S É RI E D ÉV EL O PP E MENT HUMAIN DE LA RÉGI ON A FR I QUE M DOCUMENT DE TRAVAIL Banque Mondiale Deux études pour Id scoldrisdtion priindire uniVerselle ddns les pdys du Sdhel en zoif 23563 January 2002 - P JP~ (. s .s --- . .4f Autres titres dans cette série Dynamic Risk Management and the Poor-Developing a Social Protection Strategy for Africa Engaging with Adults-The Case for Increased Support to Adult Basic Education in Sub-Saharan Africa Inclure les adultes - Pour un appui à l'éducation de base des adultes en Afrique subsaharienne Enhancing Human Development in the HIPC/PRSP Context-Progress in the Africa Region during 2000 Early Childhood Development in Africa-Can We Do More for Less? A Look at the Impact and Implications of Preschools in Cape Verde and Guinea Le développement de la petite enfance en Afrique - Peut-on faire plus avec moins? Impact et implications des centres préscolaires au Cap-Vert et en Guinée AIDS, Poverty Reduction and Debt Relief-A Toolkit for Mainstreaming HIV/AIDS Programs into Development Instruments Systemic Shocks and Social Protection-Role and Effectiveness of Public Works Programs Social Protection of Africa's Orphans and Vulnerable Children-Issues and Good Practice Program Options Can Africa Reach the International Targets for Human Development? An Assessment of Progress towards the Targets of the 1998 Second Tokyo International Conference on African Development (TICAD Il) Education and Training in Madagascar-Towards a Policy Agenda for Economic Growth and Poverty Reduction A Summary Education et Formation à Madagascar - Vers une politique nouvelle pour la croissance économique et la réduction de la pauvreté Un résumé Issues in Child Labor in Africa Community Support for Basic Education in Sub-Saharan Africa Le système éducatif mauritanien - Eléments d'analyse pour instruire des politiques nouvelles Série Développement Humain de la Région Afrique Document de travail Deux études pour la scolarisation primaire universelle dans les pays du Sahel en 2015 Alain Mingat Région Afrique Banque mondiale ii SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE ©) Janvier 2002 Departement du développement humain Région Afrique Banque mondiale Les opinions et conclusions exprimées dans ce rapport n'engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement les opinions de la Banque Mondiale ou des institutions qui lui sont affiliées. Maquette de couverture: Tomoko Hirata. Photo de couverture: Ray Witlin avec la permission de la bibliothèque photographique de la Banque mondiale. DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 Table de Matières Avant-propos/Foreword v Introduction ix 1 Perspectives pour la scolarisation primaire universelle dans les pays du Sahel après la conférence de Dakar 1 Quelques constats quantitatifs de base 1 Un engagement politiquefort, au niveau le plus élevé de l'Etat, est essentiel 5 Facteurs affectant la couverture quantitative des systèmes éducatifs et stratégies possibles 6 Facteurs affectant la qualité des apprentissages des élèves 13 Mobiliser davanitage de ressources pour l'enseignement de base 16 2 Note préliminaire sur les besoins en financements publics dans la perspective de la scolarisation primaire universelle en 2015 dans les pay du Sahel 17 Contexte et perspectives de cette note 17 Le modèle de simulationl utilisé 20 Les résultats obtenus dans les six pays 23 Annexe 1 29 Annexe 2 31 Annexe 3 35 DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 V Avant-propos l y a un accord international sur le fait les très réformes clés de politique éducative qui permet- bas niveau de scolarisation, des filles en parti- tront de rendre la scolarisation pour tous financière- culier, contraint de façon substantielle le déve- ment soutenable à moyen terme. Les leçons qu'on loppement des pays d'Afrique au sud du Sahara. Il peut tirer des deux dernières décennies suggèrent en est ainsi en raison du rôle joué par l'éducation que, dans de nombreux pays, les progrès en matière sur des aspects clés tels que l'amélioration de la pro- de scolarisation ont été limités davantage par insuf- ductivité du travail, l'amélioration des conditions fisance de volonté politique pour prendre les déci- de santé et de nutrition, la réduction des disparités, sions adéquates que par manque de ressources. en particulier celles au désavantage des femmes et Dans la perspective de renforcer l'engagement des groupes pauvres de la société; on pourrait bien pour l'EPT au niveau politique le plus élevé, la sûr ajouter que l'éducation des populations permet Banque Mondiale a organisé en novembre 2000, à de renforcer la cohésion sociale, la construction Bamako (Mali) en collaboration avec six pays sahé- d'une société plus démocratique, ainsi que son inté- liens, l'Unicef et l'Unesco, une réunion des Chefs gration dans l'économie mondiale dans laquelle la d'Etat sur l'éducation au Sahel. Les six pays - le connaissance jouera un rôle très central. Cette Burkina Faso, la Guinée, le Mali, le Niger, le Sénégal contrainte pour le développement futur des pays et la Tchad - sont en effet confrontés à des problè- est spécialement forte chez les pays sahéliens, qui, mes de nature semblable dans leur système d'édu- en tant que groupe, continue d'avoir la couverture cation, et l'idée de cette réunion était que des échan- la plus faible de leur système scolaire, par compa- ges de vue au plus haut niveau de l'Etat sur ces raison avec les autres pays de la région. problèmes pourraient être utiles pour définir les Sur la base de ce constat, la communauté interna- options les plus prometteuses pour leur résolution. tionale a renouvelé au Forum mondial de Dakar sur La réunion cherchait également à développer la l'éducation son engagement d'atteindre la scolarisa- prise de conscience sur le type de réformes néces- tion pour tous (EPT), en fixant pour cela la date de saires au niveau de chacun des pays, sur le volume 2015. La réalisation de cet objectif en Afrique sub- de ressources à mobiliser, y compris celles en prove- saharienne, et particulièrement au Sahel, deman- nance de l'aide extérieure, pour assurer le succès de dera une volonté politique forte pour mobiliser les l'entreprise. Cette initiative fait écho à la déclaration ressources additionnelles nécessaires et, peut-être du Président de la Banque Mondiale au Forum de plus important encore, pour mettre en place les Dakar selon laquelle aucun pays avec un plan crédi- vi SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE ble de développement de son système éducatif actions de politique éducative qui permettraient de devrait être empêché de la mettre en oeuvre par lever les contraintes précédemment identifiées. Le manque de ressources. texte souligne que si les pays ne réussissaient pas à Pour préparer le réunion des Chefs d'Etat, un prendre ces dispositions incontournables, les objec- atelier technique, regroupant des experts des six tifs de l'EPT ne seraient pas atteints, même si les res- pays concernés ainsi que des membres de différen- sources extérieures étaient effectivement mobilisées tes agences bilatérales et multilatérales, avait été avec le niveau estimé. organisé en octobre 2000 à Bamako; le réunion elle- Le document comprend en outre trois annexes même avait été précédée d'une réunion des minis- qui ont été produites au cours de la conférence. On tres de l'éducation et des finances des six pays par- trouvera en premier lieu la «résolution politique» ticipant. A la suite de la conférence des Chefs d'Etat, prise par les chefs d'Etat, en second lieu, le «cadre ces derniers ont produit une déclaration officielle d'action» qui définit les conditions par lesquelles définissant les grandes lignes des politiques éduca- l'objectif de scolarisation universelle pourra être tives qu'ils allaient mettre en oeuvre ainsi que le dis- atteint, et en troisième lieu le «cadre partenarial» positif de suivi des dispositions prises. qui indique comment les partenaires devront tra- La présente publication comprend les deux vailler ensemble et quelle sera la contribution de documents préparés par la Banque Mondiale pour l'aide extérieure. faciliter la discussion tant à la réunion des Ministres Finalement, je voudrais remercier Alain Mingat qu'à la conférence des chefs d'Etat, ainsi que la pour les efforts qu'il a mis pour la préparation des déclaration officielle des Chefs d'Etat à l'issue de la deux textes dans un intervalle de temps très court. conférence. 'Le premier texte préparé par la Banque Je tiens aussi à remercier Adrian Verspoor pour sa Mondiale analyse le développement de l'éducation participation à la préparation de la conférence ainsi dans ces six pays au cours des 15 dernières années, que Mamadou Ndoye pour les compétences avec en ciblant l'évolution des scolarisations, les ques- lesquelles il a coordonné les activités de préparation tions de financement, ainsi que celles d'efficacité et avant la conférence aussi bien que pendant la confé- de l'équité; il examine quelles sont les contraintes rence elle-même. principales pour la réalisation d'une expansion rapide des systèmes vers les buts de l'EPT. Le second texte propose une évaluation des besoins Birger Fredriksen financiers, y compris ceux d'origine externe, pour la Directeur réalisation des objectifs dans l'hypothèse où les Développement humain, Région Afrique pays réussiraient effectivement à mettre en place les Banque mondiale DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 Vii Foreword here is wide international consensus that organized a Heads of State Conference on Education Sub-Saharan Africa's very low levels of edu- in the Sahel in Bamako, Mali in November 2000 with cation attainment, especially among women, six Sahelian countries, UNICEF and UNESCO. The severely constrains the region's development six countries - Burkina Faso, Chad, Guinea, Mahl, prospects. This is so because of the role education Niger and Senegal - face many similar problems in plays in key areas such as enhancing productivity, the education sector, and it was thought that an improving health and nutrition conditions, promot- exchange of views on these problems at the highest ing greater equity, especially for women and the political level would be helpful in developing poorest population groups, and, more generally, in options for future solutions. The Conference also strengthening social cohesion, building democratic sought to enhance the awareness of the type of edu- institutions and enabling countries to integrate in cation reforms required at the level of each country to the globalized, knowledge-based economy. This reach the EFA targets, and of the resources needed, constraint on future development is particularly including external sources, to accompany the reform severe in the Sahelian countries which, as a group, package. This initiative echoes the declaration made continue to have even lower education coverage at the Dakar Forum by the President of the World than the rest of the region. Bank to the effect that no country with a credible In recognition of the above, the international com- education development program should be unable munity renewed at the April 2000 Dakar World Edu- to implement it because of a lack of resources. cation Forum its commitment to reaching Education To prepare the Conference a technical workshop For All (EFA), and established 2015 as the target year. was organized the month before in Bamako, bring- Reaching this target in Sub-Saharan Africa, espe- ing together experts from the six countries as well cially in the Sahel, will require strong political will to as from different bilateral and multilateral agencies. make available the needed additional resources and, The Conference was also preceded by a meeting of perhaps even more important, to implement a set of the Ministers of Education and Ministers of Finance key policy reforms designed to make provision of of the six countries. Following the Conference, the EFA financially sustainable. Lessons learned from Heads of State issued an official declaration outlin- the last two decades suggest that progress in educa- ing the types of policies they would undertake and tion in many countries has been held back more by the monitoring mechanisms needed to ensure the weak political commitment and poor policies and follow up to the Conference. institutions than by a lack of resources. The present publication includes two documents To strengthen the political commitment to EFA at prepared by the World Bank as background for the the highest political level, the World Bank jointly discussions at the Ministerial Meeting as well as at Viii SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE the Heads of State Conference. The first analysis is of the action plan adopted to achieve EFA and the way the development of education in these countries in which working in partnership with each other over the last 15 years, focusing in particular on the and donors will help achieve this goal. development of enrollment, financing, efficiency Finally, I want to thank Alain Mingat for his and equity, and on identifying key constraints to efforts in preparing these two papers under a very achieving accelerated development towards the EFA tight time table, Adriaan Verspoor for his participa- targets. The second assesses financing needs, includ- tion in the preparation of the Conference, and ing external sources, provided the countries manage Mamadou Ndoye for the skillful way in which he to put in place a set of reforms aimed at addressing coordinated the preparatory activities prior to the the key efficiency constraints identified. If the coun- Conference as well as the organization of the Con- tries are not successful in implementing the reforms, ference itself. the target of EFA for 2015 is unlikely to be attained, even if the external resources were to be made avail- able at the level estimated. In addition, there are Birger Fredriksen three annexes which were produced by the partici- Sector Director, Human Development pants of the conference covering, respectively, the The Africa Region political resolution resulting from this conference, The World Bank DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 iX Introduction ans le domaine de l'éducation et de l'ensei- scolarisation, de financement, d'efficacité et gnement primaire en particulier, les pays d'équité. On s'efforce ensuite d'identifier les fac- sahéliens accusent un retard notable sur teurs qui ont concouru à l'insuffisance de la per- d'autres Etats dont le niveau de développement est formance observée, ce qui met en évidence les pourtant comparable. Etant entendu qu'on ne rôles joués par le niveau trop élevé du salaire des considère ici que six pays, tous francophones : le enseignants dans cinq pays sur six et par les fré- Burkina Faso, la Guinée (bien qu'elle ne soit pas à quentes déficiences de la gestion administrative proprement parler sahélienne), le Mali, le Niger, le et pédagogique. Sénégal et le Tchad. Suite à la conférence de Dakar sur l'éducation « Note préliminaire sur les besoins en finance- pour tous, en avril 2000, s'est tenue à Bamako, en ments publics dans la perspective de la scolarisa- novembre de la même année, une réunion des chefs tion primaire universelle en 2015 dans les pays d'Etat de ces six pays. Elle fut précédée d'un du Sahel » propose quant à lui une estimation a) congrès de leurs ministres de l'éducation et de leurs des ressources publiques susceptibles d'être ministres des finances qui faisait lui-même suite à mobilisés pour le secteur d'ici 2015, notamment des réunions rassemblant des experts aussi bien de après la mise en oeuvre de l'initiative en cours de la Banque mondiale qu'en provenance de chacun réduction de la dette; b) du volume des ressour- des pays ainsi que les principaux partenaires tech- ces nécessaires pour aboutir à une éducation pri- niques et financiers qui avaient pu se rendre maire universelle de qualité convenable - dans disponibles. l'hypothèse où seraient effectivement prises et Deux textes, qui se résument comme suit, matéria- appliquées les dispositions de politique éduca- lisent les contributions présentées par la Banque tive en cours de discussion avec les partenaires mondiale pour aider à la réflexion sur ces échanges: techniques et financiers de chacun des pays. Enfin, la confrontation des ressources disponi- « Perspectives pour la scolarisation primaire uni- bles aux besoins globaux permet de déterminer verselle dans les pays du Sahel après la confé- ce que seraient alors les besoins additionnels rence de Dakar >» établit d'abord un diagnostic de pour assurer la couverture tant des charges base, essentiellement quantitatif, où sont exami- récurrentes que des dépenses en capital. nées en particulier les évolutions observés au cours des quinze dernières années en matière de Voici in extenso le détail de ces études. X SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Introduction a egarding education, primary education in lishes first a diagnostic base, essentially quantita- k particular, Sahelian countries have lagged tive, where the observed evolutions in the course of behind other countries whose level of the last 15 years regarding schooling, financing, effi- development is comparable. Taking this into con- ciency and equity are examined. The following dis- sideration, this paper looks at various aspects of cussions will focus on factors that are contributing education systems in six francophone countries: to countries' poor performance, highlighting the Burkina Faso, Guinea (even though it is not geo- negative impact of high teacher salaries in five out graphically considered Sahelian), Mali, Niger, Sene- of the six countries, and by the frequent deficiencies gal and Chad. in administrative and pedagogical management. Following the conference in Dakar on Education Preliminary note on the publicfinancing needs in the for All in April 2000, a meeting was held in Novem- perspective of universal primary schooling in 2015 in ber of the same year in Bamako for the Heads of Sahelian countries proposes an estimation of a) State of these six countries. This meeting was pre- potential public resources that may be mobilized for ceded by a technical meeting of experts from all six the sector from now until 2015, notably after the countries as well as from bilateral and multilateral implementation