19129 1998 Le financement et la gestion de l'enseignement supé rieur: l'état des ré-formes dans le monde D. Bruce Johnstone avec Alka Arora et William Experton FILE. COPY ED)UCATAN T* H E W 0 R L D . B A N Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur: l'état des réformes dans le monde D. Bruce Johnstone State University of New York at Buffalo avec la collaboration de Alka Arora et William Experton Banque mondiale Ce document a été établi avec le concours de la Banque mondiale dans le cadre de sa contribution à la conférence mondiale de l'UNESCO sur l'enseignement supérieur, qui se tiendra à Paris (France) du 5 au 9 octobre 1998. Les opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas les vues des membres du Conseil des Administrateurs et des pays qu'ils représentent. - s 1. Le mouvement de réforme des universités dans le monde La décennie des années 90 a vu souffler, dans le monde entier, un vent de réforme affectant le financement et la gestion des universités et autres établissements d'enseignement supérieur. Cette tendance est remarquable par le fait qu'elle est générale et suit une trajectoire presque identique dans des pays très divers, tant par leurs systèmes politico-économiques et leurs traditions universitaires que par leur stade de développement industriel et technologique. On constate donc des similitudes entre des pays dont la richesse et le régime politico-économique présentent des différences considérables, que ces pays aient un système d'éducation élitiste ou universel', à dominante publique ou privée, ou qu'ils soient relativement riches ou durement éprouvés par des mesures d'austérité. Les auteurs s'attacheront ici à évaluer l'état de ce mouvement de réforme à la fin de la décennie, en prévision des premières années du prochain millénaire. 2. Le contexte de la réforme de l'enseignement supérieur L'enseignement supérieur a toujours bénéficié d'un rang élevé dans les priorités de l'État. Il constitue un vivier et un défenseur de la culture, un facteur de changement, un moteur de croissance économique et un moyen de satisfaire les aspirations nationales. De plus, l'intérêt qu'il suscite se manifeste indépendamment du caractère public ou privé des établissements. Toutefois, l'enseignement supérieur subit actuellement d'énormes transformations, et il peut être utile d'examiner le mouvement de réforme dans le contexte de cinq thèmes : 2.1) l'expansion et la diversification -des effectifs, des taux de participation, du nombre d'établissements et de leurs types ; 2.2) les pressions financières - comme le montrent les dépenses d'éducation par étudiant qui sont peu élevées ou vont en diminuant, la rémunération faible ou inexistante des enseignants, le manque de matériel et de bibliothèques et la vétusté des installations ; 2.3) le marché - la montée en puissance des orientations et des solutions s'appuyant sur le marché et la recherche de ressources non publiques ; 2.4) la demande d'une plus grande responsabilité - de la part des établissements et des enseignants à l'égard des étudiants, des employeurs et de ceux qui payent ; 2.5) l'exigence de qualité et d'efficacité accrues -renforcement de la rigueur, de l'utilité pratique et de la diffusion du savoir. I Dans sa formulation classique (« Problèmes liés au passage d'un enseignement supérieur d'élite à un enseignement supérieur de masse » dans OCDE, Politiques de l'enseignement supérieur, Paris : OCDE, 1974), Martin Trow fixe la transition à environ 15 % de la cohorte d'âge pertinente ; la plupart des pays industrialisés se trouvent dans la fourchette des 30 à 45 % de la cohorte d'âge universitaire entrant dans un établissement d'enseignement post- secondaire, approchant la participation « universelle ». Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 2 2.1 Expansion et diversification Le mouvement de réforme est sous-tendu par un désir déclaré d'expansion et de diversification, qui découle des exigences d'une population dont la mobilité sociale augmente (ou du moins dont les aspirations sont plus grandes) et des besoins d'une économie de plus en plus concurrentielle et technologiquement avancée. Les principaux facteurs en jeu sont les suivants : a) l'expansion de l'enseignement primaire et secondaire qui crée une forte demande potentielle d'enseignement supérieur ; b) le taux de croissance du nombre d'élèves du primaire et du secondaire choisissant de poursuivre leurs études - qui est notamment fonction de la demande du marché du travail, d'une rentabilité appréciable, de la tradition et de l'urbanisation ; c) la diversification de l'enseignement supérieur et l'apparition de nouvelles possibilités d'expansion de l'enseignement supérieur afin de répondre aux exigences croissantes et complexes du monde moderne ; d) le renforcement des incitations offertes par les pouvoirs publics pour assurer aux étudiants l'égalité d'accès à l'enseignement supérieur; e) le fait qu'en moyenne, les étudiants font des études supérieures plus poussées (ou plus longues). En ce qui concerne ce dernier point, des facteurs jouent à la fois sur l'allongement et le raccourcissement du temps d'étude. Dans le premier cas, on peut citer l'élargissement du champ des connaissances, le niveau croissant des compétences qu'exige une économie moderne et concurrentielle à l'échelle mondiale, et la nécessité d'un perfectionnement professionnel constant, poussé par la tendance naturelle des cadres à améliorer leur statut par des qualifications universitaires de plus en plus élevées. Dans le deuxième cas, on citera la croissance relativement plus forte des secteurs non universitaires dans certains pays, où sont offerts des cycles de formation plus courts et où des réformes visent à décourager des études trop longues avant l'obtention d'un diplôme. Selon Salmi (1992)2, « la méthode la plus efficace réside dans une stratégie de diversification des établissements par laquelle la demande sociale d'enseignement supérieur est gérée par la mise en place de diverses institutions moins coûteuses qui se différencient sur le plan des tâches, des fonctions et des prestations... ». Cela se traduit déjà par la multiplication des centres communautaires autonomes d'enseignement supérieur, des instituts universitaires de technologie et des programmes d'éducation des adultes, d'éducation permanente et de télé-enseignement. 2.2 Pressions financières Durant les années 90, l'un des problèmes dominants de l'enseignement supérieur a été la grave pénurie de fonds, qui a amené, entre autres raisons, la Banque mondiale à déclarer en 1994 que le secteur était « en crise dans le monde entier »'. 2 Jamil Salmi (1992) Higher education and economic development: Strategies for reform - A policy brief Document présenté au Séminaire de haut niveau sur le renforcement de l'efficacité et de la viabilité financière de l'enseignement supérieur en Afrique. Banque mondiale, Institut de développement économique, mars 1992, Harare (Zimbabwe). 3 Banque mondiale (1994) L 'enseignement supérieur : les leçons de l'expérience , p. 1. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 3 Quatre facteurs principaux contribuent à cette situation générale d'austérité. Le premier est la pression exercée par les effectifs (voir plus haut), en particulier dans les pays qui enregistrent à la fois un nombre de plus en plus élevé de jeunes ayant terminé leurs études secondaires et des taux de participation à l'enseignement supérieur actuellement faibles alors que, parallèlement, l'enseignement supérieur manque de moyens pour répondre à une demande croissante. Le deuxième facteur est la tendance des coûts unitaires de l'enseignement supérieur à augmenter plus rapidement que ceux de l'économie dans son ensemble, cette tendance étant accélérée par la montée en flèche du coût de la technologie et par l'évolution rapide des domaines d'études les plus nécessaires ou les plus demandés. Le troisième facteur est la pénurie croissante de ressources publiques - due à la concurrence d'autres besoins de l'État tels que l'éducation de base, les infrastructures publiques, la santé, le maintien de l'ordre, la stabilisation et la remise en état de l'environnement et la lutte contre la pauvreté, à quoi s'ajoute l'impossibilité pour de nombreux pays de faire appel aux anciennes méthodes utilisées pour générer des recettes publiques, telles que l'impôt sur le chiffre d'affaires des entreprises d'État. Le quatrième facteur, dans bien des pays, est d'ordre essentiellement politique, à savoir le mécontentement grandissant face à la rigidité et à l'inefficacité du secteur public en général, auquel répond l'orientation croissante vers des solutions axées sur le marché (voir plus haut), notamment la privatisation, la déréglementation et la décentralisation des fonctions encore considérées comme « publiques ». 2.3 L'orientation vers le marché Le mouvement de réforme de l'enseignement supérieur durant les années 90, qui se prolongera à n'en pas douter au cours du siècle prochain, est orienté davantage vers le marché que vers la planification et la réglementation de l'État. Cette tendance a pour toile de fond la montée en puissance, presque partout dans le monde, de l'économie de marché capitaliste et des principes du néolibéralisme'. L'enseignement supérieur répond à nombre des critères définis par Barr comme caractérisant un bien privé se prêtant aux forces du marché. En premier lieu, il ne peut pas être traité comme un bien purement public du fait même qu'il présente des conditions de rivalité (limitation de l'offre), d'exclusivité (souvent moyennant finances) et de refus (limitation de la demande) qui ne répondent pas aux caractéristiques d'un bien purement public', mais qui correspondent à certaines particularités importantes d'un bien privé. En deuxième lieu, les consommateurs de ce bien (l'enseignement supérieur) sont 4 Frans van Vught « Autonomy and Accountability in Government/University Relationships », dans Jamil Salmi et Adriaan Verspoor, directeurs de publication (1994) Revitalizing Higher Education. Londres: Pergamon Press. 5 Barnes, John et Nicholas Barr (l 988) Strategies for higher education: The alternative White paper. The David Hume Institute. The Suntory-Toyota International Center for Economics and related Disciplines, LSE. Aberdeen University Press, pp. 3 et 6 à 9. 6 Barr, Nicholas (1993) The economics ofthe welfare state. Deuxième édition. Weidenfeld and Nicholsan. Londres, pp. 106 et 345. