D�veloppement et consolidation de la paix : Le cas du Burundi RESUME Depuis son ind�pendance en 1962, le Burundi a �t� pris dans un cycle de conflit et de pauvret�. Les vagues successives de violence ont creus� des divisions ethniques et r�gionales, tout en approfondissant une pauvret� d�j� aigu�. Les Burundais n'avaient pas de tradition de mobilisation politique autour de leur identit� hutue ou tutsie, mais la violence chronique de l'apr�s-ind�pendance a donn� une dimension de masse � ce qui est � l'origine un conflit cr�� et aliment� par les �lites. L'effet devenant la cause, les massacres inter-communautaires r�p�t�s ont rendu la population de plus en plus r�ceptive aux appels � la mobilisation ethnique. Le processus de paix d'Arusha, entam� en 1996, donne l'opportunit� au Burundi de sortir du jeu � somme nulle qui caract�rise son histoire depuis peu apr�s l'ind�pendance. Les violences ont cess� presque partout, mais la paix demeure fragile, comme l'a tragiquement d�montr� le massacre de Banyamulenge congolais dans un camp de r�fugi�s au Burundi en ao�t 2004 et les �ruptions de violence sporadiques dans la province de Bujumbura Rurale. Dans ce contexte, cette �tude analyse les causes et les dynamiques du conflit burundais pour identifier les mani�res sp�cifiques dont l'aide au d�veloppement peut contribuer � la consolidation de la paix. Une des conclusions de l'�tude est que l'appartenance ethnique est seulement l'une de plusieurs divisions au sein de la soci�t� burundaise : il existe d'autres divisions, claniques, r�gionales et de classes. Ces divisions et les identit�s sous-jacentes sont donc multidimensionnelles. Des in�galit�s d'acc�s aux opportunit�s �conomiques et sociales tr�s marqu�es, une histoire de violence et d'impunit�, une �conomie frapp�e par la guerre et d'autres causes, la d�gradation de l'environnement, la faillite du gouvernement et des institutions, et l'effet d�stabilisant des conflits dans les Etats voisins ont aggrav� et prolong� ces divisions. Depuis le d�but de la transition en novembre 2001, quelques facteurs menacent de contribuer � l'escalade du conflit burundais, tandis que d'autres contribuent nettement � sa d�sescalade, et d'autres enfin ont un impact encore ambigu. Le Burundi se situe donc � la crois�e des chemins : il faut investir dans la consolidation de la paix par les moyens disponibles (restauration de la s�curit� et de la gouvernance, aide au d�veloppement renfor�ant la coh�sion sociale et l'acc�s aux opportunit�s �conomiques et aux services sociaux, diplomatie formelle et informelle). Cette �tude identifie huit principes pour guider l'aide au d�veloppement : (i) ne pas de renforcer les causes structurelles ni les causes d�clenchantes du conflit ; (ii) rendre visibles les dividendes de la paix aux yeux de la population; (iii) identifier les priorit�s � court terme, particuli�rement la restauration de la s�curit� ; (iv) limiter le potentiel pour la mobilisation de masse, notamment des jeunes ; (v) prendre en compte et tenter de r�soudre les causes structurelles du conflit ; (vi) prendre en compte le lourd h�ritage du conflit en termes de perceptions et d'attitudes; (vii) s'assurer que l'aide au d�veloppement est coh�rente et soutenue sur une dur�e suffisante; et (viii) prendre en compte le contexte r�gional. En termes de programmes, l'�tude passe en revue un certain nombre de domaines de l'aide d�veloppement o� il y a des occasions d'incorporer les principes ci-dessus, notamment : le processus du Document de Strat�gie de R�duction de la Pauvret� ; le d�veloppement rural ; les infrastructures ; la r�forme du secteur de s�curit� et la r�int�gration des ex-combattants ; les questions fonci�res ; la cr�ation d'emplois ; la gouvernance et enfin les secteurs sociaux de l'�ducation et de la sant�. En termes de projets (conception, mise en oeuvre et suivi-�valuation), l'�tude souligne la n�cessit� d'engager fermement les �lites du c�t� de la paix ; d'investir dans des approches � la base, particuli�rement par des interventions inclusives dans lesquelles les communaut�s b�n�ficiaires contribuent � la d�finition de leurs propres priorit�s ; d'inclure des objectifs mesurables de consolidation de la paix dans les projets qui ont cette ambition ; reconna�tre la multiplicit� des variables qui affectent le processus de paix ; et consolider la paix par des efforts de stabilisation dans la sous-r�gion des Grands Lacs dans son ensemble. TABLE DES MATIERES Acronymes........................................................................................................................................ii Remerciements............................................................................................................................... iii Introduction et Contexte...................................................................................................................1 Section I. Analyse du Conflit Burundais (1965-2005)....................................................................7 I. Principales causes du conflit : rarete des ressources, competition pour le pouvoir et instrumentalisation de la question ethnique .................................................................................7 II. Aspects economiques: concurrence dans un contexte de croissance faible ou negative, de ressources rares et d'extreme concentration du pouvoir ............................................................11 III. Dynamiques externes : les effets trans-frontieres des conflits de la sous-region des grands lacs..............................................................................................................................................13 Section II. Dynamiques du Conflit sur Trente Ans : Causes Structurelles, Causes Declenchantes, et Effets de Retroaction.....................................................................................................................14 I. Causes structurelles et causes d�clenchantes sur trente ans....................................................14 II. Effets r�troactifs.....................................................................................................................15 Section III. Dynamiques du Conflit Aujourd'hui : A la Croisee des Chemins..............................17 I. Facteurs de d�sescalade ..........................................................................................................17 II. Facteurs d'escalade potentielle..............................................................................................18 III. L'issue de certains facteurs est encore ind�termin�e ...........................................................19 Section IV. Domaines dans Lesquelles L'aide au Developpement Peut Soutenir la Transition ....21 I. L'aide au d�veloppement et la diplomatie dans les transitions de la guerre � la paix ............21 II. Consid�rations pour l'aide au d�veloppement au Burundi....................................................24 Section V. Considerations Operationnelles : Conception, Mise en Oeuvre et Suivi-Evaluation des Projets.............................................................................................................................................30 Annexe: Chronologie .....................................................................................................................34 Bibliographie..................................................................................................................................38 Encadr�s Encadr� 1: Quatre phases dans le processus de paix, 1993-2004.........................................2 Encadr� 2: Relations causales, 1996-2004.................................................................16 Encadr� 3: Priorit�s du Gouvernement et Soutien des Bailleurs, 2004-2005..........................27 Tableaux Tableau 1: Indicateurs socio-�conomiques, 1990-2002..................................................12 Tableau 2: Conflits depuis l'ind�pendance.................................................................14 Tableau 3: Causes que le d�veloppement et l'action diplomatique formelle et informelle peuvent aborder................................................................................................22 Tableau 4: Les variables du conflit et les implications en termes de programmes et de projets......32 ACRONYMES AMIB African Mission in Burundi BLTP Burundi Leadership Training Program CNDD-FDD Conseil National pour la D�fense de la D�mocratie/Forces pour la D�fense e la D�mocratie DDR Disarmament, Demobilisation and Reintegration DSRP Document de Strat�gie de R�duction de la Pauvret� EMGI Etat-Major G�n�ral Int�gr� FAB Forces Arm�es du Burundi IFAD Fonds International de D�veloppement Agricole FMI Fonds Mon�taire International FNL Forces Nationales de Lib�ration MDRP Programme multi-Pays pour la D�mobilisation et la R�int�gration ONUB Op�rations des Nations Unies au Burundi PIB Produit Int�rieur Brut PDDR Programme de D�sarmement, D�mobilisation et R�insertion PNB Produit National Brut PNUD Programme des Nations Unies pour le D�veloppement RDC R�publique D�mocratique du Congo UN Nations Unies UNICEF Fonds des Nations Unies pour l'Enfance UPRONA Parti de l'Unit� pour le Progr�s National VIH/SIDA Virus de l'Immunod�ficience Humaine/Syndrome de l'Immunod�ficience Acquise ii REMERCIEMENTS Ce document de travail a �t� pr�par� par Juana Brachet et Howard Wolpe. Juana Brachet est actuellement conseill�re aupr�s du Forum conjoint pour le Processus de Paix � Aceh, Gouvernorat d'Aceh. Pr�c�demment, elle �tait Sp�cialiste Conflits au sein de l'Unit� Pr�vention des Conflits et Reconstruction de la Banque mondiale et de l'Equipe-Pays Afrique centrale (RDC, Burundi, Rwanda, R�publique du Congo), puis Conseill�re technique aupr�s de la Commission nationale de D�sarmement, D�mobilisation et R�insertion du Gouvernement de la R�publique d�mocratique du Congo. Howard Wolpe, ancien Envoy� Sp�cial des Etats-Unis d'Am�rique dans la sous-R�gion des Grands Lacs, a lanc� le Burundi Leadership Training Program, une initiative de renforcement des capacit�s soutenue par le Fonds post-conflit de la Banque mondiale. Il dirige actuellement le programme Afrique du Woodrow Wilson International Center for Scholars. Cet article s'appuie sur quatre initiatives: 1. La premi�re est la collaboration entre la Banque mondiale et le Secr�tariat permanent pour les r�formes �conomiques et sociales du Gouvernement du Burundi pour d�velopper le document de strat�gie de r�duction de la pauvret� (DSRP), et notamment pour identifier comment le processus de consultation et le DSRP lui-m�me peuvent aborder certaines des causes structurelles du conflit et ainsi contribuer � la consolidation de la paix (2004). 2. La seconde initiative est le Burundi Leadership Training Program, une initiative de reconstruction post-conflit lanc�e par le Woodrow Wilson International Center for Scholars en octobre 2002 avec l'appui du Fonds post-Conflit de la Banque mondiale. 3. La troisi�me initiative est le Projet sur les Documents de Strat�gie de R�duction de la Pauvret� dans les pays affect�s par les Conflits, une initiative conjointe de la Banque mondiale (Groupe de R�duction de la Pauvret� et Unit� Pr�vention des Conflits et Reconstruction) et le DfID, et qui vise � (i) analyser une s�rie de conflits dans les pays pilotes et (ii) l'aspect consolidation de la paix par les DSRP. 4. La quatri�me initiative est l'analyse du conflit burundais conduite en 2003 par Lib�re Ndabakwaje, Jean-Baptiste Mbonyingingo, et le Fonds international de D�veloppement agricole. Les auteurs tiennent � remercier leurs collaborateurs qui ont particip� � ces quatre initiatives, ainsi que les nombreux coll�gues qui ont contribu� par leurs commentaires � cet article. Ils sont particuli�rement reconnaissants � Ian Bannon, Ren� Lemarchand, Ana Paula Fialho Lopes, Steve McDonald, Eugene Nindorera, Katrina Sharkey, Alassane Sow, Maude Svensson, Achille Toto, Peter Uvin, Per Wam, Ingo Wiederhofer et Peter Woodrow. Juana Brachet Howard Wolpe iii D�veloppement et consolidation de la paix : Le cas du Burundi INTRODUCTION ET CONTEXTE "Le peuple burundais doit pouvoir distinguer mat�riellement entre le temps du conflit et les b�n�fices de la paix". --Nelson Mandela, m�diateur du processus de paix burundais Depuis son ind�pendance en 1962, le Burundi est pris dans un cycle de conflits chroniques. Les vagues successives de la violence, particuli�rement en 1965-69, 1972, 1988, 1991 et 1993, ont cr�� des divisions ethniques et r�gionales tout en approfondissant une pauvret� d�j� extr�me. Au cours des 43 ans qui ont suivi la fin de la pr�sence belge, le Burundi a �t� le th��tre de massacres de 300 000 � 400 000 personnes. Depuis 1993, environ 1,3 millions personnes (16% de la population) ont fui leur village et ont le statut de d�plac�s ou de r�fugi�s. Le PIB par habitant est tomb� � 110 de dollars en 2003, un des plus bas en Afrique, et la proportion de personnes vivant en dessous de la ligne de pauvret� est pass�e de 35% en 1992 � plus � 60% en 2002. La violence chronique a eu un impact direct sur le secteur agricole, qui repr�sente 50% du produit national du Burundi. La situation �conomique a �t� aggrav�e par la chute des prix du caf� et l'�rosion de la terre. Ces probl�mes �conomiques ont rendu la comp�tition pour le pouvoir et le contr�le de l'Etat particuli�rement f�roce. Bien que les Burundais n'aient pas une tradition de mobilisation politique autour de leurs identit�s hutue et tutsie, la violence chronique de l'apr�s-ind�pendance a �tendu aux populations ce qui �tait � l'origine un conflit entre �lites et provoqu� par elles. Des massacres inter-communaux r�p�t�s ont rendu la population sensible aux appels � la mobilisation utilisant la question ethnique. Le bilan de la r�ponse de la communaut� internationale � cette situation de violence chronique au Burundi est mitig�. Les assassinats perp�tr�s apr�s l'ind�pendance, la r�p�tition r�guli�re de la violence inter-communale, et m�me les massacres de 1972 ont �t� largement ignor�s par la communaut� internationale, une attitude que les perp�trateurs et les victimes de ces violences n'ont pas manqu� de remarquer. Sur le plan diplomatique, on peut distinguer trois phases dans le processus de paix burundais depuis l'assassinat en 1993 du premier pr�sident d�mocratiquement �lu du Burundi. Chaque phase a ses propres forces et faiblesses (Encadr� 1)1. 1Voir Wolpe (2003). 