers les Objectifs du Mill�-
naire (ODM). La Banque mondiale (BM) aborde maintenant de front la
lutte contre les in�galit�s et s'interroge sur les rapports entre �quit� et
d�veloppement, et sur leur impact sur la croissance (Bourguignon 2004).
   La sant�, �l�ment important des politiques sociales, occupe une place
de choix dans les indicateurs des ODM. Comme l'�ducation ou l'envi-
ronnement avec lesquels elle a des liens av�r�s, la sant� entretient des
relations complexes avec les facteurs du d�veloppement (croissance,
lutte contre la pauvret� et les in�galit�s et r�duction de la vuln�rabilit�).
Certaines de ses activit�s ont de fortes externalit�s, et sont maintenant
consid�r�es comme des Biens Publics Mondiaux (BPM). La maladie est
un risque qui accro�t la vuln�rabilit� �conomique des plus pauvres, et le
probl�me de la mitigation de ce risque se pose. L'assurance maladie, qui
r�pond � un des trois objectifs fondamentaux1 de tout syst�me de sant�
selon l'Organisation Mondiale de la Sant� (OMS), appara�t comme une
des strat�gies possibles de r�duction du risque.
   L'argument �conomique n'est pas la seule justification de l'int�r�t
port� aux politiques sociales. Le th�me des droits donne aussi une
l�gitimit� � l'extension de la protection sociale. A c�t� des organisa-
tions traditionnelles comme le Bureau International du Travail (BIT),
diff�rents mouvements issus de la soci�t� civile adh�rent � ce point de
vue2. Pour eux, le d�veloppement ne doit pas �tre limit� � sa seule
dimension �conomique ; la question des droits sociaux et culturels est
tout aussi l�gitime. Certaines interventions de politique sociale,
comme l'assurance maladie, acqui�rent, dans cette perspective, une
triple l�gitimit�, �conomique, sociale et politique.
   Ce chapitre vise, � travers un survol de la litt�rature, � tracer des
points de rep�res autour des relations �conomiques entre les grands
� marqueurs � du d�veloppement (croissance, pauvret� et in�galit�) et

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 523



les interventions en sant�, en particulier en rapport avec la couverture
du risque maladie par l'assurance.
   Nous examinerons d'abord comment les th�ories du d�veloppe-
ment traitent des relations entre sant�, lutte contre la pauvret�, in�-
galit�s et croissance. L'effet de l'assurance maladie sur l'�tat de sant�,
et �ventuellement sur la croissance, sera explor�, en mettant en bal-
ance ses effets positifs par sa contribution � la r�duction de la vuln�ra-
bilit�, et son impact n�gatif par l'augmentation des charges sociales.
   Nous passerons bri�vement en revue les politiques d'aide publique
au d�veloppement (APD), qui ont vu cette derni�re reprendre3 sa
croissance apr�s la diminution des ann�es 90 li�e � la fin de la guerre
froide et aux critiques formul�es � son encontre. Nous analyserons
comment les agences d'aide abordent, � travers les Documents
Strat�giques de R�duction de la Pauvret� (DSRP), la lutte contre la
pauvret� et les in�galit�s en sant�, ainsi que la r�duction de la vuln�ra-
bilit� via l'assurance maladie � vocation sociale. Enfin, nous pro-
poserons un jugement d'ensemble sur les strat�gies d'intervention aux
agences d'aide et sur les perspectives d'�volution � imaginer.



D�TERMINANTS SOCIAUX DU D�VELOPPEMENT ET CROISSANCE :
LA SANT� ET L'ASSURANCE MALADIE EN EXAMEN

Les politiques sociales4 dans les pays pauvres, bien que soutenues par
la soci�t� civile et par des institutions comme le BIT, ont �t� n�glig�es
durant la p�riode d'ajustement structurel, en raison des r�serves
exprim�es par les institutions financi�res internationales. Ces
derni�res consid�raient qu'un syst�me �largi de protection sociale
comportait des effets n�gatifs5 pour l'efficacit� �conomique et condui-
sait � une impasse pour le d�veloppement.
   L'analyse des th�ories �conomiques des d�faillances des march�s et la
crise asiatique ont conduit � remettre en cause la conception de politiques
sociales limit�es � des � filets de s�curit� � apr�s un ajustement structurel
ou une crise importante. Des �tudes ont montr�, que les �tats incapables
de construire des institutions aptes � g�rer les conflits sociaux, sont plus
vuln�rables aux chocs ext�rieurs, et ont une plus faible croissance (Rodrik
1997, 1998). La coh�sion sociale est per�ue comme un facteur essentiel
au d�veloppement �conomique � moyen terme tandis que de trop fortes
in�galit�s sociales sont per�ues comme un facteur d�favorable.

524 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Avec le d�clin du consensus de Washington, les politiques sociales sont
redevenues un des instruments des politiques d'aide. La lutte contre les
in�galit�s s'ajoute6 d�sormais � la lutte contre la pauvret�, une approche
qu'on retrouve dans le rapport 2006 de la Banque mondiale (BM) : il n'est
plus n�cessaire de faire le choix entre efficacit� �conomique et �quit�.
Favoriser l'�quit� est efficace d'un point de vue �conomique.



LUTTE CONTRE LES IN�GALIT�S ET R�DUCTION DE LA
VULN�RABILIT� : FACTEURS DE CROISSANCE ?


Croissance et pauvret� : le r�le de la redistribution

A l'�chelle macro �conomique, il n'y a pas de relation claire entre taux de
croissance et pauvret� ou entre croissance et in�galit�s (Cogneau 2002).
Toutefois, les analyses �conom�triques montrent que la croissance du
PIB/habitant est un facteur important de r�duction de la pauvret� (Cling,
Roubaud, Mazafindrakoto; 2002) : en moyenne 1 % de PIB/habitant de
plus conduit � une augmentation de 1 % de la consommation7 du quintile
le plus pauvre. Cette relation n'est cependant pas universelle.
   Les politiques de d�veloppement ont longtemps consid�r� que la
pauvret� �tait un probl�me temporaire qui devrait dispara�tre avec la
croissance. Il n'�tait donc pas n�cessaire de mettre en place des poli-
tiques sociales, l'accumulation du capital serait suffisante (Marniesse,
Peccoud 2004 ). Les �tudes empiriques ont permis de constater que la
r�alit� est diff�rente : la croissance ne profite pas toujours aux pauvres.
Seul un niveau de croissance satisfaisant (CNUCED 2002) soutenu
par une politique de redistribution et la cr�ation d'emplois peut don-
ner des marges de manoeuvre pour la r�duction de la pauvret�.
   Les r�flexions th�oriques sur la probl�matique des opportunit�s au
sens de Sen (1999) ont contribu� � �largir la probl�matique du
d�veloppement. Les nombreuses discussions sur les effets (positifs et
n�gatifs) de la mondialisation sur les individus et les �tats, le constat
d'une croissance �conomique sans r�duction des in�galit�s (Cling, De
Vreyer, Razafindrakoto, Roubaud 2003), les remises en cause d'un
manque de prise en compte de l'impact des politiques de redistribu-
tion sur la croissance, ont conduit � promouvoir la distribution
d'actifs8 dans les pays pauvres et � mettre plus souvent la question de
la redistribution sur l'agenda des r�formes.

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 525



R�duction de la vuln�rabilit� : facteur de croissance ?

Contrairement aux hypoth�ses de la th�orie n�o-classique, l'environ-
nement �conomique se caract�rise par des imperfections des march�s,
notamment la difficult� de l'acc�s au cr�dit, comme l'indiquent les
�tudes th�oriques (Dercon 2004)9 mettant l'accent sur la vuln�rabilit�.
Ces �tudes montrent que les pauvres, en plus de certaines in�galit�s de
d�part ou d'absences d'opportunit�s de d�veloppement, sont soumis aux
al�as et � des chocs divers (naturels ou sociaux). L'absence de m�ca-
nismes d'assurance ou de protection contre les risques, adapt�s aux pau-
vres, ajoute ainsi un niveau suppl�mentaire de contraintes � leur sortie
de la pauvret�. La r�partition in�gale des actifs (�conomiques ou en ca-
pital humain), des opportunit�s plus faibles et les d�faillances des
march�s enferment ainsi les pauvres dans des � trappes de pauvret� �.



D�PENSES SOCIALES, CROISSANCE ET IN�GALIT�S : UN M�ME
OBJECTIF, LE D�VELOPPEMENT ?