of the debt reduction initiative; and agencies and a separate meeting of the Ministers of b) the volume of resources needed to reach univer- Education and Ministers of Finance from all six sal primary education of a good quality-both of countries. which could hypothetically be taken and used The following two sections of this paper explain during discussions with technical and financial the contributions presented by the World Bank in partners of each country. In conclusion, the compar- order to stimulate reflection on the exchanges borne ison of resources available for global needs allows from these meetings: us to determine what additional needs would be in Perspectivesfor universal primary education in Sahe- order to assure coverage regarding recurrent and lian countries after the EFA conference in Dakar estab- capital expenses. Deux études pour la scolarisation primaire universelle dans les pays du Sahel en 2015 Série Développement Humain de la Région Afrique Document de travail Perspectives pour la scolarisation primaire universelle dans les pays du Sahel après la conférence de Dakar L a récente conférence de Dakar sur l'éduca- des systèmes que la qualité de l'apprentissage des L tion pour tous a été un moment important. élèves et la mobilisation des ressources financières D'une part pour faire le point sur les progrès nécessaires. Bien que - c'est un fait reconnu - une déjà réalisés, en particulier depuis la conférence de approche globale du développement du système Jomtien, d'autre part pour insuffler à tous le regain éducatif soit indispensable, on cible ici l'enseigne- d'énergie exigé par les indispensables progrès qu'il ment primaire: dans l'approche globale, le poids du reste à accomplir: comme nous le verrons dans la niveau primaire est à l'évidence incontournable, suite de ce texte, la bataille pour la scolarisation pri- notamment dans les pays où une forte proportion maire universelle est loin d'être gagnée. Cela et vrai des enfants n'aborde toujours pas la vie adulte avec pour un assez grand nombre de pays, mais spécia- unl bagage de compétences correspondant au moins lement les pays sahéliens. Pour avancer vers la vic- à celui que procure un système primaire de qualité toire dans cette bataille essentielle, trois ingrédients raisonnable. Ce fait est extrêmement dommageable sont indispensables : a) un très fort engagement car il a été démontré sans ambiguïté que l'enseigne- politique, sans aucun doute plus marqué que celui ment primaire, en particulier pour les filles, consti- qui a prévalu au cours de la dernière décennie et il tuait l'investissement de base dont la rentabilité est clair que c'est au plus haut échelon des Etats que économique et sociale était la plus forte pour des doit se situer le rôle moteur; b) une identification pays tels que ceux du Sahel. non moins claire des obstacles et contraintes qu'il est indispensable de lever et des politiques structu- Quelques constats quantitatifs de base relles à mettre en oeuvre à cet effet ; c) enfin une grande ténacité, car il s'agit d'actions qui s'inscri- En général, depuis Jomtien, les progrès vers la sco- vent nécessairement dans la durée, une durée larisation primaire universelle ont été fort variables relativement longue. suivant les pays. Cela vaut aussi pour les pays sahé- A partir d'un constat quantitatif initial, le texte ci- liens où les progrès ont été plus visibles dans cer- après examine les éléments qui font obstacle et les tains pays que dans d'autres; mais la route vers une politiques structurelles qui permettraient de les couverture satisfaisante dans l'enseignement pri- contourner en ce qui concerne tant la couverture maire, tant en quantité qu'en qualité, reste longue 2 SRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Tableau 1 Données de base sur la couverture de la scolarisation primaire, 1988-98 (pays dont le PIB est inférieur à 2000 US$) (%) Taux brut de Taux d'accès Taux d'accès en Taux de rétention sur scolarisation primaire en 1ère année primaire dernière année primaire le cycle primaire Pay 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 Burkina Faso 27 32 40 28 31 42 19 23 25 67 70 60 Guinée 35 42 55 39 44 51 20 20 36 50 44 71 Mali 23 39 48 23 26 47 il 13 26 42 50 55 Niger 30 29 30 32 29 36 22 20 20 73 75 60 Sénégai 59 59 62 52 54 65 42 42 40 81 84 66 Tchad 51 59 65 54 69 83 16 25 19 30 37 23 Ensemble 38 43 50 38 42 54 22 23 28 57 60 56 Afrique francophone (autre) 77 78 82 78 78 - 52 53 - 67 73 - Afrique anglophone 86 84 85 86 93 - 58 65 - 66 67 - Pays d'Asie à faible revenu 90 97 100 92 94 - 56 72 - 60 76 - pour tous. La quantité peut aisément s'évaluer de atteindre à la scolarisation universelle. Au rythme façon traditionnelle sur la base des taux bruts de linéaire observé entre 1988 et 1998, il faudrait encore scolarisation, mais la proportion d'une classe d'âge 45 ans pour atteindre un taux brut de scolarisation qui termine le cycle primaire est une mesure plus de 100 % et 120 ans pour que 100 % d'une première pertinente; on considère en effet que les enfants qui cohorte parviennent à une scolarité primaire com- abandonnent l'école avant d'avoir validé au moins plète. Même si ces chiffres ne sont qu'une extrapo- cinq années d'une éducation primaire de qualité lation statistique, ils illustrent l'ampleur de la tâche convenable courent un très fort risque de devenir restant à accomplir et la nécessité impérieuse de des adultes analphabètes. parvenir à accélérer sensiblement le rythme des Ces données montrent les progrès réalisés dans progrès. la couverture de l'enseignement primaire au cours Dans le contexte actuel, l'incomplète couverture de la dernière décennie. Dans les six pays cibles de globale de la scolarisation conduit à une situation à cette étude, la moyenne du taux brut de scolarisa- la fois inefficace au niveau de l'usage des crédits tion est passée de 38 à 50 %, soit un gain de 12 publics et inéquitable au plan de leur distribution. points, tandis qu'un gain un peu plus important (15 L'efficacité, ici restreinte à sa seule dimension points) était enregistré sur le taux d'accès en pre- interne, peut être examinée sous deux angles mière année primaire. Si l'on se fonde par contre sur complémentaires: la proportion d'une classe d'âge terminant le cycle primaire, les avancées sont plus modiques, pas plus * le premier est limité à ce qui relève des aléas dans de 6 points, avec un chiffre de 28 % seulement pour les flux d'élèves au sein du primaire (redouble- 1998, dernière année connue. Sur cette dernière base ments et abandons en cours d'études) ; on com- statistique et sauf en Guinée et au Mali, les progrès pare les ressources effectivement consommées ont été en fait très modestes car la rétention des avec celles qui auraient été strictement nécessai- élèves tout au long du cycle est restée faible. res pour produire le nombre normal de sortants Ces chiffres permettent de mesurer à la fois les du primaire en l'absence de redoublements et progrès réalisés et ceux qui restent à faire pour d'abandons. Le rapport des deux termes donne DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 3 une idée de l'impact négatif des accrocs dans les moyenne des scolarisations de chaque pays dans flux d'élèves sur l'efficience de l'utilisation des un graphique à deux dimension où la situation ressources publiques. Cet indicateur est analysé respective des différents pays peut ainsi être lue dans le tableau 2 ci-après. directement. Cette seconde représentation de l'efficacité, qui englobe du reste la première, * le second angle, pour aborder l'efficacité dans permet en outre d'intégrer les différents facteurs l'usage des ressources publiques, est comparatif caractéristiques du fonctionnement d'ensemble et plus macroscopique. On met ici en regard le d'un système éducatif. La présentation en est volume des ressources publiques mobilisées par faite dans le graphique 1 ci-après. le secteur (il est pertinent, on le démontre, d'uti- liser le rapport des dépenses au Produit Intérieur L'équité peut être abordée en un premier temps Brut du pays) avec un indicateur global de sa de façon traditionnelle : par l'examen de l'ampleur, couverture; on utilise souvent à cet effet la durée autour des moyennes nationales, des disparités moyenne des temps de scolarisation d'une entre groupes (sexe, localisation, ...). Elle peut aussi cohorte. Cette mise en regard peut s'opérer de être abordée au niveau de l'ensemble du système deux façons complémentaires: a) faire le rapport éducatif: distribution et concentration des ressour- des deux termes : on calcule ainsi combien ces publiques, proportion des ressources consacrées d'années de scolarisation le pays réussit à obtenir aux 10 % les plus éduqués d'une cohorte donnée de par pour-cent de son PIB alloué aux dépenses jeunes. Les indicateurs de base de ces deux appro- scolaires ; l'indicateur peut alors être utilisé dia- ches sont présentés dans le tableau 2. chroniquement pour un pays donné ou synchro- On peut observer sur ce tableau que l'association niquement entre différents pays (ces données d'une fréquence relativement élevée des redouble- sont présentées dans le tableau 3 ci-dessous) ; b) ments (en particulier au Tchad et en Guinée) et localiser le couple ressources mobilisées - durée d'une faible rétention en cours de cycle (en particu- Tableau 2 Indicateurs d'efficacité et d'équité (1997-98 ou année la plus récente: 93*) Efficacité des flux d'élèves dans le primaire Equité % de Indice global % accès fin de primaire % deslO% Pays redoublants d'efficacité (%) Garçons Filles Rural Filles rurales + éduqués Burkina Faso 18 65 28 20 14 10 67* Guinée 26 68 49 21 25 il 64* Mali 17 61 31 20 - - 81* Niger 13 69 24 15 12 7 74* Sénégal 14 70 43 31 24 16 56* Tchad 31 58 29 10 - - 54* Ensemble 20 65 37 20 19 il 66* Afrique francophone (autre) 25* 63* 86* 73* - - 47* Afrique anglophone 7* 75* 96* 91* - - 53* Pays d'Asie à faible revenu 10* 77* 99* 88* - - 33* *VaIeurs pour l année 1993 4 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Graphique 1 strates les plus pauvres qui sont aussi les plus défa- Ressources publiques pour l'éducation et vorisées en matière de scolarisation). En moyenne, durée moyenne des scolarisations (1993) 20 % seulement des filles terminent le primaire contre 37 % pour les garçons. Une disparité entre 12l -mu Jofdat, ~ zIrwe garçons et filles (au bénéfice des premiers) est obs- Eq Colombe Tknts,, Alg4ole ervée dans les six pays cibles de cette étude mais les `° 1 0 -- onesn e Egyple _ Chmça,.gbay Indeécarts relatifs paraissent spécialement élevés au 8 E eur c>c"a Tchad et en Guinée, relativement plus modérés au Burkina Faso (et au Sénégal). Le retard dans la sco- c 6 Q OLganda MalaNwanda CoteJdlre larisation des filles est particulièrement préjudicia- T.- ° t ~ bUrurnOga] an2a e ble, car il a été établi que leur scolarisation avait une fort impact sur le taux de rentabilité économique et ...ltinaFaso sociale des pays (y compris en particulier des effets 2 j MalC>r E I _ positifs en matière de santé et de population). 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Dépenses publiques d'éducation (%PIB) La distinction urbain-rural est encore plus mar- quée que celle qui existe entre filles et garçons et le retard des campagnes sur les villes est très sensible. lier au Mali, mais surtout au Tchad) empêche une Dans ces dernières, même si la scolarisation part substantielle (environ un tiers) des crédits éprouve certes d'évidentes difficultés, elle demeure publics alloués au primaire de se transformer en beaucoup mieux développée, avec des taux bruts de une production de capital humain efficace pour le scolarisation souvent proches de 100 %, même dans développement économique et social. un pays comme le Niger où la couverture nationale Ce qui confirme au passage la loi sociologique globale est faible. Pour les pays ici concernés, il est bien connue selon laquelle, lorsqu'un bien est glo- clair que le défi des progrès de la scolarisation balement rare, ce sont les segments les plus défavo- concerne essentiellement les enfants ruraux. En risés de la population qui pâtissent le plus. Ces seg- croisant la dimension géographique et la dimension ments sont d'une part les filles, de l'autre les ruraux du genre, on ne peut qu'observer la « pauvre » (nous ne disposons pas de données comparatives situation des filles rurales, dont seules Il % en suffisantes pour l'illustrer mais, dans les pays où moyenne terminent le cycle primaire dans les 4 ces données existent, on observe que ce sont les pays pour lesquels l'information est disponible. Tableau 3 Ressources publiques mobilisées et couverture globale des systèmes éducatifs Ressources publiques (a) Durée des scolarisations (b) Durée des scolarisations (% PIB) (années) pour 1 % du PIB (bla) Pays 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 1987-98 1992-93 1997-88 Burkina Faso 2,9 3,0 2,8 2,6 2,9 3,1 0,90 0,97 1,11 Guinée 3,1 2,4 2,0 3,0 3,4 4,6 0,97 1,42 2,30 Mali 3,3 2,8 3,1 1,8 2,0 3,6 0,55 0,71 1,16 Niger 2,5 3,1 3,0 2,3 2,3 2,3 0,92 0,74 0,77 Sénégal 4,8 4,2 3,3 4,8 4,8 5,1 1,00 1,14 1,55 Tchad 1,5 2,4 2,1 3,5 4,2 5,2 2,33 1,75 2,47 Ensemble 3,0 3,0 2,7 3,0 3,3 3,7 1,00 1,10 1,56 Afrique francophone 4,0 4,7 - 6,2 6,0 - 1,55 1,28 - Afrique anglophone 4,7 4,1 - 6,4 7,5 - 1,36 1,83 Pays d'Asie à faible revenu 3,4 2,7 - 6,7 7,9 - 1,97 2,93 DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 5 En moyenne, en proportion de leur produit inté- En résumé, on peut sans doute en conclure a) que rieur brut, les pays du groupe cible mobilisent des des ressources additionnelles seront nécessaires pour ressources publiques pour l'éducation inférieures à assurer l'indispensable développement de la couver- celles des autres pays africains, notamment franco- ture des systèmes éducatifs des pays du Sahel ; b) phones. La proportion s'est du reste encore réduite mais parallèlement, que ceci n'aura de sens que dans au cours des 5 dernières années, où elle est passée la mesure où sera améliorée de manière significative de 3,0 à 2,7 00. Mais si elle demeure du même ordre la capacité des pays à utiliser les ressources mobili- de grandeur que dans les pays d'Asie à faible sées de façon plus efficiente - c'est à dire à les trans- revenu, la performance de ces derniers, au niveau former en davantage de résultats sociaux tangibles. de la couverture quantitative globale de leurs systè- mes scolaires, est cependant très supérieure à celle Un engagement politique fort, au niveau le plus des pays sahéliens (7,9 années contre 3,3 en 1993 et élevé de l'Etat, est essentiel 3,7 en 1998: plus du double). Ce qui se traduit par des indicateurs moyens faibles (en particulier par La variabilité des résultats obtenus, en matière de rapport aux groupe des pays africains anglophones couverture scolaire, dans des pays raisonnablement et plus encore par rapport au groupe des pays comparables tant en niveau de développement éco- d'Asie à faible revenu). nomique que de volume des ressources publiques Ce graphique illustre aussi la faible capacité des mobilisées pour le secteur, montre bien le réel pays sahéliens à transformer les ressources mobili- impact, sur les résultats obtenus, des politiques édu- sées pour la couverture de leur système d'éducation. catives mises en oeuvre dans les divers contextes On notera la position des pays du groupe cible : ils nationaux. Il est hors de doute à cet égard que viser sont tous situés en bas et à gauche du graphique, ce la couverture universelle d'un enseignement pri- qui signifie a) qu'ils ne mobilisent guère de ressour- maire de bonne qualité dans les pays du Sahel impli- ces publiques pour le secteur et b) qu'ils sont relati- quera que ces efforts politiques soient engagés et vement peu performants dans la transformation de poursuivis sur une période suffisamment longue: ces ressources (même plutôt faibles) en couverture efforts pour mobiliser davantage de ressources et effective globale de leur système d'éducation. efforts pour les utiliser de manière efficace. Mais une Après avoir ainsi mis en évidence la position action d'une tout autre envergure est nécessaire car défavorable des pays du Sahel, il faut bien entendu l'extrapolation des tendances de la dernière décennie s'interroger sur les facteurs (contraintes et espaces montre qu'elles ne pourront suffire à assurer la cou- de liberté) associés à cette situation particulière et, verture universelle effective dans un avenir en un second temps, sur les politiques éducatives acceptable. les plus pertinentes pour l'améliorer. A cet égard, on La leçon de l'expérience est très claire: un fort peut observer que le graphique 1 et les données du engagement politique public au plus haut niveau de tableau 3 soulignent sans ambiguïté que, si davan- l'Etat est la condition essentielle pour que les politi- tage de ressources seront nécessaires pour parvenir ques capables de conduire à une accélération signifi- à une amélioration quantitative significative de la cative de la scolarisation soient effectivement déci- couverture scolaire et du primaire en particulier, la dées et mises en place de manière durable. Réduction façon dont les ressources sont utilisées et transfor- de la dette et définition de la stratégie nationale de mées en résultats sociaux tangibles (en couverture lutte contre la pauvreté sont sans aucun doute de scolaire) est un point important à considérer. nature à faciliter l'entreprise, mais il est important de Notamment parce que cette analyse fait apparaître créer un contexte qui marque une rupture par rap- des potentialités susceptibles de contribuer au pro- port aux pratiques antérieures, conduise à la mobili- grès des scolarisations et que, contrairement au sation convergente des différents acteurs impliqués volume des ressources (qui se présente peut être dans l'éducation de base et dans lequel: davantage comme une contrainte), l'utilisation est soumise dans une large mesure aux politiques édu- * les arbitrages budgétaires en faveur de l'éduca- catives nationales. tion de base soient plus faciles car l'engagement 6 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE national rend plus légitimes les choix opérés et rience montre encore que, si le leadership doit se moins exigeantes les parties prenantes en concur- centrer sur le développement de la scolarisation, il rence dans la répartition des moyens. Ceci est doit simultanément