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 4 raisonnablement bien informés et les fournisseurs ne le sont souvent pas - condition s qui sont idéales pour que jouent les mécanismes du marché. Cette orientation a abouti a des éléments de réforme tels que l'imposition de frais d'études qui reporte dans une certaine mesure la charge du contribuable sur les bénéficiaires directs -parents et étudiants --, la prise en charge par ceux-ci de la quasi-totalité des frais de subsistance dans l'établissement et, enfin, l'octroi de prêts pour les études à des taux plus proches de ceux du marché. fous ces éléments dépendent donc du marché, qui permet de choisir les options les plus rentables. Le recours accru aux signaux du marché fait également passer le pouvoir de décision non seulement de lÉ'tat mais aussi des établissements d'enseignement supérieur - et plus particulièrement du corps enseignant - aux consommateurs ou aux clients, qu'il s'agisse des étudiants, des entreprises ou du grand public. Ce transfert peut paraître « conservateur » au sens conventionnel du terme employé actuellement en politique. Mais on peut aussi le qualifier de « libéral », voire de « populiste », dans une acception plus ancienne. La dépendance financière totale de l'université vis-à-vis de l'État, à quoi s'ajoutait une autonomie considérable du corps enseignant, consacrait un système auquel certains reprochaient d'être élitiste, intéressé et par trop éloigné des étudiants et des contribuables. Le passage, même partiel, aux études payantes - en supposant une assistance financière afin de maintenir les possibilités d'accès - donne un poids considérable aux étudiants et aux familles par rapport au corps enseignant et au ministère de tutelle. De surcroît, aux yeux de nombreux économistes, la prise en charge d'une partie des frais par les étudiants et les familles dénote aussi une réforme dans le sens d'une plus grande équité et d'une situation plus normale dans laquelle les bénéficiaires des services sont de plus en plus les payeurs. Dans la mesure où les universités et les systèmes d'enseignement supérieur accorderont davantage d'attention à des facteurs tels que la bonne gestion du personnel, les flux de trésorerie, la position sur le marché, la diversification des produits et la responsabilisation, ils paraîtront plus « privés » que « publics » et échapperont aux clichés qui accompagnent ce dernier qualificatif, même s'ils continuent d'appartenir à l'État, d'être largement financés par l'impôt et d'être chargés d'une mission ouvertement « publique >. Une orientation vers le marché implique donc a) l'imposition de frais d'études et la vente des produits de la recherche et de l'instruction au moyen de subventions, de contrats et de formation des cadres d'entreprise ; b) l'intervention du secteur privé, y compris des entités qui dispensent un enseignement supérieur à des fins lucratives ou non ; c) la décentralisation régionale, soit la délégation de pouvoirs de l'Administration centrale aux régions; d) l'autonomie des établissements, soit la délégation de pouvoirs des divers organes administratifs aux établissements d'enseignement. Une grande partie de ce qui peut ressembler au vade-mecum de l'économiste néolibéral peut aussi relever davantage de l'opportunisme que de l'idéologie. Du fait que l'évasion fiscale est de plus en plus fréquente, qu'il est par ailleurs difficile de recouvrer les impôts7 et que tous les États 7 En 1997, le gouvernement russe n'a recouvré que 52 % des impôts dus. À Moscou, sur une dizaine de millions d'habitants, seuls 120 000 ont déclaré dans les délais prévus leur revenu imposable. The New York Times International, 8 mars 1998, p. 3. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 5 connaissent des besoins difficiles à concilier - instruction générale, santé publique, sécurité publique, transferts et infrastructures publiques -, le seul moyen d'échapper à des mesures d'austérité débilitantes consiste peut-être principalement à faire de plus en plus appel aux études payantes et à donner libre cours à l'initiative des responsables de l'administration et de l'enseignement dans les établissements. 2.4 Responsabilisation Un quatrième thème sous-tendant le mouvement de réforme est la responsabilisation. Les universités se doivent de rendre des comptes aux étudiants, aux parents, aux employeurs et au grand public. En particulier, certains pays estiment que l'université - notamment l'université classique et le corps professoral - n'est pas suffisamment responsable, en particulier à l'égard des étudiants du premier niveau. La responsabilisation n'est pas aisée du fait que les bénéfices sont, à juste titre, multiples et difficiles à évaluer. Il est pourtant essentiel d'énoncer des directives transparentes, de mettre en place des moyens plus efficaces de mesure des résultats et de mieux aligner les rémunérations aux niveaux individuel et institutionnel sur les indicateurs d'efficacité. 2.5 Qualité et efficacité Dans son rapport intitulé « Les leçons de l'expérience », la Banque mondiale a relevé de graves problèmes de qualité résultant des facteurs suivants : sureffectif, dû fréquemment aux textes législatifs conférant à tous les diplômés du secondaire le droit de s'inscrire à l'université quels que soient leur état de préparation et la capacité d'accueil établissements ; contrôle insuffisant de la qualité ou du comportement des enseignants, dû en partie au bas niveau des traitements et à la titularisation pratiquement immédiate ; déficience des programmes, inadaptés aux besoins des économies émergentes. Au début des années 90, afin de renforcer la qualité de l'enseignement, la Banque appelait l'attention sur des réformes visant notamment à améliorer les compétences des professeurs et la qualité de leur enseignement, l'utilité pratique des programmes, l'évaluation et la sélection des étudiants, ainsi que le nombre et la qualité des bibliothèques, des ordinateurs et du matériel'. Tout en mettant essentiellement l'accent sur le mouvement de réforme du financement et de la gestion de l'enseignement supérieur, le présent document ne saurait passer sous silence les problèmes de qualité de l'instruction et des professeurs. En effet, les responsables de l'élaboration des politiques considèrent de plus en plus que la nécessité d'accroître la productivité - qui est sans doute au coeur de la réforme - exige que l'on s'attache à la fois aux moyens employés (coûts) et aux résultats obtenus (qualité de l'enseignement et du savoir). Du point de vue de la productivité de l'enseignement, par exemple, les principaux problèmes de l'enseignement supérieur ne tiennent pas tant au niveau excessif des coûts qu'à l'insuffisance de la diffusion du savoir?. La réforme visant à 8 Banque mondiale L'enseignement supérieur: les leçons de l'expérience, pp. 66 à 78. 9 D. Bruce Johnstone, Learning Productivity: an Imperative for American Higher Education. Albany : The State University of New York, 1992. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 6 renforcer la productivité demande donc que l'accent soit mis sur les éléments suivants : a) un enseignement efficace, notamment de bonnes techniques pédagogiques, de même que des moyens appropriés tels que bibliothèques, laboratoires, matériel scientifique, ordinateurs et accès à Internet; b) un programme approprié, au contenu intellectuellement stimulant, qui soit d'actualité et corresponde à la mission de l'établissement; c) une diffusion effective du savoir, notamment des délais appropriés pour le travail des étudiants, et une excellente capacité de concentration; d) une structure efficace de gestion et d'administration. Tous ces éléments ont de profondes incidences sur la réduction des taux de redoublement et la durée moyenne d'obtention d'un diplôme, et aboutissent à des économies appréciables pouvant être consacrées à l'amélioration de la qualité. De tels efforts visant à renforcer l'efficacité, à maîtriser les coûts et à créer des ressources peuvent aider considérablement les pays en développement à résoudre leurs problèmes de financement et de qualité. 3. Tendances et réformes dans le domaine du financement et de la gestion Compte tenu de ce qui précède, trois grandes catégories de réformes se sont dégagées durant les 10 à 20 dernières années dans des pays extrêmement différents sur le plan politique, culturel, économique et idéologique : 3.1) renforcement des recettes de l'État par des apports extérieurs non publics ; 3.2) réforme du financement par le secteur public; 3.3) transformation radicale (restructuration) des universités et autres établissements supérieurs. On trouvera ci-après des exemples de réformes correspondant à ces trois catégories, dont certaines paraissent difficiles à appliquer. 3.1 Renforcement des recettes de l'État par des apports non publics On complète les recettes de l'État par des ressources non publiques en faisant prendre en charge le coût de l'enseignement supérieur non plus par le contribuable ou le citoyen ordinaire, mais par les parents et les étudiants en particulier -mais aussi par les mécènes et les acheteurs de services fournis par les universités. Lorsque l'État fait payer les études, il doit mettre en place un système parallèle d'aide financière afin de maintenir l'accessibilité à l'enseignement et l'équité de celui-ci. Les cinq principaux moyens de compléter les ressources et de modifier le schéma de participation aux coûts sont les suivants: a) percevoir des frais d'études, ou les augmenter sensiblement, le cas échéant, pour qu'ils se rapprochent au maximum du coût intégral, dans le cas des secteurs de l'enseignement supérieur jusqu'ici subventionnés en partie ou en totalité par l'État; b) octroyer des bourses et des prêts en fonction des ressources des candidats ; c) encourager l'enseignement supérieur privé et essentiellement payant; d) promouvoir les activités productives du corps enseignant et des universités ; et encourager les mécènes à accorder des donations, à financer directement des activités et à fournir des bourses. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 7 On trouvera ci-dessous une matrice de diversification des ressources' qui résume les différentes stratégies que peut appliquer un établissement d'enseignement supérieur. Certains éléments de cette matrice seront examinés plus loin en détail. Matrice de diversification des ressources" État Étudiants Entreprises Industrial Coopération (contribuables) ou parents servicios internationale 1. Contributions directes des établissements X 2. Contributions indirectes sous forme d'aide X fmancière ou de prêts bonifiés 3. Frais d'études 3.1 Programmes débouchant sur un diplôme X 3.2 Programmes ne débouchant pas sur un diplôme X X 4. Prêts aux étudiants et taxes prélevées auprès des diplômés 4.1 Avec subvention X X X 4.2 Sans subvention X 5. Activités productives 5.1 Services 5.1.1 Services consultatifs X X X 5.1.2 Recherche X X X 5.1.3 Essais en laboratoire X X 5.2 Production de biens 5.2.1 Produits agricoles X 5.2.2 Produits industriels X 5.3 Location de terrains et installations X X 6. Donations 6.1 directes X X X 6.2 indirectes (loterie) X Examinons maintenant certains points importants: 3.1.1. Droits de scolarité. Un nombre croissant de pays en développement ont transféré les coûts supportés par les contribuables aux parents et étudiants sous forme de droits de scolarité -pratique suivie depuis des décennies par plusieurs pays industrialisés et membres de l'OCDE. Par exemple, l'Australie fait payer des droits différenciés 10 Jamil Salmi et Gabrielena Alcala (1998) Opciones para reformar elfinanciamiento de la enseñanza superior. Cuadernos del CENDES (Centro de Estudios de Desarrollo, Universidad Central de Venezuela). NO 37, janvier-avril. I1 Matrice adaptée de Jamil Salmi et Gabrielena Alcala (1998) Opciones para reformar elfinanciamiento de la enseianza superior. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur g (3 300 dollars pour les sciences sociales, 4 700 dollars pour les sciences et la gestion et 5 500 dollars pour la santé); les établissements néo-zélandais perçoivent en moyenne des droits de 2 300 dollars ; les Pays-Bas ont fixé des droits de durée limitée qui se situent entre 2 250 et 3 150 dollars2. Tandis que les droits de scolarité existent depuis longtemps aux États-Unis aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, cette pratique n'existe généralement pas dans l'enseignement supérieur en Europe. Le Royaume-Uni vient de décider de percevoir des droits de scolarité (d'un montant maximum de 1 000 livres) proportionnels aux ressources des étudiants (il est à noter que cette mesure, proposée par une commission du Parti conservateur, est mise en oeuvre par un gouvernement travailliste, traditionnellement opposé à toute forme d'enseignement payant). En Afrique, on semble avoir largement reconnu qu'il était nécessaire et rationnel de faire payer des droits de scolarité et d'essayer de recouvrer presque intégralement les frais de subsistance". Toutefois, l'application de ces mesures a généralement été lente, sporadique et inégale, bien que Blair ait noté des progrès au Kenya et en Zambie à la fin des années 80 et au début des années 90. Saint (1992)" a étudié en détail la nécessité et la manière de diversifier les ressources dans les universités africaines. L'importance de faire payer les utilisateurs devient évidente si l'on considère le cas de la Tunisie, qui applique un système dominé par les établissements publics d'enseignement supérieur et fait payer des droits tout à fait symboliques. Les utilisateurs participent au coût de leur éducation à raison de moins de 1 %, ce qui crée un système régressif où les groupes au revenu le plus élevé bénéficient le plus de l'argent des contribuables". En Amérique latine, le seul pays qui recouvre auprès des étudiants une grande partie des frais d'études est le Chili, où le gouvernement a lancé en 1981 une série de réformes structurelles et financières de grande envergure. Les établissements publics ont commencé à percevoir des frais d'études, et le nombre de collèges privés qui les ont imités a considérablement augmenté. Dans le reste du continent, toutefois, la quasi-totalité des établissements publics d'enseignement supérieur continuent d'être gratuits. En Argentine, aux termes de la loi de 1995 sur l'enseignement supérieur, la décision revient aux universités. La grande majorité des étudiants suivent gratuitement les cours, mais dans certaines universités, les études de troisième cycle sont payantes. Dans le nord du Mexique, le recteur de l'Université de Sonora s'est employé en 1993 à rechercher l'accord des enseignants et des étudiants afin que ces derniers apportent une petite contribution aux frais. Contrairement aux autres universités publiques, en 12 Alan Wagner (l 998) Costs andfinancing oftertiary education: OECD trends and new perspectives. Document présenté à la Session de formation. Banque mondiale, Washington, 22 juin 1998. 13 Robert D. D. Blair (1992) Financial Diversification and Income Generation in African Universities. Banque mondiale, Note technique, n0 2 du Département technique, Région Afrique. 14 Saint W. S. (1 992) Les universités en Afrique : Pour une stratégie de stabilisation et de revitalisation. Banque mondiale, Washington. 15 Benoît Millot (1997) Tunisie - l'enseignement supérieur: un enjeu d'avenir. Groupe du développement humain, Région Moyen-Orient et Afrique du Nord, Banque mondiale, Washington. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 9 particulier l'Université nationale autonome du Mexique, qui se sont vigoureusement opposées au principe d'une participation aux coûts, on est parvenu, à l'Université de Sonora, à un accord quant au principe d'une contribution directe des étudiants pour dégager des ressources supplémentaires qui seraient destinées à améliorer la qualité de l'enseignement. Depuis 1994, les étudiants versent à cet effet environ 300 dollars par an. Une commission paritaire rassemblant les enseignants et les étudiants administre les fonds qui servent à moderniser les salles d'informatique et à acheter des manuels et des revues scientifiques. Une affiche diffuse chaque année des informations sur l'utilisation qui est faite des sommes recueillies16. Les pays en transition s'ouvrent également aux forces du marché et sont en proie à des crises similaires en ce qui concerne les déficits financiers de l'enseignement supérieur et la diversification des ressources. La Russie et la plupart des autres pays de l'ex-bloc soviétique sont empêchés par leurs constitutions de faire payer les études, mais ils arrivent néanmoins à trouver des failles dans le règlement. En Russie, la loi de 1992 sur l'enseignement supérieur stipulait que des frais d'études ne pouvaient être imposés aux termes de la constitution qu'aux étudiants de première année entrés sur concours dans les limites du quota des étudiants « régulièrement admis ». Toutefois, le paiement de droits de scolarité avait été approuvé depuis un certain temps pour les personnes morales, mais non pour les personnes physiques. Un décret officiel a autorisé en avril 1994 les universités à faire payer les personnes physiques à condition que les limites du quota soient respectées. En 1994-95, les universités (publiques) russes comptaient 46 000 étudiants payants, soit 9,6 % du total des nouveaux inscrits". La porte est manifestement ouverte. En Pologne, la Conférence des recteurs d'université aurait « mobilisé le parlement pour qu'il interprète la nouvelle constitution de manière à légaliser les droits de scolarité ». Comme en Russie, la constitution stipule que l'enseignement supérieur est « gratuit », mais une clause autorise la perception de droits pour les étudiants qui ne sont pas régulièrement admis. L'Université de Varsovie a déclaré, en 1997, qu'elle couvrait près de 12 % de son budget annuel en classant 40 % de ses effectifs comme étudiants « du soir » ou « auditeurs libres », ce qui lui permettait de les faire payer's. La question semble être, en Pologne comme en Russie, de savoir non pas si la perception de droits de scolarité ou la participation aux coûts est « bonne » et contribue à l'efficacité ou à l'équité, mais quand les droits de scolarité seront officiellement reconnus et perçus avec un certain degré d'ouverture et d'impartialité en étant accompagnés de mesures judicieuses d'aide financière. Recouvrement des coûts en Hongrie après la libéralisation 16 Jamil Salmi (1998) Strategy for Higher Education Development in Latin America: Executive Summary. Banque mondiale, Washington, 17 Bain, Olga (1997) « Cost of Higher Education to Students and Parents in Russia: Tuition Policy Issues » [document non publié]. 18 Burton Bollag « Poland Considers whether Universities Should have the Right to Charge Tuition.» The Chronicle ofHigher Education, 5 décembre 1997. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 10 Au moment où la Hongrie optait pour la libéralisation économique, l'enseignement supérieur s'est heurté aux problèmes importants que sont l'inadaptation à l'économie de marché, l'inefficacité et l'inégalité du fait que le secteur public finançait tous les coûts et que les bénéficiaires réels n'y contribuaient guère19. Par exemple, en 1993, les dépenses publiques d'enseignement supérieur par étudiant représentaient 86 % du PIB par habitant, contre 45 % en moyenne dans les pays de l'OCDE et 30 % en Allemagne. Il fallait utiliser plus efficacement ces dépenses et transférer dans la mesure du possible les coûts aux bénéficiaires privés. Par conséquent, en 1995, les établissements publics d'enseignement supérieur ont perçu d'une manière générale des droits de scolarité de 2 000 forint par mois et par étudiant à temps complet. Un cinquième des effectifs bénéficient d'une dérogation partielle ou totale suivant leur mérite ou leur situation financière. Les étudiants à temps partiel paient des frais supplémentaires allant jusqu'à 8 000 forint par mois. Les ressources provenant des frais d'études ont atteint 7 milliards de forint, soit 20 % des fonds de l'enseignement supérieur et environ 7,5 % des dépenses du secteur. La Chine a appliqué dans toutes les universités le principe des études payantes en déclarant que cela est maintenant conforme à l'idéologie nouvelle d'ouverture au marché du communisme chinois20. À partir de la fin des années 80, les universités ont été autorisées à faire payer les étudiants admis « en dehors du plan d'État », c'est-à-dire ceux qui étaient envoyés par les entreprises, qui finançaient eux-mêmes leurs études ou qui avaient obtenu une note juste au-dessous de la moyenne aux examens d'entrée comme étudiants réguliers. En 1994, la loi a été modifiée afin de préparer les étudiants et les familles aux études payantes à compter de 1998-99, les frais étant fixés à 1 300 yuan (environ 888 dollars), montant apparemment modeste mais qui correspond à peu près à ce qui est versé en moyenne aux universités publiques des États-Unis si l'on tient compte du pourcentage des coûts de fonctionnement à recouvrer (environ 20 %) et du revenu médian d'une famille chinoise. 3.1.2. Bourses et prêts. On commence maintenant à accorder des aides financières et des prêts en fonction des ressources des étudiants afin de maintenir l'accessibilité à l'enseignement face aux frais croissants que doivent supporter les étudiants et les familles sous forme de droits de scolarité. Étant donné qu'aucun pays ne semble vouloir ou pouvoir, sur le plan politique, transférer ces coûts aux étudiants et aux familles sans prendre certaines mesures visant à préserver l'accessibilité et l'équité, l'assistance financière sous forme de bourses et de prêts s'inscrit maintenant dans le cadre de la réforme visant à mobiliser des 19 Fredrick L. Golladay, Ilona E. Szemzo (1998) Higher Education Reform Project: Republic ofHungary, Rapport d'évaluation, Service Développement humain, Région Europe et Asie centrale, Rapport no 16536-HU, pp. 5 à 7. 20 Voir Central Educational Science Institute (1990) Education in contemporary China, p. 72. Voir également D. Bruce Johnstone (1996), « Some Principles of Tuition, Fees, and Student Financial Assistance Applicable to Chinese Higher Education », State University of New York at Buffalo [document non publié]. 21 Banque mondiale, China Higher Education Reform. Rapport no 15573-CHA, Département pour la Chine et la Mongolie, pp. 53 à 56. Voir également Hong Shen, « Tuition Reform in Chinese Universities: From « State Dominance » to « Cost Sharing ». Document présenté à la Réunion annuelle de la Comparative and International Education Society, Buffalo, NY, 19-22 mars 1998. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur il ressources supplémentaires. Dans la mesure où les coûts doivent être transférés des contribuables aux parents, il faut parvenir à évaluer les « besoins » ou les « moyens » des familles, ce qui n'est pas facile dans la plupart des pays en développement. Un autre moyen de recouvrer les coûts est de faire porter l'effort sur les étudiants sous forme de prêts ou de taxes sur les diplômés, que l'étudiant rembourse lorsqu'il trouve un emploi et devient productif. Bien que des prêts soient accordés aux étudiants dans un nombre croissant de pays, ils ne parviennent pas dans tous les cas à transférer les coûts de l'État (ou des contribuables) aux étudiants. Le succès dépend des taux d'intérêt, de la période de remboursement, du taux de recouvrement (c'est-à-dire de la fréquence des défauts de paiement) et des frais bancaires. Les prêts qui sont « généralement disponibles » sans garants (d'où la fréquence des défauts de paiement), à faible taux d'intérêt et à longue échéance ne permettent que de recouvrer de très faibles parties des sommes initialement prêtées". De tels systèmes ne parviennent généralement pas à transférer aux étudiants une partie importante des dépenses de l'État ou des contribuables. Tilak a examiné les avantages et les inconvénients des prêts aux étudiants dans un pays en développement comme l'Inde. 22 Voir Adrian Ziderman et Doublas Albrecht (1995) Financing Higher Education in Developing Countries. pp. 62 à 90. 