Protection sociale et croissance �conomique

Une revue de la litt�rature r�alis�e par l'OCDE (Arjona, Ladaique,
Pearson 2002) aborde les relations entre �quit� et croissance � travers
la protection sociale dont un des grands objectifs est de r�duire les in�-
galit�s de revenus. Les auteurs distinguent l'effet li� � la distribution de
revenus sur la croissance ind�pendamment des interventions de la pro-
tection sociale, de l'effet li� aux politiques sociales elles-m�mes.
   Selon la th�orie classique (Mirlees 1971) si les r�gimes de protec-
tion sociale d�couragent les individus de travailler, l'offre de travail
diminue, ce qui r�duit le niveau de protection sociale et, dans certains
cas, de l'investissement et, de ce fait, de la croissance. Quand le sys-
t�me de protection sociale d�courage l'�pargne, � moins que l'�pargne
publique n'augmente d'un montant �quivalent, le capital disponible
pour r�investir diminue. De plus, les imp�ts � pr�lever pour le
financement de la protection sociale peuvent rendre l'innovation
moins rentable.
   A l'inverse, la s�curit� sociale peut contribuer � l'am�lioration du
bien-�tre social dans les �conomies o� il n'existe pas de march�s de
rente (Hubbard 1987) et o� les individus ont des difficult�s �

526 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



emprunter (Imrohoglu 1995). Dans ce cas, la pr�sence d'un syst�me
de s�curit� favorise le bien �tre g�n�ral dans la mesure o� il procure �
la population une assurance contre les risques que le secteur priv� a du
mal � mutualiser et � g�rer � maladie, ch�mage, etc. En outre, cette
assurance permet aux individus de prendre plus de risques dans leur
capacit� d'investissement. Si le principe qu'il existe une relation posi-
tive entre le degr� de risque d'un projet et son taux de rendement
attendu est valid�, l'assurance offerte par la protection sociale peut
favoriser la croissance (Ahamad, Dreze, Hills, Sen 1991).
   D'autres consid�rations peuvent aussi illustrer l'impact positif de la
protection sociale sur la croissance. Elle garantit une meilleure coh�-
sion sociale, l'insertion de populations marginales dans l'�conomie
marchande, la mise � l'abri de la pauvret� de jeunes g�n�rations per-
mettant le d�veloppement de leurs capacit�s � l'�ge adulte. La protec-
tion sociale peut �tre consid�r�e comme un investissement public
(Bassanini, Scarpeta, Hemmings 2001) favorable � la croissance si elle
contribue � accro�tre l'offre de travail futur.
   Les estimations empiriques de l'OCDE montrent que la protection
sociale a une incidence mod�r�e10 sur le PIB � long terme. L'interpr�-
tation de ce r�sultat est que l'effet sur la croissance ne r�sulte pas de la
protection sociale en elle-m�me, mais de la fiscalit�. A mesure que les
d�penses sociales augmentent, la fiscalit� s'alourdit et c'est la fiscalit�
qui ralentit (Bassanini, Scarpeta, Hemmings 2001) la croissance et
non les d�penses sociales. Aucun �l�ment ne permet ainsi de conclure
si c'est le niveau des d�penses sociales ou l'ampleur de la redistribu-
tion qui a le plus d'effets sur la croissance (Arjona, Ladaique, Pearson
2001).
   En conclusion, il appara�t qu'un accroissement des d�penses de
protection sociale r�duit la production, m�me si cet effet n'est pas tr�s
marqu�. N�anmoins, pour interpr�ter d�finitivement ce r�sultat, il
faudrait analyser les effets �ventuellement divergents sur la croissance
des diff�rents types de d�penses sociales. Par ailleurs, il faudrait pou-
voir estimer les autres effets positifs de la protection sociale comme la
coh�sion sociale, etc.
   Si on ne peut apporter une r�ponse d�finitive � la question des rela-
tions entre croissance �conomique et protection sociale, l'examen de
deux des composantes essentielles de la protection sociale, la sant� et
l'assurance maladie, permet-il d'aller plus loin ?

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 527



La sant�, r�sultat ou d�terminant du d�veloppement
et de la croissance ?

L'acc�s aux services de sant� a toujours �t� une composante tr�s
importante des politiques sociales. La croissance continue des
d�penses de sant�, tant dans les pays riches que dans les pays � faible
revenu, montre qu'il y a partout une pr�f�rence pour leur consomma-
tion. L'int�r�t manifest� dans les pays plus pauvres pour le court
terme, renforce l'importance donn�e aux d�penses de sant� par rap-
port � d'autres d�penses sociales (retraite, accident du travail, etc.). Il
est donc pertinent de s'int�resser � ce secteur pour examiner les rela-
tions entre protection sociale et croissance.
   La sant� a longtemps �t� consid�r�e comme un co�t pour
l'�conomie et un poids sur la croissance. La sant� est de plus en plus
con�ue au niveau international11 non seulement comme une fin en
elle-m�me, dans la logique inscrite dans les grands principes de l'Or-
ganisation Mondiale de la Sant� (OMS) ou dans la d�claration uni-
verselle des droits de l'homme, mais aussi comme un facteur du
d�veloppement �conomique et social. L'impact positif de la sant� sur
l'�conomie est d�sormais reconnu (Sachs 2001), la sant� �tant un
investissement en capital humain. Certaines prestations de sant�
pr�sentent de fortes externalit�s (vaccination, etc.) et sont consid�r�es
par la th�orie �conomique comme des biens publics (absence de
rivalit� ou d'exclusion : cas d'une agence de surveillance �pid�mi-
ologique) La garantie du financement ad�quate de ces biens rel�ve de
l'�tat. Certains de ces biens, en raison de leur impact au niveau inter-
national ou � global �, sont en outre consid�r�s12 comme des Biens
Publics Mondiaux (BPM) justifiant un financement international.
Dans la sant�, seul le contr�le des pand�mies fait partie de la liste
restreinte des BPM13.



Assurance maladie, am�lioration de la sant�, lutte contre la
pauvret�14 et contre les in�galit�s et croissance

Il est notoirement difficile de mesurer l'impact direct de l'assurance sur les
in�galit�s sociales en mati�re de sant�15. Il faut passer par une d�marche
indirecte qui examine les diff�rents effets de l'assurance maladie sur la con-
sommation des soins et l'effet protecteur de l'assurance maladie.

528 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



   Deux grands m�canismes sont disponibles pour permettre �
l'assurance maladie d'avoir un impact sur la sant�. Premi�rement,
l'assurance, en r�duisant le co�t des soins pour les m�nages, facilite,
en principe, l'acc�s � des soins de qualit�. Deuxi�mement, en �vitant la
baisse des revenus li�s � un �pisode de maladie, elle permet de pro-
t�ger d'autres d�penses suppos�es avoir un effet positif sur la sant�.
Une condition g�n�rale est requise pour conforter ces hypoth�ses : le
co�t de la prime d'assurance ne doit conduire pas � une baisse des
revenus. Un syst�me de financement �quitable des primes doit ainsi
�tre propos�, bas� sur une subvention, via le paiement des primes, des
riches vers les pauvres.
   Une �tude r�alis�e aux �tats-Unis dans les ann�es 1990 par la Rand
Corporation (Newhouse 1993) montre que l'ouverture des droits �
l'assurance augmente (Currie 2000) le recours aux soins des plus pau-
vres. Pour prouver que ce recours aux soins am�liore l'�tat de sant�, il
convient de s'appuyer sur diff�rentes �tudes qui montrent que l'ac-
croissement de la consommation de soins en raison de l'existence
d'une assurance est li�e � des prestations de sant� dont l'efficacit�
m�dicale a �t� prouv�e, en particulier sur le plan pr�ventif. Certaines
�tudes men�es aux �tats-Unis sur certaines prestations (l'examen de
mammographie, la surveillance de certaines maladies chroniques, les
soins pr�nataux, etc.) r�pondent positivement � cette question.
   D'autres travaux montrent le lien entre la qualit� ou l'absence d'as-
surance avec, d'une part la consommation de soins et, d'autre part,
l'�tat de sant� en g�n�ral, en retenant sans la prouver l'hypoth�se que
les soins ont un impact positif sur la sant�. Ces �tudes moins
rigoureuses que l'�tude de la Rand, donnent des r�sultats assez contra-
dictoires (Kaspar, Giovannini, Hoffman 2000 ; Currie 2000) : il est
ainsi difficile de conclure sur cette relation.
   Dans les travaux pr�c�dents, il est implicitement suppos� que les
soins sont le � cha�non entre l'extension de l'assurance et l'am�lioration
�ventuelle de l'�tat de sant� �. Une approche alternative consiste � sup-
poser que l'extension de l'assurance maladie am�liore l'�tat de sant�
sans pour autant que les assur�s consomment plus de soins. Une autre
s�rie d'�tudes montrent ainsi que l'assurance pourrait avoir un effet
protecteur sur la sant� en �vitant les difficult�s �conomiques auxquelles
sont soumises les populations confront�es � un �pisode de maladie
(Ross, Mirowsky 2000 ; Wyszewianski 1986). Elles montrent que
l'augmentation de maladies chroniques est corr�l�e avec les difficult�s

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 529



de tr�sorerie, et que l'assurance r�duit les difficult�s de paiement des
soins n�cessaires. Les chercheurs en d�duisent que l'assurance peut
avoir un effet sur la sant� en �vitant que les d�penses de soins n�ces-
saires soient une source de difficult�s de tr�sorerie. Ces constatations
rejoignent l'id�e de certains promoteurs de l'assurance maladie dans
beaucoup de pays en Europe, cette derni�re �tant con�ue comme une
garantie contre les pertes de revenus li�es � l'arr�t de travail du p�re de
famille salari�.
   Ces sujets qui int�ressent les pays en d�veloppement ont �t� peu
explor�s dans les pays � faible revenu, � l'exception de l'effet de l'as-
surance maladie sur la consommation de soins (Kelley, Kelley, Sim-
para, Sidib�, Makinen 2002). La question de la vuln�rabilit�, et donc
de la gestion des risques qui est apparue r�cemment dans la probl�ma-
tique du d�veloppement (Holzmann, Jorgensen 2000 ; Dercon 2002),
offre de nouvelles opportunit�s � d'engager une r�flexion sur l'effet
protecteur de l'assurance maladie.
   Un certain nombre de travaux, majoritairement th�oriques
(Dercon, Bold, Calvo 2004) ont �t� effectu�s sur le risque sanitaire
(Dercon, Hoddinott 2004). Une �tude au Cambodge montr� que
60 % des ventes de terre par les paysans sont dues aux cons�quences
financi�res d'un �pisode de maladie (Biddulph 2004). Une seconde
�tude dans ce m�me pays a montr� les cons�quences n�gatives sur le
budget des m�nages d'un �pisode de maladie (Damme, Leempt, Por,
Hardeman, Meesen 2004). Une autre �tude sur la consommation des
m�nages au P�rou montre que les d�penses de sant� augmentent
jusqu'� 8,9 % les d�penses mensuelles d'un m�nage quand un de ses
membres est malade. Une analyse en milieu rural en Inde (Snodgrass
2001), a montr� que la maladie est �galement le risque le plus impor-
tant auquel sont soumis les pauvres.
   Plus g�n�ralement, des �tudes internationales ont montr� l'impact
n�gatif de la maladie sur le bien-�tre (Xu, Kawabata et al. 2003 ; Damme,
Meesen, Por, Kober 2003 ; Kawabata, Xu, Carrin 2002 ; Pradhan,
Prescoot 2002 ; Ranson 2002) et cette relation est d�sormais consid�r�e
comme un probl�me s�rieux (Commission 2000) ; OMS 2000). La d�fi-
nition de strat�gies de gestion des �pisodes catastrophiques de maladies
s'av�re n�cessaire (Sauebron, Adams, Hien 1996). Les auteurs de travaux
sur la relation entre assurance maladie et in�galit�s de sant� montrent
que les �tudes convergent sur l'�vidence d'un lien positif entre niveau
d'assurance et niveau de recours aux soins (Dourgon, Grignon, Jusot

