Cameroun Revue des Finances Publiques Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 2024 © 2024 The World Bank 1818 H Street NW, Washington DC 20433 Telephone: 202-473-1000; Internet: www.worldbank.org Certains droits réservés. Ce document est le produit du travail du personnel de la Banque mondiale. Les constatations, interprétations et conclusions exprimées dans cet ouvrage ne reflètent pas nécessairement les points de vue des administrateurs de la Banque mondiale ou des gouvernements qu’ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données incluses dans ce travail. Les frontières, couleurs, dénominations et autres informations présentées sur les cartes de cet ouvrage n’impliquent aucun jugement de la part de la Banque mondiale concernant le statut juridique d’un territoire ou l’approbation ou l’acceptation de ces frontières. Droits et autorisations Le matériel contenu dans cette œuvre est soumis au droit d’auteur. Parce que la Banque mondiale encourage la diffusion de ses connaissances, cet ouvrage peut être reproduit, en tout ou en partie, à des fins non commerciales à condition que l’entière citation de cet ouvrage soit indiquée. Citation—Veuillez citer l’ouvrage comme suit : « Banque mondiale. 2024. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, dépenser mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035. Banque mondiale : Washington DC » Toutes les questions concernant les droits et licences, y compris les droits subsidiaires, doivent être adressées à World Bank Publications, The World Bank Group, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA ; télécopieur : 202-522-2625 ; courrier électronique : pubrights@worldbank.org. Cameroun Revue des Finances Publiques Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 2024 Remerciements La Revue des finances publiques du Cameroun a été préparée par une vaste équipe multisectorielle d’experts de la Banque mondiale dirigée par Amina Coulibaly (Economiste principale) et composée de Ferdinand Owoundi Fouda (Economiste), Francis Ghislain Ngomba Bodi (Economiste), Chimène Diane Djapou Fouthe (Consultante), Vincent De Paul Mboutchouang (Spécialiste principal de l’éducation), Aissatou Diack (Economiste principale de la santé), Mouhamadou Moustapha Lo (Spécialiste principal de l’éducation), M’Bahly Maud-Andrée Kouadio IV (Consultante), Hugo Brousset Chaman (Spécialiste principal de la protection sociale), Paula Maria Cerutti (Spécialiste principale de la protection sociale), Francisco Vazquez Ahued (Consultant), Erkin Mamadaliev (Spécialiste principal de la protection sociale) et Ioana Alexandra Botea (Spécialiste principale de la protection sociale), Marieta Fall (Spécialiste principale du secteur public), Peter D. Bachrach (Consultant), Jade Mali Mizutani (Spécialiste principale du secteur public) et Waewnet Sukkasem (Consultante). Irene Sitienei (Assistante de programme), Pinar Baydar (Analyste des opérations), Ifeoma Clementina Ikenye (Assistante d’équipe) et Hilary Fuh Cham (Assistant d’équipe), ont facilité le processus de recherche, coordonné les déplacements en mission et soutenu la préparation et la diffusion du rapport à différentes étapes. Vito Raimondi a conçu le design du rapport. L’équipe remercie Chadi Bou Habib (Economiste principal), Fulbert Tchana Tchana (Chef de programme Croissance équitable, Finance et Investissement pour les Etats du Sahel), Assane Dieng (Spécialiste principal de l’éducation), Rick Emery Tsouck Ibounde (Economiste principal), Massimo Mastruzzi (Economiste principal), Alonso Sanchez (Economiste principal), Samer Al- Samarrai (Economiste principal), Roland White (Spécialiste principal du développement urbain) et Silver Namunane (Economiste) qui ont agi en tant que pairs évaluateurs pour ce rapport. Le rapport a été préparé sous la supervision générale et la direction de Cheick Fantamady Kante (Directeur des Opérations de la Banque Mondiale pour le Cameroun), Abebe Adugna (Directeur régional Croissance équitable, Finance et Investissement pour l’Afrique de l’Ouest et centrale), Sandeep Mahajan (Chef de l’Unité Macroéconomie-Commerce-Investissement pour l’Afrique Centrale et de l’Ouest). L’équipe remercie Guillemette Sidonie Jaffrin (Responsable des opérations pour le Cameroun), Keiko Kubota (ancienne Responsable des opérations à Yaoundé), Robert Johann Utz (Economiste en chef pour la CEMAC), Raju Singh (précédent Economiste en chef pour la CEMAC), Clelia Rontoyanni (Chef de programme Croissance équitable, Finance et Investissement pour la CEMAC) et Nathalie Lahire (Coordonnateur des programmes Développement Humain dans la CEMAC) pour leurs conseils et leur soutien tout au long de la préparation de ce travail. L’équipe remercie les équipes techniques des différentes administrations publiques du Cameroun pour leur coopération et leur collaboration. Le rapport a notamment bénéficié d’échanges avec les autorités à différents stades de son élaboration. III Table des matières LISTE DES GRAPHIQUES V LISTE DES TABLEAUX IX LISTE DES ENCADRÉS X LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS XI 1 Résumé exécutif 1 Options politiques pour renforcer les finances publiques du Cameroun 9 2 Introduction aux Finances Publiques du Cameroun 12 3 Évaluation de la performance macrobudgétaire du Cameroun 19 3.1 Tendances macroéconomiques 20 3.2 Performance budgétaire 22 3.3 Recettes 24 3.4 Dépenses 26 3.5 Créer un espace budgétaire pour une croissance inclusive à moyen terme 29 3.5.1 Perspectives en situation de référence 29 3.5.2 Évaluation des risques budgétaires 31 3.5.3 Gérer l’ajustement budgétaire 34 4 Stimuler la mobilisation des recettes fiscales 35 4.1 Tendances des recettes fiscales 36 4.1.1 Potentiel de recettes fiscales 41 4.2 Politique fiscale 44 4.2.1 Impôt sur les revenus des personnes physiques 44 4.2.2 Impôt sur les sociétés 50 4.2.3 Taxe sur la valeur ajoutée 54 4.2.4 Droits d’accise 58 4.2.5 Taxes sur le commerce international 62 4.2.6 Autres taxes 63 4.2.7 Dépenses fiscales 65 4.3 Administration fiscale 70 4.3.1 Corruption 76 4.3.2 Économie informelle 77 4.4 Options de réformes 79 4.4.1 Considérations en matière de réforme des politiques fiscales 79 4.4.2 Considérations en matière de réforme de l’administration fiscale 86 5 Allocation et exécution des dépenses publiques 93 5.1 Allocation budgétaire 94 5.1.1 Dépenses d’investissement public 101 5.2 Exécution du budget 105 5.2.1 Marchés publics 109 5.2.2 Gestion de l’investissement public 110 5.3 Réformes budgétaires 112 IV 5.4 Options de réformes 117 6 Stimuler le développement du capital humain à travers de meilleures dépenses sociales 120 6.1 Résultats et dépenses en matière de capital humain 121 6.2 Vers un système éducatif mieux géré générant de meilleurs résultats 123 6.2.1 Performance et résultats du secteur de l’éducation 123 6.2.2 Dépenses du secteur de l’éducation 129 6.2.3 Équité régionale dans le secteur de l’éducation 132 6.2.4 Messages clés et recommandations 136 6.3 Investir dans un secteur de la santé efficace, inclusif et résilient 139 6.3.1 Performance du secteur de la santé 140 6.3.2 Résultats du secteur de la santé 142 6.3.3 Dépenses dans le secteur de la santé 146 6.3.4 Equité régionale dans l’accès aux services de santé 155 6.3.5 Équité et efficacité 161 6.3.6 Efficience 163 6.3.7 Options de réformes 164 6.4 Améliorer le système de protection sociale du Cameroun 166 6.4.1 Programmes de protection sociale/performance et résultats 166 6.4.2 Dépenses en protection sociale 170 6.4.3 Analyse distributive des subventions aux combustibles fossiles 176 6.4.4 Options de réformes du système de protection sociale 179 6.5 Options de réformes pour booster le capital humain au Cameroun 179 7 Promouvoir une prestation de services publics efficace à travers la décentralisation budgétaire 183 7.1 Contexte politique et socioéconomique de la décentralisation au Cameroun 186 7.2 Le processus de décentralisation budgétaire comme voie d’amélioration de la prestation de services 189 7.3 Décentralisation budgétaire et cadre de dépenses locales 192 7.3.1 Recettes propres des collectivités locales 193 7.3.2 Subventions et transferts centraux 197 7.4 Options de réformes 208 Réferences 213 8 Annexes 215 V Liste des graphiques GRAPHIQUE 2-1. TAUX D’INCIDENCE DE LA PAUVRETE AU CAMEROUN EN SE BASANT SUR LE SEUIL DE 13 PAUVRETE INTERNATIONAL DE 2,15 DOLLARS PPA PAR JOUR (% DE LA POPULATION), 2001-2014 GRAPHIQUE 2-2. TAUX D’INCIDENCE DE LA PAUVRETE AU CAMEROUN ET DANS LES PAYS DE COMPARAISON 13 EN SE BASANT SUR LE SEUIL DE PAUVRETE INTERNATIONAL DE 2,15 DOLLARS PPA PAR JOUR (% DE LA POPULATION), DERNIERES ESTIMATIONS DISPONIBLES GRAPHIQUE 3-1. PIB PAR HABITANT, PPA 21 GRAPHIQUE 3-2. TAUX D'INVESTISSEMENT ET D'EPARGNE (MOYENNE 2010-2022 EN % DU PIB) 21 GRAPHIQUE 3-3. DEPENSES ET RECETTES PUBLIQUES TOTALES PAR TYPE, 2010-2021 (% DU PIB) 23 GRAPHIQUE 3-4. COMPOSITION DE LA DETTE PUBLIQUE : DETTE PUBLIQUE PAR CREANCIER, 2021 (EN 24 MILLIONS USD ET % DU TOTAL) GRAPHIQUE 3-5. CONTRIBUTION A LA VARIATION DU RAPPORT DETTE PUBLIQUE SUR PIB PAR SOURCE, 24 2009–21 GRAPHIQUE 3-6. RECETTES FISCALES DANS LES PAYS DE LA CEMAC, 2022 (% DU PIB) 25 GRAPHIQUE 3-7. RECETTES FISCALES DU CAMEROUN ET DES PAYS DE COMPARAISON (% DU PIB) 25 GRAPHIQUE 3-8. DEPENSES PUBLIQUES PAR CATEGORIE, 2015-2021 26 GRAPHIQUE 3-9. DEPENSES PUBLIQUES, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS, 2015–21 28 GRAPHIQUE 3-10. DEPENSES PUBLIQUES, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON, 2015–21 28 GRAPHIQUE 3-11. DEPENSES PUBLIQUES PAR CATEGORIE, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS (% DU PIB) 28 GRAPHIQUE 3-12. CAMEROUN ET PAYS PAIRS SELECTIONNES : EFFICIENCE DE L’INVESTISSEMENT PUBLIC 29 GRAPHIQUE 3-13.CAMEROUN : TRAJECTOIRE D’AJUSTEMENT BUDGETAIRE, 2019-2025 30 GRAPHIQUE 3-14 ÉVALUATION DES RISQUES BUDGETAIRES : SCENARIOS ALTERNATIFS 34 GRAPHIQUE 4-1. RECETTES MOYENNES PAR TYPE, 2010-2021 (% DU TOTAL) 36 GRAPHIQUE 4-2. RECETTES FISCALES PAR TYPE D’IMPOT, 2010-2021 (% PIB) 38 GRAPHIQUE 4-3. COMPOSITION DES RECETTES FISCALES, MOYENNE 2010-2021 (% DU TOTAL) 38 GRAPHIQUE 4-4. CONTRIBUTION AUX RECETTES FISCALES PAR SOURCE, MOYENNE 2010-2013, 2014-2017, 38 2018-2021 (% DU TOTAL) GRAPHIQUE 4-5. RECETTES FISCALES MOYENNES ET PIB PAR HABITANT PAR GROUPE DE PAYS, 2016-20 39 (% DU PIB) GRAPHIQUE 4-6. RECETTES FISCALES MOYENNES, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS, 2016-2020, (% PIB) 39 GRAPHIQUE 4-7. RECETTES FISCALES, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS DE L’AFSS, 2010-2021, (% PIB) 40 GRAPHIQUE 4-8. RECETTES FISCALES, PAYS PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 2010-2021 (% DU PIB) 40 GRAPHIQUE 4-9. CAPACITE FISCALE, 2010-20, (% DU PIB) 42 GRAPHIQUE 4-10. EFFORT FISCAL, 2010-20 42 GRAPHIQUE 4-11. RECETTES DE L’IRPP, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS, 2010-2021, (% PIB) 44 GRAPHIQUE 4-12. RECOUVREMENT DE L’IRPP, CAMEROUN ET PAYS PAIRS, 2010-2021, (% PIB) 44 GRAPHIQUE 4-13. RATIO DE RECETTES ET DE PRODUCTIVITE DE L’IRPP, 2010-2021 46 GRAPHIQUE 4-14. RECETTES DE L’IRPP ET RATIO DE PRODUCTIVITE DE L’IRPP DES PAYS PAIRS STRUCTURELS 47 ET ASPIRATIONNELS, 2020 VI GRAPHIQUE 4-15. RECETTES DE L’IS PAR GROUPES DE PAYS DE L’AFSS, 2010-2021 (% DU PIB) 50 GRAPHIQUE 4-16. RECOUVREMENT DE L’IS, PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 2010-2021, (% PIB) 50 GRAPHIQUE 4-17. RATIO DE REVENUS ET DE PRODUCTIVITE DE L’IS, 2010-2021 53 GRAPHIQUE 4-18. REVENUS DE L’IS ET RATIO DE PRODUCTIVITE DE L’IS, POUR LES PAIRS STRUCTURELS ET 53 ASPIRATIONNELS, 2020 GRAPHIQUE 4-19. RECETTES DE TVA PAR GROUPE DE PAYS DE L’AFSS, 2010-2021 (% DU PIB) 55 GRAPHIQUE 4-20.COLLECTE DE LA TVA, PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 2010-2021 (% DU PIB) 55 GRAPHIQUE 4-21. COMPOSITION DES RECETTES DE TVA, 2010-2021, (% DES RECETTES DE TVA) 56 GRAPHIQUE 4-22. TAUX ET RECOUVREMENT DE LA TVA, PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 2020 56 GRAPHIQUE 4-23. RECETTES, PRODUCTIVITE ET EFFICIENCE-C DE LA TVA, 2010-2020 57 GRAPHIQUE 4-24. PRODUCTIVITE ET EFFICIENCE-C DE LA TVA, PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 57 2020 GRAPHIQUE 4-25. RECETTES DES DROITS D’ACCISE, GROUPES DE PAYS DE L’AFSS, 2010-2021, (% PIB) 60 GRAPHIQUE 4-26. RECETTES DES DROITS D’ACCISE, PAIRS STRUCTURELS ET ASPIRATIONNELS, 2010-2021 60 (% DU PIB) GRAPHIQUE 4-27. RECETTES DES TAXES SUR LE COMMERCE, GROUPES DE PAYS DE L’AFSS, 2010-2021, (% PIB) 62 GRAPHIQUE 4-28. RECETTES DES TAXES SUR LE COMMERCE DANS DES PAYS SELECTIONNES DE L’AFSS 62 ET PAYS PAIRS ASPIRATIONNELS, 2010-2021 (% DU PIB) GRAPHIQUE 4-29. DEPENSES FISCALES MOYENNES PAR TYPE D’IMPOT, 2017-2021 68 GRAPHIQUE 4-30. COUT MOYEN DES DEPENSES FISCALES PAR REGIME FISCAL, 2016-2021 68 GRAPHIQUE 4-31. DEPENSES FISCALES PAR BENEFICIAIRE, 2016-2021 69 GRAPHIQUE 4-32. COUT DE RECOUVREMENT DES IMPOTS DANS DES PAYS SELECTIONNES DE L’AFSS, 71 2020 (% DES RECETTES) GRAPHIQUE 4-33. COUT DE RECOUVREMENT DES IMPOTS PAR BLOC ECONOMIQUE REGIONAL, 2020, (% 71 DES REVENUS) GRAPHIQUE 4-34. ENTREPRISES CONSIDERANT QUE LA FISCALITE EST UNE CONTRAINTE (%) 75 GRAPHIQUE 4-35. FARDEAU DU PAIEMENT DES IMPOTS 75 GRAPHIQUE 4-36. CHARGE FISCALE ET POST DECLARATION 75 GRAPHIQUE 4-37. CORRUPTION DANS LE RECOUVREMENT DES IMPOTS 75 GRAPHIQUE 4-38. DIX PRINCIPAUX OBSTACLES DANS L’ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES, EN SE BASANT 78 SUR LE VECU DES ENTREPRISES (% DES ENTREPRISES) GRAPHIQUE 4-39. ÉCONOMIE INFORMELLE, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON, 2019, (% PIB) 78 GRAPHIQUE 4-40. FONCTIONS ESSENTIELLES DES CENTRES DES IMPÔTS 87 GRAPHIQUE 5-1. DEPENSES PUBLIQUES PAR CATEGORIE, CAMEROUN ET GROUPES DE PAYS (% DES 94 DEPENSES), MOYENNE 2015-2021 GRAPHIQUE 5-2. MASSE SALARIALE, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON (% PIB), MOYENNE 2015–21 95 GRAPHIQUE 5-3. PAIEMENTS D’INTERETS, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON (% PIB), MOYENNE 95 2015–21 GRAPHIQUE 5-4. PAIEMENTS DE PENSIONS, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON (% DU PIB), MOYENNE 96 2015–21 GRAPHIQUE 5-5. BIENS ET SERVICES, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON (% DU PIB), MOYENNE 2015–21 96 GRAPHIQUE 5-6. DEPENSES PUBLIQUES PAR CLASSIFICATION ECONOMIQUE (EN % DU PIB), 2016-2021 97 GRAPHIQUE 5-7. DEPENSES COMMUNES EXPRIMEES EN POURCENTAGE DES DEPENSES TOTALES 100 VII GRAPHIQUE 5-8. DEPENSES PUBLIQUES D’INVESTISSEMENT (% DU PIB), 2016-21 102 GRAPHIQUE 5-9. REPARTITION SECTORIELLE DU BUDGET D’INVESTISSEMENT (EN %), 2016-21 102 GRAPHIQUE 5-10. DISTANCE PAR RAPPORT A LA FRONTIERE D’EFFICIENCE ET DEPENSES EN 103 INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT ROUTIER, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON GRAPHIQUE 5-11. INVESTISSEMENT PUBLIC (% PIB, %) ET CROISSANCE DU PIB 2007-2021 104 GRAPHIQUE 5-12. ESTIMATION DE LA REPONSE DU PIB AU CHOC DE L’INVESTISSEMENT PUBLIC (EN %), 104 GRAPHIQUE 5-13. POURCENTAGE PAR RAPPORT AU BUDGET APPROUVE, CAMEROUN ET PAYS DE 105 COMPARAISON (EN %). 2010-21 GRAPHIQUE 5-14. DECOMPOSITION DES RETARDS DE PAIEMENT (EN % DES DEPENSES TOTALES, MOYENNE 109 2015-20) GRAPHIQUE 6-1. DÉPENSES D’ÉDUCATION ET SCORES AUX TESTS, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON 122 (% PIB ET SCORE) GRAPHIQUE 6-2. DÉPENSES DE SANTÉ ET MORTALITÉ INFANTILE, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON 122 (% PIB ET TAUX) GRAPHIQUE 6-3. EFFECTIFS PAR CYCLE D’ENSEIGNEMENT (EN MILLIERS), 2000-2021 126 GRAPHIQUE 6-4.TAUX BRUTS DE SCOLARISATION DANS L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE, CAMEROUN ET PAYS 127 DE COMPARAISON, 2012, 2019 (% DE LA TRANCHE D’ÂGE) GRAPHIQUE 6-5. TAUX D’ACHEVEMENT DU CYCLE PRIMAIRE (%), 2019 128 GRAPHIQUE 6-6. DEPENSES PUBLIQUES D’EDUCATION, CAMEROUN ET PAYS DE COMPARAISON (% PIB), 129 2010-21 GRAPHIQUE 6-7. DEPENSES D’EDUCATION 129 GRAPHIQUE 6-8. DEPENSES D’EDUCATION PAR TYPE (% DU TOTAL), 2015-2021 131 GRAPHIQUE 6-9. TAUX D’EXECUTION DES DEPENSES D’EDUCATION PAR TYPE (EN %), 2015-2021 131 GRAPHIQUE 6-10. RATIO ELEVES-ENSEIGNANT QUALIFIE DANS L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE, CAMEROUN 131 ET PAYS PAIRS, 2019. GRAPHIQUE 6-11. RATIOS ELEVES-ENSEIGNANT DANS L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE, AVEC ET SANS LES 133 ENSEIGNANTS REMUNERES PAR LES PARENTS, PAR REGION, 2016-ET 2021 GRAPHIQUE 6-12. RATIO ELEVES/MANUEL PAR REGION (NOMBRE MOYEN D’ELEVES PAR MANUEL DE 134 MATHEMATIQUES ET DE LECTURE DANS L’ENSEIGNEMENT PRIMAIRE), 2020/2021 GRAPHIQUE 6-13. POURCENTAGE D’ECOLES PRIMAIRES PUBLIQUES AYANT ACCES A L’ELECTRICITE ET A 134 L’EAU POTABLE PAR REGION, 2015-ET 2021 GRAPHIQUE 6-14. MEME S’IL S’EST AMELIORE AU COURS DE CES DERNIERES ANNEES, LE NIVEAU DE 135 MORTALITE MATERNELLE AU CAMEROUN RESTE TRES ELEVE… GRAPHIQUE 6-15. … ET LE NIVEAU DE MORTALITE INFANTILE Y EST PLUS ELEVE QUE DANS LA PLUPART 144 DE SES PAYS PAIRS. GRAPHIQUE 6-16. POURCENTAGE DE FEMMES ENCEINTES COUVERTES PAR LA THÉRAPIE ARV 144 GRAPHIQUE 6-17. POURCENTAGE DES ENFANTS VACCINÉS ÂGÉS DE 12 À 23 MOIS 144 GRAPHIQUE 6-18. FAIBLE QUALITE DES SOINS DE SANTE AU CAMEROUN 144 GRAPHIQUE 6-19. DYNAMIQUE DES DEPENSES DE SANTE 145 GRAPHIQUE 6-20. ÉCART ENTRE LES ALLOCATIONS BUDGÉTAIRES INITIALES ET LES ENGAGEMENTS 148 GRAPHIQUE 6-21. CHANGEMENT DES PRIORITES DU GOUVERNEMENT EN MATIERE DE DEPENSES DE SANTE 149 GRAPHIQUE 6-22. ALLOCATION DES DÉPENSES PAR FONCTION ET MALADIE, 2019-2021 150 GRAPHIQUE 6-23. OFFRE ET DISTRIBUTION DES FORMATIONS SANITAIRES PAR REGION 152 GRAPHIQUE 6-24. DEPENSES DE PROTECTION SOCIALE PAR TYPE (% PIB), 2017-2021 156 GRAPHIQUE 6-25. DEPENSES D’ASSISTANCE SOCIALE, CAMEROUN ET PAYS PAIRS (% PIB), 2016-OU ANNEE 162 DES DERNIERES DONNEES VIII GRAPHIQUE 6-26. AFFILIÉS AU RÉGIME DE PENSION DU SECTEUR PUBLIC 171 GRAPHIQUE 6-27. PERFORMANCE FINANCIERE DU REGIME DE RETRAITE DU SECTEUR PUBLIC 171 GRAPHIQUE 6-28. COÛT BUDGÉTAIRE DES SUBVENTIONS AUX CARBURANTS, CAMEROUN ET PAYS DE 172 COMPARAISON (POURCENTAGE DU PIB), 2019-2022 GRAPHIQUE 6-29. BUDGET ET DÉPENSES EXÉCUTÉES PAR LES MINISTÈRES CHARGÉS DE LA PROTECTION 173 SOCIALE GRAPHIQUE 6-30. REPARTITION DES DEPENSES EN PROTECTION SOCIALE AU SEIN DES REGIONS DU 174 CAMEROUN. GRAPHIQUE 6-31. IMPACT DES SCENARIOS DIVERS DE REDUCTION DES SUBVENTIONS AUX CARBURANTS 175 (PERTE MOYENNE PAR MENAGE EN MILLIERS DE FCFA), SUIVANT LES MILIEUX URBAINS ET RURAUX ET SUIVANT LES QUINTILES DE REVENUS GRAPHIQUE 6-32. IMPACT DE LA PAUVRETE SUR LA REPARTITION DES DEPENSES DE CONSOMMATION 176 GRAPHIQUE 6-33. IMPACT DES SCÉNARIOS DIVERS DE RÉDUCTION DES SUBVENTIONS AUX CARBURANTS 177 (PERTE MOYENNE PAR MÉNAGE EN MILLIERS DE FCFA), SUIVANT LES MILIEUX URBAINS ET RURAUX ET SUIVANT LES QUINTILES DE REVENUS GRAPHIQUE 6-34. IMPACT DE LA PAUVRETÉ SUR LA RÉPARTITION DES DÉPENSES DE CONSOMMATION 178 GRAPHIQUE 7-1. RÉGIONS, COMMUNAUTÉS URBAINES ET COMMUNES 184 GRAPHIQUE 7-2. STATISTIQUES INFRANATIONALES, CAMEROUN ET GROUPE DE PAYS PAIRS 191 GRAPHIQUE 7-3. SOURCES DE REVENUS DES CTDS 195 GRAPHIQUE 7-4. ALLOCATION DES RECETTES DES CENTIMES ADDITIONNELS (CAC) 195 GRAPHIQUE 7-5. DYNAMIQUE DES RECETTES COMMUNALES 196 GRAPHIQUE 7-6. ALLOCATIONS DE LA DOTATION GÉNÉRALE À LA DÉCENTRALISATION EN XAF, 2010-2023 198 GRAPHIQUE 7-7. FORTE DÉPENDANCE DES CTDS AUX TRANSFERTS DU GOUVERNEMENT CENTRAL 199 GRAPHIQUE 7-8. LE NIVEAU D’ALLOCATION BUDGÉTAIRE AUX CTD EST FAIBLE 200 GRAPHIQUE 7-9. PART DES DÉPENSES AFFECTÉES À L’ADMINISTRATION CENTRALE, 2016–2021 201 GRAPHIQUE 7-10. LES FRAIS DE PERSONNEL REPRÉSENTENT UNE PART IMPORTANTE DES COÛTS DE 202 FONCTIONNEMENT DES CTD GRAPHIQUE 7-11. PART DES ALLOCATIONS AUX INFRASTRUCTURES PAR RÉGION, 2016-2021 203 GRAPHIQUE 7-12. TRANSFERTS AUX CTD EXPRIMÉS EN POURCENTAGE DES DÉPENSES, 2016-2021 204 GRAPHIQUE 7-13. RÉPARTITION DES DÉPENSES D’ÉDUCATION ET DE SANTÉ DU GOUVERNEMENT CENTRAL 205 PAR HABITANT (XAF) IX Liste des tableaux TABLEAU 1-1. ACTIONS POLITIQUES CLES REALISABLES A COURT ET MOYEN TERME 9 TABLEAU 3-1. VARIATION DES RECETTES, DES DEPENSES ET DU DEFICIT BUDGETAIRE GLOBAL, 2010-2016 22 ET 2017-2022 (% DU PIB, METHODE DE COMPTABILITE D’EXERCICE) TABLEAU 3-2. SCENARIOS ALTERNATIFS 32 TABLEAU 4-1. ESTIMATIONS DE L’ÉLASTICITÉ GLOBALE DE L’IMPÔT DU CAMEROUN, 2010-2021 43 TABLEAU 4-2. REGIMES FISCAUX SPECIAUX POUR LES PETITES ENTREPRISES 49 TABLEAU 4-3. TAUX D’IS PAR TYPE D’ENTREPRISE 51 TABLEAU 4-4. PRINCIPALES REFORMES DES DROITS D’ACCISE, 2015-2019 61 TABLEAU 4-5. MESURES DE DÉPENSES FISCALES IDENTIFIÉES ET ÉVALUÉES, 2015-2021 67 TABLEAU 4-6. DÉPENSES FISCALES EN RAPPORT À LA COVID-19 PAR SECTEUR, 2020-2021 70 TABLEAU 4-7. SOUS-CATEGORIES DU SYSTEME A TAUX FORFAITAIRE 82 TABLEAU 4-8. RECOMMANDATIONS POUR AMELIORER LA MOBILISATION DES RECETTES FISCALES 89 TABLEAU 5-1.DEPENSES EN BIENS ET SERVICES PAR TYPE (PARTS EN %), 2015-21 98 TABLEAU 5-2. COMPOSITION ADMINISTRATIVE DES DEPENSES (% DU TOTAL), 2015-20 ET MOYENNE 99 TABLEAU 5-3.DEPENSES COMMUNES, ET DEPENSES EN BIENS ET SERVICES CLASSEES DANS LES DEPENSES 101 COMMUNES (2015-2020) TABLEAU 5-4. RÉVISION ET EXÉCUTION BUDGÉTAIRES (PARTS EXPRIMÉES EN % ET ÉVOLUTION DES PARTS), 106 MOYENNE 2015-2020 TABLEAU 5-5. PART IMPORTANTE DU BUDGET ACCUMULEE SOUS FORME D’ARRIERES INTERIEURS 108 TABLEAU 5-6. INDICATEURS DE PERFORMANCE DANS L’EXÉCUTION DES MARCHÉS PUBLICS AU CAMEROUN 110 TABLEAU 5-7. RÉSUMÉ DE LA MISE EN ŒUVRE DES RECOMMANDATIONS DU PER 2018 SUR LA COMPOSITION 116 ET LA MISE EN ŒUVRE DES DÉPENSES PUBLIQUES TABLEAU 5-8. RECOMMANDATIONS POUR AMÉLIORER L'ALLOCATION ET L'EXÉCUTION DES DÉPENSES 118 PUBLIQUES. TABLEAU 6-1. INDICE D’ACCÈS ET DE QUALITÉ DES SOINS DE SANTÉ AU CAMEROUN, 2010-19 146 TABLEAU 6-2. DONNÉES BOOST VS DONNÉES COMPTES NATIONAUX DE SANTÉ (CNS), 2015-2020 149 TABLEAU 6-3. FINANCEMENT DES DÉPENSES DE SANTÉ 154 TABLEAU 6-4. DÉFICIT DE PERSONNEL ET OBJECTIFS DE RECRUTEMENT 157 TABLEAU 6-5. PART DES FORMATIONS SANITAIRES AYANT CONNU DES RUPTURES DE STOCKS DE 158 MÉDICAMENTS ESSENTIELS EN 2017, PAR RÉGION TABLEAU 6-6. ÉCHANTILLONS PRIS EN COMPTE POUR LES CALCULS DE PRÉVALENCE 160 TABLEAU 6-7. MESURES DE RÉFORMES POUR AMÉLIORER L’ÉFFICACITÉ DES DÉPENSES EN CAPITAL HUMAIN 179 TABLEAU 7-1. RÉSUMÉ DE LA MISE EN OEUVRE DES RECOMMANDATIONS DU PER DE 2018 DU CAMEROUN 185 SUR LA DÉCENTRALISATION TABLEAU 7-2. TRANSFERTS D’INVESTISSEMENT ET DE FONCTIONNEMENT PAR RÉGION, 2019-2021 (EN 204 MILLIONS XAF) TABLEAU 7-3. TRANSFERTS DU MINEPAT AUX CTD, 2017-2021 206 TABLEAU 7-4. PARAMÈTRES FINANCIERS SÉLECTIONNÉS, 2017-2021 (MOYENNE) 207 TABLEAU 7-5. MESURES DE RÉFORMES POUR ACCÉLÉRER LA DÉCENTRALISATION BUDGÉTAIRE 212 X Liste des encadrés ENCADRÉ 2-1. PRINCIPAUX CONSTATS DE LA REVUE DES DÉPENSES PUBLIQUES DE 2018 17 ENCADRÉ 4-1. METHODES D’ESTIMATION DU POTENTIEL DE RECETTES FISCALES 42 ENCADRÉ 4-2. PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DE L’IMPOT SUR LE REVENU DES PERSONNES PHYSIQUES 45 AU CAMEROUN ENCADRÉ 4-3. PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DE L’IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS AU CAMEROUN 51 ENCADRÉ 4-4. PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DE LA TVA AU CAMEROUN 55 ENCADRÉ 4-5. PRINCIPALES CARACTERISTIQUES DES DROITS D’ACCISE DU CAMEROUN 59 ENCADRÉ 4-6. TAXES FONCIERES AU CAMEROUN 65 ENCADRÉ 4-7. RAPPORT SUR LES COÛTS DES DÉPENSES FISCALES AU CAMEROUN 66 ENCADRÉ 4-8. ÉVALUATION DES DÉPENSES FISCALES EN RAPPORT À LA PANDÉMIE DE COVID-19 67 ENCADRÉ 4-9. PRINCIPAUX CONSTATS DU RAPPORT TADAT 2017 72 ENCADRÉ 4-10. RÉFORMES EN RAPPORT À LA GOUVERNANCE AU RWANDA POUR AMÉLIORER LA 77 CONFORMITÉ FISCALE ENCADRÉ 4-11. EXPERIENCE INTERNATIONALE DU RECOURS A LA FACTURATION ELECTRONIQUE 