faire preuve d'une grande vigi- important de façon générale mais évidemment lance à la fois pour maintenir des niveaux raisonna- plus encore quand l'organisation administrative bles de dépenses par élève et pour éviter que les du secteur est partagée entre plusieurs départe- gains quantitatifs de couverture ne se paient trop ments ministériels; cher.., par une baisse de qualité du produit offert. Toutefois, si un leadership fort est essentiel au * les personnels du ministère de l'Education natio- niveau politique le plus élevé, il ne peut pas s'exer- nale (ministre, directeurs, services centraux, ser- cer dans le vide et le pays doit au préalable être bien vices décentralisés et d'appui, directeurs d'école informé des facteurs à l'origine du retard de la cou- et enseignants) se sentent sécurisés, soutenus et verture scolaire ainsi que de sa relative inefficacité à valorisés en tant qu'agents d'une cause nationale transformer les ressources mobilisées en résultats reconnue; observables. En d'autres termes, le leadership doit s'appuyer sur une planification solide de la chrono- * il soit possible de mobiliser conjointement les dif- logie de mise en ceuvre des actions, planification férentes parties prenantes dans le développe- qui ne peut être établie qu'après 1) une analyse dia- ment de la couverture éducative du primaire, gnostique rigoureuse, 2) l'identification des modifi- qu'il s'agisse des bailleurs de fonds extérieurs, cations à entreprendre et la définition d'une politi- des ONG, des communautés locales et collectivi- que éducative justifiée. tés ou des parents d'enfants en passe de devenir Dans une large mesure, ces politiques éducatives des parents d'élèves. sont bien entendu spécifiques à chacun des pays concernés: d'une part en raison des situations * les décisions de politique éducative, surtout les nationales particulières, d'autre part parce que les plus difficiles, puissent être mieux comprises et conditions initiales de scolarisation, à un instant acceptées, car l'objectif d'une accélération signifi- donné, diffèrent d'un pays à l'autre. Il existe cepen- cative de la couverture scolaire va à l'encontre dant des problèmes et des contexte communs, des intérêts catégoriels et des avantages acquis, notamment à des pays d'une même zone géogra- freins traditionnels des évolutions nécessaires. phique et linguistique comme ceux sur qui est cen- Ceci est d'autant plus important qu'il existe en trée cette étude. Nous examinerons donc successi- général un déséquilibre flagrant, au plan de vement les questions a) de l'expansion quantitative l'expression publique, entre la parole très pré- de la couverture du système, b) des stratégies gnante de certains groupes constitués (souvent d'amélioration de la qualité des apprentissages des en zone urbaine et à l'intérieur du système) et la élèves et c) de la mobilisation de ressources addi- voix à peine audible de ceux qui sont actuelle- tionnelles appelées à contribuer à l'amélioration en ment privés d'école (en général dans les zones quantité et en qualité de l'éducation de base. rurales défavorisées). Facteurs affectant la couverture quantitative Il ne faut certainement pas sous-estimer la très des systèmes éducatifs et stratégies possibles forte valeur pratique de cette symbolique de la cause nationale: impulsion et contrôle ne peuvent Une perspective globale classique dès lors venir que du plus haut niveau de l'Etat, et l'on sait bien que, au-delà de l'efficacité concrète Une relation simple lie le nombre d'élèves scolarisés des actions, on constate généralement une évidente dans un système d'enseignement (NE) au volume rémunération politique pour ceux qui en ont été les global des ressources mobilisées (VR) et au choix du champions; dans le contexte africain, des pays tels montant de ressources affecté en moyenne à chaque que l'Ouganda, le Malawi ou le Zimbabwe en ont élève (RPE): NE=VR/RPE. fourni des exemples assez nets. Cela dit, l'expé- DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 7 Dans le cas des pays du groupe sahélien, comme * dans le supérieur, on peut observer que les effec- le montre le tableau 4 ci-après, le niveau des dépen- tifs ont une tendance naturelle à croître en raison ses unitaires est relativement élevé, ce qui freine généralement inverse des ressources disponibles. bien sûr très fortement le développement de la sco- Cette situation fort dommageable témoigne d'un larisation dans ces pays. Les analyses effectuées mauvais arbitrage entre quantité et qualité: d'une pour comprendre le retard de leur scolarisation, au part parce que le nombre des inscrits est souvent niveau primaire en particulier (Mingat, 1998), mon- incompatible avec les possibilités d'absorption du trent sans ambiguité que les facteurs essentiels ne marché du travail ; d'autre part parce que l'aug- sont ni l'insuffisance des ressources publiques (il mentation des effectifs, lorsque les finances ne serait pourtant légitime de les augmenter), ni peuvent suivre, entraîne une fréquente dégrada- l'intense pression démographique (cependant un tion de la qualité de l'enseignement. D'autant plus peu plus forte que dans nombre d'autres pays afri- qu'une part substantielle de la dépense publique cains et plus forte encore, en moyenne, que dans les consacrée à ce niveau d'études n'est pas allouée pays non africains à faible revenu) : la principale au fonctionnement pédagogique des établisse- responsabilité en incombe à la structure des coûts ments mais aux aides aux étudiants. unitaires. Il s'ensuit clairement que la réduction de ces coûts est ici le premier facteur à prendre en * dans l'enseignement primaire, il n'est pas inutile compte. de rappeler que le coût unitaire de fonctionne- On peut chercher à réduire de plusieurs façons ment (CU: dépense moyenne par année et par les coûts unitaires, sachant a) qu'il est utile d'identi- élève) peut être décrit comme la résultante du fier les principaux constituants qui expliquent leur niveau moyen du salaire des enseignants (SE), niveau élevé, b) et cela doit aussi être pris en consi- du rapport moyen élèves-maîtres (RME) et de la dération, qu'une réduction des coûts unitaires est moyenne des dotations pour les dépenses com- potentiellement porteuse de conséquences négati- plémentaires (DC) telles que: manuels et fourni- ves sur la qualité du service offert. Bien que nous tures scolaires, matériels pédagogiques ou super- ciblions ici l'enseignement primaire, il n'est pas vision administrative et pédagogique. La relation sans intérêt de considérer aussi l'enseignement s'écrit: [CU = (SE/RME) + DC]. Le tableau 5, ci- supérieur car -nous le verrons plus loin - les res- après, donne la valeur du salaire moyen des sources publiques sont fongibles et ce qui est utilisé enseignants (exprimée en unités de PIB par tête) à un niveau d'enseignement limite de facto la part ainsi que celle du rapport entre le nombre des disponible pour les autres. élèves et celui des maîtres. Tableau 4 Dépense publique moyenne par élève et niveau d'enseignement (unités PIB par tête) Primaire Secondaire Supérieur Pays 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 1987-88 1992-93 1997-98 Burkina Faso 0,21 0,21 0,22 0,89 0,63 0,35 13,9 13,4 7,5 Guinée 0,17 0,12 0,08 0,60 0,41 0,16 3,9 3,4 4,5 Mali 0,39 0,20 0,16 0,88 0,78 0,49 6,0 4,7 3,6 Niger 0,25 0,29 0,30 1,10 0,92 0,83 8,0 8,0 7,1 Sénégal 0,15 0,18 0,11 0,33 0,42 - 3,3 3,8 - Tchad 0,15 0,10 0,09 0,50 0,36 0,28 8,0 8,0 9,1 Ensemble 0,22 0,18 0,16 0,72 0,59 - 7,2 6,9 - Afrique francophone 0,16 0,15 - 0,45 0,49 - 4,6 5,6 - Afrique anglophone 0,13 0,10 - 0,64 0,66 - 6,1 6,3 - Pays d'Asie à faible revenu 0,12 0.08 - 0,21 0,19 - 1,9 0,9 - 8 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Tableau 5 Salaire moyen des enseignants et rapport élèves-maîtres dans le primaire Salaire moyen des enseignants (PIB/tête) Rapport élèves-maîtres Coût unitaire (PlB/Tête) Pays 1988 1993 1998 1988 1993 1998 1988 1993 1998 Burkina Faso 13 8,2 6,8 57 58 49 0,21 0,21 0,22 Guinée 4 2,6 2,8 40 49 43 0,17 0,12 0,08 Mali 8 8,4 7,2 38 60 72 0,39 0,20 0,16 Niger 9 10,3 10,5 40 34 42 0,25 0,29 0,30 Sénégal 9 7,2 5,2 51 54 55 0,15 0,18 0,11 Tchad 6 5,5 5,2 68 61 68 0,15 0,10 0,09 Ensemble 8,2 7,0 6,3 49 53 55 0,22 0,18 0,16 Afrique francophone (autre) 5,9 5,6 - 49 49 - 0,16 0,15 - Afrique anglophone 4,3 3,6 - 37 39 - 0,13 0,10 Pays d'Asie à faible revenu 2,9 2,5 - 38 38 - 0,12 0,08 La comparaison de ces chiffres fait ressortir que, à Le Sénégal est un des pays qui a suivi ces politi- l'exception de la Guinée (et, d'une certaine façon, du ques volontaristes avec le plus d'ardeur. Il a tout Tchad en raison de l'existence des « maîtres commu- d'abord intensifié le recrutement, au lieu d'institu- nautaires »), le niveau de salaire des enseignants est teurs, d'instituteurs adjoints, puis, le premier, il a spécialement haut dans les pays du groupe cible: 6,3 mis en place le recrutement d'enseignants à moindre fois la valeur du PIB par tête. Ce qui est nettement coût: les Volontaires de l'éducation. Le Burkina Faso plus haut que dans les autres pays africains, en par- a également réussi à faire baisser le niveau moyen ticulier anglophones (3,6 fois le PIB par tête) et bien du salaire des enseignants du primaire au cours de plus encore que dans les pays d'Asie à faible revenu la dernière décennie, mais en ne recourant pour où la moyenne du salaire des enseignants du pri- l'essentiel qu'au recrutement d'instituteurs adjoints. maire n'atteignait en 1993 que 2,5 fois le PIB par tête. Cette mesure a eu là un impact particulièrement On observe toutefois entre 1988 et 1998, dans la plu- important en raison d'un écart de salaire particuliè- part des pays du groupe cible, une tendance assez rement élevé entre ces deux catégories d'ensei- nette à la baisse du salaire moyen relatif des ensei- gnants ; mais l'effet de cette mesure est en voie gnants du primaire. Cette baisse a généralement d'épuisement et une nouvelle réduction du salaire résulté d'une part du mouvement « naturel » lié à un moyen ne pourra être obtenue que par le recrute- certain blocage des salaires (en situation de restric- ment de nouvelles catégories d'enseignants. La tions budgétaires) durant une période d'inflation, situation du Niger a été plus délicate car une baisse d'autre part de politiques volontaristes visant à quasi continue du niveau réel du PIB par tête a réduire le niveau moyen du salaire des enseignants. marqué la dernière décennie ; d'où l'impression Une de ces politiques volontaristes a été de recru- d'une hausse du niveau de salaire exprimé dans ter, plutôt que des instituteurs, des instituteurs cette unité alors que, dans l'absolu, les salaires adjoints à des salaires inférieurs, dans la mesure où avaient tendance à diminuer. Dans ce contexte, le il a pu être démontré que cela ne nuisait pas aux recrutement partiel d'instituteurs adjoints a seule- apprentissages des élèves. Une autre politique a été ment évité que la situation des finances publiques de recruter à moindres coûts de nouvelles catégo- s'aggrave encore. ries d'enseignants, en raison notamment du nombre Les pays du groupe cible sont également caracté- très appréciable des jeunes diplômés sans emploi. risés par des rapports élèves-maîtres plus impor- Ces personnels ont pu être recrutés aussi bien par tants (55 - en augmentation au cours de la dernière l'administration centrale que par les communautés. décennie) que ceux que l'on observe dans les autres DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 9 groupes de pays (49 dans les pays africains franco- Nombreux, parmi les pays cibles, sont ceux qui phones, 39 dans les pays africains anglophones et envisagent de prendre ou ont déjà pris des mesures 38 pour les pays d'Asie à faible revenus). pour le recrutement des enseignants à moindres Le fait que le rapport élèves-maîtres soit plus coûts; mais il est clair que ces mesures devront être élevé dans les pays du groupe cible (55) que par étudiées de façon à s'inscrire dans la durée car la exemple dans les pays d'Asie à faible revenu (38) durée est un paramètre essentiel, sous deux aspects semble impliquer que, toutes choses égales complémentaires: a) on ne peut agir que sur les flux d'ailleurs, la couverture scolaire quantitative de recrutement et c'est surtout à la longue que les devrait être meilleure dans les pays sahéliens ; or, effets sur le volume global de scolarisation se feront on observe le contraire: le taux brut de scolarisation progressivement sentir ; b) il convient de mettre en est en moyenne de 50 % dans les pays cibles contre place une structure dans laquelle les problèmes de 100 % dans les pays asiatiques dont le niveau de dualité (de statuts ou d'institutions), en quelque développement est sensiblement comparable. La sorte inhérents à la situation de transition entre sys- raison en est que l'impact de ce facteur, positif au tème actuel et système futur, pourront être gérés de plan quantitatif (la dimension qualitative sera exa- manière harmonieuse. minée dans la section IV de ce texte), est bien moin- dre que son impact très négatif au niveau des salai- Cibler les élèves qui accèdent à l'école et res ; en moyenne, ceux-ci sont en effet deux fois et surtout achèvent la scolarité primaire demie plus élevés dans le groupe cible (8,0 fois le PIB par tête, mis à part le cas de la Guinée) que dans Dans les analyses précédentes, nous nous sommes le groupe des pays asiatiques de référence (2,5 fois). intéressés au montant des dépenses publiques par Au total, il est certain qu'une politique de déve- élève et aux facteurs qui pouvaient expliquer d'une loppement de la scolarisation primaire, en particu- part leur niveau élevé, d'autre part et corrélative- lier au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Séné- ment, les difficultés que rencontreraient les pays sur gal, passe de manière incontournable par la le chemin de la scolarisation primaire universelle si recherche de mesures aboutissant à la réduction du aucune modification substantielle n'intervenait niveau moyen du salaire des enseignants du pri- dans ce domaine. Il convient maintenant d'aborder maire. Ce n'est pas là une simple option mais claire- cet autre point: ce qui est important n'est pas tant le ment une nécessité. Il est utile de rappeler à ce nombre global des élèves scolarisés au cours d'une propos que: a) dans tout pays, d'une manière statis- année donnée dans les différentes classes du cycle tiquement très significative, niveau de salaire des primaire que, bien plutôt, le nombre de jeunes que maîtres et couverture quantitative du système sco- le système amène en fin de cycle avec un niveau rai- laire sont en relation inverse ; b) dans le monde sonnable d'acquis opératoires, cognitifs et sociaux, entier, parmi les pays à faible revenu qui ont un car les adultes alphabétisés que deviendront ces taux brut de scolarisation supérieur à 80 % et jeunes d'aujourd'hui seront le moteur des progrès allouent au maximum 6 %M de leur PIB à l'éducation, économiques et sociaux de demain. Avant d'étudier aucun n'a un niveau de salaire de ses maître du pri- dans la section suivante les aspects qualitatifs, nous maire qui excède 3,8 fois le PIB par têtel. nous pencherons en un premier temps sur les ques- Cette nouvelle politique de recrutement d'ensei- tions de quantité et de couverture effective du sys- gnants à moindres coûts devrait permettre d'enga- tème jusqu'à la fin du cycle primaire. ger de plus en plus d'enseignants. Cela profitera évi- Pour que les jeunes atteignent la fin du cycle pri- demment aux enfants car, pour un budget donné, maire, deux conditions complémentaires - c'est davantage d'enseignants pourront être recrutés et une lapalissade - doivent être réunies: qu'ils accè- davantage d'enfants scolarisés ; mais ce serait aussi dent en première année d'école et qu'ils restent excellent pour les personnes ainsi recrutées car il effectivement scolarisés jusqu'en fin de cycle. Les existe dans tous ces pays un volant très substantiel chiffres présentés dans le tableau 1 ci-dessus mon- de jeunes ayant les qualifications académiques de trent que seuls quelque 50 'Y, des enfants ont accès à base requises et qui sont en fait sans emploi. la première année et qu'environ 60 % seulement 10 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE d'entre eux poursuivront leur scolarité jusqu'à la fin (mieux que ce n'est souvent le cas) les problèmes du primaire; au total, en moyenne, dans les pays du et les raisons sous-jacentes à un accès ou à une groupe considéré, il n'y a guère que 30 % des rétention jugés faibles. enfants d'une classe d'âge qui entreront dans la vie adulte avec au moins un bagage primaire complet. * en ce qui concerne l'accès à l'école, si l'on obs- On voit donc que la distance vers la scolarisation erve que seule une faible proportion d'enfants universelle effective est plus grande encore que ne y est inscrite dans tel ou tel pays (ou dans telle peut le laisser croire un examen rapide de la situa- région à l'intérieur d'un pays donné), il faut se tion à partir des données statistiques du taux brut demander dans quelle mesure cela est imputa- de scolarisation. D'autant plus d'ailleurs que ce ble à l'insuffisance d'offre scolaire à distance taux est en fait artificiellement gonflé par le niveau raisonnable des enfants et dans quelle mesure de redoublement de classe qui, comme le rappelle le à la réticence des parents à scolariser leurs tableau 2, est relativement élevé dans les pays de enfants dans le type d'école (contenus, qualité, notre groupe cible (ainsi que dans les pays franco- calendrier scolaire ... ) qui leur est proposé. phones en général). Quelles sont les part de l'offre et de la demande Ces observations induisent deux réflexions de scolarisation pour expliquer la faiblesse des complémentaires, importantes dans la perspective chiffres d'accès à l'école ? Si les caractéristiques des politiques éducatives: des écoles, telles qu'elles existent, conviennent aux parents (quand il y a une école à proximité, 1. la fréquence des redoublements et des abandons garçons et filles y ont également accès), c'est précoces entrame le gaspillage de fait d'une part que la politique d'offre est adaptée. Si l'on obs- fort substantielle des ressources publiques erve par contre que les écoles existent mais ne allouées à l'enseignement primaire puisque les sont pas fréquentées par une proportion