23 Tilak, J. B. G. (1992) « Student loans in financing higher education in India ». Higher Education vol. 23(4), pp. 389 à 404. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 12 Tendance croissante à accorder des prêts aux étudiants Au cours des dernières années, la Banque mondiale a appuyé des projets de prêt aux étudiants dans plusieurs pays. C'est ainsi qu'en 1992, elle a signé un accord de prêt pour aider la Fondation vénézuélienne de bourses d'études (Fundayacucho) à se transformer en établissement de prêt aux étudiants. En 1996, un deuxième projet a été conclu à la Jamaïque et, en 1998, un autre encore a été négocié au Mexique. En 1997, un programme national de garantie des prêts aux étudiants a été mis au point en Hongrie afin de promouvoir la diversification des ressources et l'autonomie financière et de rendre plus équitable l'enseignement supérieur. Deux des plus grandes banques commerciales se sont déclarées disposées à assurer l'octroi et le service de prêts à l'éducation, des organismes semi-privés et autonomes garantissant les remboursements. Pour que le système marche, il reste toutefois à arrêter les mécanismes et les détails nécessaires concernant l'évaluation des besoins des étudiants, la sélection, les remboursements, etc. Le gouvernement mexicain vise à long terme non seulement à améliorer l'accès à l'enseignement supérieur, mais aussi à accroître dans la mesure voulue les taux d'inscription. Il tient beaucoup, dans ce contexte, à augmenter le financement axé sur la demande - c'est-à-dire à accorder des financements aux étudiants plutôt qu'aux établissements-, à améliorer l'accès à l'enseignement supérieur, en particulier pour les étudiants qualifiés mais impécunieux, et à créer des établissements de prêts aux étudiants plus efficaces et financièrement viables2. En Chine, des systèmes de prêt aux étudiants ont été élaborés dans le cadre des aides mises en place à la suite de l'adoption du principe de l'enseignement payant pour toutes les universités publiques en 1997. Les étudiants sont maintenant tenus de prendre en charge de 10 à 25 % des coûts unitaires. Plusieurs universités assurent des prêts sans intérêts financés par l'État et les pouvoirs locaux afin d'aider les étudiants à couvrir leurs frais de subsistance. Certaines difficultés existent toutefois, par exemple la réticence traditionnelle à emprunter, l'insolvabilité des étudiants après l'obtention de leur diplôme, la pénurie de fonds, etc. Les pays en développement se heurtent à d'énormes difficultés lorsqu'ils veulent améliorer l'efficacité et la viabilité des programmes actuels de prêts aux étudiants et en élargir la portée. Malgré les carences de nombreux systèmes, l'expérience constructive de pays tels que la Colombie et la République dominicaine montre qu'il est possible de concevoir et d'administrer des programmes financièrement viables, à condition d'appliquer avec succès des systèmes efficaces de recouvrement et des taux d'intérêt appropriés et de tenir compte des niveaux de revenu. 24 Jamil Salmi (1998) International experiences with student loan schemes: The World Bank perspective [document non publié], Banque mondiale, Washington. 25 Fredrick L. Golladay et Ilona E. Szemzo (1998) Higher Education Reform Project: Republic of Hungary. Rapport d'évaluation. Service Développement humain, Région Europe et Asie centrale. Rapport no 16536-HU, pp. 5 à 7. 26 Jamil Salmi (1997) Mexico-Higher Education Financing Project. Banque mondiale, Washington. Rapport no PIC 5094. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 13 Le simple fait de faire payer des droits de scolarité et d'accorder des bourses et des prêts ne garantit pas que l'État rentrera dans ses frais ni que les étudiants jouiront de l'égalité d'accès à l'enseignement. Chaque réforme doit tenir compte du transfert final et réel des coûts ainsi que des conséquences de ce transfert (en particulier au niveau des taux d'inscription). Par exemple, le Viet Nam a adopté en 1989 le principe de l'enseignement supérieur payant, les frais à la charge des étudiants variant davantage selon les domaines d'étude et les établissements fréquentés qu'en fonction du revenu familial". Le double but poursuivi était sans doute, d'une part, de moduler les effectifs par secteur et domaine d'étude et de porter au maximum la contribution des étudiants et des parents, et, d'autre part, d'assurer la plus grande accessibilité possible à l'enseignement. Un système de prêt a été mis en place en 1994 et des bourses sont également accordées - mais là encore les étudiants défavorisés posent un problème. Un système de ce genre exige par conséquent un mécanisme de coordination transparent et équitable, qui permette de moduler effectivement l'assistance financière en fonction du revenu familial. On peut également améliorer les mécanismes de prêt en prenant notamment les mesures suivantes : i) appliquer des taux d'intérêt plus proches de ceux du marché - comme l'a proposé l'Allemagne pour la partie remboursable des bourses accordées au titre de la Loi fédérale sur les bourses d'études (BAfôG) ; ii) améliorer le recouvrement des prêts en rendant partiellement responsables du remboursement le prêteur, l'université et l'organisme chargé du service de la dette ; iii) assurer le recouvrement par un système de retenue à la source - comme le fait le Ghana pour le régime de sécurité sociale ; iv) faire appel à des collecteurs privés comme au Venezuela et à la Jamaïque ; v) remplacer les prêts qui doivent être remboursés individuellement (de la manière habituelle ou en fonction du revenu) par une taxe sur les diplômés, système suivant lequel l'étudiant est tenu de verser une surtaxe sur son revenu quel que soit le montant de sa dette. Dans ce dernier cas, toutefois, l'État ne voit pas diminuer son obligation actuelle d'appuyer financièrement les universités ou les étudiants, même s'il peut s'attendre à percevoir à l'avenir des surtaxes sur le revenu, dont la valeur actuelle est extrêmement incertaine mais qui sont dans l'ensemble (potentiellement) considérables. Les étudiants continuent à percevoir leurs subventions habituelles, sous forme de frais d'études peu élevés ou nuls et éventuellement d'indemnités de subsistance. Ils s'engagent toutefois à verser des impôts sur le revenu plus importants que s'ils n'avaient pas fait d'études supérieures. Il en résulte un déplacement de la charge financière dans l'avenir, mais sans que soit réduite dans l'immédiat la nécessité pour l'État de ponctionner les contribuables ou d'emprunter des fonds. Jusqu'à présent, aucun pays n'a réussi à imposer véritablement les diplômés - mais le système australien de contribution à l'enseignement supérieur est proche de cette formule. Son applicabilité aux pays en développement dépend largement de la confiance que l'on peut accorder à un système quelconque d'imposition du revenu. En présence d'un système stable, une taxe sur les diplômés politiquement acceptable pourrait aider l'État à 27 Maureen Woodhall (1996) Vietnam higher education project: Managing resources and finance ofhigher education. Groupe de travail no 2, Rapport 111. Banque mondiale, Washington. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 14 financer son déficit budgétaire sur les marchés financiers mondiaux, les futures obligations fiscales des diplômés servant en quelque sorte de garanties. A la fin des années 90, on ne sait toujours pas dans quelle mesure les prêts et les taxes sur les diplômés peuvent constituer un ballon d'oxygène pour les universités et le Trésor public des pays en développement. De nombreux systèmes de prêt ont échoué, et il n'est pas évident que des prêts importants et généralement accessibles puissent effectivement transférer aux étudiants la charge des contribuables. Néanmoins, à un niveau plus modeste, il restera important pour les pays d'établir certaines formes de recouvrement différé des coûts, en partie pour réaliser l'objectif plus général consistant à obtenir, par diverses combinaisons de politiques et de programmes, que les étudiants et les familles participent davantage aux frais. 3.1.3 Secteur privé. Le secteur privé a joué un rôle important dans l'enseignement supérieur en Asie et en Amérique latine, et de façon croissante dans l'ex-Union soviétique et en Europe orientale, voire dans certaines parties de l'Afrique et du Moyen-Orient. Nulle part ailleurs en Europe centrale et orientale l'enseignement privé ne s'est développé aussi rapidement qu'en Roumanie, où il était inexistant avant 1989. Une loi promulguée en 1990 a permis de créer 70 établissements non gouvernementaux et privés, qui se réclament presque tous du statut d'université et accueillent un tiers de l'effectif total de l'enseignement supérieur". Les effectifs de l'enseignement supérieur privé se sont gonflés très rapidement en Amérique latine, puisqu'ils ont plus que doublé durant les 15 dernières années, ce qui traduit non seulement une croissance de la demande d'enseignement supérieur et de diversification, mais aussi une certaine déception à l'égard des universités publiques due aux troubles politiques et à la qualité médiocre de l'enseignement dispensé. En Argentine, le nombre d'étudiants dans le secteur privé a augmenté de 76 % entre 1985 et 199429. La Chine et l'Inde autorisent et encouragent aussi la création d'établissements privés afin de répondre à une demande croissante et différenciée. Au Kenya, la fonction des établissements privés consiste davantage à renforcer la qualité de l'enseignement qu'à absorber la demande excédentaire". 28 Maurice X. Boissiere (1996) Memorandum and recommendation ofthe President ofthe IBRD to the Executive Directors on a proposed loan to Romania for a reform of higher education and research project. Banque mondiale, Washington. NO P6882-RO. 29 Carlos Marquis (1998) Recent changes in Argentine university policy. Document présenté à la Session de formation, Banque mondiale, Washington, 22 juin 1998. 