530 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



2001). En revanche, l'impact de la consommation de soins sur l'�tat de
sant� n'est d�montr� que dans des domaines particuliers : la vision et
l'hypertension art�rielle dans l'exp�rience de la Rand, la mortalit� des
enfants par des �tudes sur Medicaid, la pr�vention primaire ou se-
condaire pour les �tudes normatives16. Ces travaux montrent aussi que
les gains observ�s sur l'�tat de sant� sont plus importants pour les bas
revenus. Ainsi, le fait que l'assurance sant� ait un r�le plus protecteur de
la sant� des pauvres que sur celle des riches tant � confirmer l'hypoth�se
de l'efficacit� de l'assurance maladie en tant qu'instrument de lutte con-
tre les in�galit�s sociales de sant�. Une �tude au Vietnam le confirme :
l'assurance maladie r�duit de 200 % les d�penses directes � out-of-
pocket � des m�nages et l'assurance maladie a un impact positif sur les
in�galit�s en r�duisant significativement plus les d�penses des pauvres
(Jowtt, Contoyannis, Vinh 2003).
   Au-del� des questions sur l'efficacit� et l'efficience des d�penses
d'assurance maladie, une question d'une autre nature, mais impor-
tante pour le renforcement des syst�mes de sant�, se pose. L'assurance
maladie peut-elle accro�tre les ressources pour le secteur et ces
ressources peuvent-elles �tre r�parties de fa�on �quitable ?
   La Commission Macro�conomie et Sant� (CMS) de l'OMS a
evalu� que la d�pense n�cessaire, par an, pour couvrir les interven-
tions essentielles17 dans les pays � faibles revenus �tait de 34$18, ce qui
est au-del� de leur capacit� de payer. Une pression fiscale mod�r�e19
et des marges de manoeuvre �conomique limit�es dans ces pays exi-
gent des sources de financement alternatives. Or, une part d�j� trop
�lev�e du financement de la sant� rel�ve des m�nages et de nombreux
travaux ont montr� le caract�re in�galitaire et n�gatif de certaines
modalit�s de recouvrement des co�ts20. L'assurance maladie, dont les
objectifs principaux sont l'am�lioration de l'acc�s aux soins et la limi-
tation de leurs cons�quences financi�res, s'av�re une bonne option. La
mise en place d'institutions de mobilisation de ressources et de rem-
boursement des prestations s'av�re pertinente.
   L'acc�s � de nouvelles ressources pour am�liorer l'acc�s aux soins
n'est pas une garantie d'am�lioration des r�sultats de sant� : encore
faut-il que ces ressources soient utilis�es de fa�on appropri�e et effi-
ciente. Dans beaucoup de cas, une am�lioration de la gouvernance du
secteur s'impose. La mise en place de syst�mes d'assurance maladie
pourrait-elle contribuer simultan�ment � l'am�lioration de la gouver-
nance et � la croissance des ressources du secteur? Si une corr�lation

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 531



entre croissance �conomique et d�penses sociales est d�montr�e21,
peu d'�tudes d�crivent les effets de l'assurance maladie sur l'augmen-
tation des ressources ou l'am�lioration de la gouvernance; c'est ce qui
ressort de l'observation de projets de d�veloppement de micro assu-
rances de sant�.
   L'aide externe appara�t donc n�cessaire, � la fois sous la forme
d'aide financi�re et technique. Toutefois, malgr� la croissance de l'aide
publique au d�veloppement, dans la sant�, le niveau de ressources ren-
dues disponibles reste faible22. De surcro�t, leur efficacit� est limit�e
par les choix de politiques sous-jacents, d'o� la n�cessit� de revoir les
strat�gies des bailleurs.



QUELLE POLITIQUE D'AIDE ?

Faisons d'abord un retour sur l'�volution des politiques d'aide des 15
derni�res ann�es, en mati�re de politique sociale, et sur les critiques
qui leur ont �t� adress�es.
   Au d�but des ann�es 80, un d�bat international sur l'impact des
programmes d'ajustement structurel (PAS) sur la pauvret� et les
groupes vuln�rables, a port� plus particuli�rement sur les secteurs
sociaux. Il est g�n�ralement reconnu que les PAS peuvent en effet,
avoir des effets temporairement r�cessifs ou comporter des effets per-
vers en termes de distribution de richesse au profit de la croissance
suppos�e � terme permettre une redistribution. Dans le secteur de la
sant�, l'impact de l'ajustement sur les d�penses publiques, sur la
qualit� des services de sant� et sur les taux de mortalit� infantile et
infanto-juv�nile a fait l'objet de nombreuses �tudes. Ces discussions se
sont amplifi�es au milieu des ann�es 199023. Une �tude24 montre qu'en
Afrique la majorit� des publications concluent � un effet d�favorable
des PAS sur la sant�, bien que le probl�me m�thodologique demeure
de distinguer empiriquement ce qui rel�ve de la r�cession �conomique
et de l'ajustement, de ce qui r�sulte de l'�volution des autres facteurs
qui influencent la sant�.
   Les critiques des politiques d'aide au d�veloppement proviennent �
la fois des institutions d'aide qui cherchent � �valuer leurs propres
actions pour asseoir leur cr�dibilit� et de la soci�t� civile qui observe la
faiblesse de leurs r�sultats en Afrique. Ce d�bat porte d'abord sur la
pertinence des approches, pour se poser ensuite sur la l�gitimit� m�me

532 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



des institutions bilat�rales25 ou multilat�rales. Une �tude de la Banque
mondiale (1998) a montr� que les politiques d'aide des ann�es 80 et 90
ont eu des r�sultats d�cevants. Si la croissance reste une condition
indispensable � la r�duction de la pauvret�26, elle n'est pas suffisante.
La r�duction de la pauvret� attendue devrait �tre importante en Asie
(Chine et Inde notamment), mais moindre en Afrique Sub-Saharienne
(Cling , De Vreyer, Razafindrakoto , Roubaud 2003).
   Deux r�sultats importants de l'analyse critique des politiques d'aide
sont examin�s ici : l'aide aurait un impact positif27 seulement dans le
contexte de bonnes politiques, et globalement les politiques d'aide
n'ont qu'un impact limit� sur la r�duction de la pauvret� et l'am�liora-
tion des indicateurs sociaux comme la sant� et l'�ducation (Feyzioglu
et al., 1997). Il faudrait donc proposer d'autres politiques afin de
r�duire les foss�s entre les pays et les individus. Deux types d'ap-
proches, contradictoires dans leurs objectifs, ont �t� alors
propos�es : la premi�re privil�gie une approche s�lective de l'aide,
l'autre met l'accent sur la lutte contre la pauvret�.
   A la fin des ann�es 90, le d�bat a �t� aliment� le constat d'une dif-
f�renciation importante de la situation des pays pauvres eu �gard �
leur performance �conomique. De ce constat est n�e la th�se de s�lec-
tivit� de l'aide visant � r�server les ressources l� o� l'environnement
est le meilleur28. Cependant, cette solution apparemment efficace du
point de vue �conomique est politiquement difficile � tenir et les
agences de d�veloppement n'ont pu la mettre que partiellement en
oeuvre. Une critique bas�e sur des consid�rations �thiques (Naudet
1997), est que les citoyens de pays � mauvaise gouvernance seraient
doublement p�nalis�s, � la fois par les mauvaises politiques men�es par
leurs dirigeants et par la suppression des ressources apport�es par
l'aide externe.
   Au-del� de la question de l'efficacit� et l'impact de l'aide, le prob-
l�me qui appara�t central au cours des ann�es 90 est l'endettement des
pays pauvres, surtout en Afrique, qui n'ont pas connu de croissance
�conomique sur une longue p�riode. Vingt ans de pr�ts multilat�raux
non r��chelonnables ont cr�� une situation insupportable : i) il n'ex-
iste aucun �chappatoire financier, sauf � modifier les r�gles du jeu, ii)
les flux nets en faveur des pays pauvres tr�s endett�s (PPTE) devien-
nent n�gatifs, iii) dans certains pays, il devient politiquement et
socialement difficile d'exiger le remboursement des �ch�ances si les
salaires ne sont pas pay�s.

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 533



   En 1996, la Banque mondiale et le Fonds mon�taire international ont
approuv� l'initiative PPTE avec comme objectif la r�duction, sous condi-
tions, de la charge de la dette. En 1999, les r�sultats modestes de la pre-
mi�re version de l'initiative conduisent � proposer l'initiative PPTE ren-
forc�e29 qui vise une acc�l�ration de la r�duction de la dette et un
renforcement du lien entre la r�duction de la dette et la r�duction de la
pauvret�. La mise en oeuvre de politiques de r�duction de la pauvret�
constitue une condition pour l'all�gement de la dette dans le cadre de
l'IPPTE qui est cens�e elle-m�me d�gager les moyens financiers n�ces-
saires � leur application. Depuis 1999, les pays qui souhaitent b�n�ficier de
financement � taux privil�gi�s ou d'un all�gement de leur dette (IPPTE),
doivent formuler une strat�gie de lutte contre la pauvret� pr�sent�e dans
un document unique de politique �conomique, le Document Strat�gique
de R�duction de la Pauvret� (DSRP ou PRSP en anglais).