suffi- chiffres du tableau 2 suggèrent que cette part sante de la population des enfants de la zone pourrait être de l'ordre du tiers des ressources raisonnable d'attraction, la configuration est budgétaires mobilisées pour le cycle primaire. différente : il faut modifier l'offre (laisser aux L'Etat mobilise donc des ressources d'environ communautés assez de souplesse pour définir 30 % supérieures à ce qui serait nécessaire pour le les caractéristiques des écoles autour du tronc capital humain effectivement constitué en cours commun national des contenus et des caracté- de primaire. Il s'ensuit que les actions devraient ristiques minimales de l'enseignant) ou agir porter: d'une part sur l'amélioration de la réten- directement sur la demande (par exemple en tion des élèves en cours de cycle, d'autre part sur réduisant les frais de scolarité ou en favorisant la réduction de la fréquence des redoublements. l'installation de puits dans les villages afin de Nous verrons plus loin que, la fréquence des libérer les jeunes filles de la corvée d'eau ... ). A redoublements n'étant que très peu corrélée au cet égard, il n'est pire politique que d'agir sur niveau moyen des acquisitions des élèves, il est l'offre pour tenter de résoudre un problème de nécessaire d'envisager des stratégies institution- demande. nelles pour réduire les redoublements. Ce qui, évidemment - ce sera souligné dans la section Dans les pays du Sahel, cette question de l'offre suivante - ne remet pas en cause la nécessité et de la demande de scolarisation est d'autant plus générale d'améliorer la qualité des apprentissa- cruciale que les progrès vers la scolarisation univer- ges dans les systèmes éducatifs des pays selle concernent au premier chef les zones rurales. sahéliens. On sait que cette question est importante car on a observé, par exemple au Niger, que, dans la zone 2. l'amélioration de l'accès à l'école ni celle de la géographique de Dosso ou de Mirriah, 40 à 45 % rétention en cours de cycle ne sont pour autant seulement des enfants (30 à 35 % pour les filles) des affaires simples en termes de politique édu- vont effectivement à l'école même si elle est à proxi- cative. Il convient en particulier de bien identifier mité de leur domicile - et l'on connaît aussi des DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 11 exemples de ce type au Burkina Faso et au Mali. aux cours multiples si les effectifs sur place sont Dans ces conditions, il est clair que se borner à agir réduits) assurant partout la continuité éducative sur l'offre d'éducation par les moyens traditionnels sur l'ensemble du cycle primaire : c'est là un sera insuffisant : l'offre scolaire doit être repensée constituant de base de la politique éducative. dans un sens qui corresponde à la demande des Cependant, dans un certain nombre de pays familles. Mais il existe aussi nombre de cas où le et/ou régions, il est possible que cela ne suffise véritable obstacle au développement de la scolarisa- pas et qu'il faille aussi envisager des actions tion est l'insuffisance de l'offre. Au total, il n'est pas d'une autre nature. douteux que cette question est importante, même si elle est aujourd'hui insuffisamment documentée et 2. si les élèves quittent prématurément l'école pri- mériterait de l'être davantage. maire après y avoir eu accès en situation de continuité éducative potentielle, c'est que la * En ce qui concerne la rétention en cours de sco- balance des facteurs positifs et négatifs de la sco- larité primaire, les mêmes types de difficultés larisation s'est détériorée depuis le jour de peuvent exister bien que les analyses et informa- l'inscription : les coûts liés à la scolarisation ont tions disponibles soient en gros plutôt meilleu- augmenté et/ou les bénéfices anticipés ont dimi- res. Comme l'eût fait Monsieur de la Palice, on nué. Examinons en premier la question des béné- peut définir les abandons en cours d'études fices. Il y a sans doute plusieurs raisons possibles comme le fait d'élèves qui, ayant eu accès à pour que les bénéfices anticipés en cours de sco- l'école, l'ont ensuite quittée prématurément. larité soient inférieurs à ceux qui étaient anticipés Parmi les raisons possibles, trois sans doute sont à son début ; une raison semble toutefois jouer à considérer de façon plus attentive: un rôle spécifique, avec des conséquences assez directes, dans une perspective de politique édu- 1. ce peut être parce qu'eux-mêmes ou leurs cative : l'incidence des redoublements de classe. parents décident de mettre un terme aux études Lorsqu'on demande à un enfant de redoubler ou bien parce que l'école qu'ils fréquentent est une (ou plusieurs) classes, on envoie en effet un incomplète et n'offre pas la possibilité de conti- signal assez clair aux parents : leur enfant a des nuer sur place les études jusqu'en fin de cycle. difficultés pour acquérir les contenus scolaires et Dans le premier cas, on peut dire que ce sont les donc profiter des bénéfices de la scolarisation. élèves abandonnent l'école ; dans le second, ce serait plutôt l'école qui abandonne les élèves et il Outre l'incidence du redoublement sur les coûts y a alors clairement défaillance du côté de l'offre (direct et d'opportunité), ceci indique aux parents scolaire. On ne dispose pas de données exhausti- que les bénéfices anticipés de la scolarisation ne se ves sur la fréquence de cette dernière situation matérialiseront pas bien pour leur enfant. Le redou- dans l'ensemble des pays mais on sait qu'il faut blement modifie donc la balance coûts/bénéfices en l'étudier de manière spécifique et au cas par cas. augmentant les premiers et surtout en réduisant les On a ainsi observé que cette lacune dans la conti- seconds, ce qui constitue une incitation aux parents nuité éducative expliquait l'essentiel des aban- à retirer l'enfant de l'école. Cet argument est dons précoces en Mauritanie et une politique confirmé par toutes les études effectuées tant au d'offre est donc appropriée. Au Bénin par contre, niveau individuel, dans des pays comme le Sénégal, environ seulement un quart des élèves qui aban- la Côte-d'Ivoire ou le Burkina Faso notamment donnent prématurément sont en situation de dis- (Confemen, 2000), que dans des comparaisons continuité éducative ; même lorsque les élèves internationales (Mingat et Sosale, 2000). On y ont à distance raisonnable une école offrant les mesure combien est significatif l'impact négatif des six niveaux du primaire, la rétention des élèves redoublements de classe sur la fréquence des aban- du CI au CM2 n'est, selon les estimations, que de dons en cours d'études primaires. A titre d'illustra- 52 %. Les pays ne peut évidemment que retenir tion, si les pays du groupe sahélien ramenaient leur l'option d'une offre locale (avec recours éventuel taux moyen de redoublement des 20 % actuels à par 12 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE exemple 7 % (ce qui est la moyenne des pays afri- qui exerce donc une pression croissante sur les cains anglophones), on estime que le taux de réten- familles ainsi incitées à retirer les enfants du cadre tion pourrait passer de 58 à 69 % - ce qui représen- scolaire, revêt en outre une signification particu- terait un progrès manifeste. lière pour les filles à l'approche de la puberté. De plus: a) on n'a pas trouvé de corrélation entre la fréquence des redoublements dans un pays et le S'il n'y a rien, bien sûr, qui puisse empêcher les niveau moyen d'acquisition des élèves (l'effet jeunes de grandir et d'engendrer des coûts d'oppor- redouté sur la qualité n'est pas confirmé par l'expé- tunité croissants, il existe par contre une façon de rience, ce que corroborent les analyses faites sur les réduire l'âge des enfants d'un niveau donné (par données individuelles dans les pays où elles sont exemple CM1): en assurant leur entrée effective en disponibles) ; b) la réduction de la fréquence des première année primaire dès l'âge de six ans et en redoublements permettrait, toutes choses égales réduisant de manière sensible (comme suggéré plus d'ailleurs (les ressources publiques en particulier), haut) la fréquence des redoublements. Il n'est pas d'étendre la couverture scolaire réelle et de réduire rare en effet, surtout en milieu rural, que certains le mésusage des ressources publiques. Une politi- enfants entrent à l'école à 9 ou 10 ans; on observe de que éducative raisonnable se devrait d'atténuer même parfois en milieu urbain que des jeunes sensiblement la fréquence des redoublements. enfants ne sont pas acceptés en première année pri- Diverses méthodes pratiques peuvent être mobili- maire et doivent patienter pour permettre à leurs sées dans ce sens ; elles ne sont pas présentées ici, aînés d'avoir une place. La mise en oeuvre complé- mais il convient de retenir qu'une réduction sub- mentaire des deux mesures ici évoquées pourrait stantielle des redoublements est tout aussi souhaita- sensiblement réduire l'âge des enfants en milieu-fin ble que réalisable. D'autant plus qu'on se situerait de cycle primaire et faciliter de la sorte la poursuite ainsi dans un contexte où le développement de la des études sans abandon jusqu'à leur terme couverture effective de l'enseignement primaire souhaitable. deviendrait, dans les pays considérés, une grande Quatre mesures viennent d'ètre discutées ici cause nationale sur l'échiquier politique des pro- a) recruter uniquement (ou au moins principale- chaines années. ment) des enseignants à coûts réduits ; b) assurer la continuité éducative en tous lieux sur le territoire 3. Une troisième raison pour laquelle la balance national ; c) réduire nettement la fréquence des coûts/bénéfices peut se modifier en cours de sco- redoublements ; d) assurer une entrée de tous les larité réside dans la dimension des coûts et en par- jeunes à l'école dès l'âge de 6 ans. Cependant, ticulier celle des coûts d'opportunité. Lorsqu'un même si ces mesures constituent certes un cadre enfant est envoyé à l'école (dit encore Monsieur de important pour le progrès significatif des scolarisa- La Palice), il ne reste pas à la maison ; les parents tions dans les pays sahéliens, les voies permettant la renoncent de ce fait à sa contribution à des activi- meilleure réponse aux demandes des populations tés productives (au sens large) dans le cadre de pour leur école resteront encore à être identifiées et l'économie domestique (travaux des champs, systématiquement explorées. Il est probable que les ramassage du bois, collecte de l'eau, garde des mouvements en cours, de décentralisation et de res- enfants plus jeunes, ... ). Ces coûts d'opportunité ponsabilisation des collectivités, pourront consti- valent pour tous les enfants, mais on observe tuer un facteur de rapprochement entre école et qu'ils tendent à être sensiblement plus importants communautés et favoriseront, autour des normes pour les enfants ruraux d'une part et de l'autre nationales essentielles (contenus de base, recrute- pour les filles (Niger, 1999). Lorsque l'enfant est ment, ... ), la flexibilité nécessaire pour que les écoles jeune, il/elle peut certes contribuer à ces activités, présentent les caractéristiques souhaitées par les mais avec l'âge, les coûts d'opportunité du temps populations et rejoignent leurs demandes. Ce n'est passé à l'école croissent à mesure que les enfants certainement pas là une question accessoire. deviennent plus forts et donc plus capables d'une contribution positive à l'économie familiale. L'âge, DEUX ÉTUDES P'OUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 13 Facteurs affectant la qualité des apprentissages développement, niveau d'éducation des adultes), des élèves les apprentissages des élèves étant meilleurs lors- que des adultes plus éduqués et une société mieux Après avoir examiné les configurations susceptibles organisée offrent un contexte où les relations inter- d'accélérer les progrès de la couverture quantitative personnelles sont centrées sur la lecture et l'écriture; effective des scolarisations dans les pays étudiés, il b) l'absence d'impact du volume des ressources faut maintenant nous pencher sur la dimension de moyennes mobilisées par élève dans les différents la qualité de l'école et des apprentissages des pays (les élèves des pays qui dépensent plus élèves: la production de capital humain ne se n'obtiennent pas en moyenne de meilleurs résul- mesure pas tant par la présence à l'école que par la tats) ; c) une variabilité résiduelle considérable preuve tangible des apprentissages de ceux qui y dénotant que, à niveau de développement économi- sont allés. Joindre à l'étude d'un plan pour J'expan- que et à ressources scolaires unitaires comparables, sion quantitative du système une réflexion centrée certains pays font beaucoup mieux que d'autres - sur l'aspect qualité est donc important. Les données ce qui montre que les améliorations de la qualité de sur la qualité des apprentissages sont malheureuse- l'éducation sont, pour une large part, endogènes. ment beaucoup moins nombreuses que celles dont on dispose sur les moyens mobilisés et les aspects * La seconde étude (Confemen, 2000) est plus limi- quantitatifs. Au plan des comparaisons internatio- tée mais aussi plus ciblée sur des pays africains nales, il existe deux sources a) la compilation des francophones dont deux du groupe sahélien, le données des différentes études internationales réali- Burkina Faso et le Sénégal. Elle va par ailleurs sées à la fin des années 80 et au début des années 90 au-delà de la mesure des acquis pour examiner (Lee et Barro, 1997), b) les travaux engagés par la les facteurs en oeuvre sur les acquisitions des Confemen dans le cadre du programme PASEC. élèves. Sur les 5 pays concernés, la valeur moyenne des acquis des élèves (2ème et 5ème * Dans la première (Lee et Barro, 1997), les données année du primaire, en mathématiques et en fran- disponibles concernent 71 pays dont 28 pays du çais) est de 50,6: 50 pour le Burkina Faso, 58 pour nord et 43 pays du sud, parmi lesquels 10 le Cameroun, 50 pour la Côte-d'Ivoire, 56 pour d'Afrique sub-saharienne. L'indicateur commun Madagascar et 40 pour le Sénégal. On retrouve de mesure des acquisitions des élèves varie de 18 là: a) d'un pays à l'autre, une diversité assez (Iran) à 72 (Singapour). La moyenne générale est forte dans le niveau des acquis des élèves ; b) de 45 (57 pour les pays du nord, 45 pour l'Asie, l'absence de corrélation entre le niveau d'acquis 38 pour l'Amérique latine, 36 pour les pays des élèves et le coût unitaire du primaire (les africains et 30 pour le Moyen-Orient). Ces élèves du Cameroun, par exemple, obtieinent chiffres bruts confirment une hiérarchie plus ou des résultats supérieurs à ceux de la Côte- moins attendue des résultats comparatifs entre d'Ivoire où le coût unitaire est le double). groupes de pays, mais on observera surtout qu'ils ne vérifient pas le pessimisme ambiant sur En termes génériques, les deux études délivrent la qualité de l'école dans le contexte africain. La le même message: ce n'est pas le volume global des moyenne du niveau des acquis y est certes basse, ressources mobilisées en moyenne par élève qui mais la différence avec l'Amérique latine n'est détermine la qualité effective des systèmes éduca- pas significative et la moyenne de l'Afrique sub- tifs (mais cela ne veut pas dire pour autant que faire saharienne est supérieure à celle des pays du une bonne école est possible quel que soit le niveau Moyen-Orient. des ressources). Et deux questions paraissent parti- culièrement importantes: la répartition des ressour- Trois résultats dignes d'intérêt ressortent de ces entre les différents éléments constitutifs du l'analyse de la variabilité du niveau des acquis des contexte d'enseignement et la capacité des écoles à élèves entre les différents pays: a) le poids transformer les ressources dont elles disposent important des variables contextuelles (niveau de effectivement au niveau local en résultats scolaires 14 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE de leurs élèves. Nous examinerons successivement ges implicites d'allocations de ressources entre les ces deux points. facteurs constitutifs de la production scolaire, ce qui ressort n'est pas tant un éventuel sous financement -. D'une façon générale, le niveau relativement de l'enseignement primaire que surtout la probable élevé des salaires dans les pays sahéliens (voir en possibilité d'une grande amélioration de la qualité particulier le tableau 5 ci-dessus) a eu deux des systèmes grâce à un meilleur équilibre entre les conséquences négatives sur la qualité de l'école différents éléments dont l'ensemble constitue le primaire: la première est qu'on a souvent cher- contexte où se font les apprentissages. ché à compenser ce coût par une utilisation plus intensive, c'est à dire en imposant des classes de 2. Au delà du niveau des dépenses et de l'équilibre très grande taille (moyenne du rapport élèves- de leur répartition, il est important aussi que les maîtres: 68 au Tchad, 72 au Mali). Solution fort écoles, dans la transformation des moyens dont dommageable car il est difficile de faire classe à elles disposent en résultats scolaires avérés de des effectifs aussi nombreux (il s'agit de moyen- leurs élèves, améliorent nettement leur score. On nes et beaucoup de situations sont donc pires), a parfois la tentation coupable de vouloir asso- même si l'on sait que l'impact sur les apprentis- cier la qualité d'un système éducatif aux ressour- sages effectifs des élèves reste relativement limité ces qu'il alloue en moyenne par élève. Nous (Confemen, 2000 ; Mingat et Suchaut, 2000). La avons vu que ce n'était pas justifié au niveau seconde conséquence est sans doute plus grave: national; ce n'est pas plus justifié au niveau local elle a trait au fait que les budgets pour l'ensei- car, pour des écoles disposant de ressources glo- gnement primaire sont consacrés à peu près bales comparables, la variabilité des acquis des exclusivement à la rémunération des enseignants élèves est souvent très forte. Le graphique 2 ci- et ne laissent que très peu pour les dépenses après, établi pour la classe de CMI au Burkina pédagogiques au sens large, les manuels scolai- Faso en est l'illustration - et des observations res en particulier, alors qu'on sait l'impact de ces comparables ont été faites au Sénégal et au Niger. derniers tant sur la manière d'enseigner que sur les apprentissages des élèves. Chaque point représente la situation moyenne d'une école. Sur l'axe vertical du graphique, pour En ce qui concerne la formation des maîtres, on des élèves comparables en début d'année scolaire, est en face de situations parfois contradictoires: cer- on note le score de fin d'année, tant du point de vue tains enseignants ont bénéficié d'une formation du niveau des acquisitions que des caractéristiques professionnelle initiale de plusieurs années, alors sociales ; plus le point est haut, meilleures ont été que d'autres peuvent ne pas en avoir reçu du tout. les progressions des élèves au cours de l'année sco- Les résultats des travaux empiriques sur cette ques- tion tout comme les appréciations qualitatives de nombreux pédagogues font ressortir à la fois que, si Graphique 2 une durée minimum de formation professionnelle Progrès des élèves et coût unitaire (CMI) initiale est souhaitable, les longues durées sont peu coût-efficaces. Par contre, on a maintes fois noté que 135 la formation continue, en cours d'emploi, était sou- 125 , vent inexistante alors qu'elle pourrait sans doute .Bv. faire beaucoup pour améliorer la qualité de l'ensei- , gnement. Enfin, la grande faiblesse des ressources , __.