REPUBLIQUE DU MALI RAPPORT DE REVUE DU SECTEUR AGRICOLE VOLUME 2 : Contexte, politique agricole et rôles de l’Etat Août 2022 Agriculture and Food Global Practice West and Central Africa World Bank Group TABLE DES MATIÈRES I. Contexte national ....................................................................................................................... 6 A. Un pays fragile. ....................................................................................................................... 6 B. L’économie malienne.............................................................................................................. 6 II. Pauvreté et insécurité alimentaire............................................................................................. 8 A. Pauvreté. ................................................................................................................................. 8 B. Insécurité alimentaire et malnutrition ................................................................................ 11 III. Le secteur agricole du Mali ................................................................................................... 14 A. Importance de l’agriculture. ................................................................................................. 14 B. Contexte agro-climatique. .................................................................................................... 16 D. Profil des principales productions. ....................................................................................... 19 E. La structuration du secteur agricole. ................................................................................... 44 F. La faible Intégration de l’agriculture malienne au marché. ................................................ 46 G. Une faible transformation des produits de base. ................................................................ 47 H. Une faible diversification de la production et des exportations agricoles. ........................ 49 I. La transformation structurelle du secteur n’a pas commencé. ............ Error! Bookmark not defined. IV. POLITIQUE AGRICOLE ET ROLE DE L’ETAT ............................................................................ 51 A. Les Politiques agricoles. ........................................................................................................ 51 B Les dépenses publiques en faveur du secteur agricole. ...................................................... 52 C. Le programmme de subventions aux intrants. .................................................................... 56 C. Cohérence des politiques et actions de l’Etat ..................................................................... 59 E. Le climat des affaires. ........................................................................................................... 61 CARTE DU MALI..................................................................................................................................... 65 BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................................... 66 2 LISTE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS ACDI Agence canadienne de développement international AEDD Agence pour l’environnement et le développement durable AFD Agence française de développement AGR /IGA Activité génératrice de revenus AGRA Alliance for a Green Revolution in Africa APCAM Assemblée permanente des chambres d'agriculture du Mali BAD Banque africaine de développement BID Banque islamique de développement BNDA Banque nationale de développement agricole BOAD Banque ouest africaine de développement CEDEAO Communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest CMDT Compagnie malienne de développement des textiles CNRA Comité national de la recherche agricole COP Comité d'orientation et de pilotage CPR/RPF Cadre de politique de réinstallation CREDD Cadre stratégique pour la relance économique et le développement durable CRO Comité régional d’orientation CRRA Centres régionaux de recherche agronomique CSA Commissariat à la Sécurité Alimentaire CSCLP Cadre stratégique de croissance et de lutte contre la pauvreté CSCRP Cadre stratégique de croissance et de réduction de la pauvreté CSLP Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté CV Chaîne de valeur DNA Direction Nationale de l'Agriculture DNCC Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence DNPIA Direction Nationale des Productions et Industries Animales DNSI Direction Nationale de la Statistique et de l'Informatique EAC Enquête agricole de conjoncture EAF Exploitations agricoles familiales EMEP Enquête malienne d'évaluation de la pauvreté FAO Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture FAO Organisation mondiale de l'agriculture et de l'alimentation FEM Fonds pour l’environnement mondial FIDA Fonds international pour le développement agricole FMI Fonds Monétaire International FNAA Fonds national d’appui à l’agriculture GIE Groupement d'intérêt économique GLEAM-i Modèle mondial d'évaluation environnementale du bétail - Interactif GMM Grands moulins du Mali GRN Gestion des ressources naturelles Ha Hectare(s) IDA Association internationale de développement IER Institut d'Economie Rurale ILRI Institut international de recherche sur l'élevage LOA Loi d’orientation agricole 3 ODD Objectif de développement durable OIE Organisation mondiale de la santé animale OMA Observatoire des marchés agricoles OMD Objectifs du millénaire pour le développement ON Office du Niger ONG Organisations non gouvernementales OP Organisation Paysanne OPA Organisations professionnelles agricoles OPAM Office des produits agricoles du Mali OPV Office de protection des végétaux OSC Organisation de la société civile PAM Programme alimentaire mondial PAM Programme alimentaire mondial PAR/RAP Plan d'action de réinstallation PASSIP Programme d’appui au sous-secteur de l’irrigation de proximité PCDA Programme compétitivité et diversification agricole PCV Période de croissance des végétaux PDA Politique de développement agricole PDDAA Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine PIB Produit intérieur brut PIBA Produit intérieur brut agricole PIV Périmètre irrigué villageois PME Petites et moyennes entreprises PNG Politique nationale genre PNIP Programme national d'Irrigation de Proximité PNISA Programme national d’investissement du secteur agricole PNPE Politique nationale de la Protection de l’environnement PNUAD Plan cadre des Nations Unies pour l’assistance au développement PNUD Programme des Nations Unies pour le développement PPAD Programme de promotion de la productivité de l’Agriculture durable PRED Plan pour la relance durable PSI Programme de subvention des intrants PTBA Programmes de travail et de budget annuels PTF Partenaires techniques et financiers RPGH Recensement Général de la Population et de l'Habitat RSE Recherche systèmes d’exploitation RSV Recherche systèmes et vulgarisation S&E Suivi et évaluation SAP /EWS Système d'alerte précoce SFD Système financier décentralisé SFI /IFC Société financière internationale SIG/GIS Système d'information géographique SNRA Système national de recherche agricole SUKALA Complexe sucrier du Kala Supérieur TDR Termes de référence TEC Tarif extérieur commun TIC/ICT Technologies de l'information et de la communication 4 UCP Unité de coordination nationale et de gestion UCR Unité de coordination régionale UE Union Européenne UEMOA Union économique et monétaire ouest-africaine USAID Agence des États-Unis pour le développement international VBG Violence basée sur le genre 5 I. Contexte national A. Un pays fragile. 1. Le Mali est un vaste pays sahélien d’Afrique de l’Ouest1 sans accès à la mer qui est parmi les plus pauvres du monde. Il a une économie peu diversifiée et très dépendante d’une agriculture largement traditionnelle et pluviale, et donc vulnérable aux conditions météorologiques défavorables. Le Mali est de plus confronté à de nombreux défis : une très forte croissance démographique, une grande pauvreté structurelle de la population, une insécurité alimentaire importante et, depuis le début des années 2010, la montée des menaces sécuritaires avec une rébellion armée dans le Nord et le centre du pays, deux coups d’Etat militaires (en 2012 et 2020) et d’important conflits intercommunautaires dans une grande partie des zones rurales. Sa population est estimée à 21 millions d’habitants, dont 12 millions (58%) en zone rurale. Environ 43 % de la population vit au- dessous du seuil de pauvreté, en particulier en zone rurale (). La pandémie de COVID-19 depuis mars 2019 puis les sanctions économiques imposées par la CEDEAO à la suite du coup d’État d’août 2020 ont brutalement freiné une croissance économique qui s’était montrée globalement satisfaisante depuis le début des années 2000. B. L’économie malienne 2. Sur le long-terme, le Mali a connu une croissance économique modérée mais très volatile. Son PIB s’est accru en moyenne de 3,8% par an sur la période 1968-2021, ce qui ne lui a pas permis d’enregistrer des gains significatifs en termes de réduction de pauvreté avec une population qui s’est accrue de plus de 2,5% par an sur la période2. La croissance économique du pays a en fait connu 2 périodes distinctes. D’abord une période de croissance économique très faible de l’Independence en 1960 jusqu’au début des années 1990s, puis une période où la croissance s’est accélérée fortement, en particulier après la dévaluation du FCFA en 1994, atteignant plus de 5% par an jusqu’à 2019. Cette forte croissance a été brièvement interrompue par la crise de 2012 (rébellion Touareg et premier coup d’Etat militaire) mais s’est rapidement redressée et a atteint en moyenne de 5,7 % par an entre 2014 et 2019, malgré la poursuite des problèmes politiques et sécuritaires. Cette forte croissance a été tirée par celle du secteur agricole (6% par an en moyenne)3 La résilience de l’économie malienne malgré les multiples crises socio-politiques internes peut être créditée (i) à la forte concentration des activités économiques, en particulier agricoles4, dans la partie sud du pays qui est la plus productive et qui a été jusqu’à présent relativement épargnée par les troubles sécuritaires, (ii) à la montée en puissance des activités extractives (or) ; et (iii) au très important volume large volume des transferts de fonds de la part de la diaspora qui a soutenu la consommation des ménages. 1 Le Mali, avec ses 1 241 238 kilomètres carrés, est le plus vaste État d'Afrique de l'Ouest après le Niger. Il partage des frontières avec la Mauritanie et l’Algérie au nord, le Niger à l’est, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire au sud, la Guinée au sud-ouest et le Sénégal à l’ouest. Cela lui confère une position géographique stratégique comme carrefour d’échanges, de communication. 2 Source : UN Population department : 4,3 millions d’habitants en 1960. 3 Le secteur agricole est le secteur qui contribue le plus au PIB (environ 36%), suivi par le secteur tertiaire (33%) et les industries extractives (environ 10%), la part des industries manufacturières étant faible (6%). 4 Et pour ces dernières aussi à des conditions favorables pendant la période, tant pour l’environnement climatiques que pour le prix des principales productions. 6 Tableau No1 : Evolution de la croissance du PIB réel par secteur (%) 3. Le double choc de la pandémie de COVID-19 et du coup d’État militaire d’aout 2020 a brutalement fait entrer l’économie en récession en 2020. Les mesures pour lutter contre la propagation de la COVID-19, notamment la fermeture des frontières et les restrictions de mouvements internes, ainsi que la perturbation des chaînes d’approvisionnement 5, ont provoqué une chute brutale de la croissance économique du pays qui est passée de 4,8 % (en termes réels) en 2019 à –1,2 % en 2020, une perte totale de croissance de 6,0 pourcent et une chute du PIB/hab. de près de 9%%. L’efficacité des mesures prises par le gouvernement, la poursuite des exportations d’or et une bonne production agricole ont toutefois permis un rebond rapide de la croissance en 2021 (+3,0%). Toutefois, les perspectives de croissance à moyen terme restent soumises à une forte incertitude, liée à l’évolution de la pandémie de COVID-19, à la persistance des conflits et de l’insécurité, et la durée des sanctions imposées par la CEDEAO en janvier 2022. A moyen terme, seule la levée des incertitudes liées à la transition politique (et des sanctions de la CEDEAO), une baisse de l’insécurité et des conditions climatiques favorables à la production agricole permettront de renouer avec la forte croissance de la période pré-Covid. 4. Au-delà de l’impact des chocs conjoncturels récents, les tableaux ci -dessus illustrent bien qu’en dépit de ses récentes performances, la transformation structurelle de l’économie malienne n’a encore que peu progressé. L’économie du Mali est en effet peu diversifiée, avec un poids encore très important du secteur agricole (38% du PIB total) et la très faible part des industries manufacturières (moins de 7%). Les exportations du pays mali sont excessivement concentrées, l’or, la fibre de coton et le bétail sur pied représentant plus de 90% des exportations totales du pays6. L’un des défis pour le pays sera de diversifier son économie vers des secteurs à plus grande valeur ajoutée et de moderniser son secteur agricole s’il veut assurer une croissance soutenue et moins volatile, et ainsi réduire significativement la pauvreté de sa population. 5 Du a la conjonction des mesures de confinement intérieur dues au COVID-19, de la baisse de la demande mondiale et de la disruption des chaines d’approvisionnement, une baisse de la consommation intérieure en raison de la baisse des envois de fonds et de la réaction des ménages face au risque sanitaire et de la chute des investissements publics non prioritaires pour faire face aux dépenses liées à la crise sanitaire et au désengagement des bailleurs de fonds après le coup d’État militaire. A cela s’est ajoute les sanctions économiques imposées par la CEDEAO (et d’autres pays, comme l’exclusion du Mali de l’AGOA), ainsi qu’une une baisse de la production agricole (-5,6 %) due à de mauvaises conditions météorologiques et de la production cotonnière (-79 %) en raison de la chute des cours mondiaux et de désaccords sur les subventions aux intrants accordées aux producteurs. 6 Mali se situe au 95eme rang en termes de la complexité de son économie d’après l’Index de complexité économique et est l’un des pays qui a les exportations les moins diversifiées dans le monde. 7 Tableau No 2 : Evolution des composantes des différents secteurs de 2025 `a 2020 II. Pauvreté et insécurité alimentaire A. Pauvreté. 5. Entre 2011 et 2019, la croissance soutenue de l’économie a permis une modeste réduction du taux de pauvreté qui est passé de 45,4 % à 42,3 %. Bien que modestes, ces gains représentent un million de personnes passant au-dessus du seuil de pauvreté. Toutefois, la pandémie du COVID et le ralentissement de l’activité économique a entraîné une baisse des revenus du travail, une hausse des prix et une diminution des envois de fonds en provenance de l’étranger. La persistance des conflits dans les régions nord et sud, et l’impact des sanctions de la CEDEAO devraient s’ajouter à la crise du Covid et se traduire par une forte augmentation de la pauvreté 6. Le Mali est classé dans la catégorie des pays à faible niveau de développement humain avec un indice de développement humain (IDH) de 0,434, ce qui place le pays au 184e rang parmi 189 8 pays7. L’IDH du Mali est inférieur à la moyenne des pays du groupe à faible développement humain (0.513), et inférieur aussi à la moyenne des pays de l’Afrique subsaharienne (0.547). Comme l’indique la figure ci-contre, l’IDH du Mali a cependant progressé au cours des dernières années, passant de 0.234 à 0.434 entre 1990 et 2019 (soit une hausse de 85.5 % en trente ans) avec des progrès notables dans les trois dimensions de l’IDH (espérance de vie, l’accès à l’éducation a et un niveau de vie décent). Ces progrès ont toutefois ralenti après la crise de 2012 et, malgré une décennie croissance économique soutenue (5% par an en moyenne) ne s’est traduite que par une réduction de la pauvreté très modeste, passant de 44% en 2011 à 42% en 2019. Cette très modeste baisse, combinée avec une forte croissance démographique, s’est traduite par une augmentation du nombre absolu de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté : en 2019, 8.3 million de personnes vivaient au-dessous du seuil de pauvreté (CFAF 722/personne/an8) contre 7.1 million en 2011. 7. La pauvreté au Mali est encore plus prononcée lorsque l’on considère la pauvreté multidimensionnelle (IPM)9 et les inégalités. En 2019. l’IPM du Mali était de de 0.376 (contre un IDH de 0.43), alors que le Burkina Faso et le Niger affichaient respectivement des IPM de 0.519 et 0.590. Plus de 68 % de la population (soit 13 millions de personnes) vivaient en situation de pauvreté multidimensionnelle. En tenant compte des inégalités, l’IDH du Mali est en forte baisse à 0.289, une perte de 33.4 % par rapport à l’IDH standard. Le Mali affiche en particulier un indice d’inégalité de genre (IIG), de 0.671, ce qui le place au 158e rang sur 162 pays en 201910. Tableau No3 : Inégalités Hommes/Femmes au Mali 8. L’aggravation de la crise sécuritaire a provoqué d’importants déplacements de population et fortement accru le nombre de ménages en précarité absolue et la crise de la COVID-19 a fait reculer une décennie du processus de réduction de la pauvreté au Mali. La dégradation de la situation sécuritaire au cours des derniers mois dans les régions du nord et du centre (Tombouctou, Gao, Mopti, Ségou et la bande frontalière Mali-Burkina Faso-Niger) empêche les populations des zones affectées de mener des activités socioéconomiques, en particulier agricoles, et d’avoir accès aux services de santé et d’éducation (avec la fermeture des écoles). La crise de la COVID-19 a eu un impact particulièrement important et fait reculer d’une décennie les progrès du pays dans sa lutte contre la pauvreté. Le ralentissement de l’activité économique, les mesures sanitaires d’urgence qui ont entrainé des hausses de prix, les comportements de précaution de la part des consommateurs ont entraîné des pertes d’emplois et de revenus généralisées. La crise de la COVID-19 a eu un impact particulièrement dévastateur en zone urbaine. Malgré le soutien du gouvernement malien, on estime que le taux de pauvreté a augmenté de près de 5% au niveau national, soit près de 1 million d’habitants, deux fois plus que le nombre d’habitants qui avaient échappé à la pauvreté durant la décennie précédente11. 7 PNUD, Rapport sur le développement humain 2020 8 moins de 1,90 dollar par jour pour vivre, en 2011 PPA 9 Non seulement la pauvreté monétaire mais aussi les privations en matière d’éducation, de santé et autres conditions de vie. 10 En 2019, l’IDH du Mali était en effet de 0.388 pour les femmes, contre 0.473 pour les hommes, ce qui place le pays dans le groupe 5 des pays ou l’inégalité entre hommes et femmes est la plus élevée. 11 Mali. Note sur la situation économique. Protéger les personnes vulnérables le temps de la reprise. Banque Mondiale, Printemps 2021. 9 9. La pauvreté au Mali concentrée dans les zones rurales. La pauvreté rurale est trois fois plus élevée en zone rurale qu’en zone urbaine (74% contre 26%)12, en termes relatifs mais aussi en termes absolu13. Elle est particulièrement profonde dans les zones touchées par la crise où un nombre important de ménages ont été déplacés, où l’accès aux exploitations agricoles et au marché a été rendu difficile et la prestation des services de base s’est fortement détériorée. Il en est de même pour l’extrême pauvreté. En 2019, plus d’un Malien sur trois (36,3%) vivait en dessous du seuil d’extrême pauvreté : 10% en zone urbaine mais 50% en zone rurale1415. Paradoxalement, l’analyse régionale montre que la pauvreté rurale est la plus haute dans la partie (non-irriguée) du sud du pays, en dépit de meilleures ressources naturelles et conditions climatiques -- les régions de Sikasso (59,0%) et Ségou (57%) -- et la plus basse dans le nord (Tombouctou, 39%), région essentiellement pastorale à très faible densité de population, ou dans la région de Kayes (33%) qui bénéficie d’importants transferts d’argent. La cause première cause de la pauvreté rurale (sans parler de l’impact des problèmes d’insécurité) est la très faible productivité d’une agriculture traditionnelle extensive. Les ménages agricoles pauvres ont en général des activités peu diversifiées (dérivent moins de 15% de leurs revenus d’activités non- agricoles), cultivent des superficies moins importantes (par manque d’accès ou de main d’œuvre), produisent essentiellement des cultures pluviales (largement millet et mais) en utilisant peu d’intrants modernes et donc avec une très faible productivité. Elle est aussi corrélée avec les ménages de grande taille et ayant un ratio de dépendance élevé, et au niveau d’instruction des chefs de ménages. 16 Figure 2 : Distribution spatiale de la pauvreté rurale 12 Profil et déterminants de la pauvreté au Mali 2018-19 ; Institut de la Statistique, octobre 2020. 13 Plus de sept personnes sur dix vivent en milieu rural. 14 Seuil d’extrême pauvreté de US$1.90/personne/jour. 15 Strengthening the Link between Economic Growth and Poverty Reduction in Mali: a poverty assessment; World Bank, 2021. Et Profil et déterminants de la pauvreté au Mali 2018-19 ; Institut de la Statistique, octobre 2020. 16 L’analyse selon le niveau d’instruction montre que l’incidence de la pauvreté demeure plus élevée chez les chefs de ménage n’ayant aucun niveau d’instruction (49,1 %) suivi de ceux ayant un niveau primaire avec 32,8 %. 10 10. Les femmes et les jeunes des zones rurales sont les premières victimes de la pauvreté . La pauvreté est aussi plus élevée pour les femmes, en particulier en zone rurale. L'indice de développement (IDH) pour les femmes est de 0,388 contre 0,473 pour les hommes. À titre de comparaison, le Burkina Faso et le Niger enregistrent un IDG de 0.867 et 0.724, respectivement17. Le Mali est l'un des pays les moins bien classés en termes de l’inégalité des genres. Le Mali affiche un indice d’inégalité de genre (IIG)18 de 0.671 qui le place au 158e rang sur 162 pays dans le classement 2019. Il est aussi classé 30e sur 34 pays d'Afrique dans le Global Gender Gap 2020 du Forum économique mondial (WEF). En zone rurale, les femmes manquent d’accès à la terre, au crédit et à d’autres ressources productives. Leur pauvreté des femmes rurales a un impact direct sur le bien— être de leurs enfants. Les jeunes ruraux sont aussi particulièrement à risque. Ils ne sont généralement pas employés plus de six mois par an (pendant la saison agricole. Confrontés au sous-emploi, à la pauvreté et à des conditions de vie difficiles, ils migrent vers les villes ou à l’étranger où ils n’ont pas les qualifications nécessaires pour avoir accès à un emploi décent. Ils sont aussi des proies faciles pour les réseaux criminels ou les groupes qui promeuvent l’intégrisme et le fanatisme religieux. B. Insécurité alimentaire et malnutrition 11. Malgré des progrès au cours des deux dernières décennies, le Mali a l’un des taux d’insécurité alimentaire et de malnutrition parmi les plus élevés au monde. Selon le Global Food Security Index (GFSI, Indice mondial de sécurité alimentaire), le Mali avait un score de 42/100 en 2018, occupant ainsi la 86ème place sur 113 pays au niveau mondial19. Près d’un quart des ménages était en situation d’insécurité alimentaire dont 4% en phase sévère. L’insécurité alimentaire et la malnutrition chronique sont élevées dans la quasi-totalité du pays. Elles sont particulièrement élevées dans les régions du nord et du centre, à cause des conditions agro-climatiques difficiles, de l’insécurité et des tensions intercommunautaires20, mais affectent aussi les régions du sud telles que les régions de Sikasso, Ségou et Mopti, pourtant plus riches et bénéficiant de conditions agro climatiques plus favorables21. 12. L’enquête SMART22 montre qu’en 2018 la situation nutritionnelle des enfants de moins de cinq ans et celle des femmes, notamment en milieu rural et chez les femmes enceintes, reste préoccupante. On observe la persistance d’une malnutrition chronique et aiguë des enfants dans toutes les régions, en particulier dans les zones rurales. Un enfant sur six souffre de malnutrition aiguë et plus d’un tiers des enfants de moins de 5 ans accusent des retards de croissance)23. La sous-nutrition est liée à la faiblesse de revenus mais aussi à de mauvais régimes alimentaires qui sont très peu 17 En 2019, 95 % des femmes employées avaient des emplois vulnérables contre 86 % des hommes. 7.3 % des femmes adultes ont atteint un niveau d’éducation secondaire, contre 16.4 % des hommes. Sur 100,000 naissances vivantes, 562 femmes décèdent de causes liées à la grossesse et le taux de fécondité chez les adolescentes est de 169.1 naissances pour 1,000 femmes âgées de 15 à 19 ans. Le taux d’activité des femmes est de 61.2 %, contre 80.6 % pour les hommes 18 L’indice d’inégalité de genre (IIG) du PNUD fait ressortir les inégalités fondées sur le sexe dans trois dimensions : la santé procréative, l’autonomisation et l’activité économique 19https://foodsecurityindex.eiu.com/Index Cet indice évalue la sécurité alimentaire en partant de 28 indicateurs liés à l'accessibilité, la disponibilité, la qualité et la sécurité des aliments. 20 (ENSAN, 2018). Kidal, Mopti, Gao et Tombouctou sont les régions plus touchées par l’insécurité alimentaire (phases 3 à 5), avec respectivement 23.11%, 21.84%, 21.13% et 18.20% de leur population en insécurité alimentaire. 21 Dans l’ensemble, la prévalence de la MAG (malnutrition aiguë globale) s’élevé à 10.0%. Les régions de Gao, Tombouctou, Ségou et Bamako se trouvent au-dessus du seuil d’alerte de 10% (avec respectivement 14.2%, 12.5%, 11.2% et 10.5%). La prévalence de la MAS (malnutrition aiguë sévère) est au-dessus du seuil d’alerte de 1% dans les régions de Mopti (1.6%), Koulikoro (1.5%), Tombouctou (1.8%), Bamako et Sikasso (1%) ; et qu’a Ségou, Gao, Ménaka et Taoudéni la prévalence de la MAS est au-dessus du seuil d’urgence de 2% (avec des prévalences de 2.3%, 3.1%, 2.1% et 2.8% respectivement) (SMART, 2018). 22 Enquête Nationale Nutritionnelle Anthropométrique et de Mortalité rétrospective suivant la méthodologie SMART, UNICEF 2018 23 L’insuffisance pondérale à la naissance touche 18,9 % des enfants ; 28 % des enfants de moins de cinq ans ont un retard de croissance tandis que 72 % présentent une anémie. 11 diversifiés et pauvres en micronutriments essentiels, à des tabous alimentaires, à la méconnaissance des règles alimentaires et de diététiques. Figure 3 : Malnutrition et insécurité alimentaire 13. Les facteurs d'insécurité alimentaire et de malnutrition au Mali ont deux grandes dimensions : (i) une insécurité alimentaire chronique ou structurelle, qui résulte très largement de la pauvreté des ménages maliens ; et (ii) une insécurité alimentaire conjoncturelle, qui affecte périodiquement tout le pays, certaines régions ou certaines catégories de la population (catastrophes naturelles, perturbations des marchés, conflits). Ces deux dimensions sont étroitement liées. D’une part, la pauvreté structurelle accroît la vulnérabilité des populations aux risques conjoncturels ; d’autre part, une seule année difficile (en termes de production et/ou de revenus) détruit durablement les actifs productifs des ménages et accroit durablement leur pauvreté et insécurité structurelle. 