LES DSRP, LES D�PENSES SOCIALES ET L'ASSURANCE MALADIE

De nombreuses �valuations des DSRP ont �t� r�alis�es (Banque mon-
diale 2004 ; Cling, Roubaud, Mazafindrakoto 2002). Il est difficile de
g�n�raliser, la teneur des DSRP �tant in�gale30 en termes de qualit�
des analyses et de formulation des politiques propos�es. Toutefois, un
constat g�n�ral est fait : la gestion des conflits d'int�r�t des acteurs
nationaux dans le partage in�galitaire des ressources et les questions
li�s � la redistribution ou � la fiscalit� sont peu �voqu�es. L'accent est
mis sur la pauvret� plut�t que sur les in�galit�s.
   L'OMS a fait �tat de la faible implication des minist�res de la sant�
dans l'�laboration des DSRP et dans l'analyse des liens entre sant� et
r�duction de la pauvret�. Une analyse de la Banque mondiale au d�but
du processus31 montre une situation plut�t ambivalente : i) les forces
qui se d�gagent sont l'accent en faveur des r�sultats sanitaires et les
modifications d'allocation des ressources budg�taires, ii) les faiblesses
tiennent principalement � une analyse insuffisante du contexte et des
d�terminants de la pauvret�, li�e souvent � une m�diocre exploitation
des maigres donn�es existantes.
   A contrario et de mani�re plus positive, l'�laboration des DSRP a
impos� aux pays de r�viser ou d'actualiser leurs politiques sanitaires32
en regard des trois principales33 mesures en faveur des plus
pauvres : l'augmentation de la couverture sanitaire34, la r�forme des

534 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



syst�mes de sant�35, l'augmentation du financement36. L'augmentation
des d�penses publiques en faveur des soins de sant� primaires est une
des caract�ristiques des DSRP37. Souvent, ces derniers limitent la gra-
tuit� des traitements m�dicaux � quelques interventions sp�cifiques et
encouragent les soins priv�s, qui doivent �tre financ�s au moyen du
recouvrement des co�ts ou de cotisations. Cette approche est con-
test�e par les pauvres eux-m�mes qui consid�rent que si la pr�vention
est importante, la m�decine curative doit �tre privil�gi�e (Narayan et
al., 2000).
   Une analyse des DRSP r�alis�e dans le cadre des ateliers38 de pr�-
paration des cadres africains � l'�laboration de ces documents, portant
sur 10 pays africains dont 5 francophones (Burkina Faso, Mauritanie,
Niger, Rwanda et Guin�e) a montr� la faiblesse de l'analyse de l'im-
pact sur les pauvres. Pour ce qui concerne plus sp�cifiquement les
aspects financiers, il est observ� :

� Tr�s peu d'analyses sur le r�le protecteur du syst�me de sant� �
   pr�server les individus contre les chocs financiers li�s � la maladie.

� Rares analyses de l'impact n�gatif du paiement excessif des soins ou
   de l'absence de syst�mes de partage des risques.

� Rien sur l'impact n�gatif ou positif de l'organisation du syst�me de
   sant� sur la pauvret�.

� Des recommandations portant sur l'extension de la couverture des
   soins des pauvres et jamais sur le partage des risques ou les strat�gies
   de protection financi�re.


   Ces r�sultats sont conformes � l'analyse que le BIT a r�alis�e dans 5
pays pilotes en 2002 (N�pal, Mali, Cambodge, Tanzanie, Hon-
duras) : les questions d'emploi et de dialogue social ont �t� d�velop-
p�es, la protection sociale marginalis�e et les droits du travail exclus.
Une �valuation39 de la GTZ montre qu'aucun document n'a mis l'ac-
cent sur la relation entre la croissance pro-pauvre et la s�curit� sociale
et sur le traitement insuffisant r�serv� � la question des in�galit�s et la
rel�gation � la seconde place qui est r�serv�e aux politiques d'insertion
et de protection (filets de s�curit� ou syst�mes d'assurance) dans les
DRSP. Ce constat montre l'important d�calage entre la sph�re du
savoir (recherche) et celle de l'action (politiques de sant� ou de lutte
contre la pauvret�), m�me si la protection financi�re et le partage des

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 535



risques en sant�, comme strat�gies � d�velopper, figurent dans les doc-
uments de r�f�rence (� Sourcebooks �) pour l'�laboration des DSRP.



QUELLES PERSPECTIVES POUR LA PROTECTION SOCIALE
EN SANT� ET L'ASSURANCE MALADIE ?

Les analyses �conomiques r�centes qui ont remis en question certains
pr�ceptes de l'�conomie du d�veloppement et la priorit� de la lutte
contre la pauvret� ont conduit � un changement de paradigme. La jus-
tification de l'aide au d�veloppement a trouv� d'autres motivations,
comme la production des BPM, qui n�cessitent d'autres modalit�s de
financement.
   Si on accepte l'hypoth�se voulant que l'aide favorise la croissance
dans les pays bien g�r�s (Severino, Chamoz 2005; Burnside, Dollar
1997, 2000) et r�duit la pauvret� (Ravallo, Chen 1997 ; Dollar, Kraay
2000), et celle voulant que la sant� ait un impact positif sur la sant�,
l'augmentation de l'aide au d�veloppement en g�n�ral, et en faveur de
la sant� en particulier, devrait avoir un impact positif sur la lutte contre
la pauvret�.
   En Afrique, l'�tendue des besoins sanitaires et des in�galit�s, la
croissance d�mographique soutenue, les grandes end�mies et la mau-
vaise gouvernance, temp�rent l'impact potentiel de l'augmentation de
l'aide externe sur la r�duction de la pauvret�. Le constat de l'insuffi-
sance des march�s, dont celui de l'assurance et la persistance des in�-
galit�s en termes d'�tat de sant� obligent � d�velopper une palette
d'interventions plus large que celle qui est actuellement propos�e.
   Les interventions en sant� restent encore trop ax�es sur la fourni-
ture de services, dans une logique d'offre, qui n'a pas toujours r�ussi �
prouver sa pertinence. En termes de priorit�s sectorielles, la place de
l'assurance dans l'aide est encore insuffisante et ne permet pas de
r�soudre les insuffisances du march�. La gestion des risques sociaux
est n�glig�e comme le sont les interventions en faveur de la demande,
alors que le d�veloppement du secteur priv� est attest�, mais reste
encore sous estim�, sous �valu� et non r�gul�.
   Pour certains services et sous certaines conditions, d�finies dans un
cadre contractuel, la production par le priv� de biens publics ou de
services � fortes externalit�s, serait efficiente et permettrait
d'am�liorer la qualit� et de r�pondre � la demande de soins. Une des

536 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



conditions du d�veloppement de services de sant� de qualit� par l'of-
fre priv�e, sous contrainte d'�quit�, reste l'augmentation de la couver-
ture financi�re par des syst�mes de pr�paiement et de partage des
risques.
   Plusieurs ann�es apr�s l'Initiative de Bamako et la mise en place de la
participation des usagers, le d�bat sur la gratuit� des soins a r�cemment
rebondi, notamment avec la d�claration du Secr�tariat G�n�ral des
Nations Unies en 2005 sur les prestations de base en �ducation et en
sant� et les propositions du Royaume-Uni lors de sa pr�sidence du G8.
Dans plusieurs pays, certaines prestations (soins pr�nataux, certaines
maladies de l'enfant, etc.) deviennent ou redeviennent40 � gratuites �.
La lutte contre les maladies infectieuses a par ailleurs conduit � la mise
en place de grands fonds internationaux : Fonds Mondial contre le Sida,
la Tuberculose et le Paludisme, initiative GAVI, etc.
   Si les efforts financiers consacr�s � la lutte contre le VIH-Sida et
aux autres grandes end�mies ont consid�rablement augment�, des cri-
tiques ont �t� formul�es41 sur leur gestion et leur impact. Au-del� des
critiques sur leur gouvernance ou sur leur verticalit�, la question de la
p�rennit� de leurs financements se pose d�s lors qu'ils sont li�s � des
contributions volontaires, dont le renouvellement n'est pas garanti. La
proposition d'asseoir leurs financements sur des ressources plus sta-
bles (IFF, taxes sur les billets d'avion), va dans ce sens.
   D�velopper les syst�mes d'assurance maladie pour permettre
qu'une partie au moins des d�penses de sant� de maladies devenues
chroniques (traitement du Sida, etc.), en plus de la couverture des
biens publics prioritaires, s'av�re donc pertinent.
   Les agences d'aide commencent d'ailleurs � intervenir en mati�re
d'assurance maladie obligatoire, dans les pays � revenu interm�diaire
en Afrique (Norton, Conway, Foster 2001). Ces interventions pour-
raient �tre amplifi�es alors que la demande de renforcement de la pro-
tection contre les maladies est forte. Dans ce domaine, les agences
doivent agir avec pragmatisme et efficacit� : i) privil�gier selon les cas,
le renforcement de l'existant plut�t que de soutenir des r�formes trop
ambitieuses (S�n�gal, C�te d'Ivoire, etc.); ii) favoriser l'articulation de
diff�rents syst�mes (adh�sion volontaire ou obligatoire, rembourse-
ment � au premier franc � ou compl�mentaire, gouvernance soit
publique, soit priv�e, etc.), iii) une gestion professionnelle � ind�pen-
dante � et d�centralis�e des jeux politiques et sociaux; iv) utiliser les
outils modernes de management (contractualisation et �valuation de

        Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 537



l'offre, �valuation des prestations d'un point de vue sanitaire et de leur
co�t efficacit�, etc.) .
   Malgr� des r�sultats encore modestes, le secteur de la micro-
assurance (Jutting 2004) qui est adapt� � une �conomie informelle
pr�dominante et aux caract�ristiques des pauvres, pr�sente des avantages
pour les agences d'aide, notamment en termes d'apprentissage et de
visibilit�, et cela � faible co�t. Toutefois, pour avoir un impact significatif
et �tre p�rennes, ces exp�riences doivent �tre n�cessairement adoss�es
� d'autres instruments, comme les prestations d'assistance cibl�es, ou
des syst�mes d'assurance maladie � sociale �42, concept pr�f�r� ici �
celui d'assurance maladie universelle, inefficace voire dangereux43 car
irr�aliste.
   La prise en compte de la probl�matique �conomique dans le
secteur de la sant� se limite souvent aux insuffisances de financement44
plut�t qu'� la mesure de son efficacit� et de son efficience et � l'explo-
ration des diff�rentes autres modalit�s d'intervention financi�re. Les
cadres de r�f�rence traditionnels de l'aide n'offrent pas les motivations
suffisantes aux d�cideurs pour investir dans la mise en place de sys-
t�mes d'assurance maladie. Les probl�mes de gouvernance sont sou-
vent �voqu�s pour justifier cette attitude45.
   Dans un environnement politique et intellectuel plus favorable,
alors que les besoins sont �normes, mettre l'accent sur les politiques
de lutte contre la pauvret�, les in�galit�s et la vuln�rabilit� est justifi�
d'un point de vue �thique (Naudet 2005). Pour le secteur de la sant�,
on s'attend � ce que les agences d'aide se donnent des objectifs pr�cis46
(contr�le des �pid�mies majeures, lutte contre la pauvret�, d�veloppe-
ment de l'offre de soins, diversification des modalit�s de financement
et de gouvernance des syst�mes de sant�, extension du march� de l'as-
surance priv�e, etc.), et qu'elles mobilisent les moyens requis. Ensuite,
elles devront choisir les interventions correspondantes dans le champ
du financement de la protection sociale en sant� (assistance sociale et
assurance en sant�).
   Les agences sont-elles pr�tes � ajouter un nouvel objectif aux ODM,
celui de la r�duction des in�galit�s (Maxwell 2000) et de la vuln�rabilit�,
conform�ment � l'id�e que le d�veloppement n'est pas seulement un
concept �conomique, mais inclut aussi le respect des droits humains,
dont l'�galit� des chances et l'absence de pauvret� absolue (Cling,
Cogneau, Loup, Naudet, Razafindrakoto, Roubaud 2005), et donc � se
donner un mandat de justice sociale internationale ? Le financement de

538 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



syst�mes d'assurance maladie sociale nationale, ou peut-�tre m�me
mondiale, pour certains biens de sant� au del� des seuls BPM en sant�,
pourrait en �tre une premi�re manifestation dans le secteur de la sant�.



NOTES

  1. Les trois objectifs poursuivis par un syst�me de sant� selon le rap-
port 2000 de l'Organisation Mondiale de la Sant� (OMS) sont :
i) am�liorer la sant� de la population desservie ; ii) favoriser la r�activit�
(r�pondre aux attentes des populations autres que celles concernant les
soins) ; iii) assurer une protection financi�re contre les co�ts de la mau-
vaise sant�.


  2. R�seau Impact, � Lutte contre la pauvret� et droits de l'homme :
une approche de l'extension de la protection sociale en termes de droits
�conomiques, sociaux et culturels �, �tude financ�e par le HCCI, Mi-
nist�re des Affaires Etrang�res, version d�cembre 2005.


  3. Cet accroissement r�cent b�n�ficie en priorit� � l'Afrique subsa-
harienne et aux secteurs sociaux conform�ment aux engagements inter-
nationaux en faveur des ODM (�ducation, sant�, eau, population,
gouvernance), qui repr�sentent environ 57 % de l'APD en 2003 contre
39% en 1973 (Sources : Comit� d'aide au d�veloppement `CAD' de
l'OCDE).


  4. Le concept de politique sociale plut�t que celui de protection
sociale a �t� retenu ici. En effet, ce dernier ne repose pas sur un consen-
sus international. Les institutions internationales comme la Banque
Mondiale et le Bureau International du Travail (BIT/ILO) en ont une
compr�hension diff�rente. Ind�pendamment de cette premi�re difficult�
qui est trait� par ailleurs, il convient de retenir que les politiques de
pr�vention et de gestion des risques qui sont soutenues par ces dif-
f�rentes institutions, divergent �galement. Celles-ci s'expliquent en
partie pour des raisons li�s au cadre � id�ologique � propre � ces institu-
tions, mais aussi par les finalit�s qu'elles poursuivent, entre d'une part, la
primaut� en faveur des strat�gies de croissance (avec depuis peu un
accent sur les strat�gies � pro-growth �), et de l'autre, les interventions
cibl�es en majorit� en faveur de la lutte contre la pauvret� manifest�

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 539



notamment � travers les Objectifs du Mill�naire. La place des droits est
un autre sujet de divergence.


 5. Pour le BIT, aucune �tude n'apporte de r�ponse univoque et
d�finitive sur le th�me de la relation positive ou n�gative entre protec-
tion sociale et croissance �conomique (cf. BIT � Rapport sur le Travail
dans le Monde du BIT �, 2000 et Euzeby A. � Le financement de la
protection sociale � l'�preuve de la mondialisation de l'�conomie �, dans
La s�curit� dans le village global, sous la direction de Sigg R., Behrendt
C., AISS, 2000. Ce point sera approfondi dans la partie suivante.


 6. Pour la plupart des acteurs de la soci�t� civile qui ont anim� le
d�bat au cours des derni�res ann�es, cette �volution devait r�pondre �
leur demande d'inclure les questions sociales dans les mandats des IBW
(Alice Sindzingre � Les bailleurs de fonds en qu�te de l�gitimit� �, dans
Esprit, La nouvelle question Nord Sud, juin 2000). Ces derni�res
devraient d�passer les recommandations macro-�conomiques standards
centr�es sur l'am�lioration de la balance des paiements et l'ouverture
des �conomies cens�s redonner confiance aux investisseurs �trangers.


 7. Ce r�sultat d�pend du degr� d'in�galit� de revenu et de patri-
moine initial.


 8. La redistribution d'actifs financiers est jug�e pour Fran�ois Bour-
guignon, �conomiste en chef de la Banque Mondiale, impossible dans
les pays � faible gouvernance (Bourguignon 2004).


 9. Dercon S. � The Microeconomics of Poverty et Inequality : The
Equity-Efficiency Trade-Off Revisited �, Notes et documents N�10,
AFD, 2004.


10. Selon le mod�le MRW utilis�e par l'OCDE, si les d�penses
publiques passaient d'environ 18,5 % du PIB (moyenne arithm�tique
observ�e sur la p�riode �tudi�e) � 19,5 %, le PIB se trouverait r�duit �
long terme de 0,7 %.


11. Le secteur de la sant� est concern� par 3 des 8 Objectifs du Mill�naire
(Millennium Development Goals ou MDG) et 17 des 48 indicateurs

540 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



retenus pour 2015 par la communaut� internationale suite � l'Assem-
bl�e G�n�rale des Nations Unies de septembre 2000.


12. Lanc�e par le PNUD en 1999, la notion de BPM fait l'objet d'un
processus de d�finition et d'analyse par un groupe de travail (Groupe de
travail international sur les BPM) dont le secr�tariat, le GTIBPM, est
bas� � Stockholm). � La production de BPM concernerait uniquement
les BP que le march� ne peut produire et qui n�cessitent une coop�ration
international � dans Marniesse S, � Biens publics mondiaux et
d�veloppement : de nouveaux arbitrages pour l'aide �, document de tra-
vail n� 3, d�partement de la recherche, Agence fran�aise de d�veloppe-
ment, septembre 2005.


13. Ni le secteur de la sant� dans son ensemble, ni �galement l'assu-
rance maladie ne sont consid�r�s comme des BPM. Les autres BPM
sont : la paix et la s�curit�, les biens communs naturels, l'ouverture
commerciale, la stabilit� financi�re internationale et la connaissance.


14. Cette partie doit beaucoup � Dourgon, Grignon, Jusot (2003).


15. Il serait encore plus difficile de vouloir mesurer l'impact de l'as-
surance sur la pauvret�.


16. Sur les �tats plus g�n�raux de sant�, les �tudes mentionn�es ne
permettent pas de mesurer d'un point de vue scientifiquement solide,
une am�lioration.


17. Les interventions essentielles sont : le VIH/Sida, le paludisme, la
tuberculose, les pathologies maternelles et p�rinatales, les causes
fr�quentes de d�c�s de l'enfant (rougeole, t�tanos, dipht�rie, infections
respiratoires aigu�s, maladies diarrh�iques), la malnutrition (qui
aggrave toutes ces maladies), les autres infections qui pourraient �tre
�vit�es par la vaccination, les maladies li�es au tabac.


18. Les pays concern�s ont un PNB inf�rieur � 1200$ par habitant.


19. Cette pression fiscale est souvent jug�e insuffisante selon les
crit�res que se sont donn�s certains pays comme c'est le cas des pays
membres de l'Union Mon�taire Ouest Africaine (UEMOA).

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 541



20. L'impact du recouvrement des co�ts sur l'acc�s et l'�quit� d�pend
de la mani�re dont les initiatives sont con�ues et mises en oeuvre.
(Leighton 1995).