88 OBLIGATOIRE POUR LA TVA ENCADRÉ 5-1. PART ELEVEE DES DEPENSES COMMUNES 100 ENCADRÉ 5-2. EST-CE QUE LE GOUVERNEMENT DU CAMEROUN INVESTIT TROP OU PAS ASSEZ ? UNE 103 EVALUATION DU MULTIPLICATEUR D’INVESTISSEMENT PUBLIC ENCADRÉ 5-3. LES DEFIS DE LA GESTION DE L’INVESTISSEMENT PUBLIC AU CAMEROUN 111 ENCADRÉ 5-4. PRINCIPALES INNOVATIONS DU CODE DES MARCHÉS PUBLICS DU CAMEROUN 2018 114 ENCADRÉ 5-5. PRINCIPALES CONCLUSIONS DE LA REVUE DES DÉPENSES PUBLIQUES DE 2018 SUR 115 L’ALLOCATION ET L’EXÉCUTION DU BUDGET ENCADRÉ 6-1. CONFLITS, REFUGIES ET DEPLACEMENTS INTERNES 123 ENCADRÉ 6-2. REFORMES DU SECTEUR EDUCATIF AU CAMEROUN DEPUIS LE PER DE 2018 124 ENCADRÉ 6-3. STRATÉGIE DE SANTÉ DU CAMEROUN (SSC), 2016-2027 139 ENCADRÉ 7-1. ROLE ET POUVOIRS DES CTD EN VERTU DE LA LOI 187 ENCADRÉ 7-2. COUTS ET AVANTAGES DE LA DECENTRALISATION BUDGETAIRE. REVUE DOCUMENTAIRE 190 ENCADRÉ 7-3. LE FONDS SPÉCIAL D’ÉQUIPEMENT ET D’INTERVENTION INTERCOMMUNALE (FEICOM) 193 XI Liste des sigles et abbreviations BEAC Banque des États de l'Afrique Centrale BIP Budget d'Investissement Public BOOST Outil CAC Centimes Additionnels Communaux CEMAC Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale CET Tarif extérieur commun CEMAC FCFA Franc de la Communauté Financière Africaine (Communauté Financière Africaine Franc) CGCT Code Général des Collectivités Territoriales Décentralisées COVID 19 Maladie du coronavirus CTD Collectivité territoriale décentralisée DDI Droit de douane à l'importation (droits de douane à l'importation) DGB Direction Générale du Budget, Ministère des Finances DGD Direction Générale des Douanes, Ministère des Finances DGI Direction Générale des Impôts, Ministère des Finances DSA Analyse de viabilité de la dette ECAM Enquête Camerounaise auprès des ménages FEICOM Fonds spécial d'équipement et d'intervention intercommunale FERDI Fondation pour les études et la recherche sur le développement international PIB Produit intérieur brut HAQ Indice d’accès et de qualité des soins de santé HCI Indice du capital humain IFMIS Système intégré d’information sur la gestion financière FMI Fonds monétaire international INS Institut National des Statistiques LIC Pays à faible revenu PRITI Pays à revenu intermédiaire tranche inférieure PRITS Pays à revenu intermédiaire tranche supérieure MINAT Ministère de l'Administration Territoriale MINAS Ministès des Affaire Sociales MINDDEVEL Ministère de la Décentralisation et du Développement Local MINEDUB Ministère de l'Éducation de Base MINEDUB Ministère de l'Éducation de Base MINEPAT Ministère de l'Économie de la Planification et de l'Aménagement du Territoire MINFI Ministère des Finances MINFOPRA Ministère de la Fonction Publique et de la Reforme Administrative MINMAP Ministère des Marchés Publics MINSANTE Ministère de la Santé Publique MTRS Stratégie de revenus à moyen terme FBP Financement basé sur la performance GFP Gestion des finances publiques XII PER Revue des dépenses publiques PFR Revue des finances publiques POA Domaine de résultats de performance (dans le cadre de TADAT) PPP Parité de pouvoir d'achat SENDs Soldes engagés non décaissés (dette contractée mais non décaissée) PME Petites et moyennes entreprises SND30 Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 Entreprise Entreprise d'état publique AfSS Afrique sub-saharienne TADAT Outil d’évaluation diagnostique de l’administration fiscale EFTP Enseignement et formation techniques et professionnels CSU Couverture maladie universelle DOLLARS Dollar des États-Unis d'Amérique AMÉRICAINS $ T.V.A. Taxe sur la valeur ajoutée WDI Base de données des indicateurs du développement dans le monde de la Banque mondiale OMS Organisation Mondiale de la Santé ZEP Zones d'Education Prioritaire 1 1 RÉSUMÉ EXÉCUTIF Les récents événements liés notamment à la pandémie de COVID-19, aux multiples chocs externes qui en ont découlé et aux conflits dans diverses régions du Cameroun ont plongé le Cameroun dans une situation budgétaire particulièrement précaire. La pandémie de COVID-19 et les crises qui en ont résulté ont eu des conséquences budgétaires négatives dans la mesure où elles ont entrainé une baisse des recettes intérieures et des dépenses publiques supplémentaires pour atténuer les impacts de ces crises. En parallèle, les conflits dans six régions du Cameroun sur dix ont entravé l’activité économique, la génération de revenus et la prestation de services publics dans les régions affectées mais a aussi entrainé des dépenses supplémentaires visant à contenir les conflits. Par ailleurs, le Cameroun est confronté à une baisse des recettes provenant du secteur des ressources naturelles, la production pétrolière et gazière étant sur une tendance baissière durable. La croissance économique, inférieure à 3 % en moyenne annuelle au cours des trois dernières décennies, n’a donné qu’un faible élan à la mobilisation des recettes intérieures alors que la croissance démographique rapide met davantage de pressions sur la prestation de services publics. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 2 Tout en faisant face à ces pressions budgétaires élevées, le Cameroun a poursuivi avec succès l’ajustement budgétaire lancé en 2016 et a ramené les déficits budgétaires (base ordonnancement, dons compris) de 6,2 % du PIB en 2016 à 1,1 % en 2022. L’ajustement budgétaire s’est fait notamment à travers une compression des investissements publics, tandis que les recettes intérieures et les dépenses récurrentes ont peu changé. Même si cet ajustement budgétaire a été essentiel au maintien de la viabilité macroéconomique et de la dette, il laisse le Cameroun dans une situation très vulnérable avec peu de marges de manœuvre budgétaires en cas de nouveaux chocs économiques. La forte réduction des investissements publics participe également à réduire le potentiel de croissance économique à moyen et long terme, en plus de nombreux facteurs qui sous-tendent la faiblesse de la croissance du Cameroun. ll est essentiel d’avoir de meilleures politiques budgétaires pour aider le Cameroun à faire face à des évolutions défavorables, notamment la faiblesse de la croissance, l’inadéquation des infrastructures publiques et de la prestation de services publics, les inégalités croissantes et le nombre croissant de pauvres, autant de facteurs qui contribuent à l’exacerbation des conflits et à la faible résilience aux chocs externes. Les impacts de plus en plus visibles du changement climatique et la diminution continue des recettes pétrolières font qu’il est devenu encore plus urgent de mener une réforme budgétaire. Les dépenses publiques du Cameroun s’élèvent désormais à 17 % du PIB, ce qui est faible en comparaison aux pays de la région et fait qu’il est difficile au pays d’assurer des services et de infrastructures publiques adéquats. Les réformes devront donc viser à élargir l’espace budgétaire en améliorant la mobilisation des recettes intérieures et la qualité des dépenses publiques. Le Cameroun est confronté à un défi important en matière de recettes fiscales  : celles-ci restent inférieures au seuil de 15 % requis pour soutenir les services publics de base. Malgré une hausse des recettes fiscales de 9,5 % à 11,3 % du PIB entre 2011 et 2021, elles sont à la traîne par rapport aux moyennes des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI), de l’Afrique subsaharienne et des pays pairs d’autres régions. Une part substantielle des recettes fiscales non pétrolières provient d’un petit groupe de gros contribuables, les 0,5 % d’entreprises les plus riches contribuant à 73 % de ces recettes. Le pays s’appuie fortement sur des impôts indirects régressifs, principalement la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui représente plus de 41 % des recettes fiscales. Même si le recouvrement de la TVA s’est quelque peu amélioré, la fiscalité directe, en particulier l’impôt sur le revenu, est restée stagnante et à un niveau faible. Sur la période 2016 à 2021, les recettes fiscales directes se sont élevées à environ 3 % du PIB, ce qui est nettement inférieur aux recettes perçues en moyenne par les PRITI et les pays à faible revenu (LIC) en Afrique subsaharienne (AfSS). La performance du pays en matière de taxes sur le commerce international, la deuxième source de revenus après la TVA, est également moins bonne que celles des pays comparatifs. De plus, les impôts sur l’activité forestière et la propriété foncière n’ont pas atteint leur potentiel, contribuant ainsi aux problèmes globaux auxquels le pays est confronté en matière de recettes. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 3 Il existe un écart fiscal persistant, alimenté par d’importantes exonérations fiscales dans divers instruments fiscaux. Le Cameroun pourrait augmenter considérablement ses recettes fiscales en comblant les lacunes en matière de conformité et de politique fiscales, notamment en ce qui concerne la TVA et les taxes sur le commerce. La mise en œuvre de mesures visant à réduire les exonérations, à élargir l’assiette fiscale et à améliorer le contrôle de la conformité et le paiement des impôts pourrait potentiellement augmenter les recettes fiscales à hauteur de 6 % du PIB. Cette augmentation des recettes est cruciale pour que le pays puisse continuer de fournir les services publics les plus essentiels. Pour améliorer la mobilisation des recettes intérieures, le Cameroun devrait envisager de mettre en œuvre une Stratégie de Recettes à Moyen Terme (SRMT). Actuellement, la politique fiscale du Cameroun manque d’orientation globale en ce qui concerne l’exploitation optimale des sources de recettes fiscales et l’adaptation aux évolutions de l’économie nationale. Actuellement, le Cameroun ne dispose pas d’une politique fiscale cohérente qui exploite efficacement les principaux gisements de recettes et s’adapte aux changements de l’économie. Il manque également au système fiscal actuel des efforts systématiques pour optimiser les sources fiscales. En adoptant et mettant en œuvre une SRMT, le Cameroun peut établir des principes directeurs clairs en matière de fiscalité et améliorer l’efficacité globale de son système fiscal. Cette stratégie devrait donner la priorité à des mesures telles que la réduction des dépenses fiscales, la rationalisation de l’administration fiscale, l’amélioration des services aux contribuables, le renforcement de la gestion des risques de non-conformité et l’amélioration de la gestion des arriérés. L’ajustement budgétaire du Cameroun a été axé sur les dépenses, ce qui fait que les niveaux de dépenses publiques ont été faibles et qu’il a été difficile en conséquence de fournir des services publics adéquats et d’investir suffisamment dans les infrastructures publiques. Les dépenses publiques globales ont diminué, passant de leur pic de 21 % du PIB en 2016 à 17 % du PIB en 2021. La majeure partie de l’ajustement des dépenses a porté sur les dépenses d’investissement qui ont baissé de 8,4 % du PIB à 4,6 %, tandis que les dépenses courantes sont restées relativement stables à 12,5 % du PIB. À 17 % du PIB, les dépenses publiques du Cameroun sont faibles par rapport aux autres pays d’Afrique subsaharienne qui consacrent en moyenne 23 % du PIB aux dépenses publiques. En 2022, la masse salariale représentait 4,3  % du PIB, les dépenses en biens et services 3,2 %, les subventions et transferts 4,2 % et les paiements d’intérêts 0,8 %. Les autorités ont réussi à contenir la masse salariale à un niveau nettement inférieur à celui des autres pays africains, même s’il est important de noter que les perdiems et autres revenus de même nature, qui peuvent souvent représenter une part importante de la rémunération du personnel, sont classées comme dépenses en biens et services à hauteur d’environ 0,8 % du PIB. Il est essentiel d’avoir des dépenses adéquates et efficaces en biens et services pour pouvoir fournir des services publics de qualité et entretenir les infrastructures. Cependant, les dépenses publiques du Cameroun sont inefficaces en ce qui concerne certaines catégories de dépenses, notamment les dépenses relativement élevées Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 4 en matière de représentation et de services extérieurs. Les subventions aux entreprises publiques, un déficit du régime de retraite du secteur public et de généreuses subventions aux carburants contribuent à des dépenses de transferts et de subventions relativement élevées, tandis que les dépenses d’assistance sociale restent faibles. La réduction progressive des subventions aux carburants, qui a débuté par une augmentation moyenne de 21 % des prix de détail des carburants (à l’exception du pétrole lampant) à la fin de janvier 2023, constitue une étape importante vers la rationalisation des dépenses publiques et leur réaffectation en faveur d’une part des pauvres et des personnes vulnérables, et d’autre part de la création d’opportunités de croissance. Les réformes des entreprises publiques et des retraites sont d’autres domaines qui pourraient permettre de réaliser d’importantes économies sur les dépenses en subventions. Les dépenses d’investissement souffrent d’importantes inefficacités. Non seulement les dépenses d’investissements publics ont été considérablement réduites depuis 2016, mais elles sont affectées d’inefficiences persistantes. Par exemple, des dépenses plus efficaces dans le secteur routier pourraient générer une amélioration de 40 % de la qualité des routes par dollar dépensé. Les faibles niveaux et la qualité réduite des dépenses d’investissement compromettent les perspectives de croissance du Cameroun. En outre, dans la mesure où les réductions des investissements publics se concentrent dans une certaine mesure sur la réduction des dépenses d’infrastructures sociales, elles risquent également de contribuer à un affaiblissement supplémentaire des indicateurs sociaux à moyen et long terme. L’amélioration de l’efficience des dépenses d’investissement public devrait donc être une priorité essentielle dans les réformes budgétaires, tout comme la priorisation des dépenses d’investissement lorsqu’il y aura davantage d’espace budgétaire. Les réformes des marchés publics engagées par les autorités constituent une étape importante dans l’amélioration de l’efficience des dépenses publiques. Dans la composition sectorielle des dépenses publiques, les dépenses d’administration générale sont privilégiées au détriment des dépenses en capital humain et en protection sociale. Près d’un quart des dépenses publiques est consacré à l’administration générale, ce qui est élevé par rapport aux autres pays de la région. Les dépenses consacrées à l’administration générale sont importantes pour assurer les fonctions de base du gouvernement et garantir une bonne gouvernance. Cependant, dans le cas du Cameroun, les niveaux de dépenses relativement élevés pour l’administration générale ne se traduisent pas par une qualité équivalente de l’administration publique, comme le démontre le score relativement faible du Cameroun s’agissant des indicateurs de gouvernance relatifs à la participation et la responsabilité, la stabilité politique et l’absence de violence/terrorisme, la qualité de la réglementation, l’état de droit et la lutte contre la corruption. Cette situation indiquerait qu’il pourrait y avoir des possibilités d’une plus grande efficience et d’une plus grande efficacité des dépenses d’administration générale. En revanche, moins d’un quart des dépenses est consacré aux secteurs sociaux – éducation, santé et protection sociale – les dépenses d’éducation ayant diminué ces dernières années. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 5 L’efficience des dépenses est compromise par des pratiques peu efficaces en matière de préparation et d’exécution du budget. Au stade de la budgétisation, une part importante reste non allouée. Bien que cette pratique offre une certaine flexibilité pour répondre aux imprévus, elle donne également une certaine latitude quant à l’ampleur des enveloppes de dépenses pendant l’exécution du budget, ce qui a des impacts négatifs en termes de transparence, de contestabilité budgétaire et d’efficience de l’allocation. Ce problème est exacerbé par les modifications fréquentes du budget par voie d’ordonnances. Lors de l’exécution du budget, le recours massif à des procédures budgétaires exceptionnelles telles que les régies et caisses d’avances, les engagements provisoires et les avances de trésorerie contribuent encore davantage à la faible crédibilité et à la faible transparence du budget, dans la mesure où ces procédures permettent de dépenser au-delà de l’allocation approuvée. Elles contribuent également à un faible contrôle des engagements et des dépenses, ce qui a donné lieu à une accumulation d’arriérés intérieurs à hauteur d’environ 4 % du PIB. La performance du secteur de l’éducation est en déclin en raison d’une combinaison de pressions externes et d’inefficiences internes qui atténuent l’impact d’importantes réformes récentes visant à augmenter le nombre d’enseignants et à améliorer l’accès aux manuels scolaires. Les crises sécuritaires dans plusieurs régions du Cameroun entraînent la fermeture d’écoles, une réduction des effectifs et des pertes d’apprentissage dans les régions affectées, tandis que le grand nombre de personnes déplacées exerce Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 6 également de graves pressions sur les systèmes scolaires dans les régions non touchées par le conflit. Conjuguée aux impacts négatifs de la pandémie de COVID, cette situation a entraîné une baisse globale des taux de scolarisation et des taux d’achèvement aux niveaux primaire et secondaire. Le secteur continue également de souffrir d’une inefficacité interne forte et croissante illustrée par les faibles niveaux de réussite et de faibles taux d’achèvement chez les élèves, et cette situation est aggravée le fait qu’une part importante des élèves du primaire ne dispose pas d’acte de naissance et ne peuvent dès lors pas passer les examens de fin du cycle du primaire. L’efficacité du récent recrutement d’enseignants supplémentaires a été entravée par des problèmes persistants de déploiement et de rétention des enseignants et par une répartition inégale des enseignants entre les écoles. Les réformes récentes qui visent à réduire le coût des manuels scolaires et à en améliorer l’accès constituent un développement positif important qui devrait ouvrir la voie à une politique de gratuité des manuels scolaires pour les zones d’éducation prioritaire. L’inadéquation et l’inefficacité des dépenses publiques de santé se manifestent par un faible accès aux formations sanitaires, une faible qualité des services, un niveau élevé de dépenses à la charge des patients et des indicateurs de santé nettement inférieurs à ce à quoi on pourrait s’attendre pour un pays ayant le niveau de revenu du Cameroun. Bien que le nombre de formations sanitaires au Cameroun corresponde aux normes internationales, elles sont inégalement réparties, mal dotées en personnel et sous-approvisionnées en médicaments essentiels. Les dépenses de santé à la charge des patients s’élèvent à environ 40 USD par personne et représentent 70 % des dépenses totales de santé du Cameroun. L’introduction du financement basé sur la performance a permis de parvenir à une répartition plus équitable des ressources budgétaires au sein du secteur de la santé, en mettant l’accent sur les formations sanitaires au niveau des districts qui offrent des soins à coût réduit, notamment les soins primaires, les soins préventifs et les services de santé communautaire. Cependant, les priorités en matière de dépenses publiques de santé ne mettent toujours pas suffisamment l’accent sur les programmes de santé publique essentiels qui sont à la fois très efficaces et génèrent des externalités positives. Il est nécessaire de mener des réformes pour améliorer l’efficacité et l’efficience des dépenses publiques de santé et pour jeter les bases d’une augmentation des dépenses publiques dans ce secteur. Premièrement, il serait essentiel d’améliorer l’efficacité de la gouvernance et de l’allocation des ressources en promouvant l’allocation stratégique des ressources à tous les niveaux du système de santé et en renforçant la coordination entre les parties prenantes impliquées dans le financement de la santé. Comme aspect important de ce travail, il faudrait faire progresser la décentralisation des dépenses de santé. Deuxièmement, les réformes doivent également viser à renforcer la transparence et la redevabilité en établissant un système standardisé et codifié de gestion des ressources de santé et en adoptant des mécanismes de transparence, de redevabilité et de lutte contre la corruption au sein du secteur de la santé. Troisièmement, il serait important de renforcer le cadre de financement basé sur la performance et d’accélérer sa mise en œuvre à l’échelle nationale. Cela impliquera de renforcer le système d’information financière, de mettre à jour le cadre juridique régissant l’allocation et l’utilisation des ressources dans les Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 7 formations sanitaires publiques et de mener des activités régulières de contrôle, d’audit, d’enquête, de suivi et d’évaluation de la gestion des ressources financières. Enfin, la performance du secteur et l’efficacité des dépenses nécessitent une collaboration avec les ministères centraux pour rationaliser les processus de préparation et d’exécution du budget, y compris la mise en place de comptes spéciaux pour une commande publique stratégique et performante afin de surmonter les défis liés à l’exécution centralisée et lourde du budget, y compris l’allocation des ressources et la justification ex-post de celles-ci. Le système de protection sociale du Cameroun reste régressif, n’apportant que très peu de soutien à une petite fraction des personnes pauvres et vulnérables. L’essentiel des dépenses en protection sociale au Cameroun est alloué aux retraites du secteur public, suivies par le subventionnement du carburant et les autres subventions, les initiatives du marché du travail et les programmes d’aide sociale. Ces programmes d’aide sociale sont les seuls à cibler directement les pauvres ; toutefois, leur couverture reste peu étendue. Les systèmes de prestation intégrés associés à certaines interventions favorables aux pauvres, y compris un Registre social, en sont encore à leurs premiers stades d’élaboration. En outre, malgré la croissance récente du PIB, la participation au marché du travail s’est détériorée, les taux de chômage des jeunes étant presque deux fois plus élevés. En réponse aux défis auxquels le secteur de la protection sociale est confronté, il faudra mettre en œuvre des réformes globales, notamment réallouer les ressources, améliorer le ciblage des programmes et assurer la viabilité des systèmes de retraite. Les autorités reconnaissent que la décentralisation budgétaire est un outil essentiel pour réduire les conflits, renforcer la résilience et favoriser la stabilité. Toutefois, les progrès du déploiement de l’ambitieux programme de décentralisation budgétaire du gouvernement, qui fixe notamment l’objectif de transférer 15 % du budget gouvernemental aux Collectivités Territoriales Décentralisées (CTDs), restent lents et fragmentés. Les CTDs souffrent de la faiblesse de leur capacité et d’un manque de financement, qu’il s’agisse de leurs propres sources de recettes ou des transferts provenant du gouvernement central. À cause de cela, il devient non seulement difficile pour les CTDs d’effectivement remplir leurs fonctions, notamment dans les domaines de la santé et de l’éducation, mais les ministères centraux se trouvent aussi confortés dans leur réticence à effectivement transférer les ressources et les responsabilités aux CTDs. Pour faire avancer les choses dans ce domaine important, il faudra faire des investissements dans le renforcement des capacités des autorités infranationales et dans un cadre de décentralisation budgétaire qui assure une adéquation effective entre les responsabilités et les ressources financières et humaines. La Revue des Finances Publiques met en évidence plusieurs options de réformes à court et moyen terme sur les six domaines résumés dans le tableau ci-après : i. Pour inscrire le Cameroun sur une trajectoire de croissance à la hauteur de son ambition d’atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, il faudra un nouveau modèle de développement, et des politiques budgétaires favorables jouent un rôle important dans la stimulation de la croissance. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 8 ii. Le système fiscal camerounais n’a actuellement pas d’orientation suffisamment bien définie pour utiliser les principales sources de recettes fiscales avec efficacité et s’adapter aux mutations économiques. La mise en œuvre d’une Stratégie de mobilisation de Recettes à Moyen Terme (SRMT) permettrait d’avancer. À court terme, la réduction des dépenses fiscales pourrait générer jusqu’à 3 points de PIB de gains en recettes. iii. Les dépenses publiques sont très peu alignées sur les besoins de développement : il est non seulement possible de dépenser mieux, mais aussi de dépenser plus compte tenu des défis économiques du Cameroun en termes de besoins dynamiques de santé, une population jeune et un capital humain en retard. La réaffectation des dépenses, notamment en réduisant le montant des dépenses communes, créera une marge pour des dépenses productives. iv. Compte tenu de la faiblesse du capital humain, pour pouvoir passer à l’étape suivante, le Cameroun devra adopter une approche des dépenses publiques et du capital humain qui intègre les dépenses sociales de façon plus systématique. v. Dans le secteur de l’éducation, la réaffectation des dépenses publiques en faveur des priorités stratégiques, l’efficacité des dépenses, la réduction des disparités dans l’accès à l’éducation et l’appui aux intrants clés tels que les manuels scolaires et le déploiement des enseignants peuvent améliorer la qualité de l’éducation et promouvoir le développement du capital humain. vi. Dans le domaine des soins de santé, l’augmentation des ressources financières destinées au secteur de la santé et l’amélioration de l’allocation des ressources et de la prestation de services peuvent conduire à un meilleur accès aux soins de santé et à de meilleurs résultats, contribuant, au final, à améliorer le capital humain. vii. Dans le secteur de la protection sociale, il faudra réallouer les économies réalisées à partir de l’ajustement des subventions, valider et publier la Stratégie nationale de protection sociale, mettre en place des plateformes de prestation solides et élargir la couverture des filets de sécurité ciblés et des programmes productifs ciblant les jeunes, tout en mobilisant les communautés locales et les organisations de la société civile à créer un filet de sécurité sociale plus robuste et plus réactif. viii. Il faudrait accélérer la décentralisation budgétaire en améliorant la mobilisation des recettes ; en introduisant un système de surtaxe pour les conseils régionaux ; en mettant en œuvre un système de péréquation pour atténuer les disparités régionales ; en améliorant les flux financiers au bénéfice des municipalités et des régions ; en établissant un système de transferts, subventions et dons en capital du gouvernement central aux CTDs basé sur la performance  ; en améliorant la coordination intergouvernementale ; et en renforçant les mécanismes de redevabilité. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 9 Options politiques pour renforcer les finances publiques du Cameroun Le tableau ci-dessous met en évidence les recommandations politiques les plus importantes à court et moyen terme de ce rapport dans les quatre principaux domaines des finances publiques du Cameroun : les recettes fiscales, les dépenses publiques, les dépenses en capital humain, y compris l’éducation, la santé et la protection sociale ; et la décentralisation fiscale. Des actions politiques plus détaillées peuvent être trouvées à la fin de chacun des chapitres analytiques de ce rapport. Tableau 1-1: Actions politiques clés réalisables à court et moyen terme Augmenter les recettes fiscales La politique fiscale Réviser et restructurer le code des impôts dans le cadre d’une stratégie de revenus à moyen terme axée sur la réalisation d’une fiscalité inclusive, large et durable. Renforcer la progressivité de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, notamment en établissant un seuil d’exonération ; en augmentant les taux pour les plus hauts revenus et en réduisant les taux pour les revenus faibles. Décourager l’informalité en simplifiant le régime fiscal spécial et le système d’imposition des bénéfices pour les petites et moyennes entreprises. Réduire les dépenses fiscales pour limiter les pertes de recettes en limitant les incitations fiscales à l’investissement privé aux secteurs prioritaires et en réduisant la portée des exonérations conformément aux directives CEMAC de 2022. L'administration fiscale Établir un fichier numérique des contribuables à jour et complète. Faciliter la déclaration et le paiement des impôts, notamment grâce à la digitalisation. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 10 Améliorer la gestion des arriérés d’impôts, le contrôle fiscal et l’application des taxes. Améliorer l’allocation et l’exécution des dépenses publiques Améliorer l'allocation budgétaire en fixant une limite globale de 40 % des dépenses centralisées dans les dépenses totales (hors retraites et service de la dette) et en réduisant les « dépenses communes » (chapitre 65 du budget de l'État). Améliorer la crédibilité du budget en évitant les procédures budgétaires exceptionnelles et les modifications du budget par ordonnance présidentielle et en modifiant le budget uniquement par l'action du Parlement, et en établissant des règles pour réduire l'accumulation des arriérés. Améliorer l'efficacité, la transparence et la responsabilité de l'exécution du budget grâce à une meilleure gestion financière, des données budgétaires cohérentes et précises, ainsi qu'un suivi et une évaluation solides de l'exécution du budget. Renforcer le développement du capital humain grâce à de meilleures dépenses sociales Éducation Améliorer l’efficacité des dépenses en mettant en œuvre les règles de financement de l’école édictées en 2022 Optimiser les ressources du système éducatif en appliquant un déploiement équitable des enseignants et en finançant les manuels scolaires dans toutes les régions Remédier aux disparités en supprimant les obstacles administratifs qui nuisent aux pauvres (comme l'exigence d'un certificat de naissance pour obtenir un diplôme de l'école primaire), en réduisant les dépenses directes des familles défavorisées et en fournissant des manuels gratuits dans les Zones d'Education Prioritaire (ZEP). Santé Réaffecter l’ensemble des dépenses publiques aux priorités stratégiques de santé en consolidant les régimes existants et en adoptant une stratégie de financement sectoriel. Améliorer l’efficacité des dépenses de santé en augmentant le financement régional, en déléguant les responsabilités et en donnant la priorité aux programmes de santé publique essentiels et aux services de santé à coût minimum. Soutenir les ressources clés du secteur de la santé et remédier aux disparités grâce à une plus grande disponibilité des équipements médicaux et une meilleure répartition territoriale des établissements de santé publique, un personnel adéquat et des politiques améliorées en matière de rétention et de répartition géographique du personnel, et une meilleure disponibilité des médicaments essentiels, en particulier pour les populations vulnérables. Protection sociale Axer les dépenses publiques consacrées à la protection sociale vers les priorités stratégiques en utilisant les économies réalisées grâce à la réforme des subventions aux carburants pour étendre l’assistance sociale ciblée et finaliser une stratégie nationale. Améliorer l'efficacité des dépenses de protection sociale en réaffectant le budget de l'administration centrale vers les régions et en impliquant les communautés locales et les organisations de la société civile dans la planification, la mise en œuvre et le suivi des programmes d'assistance sociale afin de garantir leur pertinence et leur efficacité. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 11 Soutenir les principaux éléments de protection sociale et remédier aux disparités en mettant en œuvre un registre social, en adoptant des critères d’éligibilité aux programmes de protection sociale et en améliorant le ciblage des politiques d’emploi sur les plus vulnérables. Promouvoir une prestation efficace des services publics grâce à la décentralisation budgétaire Améliorer la mobilisation des recettes locales en mettant en œuvre la loi sur la fiscalité locale et en introduisant un système de surtaxes régionales pour offrir une flexibilité dans la détermination des niveaux de service public. Augmenter les transferts budgétaires du budget national vers les collectivités locales conformément au Code Général des CTDs, améliorer la prévisibilité des transferts par un décaissement rapide du compte unique du Trésor directement vers les CTDs et améliorer l'équité des transferts en adoptant une formule de péréquation pour les régions et en révisant la formule de péréquation pour les communes. Rendre les processus budgétaires locaux plus participatifs et plus responsables en promouvant la participation du public aux processus décisionnels par le biais de consultations publiques et de pratiques de budgétisation participative et en pilotant un système de subventions basé sur la performance pour les CTD. 12 2 INTRODUCTION AUX FINANCES PUBLIQUES DU CAMEROUN Malgré une certaine tendance globalement positive au cours des trois dernières décennies, la trajectoire de croissance du Cameroun a été mitigée, contribuant à la lenteur des progrès en matière de réduction de la pauvreté. Avec 28 millions d’habitants et un PIB de 44 milliards USD, le Cameroun est la plus grande économie de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC)1 représentant près de la moitié de la population et du PIB de la CEMAC. Depuis 2010, l’économie camerounaise a atteint un taux de croissance annuel moyen d’environ 4 %, malgré divers défis économiques tels que le choc des cours du pétrole de 2014, la pandémie de COVID-19 et les incertitudes économiques mondiales. Néanmoins, ce taux de croissance économique reste proche de celui de la croissance démographique du pays (3 %), n’entraînant qu’une faible réduction de la pauvreté. 1 Les membres de la CEMAC sont le Cameroun, la République centrafricaine, la République du Congo, la Guinée équatoriale, le Gabon et la République du Congo. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 13 Suivant les données de l’Enquête Auprès des Ménages (ECAM) de 2014, environ 1 Camerounais sur 4 (25,7  % de la population) vivait en dessous du seuil de pauvreté international de 2,15 dollars PPA par jour – ce qui est proche du niveau de 2001. D’après les simulations, la réduction de la pauvreté a été peu importante depuis 2014, le taux d’incidence de la pauvreté ayant diminué de seulement 0,6 point de pourcentage entre 2020 et 2023 (Graphique 2-1). Même si le taux de pauvreté du Cameroun (défini à partir du seuil de pauvreté international de 2,15 USD par jour) se retrouve donc bien en dessous de la moyenne de l’ensemble de l’Afrique subsaharienne (35,1 %), il vaut plus du double de la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) de 10,2 % (Graphique 2-2). Conjugué à la forte croissance démographique, il implique également que le nombre absolu de Camerounais pauvres est en hausse. L’inégalité reste également forte, avec un coefficient de Gini de consommation de 46,6 en 2014. Cette situation reflète les grandes différences de niveau de vie entre les différentes régions du Cameroun et entre les milieux urbains et ruraux. Graphique 2-2. Taux d’incidence de la pauvreté au Cameroun Graphique 2-1. Taux d’incidence de la pauvreté au Cameroun et dans les pays de comparaison en se basant sur le seuil de en se basant sur le seuil de pauvreté international de 2,15 pauvreté international de 2,15 dollars PPA par jour (% de la dollars PPA par jour (% de la population), 2001-2014 population), dernières estimations disponibles 35 31,4 Nigeria 30 25,7 25,7 Kenya 25 Ghana 20 15 Cameroun 2023(*) 10 Cote d'Ivoire 5 Pays à revenu intermédiaire 0 tranche inférieure 01 03 05 07 09 11 13 15 17 19 21 23 Pays à revenu faible 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 et moyen Senegal Estimations des enquêtes auprès des ménages Projections 0 10 20 30 40 Sources : Indicateurs du développement dans le monde (WDI) de la Banque Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI) de la Banque mondiale et Macro-Poverty Outlook (MPO). mondiale et Macro-Poverty Outlook (MPO) Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 14 Des fragilités sont apparues et le contexte macrobudgétaire s’est détérioré. Le Cameroun a été confronté à une série de crises entrelacées au cours de ces dernières années, notamment des conflits régionaux, le changement climatique, la pandémie de COVID-19 et les retombées de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, chacune d’entre elles infligeant des dommages supplémentaires à son faible espace budgétaire. Plus de trois années de crise politique ont entraîné d’importants bouleversements socioéconomiques dans les deux régions anglophones du Cameroun (Nord-Ouest et Sud-Ouest), tandis que l’insurrection de Boko Haram a exacerbé l’extrême pauvreté et le retard de développement humain dans les régions de l’Extrême-Nord et du Nord. En outre, l’insécurité à la frontière orientale du Cameroun avec la République centrafricaine a généré un flux important de réfugiés.2 Le changement climatique constitue de plus en plus une menace sérieuse, combinée à la dépendance du pays envers les ressources naturelles et ses moyens de subsistance fondés sur l’agriculture, exacerbant les problèmes en rapport à la pauvreté, à la fragilité, aux conflits, aux disparités entre les sexes et aux inégalités régionales (Rapport sur le Climat et le Développement- CCDR 2022). Les chocs climatiques pourraient nuire à la croissance du PIB et réduire encore plus l’espace budgétaire en l’absence de réformes. Au niveau économique, l’accumulation rapide des dettes et les intérêts à payer supplantent rapidement les dépenses sociales et d’investissement. Le resserrement des conditions de financement pour les économies en développement et émergentes apporte des contraintes supplémentaires à la situation budgétaire du Cameroun. La réalisation de l’ambition du gouvernement de faire accéder le Cameroun au statut d’économie émergente d’ici 2035 appelle à des réformes structurelles plus approfondies. Les autorités ont lancé la Stratégie Nationale de Développement 2020-2030 (SND30) pour faire du Cameroun un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici 2035. Cette stratégie vise à favoriser la transformation structurelle de l’économie en augmentant les investissements, notamment en mobilisant une plus grande participation du secteur privé. Actuellement, le niveau d’investissement privé et public au Cameroun reste inférieur à ce qu’il faut pour atteindre l’objectif ambitieux de doubler le revenu par habitant d’ici 2035. Cet objectif nécessite une croissance moyenne soutenue de plus de 7 % au cours de la prochaine décennie, doublée d’une augmentation continue de la productivité de la main-d’œuvre et des investissements. Pour renforcer l’investissement public jusqu’à atteindre les niveaux requis pour réaliser la vision tracée dans la SND30, tout en maintenant la viabilité budgétaire, il faudra prioriser les dépenses de manière sélective et efficace, déployer des efforts complémentaires robustes en vue de mobiliser des recettes et améliorer la gestion des finances publiques. Cette orientation politique reflète la deuxième génération de réformes approuvées par les chefs d’État de la CEMAC en août 2021. Pour relever les défis auxquels le pays est confronté et renforcer sa résilience au changement climatique, le Cameroun doit effectuer une refonte de son modèle de développement, notamment en améliorant sa gestion budgétaire. Le changement climatique constitue une menace majeure pour la réduction de la pauvreté et la prospérité 2 Voir Encadré 6 1. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 15 partagée au Cameroun, accentuant la variabilité des précipitations et aggravant les inondations et les sécheresses. L’adoption d’un scénario de réforme améliorant l’environnement des affaires et la gestion budgétaire limiterait non seulement les pertes de PIB, mais accélérerait également légèrement la croissance économique (CCDR, 2022). La mobilisation des recettes fiscales, la priorisation des dépenses publiques et le renforcement de l’efficience des dépenses créeraient davantage d’espace budgétaire et permettrait de s’assurer que la dette publique suive une trajectoire descendante. Le Cameroun doit intensifier ses efforts de mobilisation des recettes afin de financer les investissements publics essentiels et appuyer la croissance à long terme. Malgré les efforts déployés ces dernières années, les recettes fiscales ont continué de diminuer pour tomber nettement en dessous du seuil souhaité de 15 %, entravant les fonctions essentielles de l’Etat et présentant un retard par rapport à la moyenne de celles des Pays à faible revenu (LIC), de l’AfSS et des autres pays comparatifs. La faible mobilisation des ressources intérieures limite la capacité à appuyer les plans pluriannuels d’investissement public tout en allouant des ressources adéquates aux secteurs sociaux et productifs. Les niveaux de dépenses actuels du Cameroun sont loin de répondre aux objectifs de croissance du pays. Les économies à forte croissance allouent généralement au moins 5 à 7 % de leur PIB aux investissements dans les infrastructures et 7 % supplémentaires à l’éducation et à la santé, selon le rapport 2008 de la Commission de croissance.3 Cependant, le Cameroun ne satisfait pas à ces recommandations, ses investissements publics oscillant autour de 5 % et ses dépenses publiques actuelles dans la santé et l’éducation étant respectivement de 1 et 4 % du PIB. L’insuffisance des dépenses empêche le pays de combler ses déficits d’infrastructures et de capital humain nécessaires à la réalisation de ses aspirations en matière de croissance. De plus, la faible efficience des dépenses publiques, notamment celles en rapport aux projets d’investissement, exacerbe les défis de croissance du pays. Les dépenses d’investissement publiques ont faiblement contribué à la croissance économique ces dernières années. Compte tenu de l’accroissement des vulnérabilités budgétaires du Cameroun et de la réduction de l’espace budgétaire, il est impératif d’améliorer l’efficience de l’investissement public. La construction d’une croissance durable et inclusive au Cameroun repose sur l’amélioration du capital humain, pourtant l’Indice de capital humain (ICH) du pays reste faible. En influençant le potentiel productif futur, le capital humain a un impact intergénérationnel à long terme sur la réduction de la pauvreté. Le niveau du capital humain entraîne des conséquences intergénérationnelles sur la pauvreté : une bonne santé et une éducation de qualité sont nécessaires pour sortir du piège de la pauvreté. Les résultats en matière de santé et d’éducation au Cameroun sont comparables à ceux des pays à faible revenu (LIC), les disparités étant importantes entre les régions et entre milieux rural et urbain. L’insuffisance des dépenses dans les secteurs sociaux a conduit à une couverture inadéquate et à une mauvaise qualité des services dans les domaines des soins de santé, de l’éducation et de la protection sociale. Pour soutenir une croissance 3 Commission sur la croissance et le développement. 2008. The Growth Report: Strategies for Sustained Growth and Inclusive Development. © Washington, DC: Banque mondiale. http ://hdl. handle. net/10986/6507. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 16 élevée et inclusive, il est crucial de réaliser des gains d’efficience dans les allocations sectorielles en améliorant l’efficience technique et allocative. La décentralisation au Cameroun offre l’opportunité d’améliorer l’efficience de la prestation des services publics, de combler les disparités et de s’attaquer aux sources de fragilité. Le système politique centralisé actuel, marqué par le clientélisme et une allocation inéquitable des ressources, a conduit à une faible qualité de prestation des services publics et à des inégalités. Une décentralisation budgétaire réduite a limité les dépenses et affaibli la capacité de prestation de services des administrations locales. Le renforcement de la décentralisation est important pour améliorer la résilience du Cameroun. A mesure que le système budgétaire du pays évolue, il est essentiel de définir clairement la répartition des ressources publiques. Pour mener à bien la mise en œuvre d’un système politique décentralisé, il est nécessaire de transférer effectivement des ressources financières et humaines adéquates ainsi que les compétences aux administrations locales conformément aux dispositions du code général des CTDs de 2019. Cette Revue des Finances Publiques (PFR) est pleinement en accord avec le récent Diagnostic Systématique Pays du Cameroun (SCD 2022) qui identifie le développement du capital humain, à travers l’augmentation des dépenses sociales, comme l’une des principales voies de développement pour le Cameroun. Selon le SCD 2022, la faiblesse des dépenses publiques au cours des années récentes dans les services sociaux de base, en particulier dans les soins de santé primaires et dans l’éducation de base, a conduit à une couverture inadéquate et à une mauvaise qualité des services. Il soulignait la nécessité d’augmenter les dépenses globales dans les secteurs sociaux pour réhausser la productivité moyenne de l’économie et profiter du dividende démographique. Toujours selon le SCD 2022, malgré les efforts visant à améliorer le système de gestion des Finances Publiques (GFP) du Cameroun, les indicateurs de gouvernance se sont détériorés ces dernières années, compliquant l’intensification de la mobilisation des recettes et l’amélioration de la gestion des dépenses publiques pour faire face au fardeau croissant de la dette du pays. Enfin, le SCD 2022 recommandait de créer un cadre adéquat pour une décentralisation efficace, en commençant par des transferts plus équitables et transparents vers les collectivités territoriales décentralisées. La dernière Revue des Dépenses Publiques (PER 2018) était axée sur les dépenses publiques (et non sur les recettes) et a été achevée en 2018, soulignant la nécessité d’améliorer l’efficience des dépenses publiques. Le PER de 2018 a révélé l’efficience et l’efficacité limitées des dépenses publiques au Cameroun, en particulier dans le secteur de la santé et celui des entreprises publiques. L’allocation des dépenses publiques est axée sur les frais généraux et le service de la dette, ce qui fait que les secteurs prioritaires ne disposent pas de ressources suffisantes. De plus, une part importante des dépenses en biens et services est déguisée en avantages non salariaux. Le PER de 2018 soulignait l’impact négatif de l’augmentation des dépenses, en particulier des investissements d’immobilisations, sur les déséquilibres budgétaires, nécessitant un ajustement budgétaire à court terme. Il recommandait d’améliorer l’efficience de l’allocation en réduisant les dépenses d’administration et en biens et services. Ladite étude relevait également la complexité de la masse salariale, les avantages non salariaux n’ayant aucun rapport avec la performance. Les transferts aux Entreprises et Etablissements Publics étaient signalés Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 17 comme des risques budgétaires. Même si l’investissement public a contribué à réduire le déficit d’infrastructures, il faut encore des réformes structurelles et un entretien adéquat pour garantir la qualité des infrastructures. La crédibilité du budget public est minée par des taux d’exécution supérieurs à 100 % alors que la gestion centralisée du budget de l’Etat occasionne des coûts politiques et sociaux (Encadré 2-1). Encadré 2-1 : Principaux constats de la Revue des dépenses publiques de 2018 Selon les constats du PER de 2018, la faiblesse de l’efficience, de l’efficacité et de l’équité des dépenses publiques constitue un sérieux obstacle à la réalisation des objectifs politiques déclarés du Gouvernement du Cameroun. Plus précisément, le PER montrait que : a. L’inefficience allocative et technique nuit à l’optimisation des ressources dans l’ensemble du secteur public. L’inefficience de l’allocation des ressources est particulièrement critique dans le secteur de la santé, où l’allocation est excessivement centrée sur les hôpitaux tertiaires au détriment des soins primaires plus rentables. b. Le coût du régime de retraite des fonctionnaires absorbe une part importante du budget de la protection sociale, limitant la capacité du système de protection sociale à servir les ménages pauvres et vulnérables. c. L’expansion rapide du budget d’investissement semble avoir compromis l’efficience technique des dépenses d’investissement. d. L’inefficience technique constitue également un défi majeur pour les entreprises publiques, où l’accumulation de passifs conditionnels renforce les risques budgétaires globaux. e. L’efficacité des dépenses publiques représente un défi majeur dans l’administration publique, en ce que la faiblesse des contrôles des dépenses facilite une augmentation des coûts de personnel et des frais généraux sans qu’il y ait une augmentation correspondante de la capacité institutionnelle. f. L’équité des dépenses publiques est compromise par un biais systématique en faveur des centres urbains et des régions du sud, du centre et de l’ouest du pays. g. Il sera essentiel de relever les défis en rapport à l’efficience, à l’efficacité et à l’équité des dépenses publiques pour réaliser les objectifs de la SND30. Source: Cameroon Public Expenditure Review: Aligning Public Expenditures with the Goals of Vision 2035. Washington DC : Groupe de la Banque mondiale. http://documents.worldbank.org/curated/en/501141543353309471/Aligning-Public-Expenditures-with-the-Goals-of-Vision-2035. Ce PFR s’appuie sur les données du Système Intégré d’Information de Gestion Financière (SIIGF) du Gouvernement du Cameroun, qui a été réorganisé en une base de données, BOOST. BOOST est une base de données qui présente les informations détaillées sur les dépenses publiques du système de Trésorerie d’un pays au niveau le plus désagrégé disponible, dans le but d’exploiter toutes les informations du système de classification budgétaire du pays, couvrant tous les secteurs, toutes les unités de dépenses et tous les types de dépenses. Pour le Cameroun, ces données couvrent la période 2019- Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 18 2021 et comprennent les informations d’exécution budgétaire, les lois de règlement auditées, les indicateurs de finances publiques, les rapports d’exécution du budget et les statistiques des Directions Générales du Budget et du Trésor. La base de données moins détaillée des Statistiques des finances publiques du Fonds monétaire international (FMI) est utilisée pour les séries chronologiques plus longues. Le PFR est divisée en six chapitres. Le Chapitre 2 couvre les évolutions macroéconomiques et budgétaires, pour ouvrir la voie à une analyse plus détaillée. Le Chapitre 3 est axé sur la mobilisation des recettes fiscales intérieures, analysant la composition et la performance des recettes fiscales afin de cerner les opportunités d’amélioration du recouvrement des impôts. Le Chapitre 4 effectue une analyse des dépenses publiques, examinant l’évolution des dépenses en se basant sur les classifications fonctionnelles et économiques et en évaluant l’exécution du budget et la gestion des investissements publics. Le Chapitre 5 met à jour l’analyse du PER 2018 sur les dépenses de capital humain et évalue l’efficience des dépenses publiques dans les secteurs de l’éducation, de la santé et de la protection sociale. Enfin, le Chapitre 6 traite de la décentralisation budgétaire, en mettant un accent particulier sur le cadre des dépenses locales. 19 3 ÉVALUATION DE LA PERFORMANCE MACROBUDGÉTAIRE DU CAMEROUN Le Cameroun - économie la plus importante de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) - a connu au cours des dernières années une trajectoire de développement bien en deçà des espérances. Malgré le maintien d’un taux de croissance moyen du PIB d’environ 4 % pendant ces dernières décennies, le pays a rencontré des obstacles dans la réduction de la pauvreté à cause de la rapidité de la croissance démographique et de la persistance de niveaux élevés d’inégalités. Cette situation a été exacerbée par une série de facteurs, notamment les efforts d’ajustement budgétaire, l’impact de la pandémie de COVID-19 et les incertitudes économiques mondiales. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 20 3.1 Tendances macroéconomiques Le Cameroun a connu une trajectoire de croissance quelque peu décevante ces dernières années, malgré un taux de croissance moyen du PIB réel d’environ 3 % pendant les dernières décennies. Le resserrement budgétaire, l’impact de la pandémie de COVID-19 et la diminution de la production pétrolière ont miné la croissance depuis 2017. Le Cameroun a connu un taux de croissance moyen de 2,8 % pendant les trois dernières décennies, tandis que les pays à revenu similaire et ses pairs régionaux ont présenté respectivement un taux de croissance de 4,4 % et 3,4 %. Le PIB par habitant du Cameroun n’a pas encore retrouvé son niveau de 1990 et est désormais inférieur au niveau de revenu de ses pairs (Graphique 3-1). La croissance du Cameroun a été impulsée par la réalisation d’importants projets d’infrastructures, la résilience du secteur privé et l’accroissement de la consommation publique. L’augmentation des dépenses publiques a contribué à stimuler la demande intérieure. En revanche, les exportations nettes ont contribué négativement à la croissance, en partie à cause Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group des termes de l’échange et des chocs climatiques. La contribution de l’investissement à la croissance reposait sur l’augmentation de l’investissement pendant ces dernières années, qui s’est traduite par un rebond de l’investissement public, contribuant à la réduction du déficit d’infrastructures, notamment dans le secteur de l’énergie, et stimulant la demande globale. Cependant, le Cameroun est confronté à un défi de taille : son taux d’investissement est inférieur aux pairs régionaux. La croissance a été portée par les grands projets d’infrastructures, l’investissement privé et la hausse des dépenses publiques jusqu’en 2017. Néanmoins, le taux d’investissement du Cameroun, représentant en moyenne 18,8 % du PIB en 2021, reste inférieur à la moyenne des taux des pays d’Afrique Sub-saharienne (20,7 %) et des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (26 %). Le taux d’épargne nationale brute du pays (15,3 % du PIB) est également inférieur à la moyenne des taux des pays de la CEMAC (25,5 %) et de l’AfSS (19,3 %). Plus important encore, la performance du Cameroun en matière de productivité a été faible et constitue un obstacle majeur à la réalisation de ses ambitions de croissance économique et de diversification. Il est indispensable de combler ces déficits d’investissement et d’épargne pour libérer le potentiel économique du Cameroun (Graphique 3-2). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 21 Graphique 3-1. PIB par habitant, PPA (en USD internationaux Graphique 3-2. Taux d’investissement et d’épargne (moyenne constants de 2015) 2010-2022 en % du PIB) 30 10 000 8000 25 6000 20 4000 15 2000 10 0 5 19 0 19 3 19 6 19 9 19 2 19 5 20 8 20 1 20 4 20 7 20 0 20 3 20 6 20 9 22 8 8 8 8 9 9 9 0 0 0 1 1 1 1 19 0 Cameroun Pays à revenu intermédiaire tranche inférieure Cameroun CEMAC hormis Afrique Pays à revenu faible le Cameroun SubSaharienne et intermédiaire Pays à revenu moyen supérieur Taux d'investissement (%) Afrique SubSaharienne Taux brut d'épargne nationale (%) Remarques : Mesuré à parité de pouvoir d’achat (USD internationaux de 2017). Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI) Source : Indicateurs du développement dans le monde (WDI) Le resserrement budgétaire, l’impact de la pandémie de COVID-19 et la baisse de la production pétrolière ont miné la croissance depuis 2017. Les dépenses publiques ont ralenti après le pic observé en 2016, améliorant la situation budgétaire mais freinant l’activité économique, tandis que la production pétrolière a fortement diminué en 2017- 18. Alors que l’activité économique montrait déjà des signes d’affaiblissement, l’impact de la pandémie de COVID-19 et la récession mondiale qui en a résulté ont entraîné un ralentissement de l’activité mi-2020. Les confinements et les restrictions pesant sur la mobilité ont affecté les activités basées sur les contacts humains, bien que de manière moins sévère que dans les autres pays où la population est plus âgée. Le resserrement budgétaire actuel a freiné davantage la croissance du PIB ces dernières années en réduisant les dépenses d’investissement. Même si l’ajustement budgétaire a été essentiel pour préserver la viabilité macroéconomique et la viabilité de la dette, il laisse le Cameroun dans une situation très vulnérable, disposant d’une faible marge de manœuvre budgétaire pour répondre aux nouveaux chocs économiques futurs, cette situation s’ajoutant aux nombreux facteurs contribuant déjà à la faiblesse de la croissance du Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 22 3.2 Performance budgétaire L’ajustement budgétaire de ces dernières années, consistant principalement en des réductions des investissements publics, a ramené le déficit à des niveaux gérables. Le déficit budgétaire a augmenté depuis 2010, son niveau ayant culminé en 2016, sous l’effet de l’augmentation des dépenses en immobilisations et de la diminution des recettes pétrolières (Graphique 3-3). Le déficit budgétaire a atteint 5,9 % du PIB en 2016, par suite de l’augmentation des dépenses dans les infrastructures, qui ont atteint environ 5 % du PIB en 2010-2016, contre 2,5 % en moyenne entre 2005 et 2009. Sur la même période, les recettes pétrolières ont fortement diminué de 1,7 % du PIB, reflétant une baisse du cours du pétrole et de sa production, mais ces pertes ont été compensées par une amélioration du recouvrement des recettes fiscales. Les efforts d’ajustement budgétaire déployés entre 2017 et 2022 ont permis de réduire le déficit, y compris pendant la crise de la COVID-19 (le déficit budgétaire n’ayant pas changé en 2020 à la suite du renforcement du contrôle des dépenses). En conséquence, le déficit global a diminué, passant de 5,9 % du PIB en 2016 à 1,8 % du PIB en 2022, à la suite d’une réduction de 3 points de pourcentage des dépenses en capital entre 2016 et 2022, passant de 8,2 % du PIB en 2016 à 5,2 % du PIB en 2022 (Tableau 3-1). Tableau 3-1. Variation des recettes, des dépenses et du déficit budgétaire global, 2010-2016 et 2017-2022 (% du PIB, méthode de comptabilité d’exercice) 2010-16 2017-22 Recettes pétrolières + -1,7 +1,5 Recettes fiscales + +1,7 +0,1 Recettes non fiscales et dons + -0,3 +0,3 Dépenses d’investissement – +4,9 -3,0 Dépenses primaires courantes + – +0,1 +0,6 prêts nets Dépenses primaires – +5,0 -2,5 Variation du solde primaire = -5,4 +4,3 Paiements d’intérêts – +0,5 +0,2 Variation du solde global = -5,8 +4,0 Source : Autorités Camerounaises. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 23 Graphique 3-3. Dépenses et recettes publiques totales par type, 2010-2021 (% du PIB) 20 15 10 5 0 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Recettes pétrolières Dons Recettes non pétrolières Dépenses publiques Note : Le total des recettes et des subventions est composé des recettes du secteur pétrolier, des recettes du secteur non pétrolier et des subventions. Source : Calculs des services du MINFI et de la Banque mondiale. Malgré les efforts d’ajustement budgétaire, l’augmentation du déficit primaire a contribué à la hausse des ratios d’endettement public. La dette publique, qui s’élevait à 76 % du PIB en 2000, a diminué, passant à seulement 11 % du PIB en 2008 suite à l’Initiative Pays Pauvres Très Endettés (PPTE). Depuis 2010, l’augmentation de la dette publique est alimentée par le déficit primaire. Même si cette augmentation a été compensée par la croissance économique, la dette publique a augmenté, passant de 15 % du PIB en 2010 à 46,1 % en 2021.Les déficits budgétaires constituaient le principal moteur de cette augmentation de la dette publique, contribuant à hauteur de 1,3 % du PIB par an de 2009 à 2014, puis s’accélérant pour atteindre 3,5 % du PIB par an de 2015 à 2017. Cependant, le taux annuel d’augmentation de la dette a ralenti après 2017 suite aux efforts d’ajustement budgétaire, réduisant la contribution du déficit primaire à l’augmentation de la dette de 2,2 points de PIB par an de 2017 à 2022. En 2021, environ 30 % de la dette publique était des dettes intérieures alors que près de 60 % étaient dues à des sources bilatérales et multilatérales (Graphique 3.4). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 24 Graphique 3-4. Composition de la dette publique : Dette Graphique 3-5. Contribution à la variation du rapport dette publique par créancier, 2021 (en millions USD et % du total) publique sur PIB par source, 2009–21 (% du PIB) 8% Eurobonds 6% 5% Autre dette commercialel Total: 45,6 % 4% 4% SONARA 2% 3% Bilatérale 29 % 0% -2 % Autres dettes multilatérales -4 % 23 % 4 7 9 1 20 21 -1 -1 -1 -2 20 20 09 15 18 20 20 20 20 20 Autres facteurs FMI Taux d'intérêt réel + Dépréciation du taux de change 6% Croissance réelle Domestique 30 % Déficit primaire Variation de la dette Source : Calculs des services de la Banque mondiale. 3.3 Recettes Malgré la diminution des recettes pétrolières au fil du temps, les recettes publiques du Cameroun sont restées globalement stables, chutant en 2016-2017 à cause de l’effondrement du cours du pétrole et diminuant temporairement en 2020-2022 à cause de la détente fiscale. Les recettes publiques totales continuaient d’avoisiner les 16 % du PIB entre 2010 et 2015, avant de diminuer à un peu plus de 14 % du PIB en 2016, tandis que les dépenses ont connu un bond. Le déficit budgétaire qui en a résulté a déclenché le besoin de rééquilibrer le budget, à travers notamment une meilleure mobilisation des recettes. Plus des trois quarts des recettes de l’ensemble de la période provenaient des impôts, à mesure que leur recouvrement s’améliorait (Graphique 3-6). Les effets directs de la COVID-19 et la riposte à la pandémie ont entraîné une contraction des recettes intérieures non pétrolières de 0,9 % du PIB en 2020, tandis que les recettes pétrolières se sont repliées de 0,7 % du PIB la même année. Les mesures d’allègement fiscal comprenaient des moratoires fiscaux, le report des paiements, des exonérations temporaires pour les restaurants et les hôtels, ainsi que pour les entreprises de transport de passagers et les micro-détaillants, et l’accélération des remboursements des crédits de TVA. Les réponses en matière de politique fiscale ont également pris en compte la flambée des prix alimentaires en 2022 provoquée par la guerre en Ukraine, comprenant des allégements fiscaux temporaires sur la fabrication de farine et de sucre ainsi que des mesures d’allégement douanier sur le fret et les importations de riz et d’huile de palme. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 25 La diminution continue des recettes pétrolières, à mesure que la production pétrolière du Cameroun baisse, souligne la nécessité d’une réorientation vers les revenus fiscaux non pétroliers. Même si le Cameroun dépend moins du pétrole que les autres pays africains exportateurs de pétrole, une part importante de ses recettes publiques provient du secteur pétrolier, qui a contribué à environ un quart des recettes publiques entre 2010 et 2016, avant de diminuer à un sixième en 2017-2021, à cause de la chute des cours internationaux du pétrole après 2015 et du déclin de la production. Alors que la hausse des cours du pétrole en 2022 a augmenté les recettes pétrolières, les portant à près d’un quart des recettes totales, l’imprévisibilité des recettes pétrolières, vulnérables à la volatilité du cours mondial du pétrole, souligne la nécessité pour le gouvernement de poursuivre la transition vers les recettes non pétrolières. Le total des recettes publiques du Cameroun se situe à un niveau inférieur aux niveaux régionaux, indiquant l’existence de possibilités de mobiliser davantage de recettes. Les recettes non pétrolières ont augmenté, passant de moins de 10 % du PIB en 2010 à près de 12 % du PIB ces dernières années, principalement grâce aux recettes fiscales, notamment celles provenant des taxes sur les biens et services (+1,6 points de pourcentage du PIB) et des impôts directs (+0,6 point de pourcentage). Malgré cette croissance, les recettes fiscales restent à un niveau inférieur aux niveaux régional et mondial, indiquant qu’il est possible de mobiliser davantage de recettes pour appuyer les efforts d’ajustement budgétaire. Le ratio recettes sur PIB du Cameroun en 2022, qui est de 15,6 %, est inférieur à la moyenne des rapports des pays de la CEMAC, qui est de 18,2 % (Graphique 3.6, Graphique 3.7). Graphique 3-6. Recettes fiscales dans les pays de la CEMAC, Graphique 3-7. Recettes fiscales du Cameroun et des pays de 2022 (% du PIB) comparaison (% du PIB) 35 30 25 25 20 20 15 15 10 5 10 0 o e le 5 ad n on AC ng in ou ia Ch ca ab or M Co er 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 fri G CE at m ra du u Ca Eq nt ue Ce e liq né e Cameroun Côte d'Ivoire u b ui iq pu G bl Ghana Senegal Ré pu Ré Kenya Maroc Sri Lanka Vietnam Recettes totales hors dons Dons Source : IMF World Economic Outlook (April 2023); IMF Country Report No. 23/1; and OECD. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 26 3.4 Dépenses Depuis 2016, les efforts d’ajustement budgétaire du Cameroun ont été axés sur la réduction des dépenses, ce qui est devenu plus difficile à cause de l’augmentation du service de la dette. Selon les tendances, les dépenses totales augmentent depuis 2010, atteignant un pic de plus de 20 % du PIB en 2019 (Graphique 3-8). L’augmentation des dépenses de 5,5 % du PIB entre 2010 et 2016 s’explique par une hausse considérable des dépenses d’investissement, qui sont passées de 2,5 % du PIB en 2009 à un pic de 7,5 % du PIB en 2016. Depuis 2017, les efforts d’ajustement budgétaire ont été principalement axés sur la réduction des dépenses, en particulier la réduction des investissements publics, qui sont passés de 7,5 % à 4,5 % du PIB entre 2016 et 2021. Parallèlement, les paiements des taux d’intérêt ont doublé, passant de 0,5 % en 2016 à 1 % du PIB en 2021, représentant une charge budgétaire croissante. Les dépenses courantes sont restées relativement stables en 2022, les dépenses d’investissement augmentant pour atteindre plus de 5 % du PIB tandis que le service de la dette a légèrement diminué. Graphique 3-8. Dépenses publiques par catégorie, 2015-2021 (% du PIB) 20,0 % 15,0 % 10,0 % 5,0 % 0,0 % 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Dépenses courantes Dépenses de capital Paiements d'intérêt Dépenses totales Source : Autorités du Cameroun ; Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 27 Les dépenses d’investissement ont été le principal moteur de l’expansion budgétaire et de l’ajustement budgétaire du Cameroun. Les investissements publics ont diminué de 3 % du PIB depuis 2016. S’ils ont été le principal moteur de l’expansion budgétaire du pays en 2010-2016, lorsque les financements étaient abondants, ils ont également été le moteur de l’ajustement budgétaire en 2017-2022, lorsque les financements se sont rarifiés. L’investissement financé sur ressources intérieures est le secteur qui s’est le plus fortement contracté. Entre 2017 et 2022, les dépenses d’investissement public financées par des sources intérieures ont diminué d’environ 3,5% du PIB, tandis que les investissements d’immobilisation financés par des ressources extérieures ont augmenté de 0,4 % du PIB. La part de l’investissement public intérieur dans l’investissement total a diminué, passant d’environ deux tiers avant 2017 à environ la moitié après 2017. Entre 2015 et 2021, les dépenses publiques du Cameroun exprimées en pourcentage du PIB étaient inférieures à celles de ses pairs, et le pays a consacré une part plus importante à l’investissement et une part plus faible aux prestations sociales que les pays pairs. Les dépenses publiques globales du Cameroun représentaient en moyenne environ 17 % du PIB sur la même période, ce niveau étant inférieur à la moyenne des niveaux des pays de l’AfSS et celle des pays pairs aspirationnels, qui sont de 23 % et 25 % respectivement (Graphique 3-9, Graphique 3-10). Le niveau de dépenses inférieur du pays par rapport à ceux des pays pairs s’expliquent en partie par la nécessité d’un ajustement budgétaire pour mieux adapter les niveaux de dépenses à ceux des recettes. La structure des dépenses du Cameroun est également différente de celles des pays comparatifs, dans la mesure où il dépense plus en investissement public que ses pairs structurels et aspirationnels, les PRITI et les pays d’Afrique subsaharienne, et moins en prestations sociales que tous ses pairs, sauf les pairs structurels (Graphique 3.9). Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 28 Graphique 3-9. Dépenses publiques, Cameroun et groupes de Graphique 3-10. Dépenses publiques du Cameroun et des pays, 2015–21 (% PIB) pays comparables (% du PIB), 2015-21 0,30 40,0 0,25 35,0 0,20 30,0 % du PIB 25,0 % du PIB 0,15 20,0 0,10 15,0 0,05 10,0 0 5,0 e Su ieu es n s s nn el ou el r ir re 0,0 nn ur fé ia ie er in éd ar ct tio m ah tru ZAF ETH KEN he m SEN TZA CMR RWA MRT COD AGO Ca UGA ra bS r s pi nc te irs as tra s in Pa irs ue nu Pa Pairs Pairs riq ve Af re aspirationnels structurels à ys Pa Source : Autorités camerounaises, calculs des services de la Banque mondiale. Graphique 3-11. Dépenses publiques par catégorie, Cameroun et groupes de pays (% du PIB) 100 % 80 % 60 % 40 % 20 % 0% Cameroun Pairs aspirationnels Pairs structurels PRITI AfSS Masse salariale Biens et services Dépenses de capital Paiements d'intérêt Prestations sociales Subventions Autres Source : Autorités du Cameroun ; Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 29 Les niveaux et l’efficience des investissements publics au Cameroun sont faibles. Malgré l’augmentation du stock de capital public avant la pandémie de COVID-19, la base infrastructurelle du Cameroun reste modeste et moindre par rapport à celles des pays comparatifs en moyenne. Le déficit relatif d’efficience de l’investissement public du pays par rapport à la frontière d’efficience (qui est établie en se basant sur les pays les plus performants) est supérieur à 60 %, selon le dernier rapport d’Évaluation de la gestion des investissements publics (PIMA) (Graphique 3-12). Les dépenses primaires du Cameroun restent inférieures à celles des pays pairs, notamment les investissements publics, et étaient proches de la moyenne de celles des pays de la CEMAC en 2021, même si elles étaient légèrement inférieures à la moyenne de celles des pays de l’AfSS. Graphique 3-12. Cameroun et pays pairs sélectionnés : Efficience de l’investissement public 1,0 0,8 Score d'ef cacité 0,6 0,4 0,2 0,0 PFR ASS Source : PIMA FMI 2020. Note : Le Cameroun est représenté par le triangle rouge. 3.5 Créer un espace budgétaire pour une croissance inclusive à moyen terme 3.5.1 Perspectives en situation de référence La croissance économique devrait légèrement augmenter à moyen terme, appuyée par une activité soutenue dans les secteurs secondaire et tertiaire. La croissance du PIB réel devrait atteindre en moyenne 4,2 % sur la période 2023-2025. Du côté de l’offre, la production pétrolière devrait continuer de diminuer à cause de l’épuisement des gisements pétroliers, alors que la production gazière devrait rester soutenue. Dans le secteur non pétrolier, la croissance serait appuyée par une augmentation de la production agricole et Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 30 des revenus élevés durables provenant de produits tels que le cacao, le café, la banane, le coton et le caoutchouc. Les industries agroalimentaires, la construction et l’énergie devraient appuyer l’activité du secteur secondaire, tandis que la télécommunication, les services financiers, l’hôtellerie et la restauration devraient appuyer l’activité du secteur tertiaire. Du côté de la demande, l’augmentation de la consommation privée et des investissements devrait être le principal moteur de la croissance du PIB réel, à mesure que les importations de produits alimentaires et de matériels de construction continuent d’augmenter. Le déficit budgétaire devrait diminuer à moyen terme, cette diminution étant appuyée par l’engagement du gouvernement à prioriser les dépenses et à améliorer le recouvrement des recettes non pétrolières (Graphique 3-13). La réduction progressive des subventions aux carburants, qui a débuté par une augmentation moyenne de 21 % des prix de détail des carburants (à l’exception du pétrole lampant) à la fin janvier 2023, ainsi que d’autres réductions de dépenses en cours devraient contenir les dépenses publiques. Du côté des recettes, la mobilisation des recettes fiscales devrait être stimulée par des mesures visant à : (i) élargir l’assiette fiscale ; (ii) rationaliser les dépenses fiscales ; (iii) améliorer l’imposition des revenus des personnes physiques et la fiscalité du secteur informel  ; (iv) généraliser les paiements électroniques et le suivi électronique des transactions économiques ; et (v) lutter contre la fraude et l’évasion fiscales en exploitant les mégadonnées et en recourant aux systèmes automatisés d’analyse des risques et au partage d’informations avec les juridictions étrangères. L’administration fiscale entend augmenter le ratio impôts sur PIB, le faisant passer de 8,1 % en 2022 à 9,6 % en 2025. Le déficit budgétaire devrait diminuer pour passer à 0,4 % du PIB d’ici 2025. Graphique 3-13. Trajectoire d’ajustement budgétaire, 2019-2025 (Pourcentage du PIB) 25,0 0,0 -0,5 20,0 -1,0 15,0 -1,5 10,0 -2,0 -2,5 5,0 -3,0 0,0 -3,5 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 Dépenses totales Recettes totales (dons compris) Dé cit budgétaire (axe de droite) Sources : Banque mondiale, FMI et autorités du Cameroun, mars 2023. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 31 Les perspectives économiques du Cameroun restent incertaines et fortement exposées à des risques qui pourraient perturber le cadre macroéconomique. Parmi ces risques, il y a un nouveau resserrement possible des conditions financières ainsi qu’une hausse de l’inflation en conséquence de la prolongation de la guerre en Ukraine et de la crise sécuritaire actuelle dans les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême- Nord. La situation sécuritaire dans ces régions continue d’affecter les dépenses publiques, exerçant une pression sur les finances publiques. Si ces risques venaient à se concrétiser, la croissance du PIB réel du pays serait plus modeste que prévu dans le scénario de référence, ce qui aurait des implications sur les comptes budgétaires et les comptes des opérations avec l’extérieur. De plus, la hausse des cours internationaux du pétrole et des prix des produits alimentaires pourrait contribuer à l’intensification des pressions inflationnistes et aux problèmes budgétaires, même si, selon les attentes, les recettes pétrolières devraient augmenter. Dans un tel scénario, le gouvernement devrait probablement mettre en œuvre des réductions de dépenses plus importantes pour réduire le déficit budgétaire et gérer le faible financement disponible provenant des sources externes et nationales. 3.5.2 Évaluation des risques budgétaires : scénarios de sensibilité de la dette Des scénarios alternatifs, dans lesquels les hypothèses de base du scénario de référence seraient affaiblies, pourraient entraîner des écarts significatifs par rapport à la trajectoire à la baisse projetée de la dette.4 Un ralentissement de la croissance économique, une interruption des efforts d’ajustement budgétaire, ou une complication des conditions de financement, pourraient conduire à une hausse du niveau de la dette publique d’ici 2028. Une croissance économique plus faible que prévue réduirait les perspectives en matière de dette. Dans un scénario alternatif à croissance ralentie du PIB, l’ajustement budgétaire devient plus difficile, des réductions nominales plus importantes des dépenses étant nécessaires pour faire diminuer le rapport dette sur PIB. En tablant sur la stabilité du ratio recettes fiscales sur PIB et des dépenses nominales, un scénario d’expansion économique plus faible que prévue entraînerait une tendance à la hausse de la dette en affectant négativement l’orientation de la politique budgétaire du gouvernement et en réduisant la contribution de la croissance économique aux recettes budgétaires. La réduction de moitié du taux de croissance prévu augmenterait la dette publique qui passera à 49 % du PIB d’ici 2028. Dans ce scénario, le solde primaire présenterait en moyenne un déficit de 0,9 % du PIB, tandis que les besoins de financement bruts s’élèveraient à 6,8 % du PIB par an (contre un excédent primaire de 0,3 % du PIB et des besoins de financement bruts de 5 % du PIB dans la situation de référence). De plus, la contribution négative du PIB nominal à la croissance représente une réduction annuelle de 2,3 % du PIB, soit 0,7 point de PIB de moins que dans le scénario de référence. En conséquence, le rapport dette sur PIB augmenterait pour passer à 49 % au lieu de diminuer à 37 % comme prévu dans le scénario de référence (Tableau 3-2). 4 Des scénarios alternatifs ont été étudiés à l’aide de l’outil d’Analyse de Viabilité Budgétaire (AVB). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 32 Tableau 3-2. Scénarios alternatifs 2022 2023-28 Perspectives Absence Croissance Choc Combinaison en situation d’ajustement plus faible financier de chocs de référence budgétaire Hypothèses macrobudgétaires Croissance du PIB 3,4 4,6 2,3 4,6 4,6 2,3 Recettes 16,1 15,3 15,3 15,3 15,3 15,3 Dépenses primaires 17 15 16,2 17 15 17,7 Solde primaire (% du PIB) -0,9 0,3 -0,9 -1,7 0,3 -2,3 Émission de dette intérieure … 35 35 35 75 75 (part en %) Émission de dette extérieure … 65 65 65 25 25 (part en %) Conditions financières Perspectives en situation de Scénarios de choc financier et de référence combinaisons de chocs Délai de Taux Maturité Délai de grâce Maturité Taux d’intérêt grâce d’intérêt Dette commerciale extérieure 3 13 3,6 1 13 7,6 Bons du Trésor nationaux 0 1 3 0 1 7 Obligations du Trésor nationales 1 2 4 1 2 8 à 2 ans Obligations du Trésor nationales 4 5 6 3 5 10 à 5 ans Source : Simulations des services de la Banque Mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 33 Si les dépenses primaires ne sont pas réduites, la dette publique pourrait atteindre 48 % du PIB. Dans le scénario de référence, les dépenses primaires devraient diminuer, passant de 17,0 % du PIB en 2022 à 15,4 % du PIB en 2024. Sans cette réduction des dépenses, selon les projections, le déficit primaire devrait atteindre en moyenne 1,7 % du PIB sur la période 2023-2028, et les besoins de financement bruts atteindraient 7,5 % par an, ce qui entraînerait une augmentation de la dette publique. Même si la contribution négative du PIB nominal à l’accumulation de la dette publique ne serait que de 0,3 point de pourcentage plus élevée que dans les perspectives en situation de référence (l’hypothèse de croissance n’étant pas affectée, mais l’encours de la dette étant plus important), le rapport dette sur PIB atteindrait 48 % du PIB d’ici 2028. Le resserrement des conditions d’emprunt augmenterait les besoins bruts de financement et la dette publique du Cameroun. Dans le scénario de référence, la stratégie financière reposerait largement sur le financement extérieur, à des conditions largement concessionnelles, et sur des conditions financières favorables pour les instruments de dette intérieure. Dans un scénario de tension caractérisé par une moindre disponibilité des financements extérieurs concessionnels et des taux d’intérêt intérieurs plus élevés, les besoins de financement bruts augmenteraient et accéléreraient l’accumulation de la dette publique. La multiplication par deux des taux d’intérêt et l’intensification du financement intérieur affaibliraient la réduction projetée de la dette publiqu e. Une stratégie financière davantage centrée sur le financement intérieur (en supposant que seul un quart des émissions soit externe, contre trois quarts dans le scénario de référence) en combinaison avec une augmentation des taux d’intérêt (en doublant leurs valeurs par rapport au scénario de référence) ralentiraient la réduction de la dette envisagée, sans cependant l’arrêter. Dans ce scénario, les charges d’intérêt représenteraient en moyenne 1,4 % du PIB en 2023-2028 (contre 1 % du PIB dans le scénario de référence) et la dette publique atteindrait environ 39 % du PIB Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group d’ici 2028, soit environ 2 points de pourcentage de plus que dans les perspectives en situation de référence. Une déviation simultanée par rapport aux trois hypothèses de base du scénario de référence entraînerait une augmentation significative de la dette publique. En tablant sur une trajectoire de croissance plus faible que prévue, sans réduction des dépenses primaires Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 34 et sans resserrement des conditions financières, la dette publique augmenterait de 2,5 points de PIB par an entre 2023 et 2028, soit plus de 1,6 point de pourcentage du PIB dans le scénario de référence. De plus, le rythme d’accumulation de la dette s’accélérerait par rapport à celui des années récentes (il atteignait en moyenne 2,0 points de PIB sur la période 2019-2022) et le rapport dette sur PIB augmenterait en flèche pour atteindre 61 % du PIB d’ici 2028. Graphique 3-14. Évaluation des risques budgétaires : Scénarios alternatifs a. Cameroun : Dette publique (% du PIB) b. Cameroun : Besoins de financement (% du PIB) 65 18 61 16 16 60 14 55 12 50 49 10 48 8 45 8 8 7 6 40 39 4 4 37 35 2 30 0 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 Projections de référence Scénario de faible croissance Scénario d'absence d'ajustement budgétaire Scénario de choc financier Scénario de chocs combinés Source : Simulations des services de la Banque Mondiale 3.5.3 Gérer l’ajustement budgétaire L’indispensable ajustement budgétaire actuel représente un défi sérieux pour une croissance stable et robuste dont le Cameroun a besoin à moyen terme pour réaliser ses objectifs de développement. Pour maintenir la viabilité budgétaire à moyen terme, il sera nécessaire d’augmenter les recettes et de maîtriser les dépenses tout en veillant à ce que la politique budgétaire appuie les objectifs de croissance à long terme. Étant donné que le ralentissement de ces dernières années était en partie dû à la réduction des dépenses publiques, en particulier des dépenses d’investissement, l’un des principaux défis du Cameroun est de déterminer dans quelle mesure l’ajustement budgétaire peut être réalisé tout en réalisant les niveaux nécessaires d’investissement public. 35 4 STIMULER LA MOBILISATION DES RECETTES FISCALES Une intensification de la mobilisation des recettes est nécessaire pour financer les investissements publics indispensables à la croissance à long terme et fournir des services publics adéquats, tout en préservant la viabilité budgétaire et la viabilité de la dette. Le ratio impôts sur PIB du Cameroun reste nettement inférieur au benchmark de 15 % nécessaire pour financer de manière adéquate les investissements publics, et son niveau se situe en dessous de la moyenne des niveaux des PRITI, des pays de l’AfSS et des autres pays comparatifs. La faible mobilisation des ressources intérieures mine la capacité à soutenir les plans d’investissement public pluriannuels et les dépenses sociales et productives essentielles, réduit la capacité d’emprunt du pays et affaiblit sa résilience aux chocs. La rationalisation des dépenses fiscales, l’élargissement de l’assiette fiscale et le renforcement de l’administration fiscale pourraient grandement contribuer à améliorer la mobilisation des recettes intérieures. Ce chapitre présente une évaluation du recouvrement des recettes fiscales intérieures sur la période 2010-2021. Il décrit les politiques fiscales actuelles du Cameroun et discute des principaux problèmes auxquels l’administration fiscale fait face dans l’intensification de la mobilisation des recettes intérieures. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 36 4.1 Tendances des recettes fiscales Les autorités doivent améliorer la mobilisation des recettes fiscales destinées à financer les investissements publics nécessaires pour appuyer la croissance à long terme du Cameroun. Alors que le pays poursuit son ajustement budgétaire, un renforcement de la mobilisation des recettes sera essentiel pour limiter l’ampleur des réductions des dépenses publiques à opérer, en particulier les dépenses d’investissement, qui sont nécessaires pour stimuler la croissance économique. Les recettes publiques totales, bien que variables, ont stagné à environ 15 à 16 % du PIB depuis 2010, dont environ un cinquième provenant du secteur pétrolier, même si les recettes pétrolières suivent inévitablement une tendance baissière à mesure que les réserves pétrolières diminuent (voir Annexe 1). Entre 2010 et 2021, près de 90 % de la part croissante des revenus non pétroliers proviennent des impôts (70 % des revenus totaux) (Graphique 4-1). Ainsi, il est essentiel pour le Cameroun d’augmenter ses recettes fiscales pour préserver et améliorer sa situation budgétaire. Graphique 4-1. Recettes moyennes par type, 2010-2021 (% du total) Dons 2,2 % Recettes fiscales 69,3 % Recettes Recettes pétrolières non pétrolières Recettes de 19,9 % 77,9 % privatisation 2,9 % Factures de paiement 0,003 % Recettes à régulariser 1,2 % Recettes non fiscales 4,5 % Note : Les recettes du secteur pétrolier correspondent au solde transférable total de la Société Nationale des Hydrocarbures (SNH) et à l’impôt sur le revenu des sociétés pétrolières et des opérateurs gaziers (Impôt/Stés Pétrolières). Les recettes fiscales excluent l’impôt sur les revenus du secteur pétrolier. Les recettes non fiscales comprennent les frais administratifs, les loyers et les revenus immobiliers, ainsi que les redevances d’oléoduc payées par la Cameroun Oil Transportation Company. Les années 2013 et 2015 étaient les seules années où des recettes de privatisation ont été générées. C’est en 2014 uniquement qu’il y a eu des recettes à régulariser, cas où des contribuables ont payé leurs impôts directement au Trésor en une seule fois sans en préciser le type. Le recours aux effets à l’encaissement n’a eu lieu qu’avant 2015, lorsque des contribuables effectuaient leurs paiements par chèque bancaire plutôt que par virement bancaire. Source : Ministère des Finances du Cameroun ; Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 37 Les recettes fiscales ont suivi une tendance à la hausse et ont représenté en moyenne 11 % du PIB en 2010-2021. Les mesures administratives et fiscales prises entre 2011 et 2012 (telles que la fin des réductions temporaires, l’amélioration de la conformité et de l’administration fiscale, et la simplification et la rationalisation des taux) ont permis d’augmenter les recettes fiscales de 1  % du PIB (Graphique 4-2).5 Des améliorations supplémentaires ont été apportées au recouvrement des impôts en 2014-2015, à travers la création de centres des impôts décentralisés devant faciliter le paiement des impôts, l’ajustement de certains taux d’imposition, la limitation des exonérations fiscales et la promulgation de la loi sur les mesures d’incitation à l’investissement.6 Les mesures publiques visant à améliorer l’administration fiscale, incluant des contrôles fiscaux et douaniers conjoints supplémentaires, le recoupement des données douanières et fiscales, et la rationalisation des exonérations de TVA, ont largement compensé les recettes perdues pendant la crise socio-politique qui a éclaté dans les régions anglophones (Nord-Ouest et Sud-Ouest) en septembre 2016. Les recettes fiscales ont connu un rebond en 2017-2018 pour atteindre 12 % du PIB. Cependant, les recettes non pétrolières ont diminué, passant à 11,9 % en 2019 à cause de différents facteurs, notamment la crise sécuritaire dans les secteurs à rendement budgétaire élevé (notamment le secteur brassicole, chimique, métallurgique et de transformation du bois) ; la réduction des impôts payés par la Société Nationale de Raffinage (SONARA) ; et les retards dans les importations suite à la mise en œuvre d’une nouvelle réglementation des changes par la banque centrale régionale (Banque des États de l’Afrique Centrale, BEAC).7 Dans l’ensemble, les contraintes à l’activité de l’administration dans les régions affectées par les crises internes ont été à l’origine d’une diminution des revenus estimée à 5 % en 2019. Le système fiscal du Cameroun s’appuie fortement sur les impôts indirects, notamment la TVA qui continue d’augmenter, et sur les impôts sur les gros contribuables. En 2010- 2021, près des trois quarts des recettes fiscales du pays provenaient des impôts indirects, les recettes de TVA étant celles qui ont le plus augmenté en proportion du PIB (Graphique 4-2 et Graphique 4-3). La TVA a été le plus grand contributeur au total des recettes fiscales, représentant environ 39 %, suivie par les taxes sur le commerce international atteignant 16,8 % (Graphique 4-3, Graphique 4-4). La part de la TVA et des droits d’accise dans le total des recettes fiscales a augmenté au fil du temps entre 2010-13 et 2018-21, principalement à la suite de la simplification des exonérations de TVA et de l’introduction de nouveaux droits d’accise. En revanche, la contribution des taxes sur le commerce international a diminué à mesure que le Cameroun s’intégrait davantage dans les chaînes de valeur mondiales et implémentait les réformes tarifaires de la CEMAC. De plus, les revenus de l’impôt sur les sociétés et sur les revenus des personnes physiques ont diminué au cours de ces deux périodes, passant respectivement de 15,5 à 13,9 % et de 10,2 à 9,7 %, (Graphique 4-3), suite à l’introduction de nouvelles dépenses fiscales et de mesures incitatives pour attirer les investissements directs étrangers. Les gros contribuables jouent notamment un rôle central dans les recettes fiscales du Cameroun. La Direction Générale des Impôts (DGI) segmente la base des contribuables pour améliorer la conformité et la gestion du service client. Les contribuables grandes entreprises ont représenté 73 % du total des recettes fiscales du secteur non pétrolier sur la période 2016-2021. 5 FMI. Cameroun : Rapport sur l’article IV de 2012. Rapport Pays No. 12/237. Août 2012. 6 FMI. Cameroun : Rapport sur l’article IV de 2014. Rapport Pays No. 14/212. Juillet 2014. FMI. Cameroun. Rapport sur l’article IV de 2015. Rapport Pays No. 15/331. Décembre 2015. 7 FMI. Cameroun : Cinquième Revue dans le cadre de l’Accord au titre du Mécanisme Elargi de Crédit. Rapport Pays No. 20/48. Février 2020. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 38 Graphique 4-2. Recettes fiscales par type d’impôt, 2010-2021 (% PIB) 14 12 10 8 6 4 2 0 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Impôt sur le revenu des personnes physiques Impôt sur les sociétés Impôt sur le revenu des capitaux mobiliers Autres impôts directs TVA inclus remboursement de TVA Droits d'accises Taxe spéciale sur les produits pétroliers Impôt sur le commerce international Taxes forestières Droits d'enregistrement et de timbres Note  : Les impôts directs sont constitués des impôts sur les revenus des personnes physiques (IRPP), de l’impôt sur les sociétés (IS), de l’impôt sur les revenus des capitaux mobiliers (IRCM) et des autres impôts directs. Les impôts indirects sont constitués de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), des droits d’accises, de la taxe spéciale sur les produits pétroliers (TSPP), des taxes sur le commerce international, des taxes forestières et des droits d’enregistrement et des timbres. L’IS ne concerne pas les revenus des sociétés pétrolières et des opérateurs gaziers. Source : Ministère des Finances du Cameroun ; Calculs des services de la Banque mondiale. Graphique 4-3. Composition des recettes fiscales, Graphique 4-4. Contribution aux recettes fiscales par source, moyenne 2010-2021 (% du total) moyenne 2010-2013, 2014-2017, 2018-2021 (% du total) Taxes forestières 100 % 2,658457442 2,530181924 2,55684775 et Droits d'enregistrement IRCM et Autres 90 % 17,06341453 14,88436709 19,03490281 2,6 % impôts directs 2,2 % 80 % 5,182814082 5,32372864 6,42444568 8,533949196 10,15961176 70 % 6,675233569 IRPP Impôts sur le 10,2 % 60 % commerce international 50 % 16,8 % 37,48389467 38,22156538 41,23069314 IS TSPP 5,6 % 40 % 15,1 % 30 % 1,978013623 1,965694432 2,355173194 20 % 15,80611117 15,54388579 13,923197 Droits TVA, inclus 10 % d'accise remboursements 10,20116642 10,55535473 9,70729598 8,9 % de TVA 0% 38,6 % 2010-2013 2014-2017 2018-2021 Taxes forestières et Impôts sur le commerce Droits d'enregistrement international TSPP Droits d'accises TVA y compris remboursements IRCM et Autres Impôts directs de TVA IS IRPP Note : TSPP : taxe spéciale sur les produits pétroliers ; IRCM : impôt sur les Source : Ministère des Finances du Cameroun, FMI, Calculs des revenus des capitaux mobiliers. Source : Ministère des Finances du Cameroun, services de la Banque mondiale. Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 39 Le niveau de collecte des recettes fiscales du Cameroun a dépassé la moyenne des niveaux des pays de la CEMAC, mais reste inférieur à ceux des pays pairs structurels et aspirationnels ainsi que des benchmarks internationaux. Au cours de la période 2016-2020, les recettes fiscales du Cameroun ont augmenté, passant à 11,6 % du PIB, ce niveau dépassant la moyenne des niveaux des pays de la CEMAC, qui est de 9,3 %, principalement à cause de l’important recouvrement de TVA. Cependant, elles restent inférieures à l’objectif de la CEMAC, qui est de 17 % du PIB, et aux moyennes de l’AfSS et des PRITI, qui sont de 15,9 % et 15,7 %, respectivement (Graphique 4-6).8 Le principal contributeur à cet écart de recettes par rapport aux autres pays de la région est l’impôt sur les sociétés et sur les revenus des personnes physiques (Graphique 4-6). Par rapport à ses pairs, le niveau de collecte d’impôts du Cameroun ne dépasse que celui du Sri Lanka (10,6 % du PIB) et est égal avec celui du Ghana et de la Côte d’Ivoire (tous deux à 12,1 % du PIB). D’autres pays comparatifs tels que le Sénégal, le Maroc, le Vietnam et le Kenya recouvrent trois fois plus d’impôts directs que le Cameroun (IS et IRPP) (Graphique 4-6). Le niveau de recouvrement de l’IRPP a atteint 1,1 % du PIB au cours de la période 2016- 20, soit moins de la moitié de la moyenne des niveaux de recouvrement des pays de la CEMAC et de l’AfSS et des PRITI (Graphique 4-6). Graphique 4-5. Recettes fiscales moyennes et PIB par habitant Graphique 4-6. Recettes fiscales moyennes, par groupe de pays, 2016-20 (% du PIB) Cameroun et groupes de pays, 2016-2020, (% PIB) 20 7 16 6 12 5 4 8 3 4 2 0 AfSS PRITI CEMAC Cameroun Gabon Rep. du Congo Tchad RCA Guinée Equatoriale Sénégal Ghana Côte d'Ivoire Maroc Vietnam Kenya Sri Lanka 1 - Impôts sur les personnes physiques Impôts sur les sociétés TVA Droits d'accises Impôts sur le commerce international Pairs Régions CEMAC Pairs aspirationnels structurels Autres Impôts commerce international Droits d'accise Cameroun CEMAC PRITI TVA ISPP IS Recettes fiscales AfSS Monde Note : Pour le Cameroun, les données sur la TVA prennent en compte le remboursement des crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun, FMI, Calculs des services de la Banque mondiale. 8 Fiess,Norbert Matthias; Aguera,Philippe Marie; Calderon,Cesar; Jensen,Leif; Gaskell,Joanne Catherine; Keyser,John C.; Nielsen,Hannah Sibylle; Portugal,Alberto; Signoret,Jose E., CEMAC: Deepening Regional Integration to Advance Growth and Prosperity, Washington, D.C. : World Bank Group. http://documents.worldbank. org/curated/en/491781560455916201/Deepening-Regional-Integration-to-Advance-Growth-and-Prosperity Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 40 Le niveau de collecte des recettes fiscales au Cameroun est largement inférieur aux moyennes régionales et aux moyennes des PRITI de la région AfSS.9 Entre 2010 et 2021, les recettes fiscales du Cameroun sont systématiquement restées inférieures aux moyennes de celles des pays à faible revenu et PRITI en AfSS, mais dépassaient la moyenne de celles des pays de la CEMAC (Graphique 4-7). Même si sa performance est similaire à celle du Ghana et de la Côte d’Ivoire, elle est inférieure à celle du Sénégal, un autre pays pair structurel (Graphique 4-8). Parmi les pays pairs aspirationnels du Cameroun, seul le Sri Lanka présente une performance inférieure à la sienne. Dans l’ensemble, les recettes fiscales du Cameroun, tant en termes de niveau que de composition, sont inférieures aux benchmarks recommandés pour la prestation des services de base et sont à la traine par rapport au benchmark de la conférence d’Addis-Abeba pour le ratio impôts sur PIB en AfSS et dans les PRITI. Graphique 4-7. Recettes fiscales, Cameroun et groupes de Graphique 4-8. Tax Revenue, structural and aspirational peers pays de l’AfSS, 2010-2021, (% PIB) 2010–2021, (% GDP) 25 25 20 20 15 15 10 10 5 5 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Cameroun Côte d'Ivoire Ecart Interquartile Cameroun Ghana Sénégal PRITI & PFR en AfSS PRITS & PRE en AfSS CEMAC Kenya Maroc Sri Lanka Vietnam Note : L’écart interquartile couvre les 75ème au 25ème percentiles des PRITI et des LIC en ASS. Source : Ministère des Finances du Cameroun, FMI, Calculs des services de la Banque mondiale. 9 L’échantillon des groupes de pays de l’AfSS par niveau de revenu a été sélectionné ainsi qu’il suit. (1) Le groupe des pays à revenus élevés (PRE) : Les Seychelles ; (2) Le groupe des pays à revenus intermédiaires de la tranche supérieure (PRITS) : Botswana, Gabon, Guinée équatoriale, Maurice, Namibie et Afrique du Sud ; (3) Le groupe des pays à revenus intermédiaires de la tranche inférieure (PRITI) : Angola, Bénin, Côte d’Ivoire, Cameroun, République du Congo, Comores, Cabo Verde, Ghana, Kenya, Lesotho, Mauritanie, Nigeria, Sénégal, São Tomé et Principe, Eswatini, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe ; (4) Le groupe des pays à faibles revenus (LIC) : Burundi, Burkina Faso, République Centrafricaine, Congo, République démocratique du Congo, Érythrée, Éthiopie, Guinée, Gambie, Guinée-Bissau, Libera, Madagascar, Mali, Mozambique, Malawi, Niger, Rwanda, Soudan, Sierra Leone, Somalie, Soudan du Sud, Tchad, Togo et Ouganda. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 41 4.1.1 Potentiel de recettes fiscales Les recettes fiscales au Cameroun ne représentent actuellement que 58  % de leur plein potentiel, indiquant l’existence de possibilités de réformes des politiques et de l’administration fiscales. Le Cameroun exhibe un indice d’effort fiscal de 0,58 sur la période 2010-20 (Graphique 4-10) l’effort fiscal est considéré faible lorsque l’indice d’effort fiscal est inférieur à 1) indiquant d’importantes possibilités pour le Cameroun d’augmenter ses recettes fiscales. L’effort fiscal est affecté par la structure fiscale (tels que le taux d’imposition, l’assiette fiscale, etc.), ainsi que par Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group l’administration et la conformité fiscales. L’effort fiscal peut être renforcé en augmentant les taux d’imposition, en élargissant l’assiette fiscale et en améliorant la conformité fiscale et l’application des règles fiscales. Comparé aux pays pairs, compte tenu des niveaux d’imposition et des différents facteurs structurels et institutionnels, le Cameroun présente un potentiel fiscal moyen estimé à 18,8 % du PIB (Graphique 4-9). Ce calcul donne pour résultat un écart fiscal total de 7,8 % du PIB, alors que les recettes fiscales du pays représentaient en moyenne un peu plus de 11 % du PIB en 2010-20. Pour l’AfSS, l’écart fiscal total variait entre 3 et 9 % du PIB, les pays riches en ressources naturelles présentant les plus importants écarts selon les estimations. Ces déficits de recettes fiscales par rapport au potentiel résultent soit de lacunes au niveau de la politique fiscale, soit d’un manque de conformité (Encadré 4-1). Cependant, il n’est pas possible de présenter dans ce chapitre la part de l’écart fiscal total imputable aux lacunes de politique fiscale ou au manque de conformité, ni d’évaluer, secteur par secteur, l’écart fiscal à cause des limitations des données désagrégées sur les contribuables. L’analyse détaillée de l’écart fiscal est réalisée dans le cadre du programme d’assistance technique à la mobilisation des recettes (P179082). L’affectation des « diverses recettes fiscales » génère des inefficiences. Ces revenus, qui représentent 1,4 % du PIB entre 2010 et 2021, proviennent de la TSPP10, de la taxe forestière et d’autres recettes fiscales mineures. Contrairement à la fiscalité générale, qui génère des recettes sans contrepartie recouvrées pour les réserves financières communes, les recettes fiscales spéciales sont recouvrées et redistribuées selon des modalités bien précises. A cause de ces modalités, ainsi que des pertes d’efficience, les recettes ne sont pas disponibles pour financer des dépenses critiques. 10 Les revenus de la TSPP sont en partie affectés au Fonds Routier (Fonds Routier, CdI, Article 234). Le statut de cantonnement du TSPP doit être appréhendé dans le contexte du régime d’imposition global des ressources naturelles au Cameroun, y compris les critères d’allocation. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 42 Graphique 4-9. Capacité fiscale, 2010-20, (% du PIB) Graphique 4-10. Effort fiscal, 2010-20 20 0,7 0,6 15 0,5 10 0,4 0,3 5 0,2 - 0,1 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 TVA Recettes fiscales Recettes fiscales Impôt sur les sociétés Impôt sur IRPP IRPP VAT les sociétés Impôt sur le Droits d'accise Impôt sur le Droits d'accise commerce international commerce international Source : Ministère des Finances du Cameroun, Tableau de bord des recettes fiscales de la Banque mondiale et calculs des services de la Banque mondiale Encadré 4-1. Méthodes d’estimation du potentiel de recettes fiscales Il existe plusieurs méthodes d’estimation du potentiel de mobilisation des recettes d’un pays. Différents facteurs, en rapport à la fois aux politiques fiscales et à l’administration, affectent le recouvrement des recettes. Les recettes intérieures peuvent être considérablement inférieures à leur potentiel à cause de taux d’imposition sous-optimaux et de la prolifération d’exonérations (en rapport aux politiques fiscales), ainsi que d’un manque de conformité et d’une faible capacité à recouvrer les recettes (en rapport à l’administration fiscale). Il est donc crucial de cerner les contraintes les plus fortes pour prioriser les réformes. Une méthode simple pour estimer le montant des recettes fiscales supplémentaires qui pourraient être recouvrées consiste à comparer le rapport impôts sur PIB d’un pays avec celui d’autres pays présentant des caractéristiques similaires - telles que le niveau de développement économique et institutionnel. Cela peut être effectué à travers un simple exercice d’analyse comparative, y compris de la productivité fiscale et de l’efficience-C de la TVA, ou à travers un exercice empirique. L’« effort fiscal » mesure les efforts déployés par un pays pour accroître ses recettes fiscales, tandis que « l’écart fiscal » est souvent dû à des lacunes dans les politiques et l’administration. Le potentiel fiscal (ou capacité contributive), en utilisant une estimation de la frontière fiscale du pays,11 fournit un point de référence pour le montant maximal des recettes qui pourraient être recouvrées suite à des changements de politique 11 La frontière fiscale est définie comme étant le niveau théorique maximal de recettes fiscales qu’un pays peut réaliser compte tenu des conditions de base telles que le niveau de développement, l’ouverture commerciale, la structure sectorielle, la distribution des revenus et la gouvernance. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 43 fiscale ou à des améliorations de l’efficience du recouvrement compte tenu des facteurs socioéconomiques d’un pays (exemple : les caractéristiques macroéconomiques, démographiques et institutionnelles spécifiques d’un pays). L’effort fiscal est le rapport du recouvrement réel des impôts sur le potentiel fiscal, qui mesure les efforts qu’un pays déploie pour augmenter ses recettes fiscales. L’écart fiscal est la différence entre le potentiel fiscal et le recouvrement réel des impôts, et il prend en compte le « déficit de politiques » et le « déficit de conformité ». Le déficit de politiques quantifie la mesure dans laquelle le recouvrement des impôts est affectée par les politiques qui réduisent l’assiette fiscale et/ou les taux d’imposition. Parmi les exemples, il y a les exonérations fiscales et les réductions de taux, qui représentent des dépenses fiscales en réduisant les obligations fiscales (constituant ainsi une perte de recettes) plutôt que des dépenses directes. Le déficit de conformité indique dans quelle mesure l’insuffisance de capacité de l’administration fiscale et/ou les évasions fiscales peuvent expliquer l’écart entre les recettes potentielles et le recouvrement réel. Le système fiscal du Cameroun est dynamique, les recettes augmentant plus rapidement que le PIB. Tableau 4-1: Estimations de l’élasticité globale de l’impôt du Cameroun, 2010-2021 L’élasticité globale de l’impôt informe sur le lien temporel entre la croissance des revenus fiscaux et Type de taxe Élasticité la croissance économique. Un coefficient d’élasticité globale de 1 indiquerait qu’une augmentation de 1 % Recettes fiscales 1,40 du PIB entraîne une augmentation moyenne de 1 % des recettes fiscales – signifiant que les recettes augmentent Impôt sur le revenu des au même rythme que l’activité économique. De 2010 à 1,25 personnes physiques (IRPP) 2021, l’élasticité globale de l’impôt du Cameroun était de 1,4, ce qui signifie que le taux de croissance des Impôt sur les sociétés (IS) 1,15 recettes fiscales a dépassé celui du PIB, jouant ainsi le Impôt sur les revenus des rôle de stabilisateur de l’activité (Tableau 4-1). Les droits 0,64 capitaux mobiliers (IRCM) d’accise présentaient la plus grande élasticité, soit 2,7, probablement à cause des ajustements automatiques Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) 1,66 à l’inflation des taux d’imposition ad valorem. Les élasticités de l’IRPP (1,3), l’IS (1,2) et la TVA (1,7) Droits d’accise 2,67 dépassent également 1, alors qu’elles restent inférieures à 1 pour l’impôt sur les revenus des capitaux mobiliers Taxe spéciale sur les produits 0,75 (IRCM) (0,6), la taxe spéciale sur les produits pétroliers pétroliers (TSPP) (TSPP) (0,8) et les taxes sur le commerce international Taxe commerciale 0,64 (0,6) à cause des réductions tarifaires en accord avec les directives régionales de la CEMAC. Le niveau élevé de l’élasticité globale des revenus fiscaux du Cameroun est Taxe forestière 0,87 en accord avec la tendance générale des PRITI et des Note : Les données sur la TVA prennent en compte le remboursement des LIC à présenter une élasticité supérieure à 1.12 crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun ; Calculs des services de la Banque mondiale. 12 Cornevin, Antoine, et al. « IMF Working Papers Volume 2023 Issue 071 : A Deep Dive into Tax Buoyancy: Comparing Estimation Techniques in a Large Heterogeneous Panel (2023). » FMI, 17 mars 2023, doi.org/10.5089/9798400238376.001. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 44 4.2 Politique fiscale 4.2.1 Impôt sur les revenus des personnes physiques Le niveau de recouvrement de l’IRPP au Cameroun a été relativement stable mais inférieur à celui des pays de comparaison régionaux et mondiaux. Les recettes de l’IRPP ont représenté environ 1,1 % du PIB en 2017-2021, un niveau bien inférieur à la moyenne de 2,3 % du PIB des niveaux des PRITI et LIC de l’AfSS. Les recettes de l’IRPP ont peu changé depuis plus d’une décennie, passant d’une moyenne d’environ 0,9 % du PIB en 2010-2012 à 1,2 % du PIB en 2013-2016, avant de diminuer légèrement, passant à 1,1 pour 2017- 2021. Jusqu’en 2014, le niveau de recouvrement de l’IRPP au Cameroun correspondait à la moyenne des niveaux des pays de la CEMAC, mais depuis 2015 son niveau est tombé en dessous de cette moyenne, et est même tombée en dessous de l’écart interquartile pour certaines années (Graphique 4-11). Parmi les pays pairs structurels et aspirationnels du Cameroun, tous à l’exception du Sri Lanka, ont surpassé le Cameroun, et seul le Vietnam a réussi à augmenter constamment ses recettes d’IRPP depuis 2010 (Graphique 4-12). L’écart fiscal (différence entre les recettes collectées et les recettes potentielles de l’IRPP) du Cameroun, qui s’élevait en moyenne à environ 1,1 % du PIB en 2017-2020, est une autre preuve de la faible performance du pays en matière de collecte de l’IRPP. Graphique 4-11. Recettes de l’IRPP, Cameroun et groupes de Graphique 4-12. Recouvrement de l’IRPP, Cameroun et pays pays, 2010-2021, (% PIB) pairs, 2010-2021, (% PIB) 5 5 4 4 3 3 2 2 1 1 0 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Cameroun Côte d'Ivoire Ecart Interquartile Cameroun Ghana Sénégal PRITI & PFR en AfSS PRITS et PRE en AfSS Kenya Maroc CEMAC Sri Lanka Vietnam Note : L’écart interquartile couvre les 75ème au 25ème percentiles des PRITI et des LIC en AfSS. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 45 Les taux et tranches d’IRPP au Cameroun permettent de parvenir à un équilibre entre la simplicité, l’optimisation des recettes et la progressivité. Le pays compte le même nombre de tranches d’imposition (quatre) que le Tchad et la République du Congo, tandis que d’autres membres de la CEMAC en ont plus, tels que la République centrafricaine (cinq), la Guinée équatoriale (sept) et le Gabon (huit) (Annexe 4). Alors que la Guinée équatoriale et le Gabon, tous deux des PRITS, comptent un nombre plus grand de tranches de taux pour un objectif affiché de renforcer la progressivité de leur IRPP et l’équité, selon l’expérience internationale un nombre élevé de tranches entraine plus de complexité sans contribuer substantiellement aux recettes ou à la progressivité. Une structure plus simple comportant un nombre inférieur de tranches d’imposition, comme celle du Cameroun, réduit les coûts de conformité et d’administration. Un taux d’imposition marginal supérieur moins élevé favorise la conformité, et l’augmentation des taux maximaux s’est révélée être l’un des rares leviers de politique fiscale facilement mobilisable pour lutter contre les inégalités de revenus (Encadré 4-2). Encadré 4-2. Principales caractéristiques de l’impôt sur le revenu des personnes physiques au Cameroun Réforme. La Loi de finance 2015 a réorganisé le régime de l’IRPP pour le simplifier et moderniser son administration. Base. L’IRPP est payé aussi bien par les résidents que par les non-résidents au Cameroun. Les résidents sont imposés sur leurs revenus partout dans le monde, tandis que les non-résidents ne sont imposés que sur les revenus d’origine camerounaise. L’impôt s’applique au total des revenus provenant des différentes sources, y compris les revenus salariaux, les bénéfices et les revenus passifs de placements. Structure tarifaire. Il existe quatre tranches d’imposition au Cameroun, allant de 10 à 35 %. Le taux de l’IRPP plus une surtaxe locale de 10 % sont appliqués aux revenus salariaux, tandis que les revenus des actions et parts (y compris les plus-values) sont imposés à un taux de 16,5 %. Régime spécial pour les très petites entreprises. Les entreprises individuelles sont assujetties à un impôt de 10 % dans le cadre d’un système d’imposition forfaitaire, ou à un taux minimal de 2,2 % ou 5,5 % du chiffre d’affaires pour les personnes physiques évaluées, respectivement, dans le cadre du système simplifié et du système d’imposition sur les bénéfices réels. Source : Code Général des Impôts, édition du 1er janvier 2022. L’écart d’imposition 13 sur les revenus faibles et moyens au Cameroun est exceptionnellement élevé à cause du manque d’exonération, ce qui favorise l’informalité. Contrairement à la plupart des pays de la CEMAC, le Cameroun et la République du Congo ne disposent pas d’une tranche d’imposition à taux zéro pour les salariés percevant un salaire ou un revenu salarial, ce qui entraîne des obligations fiscales dès le premier XAF gagné après la déduction forfaitaire. Le taux d’imposition le plus bas du Cameroun est de 10 % pour les personnes célibataires dont les revenus sont de XAF 2 millions ou moins, ce qui est nettement supérieur au taux de 1 % en République 13 La différence entre les coûts totaux de main-d’œuvre de l’employeur et le salaire net de l’employé. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 46 du Congo pour les personnes dont les revenus sont de XAF 464 000 ou moins. Dans les autres pays de la CEMAC, les seuils d’exonération varient : XAF 378 000 en République centrafricaine, XAF 800 000 au Tchad, XAF 1 million en Guinée équatoriale et XAF 1,5 million au Gabon. Le taux élevé de l’IRPP au Cameroun crée un écart d’imposition important pour les salariés à revenus faibles et moyens, encourageant l’informalité et maintenant les activités économiques dans le secteur informel à cause des coûts d’entrée élevés ou en incitant les entreprises du secteur formel à basculer dans l’informalité. La productivité de l’IRPP au Cameroun est inférieure à la moyenne régionale, ce qui indique une efficience fiscale moindre. La productivité de l’IRPP est évaluée à travers le rapport de la part de l’IRPP dans le PIB sur son taux marginal réglementaire le plus élevé. Entre 2010 et 2021, la productivité de l’IRPP du Cameroun était en moyenne de 0,031 (Graphique 4-13). En 2020, le ratio de productivité de l’IRPP du pays était de 0,029, ce qui était inférieur à la moyenne de la CEMAC qui était de 0,036, et était le quatrième plus bas par rapport à ceux des six pays de la CEMAC (Graphique 4-13, Graphique 4-14). La productivité de l’IRPP du Cameroun est à la traine par rapport à celles de la plupart de ses pairs structurels et aspirationnels, à l’exception du Sri Lanka (0,005). Les autorités doivent s’attaquer au problème de la relative faiblesse du niveau et de la progressivité des recettes d’IRPP. La combinaison des taux d’imposition de l’IRPP devrait être revue pour en améliorer la progressivité, ce qui pourrait être réalisé à travers le relèvement des seuils et/ou l’ajout de tranches d’imposition. Actuellement, la pression fiscale exercée sur le secteur formel est élevée, en partie à cause des cotisations de sécurité sociale, et des mesures devraient être prises pour garantir une répartition juste et progressive de la pression fiscale. Graphique 4-13. Ratio de recettes et de productivité de l’IRPP, 2010-2021 1,4 1,33 0,04 1,20 1,16 1,2 1,10 1,10 0,04 1,06 1,06 1,02 1,02 0,94 0,93 0,03 1,0 0,90 0,03 0,8 0,02 0,6 0,02 0,4 0,01 0,2 0,01 0,03 0,03 0,03 0,03 0,04 0,03 0,03 0,03 0,03 0,03 0,03 0,03 - 0,00 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Coefficient de productivité de l'IRPP - axe de droite Recettes d'IRPP (% du PIB) - axe de gauche Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 47 Graphique 4-14. Recettes de l’IRPP et ratio de productivité de l’IRPP des pays pairs structurels et aspirationnels, 2020 Coefficient de productivité de l'IRPP - axe de gauche Recettes d'IRPP (% du PIB) - axe de droite 0.14 4.0 0.12 3.5 Coefficient de productivité Recettes d'IRPP (% du PIB) 3.0 0.10 2.5 0.08 2.0 0.06 1.5 0.04 1.0 0.02 0.5 0.00 0.0 Tchad RCA Rep. du Congo Cameroun Gabon Guinée Equatoriale Ghana Sénégal Côte d'Ivoire Kenya Maroc Vietnam Sri Lanka PFRs PRITIs PRITSs PRITIs PRITIs CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels Source: Ministere des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Au Cameroun, la législation fiscale distingue quatre régimes fiscaux : (i) un régime d’imposition forfaitaire ; (ii) un régime simplifié ; (iii) un régime d’imposition sur le résultat réel ; et (iv) un régime pour les organisations à but non lucratif qui varient en fonction du chiffre d’affaires, de la taille et de la forme juridique de l’entreprise. • Le régime d’imposition forfaitaire s’applique aux entreprises individuelles dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à XAF 10 millions. Les contribuables assujettis à ce régime paient « l’impôt libératoire ». Le paiement de l’impôt libératoire exonère de l’obligation de payer la patente, l’IRPP et la TVA, sauf en cas de retenue à la source. • Le régime simplifié s’applique aux entreprises dont le chiffre d’affaires est compris entre XAF 10 et 50 millions. La principale différence entre l’entrepreneur individuel assujetti au régime d’impôt forfaitaire et le régime fiscal simplifié est qu’une patente est délivrée aux entrepreneurs assujettis au