1 Encadr� 1 : Les quatre phases du processus de paix, 1993-2004 Entre 1994 et 1996, l'ONU a essay� de faciliter la n�gociation du partage du pouvoir pour stabiliser le Burundi, apr�s la vague de violence de 1993 cons�cutive � l'assassinat du Pr�sident Ndadaye et le g�nocide de 1994 au Rwanda voisin. Cette tentative a �t� handicap�e par l'absence d'une puissance pr�te � prendre le leadership sur le plan diplomatique ou s�curitaire. En effet, l'appel du secr�taire g�n�ral de l'ONU � une force de maintien de la paix est rest�e sans r�ponse. Entre d�but 1996 et fin 1999, l'ancien Pr�sident tanzanien Julius Nyerere a facilit� un processus de paix sous-r�gional, avec l'appui de la communaut� internationale dans son ensemble. Le processus de paix s'est d�roul� sur trois fronts diff�rents mais de plus en plus li�s : � Arusha, Rome et Bujumbura. La facilitation de Julius Nyerere a �t� affaiblie par : - La multiplicit� des sponsors r�gionaux du processus d'Arusha, - Un manque de confiance r�ciproque entre le m�diateur d'une part, et les parties n�gociantes d'autres part. Les �l�ments tutsis ont per�u le m�diateur comme biais� en faveur des Hutus. De fait, en agissant non seulement comme le m�diateur mais �galement comme l'autorit� derri�re les sanctions impos�e au Burundi par la sous-r�gion, c'est toute la neutralit� et la cr�dibilit� du processus d'Arusha qui a �t� mise en question. - La concurrence entre la conception de l'interlocuteur tutsi principal, le Pr�sident Buyoya, qui consid�rait le processus comme un processus national dont il serait le guide, et la conception de Julius Nyerere d'un processus sous-r�gional. - Les tensions entre l'�quipe de Julius Nyerere et la Communaut� de Sant 'Egidio de Rome qui a facilit� les premiers entretiens secrets entre le gouvernement et le mouvement rebelle CNDD. En d�pit de ces multiples difficult�s, Julius Nyerere et son �quipe ont r�ussi � emmener les Burundais vers l'accord sur certains protocoles qui sont devenus les fondations de l'accord d'Arusha. Entre la fin de 1999 et ao�t 2000, apr�s la mort de Julius Nyerere, l'ancien pr�sident sud-africain Nelson Mandela a jou� le r�le principal dans le processus qui a abouti � l'accord d'Arusha, sign� par dix-neuf parties � la n�gociation. L'accord a fourni un cadre pour le partage du pouvoir et la r�forme des institutions-cl�s, et a prescrit une p�riode de transition de 36 mois � partir du 1er novembre 2001. Cependant, l'accord d'Arusha est fragile � deux �gards : - (i) Il lui manquait l'adh�sion des deux principaux groupes arm�s, et plusieurs signataires ont �mis des r�serves formelles. - (ii) Il ne r�glait pas les questions essentielles de qui gouvernerait pendant la transition et de la r�forme du secteur de s�curit�. Dans un processus qui ressemblait parfois plus � un arbitrage qu'� une facilitation, Nelson Mandela et les leaders de la sous-r�gion ont convaincu les Burundais de diviser la transition en deux parties �gales, avec le Pr�sident Buyoya comme pr�sident pour les 18 premiers mois et son vice-pr�sident hutu, Domitien Ndayizeye, pour assurer la pr�sidence pour la deuxi�me moiti� de la transition. 2 Depuis 2000, un des deux groupes rebelles absents de l'Accord d'Arusha, le CNDD-FDD (Nkurunziza), a accept� un cessez-le-feu (d�cembre 2002) et accept� de participer au gouvernement de transition (novembre 2003). Toutefois, le FNL-Palipehutu (Rwasa) reste intransigeant et poursuit ses op�rations dans la province de Bujumbura Rurale. En avril 2003, le transfert du pouvoir entre Pierre Buyoya et Dominique Ndayizeye s'est produit sans incident. Cependant, des d�saccords persistants sur le partage du pouvoir apr�s la p�riode de la transition ont retard� les �lections. Le 28 f�vrier 2005, le r�f�rendum pour adopter la nouvelle constitution s'est tenu, et plus de 90% des 3 millions d'�lecteurs enregistr�s ont vot� "oui". Selon le calendrier �lectoral r�vis�, des �lections communales ont �t� tenues le 3 juin 2005 ; les �lections l�gislatives le 4 juillet 2005, les �lections s�natoriales le 29 juillet 2005, et le pr�sident a �t� choisi par l'Assembl�e nationale et le S�nat le 19 ao�t 2005. En avril 2005, le FNL a d�clar� son intention de cesser ses op�rations militaires et sa volont� de commencer des n�gociations avec le gouvernement de transition. Sur le plan s�curitaire, le Secr�taire g�n�ral des Nations Unies Boutros Boutros-Ghali a �chou� dans sa tentative de pr�parer un plan de contingence militaire : le gouvernement burundais, domin� par les Tutsis, s'est oppos� � une force de maintien de la paix qui pourrait menacer sa commande de l'arm�e burundaise, vu par les Tutsis comme l'instrument principal de leur protection et de leur contr�le, et le Secr�taire g�n�ral a �t� mal appuy� par les puissances principales. Dans les ann�es qui ont suivi, cependant, la r�sistance du gouvernement burundais a �t� surmont�e et, en 2003, la mission africaine au Burundi (AMIB), une force africaine de maintien de la paix soutenue par l'Union africaine, a �t� mise en place pour surveiller les accords de cessez-le-feu. En mai 2004, la r�solution 1545 du Conseil de s�curit� de l'ONU a transform� l'AMIB en op�ration de maintien de la paix de l'ONU, l'Op�ration des Nations Unies au Burundi (ONUB). Avec l'int�gration r�cente du CNDD-FDD (Nkurunziza) dans l'arm�e et les institutions politiques de la transition, la r�forme du secteur de s�curit� (qui implique la r�forme de l'arm�e, le d�mant�lement de la gendarmerie et du corps des gardiens de la paix, et le renforcement de la police nationale, et qui est vue par toutes les parties comme une des questions les plus sensibles et essentiels � un Burundi stable) a finalement d�marr�, et le processus de d�mobilisation et r�insertion des ex-combattants a commenc�. En ce qui concerne l'aide humanitaire et au d�veloppement au cours de cette p�riode (1993-2004)2, la communaut� internationale s'est engag�e et d�sengag�e tour � tour. Entre 1992 et 2002, l'aide financi�re internationale est tomb�e de presque 300 millions de dollars de moyenne annuelle � moins de 100 millions, en grande partie en raison de la reprise du conflit en 1993. Les 2 Dans cette �tude, les auteurs ne s�parent pas l'humanitaire et l'aide au d�veloppement. L'aide humanitaire est traditionnellement une activit� d'urgence fond�e sur les besoins, et l'aide au d�veloppement a des objectifs � plus long terme, mais du point de vue des programmes la distinction est de plus en plus artificielle : (i) Les "urgences complexes" de la post-Guerre froide, tels que les conflits caract�ris�s par des vagues de violence r�currentes et une instabilit� chronique plut�t que par des phases diff�renci�es pr�-conflit, conflit et post-conflit, rendent la distinction entre activit�s � court terme et long terme peu pertinent ; (ii) les acteurs humanitaires ont presque tous commenc� � int�grer des objectifs � plus long terme dans leur programmation (par exemple, le Comit� international de la Croix-Rouge distribue des graines et des outils en Afghanistan depuis plus de cinq ans); et (iii) dans des contextes de post-crise, ce qui est habituellement vu comme aide au d�veloppement a un impact humanitaire direct (par exemple, la reconstruction des routes, qui am�liore directement la s�curit� alimentaire). 3 bailleurs ont promis une aide au d�veloppement importante apr�s la signature de l'Accord d'Arusha en 2000, mais une proportion significative de cette aide n'a pas �t� d�bours�e, en partie en raison de l'ins�curit� persistante et des incertitudes politiques. Dans une tentative de mobilisation de l'aide, le gouvernement de la Belgique et le PNUD ont organis� une concertation des bailleurs en janvier 2004, au cours duquel les bailleurs ont promis 1,032 milliards de dollars, et l'aide au d�veloppement a repris. En d�pit de toutes ses difficult�s, le processus de paix d'Arusha donne l'opportunit� au Burundi de sortir du jeu � somme nulle qui caract�rise sa vie politique depuis l'ind�pendance : - Une constitution de transition a �t� adopt�e en octobre 2001. - Le parlement de transition a commenc� ses travaux en janvier 2002. - Le gouvernement de transition install� en novembre 2001 est fond� sur le principe du partage de puissance entre les deux groupes ethniques principaux du pays. Le Pr�sident Buyoya, un Tutsi, a men� les 18 premiers mois du gouvernement de transition. En mai 2003, le vice-pr�sident hutu, Domitien Ndayizeye, a pris le relais � la pr�sidence sans incident, alors qu'Alphonse Kadege, un Tutsi, assumait la vice-pr�sidence. Quand le Pr�sident (avec la nouvelle autorit� que lui accorde la constitution int�rimaire) a �cart� le vice-Pr�sident tutsi, avec qui il a eu un rapport personnel difficile, et a nomm� un autre chef du parti tutsi UPRONA a sa place, sa d�cision a �t� accept�e sans peine. - Apr�s une s�rie de n�gociations difficiles et prolong�es, le gouvernement de transition a sign� de nouveaux accords de paix et de cessez-le-feu avec tous les groupes arm�s qui n'avaient pas sign� l'accord d'Arusha, sauf un. En novembre 2003, le CNDD-FDD (Nkurunziza), le groupe rebelle le plus important, a accept� de participer au gouvernement de transition. Ces nouveaux accords post-Arusha ont eu pour cons�quence un gouvernement de transition incluant les nouveaux signataires. - Les combats ont cess� partout sauf dans la province de Bujumbura Rurale, o� le FNL-Palipehutu (Rwasa) continue � lancer des attaques et � adopter une ligne dure en opposition aux n�gociations et au gouvernement de transition. Toutefois, alors que les Burundais sont fatigu�s de la guerre et sont r�solus � la r�solution pacifique des questions en suspens, le massacre de Banyamulenge congolais dans un camp de r�fugi�s au Burundi en ao�t 2004, auquel le FNL a particip�, �tait un rappel tragique de la fragilit� du processus de paix et, en particulier, de l'impact sur le Burundi de la volatilit� continue de l'Est de la R�publique d�mocratique du Congo (r�gion frontali�re avec le Burundi). En outre, bien qu'il y ait � l'�vidence un effort consid�rable des forces arm�es burundaises et des commandants militaires rebelles pour �tablir une arm�e et une police int�gr�es, le processus de la r�forme de secteur de s�curit� comporte des risques potentiellement d�stabilisants. De plus, les tensions au sujet de la nouvelle constitution sugg�rent que quelques �l�ments tutsis ne sont pas compl�tement acquis aux accords de partage du pouvoir. Dans le contexte d'une diminution de la violence mais d'incertitude politique continue, comment l'aide au d�veloppement peut-elle contribuer � la consolidation de la paix ? Bien que la paix soit une opportunit� pour l'am�lioration des conditions de vie des populations, le d�veloppement ne peut contribuer � soutenir le processus de paix qu'� certaines conditions. Bien con�ue, l'aide au d�veloppement peut s'attaquer � certaines des causes fondamentales du conflit. Avec des politiques macro-�conomiques appropri�es, l'am�lioration des conditions mat�rielles des 4 communaut�s peut r�duire des conflits dont les sources sont principalement �conomiques, par exemple, des conflits fonciers. Les projets de reconstruction peuvent �galement contribuer � r�duire des tensions sociales en favorisant la coop�ration inter-groupes, si possible avec la mise en place ou le renforcement de m�canismes de d�cision collective et de gestion des conflits. - Pour �tre efficace et consolider la paix, l'aide au d�veloppement n�cessite en premier lieu l'identification ad�quate des causes et des dynamiques du conflit, afin de donner un cadre � l'engagement des bailleurs. Par exemple, au-del� du serment d'Hippocrate de "ne faire aucun mal" en veillant � ne pas renforcer les in�galit�s structurelles qui caract�risent le Burundi, une aide au d�veloppement qui consoliderait effectivement la paix mettrait l'accent sur l'inclusion, la responsabilisation des �lites, la d�centralisation de la puissance �conomique et politique, et la cr�ation d'opportunit�s �conomiques en dehors de la sph�re de l'Etat. - En second lieu, il faut identifier les secteurs sp�cifiques dans lesquels l'aide au d�veloppement peut et devrait soutenir la transition. Par exemple, le processus du DSRP, les programmes macro-�conomiques et sectoriels peuvent fournir des occasions de s'attaquer � certaines des causes structurelles du conflit. - Enfin, une aide externe bien con�ue devrait renforcer la coh�sion et l'efficacit� manageriale des �lites nationales et, au niveau des communaut�s, (i) prendre en compte l'h�ritage de m�fiance et de haine qui r�sulte de quatre d�cennies de conflit, et (ii) diminuer le potentiel de mobilisation ethnique et de recours � la violence. Les projets de d�veloppement qui souhaitent consolider la paix doivent incorporer des objectifs explicites et mesurables, bas�s sur l'analyse du conflit, et d�finir des mani�res sp�cifiques d'atteindre ces objectifs. Cet article, qui s'appuie sur quatre initiatives3, utilise le cadre d'analyse des conflits4 d�velopp� par l'Unit� Pr�vention des Conflits et Reconstruction de la Banque mondiale pour identifier les dynamiques du conflit burundais depuis son ind�pendance en 1962, en mettant l'accent sur la p�riode post-Arusha (2000-2004). Pour analyser le conflit burundais de mani�re dynamique et pour identifier des r�ponses appropri�es, cet article fait �galement une distinction entre causes structurelles et causes d�clenchantes. - Les causes d�clenchantes sont des �v�nements ou des facteurs qui causent l'explosion de la violence. - Les causes structurelles sont les causes fondamentales du conflit mais n'expliquent pas � elles seules le passage � la violence. Cet article identifie d'abord les causes du conflit (Section I), les relations r�troactives entre ces 3 Ces quatre initiatives sont: (i) la collaboration entre la Banque mondiale et le Secr�tariat permanent pour les r�formes �conomiques et sociales du Gouvernement du Burundi pour d�velopper le document de strat�gie de r�duction de la pauvret� (DSRP), (ii) le Burundi Leadership Training Program, une initiative de reconstruction post-conflit du Woodrow Wilson International Center for Scholars (2003-2005); (iii) le Projet sur les Documents de Strat�gie de R�duction de la Pauvret� dans les pays affect�s par les Conflits, une initiative conjointe de la Banque mondiale et du DfID, et (iv) l 'analyse du conflit burundais conduite en 2003 par Lib�re Ndabakwaje, Jean-Baptiste Mbonyingingo, et le Fonds International de D�veloppement Agricole utilisant le Cadre d'Analyse des Conflits d�velopp� par l'Unit� Pr�vention des Conflits et Reconstruction de la Banque mondiale. 4 Voir www.worldbank.org/conflict. 5 causes (Section II), et les dynamiques actuelles (Section III), puis met en relief les domaines critiques dans lesquels l'aide au d�veloppement peut investir pour soutenir la transition (Section II), et enfin propose quelques recommandations op�rationnelles. 