21. L'analyse des donn�es dans les pays de l'OCDE montre une cor-
r�lation positive entre la variation du niveau de d�penses sociales (y com-
pris la sant� mais sans l'�ducation) et le PIB par habitant, t�moignant
d'une �lasticit� positive entre d�penses sociales et croissance.


22. Notamment � travers la vuln�rabilit� de tous face � la circulation
mondiale des �pid�mies (SRAS, grippe aviaire, VIH-Sida, etc).


23. Notamment apr�s l'ouvrage de Cornia, Jolly, Stewart (1987).


24. Voir Breman, Shelton (2001). En g�n�ral, les �tudes de cas pays sont
plut�t n�gatives, les �tudes comparatives entre pays sont � la fois positives
et n�gatives, sans que des r�sultats d�terminants puissent �tre tir�s des
�tudes et publications �tudi�es (76 articles ont �t� s�lectionn�s dont 28
pr�sentent des analyses empiriques). Ces derni�res sont plus nuanc�es.


25. L'aide ne va pas forc�ment l� o� les politiques sont bonnes. Les
d�terminants des choix ne sont pas li�s � l'efficacit� de l'aide.
Berth�l�my J.C., Tichit A. � Bilateral donors'aid allocation decision : A
three-dimensional panel analysis �, mim�o 2002


26. La croissance est bonne pour les pauvres comme le montrent les
travaux de Dollar et Kraay (2000).


27. De nombreux auteurs ont soulign�s divers impacts n�gatifs de
l'APD. (Naudet 1994, 1997).


28. C'est aujourd'hui le support th�orique de l'Initiative Fast Track
pour le secteur de l'�ducation.


29. L'initiative PPTE a �t� con�ue pour des pays r�pondant � des
crit�res pr�cis. Les pays concern�s: (i) disposent d'une dette jug�e
insoutenable selon des ratios techniques mis au point par le FMI et la
BM, (ii) sont �ligibles aux pr�ts de l'AID et du FMI, (iii) ont mis en
oeuvre et suivi une politique macro �conomique, (iv) ont produit un

542 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



DSRP int�rimaire et, (v) ont n�goci� leurs dettes avec leurs diff�rents
cr�diteurs. Les obligations pour b�n�ficier de la r�duction de la dette
sont d'avoir restructurer les allocations budg�taires en faveur des
d�penses sociales et d'avoir mis en place des syst�mes effectifs de suivi
des d�penses.


30. Leurs lacunes sont : le manque d'articulation entre les politiques
�conomiques et sectorielles, le lien insuffisant entre pauvret� et in�ga-
lit�, la prise en compte modeste de la nature multi-dimensionnelle de la
pauvret� qui ne conduit pas � des proposition convaincantes, l'absence
d'�laboration d'une strat�gie d'insertion internationale, l'oubli des poli-
tiques de redistribution ou le manque de hi�rarchisation des priorit�s
dans un contexte de fortes contraintes financi�res et humaines, malgr�
les ressources rendues disponibles par la r�duction de la dette.


31. Analyse r�alis�e dans le cadre de l'atelier pays francophones
organis� par la Banque Mondiale, l'UNICEF et l'OMS � Dakar, avril
2001.


32. Dans certains pays, comme la Mauritanie, le processus IPPTE a
permis de pr�voir : (i) d'augmenter les salaires du personnel de sant� de
mani�re importante, (ii) de cr�er des bonus pour le personnel con-
front� � des conditions de travail d�favorables ou en fonction des per-
formances realis�es; (iii) d'accro�tre les d�penses sp�cifiques de sant�
pour la vaccination, le paludisme, le SIDA; et (iv) de cr�er des fonds
contre la pauvret� dans chaque r�gion.


33. La dimension multi-sectorielle des DSRP a conduit �galement �
favoriser la prise en compte de l'impact des d�terminants de la sant�
provenant des autres secteurs (�ducation, hydraulique, politique agri-
cole . . .). L'articulation des politiques sectorielles restent n�anmoins un
important chantier. Peu de DRSP font des proposition satisfaisantes en
la mati�re.


34. Vaccination des enfants, pr�vention VIH/SIDA, moustiquaire,
sant� de la reproduction.


35. Personnel de sant�, approvisionnement et disponibilit� des
m�dicaments.

       Assurance maladie : Facteurs de lutte contre l'in�galit� et la vuln�rabilit� � 543



36. D�penses publiques, r�allocation aux services de base et zones
rurales.


37. Cela est �galement le cas dans le secteur de l'�ducation.


38. En particulier celui r�alis� � Dakar au printemps 2001 en collabo-
ration avec l'OMS et la Banque mondiale.


39. � Making Poverty Reduction Strategies Work : Good Practices,
Issues and Stakeholder View �, GTZ, Ao�t 2005. Elle rejoint celle de
l'ODI qui met l'accent sur l'insuffisance prise en compte des chocs dans
les DSRP, mais qui critique aussi l'accent trop important mis par les
bailleurs dans les secteurs sociaux au d�triment de l'accent sur la
� croissance pro-pauvre �, dans � Second Generation Poverty Reduc-
tion Strategies �, Overseas Development Institute, septembre 2004.


40. Un mauvais usage du paiement des soins � travers l'Initiative de
Bamako (IB) a conduit � r�duire, voire supprimer les prestations de service
qui �taient destin�es � �tre gratuites comme l'UNICEF l'a souvent
constat�.


41. A ce sujet, voir le compte rendu qui reprend des critiques for-
mul�es sur le Fonds Mondial Sida, Tuberculose et Paludisme lors du
Forum de Haut Niveau sur la sant� de novembre 2005 � Paris.


42. Ce concept d'� assurance maladie sociale � a notamment �t� uti-
lis� par le consortium OMS/ILO et GTZ lors de la conf�rence de
Berlin les 5 et 6 d�cembre 2005 mais sans qu'une d�finition univoque
n'en ait �t� donn�e, par chacune de ces organisations.


43. C'est le cas lorsque ce concept est utilis� � des fins politiques
(notamment au S�n�gal au milieu des ann�es 90 ou en C�te d'Ivoire �
la fin de la derni�re d�cennie).


44. La r�flexion que souhaite mener en 2006 diff�rentes agences inter-
nationales en Afrique est d'�largir le discours des ministres de la sant�
aux diff�rentes probl�matiques du champ du financement de la sant�.


45. Le mode et la pratique de la gouvernance des caisses d'assurance
maladie ou de retraite ne facilitent pas toujours l'intervention des bailleurs.

544 � L'Assurance maladie en Afrique francophone



46. L'APD doit en outre pr�ciser en fonction de leur pertinence et de
leurs impacts, les modalit�s d'intervention � privil�gier (aide budg�taire
globale, aide budg�taire cibl�e, aide projet et autres m�canismes d'inci-
tations, etc.).




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                          Pr�sentation des �diteurs
                                   et des contributeurs




Martine Audibert est directeur de recherches au CNRS et membre
du CERDI (Centre d'�tudes et de Recherches sur le D�veloppement
International � UMR CNRS 6587). Elle a publi� de nombreux
chapitres et articles sur l'�conomie de la sant� dans les pays en
d�veloppement. Elle est consultante pour diff�rents organismes et
codirige au CERDI le Master en � �conomie de la sant� dans les pays
en d�veloppement et en transition �.

Pierre Blaise est m�decin de sant� publique, titulaire d'un doctorat.
Il a travaill� en Afrique de 1988 � 1990 comme coordinateur m�dical
pour M�decins du Monde en Guin�e, puis de 1992 � 1995 comme
m�decin de district pour le minist�re de la sant� du Zimbabwe et
Medicus Mundi Belgium. Dans ce cadre, il a particip� � des projets de
recherche visant au renforcement du management des services de
sant� de district. Entre 1996 et 1998 il a effectu� de nombreuses mis-
sions comme consultant pour diff�rents organismes internationaux et
ONG. Il a rejoint le d�partement de sant� publique de l'Institut de
M�decine Tropicale d'Anvers en 1998 o� il enseigne l'organisation
des syst�mes de sant�, la gestion des ressources humaines, le manage-
ment et l'assurance de la qualit� dans les cours internationaux de Mas-
ter of Public Health. Ses recherches se concentrent sur la promotion
des soins centr�s sur le patient et sur l'�tude des dynamiques de
changement et d'am�lioration de la qualit� dans les syst�mes de sant�
des pays en d�veloppement.

                                                                   549

550 � �diteurs et contributeurs



Pascal Brouillet, est �conomiste de la sant�. Apr�s plusieurs ann�es
dans le conseil en planification strat�gique dans le secteur hospitalier
et social fran�ais, il a �t� directeur des programmes de l'organisation
non gouvernementale Action Nord Sud/Handicap International.
Ensuite, il a �t� conseiller �conomique du Ministre de la sant� du
S�n�gal et conseiller �conomique du Directeur de la planification du
minist�re de la sant� et de la population en Ha�ti au titre de la poli-
tique de coop�ration du Minist�re des Affaires Etrang�res fran�ais. Il
a �galement occup� un poste d'expert au sein du programme � Strate-
gies and Tools against Exclusion and Poverty � (STEP) au si�ge du
Bureau International du Travail. Il est actuellement charg� de mission
dans la division sant� de l'Agence fran�aise de d�veloppement o� il est
en charge des financements accord�s dans le secteur de la sant� de dif-
f�rents pays. Il est �galement responsable d'�tudes sectorielles (assu-
rance-maladie, macro-�conomie et sant�, etc.). Il est depuis 4 ans
charg� de cours � l'Universit� d'Auvergne (Centre d'�tudes et de
Recherche en D�veloppement International).