____"_._,_.,___. __ non absorbées par les salaires a souvent entraîné le o " délaissement des activités de supervision et de conseil pédagogique. Au total, dans les pays sahéliens, lorsqu'on exa- 65 ° 20000 30000 Z000 50000 60000 70000 mine le fonctionnement des systèmes et des arbitra- Cout unitaire global (Fcfa) DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 15 laire ; l'axe horizontal donne le niveau des coûts trois fois l'écart-type de la distribution individuelle- unitaires dans chacune des écoles de l'échantillon. et l'on observe le même résultat si, au lieu du coût Les données de base utilisés pour cette analyse spé- unitaire, on utilise directement la combinaison phy- cifiques sont celles de la Confémen et l'analyse elle- sique des facteurs d'organisation scolaire. Ceci indi- nmême a été effectuée en collaboration avec la que combien est faible le degré de gestion pédago- Banque mondiale pour les besoins de ce document. gique dans ce système (comme dans celui de tous Ce qui apparaît très clairement sur le graphique, les pays cibles de cette note: le graphique ci-dessus c'est d'une part l'existence d'une forte variabilité a été élaboré pour le Burkina Faso, mais la structure dans les deux axes, d'autre part l'absence notoire de en est très semblable pour d'autres pays, le Sénégal relation entre les deux grandeurs considérées. ou le Niger par exemple). Sur l'axe des coûts unitaires, la variabilité On voit bien les gains de qualité qu'on obtien- provient à la fois de la dispersion en quelque sorte drait si, à chaque niveau de coût unitaire, on pouvait « normale >, de la taille des écoles, compte tenu de la faire en sorte que les écoles les moins performantes distribution des populations sur le territoire, et de la se hissent au niveau des plus efficaces (les deux dispersion parasite due au fait que des écoles bulles sur le graphique 2). Il ne s'agit pas d'argent, scolarisant le même nombre d'élèves peuvent avoir (on se situe au même niveau de coût unitaire), mais des nombres bien différents d'enseignants - et ce de la façon dont cet argent est utilisé et transformé dernier fait peut être considéré comme le symptome en ce qui compte pour une école: ce que les élèves d'un certaine incohérence dans les allocations de apprennent. Ceci indique que ce qui se passe dans la ressources entre les différentes écoles. Parmi les classe (les techniques et les pratiques pédagogiques pays cibles, le degré d'incohérence le plus bas est et relationnelles, l'utilisation du temps scolaire, la celui de la Guinée (environ 8 %) ; il est sensiblement motivation du maître, ... ) a en fait plus d'impor- plus élevé au Sénégal et au Niger (15 à 20 %) et tance que le volume formel des ressources mobili- davantage encore au Burkina Faso (27 %) ; plus ce sées. On sait aussi que tous les enseignants ne sont degré d'incohérence est élevé, plus il faut accorder pas également motivés pour l'exercice de leur métier d'importance à l'amélioration de la gestion des et que les contrôles, y compris de la présence des personnels dans la politique globale du secteur. La enseignants, sont relativement faibles ; en fait, les variabilité sur l'axe des scores des élèves en fin performances des enseignants ne sont pas mesurées d'année scolaire traduit pour sa part la forte -donc pas régulées - alors que, les indications fac- hétérogénéité de la qualité des différents tuelles le montrent, c'est ce qui compte le plus pour établissements d'enseignement. Le fait qu'il n'y ait la qualité effective de l'école. pas, sur ce type de données, de corrélation Ainsi, le passage d'une bulle à l'autre correspond statistique entre le volume des ressources unitaires à un gain de 25 points pour les écoles concernées, et les apprentissages des élèves, corrobore ce qui soit environ 10 points en moyenne pour le système. avait déjà été remarqué sur la base des données Alors qu'à partir de ces mêmes données, on estime comparatives présentées précédemment. qu'une réduction de 50 à 30 de la taille moyenne des Au delà de ces informations générales, le graphi- classes n'aurait eu qu'un impact de 1,5 point sur que souligne clairement que, à niveau comparable l'échelle des acquisitions, mais une incidence consi- de dépenses par élève, les progrès réalisés par les dérable sur le coût budgétaire. Pour progresser élèves au cours de l'année scolaire varient forte- dans ce sens, on voit donc qu'il conviendrait a) que ment d'un établissement à l'autre. Ainsi, des élèves les performances individuelles des élèves, et corré- dont le niveau d'acquisitions est comparable en lativement des écoles, soient mesurées de manière à début d'année scolaire, scolarisés dans des écoles permettre les comparaisons - et que les mesures différentes mais caractérisées par un même coût soient rendues publiques ; b) qu'il existe des méca- unitaire, par exemple de 20.000 FCFA, ont-ils en fin nismes incitant fortement les écoles peu performan- d'année scolaire des niveaux d'acquis variant de 77 tes à s'améliorer, même si l'on peut envisager un à 135 (dans l'échelle des acquisitions retenue pour accompagnement pédagogique et institutionnel, cette étude), une amplitude considérable: plus de par exemple par les inspecteurs. 16 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Mobiliser davantage de ressources pour pement rural notamment), d'autre part des arbi- l'enseignement de base trages en faveur du niveau primaire à l'intérieur de ce qui reviendra à l'éducation. Cela laisse Les analyses et mesures dont on a fait état jusqu'ici planer bien des incertitudes (par exemple la déci- s'intéressaient aux façons de mieux utiliser les res- sion de mettre en place un grand hôpital à Oua- sources mobilisées pour l'enseignement primaire, gadougou avec les ressources de la dette ne va mais cela n'implique pas pour autant que les res- guère laisser de ressources pour l'enseignement sources couramment disponibles soient adéquates. primaire dans le pays) mais multiplie aussi les Si l'on se réfère aux données du tableau 3, on peut possibilités. Cela dit, indépendamment de observer que la part du PIB affectée à l'éducation l'affectation des ressources budgétaires associées dans les pays cibles n'est que de 2,7 % et qu'elle a directement à l'initiative PPTE, le contexte de la baissé au cours des cinq dernières années. Par stratégie de lutte contre la pauvreté offre une ailleurs, on constate que ce chiffre de 2,7 % est déjà excellente opportunité de modifier les allocations sensiblement inférieur aux 4 % observés en de ressources en faveur de l'éducation au sein du moyenne dans les pays PPTE du continent (les cas budget de l'Etat. de la Guinée et du Tchad étant à cet égard les plus préoccupants). Qu'il y ait certes de fortes raisons * Les allocations budgétaires au sein même du d'améliorer l'efficacité et l'équité dans l'utilisation budget de l'éducation constituent une seconde des crédits publics affectés à l'enseignement pri- ressource pour accroître le budget de l'enseigne- maire dans les pays sahéliens, n'empêche pas l'exis- ment primaire. Dans une perspective générale de tence d'arguments raisonnables en faveur de l'aug- lutte contre la pauvreté, pour un secteur comme mentation des ressources mobilisées pour ce niveau celui de l'éducation, l'objectif est double : a) de scolarisation. contribuer autant qu'il est possible à la croissance On peut certes anticiper le retour de la croissance économique car celle-ci constituera à terme, on le économique, qui contribuera à desserrer les sait, un moteur essentiel de la réduction de la contraintes macro-économiques, mais cela ne sera pauvreté ; b) cibler des populations particulières que progressif et l'impact global restera sans doute pour les aider à sortir de la situation de pauvreté assez faible dans les dix années à venir. La base fis- et devenir capables de bénéficier ultérieurement cale, particulièrement réduite, peut également des fruits de la croissance globale. Quant à s'améliorer; mais souvent, dans le passé, les amé- l'objectif même de cette croissance, il ne faut pas liorations anticipées ne se sont pas concrétisées. oublier que les pays sahéliens sont et resteront C'est donc avec les relatives contraintes du contexte dans un système d'économies duales, avec un actuel que l'enseignement primaire dans les pays secteur moderne qui se développe, certes, mais sahéliens devra chercher à mobiliser des ressources restera numériquement très minoritaire au complémentaires. niveau de l'emploi. * La mise en oeuvre de l'initiative PPTE de réduc- Il convient dès lors que les systèmes d'éducation tion de la dette, dans le cadre de laquelle les pays et de formation soient à même de fournir le capital établissent leurs programmes nationaux de lutte humain adapté à ces deux secteurs et à leurs évolu- contre la pauvreté, peut constituer une première tions progressives. Si l'enseignement supérieur et ressource. Deux aspects sont à mentionner: a) les l'enseignement technique sont évidemment impor- ressources réelles provenant de la réduction du tants pour le secteur moderne, c'est l'enseignement service de la dette sont relativement variables primaire qui constitue l'investissement « à tout d'un pays à l'autre ; b) les ressources obtenues faire » de référence pour le secteur traditionnel. pour l'enseignement primaire vont dépendre Dans la plupart des pays cibles de cette étude, d'une part des arbitrages faits en faveur de l'édu- l'enseignement supérieur est à la fois sur-dimen- cation par rapport aux autres secteurs candidats sionné en quantité et mal ciblé en termes de qualité à l'utilisation de ces ressources (santé, dévelop- et de pertinence des formations pour les besoins du DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 17 marché du travail. Selon les pays, des efforts plus beaucoup : ainsi, le niveau de salaire des ensei- ou moins importants restent à faire pour assurer gnants du primaire représente aujourd'hui 2,8 une meilleure régulation des flux et mieux cibler la fois le PIB par tête en Guinée contre 10,5 fois au qualité. Dans la mesure où les aides aux étudiants Niger). Ce qui conduit à envisager de définir les absorbent souvent une part substantielle des programmes d'action de chaque pays en fonction dépenses publiques de l'enseignement supérieur, la des spécificités observées. Toutefois, au-delà de régulation des flux devrait pouvoir générer des ces spécificités nationales, on pourrait sans doute opportunités de distraire progressivement une suggérer qu'un bon programme est celui où les partie des ressources du supérieur vers le primaire. arbitrages financiers sont effectivement faits en Au cours des dernières années, cette politique a été faveur de l'enseignement primaire, où sont assez nettement mise en oeuvre, par exemple au prises et appliquées les décisions de base qui Burkina, mais c'est beaucoup moins vrai dans des amélioreront l'équité et l'efficacité dans l'usage pays comme le Mali. des crédits publics (leur transformation en résul- tats sociaux tangibles : couverture quantitative * Le financement extérieur constitue bien entendu du système et mesures concrètes pertinentes une troisième ressource. Le Président de la pour une bonne qualité des apprentissages des Banque mondiale disait récemment - on l'a déjà élèves), celui, enfin, où ces actions s'inscrivent souligné - que le manque de ressources ne dans une volonté politique forte, capable d'assu- devrait empêcher aucun pays disposant d'un rer la mobilisation de tous les acteurs concernés, bon programme pour la scolarisation primaire y compris l'aide internationale. universelle de mettre en oeuvre ce programme: a priori, les possibilités existent donc. On bute tou- tefois sur la définition de ce que serait un «, bon 1. Au Zimbabwe, le salaire des enseignants du primaire représentait certes, en 1993, 7,6 fois le PIB par tête, avec un programme ». En premier lieu, il est clair que si taux brut de scolarisation primaire proche de 100 %; rnais les les pays du groupe cible présentent des aspects dépenses publiques pour l'éducation représentaient 9,1 /%, du communs, il ont aussi de très importants aspects PIB du pays, un niveau impossible à envisager pour les pays sahéliens. spécifiques (les conditions initiales diffèrent 2 Note préliminaire sur les besoins en financements publics dans la perspective de la scolarisation primaire universelle en 2015 dans les pays du Sahel Contexte et perspectives de cette note seuls 28 % de la classe d'âge atteignent la fini du pri- maire), on voit l'importance du chemin à parcourir L es pays du Sahel accusent un retard notable jusqu'à la scolarisation primaire universelle. Mais si L en matière de scolarisation, en particulier au les six pays ont effectivement une longue route à niveau du primaire où la couverture est rela- parcourir pour que cette couverture soit effective et tivement faible. Dans l'ensemble des six pays cible universelle, la distance varie sensiblement: au de cette note (Burkina Faso, Guinée, Mali, Niger, Niger et au Tchad, environ 20 % seulement de la Sénégal et Tchad), le taux brut moyen de scolarisa- classe d'âge effectuent une scolarité primaire com- tion n'était en effet que de 50 % en 1998 (tableau 1 plète; en Guinée ou au Sénégal, le double. ci-dessous). Si l'on ajoute que la couverture effec- Rappelons brièvement quelques chiffres et faits tive est en fait inférieure à ce chiffre (on estime que évoqués dans le premier volet de ce document. Tableau 1 Données de base sur la couverture de la scolarisation primaire, 1988-98 Taux brut de Taux d'accès en 1ère Taux d'accès en Ressources publiques scolarisation primaire année primaire dernière année primaire pour le secteur (% PIB) Pays 1987-88 1997-98 1987-88 1997-98 1987-88 1997-98 1987-88 1997-98 Burkina Faso 27 40 28 42 19 25 2,9 2,8 Guinée 35 55 39 51 20 36 3,1 2,0 Mali 23 48 23 47 il 26 3,3 3,1 Niger 30 30 32 36 22 20 2,5 3,0 Sénégal 59 62 52 65 42 40 4,8 3,3 Tchad 51 65 54 83 16 19 1,5 2,1 Ensemble 38 50 38 54 22 28 3,0 2,7 19 20 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Si l'on regarde les ressources publiques mobilisées ble pour le développement de la scolarisation pri- dans ces pays, on remarque qu'elles sont relative- maire universelle ne devraient pas être entravés par ment modestes puisque la moyenne n'atteint pas 3 % le manque de ressources. La présente note, établie du PIB en 1998. Ce chiffre, inférieur à la moyenne de sur la base des travaux de la réunion des experts 4,5 % observée dans les autres pays africains, donne (Bamako, 1-3 novembre 2000) qui préludait à la à penser qu'un sous-financement de l'éducation réunion des chefs d'Etats des six pays considérés pourrait être à l'origine des performances modestes (Bamako, 27 novembre 2000), étudie quelles des pays cibles en matière de couverture scolaire. seraient les ressources nécessaires au financement Empiriquement valide, l'argument a pourtant des de ces plans crédibles et, dans cette perpective, les limites. En effet, si l'on étend la comparaison des ressources nationales qui manqueraient aux pays. moyennes aux pays à faible revenu d'Asie ou l'idée qui s'en est dégagée est que les plans d'Amérique latine, on constate que le volume des devraient être financées par des appuis internatio- ressources publiques y est plus ou moins comparable naux ciblés - et selon des modalités institutionnel- à celui des pays du Sahel (2,7 % du PIB dans les pays les et pratiques qui restent bien entendu à définir. d'Asie et 2,8 % dans les pays d'Amérique latine), A cet effet, on a d'abord procédé à une analyse mais avec un niveau très supérieur de couverture des politiques éducatives les mieux adaptées à la effective du primaire. De même si l'on examine définition d'une éducation primaire assurant à la d'autres pays du continent africain, on observe que fois la couverture universelle et une amélioration l'Ouganda, le Ghana ou le Cameroun mobilisent des sensible de la qualité des services éducatifs (ce sont, ressources publiques comparables à la moyenne de dans une large mesure, les politiques étudiées lors celle des six pays cibles mais obtiennent des perfor- des discussions courantes entre les pays et la mances très supérieures en matière de couverture de Banque mondiale, dans le contexte des plans décen- la scolarisation primaire. Enfin, l'argument selon naux, des nouveaux projets, de l'initiative PPTE et lequel le volume des ressources publiques serait la du cadre stratégique de réduction de la pauvreté). principale cause du retard des pays faisant l'objet de On a ensuite effectué des simulations financières cette note est contredit en partie au sein même des pour identifier le maximum des ressources nationa- pays du groupe car ce ne sont pas ceux qui dépen- les mobilisables et les montants nécessaires à la sent le plus qui obtiennent systématiquement les réalisation de l'objectif normatif. (Il faut noter que le meilleures performances: le Niger, par exemple, modèle de simulation utilisé est un modèle très pour une performance très inférieure, dépense sensi- global qui ne fait en aucune manière concurrence blement plus que la Guinée. aux modèles plus sophistiqués généralement utili- Il ressort de cette brève discussion que, si les res- sés au plan national pour l'élaboration