6 SECTION I. ANALYSE DU CONFLIT BURUNDAIS (1965-2005) L'Accord d'Arusha conclut que le conflit "est fondamentalement politique, avec des dimensions ethniques extr�mement importantes. Il provient d'une lutte par la classe politique pour acc�der � et/ou rester au pouvoir" (Pr�ambule, Protocole I). En utilisant le cadre d'analyse des conflits, cette section identifie les causes saillantes du conflit burundais, les relations entre elles, et leur contribution � l'escalade ou � la d�sescalade des tensions. Les implications pour l'aide au d�veloppement en termes de programmes (quels sont les domaines prioritaires ?) et de projet (quelles sont les recommandations en ce qui concerne la conception, la mise en oeuvre et le suivi-�valuation des projets ?) d�coulent des conclusions de cette analyse du conflit. I. Principales causes du conflit : rarete des ressources, competition pour le pouvoir et instrumentalisation de la question ethnique 1. Clivages sociaux, ethniques et �conomiques, et d�s�quilibres r�gionaux : L'appartenance ethnique est seulement un clivage parmi plusieurs autres dans la soci�t� burundaise. Bien que les clivages ethniques soient per�us comme dominants en raison de quatre d�cennies de manipulation des identit�s socio-ethniques dans la lutte pour le pouvoir apr�s l'ind�pendance, les clivages sociaux au Burundi sont aussi bien verticaux qu'horizontaux, et sont d'au moins quatre types : ethnique, clanique, r�gional, et de classe (�lites urbaines contre masses rurales). Ces quatre clivages se recoupent et se renforcent souvent : Ainsi, malgr� une longue histoire d'inter mariages et de cohabitation, et d'all�geances claniques, la distinction entre les puissants et les d�munis co�ncide souvent avec les distinctions ethniques (Hutus et Tutsis) et r�gionales (Bururi et reste du pays). La composition ethnique du Burundi est semblable � celle du Rwanda (85% Hutu, 14% Tutsi, 1% de Twa), et les destins de ces deux petits pays semblent inextricablement li�s, mais le Burundi diff�re nettement du Rwanda en ce qu'avant l'ind�pendance du Burundi en 1962, la distinction entre Hutus et Tutsis n'�tait pas � la base de la mobilisation politique. Bien au contraire, au Burundi, Hutus et Tutsis �taient unis par leur all�geance commune � la monarchie. Les gouverneurs provinciaux, gouvernant les diverses r�gions du Burundi au nom du roi, �taient traditionnellement membres de l'aristocratie (gansa). La comp�tition politique existait principalement entre les diff�rents clans qui constituaient collectivement le ganwa, et les pr�tendants � la puissance monarchique ont utilis� des bases tant tutsies que hutues pour tenter d'y acc�der. Etant donn�es ces dynamiques, les colons belges ont exploit� les clivages claniques au sein du ganwa plut�t que la distinction Hutus/Tutis. C'est bien diff�rent au Rwanda, ou les Belges ont exploit� la division Hutus/Tutsis, donnant le pouvoir aux Tutsis et gouvernant � travers eux. Bien que la distinction Hutus/Tutsis se soit creus�e au cours de l'�poque coloniale, cette division est temp�r�e par un r�seau de relations sociales complexes: - Un syst�me hi�rarchique de castes : par exemple, la caste tutsie sup�rieure Banyaruguru et la caste inf�rieure tutsie Hima - Des divisions horizontales � l'int�rieur des castes (selon les diff�rentes lign�es). - Ces castes et lign�es �taient ancr�es dans des territoires pr�cis. De fait, les divisions r�gionales s'ajoutent aux divisions ethniques et claniques. Ainsi, la province de Bururi est politiquement 7 et �conomiquement dominante depuis les ann�es 605. Trois pr�sidents de la R�publique et une grande partie de l'�tat-major proviennent de Bururi. - Des divisions profondes au sein de chaque groupe ethnique entre mod�r�s et extr�mistes. - Des divisions entre les �lites et les populations : �lites instruites contre populations illettr�es, foss� entre les urbains et les ruraux, �lites urbaines contre populations urbaines sans emploi). - Les femmes sont aussi victimes de discriminations juridique et sociale : lois de transmission et pratiques en mati�re de cr�dit discriminatoires, et violence domestique r�pandue. - Des tensions entre les populations d�plac�es et r�fugi�es revenant dans leurs communaut�s d'origine, et ces communaut�s, notamment sur les questions fonci�res, un probl�me aviv� par la sp�culation et des attributions de terre irr�guli�res. - La minorit� twa demeure marginalis�e �conomiquement, socialement, et politiquement, avec une grande partie vivant de mani�re isol�e, sans acc�s aux services sociaux. Sans atteindre le m�me degr� qu'au Rwanda, la colonisation belge au Burundi a renforc� la distinction Hutus/Tutsis. Avec comme point de d�part l'assassinat en 1965 du ministre Ngendandumwe par un Tutsi rwandais r�fugi� au Burundi, la distinction Hutus/Tutsis est devenue la grille de lecture � travers laquelle tout �v�nement au Burundi tend � �tre lu. Les �v�nements au Rwanda dans les ann�es qui ont suivi ont aussi contribu� � cristalliser le conflit burundais autour de la question ethnique. La situation au Rwanda a mis de l'huile sur le feu du ressentiment croissant des Hutus burundais � l'�gard de la dominance tutsie apr�s l'ind�pendance. En m�me temps, la minorit� tutsie du Burundi craignait de plus en plus l'expansion de la r�volution du "Hutu Power" (en faveur des Hutus) du Rwanda jusqu'au Burundi. L'assassinat de 1965, les massacres de masse qui ont suivi, les assassinats et les massacres subs�quents (1965-69, 1972, 1988, 1991 et 1993) ont consid�rablement intensifi� les craintes des deux c�t�s, et lanc� une spirale de violence qui n'a commenc� � s'enrayer qu'avec la transition d'Arusha. Ces craintes ont �t� aliment�es et amplifi�es par les �lites politiques burundaises, hutues comme tutsies. Elles ont syst�matiquement mis la question ethnique en avant pour justifier les coups d'Etat, assassinats et insurrections qui rythm� l'histoire burundaise. Les appels � la mobilisation ethnique ont �t� une constante. Par exemple, le capitaine Micombero, qui a d�clar� l'abolition de la monarchie en 1966 et mis en place une dictature militaire, �tait membre de la basse caste tutsie et a employ� son appartenance tutsie pour gagner l'appui de la haute caste tutsie. Il "a employ� son appartenance ethnique pour les raisons qui �taient loin d'�tre abstraites et id�ologiques. En fait, ce nouvel ordre militaire �tait le reflet de la marginalisation des anciennes �lites et l'arriv�e de nouveaux groupes de parvenus. La vieille �lite ganwa a perdu sa pertinence, enlevant de ce fait un amortisseur entre Tutsis et Hutus" (Prunier 1994). 5Pour les indicateurs sociaux par province, voir le DSRP int�rimaire (novembre 2003) et la Burundi Poverty Note, Prospects for Social Protection in a Crisis Economy. Par exemple, en 1999, la province de Karuzi comptait trois fois plus de m�nages sous la ligne de pauvret� (pourcentage de la population totale) que la province de Cankuzo. 8 2. Diff�rences d'acc�s aux opportunit�s socio-�conomiques : Exclusion et injustice dans un contexte de pauvret� extr�me et de p�nurie de ressources. Les diff�rences d'acc�s aux opportunit�s socio-�conomiques ont sensiblement aggrav� les divisions ethniques, sociales, �conomiques et r�gionales d�crites ci-dessus. Ces divisions n'ont pas par elles-m�mes men� au conflit violent. Mais dans un contexte d'aggravation de la d�pression �conomique, et notamment des questions fonci�res, et de concentration de la puissance �conomique et politique aux mains d'une petite �lite urbaine, l'aggravation des disparit�s sociales au cours du temps a consid�rablement augment� le risque de conflit violent. En fin de compte, le facteur le plus d�stabilisant a �t� l'exclusion des Hutus de pratiquement toutes les institutions �conomiques, sociales, et politiques du Burundi, une pratique qui a commenc� en 1965 et a atteint un niveau inimaginable avec les massacres de 1972 visant les Hutus instruits. 3. Capital social. Le capital social entre groupes ("liens horizontaux") �tait traditionnellement important, y compris entre diff�rents clans et groupes ethniques. En effet, le Burundi est l'un des rares Etats africains qui avaient une identit� nationale avant l'arriv� du colon europ�en : "le syst�me monarchique s'est maintenu depuis le 17�me si�cle gr�ce � des alliances entre tous les groupes ethniques et entre certains clans, �tablissant de ce fait un v�ritable �tat-nation." (Gahama 2002). Cependant, ce capital social "horizontal" a �t� �puis� par les 40 ann�es de conflit violent. La crainte et la m�fiance croissantes entre Hutus et Tutsis, l'approfondissement des divisions entre r�gions et entre Bujumbura et les provinces, le fosse grandissant entre "la classe politique" et les populations, et le politisation de l'institution de l'abashingantahe a �rod� la capacit� de la soci�t� burundaise traditionnelle � g�rer les conflits de mani�re non-violente6. En revanche, le capital social � l'int�rieur de chaque groupe s'est d�velopp� au cours de la p�riode 1965-94, mais s'est manifest� principalement de mani�re n�gative. L'instrumentalisation de la question ethnique et les vagues successives de la violence ont fourni des moyens de mobilisation puissants, comme d�montr� lors des massacres de 1965, de 1972, et de 1993. Cependant, depuis l'Accord d'Arusha, les extr�mistes tant hutus que tutsis semblent avoir perdu beaucoup de leur puissance : les deux c�t�s sont arriv�s au constat que la victoire militaire n'est pas � port�e de main, et que seuls des accords politiquement n�goci�s sont possibles. Le choix de la coexistence pacifique a pour le moment ralenti les dynamiques de formation des identit�s de groupe � l'oeuvre depuis les ann�es 60, et a multipli� les occasions pour la coop�ration inter-groupes. Les relations inter-groupes au niveau des �lites ont d�j� consid�rablement �volu�es, gr�ce aux institutions de la transition et � des initiatives de diplomatie informelle telles que le Burundi Leadership Training Programme. La politique burundaise continue � �tre domin�e par la distinction Hutus/Tutsis, les in�galit�s structurelles qui sont � la base du conflit du Burundi restent inchang�es, il y a encore des extr�mistes dans chaque camp, et la comp�tition �lectorale peut toujours raviver le conflit, mais le discours politique est de plus en plus focalis� sur l'objectif de la cohabitation et du partage inter-ethnique du pouvoir. De nombreux d�fis demeurent, mais les Burundais semblent fermement engag�s � faire les compromis n�cessaires pour une paix et un r�tablissement �conomique durables. 6Ces divisions sont des conditions pr�-existentes. Certaines, pas toutes, ont �t� activ�es par la mobilisation politique. 9 4. Une histoire de violence et d'impunit� Les vagues chroniques de massacres pr�emptifs et de vengeance, ainsi que l'absence de toute notion de responsabilit� juridique et d'impartialit� judiciaire, ont produit une culture d'impunit�, de demandes de r�paration d'un groupe ethnique � l'autre, et une crainte et une m�fiance mutuelles profondes. La prolif�ration de petites armes est une source additionnelle de craintes et de tension. Beaucoup de citoyens ont perdu toute confiance en la capacit� du syst�me judiciaire � assurer m�me une protection juridique de base, le pr�sumant corrompu et partial. La faillite du syst�me juridique formel est seulement en partie compens�e par des m�canismes traditionnels de gestion des conflits, tels que l'abashingantahe. La politisation de cette institution durant cette derni�re d�cennie lui a fait perdre beaucoup de son autorit� morale traditionnelle. L'absence de justice et notamment l'impunit� ont donn� lieu � de nombreux meurtres pr�emptifs par des personnes craignant leur propre �limination, et � des actes de vengeance comme seul moyen de faire justice. Le r�tablissement de l'Etat de droit et des institutions judiciaires cr�dibles sont des conditions essentielles pour une paix durable au Burundi. 5. La faillite des institutions L'histoire du Burundi, marqu�e par des assassinats politiques, des coups d'Etat et des soul�vements politiques t�moigne de l'�chec du gouvernement et de la gouvernance au Burundi. Il y a eu des moments historiques positifs - tels que le gouvernement constitu� par Rwagasore � l'ind�pendance (ethniquement inclusif), et la transition d�mocratique de 1993 qui a port� au pouvoir le premier pr�sident hutu d�mocratiquement �lu du Burundi, mais ces rares moments ont �t� de courte dur�e. Autoritarisme, corruption et n�potisme ont caract�ris� les institutions et les relations entre le gouvernement et les citoyens. La transition en cours offre des opportunit�s d'am�lioration et permet une certaine dose d'optimisme en ce qui concerne le partage du pouvoir, mais les m�canismes de participation des communaut�s et de responsabilisation des �lites sont encore inexistants. Un gouffre s�pare les �lites et la population du Burundi. Les d�cennies de conflit violent dont la population a �t� la premi�re victime l'a rendue profond�ment m�fiante et cynique vis-�-vis de leaders vus comme corrompus et irresponsables. La restauration de la confiance publique dans les institutions prendra du temps et un effort consid�rable. � cet �gard, un d�veloppement positif a �t� l'�mergence au cours de la d�cennie pass�e d'une soci�t� civile active et organis�e : associations de d�fense des droits de l'homme, associations de jeunes, associations de femmes, associations paroissiales, et organisations non-gouvernementales contribuant � la r�conciliation � la base et au d�veloppement par les communaut�s. Les chefs des partis politiques ont r�serv� un accueil enthousiaste aux ateliers du Burundian Leadership Training Program con�us pour favoriser leur capacit� � collaborer et g�rer efficacement les premi�res �lections post-transition. Lentement mais s�rement, une �thique politique fond�e sur la participation est en train de prendre racine dans ce qui est historiquement un syst�me politique autoritaire. L'�mergence de m�dias ind�pendants a aussi contribu� � cette d�mocratisation. Lorsque le monopole d'Etat sur les m�dias a �t� lev� en 1992, il y a d'abord eu une explosion des m�dias partisans et ethniques qui ont parfois �t� le v�hicule d'appels � la haine (par exemple, Radio Rutomorangingo), quoique sans commune mesure avec ce qui s'est pass� au Rwanda. Maintenant, cependant, les radios sont de plus en plus utilis�es pour promouvoir la paix. Un tel exemple est la Radio Publique Africaine, qui propose des programmes sur un large nombre de questions sociales et est un symbole de la r�conciliation entre Hutus et Tutsis. 10 6. S�curit� humaine: Un cycle de conflit et de pauvret�. Le manque de s�curit� humaine (s�curit� des personnes, prot�g�es des menaces d'atteintes � leurs droits, leur s�curit� et leur vie) a augment� le potentiel pour la mobilisation ethnique. La s�curit� physique est restaur�e dans 16 des 17 provinces du Burundi. L'arm�e et la plupart des groupes rebelles ont commenc� � prendre part au programme de d�sarmement, de d�mobilisation, et de r�int�gration. Toutefois, le FNL continue � lancer des attaques dans la province de Bujumbura Rurale, et la guerre civile a laiss� une population civile fortement arm�e, avec des milices hutues et tutsies et des groupes d'autod�fense au niveau des collines. Deux t�ches sont essentielles � une paix durable : la r�forme de l'arm�e et de la police nationales, afin de les rendre coh�sives, professionnelles et ind�pendantes, au service de tous les �l�ments de la population et symbole de l'unit� de la nation ; et le d�sarmement de la population civile. Le chemin est long mais les d�veloppements r�cents sont encourageants, notamment la demande de formation venant de l'arm�e et de la police aupr�s du Burundi Leadership Training Program, afin de renforcer la collaboration et les capacit�s de gestion des �tats-majors nouvellement int�gr�s. Restaurer la confiance publique dans des forces de s�curit� professionnelles et impartiales prendra du temps et des efforts consid�rables, toutefois les premi�res �tapes de leur r�forme donnent mati�re � optimisme. II. Aspects economiques: concurrence dans un contexte de croissance faible ou negative, de ressources rares et d'extreme concentration du pouvoir 1. Croissance �conomique et in�galit�s D�j� un des pays les plus pauvres du monde lors de son ind�pendance, l'�conomie burundaise fond�e sur l'agriculture a �t� directement affect�e par violence chronique et les d�placements massifs. Le taux de croissance �conomique moyen du Burundi �tait de 4% avant 1993, avant de devenir n�gatif pour le reste de la d�cennie, avec un PNB par habitant r�duit de moiti� entre 1993 et 2001. Avec une croissance de 2,4% entre 1980-2000 (6% dans des secteurs urbains), la population du Burundi a augment� bien plus rapidement que son �conomie, d'o� la d�gradation brutale de son PNB par habitant. L'explosion de la population a �galement men� � la division de terres d�j� rares en parcelles de plus en plus petites, et � la d�gradation de l'environnement. En outre, l'�conomie du Burundi, petite et ouverte aux �changes internationaux, a �t� affect� par : - la diminution de 66% de l'aide internationale entre 1996 et 2003 ; - la nette d�gradation des prix du caf� et du th�, ses deux exportations principales; - l'embargo impos� par six pays voisins (1996-99) ; - l'augmentation des d�penses militaires ; - l'augmentation du service de la dette ; - une inflation �lev�e (40% de 1998) ; et - la d�valuation de 20% du Franc burundais en ao�t 2002. Ces facteurs ont tous contribu�s � briser l'�conomie, mais de tous ces facteurs, aucun n'a eu plus d'impact que la guerre civile. La d�pression �conomique, la croissance rapide de la population du pays, et la concentration de la puissance �conomique et politique aux mains d'un petit sous-ensemble de la