14. Le problème majeur de la sécurité alimentaire au Mali est essentiellement celui de la pauvreté, mais c’est aussi la capacite du pays à assurer un bon niveau de production suffisant pour approvisionner le marché national. Une partie importante de la population rencontre des difficultés à produire ou acheter sur le marché leurs besoins alimentaires de base. De plus, les systèmes agricoles du pays sont fragiles, sensibles aux variations climatiques. Le Mali est doté de la capacité d’être un « grenier alimentaire pour toute l’Afrique de l’Ouest », et la production nationale de denrées alimentaires de base (maïs, mil, riz et sorgho) a jusqu’à présent globalement suivi la croissance de la population24, à l’exception de la production de riz et de blé dont la demande (surtout urbaine) s’est accrue très rapidement et pour lequel il doit importer chaque année respectivement 25% et 95% de ses besoins (690 000 tonnes et 375 000 tonnes en 2021). De plus, il existe une forte disparité régionale en matière de production céréalière (tableau 4), avec des régions/zones le plus souvent excédentaires (Ségou, Sikasso, Koulikoro) et des régions/zones en situation de déficit chronique par rapport aux besoins (Kidal, Tombouctou, Gao, Mopti). Dans les régions déficitaires, une partie de l’insécurité alimentaire des ménages provient du manque de disponibilité physique du a des marchés imparfaits n’assurant pas une redistribution des zones excédentaires vers les zones déficitaires. 24 Même si des déficits importants de production céréalière sont enregistrés en moyenne une année sur trois… 12 Tableau No4 : Bilan cerealier pour l’annee 2021 / 2022 15. Toutefois, cet équilibre semble de plus en plus fragile et il n’est pas certain que le Mali, confronté à une croissance démographique et une urbanisation qui ne faiblit pas, puisse continuer à assurer la sécurité alimentaire du pays. L’accroissement très rapide de la population représente déjà, et représentera plus encore dans le futur, le défi majeur du Mali pour la réduction de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire de sa population. La population du pays a quadruplé entre 1960 et 2020, passant de 5,2 à 21,0 millions d’habitants25. Cette forte croissance démographique (+3,6% par an en moyenne), s’est ralentie graduellement (3.0% actuellement) mais les projections démographiques indiquent que le Mali devrait compter environ 28 millions d’habitants en 2030 et 44 millions en 205026. Elles indiquent aussi que l’urbanisation du pays continuerait à un rythme rapide : la population urbaine s’accroitrait à un rythme très rapide (plus de 4% par an) et passerait de 42% de la population totale actuellement à 50% en 2030 et plus de 60% en 2050 ; la population rurale continuerait aussi à s’accroitre mais à un rythme rapide (plus de 1,5% par an), en particulier dans les zones déjà à forte densité, mettant une pression accrue sur les ressources naturelles. Cette urbanisation rapide aura des implications profondes pour l’agriculture malienne, tant au niveau de la productivité27 que de la structure de la demande urbaine qui comprendra une part de plus en plus grande de produits à plus haute valeur ajoutée (produits frais, animaux, transformés). La demande future offrira d’importantes opportunités pour la diversification de la production agricole nationale et pour l’augmentation des revenus agricoles. 25 La rapide croissance démographique traduit attachement des Maliens à une forte natalité est ancré dans une population encore très rurale et des normes sociales qui valorisent une nombreuse descendance. Rien ne laisse donc penser que la natalité et la croissance démographique puissent baisser de façon significative dans un futur proche. 26 Nations Unies, Division de la Population, 2020. 27 En effet, si un ménage agricole produit à l’heure actuelle à la fois pour sa propre consommation et pour moins d’un ménage urbain, il devra produire pour près de 2 ménages urbains en 2050. 13 Figure 4 : Croissance démographique et projetée 16. La production agricole devra finalement faire face à des conditions agro-climatiques de plus en plus défavorables. Les changements climatiques sont déjà évidents au Mali et devraient s’accentuer au cours des prochaines décennies. Les températures annuelles ont déjà augmenté de 0,8°C depuis 1960 (une moyenne de 0,15°C par décennie) et les précipitations sont devenues de plus en plus variables, avec des événements climatiques plus fréquents et importants (sècheresses, inondations) affectant gravement la majeure partie d’une agriculture malienne très largement pluviale. Ces changements auront des incidences profondes sur la productivité et la production agricoles et sur la sécurité alimentaire du pays et des ménages. 17. Pour que la production nationale puisse répondre à cette demande urbaine, il faudra réaliser des gains de productivité très importants sur un ensemble très large de produits. Faire face à ces évolutions demandera (i) le développement soutenu de l’agriculture irriguée (horticulture, atténuation des risques climatiques), y-compris péri-urbaine, (ii) l’amélioration des infrastructures de transport (réduction des couts de transport, péréquation régionale) et de mise en marché (réduction des pertes, régulation temporelle) ; et (iii) l’émergence de chaines de valeur capables de répondre à la demande urbaine en particulier en termes de qualité des produits. De plus, la pression foncière s’accentuera, surtout dans le Centre et le Sud qui sont les zones les plus favorables, et sur les terres irriguées où la pression est déjà forte et demandera la mise en place d’un régime/marché foncier efficace et sécurisé favorable aux investissements agricoles. L’extension probable de la mise en valeur agricole vers les zones pastorales devra être accompagnée de mesures efficaces pour la prévention/atténuation des conflits entre cultivateurs et éleveurs (à propos des droits fonciers, de l’accès à l’eau et de la disponibilité en pâturages), et la demande nationale en produits de l’élevage devra être de plus en plus satisfaite par un élevage stabilisé et intensif. Finalement, le changement climatique demandera la mise en Å“uvre d’une politique volontariste visant à l’adoption d’une agriculture intelligente face au climat (AIC). Cela exigera une révolution profonde des pratiques culturales que pour l’instant ni les producteurs ni les services d’appui ne semblent capables de mettre en Å“uvre. III. Le secteur agricole du Mali A. Importance de l’agriculture. 18. L'agriculture est un secteur essentiel à la stabilité économique et sociale du Mali en raison de son rôle central dans l'économie nationale, la sécurité alimentaire et la création d'emplois. Le secteur agricole (y-compris élevage et pêche) emploie environ 80 % de la population active du pays, contribue à plus de 35% à son PIB (avec des variations annuelles assez importantes liées aux conditions climatiques) et à environ 20 % de ses exportations (très largement dominée par celles d’or, 75%). Les 14 productions vegetales representent 50% du PIB agricole, suivies de l’elevage (36%) et de la peche et de l’exploitaion forestiere (7% chacun). Le sous-secteur des productions végétales est le plus important. Il est dominé par de petites exploitations traditionnelles qui produisent du mil, du sorgho, du maïs et/ou du riz. pour leur autoconsommation, avec peu de surplus commercialisables. Le sous- secteur de l’élevage revêt une grande importance pour le Mali. Plus de 85% des ménages agricoles produisent du bétail et on estime que le cheptel national se compose de plus de 15 millions de bovins, 32 millions de petits ruminants (ovins et caprins), 37 millions de volailles et près d’un million de chameaux. Ces animaux constituent une source de revenus importante pour près du tiers de la population et aussi une forme d’épargne pour de nombreux ménages. Le sous-secteur de l’élevage occupe le troisième rang après l’or et le coton dans les exportations du pays. Figure 5 : Poids du secteur agricole dans le PIB (2012 – 2019) 19. Le secteur agricole a connu une croissance soutenue au cours des deux dernières décennies (environ 5,5% par an sur la période) qui a concerné la plupart des sous-secteurs. La production de céréales a en particulier enregistré une forte croissance, passant de 2,0 millions de tonnes en 2001 à 9,5 millions de tonnes en 2018 (dont le riz représentait 30% du total), soit une croissance de 8,0% par an sur la période. Sur la même période, la production de coton, la principale culture de rente et d’exportation, a, elle aussi, connu une progression importante, bien que marquée par de fortes variations annuelles (voir ci-dessous), passant de 250 000 tonnes à 700 000 tonnes en 2021 (6,0% par an sur la période). La production de produits de l’élevage (viande de bÅ“uf et de lait) s’est aussi accrue de 7% par an sur la période 2001-2018. Les performances et la résilience du secteur agricole, ont donc été remarquables en dépit de la crise sécuritaire que connait le pays, 15 Figure 6 : Taux de croissance de certaines spéculation 2000-2018 B. Contexte agro-climatique. 20. Près de 60 % de la superficie totale du Mali (1, 240, 000 de km²) est désertique. Deux rivières, le Niger et le Sénégal, traversent cependant le pays dans le sud et offrent de très importantes opportunités d’irrigation ainsi que des possibilités de navigation qui contribuent au désenclavement de certaines zones production agricole importantes. La Direction Nationale du Génie Rural (DNGR) du Ministère de l’Agriculture estime le potentiel de terres utilisables pour l’agriculture et l’élevage à 43,7 millions d’ha (soit 35% de la superficie totale du pays) dont seulement 7 millions d’ha (soit 16%) sont cultivés à l’heure actuelle. Le Mali bénéficie aussi de 2,2 millions d’ha de terres potentiellement irrigables (le potentiel le plus élevé de la région ouest-africaine), dont seulement 20% (450 000 ha) sont actuellement irrigués. 21. Son climat est marqué par l’alternance d’une saison humide pluvieuse et d’une saison sèche avec des précipitations décroissant du Sud au Nord du pays. Le régime des pluies détermine les principaux systèmes agricoles du pays: (i) une zone saharienne désertique dans la partie la plus septentrionale : 55% de la superficie totale du pays, 200 mm/an et de très hautes températures pouvant dépasser 45°C, qui accueille moins de 10% de la population, où se pratiquent un élevage nomade et une agriculture dans les zones de dépression assez humides pour la mise en culture ; (ii) une zone intermédiaire sahélienne : 28% de la superficie totale, de 200 à 600 mm/an, qui couvre l’essentiel du delta intérieur du Niger, avec des zones où peut se pratiquer une agriculture irriguée et des zones d’agriculture pluviale ; et (iii) une zone soudanienne : au centre et au sud du pays, 17% de 16 la superficie totale, de 600 à plus de 1 200 mm/an, des températures comprises entre 24 °C et 32 °C, densément peuplée (plus de 100 hab./km2) et qui offre des conditions favorables à une agriculture diversifiée (céréales, racines, tubercules, arboriculture, etc.) associée à l’élevage familial. Ces trois grands systèmes agricoles sont complétés par deux autres systèmes bénéficiant d’une disponibilité de l’eau à tout moment de l’année : les grands systèmes irrigués (aménagement des grandes vallées alluviales) dans la région du Delta Intérieur du fleuve Niger (DIN), et les systèmes irrigués périurbains (eaux de surfaces et souterraines peu profondes). 22. Le Mali est particulièrement vulnérable à divers risques naturels : sécheresses, inondations et invasions de criquets pèlerins. Le changement climatique est déjà évident et depuis 1980, plus de 7 millions de personnes ont été touchées par 28 événements majeurs de sécheresse et d'inondation. Depuis 1960, les températures ont augmenté de 0,7°C à travers la majeure partie du pays et les précipitations annuelles ont diminué28 et sont devenues plus irrégulières. Les pluies commencent et se terminent plus tôt, et les saisons de croissance se terminent maintenant plus tôt. Dans le sud du Mali, les températures plus chaudes et le nombre de jours sans précipitations ont déjà réduit la productivité agricole. Dans le Nord, le changement climatique a eu un impact négatif sur les pâturages et les ressources fourragères, considérablement la pression exercée sur des ressources fourragères limitées modifié les schémas traditionnels de transhumance, augmenter et provoquer des conflits. Selon les scénarios élaborés pour le Mali, la température annuelle moyenne est susceptible d’augmenter entre 1,2 et 3,6°C d'ici les années 2050, et entre 1,8 et 5,9°C d'ici les années 2090. Cela aura une incidence profonde sur les possibilités de production de produits agricoles essentiels et donc sur la sécurité alimentaire du pays et des ménages et sur le développement économique et social du pays. Pour relever ces défis, il est nécessaire d’adopter une agriculture intelligente face au climat (AIC) pour augmenter la productivité agricole de manière durable (sur les plans environnemental et social) et renforcer la résilience des systèmes agricoles aux risques climatiques29. C. L’importance de l’agriculture familiale. 23. La production agricole malienne est presque exclusivement le fait de l’agriculture familiale, dont l’écrasante majorité sous cultures pluviales. Le dernier recensement agricole30 dénombrait 992 665 ménages agricoles (11 millions de personnes) dont 88% vivaient en zone rurale et 12% en zone urbaine. Parmi les ménages agricoles, 87 pratiquent l’agriculture végétale, 89% l’élevage et 5% la pêche. Les exploitations sont de taille réduite : 48% ont moins de 2 ha et ne cultivent que 8% de la superficie cultivée totale ; 68% cultivent moins de 5 ha et 90% moins de 10 ha (59 % de la superficie). Les grandes exploitations (> 20ha) restent rares (2% et 15% de la superficie totale cultivée) même si les politiques tendent à les promouvoir (notamment dans la zone irriguée de l’Office du Niger et autour de Bamako). Pour ce qui concerne l’élevage, il y a une forte concentration des animaux puisque 10% des exploitations possèdent près de la moitié des Unités Gros Bétail. A l’autre extrémité, 11 % des exploitations n’ont aucun animal. 24. Les exploitations familiales ont des activités diversifiées, agricoles et non agricoles. Dans le sud et le centre, ces exploitations familiales pratiquent la polyculture céréalière et l’élevage. Dans le nord, vues les conditions agro-climatiques, elles présentent une très forte spécialisation pastorale. Les ménages agricoles tirent environ 85 % de leurs revenus de productions agricoles multiples -- végétales, d’élevage et de pêche-- y compris la valeur des produits consommés dans le ménage. Les revenus non- agricoles génèrent en moyenne 15 % des revenus des ménages et viennent compenser le peu d’activité agricole en saison sèche. La taille des ménages agricoles est élevée avec en moyenne douze (12) personnes par exploitation, et la main d’œuvre familiale représente la presque totalité du travail 28 Les précipitations moyennes enregistrées entre 2000 et 2009 ont été inférieures de 12% à celles de 1920-1969. 29 L’agriculture intelligente face au climat (AIC) vise à relever les défis liés à l’impact des changements climatiques sur la sécurité alimentaire, afin d’atteindre explicitement trois objectifs : (i) accroître durablement la productivité agricole, af in de soutenir les revenus agricoles et l’amélioration de la sécurité alimentaire ; (ii) adapter et renforcer la résilience des systèmes agricoles et de sécurité alimentaire face aux changements climatiques à plusieurs niveaux ; et (iii) réduire les émissions de gaz à effet de serre produites par l’agriculture (y compris les cultures, l’élevage et la pêche). 30 Module Agriculture du RGPGH5, INSAT, avril 2021. 17 nécessaire.31. La majorité des chefs de ménage n'ont aucun niveau d’instruction. Seuls 22% sont alphabétisés et 17% ont le niveau de l’école primaire. Figure 7 : Sources de revenus des ménages agricoles 25. La plupart des exploitations familiales se caractérisent encore par leurs pratiques extensives, sauf dans les zones cotonnières et de l’Office du Niger . L’utilisation d’intrants est encore très faible. Globalement, l’utilisation des engrais est surtout caractérisée par l’utilisation d’engrais organiques et seulement 30 % des exploitations agricoles utilisent des engrais minéraux, presque exclusivement pour la production cotonnière et rizicole (irriguée). Moins de 20% utilisent des semences améliorées. L’utilisation de pesticides/herbicides est aussi très faible. Ces moyennes cachent cependant d’importantes variations avec des taux d’utilisation beaucoup plus élevés dans les zones où l’Etat malien a concentré ses efforts (subventions aux engrais) pour améliorer la productivité agricole, en particulier la zone cotonnière et celle de l’Office du Niger (par exemple à Sikasso où 80 % des exploitations y ont bénéficié d’apports en engrais et la moitié des ménages de cette région a bénéficié de semences). Tableau No5 : Utilisation de la production des céréales majeures du pays (Pourcentage des exploitations ) 26. Le gouvernement a fait d’importants efforts pour promouvoir la mécanisation, en particulier la culture attelée. Le tableau ci-dessus indique que : (i) le labour attelé est très développé dans les régions de Sikasso, Ségou et Koulikoro (65%) ; (ii) le travail du sol manuel concerne 21% des parcelles (lié soit à la pauvreté des exploitations soit aux cultures pratiquées) ; et (iii) la motorisation 31La majorité de la population agricole (57%) vit dans des exploitations de 2 ménages ou plus. Les grandes familles gardent encore une certaine importance avec 8% des exploitations constituées de 4 ménages ou plus (soit plus de 20 personnes) et qui regroupent 22% de la population agricole. 18 (motoculteurs et tracteurs) est encore très peu répandue (moins de 4%). Environ 70% des exploitations disposent d’équipement de culture attelée dans les zones cotonnières et ces équipements prédominent également dans la zone de l’Office du Niger32. La motorisation (tracteurs, motoculteurs, motorisation à poste fixe) se développe dans les périmètres irrigués rizicoles et dans les zones cotonnières. Le parc de tracteurs est actuellement estimé à plus de 7 000 unités, concentrées dans la zone CMDT (régions de Sikasso et Ségou), et la petite motorisation (motoculteurs, batteuses) sont de plus en plus utilisés dans les casiers rizicoles de l’Office du Niger. L’emploi de motopompes pour la petite irrigation villageoise se développe aussi. L’accès à la mécanisation reste cependant un défi pour les zones de production basées sur les cultures sèches où les revenus sont trop bas pour permettre des investissements en équipements agricoles, en particulier sans accès à un crédit approprié. Tableau No6 : 27. L’intégration des exploitations agricoles familiales au marché reste très faible. La majorité des ménages agricoles produisent des céréales (mil, le sorgho, le riz, le maïs et même le fonio) largement pour l’autoconsommation. La part commercialisée est faible, globalement moins de 25% en moyenne. Elle est toutefois plus élevée dans les zones où l’agriculture est plus intensive -- riz irrigué et productions maraichères comme l’échalote dans les zones de l’Office du Niger, coton et cultures vivrières en rotation dans les zones cotonnières et quelques filières émergentes (sésame, mangue, lait, etc.) dont la commercialisation est aussi assez bien structurée. D. Profil des principales productions. 1. Production végétales. 28. L’agriculture du Mali est essentiellement vivrière, dominée par la production céréalière (mil, sorgho, maïs, riz) qui représente environ 70% des superficies cultivées. La diversité agroécologique du pays permet toutefois une production agricole assez diversifiée avec le coton, les tubercules (manioc, igname), l’anacarde, les cultures fruitières (mangue) et horticoles (échalotte), le sucre et le tabac… s’ajoute également du maraîchage et des cultures d’exportations dont le coton (pluvial). L’augmentation de la production au cours des dernières décennies s’est surtout faite plus par l’accroissement des superficies cultivées que par celui des rendements. La grande majorité des productions végétales du pays (90%) sont pluviales, à l’exception du riz irrigue et de l’horticulture péri- urbaine, et restent donc tributaires du niveau des pluies. 32Des avancées rapides en matière de culture attelée ont été enregistrées grâce à la mise en place (dans le cadre des Opérations de Développement Rural (ODR) de facilités de crédit et à la disponibilité de matériels mieux adaptés fabriqués sur place. 19 Les céréales (riz, mais, mil, sorgho, fonio). 29. Les céréales représentent, et de loin, les productions végétales les plus importantes. Elles sont produites par la grande majorité des exploitations familiales, en grande partie pour l’autoconsommation (seuls moins de 20% sont commercialisés, à l’exception du riz irrigué dans la zone de l’Office du Niger). La production de céréales a augmenté de 2,0 millions de tonnes en 2001 à plus de 10,0 millions de tonnes en 2020 (8% par an) dont : 3,0 millions de tonnes de riz (30%), 3,5 millions de tonnes de maïs (33%) et de 3,3 million de tonnes de mil et de sorgho (11%). S’y ajoute le fonio dont la production ne semble pas augmenter et le blé (entre 30 et 50 000 tonnes/an chacun). Les surfaces emblavées en céréales sont passées de 2.5 à 5.8 millions hectares entre 2001 et 2020 (5% par an), indiquant que l’évolution de la production a été due à la fois à l’augmentation des surfaces et à celle des rendements. La production nationale couvre environ 90% de la demande nationale, les importations de riz et de blé représentant la presque totalité du déficit). Un des problèmes majeurs de la production céréalière, très largement pluviale, reste sa forte variabilité interannuelle liée aux aléas climatiques, qui se répercute sur les prix à la fois au producteur et au consommateur. A ce risque s’ajoute la faible organisation de des filières qui restent « traditionnelle » et atomisée, sauf dans la zone de l’Office du Niger pour le riz irrigué. Figure 8 : Evolution de la production des cultures céréalières 30. Filière riz. La culture du riz domine le secteur des céréales et représente à elle seule 5 pour cent du PIB du Mali. Le riz est produit selon divers modes (submersion contrôlée, maîtrise totale de l’eau, submersion libre, pluvial). La production de riz a connu une forte croissance au cours de la dernière décennie atteignant 3,0 millions de tonnes en 2020 (source FAO/INSAT). Cette croissance s’est faite à la fois par l’augmentation des superficies et par celle des rendements, en particulier en irrigué. La forte progression de la production rizicole a été soutenue, dans le cadre de la Stratégie Nationale de Développement de la Riziculture (SNDR)33, par d’importants investissements publics dans des infrastructures d’irrigation à grande et à petite échelle, accompagnés par l’introduction de nouvelles variétés, la subventions des intrants, un meilleur accès au crédit agricole, et des initiatives en matière de transformation. La zone de l’Office du Niger est le « grenier à riz » du Mali avec 90 000 hectares de terres irriguées consacrées principalement à la riziculture (avec aussi des cultures horticoles). 33 Mali met en Å“uvre depuis 2009, la Stratégie nationale de développement de la riziculture qui s’inscrit dans l’approfondissement de la Loi d’orientation Agricole (LOA) et qui a été initiée dans le cadre de la CADR (Coalition p our le développement du riz en Afrique). 20 Figure No 9 : 31. Malgré les performances de la filière riz, la production nationale demeure insuffisante pour couvrir les besoins nationaux et a fortiori pour générer un surplus exportable. En effet, la consommation de riz a progressé de façon spectaculaire en raison de la croissance démographique et de l’urbanisation.. Elle est passée de 50 kg/habitant en 2001 à près de 90 kg actuellement (consommation totale de 2,0 million de tonnes de riz en 2021). Le riz est devenu la première céréale consommée en zone urbaine avec une populations rurale se nourrissant aussi de plus en plus de riz importé (en substitution du mil). La production annuelle est de 1,5 million de tonnes et sont complémentées par environ 500 000 tonnes/an d’importations (pour un taux de couverture 75% et un cout estimé à plus de 250 millions de dollars EU). 32. Il existe donc un potentiel de substitution aux importations considérable, et le marché régional-Ouest-Africain offre aussi des opportunités presque illimitées (les importations de la région représentent 80% de la consommation régionale). Pour tirer parti de ces importantes opportunités de croissance, il faudra toutefois que des efforts soutenus soient faits à tous les niveaux de la chaine de valeur pour améliorer sa compétitivité. Au niveau de la production, les actions devraient porter sur (i) l’amélioration des rendements, tant en pluvial qu’en irrigué, par un meilleur accès aux variétés améliorées et aux intrants ; (ii) l’extension des aménagements hydroagricoles pour diminuer la variabilité de la production due aux aléas climatiques ; (iii) l’amélioration de la sécurité foncière pour encourager les investissements ; et (iv) le développement de la mécanisation. Au niveau de la commercialisation et de la transformation, la priorité devrait être donnée à : (i) l’amélioration de l’accès au marché et par la réduction des coûts particulièrement élevés (transport, stockage, manutention, taxes illicites, etc.) et des pertes post-récolte ; (iii) l’amélioration de la qualité du riz ; et (iv) le renforcement de l’efficacité de la chaine de valeur par une meilleure coordination de ses acteurs. 33. Filière mais. Le maïs est cependant la céréale pluviale qui a connu la croissance la plus rapide au cours des dernières années. La production de maïs dépasse désormais celle de riz. La production est passée d’environ 650 000 tonnes en 2005 à 3,5 millions de tonnes en 2020, sous le double effet d’une extension des superficies mais aussi de l’accroissement soutenu des rendements (8 à 9% par an chacun sur la période). Cette croissance a été tirée par une forte demande, tant nationale que régionale, pour la consommation humaine mais aussi animale (en particulier pour l’aviculture en plein essor). Le mais est produit dans la zone Sud du Mali où les systèmes pluviaux intègrent coton et céréales, les céréales bénéficiant des engrais utilisés pour la culture du coton34. A part le maïs-grain, la culture fournit aussi ses feuilles/fanes qui sont utilisées pour l’alimentation du bétail. La production est consommée sur l’exploitation mais est aussi vendue (40 à 50%) à des collecteurs qui les transportent jusqu’aux marchés urbains. Le gouvernement a soutenu la culture du maïs pour répondre 34 Le système coton-maïs est de loin le plus intensifié du pays. 21 à la demande intérieure, réduire la dépendance du pays aux importations (pratiquement éliminées en 2020)35. 