Guy Carrin d�tient un M.A. en �conomie de l'University of New
Hampshire (USA) et un doctorat en sciences �conomiques de
Katholieke Universiteit Leuven (Belgique). En 1985 � 1986, il �tait
Takemi Fellow en Sant� Internationale � l'Ecole de Sant� Publique de
Harvard University. Depuis 1986, il occupe des positions de pro-
fesseur � Universiteit Antwerpen (Belgique) et Boston University
(USA). Il est actuellement coordinateur au D�partement de Finance-
ment des Syst�mes de Sant� � l'OMS � Gen�ve. Il est l'auteur de Eco-
nomic Evaluation of Health Care in Developing Countries et de Strategies
for Health Care Finance in Developing Countries, co-�diteur de Macroeco-
nomic Environment and Health et de Health Financing for Poor People. Il
a co-�dit� un num�ro sp�cial de la revue Social Science and Medicine sur
"The Economics of Health Insurance in Low and Middle-income
countries."

Bart Criel est sp�cialiste en analyse et organisation de syst�mes de
sant�. Il est m�decin de formation, et total aire d'une ma�trise en sant�
publique de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, et
d'un doctorat � l'Universit� Libre de Bruxelles. Sa th�se de doctorat
portait sur les syst�mes d'assurance-maladie au niveau district en
Afrique sub-Saharienne.

                                               �diteurs et contributeurs � 551



   De 1983 � 1990, il a travaill� comme m�decin de district dans les
services de sant� publics en ex-Za�re. Depuis 1990, il est bas� au
d�partement de sant� publique de l'IMT o� il participe � l'enseigne-
ment sur l'organisation des services de sant� et o� il a d�velopp� des
activit�s de recherche autour de la probl�matique de l'acc�s � des soins
de sant� de qualit� et sur l'�tude des syst�mes mutualistes en Afrique.

Ole Doetinchem est analyste des syst�mes de sant� dans le
d�partement de Financement des syst�mes de sant� de l'Organisation
mondiale de la Sant�. Il a et� gestionnaire de projet dans le domaine
d'assurances maladie sociales � la Deutsche Gesellschaft f�r Technis-
che Zusammenarbeit (GTZ) en Allemagne. Il est titulaire d'un MSc
en Health Policy, Planning and Financing de la London School of
Economics and Political Science (LSE) et la London School of
Hygiene and Tropical Medicine.

Gilles Dussault est � Senior Health Specialist (Policy) �, � l'Institut
de la Banque mondiale. Il est responsable d'activit�s d'apprentissage
destin�es aux cadres de la sant� des pays d'Afrique francophone o� la
Banque mondiale est active. Il a �t� Professeur titulaire (1985 � 2000),
et Directeur (1990 � 1991, 1998 � 2000) du D�partement d'administra-
tion de la sant�, Facult� de m�decine, Universit� de Montr�al. Il est
titulaire d'un PhD. en sociologie, de l'Universit� de Londres (1981). Il
a �t� Professeur-invit�, � l'�cole de sant� publique du Br�sil (Escola
Nacional de Sa�de P�blica), � Rio de Janeiro en 1991 � 1992. Ses
champs d'int�r�t sont la production des services de sant�, le
d�veloppement des ressources humaines en sant�, la formation des
gestionnaires des services de sant�. En 2002 � 2004, il a �t� membre
du Groupe de travail de la Fondation Rockefeller sur les ressources
humaines pour la sant�, qui a publi� Human Resources for Health :
Overcoming the Crisis (Harvard University Press, 2004).

David Evans est �conomiste et a fait une carri�re universitaire dans
des facult�s d'�conomie et de m�decine. Il s'est joint � l'OMS en 1990
et pendant 8 ans il a travaill� au d�veloppement et � la promotion de la
recherche sur les aspects sociaux et �conomiques des maladies tropi-
cales. Il a ensuite �t� Directeur du Programme des donn�es probantes
pour les politiques de sant� et plus r�cemment du D�partement de
financement de la sant�. Il est, entre autres, responsable du programme

552 � �diteurs et contributeurs



OMS-CHOIX qui a �valu� les co�ts et l'efficacit� d'environ 800
interventions, et les co�ts de leur mise � �chelle. Ses travaux touchent
aussi les comptes nationaux de sant�, les effets appauvrissants des
d�penses de sant� sur les m�nages, et les m�canismes de couverture du
risque maladie.

Daniel Ferette. Licenci� en droit, il est entr� en 1976 au service de
l'Union Nationale des Mutualit�s Libres, dont il est devenu le Secr�-
taire G�n�ral. De mars 2003 � octobre 2004, il a exerc� des fonctions
dans deux cabinets Minist�riels (suivi de la protection sociale). En
2005, consultant ind�pendant, il a �t� charg� par le BIT et la Coop�ra-
tion Belge d'une �tude de faisabilit� d'une mutuelle pour les agents de
l'�tat au Niger

Pierre Fournier est professeur titulaire au D�partement de m�decine
sociale et pr�ventive membre de l'Unit� de sant� internationale
chercheur au Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Sant� et au
Centre de Recherches du Centre Hospitalier de l'Universit� de Mon-
tr�al. Il est actif dans le domaine de la sant� publique dans des milieux
acad�miques et professionnels depuis plus de 25 ans et dans diff�rents
pays. A occup� les postes de M�decin de district (Burkina Faso ; 1978 �
1979), Professeur adjoint (France ; 1981 � 1982), Expert en sant�
publique � la Banque Africaine de D�veloppement (C�te d'Ivoire ;
1982 � 1986) avant d'int�grer l'Universit� de Montr�al en 1986, il est �
l'Universit� de Montr�al o� il a d�velopp� des enseignements en
gestion de projets, sant� internationale et sant� publique. Ses int�r�ts
de recherche concernent les politiques et l'organisation des services de
sant� dans les pays en d�veloppement, les pratiques et l'histoire de la
sant� publique. Il a �t� directeur de l'Unit� de sant� internationale de
l'Universit� de Montr�al (1989 � 1996) et directeur du D�partement
de m�decine sociale et pr�ventive (1996 � 2002).

Bruno Galland, Docteur en M�decine est Directeur de recherche au
Centre International de D�veloppement et de Recherche (depuis
1985). Il s'est sp�cialis� dans deux secteurs de la micro �conomie de la
sant�, la micro assurance sant� (� gestion mutualiste ou articul�e avec
des syst�mes de micro finance) et la d�centralisation de la gestion des
services de sant�. Il apporte un appui technique et m�thodologique
aux programmes men�s par le CIDR et par d'autres organismes de

                                              �diteurs et contributeurs � 553



coop�ration en Afrique l'Ouest et en Afrique de l'Est. Il contribue � la
diffusion des enseignements tir�s de programmes suivis en publiant
des travaux de capitalisation et des outils m�thodologiques, en orga-
nisant ou participant � des cursus internationaux de formations, ou �
l'occasion de consultations.

Slim Haddad est m�decin sp�cialiste en sant� publique (Universit�
d'Aix Marseille, France), docteur en �conomie de la sant� (Universit�
Claude Bernard, Lyon, France). Il est Professeur au d�partement de
m�decine sociale et pr�ventive de l'Universit� de Montr�al et
chercheur au Centre de Recherche du Centre Hospitalier Universi-
taire de Montr�al.
   Ses principaux int�r�ts de recherche portent sur : (1) l'�valuation
des politiques de sant� (r�formes et financement des syst�mes de
sant�, assurance et partage des risques en sant�, impacts distributifs),
(2) les d�terminants de l'utilisation des services de sant� (capacit�s �
payer, accessibilit�, co�ts, qualit�s des soins) et (3) la qualit� des soins
et services de sant�.

Chris James est docteur en �conomie de la sant� � la London School
of Hygiene and Tropical Medicine. Son activit� professionnelle l'a
amen� � occuper diff�rents postes dans les grandes organisations
internationales et participer � la r�daction de plusieurs rapports, �
l'OMS, � l'UNICEF et � Save the Children Fund � UK.

Alain Letourmy est ing�nieur de formation (�cole des Mines de
Paris), puis dipl�m� de l'ENSAE et de l'Universit� Paris-IX-
Dauphine. Il est chercheur au CNRS depuis 1976. Sp�cialis� en
�conomie de la sant�, il a conduit diverses recherches sur le syst�me
fran�ais et les syst�mes europ�ens. Depuis 1990, il travaille r�guli�re-
ment avec la Coop�ration fran�aise, comme expert sur les questions
de financement de la sant�. Il a collabor� aussi comme consultant avec
des ONG et des d'Afrique de l'Ouest. Il participe activement au
d�veloppement des mutuelles de sant� au Mali, au S�n�gal, en
Guin�e, au B�nin et au Burkina Faso. Il a r�alis� des �tudes de faisa-
bilit� sur l'assurance maladie obligatoire au Mali et au S�n�gal.

Jacky Mathonnat est professeur de sciences �conomiques � l'univer-
sit� d'Auvergne et membre du CERDI (Centre d'�tudes et de

554 � �diteurs et contributeurs



Recherches sur le D�veloppement International � UMR CNRS
6587). Il a �crit de nombreux articles et chapitres d'ouvrages sur l'�-
conomie de la sant�, notamment sur le financement et la r�forme des
syst�mes de sant� dans les pays d'Afrique et d'Asie en relation avec les
politiques macro�conomiques. Il est �galement consultant pour dif-
f�rents organismes fran�ais et internationaux. Il dirige au CERDI le
Master en � �conomie de la sant� dans les pays en d�veloppement et
en transition �.