des pro- sources publiques consacrées à l'éducation sont grammes décennaux.) certes modestes, en moyenne, dans notre groupe cible (et devraient sans doute être augmentées), il y Le modèle de simulation utilisé a aussi d'indéniables progrès à réaliser pour parve- nir à ce que les ressources publiques effectivement Avant d'examiner les résultats obtenus, une descrip- mobilisées soient utilisées de manière plus effi- tion rapide de la structure du modèle qui a permis ciente, c'est à dire produisent plus de résultats ces simulations s'impose. Fort banalement, ce sociaux effectifs. En d'autres termes, il faudrait sans modèle est constitué de deux blocs principaux: le doute davantage de ressources (de source interne premier concerne les ressources nationales suscepti- et/ou en provenance de l'aide extérieure), mais il bles d'être mobilisées; le second, le volume des res- faudrait aussi que les pays prennent les mesures sources publiques nécessaires pour atteindre les structurelles de politique éducative nécessaires objectifs. Sont incorporés dans ce bloc les paramètres pour utiliser les ressources de manière à augmenter caractéristiques des grandes politiques éducatives - sensiblement leur niveau d'efficience. pour ce qui est, du moins, de leurs conséquences Ceci nous renvoie directement à la déclaration financières - et l'on y fait par ailleurs la distinction du forum de Dakar: les pays qui ont un plan crédi- entre les dimensions dépenses courantes et dépenses DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHIEL EN 2015 21 en capital. Le solde des ressources nationales et des Les ressources pour le primaire dépendent donc: ressources nécessaires correspond aux besoins de a) de l'évolution du PIB (exogène), b) du taux de financement non couverts. Le modèle est calé sur pression fiscale du pays (exogène et soumis aux une année de référence (généralement 1998 ou 1999) contraintes de la structure des économies), c) des et les estimations des ressources et besoins couvrent arbitrages budgétaires au bénéfice de l'éducation au la période allant de 2000 à 2015, année cible pour la sein de ressources publiques (choix politique) et d) scolarisation universelle dans chacun des pays des arbitrages faits au sein de l'éducation au béné- concernés. Tous les éléments financiers sont expri- fice du primaire (choix politique mais assujetti à la més en unités monétaires de l'année de référence. nécessité d'obtenir un équilibre sectoriel convenable avec des ressources suffisantes aussi pour le post- Les ressources publiques nationales primaire). Dans les hypothèses utilisées (suscepti- susceptibles d'être mobilisées bles bien entendu d'ajustements) on a retenu un taux de croissance prospectif de 6 `/o constant sur la D'une manière très simple, les ressources publiques période et un taux de pression fiscale en augmenita- pour le primaire (PUBPRIM) dépendent : d'une tion progressive de 2 à 3 points par rapport au taux part des ressources publiques allouées au secteur de observé dans l'année de référence. La part des res- l'éducation (PUBED) ; d'autre part de l'arbitrage sources publiques affectée à l'éducation a été fixée à effectué à l'intérieur de celles-ci entre le primaire et un chiffre en général croissant par rapport à la situa- l'ensemble de tout le post primaire; cet arbitrage est tion initiale (traduisant, entre 2000 et 2015, des arbi- caractérisé ici par le pourcentage alloué au primaire trages budgétaires plus favorables au secteur de dans le volume des ressources publiques du secteur l'éducation), avec un objectif pour 2015 qui, légère- (PRIMED). ment variable d'un pays à l'autre, s'établit la plupart du temps entre 25 et 30 %. Enfin, la cible en 2015 1) PUBPRIM =PUBED x PRIMED pour la part des ressources publiques du secteur affectée au primaire a été en général choisie entre 50 A leur tour, les ressources publiques pour le sec- et 55 0/,, (marquant ainsi une stabilité ou une aug- teur de l'éducation dépendent du volume des recet- mentation de l'indicateur sur la période). tes de l'état (PUBTOT) et des arbitrages budgétaires effectués au bénéfice de l'éducation dans la straté- Les ressources nécessaires pour la gie globale du gouvernement. Cet arbitrage est scolarisation universelle de qualité caractérisé par le pourcentage des ressources publi- ques globales affecté au secteur (BUDED). Cet aspect du modèle risque d'être beaucoup plus complexe en raison de la multiplicité des politiques 2) PUBED = PUBTOTx BUDED susceptibles d'être impliquées. Un des objectifs a été de conserver une structure simple, agrégée et Enfin, il faut considérer que les recettes de l'état très transparente, qui ne définit de façon précise ont une origine : elles résultent d'un prélèvement certaines des politiques importantes pour le secteur, sur l'économie du pays. Les recettes publiques sont mais assure toutefois qu'elles disposeront d'un alors définies comme le produit du Produit Inté- espace financier suffisant à leur mise en place (selon rieur Brut (PIB) par la pression fiscale (PF) qui des modalités qui ne sont pas considérées dans cet caractérise la proportion de PIB prélevée par l'état. exercice. Le premier but de celui-ci est de cerner l'évolu- 3) PUBTOT = PIB x PF tion de la population d'âge scolaire entre l'année de référence et 2015, année au cours laquelle la popula- En articulant ces trois expressions symboliques, tion scolarisée est par hypothèse égale à la popula- on obtient: tion scolarisable en l'absence de redoublements de classe. Si l'on suppose que ceux-ci atteindront PUBPRIM = PIB x PF x BUDED x PRIMED encore 10 ?/%, en 2015, on cible alors une population 22 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE scolarisée égale à 1,10 fois la population d'âge sco- des enseignants du primaire est de 2,8 fois le laire. On suppose aussi qu'auront été prises, entre PIB par tête contre 10,5 au Niger! 2000 et 2015, toutes mesures adéquates (actions sur la qualité de l'école et la demande de scolarisation) Alors qu'il est impératif pour le Niger (comme permettant d'obtenir une bonne rétention des pour les autres pays cibles) de trouver des élèves en cours de cycle primaire, voies pour réduire le niveau moyen du salaire Il s'agit, en fonction de l'évolution du nombre de ses maîtres' , il est sans doute justifié de des élèves scolarisés (NES) dans le primaire entre penser qu'en Guinée, les salaires devraient l'année de référence et 2015, de calculer les res- légèrement augmenter si le pays veut attirer sources nécessaires. des enseignants possédant les qualités requi- ses. Les pays ont bien conscience de cette A) Dépenses courantes. On peut y considérer deux nécessité ; tous ont engagé, plus ou moins groupes: a) la masse salariale des enseignants récemment, des actions pour recruter des mai- MSE) ; b) autres dépenses: d'administration tres d'un nouveau type (maîtres communau- (personnels et autres), d'encadrement pédago- taires et volontaires) et la poursuite assidue de gique (inspections, conseils pédagogiques, éva- cette politique ne manquera pas d'entraîner luation, formation continue), de matériels une réduction progressive du niveau moyen didactiques et pédagogiques (livres scolaires, de rémunération des enseignants en poste. petit matériels) et enfin d'entretien courant ; Mais, même si les méthodes différeront d'un nous appellerons DEPHENS le volume des pays à l'autre, on peut envisager qu'en 2015 le dépenses de ce groupe et examinerons successi- salaire moyen ne représentera plus en général vement les deux groupes (a) et (b). que 3,5 à 4,5 fois le PIB par tête des pays. C'est donc ce niveau que le modèle cible pour 2015, a) MSE n'est autre que le produit du nombre des en aménageant une transition progressive enseignants (NENS) et du salaire moyen de entre le niveau actuel et le niveau visé. La ceux-ci (SMENS) sachant que le nombre des connaissance de l'évolution du PIB par tête enseignants nécessaires chaque année va (rapport du PIB à la population du pays) dépendre de l'évolution du nombre des élèves permet alors d'obtenir, sur l'ensemble de la scolarisés (NES, défini plus haut) et des choix période, une estimation de l'évolution de la du pays en matière de rapport élèves-maîtres masse salariale des enseignants du primaire. moyen (REM); dans l'option retenue de cibler une école primaire de qualité, on fait l'hypo- b) Les autres dépenses, dont nous avons indiqué thèse de viser pour 2015 un rapport élèves- qu'elles étaient assez variées, n'atteignent sou- maîtres moyen de 40 (avec une évolution pro- vent, dans la situation actuelle, qu'un niveau gressive depuis le chiffre observé dans l'année insuffisant. En moyenne, pour les 6 pays cibles, de référence). elles n'équivalent guère qu'à environ 30 % de la masse salariale des enseignants « à la craie ». Le salaire moyen des enseignants va certes Il faut donc envisager et de rationaliser leur dépendre, quant à lui, du niveau de salaire des usage (réduction relative des dépenses admi- enseignants actuellement en poste et encore nistratives en particulier) et d'en augmenter le dans la profession en 2010 ou 2015, mais sur- montant global pour pouvoir assurer de bons tout - le point est crucial - du niveau de standards de qualité à l'enseignement dis- rémunération des nouveaux enseignants pensé. On estime que ceci serait réalisable en recrutés durant la période considérée. Ques- augmentant leur niveau jusqu'à 35 à 40 % de tion essentielle: où se situera le niveau de celui de la masse salariale des enseignants. Le salaire offert par rapport à celui de l'année de montant en est donc aisé à évaluer à partir du référence ? A pays différents, situations diffé- calcul, déjà effectué, de la masse salariale des rentes: en Guinée, le niveau de salaire moyen enseignants « à la craie ». DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 23 Les dépenses courantes (A) sont fort simplement total, ce sont donc 132,8 milliards de FCFA qu'il la somme des dépenses pour les enseignants (a) serait nécessaire de mobiliser en 2015, ce qui corres- et des autres dépenses (b). pond à environ 3,3 % du PIB du pays pour le seul primaire (l'ensemble du secteur de l'éducation B) Quant aux dépenses en capital pour assurer le représentant alors 5 %/O). développement prévu de la scolarisations, elles Les ressources publiques nationales n'étant esti- résultent assez directement de la connaissance des mées, en 2015, qu'à 83,4 milliards, il en résulte un besoins en salles de classe pour chacune des écart de 49,4 milliards FCFA (20,6 milliards pour le années du programme, des flux annuels nécessai- fonctionnement courant - financé en priorité sur res et d'une estimation du coût de construction/ budget national - et de 28,9 milliards pour les équipement de base d'une salle de classe (dans dépenses en capital. Ces chiffres peuvent être consi- des conditions économiques de construction). dérés comme une première estimation de besoins en aide extérieure. Il est maintenant aisé de récapituler d'une part Sur l'ensemble de la période 2000 - 2015, les l'évolution des ressources publiques mobilisables, besoins additionnels cumulés sont ainsi estimés à d'autre part celle des dépenses (courantes et en environ 217 milliards de FCFA pour les dépenses capital) qui devraient être engagées pour assurer courantes et à 332 milliards pour les dépenses en la scolarisation universelle de qualité en 2015. Du capital. Le total, 549 milliards de FCFA, correspond rapprochement de ces chiffres, résultera le volume à quelque 730 millions de US$ sur 15 ans, soit 49 des ressources additionnelles nécessaires. millions de US$ par an. Il est à noter cependant que se réduiront au delà de 2015: a) les besoins en capi- Le tableau 2 ci-après montre, à titre d'exemple, tal, car il suffira de construire des salles de classe l'application de ces calculs au cas du Burkina Faso. pour maintenir (et non plus augmenter) le taux de scolarisation ; b) progressivement, les besoins addi- Les résultats obtenus dans les six pays tionnels en dépenses courantes, dans la mesure où les dépenses publiques augmenteront à un rythme Rappelons tout d'abord que l'exercice ne fixe que supérieur à celui des élèves à scolariser. des ordres de grandeur et que les données utilisées Ce type d'estimation peut effectué pour chacun pour son application demandent sans aucun doute des six pays faisant l'objet de l'étude et le tableau 3 à être validées et, en toute hypothèse, affinées, pour ci-dessous propose une consolidation des résultats bien coller et à la réalité de la situation dans l'année obtenus. de référence et aux politiques éducatives en cours Si l'on porte en premier lieu son attention sur la de discussion ou de mise en ceuvre. ligne des dépenses à engager pour le secteur à la fin On voit, dans le modèle de simulation pour le du programme, en 2015, on observe que les ressour- Burkina Faso (tableau 2), que le pays est susceptible ces nécessaires pour obtenir une couverture primaire de mobiliser, en 2015, 83,4 milliards de FCFA pour universelle capable d'offrir une qualité raisonnable le financement public de son enseignement pri- (tout en conservant un minimum de possibilités de maire (environ 2,1 % du PIB contre 1,5 % en 1999). financement du post-primaire), s'échelonnent Le financement public du secteur éducation corres- approximativement, selon les pays, entre 4 et 6 `/o du pondrait alors à 3,8 % du PIB contre 2,6 % en 1999) PIB, ce qui ne peut s'obtenir qu'au prix d'efforts en Les besoins pour assurer en 2015 l'ensemble du général substantiels en matière de politique salariale fonctionnement courant du primaire (couverture pour les enseignants du primaire. Il est donc clair universelle et qualité améliorée) sont estimés à que les pays où les dépenses publiques d'éducation 103,9 milliards de FCFA (dont 75,3 milliards pour sont inférieures à 4,5 % du PIB ne peuvent mettre sur les enseignants et 28,6 pour les dépenses que nous pied un système éducatif à même de fournir les ser- avons appelées « autres »). Par ailleurs, pour cette vices attendus en quantité et en qualité. même année 2015, les besoins de financement en A examiner maintenant la dernière ligne du capital sont estimés à 28,9 milliards de FCFA. Au tableau, on mesure l'ampleur des financements 24 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE Tableau 2 Modèle de simulation pour le Burkina Faso (Fcfa) Année de Hypothèses base Années de projection Cible 2015 1999 2000 2005 2010 2015 RESSOURCES NATIONALES ANTICIPÉES PIB (millions) 1.591.000 1.686.460 2.256.864 3.020.193 4.041.700 Taux de croissance annuel du PIB (%) 6 % Pression fiscale (%) 15,0 % 13,0 % 13,1 % 13,8 % 14,4 % 15,0 % Recettes fiscales (millions) 206.830 221.348 310.319 434.153 606.255 % Dépenses d'éducation courantes/recettes 25,0 % 19,6 % 20,0 % 21,7 % 23,3 % 25,0 % Budget courant de l'éducation (millions) 40.621 44.214 67.184 101.266 151.564 % Primaire/Education (courant) 55,0 % 58,0 % 57,8 % 56,9 % 55,9 % 55,0 % Budget courant du primaire (millions) 23.560 25.561 38.211 56.646 83.360 BESOINS DE FINANCEMENT PUBLIC Dépenses courantes Population totale (milliers) 11.065 11.327 12.735 14.317 16.096 Accroissement annuel de la population globale 2,4 % PIB/Tête 143.787 148.885 177.222 210.952 251.102 Population scolarisable 2.061.538 2.110.396 2.372.617 2.667.418 2.998.849 Accroissement annuel de la population scolarisable 2,4 % Taux de scolarisation 100 % 41,3 % 45,0 % 63,3 % 81,7 % 100,0 % Elèves du primaire 852.160 949.019 1.502.163 2.178.114 2.998.849 Nombre d'élèves par enseignant 40,0 49,0 48,4 45,6 42,8 40,0 Nombre d'enseignants 17.391 19.593 32.924 50.876 74.971 Coût enseignant en unité PIB/Tête 4,0 6,9 6,7 5,8 4,9 4,0 Coût enseignant (millions) 17.254 19.599 33.915 52.655 75.302 Autres dépenses courantes/Coût enseignant (%) 38,0 % 33,0 % 33,3 % 34,9 % 36,4 % 38,0 % Autres dépenses courantes (millions) 5.694 6.529 11.828 19.186 28.615 Total dépenses courantes primaire (millions) 22.948 26.128 45.743 71.842 103.916 Besoins pour dépenses en capital Coût par salle (milliers) 6.000 Nombre de classes/enseignant 1,00 Nombre de salles 17.391 19.593 32.924 50.876 74.971 Nouvelles constructions/an 2.202 2.666 3.590 4.819 Besoins Capital (millions) 13.210 15.998 21.542 28.915 RÉCAPITULATIF Besoins totaux pour le primaire (millions) Courant 26.128 45.743 71.842 103.916 Capital 13.210 15.998 21.542 28.915 Total 39.338 61.741 93.384 132.831 Ressources totales pour le primaire (millions) Courant 25.561 38.211 56.646 83.360 Ecart - Besoin de financement (millions) Dépenses courantes -567 -7.532 -15.196 -20.556 Dépenses en capital -13.210 -15.998 -21.542 -28.915 Besoins totaux -13.776 -23.530 -36.738 -49.471 DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 25 Tableau 3 Le financement de la scolarisation universelle de qualité dans les 6 pays Burkina Faso Guinée Mali Niger Sénégal Tchad Conditions initiales Taux brut de scolarisation (%) 40 55 48 30 62 65 % PIB pour le secteur 2,6 1,5 2,4 3,8 4,0 1,6 % PIB pour le primaire 1,5 0,8 0,9 1,9 1,5 0,7 % PIB pour le post-primaire 11 0,7 1,5 1,9 2,5 0,9 Situation 2015 Taux brut de scolarisation (%) 100 100 100 100 100 100 Ressources publiques nationales % PIB pour le secteur 3,8 2,2 4,6 4,2 5,1 3.0 % PIB pour le primaire 2,1 1,3 2,3 2,3 2,5 1,5 % PIB pour le post-primaire 1,7 1,0 2,3 1,9 2,5 1,5 Dépenses à engager % PIB pour le secteur 5,0 3,8 5,6 5,5 6,0 5,1 O/% PIB pour le primaire 3,3 2,8 3,3 3,6 3,5 3,6 Ressources additionnelles nécessaires % PIB en 2015 1,2 1,6 1,0 1,3 1,0 2,1 Millions de US$ sur 15 ans 732 588 479 622 932 632 Dépenses courantes 289 310 33 225 480 358 Dépenses en capital 443 278 446 397 452 274 Millions US$ par an en moyenne (total) 49 39 32 41 62 42 additionnels qui devraient venir compléter les res- élevés, ni si les financements correspondants peu- sources publiques mobilisés par les pays. Pourtant, vent ou ne peuvent pas être mobilisés auprès des ces financements sont nécessaires car, c'est un cons- agences d'aide extérieure, ni enfin quels mécanis- tat concret, les ressources publiques que les pays mes concrets on peut imaginer si l'opération est sont raisonnablement capables de générer pour leur jugée financièrement envisageable. secteur éducatif sont obligées de rester à des Cela dit et pour achever cette note, il semble utile niveaux qui rendent bien difficile d'atteindre de donner des informations plus précises sur les l'objectif d'une scolarisation universelle de