30 Thomas Owen Eisemon (1992) Private initiatives and traditions of state control in higher education in sub- Saharan Africa. Série documents de référence de la Division de l'éducation et de l'emploi. Département de la population et des ressources humaines. Banque mondiale, Washington. Le financement et la gestion de 1'enseignement supérieur 15 Le rôle des établissements privés d'enseignement supérieur au Chili Avant 1981, le Chili comptait moins de dix établissements publics d'enseignement supérieur. Cette année-là, l'État a lancé toute une série de réformes structurelles et financières par lesquelles l'enseignement supérieur a été classé en universités, instituts professionnels et centres de formation. Le nombre de collèges privés payants a augmenté, mais aussi plusieurs établissements publics ont commencé à faire payer des frais de scolarité. En 1990, les institutions privées absorbaient, sans aucun financement public", 52,4 % de l'effectif total, et l'État ne couvrait que 27 % des coûts contre 100 % avant 1980. La multiplication des établissements privés a contribué à satisfaire la demande de plus en plus forte d'enseignement supérieur et à créer une certaine diversité - sans frais pour l'État. Mais ce phénomène s'est aussi accompagné d'inconvénients majeurs tels que le niveau élevé des frais d'études, la baisse de la qualité de l'enseignement dispensé et l'augmentation incontrôlée des effectifs. Une nouvelle réforme est maintenant proposée2 afin de remédier à ces problèmes. Ses principaux objectifs consistent à renforcer la qualité et l'utilité pratique de l'enseignement, à élaborer des politiques financières et des cadres réglementaires, et à ouvrir davantage les portes aux étudiants défavorisés grâce à des prêts mieux ciblés et à un système de bourses amélioré pour couvrir une plus large gamme de spécialisations. Notons ici que l'essentiel est d'utiliser la privatisation pour accroître l'accessibilité lorsque cela est nécessaire et avantageux. De même, l'État devrait continuer à fournir des services de réglementation à tous les établissements d'enseignement. On reproche beaucoup aux établissements privés de dispenser un enseignement de médiocre qualité et de ne pas pouvoir survivre à long terme uniquement avec les droits de scolarité qu'ils font payer et sans d'importantes subventions publiques directes ou indirectes. Pour ce qui est de la viabilité financière, un rapport intérimaire, établi par une équipe de l'Université de Manchester (Royaume-Uni) à l'intention de la Société financière internationale et de la Banque mondiale, a signalé à titre préliminaire « qu'il existe dans les pays en développement des écoles, des collèges et des universités qui sont rentables (ou qui dégagent des excédents) et qui sont entièrement (ou presque) financés par les droits de scolarité modestes payés par les étudiants »'. Il est certain que l'enseignement supérieur privé est très inégal, mais il n'est pas évident que cela soit nécessairement synonyme de qualité médiocre. En fait, on ne sait pas au juste quels critères devraient être employés pourjuger de la qualité d'un établissement ou d'un programme, ni comment l'efficacité et la productivité devraient entrer en jeu. Dans son 31 Laurence Wolff et Douglas Albrecht (1992) (directeurs de publication) Higher education reform in Chile, Brazil, and Venezuela: Towards a redefinition ofthe role ofthe state. Division des ressources humaines, Département technique. Région Amérique latine et Caraïbes. Banque mondiale. 32 Lauritz B. Holm-Nielsen (1998) Chile: Higher Education Reform Project. PAD. Banque mondiale, Washington. 33 Institute of Economic Affairs and Nord Anglia Education PLC, University of Manchester, « Investment Opportunities in Developing Countries », Rapport intérimaire à la Société financière internationale, 24 novembre 1997, p. 4. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 16 document sur une stratégie pour l'enseignement supérieur en Amérique latine et les Caraïbes (partie du monde où l'enseignement supérieur privé a probablement absorbé la demande (depuis plus longtemps qu'ailleurs), la Banque interaméricaine de développement a constaté en 1997 qu'il n'y avait guère de différence entre le secteur public et le secteur privé du point de vue de la qualité de l'enseignement dispensé, sauf au niveau le plus élevé, où le secteur public prédomine. Le rapport souligne également ce qui suit : Même les établissements médiocres ou faibles sur le plan de la qualité de l'enseignement se sont modernisés à certains égards : différenciation entre les établissements, financement privé, amélioration considérable de l'efficacité mesurée par les moyens habituels, limitation des conflits politiques, nouvelles formes de choix et de responsabilité, et ouverture sur le marché du travail plus grande que dans la plupart des établissements publics". Il convient de mentionner, à cet égard, un point important, à savoir que la qualité est déterminée non pas par le caractère « public » ou « privé » d'un établissement - distinction souvent très floue -, mais par le fait que cet établissement atteint ou non, de manière économique, les objectifs qu'il s'est fixés ou qui l'ont été par une autorité publique compétente. Par conséquent, l'État aura pour rôle de rendre ces critères transparents et de mettre en place des mécanismes permettant de les évaluer, d'homologuer de nouveaux établissements et d'assurer le maintien de la qualité. Les mécanismes d'homologation peuvent être institués par un organisme public, par une entité autonome créée par les établissements d'enseignement supérieur eux-mêmes ou par les spécialistes de divers secteurs de l'économie. Par exemple, la Banque mondiale aide à mettre au point divers mécanismes et projets d'homologation dans des pays tels que l'Argentine, la Roumanie et le Chili. 3.1.4 Activités productives. L'enseignement supérieur se diversifie de plus en plus, et plusieurs établissements de formation professionnelle ont forgé de solides liens de partenariat avec des employeurs potentiels, ce qui conduit entre autres à des transferts de technologie, à de doubles systèmes de formation et à des programmes d'apprentissage. De même, les universités sont sans conteste davantage orientées vers les entreprises qu'elles ne l'étaient il y a quelques années seulement. En Russie et dans les nouveaux États indépendants de l'ex-Union soviétique, les activités productives orientées vers les entreprises comprennent une formation dans le domaine linguistique et de nouveaux secteurs tels que les systèmes informatiques et de gestion que demandent les nouveaux et futurs hommes d'affaires. En Russie et en Chine, les activités de ce genre dans les établissements d'enseignement s'étendent aux usines, aux exploitations agricoles et aux entreprises contrôlées et exploitées par ces établissements pour l'État ou créées dans le cadre de coentreprises à participation étrangère ou avec de nouveaux capitalistes locaux. Tandis que l'unité de production était auparavant centrée sur la formation offerte, les nouvelles entreprises visent apparemment davantage à assurer des recettes supplémentaires. 34 Banque interaméricaine de développement, Département du développement durable, « Higher Education in Latin America and the Caribbean: A Strategy Paper », sd [1997], p. 6. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 17 Les universités mexicaines se rendent de plus en plus compte que l'État n'augmentera pas ses subventions d'exploitation ordinaires et qu'elles devront donc entreprendre des activités productives afin d'obtenir un surcroît de revenu et associer les enseignants et les étudiants à cet effort. Certaines facultés commencent à créer des ressources propres en vendant des services, des cours spécialisés, etc. Ce phénomène s'étend même par effet d'imitation à des disciplines où cela aurait été auparavant impensable. Les facultés y trouvent leur intérêt du fait qu'elles conservent 80 % des recettes d'origine locale. Elles s'emploient également à élaborer des règles concernant les subventions croisées de manière que celles qui ont le plus faible potentiel d'activité productive ne soient pas négligées". De même, en Argentine, les ressources générées par les universités elles-mêmes sont passées entre 1991 et 1996 de 7 à 14 % du budget global. C'est là un fait important étant donné que, durant cette période, les financements publics ont augmenté de 52 %. On constate ainsi que les universités argentines se sont efforcées d'accroître leur budget en générant leurs propres ressources". Certaines universités africaines commencent aussi à prendre des initiatives analogues. L'Université de Zambie et l'Université Eduardo Mondlane au Mozambique ont pu sensiblement renforcer leurs capacités, leurs moyens d'information et leur revenu en établissant des liens avec Internet par l'intermédiaire des réseaux électroniques locaux qui vendent des abonnements à des entreprises, des organisations et des particuliers en dehors des universités. Les initiatives des universités du Ghana et de Nsukka ont été particulièrement heureuses". L'Université du Ghana a déclaré en 1991 un profit de 9 % sur un revenu total de 22 700 dollars. Les principes directeurs et les méthodes d'exploitation de son centre de services consultatifs sont excellents et pourraient servir de modèle à d'autres universités. L'Université de Nsukka a fait état d'un bénéfice de 35 238 dollars grâce aux services consultatifs fournis entre 1982 et 1991, pour un chiffre d'affaires de 90 398 dollars ; les consultants reçoivent 50 % des bénéfices et l'université et la faculté concernée, 30 et 20 % respectivement. Certains rapports d'enquête ont conclu que les activités consultatives étaient minimales et concentrées surtout sur un petit nombre de domaines mais, à y regarder de plus près, on obtient une image très différente : un assez grand nombre d'enseignants ont des activités de consultants et n'appliquent pas de règles ou de critères spécifiques. Par conséquent, les services consultatifs peuvent se révéler avantageux, mais ils doivent aussi se plier à certaines directives. Étant donné la tendance à l'austérité financière et la nécessité de diversifier les sources de revenu, les activités productives au sein des universités apparaissent à la fois inévitables et indispensables. Elles présentent certes des inconvénients, mais elles offrent 35 Voir Rollin Kent (1998) Institutional reform in Mexican Higher Education: Conflict and renewal in three public universities. Etude technique, Banque interaméricaine de développement, Département du développement durable, Service Éducation. Washington, p. 17. 36 Carlos Marquis (1998) Recent changes in Argentine universitypolicy. 37 Blair, Robert D. D. (1992) Financial diversification and incone generation at African universities. Note technique no 2 AFTED. Département technique, Région Afrique. Banque mondiale. Washington. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 18 aussi plusieurs avantages : les établissements deviennent plus conscients du marché ; les étudiants reçoivent une formation pratique utile ; des liens de coopération et de partenariat sont créés avec des entreprises, susceptibles de jouer un rôle dans l'orientation des programmes, l'organisation de stages pratiques et de cours à temps partiel, etc., ce qui contribuera à renforcer la qualité de l'enseignement supérieur et les rentrées d'argent. On peut éliminer ou réduire au maximum la plupart des inconvénients et des risques liés aux activités productives en légalisant ces activités dans le secteur de l'enseignement supérieur des pays en développement et en adoptant des mesures de bonne gestion, de transparence, de réglementation et de discipline. Il faut toutefois procéder avec prudence et veiller à ne pas compromettre l'utilisation appropriée des ressources, l'enseignement et la recherche et les normes de responsabilité et d'intégrité du personnel, des facultés et des établissements. Dans les pays industrialisés de l'OCDE, il semble que les activités productives s'orientent davantage vers le concept naissant de services universitaires et servent de laboratoire pour l'enseignement et la recherche appliquée - bien qu'elles continuent pour l'essentiel à s'autofinancer et génèrent parfois des bénéfices. Après avoir étudié les aspects positifs et négatifs des activités productives des universités de Warwick (Angleterre), Twente (Pays-Bas), Strathclyde (Écosse), Joensuu (Finlande) et Chalmers University of Technology (Suède), Burton Clark arrive à la conclusion suivante : Les activités productives offrent un moyen de développer les établissements qui permet à ceux-ci de devenir autonomes comme ils l'entendent en diversifiant leurs revenus pour accroître leurs ressources financières, en obtenant des fonds qu'ils utilisent à leur guise et en devenant moins dépendants à l'égard de l'État; en mettant en place de nouvelles unités à l'extérieur des facultés traditionnelles afin d'instaurer un climat nouveau et de nouveaux modes de réflexion et de formation ; en persuadant les facultés traditionnelles qu'elles peuvent elles aussi devenir autonomes, recueillir des fonds, choisir des spécialisations viables et se comporter par ailleurs comme des entreprises ; en élaborant un ensemble de principes essentiels pour guider et rationaliser les changements structurels propres à renforcer les moyens d'intervention ; enfin, en mettant en place au niveau central une capacité de direction d'orientation permettant de faire les choix de grande portée qui aident à préciser la mission des établissements". 