Florence Morestin est dipl�m�e de Sciences-Po (Institut d'�tudes
Politiques d'Aix en Provence, France), titulaire du DESS de Coop�ra-
tion de l'Institut des Hautes �tudes de l'Am�rique Latine (Universit�
Paris 3 Sorbonne Nouvelle, France) et d'une licence en ethnologie
(Universit� Montpellier 3, France). Actuellement �tudiante en
Ma�trise en sant� communautaire � l'Universit� de Montr�al, et assis-
tante de recherche au Centre de Recherche du Centre Hospitalier
Universitaire de Montr�al, apr�s deux ans d'engagement profession-
nel comme assistante technique aupr�s des autorit�s de sant� en
Afghanistan et au Burundi.

Pascal N'Diaye est dipl�m� en G�ographie humaine � l'Universit�
Cheikh Anta Diop de Dakar. Il a �t� responsable du volet diffusion/
partenariat du programme ACOPAM (Appui associatif et coop�ratif
aux Initiatives de D�veloppement � la Base) du Bureau International
du Travail. Ce programme est en appui aux organisations de base dont
les activit�s sont li�es aux besoins fondamentaux de d�veloppement en
Afrique : s�curit� et autosuffisance alimentaires, gestion durable des
ressources naturelles, questions du genre, acc�s au cr�dit, � l'�pargne,
aux services financiers et � la protection sociale. A partir de 1999, il a
�t� le premier coordinateur de La Concertation entre les acteurs du
d�veloppement des mutuelles de sant� en Afrique de l'Ouest et du
Centre, un r�seau, soutenu par plusieurs partenaires d'appui tech-
nique et financier, qui intervient dans 11 pays francophones.

Mathieu Noirhomme, licenci� en sciences �conomiques appliqu�es,
a travaill� trois ans pour M�decins Sans Fronti�res en Afrique et dans
les Cara�bes apr�s une premi�re exp�rience professionnelle en Bel-
gique comme consultant financier. En 2003, il a rejoint l'Institut de
M�decine Tropicale d'Anvers en tant que chercheur en �conomie de

                                             �diteurs et contributeurs � 555



la sant�. Ses principaux centres d'int�r�ts sont le financement de la
sant�, les m�canismes de protection sociale, les mod�les de ciblage et
les strat�gies de r�duction de la pauvret�. Il se consacre � des activit�s
de recherches et de consultance sur les Fonds d'�quit� au Cambodge,
et le d�veloppement de l'approche sur les pays africains.

Oumar Ouattara est Directeur G�n�ral de l'Union Technique
Mutualit� Malienne depuis 1998 et Pr�sident du Conseil d'Administra-
tion de l'Institut d'ophtalmologie pour l'Afrique Tropicale depuis Mai
2005. Il est �galement Point focal de la Concertation des mutuelles de
sant� en Afrique et membre de l'Association Internationale de la
Mutualit�. Sp�cialiste des questions de planification sanitaire et de
couverture du risque maladie notamment par les mutuelles de sant�, il
a une longue exp�rience de d�veloppement communautaire au Mali et
dans la sous r�gion ouest africaine. Il a �t� m�decin praticien,
Directeur d'un CSCom au Mali, Chef de la Cellule d'appui aux cen-
tres de sant� communautaire et aux m�decins de campagne. Dipl�m�
de m�decine g�n�rale de l'�cole nationale de m�decine et de pharma-
cie Point G Bamako, il est aussi titulaire d'un DEA de sant� publique
de l'Universit� Paris VI.

Alexander Preker est �conomiste principal (Lead Economist) � la
Vice-pr�sidence Afrique de la Banque mondiale, o� il est responsable
du dossier du financement de la sant�. Il a �t� responsable de la publi-
cation de la Strat�gie sectorielle en Sant�, Nutrition et Population
(1997) de la Banque mondiale et a publi� plusieurs ouvrages sur les
questions d'assurance maladie et de financement de la sant�. Il est
l'Editeur de la collection de publications Sant�, Nutrition et Popula-
tion de la Banque. Il a particip� �troitement � la publication du Rap-
port mondial sur la Sant� 2000, Pour un syst�me de sant� plus perfor-
mant, ainsi qu'aux travaux de la Commission Macro�conomie et sant�
cr��e par l'OMS. Il est titulaire d'un Ph.D. en �conomie du London
School of Economics and Political Science, d'un Fellowship en
M�decine du University College de Londres, d'un Dipl�me en Droit
M�dical et �thique du King's College de Londres, et d'un MD de
l'University of British Columbia/McGill (Canada).

�ric de Roodenbeke est �conomiste et dipl�m� de l'ENSP-
RENNES. Depuis 1983, il a occup� diff�rents postes de responsabilit�

556 � �diteurs et contributeurs



dans des h�pitaux en France et en Afrique. Entre 1996 et 2001 il est
charg� de mission sur l'offre et le financement de la sant� au Minist�re
des Affaires Etrang�res en France. En janvier 2004, il rejoint la
Banque mondiale � Washington pour concourir � la formation en
politiques hospitali�res (WBI) et soutenir des op�rations en Afrique.

Jean-Pierre Sery travaille depuis dix ans sur la r�forme du finance-
ment de la sant� en C�te d'Ivoire, en particulier, la conception et
l'ex�cution du programme national d'assurance maladie. Il a aussi
men� des activit�s de consultance au Togo, Gabon, S�n�gal, Tchad et
en Ouganda, dans le cadre des politiques de r�forme du secteur de la
sant� dans ces pays. Il est point focal en C�te d'Ivoire, de la Concerta-
tion entre les acteurs du d�veloppement des mutuelles de sant� en
Afrique. M. Sery est dipl�m� de l'�cole Nationale de la s�curit�
sociale de Saint-�tienne, en France et s'est sp�cialis� dans l'�conomie
et le financement de la sant� dans les pays en voie de d�veloppement,
au Centre pour la Sant� Internationale de la Facult� de la Sant�
Publique, � l'universit� de Boston aux �tats-Unis.

Jean-Marc Thom� est consultant ind�pendant en gestion et en
�conomie de la sant�. Il s'est sp�cialis� dans la probl�matique du
financement de sant� en R.D.P. Lao (depuis 13 ans) et au Cambodge (8
ans) o� il assure le suivi technique d'une dizaine de projets. Son appui
consiste principalement en �tudes de faisabilit�, �valuations, n�gocia-
tions d'accords entre partenaires, appuis technique � la mise en place et
monitoring r�gulier sur des sujets tels que la gestion transparente, les
modes de paiement, la motivation du personnel, le financement � la
performance, l'approche contractuelle, les fonds d'�quit� etc. En
Afrique, il a principalement travaill� sur ces sujets au Mali et dans une
moindre mesure en R.D. Congo. (jmthome@compuserve.com,
jeanmarc.thome@bluewin.ch)

Caroline Tourigny est assistante de recherche � l'Universit� de Mon-
tr�al, � l'Unit� de Sant� internationale et � l'Unit� de Recherche Cli-
nique en P�rinatalit� du Centre Hospitalier Universitaire Ste-Justine.
Elle d�tient une ma�trise en sant� communautaire et un baccalaur�at en
sciences infirmi�res. Elle a travaill� avec M�decins Sans Fronti�res et
d�tient une exp�rience �tendue en Afrique Sub-Saharienne et en
Europe de l'Est. Ses int�r�ts de recherche sont l'�valuation de pro-

                                            �diteurs et contributeurs � 557



gramme, les mutuelles de sant�, les soins de sant� primaires et la mor-
talit� maternelle.

Edit Velenyi est actuellement candidate au PhD au Centre d'�-
conomie de la sant� de l'Universit� de York en Angleterre. Elle
d�tient une Ma�trise de la University of Economics, de Budapest
(Hongrie), et une autre en �conomie et droit international de la
School of Advanced International Studies, Johns Hopkins University,
Washington. Elle travaill� � la Banque mondiale dans l'�quipe du
R�seau Sant�, Nutrition et Population, ainsi que dans les D�parte-
ments Europe et Asie Centrale, et Afrique. Ses travaux ont principale-
ment port� sur des questions d'allocation et d'utilisation des
ressources financi�res, sur l'assurance maladie volontaire et sur le r�le
des gouvernements dans la mise en place de programmes d'assurance
maladie obligatoire.



        'est un paradoxe que services de sant� et
C       couverture maladie, des � biens � de pre-
        mi�re n�cessit�, ob�issent � la loi des biens
de luxe : plus on est riche, plus on en consomme !
Les pays riches y consacrent 10% de leur richesse,
les pauvres 2 � 3% ! Cette loi a eu de f�cheuses
r�percussions sur nos repr�sentations collectives.
Nous avons longtemps limit� l'�tude de la couver-
ture maladie aux pays riches, comme si elle �tait
leur seul apanage. Un m�rite de cet ouvrage est
de r�futer cette vue paternaliste. Plusieurs pays
africains mettent en place des exp�riences souvent
passionnantes d'assurance, nous obligeant � r�viser
notre vision d'une Afrique immobile, paralys�e
par ses propres pesanteurs. Une autre cons�quence
est d'avoir consid�r� que le d�veloppement �cono-
mique devait primer sur le d�veloppement sanitai-
re. Cet ouvrage rappelle que sant� et richesse
nationale entretiennent des relations complexes : la
croissance �conomique stimule certes le d�veloppe-
ment du secteur sanitaire, mais celui-ci contribue
fortement � lutter contre la pauvret� et la vuln�ra-
bilit� sociale, favorisant ainsi le d�veloppement
�conomique. Il est r�confortant, que de chercheurs
d'horizons divers, nous parvienne un message
positif d'un continent trop longtemps d�crit avec
commis�ration et condescendance. Et s'il est des
biens dont on ne saurait regretter la � globalisa-
tion �, ce sont bien la sant� et la s�curit� sanitaire !

--Claude Le Pen
  Pr�sident, Coll�ge des �conomistes de la sant�
  (Paris)




                                                        ISBN 0-8213-6617-3