minorit� tutsie, ont s�v�rement limit� les aspirations socio-�conomiques des populations tant tutsies et que hutues, et aussi aggrav� les clivages ethniques et r�gionaux. En effet, la distinction entre les poss�dants et les d�munis � tendu � co�ncider avec ces clivages et � rendre encore plus direct le lien entre les int�r�ts 11 �conomiques dominants et la commande de l'appareil d'Etat7. L'Etat est devenu le principal moyen d'acc�s � la richesse et la majorit� des opportunit�s socio-�conomiques s'est concentr�e dans le secteur public. L'acc�s aux emplois du secteur public et priv�, cependant, est conditionn� par l'acc�s � l'�ducation, lequel a �t� fortement in�gal en termes ethniques et r�gionaux. Les Burundais sont conscients que la mauvaise gestion �conomique du pays a contribu� � la d�gradation de la situation �conomique et � des injustices sociales graves. Alors que le revenu national diminuait, les d�penses militaires ont augment� - au d�triment de d�penses sociales essentielles. La pauvret� des m�nages a doubl� pendant les ann�es de guerre8. Une pauvret� caus�e principalement par la guerre. Le Burundi a �t� pris dans un cycle tragique de pauvret� et de conflit. La pauvret� a rendu la population plus r�ceptive � la mobilisation ethnique, et le conflit a progressivement �rod� le capital humain, physique et social du Burundi. Le conflit a �galement cr�� une population croissante de personnes vuln�rables, notamment une jeunesse marginalis�e, les r�fugi�s et les d�plac�s. On estime que la guerre a caus� plus de 300 000 morts depuis l'ind�pendance, avec 800 000 r�fugi�s dans les pays voisins et 700 000 d�plac�s. Toutefois, les diff�rentes provinces n'ont pas �t� affect�es par la violence et la polarisation ethnique de la m�me mani�re, et la dynamique politique locale varie selon les diff�rentes r�gions. La raret� des ressources naturelles a toujours �t� une source de tensions au Burundi, une soci�t� agricole avec 92% de population rurale. La diminution de la terre arable disponible, combin�e avec le retour massif des r�fugi�s et des personnes d�plac�es, produira presque certainement de nouvelles tensions importantes sur les questions fonci�res et d'acc�s aux autres ressources naturelles. Tableau 1: Indicateurs sociaux et �conomiques, 1990-2002 Indicateurs 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 Produit national brut na 2.7 -3.8 -8.3 -1.0 2.1 2.7 Produit national brut par habitant (US$ 214.4 179.6 170.8 131.8 129.3 119.1 110.0 actuels) Population (millions) 5.3 5.6 5.9 6.0 6.3 6.7 7.0 % Urbain 6.3 6.8 7.2 7.5 7.8 8.2 9.0 % Rural 93.7 93.2 92.8 92.5 92.2 91.8 91.0 Population sous la ligne de pauvret� (%) 34.9 33.5 47.8 60.7 65.6 68.7 68.0 Densit� de population (personnes/km carr�) 211.4 224.1 234.6 243.1 251.6 266.2 280.8 Terre arable (% de la superficie) 58.8 56.7 60.0 60.0 54.5 55.0 55.0 Actifs (% de la population totale) 45.0 44.4 44.1 44.2 44.4 44.6 49.0 Secteur public (% du secteur formel) 36.7 36.8 36.6 36.2 37.1 36.9 33.7 Secteur priv� (% du secteur formel) 35.2 35.1 35.2 35.4 34.9 34.9 35.0 Source: Gouvernement du Burundi, Secr�tariat permanent pour les R�formes �conomiques et sociales. 7En 1985, moins de 20% de la population de l'Universit� nationale �tait hutue ; 15% des 6 000 �tudiants de l'Universit� du Burundi venait d'une commune de la province de Bururi, Mugamba; la majorit� des Hutus ayant re�u une �ducation sup�rieure a �t� massacr�e en 1972 ou s'est r�fugi�e dans les pays voisins. Les grandes in�galit�s d'emploi et de revenus entre Hutus et Tutsis en r�sultent (Nkurunziza and Ngaruko 2002). 8Les in�galit�s au Burundi sont aussi per�ues en termes non-ethniques : le sentiment d'injustice est �galement dirig� contre les classes urbaines ais�es. 12 III. Dynamiques externes : les effets trans-frontieres des conflits de la sous-region des grands lacs La sous-r�gion des Grands Lacs est prise dans la toile de multiples conflits nationaux qui ont des dimensions r�gionales. La R�publique D�mocratique du Congo, le Rwanda et le Burundi ont chacun �t� des bases arri�res pour des groupes arm�s des pays voisins, et re�u des r�fugi�s des pays voisins. Les trois pays partagent des probl�matiques identitaires, avec des solidarit�s ethniques mall�ables et fluides (par exemple entre les Banyamulenge (Congolais d'origine rwandaise, hutus et tutsis), et les Tutsis rwandais et burundais. Les �v�nements militaires et politiques au Burundi et au Rwanda ont eu des impacts mutuels importants. Ainsi, la r�volution du "Hutu Power" au Rwanda a inspir� les Hutus burundais, exclus des principales institutions de l'apr�s-ind�pendance. En m�me temps, les Tutsis burundais sont venus � craindre le m�me sort violent que les Tutsis rwandais. La R�publique D�mocratique du Congo a servi de base arri�re et d'asile aux groupes rebelles hutus, tant rwandais que burundais. Les combattants burundais et rwandais se sont alli�s avec l'arm�e congolaise contre les interventions arm�es de l'Ouganda et du Rwanda en RDC. Ils ont re�u une instruction, des armes et un financement en �change de leur contribution � l'effort de guerre congolais. Un autre Etat de la sous-r�gion, la Tanzanie, a subi l'impact direct du conflit burundais. Des centaines de milliers de personnes (7% de la population du Burundi en 1999) se sont r�fugi�es en Tanzanie, et la r�bellion hutue arm�e a beaucoup recrut� au sein des camps de r�fugi�s en Tanzanie. En outre, des Tanzaniens ont soutenu la lutte hutue contre l'h�g�monie tutsie, avec des indices d'un appui tacite aux groupes arm�s hutus. 13 SECTION II. DYNAMIQUES DU CONFLIT SUR TRENTE ANS : CAUSES STRUCTURELLES, CAUSES DECLENCHANTES, ET EFFETS DE RETROACTION I. Causes structurelles et causes d�clenchantes sur trente ans Comprendre les relations entre les causes du conflit, et notamment distinguer les causes structurelles (causes pr�existantes qui en elles-m�me n'expliquent pas le passage � la violence de masse) des causes d�clenchantes, est essentiel pour comprendre les dynamiques du conflit. Une mani�re d'appr�hender ces relations est d'identifier des causes structurelles et des causes d�clenchantes en �tudiant une s�rie d'�v�nements sur la longue dur�e. Le Tableau 2 utilise cette approche en couvrant trois d�cennies de l'histoire du Burundi. Tableau 2: Conflits depuis l'Ind�pendance (1962) Ann�e Dur�e Nombre de morts Nombre de r�fugi�s R�gion affect�e 1961 Assassinat du Prince Louis Rwagasore 1963 1 mois n.d. n.d. Conflits localis�s 1965 Assassinat du Premier Ministre Ngendadumwe 1965 Les Hutus gagnent la majorit� parlementaire mais le Roi refuse de nommer un Premier Ministre hutu. Coup d'Etat de la police, d�jou�. 1965 1 mois 5 000-25 000 n.d. Centre (Muramvya) 1966 1966: Coup d'Etat et abolition de la monarchie 1966 1 mois n.d. n.d. Conflits localis�s 1969 1 mois n.d. n.d. Conflits localis�s 1972 Massacre massif des Hutus instruits 1972 Assassinat de Ntare V 1972 4 mois 150 000 300 000 Tout le pays 1973 1 mois n.d. 300 000 Conflits localis�s 1976 Coup d'Etat de Bagaza 1976 1 mois n.d. n.d. Conflits localis�s 1987 1 mois n.d. n.d. Conflits localis�s 1987 Coup d'Etat de Pierre Buyoya 1988 2 months 5 000-25 000 20 000 � 60 000 North (Ngozi, Kirundo) 1991 R�bellions hutus locales et repression de l'arm�e domineer par les Tutsis 1991 1 mois 1.500-5 000 40 000 Cibitoke, Bubanza, Bujumbura 1992 1 mois n.d. n.d. Cibitoke, Bubanza 1993 Assassinat du Pr�sident Ndadaye 1993 96 mois 150 000-200 000 250 000 � 800 000 Tout le pays n.d. = information non disponible Sources: Minorities at Risk Project, University of Maryland ; Human Rights Watch, Economist Intelligence Unit, United States Institute of Peace ; International Crisis Group; et Nkurunziza (2001). A la lecture de ce Tableau 2 r�sumant trente ans d'histoire tragique, les causes imm�diates de chacune des �ruptions de violence ont �t� : 14 � Une violence caus�e par les �lites : quatre assassinats politiques, le massacre de 1972, et trois coups d'Etat ou tentatives de coups d'Etat, � La mobilisation ethnique, � Des �v�nements dans la sous-r�gion qui ont d�clench� des �ruptions de violence (massacres au Rwanda, guerre civile en R�publique d�mocratique du Congo, flux transfrontaliers de r�fugi�s, de g�nocidaires, d'armes et de contrebande). Les causes structurelles de ces pages sanglantes de l'histoire burundaise ont �t� relativement constantes : - Clivages structurels : sociaux, ethniques, r�gionaux et �conomiques, et acc�s in�gal aux services sociaux et � l'emploi, dans un contexte de grande pauvret� et d'extr�me concentration du pouvoir. - Le legs de trente ans de violence, d'impunit� et de la faillite des institutions publiques. - Un cercle vicieux de conflit violent et de pauvret�, dont sont victimes les populations, ce qui augmente le potentiel de mobilisation. Ainsi, la lutte pour le pouvoir dans un contexte de la pauvret� extr�me et de ressources rares a instrumentalis� la question ethnique comme moyen de mobilisation de masse. II. Effets r�troactifs L'Encadr� 2 illustre les nombreux effets de r�troaction qui ont produit un cycle de violence et de pauvret� particuli�rement vicieux au Burundi. 15 Encadr� 2: Relations causales, 1996-2004 Pauvret� extr�me et Afflictions ressources rares Politique coloniale de Divisions ethniques "diviser pour r�gner" R�volution du "Hutu Mobilisation ethnique power" au Rwanda de masse Violence de masse Acc�s in�gal aux services sociaux et aux opportunit�s �conomiques Lutte pour le pouvoir Faillite des institutions apr�s l'ind�pendance et recours � la violence Impact limit� de la pression ext�rieure pour am�liorer la gouvernance 16 SECTION III. DYNAMIQUES DU CONFLIT AUJOURD'HUI : A LA CROISEE DES CHEMINS Apr�s quatre ans d'une transition qui a d�but� en novembre 2001, certains facteurs contribuent � mettre fin au conflit tandis que d'autres continuent � contribuer � son escalade. Dans certains cas, l'impact de facteurs � l'origine du conflit est encore incertain. I. Facteurs de d�sescalade � Le rejet de la guerre et la baisse de la violence, avec 16 des 17 provinces actuellement sans conflits violents, avanc�es de la r�forme du secteur de s�curit� et du Programme de D�mobilisation, R�insertion et R�int�gration (DRR) ; � Le fait que la guerre ait entra�n� une baisse importante des revenus pour presque tout le monde, si bien que la plupart des Tutsis et des Hutus sont maintenant, de fait, � dans le m�me bateau �conomique � ; � Des initiatives pour supprimer les clivages ethniques au niveau central, gr�ce au partage du pouvoir et du renforcement de la confiance ; � Des programmes de formation initi�s par l'arm�e et par la nouvelle force de police ind�pendante pour renforcer la coh�sion et la capacit� � collaborer des hauts commandements de ces deux institutions ; � L'�mergence de m�dias ind�pendants et d'organisations civiles constitu�es de membres des deux ethnies ; et un grand nombre d'initiatives communautaires, pour la formation au leadership, la r�conciliation, et la gestion du conflit ;9 � La marginalisation apparente de nombreux extr�mistes tutsis ; � La pr�sence significative de soldats de la paix internationaux de l'ONUB, apparemment bien accueillie par la plupart des Burundais, et l'engagement de la communaut� des bailleurs dans la reconstruction d'apr�s-guerre ; � Les efforts des principaux hommes politiques burundais pour continuer les n�gociations sur le partage du pouvoir, m�me apr�s la ratification par le parlement de la constitution par int�rim qui vient d'�tre approuv�e par r�f�rendum ; � Des initiatives prises en commun par les dirigeants des partis politiques burundais, en particulier leur participation � des commissions destin�s � renforcer leur coh�sion, le succ�s de leur r�daction commune d'un code de conduite �lectoral, et leur publication d'un communiqu� de presse visant � convaincre le public de leur volont� de travailler ensemble pour des �lections sans violence ou intimidation ; et � La gestion r�ussie � la fois du r�f�rendum constitutionnel et des �lections communales ; dans ce dernier cas, � part dans six communes o� les �lections ont �t� retard�es par des 9Une initiative particuli�rement int�ressante consiste en un programme exp�rimental de leadership communautaire (CBLP) d'une dur�e de deux ans, mis en place dans les provinces du Ruyigi et de Gitega, avec l'aide financi�re de l'USAID. Ayant pour but d'acc�l�rer la r�int�gration des r�fugi�s, des personnes d�plac�es et des ex-combattants dans la communaut�, le CBLP associe trois �l�ments principaux : la formation au leadership des dirigeants locaux, de petites subventions pour le d�veloppement de la communaut�, et des centres de formation professionnelle. Cette initiative pr�voit un partenariat entre PADCO, African Strategic Initiatives, une ONG burundaise locale, le Wilson Center, et le BLTP. Search for Common Ground a aussi jou� un r�le majeur en d�veloppant parmi les communaut�s locales les comp�tences n�cessaires � la r�solution non-violente des conflits. 17 violences, pr�s de 75% de la population est venue participer � ce qui a �t� vu par la plupart des observateurs comme des �lections libres et justes. II. Facteurs d'escalade potentielle � Les �lections nationales � venir portent le risque d'une escalade des tensions ethniques. Les partis hutus et tutsis peuvent tous deux �tre tent�s de se pr�senter comme les meilleurs repr�sentants des int�r�ts de leur r�gion, de leur ethnie ou de leur clan, donnant par-l� une empreinte fortement r�gionale, ethnique ou clanique � la comp�tition entre les partis. De plus, dans un pays o� les solutions violentes et l'impunit� sont devenues la norme, et dans lequel la perte du pouvoir politique est per�ue comme ayant des cons�quences d�sastreuses, les �lections pourraient bien �tre une invitation � poursuivre la violence ;10 � La raret� extr�me des terres agricoles, aggrav�e par le retour des r�fugi�s et des personnes d�plac�es depuis fin 2003 ; � La tendance des organisations humanitaires � exacerber involontairement les clivages ethniques et les diff�rences de classes par une r�partition g�ographique in�gale des services ; � La r�sistance de certains �l�ments tutsis qui craignent de voir leur statut �conomique diminu� ou qui s'inqui�tent de savoir comment le futur gouvernement va r�gler les questions de justice non r�solues, ou qui, avec les massacres de 1993 en t�te, craignent pour leur survie si les Tutsis perdent le contr�le de l'arm�e et de l'Etat ; � L'impunit� continuelle et l'absence de programme s�rieux pour mettre fin au cycle de la violence, l'absence de sanctions des actes de violence, et en cons�quence la l�gitimation de l'utilisation de la force ; � L'intransigeance et la violence continues du FNL, le seul groupe arm� qui reste en dehors du processus de paix ; � Des tendances d�stabilisantes en RDC qui pourraient g�n�rer de nouvelles violences entre les fronti�res et de nouvelles vagues de r�fugi�s, comme cela a eu lieu en ao�t 2004 avec l'afflux de Banyamulenge du Kivu sud en RDC et leur massacre au Burundi ; � Une r�action possiblement n�gative du gouvernement rwandais � une transition burundaise r�ussie et � l'�mergence d'un gouvernement majoritairement hutu � sa fronti�re ;11 et � La prolif�ration de petites armes qui constitue une menace constante � la paix, sachant que la mobilisation de masse est toujours possible, et l'augmentation des actes de banditisme de droit commun et de violences criminelles (non politiques). 10Les bailleurs devraient remettre en question la tendance � consid�rer les �lections comme le m�canisme central de la transition politique. En fait, il n'est pas impossible que la pression mise par les bailleurs pour que des �lections exp�ditives aient lieu en 1992-93 ait contribu� � la trag�die qui en a r�sult�. 