qualité voies qui ont permis d'arriver à ces chiffres de res- convenable. En effet, pour un pays tel que le Bur- sources additionnelles nécessaires. kina Faso dont la capacité fiscale est estimée à quel- Considérons tout d'abord le cas d'un pays X qui, que chose comme 14 % du PIB, on voit bien que, en actuellement d'une part effectue des arbitrages affectant 30 des ressources publiques au secteur financiers plus ou moins favorables au secteur de scolaire, il n'est pas aisé d'obtenir les 5 % du PIB l'éducation et à l'enseignement primaire en particu- jugés par ailleurs nécessaires (avec 14 % de pression lier; d'autre part fait fonctionner son enseignement fiscale et 30 0/ des ressources affectés à l'éducation, primaire dans telles conditions d'enseignement, le pays arrive en fait 4,2 % du PIB). Selon les pays, tant en matière d'encadrement que de dépenses non la moyenne annuelle des ressources additionnelles salariales. Il est en outre caractérisé par un niveau nécessaires estimées varie de 32 millions de US$ à moyen de rémunération de ses enseignants et par 62 millions pour le Sénégal - dont les besoins plus une certaine valeur initiale de son taux brut de sco- grands tiennent surtout à ce que le niveau du PIB larisation. Si, à partir de là, il envisage la scolarisa- par tête v est sensiblement plus élevé que dans les tion universelle à une échéance donnée, il se trouve autres pays. Mais ce n'est pas le lieu d'examiner ici face à plusieurs options, dont les 4 suivantes dans quelle mesure ces chiffres sont ou ne sont pas 26 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE a) il ne change rien : ni à ses arbitrages financiers d) enfin, il complète son évolution politique en internes, ni au niveau de rémunération de ses modifiant ses arbitrages financiers et en donnant enseignants, ni aux conditions d'enseignement. une plus grande priorité budgétaire au secteur de Pour atteindre son objectif, il a alors besoin d'un l'éducation, au niveau primaire en particulier. certain volume de ressources publiques (Ai). Dans ces conditions, les ressources nécessaires au Comme il ne mobilise qu'un volume (BI) de res- fonctionnement de la scolarité primaire univer- sources publiques nationales, son besoin addi- selle de qualité avec des maître aux salaires révi- tionnel est: (Cl) (A) - (BI). sés reste au niveau (A3) mais les ressources publi- ques nationales augmentent jusqu'au niveau (B2) b) il ne change ni ses arbitrages financiers ni le - avec (B2) plus grand que (BI). Dans ces condi- niveau de rémunération de ses enseignants mais tions les besoins additionnels sont réduits au souhaite parvenir à une scolarisation universelle niveau (C4) - avec (C4) plus petit que (C3). de meilleure qualité. Dans ce cas, il a alors besoin d'un volume (A2) de ressources publiques - avec Bien entendu, les différentes valeurs de A, B et C (A2) plus grand que (AI). Comme son volume de (selon les notations ci-dessus) diffèrent suivant les ressources disponibles est toujours (BI), ses pays, les conditions initiales dans les différentes besoins additionnels augmentent et s'établissent à dimensions considérées et l'ampleur des décisions (C2) - avec (C2) plus grand que (CI). de politique éducative envisagées. Si nous poursui- vons l'exemple du Burkina Faso pour illustrer et c) il conserve les mêmes arbitrages financiers mais chiffrer la démarche, la structure des chiffres obte- modifie le niveau de rémunération de ses ensei- nus est donnée par le tableau 4 ci-dessous, où les dif- gnants (en particulier, il le baisse s'il est initiale- férentes étapes sont référencées comme plus haut. ment trop élevé) et continue de viser une scolari- L'option (a) sert de référence : le pays doit sation universelle de qualité. Dans ce cas, le engager, en 2015, 141 milliards de dépenses cotu- volume de ressources publiques pour financer le rantes, avec un déficit global de 95,6 milliards de système est (A3) qui est inférieur à (A2) si les FCFA. Dans l'option (b), l'amélioration de qualité salaires relatifs étaient initialement trop élevés (et prévue (diminution du rapport élèves-maîtres de 49 supérieur dans le cas contraire). Les ressources à 40 et augmentation des dépenses hors salaires des disponibles restent au niveau (BI) mais les enseignants) entraîne pour les dépenses courantes besoins additionnels s'établissent alors au niveau un coût global de 38,3 milliards et de 8,9 milliards (C3) - avec (C3) inférieur à (C2). pour les dépenses en capital ; comme les ressources publiques nationales ne changent pas dans cette Tableau 4 Articulation des différentes actions définissant les ressources additionnelles nécessaires au cours de l'année 2015 (milliards de FCFA de 1999) Options Option (a) Option (b) Option (c) Option (d) Dépenses à engager Courantes 141,0 179,3 103,9 103,9 Capital 20,0 28,9 28,9 28,9 Totales 161,1 208,2 132,8 132,8 Ressources publiques pour le primaire 65,4 65,4 65,4 83,4 Ressources additionnelles nécessaires Courantes 75,6 113,9 38,5 20,5 Capital 20,0 28,9 28,9 28,9 Totales 95,6 142,8 67,4 49,4 DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 27 Tableau 5 Ressources nécessaires en 2015 pour la scolarisation universelle dans les 6 pays en fonction des politiques mises en oeuvre (Millions de FCFA 1999 sauf Guinée: millions de F. Guinéens) Option (a) Option (b) Option (c) Option (d) Pas de politique Qualité améliorée (b) + Action sur salaires (c) + Arbitrages budgétaires Burkina Faso Dépenses courantes à engager 141,0 179,3 103,9 103,9 Dépenses totales à engager 161,1 208,2 132,8 132.8 Ressources publiques pour primaire 65,4 65,4 65,4 83,4 Ressources additionnelles courantes 75,6 113,9 38,5 20,5 Ressources additionnelles totales 95,6 142,8 67,4 49,4 Guinée Dépenses courantes à engager 110,3 124,1 167,0 167,0 Dépenses totales à engager 145,2 168,1 211,0 211,1 Ressources publiques pour primaire 87,8 87,8 87,8 94.0 Ressources additionnelles courantes 22,5 36,3 79,3 73,1 Ressources additionnelles totales 57,4 80,3 123,3 117,1 Mali Dépenses courantes à engager 69,2 133,8 86,3 86,3 Dépenses totales à engager 81,8 168,4 120,9 120,9 Ressources publiques pour primaire 40,1 40,1 40,1 83,8 Ressources additionnelles courantes 29,2 93,7 46,2 2,5 Ressources additionnelles totales 41,7 128,3 80,8 37,1 Niger Dépenses courantes à engager 153,4 145,8 69,4 69,4 Dépenses totales à engager 180,0 170,2 93,8 93,8 Ressources publiques pour primaire 54,2 54,2 54,2 60,9 Ressources additionnelles courantes 99,2 91,5 15,2 8,5 Ressources additionnelles totales 125,8 115,9 39,6 32,9 Sénégal Dépenses courantes à engager 222,0 305,2 234,8 234,8 Dépenses totales à engager 239,0 336,2 265,7 265,7 Ressources publiques pour primaire 129,0 129,0 129,0 199,1 Ressources additionnelles courantes 92,9 176,2 105,7 35,6 Ressources additionnelles totales 109,9 207,1 136,7 66,6 Tchad Dépenses courantes à engager 44,9 77,0 61,9 61,9 Dépenses totales à engager 52,2 97,0 81,9 81,9 Ressources publiques pour primaire 21,3 21,3 21,3 34,3 Ressources additionnelles courantes 23,6 55,7 40,6 27,5 Ressources additionnelles totales 31,0 75,8 60,6 47,5 configuration, le déficit global en 2015 atteint 142,8 trouve alors ramené de 142,8 milliards à 67,4 milliards. Dans l'option (c), les mesures prises milliards de FCFA. Enfin, dans l'option (d), les ramènent le salaire moyen des enseignants de 6,9 arbitrages budgétaires plus favorables au secteur et fois le PIB par tête en 1999 à 4 fois en 2015. D'où une au primaire amènent, en 2015, une réduction du réduction du volume des dépenses courantes à déficit global de 67,4 à 49,4 milliards de FCFA. engager en 2015 qui passent ici, de 179,3 milliards L'extension de cet exercice aux autres pays est dans l'étape (b), à 103,9 milliards de FCFA (un gain présentée dans le tableau 5 ci-dessous qui définit les de 75,4 milliards) ; de son côté, le déficit global se 28 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE besoins additionnels en 2015 en fonction des mêmes L'action sur le niveau de salaires des maîtres différentes options politiques. entraîne une réduction des dépenses courantes dans Ce tableau fait ressortir des structures assez diffé- tous les pays considérés sauf la Guinée, où il faudra rente dans les 6 pays considérés: ainsi, les mesures au contraire envisager de les augmenter d'ici 2015. prises pour aboutir à ce qui est considéré ici comme Dans les 5 autres pays, les mesures prises sur les un contexte scolaire favorable (rapport élèves-mai- salaires déterminent une réduction de la masse sala- tres de 40 et dépenses hors salaires des maîtres égales riale et, par conséquent, des dépenses courantes. à environ 35 % de la masse salariale de ces derniers), L'impact est spécialement accusé au Niger (où le entraînent par rapport à la situation de référence niveau initial du salaire des enseignants est de loin (actuelle) des dépenses additionnelles très variables relativement le plus élevé), mais il demeure très sub- d'un pays à l'autre. Nulles au Niger, elles seraient, stantiel aussi au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal. selon les mêmes normes, en forte augmentation en ce Enfin, si l'action sur les arbitrages budgétaires en qui concerne les dépenses courantes au Mali, et dans faveur de l'éducation en général (et du primaire en une moindre mesure au Sénégal et au Tchad (le Bur- particulier) a un fort impact potentiel au Mali et au kina Faso et la Guinée étant dans une situation inter- Sénégal, cet impact demeure important au Burkina médiaire). Cela tient évidemment à la disparité des Faso et au Tchad et n'est plus limité qu'en Guinée et conditions initiales (le Mali, par exemple, qui pré- au Niger. sente un rapport élèves-maîtres de 72, n'affecte que l'équivalent de 23 % de la masse salariale des ensei- gnants aux dépenses « autres » que le salaire des maî- 1. Il n'existe aucun pays au monde où à la fois le taux brut de scolarisation primaire soit supérieur à 80 °/,, et les ressources tres alors que le rapport élèves-maîtres n'est que de publiques inférieures à 6 % du PIB, qui ait un niveau de 38 au Niger). rémunération moyen de ses enseignants du primaire représentant plus de 3,8 fois le PIB par tête. Annexe 1 Conférence au sommet sur la stratégie d'accélération de l'éducation pour tous dans six pays africains parmi les moins scolarisé Bakamo, le 27 novembre 2000 Résolution politique pour la scolarisation universelle Préambule * au Cadre d'Action de Dakar adopté lors du Forum Mondial sur l'éducation du 26 au 28 Avril 2000 qui Il y a plus de cinquante ans, les nations du monde a affirmé: « les Gouvernements ont le devoir de affirmaient, dans la Déclaration Universelle des veiller à ce que les buts et objectifs de l'Education Droits de l'Homme, que « toute personne a droit à Pour Tous soient réalisés de façon durable ». l'éducation ». Le 9 Mars 1990, 155 Etats membres de l'Organisation des Nations Unies adoptaient à * au rôle clé de l'éducation de base dans la mise en Jomtien, en THAILANDE, la Déclaration Mondiale valeur des ressources humaines afin d'ouvrir un sur l'Education Pour Tous et convenaient du Cadre cycle de croissance économique durable, de lut- d'Action pour répondre aux besoins éducatifs ter efficacement contre la pauvreté et d'imprimer fondamentaux susceptibles de réaliser les objectifs un nouvel élan à la transformation de nos Etats, énoncés dans la Déclaration. à la mise en place et au renforcement de la La Conférence au Sommet sur la Stratégie démocratie à l'aube du nouveau millénaire. d'Accélération de l'Education Pour Tous dans les six pays africains du Sahel parmi les moins scola- Considérant risés tenue à Bamako (République du Mali), le 27 Novembre 2000. * le faible taux de scolarisation de nos pays (en moyenne 50 '/Y de TBS) et le nombre élevé Se référant: d'adultes analphabètes; * à la vision adoptée par la Conférence de Jomtien * la situation préoccupante que constituent les sur l'Education Pour Tous : fortes disparités entre zones géographiques « l'Education de base est celle qui fait acquérir à (notamment urbain/rural) et entre sexes ainsi l'individu dans un contexte historique, social et que la nécessité de faire accéder tous les enfants, linguistique déterminé, un minimum de connais- y compris les enfants en difficulté, à un enseigne- sances, d'aptitudes et d'attitudes lui permettant ment primaire complet, obligatoire et de qualité; de comprendre son environnement, d'interagir avec lui, de poursuivre son éducation et sa for- * l'ampleur des efforts qui restent à faire pour mation au sein de la société et de participer plus améliorer la qualité de l'éducation et réduire sen- efficacement au développement économique, siblement les taux de redoublement et d'abandon social et culturel de celle-ci >; dans nos pays; 29 30 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE * l'insuffisance des investissements tant nationaux Décidons que des agences d'aide dans le développement de l'éducation; * de mettre en place une politique vigoureuse de communication en vue de faire partager les objec- * la nécessité d'une meilleure utilisation et d'une tifs et les stratégies définis par toutes les parties répartition plus judicieuse des ressources prenantes de la politique éducative et d'assurer la allouées à l'éducation pour mieux répondre aux mobilisation sociale autour des reformes. priorités * de faire de l'éducation une cause nationale qui * la globalisation qui intègre nos économies aux mobilise les différents secteurs de la société, en marchés mondiaux ainsi que les nouveaux défis particulier les acteurs et partenaires principaux qui en découlent pour nos systèmes éducatifs; de l'éducation que sont les syndicats d'ensei- gnants, les associations de parents d'élèves, les Nous Chefs d'Etat du Burkina Faso, de la Guinée, collectivités locales, les communautés de base, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Tchad, les ONG et le secteur privé ... ; Exprimons notre ferme volonté: * de garantir la continuité des politiques éducatives ayant fait l'objet d'un consensus national afin de * de hisser l'Education Pour Tous au rang de pre- les situer dans la durée nécessaire au succès; mière priorité de notre agenda politique, le déve- loppement de l'éducation étant d'abord et avant * de mettre en place un mécanisme de suivi de la tout une question volonté politique; résolution de Bamako au plus haut niveau de nos Etats (Rencontre des Chefs d'Etat tous les 5 ans et * de promouvoir un modèle éducatif de base adap- Rencontre de leurs Représentants personnels té aux besoins et aux ressources de nos pays; tous les ans) pour évaluer les progrès accomplis dans nos pays et ce en rapport avec les parte- * d'assumer la responsabilité de chercher des solu- naires parrains de 1'EPT. tions aux problèmes d'accessibilité, de perti- nence et de qualité pour toutes les écoles et tous Lançons un appel pour: les enfants. * la réalisation de partenariats nationaux dynami- Prenons l'engagement: ques pour: - la réalisation de la scolarisation universelle; * d'accroître substantiellement la part du PIB - l'appropriation de l'école par le milieu qui consacrée à l'éducation avec un objectif d'au l'accueille à travers la participation des coin- moins 4 % d'ici 2015; munautés et l'introduction de diverses inno- vations garantissant des espaces d'autonomie * d'accorder au moins 50 % du budget de l'éduca- et d'initiation aux acteurs de l'école à la base; tion au développement de l'éducation de base; - la contribution effective de l'école à la solu- tion des problèmes auxquels nos populations * d'entreprendre des réformes pour une redéfini- et nos Etats sont confrontés; tion des priorités, une réallocation des budgets et un partage des responsabilités de l'éducation * la réalisation de nouveaux partenariats avec les entre l'Etat, les communautés et les collectivités agences d'aide extérieure basés sur la transpa- dans le cadre d'une gestion décentralisée renfor- rence et la recherche de l'efficacité maximale à tra- çant l'autonomie des écoles. vers la coordination des interventions par nos gouvernements et une meilleure écoute des inté- rêts de nos pays. Annexe 2 Conférénce des chefs des six pays du Sahel sur l'éducation pour tous Bakamo le 27 novembre 2000 Cadre d'action Introduction moitié des contenus des programmes est effective- ment acquise par les élèves. Le récent Forum de Dakar sur l'Education Pour Ces constats sont une source de motivation très Tous (avril 2000) a été l'occasion de dresser un bilan forte; ils appellent en effet des stratégies nouvelles sans complaisance des progrès réalisés durant la et ambitieuses, à la mesure des enjeux et des défis à décennie, d'évaluer l'ampleur des efforts restants à relever. Il en est notamment ainsi car la poursuite accomplir et d'exprimer une double volonté. d'une du rythme de progression actuelle ne permettrait part celle des pays à disposer de programmes crédi- pas d'atteindre la scolarisation universelle avant 50 bles en vue de la scolarisation universelle et, d'autre ans, ce qui est évidemment tout à fait inacceptable. part, celle des partenaires financiers pour un appui Il convient de rappeler ici avec insistance que dynamique et continu. toutes les analyses convergent dans la même De façon globale pour les six (6) pays du Sahel, direction, à savoir que l'universalisation de l'en- des gains dans la scolarisation ont été obtenus au seignement primaire constitue une condition cours de la dernière décennie puisqu'en moyenne le nécessaire à la formation du capital humain, à la Taux Brut de Scolarisation (TBS) du primaire est lutte contre la pauvreté et l'ingrédient premier du passé de 38 à 50 % sur cette période. développement économique et social de nos pays. Les six pays ne sont toutefois pas au même Si l'on veut créer rapidement les conditions niveau puisqu'en 1998 le TBS varie de 32 à 65 %. En favorables à un décollage économique entendu réalité, le niveau de couverture effective des comme développement humain durable, il est plus systèmes est inférieur à ces chiffres dans la mesure que jamais urgent pour les pays du Sahel de consi- où seulement 28 % des enfants atteignent la fin du dérer la scolarisation primaire universelle comme la primaire avec des variations comprises entre 20 et priorité essentielle des politiques de développe- 40 % selon les pays. ment à mettre en oeuvre. En conséquence, les En outre, ces moyennes cachent des disparités actions d'envergure qui permettront