38 Burton R. Clark (1998) « The Entrepreneurial University: Demand and Response » Tertiary Education and Management, vol. 4, no 1, p. 14. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 19 Initiatives productives en Chine Les réformes en Chine ont donné plus d'autonomie aux établissements d'enseignement supérieur et leur ont permis de générer leurs propres ressources. En 1992, ces établissements assuraient eux-mêmes 14 % de leur revenu provenant de sources diverses, contre 4 % en 1978. À Shanghai, 50 % d'entre eux géraient en 1992 quelque 700 entreprises dont le chiffre d'affaires total s'élevait à 1 milliard de yuan. Pour l'ensemble du secteur de l'enseignement supérieur, la deuxième source (2,3 %) de revenu indépendant provient de cours de formation organisés à la demande des entreprises. Par exemple, la faculté de droit de l'Université de Beijing a gagné beaucoup d'argent en organisant, à l'intention des employés des entreprises d'État et des coentreprises, des stages de formation de courte durée sur les nombreuses lois récemment adoptées. En 1992, les travaux de recherche et les services consultatifs représentaient 1,3 % du revenu total. Les ressources provenant de la recherche dans les 36 grandes universités nationales se chiffraient à 1,12 milliard de yuan par an, tandis que les crédits affectés par l'État aux dépenses renouvelables s'élevaient à 1,17 milliard de yuan en 1993. Les universités peuvent maintenant facturer des frais généraux allant de 5 à 15 % suivant le type de recherche et la source des fonds39. 3.1.5 Mécénat. Le mécénat vient aussi compléter les apports de fonds publics à l'enseignement supérieur. De nombreux pays en développement tels que l'Inde, l'Argentine et la Chine ont une tradition dans ce domaine, mais les fonds sont destinés davantage aux oeuvres pieuses et charitables qu'au secteur de l'enseignement supérieur et aux étudiants. Il y a toutefois des exceptions: l'Université de Beijing, par exemple, a reçu de riches hommes d'affaires de Hong-Kong une somme de 10 millions de dollars pour construire la plus grande bibliothèque d'Asie. De plus, les gouvernements sont conscients de la nécessité d'accorder des réductions d'impôt, même au prix d'une diminution des recettes fiscales. Quoi qu'il en soit, la plupart des pays ne sauraient atteindre le niveau des donations faites par les mécènes des États-Unis à l'enseignement supérieur -environ 14,25 milliards de dollars en 1995-96, huit des 20 principaux bénéficiaires étant des universités publiques4". Le succès enregistré dans ce domaine exige une tradition de mécénat, ainsi qu'un traitement fiscal favorable qui reporte sur l'État une partie de la charge financière sous forme de manque à gagner. Cette tradition ne s'acquière pas aisément ni rapidement. Un pays qui fait des dons aux oeuvres religieuses ou aux nécessiteux n'appuie pas nécessairement des institutions telles que les universités publiques qui, dans la plupart des pays, sont encore censées dépendre de l'« État ». Par exemple, aux États-Unis, l'appui aux collèges et universités se limitait au secteur privé jusqu'aux années 70 environ, après quoi l'appui de l'État au financement des universités publiques a commencé à diminuer et les présidents de ces établissements ont découvert le mécénat. Il se peut toutefois qu'il faille 39 Hena Mukherjee (1997) China: Higher Education Reform, Monographie-pays de la Banque mondiale, Banque mondiale, Washington, Rapport 17138. 40 The Chronicle ofHigher Education, Almanac Issue, 44 : 1, 29 août 1997, p. 30. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 20 attendre des décennies avant que les établissements publics d'enseignement supérieur aient une masse critique d'anciens élèves ayant, d'une part, accepté l'idée de rendre une partie de l'appui reçu durant leurs études et, d'autre part, accumulé suffisamment d'argent pour faire des dons importants. Par ailleurs, avant de commencer à faire des bénéfices nets, il faut également des années et un investissement considérable pour mettre à jour les listes d'anciens élèves, de leurs associations et des bénévoles, ainsi que pour acquérir l'expérience nécessaire pour faire des appels de fonds. Par conséquent, les programmes de réforme n'omettent naturellement pas le mécénat comme source de fonds privés. Toutefois -même si quelques mécènes peuvent contribuer à ouvrir des universités privées de haute qualité susceptibles de servir de modèles de gestion et de compétence" -, il est peu probable que le mécénat joue, dans un avenir proche et dans la plupart des pays, surtout les pays en développement, un rôle majeur pour ce qui est de compléter les fonds accordés par l'État au secteur public de l'enseignement supérieur. Cela étant, dans la mesure où le mécénat peut être mis à contribution en bénéficiant d'avantages fiscaux, cette source offre un bon moyen d'obtenir des fonds supplémentaires. 3.2 Réforme du financement par le secteur public Le financement de la plus grande partie du secteur de l'enseignement supérieur restera largement tributaire des ressources de l'État. Même dans des pays tels que les États- Unis, où l'enseignement privé est très développé, les universités privées ou non reçoivent une aide des pouvoirs publics. Une grande partie de la réforme consiste à utiliser plus efficacement ces ressources, et deux éléments importants prennent à ce sujet un relief particulier : en premier lieu, la décentralisation budgétaire, c'est-à-dire la délégation de pouvoirs pour les engagements de dépenses, de l'administration centrale aux collectivités régionales et, finalement, aux établissements d'enseignement supérieur; en deuxième lieu, les réformes budgétaires, en particulier l'adoption de la budgétisation fondée sur les résultats et autres formes d'élaboration des budgets faisant appel aux incitations. 3.2.1. Délégation des pouvoirs dans le domaine de la gestion et des dépenses. Ce genre de décentralisation au niveau des provinces, des États d'une fédération, des Länder, des districts, etc., allant jusqu'aux systèmes et établissements d'enseignement supérieur eux- mêmes occupe une place de choix dans le mouvement de réforme. Tant que les acteurs connaissent les règles et que les procédures sont bien contrôlées, ce mécanisme peut être très efficace, mais la facilité avec laquelle la réforme peut être appliquée dépend des pays. Il ne s'agit pas simplement de relâcher ou d'affaiblir l'autorité de l'administration centrale. L'autonomie, la déréglementation et la privatisation n'assurent pas en soi une répartition optimale des tâches et des structures des établissements. La réduction du pouvoir de 1'État peut avoir pour conséquence de renforcer l'« isomorphisme » des établissements, c'est-à- dire la convergence de leurs types et de leurs missions qui va généralement dans le sens de 41 On peut citer comme exemple l'Université Bilkent en Turquie, fondée et appuyée par Ihsan Dogramaci, ou l'Université Charles à Budapest, fondée et appuyée par George Soros. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 21 l'université de recherche classique, plutôt que d'élargir comme il conviendrait les différences entre établissements. Elle peut avoir aussi pour résultat une différenciation bimodale : les établissements qui ont une assise financière stable (quelle qu'en soit la raison) s'orientent vers le modèle de l'université classique, tandis que les autres établissements deviennent de plus en plus sensibles au marché et voient diminuer leurs coûts de même que leur qualité- ce qui laisse entre ces deux catégories peu de place à un enseignement supérieur souple, rentable et de qualité. En bref, l'autonomie, la déréglementation et la privatisation ne sont pas incompatibles avec un Etat qui continue de jouer un rôle important dans le domaine du contrôle de la qualité et des grandes « orientations ». Pour la définition des objectifs généraux des établissements et l'approbation des nouveaux programmes conformément à ces objectifs, il convient de continuer à centraliser dans une très large mesure l'élaboration de certains principes régissant l'administration et la responsabilité des universités, ainsi que l'homologation des programmes et des diplômes, et de certaines formes d'évaluation, de responsabilité et d'autorité au niveau global. Les réformes budgétaires progressent, en particulier dans les pays de l'OCDE. A l'image de nombreux pays industrialisés (États-Unis, Royaume-Uni, Suède, Danemark, Pays-Bas, Belgique, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.), certains pays en développement mettent en place un système de budget « global ». A ce titre, un budget général est alloué à l'administration des établissements suivant un système donné (en fonction des résultats ou, plus traditionnellement, des effectifs), l'administration prenant ensuite toutes les décisions concernant la répartition des fonds. L'adoption de ce type de budget est considéré comme une « réforme » du fait que l'on suppose que les administrateurs des établissements eux- mêmes auront tendance, au moins dans des conditions idéales, à mieux répartir les ressources que des employés de ministères éloignés et peut-être peu au fait des réalités, ou que des hommes politiques soumis aux pressions de leur clientèle. Les mécanismes de financement fondés sur une formule offrent plusieurs avantages. Ils permettent de répartir les fonds plus rationnellement (et sans intervention d'ordre politique) entre les divers établissements d'enseignement supérieur et les diverses disciplines, de remédier aux principales lacunes du système, d'améliorer l'innovation et de réduire les coûts. Il ne faudrait cependant pas en conclure que des décisions internes, prises par le recteur ou le conseil d'une université, sont nécessairement meilleures au regard de l'intérêt général. Les décisions politiques des établissements -jusqu'aux recteurs qui font des promesses au corps enseignant pour se faire élire ou réélire -peuvent être aussi inefficaces, à courte vue, et intéressées que celles, en principe plus inopportunes, de fonctionnaires élus ou nommés. Le compromis le plus satisfaisant réside probablement dans une réforme qui transfère à l'établissement presque tous les pouvoirs décisionnels, mais qui permette par ailleurs de renforcer la direction de l'établissement pour lui permettre de mieux répondre à l'intérêt général - qui ne correspond pas forcément à celui du corps enseignant ou d'autres groupes politiquement puissants ; de conserver inscrites au budget fixé par l'État certaines activités de l'établissement qui répondent manifestement à l'intérêt général (mais peut-être pas à l'intérêt du corps enseignant, voire du recteur) ; enfin, d'insister sur les Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 22 principes de transparence et de responsabilité afin de réduire au maximum la méfiance et d'encourager dans une certaine mesure la prise de risques. Un élément tout à fait capital de la réforme du financement par le secteur public consiste à gérer efficacement les ressources au niveau des universités, ce qui peut être accompli grâce à des décisions judicieuses concernant le budget, l'emploi et la rémunération du personnel. 