34. Filière millet et sorgho. Le Mali est l’un des principaux producteurs régionaux de millet et de sorgho. Ce sont deux des céréales les plus consommées, en majorité dans les zones rurales et par les populations aux revenus les plus faibles. Leur production et rendement ont progressé beaucoup plus modestement que ceux du riz et du maïs. La production de mil est passée de 1,2 million de tonnes en 2005 à 1,9 million de tonnes en 2020 (croissance de 3 pour cent sur la période). Celle de sorgho de 750 000 tonnes à 1,8 millions de tonnes (5%). Comme indiqué par le graphe ci-joint, la progression de la production (très largement pluviale) des deux céréales a été largement due à l’accroissement des superficies plutôt qu’à celle des rendements qui ont été stagnants. Le mil et le sorgho sont produits par les petites exploitations familiales qui utilisent très peu d’intrants modernes. Figure No 10 : 35. La production est très largement destinée à l’autoconsommation (80%) mais il existe aussi une minoritéÌ? d’exploitants produisant pour le marché (bière, aliments de bétail). Ces exploitants utilisent des pratiques agricoles modernes (semences certifiées et engrais) et sont souvent organisés en associations et en coopératives qui les aident leurs membres à accéder à des intrants tels que le crédit, le renforcement des capacités techniques et la commercialisation collective. De multiples unités artisanales et semi-industrielles transforment le millet en farines et produits locaux. Il y a aussi 35 En 2009, le gouvernement a étendu au mais les subventions des intrants pour le riz (principalement engrais, FAO, 2017). 22 de (faibles) exportations de mil et de sorgho vers les pays limitrophes (Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Sénégal). Bien que les deux céréales fassent partie des six produits prioritaires du Programme national d’investissement dans le secteur agricole (PNISA), les perspectives de développement de la production semblent limitées (la consommation par habitant décroît en faveur du riz et du maïs). L’une des options possibles pourrait être une intensification sélective du sorgho orientée vers les aliments pour animaux. 36. Filière fonio. Le fonio est consommé au Mali depuis très longtemps, essentiellement pour la consommation familiale pendant la période de soudure. Il est maintenant aussi produit pour le marché, national et international, et le Mali est devenu le troisième plus gros producteur de fonio dans le monde, avec une production estimée à environ 41 000 tonnes/an (après la Guinée et le Nigeria)36. Sa faible production en fait une production marginale, mais cela n’enlève en rien à son importance alimentaire et sociale (largement produit par les femmes). Le fonio s’accommode de sols pauvres et résiste bien à la sécheresse et/ou aux fortes pluies. Il est de ce fait parfaitement adaptée au contexte du changement climatique que doit affronter le Mali. La production s’est accrue au cours des dernières années (20 000 tonnes en 2005, presque exclusivement par l’extension des superficies avec un rendement stagnant autour de 600 kg/ha37 pour répondre à la forte augmentation de la demande des marchés d’exportations (Etats Unis, Europe), portée par des considérations nutritionnelles (le fonio ne contient pas de gluten). Cette demande a provoqué l’émergence nombreuses petites entreprises de transformation qui ont graduellement adopté des équipements mécanisés pour le décorticage38, le lavage, le dessablage et la précuisson à la vapeur du fonio blanchi. Ces innovations ont allégé la pénibilité de la transformation du fonio et permis d’offrir des produits « prêts à l’emploi » (précuit) bien adapté à la demande urbaine et des marchés d’exportation. Figure No11 : 36 Production mondiale estimée : 700 000 tonnes (2019, FAO), dont Guinée 500 000 tonnes, Nigeria 85 000 tonnes et Mali 41 000 tonnes. 37 La croissance de la production a été forte de 2000 à 2010 puis a connu une période en dents de scie avant de progresser à nouveau.. 38 Les petites entreprises privées ont joué un rôle central dans le développement de ces innovations techniques capitales : le décortiqueur blanchisseur GMBF qui a permis de résoudre le blocage dû au décorticage manuel au pilon et au mortier, le séchoir à gaz Atesta. 23 37. Quelques entreprises maliennes exportent de petites quantités de fonio précuit (environ 200 tonnes/an). Ces exportations visent très largement les communautés d’origine ouest-africaine vivant en Europe et en Amérique du Nord, mais il existe d’importantes opportunités de croissance, à la fois sur les marchés national, régional et à l’exportations avec une forte demande de produits « sans gluten ». Le développement de la filière fonio serait fortement générateur d’emploi, en particulier pour les femmes. Il se heurte cependant à d’importants obstacles tant au niveau de la production, de la transformation/du conditionnement pour améliorer la qualité des produits et de la structuration de la filière. Les rendements sont faibles, ce qui a réduit les superficies qui lui sont consacrées malgré ses avantages évidents et prix forts sur le marché. Des améliorations des semences auraient un impact direct sur les revenus féminins, surtout sur le plateau Dogon et dans le sud-ouest du Mali où il est fréquemment cultivé. De meilleurs cultivars de fonio permettraient également de l’étendre à des zones où il était cultivé dans le passé mais d’où il a disparu. La plupart des entreprises de transformation sont très petites parce qu’entièrement autofinancées. Un meilleur accès au crédit aiderait fortement ces entreprises à améliorer leurs technologies et économies d’échelle. Filière racines et tubercules. 38. Le manioc et l’igname (200 000 tonnes en 2018) sont des aliments de base des populations rurales et sont cultivées dans des environnements agroécologiques et selon des systèmes de production variés. Il y a aussi une petite production de pomme de terre et de patate douce. Le manioc et l’igname sont essentiels dans le cycle annuel de la disponibilité alimentaire en raison notamment de leur capacité de stockage dans le sol et de la plus grande stabilité de leur prix sur le marché par rapport à celle des céréales. La plupart des producteurs utilisent toujours les variétés traditionnelles qui sont bien adaptées aux conditions de culture mais ont un faible rendement. La production de manioc se développe et offre des perspectives intéressantes car sa production et sa transformation sont fortement créatrices d’emplois et de revenus, en particulier pour les femmes. La consommation de manioc au Mali augmente avec le développement de la fabrication locale de semoule et de farine communément appelées atiéké, gari ou tapioka. Le manioc peut aussi être utilisé pour l’alimentation du bétail (feuilles, épluchures, cossettes) et pour la fabrication de nombreux produits industriels39. La filière manioc est toutefois confrontée à de nombreux défis : le manque de variétés performantes, le manque de crédit pour acquérir les équipements de transformation, la non-maîtrise des techniques de transformation et de conservation et la faible organisation de la filière. 39. La production de pomme de terre se développe à un rythme assez soutenu, notamment dans les régions de Sikasso, et de Kati et Koulikoro. Elle y est produite en culture irrigués (manuellement). La production est estimée à environ 100 000 tonnes et augmente régulièrement pour approvisionner une demande urbaine qui devrait connaitre une croissance soutenue à l’avenir. En outre, il y a quelques exportations vers un marché sous-régional qui reste largement importateur de pommes de terre en provenance d'Europe: Tirer parti de ces opportunités demandera toutefois: (i) une amélioration de la compétitivité au stade de la production par l’utilisation de semences améliorées (importées) et une meilleure maitrise des itinéraire technique, (ii) l’amélioration des méthodes de stockage ; (iii) le développement du crédit intrants pour l'achat de semences et de d'engrais et d'un système approprié de financement des stocks; (iv) la structuration des producteurs pour l'approvisionnement en intrants, le stockage et la commercialisation; et (v) la mise en place d'un système d'information sur les prix des grands marchés de consommation nationaux et régionaux. 39 Les amidons de manioc, tant natifs que modifiés, sont recherchés pour apporter des solutions dans divers types d’industrie (agroalimentaire, pharmaceutique, chimique, cosmétique, etc.) Les amidons de manioc ont également des usages non alimentaires notamment dans les industries papetières (papier, carton), textiles, pharmaceutiques, chimiques (peintures, adhésifs et colles) 24 Filière arachide. 40. La production d’arachide a aussi connu une croissance irrégulière, passant de 150 000 tonnes en 2005 à environ 500 000 tonnes en 2015 avant de chuter à 250 000 tonnes en 2020. L’arachide est une culture importante au Mali, à la fois pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages et comme aliment du bétail (sous forme de tourteau ou de fanes). La production est principalement le fait de petits producteurs, pour la consommation des ménages et comme culture de rente. Elle est cultivée soit en monoculture, soit associée au sorgho, au millet ou au coton. L’arachide constituait un produit d’exportation important du Mali jusqu’aux années 1970, mais elle est désormais presqu’exclusivement destinée au marché intérieur (les exportations n’excédent pas 2 pour cent de la production totale, FAO, 2021). La transformation de l’arachide est principalement effectuée à̀ petite échelle par des femmes pour la production de pâte, d’huile et de tourteaux. Les fanes et les tourteaux sont utilisés pour l’alimentation du bétail. La contamination par l’aflatoxine constitue une contrainte majeure pour le développement de la production, notamment pour les exportations des graines brutes ou transformées vers l’Europe et les États-Unis (et pose aussi un problème sérieux pour la consommation intérieure). Une fois la contamination par l’aflatoxine maitrisée, le potentiel de développement du secteur semble bon vue la forte demande d’huiles alimentaires au Mali et dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest40. Les autres contraintes auxquelles est confrontéÌ? le secteur de l’arachide sont l’accès aux semences à haute productivité et le nombre limité d’installations de stockage et d’unités de transformation industrielle. Figure No12 : Filière Karité. 41. Le Mali est le second producteur mondial de karité, derrière le Nigeria, avec environ 20% de l’offre mondiale. Le potentiel de production est d’environ 600 000 tonnes par an. La production de noix repose sur un parc d’arbres très vaste (reparti sur 20 millions d’hectares) qui repose sur un renouvellement naturel. Il n’existe pas de statistiques fiables établissant de manière précise la quantité de noix produite au Mali, mais on peut estimer les quantités réellement exploitées entre 50 000 à 100 000 tonnes d’amandes/an selon les années. (10-15 % de la production). Le ramassage des noix est traditionnellement effectué par les femmes, individuellement ou collectivement par l’intermédiaire de coopératives de quelques dizaines à plusieurs centaines de membres (on estime que jusqu’à 1,0 million de femmes y participent). La transformation est artisanale. Les produits issus des noix de karité sont le beurre et l’oléine41. De petites unités de transformation mécanisées peuvent être sollicitées pour le 40 Cependant, il y a un manque de données solides sur la compétitivité de l’huile d’arachide comparée à l’huile de coton produite localement ou à l’huile de palme importée d’Asie. 41 Deux organisations faîtières regroupent l’ensemble des acteurs évoluant dans la filière karité : la Fédération Nationale Karité (FNK) et le réseau des femmes productrices de beurre de karité (SIDO). Les membres de la FNK sont des acteurs des 25 broyage des amandes, ce qui permet de réduire le temps consacré à cette tâche mais aussi d’augmenter le taux d’extraction de beurre. 42. Les produits du karité sont soit autoconsommes soit vendus sur deux marchés distincts : un marché local, avec des produits de basse qualité à des prix modiques, et un marché d’exportation avec des produits de qualité supérieure à un prix élevé. Sur le marché intérieur, le beurre de karité sert d’huile de cuisine, fournit le principal ingrédient pour la savonnerie et sert de crème corporelle et de baume. Le beurre de karité de qualité export entre dans la composition des produits cosmétiques et remplace le beurre de cacao en Europe. Il doit être libre de toute contamination par des produits potentiellement carcinogènes libérés par la technique traditionnelle42. A l’heure actuelle, l’inexistence d’acteurs industriels modernes pouvant offrant des produits de qualité oblige le Mali à exporter son karité sous forme de noix brutes, sans pouvoir tirer bénéfice d’un marché de beurre de karité industriel très lucratif et à forte croissance43. En 2019, le Mali a exporté 60 000 tonnes de noix contre seulement 211 tonnes de beurre. Les trois principaux pays de destination sont le Togo, la Côte d’Ivoire (ces deux pays essentiellement pour transformation et réexportation) et le Danemark. La demande mondiale de karité devrait continuer à croitre à l’avenir, offrant d’importantes opportunités de croissance à la filière malienne. Une nouvelle usine, a démarré ses opérations dans la région de Sikasso avec une capacité de transformation de 30 000 tonnes de noix par an (bénéficiant d’un appui de la SFI). Elle devrait permettre de structurer la filière locale pour apporter un appui à la production et organiser la mise en marché du beurre et des amandes y-compris leur traçabilité. Filières horticoles et fruitieres. 43. Le Mali produit une grande variété de fruits et légumes (oignons/échalotes, tomates, pommes de terre, patate douce, etc.). Les cultures horticoles concernent environ 1% des superficies cultivées totales et se pratiquent dans toutes les régions, en zone rurale et péri-urbaine, partout où l'eau est disponible, en saison et en contre saison44. La production horticole a connu une croissance d’environ 8% par an au cours des 20 dernières années, essentiellement à cause de l’accroissement des superficies. La production est le fait d’un grand nombre de petits producteurs (environ 100 000), dont les deux-tiers de femmes, cultivant de très petites surfaces (une moyenne de 0,1 ha) et utilisant des méthodes traditionnelles. Les producteurs sont peu organisés ce qui complique l’accès aux intrants, au crédit et au conseil. L’Institut d’Economie Rurale (IER) et le World Vegetable Center fournissent du matériel génétique performant mais son prix est assez élevé et la plupart des producteurs recyclent leurs graines sur de longue période, ce qui déprime les rendements. Les cultures horticoles sont des produits périssables qui doivent être récoltés et commercialisés rapidement. La commercialisation se fait toutefois par des canaux informels et se heurte à un manque d’infrastructure de transport, de différents maillons de la filière et des démembrements sont installés dans la plupart des zones de production, de transformation et de commercialisation. Quant au réseau SIDO, créé en 2007, il comprend 24 coopératives regroupant plus de 1 000 femmes. Ces deux organisations ont bénéficié depuis quelques années de l’accompagnement des PTF. 42 Les méthodes traditionnelles de stockage et de d’extraction contribuent à donner au beurre extrait un goût amer, une forte acidité et une mauvaise odeur, et ne permettent pas au beurre de répondre aux exigences de qualité nécessaires pour l’exportation 43 la majeure partie de la valeur est créée sur les activités d’extraction de beurre et de raffinage. 44Il existe cependant une spécialisation assez marquée des grandes zones de production. La zone Haute Vallée du Niger et notamment la région de Koulikoro et le district de Bamako est une zone importante de production de mangue, de banane, d'agrumes et de haricot vert. La zone du plateau dogon produit une quantité importante d'échalote commercialisée vers Bamako, Ségou, Mopti et exportée vers la Côte d'Ivoire et le Sénégal. La production de tomate est aussi importante dans cette zone. La zone de l'Office du Niger (région de Ségou) produit des quantités importantes d'échalote, d'ail et de tomate ; Les produits sont commercialisés vers l'intérieur du pays ainsi qu'à l'extérieur vers la Cote d'Ivoire, le Burkina, la Mauritanie ; etc. Le cercle de Yanfolila est plus spécialisé dans la production des agrumes (oranges surtout). La région de Kayes, précisément le cercle de Kéniéba est une grande zone de production d'agrumes pendant que le cercle de Kita produit les légumes et la mangue. Les régions de Gao, Tombouctou, Kidal produisent le l’oignon, la pomme de terre, le manioc et les dattes. 26 conditionnement et de stockage qui entraine de très fortes pertes post-récolte. Il y a aussi un manque de contrôles sanitaires et de traçabilité des produits. 44. Les cultures horticoles ont un fort potentiel de croissance, tirée par une demande urbaine qui s’accélère et les opportunités du marché régional et international. Les productions horticoles sont des productions à haute intensité de main d’œuvre, tant au niveau de la production qu’au niveau de la commercialisation, et offrent donc aussi des opportunités importantes en termes de réduction de la pauvreté, en particulier pour les femmes. Toutefois, à l’heure actuelle, la production n’arrive pas à satisfaire la demande nationale, ni en quantité ni en qualité et ne génère que de faibles quantités d’exportations. Réaliser ce potentiel demandera des efforts importants pour lever une série de contraintes. Au niveau de la production, l’utilisation un matériel végétal performant et de bonnes pratiques agricoles devrait permettre des avancées significatives au niveau des rendements. Des investissements importants seront nécessaires dans l’infrastructure de commercialisation (transport, stockage, conditionnement, chaine de froid) ainsi qu’un un meilleur accès au crédit (tant pour les investissements que pour les besoins en fonds de roulement) et les chaines de valeur devront être mieux structurées pour assurer l’accès à des marchés de plus en plus exigeants et termes de qualité. 45. L’arboriculture fruitière. La filière recèle de grandes potentialités grâce aux conditions climatiques favorables du pays (on rencontre même quelques plantations de manguiers, goyaviers, citronniers dans le sahel, au bord des marigots et dans les falaises). Le produit le plus important est la mangue, tant pour le marché national que pour l’exportation, suivie par l’anacarde et les agrumes. La banane est produite autour des exploitations agricoles familiales dans les régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso et le District de Bamako. La production de dattes, dans la bande sahélienne et saharienne, est estimée à environ 20 000 tonnes45. Elle joue un rôle central dans l'alimentation des populations des régions du Nord (Gao, Tombouctou, Kidal et Kayes) et leur fournit des revenus importants, en particulier pendant les périodes de fêtes. â–ª La mangue est le fruit le plus cultivé au Mali et la mangue fraîche en est le premier fruit d’exportation. La production est estimée à environ 850 000 tonnes (2018). Les principaux bassins de production de la mangue sont Sikasso, Koulikoro, Kayes (Sud), Ségou (Sud) et Bamako. Les variétés les plus cultivées sont Kent, Keitt, Julie, Amélie, etc.46. Une grande partie de la production est perdue (les pertes post-récolte pourraient être de plus de 50%). Sur les quantités commercialisées, plus de la moitié est consommée localement, le reste étant exporté soit vers l'Europe (21 000 t/an)47, très largement par bateau mais avec de petites quantités par voie aérienne, soit vers la sous-région : Mauritanie, Sénégal, Burkina Faso et Cote d’Ivoire qui sont approvisionnés par camion avec des flux qui sont difficiles à estimer (30 000 tonnes/an ?), dont une partie est destinée à la réexportation vers les marchés européens). Une partie de la production est transformée localement48 par de petites unités, principalement pour le marché local, mais aussi pour l’exportation (mangue séchée et concentré de mangue). â–ª La filière mangue a bénéficié de nombreux programmes d’appui tant pour la maîtrise des itinéraires techniques que pour l’organisation de la chaine de valeur. Les producteurs sont organisés en coopératives et l’Interprofession de la Filière Mangue (IFM-Mali) a été créée en 45 La promotion de la filière datte à travers le développement de l’agriculture oasienne contribue à la sécurité alimentaire dans les régions du nord, notamment Kidal, à la création d’emplois pour les jeunes et à la stabilisation de la zone. La régio n de Kidal à travers les sites oasiens de Intekoi, Tanazrouft et Tinzawatene offre de grandes potentialités pour la promotion de la filière datte. Les principales variétés sont : Deglet-nour, Tegahaza et Ghars. 46 Les variétés locales, qui sont fibreuses, ont constitué durant une longue période l’essentiel de la production. C’est l’introduction de la variété antillaise « Amélie », non fibreuse, qui a permis les exportations ventes de mangue du Mali, notamment aux Pays Bas et en France. La production de mangue s’est accrue avec l’implantation de nouveaux vergers avec les variétés demandées à l’exportation telles que la Kent et la Keitt. 47 Plan Triennal de Campagne Agricole Consolidé et Harmonisé 2019. 48 La capacite installée était de 85 000 tonnes en 2018. La transformation portait en majorité sur les purées, les concentrés et les jus ainsi que sur de petites quantités de mangues séchées. 27 201149. Les acteurs de la filière ont aussi bénéficié d’appui aux certifications GlobalGAP, Biologique et Equitable qu’imposent certains clients européens. Toutefois, la concurrence sur ces marchés est aussi très forte (Inde, Burkina, Cote d’Ivoire) et la filière est confrontée à d’importantes contraintes qui obèrent sa compétitivité : (i) la persistance des maladies qui impacte négativement sur la qualité des fruits (mouche des fruits)50; (ii) un certain manque de crédibilité sur le marché international en raison de la faible qualité (perçue) de sa production ; (iii) l’enclavement des zones de production qui freine l’évacuation d’un fruit très périssable ; (iv) un manque d’emballages appropriés et d’équipements ; (v) des infrastructures de mise en marché de mauvaise qualité (chaine du froid) ; et (vi) la difficulté d’accéder au crédit pour le développement des plantations à cause de la longue période avant leur entrée en production et le risque perçu par les banques sur un produit périssable et le manque de fiabilité de la chaine de valeur. Figure No13 : â–ª La production d’anacarde s’est aussi considérablement accrue ces dernières années, atteignant 170 000 tonnes en 2019. L’anacarde constitue aujourd’hui le deuxième produit agricole d’exportation après le coton. L’anacarde n’est produit que dans le sud du Mali La production est concentrée dans la région de Sikasso, avec de petites quantités dans les régions de Kaye et de Ségou. La production s’est développée très rapidement depuis le début des années 2000 (2 500 tonnes)51. On estime que la culture de l’anacarde occupe environ 300 000 ha et concerne 100 000 producteurs (taille moyenne des exploitations de 3 ha). La semence est essentiellement du « tout venant » (non améliorée), obtenue au niveau de ses propres champs ou par échange avec des voisins. Les producteurs utilisent très peu d'intrants. Les travaux pré-récolte (entretien, désherbage, etc.), de récolte (cueillette) et post récolte (tri, séchage, etc.) sont faits par les agriculteurs et de manière rudimentaire. De ce fait, les rendements sont faibles (300 kg de noix/ha) et la qualité des noix médiocre, ce qui a un impact négatif sur le prix obtenu par les producteurs. â–ª Seule une très faible partie de la production est transformée localement en amandes (5%). La presque totalité de la production est exportée sous forme de noix brutes (vers l’Inde ou le 49 Avant la reconnaissance officielle d’une interprofession, l’organisation doit prouver, entre autres, que ses membres produisent, transforment et commercialisent plus de 50 % de la richesse générée dans la filière et joindre à la demande d’enregistrement au moins les deux procès-verbaux des deux dernières assemblées générales. 50 Les mouches des fruits étant classées « insectes de quarantaine », aucun fruit piqué renfermant une larve ne peut être exporté sous peine du rejet et de la destruction totale du lot de mangues par les services phytosanitaires européens. 51 La culture de l’anacarde s’est développée à la suite d’une campagne de promotion par le Ministère des Eaux et Forêts et la Compagnie Malienne pour le Développement du Textile (CMDT) à la fin des années 1980. Son développement a tiré parti à la fois d’une demande croissante d’anacarde sur le marché international et d’une saturation du marché de la mangue. Ainsi les paysans qui entretenaient des haies d’anacardier pour délimiter leurs manguiers ont vendu les noix d’anacarde à un meilleur prix que les mangues. 28 Vietnam, ou pour être transformée dans les pays voisins pour réexportation). Bien qu’il n’existe pas de statistiques fiables, on estime que la capacité installée est de moins de 10 000 tonnes de noix (pouvant produire environ 2 000 tonnes d’amandes). La transformation est le fait d’une multitude d’unités artisanales (certaines organisées en coopératives de femmes) et de quelques unités semi-industrielles qui utilisent des technologies semi-mécanisées (indiennes ou vietnamienne) qui sont les seules qui peuvent respecter les normes internationales requises pour l’exportation. Les amandes produites sont majoritairement destinées à l’autoconsommation ou au marché local et seules de très faibles volumes sont actuellement exportées (100 tonnes/an). â–ª La filière anacarde offre de très importantes opportunités en matière de création d’emplois et de revenus, en particulier en zone rurale, et son impact environnemental est aussi très positif. Son développement est une priorité pour le gouvernement. La filière commence seulement à s’organiser. Il existe de nombreuses coopératives de producteurs qui sont organisées en unions régionales, et une fédération nationale des producteurs d’anacarde (FENACOPAM). Toutefois, le manque de moyens financiers, de logistique et d’appui technique et de gestion nuit à la bonne coordination de la filière et beaucoup de producteurs font des ventes individuelles plutôt que groupées (ce qui pourrait leur procurer un prix supérieur et éviter les intermédiaires). Les transformateurs sont regroupés sous le Groupement des transformateurs d’anacarde du Mali (GTRAM créé en décembre 2017. Une Interprofession de la filière anacarde au Mali (IPROFAM) a été officiellement créée en 2019. Elle regroupe tous les acteurs (producteurs, transformateurs, commerçants, artisans) de la filière anacarde au Mali et est l’interlocuteur au niveau national dans tout ce qui concerne la filière. Son développement reste cependant confronté à de nombreux défis : (i) le faible rendement des exploitations, la mauvaise qualité des noix brutes, qui demandent d’importants efforts en termes d’accès à des variétés améliorées et de promotion de bonnes pratiques agricoles (y - compris post-récolte) ; (ii) le manque de compétitivité des unités de transformation qui sont à l’heure actuelle incapables de lutter avec les acheteurs de noix brutes et donc de s’approvisionner52 ; et (iii) la faible organisation et le manque d’efficacité de la filière. Le levier principal de son développement sera l’émergence d’une industrie de transformation compétitive, capable de s’approvisionner en noix brutes et de pénétrer les marchés d’exportation pour les amandes. Cela demandera des actions à plusieurs niveaux : l’amélioration des capacités techniques et de gestion des opérateurs ; un meilleur accès à des équipements performants (exonérations de taxes à l’importation) ; la meilleure formation du personnel ; un meilleur accès au crédit (à l’investissement et pour l’achat des noix brutes). Comme dans la plupart des pays producteurs, cela demandera aussi un niveau raisonnable de protection contre l’exportation de noix brutes53. 