11D'un autre c�t�, un succ�s burundais pourrait peut-�tre encourager les Rwandais � r��valuer leur propre politique d'apr�s-guerre, plut�t autoritaire, qui cherche � supprimer toute discussion sur les diff�rences politiques entre ethnies. 18 III. L'issue de certains facteurs est encore ind�termin�e � Le processus tr�s d�licat de la r�forme du secteur de s�curit�, essentiel � la fois � la cr�ation de structures de commandement et de contr�le int�gr�es et au r�tablissement de la l�gitimit� de l'arm�e et de la police, comporte des risques �vidents, qui doivent �tre bien g�r�s. Une attention particuli�re doit par exemple �tre port�e aux incertitudes �conomiques et aux frustrations des ex-combattants, qui craignent les cons�quences de la d�mobilisation ou qui fondent trop d'espoirs sur ce que peut leur apporter le programme DDR. � Des mesures pour am�liorer l'�quilibre du gouvernement et des institutions politiques, et des formes de d�mocratie consensuelle, y compris la protection des droits de minorit�s, font l'objet d'un d�bat public ; cependant, aucun consensus n'a encore �t� atteint et la participation de la population � ce d�bat a �t� extr�mement limit�e. Sans initiatives pour renforcer la capacit� du Burundi � g�rer les conflits, pour �tablir la confiance chez les dirigeants cl�s, pour renforcer les capacit�s de d�cisions communes, au-del� des diff�rences politiques ou ethniques, et pour s'attaquer � la grande division entre les �lites urbaines et la masse rurale de la population, les in�galit�s structurelles inh�rentes au conflit burundais ne seront pas r�solues. � Les clivages ethniques et r�gionaux sont discut�s ouvertement, mais il y a eu peu d'efforts programm�s pour aborder les probl�mes sous-jacents, et des statistiques de base �valuant les diff�rences ethniques et r�gionales n'ont jamais �t� compil�es. � Dans le cadre des consultations sur la Strat�gie de R�duction de la Pauvret�, il y a quelques tentatives isol�es d'am�liorer la responsabilit� des gouvernants vis-�-vis des gouvern�s, mais la participation publique doit �tre g�n�ralement renforc�e ; � Il n'y a pas encore de programme national de r�forme du syst�me judiciaire dans le but de condamner les responsables des crimes de guerre et des violations des droits de l'homme qui ont �t� commis durant les quatre derni�res d�cennies. � La croissance �conomique a repris en 2001 (2,1% en 2001 et 4,5% en 2002), mais est retomb�e � 1% en 2003. Bien qu'il y ait des signes anecdotiques d'une meilleure performance �conomique en 2004 � en partie due la pr�sence accrue des gardiens de la paix internationaux - la croissance de la population a exc�d� le taux de croissance �conomique, et la croissance �conomique a eu peu d'impact sur la frange la plus pauvre de la population burundaise. Le Burundi reste une des nations les plus pauvres du monde, et l'extr�me pauvret� du pays est l'un des facteurs locaux les plus significatives de la vie politique du Burundi. � Le futur du Burundi ne peut pas �tre dissoci� de d�veloppements impr�visibles dans le Rwanda de l'apr�s g�nocide, et du processus de paix encore extr�mement fragile en RDC. Dans la p�riode post-Arusha, la pauvret� extr�me, les ressources limit�es, une lutte continue aux plus hauts niveaux pour le contr�le de l'�tat, et un acc�s toujours in�gal aux services et aux opportunit�s restent une source d'inqui�tude, de m�me que les probl�mes non r�solus de justice et de responsabilit�. Dans le contexte de la transition politique et des attentes accrues de la population, le statu quo lui-m�me porte le risque de l'escalade du conflit. Le grand nombre de facteurs encore ind�termin�s sugg�re qu'il reste de nombreuses possibilit�s d'assistance au 19 d�veloppement et de diplomatie formelle et informelle ("Track II") pour aider � consolider le processus de paix au Burundi. Les possibilit�s notables incluent : l'actuel acc�s hautement in�gal aux services sociaux, � l'emploi et aux ressources de production ; le manque d'opportunit�s dans les zones rurales et le besoin urgent de renforcer le secteur agricole ; l'absence criante de volont� de mettre fin � l'historique de violence et d'impunit� du Burundi, qui maintient l'usage de la violence comme un recours possible ; le manque de processus de r�conciliation et de justice nationaux et profond�ment enracin�s ; et la nature limit�e de la responsabilit� verticale et de la participation publique. En compl�ment, un effort international concert� pour stabiliser l'ensemble de la r�gion sera une contribution importante � la paix et � la stabilit� futures du Burundi. 20 SECTION IV. DOMAINES DANS LESQUELLES L'AIDE AU DEVELOPPEMENT PEUT SOUTENIR LA TRANSITION Les rapports de l'aide au d�veloppement dans les mois pr�c�dents le g�nocide de 1994 au Rwanda �taient teint�s d'estimations irr�alistes des intentions des bellig�rants et sous-estimaient � la fois le besoin de r�formes profondes pour r�soudre les in�galit�s structurelles du Rwanda et les risques multiples de d�clenchements de violence sur les fronts politiques et s�curitaires. M�me si de bien des fa�ons la situation est radicalement diff�rente au Burundi, ses in�galit�s structurelles commencent juste � �tre mesur�es et abord�es, et il reste un risque de reprise des conflits violents, sp�cialement dans le contexte des premi�res �lections apr�s la transition. Plusieurs sc�narios sont en fait possible : (i) une reprise des conflits violents, (ii) une continuation des conflits chroniques avec des p�riodes de paix entrecoup�es d'�pisodes violents, (iii) une stabilisation superficielle � du sommet � qui ignore les in�galit�s fondamentales restantes, et (vi) une consolidation de la transition par un v�ritable effort pour r�soudre ces in�galit�s. Consid�rant l'importance de l'aide au d�veloppement au Burundi (24% du PNB en 2002)12 et son r�le potentiel pour r�soudre les in�galit�s structurelles du Burundi, mais aussi plusieurs d�clencheurs de conflits violents � court terme, il est essentiel d'�tudier le r�le de l'assistance au d�veloppement dans ces diff�rents cas de figure. Cette section d�finit les implications de l'analyse du conflit burundais pour le calendrier du d�veloppement, � la fois pour donner la priorit� aux programmes qui aideront � consolider la transition au Burundi, et pour sensibiliser les bailleurs sur les questions op�rationnelles cl�s au niveau des projets. I. L'aide au d�veloppement et la diplomatie dans les transitions de la guerre � la paix L'aide au d�veloppement et la diplomatie sont des approches compl�mentaires dans les transitions de la guerre � la paix. Le Tableau 3 liste des facteurs types de conflit,13 faisant la distinction entre ceux que l'aide au d�veloppement a traditionnellement �t� capable ou charg�e de r�soudre, et ceux qui ont traditionnellement �t� abord�s par la diplomatie formelle ou informelle. Ce tableau a pour but de donner une image globale et ne fait pas la distinction entre les bailleurs bilat�raux, les organisations multilat�rales, les organismes des Nations Unies, ou les ONG ; cependant, il faut souligner qu'il y a des diff�rences significatives entre les mandats respectifs de ces entit�s et qu'aucune n'a un mandat pour s'attaquer � toutes les causes de conflit. Le tableau prend en compte des d�veloppements r�cents tel que le changement de priorit� de la reconstruction post-conflit � une approche plus globale comprenant pr�vention des conflits et rehabilitation post-conflit, et les nouvelles approches d�velopp�es ces derni�res ann�es, telles que la r�int�gration communautaire de personnes d�plac�es et d'ex-combattants, des nouvelles modalit�s de formation con�ues pour renforcer la collaboration entre les anciens partis bellig�rants, de nouveaux outils de financement (par exemple des programmes de subventions pour des projets de petite envergure, � court terme et � l'impact important ; le Programme multi-Pays pour la D�mobilisation et la R�int�gration, et les nouveaux partenariats entre les entit�s diplomatiques conventionnelles et les organisations non gouvernementales.) 12Base de donn�es des indicateurs de d�veloppement de la Banque Mondiale, ao�t 2004. 13Adapt� du cadre d'analyse des conflits : www.worldbank.org/conflict. 21 Tableau 3 : Les questions pouvant �tre r�solues par des interventions de d�veloppement et de diplomatie formelle ou informelle Cause Aide au d�veloppement Diplomatie formelle ou informelle Clivages sociaux, Etudes des d�penses publiques, contr�le Collaboration et m�diation �conomiques, ethniques et et �valuation � l'aide d'indicateurs de inter-groupes des dirigeants r�gionaux paix et de conflit ; investissements destin�s � aider les groupes d�savantag�s ; formation au leadership, mettant particuli�rement l'accent sur la gestion de conflit et mitigation. Opportunit�s sociales Programmes par secteur avec des N�gociation avec les �lites diff�renci�es (ex. �ducation, objectifs explicites d'�galit� sociale sant�) Restauration du capital social, Projets d'infrastructures inter-groupes ; Formation � la gestion de conflit et � la construction d'une identit� de projets m�diatiques de renforcement de mitigation groupe et fabrication de la paix ; promotion des m�dias justes et mythes professionnels Historique de violence et Formation � la gestion de conflit et � la Formation � la gestion de conflit et � la d'impunit� mitigation ; soutien de la r�forme mitigation ; Court p�nale judiciaire et renforcement des capacit�s ; Internationale ; soutien des processus soutien de la v�rit� et des processus de de la r�habilitation et de r�conciliation r�conciliation Gouvernance et institutions Soutien budg�taire, initiatives de N�gociation avec les �lites formation au renforcement des capacit�s Syst�me juridique et judiciaire Soutien budg�taire, initiatives de N�gociation avec les �lites formation au renforcement des capacit�s Liens entre le gouvernement et Participation requise aux programmes de N�gociation avec les �lites les citoyens d�veloppement Droits de l'homme Soutien des groupes militants pour les N�gociation avec les �lites ; Stopper droits de l'homme, soutien de la r�forme l'impunit� (gouvernance ; tribunal des du syst�me judiciaire et renforcement des crimes de guerre) capacit�s, soutien de la r�forme du syst�me de s�curit� Militarisation de la soci�t� et Soutien financier et technique aux Soutien � l'�mergence de r�gimes prolif�ration des petites armes programmes de d�mobilisation et de r�gionaux de contr�le des armes ; r�int�gration conditionnalit� des programmes des institutions financi�res internationales exigeant une r�duction des d�penses militaires Structure et performance Soutien du d�veloppement centr� sur la Facilitation de la n�gociation des �conomique communaut� et des programmes de nouveaux accords �conomiques protection sociale ; extension de r�gionaux l'initiative des (Pays Pauvres Lourdement Endett�s) ; promotion de la diversification �conomique et des industries de transformation; promotion de l'emploi ; assistance technique pour la r�forme agraire Ressources naturelles et Gestion des ressources naturelles N�gociation des conventions environnementales (y compris environnementales r�gionales agraires) concernant la gestion des ressources naturelles Forces ext�rieures : Conflits Programmes de d�veloppement, Embargos internationaux sur les r�gionaux ; R�les des groupes encourageant clairement la coop�ration armes ; n�gociation d'une nouvelle 22 familiaux en dehors du pays ; et l'int�gration r�gionales ; soutien au organisation de la s�curit� r�gionale) ; R�le des diasporas commerce r�gional et � l' engagement de contr�leurs et de investissement; facilitation de la cr�ation soldats de la paix internationaux de r�seaux professionnels r�gionaux ; soutien � la participation de la diaspora aux projets de d�veloppement Il y a un large �ventail de domaines dans lesquels l'aide au d�veloppement peut aider � r�soudre certaines des sources de conflits. La difficult� consiste � s'assurer que le plan d'action de d�veloppement a les bonnes priorit�s et est extr�mement pr�cis. Mieux vaut faire passer en priorit� un certain nombre d'initiatives � l'impact important que de tenter de r�soudre tous les probl�mes en m�me temps ; une approche ponctuelle de l'aide au d�veloppement a des chances de g�n�rer de nombreuses initiatives de moindre impact. Une analyse dynamique des conflits peut grandement aider � �tablir la liste des priorit�s de l'aide au d�veloppement en fixant l'attention sur les questions cl�s suivantes : Quelles sont les causes structurelles et les causes d�clenchantes du conflit ? Quels outils de d�veloppement et/ou diplomatiques sont les plus adapt�s pour r�soudre ces probl�mes ? Comment les outils de d�veloppement et/ou diplomatiques peuvent-ils �tre compl�mentaires dans la r�solution de ces causes de conflit en utilisant diff�rentes strat�gies et outils, avec des mandats et des cadres temporels diff�rents ? En particulier, les experts du d�veloppement et les diplomates devraient d�passer dans leur analyse les facteurs qu'ils prennent traditionnellement en compte. Par exemple, bien que la diplomatie soit la plus � m�me � g�rer les acteurs qui peuvent menacer le processus de paix (� spoiler management �), les agences de d�veloppement devraient inclure cette consid�ration dans le d�veloppement de leurs projets : identification des risques politiques, et mesures �ventuelles de mitigation. Quel type de projets de d�veloppement peuvent contribuer non seulement � la reconstruction �conomique mais aussi � la consolidation du processus de paix et de la stabilit� politique � long terme ? Quelles initiatives sont le plus � m�me de r�soudre les causes structurelles sous-jacentes de conflit ? Comme les initiatives qui soutiennent la stabilisation peuvent dans certains cas contredire les initiatives pour r�soudre les causes structurelles, dans quel ordre les initiatives de d�veloppement et/ou diplomatiques doivent-elles se succ�der ? Quel est le d�lai requis pour la mise en oeuvre efficace d'un plan d'action de d�veloppement durable ? Il a �t� rapport� que les pays sortant de conflits ont 44% de chances de retomber dans la violence dans les cinq ans suivant la signature des accords de paix ; pourtant, l'aide d'apr�s-guerre, souvent tr�s abondante aux premiers signes d'un accord de paix n�goci� (fournissant jusqu'� 95% du PNB), est habituellement brusquement r�duite � la portion congrue dans les cinq ann�es suivantes (Collier et al. 2003). 