d'atteindre cet notables entre populations particulières, avec objectif doivent être engagées sans tarder. notamment un retard substantiel des filles et des enfants du monde rural; il est en particulier noté Objectifs d'ici 2015 que seul 10 % des filles de milieu rural réussissent une scolarité primaire complète. Compte tenu de l'impact avéré de l'éducation de Enfin, en dépit des efforts réalisés, en matière de base, en particulier pour les filles, sur le développe- formation et d'équipement, la qualité des apprentis- ment économique et social de nos pays, il est sages reste faible car, très souvent, moins de la impératif d'envisager des progrès très sensibles et 31 32 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE rapides dans ce domaine. Dans ce cadre, notre Stratégies de mise en oeuvre objectif est d'atteindre la scolarisation universelle conçue comme la réalisation d'une scolarité pri- Pour atteindre ces objectifs, une double stratégie maire complète pour tous les enfants, en particulier devra être mise en oeuvre: la première consiste à les filles, les enfants issus de milieux défavorisés ou mobiliser le maximum possible de ressources ayant des besoins éducatifs spéciaux. nationales pour le financement de la scolarisation Le réalisme impose d'inscrire cet objectif dans un primaire ; la seconde consiste à prendre un ensem- cadre temporel suffisamment long pour construire ble articulé de mesures pour améliorer l'efficience un système efficace, mais dans des échéances aussi dans l'usage des crédits publics et pour améliorer la accélérées que possible. L'objectif de 2015 apparaît qualité des services rendus. raisonnable pour que tous les enfants aient une sco- Un élément important de la stratégie pour l'en- larité primaire complète, même si certains pays un seignement primaire sera de renforcer la décentrali- peu p]us avancés que d'autres peuvent l'atteindre sation en rapprochant davantage l'école des com- avant cette échéance. Cela dit, ces échéances sup- munautés et en favorisant leur participation et leur posent que le système éducatif puisse opérer dans implication effectives dans la gestion et l'organisa- des conditions normales de stabilité sociale et tion. Cette option est notamment justifiée parce politique. qu'on sait qu'il ne suffit pas de mettre en place une Il ne s'agit pas toutefois de privilégier l'accès au école standard pour que celle-ci corresponde aux détriment de la qualité, car la scolarisation univer- préoccupations et aux besoins des populations. Ces selle doit s'accompagner de progrès substantiels actions concernent de façon principale l'enseigne- dans l'amélioration de la qualité de l'éducation ment formel mais les potentialités de l'éducation pour que les enfants soient durablement attirés par informelle seront également valorisées tant à l'école et obtiennent des résultats significatifs en l'usage des enfants que des adultes. Par ailleurs des matière d'apprentissage. Il faut faire en sorte que les activités à destination de la petite enfance seront efforts déployés pour scolariser davantage d'en- développées dans la perspective de mieux préparer fants se traduisent, chez chacun d'entre eux, par des les enfants à l'enseignement primaire; ces actions apprentissages effectifs, pertinents et suffisants, seront principalement conduites selon une ap- notamment en ce qui concerne l'acquisition des proche communautaire. connaissances instrumentales et des compétences Ces stratégies générales seront décrites au niveau de vie courante. En définitive, il s'agit de promou- de chaque pays par la production ou la finalisation voir une école d'excellence où tous les enfants, sans des plans décennaux de développement de l'éduca- distinction de sexe, de revenu, de langue, de milieu tion. Ceux-ci seront préparés dans un cadre de con- ou d'ethnie, sont aidés à réussir et à aller aussi loin certation avec tous les partenaires de l'école avant la que possible dans les apprentissages. fin 2001. Enfin, il importe de souligner que ce mouvement permettra des progrès sensibles en matière d'équité. 1. Mobiliser davantage de ressources En effet, ce sont ceux qui sont actuellement exclus du système, notamment les enfants du monde rural Ceci prendra la forme d'une plus grande mobilisa- et les filles, qui profiteront de ces évolutions. Dans tion de ressources publiques d'une part, et de la le mouvement vers la scolarisation universelle, des prise en compte des possibilités financières nationa- mesures seront prises pour promouvoir l'égalité et les extrabudgétaires de l'autre. l'équité, ce qui impliquera des corrections dans Concernant en premier lieu les ressources publi- l'allocation des ressources, avec une attention toute ques, les pays alloueront une part accrue de leur particulière aux questions liées au genre et aux budget pour le financement du secteur, même si l'in- handicaps de toute nature, ainsi qu'une diversifica- tensité de cette mesure sera différente d'un pays à tion des curricula en fonction des besoins et des l'autre compte tenu de la variabilité des conditions possibilités de chaque individu. initiales. Cela dit, un engagement de consacrer au moins 4% du PIB à l'éducation doit être pris. Par DEUX ÉTUDES POUR LA SCOLARISATION PRIMAIRE UNIVERSELLE DANS LES PAYS DU SAHEL EN 2015 33 ailleurs, les pays établiront des arbitrages favorables et être suffisamment mobilisateur pour assurer un au niveau primaire en assurant qu'au moins 50 % du recrutement d'enseignants ayant les qualités et la budget alloué au secteur bénéficie à ce niveau de sco- motivation requises. Les six pays sont dans des larisation. On veillera ainsi à ce que cette part laisse situations différenciées sur ce plan ; cela dit, dans la des espaces de liberté pour le développement en plupart d'entre eux, cette option se traduira par des qualité et en quantité soutenable des différents types actions visant à réduire le coût salarial moyen en et ordres d'enseignement post-primaire. Le dévelop- recrutant désormais un personnel contractuel à des pement de la scolarisation primaire s'inscrira ainsi niveaux de salaires sensiblement inférieurs aux dans une vision globale pour une bonne cohérence niveaux traditionnels, en s'assurant toutefois de des différents types et ordres du système éducatif. pouvoir recruter le nombre nécessaires d'ensei- De façon complémentaire au financement public, gnants de qualité pour le développement de la la stratégie mise aussi sur la mobilisation de scolarisation. Ceci permettra d'obtenir à terme un ressources de nature extrabudgétaire, qu'il s'agisse coût salarial moyen de l'ordre de 4 fois le PIB par du rôle des communautés (notamment dans la tête du pays. construction des salles de classe) et de la prise en La maîtrise de la masse salariale, combinée à des compte positive de l'enseignement privé (en parti- mesures de rentabilisation de l'utilisation des culier dans l'enseignement post-primaire) dans la locaux et de du personnel, permettra l'augmenta- stratégie globale de la scolarisation dans le pays. tion des dépenses non salariales afin d'investir davantage dans la qualité des services éducatifs. 2) Utiliser les ressources de façon efficiente Ceci concernera la formation initiale et continue et cibler un enseignement de qualité adéquate des enseignants, l'acquisition de manuels scolaires et matériels didactiques, en somme J'amé- Une source importante de gains potentiels pour le lioration sensible des conditions d'enseignement et système se trouve dans une meilleure efficience d'apprentissage des maîtres et des élèves. Les con- dans l'usage des ressources mobilisées pour son tenus de programme seront révisés pour correspon- développement; on compte en effet que, dans la dre mieux aux attentes des familles, notamment en situation actuelle, c'est presque la moitié des milieu rural. Dans de contexte, on veillera à intro- ressources mises en oeuvre qui n'est pas utilisée de duire des éléments contribuant à l'information et à façon optimale. la prévention du VIH/SIDA. L'ensemble de ces Pour aller dans le sens d'une meilleure transfor- actions permettront de réduire les dépenses des mation des ressources en résultats effectifs chez les familles pour la scolarisation et ainsi de faciliter élèves, les pays s'engagent à réduire de façon mas- l'accès à l'école des enfants de familles défavori- sive les redoublements pour viser un taux maxi- sées ; par ailleurs, la réduction relative des dépenses mum de 10%. Par ailleurs ils prendront les disposi- salariales donnera des espaces de manoeuvre pour tions appropriées (notamment en rapprochant raccourcir la distance entre l'école et le domicile. l'école des communautés) pour améliorer la réten- Même si les pays accroissent la mobilisation des tion des élèves de sorte à ce qu'au moins 80% des ressources intérieures et utilisent les ressources de enfants entrant en première année atteignent la fin façon plus efficiente, un apport supplémentaire sera du cycle. Dans la mesure du possible, l'emploi des nécessaire de la part des organismes internationaux langues nationales pourra être d'une grande utilité pour atteindre les objectifs d'une scolarisation pour les apprentissages premiers universelle de qualité. Il est estimé que cet apport Par ailleurs, il est observé qu'il y a souvent un devrait représenter au moins entre 40 et 50 millions mauvais équilibre entre les dépenses salariales et de dollars par an et par pays jusqu'à l'horizon 2015. non-salariales au sein des ressources affectées à Dans ce cadre, les ressources dégagées grâce aux l'enseignement primaire. Concernant en premier mesures d'allégement de la dette seront utilisées lieu les salaires, le niveau de rémunération des pour au moins 40% au financement de l'universali- enseignants devra à la fois être en ligne avec les sation de la scolarisation primaire, dans le cadre du conditions et les possibilités économiques des pays programme de lutte contre la pauvreté. 34 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE 3) Renforcement des capacités de gestion des l'ordre de 15 années. Les décisions initiales sont systèmes et de suivi des programmes certes importantes tant sur le plan technique que sur celui de la mobilisation; elles sont utiles pour Le renforcement de la capacité de gestion des initier l'action dans sa perspective temporelle. Il systèmes est essentiel pour que les mesures déci- sera toutefois indispensable de mettre en place des dées soient mises en oeuvre de façon optimale. Des structures faisant collaborer l'administration et les efforts seront faits pour améliorer la gestion admini- partenaires de l'école pour assurer un suivi- strative et pédagogique. Les principes de pilotage évaluation régulier et efficace des résultats obtenus du système sur la base des résultats obtenus et de et l'identification et la mise en oeuvre des correc- responsabilisation des acteurs en charge des diffé- tions à apporter. rentes fonctions seront mise en place de façon aussi Aussi bien dans la perspective d'améliorer les systématique que transparente. Dans le domaine de procédures de gestion administrative et pédago- la gestion administrative, des critères seront mis en gique dans le cadre du fonctionnement ordinaire place pour les allocations de personnels et de des systèmes que dans celle du suivi global des moyens aux écoles. Dans celui de la gestion pédago- politiques engagées vers la scolarisation primaire gique, les résultats des élèves seront systématique- universelle et de qualité, il sera nécessaire d'une ment évalués sur des bases comparatives et les dis- part de mettre en place un système cohérent d'in- positions institutionnelles seront prises pour mettre formations et d'autre part d'assurer la formation et un terme aux dysfonctionnements observés. l'instrumentation des personnels et structures Le programme vers une scolarisation universelle concernés. primaire de qualité est prévu sur une période de Annexe 3 Cadre partenarial pour la scolarisation universelle INTRODUCTION * Elaborer des plans crédibles de scolarisation pour tous les enfants d'ici 2015; En mars 1990 à Jomtien, en Thailande, les Gouver- nements des six (6) Pays ont adhéré au principe * Allouer des ressources financières conséquentes selon lequel toute personne (enfant, adolescent, à cet effet et utiliser celles-ci de la manière la plus adulte) doit bénéficier d'une formation conçue pour efficiente possible. répondre à ses besoins éducatifs fondamentaux. En avril 2000, à Dakar, les Gouvernements des Pour être crédibles, ces plans d'action doivent six Pays ont réaffirmé leur détermination collective selon les conditions définies dans le cadre d' action: à assurer la réalisation des buts et objectifs de l'édu- cation de base pour tous. * contenir des options politiques qui montrent Pour atteindre ces objectifs, les Pays se sont enga- clairement la priorité accordée à l'éducation, gés à présenter des plans d'action crédibles et la notamment à travers le niveau satisfaisant de Communauté Internationale s'est engagée en ressources affectées au secteur et aux arbitrages retour, à ce qu'aucun plan crédible ne souffre de intersectoriels favorables à l'enseignement manque de financement, primaire; Cadre politique de réalisation des * reposer sur une politique de communication qui engagements des pays assure le dialogue entre tous les acteurs de l'édu- cation et favorise leur adhésion aux objectifs et Pour manifester leur volonté de garantir un cycle aux stratégies. complet de scolarisation primaire à tous les enfants d'ici 2015, les six pays s'engagent à: * prévoir un financement durable susceptible de garantir la pérennité des actions engagées dans * Faire de l'éducation un secteur prioritaire dans la durée; les politiques nationales; * mettre en place des mécanismes de gestion et * Prendre des décisions et entreprendre des réfor- d'audit garantissant la rigueur, la transparence mes susceptibles de faciliter la mise en oeuvre et l'efficience dans l'utilisation des ressources des plans nationaux; 35 36 SÉRIE DÉVELOPPEMENT HUMAIN DE LA RÉGION AFRIQUE * prévoir des reformes institutionnelles qui décen- Engagements attendus des Agences tralisent l'organisation des écoles et impliquent les communautés de base dans la gestion; Il est attendu que les Agences de coopération s'engagent à: * prévoir des mécanismes de suivi-évaluation à tous les niveaux; * accorder un volume d'aide à la hauteur des am- bitions des Pays pour soutenir la mise en oeuvre * comprendre des stratégies d'amélioration de la des plans nationaux crédibles; qualité dans toutes les écoles et pour tous les enfants pour garantir l'équité. * mettre en place un partenariat efficace basé sur: Problèmes de financement -une assistance sur le long terme pour accom- pagner tout le processus vers la scolarisation La solution des problèmes en matière de finance- universelle; ment doit être recherchée aussi bien au niveau des efforts nationaux nécessaires qu'à celui des besoins - une assistance pleinement intégrée dans les d'assistance extérieure. politiques nationales; Dans le premier cas, il s'agira d'allouer un montant au moins égal à 4% du PIB au secteur de - une assistance coordonnée par les Autorités l'éducation. A l'intérieur de ce budget, au moins 50 % Nationales afin d'éviter les duplications et doivent être consacrés à l'éducation de base. Il s'agira pour avoir une cohérence globale dans la également d'allouer au moins 40% des ressources mise en oeuvre des plans d'actions; attendues de l'Initiative PPTE à l'éducation de base. Malgré ces efforts à consentir au niveau interne, - une assistance dans laquelle les intérêts de les besoins d'assistance seront de l'ordre de 40 à 50 développement national priment sur les millions de dollars US par pays et par an jusqu'à considérations extérieures; l'horizon 2015. Les Gouvernements pourraient créer un fonds - une assistance où les procédures des agences national pour soutenir le développement de l'édu- sont plus proches des procédures nationales. cation de base et encourager les agences de coopération bilatérale et multilatérale à l'alimenter sous forme d'aide budgétaire. Banque Mondiale 1818 H Street, N.W. Washington, D.C. 20433, États-Unis d'Amérique Téléphone 202 477 1234 Télécopie 202 477 6391 Site web www.woridbank.org Messagerie afrhdseries@worldbank.org A la suite de la Conférence de Dakar d'Avril 2000, Des chefs d'Etat, des experts et des responsables du domaine de l'éducation de six pays (Burkina Faso, Guinée, MIali, Niger, Sénégal et Tchad), se sont réunis à Bamnako en Novembre 2000. L'objet était d'examiner a) ce que peuvent faire les différents pays pour mobiliser davantage de ressources nationales pour l'éducation et mettre en place les politiques adaptées pour les utiliser le plus efficacement possible et b) ce que seraient les appuis extérieurs nécessaires pour atteindre en 2015 la scolarisation primaire universelle. Dans cette perspective, deux documents ont été préparés: le premier vise à mesurer les progrès réalisés au cours de la dernière décennie et mieux comprendre les difficultés rencontrées comme les récents changements intervenus. On souligne qu'il sera nécessaire d'augmenter de façon très substantielle le rythme de progression pour envisager la scolarisation universelle en 2015. Cela impliquera que des réformes importantes soient prises aussi bien en termes de politiques éducatives que de politiques de mobilisation de ressources nationales (les facteurs) jouant sur la couverture quantitative et les stratégies coût-efficaces sont étudiés non seulement dans la perspective globale classique mais aussi en fonction de la cible même: l'achèvement de la scolarité par le plus grand nombre possible d'élèves - et avec des apprentissages de qualité qui leur serviront toute la vie. Cela impliquera aussi un engagement fort de l'Etat au plus haut niveau. Le second texte examine dans quelle mesure la prise en considération de toutes ces actions de politique au niveau de chacun des Etats serait de nature à conduire à l'objectif visé. La réponse à cette question est négative. On estime alors, par des modèles de simulation quel serait le montant du besoin financier qui resterait à satisfaire. Cet exercice est conduit en écho à la déclaration du Président de la Banque mondiale qui disait avec force au Forum de Dakar, que les pays dont le plan de développement est crédible ne devraient pas être entravés par le manque de ressources.