3Filière Coton. 46. Le coton a toujours occupé une place centrale dans le développement économique et social du Mali. Il constitue la principale culture de rente et d’exportation du pays : 15 % du PIB, 20% des recettes d’exportation (la seconde place après l’or) et 12% des recettes fiscales de l’Etat. Il procure aussi des revenus à plus de quatre millions de personnes (soit environ 20% de la population totale du pays). Le coton est produit dans tout le sud du pays par environ 190 000 petites exploitations (entre 2 et 5 ha). Sa culture est pluviale et il est cultivé en rotation avec les céréales sèches et en général en association avec l’élevage. Il occupe en moyenne 700 000 ha (avec de fortes variations annuelles) et les rendements en coton-graine, qui ont globalement été stagnants, fluctuent autour de 900-1 000 52 Les unités semi-industrielles/industrielles fonctionnent en sous-capacité à cause de leur difficulté à s’approvisionner en noix brutes. 53 Cette protection devra être conçue de façon à ne pas pénaliser excessivement les producteurs et n’encourage pas les exportations informelles vers des pays ou les couts d’évacuation, de transformation et d’exportation sont plus bas qu’au Mali et dont les opérateurs peuvent donc offrir des prix bord-champ plus intéressants. 29 kg/ha. En 2020/21, la production a atteint a atteint 730 000 tonnes, faisant du Mali le premier producteur de coton d’Afrique de l’Ouest. 47. La contribution du coton au développement du Mali va plus loin que la seule production du coton. En effet, la culture du coton a été l’élément structurant principal de l’économie rurale du sud du Mali. Elle (i) a contribué fortement au développement de la production de céréales (qui bénéficient de l’arrière-effet de la fertilisation du coton) et donc à la sécurité alimentaire du pays et des ménages; (ii) a soutenu des transformations importantes des systèmes de culture par le développement de la culture attelée, l’intensification des productions grâce à l’utilisation de la fumure organique et des engrais minéraux et l’ intégration agriculture-élevage; (iii) contribué fortement à la structuration du milieu paysan en soutenant émergence d’un mouvement coopératif puissant; et (iv) a eu d’importants effets multiplicateurs sur l’ensemble de l’économie malienne grâce aux dépenses des ménages coton- culteurs et à son impact sur de multiples branches de l’économie : le transport, la fourniture d’intrants agricoles et le développement industriels (industries textiles et de trituration de la graine de coton). 48. La filière coton est fortement structurée, l’Etat ayant toujours joue un grand rôle dans son développement. La production de coton graine au Mali est assurée par des unités de production familiales, regroupées en plus de 7 000 Sociétés Coopératives de Producteurs de Coton (SCPC) réunies dans la Confédération des Sociétés Coopératives des Producteurs de Coton (C-SCPC). Il existe aussi quatre syndicats, tous membres de l’Association des organisations professionnelles paysannes54, dont le rôle est d’assurer la défense des intérêts des producteurs. A cause de son importance stratégique, économique et sociale, le gouvernement a toujours gardé le contrôle de la chaîne de valeur du coton par le biais de l’entreprise publique Compagnie malienne de développement des textiles (CMDT) et de l'Office de la Haute Vallée du Niger (OHVN)55 qui intervient dans les cercles de Koulikoro, Kati et Kangaba, autour de Bamako pour promouvoir le développement des cultures vivrières et industrielles, y-compris celui du coton. La CMDT (et l’OHVN) fournit (à crédit) les intrants aux producteurs, fixe le prix du coton graine, l’achète aux producteurs, le transforme et commercialise le produit final56. Cette forte structuration, et la forte implication de l’Etat dans la gestion de la filière, ont permis d’assurer son développement et sa résilience malgré les chocs, internes et externes, qu’elle a subi. 49. La filière coton a cependant des fragilités qui se répercutent sur l’ensemble de l’économie du pays. Sa forte intégration au marché international (plus de 90% de la production de fibre est exportée) et sa dépendance aux engrais minéraux la rendent vulnérables aux fluctuations du cours mondial de la fibre et du prix des intrants agricoles. La production est pluviale et donc soumise aux aléas climatiques. Les rendements ont été stagnants au cours des dernières décennies et sont maintenant menacés par la perte de fertilité des sols et le changement climatique. • La grande variabilité des cours de la fibre sur le marché international, et la forte capacité des producteurs à mener des actions collectives, ont fréquemment entrainé de fortes variation de la production nationale. De 2000 à 2020, la filière coton a connu trois grandes crises qui l’ont 54 Syndicat des cultivateurs de coton et vivriers (SYCOV) ; Syndicat des producteurs agricoles du Moyen-Ouest (SYPAMO) ; Syndicat pour la valorisation du coton ; et Syndicat des paysans du Cercle de Kita (SPCK). 55 L’OHVN intervient dans les cercles de Koulikoro, Kati et Kangaba, autour de Bamako pour promouvoir le développement des cultures vivrières et industrielles dans sa zone d'intervention, y-compris celui du coton. Dans sa zone d'intervention, l'OHVN a la même obligation que la CMDT, c'est à dire la collecte de la totalité de la production commercialisable de coton. Du reste, c'est la CMDT qui fournit les intrants et les semences utilisés aussi en zone OHVN et c'est à elle qu'est livrée la totalité de la production. Le prix d'achat du coton au producteur est le même dans tout le pays, l'OHVN cède aussi les intrants au même prix que la CMDT. 56 La Compagnie Malienne pour le Développement des Textiles (C.M.D.T.) est une société anonyme d’économie mixte créée en 1974. Maillon essentiel de la filière cotonnière du Mali, elle assure les missions suivante : (i) le conseil agricole auprès des producteurs de coton ; (ii) la fourniture des intrants aux producteurs ; (iii) l’achat du coton graine aux producteurs ; (iv) le transport et l’égrenage du coton graine ; (v) la vente de la graine de coton aux industries locales de trituration ; et (vi) la vente de fibre de coton à l’exportation et aux industries textiles maliennes. La CMDT est organisée en une Holding appuyée par quatre filiales de production (Sud.sa, Nord Est.sa, Centre.sa, Ouest.sa) et l’Office de Classement du Coton. Le Capital de la C.M.D.T. Holding est détenu à 99,49% par l’Etat malien et 0,51% par GEOCOTON. Le capital des quatre Filiales de production de la C.M.D.T. est détenu à 20% par les producteurs à travers la Confédération des Sociétés Coopératives des Producteurs de Coton (C-SCPC) et 80% par la C.M.D.T. Holding. 30 fortement ébranlée (en 2000-2001, 2008-2009 et 2020-2021). Dans chacun des cas, la chute du prix mondial, et/ou la hausse du prix des engrais ont conduit au boycott de la culture (qui est annuelle) par les producteurs. Ces derniers ont soit réduit drastiquement les superficies emblavées et/ou l’utilisation d’engrais, soit abandonné la culture du coton au profit d’autres spéculations (les céréales). Cela a entrainé des chutes brutales de la production57. Dans chacun des cas, l’Etat a dû subventionner soit le prix bord-champ soit le prix des engrais pour relancer la culture. L’augmentation du prix bord-champ pour la saison 2010-2021, rendu possible par l’augmentation importante des cours de la fibre a permis un rebond spectaculaire de la production en 2021 qui est estimée 730 000 tonnes de coton graine. • L’accroissement des volumes produits au cours des dernières décennies a reposé presque uniquement sur l’accroissement des surfaces cultivées et non sur la progression des rendements agricoles, qui ont globalement stagné autour de 0,9/1,0 tonne/ha. Les principales contraintes pour l’amélioration des rendements ont été identifiées : (i) des contraintes agronomiques, dont la baisse de la fertilité des sols, le non-respect de l’assolement/rotation ou des itinéraires techniques, le parasitisme et la mauvaise utilisation des engrais ; (ii) des contraintes socio-économiques, dont la faiblesse récurrente des cours internationaux de la fibre et le coût élevé des intrants ; et (iii) des contraintes climatiques, notamment l’irrégularité et l’insuffisance ou l’excès des pluies dues, en partie, à l’impact de la culture du coton sur son environnement. • La zone cotonnière montre en effet des signes inquiétant de baisse de la fertilité des sols et d’érosion éolienne et hydrique. L’accroissement de la pression foncière, la pression de l’élevage et à la pression de l’élevage et des techniques culturales inadaptées, (telles que le labour parallèle aux courbes de niveau ou la forte utilisation des cultures attelées et motorisées) ont entrainé la disparition du couvert végétal et une dégradation mécanique des sols58. La culture continue sur les mêmes parcelles ont aussi provoqué une baisse de la fertilité des terres malgré l’utilisation des engrais (minéraux et organiques). La forte utilisation de ces derniers aussi a contribué à la salinisation des terres59. La dégradation des sols, et les changements climatiques, représentent un défi majeur à la durabilité des systèmes cotonniers. Ces derniers devront donc évoluer profondément au cours des prochaines années avec l’adoption de pratiques agricoles mieux adaptées aux conditions imposées par le changement climatique60. 57 De 459 000 tonnes de coton-graine en 1999/2000 à 242 000 tonnes en 2000/2001 ; de 700 000 tonnes de coton graine en 2018-2019 à 147 200 tonnes en 2019-2020. 58 La culture du coton est traditionnellement associée à une faible couverture arborée, le coton nécessitant beaucoup de lumière solaire. De plus, à l’exception des arbres fruitiers tels que le manguier et le goyavier, les agriculteurs n’ont pas la tradition de plantation d’arbres 59 Les herbicides coton sont aussi dangereux pour la santé humaine et celle des animaux. 60 Lutte contre la dégradation des sols, réduction de l’usage des pesticides, culture biologique, semis direct sous couvert végétal ; rotations culturales incluant des légumineuses ; pâturage systématique des résidus de récolte, utilisation de biopesticides et/ou l’agroforesterie. Cette dernière est encore peu employée mais se développe et semble prometteuse. Les producteurs de coton ont généralement entre 10 et 20 arbres/ha (typiquement néré et karité), mais il faudrait augmenter cette densité a 70-80 arbres/ha. Des expérimentations démontrent que l’agroforesterie permet d’obtenir une augmentation de rendement d’environ 100 kg/ha. De plus, les agriculteurs pratiquant l’agroforesterie peuvent également récolter des produits forestiers ligneux et non-ligneux, tels que des fruits (mangue, néré), des gousses pour le fourrage (d’Acacia albida) et des noix d’arbres (par exemple le karité), qui leur permettent de générer des revenus supplémentaires. 31 Figure No14: 50. La production de coton soutient aussi une des plus importantes branches de l’industrie agro- alimentaire du pays. La CMDT transforme le coton graine en fibre et en graines dans 18 usines d'égrenage. Les graines de coton sont triturées par une centaine d'huileries, regroupées au sein de la Fédération nationale des producteurs d'huile et d'aliment bétail (FENAPHB). et produisent de l’huile alimentaire et des tourteaux utilisés comme aliment de bétail. A côté de ces unités de trituration se développent de nombreux GIE de femmes qui récupèrent les résidus de transformation pour produire du savon dont la vente génère des revenus importants. Les linters (fibres de basse qualité produites au cours de l'égrenage) sont utilisés dans la production locale de serpillières et d'emballages pour les balles de coton. • La transformation de la fibre constitue le maillon de la filière où le potentiel de création de valeur et d’’emplois est le plus important. Le gouvernement ambitionne de mettre en place une industrie de transformation locale pour qu’au moins 10 à 25% du coton produit soit transformé au Mali. Pour cela, l’Etat accorde une décote dégressive sur le prix de cession par la CMDT du coton fibre aux filateurs locaux. Toutefois, les attentes du gouvernement ne se sont toujours pas concrétisées. Bien que les quantités transformées par les filatures aient augmenté régulièrement, les quantités transformées (en fil et/ou en tissues) représentant moins de 5% de la fibre produite par la CMDT. Les difficultés majeures rencontrées par les filateurs locaux sont : (i) les coûts élevés de l’énergie ; (ii) la formation insuffisante de la main-d’œuvre ; (iii) un marché local trop réduit ; et (iv) la concurrence de produits textiles d'importation moins chers et de la friperie. • L'huile de coton et le tourteau sont toutefois valorisés sur le marché national. L'huile est utilisée dans l'alimentation humaine et le tourteau dans les compléments alimentaires des animaux (bovins et volaille). Les pâtes issues de la trituration de l'huile servent de matière première à de nombreux GIE de femmes pour la fabrication de savon. La demande en huile et en tourteau dépasse largement les capacités actuelle de production de graines de coton et cette demande devrait connaitre une croissance soutenue dans l’avenir, offrant des opportunités importante de substitution aux importations si la production de coton continue à augmenter. Le gouvernement du Mali réserve la vente des graines de coton aux entreprises nationales. Toutefois, le nombre d'usines est de loin supérieur à la capacité actuelle de la CMDT à les approvisionner en graines et la plupart d’entre elles ont besoin d’un approvisionnement complémentaire en provenance du Bénin et de Côte d'Ivoire. 51. Un Plan stratégique pour le développement de la filière coton pour la période 2020-2025 a été élaboré par le gouvernement. Ce plan vise la production de plus de 1 000 000 de tonnes de coton graine à l’horizon 2025, des rendements de 1 500 kg/ha ; une amélioration de la qualité de la fibre et au moins 20% du coton fibre transformé localement (plus de 200 000 tonnes). Les actions suivantes sont envisagées : (i) l’amélioration de la fertilité des sols ;; (ii) la promotion d’itinéraires techniques adaptés aux changement climatiques ; (iii) la diversification des systèmes de production et le 32 développement du coton biologique et du coton irrigué.; (iv) le désenclavement des zones de production et l’amélioration de la logistique/outils pour la collecte, l’égrenage, le stockage et l’évacuation (achat de nouveaux camions et engins, modernisation des anciennes usines, construction de nouvelles usines) ; (v) la poursuite du programme de raccordement des usines au réseau interconnecté de l’Energie du Mali (E.D.M). Ce plan est très ambitieux, mais sa mise en Å“uvre devrait être une priorité pour le gouvernement. 2. Productions animales (élevage). 52. Le Mali est un pays à forte vocation agro-pastorale. Il est le deuxième plus grand pays d’élevage de la CEDEAO après le Nigéria, et le premier pays exportateur de bétail de la sous -région. Le secteur de l’élevage contribue environ 13% à la formation du PIB (36 % du PIB agricole). Le bétail a connu une croissance rapide au cours des dernières années.61 En 2020, le pays dénombrait plus de 15 millions de bovins, 32 millions de petits ruminants (moutons et chèvres), 37 millions de volailles et un peu moins d’un million de camelins. L’élevage constitue le troisième secteur exportateur du pays (essentiellement du bétail sur pieds, avec de petites quantités de cuirs et peaux) après l’or et le coton. On estime que l’activité est pratiquée par 80% de la population rurale pour qui il procure environ un- tiers des revenus monétaires et contribue à leur sécurité alimentaire/nutritionnelle. De plus, environ 12 pourcents des ménages vivant en ville ont du cheptel destiné à la vente ou à l’autoconsommation62. Environ 80% des ménages éleveurs maliens possèdent des petits ruminants, 70% des volailles et 66% des bovins. Pour ces derniers, il y a une forte concentration des effectifs : 80% des têtes de bétail sont élevées et commercialisées par 10% d’exploitations familiales pratiquant l’élevage sous une forme pastorale ou agropastorale, extensive et –partiellement – transhumante. 53. Il existe trois principaux types de systèmes de production animale au Mali : (i) les systèmes d’élevage pastoraux qui exploitent les vastes zones semi-arides du nord et du centre du pays ; (ii) les systèmes d’élevage agropastoraux sédentaires extensifs, fortement développé dans les zones agricoles ; et (iii) les systèmes d’élevage semi-intensifs péri-urbains. L’élevage pastoral concerne les bovins et les petits ruminants. Il est pratiqué par les pasteurs nomades et transhumants et il est caractérisé par un faible taux d’exploitation du cheptel. La production est généralement largement non commerciale, mais permet d’accumuler des actifs productifs et de répondre aux besoins de trésorerie des éleveurs. Le système agropastoral sédentaire extensif est prédominant dans le Sud du pays (régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso et Ségou). Sa productivité est aussi faible. L’élevage semi- intensif en périphérie des centres urbains porte principalement sur l’aviculture, l’embouche bovine et l’élevage laitier. La production agropastorale et péri-urbaine sont largement commerciales et servent les marchés nationaux et à l'exportation. Les producteurs sont organisés en groupes ou coopératives, avec divers niveaux de spécialisation. 61 Le taux de croissance annuel moyen a été de 3.1% pour les bovins, 5.2% pour les petits ruminants et de 1.0% pour les camelins. 62 Enquête agricole intégrée aux conditions de vie des ménages (EAC-I) au Mali, USAID, 2018. 33 Figure No15 : repartition des productions agro-pastorales 54. Le Mali semble avoir un avantage comparatif au sein de la sous-région de la CEDEAO pour la production de bovins et de petits ruminants. Jusqu’à présent, le secteur a été capable de répondre à la demande nationale et de permettre d’importante exportations vers les pays de la sous-région. Les exportations du Mali sont essentiellement constituées de bétail sur pied, en particulier de bovins, d’ovins et de caprins. La Côte d’Ivoire est la première destination des exportations mais le Mali exporte aussi le Ghana, le Nigeria, le Sénégal et l’Algérie (qui a toujours été une destination privilégiée des exportations maliennes de petits ruminants et de camelins). La croissance du marché national et du marché sous-régional (qui importe déjà de très importantes quantités de produits animaux en provenance du marché extrarégional), offre d’importantes opportunités de croissance au secteur de l’élevage malien si ce dernier est capable de répondre à une double exigence : (i) fournir du bétail/viande (plus d’animaux, des animaux plus lourds) de bonne qualité ; et (ii) améliorer sa compétitivité face à la concurrence des productions d’autres pays de la sous-région et importées. 55. Toutefois, en dépit des efforts du gouvernement, les éleveurs maliens restent confrontés à de nombreuses contraintes tout au long des chaînes de valeur. Les races locales ont une faible productivité avec des taux d’exploitation bas63 et des poids de carcasse inférieurs de 25 à 40 pour cent à ceux qui seraient possibles avec une alimentation et une gestion sanitaire adéquates. D’importants progrès de compétitivité sont possibles donc par l’amélioration génétique du cheptel (en particulier pour les élevages sédentaires dans les zones agropastorales et péri-urbaines, y-compris pour la 63 De l’ordre de 13% pour les bovins et de 10% pour les petits ruminants, alors que le taux d’exploitation des bovins est de l’ordre de 20 % dans les pays maghrébins et de plus de 30 % dans les élevages européens. 34 production de lait)64, par l’amélioration de son alimentation (y-compris complémentation minérale) et de celle de sa couverture sanitaire (prophylaxie et déparasitage) ainsi que de la gestion des troupeaux (déstockage). • Le secteur fait aussi face à un déficit grandissant en ressources fourragères des pâturages naturels. En principe, le disponible en pâturages naturels couvre les besoins du cheptel national. Ce disponible n’est en fait que partiellement accessible par le bétail pour diverses raisons : (i) le faible maillage des points d’eau en zone sahélienne ; (ii) les feux de brousse qui détruisent chaque année de vastes superficies et induisent une perte énorme en biomasse ; (iii) la faible valeur fourragère des pâturages en saison sèche. De plus, avec le changement climatique, les disponibilités en fourrages ont diminué au cours des dernières décennies et devraient continuer à diminuer à l’avenir. Finalement, la croissance du cheptel se heurte à une compétition grandissante avec les activités agricoles pour l’accès au pâturages et à l’eau à cause de la pression démographique. L’élevage se trouve ainsi de plus en plus confiné dans les zones marginales du pays, souvent sous- équipées en point d’eau65. La progression de l’agriculture entraine aussi l’obstruction des passages d’animaux pour l’accès aux pâturages et aux points d’eau, ce qui occasionne des conflits agriculteurs-éleveurs de plus en plus fréquents. Les solutions possibles résident dans (i) la clarification par l’Etat de la notion de propriété des espaces pastoraux dans le cadre de la Charte pastorale66 ; (ii) la mise en Å“uvre d’une politique d’hydraulique pastorale qui prenne en compte d’une part la cohérence nécessaire entre les ressources en eau et fourragères et la charge en bétail ; et (iii) l’élaboration et la mise en Å“uvre participatives de schémas d’aménagement pastoraux permettant une affectation consensuelle de l’espace dans le temps selon les différentes activités productives. • L’enjeu principal pour les élevages sédentaires intégrant agriculture et élevage et les élevages péri- urbains, est celui de l’intensification des productions tout au long de l’année. Pour cela, les actions nécessaires sont : l’amélioration des races (y-compris par la réhabilitation du programme d’insémination artificielle au profit d’un plus grand nombre d’éleveurs) ; l’amélioration de l’alimentation et de la couverture sanitaire du bétail 67; la professionnalisation des acteurs, par la 64 Des programmes d’amélioration génétique ont déjà été menés par l’IER et les producteurs prives ont aussi procédé à des importations de races exotiques (Holstein, Montbéliarde, etc.) pour une exploitation en race pure et en croisement. Des programmes d’insémination sont entrepris à partir des semences congelées de Montbéliard... Genetic improvement programs have been established with the objective to create genotypes capable of producing more milk and meat. To improve the size and productivity of local breeds, the practice of crossbreeding indigenous breeds with breeds imported from Europe has been adopted. Government and donor programs have deployed efforts to promote artificial insemination by importing quality semen from Europe, Morocco, and the US to inseminate local genotypes. Newly trained artificial inseminators are employed to perform in this specific activity. This practice is particularly dominant in the peri-urban dairy value chain. In 2017, a total of 14,194 cows were inseminated with dairy producing breed semen against 1,153 cows with meat producing breed semen. The program reached 3,482 breeders 7 Nevertheless, veterinary and animal health services are geographically dispersed and particularly weak, leading to high rates of cattle disease. 65 Dans les zones d’inondation et de décrue du delta, cela conduit à une occupation systématique des bourgoutières par la riziculture. 66 La charte pastorale adoptée en 2001 consacre les droits essentiels des pasteurs en matière de mobilité du bétail et d’accès aux ressources pastorales tout en définissant les obligations qui leur incombent en ce qui concerne la préservation de l’environnement et le respect des biens d’autrui en général et des agriculteurs en particulier. Cependant, tout en reconnaissant aux pasteurs les droits d’accès aux ressources pastorales, elle ne leur confère pas le droit de propriété des sols qui portent ces ressources, laissant ainsi tout entier la problématique de l’appropriation foncière dans le domaine de l’élevage. Ces contraintes incitent les populations nomades et pastorales à abandonner leurs activités d’élevage au profit d’une sédentarisation dans l’agriculture ou d’autres activités et menace l’avenir des élevages pastoraux, seuls capables de valoriser les maigres ressources du nord. 67L’approche pourrait être de promouvoir une meilleure alimentation des bÅ“ufs de labour et l’embouche paysanne par la valorisation des sous-produits agricoles (en particulier par l’ensilage, etc. Pour l’élevage péri -urbain (lait, embouche), déjà semi-intensifié et strictement commercial, seule une meilleure disponibilité peut être une réponse adéquate. A l’heure actuelle, la disponibilité en aliments bétail (tourteaux de coton, mais, mélasse, farine basse et son de riz) demeure insuffisante. Il est nécessaire de mettre en place une meilleure intégration avec les chaînes de valeur du riz et du maïs pour 35 formation et l’amélioration des circuit de commercialisation ; et l’accès au crédit à des conditions appropriés. Filière Viande. 56. Jusqu’à présent, le Mali n’a pas encore réussi à développer ses les exportations de viande dans la sous-région et la plus grande partie des animaux sont exportés vivants vers les pays partenaires, où ils sont abattus et leur viande et sous-produits vendus. Dans la mesure où ce sont les opérations de transformation qui créent la valeur ajoutée la plus importante (viande mais aussi cuirs et peaux), cela représente pour le Mali une perte importante en termes de croissance et de recettes d’exportation. Les obstacles à l’exportation de viande sont nombreux : manque d’infrastructures d’abattage et conditionnement respectant les normes sanitaires requises ; capacité du secteur à fournir des quantités suffisantes d’animaux sains et de poids suffisants ; chaine de froid déficiente … De plus, les exportations maliennes de viande se heurtent à une double concurrence sur ses marchés d’exportation (les grands centres de consommation des pays côtiers): (i) tout d’abord, la concurrence des importations extracommunautaires de ces pays (viandes fraiches et congelées) qui respectant les normes sanitaires requises et arrivent à des prix très compétitifs ; et (ii) la concurrence des acheteurs de viande sur pied des pays côtiers qui sont capables de payer des prix élevés pour les animaux car ils peuvent profiter d’une part de la valorisation du « cinquième quartier » (abats comestibles, peaux brutes et sabots) par les abattoirs modernes qui se trouvent dans ces pays68. 