23 Comment chaque projet doit-il �tre con�u, r�alis�, contr�l� et �valu� pour assurer que les objectifs de consolidation de la paix soient atteints ? En accordant l'attention n�cessaire � ces questions op�rationnelles, un projet immobilier peut contribuer � la consolidation de la paix. II. Consid�rations pour l'aide au d�veloppement au Burundi La transition mise en place � Arusha a donn� � la communaut� internationale la possibilit� de tenter de r�soudre certaines des causes structurelles du conflit burundais. De plus, la communaut� de l'aide au d�veloppement est charg�e de surveiller la r�alisation de l'Accord d'Arusha, par le Implementation Monitoring Committee pilot� par les Nations Unies, et l'unit� de coordination des bailleurs pour la r�alisation du Protocole IV de l'Accord d'Arusha bas�e � Bujumbura. En tenant compte de l'analyse des causes et des dynamiques du conflit, effectu�e en premi�re partie, une strat�gie efficace de d�veloppement pour les bailleurs pourrait �tre la suivante : � Premi�rement, � ne pas faire de mal � et en particulier �viter de renforcer les causes structurelles ou les d�clencheurs du conflit. Il faut faire attention � ce que l'aide vienne en continu et que les programmes ne perp�tuent pas involontairement les in�galit�s structurelles du pass�. Le danger d'une captation de l'aide par les �lites, qui augmenterait encore la concentration d�j� exceptionnelle du pouvoir �conomique et politique, est grand. Les r�gions disposant de meilleures infrastructures, d'une meilleure s�curit� et d'un personnel plus exp�riment� sont des emplacements de choix non seulement pour le si�ge des organismes d'aide au d�veloppement mais aussi pour leurs op�rations, exacerbant parfois sans le vouloir les tensions entre les classes et les ethnies. Dans le contexte des �lections � venir, les bailleurs doivent aussi tenir compte du risque que l'aide soit utilis�e dans un but �lectoral et augmente la comp�tition entre les groupes. En outre, l'aide des bailleurs doit �tre focalis�e sur des initiatives de formation qui regroupent les dirigeants de partis politiques, qui se concentrent sur le d�veloppement des capacit�s � n�gocier, communiquer, et prendre des d�cisions en commun, et qui peuvent aider � renforcer leurs relations personnelles. L'accent doit �tre mis sur l'importance d'un bon processus et sur la promotion d'un forum inclusif, plut�t que sur le soutien � des partis ou des groupes sp�cifiques. � Deuxi�mement, m�me si l'union des initiatives diplomatiques, s�curitaires et de d�veloppement peut aider � consolider la paix, l'aide au d�veloppement peut augmenter sa durabilit� en montrant les dividendes de la paix � la population. Am�liorer l'acc�s �quitable aux services sociaux, encourager la croissance et la diversification �conomique, stimuler l'emploi � tout cela peut calmer le climat politique et augmenter la confiance populaire dans le processus de paix. La r�forme du secteur public, initiatives anti-corruption et pour la transparence comprises, peut �tre un moyen de parer � la concentration du pouvoir chez quelques familles. La responsabilisation des �lites, au moins au niveau local, peut encore �tre renforc�e par l'expansion des projets de d�veloppement communautaires. Dans le m�me temps, les initiatives pour encourager le d�veloppement du priv� peuvent aussi aider � la transmission du pouvoir du public au priv�. 24 � Troisi�mement, contrairement � l'id�e que l'aide au d�veloppement est limit�e � des objectifs � moyen ou long terme, l'aide au d�veloppement au Burundi peut r�soudre certains probl�mes critiques sur le court terme. Par exemple, l'aide au d�veloppement bilat�ral et multilat�ral peut contribuer de fa�on significative au r�tablissement de la s�curit�, au moyen du soutien � la d�mobilisation et � la r�int�gration des ex-combattants (comme au moyen du Programme de D�mobilisation et de R�int�gration Multi-Pays de la sous-r�gion des Grands Lacs),14 et au moyen d'une assistance technique pour la r�forme du secteur de s�curit�. De fait, la s�curit� doit �tre consid�r�e comme la plus grande priorit� � parce que c'est la s�curit� qui va permettre de commencer le travail de reconstruction �conomique et de r�conciliation sociale. C'est la s�curit� qui apporte les premiers dividendes de la paix : l'ouverture de march�s, l'expansion de la production agricole, la reprise du commerce, l'�mergence de nouvelles possibilit�s d'investissement � tout devient possible dans un environnement s�curis�. A cet �gard, la mission des Nations Unies au Burundi, l'ONUB, a la mission essentielle de s'assurer que le cessez-le-feu est respect� et que les conditions de s�curit� permettent � l'aide humanitaire d'�tre dispens�e sans danger. � Quatri�mement, l'aide au d�veloppement peut limiter les potentielles mobilisations de masse � la fois dans les zones rurales et dans les zones urbaines en ciblant la jeunesse,15 en se concentrant sur les projets de travaux n�cessitant l'emploi de beaucoup de main-d'oeuvre et cr�ant des emplois � moyen terme, et en investissant dans les programmes de formation pour renforcer les capacit�s de gestion de conflit au niveau communautaire. � Cinqui�mement, l'aide au d�veloppement peut s'attaquer � certaines des causes structurelles du conflit : o En soutenant activement le d�veloppement de la r�insertion, et en incorporant des objectifs mesurables de r�partition �quitable des emplois, des ressources, et de l'acc�s aux services sociaux, pour tous les groupes ethniques et toutes les r�gions � � tous les niveaux du gouvernement ; o En mettant fermement la priorit� sur la gouvernance, et en encourageant des processus bas�s sur la participation, en cherchant � contrer les prises de d�cisions profond�ment �litistes, qui, historiquement, sont � l'origine des exclusions et des in�galit�s qui ont provoqu� le conflit burundais ; et o En cherchant � inverser la tendance � la centralisation �tatique de l'�conomie qui a favoris� une subdivision de la minorit� tutsie (principalement de Bururi) aux d�pens de la plupart des Tutsis et de la majorit� hutue. En particulier, la cr�ation d'opportunit�s �conomiques en dehors de l'Etat est essentielle pour d�samorcer la tension entourant la comp�tition pour le contr�le des rouages de l'Etat, et des efforts syst�matiques doivent �tre faits pour surmonter les effets sociaux des politiques de discrimination et d'exclusion qui ont d�savantag� la majorit� hutue. � Sixi�mement, l'aide au d�veloppement doit accorder une attention particuli�re aux attitudes et aux perceptions h�rit�es du conflit burundais, et incorporer des initiatives 14http://www.mdrp.org 15Les moins de 15 ans constituaient 47% de la population en 2002. 25 de renforcement des capacit�s destin�es � aider les Burundais � recouvrir leur sentiment d'appartenance � une communaut� nationale, r�tablir des relations de confiance, et d�velopper un nouveau consensus sur la fa�on dont le pouvoir doit �tre partag� et dont les d�cisions doivent �tre prises. A moins que les Burundais parviennent � s'�loigner du jeu � somme nulle caus� par leur guerre et par les mauvais gouvernements pr�c�dents, dans lequel chaque partie en est venu � voir sa survie comme n�cessitant la d�faite de l'autre, pour arriver � une reconnaissance partag�e des int�r�ts communs et de l'interd�pendance, les Burundais seront peu � m�me de s'attaquer s�rieusement aux in�galit�s structurelles � l'origine du conflit. Les initiatives de renforcement des capacit�s consacr�es � la consolidation des comp�tences de prises de d�cisions communes � � la fois pour les �lites et au sein des communaut�s locales � associ�es � la formation au leadership destin�e � rendre les �lites plus responsables d�mocratiquement, sont les meilleurs moyens d'inculquer une culture non-violente de r�solution de conflit. En l'absence d'attention � la dimension � processus � dans les programmes de d�veloppement, la paix ne sera pas durable, et les investissements fonciers n'auront pas beaucoup de sens. De plus, pour r�pondre aux souvenirs vivaces et aux peurs de violence collective, un des objectifs prioritaires de l'aide au d�veloppement doit �tre d'aider les Burundais � construire un syst�me l�gal global et r�form�, et de mettre en place des institutions destin�es � faciliter � la fois la responsabilisation et la r�conciliation. Une attention particuli�re doit �tre port�e au besoin de protections constitutionnelles et judiciaires pour les minorit�s. � Septi�mement, l'aide au d�veloppement doit �tre consistante et soutenue. Bien que les tendances actuelles soient dans l'ensemble positives, le processus de paix burundais doit toujours �tre consid�r� comme fragile. Les ressources fiscales internes sont tr�s limit�es, et un soutien ext�rieur important et continu sera essentiel pour r�soudre les probl�mes sociaux urgents et �viter une reprise du conflit. La r�ponse typique des bailleurs aux situations de l'apr�s-guerre, qui consiste en un d�clin aigu de l'aide �trang�re avant que la paix soit consolid�e, doit �tre �vit�e (Collier 2003). Les efforts des Burundais pour d�passer des d�cennies de conflits traumatisants et de violences inter-communales ne vont pas seulement demander un courage et des comp�tences exceptionnelles ; ils vont aussi n�cessiter un partenariat durable avec la communaut� internationale. � Huiti�mement, la soutien des bailleurs au Burundi doit aussi prendre le contexte r�gional du Burundi en consid�ration. Une paix burundaise durable et la reconstruction �conomique du pays vont d�pendre � la fois de la stabilisation politique de la sous-r�gion des Grands Lacs et de l'int�gration du Burundi dans un cadre �conomique r�gionale plus large. Comme dans le MDRP pour les neufs pays de la sous-r�gion des Grands Lacs (Banque Mondiale 2002), la communaut� des bailleurs peut jouer un r�le majeur et encourager tous les Etats de la r�gion � reconna�tre et prendre en compte leurs int�r�ts communs � b�tir un nouveau syst�me de s�curit� r�gional et un cadre �conomique r�gional int�gr�. La strat�gie de d�veloppement du gouvernement, incluant le processus du DSRP, et les promesses d'aide des bailleurs suivant la r�union des bailleurs de janvier 2004 � Bruxelles offrent de nombreuses opportunit�s de r�soudre les probl�mes �voqu�s ci-dessus. L'�tude suivante des initiatives de d�veloppement en cours actuellement l'illustre : 26 � D�veloppement rural. Les projets actuels se concentrent sur les secteurs du th� et du caf� en cherchant � am�liorer la qualit� des produits, la productivit� et le marketing. La diversification agricole est un objectif important, avec un potentiel significatif dans la p�che, l'�levage, la transformation agroalimentaire et les cultures � valeur ajout�e telles que les l�gumes et les fleurs. � Infrastructures. A pr�sent que la s�curit� physique est graduellement restaur�e, le d�veloppement des infrastructures de base, incluant les routes secondaires, faciliterait l'acc�s � l'alimentation et aux soins. Cependant, il doit y avoir un �quilibre dans la distribution des projets li�s aux infrastructures : les projets centr�s sur la capitale et favorisant les villes risquent d'aggraver certains des d�s�quilibres structurels d�crits en premi�re partie. � R�forme du secteur de s�curit�, et d�mobilisation et r�int�gration. La r�forme du secteur de s�curit�, soutenue par l'ONUB et par les principaux partenaires internationaux, est en cours, de m�me que le programme DDR commenc� mi-2004 avec le soutien de la Banque Mondiale. Ces programmes sont essentiels pour construire une arm�e unie, professionnelle et apolitique, et une force de police nationale ind�pendante, et pour l'int�gration des ex-combattants dans la soci�t� burundaise. Encadr� 3 : Exemples de la fa�on dont le DSRP peut contribuer � la consolidation de la paix I. Le processus de consultation du DSRP peut contribuer � consolider la paix : � En institutionnalisant la participation des groupes marginalis�s (les minorit�s ethniques, les pauvres, les personnes d�plac�es, les femmes, les jeunes, les r�gions n�glig�es) y compris par l'utilisation d'objectifs et de quorums ; � En donnant � ces groupes marginalis�s les moyens et le lieu pour exprimer leurs priorit�s, par exemple au moyen de formations � la d�fense des int�r�ts et aux comp�tences de leadership, ou au moyen de groupes de r�flexion issus des populations marginalis�es ; � En s'attaquant aux probl�mes critiques li�s � la consolidation de la paix, tels que (i) les positions diff�rentielles des groupes cl�s (d�finis par appartenances ethniques ou par r�gions) en ce qui concerne l'acc�s aux services sociaux, aux emplois dans les secteurs publics et priv�s, et l'acc�s au capital ; et (ii) la mesure dans laquelle le d�veloppement communautaire est global et les autorit�s locales sont responsabilis�es ; et � En s'associant aux processus li�s au conflit ( par exemple, les programmes de r�conciliation au niveau de la communaut�, le programme DDR, les initiatives sp�cifiques � un secteur ou � un groupe, ciblant par exemple les personnes d�plac�es ou les ex-combattants), et en identifiant explicitement les synergies et les compl�mentarit�s qui peuvent contribuer � la consolidation de la paix. 27 II. Le contenu du DSRP peut contribuer � consolider la paix : � En reconnaissant les facteurs de conflit (les causes profondes et les d�clencheurs, y compris les disparit�s ethniques) et en identifiant la relation entre paix et d�veloppement ; � En s'attaquant � certaines des causes profondes du conflit au moyen de : (i) programmes pour r�duire les d�s�quilibres structurels d�stabilisants ; (ii) processus de prises de d�cisions inclusifs ; (iii) m�canismes de r�solution de conflit et initiatives de formation destin�s � faire progresser la collaboration et la r�conciliation entre les groupes, � la fois au niveau local et au niveau national ; et (iv) strat�gies �conomiques tourn�es vers la croissance interne ; � En s'attaquant � certains des d�clencheurs de conflit au moyen d'initiatives ciblant les jeunesses urbaines priv�es du droit �lectoral et les ex-combattants ; et � En d�veloppant des indicateurs et en r�coltant des statistiques qui permettront d'�valuer dans quelle mesure le d�veloppement proc�de de fa�on �quitable et g�n�ralis�e � du point de vue de l'ethnicit�, de la r�gion et de la mixit�. � Le processus du Document de Strat�gie de R�duction de la Pauvret� et les programmes macro�conomique et sectoriels. La stabilisation macro-�conomique s'est am�lior�e depuis l'installation du Gouvernement de Transition en novembre 2001, avec la mise en place de mesures fiscales, mon�taires et commerciales.16 Le processus du DRSP, les programmes macro-�conomiques17 et les programmes et projets de secteur de grande �chelle ou multi-secteurs18 donnent �galement les moyens de s'attaquer aux causes structurelles du conflit, y compris les disparit�s r�gionales dans la distribution des ressources et l'acc�s aux services sociaux (voir Encadr� 3). Cependant, la faiblesse de la soci�t� civile burundaise � particuli�rement l'absence de d�fense efficace de la population rurale � signifie que ce potentiel ne sera pas r�alis� sans une formation au leadership, destin�e � renforcer la capacit� � une participation efficace au DSRP et aux processus li�s. Si une telle formation n'est pas entreprise, l'�l�ment participatif de ces processus restera une illusion. � Les conflits li�s � la terre. Les vieilles querelles fonci�res sont de plus en plus aigu�s � le r�sultat � la fois d'une �rosion des sols g�n�ralis�e et du retour en masse de r�fugi�s et de personnes d�plac�es dans des communaut�s d�j� pauvres en terres. La Commission Nationale de R�habilitation des Sinistr�s et les programmes en court pour les groupes vuln�rables reconnaissent les difficult�s sociales et politiques inh�rentes � la r�int�gration de ces �l�ments dans leurs communaut�s d'origine, et les pressions suppl�mentaires plac�es sur des infrastructures limit�es ou inexistantes. Investir dans la capacit� des communaut�s � g�rer de telles tensions est crucial. 16L'inflation, qui s'est �lev�e en moyenne � 24% en 2000, est retomb�e � moins de 9% en 2002. La croissance �conomique a repris en 2001 et a atteint 5,4% en 2004. (Source : Banque Mondiale) 17Tels que le Projet de Soutien � la Gestion �conomique et le Projet de Recouvrement Economique de Cr�dit. 18Tels que le Projet de R�habilitation et de Soutien Agricole, le Projet de R�habilitation des Infrastructures de Transport, et les Projets d'Action Sociale. 