3.2.2. Réformes budgétaires. Il existe un moyen populaire de réforme qui s'appelle la « budgétisation fondée sur les résultats », qui suppose que les administrateurs des établissements (principalement les recteurs, présidents et doyens) agissent rationnellement et encouragent au maximum toutes les activités susceptibles de porter des fruits. Il convient de noter ici qu'il existe une différence subtile entre « financement» et « budgétisation » fondés sur les résultats, ces deux méthodes étant toutes deux employées pour le budget de l'État. « Le financement fondé sur les résultats relie directement des montants donnés aux résultats obtenus d'après des indicateurs spécifiques. Dans la budgétisation fondée sur les résultats, les gouvernants et les législateurs considèrent le bilan obtenu comme un facteur du financement global des établissements publics d'enseignement supérieur». Les partisans de ce type de budgétisation estiment que le « moteur » du budget classique - essentiellement un effectif équivalent plein temps par domaine et niveau d'étude -est une incitation inappropriée ou tout au moins insuffisante. La budgétisation fondée sur le nombre d'inscriptions peut conduire les établissements à accroître à tout prix les effectifs et à rechercher un maximum de temps de présence des étudiants au détriment de la qualité de l'enseignement et, pis encore, de l'assimilation des connaissances. Elle peut aboutir aussi à ce que l'accent soit mis uniquement sur les programmes qui sont les plus populaires ou les moins chers à enseigner. En particulier, si les candidats sont nombreux, le budget fondé sur les effectifs peut, semble-t-il, entraîner un nombre d'abandons excessif du fait que l'enseignement dispensé aux nouveaux étudiants est moins coûteux. D'un autre côté, la budgétisation fondée sur les résultats attire des fonds publics par l'application de critères autres que les effectifs, ou tout au moins qui s'y ajoutent. Ces critères peuvent être, par exemple, les diplômes conférés, en particulier dans des domaines spécifiques, la durée moyenne d'obtention des diplômes, les résultats obtenus par les diplômés à l'issue d'études hautement spécialisées, la capacité des enseignants à décrocher des bourses de recherche ou la réputation des enseignants parmi leurs collègues d'autres établissements. Toutefois, les tenants de ce système en viennent à constater que les établissements d'enseignement supérieur doivent concilier des objectifs multiples, difficilement mesurables- et parfois incompatibles. Par exemple, la maximisation de l'accessibilité ou de l'accumulation des connaissances, qui encouragerait probablement les universités à accepter certains étudiants prometteurs mais moins qualifiés, est incompatible avec celle des taux d'achèvement des études ou des résultats obtenus par les diplômés à l'issue d'études hautement spécialisées. 42 Joseph C. Burke et Andrea M. Serban (1997) Performance funding ofpublic higher education: Resuits should count. Public Higher Education Program, Institut Rockefeller. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 23 Le mouvement de réformes budgétaires dans les pays en développement tend à s'écarter des budgets négociés - où les budgets des universités sont fixés conformément à leur pouvoir politique réel ou virtuel -en faveur d'un système qui soit raisonnable et considéré comme équitable et transparent. On peut soutenir pour le moins que la réforme véritable - dans la mesure où il est nécessaire de modifier les procédures budgétaires -consisterait moins à perfectionner ou à rationaliser le système d'incitations qu'à faire cesser (ou à réduire sensiblement) la pratique des budgets négociés et à adopter un système budgétaire qui oblige les administrateurs à prendre la difficile décision de réaffecter les ressources au sein des établissements. Le mécanisme de financement fondé sur les résultats en Argentine La loi de 1995 sur l'enseignement supérieur a défini un vaste programme de réformes visant i) à accorder aux universités une autonomie totale en ce qui concerne leur administration, l'affectation de leurs ressources, la gestion du personnel et l'accès des étudiants - en leur offrant la possibilité de diversifier leurs ressources, ii) à établir un cadre commun pour les établissements privés et publics en créant la Comisión nacional de evaluación y acreditación universitaria, et iii) à améliorer la gestion des universités en renforçant la participation du corps enseignant. Dans le cadre de la réforme financière, le Secrétariat des politiques universitaires applique progressivement au budget traditionnellement négocié au Parlement des mécanismes fondés sur les résultats43. En 1997, 13 % du budget global de 1,5 milliard de dollars ont été répartis à l'aide du nouveau système : 20 millions l'ont été au moyen d'une formule de financement fondée sur le coût unitaire par étudiant dans chaque discipline ; 20 millions sont allés à un programme d'infrastructure afin de mettre en place de nouvelles capacités et d'effectuer des travaux de remise en état ; 70 millions ont été consacrés à des incitations salariales pour les professeurs faisant des recherches, 50 millions à des programmes de recherche et 6,8 millions à l'octroi de bourses. L'objectif est d'atteindre 40 % du budget d'ici à l'an 2000. De plus, un projet de la Banque mondiale appuie un Fonds d'amélioration de la qualité de l'enseignement (FOMEC) doté de 240 millions de dollars, qui constitue un fonds d'investissement concurrentiel et transparent destiné à financer l'amélioration de la qualité et de l'efficacité au niveau du premier et du deuxième cycles au moyen d'une assistance technique pour la modification des programmes, les visites de professeurs invités, l'octroi de bourses et le financement de matériel pédagogique, de laboratoires et de bibliothèques. Le FOMEC finance 70 % du coût total des projets, et 30 % sont couverts par les bénéfices des universités44. 43 William Experton (1998) Argentina: Higher Education Reform Project. Banque mondiale, Washington. 44 Carlos Marquis (1998) Recent changes in Argentine universitypolicy. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 24 Tandis que divers types de « budgétisation fondée sur les résultats » continueront sans aucun doute de faire partie de la réforme de l'enseignement supérieur, le véritable changement consistera peut-être à accepter trois principes, à savoir que i) les dirigeants des universités, le corps enseignant et les fonctionnaires sont tous, à leur manière, des « acteurs rationnels » qui répondent aux incitations ; ii) les « règles du jeu » concernant l'allocation de fonds publics constituent un système d'incitation puissant et extrêmement complexe qui exerce un impact différent sur les dirigeants des universités, le corps enseignant et les divers échelons administratifs nationaux ; iii) le meilleur moyen de faciliter les décisions difficiles à prendre en matière de programmes et d'allocation des ressources au niveau des établissements réside dans un ensemble de règles budgétaires fixées par l'État et qui soient d'une manière générale rationnelles, équitables, transparentes, et avant tout stables. 3.3. Transformation radicale (restructuration) des établissements d'enseignement supérieur La restructuration de l'enseignement supérieur s'est produite dans divers pays pour différentes raisons. D'une part, elle peut résulter de graves préoccupations face aux contraintes financières ; elle peut aussi être entreprise afin de fusionner les établissements, de regrouper l'enseignement supérieur et de favoriser les économies d'échelle. La transformation radicale d'une organisation touche son objectif, ses compétences et ses autres caractéristiques, de même que les effectifs qu'elle emploie. Dans le cas d'un établissement d'enseignement supérieur, la restructuration implique la réduction ou le changement des membres du corps enseignant, du personnel administratif et des agents auxiliaires. Il s'ensuit des licenciements, des retraites anticipées obligatoires ou d'importantes mesures de recyclage ou de réaffectation, par exemple dans les cas suivants : fermeture d'établissements inefficaces ou non rentables ; fusion d'établissements de qualité auxquels fait simplement défaut une masse critique d'activités qui les rendraient financièrement viables; modification radicale de l'objectif et de la fonction productive d'un établissement -ce qui nécessite un bouleversement général du corps enseignant concernant sa composition, son comportement, son organisation, sa manière de travailler et sa rémunération. Les universités russes ont manifestement « souffert » dans la mesure où elles ont dû subir de cruelles réductions de fonds entraînant une érosion des rémunérations en valeur réelle, la disparition totale de certaines facultés et de certains programmes débouchant sur un diplôme, et la superposition de diverses activités productives faisant appel au personnel enseignant et aux installations des établissements. En même temps, un grand nombre de changements apportés aux universités russes paraissent ne pas avoir été fondamentaux, mais avoir visé davantage à faire face à la situation ou à survivre. De telles transformations sont probablement peu durables du fait qu'elles ne s'accompagnent ni d'objectifs nouveaux acceptés de tous, ni de changements dans les méthodes de travail des professeurs et des administrateurs qui devraient aller de pair avec une restructuration fondamentale. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 25 Le changement radical tend à susciter l'opposition des employés et des cadres, indépendamment de la nécessité ou de l'opportunité du changement lui-même. La restructuration est tout particulièrement difficile du fait que les employés du secteur public sont en général des fonctionnaires ou des personnes nommées pour des raisons politiques ou tout au moins des personnes politiquement actives, avec lesquels il est difficie de manier l'outil de la persuasion. Dans le cas des universités publiques, les enseignants ont d'autres armes pour résister aux menaces de changement radical ou de perte d'emploi : l'idée que l'université est le bastion indispensable de la continuité et de la tradition, le maintien des libertés et franchises universitaires traditionnelles et l'armée des anciens, actuels et futurs étudiants, dont la plupart sont cultivés, énergiques, politiquement versatiles et généralement mobilisables pour lutter contre les efforts du gouvernement visant à changer du tout au tout leur université. Or, tout en résistant aux transformations radicales, les universités publiques ne sont pas épargnées par les pertes considérables de fonds publics dues aux facteurs cités plus haut. En fait, étant donné la concurrence de plus en plus forte, les universités n'ont peut-être pas de pire ennemi que leur solidité à très court terme - leur capacité apparente à s'accommoder de classes de plus en plus surchargées, de professeurs travaillant à temps partiel ou mal rémunérés, de matériel de laboratoire vétuste et de bibliothèques de moins en moins bien fournies -et même si elles admettent davantage d'étudiants payants ou dirigent les enseignants vers des activités productives. Ces expédients amènent parfois l'État ou le ministère de l'éducation à couper les fonds des établissements publics, en se refusant à admettre la nécessité de fermer des universités inefficaces ou de mettre à pied