57. Si un développement rapide des exportations de viande semble encore difficile à envisager dans le court-terme, la demande nationale de viande est en croissance régulière et devrait fournir une bonne base pour l’industrie nationale. On estime que la demande nationale en viande (rouge et blanche) est satisfaite fournie à 65% par les bovins, 14,55% par les volailles, 11% par les caprins, 8% par les ovins, 1% par les porcins et 0,35% par les camelins. Elle a cru de plus de 5% par an pendant la dernière décade (200 000 tonnes en 2016 soit environ 12 kg/habitant). Elle devrait continuer à croitre fortement avec la croissance démographique, l’urbanisation et le développement de la classe moyenne -- pour atteindre près de 20 kg par habitant en 2030. La consommation nationale est approvisionnée pour plus des trois quarts surtout par des abattages effectués sans contrôle sanitaire, en famille et/ou par des bouchers locaux. Ces abattages non-contrôlés sont réalisés par des opérateurs informels qui évitent les couts associés à l’utilisation d’abattoirs modernes. Ils ne sont soumis à aucune mesures d’hygiène. Les abattages contrôlés sont effectués dans des infrastructures « modernes » qui approvisionnent les bouchers ciblant la classe moyenne urbaine. Toutefois, les diagnostics de ces abattoirs « modernes » font ressortir un état de dégradation assez avancé au niveau des bâtiments et des équipements (chaines de découpe, stockage réfrigéré), des pratiques sanitaires très souvent ignorées et d’importants problèmes environnementaux (traitement des eaux usées). Un important programme de mise à niveau de la filière « viande » nationale semble donc urgent. Ce programme devrait inclure une amélioration drastique de l’ensemble de l’environnement technique et institutionnel – mise en place d’infrastructures appropriées, disponibilité des services de base (électricité, eau), contrôle des abattage clandestins – pour permettre l’émergence d’une chaine moderne. De plus, le développement de la filière viande dépendra fortement, en amont, de la capacité des producteurs à fournir des animaux saints, d’un poids important, et en quantités suffisantes. De nouveaux opérateurs sont cependant apparus récemment pour le développement d’embouche industrielle (comme Afrique Color) ou l’implantation d’abattoirs modernes comme ceux de Laham Industries qui fournit la distribution moderne (supermarchés et ses propres points de vente) et exporte garantir que la disponibilité des aliments de bétail puisse soutenir l’approvisionnement abattoirs en animaux d’une taille et d’une qualité qui leur permettent de se rentabiliser 68 Le « cinquième quartier » est très périssable, ce qui rend son exportation coûteuse sous toute autre forme que celle du bétail sur pied, bien que quelques peaux brutes de bovins soient exportées vers le Ghana pour la consommation humaine. 36 même au Sénégal69. Ces entreprises pourraient former la base du développement des exportations de viande dans la sous-région. Filière cuirs et peaux. 58. Le développement de la filière peaux et cuirs représente une importante opportunité pour la valorisation des sous-produits de l’élevage et la compétitivité de toute la filière viande nationale. Le Mali exporte encore très largement des peaux brutes (d’ovins de caprins et de bovins) vers le Ghana, la Côte d’Ivoire et le Sénégal, où elles sont transformées. Les peaux brutes pour le marché local ou pour l’exportation sont collectées par un réseau de collecteurs informels qui s’approvisionnent auprès des abattages traditionnels. Elles sont donc de mauvaise qualité car issues d’un bétail très médiocre et d’un abattage qui ne permet pas d’obtenir des peaux de qualité acceptable. Un grand nombre de petites tanneries traditionnelles fournissent le marché local en cuir de basse qualité. Il existe aussi un petit nombre de tanneries industrielles qui produisent un volume limité d’exportations de cuirs et peaux tannés en « wetblue » (premier stage de tannage) à destination de la Chine, de la France et de l’Italie. La taille du cheptel du Mali constitue potentiellement une importante source de croissance économique par la production et l’exportation de produits transformés utilisant les peaux de bonne qualité comme matière première. Filière lait. 59. Le Mali est le plus gros producteur de lait de la zone UEMOA avec une production d’environ 1,4 milliards de litres de lait (bovins, caprins et camelins). La production est assurée essentiellement par les élevages traditionnels (90%) et seulement 10% par les élevages semi-intensifs qui se sont développés autour des centres de consommation urbains. La production est largement autoconsommée, avec une quantité commercialisée estimée à environ 800 millions de litres (dont 60% par les bovins). La commercialisation comprend deux circuits : (i) un circuit court local (lait frais, lait caillé, beurre ou fromage) en milieu rural animé par les femmes des ménages impliqués dans l’élevage traditionnel ; (ii) un circuit contrôlé par les laiteries installées dans les zones urbaines qui organisent la collecte, la pasteurisation, l’emballage et la distribution du lait des producteurs péri- urbains (qui reconditionnent aussi et distribuent le lait importé). 60. La part de la production nationale qui approvisionne les centres urbains est faible, environ 10% soit 140 millions de litres (auxquels s’ajoute le lait importé). Mali Lait, une entreprise publique, s’approvisionne auprès de producteurs autour de Bamako. Les laiteries modernes privées (environ 30 unités industrielles et une centaine d’unités artisanales)70 ont été installées dans la plupart des centres urbains du pays avec l’appui de Partenaires Techniques et Financiers et d’ONG. Elles s’approvisionnent dans un périmètre relativement faible (30 km environ) qui exclut de ce fait la vaste majorité des éleveurs maliens. afin de permettre aux producteurs péri-urbains d’écouler leur production. 61. La production nationale de lait cru ne peut pas satisfaire la demande nationale. La demande en produits laitiers est en forte croissance (estimée à 1,6 millions de litres, soit 75 litres/personne et par an), tirée par la croissance démographique, l’urbanisation et l’évolution des habitudes alimentaires en milieu urbain. La production nationale doit donc être complémentée par des importations de poudre de lait qui ont pratiquement doublé pendant la dernière décennie et qui atteignent aujourd’hui 69 De nouveaux opérateurs sont cependant apparus récemment pour le développement d’embouche industrielle (comme Afrique Color) ou l’implantation d’abattoirs modernes comme ceux de Laham Industries qui fournit la distribution moderne (supermarchés et ses propres points de vente) et exporte même au Sénégal. La compagnie, installée à Kaye, possède d’importants entrepôts frigorifiques et une chaine de distribution à Bamako (« le carre fermier ») mais fonctionne actuellement à un bas niveau d’activités, à cause de difficultés d’approvisionnement en bêtes de qualité. Elle tente de développer ses propres activités d’embouche et un réseau de fournisseurs. 70Par exemple, Danaya Nono, un réseau de collecte de lait frais a été appuyé le Centre Internationale de Développement et du Recherche (CIDR), une ONG française. La Laiterie de Kasséla est une a coopérative de producteurs située à 40 km de Bamako qui a reçu l’appui de VSF Suisse. 37 20 000 tonnes (soit 200 millions de litres équivalent). Il semble donc exister des opportunités importantes pour développer la filière lait nationale. Toutefois, la production nationale souffre (i) de la mauvaise performance des races locales, de leur mauvais état sanitaire et de leur mauvaise alimentation ; (ii) de la saisonnalité de la production; (iii) des difficultés de collecte dues à la forte mobilité des troupeaux et aux difficultés d’accès aux zones de production ; et (iv) de la faible structuration de l’amont de la filière qui ne permet ni de réaliser des économies d’échelle dans le groupage des productions, d’organiser la chaine du froid ou la traçabilité des produits. Ces difficultés se traduisent par des couts élevés et des prix faiblement rémunérateurs pour les producteurs, mais aussi par de fortes incitations pour les unités industrielles à se tourner vers la reconstitution de lait en poudre importé, moins couteux à produire et plus facile à commercialiser71. 62. Le développement de la filière demandera donc un programme ambitieux pour lever les contraintes à tous les niveaux de la chaine de valeur. Ce programme pourrait inclure : (i) l’amélioration de la productivité des élevages par insémination artificielle ; (ii) la création d’unité de fabrication d’aliment bétail ; (iii) la formation et la structuration des producteurs ; (iv) la mise en place des infrastructures et contrôles nécessaires assurer la sécurité sanitaire des produits (traitements vétérinaires, techniques d’hygiène du troupeau, de la traite, du transport et du conditionnement). Il semble qu’il soit opportun d’accorder dans le court terme une priorité élevée au développement de la filière péri-urbaine, mieux structurée, plus accessible et favorable à un partenariat public-privé efficace. Filière Aviculture. 63. D’importants efforts ont été faits par le gouvernement pour soutenir le développement de l’aviculture pour augmenter la consommation de protéine de la population72. La production nationale a aussi été favorisée par l’interdiction, dès 2004, d’importer de la viande blanche. Les effectifs, toutes espèces confondues (poulets, pintades…), ont ainsi connu une croissance soutenue depuis le début des années 2000, à l’exception de l’épisode de la grippe aviaire en 2006, passant de 20 millions de têtes en 2001 a environ 47 millions aujourd’hui (une croissance de 4% par an en moyenne). Il existe deux grands systèmes de production avicole : (i) l’aviculture traditionnelle, qui est pratiquée en milieu rural et qui représente environ 85% du nombre total d’animaux (40 millions) ; et (ii) l’aviculture moderne, localisée autour des grands centres urbains (Bamako, Ségou, Sikasso et Mopti), qui compte environ 7 millions de têtes (15%). Ces deux systèmes produisent à la fois des Å“ufs et des poulets. Les données consolidées donnent une production annuelle d’environ 50 000 tonnes de viande de volaille (dont 30 000 tonnes de poulets traditionnels et 20 000 tonnes de poulets de chair). On peut donc estimer une consommation de 2,5 kg /personne/an, un peu plus bas que la moyenne africaine (3,3 kg). Selon les estimations faites par le Conseil national du patronat du Mali (CNPM)73, la production d’œufs des fermes avicoles modernes pour la consommation urbaine pourrait être de près de 1,8 milliard par an 74. A cette production commercialisée, il faut ajouter les Å“ufs issus de l’élevage familial traditionnel qui sont auto-consommés ou gardés pour la reproduction. 64. L’aviculture familiale est extensive, avec peu ou pas d’investissements. Les effectifs varient de quelques têtes à quelques dizaines de têtes de races locales. Les volailles doivent couvrir leurs besoins alimentaires avec la divagation. Les pertes dues aux maladies et aux prédateurs sont très élevées (50% et plus). L’aviculture villageoise est considérée principalement comme une importante 71 Par exemple, Mali-Lait, qui représente pour les producteurs un débouché majeur pour écouler leur lait, utilise 75% à 80% de lait en poudre dans ses productions. 72 investissements importants à l’aviculture à travers divers projets dont le Programme de Développement de l’Aviculture au Mali (PDAM) et plus récemment le Programme Spécial de la sécurité alimentaire (PSSA) mis en Å“uvre avec l’appui de la FAO (FAO Mali, 2003 ; PSSA Mali, 2004). 73 Etude de marché pour la filière volaille, 2016. 74 Consommation urbaine par habitant estimée à 230 Å“ufs/an 38 source de protéine et de revenus en milieu rural et comme un instrument privilégié de lutte contre la pauvreté. Il existe aussi une « aviculture villageoise améliorée », surtout en zone péri-urbaine, qui se caractérise par son caractère économique plus affirmé, avec une amélioration génétique par voie de croisement (avec des coqs améliorateurs) et des compléments alimentaires. Les performances de l’élevage villageois sont très faibles. L’élevage villageois amélioré est plus performant, avec un meilleur taux de survie (75%), un poids vif des volailles plus élevé (de l’ordre de 1,5 à 2,5Kg à 6 mois). 65. Le secteur avicole moderne, que ce soit pour la production de poulets de chair ou d’œufs, inclut quelques grandes exploitations de plus de 20 000 têtes, mais se compose en majorité d’unités plus petites (autour de 5 000 têtes). Ces exploitations utilisent des techniques modernes d’élevage et observent des normes techniques satisfaisantes (santé, alimentation, hygiène, habitat, souches sélectionnées, etc.). Au niveau national, sept accouveurs se partagent le marché des poussins de un jour75. Avec une production annuelle de poussins d’environ 2 millions/an, la production nationale de poussins de un jour ne permet de couvrir que 40 % de la demande, le complément étant assuré par l’importation. Le secteur de production d’aliment volaille englobe de nombreuses unités avec des niveaux d’équipement et des capacités variables. La production est faite à base de maïs, de farine de poisson, de tourteau de coton, de concentrés (le concentré de soja est utilisé à cause de la qualité de la farine), de son de blé ou de riz, de sel… Le maïs constitue la principale source alim entaire de la volaille, entrant pour plus de 50% dans la formulation alimentaire de la volaille. Les services vétérinaires sont rendus par des vétérinaires privés contre rémunération. Les produits de traitement concernent les additifs alimentaires, les vaccins, les antibiotiques et les vitamines. Les pharmacies vétérinaires sont présentes dans les différentes régions du pays, mais à cause des besoins de la chaine de froid, des ruptures de stock de certains produits sont fréquentes. 66. Les intervenants de la filière avicole sont nombreux – producteurs, provendiers, accouveurs, marchands de volailles et/ou d’œufs, abatteurs – pour certains organisés en associations/coopératives. Les grands acheteurs de poulet de chair sont : (i) les restaurateurs, cantines, hôtels et supermarchés ; et (ii) de grands grossistes spécialisés dans la vente des volailles locales. Le transport au marché se fait à travers tous les moyens possibles de transport (bicyclette, motocyclette, minibus et « taxi-brousse » etc.). Le manque de chaine de froid entraine des pertes importantes. Il existe quelques marchés modernes, dont le marché à volailles de la commune III du district de Bamako qui dispose d’une chaîne d’abattage industriel permettant de conditionner les volailles selon les normes d’hygiène requises, mais la grande partie des échanges ont lieu sur les marchés locaux, autour desquels des abattoirs informels s’organisent, ce qui favorise la dissémination des maladies contagieuses. 67. Le Mali n’importe en principe pas de viandes blanches ou d’œufs de consommation76. Malgré cette interdiction, il y a encore d’importantes importations incontrôlées de viande de volaille, comme dans la plupart des pays ouest. Les importations portent sur des sous-produits de découpe (ailerons, croupions…) qui n’ont qu’une très faible valeur sur le marché européen, et sur des poulets entiers congelés provenant principalement du Brésil et des autres pays du Mercosur dont les coûts de production sont très bas. Ces produits sont consommés dans les grands centres urbains où ils concurrencent les productions locales. 68. A l’avenir, l’accroissement de la population, l’urbanisation et le changement des habitudes alimentaires devraient soutenir un fort accroissement de la demande en produits avicoles (poulets de chair, Å“ufs), surtout en zone urbaine. Avec une croissance urbaine de 4% par an et l’augmentation prévisible des revenus, la demande pourrait s’accroire de 5% par an, c’est-à-dire doubler en moins de 75 Mali poussins, la société SODOUF, Veto–services, Weredougou Sarl). Parmi ces sept unités, seule la Société SODOUF dispose d’un élevage de reproducteurs. Les six autres unités fonctionnent à partir d’œufs fécondés importés d’Allemagne, de la Hollande, du Portugal, du Brésil, du Sénégal, de la France, de la Côte d’Ivoire, etc. 76 Conformément à l’Arrêté Interministériel N°09-1651/MIIC-MEF-MEP-MSIP portant interdiction d’importation et de transit des oiseaux et produits avicoles du 08 Juillet 2009. 39 15 ans. Des actions devraient donc être menées afin que cette demande ne se traduise pas par des besoins croissants en importations. Les principales contraintes auxquelles les acteurs du secteur sont confrontés pour augmenter la production et la compétitivité sont : (i) l’inefficacité des contrôles sur les importations de produits extra-communautaires ; (ii) la forte dépendance du pays à l’importation des poussins d’un jour ; (iii) l’insuffisance de l’appui technique aux producteurs pour assurer un suivi technique et sanitaire des élevages ; (iv) la disponibilité insuffisantes d’équipements (poulaillers normés, batteries d’élevage) et des aliments ; (v) l’inexistence de la chaine de froid pour la distribution des poulets de chair et l’insuffisance du plateau technique d’abattage de volaille ; (vi) ne structuration in suffisante des chaines de valeur ; et (vii) le manque d’ accès au crédit pour les investissements et les fonds de roulement. Des programmes de développement du secteur ont déjà été proposés dans les successives stratégies adoptés par le gouvernement77. Leur mise en Å“uvre devrait permettre une modernisation profonde du secteur pour prendre en compte les mutations économiques, sociale et environnementales en cours et à venir. 3. Production halieutique. 69. Le Mali est le troisième pays africain producteur de poisson d’eau douce. Le pays est doté d’un fort potentiel halieutique continental. La contribution du sous-secteur au Produit Intérieur Brut (PIB) Agricole est estimée à 5 % (INSTAT). La filière halieutique malienne se décompose en deux principales branches : (i) la pêche dans les fleuves et les plaines d'inondation ; et (ii) la production de poisson dans les retenues d'eau qui ont été empoissonnées pour une pisciculture extensive ainsi que, de façon encore limitée, une aquaculture moderne. Selon les estimations les plus récentes, le sous- secteur (transformation et commercialisation comprises) fournit des emplois à environ 350 000 actifs (en équivalent temps plein), soit 4,5% des actifs maliens, auxquels il faut rajouter les pêcheurs occasionnels et les emplois indirects. La production est essentiellement une activité pratiquée par les hommes, les femmes dominant la transformation (fumage et salaison) et la commercialisation. La filière est une source importante de revenus pour des ménages pauvres et fait une contribution significative à la sécurité alimentaire et nutritionnelle du pays78. Pèche continentale 70. La pêche s’effectue dans les bassins fluviaux des fleuves Niger et Sénégal), autour de trois pôles principaux : le Delta Intérieur du Niger (DIN), la zone de Gao et la zone de Sikasso. Le DIN couvre une superficie de 40 000 km2 en inondation maximale et constitue la première zone de pêche du Mali (et une des premières en Afrique). Il fournit plus des 2/3 des captures du pays, suivi de la zone de Gao (30%). La région de Kayes représente une faible part de la production avec le lac Manantali. Les autres régions (la région de Sikasso avec le lac de Sélingué, la zone de Koulikoro, les affluents du fleuve Niger, les zones inondables et de lacs secondaires) jouent un rôle important pour la sécurité alimentaire des riverains. A la production des fleuves et des plaines d'inondation s’ajoute une production « piscicole » dans les retenues d'eau, par empoissonnement naturel (apporté par les eaux de la crue) ou artificiel (à partir d'alevins élevés dans des marres ou en bassin). Cette activité y constitue une activité d'appoint à l'agriculture, pratiquée à la fin de la décrue (fin de l'année calendaire). 71. Production et Consommation. Le Mali a consommé en moyenne 150 000 T de poisson par an sur la période 2013 à 201779, ce qui correspond à une consommation de 9 kg/an/habitant. On peut donc estimer que la demande nationale est actuellement de l’ordre de 200 000 tonnes/an. Les 77 2001, adoption de la Charte pastorale ; 2003, adoption d’une politique nationale de développement de l’élevage (PNDE) pour la période 2004-2009 ; 2006 : adoption d’une Loi d’Orientation Agricole (LOA) stipulant que des aménagements pastoraux et ouvrages hydrauliques doivent être réalisés dans les zones d’élevage ; hydrauliques doivent être réalisés dans les zones d’élevage ; 2010: Elaboration de la Politique de Développement Agricole et du programme d’investissement prioritaire dans le secteur agricole 2011-2015 (PNIP-SA), qui comprend un fort volet productions animales. 78 Le poisson séché constitue la principale source de protéine accessible par les ménages très pauvres vu que son prix est plus bas que celui du poisson frais ou de la viande. 79 Instat-Mali, Recueil des données du système d’informations sur la Pêche et l’aquaculture (SIPA) (2013-2017) 40 captures annuelles de sont de l’ordre de 100 000 tonnes, avec des variations annuelles importantes en fonction de la pluviométrie et du débit du fleuve Niger. Comme le montre le tableau ci-contre, le fort déficit est comblé dans une faible mesure par l’aquaculture (5000 tonnes/an) mais surtout par les importations. Ces dernières se font essentiellement sous forme de poissons entiers congelés en provenance des pays voisins côtiers (Sénégal, Mauritanie) ou d’Asie (Chine, Thaïlande, Viet Nam). 72. Les acteurs de la filière recouvrent plusieurs types d’activités. Le pêcheurs peuvent être classés selon leur niveau d’investissement, leur temps de pêche, leur mobilité et leurs sources de revenus : les pêcheurs professionnels (sédentaires et migrants), les pêcheurs occasionnels et les agro- pêcheurs. On distingue 4 chaînes principales : la pêche riveraine, approvisionnée par des pêcheurs occasionnels qui pratiquent une pêche de subsistance bien qu’ils puissent aussi revendent une partie de leur capture ; la pêche fluviale, faite par des pêcheurs professionnels sédentaires ou migrants ; et les agro-pêcheurs qui opèrent dans les zones inondées et lacustres. Ces deux derniers types de pèche alimentent la chaîne de poisson frais ou fumé à destination des marchés urbains et ruraux. L’importation du poisson congelé repose sur un très petit nombre de grossistes-importateurs basés à Bamako. Figure No16 : 73. La commercialisation du poisson frais ou fume est dominée par les femmes. Le poisson est commercialisé frais, fumé ou séché. Le transport du poisson frais se fait dans des paniers tressés à la main et parfois dans des caisses en polystyrène avec un peu de glace surtout en saison chaude. Le conditionnement (fumage, séchage) est fait sur les lieux de pêche et est rudimentaire, ce qui peut engendrer des problèmes de conservation et de sécurité sanitaire. La situation des pêcheurs dans la chaine de valeur est assez précaire car ils dépendent souvent des acheteurs qui leur accordent des crédits pour financer le matériel de pêche et les dépenses du foyer et à qui ils doivent l’exclusivité des ventes (leur capacité de négociation est ainsi très faible). Aussi, malgré l’existence d’une Politique sectorielle nationale80, les moyens donnés aux institutions publiques locales et au personnel technique d’appui aux pêcheurs sont insuffisants (la pêche apparaît comme un “parent pauvreâ€? de l’agriculture. Aussi, bien qu’une loi ait été adoptée (2014) d’une loi déterminant les principes et les conditions de gestion de la pêche et de l’aquaculture, les lois et règlements en faveur d’une meilleure gestion des ressources naturelles sont mal connus et peu appliqués. Un grand nombre de pêcheurs n’ont pas de permis de pêche et/ou échappent au contrôle du gouvernement. Les conflits entre les pécheurs et les autres usagers de l’espace sont aussi de plus en plus nombreux. 74. La demande en produits de la pêche devrait continuer à croitre fortement. Avec une population, estimée à plus de 23 et 40 millions en 2025 et 2050, la demande devrait atteindre 250 et 80 Politique Nationale de développement de la pêche et de l’aquaculture (PNDPA) . 41 400 000 tonnes par an respectivement (sur la base d’un niveau de consommation de 10kg/an/hab.). Si la production nationale devait se maintenir au niveau actuelle (100 000 tonnes), le déficit devrait être comblé par des importations de plus en plus importantes. Le développement durable de la production nationale se heurte cependant à plusieurs problèmes de fonds. Premièrement, l’état des stocks halieutiques est mal connu et complexe à établir à cause des multiples facteurs qui agissent sur la capacité de la ressource à s’adapter à la pression de pêche. Il semble toutefois que cette dernière, souvent avec l’utilisation d’engins de petites mailles, ait déjà engendré une raréfaction de certaines espèces de poissons (Gymnarchus, Heterotis…). D’autres activités comme l’extraction d’or et le dragage de sable ont aussi un impact négatif sur la ressource et il est urgent que des mesures de protection/conservation soient prises. De plus, le débit du fleuve Niger semble avoir baissé au cours de la dernière décennie et les importants changements climatiques prévus dans l’avenir pourraient se traduire par une baisse importante du taux d’exploitation durable de la ressource81. Deuxièmement, des méthodes de pêche et de commercialisation peu efficaces, ainsi que le manque d’infrastructures appropriées, engendrent de nombreuses pertes. Aussi, les poissons congelés importés se vendent moins chers que les poissons locaux. Ils approvisionnent efficacement les marchés de Bamako et des autres centres urbains, alors que la production locale est pénalisée par les défaillances des infrastructures de transport et de froid (en particulier pour le poisson frais). La grande majorité des consommateurs urbains ont encore des niveaux de revenus assez bas qui les incitent à se tourner vers le poisson importé. Finalement, la production est freinée par les conflits fonciers pour l’accès à la ressource qui se sont exacerbés ces dernières années et continuent à s’amplifier avec la densité croissante de la population (plus d’un million de personnes vivent dans le delta intérieur) et l'incompatibilité des usages. La filière piscicole 75. L’intérêt pour la pisciculture au Mali date de la fin des années 1970, à la suite à plusieurs épisodes de sècheresse ayant entrainé une baisse de la production halieutique nationale. Plusieurs projets financés par des bailleurs internationaux ont été mis en Å“uvre jusque dans les années 2000. Ces projets ont eu des résultats mitigés, à cause du manque de capacités, tant des services d’encadrement de l’Etat que ces acteurs privés, et l’absence de fournisseurs d’intrants de qualités (alevins, aliments spécialisés). La situation s’est cependant améliorée depuis que des promoteurs privés ont lancé des activités de pisciculture intégrée (avec l’appui d’une assistance technique internationale subventionnée). La production piscicole s’élevait à 4 200 tonnes pour la campagne 2016/2017 et pourrait être d’environ 5 000 tonnes actuellement. Elle se concentre dans la région de Ségou. Elle provient de deux types de fermes piscicoles : (i) les fermes piscicoles spécialisées (plus d’une vingtaine aujourd’hui) qui ont investi dans des infrastructures modernes permettant la production d’alevins et d’aliments en plus des bassins ou cages flottantes de production de poisson. Ces exploitations tirent leur revenu exclusivement de la vente d’intrants de pisciculture (alevin, aliments, équipement) et de leur production de poissons ; et (ii) les exploitations familiales ayant diverses activités d’agriculture ou d’élevage et qui ont installé une ou plusieurs unités de production de poisson (cage flottante ou bassin). Ces exploitations achètent les intrants (alevins, aliments, équipements) aux entreprises spécialisées. Plusieurs unités de production d’aliment pour poisson et d’alevins existent dans le pays82. La plupart des fermes intégrées proposent des formations à destination des pisciculteurs. Les deux espèces de poissons produites sont le Tilapia et le Silure (Clarias). Le poisson est commercialisé entier, en général frais pour le tilapia ou fumé pour le clarias. 