28 � La cr�ation d'emplois. Etant donn�e la pr�dominance du secteur agricole, la cr�ation d'emplois n�cessite de se concentrer sur le d�veloppement rural et sur le d�veloppement de strat�gies li�es � des secteurs sp�cifiques. Dans la perspective de la consolidation de la paix, les travaux publics et les projets de cr�ation d'emplois destin�s aux jeunes ont un m�rite particulier. Ces projets donnent �galement l'occasion d'aider � reconstruire le tissu social, en particulier par les initiatives de formation qui stimulent les prises de d�cisions communautaires et la coop�ration entre les groupes. � La gouvernance. Le gouvernement a lanc� un programme ambitieux pour r�former la performance �conomique et la gestion fiscale. La r�alisation de ces r�formes et la transformation � venir, comme les privatisations et ou la d�centralisation, vont n�cessiter des efforts soutenus pour surmonter les droits acquis et pour renforcer la capacit� des r�formateurs � la fois au sein du gouvernement et de la soci�t� civile. � Les secteurs sociaux. Les indicateurs sociaux sont alarmants. Les projets du secteur social doivent �tre sensibles au besoin de redresser les d�s�quilibres ethniques et r�gionaux et doivent inclure des indicateurs permettant de mesurer l'impact de la distribution de l'aide au d�veloppement. 29 SECTION V. CONSIDERATIONS OPERATIONNELLES : CONCEPTION, MISE EN OEUVRE ET SUIVI-EVALUATION DES PROJETS Il n'est pas suffisant de simplement allouer des fonds aux domaines identifi�s comme prioritaires et de pr�sumer qu'ils auront au final un impact sur les causes de conflits contre lesquelles ils luttent. Le changement, m�me s'il a dans l'ensemble un r�sultat positif, cr�e souvent des perdants en m�me temps que des gagnants. La consolidation de la paix d�pend aussi de la fa�on dont les projets sont con�us, ex�cut�s et contr�l�s, car l'aide au d�veloppement peut tr�s bien alimenter le conflit au moment m�me o� elle tente de s'attaquer � ses causes. L'analyse du conflit burundais de la premi�re partie inclut un certain nombre d'implications pour la conception et l'ex�cution de projets. L'aide au d�veloppement � un r�le � jouer pour impliquer les �lites du c�t� de la paix. Les initiatives pour �tablir la paix tendent � cibler les franges de la population qui sont d�j� en faveur de la paix, ou au moins pas structurellement contre la paix, tel que les femmes et les enfants ; pourtant de telles initiatives �chouent souvent � impliquer les �lites qui sont g�n�ralement les meneurs des conflits nationaux. L'aide au d�veloppement structur�e de fa�on cr�ative doit chercher � encourager les r�formes institutionnelles et l'�tablissement de la paix � � la fois au sein du gouvernement et de la soci�t� civile � et doit aider les leaders des deux camps � reconstruire leurs relations et � renforcer leur capacit� � travailler en collaborant au-del� des divisions ethniques et politiques. L'aide financi�re et l'assistance technique peut �galement encourager les r�formes structurelles, mettre la priorit� sur la lutte contre la pauvret�, et encourager un acc�s �quitable aux services sociaux. Bien con�ue et contr�l�e rigoureusement, elle peut aider les r�formes m�me dans le cas d'int�r�ts enracin�s. Les projets de d�veloppement doivent �galement investir dans une approche du bas vers le haut pour renforcer la paix au niveau des collines et responsabiliser les �lites aux niveaux central et local. Une reconstruction bien con�ue par la communaut� est constitu�e autant du r�sultat que du processus. D'une part, une route, un puits ou une �cole repr�sentent une r�ponse mat�rielle aux besoins imm�diats de la communaut�. D'autre part, une approche du d�veloppement communautaire du bas vers le haut n�cessite un processus de prise de d�cision en commun, qui va aider une communaut� comportant diff�rentes ethnies � prendre d'autres d�cisions, identifier d'autres besoins, et r�soudre pacifiquement les conflits �mergents. Sans cette dimension de processus, l'aide au d�veloppement peut se limiter � fournir des r�sultats qui peuvent ne pas �tre durables. De plus importantes interactions entre les groupes � au moyen de processus de prises de d�cisions en commun � augmentent la capacit� d'une soci�t� � se remettre des conflits.19 Malheureusement, les projets communautaires dans les soci�t�s divis�es ne font pas toujours suffisamment attention aux groupes ethniques marginalis�s, ou aux autres groupes vuln�rables tels que les pauvres, les personnes d�plac�es, les femmes, et la jeunesse. Les strat�gies de d�veloppement des bailleurs doivent s'assurer que les groupes historiquement subordonn�s ont les moyens et l'opportunit� d'exprimer leurs propres priorit�s. Si les 19Voir par exemple Colletta et Cullen (2000), Barron et al. (2004), et Cliffe et al. (2003). 30 institutions traditionnelles ne permettent pas une telle participation, de nouveaux vaisseaux et m�canismes doivent �tre cr��s. L'aide au d�veloppement doit privil�gier les projets qui fournissent non seulement des am�liorations mat�rielles mais qui ont aussi pour cons�quence de consolider la paix. La consolidation de la paix isol�e de la reconstruction �conomique concr�te sera moins durable qu'une approche compl�tement int�gr�e et holistique du d�veloppement communautaire. De nombreuses initiatives d'aide au d�veloppement conventionnelles cherchent � construire un capital social, sans r�f�rence au d�veloppement mat�riel, ou elles sont avant tout des projets mat�riels qui tiennent � peine compte du besoin de reconstruire les comp�tences sociales. Il n'y a pas de raison pour que les projets mat�riels ne servent pas simultan�ment de v�hicules pour rassembler les Burundais, et pour augmenter les capacit�s de gestion et de leadership du Burundi. De cette fa�on, l'aptitude des Burundais � s'occuper des in�galit�s structurelles sous-jacentes qui ont fait na�tre le conflit sera grandement renforc�e (Barron et al. 2004) L'impact du d�veloppement assist� par les bailleurs doit �tre contr�l� avec soin, et d�termin� par des objectifs et des indicateurs de consolidation de la paix explicites. Etablir une base statistique de d�part est un moyen d'examiner de pr�s le statut actuel des diff�rents groupes (divis�s par ethnies, r�gions, ruraux/urbains etc.) en ce qui concerne l'acc�s aux services sociaux ; la distribution des emplois dans les secteurs public, priv� et de s�curit� ; et les terres. De plus, si la consolidation de la paix est un objectif explicite de la reconstruction d'apr�s-guerre au Burundi, les indicateurs de succ�s doivent mesurer des facteurs tels que le capital social inter-groupes,20 les perceptions de la jeunesse, le degr� de s�curit�, et le degr� de l'�galit� entre les sexes. L'Evaluation de l'Impact de la Paix et des Conflits est une m�thodologie utile pour mesurer l'impact des projets de d�veloppement sur certaines dimensions de la paix.21 Enfin, dans le cas des programmes �tendus au pays entier, la r�partition r�gionale des b�n�ficiaires de programmes doit �tre contr�l�e pour assurer un �quilibre g�n�ral. Les strat�gies d'aide au d�veloppement doivent prendre en compte la multiplicit� des variables qui conditionnent le processus de paix, et doivent �tre suffisamment flexibles pour s'adapter � un environnement changeant, y compris des opportunit�s et des retours en arri�re dans le processus de paix. Les interventions et facteurs multiples qui influencent la construction de la paix (s�curit�, diplomatie formelle et informelle, activit�s du secteur priv�, d�placements de population, assistances humanitaires et de d�veloppement, etc.) doivent �tre �tablis et leurs interactions doivent �tre comprises. Les obstacles techniques et politiques � la paix doivent �tre distingu�s, et les outils disponibles doivent �tre utilis�s pour traiter les probl�mes devant �tre r�solus. O� l'aide au d�veloppement peut-elle avoir le plus d'impact ? A quoi les outils traditionnels de la diplomatie doivent-ils �tre consacr�s ? Les liens � synergies, compl�mentarit�s, contradictions, encha�nements appropri�s � entre les projets de d�veloppement et d'autres �v�nements li�s au conflit (par exemple, les processus de v�rit� et de r�conciliation, les initiatives de la Commission Nationale de R�habilitation des Sinistr�s, la pr�paration pour 20Colletta et Cullen (2000), Grootaert (1998), et Grootaert et van Bastelaer (2001). 21Par exemple, voir DFID, Banque Mondiale, et les Evaluations de l'Impact de la Paix et des Conflits de l'USAID. 31 les �lections nationales), ne sont d'habitude pas identifi�s explicitement. La coordination n�cessaire peut prendre la forme : (i) d'appels et d'�valuations des besoins communs, tel que la r�union des bailleurs de janvier 2004 � Bruxelles ; (ii) du partage des m�thodologies d'�valuation du conflit et des applications ; et (iii) d'une collaboration des efforts entre les bailleurs et les Burundais pour d�velopper une vision commune des conditions, motivations et types d'aide qui vont r�duire le potentiel de conflit. Tableau 4 : Variables du conflit et quelques implications cl�s pour les programmes et au niveau des projets Quelques implications pour Quelques implications pour Variables du conflit le portefeuille de la conception et l'ex�cution d�veloppement du Burundi de projets Clivages sociaux, ethniques, Etablir des m�canismes pour D�finir des objectifs explicites r�gionaux et �conomiques coordonner les initiatives de et des indicateurs de progr�s s�curit�/diplomatiques en r�duisant les in�galit�s formelles et informelles structurelles. Utiliser des /humanitaires/de projets mat�riels comme d�veloppement dans le but de v�hicule pour renforcer la r�duire les in�galit�s coh�sion entre les groupes. structurelles. Exclusion et injustice dans un Se concentrer sur les secteurs Mettre l'accent sur les contexte de pauvret� extr�me d�savantag�s ; �viter de processus de d�cisions et de raret� des ressources renforcer involontairement les g�n�ralis�es prises par la base. d�s�quilibres structurels. Capital social : ponts faibles, Insister sur la formation au Se concentrer sur la liens forts leadership � tous les niveaux, coop�ration inter-groupes pour renforcer les capacit�s dans la conception et collaboratives. l'ex�cution des projets. Reconna�tre l'importance du � processus � dans le d�veloppement de projets. Un historique de violence et Insister sur la s�curit� et la Mettre l'accent sur les d'impunit� r�forme de la justice, soutenir processus de d�cisions les processus de v�rit� et de g�n�ralis�es prises par la base. r�conciliation. Un mauvais bilan en ce qui Insister sur la formation, en Promouvoir le d�veloppement concerne la gouvernance et les mettant l'accent sur les du bas vers le haut institutions politiques m�canismes pour �tablir la (responsabilisation des �lites, responsabilisation et la au moyen de processus transparence. Se concentrer inclusifs, centr�s sur les sur la d�centralisation et la participants). gouvernance locale. S�curit� humaine : un cycle de Insister sur les programmes Mettre l'accent sur les projets conflit et de pauvret� qui renforcent la s�curit� qui vont produire des humaine (physique, de la am�liorations concr�tes de la nourriture, sociale) et s�curit� (par ex. la diminuer le potentiel de professionnalisation des 32 mobilisation de masse en structures de l'arm�e et de la g�n�rant un dividende concret police, des projets pour de la paix pour la population augmenter la productivit� dans son ensemble. agricole, programmes de rachat des armes). Comp�tition �conomique dans Encourager la d�centralisation Cibler les groupes un contexte de pauvret� �conomique et la d�savantag�s, encourager les extr�me et de concentration du privatisation ; r�soudre le options de secteur priv�. pouvoir probl�me des in�galit�s au niveau de l'�ducation. Un voisinage difficile, avec Soutenir les initiatives Faciliter les r�seaux des effets transfrontaliers en r�gionales (rapatriements r�gionaux, l'assistance retour. au-del� des fronti�res et DDR, technique pour l'int�gration et diminution du commerce la coop�ration r�gionales. ill�gal des armes, conventions �conomiques et s�curitaires r�gionales) - Le r�tablissement du Burundi et la consolidation de la paix demande la stabilisation de la sous-r�gion. Le d�veloppement peut soutenir des projets visant des probl�mes transfrontaliers, tels que la contrebande d'armes et la pr�sence de groupes arm�s �trangers au Burundi, au Rwanda ou en RDC. Une initiative de ce type actuellement en cours est le Programme de D�mobilisation et de R�int�gration, qui a �t� d�velopp� et est ex�cut� dans le cadre du Programme Multi-Pays de D�mobilisation et de R�int�gration pour la sous-r�gion des Grands Lacs. Comme not� ci-dessus, les interventions diplomatiques et l'assistance technique ext�rieure peuvent jouer un r�le significatif pour amener les Etats de la r�gion � une coop�ration �conomique accrue, pour faciliter les r�seaux entre les Etats dans plusieurs sph�res institutionnelles, et pour encourager la construction d'une nouvelle architecture s�curitaire r�gionale. 33 ANNEXE: CHRONOLOGIE22 Autour de 1100-1400 : La population hutue s'installe dans la r�gion, imposant son langage et sa culture aux premiers habitants, les Batwa. Les colonisateurs tutsis s'�tablissent comme souverains f�odaux. 1890 : Le royaume tutsi d'Urundi et du Ruanda (Rwanda) voisin sont incorpor�s dans l'Afrique de l'Est allemande. 1916 : Les Belges occupent la r�gion. 1923 : La Belgique re�oit un mandat de la Soci�t� des Nations pour administrer le Ruanda-Urundi. 1959 : Afflux de r�fugi�s tutsis du Rwanda suite au � Toussaint Rwandais �, une insurrection hutue contre la domination tutsie au Rwanda. 1961 : Septembre � �lections parlementaires, le parti nationaliste et multi-ethnique UPRONA remporte 82% des votes. 1961 : Octobre � Assassinat du Prince Louis Rwagasore, leader de l'UPRONA qui devait devenir le premier Premier Ministre du Burundi ind�pendant. Ind�pendance 1962 : L'Urundi est s�par� du Ruanda-Urundi, devient le Burundi et une monarchie ind�pendante sous le roi Mwambutsa IV. 1965 : Le Roi Mwambutsa ignore le r�sultat des �lections de mai, qui avaient donn� aux Hutus 23 des 33 si�ges � l'Assembl�e Nationale, et nomme son secr�taire particulier, L�opold Biha, Premier Ministre ; la tentative de coup d'Etat par la police hutue dirig�e par le chef de la gendarmerie est brutalement r�prim�e, et entre 2500 et 5000 Hutus sont tu�s. 1966 juillet : Mwambutsa est d�tr�n� par son fils, Ntare V. 1966 novembre : Micombero organise un deuxi�me coup d'Etat ; ordonne la r�pression des Hutus et l'ex�cution du leader hutu Paul Mirerekano ; d�clare l'abolition de la monarchie et se prononce lui-m�me pr�sident. 1972 : Entre 125 000 et 150 000 Hutus, pour la plupart �duqu�s, sont tu�s apr�s l'assassinat de Ntare V, apparemment par des Hutus. 1976 : Micombero est destitu� par un coup d'Etat militaire et remplac� par Jean-Baptiste Bagaza comme pr�sident. 1981 : Une nouvelle constitution, pr�voyant une assembl�e nationale, est adopt�e. 1987 : Le pr�sident Bagaza est destitu� par un coup d'Etat de Pierre Buyoya, sans que le sang soit vers�. 1988 : Des paysans hutus tuent des Tutsis dans deux communes ; entre 5 000 et 20 000 Hutus sont massacr�s par l'arm�e par repr�sailles et 60 000 r�fugi�s s'enfuient au Rwanda. Espoirs bris�s 1992 : Une nouvelle constitution, pr�voyant un syst�me multi-partis, est adopt�e par r�f�rendum. 1993 juin : Melchior Ndadaye devient le premier Pr�sident �lu d�mocratiquement du Burundi. 1993 octobre : des membres de l'arm�e assassinent Ndadaye, provoquant le massacre de dizaines de milliers de Tutsis et en repr�sailles le meurtre par l'arm�e d'un nombre encore plus grand de Hutus, le d�placement de 700 000 personnes, et la fuite de 600 000 r�fugi�s. 34 1994 : Le parlement nomme Cyprien Ntaryamira, un Hutu, Pr�sident ; Ntaryamira est tu� dans un accident d'avion avec son homologue rwandais ; nouvelles violences ethniques et fuites de r�fugi�s au Rwanda ; le porte-parole du Parlement Sylvestre Ntibantunganya est nomm� Pr�sident. 1995 : Violences ethniques renouvel�es dans la capitale, Bujumbura, marqu�es par la purification ethnique des Hutus et l'assassinat de parlementaires hutus. 