des enseignants qui ne sont plus adaptés aux besoins des étudiants, de l'économie et de l'université elle-même. 3.3.1 L'impact de la technologie. Un motif important de réforme dans de nombreux pays en développement est l'adaptation à la technologie et la réalisation d'économies. Avec ses éléments à la fois positifs et négatifs, la technologie peut à la fois améliorer l'organisation de l'enseignement supérieur et réduire les coûts grâce aux universités ouvertes (libres), au téléenseignement, etc., et, en raison de son coût élevé, dissuader les pays en développement d'entrer en concurrence avec les pays industrialisés. Le financement s'en ressent énormément. Il faut toutefois noter que les universités devront à l'avenir se diversifier davantage et se montrer plus disposées à partager les connaissances de manière novatrice pour pouvoir obtenir une part équitable du marché et ne pas être marginalisées. Les pays développés et les pays en développement n'ont pas à cet égard les mêmes motivations. Les premiers ont des systèmes d'enseignement bien établis et des taux d'inscription élevés. Ils utilisent les technologies principalement pour améliorer l'efficacité de l'enseignement et de l'acquisition du savoir, pour moduler les programmes suivant les intéressés et inculquer des connaissances spécialisées à de petits groupes d'étudiants. En revanche, dans les pays en développement, où seul un nombre relativement faible d'étudiants ont les moyens d'entrer dans de bonnes écoles, les responsables cherchent d'autres solutions qui permettent de renforcer considérablement l'efficacité de Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 26 l'enseignement et de la recherche, tout en élargissant l'accès à l'éducation, en particulier au niveau de l'enseignement secondaire et supérieur, à un coût réduit par étudiant". La technologie dans le domaine éducatif et l'enseignement différencié dans les pays en développement De toutes les régions du monde, c'est l'Asie qui s'est efforcée le plus de différencier l'enseignement et qui y a le mieux réussi. Durant les 20 dernières années, le téléenseignement s'est rapidement développé au Bangladesh, en Chine, en République de Corée, en Inde, en Indonésie, au Pakistan, aux Philippines, à Sri Lanka et en Thaïlande. Par exemple, la Chine a mis en place un réseau d'universités provinciales et de cours télévisés. En Inde, 3 millions d'étudiants à temps partiel suivent des cours par correspondance, en plus des 4 millions d'étudiants réguliers à temps plein. La Thaïlande a créé deux universités ouvertes et plusieurs universités provinciales pour compléter les quatre grandes universités nationales de Bangkok. Des programmes d'enseignement à distance et d'enseignement libre peuvent permettre d'accroître le nombre d'étudiants à moindre frais, en particulier pour les groupes défavorisés qui ne fréquentent généralement guère l'université. Les universités peuvent également être conçues pour accueillir des étudiants étrangers, comme l'Open University of South Africa dont 15 000 étudiants, sur un effectif total de 120 000, viennent de pays voisins". Il importe de ne pas confondre ce qui est techniquement possible avec ce qui est souhaitable ou nécessaire. Dans le cas des universités, il n'est que trop facile de s'enthousiasmer pour le potentiel de transformation radicale qu'offre la technologie. Ainsi, la transmission numérique des données pour le courrier électronique, l'accès à l'information et aux bases de données par Internet, la transmission multivoie sur bande large d'images vidéo et les logiciels interactifs avec les micro-ordinateurs, sans parler de la télévision et des vidéolecteurs omniprésents. Tous ces moyens ouvrent des possibilités telles que la vidéo multivoie interactive pour le téléenseignement synchrone, les bibliothèques et les bases de données sur Internet et l'enseignement asynchrone à rythme individualisé par vidéocassettes et logiciels audiovisuels. Certains auteurs prévoient la fin de l'université traditionnelle et de ses éléments familiers tels que les campus, les salles de cours et les bibliothèques, voire les professeurs titulaires. Quels seront les éléments effectivement adoptés, pour qui le seront-ils et dans quels pays ? La réponse ne dépend pas simplement des possibilités pédagogiques ni des coûts et avantages des techniques modernes. Elle sera en grande partie fonction du stade auquel se trouve un pays sur la voie de l'enseignement supérieur de masse et de sa réforme. Les étudiants actuels ou les jeunes gens qui envisagent une vie estudiantine sur le campus ne sont vraisemblablement pas prêts à accepter une nouvelle version de l'« enseignement 45 Bojana Boh (1994) Interactive educational technologies in higher education. Série documents de synthèse ESP. Service consultatif de la Banque mondiale, Washington. 46 Banque mondiale (1994) Les leçons de l'expérience, pp. 29 à 34. Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 27 supérieur » uniquement par cours électroniques ou vidéo avec des « salles virtuelles », tout en ayant un emploi à temps partiel ou à plein temps. Ni d'ailleurs les enseignants, habitués à leur campus, leur bibliothèque, leurs horaires légers et leur poste de titulaire. Pour le moment, donc, dans les pays plus développés sur le plan de l'économie et de l'éducation, de puissants facteurs joueront sans doute en faveur du maintien de la pédagogie classique dans la plupart des secteurs de l'enseignement supérieur et en particulier dans l'université traditionnelle. Sur le plan financier, la technologie n'a pas été utilisée dans la majorité des cas pour remplacer le corps enseignant - qui est la source classique de gains de productivité. Elle a surtout constitué un élément complémentaire susceptible de renforcer l'acquisition et la diffusion du savoir et, partant, la productivité, mais elle n'a pas permis de réduire les coûts unitaires tels qu'ils sont calculés dans le secteur universitaire. Lorsque la croissance de l'enseignement supérieur -sous une forme ou sous une autre - reste encore du domaine de l'avenir et lorsque l'avènement de l'enseignement supérieur de masse demeure tout simplement impossible avec des campus, des taux d'encadrement, des bibliothèques et des laboratoires auxquels même les pays de l'OCDE n'apportent plus leur soutien, le mouvement de réforme doit alors mettre nettement l'accent sur une instruction financièrement viable, faisant appel à la technologie et offrant des possibilités d'acquisition des connaissances à des rythmes personnalisés. 4. Conclusions : L'état et les conséquences du mouvement de réforme du financement et de la gestion classiques de l'enseignement supérieur A la suite de la massive fixation et de la diversification de l'enseignement supérieur, les pouvoirs publics en sont venus à appliquer progressivement un plan de réforme financière et administrative pour pouvoir compléter les ressources de l'État (en mettant surtout à contribution les étudiants et les familles qui ont les moyens de payer), différencier les établissements, encourager les initiatives du secteur privé et relâcher les règlements officiels. Ce mouvement a été généralement accepté en principe dans la plus grande partie du monde et est appuyé par la Banque mondiale dans des pays qui se trouvent à des stades de développement très différents sur le plan de l'économie et de l'enseignement supérieur. Les faits ci-après témoignent des progrès considérables qui ont été accomplis : les étudiants et les familles participent de plus en plus aux coûts des études par un système d'enseignement entièrement ou partiellement payant. Des bourses et des prêts en fonction des ressources des intéressés sont accordés dans de nombreux pays et sont envisagés dans beaucoup d'autres. Le rôle du secteur privé continue de grandir lorsque la loi le permet, et les établissements privés ont le souci de la rentabilité et de l'orientation du marché, bien que l'enseignement qu'ils offrent soit, semble-t-il, d'une qualité souvent inégale. Le financement des universités tient compte des indicateurs de production mesurable, et les pouvoirs en matière d'engagements de dépenses sont délégués aux universités. La technologie - en particulier la télématique - est incorporée dans les universités du monde entier et permet d'avoir instantanément accès aux chercheurs, aux bibliothèques et à Le financement et la gestion de l'enseignement supérieur 28 l'information. Enfin, les activités productives -au sein des établissements, des facultés et du corps enseignant -augmentent presque partout, généralement pour le plus grand bien des établissements et de la société. Par ailleurs, le mouvement de réforme a progressé de façon très inégale à certains égards. Par exemple, dans la plupart des pays (et plus particulièrement en Russie et dans les États nouvellement indépendants), le secteur de l'enseignement supérieur public continue d'avoir beaucoup de mal à se restructurer et à fermer des établissements inefficaces ou vétustes. Les pays où le recouvrement de l'impôt est inégal ont eu de grandes difficultés dégager les niveaux de ressources nécessaires pour offrir des bourses aux étudiants les plus défavorisés sur le plan financier. Dans la plupart des cas, les systémes de prêts n'ont pas transféré aux étudiants la charge de l'État ou des contribuables, essentiellement en raison des insuffisances concernant les taux d'intérêt, le recouvrement des prêts et le ciblage de ceux qui en ont le plus besoin. La budgétisation fondée sur les résultats et autres systèmes nouveaux se sont bien souvent accompagnés de conséquences involontaires et parfois fâcheuses, par exemple la tendance à exagérer les critères d'efficacité afin d'obtenir davantage de ressources. La recherche de la productivité et de la rentabilité est dominée davantage par des considérations de coût que par l'acquisition effective de connaissances -partout dans le monde, les universités n'évaluent toujours pas la valeur ajoutée du savoir qu'elles dispensent et ne maximisent pas non plus la diffusion de connaissances par des moyens dont l'efficacité a été prouvée. Le risque est que la technologie continue d'être incorporée dans les universités principalement en tant qu'« élément accessoire » venant s'ajouter aux programmes classiques, sans s'accompagner des transformations structurelles nécessaires pour obtenir de réels gains de productivité. Enfin, s'agissant de la délégation de pouvoirs entre l'État et les établissements, il convient de préciser quels sont les pouvoirs et les décisions qui appartiennent aux établissements et ceux qui relèvent de l'État. Pour conclure, la plupart des pays poursuivent le débat sur les avantages et d'approches centralisées ou décentraliseés l'importance relative des secteurs privé et public, le rôle de l'État et l'autonomie des universités. Pour les pouvoirs publics, il s'agit de parvenir à concilier la souplesse et la rentabilité en même temps que la diversification et la privatisation, tout en continuant à jouer leur rôle au niveau des orientations, des réglementations et des subventions. Les orientations et les réformes doivent essentiellement viser à assurer des normes minimales de qualité et de protection des consommateurs, à veiller à ce que les études répondent aux besoins de l'économie et de la société, et à garantir l'accès à l'enseignement supérieur aux étudiants particulièrement capables et motivés mais dont les familles ont des moyens financiers insuffisants pour payer leurs études. 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