81 Si l’on sait que l’hydrologie du delta et l’étendue de ses crues conditionnent fortement les stocks de poissons, le fonctionnement exact des écosystèmes reste mal étudié. De même, l’effet de la construction de barrages en amont ou de l’ensablement n’est pas appréhendé avec précision. Les impacts sur les stocks de poissons ne sont donc appréhendés que très généralement. 82 La plus importante recensée est l’exploitation de la famille Diallo qui a installé une unité spécialisée sur l’aliment piscic ole d’une capacité de 30 000T à Baguinéda (à 30km à l’est de Bamako) et une écloserie pouvant produire 40 millions d’alevins par an. Il existe d’autres fermes piscicoles ayant intégré en plus de la production de poisson de table, la production d’alev ins et d’aliments de capacité plus ou moins importante. 42 Figure No17 76. Le défi de la filière piscicole est de réussir à proposer un poisson plus compétitif que les importations. Par l’importance de son potentiel, l’aquaculture devrait devenir une activité économique à part entière, offrant d’importantes opportunités de diversification des productions animales et de créations d’emplois et de revenus en zone rurale. Le développement de l’aquaculture moderne, intensive, devrait être soutenue car elle joue aussi un rôle central d’entrainement pour les autres formes de pisciculture traditionnelle et/ou semi-intensive en lui fournissant un accès aux intrants ainsi que des services d’appui (rôle très important au vu de la faiblesse des services publics. Un autre axe d’intervention prometteur semble être un appui au développement de la pisciculture artisanale ou à l’exploitation en étangs, semi-intensive. La pisciculture artisanale suscite un intérêt croissant de la part des populations rurales dans des régions possédant des conditions naturelles (topographie, disponibilité de ressources en eau, etc.) favorables et où le poisson de capture est rare et cher. Elle ne requiert pas de gros investissements de départ, l’ensemencement des plans d’eau se fait par capture des alevins et fretins de poissons lors des épisodes de crue et l’itinéraire technique est simple à maîtriser. Cette technique est rentable grâce à des coûts d’intrants relativement bas et à des frais de fonctionnement minimisés. L’exploitation semi-intensive en étangs consiste à exploiter des étangs creusés, avec une bonne maîtrise de l’eau. Elle implique des investissements significatifs, une maîtrise de l’ensemble du cycle de production, l’utilisation d’alevins et d’aliments et la mise en marché régulière du poisson. Axes principaux d’un appui au développement des filières halieutiques 83. 77. Le développement de la production halieutique du Mali demandera un programme d’actions cordonnées pour assurer la compétitivité de la chaine de valeur ainsi que la pérennité de la ressource.. Ce programme inclurait : (i) le renforcement de la capacité des services publics (connaissance et suivi de la ressource, l’appui aux opérateurs de la filière…) et la relance de programmes de recherche pour une meilleure gestion des ressources et le développement de technologies et itinéraires techniques appropriés ; (ii) la mise en place d’infrastructures de mise en marché (débarcadères, chaine du froid, marchés à poisson) ; (iii) la promotion d’unités de production d’aliment poisson, d’alevin et de glace industrielle dans chacune des grandes régions productrices ; (iv) la définition de normes sanitaires à tous les échelons de la filière et la mise en place d’un système de traçabilité ; (v) le renforcement des capacités des organisations professionnelles, avec la mise en place 83 Le développement de la pisciculture est entravé par une série de contraintes largement similaires à celles qui freine le développement du secteur halieutique dans son ensemble avec de plus des contraintes plus spécifiques comme la promotion de systèmes de productions bien adaptés et à faible impact environnemental, et l’amélioration de l’accès aux alevins et aux aliments de qualité, l’accès aux alevins et aux aliments de qualité. 43 un cadre de concertation et la création d’une interprofession pour la filière ; (vi) l’amélioration des conditions d’accès au crédit d’investissement et de fonds de roulement (pour réduire la dépendance des pêcheurs aux crédits des acheteurs) ; et (vii) l’appui au passage à un système de gestion collective de la ressource halieutique ainsi que de l’accès à l’eau et aux ressources foncières, tenant compte de l’ensemble des usagers pour limiter les conflits entre utilisateurs de ces ressources. E. La structuration du secteur agricole. 78. Il existe un nombre très important d’organisations agricoles au Mali (groupements, associations, coopératives, syndicats, etc.). Les mouvements associatifs ont été encouragés depuis la période coloniale, certaines organisations s’appuyant sur les formes d’organisation traditionnelles (les tons), d’autres initiées par le colonisateur (sociétés indigènes de prévoyance). Au lendemain de l’indépendances, la politique agricole adoptée par l’État préconisait l’exclusion du secteur privé du secteur primaire, l’encadrement étroit du secteur associatif, la création de monopoles publics (exclusivité de l’achat), le contrôle strict des prix et des marges et la réglementation des importations et exportations. Les associations de producteurs sont alors apparues comme des appendices des organes gouvernementaux. Au début des années 1980, le gouvernement a cependant ouvert la voie à la libre-entreprise dans l’agriculture et le retrait d l’Etat de la gestion directe du secteur agricole. Cela a encouragé les initiatives collectives au niveau des producteurs84. L’émergence des Organisations professionnelles agricoles (OPA) structurées a été fortement appuyée depuis les années 199085 : (i) par la Chambre d’Agriculture : constituée en 1988 et restructurée en 1993 pour mettre en place une organisation décentralisée, avec des Chambres Régionales d’Agriculture (CRA) et une Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture du Mali (APCAM), (ii) par le Réseau des Organisations Paysannes de l’ Afrique de l’Ouest (ROPPA) qui a appuyé la création de la Coordination Nationale des Organisations Paysannes (CNOP) du Mali; et (iii) par les Partenaires Techniques et Financiers (PTF)86 . 79. Les Chambres d’Agriculture (Chambres Régionales et APCAM) sont l es interlocuteurs privilégiés de l’Etat et des opérateurs pour la mise en Å“uvre des politiques publiques. Elles ont deux missions principales : (i) une mission de représentation, pour la défense des intérêts des producteurs dans les prises de décision concernant le monde rural ; et (ii) une mission de structuration du monde rural afin de renforcer son pouvoir de négociation dans le cadre d'une économie de marché87. A l’heure actuelle, trente-deux organisations nationales sont enregistrées à l’APCAM (fédérations, Unions de coopératives ou interprofessions), couvrant l’ensemble des sous-secteurs (agriculture, élevage, pèche). Le réseau des chambres d’agriculture a initié un processus d’accompagnement des différents intervenants (acteurs et partenaires) en vue de susciter la création d’interprofessions 84 L’ouverture démocratique a permis que se développent de nouvelles formes de structuration du monde paysan à travers des dynamiques autonomes. La manifestation la plus remarquable de ce changement est marqué dès 1992 par la constitution du Syndicat des Cotonniers et Vivriers du Mali (SYCOV), puis quelques années plus tard par l’émergence du Syndicat des Exploitants Agricoles de l’Office du Niger, (SEXAGON). 85 On note ainsi l’adoption des textes, notamment : la loi n°01 -076/du18 juillet 2001 régissant les sociétés coopératives en République du Mali ; la loi n°04-038/du 05 aout 2004 relative aux associations ; la loi N°006 045/du 5 septembre 2006 portant Loi d'Orientation Agricole (ses articles N°173 à 179 sont relatifs aux interprofessions Agricoles) ; le Décret d’application N°793/P-RM du 31 Décembre 2008, fixant les modalités de création et d’enregistrement des organisations interprofessionnelles Agricoles. La ratification de l'Acte uniforme N°9 de l’OHADA relatif aux Droits des sociétés coopérativ es adopté le 15 décembre 2010 à Lomé et publié au journal officiel de l’OHADA le 15 février 2011. 86 Canada, France, Pays-Bas, Allemagne, Union européenne, Belgique, Royaume-Uni, États-Unis, Autriche, Suisse ; Banque mondiale et le Fonds international de développement agricole ; et de nombreuses organisations non gouvernementales qui travaillent avec des communautés rurales comme l’organisation belge SOS Faim. La coopération canadienne a été particulièrement active des 1995 dans le cadre du Projet d’appui à la commercialisation des céréale s au Mali (PACCEM) qui a permis la création en 1997 d’une organisation faitière nommée « Union Faso Jigi », « Espoir du peuple » en langue bambara ; et le projet Feere Diyara, qui signifie « La commercialisation a été bonne », qui a aidé à structurer la fi lière de l’échalotte largement dominée par les femmes. 87 L’Article 33 de la Loi d’Orientation Agricole stipule que : ‘‘ les Chambres d'Agriculture appuient l'émergence d'organisations professionnelles Agricoles, d'organisations de femmes rurales et de jeunes ruraux ainsi que la création d'organisations interprofessionnelles’’. 44 agricoles, qui sont les organisations les plus appropriées pour organiser les filières de la production, a l’accès aux intrants et services nécessaires (y-compris le crédit) à la mise en marche des produits88. 80. La Coordination Nationale des Organisations Paysannes (CNOP) du Mali a une action focalisée sur la défense des paysans et de l’agriculture familiale. Elle fonctionne comme une confédération, mais n'a pas de pouvoir hiérarchique sur ses organisations affiliées (l'identité et l'autonomie de chacune étant une donnée fondamentale). La CNOP a été très active dans la mise en place des cadres de concertation et d'échanges entre les OPA membres pour leur permettre de participer pleinement aux débats les concernant dans les politiques et programmes de développement les concernant. Elle a par exemple été un acteur central dans l’élaboration de la Loi d’Orientation Agricole (LOA), en y défendant la reconnaissance des exploitations familiales, l’équité sociale, la protection et la gestion des ressources naturelles, la sécurité foncière, et l’accès des producteurs aux services financiers. La CNOP mène aussi le combat contre les OGM, le brevetage du vivant et l’accaparement de terres. Elle est particulièrement vigilante sur le processus juridique et réglementaire de la « démarche qualité » pour la promotion de la compétitivité de l’agriculture malienne dans un contexte de globalisation des marchés. 81. Au niveau opérationnel, il existe un large éventail d’organisations paysannes ou professionnelles agricoles, (associations, coopératives, syndicats, groupements, etc.). Le paysage des organisations paysannes et rurales est très divers et en ajustement constant pour répondre aux changements du contexte économique et politique. Ces organisations peuvent prendre de multiples formes en fonction notamment de leurs missions, des acteurs qui les composent, de la délimitation géographique qu’elles couvrent. Il existe par exemple des organisations de type « syndicat » dont le but est le plaidoyer au profit de leurs membres : Association pour la Promotion des Filières Agricoles (APROFA) ; Collège des Syndicats Paysans ; Fédération Nationale des Femmes Rurales (FENAFER) ; Fédération Nationale des Jeunes Ruraux (FENAJR). Mais la plupart les organisations sont dédiées à des filières spécifiques 82. L’appui dont ont bénéficié les OPA maliennes a permis des progrès important dans la structuration du secteur agricole. Elles ont beaucoup Å“uvré à la reconnaissance de l’agriculture familiale comme modèle de développement et ont réussi à influer sur les textes de loi et la politique agricole. De nombreuses OPA ont aussi amélioré l’accès de leur membres aux intrants et même aux services financiers (comme la coopérative Faso Jigi au Mali, qui travaille sur les filières riz, oignon et échalote)89. Elles ont aussi été un instrument efficace pour la reconnaissance du rôle-clé des femmes dans les activités agricoles. Finalement, la mise en place d’organisations interprofessionnelles fortes est maintenant largement reconnue comme le moyen le plus efficace pour assurer une bonne coordination entre les différents opérateurs au sein d’une chaine de valeur (producteurs, transformateurs, commerçants, transporteurs, etc.) pour un meilleur accès aux technologies et intrants et une mise en marché efficace des productions (diffusion d’informations stratégiques, gestion de l’offre, normes de qualité des produits, partage de la valeur ajoutée). Un état des lieux du processus de mise en place des interprofessions agricoles au Mali a été réalisé par l’APCAM en 2017. A cette date, treize (13) filières avaient entamé la mise en place d’une interprofession : la mangue, l’échalote/oignon, la pomme de terre, la papaye, le riz, le karité, l’anacarde, la gomme arabique, le bétail/viande, le lait, le sésame, le maïs, le manioc. A cette date, seules deux Interprofessions avaient été reconnues officiellement pour les filières coton et anacarde. Les autres filières (mangue, échalote/oignon, pomme de terre, papaye, riz, karité, gomme arabique, bétail/viande, lait, sésame, maïs, manioc) étaient encore à l’état de « projet d’interprofession ». 88 Au Mali, deux textes régissent les interprofessions des filières agroalimentaires, il s’agit de la Loi d’orientation agricole (LOA) n°06/45 du 5 septembre 2006 et le décret n°08-793 P-RM du 31 décembre 2008, fixant les modalités de création et d’enregistrement des organisations interprofessionnelles agricoles. 89 La mise en marché collective des produits des membres stockés dans de bonnes conditions a garanti aux producteurs et productrices un réel pouvoir de négociation avec les acheteurs, un meilleur prix et, conséquemment, l’amélioration de leurs revenus. 45 83. Toutefois, malgré ces avancées, beaucoup reste à faire pour améliorer l’efficacité des OPA. Sur le plan interne, les organisations paysannes ont encore de nombreuses faiblesses. Leur gouvernance n’est pas toujours à la hauteur des enjeux et des attentes. Elles doivent améliorer leur légitimité en évitant les arrangements politiques de façon à garder leur indépendance du pouvoir en place. Les femmes et les jeunes peinent encore à participer à la gestion et la prise de décision. Au niveau de leur activités économiques, d’importants défis subsistent aussi. En particulier, l’accès aux financements dont elles ont besoin est encore très limité, à cause du manque de décentralisation des institutions financières mais aussi des risques perçus, tant ceux liés à l’activité agricole elle-même que ceux liés à la qualité de leur gestion. Cela les empêche de fournir à leurs membres les services (de conseil par exemple) dont ils ont besoin, pour pallier le désengagement de l’État, et de développer leurs activités, en particulier celles en aval de la chaine de valeur (commercialisation, transformation) qui leur permettraient de capturer une plus grande valeur ajoutée. F. La faible Intégration de l’agriculture malienne au marché. 84. Le Mali est en principe bien intégré dans le commerce régional et international. Il est membre de l’OMC depuis 1995 et des deux principales organisations régionales, la CEDEAO et de l’UEMOA. Il bénéficie aussi d’un traitement préférentiel sur les marchés européen dans le cadre des accords APC et américain dans celui de l’AGOA. Le Mali a largement libéralisé son commerce extérieur, notamment par le biais de l’adoption du Tarif Extérieur Commun (TEC) de l'UEMOA90. Au niveau de la CEDEAO (15 Etats Membres), les efforts d’intégration se poursuivent (Convention relative au transit routier inter-Etats des Marchandises, décision d’adopter un système de transit douanier régional (TRIE), harmonisation de repliements communs, en particulier dans le domaine des intrants et des normes sanitaires…)91. L’accord EU-ACP de Cotonou, signé en juin 2000 pour 20 ans, définit un partenariat commercial et économique entre l’UE et les pays ACP signataires et met en place un système de libre-échange entre l’UE et les ensembles régionaux92. Du fait de son expiration en 2020, un accord de remplacement est en cours de négociation depuis septembre 20183. Un accord sur le contenu de ce nouveau partenariat a été signé en avril 2021 et doit maintenant être approuvé par toutes les parties. Finalement, le Mali a aussi rejoint en 2006 l’« African Growth and Opportunity Act (AGOA) » qui est un programme de préférence commerciale qui ouvre l’accès sans tarif au marché américain à près de 7000 produits originaires des pays Africains bénéficiaires (le Mali a cependant été suspendu pour l’instant de l’AGOA après le récent coup d’Etat)93. 85. Les produits agricoles représentent 19 % de la valeur totale des exportations du Mali et 14% de celle des importations. En 2019, les exportations totales du pays se montaient à CFAF 2,150 milliards, en progression de 34% depuis 2015 (8% par an), dont CFAF 400 milliards de produits agricoles (19%). Les importations totales se montaient à CFAF 2,525 milliards, aussi en hausse de 34% sur la période, dont CFAF 352 milliards de produits agricoles (14%). La balance commerciale globale du pays est déficitaire (-CFAF 400 milliards), mais la balance agricole faiblement positive (CFAF 48 milliards). Trois principaux produits dominent les exportations du Mali : l'or non monétaire (72%), le coton fibre (12%) et les animaux vivants (6%). Le Mali exporte aussi de petites quantités de fruits et noix (mangues, anacarde, karité, fonio..) et de cuirs et peaux. Les exportations intrarégionales représentent moins de 90 L’appartenance à l’UEMOA (8 Etats Membres) offre la liberté de circulation des marchandises et des personnes. 91 Le traité de la CEDEAO vise la « mise en place d'une union économique en Afrique de l'Ouest.... » à travers une politique commerciale commune vis-à-vis des pays tiers fondée sur le TEC CEDEAO adopté par la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement enjanvier2006. Cependant, la mise en Å“uvre du TEC de la CEDEAO a été retardée et n’est touj ours pas en vigueur. 92 Depuis 2008, des négociations sont engagées entre l’UE et la CEDEAO (qui n’ont pas encore abouti) qui portent principalement sur : (i) les mesures d’accompagnement à mettre en place pour que la région Afrique de l’Ouest soit en mesur e d’accroître et de diversifier ses exportations vers de l’UE et ainsi profiter de l’ouverture au commerce ; et (ii) le degré d e libéralisation des échanges jugé acceptable. Sur ce deuxième point, les négociations portent sur un taux d’ouverture variant entre 60% et 80%. Dans la pratique, le marché européen étant déjà très largement ouvert aux produits des pays ACP, la réciprocité vise essentiellement à libéraliser l'accès des produits européens aux marchés des pays ACP. 93 L’AGOA qui devait expirer en 2015 a été prolongé jusqu’en 2025. Toutefois, son impact sur le commerce bilatéral entre les USA et le Mali est resté très limité. En effet les exportations du Mali vers les EU sont restées presque insignifiantes. 46 10%, ce qui est peu au regard des objectifs d'intégration de la zone UEMOA. Les exportations de fibres de coton sont essentiellement vers la Chine, l'Inde et la Thaïlande. Leur volume est variable et dépend du niveau de la production de l’année précédente. Les exportations de produits animaux concernent essentiellement de bovins et d'ovins sur pieds à destination des pays de la sous-région. Le Mali importe essentiellement des produits énergétiques, des biens d'équipement et des produits alimentaires : sucre, céréales (riz et blé), poissons et lait. La part des pays de la sous-région dans les importations est de 37%, avec le Sénégal et la Côte d’Ivoire comme principaux fournisseurs. Tableau No8 : Tableau No9: G. Une faible transformation des produits de base. 86. L’économie du Mali est l’une des économies les moins diversifiées en Afrique, occupe le 95eme place dans le monde d’après l’Index de Complexité Economique94 et est l’un des pays dans le monde dont les exportations sont aussi les moins diversifiées. Les différentes stratégies d’industrialisation mises en Å“uvre jusqu'à ce jour, n’ont pas permis au Mali de réaliser un véritable développement industriel national. En 2020, le secteur industriel représentait environ 27% du PIB du 94 L’université de Harvard a établi un classement de complexité économique, appelé l'Economic Complexity Index. Plus une économie présente de secteurs d'activité, plus elle sera qualifiée de diversifiée et donc résiliente. À l'inverse, plus les secteurs économiques d'un pays sont réduits, plus ils se révèlent vulnérables, et mettent en danger la stabilité du pays. 47 pays, dont les secteurs de la construction, des travaux publics et industries extractives représentent environ 21%. L’industrie manufacturière, dominée par l’agro-industrie, ne représente que 6% du PIB et, bien qu’elle ne soit pas connue avec précision, on estime que la part de l’agro-industrie ne devrait pas dépasser 4%. Mise à part la production de fibre de coton, dont la presque totalité est exportée, les industries de transformation de la production agricole sont dirigées vers le marché intérieur, protégé pas la situation géographique du pays. Elle porte essentiellement sur la biscuiterie, les pâtes alimentaires, la confiserie, la conserverie, la brasserie, la boulangerie, l’huilerie, la sucrerie, la laiterie, le textile et le tabac. Moins de 5% de la production cotonnière, pourtant première culture d’exportation, est transformé par l’industrie textile locale, le bétail est essentiellement vendu sur pied, la mangue est très largement exportée en frais. Les céréales (riz, maïs, mil, sorgho, etc.) ne sont transformées que par des petites unités locales, ce qui ne permet pas de créer suffisamment de valeur ajoutée pour l’économie nationale. 87. L’agro-industrie domine les activités manufacturières et est géographiquement très concentrée. En 2015, il existait 765 entreprises industrielles en activité dont 520 entreprises agro- alimentaires (74%). Ces dernières étaient fortement concentrées dans les grandes régions agricoles (Sikasso et Koulikoro, 32% du total) et autour de Bamako (53%). Elles se répartissaient se répartissant entre la filière textile, la filière agroalimentaire et la filière viande/lait/peaux/cuirs. La filière textile est dominée pat Compagnie Malienne des Textiles qui fournissait la matière première aux quelques usines de filature du pays (Compagnie Malienne des Textiles, Industrie Textile du Mali, BATEX-SA, FITINA, EMBALMALI). La CMDT fournit aussi les graines de coton à une centaine d’usines de production d’huile qui fournissent environ 60%) de l’huile consommée au Mali et produisent aussi du tourteau pour l’alimentation animale. La filière agro-alimentaire inclut les minotiers (Moulins du Sahel et Moulin Moderne du Mali), les Brasseries du Mali, les sucreries de SUKALA-SA (qui produisent également de l’alcool éthylique et de la mélasse) et la Société Nationale des Tabacs et des Allumettes du Mali, ainsi que de nombreuses PME dans les secteurs de la minoterie, des pâtes alimentaires, des confitures et fruits séchés, etc. qui sont pour la plupart concentrées dans la zone industrielle de Bamako et dans les capitales régionales. La filière animale est dominée par des Petites et Moyennes Entreprises implantées autour des grands centres urbains de consommation de viande ou elles s’approvisionnent en matière première (très largement lait et peaux), avec des unités produisant aussi à la fois des aliments de bétail et du lait reconstitué sur la base de matière importée. 88. Globalement, le secteur agro-industriel est sous-développé avec la majorité de la production étant le fait de petites structures semi-industrielles ou artisanales pour des besoins locaux. Seul un très petit nombre d'entreprises utilisent des technologies industrielles95. Les autres unités fonctionnent au mieux sur une base semi-industrielle seulement partiellement mécanisée. La majorité sont encore « artisanales », produisant à petite échelle avec une technologie traditionnelle. La médiocrité des équipements de transformation, de conditionnement et de conservation engendre des pertes considérables (de l'ordre de 25 à 40% des productions) et des contrôles sanitaires souvent défaillants ne permettent pas d’assurer des standards de qualité satisfaisants. La grande majorité des entreprises manquent aussi d’économie d’échelle et de capacite à structurer leurs chaines d’approvisionnement et à développer une agriculture contractuelle (garantie d’achat, fourniture d’intrants, traçabilité et contrôle de qualité…) avec des producteurs en général peu organisés. Des initiatives récentes sont cependant en cours, comme celles des deux grands minotiers (avec une intégration verticale : farines de blé, maïs et mil, farine infantile, rizerie, aliments bétail/volaille), d’Agro-business pour la production de produits à base de fruits96, ou deux projets d’agro-carburants 95 Deux minoteries, une poignée de rizeries, quelques boulangeries, quatre huileries, deux sucreries, un producteur de pâte d'arachide, cinq laiteries, deux tanneries, une poignée de producteurs de boissons gazeuses, une brasserie de bière, ainsi que quelques filatures et tissages. 96 Agro-business a fait la transformation/vente de mangue, bissap, tamarin et d’autres fruits. Elle exporte en moyenne 1 000 tonnes de mangues par année principalement vers la France, l’Allemagne et la Belgique. Ses produits sont aussi commercialisés dans la sous-région Afrique de l’Ouest. Agro-business 48 Jatropha, portés par des investisseurs néerlandais (Mali Biocarburant) et français (Jatropha Mali Initiative, groupe Éco-Carbone), situés dans la région de Koulikoro. 89. La diversification de l’agriculture malienne et la transformation de ses productions sont nécessaires pour soutenir le développement économique et social du pays en créant plus de valeur ajoutée et d’emplois décents et durables, en particulier en faveur des femmes et des jeunes. Atteindre cet objectif demande de s’attaquer de façon coordonnée aux multiples contraintes auxquelles la secteur agro-industriel est confronté, entre autres : (i) la faible performance de petites exploitations agricoles tant en termes de surplus commercialisables que de la qualité de leurs productions ; (ii) la forte variabilité de l’offre en matière première due aux aléas climatiques (sécheresses, inondations, faibles crue) et a d’autres risques (sanitaires, déprédateurs, épizooties, feux de brousse); (iii) l’enclavement des zones de production et le manque d’infrastructures de mise en marche ; (iv) le manque de structuration de la plupart des filières agricoles et le cout élevé de la collecte de la matière première ; (v) la faible qualification de la main-d’œuvre ; (vi) l’accès limité et le coût élevé de l’électricité, de l’eau ; (vii) les difficultés à trouver des financements adéquats et (viii) la forte concurrence des produits importés. 90. Relever un tel défi demandera une approche ciblée et une forte synergie entre les acteurs publics et privés. Il s’agira en effet à la fois diversifier, d'intensifier et de moderniser les systèmes de production agricoles, de structurer les chaines de valeur et de soutenir l'émergence de véritables entreprises de commercialisation/transformation capables de dynamiser des filières de petits producteurs et de forger avec eux des alliances productives, leur offrant à la fois l’accès au marché et un ensemble d’intrants et de services. De son côté, l’Etat devra fournir à la fois les infrastructures de base nécessaires mettre en place cadres juridiques et règlementaires propices permettant aux entreprises privés d’assurer leur compétitivité. 