1996 : L'ancien Pr�sident de la Tanzanie Julius Nyerere est nomm� m�diateur du processus de paix burundais par l'OAU et les Nations Unies, d�marrant le processus d'Arusha, sponsoris� par la r�gion. Pierre Buyoya reprend le pouvoir 1996 : Pierre Buyoya reprend le pouvoir par un second coup d'Etat, destituant Ntibantunganya et suspendant la constitution. 1998 : Un � partenariat interne � entre les parlementaires du Frodebu et de l'Uprona se conclut par un accord entre Buyoya et l'Assembl�e Nationale sur une nouvelle constitution de transition sous laquelle Buyoya est officiellement institu� Pr�sident. 1999 : Julius Nyerere meurt et l'ancien Pr�sident de l'Afrique du Sud Nelson Mandela prend la rel�ve en tant que m�diateur du processus de paix burundais. 2000 : L'Accord d'Arusha est sign� par 19 d�l�gations � y compris 17 partis politiques, le Gouvernement et l'Assembl�e Nationale. Certains partis font part de leurs r�serves sur certains points. Le CNDD-FDD (Nkurunziza) et le FNL rejettent l'Accord d'Arusha. Mandela tente de lancer des n�gociations s�par�es avec les deux groupes arm�s, et sert de m�diateur pour un accord stipulant que la p�riode transitoire de 36 mois sera divis�e en deux parties � la premi�re sera dirig�e par un Tutsi (Buyoya), la seconde par un Hutu (Domitien Ndayizeye). Il est accept� que ni l'un ni l'autre ne se pr�sentera � la pr�sidence quand le gouvernement post-transition sera form�. 2001 janvier : Des pourparlers pour un cessez-le-feu entre le Gouvernement et le plus grand groupe arm�, le CNDD-FDD (Nkurunziza), sont entam�s. 2001 : Deux tentatives de coup d'Etat pour destituer Pierre Buyoya �chouent. La transition 2001 octobre : Installation du gouvernement de transition sous lequel les leaders hutus et tutsis partagent le pouvoir (Accord d'Arusha). Le CNDD-FDD (Nkurunziza) et le FNL continuent � rejeter le cessez-le-feu et les combats s'intensifient. 2002 d�cembre : Le Gouvernement et le CNDD-FDD signent un accord de cessez-le-feu. 2003 janvier : Les combats reprennent entre le Gouvernement et le CNDD-FDD. 2003 1er mai : Domitien Ndayizeye, un Hutu, succ�de � Pierre Buyoya � la pr�sidence sans incident. Alphonse Kadege � un Tutsi du parti de l'UPRONA � est d�sign� comme Vice-Pr�sident. 2003 novembre : Le Pr�sident Ndayizeye et le leader du FDD Pierre Nkurunziza signent un accord final pour mettre fin aux hostilit�s au sommet des leaders africains en Tanzanie. Nkurunziza et d'autres membres du FDD re�oivent des postes minist�riels. Le plus petit groupe rebelle hutu, les Forces de Lib�ration Nationale (FNL), continue � lancer des attaques dans les banlieues de Bujumbura Rurale et Bujumbura. Trente sept commandants militaires de l'arm�e burundaise et tous les groupes arm�s mis � part le FNL participent � un atelier de six jours, dirig� par le BLTP, � Nairobi, sur la prise de d�cision collective, en pr�paration pour l'ex�cution de l'accord de cessez-le-feu, le DDR, et l'unification de l'arm�e. 35 2004 f�vrier : Un atelier de la BLTP de six jours sur la prise de d�cision collective est organis� pour les membres de la commission comjointe pour le cessez-le-feu. 2004 mai : Le plus grand des anciens groupes rebelles, les Forces pour la D�fense de la D�mocratie (FDD), cesse temporairement de participer aux r�unions du Cabinet et de l'Assembl�e Nationale, en reprochant au Gouvernement de ne pas avoir tenu certaines de ses promesses. Le leader du FDD Hussein Rajabu dit que cette d�cision ne signifie pas un retour � la guerre. Les membres de l'Etat-Major G�n�ral Int�gr� (EMGI), constitu� de membres du FAB et du CNDD-FDD (Nkurunziza), ainsi que de repr�sentants des cinq plus petits groupes arm�s, participent � une retraite de six jours dirig�e par le BLTP, concentr�e sur la prise de d�cision collaborative. Cet commission conduit � la r�solution de l'EMGI de l'un des probl�mes les plus sensibles bloquant la mise en route du programme de DDR : la d�finition de � combattant �. 2004 ao�t : Le FNL revendique la responsabilit� du massacre de plus de 150 r�fugi�s congolais � Gatumba. 2004 septembre : L'Assembl�e Nationale et le S�nat, agissant ensemble, approuvent un projet de constitution devant �tre soumise � un r�f�rendum. 2004 septembre : Les leaders de l'UPRONA expriment leur opposition au projet de constitution et annoncent leur intention de mettre en doute sa l�galit� devant la Cour Constitutionnelle. 2004 octobre : Le pr�sident retire le projet de constitution de la consid�ration de la Cour Constitutionnelle, en raison du fait que la Cour n'a pas agi dans la p�riode stipul�e de 15 jours. 2004 octobre : Le Sommet R�gional de Nairobi sanctionne la recommandation de la Commission Electorale conseillant de retarder les �lections pr�vues pour des raisons techniques, demande une extension de six mois de la p�riode de transition, et affirme que le projet de constitution r�cemment approuv� devrait servir de constitution du Burundi par int�rim en attendant la ratification par r�f�rendum public. Le Parlement burundais promulgue en cons�quence une loi pour appliquer les recommandations du Sommet. 2004 octobre : Plusieurs partis tutsis abandonnent leur opposition � la constitution par int�rim du pays, affirment leur intention de rester au sein des institutions de transition, mais demandent une poursuite des n�gociations sur les arrangements potentiels de partage du pouvoir. 2004 novembre : Les leaders de 31 des 33 partis politiques du Burundi se r�unissent dans une commission du BLTP de six jours. Ils se mettent d'accord sur les recommandations � faire � la Commission Electorale Ind�pendante au sujet du Code de Conduite Electoral. Ils demandent plus de formations et d'opportunit�s de travailler en collaboration. 2004 d�cembre : Le programme de DDR est formellement mis en route. 2004 d�cembre : Le Pr�sident Ndayizeye renvoie le Vice-Pr�sident Kadege sans incident, nomme Frederic Ngenzebuhorg, un candidat soutenu par l'UPRONA, � sa succession. Le r�f�rendum pr�vu pour ratifier la constitution par int�rim est � nouveau repouss� pour des raisons techniques. 2004 d�cembre : Les leaders des partis politiques burundais participent � une seconde commission du BLTP sur la prise de d�cision collective, publient un communiqu� commun pour assurer le public de leur d�termination collective � travailler ensemble pour assurer des �lections libres de violences et d'intimidations. 2004 d�cembre : Le Pr�sident exprime son int�r�t pour de possibles amendements de la constitution par int�rim, qui permettraient des �lections directes du Pr�sident et supprimerait l'interdiction pour les deux Pr�sidents de transition de se pr�senter aux �lections pr�sidentielles d'apr�s-transition. Des membres important de son propre parti FRODEBU, le CNDD-FDD, et de nombreux autres partis d'importance moindre, hutus et tutsis, s'opposent � lui. 2005 janvier : La Commission Electorale fixe la date du 25 janvier 2005 pour le r�f�rendum constitutionnel. 36 2005 janvier : Une coalition de 20 partis politiques, moiti� Tutsis et moiti� Hutus, publient une d�claration commune s'opposant aux amendements � la constitution par int�rim avant le r�f�rendum public. Le m�diateur Zuma se rend � Bujumbura et r�it�re que du point de vue de la r�gion, les accords n�goci�s d'Arusha et post-Arusha doivent �tre respect�s. 2005 f�vrier : Le Pr�sident annonce qu'il n'y aura pas de modification des propositions constitutionnelles ayant cr�� une controverse, et demande une action rapide sur la Loi Electorale. 2005 f�vrier : La commission inaugurale du BLTP sur le leadership et la prise de d�cision collective est organis�e pour le haut commandement de la nouvelle force de police nationale. 2005 28 f�vrier : Un r�f�rendum sur la nouvelle constitution se d�roule, avec plus de 90% des 3 millions des inscrits optant pour le oui. 2005 11 mars : L'Assembl�e Nationale approuve la nouvelle Loi Electorale. 2005 avril : Le gouvernement tanzanien obtient un accord du FNL de cesser les combats et d'entamer des n�gociations sans conditions avec le gouvernement burundais. 37 BIBLIOGRAPHIE Anderson, Mary B. 1999. Do No Harm. How Aid Can Support Peace or War. First ed. London: Lynne Rienner Publishers. Barron, Patrick, Rachel Diprose, David Madden, Claire Smith and Michael Woolcock. 2003. "Do Participatory Development Projects Help Villagers Manage Conflicts?" CPR Working Paper No. 9. Washington D.C.: World Bank. Beleli, Ozsel. 2001. Aid as a Peacemaker: A View from Burundi. Bowen, Michael and Kay Miller. 1973. "No Samaritan: The U.S. and Burundi." Africa Report 18: 32-39. Bowen, Michael, Gary Freeman, and Kay Miller. 1972. Passing By: The United States and Genocide in Burundi. New York: Carnegie Endowment for International Peace. Brachet, Juana and Maude Svensson. 2004. Poverty Reduction Strategies in Conflict-affected Countries: Burundi, July (internal World Bank paper). Cullen, Michelle. 2003. Exclusion and Development in Conflict-Affected Countries, September (unpublished). Chr�tien, Jean-Pierre. 1997. Le D�fi de l'ethnisme. Rwanda et Burundi: 1990-1996. Paris: Karthala. ------. 1993. Burundi: l'Histoire retrouv�e. Paris: Karthala. ------. 1994. "Burundi: pogromes sur les collines." Esprit (July). Cliffe, Sarah, Scott Guggenheim and Markus Kostner. 2003. "Community-Driven Reconstruction as an Instrument in War-to-Peace Transitions." CPR Working Paper No. 7. Washington D.C.: World Bank. Colletta, Nat and Michelle Cullen. 2000. Violent Conflict and the Transformation of Social Capital. Lessons from Cambodia, Rwanda, Guatemala and Somalia. Washington, D.C.: World Bank. ------. 2000. The Nexus between Violent Conflict, Social Capital and Social Cohesion: Case Studies from Cambodia, and Rwanda. Washington, D.C.: World Bank. Colletta, Nat and Taies Nezam. 1999. From Reconstruction to Reconciliation. Washington, D.C.: World Bank. 38 Collier, Paul. 1999. "On the Economic Consequences of War". Oxford Economic Papers, Vol. 51, pp.168-83. ------. 2003. "Aid, Policy and Peace: Reducing the Risk of Civil Conflict." CPR Dissemination Notes No.9. Washington, D.C.: World Bank. Collier, Paul, Lani Elliot, H�vard Hegre, Anke Hoeffler, Marta Reynal-Querol, and Nicholas Sambanis. 2003. Breaking the Conflict Trap. Civil War and Development Policy. Washington D.C.: World Bank. Commission Nationale, Burundi. 1989. Rapport de la Commission Nationale charg�e d'�tudier la question de l'unit� nationale. Bujumbura. DFID. 2004. Conducting Conflict Assessments: Guidance Notes. London: DFID. Edlin, John and Colin Legum. 1994. "Burundi: the land that lost its head". The New African, (February). Gahama, Joseph. 1983. Le Burundi sous administration belge. Paris: Karthala. ------. 2002. Conflict Prevention, Management and Resolution in Burundi. DPMF. Addis Ababa: Development Policy Management Forum. Grootaert, Christiaan. 1998. "Social Capital: The Missing Link?" Washington, D.C.: World Bank. Grootaert, Christiaan and Thierry van Bastelaer. 2001. Understanding and Measuring Social Capital: A Synthesis of Findings and Recommendation from the Social Capital Initiative. Washington, D.C.: World Bank. Hakizimana, D�o. 1991. Burundi: le non-dit. Vernier: �ditions Remesha. Harroy, Jean-Paul. 1987. Burundi (1955-1962). Brussels: Hayez. Human Rights Watch/F�d�ration Internationale des Droits de l'Homme. 2003. Rapport de la Commission Internationale d'Enqu�te sur les Violations des Droits de l'Homme au Burundi depuis le 23 Octobre 1993. Brussels. July 1994. International Crisis Group. A Framework for Responsible Aid To Burundi. Africa Report N�57, 21 February 2003. International Crisis Group. 2004. End of the Transition in Burundi: the Home Stretch. Africa Report N�81, 05 July 2004. ------. 2004. Elections in Burundi: The Peace Wager. Africa Report N�XX, 09 December 2004. Lemarchand, Ren�. 1970. Rwanda and Burundi New York: Praeger. 39 ------. 1992."Burundi: The Politics of Ethnic Amnesia," in Helen Fein, ed., Genocide Watch. New Haven: Yale University Press, pp. 70-86. ------. 1996. Burundi: Ethnic Conflict and Genocide. Washington, DC: Woodrow Wilson Center Press. Lemarchand, Ren� and David Martin. 1974. Selective Genocide in Burundi. Report No. 20. London: Minority Rights Group. Meisler, Stanley. 1976. "Holocaust in Burundi, 1972." Case Studies on Human Rights and Fundamental Freedoms: A World Survey, vol. 5, ed. Willem A. Veenhoven. The Hague: Martinus Nijhoff. Muscat, Robert. 2002. Investing in Peace: How Development Aid Can Prevent or Promote Conflict. ME Sharpe. Ndabakwaje, Lib�re and Jean-Baptiste Mbonyingingo. 2003. Cadre d'analyse du conflit (internal World Bank paper). Nkurunziza, Janvier. 2001. "Economic Determinants of Violent Conflict in Burundi." Bonn: Deutsche Stiftung fur Internationale Entwicklung. Nkurunziza, Janvier and Floribert Ngaruko. 2002. Explaining Growth in Burundi: 1960-2000. Centre for the Study of African Economies, Oxford. Pabanel, Jean-Pierre. 1988. "Statistiques tribales au Burundi en 1986. " Politique Africaine. No. 43 (December 1988) Percival, Valerie and Thomas Homer-Dixon. 1995. Environmental Scarcity and Violent Conflict: The Case of Rwanda. Washington, D.C.: American Association for the Advancement of Science, University of Toronto. Prunier, G�rard. 1994. "Burundi: A Manageable Crisis? " United Kingdom: Writenet. Reyntjens, Filip. 1994. L'Afrique des Grands Lacs en crise. Paris: Karthala. ------. 1995. Burundi: Breaking the Cycle of Violence. London: Minority Rights Group. ------. 2000. Burundi: Prospects for Peace. London: Minority Groups International. Stedman, Stephen. 1997. "Spoiler Problems in Peace Processes," in International Security, v. 22, #2. Swedish International Development Cooperation Agency. 2004. A Strategic Conflict Analysis for the Great Lakes Region. Stockholm: SIDA. 40 Uvin, Peter. 1996. Development, Aid and Conflict: Reflections from the Case of Rwanda. United Nations University World Institute for Development Economics Research--Research For Action. Watson, Catherine. 1993. Transition in Burundi: The Context for a Homecoming. Washington, D.C.: US Committee for Refugees. Weissman, Stephen. 1998. Preventing Genocide in Burundi: Lessons from International Diplomacy Washington, D.C.: United States Institute of Peace. Weinstein, Warren and Robert Schrire. 1976. Political Conflict and Ethnic Strategies: A Case Study of Burundi. Syracuse: Syracuse University Press. Wolpe, Howard. 2003. "Burundi: Facilitation in a Regionally Sponsored Peace Process." Unpublished manuscript prepared for a United States Institute of Peace conference on best facilitation practices. Wolpe, Howard et al. 2004. "Rebuilding Peace and State Capacity in War-torn Burundi." The Roundtable, Vol. 93, No. 375, 457-467. World Bank. 2002. Greater Great Lakes Regional Strategy for Demobilization and Reintegration, Report No. 23869-AFR. March 2002. ------. 1998 Operations Evaluation Department. World Bank's Experience with Post-Conflict Reconstruction. Washington, D.C.: World Bank. ------. 2002. Holst Peace Fund � Supporting Development in the West Bank and Gaza. ------. 2002. West Bank and Gaza: An Evaluation of Bank Assistance. WB Country Case Studies: ------. 2000. Bosnia and Herzegovina: Post-Conflict Reconstruction, (A. Kreimer, R. Muscat, A. Elwan and M. Arnold). ------. 2000. El Salvador: Post-Conflict Reconstruction, (J. Eriksson, A. Kreimer and M. Arnold) ------. 2000.Uganda: Post-Conflict Reconstruction, (A. Kreimer, P. Collier, C. Scott and M. Arnold) Country Assistance Evaluations: ------. 1997. Mozambique (Report No.17209, December 1997). ------. 2000. Cambodia (Report No. SecM2000-708, December 2000). ------. 2001. Sri Lanka (Report No. 21771, January 2001). 41 ------. 2002. Guatemala (Report No. 25212-GT, December 2002). ------. 2002. Haiti (Report No.23637, February 2002). 42