91. Ciblage et synergies sont la base de la stratégie adoptée par le gouvernement dans le cadre de sa politique de développement agricole. La PDA privilégie (i) une approche filière ; (ii) la mise en place d’agropoles centrés sur les principaux bassins de production du pays ; et (iii) la création dans ces agropoles de Zones spéciales de transformation agro-alimentaire (ZSTA) bénéficiant du statut de zones économiques spéciales (ZES) dans ces agropoles pour attirer les investissements privés en mettant à la disposition des investisseurs des infrastructures adéquates (énergie, eau, routes, stockage) et des services spécialisés (chaîne du froid, laboratoire et certification, services aux entreprises, technologie de l’information et de la communication, traitement des déchets). H. Une faible diversification de la production et des exportations agricoles. 92. Malgré ses nombreuses ressources, le Mali n'a pas encore réussi à diversifier son secteur agricole, ni en termes de son mix de production ni en termes de la transformation de ses productions en produits transformés à haute valeur ajoutée. La production agricole est dominée par quatre grandes spéculations (le coton, les céréales sèches, le riz et les produits animaux, qui représentent globalement près des trois-quarts du PIB agricole). Les exportations sont encore très largement dominées par (i) la fibre de coton (environ 70% des exportations agricoles) et (ii) les produits non transformés : bétail sur pied (20%), cuirs et peaux (peu transformés, 5%), les noix de cajou (brutes) et fruits et légumes (mangues essentiellement, sésame, fonio… 5%). Le concentration des exportations du mali sur l’or et le coton expose le Mali a des risques considérables. Les recettes des exportations de fibre de coton sont sujettes non-seulement aux risques de marchés (avec la volatilité des cours internationaux) mais encore aux risques agricoles avec une production pluviale très dépendante des conditions climatiques. La production de coton pourrait aussi décliner à terme avec la détérioration exporte 67% de ses produits vers l’Occident, 30% vers le marché régional et seulement 3% sur le marché local. Elle s’approvisionne auprès de plus de 300 agriculteurs. 49 des sols et la menace du changement climatique. De plus, les projections indiquent que les réserves d’or du pays pourraient être épuisées avant 2040. 93. Le Mali doit donc continuer à développer et diversifier son économie, et en particulier sa production agricole. Les appuis apportés ces dernières années à certaines filières ont permis d’obtenir des résultats déjà visibles sur certaines filières d’exportation, notamment les filières mangue, noix de cajou, gomme arabique, fonio et sésame. D’autres filières rencontrent davantage de difficultés à décoller, en particulier la sous-filière viande, cuirs et peaux et dans une moindre mesure les filières échalote/oignon et beurre de karité. Les écarts de performance entre les différentes filières de diversification s’expliquent notamment par leur niveau initial de structuration ainsi que les exigences (qualité) et le degré de concurrence sur le marché international propre à chaque filière. Dans le court et moyen terme, une diversification basée sur un transfert rapide des ressources de l’agriculture vers les secteurs industriel et des services semble très difficile, vu de l’environnement économique et institutionnel, les risques qui pèsent sur l’investissement privé et le manque de la main d’œuvre qualifiée qui serait nécessaire. L’option qui parait la plus réaliste est promouvoir une diversification basée sur le développement de filière agricoles présentant pour lesquelles le Mali possède un avantage comparatif clair et qui : (i) sont déjà raisonnablement structurées et ; (ii) présentent de bonnes opportunités en termes de transformation en produits dérivés à forte valeur ajoutée ; et (iii) demandent des technologies déjà existantes et relativement peu sophistiquées. Une telle approche (semblable à celle utilisée par le Vietnam dans la première phase de sa transformation structurelle) aurait l’avantage d’être en ligne avec la stratégie du gouvernement de promouvoir une croissance inclusive, qui crée des emplois rémunérateurs même pour une main d’œuvre peu qualifiée. Elle pourrait aussi être mis en Å“uvre par des « champions » nationaux capables de dynamiser les filières concernées. Elle demanderait toutefois un engagement et un appui clair du gouvernement pour créer un environnement macro-économique et des affaires capable d’attirer et de sécuriser des investissements privés conséquents. J. L’agriculture familiale en question ? 94. L’objectif que fixe la Loi d’Orientation Agricole adoptée en décembre 2005 et de la Politique de Développement Agricole du Mali (PDA)97 est de promouvoir une transition d’une agriculture extensive, de subsistance, à une agriculture moderne, diversifiée, compétitive, capable à la fois de dégager d’importants surplus commercialisables, d’assurer la sécurité alimentaire du pays et de permettre aux ménages agricoles de sortir de la pauvreté. Ces deux documents confirment le choix de l’agriculture familiale comme modèle de développement, d’un point de vue social (les exploitation familiales regroupent près de la moitié de la population du pays, parmi les plus pauvres) et de celui d’un développement économique inclusif.98 Ils insistent cependant aussi sur le besoin de promouvoir « l’entreprise agricole », « d’adopter une approche filière » pour favoriser l’accès aux marchés des petites exploitations familiales et voir émerger un secteur agro-industriel structuré et compétitif. 95. La LOA identifie cependant clairement les principales contraintes et menaces qui pèsent sur les exploitations familiales, et elle définit les principaux axes de la stratégie pour leur développement. Elle constate (i) la faible performance actuelle des exploitations familiales et le besoin d’améliorer leur productivité par l’adoption de technologies (intrants, équipements) bien adaptées à leurs capacités et environnement socio-économique ; (ii) le faible niveau d’alphabétisation et de formation de la grande majorité des producteurs agricoles et l’urgence de renforcer leurs capacités (par une meilleure éducation et formation professionnelle agricole) pour permettre l’adoption de technologies et systèmes de production plus complexes; (iii) la faible intégration des exploitations dans les marchés (national, régional, international) et le besoin de structurer les chaines de valeur pour améliorer cet accès avec un rôle central des OPA et des organisations interprofessionnelles dans ce 97Politique de Développement Agricole, République du Mali, mai 2013. 98 Les successifs Cadres de Lutte contre la Pauvreté (Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) de 2002 à 2006 ; Cadre Stratégique de Croissance et de Réduction de la Pauvreté (CSCRP) de 2007 à 2011 ; puis CSRP de 2012 à 2017) rappellent que « l’économie du pays repose principalement sur l’agriculture qui reste de type familial et que le défi est de moderniser les exploitations agricoles familiales et faire du paysan, de l’éleveur et du pêcheur maliens de vrais entrepreneurs ». 50 domaine) ; (iv) la montée des problèmes fonciers et le besoin de sécuriser les exploitations et de garantir un accès équitable de tous aux ressources foncières; et (vi) la forte vulnérabilité des ménages agricoles aux aléas climatiques et donc l’urgence de promouvoir une Agriculture Intelligente face au Climat pour une gestion durable des ressources naturelles (en particulier des sols et ressources en eau). IV. POLITIQUE AGRICOLE ET ROLE DE L’ETAT A. Les Politiques agricoles. V. L’émergence d’une agriculture moderne, compétitive et capable de créer des emplois décents est au cÅ“ur de la stratégie de développement économique et social du Gouvernement . Le secteur agricole joue en effet un rôle clé dans l'économie malienne, représentant 33 à 38 % du PIB, 5 à 20 % des recettes d'exportation totales et 56 à 66 % de l'emploi en 2010–20. Le Mali possède un énorme potentiel agricole pour l’instant largement inexploité et qui pourrait être le moteur principal du futur développement t économique et social du pays. L’importance d’un développement soutenu, durable et inclusif du secteur agricole/agroindustriel est réaffirmée dans les deux derniers Cadres stratégiques pour la Relance Economique et le Développement Durable (CREDD 2012-2017 et 2019- 2023). VI. Le CREDD 2019-2023 a pour objectif une croissance moyenne de l’ordre de 6,5% sur la période (soit un taux de croissance par tête de 2.9%) qui ne pourra être atteint que si la croissance moyenne dans le secteur agricole est au même niveau. Le CREDD 2019-2023 souligne aussi que le développement et la modernisation du secteur agricole ne peut être basé que sur les investissements productifs du secteur privé et que le rôle de l’Etat est en priorité de s’attaquer à toutes les contraintes qui freinent la compétitivité des entreprises maliennes : (a) la stabilité macroéconomique ; (b) la définition et mise en Å“uvre de politiques favorable au secteur privé (politique fiscale, politique des prix) ; (c) le développement des infrastructures de base (transport, Energie, mise en marche), qui sont essentiels pour améliorer la compétitivité de l’économie, et les infrastructures productives structurantes (aménagements hydro-agricoles…) ; et (d) l’appui aux services agricoles de base : (i) la recherche agronomique (en particulier la recherche stratégique, l’adaptation au changement climatique); (ii) les services de conseil aux petites exploitations familiales qui ne peuvent pas mobiliser elles-mêmes ces services ; et (iii) l’appui à la structuration du secteur (OPA, chaines de valeur, Interprofessions). aux OPA et à la structuration des chaines de valeur… 1. La Politique agricole. VII. Les principaux objectifs du Mali en matière de développement du secteur agricole sont énoncés dans une série de documents-clés : • Le CREDD 2019-2023, fondée sur une nouvelle vision de long terme, Mali 2040, qui a pour objectif la transformation structurelle de l’économie du Mali en général et du secteur agricole en particulier constitue la nouvelle stratégie nationale de développement du Mali. Il est articulé autour des cinq axes suivants : (i) consolidation de la démocratie et amélioration de la gouvernance ; (ii) restauration de la paix, de la sécurité et renforcement du vivre ensemble ; (iii) croissance inclusive et transformation structurelle de l’économie ; (iv) protection de l’environnement et renforcement de la résilience au changement climatique, et (v) développement du capital humain. • La Loi d’orientation agricole (LOA, 2006), qui est le cadre fédérateur pour toutes les interventions publiques dans le secteur agricole, qui présente la vision à long-terme d’un développement du secteur agricole base sur (i) la complémentarité entre l’agriculture familiale et des entreprises agricoles modernes et concurrentielles ; et (ii) l’émergence de chaines de valeurs fortement structurées ; 51 • La Politique de développement agricole (PDA 2013) qui opérationnalise la vision de la LOA avec deux axes principaux : (i) l’appui à la résilience des petits producteurs à travers l’initiative AGIR et les priorités pour la résilience du pays ; et (ii) l’approche pôle de croissance agricole (‘‘Agropoles’’). Elle s’adresse aux principaux défis auxquels le secteur agricole est confronté : (i) la modernisation de l’agriculture familiale et le développement agroindustriel; (ii) la souveraineté nationale et la sécurité alimentaire; (iii) la protection de l’environnement et la gestion durable des ressources naturelles, avec la sécurisation foncière et l’adaptation au changement climatique ; la réduction de la pauvreté rurale par un développement agricole inclusif fortement créateur d’emploi, avec une attention particulière donnée à l’ avancement économique et social des femmes et des jeunes. • Une série de stratégies sous-sectorielles dont, entre autres : la Stratégie nationale de développement de l’irrigation 1999 et 2008) et la Stratégie nationale de développement de l’irrigation de proximité ; Le Code pastoral (2001) et la Politique nationale de développement de l’élevage (2002) ; la stratégie nationale de développement de la riziculture (SNDR 2009-2018) ; la Programme de développement stratégique de la filière coton (2013-2018) ; la Politique foncière et la Loi portant sur le foncier Agricole (2017); la Politique nationale sur les changements climatiques (PNCC) et la stratégie nationale sur les changements climatiques (SNCC) ; la Politique Nationale de Sécurité Alimentaires (PNSA 2011 à 2015) ; • La Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA), adoptée en 2002, dont l’objectif est d’assurer l’accès de tous les maliens, à tout moment, aux aliments nécessaires pour mener une vie saine et active. Pour atteindre ces objectifs, les lignes d’intervention de la SNSA couvrent la plupart des priorités du développement agricole et y ajoute un plan national de réponse (PNR) pour améliorer la prévention et la gestion des crises alimentaires conjoncturelles ; et • Le Programme National d’Investissement Agricole 2015-202599. Approuvé en 2014, il est le plan d’investissements prioritaires dans le secteur agricole en soutien de la PDA et des stratégies sous- sectorielles. 2. Le Programme National d’Investissement Agricole (PNISA). VIII. Le PNISA est basé sur les orientations stratégiques de la PDA et les stratégies sous- sectorielles pour le développement du secteur agricole, et une projection des actions et des ressources qui permettraient d’atteindre l’objectif de 6% de croissance annuelle du secteur fixé par le gouvernement. Il prend en compte les besoins (fonctionnement et investissement), les financements acquis et les financements à rechercher pour un horizon de 10 ans glissants. Son cout total est évalué à 6 951 milliards sur la période 2015- 2024 (en moyenne 695 milliards de F CFA par an). En moyenne sur la période concernée, 80 % du financement du secteur provient de l'extérieur (prêts et subventions) contre 20 % de contribution sur recettes intérieures. Le PNISA est structuré autour de deux axes stratégiques majeurs : (i) des investissements productifs (foncier agricole, crédit agricole, aménagements et infrastructures agricoles, intrants et équipements agricoles, infrastructures d’accès, marchés, …) et (ii) la production et la compétitivité des filières (végétales, animales, pêche et aquaculture, notamment). Son champ d’application s’étend aux domaines transversaux (renforcement institutionnel, formation, recherche et vulgarisation agricole, professionnalisation agricole, décentralisation, dimensions genre, environnementales et sociales. B Les dépenses publiques en faveur du secteur agricole. 1. Importance des allocations budgétaires en faveur de l’agriculture. IX. Malgré des contraintes budgétaires accrues ces dernières années, les dépenses publiques consacrées à l'agriculture ont augmenté au cours de la dernière décennie. Cependant, l'efficacité des dépenses est faible. Les dépenses courantes et les subventions au sous-secteur des productions végétales occupent près de la moitié du budget total, au détriment de l'investissement et des sous- 99 52 secteurs de l'élevage et de la pêche. Le budget alloué aux régions et aux unités de services déconcentrés (responsables des services de proximité) ne leur permet pas de fournir des services adéquats aux agriculteurs. X. Le Mali consacre une part élevée de ses dépenses publiques totales au secteur agricole. Hormis une brève baisse en 2012, le budget approuvé pour le secteur agricole a constamment égalé ou dépassé le seuil de 10% de son budget total recommandé par la Déclaration de Maputo100. La part des dépenses publiques consacrée à l'agriculture a été en moyenne de 10,4 % sur la période 2010- 2019 (graphique), correspondant à 6,7% du PIB agricole et 2,6 du PIB total (contre 0,5 % du PIB pour l’ensemble de l’Afrique au sud du Sahara et 0,5% et pour les pays de l’l'UEMOA)101. Malgré ces niveaux élevés de dépenses, les dotations budgétaires sont en deçà des sommes prévues par Programme national d'investissement dans le secteur agricole (PNISA) : 308 milliards de FCFA par an en moyenne sur la période 2014-20 contre 695 milliards de FCFA, soit 44 % de l'objectif, avec l'investissement étant l'un des domaines les plus sous-financés en raison de la plus faible mobilisation des ressources externes. Figure No18 : XI. L’analyse des budgets alloués sur la période 2010-2019 permet les observations suivantes : • Le Mali a respecté l'engagement de Maputo de consacrer au moins 10 % des ressources publiques à l'agriculture. Sur la période 2010-2011, les dépenses agricoles ont atteint en moyenne 12 % des dépenses publiques. • Le sous-secteur des productions végétales représente de loin la part la plus importante : 80 %, bien au-dessus de sa contribution au PIBA total (45%), reflétant en partie la part des subventions aux intrants. La part du sous-secteur forestier est en ligne avec sa contribution au PIBA (9%) mais le sous-secteur de l'élevage et de la pêche reste faiblement financé en comparaison avec sa part dans le PIBA (11 % du budget total approuvé en 2010–20, baissant même en fin de période, contre environ 45%du PIBA). • Le financement du secteur de l’élevage et de la pèche s’est élevé à seulement 7% de ce que prévoyait le PNISA pour dynamiser les différentes filières de l'élevage et de la pêche (y-compris la pisciculture). En outre, ce sous-secteur a été très dépendant des sources de financement externes et donc plus sujet à la volatilité des financements d'une année sur l'autre. 100 Déclaration de l’Union Africaine (2003) dans le cadre du Programme Détaillé du Développement Agricole en Afrique (PDDAA) qui recommande à tous les états membres de l’UA d’accroître la part de leur budget dans le secteur de l’agriculture, à hauteur au moins de 10% de leur budget national dans un délai de cinq ans. 101 Revue des dépenses publiques, Banque Mondiale, 2020. 53 Figure No19 : • Les investissements dans l’irrigation (hors exploitation), une priorité vu le risque climatique, ont constitué environ 20% des dépenses totales sur la période mais ont décliné dans la deuxième moitié, alors que le cout du programme de subvention aux intrants a connu des augmentations importantes. • Les dépenses en faveur de la recherche agricole et la diffusion des connaissances (notamment vulgarisation, formation, assistance technique) ont représenté environ 10 % des dépenses totales (5% pour chacune des (activités). Elles ont connu des fluctuations importantes au cours de la période en fonction des financement extérieurs. • Les dépenses dans les routes rurales ont été très faibles (environ 1% des dépenses totales) et irrégulières). La forte chute constatée après 2015 est largement due à l’escalade de l’instabilitéÌ? politique qui a perturbé les projets sur financements extérieurs. • La faible part des dépenses totales en faveur de la recherche agricole et des infrastructures de transport, associées à des gains de compétitivité et de productivité importants, vont à l’encontre des engagements du PDDAA et du PNISA. • Les dépenses courantes (salaires et frais de fonctionnement) et les subventions aux intrants ont représenté 60% des dépenses totales sur la période. Les subventions aux intrants ont représenté à elles seules environ 20 % des dépenses totales (25% des dépenses en faveur des productions végétales). Les dépenses courantes sont très largement financées par les allocations sur ressources intérieures. Les dépenses en capital ont atteint en moyenne 40 % sur la période 2010–19, ce qui est loin d'être suffisant compte tenu des énormes besoins d'investissement public dans le secteur pour dynamiser les investissement privés (pistes rurales, infrastructures de stockage et de conservation, énergie rurale, maîtrise de l'eau, gestion durable des sols, recherche et appui- conseil, vaccinations…). • Les financements intérieurs ont représenté environ 66% des allocations totales sur la période sur la période, avec des ressources extérieures baissant drastiquement en 2012 et à partir de 2019 (liées au déclanchement des crises politiques). • Le taux global d'exécution du budget pour les dépenses agricoles a été de 75 % en moyenne sur la décennie 2010-2019. La complexité des procédures pour les projets financés par l'extérieur et la faiblesse des ressources humaines dans les départements gouvernementaux responsables sont 54 des facteurs importants qui ont affecté en particulier la mise en Å“uvre efficace des projets financés par l'extérieur. • La déconcentration des services de proximité (conseil, génie rural) ne s'est pas accompagnée d'un transfert effectif de ressources. Les dépenses décentralisées représentaient en moyenne 9 % du total sur la période 2010–18. Elles sont utilisées pour payer les salaires ce qui impacte négativement sur la fourniture de ces services pourtant essentiels. La plupart des régions n'ont pratiquement pas réalisé d'investissements, à quelques exceptions près : Ségou et Gao avant 2015, et Sikasso et Tombouctou (portés par quelques grands projets d'investissement). Figure No20 : XII. Malgré leur part relativement élevée dans les dépenses publiques totales, les dépenses en faveur du secteur agricole ne génèrent pas les effets attendus. Leur impact pourrait être beaucoup plus important en améliorant à la fois la pertinence dans leur allocation aux différents sous-secteurs que leur mise en Å“uvre. Un certain nombre de mesures concrètes pourraient être prises pour améliorer l’impact des dépenses publiques dans le secteur, telles que présentées dans l’analyse des dépenses publiques réalisée par la Banque Mondiale en 2020102. • Réallouer les ressources disponibles entre les différents sous-secteurs en fonction de leurs importance dans le PIB, leur potentiel de croissance et leur impact sur la pauvreté. les ressources semblent trop concentrées dans le sous-secteur des productions végétales (et du riz en particulier) au détriment du sous-secteur de l'élevage. • Réduire la part des dépenses courantes pour pouvoir financer les infrastructures et autres activités ayant un impact positif important sur la mobilisation des investissements privés. Finalement, plus de ressources devrait être transférées aux régions et aux services déconcentrés pour permettre une meilleure fourniture de services aux producteurs. • Réduire et rationaliser les effectifs des ministères techniques et augmenter les moyens alloués aux services déconcentrés, en mettant en Å“uvre les réformes qui devraient accompagner cette décentralisation, y compris la restructuration des bureaux décentralisés la mise en Å“uvre d’une véritable décentralisation budgétaire, le renforcement des capacités du personnel décentralisé, et la mise en place d’un suivi de la qualité des services de proximité. 102 Revue des dépenses publiques, Banque Mondiale, 2020. 55 • Accroître l'efficace des engrais coton par des investissements accrus dans la recherche variétale et les techniques d'amélioration des sols. C. Le programmme de subventions aux intrants. XIII. La subvention des engrais a toujours été une pratique intégrante des stratégies de développement agricole des gouvernements successifs de la République du Mali de 1960 à aujourd’hui. Durant les premières années de l’indépendance, de fortes subventions d’engrais étaient allouées à des opérations de développement rural (ODR). La mauvaise gestion de celles-ci a conduit à un endettement insoutenable pour l’État sans un impact visible sur les rendements agricoles et les conditions de vie des populations et les subventions d’engrais ont été supprimées dans le cadre des politiques d’ajustements structurels. Toutefois, la Loi d’Orientation agricole de 2006 a réintroduit l’usage des subventions aux intrants comme appui aux exploitations agricoles103 et l’usage de subventions aux intrants est redevenu un instrument-clé des stratégies de développement agricole du Gouvernement du Mali104. En 2008, à la suite de la crise alimentaire et nutritionnelle mondiale, le Mali a mis en place un programme appelé "Initiative riz" pour accroitre la production nationale de riz en mettant à la disposition des producteurs des engrais et des semences subventionnés105. Au démarrage du programme, les principales cultures ciblées étaient le riz irrigué et le riz pluvial (NERICA). La subvention s’est ensuite étendue dès 2009 /2010 au coton, au maïs et au blé, puis au mil/sorgho et au niébé en 2010/2011. L’« Initiative Riz », rebaptisée « Programme de subvention des intrants agricoles (PSI) », couvre maintenant la majorité des intrants du secteur agricole, de l’élevage et de la pêche : en plus des engrais et des semences certifiées, les subventions couvrent en effet les concentrés d’aliments destinés à la production de lait, de viande, d’œufs et de poulets de chair, ainsi que les vaccins contre la maladie de Newcastle, les alevins et les aliments poisson. XIV. La mise en Å“uvre du PSI se présentent sous différentes formes, notamment la « caution technique »106 et le programme pilote du « e-voucher ». L’approche « caution technique » représente la très grande majorité de la distribution des intrants subventionnés (95% des volumes). Elle est mise en Å“uvre par les structures parapubliques : (i) Le Groupement d'Intérêt Economique du Secteur Coton (GIE – Coton, composé par la Compagnie Malienne pour le Développement du Textile - CMDT & Office de la Haute Vallée du Niger - OHVN), (ii) l'Office du Niger (ON) et d'autres Offices intervenant dans la filière riz, et (iii) la Direction Nationale de l‘Agriculture (DNA) qui couvre les autres zones non-couvertes par les deux canaux ci-dessus. L’approche « caution technique » a connu de nombreux problèmes de transparence et de traçabilité et le gouvernement du Mali a sollicité l’appui de la Banque mondiale pour l'expérimentation d'un système de distribution alternatif par l’intermédiaire de coupons électroniques (« e-vouchers ») distribués aux producteurs qui peuvent alors d’approvisionner 103 La Loi d’orientation agricole précise en effet que : “l’État et les collectivités territoriales accordent, dans le cadre de contrats de conservation et de bonne gestion des ressources naturelles, des subventions et/ou appuis aux exploitations agricolesâ€?. 104 De plus, les Ministres de l’Agriculture des Etats membres de l’Union Africaine ont adopté à Abuja au Nigeria en juin 2006 une déclaration visant la mise en place d’un Mécanisme africain de financement de l’utilisation des engrais (MAFDE) pour relancer la croissance agricole. 105 L’Initiative Riz faisait partie du plan à moyen terme du gouvernement pour produire 10 millions de tonnes de céréales en 2012 afin de rendre le Mali autosuffisant en matière de production céréalière et de devenir un exportateur net de riz. L’initiative visait à accroitre la production du riz de 50%, pour passer de 1,1 à 1,6 millions de tonnes pendant la première campagne. Pour la campagne 2008/09, la subvention était de 50% pour les engrais et de 60% pour la variété de semence NERICA. 106 La caution technique en papier est un document technique/un cahier de charge préparé pour chaque exploitation qui donne droit d’accès aux intrants subventionnés pour une campagne agricole. Le document est établi par les agences d’exécution du PSI et contient toutes les informations permettant d’identifier et de localiser le bénéficiaire et d’identifier les cultures pratiquées, les superficies, l’effectif du cheptel, la taille des étangs piscicoles etc. pour assoir la subvention s ollicitée. La caution technique est en vigueur depuis le démarrage de l’Initiative riz en 2018. Elle est élaborée par les services techniques de l’agriculture qui sont également chargés de la distribution des engrais aux bénéficiaires. 56 directement auprès de distributeurs prives agréés107. Le programme a été lancé en 2014/2015 dans les régions caractérisées par une grande insécurité (Gao, Tombouctou et Mopti) dans le cadre du Projet de production et productivité agricole en Afrique de l’ouest (PPAAO/WAAPP) financé par la Banque mondiale. Les cultures concernées étaient initialement le mil/sorgho et le riz. L’expérimentation s’est ensuite étendue sur deux grands bassins de production du Mali, notamment les cercles de Niono pour le riz et Bla, Koutiala et Yanfolila pour le coton et les céréales sèches. Depuis 2018/2019, elles incluent aussi le maïs et le coton dans la zone CMDT. Le programme e-voucher ne couvre cependant que mois de 2% des volumes distribués. XV. Les impacts du PSI sur la production et la productivité restent mitigés alors que coûts budgétaires du programme ont été de plus en plus élevés et représentent maintenant une part importante (20%) des dépenses publiques en faveur du secteur agricole. Comme le montre le tableau ci-dessous, la quantité d’engrais distribuée par le PSI a connu une augmentation rapide, passant de 52 000 à 496 000 tonnes entre 2008 et 2017 (augmentation de plus de 850%). Le nombre de bénéficiaires a été multiplié par 4, atteignant 820 000 ménages en 2017/18, dont environ 150 000 ménages gérés par des femmes. Le coût du PSI s’est toutefois avéré de plus en plus élevé. En effet, le cout des subventions sur les engrais est passé de 12 milliards à 37 milliards (de US$ 20 millions à US$ 76 million) entre 2008 et 2017108.109. En moyenne sur la période 2008-2017, la part du PSI dans les dépenses publiques totales du secteur agricole a été de près de 20% (2% des dépenses publiques totales). Cela, combiné à un impact en deca des attentes en termes de productivité agricole, a suscité des interrogations à la fois sur l’efficacité interne (de mise en Å“uvre) du programme et sur les poids respectifs à donner dans les dépenses publiques à la subvention des intrants (qui peut accroitre la productivité agricole à court terme) et aux investissements qui sont nécessaires pour développer la production agricole sur le long-terme (ex., recherche et développement, infrastructures de transport et d’irrigation…). Tableau No10 : Subvention d’engrais 107 L’opération consiste à la distribution d’un kit composé de semences et d’engrais, distribué gratuitement aux populations ciblées. Il est géré par le CNRA et organisé autour d’une plate-forme électronique de gestion des transactions, d’une base de données des bénéficiaires, et d’un registre des fournisseurs d'intrants agricoles. Les bénéficiaires reçoivent un message électronique (SMS) indiquant la quantité d’engrais par type qu’ils doivent retirer auprès d’un fournisseur donné. 108 La revue d’AGRA souligne que le coût de distribution par tonne d’engrais distribué au Mali figure parmi les plus élevés en Afrique au Sud du Sahara. 109 Ce cout n’inclut que la distribution des engrais, qui représente environ 80% du total. Si on inclut le cout des subventions sur les autres intrants (semences, aliments de bétail, vaccins..., mécanisation…), le cout total du programme a été d’environ 35 milliards par an, soit 20% des dépenses publiques totales en faveur de l’agriculture. 57 XVI. Le gouvernement a alors décidé (i) de lancer une revue détaillée du PSI ; et (ii) de mettre en Å“uvre une approche différente de la distribution des intrants subventionnés. La revue du PSI a été réalisée en 2019 par l’« Alliance for à Green Révolution in Africa (AGRA) » pour : (i) tirer les leçons de ses 10 années d’opération ; et (ii) formuler des recommandations pertinentes d’amélioration. La revue a mis en évidence à la fois les impacts et les faiblesses du programme110. La revue a montré qu’à part pour le maïs, il n’y avait pas eu une augmentation significative de la productivité111. La production de mil, de sorgho, de riz et de maïs a augmenté respectivement de 28%, 36%, 71% et 304%, alors que les superficies emblavées avaient augmenté respectivement de 29%, 57%, 73% et 193%, ce qui semble démontrer qu’à part pour le maïs, l’accroissement de la production a été dû à l'extension de superficies plutôt qu'à une amélioration des rendements. Les rendements en coton, bien qu’il ait reçu environ 60% des engrais subventionnés (contre 14% au riz irrigué et 26% aux autres cultures), se sont maintenu autour de 1.0 t/ha (il faut toutefois prendre en compte que le coton bénéficiait déjà d’une distribution systématique d’engrais avant le programme et l’impact de leur cout a essentiellement un effet sur la décision des planteurs quant aux superficies à emblaver112). Figure No21 : XVII. La revue d’AGRA a par contre mis en lumière de nombreux dysfonctionnement dans la mise en Å“uvre du programme. Les principales sont : (i) un manque de clarté sur les conditions d'admissibilité au programme et dans le ciblage des bénéficiaires (en termes de taille des exploitations)113 ; (ii) des insuffisances dans les procédures de passations des marchés ; (iii) des retards fréquents dans la distribution des intrants et le paiement des fournisseurs ; (v) des problèmes avec la qualité des engrais distribués114 ; et (vi) un manque de suivi-évaluation régulier qui interdit l’ajustement du programme en cas de besoin. Ces insuffisances devraient être corrigées si le 110 D’autres revues, telle que celle réalisée par USAID dans le cadre de son programme « Feed the Future » ont aussi sont arrivées aux mêmes conclusions et recommandations. « La subvention des engrais au Mali : origines, contexte et évolution » ; Feed the Future, USAID, aout 2019. 111 L’efficacité du programme de subventions aux intrants est très difficile à analyser en mesurant l'effet des engrais sur la productivité de différentes spéculations111, par manque d’indicateurs de performance, de suivi et de traçabilité du budget qui y a été alloué (comme en témoignent le manque de détails dans la loi de finances et les écarts d'information entre la planification budgétaire et la mise en Å“uvre du programme) et la difficultés de séparer l’effet des engrais d’autres facteurs comme les bonnes pratiques et les conditions climatiques). 112 Comme indiqué dans le Programme de Développement Stratégique de la Filière Coton (CMDT/OHVN/UN-SCPC, 2013), un effort accru dans les programmes d'amélioration variétale et dans la vulgarisation des bonnes pratiques agricoles, y compris la gestion de la dégradation et de la fertilité des sols, devrait être la priorité. 113 Il n'y a pas de bases de données fiables (Registre des exploitations) pour faciliter le ciblage du programme. 114 Ce qui n’est pas un problème spécifique au PSI. Au Mali, la mauvaise qualité des engrais est un problème récurrent. Dès la première année de mise en place de l’Initiative riz, la qualité des engrais a été ouvertement critiqués. Des analyses effectuées par le laboratoire Sol-Eau-Plante du Centre régional de recherche agronomique de Sotuba ont démontré que les engrais avaient des niveaux de teneurs en nutriments inférieurs aux normes de qualité recommandées ou requises. 58 programme devait être poursuivi pour que le Mali puisse bénéficier d’un meilleur impact en termes d’accroissement de la productivité et de la production. XVIII. L’opération pilote de distribution électronique, ou « caution e-voucher », a connu sa première expérimentation en 2014/2015 dans les régions de Gao, Tombouctou et Mopti (caractérisées par une grande insécurité). Le pilote entre dans le cadre de l’alignement de la CEDEAO sur les programmes de subventions dites intelligentes. Il est coordonné par le Comité national de la recherche agricole (CNRA). L’approche consiste à mettre les bénéficiaires directement en contact avec des fournisseurs privés agréés. Les bénéficiaires reçoivent un message électronique (SMS) indiquant la quantité d’engrais par type qu’ils doivent retirer auprès d’un fournisseur donné. Les coupons électroniques envoyés aux producteurs sont enregistrés dans une base de données et un répertoire des fournisseurs. Le bénéficiaire peut alors aller récupérer ses intrants en payent leur cout net homologué. Le système est organisé autour d’une base de données des bénéficiaires géoréférencés, d’un registre des fournisseurs agréés et d’une plate-forme électronique de gestion des transactions. Les cultures concernées par le pilote étaient initialement le mil/sorgho et le riz. Le pilote a connu quelques difficultés au cours des deux premières saisons (disponibilité d’une liste à jour des bénéficiaire potentiels, accès au réseau téléphonique, retards dans la mise e disposition des intrants et dans le paiement des distributeurs…). Les enquêtes menées en 2017/18 semblent montrer que ces difficultés ont été graduellement résolues. Depuis 2018/2019, le pilote a été étendue au maïs et au coton dans la zone CMDT. Le pilote n’a couvert que moins de 2 % du total des subventions distribuées entre 2016 à 2018 et est toujours au stade « expérimental ». XIX. Plusieurs mesures, déjà recommandées par la revue du PSI, pourraient être mises en Å“uvre pour augmenter l’efficacité et l’impact du programme. Elles incluent : (i) améliorer le ciblage des bénéficiaires ; (ii) améliorer la gestion et le contrôle de la passation des marchés publics et la transparence de la distribution ; (iii) renforçant le contrôle de qualité des engrais distribués ; (iii) mettre plus rapidement à l’échelle l’approche « e-voucher », profitant des avancées technologiques (par exemple pour effectuer des paiements sécurisés) pour augmenter son efficacité et réduire ses coûts de transaction ; et (iv) mettre en place un mécanisme efficace de suivi et d’évaluation du programme pour pouvoir le réorienter si nécessaire. C. Cohérence des politiques et actions de l’Etat XX. L’impact de l’action de l’Etat en faveur du secteur agricole dépend non seulement du niveau et de la pertinence de son soutien mais encore de la cohérence de ce soutien avec (i) les incitations données aux producteurs par l’intermédiaire de la fiscalité et de la politique prix ; et (ii) de façon plus générale, la qualité du climat des affaires. Globalement, les politiques et les actions du gouvernement présentent un certain manque de cohérence entre leurs objectifs affichés et les mesures prises, en termes tant de dépenses publiques que d’incitations données aux producteurs et au secteur privé. • Les dépenses publiques ont été dominées par des interventions à court terme (subventions aux intrants) au dépend des actions appuyant la croissance agricole à moyen et long termes pourtant identifiées dans le PNISA le développement des infrastructures et la technologie comme le moteur de la croissance agricole. telles que la recherche et la vulgarisation agricole (améliorations variétales, gestion des sols, adaptation au changement climatique), le développement de l’irrigation et l’amélioration de l’acces au marchés (transport, infrastructures de mise en marché) qui n’ont fait l’objet que de faibles dépenses publiques. • Bien que la diversification agricole soit un des objectifs centraux du PNISA, plus de 70 pour cent des dépenses publiques sont allouées au coton et au riz. Les autres produits prioritaires tels que 59 le maïs, le millet, le sorgho, les pêches intérieures et les produits de l’élevage n’ont reçu relativement que peu d’attention. • Finalement les producteurs at autres acteurs des filières agricoles ont été pénalisés par (i) des politiques qui ont souvent favorisé la protection des consommateurs et (ii) le manque de progrès dans le climat des affaires n’a pas encouragé les investissements prives dans le secteur agricole. XXI. Des analyses détaillées ont montré le manque de cohérence des politiques du gouvernement pour la plupart des principales productions agricoles. Ces analyses ont porté sur un ensemble de produits représentant 65 % de la valeur de la production agricoles (coton, riz, viande de bÅ“uf, mais, sorgho, millet et arachide). Les analyses ont mis en évidence l’impact négatif sur les producteurs des mesures prises par le gouvernement pour protéger le consommateur malien à la suite de la hausse des prix alimentaires due aux chocs météorologiques et à la crise alimentaire de 2008 (suspension ad hoc des droits et taxes de douane et interdiction temporaire des exportations, notamment pour le riz, le maïs, le sorgho et le millet). Ces mesures ont pénalisé les producteurs en les empêchant de profiter de prix plus élevés sur le marché mondial et/ou régional dans les pays voisins. Ces mesures ont encore aggravé les contraintes auxquelles les producteurs maliens sont confrontés pour approvisionner les principaux marchés (urbains) nationaux (réseau de transport inadéquat, frais illicites, marges bénéficiaires élevées et insuffisance d’informations sur les prix). XXII. Globalement, ces deux facteurs ont résulté dans des taux nominaux de protection (TNP)115 généralement négatifs (sauf pour le coton qui, en tant que culture d’exportation non-vivrière, n’a pas été affecté et a bénéficié d’un taux nominal de protection globalement positif). Ainsi, les taux nominaux de protection de la plupart des spéculations (bétail, mais, sorgho et arachique) ont systématiquement été négatifs, ce qui a découragé la production nationale et aggravé l’insécuritéÌ? alimentaire et nutritionnelle du pays. La chaîne de valeur « riz » illustre bien le manque de cohérence des politiques du gouvernement. Le riz a bénéficié d’une grande part des dépenses publiques dans l’agriculture (infrastructures d’irrigation subventions aux intrants) mais les mesures prises par le gouvernement pour protéger le consommateur, comme les exemptions de taxes à l’importation et les prix plafond, ont pénalisé les producteurs qui n’ont pas bénéficié autant qu’ils auraient dû des prix internationaux élevés. Globalement, il semble que le riz ait bénéficié d’un TPE positif116 mais l’effet net de ces incitations contradictoires sur la production de riz est difficile à estimer et le « wedge » introduit par les politiques du gouvernement pour protéger à la fois le consommateur et le producteur est extrêmement couteux en termes de ressources publiques. XXIII. Une meilleure cohérence de la politique agricole du gouvernement permettrait d’atteindre plus efficacement les objectifs du gouvernement en terme à la fois de croissance agricole et de sécurité alimentaire du pays. Il serait donc utile d’identifier les mesures nécessaires pour mieux aligner les différentes politiques du gouvernement. La mise en Å“uvre d’une politique tarifaire et des prix plus neutre et ne pénalisant pas les producteurs les inciterait à investir dans leur exploitation (meilleures technologies et pratiques agricoles) et à diversifier leur productions en fonction des opportunités du marché. Cela devrait s’accompagner d’un ensemble de dépenses publiques à la fois transversales (réseau routier, stockage, contrôle de qualité…), mieux ciblées sur les filières prioritaires 115 Les taux nominaux de protection (TNP) sont les ratios exprimant la différence de prix entre le prix du marché (prix observés) et le prix frontière pour ces produits (le prix international ajuste par le taux de change officiel et ramené au niveau de la ferme en soustrayant les pertes et les coûts de commercialisation. Un ratio supérieur à 1,0 indique une protection et un ratio inferieur a 1,0 une protection négative (une taxation) 116 Le taux de protection effective (TPE) est l’un des indicateurs pertinents (avec le CCRI) en matière d’analyse d’un système protection tarifaire et d’incitation économique, car il permet de capter l’effet de la protection tarifaire accordée aussi bi en aux intrants qu’aux produits. 60 et prenant mieux en compte les actions nécessaires pour assurer la durabilité à moyen et long termes d’un développement agricole soutenu et inclusif. E. Le climat des affaires. XXIV. Le secteur privé est au cÅ“ur de la création de la richesse nationale et de la création d’emplois. La croissance économique future du Mali passera par le développement des investissements prives qui seront nécessaires pour diversifier l’économie et créer de la valeur ajoutée, en particulier dans l’agriculture et l’agro-industrie Le Plan National de Développement (PND 2016- 2020) et les Cadres stratégiques pour la relance Economique et le Développement Durable du Mali (2016-18 et 2019-23) visent d’ailleurs clairement à faire de l'investissement privé un moteur de la croissance économique du pays. Toutefois, bien que l’économie malienne ait connu une croissance moyenne de 5.3% pendant la période 2012-2019, cela a été du très largement à des conditions climatiques favorables à l’agriculture et au développement du secteur des mines (qui crée peu d’emplois). De fait, l’investissement privé a reculé sur la même période, passant de 12% à 8% du PIB., et le nombre de projets agréés au Code des investissements (214) a connu une baisse continuelle depuis 2012. Les investissements directs étrangers ont été en moyenne de 2,50% du PIB sur la période117 avec un recul marque en 2020 qui pourrait se prolonger si la situation sécuritaire se détériorait et les sanctions imposées par la CEDEAO devaient se prolonger. Figure No23 : XXV. Un climat des affaires peu favorable aux investissements privés, à cause de la situation sécuritaire, mais pas seulement. Le développement du secteur privé est entravé par de nombreux facteurs structurels, comme clairement identifié à la fois dans les rapport « Doing Business 2020 » qui classe le Mali au 148eme rang sur 190 pays, et ou le rapport du Forum Economique Mondial sur la compétitivité mondiale (2019) qui place le Mali au 125eme rang sur 140 pays118. L'environnement des affaires au Mali est en particulier pénalisé par les difficultés pour initier une affaire ; la protection de la propriété ; le manque de ressources humaines qualifiées ; l'accès à l'électricité, au foncier ou au services financiers ; et la fiscalité, un système judiciaire peu transparent et la corruption. Le Cadre Stratégique pour la Relance Economique et le Développement Durable 2019-23 confirme l’engagement du Gouvernement à renforcer les efforts pour mettre en Å“uvre la Politique Nationale de Promotion des Investissements (PNPI)119 pour renforcer la contribution à la croissance économique 117 Contre 4,0% en Moyenne pour 180 pays, le Mali étant classé 86eme. 118 L’environnement des affaires semble même s’être légèrement dégradé au cours des dernières année sous l’effet de la crise que traverse le pays : le Mali était en effet classé 146 eme par Doing Business 2012. 119 Gouvernement du Mali, Politique Nationale de Promotion des Investissements du Mali (version 2017 adoptée par le Conseil des Ministres du 22 février 2017). 61 et à la création d’emplois. Le Diagnostic du secteur privé réalisé en 2021 par la Banque mondiale120 a identifié des actions-clés qui devraient être mise en Å“uvre. XXVI. Le secteur agricole du Mali offre des opportunités prometteuses de croissance et de diversification. Comme déjà indiqué, le Mali est l'un des pays dont les exportations sont les moins diversifiés au monde et dispose à l’heure actuelle de la cinquième économie la moins diversifiée d'Afrique subsaharienne. La diversification de ses productions et de ses exportations agricoles ainsi que le développement d’une agro-industrie locale permettraient de créer de nouvelles opportunités de revenus pour les agriculteurs et de nombreux emplois dans les chaines de valeur en aval. XXVII. Les principaux facteurs qui stimulent la croissance de la productivité et la compétitivité dans l’agriculture et l'agro-industrie sont similaires à ceux qui favorisent les investissements privés au sens large, plus quelques autres spécifiques au secteur : un environnement institutionnel favorable ; des infrastructures de base acceptables ; un accès satisfaisant aux technologies clés ; un bon accès aux services financiers et la disponibilité de ressources humaines qualifiées… Certains de ces facteurs prennent une plus grande importance pour des investissements agricoles ou agro-industriel : les infrastructures de transport et de mise en marché ; l’acces à l’électricité pour permettre le développement des chaînes du froid, essentielles au maintien de la qualité des produits périssables ; un système de contrôle sanitaire permettant de respecter les exigences des marchés (laboratoires et sociétés de certification) … Les défis sont importants et justifient la stratégie de développement de pôles de croissance agro-industriels adoptée par le gouvernement pour concentrer ses efforts, de Facon coordonnée, sur des zones favorables pour y les investissements privés, telle que celle de l’Office 120 (Banque mondiale 2021e [à paraître]). 62 du Niger (voir plus haut) ou la zone économique spéciale (ZES) transfrontalière Sikasso-Korhogo-Bobo Dioulasso (SiKoBo) qui est en discussion avec la Cote d’Ivoire et le Burkina Faso. XXVIII. Les achats (ou concessions à long terme) de terres agricoles par des entreprises commerciales peuvent être un moteur de la modernisation de l’agriculture et de la sécurité alimentaire si les droits des populations locales et les objectifs des acquéreurs et du gouvernement étaient réconciliés. Au Mali comme dans d’autres pays africains, ils sont cependant devenus un motif Box 4 : La Zone économique spéciale (ZES) de Sikasso au Mali, Korhogo en Côte d’Ivoire et Bobo -Dioulasso au Burkina Faso La ZES a été lancée en mai 2018 et suscite de grandes attentes pour une nouvelle dynamique d’intégration économique entre les trois pays. L’ambition de la ZES est de mettre en synergie toutes les opportunités de développement entre les trois pays, en particulier dans les domaines de l’agriculture et de l’agro -business, de manière à rendre leurs économies plus complémentaires, Il s’agira spécifiquement de : (i) mettre en place l’infrastructure nécessaire aux investissements privés, (ii) développer les chaines de valeurs agricoles prioritaires allant de la production, la conservation, le transport, la transformation à l’accès aux marchés ; et (iii) d’ accroitre les échanges intra-communautaires et le développement de chaînes des valeurs capables d’intégrer compétitivement les marches mondiaux. La ZES permettra d’attirer les investissements étrangers, de dynamiser la production locale, de créer de nombreux emplois et d’améliorer l’accès à la technologie. L’opérationnalisation de la ZES nécessite des fonds financiers conséquents. La CEDEAO accompagne le projet et l’appui des partenaires techniques et financiers tels que la Banque mondiale, l a BAD, la BADEA, la BOAD, la BIDC, etc. est sollicité. Source : CREDD 2019-2023. d’inquiétude. Suite aux orientations données par la Loi d’Orientation Agricole, et pour accélérer la modernisation de l’agriculture malienne, le gouvernement a accordé d’importantes concessions agricoles a des investisseurs privés, nationaux et étrangers, en particulier dans la zone de l’Office du Niger. A l’heure actuelle, ces concessions totalisent environ 200 000 ha et concernent la production de cultures vivrières (riz) mais aussi des cultures de rente (y-compris le jatropha et autres cultures destinées à la production de bio-carburant). Selon la réglementation officielle121, toutes les concessions doivent faire l’objet d'études d'impact environnemental et social (EIES) et les communautés concernées doivent être consultées avant la décision d’octroi par une commission interministérielle gouvernementale. Selon la loi, le promoteur doit prouver que le projet aura un impact positif sur la communauté locale, soit en termes d’effet d’entrainement pour les exploitations familiales environnantes soit en termes de création d’emplois. La loi stipule également que le promoteur doit tenir compte des droits existants et payer des compensations aux détenteurs de ces droits122. Une revue des concessions déjà octroyées, semble mettre en évidence que les procédures requises par la loi ne sont en général pas respectées et que les contrepoids mis en Å“uvre pour lutter contre la corruption et l’accaparement des terres n’étaient pas efficaces. Dans un certain nombre de cas en effet :: (i) les EIES étaient très sommaires ; (ii) les populations locales n’étaient pas consultées ; (iii) le dédommagement des droits coutumiers n’était pas effectif ; (iv) les concessions entraient en concurrence directe avec les populations locales pour l’acces e a la terre et aux ressources en eau sans tenir compte des besoins des populations (y-compris les droits de transhumance et d’acces aux pâturages); et (v) peu d’efforts étaient faits par les concessionnaires pour associer les exploitations locales à leurs activités ou créer des emplois pour les populations locales123. XXIX. Les grands investissements privés dans le domaine agricole ont donné lieu à de nombreux conflits et a une mobilisation importante de la société civile malienne. Ces investissements, derrière l’objectif proclamé d’un développement agricole moderne et inclusif, ont souvent été vus comme des 121 Decree No. 08-346/P-RM 122La loi malienne ne réglemente pas entièrement les processus de compensation pour les propriétaires/utilisateurs coutumiers des terres. Comme les droits coutumiers sont considérés seulement comme des droits d'usage, aucune compensation n’est prévue pour la terre, mais seulement les constructions et les cultures etc. 123 Foreign Direct Investment (FDI) in Land in Mali; GIZ, 2009. 63 instruments d’appropriation foncière.. Des mesures énergiques devraient être prises pour empêcher la perpétuation de telles pratiques qui sont contraire aux objectifs centraux du gouvernement en termes de lutte contre la pauvreté et de rétablissement de la pays sociale. Pour garantir que le Mali et les communautés locales tirent le maximum de bénéfices des investissements privés dans le développement agricole, il faudrait que le pays adhère pleinement aux principes énoncés par les Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers124 adoptées par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) des Nations Unies (et par l’ensemble des Partenaires Techniques et financiers125) et que ces directives soient intégrées dans lois nationales pour les rendre contraignantes pour qu’elles soient effectivement appliquées.. 124 Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire ; FAO, 2012 125 Voir aussi: The Land Governance Assessment Framework: Identifying and monitoring good practices in the land sector ; World Bank, 2012. And: Guiding principles on large scale land-based investments in Africa; African Development Bank and African Union, 2014. 64 CARTE DU MALI 65 BIBLIOGRAPHIE Africa Rice (ADRAO). 2008. Guide pratique de la culture des NERICA de plateau 2008. Cotonou, Bénin : Centre du riz pour l’Afrique (ADRAO). 36pp. Africarice (2012). Redynamisation du secteur rizicole en Afrique : une stratégie de recherche pour le développement 2011-2020. Adékambi, S. A. (2005). Impact de l’adoption des variétés améliorées de riz sur la scolarisation et la santé des enfants au Bénin : cas du département des Collines. Thèse pour l’obtention du diplôme d’Ingénieur Agronome, p127. Boutsen, S. et Aertsen, J. (2013). Peut-on nourrir l’Afrique de l’Ouest avec du riz ? MO Papers, n°47-février 2013- www.mo.be/papers. Demont, M., Rutsaert, P., Ndour, M., Werbeke, W. (2013a). Reversing urban bias in Africa Rice markets: Evidence from Senegal. World Development, in press. Dethier, J. J. et Effernberger, A. (2011). 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