régime simplifié. Les contribuables sous ce régime sont assujettis à un impôt sur les sociétés de 25 % plus une surtaxe de 10 %. L’IRPP est payé par toute personne dont le domicile fiscal est au Cameroun. De plus, les entreprises assujettis à ce régime sont tenues de payer la patente en fonction du chiffre d’affaires. • Le régime de l’impôt sur le résultat réel s’appliquait aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel était supérieur à 50 millions de FCFA. L’entrepreneur individuel assujetti à ce régime présente des similitudes avec celui assujetti au régime fiscal Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 48 simplifié, la différence étant principalement le montant du chiffre d’affaires. De plus, les entreprises assujettis au régime de revenus réels sont redevables de la TVA, en plus de l’IRPP et de l’IS. • Le régime pour organisations à but non lucratif s’applique aux entités publiques, privées ou confessionnelles dont le but n’est pas de réaliser des profits. Les entités assujetties à ce régime sont exonérées de la patente, de l’IS et de l’impôt foncier. Les régimes fiscaux spéciaux, tels que le régime d’imposition forfaitaire et le régime simplifié, sont conçus pour relever le défi de l’imposition des micros et petites entreprises. Même si ces régimes améliorent la conformité, ils génèrent des revenus modérés. Le double objectif de la mise en place de régimes fiscaux spéciaux est de simplifier la mise en conformité, réduisant ainsi les coûts de recouvrement, et d’encourager progressivement les entrepreneurs à intégrer le filet fiscal normal. Les petites entreprises exercent souvent dans le secteur des services (exemple : commerce de détail et transports) et manquent de capacité adéquate pour tenir une comptabilité financière, ce qui rend leur imposition difficile et coûteuse tant pour les entreprises que pour les autorités fiscales. Malgré ces efforts, les recettes recouvrées restent modestes, contribuant à moins de 2 % des recettes fiscales totales – une tendance observée dans d’autres pays dotés de modalités similaires, tels que la Tanzanie. Malheureusement, aucune information n’est disponible sur le nombre de contribuables bénéficiant du régime spécial des petites entreprises. Les efforts visant à accroître l’efficience des régimes fiscaux spéciaux doivent trouver un compromis entre simplicité et équité, en particulier lors de la détermination de la base d’imposition. L’utilisation du chiffre d’affaires comme simple mesure indirecte du revenu imposable peut conduire à l’application d’un traitement injuste à des secteurs où les taux de bénéfice varient, notamment les secteurs soumis à une réglementation des prix. L’emploi du chiffre d’affaires comme simple mesure indirecte du revenu imposable pourrait conduire à l’application d’un traitement injuste à certains secteurs où les taux de profit des petites entreprises diffèrent de la moyenne, notamment les secteurs où les prix sont réglementés. Pour rationaliser la mise en conformité et réduire les coûts, de nombreux pays, y compris les membres de l’OCDE et les LIC, recourent à des régimes fiscaux forfaitaires basés sur le chiffre d’affaires et les obligations fiscales. Dans ces systèmes, les autorités fiscales définissent un chiffre d’affaires « présumé » en se basant sur différents critères, tels que les ventes quotidiennes, et les entreprises paient un taux d’impôt fixe sur ce chiffre d’affaires présumé sans avoir besoin d’une comptabilité détaillée. Les régimes fiscaux simplifiés du Cameroun visent à encourager les petites entreprises à passer au régime fiscal standard à mesure que leur chiffre d’affaires augmente. Cependant, il est essentiel de noter que si une approche différenciée basée sur la taille de l’établissement améliore l’équité dans l’imposition des micros et petites entreprises, elle crée également des difficultés et occasionne des coûts administratifs supplémentaires pour les autorités fiscales.14 14 Par exemple, en Éthiopie, une matrice complexe de montants d’impôts à payer basée sur des estimations de marges bénéficiaires a été élaborée pour plus de 90 types spécifiques d’activités de microentreprises, telles que les services de couture et la vente de fruits et légumes. Le chiffre d’affaires présumé est déterminé à partir d’estimations périodiques des ventes quotidiennes. Plusieurs comités d’estimation sont en place pour examiner et confirmer les résultats des estimations. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 49 Tableau 4-2. Régimes fiscaux spéciaux pour les petites entreprises Chiffre Régime Groupe cible d’affaires Taux annuel (XAF) Régime forfaitaire Entreprises individuelles, à Inférieur à 10 Le taux de l’impôt libératoire est déterminé l’exception des entreprises millions par les autorités régionales ou locales qui d’exploitation forestière, tirent avantage des produits, ainsi que selon des administrateurs et des les catégories. professions libérales • Catégorie A : 0 à 20 000 XAF • Catégorie B : 20 001 à 40 000 XAF • Catégorie C : 40 001 à 50 000 XAF • Catégorie D : 50 001 à 100 000 XAF Régime d’imposition Entreprises individuelles et Entre 10 25 % (27,5 % surtaxe comprise), avec une simplifiée personnes morales millions et 50 imposition minimale de 5 % sur le chiffre millions d’affaires (5,5 % surtaxe comprise) Régime d’imposition Entreprises individuelles et Supérieur à 50 25 % / 30 % (27,5 % / 33 % surtaxe comprise), des revenus réels personnes morales millions avec une imposition minimale de 2 % sur le chiffre d’affaires (2,2 % surtaxe comprise) Régime pour les Entités publiques ou privées, NA Exonérées de la patente, de l’IS et de l’impôt organisations à but à but non lucratif foncier. non lucratif 15 % (16,5 % incluant surtaxe pour les collectivités locales) Source : Code des impôts du Cameroun. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 50 4.2.2 Impôt sur les sociétés Le niveau de recouvrement de l’IS du Cameroun est inférieur à la moyenne des niveaux régionaux et mondiaux. En 2017-2021, les recettes de l’IS représentaient en moyenne 1,5 % du PIB, ce niveau étant nettement inférieur à la moyenne de 2,3 % des niveaux des PRITI et des LIC en AfSS. Entre 2010 et 2021, l’IS a contribué en moyenne à 14,4 % des recettes fiscales et a représenté 1,6 % du PIB. Les recettes de l’IS ont atteint un pic de 1,9 % du PIB en 2015, contre 1,3 % du PIB en 2010, mais ont chuté à 1,5 % du PIB en 2017 (Graphique 4-15). La performance du Cameroun en matière de recouvrement de l’IS est restée pour l’essentiel au bas de l’écart interquartile et est tombée en dessous de l’écart interquartile en 2010, 2017 et 2019-20, le pays présentant une sous-performance par rapport à la moyenne des performances des PRITI, des LIC et des pays de la CEMAC. En 2010, les recettes de l’IS du Cameroun (1,3 % du PIB) étaient similaires à celles du Sénégal (1,3 % du PIB) et légèrement inférieures à celles du Ghana (1,7 % du PIB). Alors que le recouvrement de l’IS a connu une augmentation de 60 à 70 % au Ghana et au Sénégal entre 2010 et 2021, il n’a augmenté que de 20 % au Cameroun (Graphique 4-16). Graphique 4-15. Recettes de l’IS par groupes de pays de Graphique 4-16. Recouvrement de l’IS, pairs structurels et l’AfSS, 2010-2021 (% du PIB) aspirationnels, 2010-2021, (% PIB) 6 8 7 5 6 4 5 3 4 3 2 2 1 1 0 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Ecart Interquartile Cameroun Cameroun Côte d'Ivoire Ghana PRITI & PFR en AfSS PRITS et PRE en AfSS Sénégal Kenya Maroc CEMAC Sri Lanka Vietnam Note : L’écart interquartile couvre les 75ème aux 25èmes percentiles des PRITI et des LIC en AfSS. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 51 Le taux d’IS le plus élevé du Cameroun est comparable à la moyenne des taux en Afrique subsaharienne. L’IS s’applique aux bénéfices imposables réalisés par les entités résidentes au Cameroun mais aussi celles à l’étranger, ainsi que par les non-résidents ayant un établissement permanent au pays (Encadré 4-3). Les entités résidentes sont imposées sur leurs revenus gagnés dans le monde entier, tandis que les entités non-résidentes sont imposées sur leurs revenus d’origine camerounaise. En fonction de leur chiffre d’affaires annuel, les entreprises assujetties à l’IS peuvent être classées sous le régime simplifié ou sous le régime d’imposition sur les résultats réels. Encadré 4-3. Principales caractéristiques de l’impôt sur les sociétés au Cameroun Réforme. La Loi de finance 2015 a réduit le taux de l’impôt sur les sociétés, le faisant passer de 35 à 30  %. Parallèlement, l’acompte mensuel d’IS est passée de 1 à 2 % du chiffre d’affaires. À compter du 1er janvier 2023, la Loi de finance 2023 a réduit le taux de l’impôt sur les sociétés, le faisant passer de 28 à 25 % pour les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est égal ou inférieur à 3 milliards XAF. Cet acompte mensuel est une méthode de règlement de l’impôt sur les sociétés et constitue le recouvrement minimal dû par une entreprise lorsqu’elle enregistre un déficit la rendant incapable de payer un montant d’impôt sur les sociétés supérieur à la part des acomptes dus. Les acomptes sont considérés comme une dépense payée d’avance et déduits des revenus imposables générés sur la période allant du début à la fin de l’exercice fiscal. Base d’imposition. Le revenu imposable est calculé sur la base des revenus annuels totaux du contribuable après déduction des dépenses admissibles. Structure tarifaire. Le taux standard de l’IS est de 25 % pour les petites et moyennes entreprises (c’est-à-dire les entreprises à chiffre d’affaires inférieur à 3 milliards XAF) et de 30 % pour les grandes entreprises (c’est-à-dire les entreprises à chiffre d’affaires supérieur à 3 milliards XAF). Une surtaxe locale de 10 % est appliquée à l’IS sur les sociétés, ce qui porte le taux d’imposition effectif à 27,5 % pour les petites et moyennes entreprises et à 33 % pour les grandes entreprises. Tableau 4-3. Taux d’IS par type d’entreprise Régime IS Admissibilité du chiffre d’affaires annuel Nombre Nombre de Taux d’employés contribuables XAF USD a/ (%) en 2021 Grandes 30 % > 3 milliards > 5,1 millions 20 cadres 549 (0,4 %) entreprises supérieurs 50 intermédiaires 100 subalternes Entreprises 25 % 50 millions – 3 85 540 – 5,1 4 cadres 16 423 (11,8 %) moyennes milliards millions supérieurs 10 intermédiaires 20 subalternes Petites 25 % < 50 millions < 85 540 4 cadres 121 653 (87,8 %) entreprises supérieurs 10 intermédiaires 20 subalternes Note : a/ Le taux moyen USD/XAF au 18 juillet 2023 est de 584,5 XAF = 1,00 USD Source : Rapport annuel 2021 de la Direction Générale des Impôts, et Code des Impôts du Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 52 Revenus exonérés. Les revenus suivants sont exonérés de l’IS : les revenus générés par les syndicats agricoles et pastorales ; les revenus provenant des coopératives de fourniture et d’achat fonctionnant conformément aux dispositions qui les régissent ; les revenus perçus par les autorités régionales et locales et leurs services d’utilité publique, les sociétés ou organismes chargés du développement rural et qui sont reconnus comme services d’utilité publique ; et les gains provenant de cessions de titres, lorsque les gains imposables ne dépassent pas 500 000 XAF. Report des pertes. Les pertes peuvent être reportées sur quatre exercices au maximum, mais ne peuvent pas être reportées sur un exercice précédent. Conformément à la Loi de finance 2021, les établissements de crédit et les sociétés de portefeuille de l’État en restructuration peuvent reporter leurs pertes sur six exercices au maximum. De plus, les entreprises directement affectées par la crise sanitaire en rapport à la COVID-19 peuvent reporter leurs pertes sur cinq exercices au maximum. Amortissement et dépréciation. Les amortissements sont généralement calculés de manière linéaire sur la durée de vie utile des actifs en utilisant les taux prévus par le Code Général des Impôts, y compris ceux qui auraient pu déjà être reportés en période de pertes. La déduction des amortissements peut être reportée indéfiniment, la complexité des différents taux applicables aux différents types d’actifs est excessive (CDI, Section 7). Fiscalité internationale. Le Code Général des Impôts comprend d’importantes dispositions de lutte contre l’évasion fiscale, notamment en matière de prix de transfert et de capitalisation restreinte. Cependant, le Cameroun ne dispose actuellement d’aucune disposition particulière pour les sociétés étrangères contrôlées. Des changements importants ont été apportés à la législation sur la fiscalité internationale et la mise en œuvre du programme d’action de lutte contre l’érosion de l’assiette fiscale et des transferts de bénéfices, un instrument multilatéral que le Cameroun a ratifié.15 Source : Code Général des Impôts. Édition du 1er janvier 2022, PwC Worldwide Tax Summaries, et OCDE. La productivité de l’IS du Cameron, calculée comme le rapport du ratio IS/PIB sur le taux standard de l’IS, est également faible. De 2010 à 2014, alors que le taux d’IS le plus élevé était de 35 % (c’est-à-dire l’IS pour les grandes entreprises), la productivité de l’IS était en moyenne de 0,04. Elle est passée à 0,05 de 2015 à 2021, alors que le taux de l’IS est tombé à 30 % en 2015 (Graphique 4-17). En 2020, les recettes de l’IS du Cameroun, qui représentaient 1,6 % du PIB, égalaient celles de la Côte d’Ivoire, mais étaient inférieures à celles de la plupart de ses pairs aspirationnels, à l’exception du Sri Lanka (1,4 % du PIB) (Graphique 4 -8). Le ratio de productivité de l’IS du Cameroun le classe au quatrième rang par rapport à ses pairs de la CEMAC, le Sri Lanka (0,048) étant le seul à avoir un ratio inférieur parmi les pairs aspirationnels. 15 OCDE. Le Bélize et le Cameroun ont mis en place les instruments de ratification et le Japon a élargi l’application de la Convention multilatérale BEPS. https:// www.oecd.org/tax/beps/ Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 53 Graphique 4-17. Ratio de revenus et de productivité de l’IS, 2010-2021 1,93 2,0 0,07 1,75 1,70 1,66 1,60 Coefficient de productivité de l'IS 1,55 1,52 1,57 0,06 1,49 1,49 1,50 Recettes d'IS (% du PIB) 1,5 1,27 0,05 0,04 1,0 0,03 0,02 0,5 0,01 0,04 0,04 0,05 0,04 0,05 0,06 0,06 0,05 0,05 0,05 0,05 0,05 - - 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Coefficient de productivité de l'IS - axe de droite Recettes d'IS (% du PIB) - axe de gauche Note : Le taux maximal de l’IS a été réduit, passant de 35 à 30 % en 2015, tandis que le taux réduit de l’IS est passé de 28 à 25 % pour les entreprises à chiffre d’affaires annuel hors taxe égal ou inférieur à 3 milliards XAF en 2023. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Base de données GFS du FMI, Calculs des services de la Banque mondiale. Graphique 4-18. Revenus de l’IS et ratio de productivité de l’IS, pour les pairs structurels et aspirationnels, 2020 Coefficient de productivité de l'IS - axe de gauche Recettes d'IS (% du PIB) - axe de droite 0,18 6 0,16 Coefficient de productivité de l'IS 5 0,14 Recettes d'IS (% du PIB) 0,12 4 0,10 3 0,08 0,06 2 0,04 1 0,02 0,00 - Tchad Rép. Centrafricaine Rep. du Congo Cameroun Gabon Guinée équatoriale Ghana Sénégal Côte d'Ivoire Vietnam Maroc Kenya Sri Lanka PRF PRITI PRITS PRITI PRITI CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationels Source : Ministère des Finances du Cameroun, Base de données GFS du FMI, Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 54 Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group 4.2.3 Taxe sur la valeur ajoutée La TVA est la principale et la plus importante source de recettes du Cameroun, générant en moyenne 4,4 % du PIB ou 39,7 % des recettes fiscales totales au cours de la période 2010-2021, soit une performance égale ou supérieure à celle des pays comparables ou aspirationnels du Cameroun. Le recouvrement de la TVA atteignait en moyenne 3,8 % entre 2010 et 2016, a augmenté à 5,2 % en 2018 et a chuté à 4,1 % en 2020-2021 à cause de l’impact de la pandémie. Par rapport aux performances des autres pays de l’AfSS, celle du Cameroun en matière de TVA lui a été favorable, dépassant les moyennes des LIC et PRITI en 2013-14 et 2016-19. En 2018, il a presque égalé les performances des PRITS et des pays à haut revenus. La bonne performance du Cameroun en matière de recouvrement de la TVA est le résultat de nouvelles mesures de politique fiscale introduites dans le budget 2018. Ces mesures ont réduit le nombre d’exonérations afin d’améliorer le rendement de la TVA, ce qui a amélioré l’administration de la TVA en accélérant les remboursements de TVA et en éliminant les retenues automatiques. La Loi de finance 2019 a mis en œuvre plusieurs mesures visant à stimuler les recettes de TVA, notamment à réduire les exonérations sur les contrats et commissions d’assurance-vie et d’assurance-maladie, à limiter les exonérations sur la tranche sociale de consommation d’eau et d’électricité pour n’en accorder qu’aux ménages ayant des niveaux de consommation modérés, et à réduire les exonérations sur la transformation locale du bois.16,17 En 2010-2016, les recettes de TVA du Cameroun sont restées similaires à la moyenne de ses pairs structurels et aspirationnels, présentant une amélioration relative modeste (Graphique 4-20). Entre 2010 et 2021, la majorité des recettes de la TVA du Cameroun, soit environ 60 pour cent du recouvrement total de TVA, provenaient de la consommation intérieure et étaient recouvrées par la DGI. La partie restante provenait de la TVA sur les importations, recouvrée par la Direction Générale des Douanes (DGD) (Graphique 4-21) 16 Banque mondiale. Deuxième Opération d’appui budgétaire pour la consolidation fiscale et de croissance inclusive au Cameroun. Rapport n° PGD30. 1er août 2019. 17 FMI. Cameroun : Lettre d’intention, Mémorandum de politiques économiques et financières, et Protocole d’accord technique. 6 décembre 2018. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 55 Graphique 4-19. Recettes de TVA par groupe de pays de Graphique 4-20. Recettes de TVA, pairs structurels et l’AfSS, 2010-2021 (% du PIB) aspirationnels, 2010-2021 (% du PIB) 6 9 8 5 7 6 4 5 4 3 3 2 2 1 1 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Ecart Interquartile Cameroun Cameroun Côte d'Ivoire Ghana PRITI & PFR en AfSS PRITS et PRE en AfSS Sénégal Kenya Maroc CEMAC Sri Lanka Vietnam Note : L’écart interquartile couvre les 75ème au 25ème percentiles des PRITI et des LIC en AfSS. Pour le Cameroun, les données sur la TVA incluent les remboursements de crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Encadré 4-4. Principales caractéristiques de la TVA au Cameroun Base d’imposition. La TVA est basée sur la consommation et suit le principe de destination, qui exige que la taxe soit payée dans le pays où a lieu la consommation. Seuil d’exonération. La TVA est facturée par les personnes physiques ou morales qui effectuent automatiquement, habituellement ou occasionnellement des opérations imposables consistant en des prestations de services ou des ventes de biens dont le chiffre d’affaires (hors taxes) est égal ou supérieur à 50 millions XAF et qui sont assujetties au régime d’imposition sur le résultat réel. Structure tarifaire. Le taux standard est de 17,5 %, plus une surtaxe de 10 %, donnant un taux effectif de 19,25 %, ce qui est exceptionnellement élevé. Les exportations sont détaxées et plus d’une centaine de produits de base sont exonérés de TVA. Calcul de la TVA. La TVA est calculée selon la méthode de la facture de crédit. Le Code des impôts ne contient pas de dispositions sur l’autoliquidation de la TVA. Source : Code Général des Impôts, Édition du 1er janvier 2022 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 56 En 2020, le Cameroun a recouvré le niveau de recettes de TVA le plus élevé (4 % du PIB) de la CEMAC. Le taux standard de TVA au Cameroun est de 17 %, qui est supérieur à ceux de tous les pays de la CEMAC à l’exception de la Guinée équatoriale (15  %) (Graphique 4-22). La différence de taux avec les membres de la CEMAC montre clairement l’existence de potentiel d’augmentation des recettes de TVA au Cameroun. Par exemple, le Vietnam a un taux de TVA bien inférieur, qui est de 10 %. Pour stimuler les recettes de TVA, des mesures telles que l’amélioration de l’administration des recettes, la réduction des exonérations de TVA ou l’ajustement du taux de TVA peuvent être nécessaires. Graphique 4-21. Composition des recettes de TVA, 2010- Graphique 4-22. Taux et recouvrement de la TVA, pairs 2021, (% des recettes de TVA) structurels et aspirationnels, 2020 100 % 8 25 7 20 30 6 33 34 35 36 38 38 38 80 % 40 40 41 42 43 44 45 46 5 15 4 60 % 3 10 2 40 % 5 1 70 67 66 65 64 62 62 62 60 60 59 58 57 56 0 0 55 54 Guinée Équatoriale Gabon Cameroun Rep. du Congo RCA Tchad Côte d'Ivoire Ghana Sénégal Kenya Maroc Sri Lanka Vietnam 20 % 0% 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Recettes de TVA (% du PIB) - axe de gauche DGI DGD Taux réglementaire de TVA - axe de droite Note : Pour le Cameroun, les données sur la TVA incluent les Note : Les données sur la TVA excluent les remboursements de crédits de TVA. remboursements de crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Source : Ministère des Finances du Cameroun, WDI, Calculs des Banque mondiale. services de la Banque mondiale. Même si la performance du Cameroun en matière de recettes de TVA dépasse celle de nombreux pays pairs, l’efficience-C et la productivité de sa TVA fluctuent et restent inférieures à la moyenne de celles des pays de l’AfSS. De 2010 à 2020, la productivité de la TVA et son efficience-C ont fluctué en moyenne de 0,24 et 0,33, respectivement, atteignant un pic en 2018 (Graphique 4-23). En 2020, la productivité de la TVA du Cameroun (0,235) était la plus élevée de la CEMAC, mais loin derrière celle du Vietnam (0,54), du Maroc (0,347) ou du Sénégal (0,317) (Graphique 4-24). En termes d’efficience-C, le Cameroun se classe au deuxième rang (0,321) dans la CEMAC, légèrement derrière la République du Congo (0,342), malgré une consommation finale des ménages presque double exprimée en part du PIB. Cependant, l’efficience-C de la TVA et sa productivité au Cameroun sont légèrement inférieures à la moyenne de celles des pays de l’AfSS (0,263 et 0,401, respectivement). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 57 Graphique 4-23. Recettes, productivité et efficience-C de la TVA, 2010-2020 6,0 0,5 0,43 0,39 0,45 0,38 Productivité de la TVA et C-efficience 5,0 0,4 0,33 0,33 0,32 0,32 Recettes de TVA (% du PIB) 0,31 0,30 0,29 0,35 0,27 4,0 0,3 3,0 0,25 0,2 2,0 0,15 0,1 1,0 0,05 3,4 3,6 3,6 3,9 4,0 3,9 4,0 4,6 5,2 4,9 4,0 - 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Recettes de TVA (% du PIB) - axe de gauche Coefficient de productivité de la TVA - axe de droite C-efficience - axe de droite Note : Les données sur la TVA prennent en compte les remboursements de crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Graphique 4-24. Productivité et efficience-C de la TVA, pairs structurels et aspirationnels, 2020 Productivité de la TVA C-Efficience 0,8 Productivité TVA Moyenne AfSS, 2020 C-effcience Moyenne AfSS, 2020 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0,0 RCA Tchad Cameroun Gabon Guinée Equat. Sénégal Ghana Côte d'Ivoire Vietnam Maroc Kenya Sri Lanka Rep. du Congo PFR PRITI PRITS PRITI PRITI CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels Note : Pour le Cameroun, les données sur la TVA incluent les remboursements de crédits de TVA. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 58 La TVA étant de nature régressive, il est important de la définir en vue de favoriser la croissance et l’inclusion. Même si les impôts sur la consommation (c’est-à-dire les taxes sur les ventes et la TVA) s’avèrent moins dommageables pour la croissance que l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur les revenus des personnes physiques, les impôts sur les revenus ont tendance à réduire davantage les inégalités que les impôts sur la consommation. Selon une pratique d’excellence en matière de TVA, pour générer efficacement des recettes de la TVA tout en nuisant le moins possible à la croissance inclusive, il serait mieux de concevoir des systèmes de TVA à seuil élevé, une large base d’imposition et un taux unique. La base d’imposition de la TVA au Cameroun a un seuil relativement élevé sans aucune disposition pour l’enregistrement volontaire. Le seuil d’enregistrement obligatoire à la TVA est fixé à 50 millions XAF (environ 82 000 USD), excluant de fait la plupart des petites entreprises des obligations de payer la TVA et permettant aux administrations de la TVA de se concentrer sur les plus gros contribuables. Les seuils varient considérablement en Afrique, allant de moins de 20 000 USD dans des pays tels que l’Algérie, l’Éthiopie, le Malawi et la Mauritanie à plus de 150 000 USD au Tchad, à Djibouti, en Guinée équatoriale, à Maurice et au Niger. De plus, le Cameroun n’autorise pas l’enregistrement volontaire des entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur au seuil, empêchant ainsi les entreprises non enregistrées de demander des crédits sur leurs intrants. Le régime de TVA prévoit également de nombreuses exonérations, qui présentent plusieurs inconvénients. Les listes d’exonération de TVA au Cameroun incluent bien plus que les groupes exonérés recommandés pour la TVA plus productive (santé, éducation et services financiers sélectionnés). Les exonérations de TVA créent des distorsions économiques en profitant davantage à certains secteurs qu’à d’autres. Les entreprises qui ne peuvent pas obtenir un crédit de TVA sur leurs intrants parce qu’elles s’approvisionnent auprès d’entreprises exonérées connaissent une augmentation de leurs coûts. En revanche, si l’exonération est appliquée à la fin de la chaîne logistique, elle réduit les recettes de TVA. Compte tenu de ces effets négatifs des exonérations de TVA, il est important d’examiner la justification de toutes les exonérations. 4.2.4 Droits d’accise Au Cameroun, les droits d’accise sont appliqués aux produits assujettis aux droits d’accise fabriqués au pays ou importés, principalement pour réduire les externalités négatives associées à certains produits. Le Cameroun prévoit six taux de droits d’accise ad valorem : taux très élevé (50 %) ; taux élevé (30 %) ; taux général (25 %) ; taux moyen (12,5 %) ; taux réduit (5 %) ; et taux extrêmement allégé (2 %) (Encadré 4-5). Les taxes sur le tabac et l’alcool représentent deux droits d’accise importants. Le Cameroun a mis en œuvre différentes politiques de lutte contre le tabagisme (tels que des avertissements sanitaires sur les emballages, un programme de sevrage et des interdictions modérées de publicité). Il faudrait noter que les produits du tabac au Cameroun restent relativement abordables malgré un taux d’imposition effectif de 43,2 %, supérieur à celui de la plupart des pays pairs, mais encore inférieur au taux recommandé par l’OMS de 75 % du prix de Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 59 détail de la marque de cigarettes la plus vendue18. De même, la consommation d’alcool au Cameroun est parmi les plus élevées d’Afrique centrale, près de 12 % des hommes camerounais étant atteint d’un trouble en rapport à la consommation d’alcool, dépassant la moyenne régionale de 3,7 %19. Cependant, le Cameroun ne dispose pas de politique nationale en matière de lutte contre l’alcoolisme pour résoudre les problèmes associés, même si l’alcool est soumis à un taux de TVA de 17 % et à un taux de droits d’accise de 25 %, entraînant un taux d’imposition effectif inférieur à celui de nombreux autres pays. Encadré 4-5. Principales caractéristiques des droits d’accise du Cameroun Les droits d’accise au Cameroun comprennent : • Un droit d’accise compris entre 25 et 50 % applicable aux cigarettes, boissons, cosmétiques, articles de luxe (tels que bijoux et pierres précieuses), machines à sous et autres appareils utilisés pour les jeux de hasard. • Un droit d’accise ad valorem très élevé de 50 % applicable à l’hydroquinone et aux produits cosmétiques associés contenant de l’hydroquinone. • Un taux élevé de 30 % applicable aux cigarettes, aux cigares et autres produits du tabac, aux pipes et à leurs pièces, ainsi qu’aux préparations à base de tabac et pour pipe. • Un taux général de 25 % applicable aux biens et services énumérés à l’Annexe II du Code Général des Impôts, autres que ceux soumis aux taux extrêmement élevé, élevé, moyen, réduit ou extrêmement allégé. • Un droit d’accise moyen de 12,5 % applicable aux véhicules particuliers d’une cylindrée inférieure ou égale à 2 500 cm³ âgés de 10 à 15 ans et d’une cylindrée supérieure à 2 500 cm³ âgés de 0 à 15 ans ; les véhicules utilitaires, les véhicules de transport en commun, les remorques et les tracteurs autres que les véhicules agricoles de toute cylindrée, âgés de plus de 15 ans mais de moins de 25 ans ; les motocyclettes d’une cylindrée supérieure à 250 cm³ ; les cheveux, perruques ; vêtements usagés et pneus usagés ; et les services audiovisuels à contenu numérique. • Un taux réduit de 5 % applicable aux jeux de hasard et de divertissement non soumis à la taxe spéciale sur les jeux de hasard et de divertissement ; la confiserie sucrée ; le chocolat et produits associés à haute teneur en cacao ; les motocyclettes d’une cylindrée inférieure ou égale à 250 cm³ ; les préparations destinées à la consommation relevant des positions tarifaires 2103 à 2104 des douanes ; les glaces relevant de la position tarifaires 2105 des douanes ; le gruau de maïs importé ; et la mayonnaise importée. • Un droit d’accise extrêmement allégé de 2 % applicable aux communications téléphoniques mobiles et aux services Internet. Outre l’application d’un taux général de 25  %, il existe des droits d’accises minimaux applicables aux boissons alcoolisées et au tabac. Pour le tabac, le droit minimal est d’au moins 5 000 XAF pour 1 000 tiges de cigarette. Pour les boissons alcoolisées, le droit d’accise spécifique minimal dépend de la nature de l’alcool, du titre alcoométrique et du volume (exemple : 2 XAF et 25 XAF par centilitre pour les vins et champagnes produits localement respectivement, ou 3 XAF et 30 XAF par centilitre pour les vins et champagnes importés respectivement). Source : Code Général des Impôts. Édition du 1er janvier 2022. 18 Organisation mondiale de la santé. (2019). WHO Global Tobacco Control Report, 2019 : Offer to help quit tobacco. Genève : Organisation mondiale de la santé. https ://www.who.int/tobacco/global_report/en/. 19 Baudouin Fuh Suh. (2021). Alcohol Control Policy in Cameroon : A Scoping Review. Université de Finlande orientale, Faculté des sciences de la santé. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 60 Les recettes des droits d’accise du Cameroun représentaient 1 % du PIB entre 2016 et 2021, une performance inférieure à celles de ses pairs. Les recettes des droits d’accise ont augmenté, passant de 0,7 % du PIB en 2010-2014 à 1,1 % du PIB en 2015- 2021 (Graphique 4-25). Même si la collecte des recettes de droits d’accise au Cameroun est restée dans l’écart interquartile et a été meilleure que la moyenne des pays de la CEMAC entre 2010 et 2021, il est à la traine par rapport à ceux de ses pairs structurels et aspirationnels en 2016-21 (Graphique 4-26). Graphique 4-25. Recettes des droits d’accise, groupes Graphique 4-26. Recettes des droits d’accise, pairs structurels de pays de l’AfSS, 2010-2021, (% PIB) et aspirationnels, 2010-2021 (% du PIB) 2,5 5 4 2,0 3 1,5 2 1,0 1 0,5 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 0,0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Cameroun Côte d'Ivoire Ghana Sénégal Kenya Maroc Ecart Interquartile Cameroun Sri Lanka Vietnam PRITI & PFR en AfSS PRITS et PRE en AfSS CEMAC AfSS CEMAC PRITI Note : L’écart interquartile couvre les 75ème au 25ème percentile des PRITI et des LIC en AfSS. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Le Cameroun a mis en œuvre différentes réformes des droits d’accise qui vont dans le sens d’une augmentation de la collecte de ces impôts.20 Avant la réforme de 2015 des droits d’accise sur les boissons alcoolisées, le Cameroun appliquait un régime d’imposition ad valorem basé sur un taux proportionnel de 25 %. La Loi de finance 2015 et ses modifications ultérieures ont fait passer le Cameroun à un régime d’imposition mixte combinant une taxe ad valorem (25 %) et une taxe spécifique basée sur le type de produit et son volume (Tableau 4-4). Selon les estimations, la réforme aurait généré 70 milliards XAF, soit plus d’un tiers des recettes d’accises recouvrées en 2016. Depuis 2016, 20 Direction Générale des Impôts : Rapport décennal 2010-2020. Ministère des Finances, Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 61 les communications par téléphonie mobile et les services Internet sont soumis à des droits d’accise au taux extrêmement allégé de 2 %. En 2017, un droit d’accise spécifique sur les emballages non consignés de boissons et autres produits liquides (5 XAF ou 15 XAF par emballage) a été instauré. De plus, un droit d’accise spécifique prélevé sur les jeux de hasard et les divertissements au taux de 25 XAF par unité de jeu ou pari a été mis en place en 2018 pour se conformer à la législation de la CEMAC. Cependant, étant donné que cette méthode d’imposition était compliquée pour les sociétés de jeux, la taxe spécifique a été remplacée par une taxe ad valorem au taux réduit de 5 % sur le chiffre d’affaires total. Enfin, la Loi de finance 2019 a établi le prix de vente conseillé comme base d’imposition des droits d’accise ad valorem sur les boissons manufacturées locales. En conséquence, le recouvrement des droits d’accise a plus que doublé en termes de XAF sur la période 2014-2020 et a fortement augmenté, passant de 0,7 % du PIB en 2014 à 1,2 % en 2020. Tableau 4-4. Principales réformes des droits d’accise, 2015-2019 Recettes d’accises Année Réforme de la politique fiscale Taux/base d’imposition appliqué supplémentaires 2015-2020 2015 Introduction d’un régime Taxe ad valorem (25 %) et taxe spécifique selon 70 milliards XAF d’imposition mixte pour les le produit et le volume boissons alcoolisées 2016 Introduction de droits Taux extrêmement allégé de 2 % 8,8 milliards XAF d’accise dans le secteur de la télécommunication 2017 Introduction d’un droit d’accise Taxe de 15 XAF par unité d’emballage non 5,2 milliards XAF spécifique sur les emballages consigné pour les boissons gazeuses et non consignés de boissons et alcoolisées autres produits liquides Taxe de 5 XAF par unité d’emballage non consigné, plafonnée à 10 % de la valeur du produit pour tous les autres produits liquides. 2018 Introduction d’un droit d’accise Taxe de 25 XAF par unité de jeu ou pari Aucune donnée spécifique sur les jeux de hasard (abrogée) et les divertissements Taux ad valorem de 5 % sur le chiffre d’affaires total 2019 Établissement du prix de vente Prix de vente conseillé défini comme étant le 18,1 milliards XAF recommandé comme base coût de livraison au consommateur final figurant d’imposition pour les droits sur la grille tarifaire déposée par les sociétés d’accise ad valorem sur les brassicoles auprès du ministère en charge du boissons manufacturées locales commerce, moins la TVA et les droits d’accises. Source : Rapport décennal 2010-2020, Direction Générale des Impôts, Ministère des Finances. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 62 Le Cameroun devrait envisager de revoir sa gamme de droits d’accise afin d’améliorer la collecte de ces recettes fiscales. Malgré l’adéquation de la conception du système de droits d’accise, la génération de recettes reste faible par rapport à celle en moyenne dans l’AfSS. Pour stimuler les recettes, les autorités pourraient refondre différents droits d’accise, notamment en augmentant les taxes sur les cadeaux, en particulier sur l’alcool, et en réévaluant le faible taux sur la télécommunication, qui est dû à des réductions significatives de l’évaluation de la base. 4.2.5 Taxes sur le commerce international Les taxes sur le commerce international constituent la deuxième source de recettes fiscales (après la TVA), mais les revenus de ces taxes restent encore inférieurs à ceux des pairs du Cameroun. De plus, ils représentaient environ 1,7 % du PIB et 14,6 % des recettes fiscales totales entre 2017 et 2021, la tendance étant à la baisse. Sur la même période, le Cameroun a recouvré moins de taxes sur le commerce que les pays de l’AfSS en moyenne (2,5 % du PIB) et des PRITI de l’AfSS (2,9 % du PIB) (Graphique 4-27, Graphique 4-28). Tout au long de la période 2010-2021, la performance du Cameroun était en accord avec la moyenne de celles des pays de la CEMAC et proche de la moyenne de celles de ses pairs structurels et aspirationnels. Graphique 4-28: Recettes des taxes sur le commerce dans des Graphique 4-27: Recettes des taxes sur le commerce, groupes pays sélectionnés de l’AfSS et pays pairs aspirationnels, de pays de l’AfSS, 2010-2021, (% PIB) 2010-2021 (% du PIB) 6 6 5 5 4 4 3 3 2 2 1 1 0 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Ecart Interquartile Cameroun Cameroun Côte d'Ivoire PRITI & PFR en AfSS PRITS et PRE en AfSS Ghana Sénégal CEMAC Kenya Maroc Sri Lanka Vietnam Note : L’écart interquartile couvre les 75ème au 25ème percentiles des PRITI et des LIC en AfSS. Source : Ministère des Finances du Cameroun, Calculs des services de la Banque mondiale. Alors que l’union douanière de la CEMAC fixe des tarifs extérieurs communs, le Cameroun s’écarte des taux de la CEMAC et impose des frais supplémentaires sur les importations. Au Cameroun, l’importation de marchandises est assujettie aux droits de douane à l’importation (DDI), sauf application d’une exonération ou d’un régime douanier suspensif. Le pays applique le Tarif extérieur commun (TEC) de la CEMAC, Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 63 qui est entièrement ad valorem et prévoit quatre taux tarifaires  : 5  % pour les biens essentiels ; 10 % pour les matières premières et les biens d’équipement ; 20 % pour les biens intermédiaires ; et 30 % pour les biens de consommation.21 Les droits de douane sont exonérés sur les marchandises importées destinées à appuyer les secteurs de l’agriculture, de l’élevage, de la santé humaine et animale ainsi que la transformation locale du bois.22 Cependant, les droits d’importation du Cameroun diffèrent de ceux du TEC pour environ 300 positions tarifaires, donnant un droit d’importation moyen de 19,1 %. De plus, des frais supplémentaires sont imposés sur les importations qui varient en fonction de la nature de l’article, de la taille de l’envoi et du mode de transport, ce qui fait que les frais de douane moyens sont bien plus élevés que ce que les taux de droits de douane officiels laissaient prévoir. Dans le cadre de sa riposte à la pandémie de COVID-19, le Cameroun a réduit à 5 % les droits de douane sur les équipements importés pour l’industrie pharmaceutique et a exempté de droits de douane les médicaments pharmaceutiques, les matières premières pour l’industrie pharmaceutique et les intrants pour les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche.23 La TVA sur les importations est importante pour la mobilisation des recettes intérieures, d’autant plus que les efforts visant à réduire les droits de douane se poursuivent. En plus des droits de douane, le Cameroun applique des droits d’accise sur les importations et une TVA de 17,5 %. Entre 2016 et 2021, selon la DGD, les droits de douane à l’importation (DDI) et la TVA à l’importation ont généré des recettes équivalentes à 36 et 48 %, respectivement, de la valeur des importations du Cameroun, démontrant l’importance de la TVA sur les importations pour générer des recettes.24 En comparaison, les recouvrements douaniers typiques d’un LIC appliquant la TVA dépend encore plus des recettes de TVA - la TVA sur les importations, les droits d’accise sur les importations, les droits de douane et les taxes diverses représentant 50, 25, 15 et 10 % des recettes fiscales en rapport aux importations, respectivement.25 Il faudrait noter que la DGD déclare en tant que recettes douanières une combinaison de recettes comprenant la TVA, les droits d’accise et les droits de douane, ce qui aboutit à des de recettes fiscales sur le commerce international supérieures d’environ 50 % à celles déclarées par la DGI au Ministère des Finances. 4.2.6 Autres taxes Un peu plus de 10  % des recettes fiscales en 2010-2021 provenaient d’autres impôts divers, les impôts forestiers et fonciers étant les plus importants. Les autres impôts comprennent les impôts indirects tels que les TSPP, les taxes forestières, les droits d’enregistrement et de timbre, et les impôts directs tels que l’impôt sur les revenus des capitaux mobiliers (IRCM). Les taxes forestières sont particulièrement importantes à cause de leur rôle dans les politiques en matière de changement climatique, tandis que les taxes foncières sont essentielles aux efforts de décentralisation en cours du pays. Les taxes forestières ne représentent pas une part importante des recettes publiques ; les politiques du secteur forestier du pays, y compris la fiscalité forestière, 21 Système National Tarifaire Harmonisé 2022, Direction Générale des Douanes (DGD), Cameroun. 22 Loi de finance 2022 (Loi n° 2021/026 du 16 décembre 2021). 23 Africa tax in brief. 16 février 2021 https ://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=6641bcd5-654f-48ad-8e8b-90212ea9db6e 24 SYDONIA/CAMCIS. Direction Générale des Douanes. 25 Tadatsugu Matsudaira et Michael Daly. Chapter 2 : How Trade and Tax Policies Are Shaping Customs. « Customs Matters Strengthening Customs Administration in a Changing World ». FMI. 15 juin 2022. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 64 doivent trouver un juste équilibre entre la création de valeur d’une part et la Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group déforestation et les préoccupations climatiques de l’autre. Les recettes des taxes forestières ont faiblement contribué aux ressources publiques, représentant en moyenne 0,5 % des recettes globales des taxes et des subventions en 2010-2021. Néanmoins, les forêts du Cameroun sont importantes pour l’économie, fournissant près de 200 000 emplois formels et informels et représentant environ 16  % des exportations du pays en 2020. Ses forêts, en particulier la forêt tropicale du bassin du Congo, sont également importantes pour la communauté mondiale, abritant une riche biodiversité et stockant environ 4 600 mégatonnes d’équivalent dioxyde de carbone, tout en absorbant environ 165 mégatonnes de dioxyde de carbone par an.26 Environ 43 % de la superficie du Cameroun reste boisée, mais le pays figurait au 7e rang dans la liste des principaux déforesteurs dans le monde en 2021, la déforestation et la dégradation des forêts étant principalement dues à l’expansion de l’agriculture commerciale. Le défrichement des forêts au profit de l’agriculture à petite échelle, des activités extractives, des routes et autres infrastructures ainsi que, de plus en plus, le changement climatique ont également contribué à la déforestation.27 Même s’ils sont les 5e plus bas de la CEMAC, les revenus forestiers du Cameroun (mesurant l’épuisement des forêts et la perte de richesse nationale) étaient estimés à 2,7 % du PIB en 2020. Par rapport aux objectifs en contradiction de développement économique et de conservation, la fiscalité forestière consistait principalement en une Redevance Forestière Annuelle, perçue par unité de superficie forestière sous concession, et en une taxe d’abattage sur la valeur des grumes récoltées, mais les recettes ont été réduites par la généralisation des exploitations forestières illégales, représentant, selon les estimations, la moitié de la récolte de bois d’œuvre du Cameroun.28 De plus, les engagements internationaux du Cameroun, tels que sa Stratégie Nationale de Réduction des Émissions Issues de la Déforestation et de la Dégradation des Forêts de 2018, appuient une action efficace visant à freiner la déforestation, même si le pays est à la traine en matière d’accréditation, ce qui augmenterait l’accès aux ressources.29 Les impôts fonciers ne contribuent qu’à hauteur de 0,01 % du PIB, soit nettement moins que les 0,3 à 0,6 % observés dans les LIC et les PRITI. L’impôt foncier annuel présente un énorme potentiel de mobilisation de recettes propres pour les collectivités décentralisées et le système de transferts intergouvernementaux (Encadré 4-6).30 26 Sonwa, D.J., J.H. Nlom et S.G. Neba (2016). Valuation of forest carbon stocks to estimate the potential for result-based payment under REDD+ in Cameroon. International Forestry Review. Vol. 18(S1). cifor.org/publications/pdf_files/articles/ASonwa1601.pdf 27 Groupe de la Banque mondiale. 2022. Rapport national sur le climat et le développement du Cameroun. Série de RNCD ; Banque mondiale, Washington, DC. htpp ://hdl.handle.net/10986/38242 Licence : CC BY-NC-ND. 28 Rapport du suivi de l’Indicateur 3.4 A/S Amélioration des performances des recettes forestières DGI, Ministère des Finances, Cameroun. Octobre 2020. 29 Groupe de la Banque mondiale. 2022. Rapport national sur le climat et le développement du Cameroun. Série de RNCD ; Banque mondiale, Washington, DC. htpp ://hdl.handle.net/10986/38242 Licence : CC BY-NC-ND. 30 Kelly, Roy ; Blanc, Roland ; Anand, Aanchal. Property Tax Diagnostic Manual. Washington DC : Groupe de la Banque mondiale. 2020. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 65 Encadré 4-6. Taxes foncières au Cameroun Par rapport au Manuel de diagnostic de la fiscalité foncière de la Banque mondiale, la fiscalité foncière du Cameroun présente des lacunes dans différentes fonctions identifiées. L’impôt foncier est actuellement facturé à un taux unique de 0,1 % de la valeur de réalisation des terrains et des bâtiments situés dans tous les centres urbains dotés de routes revêtues et de services d’eau, d’électricité et de téléphonie ainsi que de sièges de sous-divisions (départements). (Articles 577 et suivants, et Article 581 du Code Général des Impôts). Les écoles et hôpitaux publics et privés ; les églises ; les propriétés publiques et diplomatiques ; les terrains affectés exclusivement à l’agriculture, à la pêche, à l’élevage, aux complexes agro-industriels (à l’exception des bureaux), ainsi que les terrains appartenant à des clubs et associations sportives sont tous exonérés (Articles 578 et suivants du Code Général des Impôts). Couverture : La DGI et le Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières n’ont communiqué aucune donnée et il n’existe pas de système d’information géographique (SIG) permettant d’identifier efficacement les propriétés. Selon la loi (Articles 145 et 146 du Code des Impôts), les propriétés devraient être identifiées et des relevés cadastraux devraient être réalisés tous les cinq ans, même si cela n’est pas effectué dans la pratique. Le système permettant de définir l’adresse physique des propriétés n’est pas fiable et la plupart des propriétés sont occupées par des lotissements informels, même dans les grandes villes. Évaluation des propriétés : En l’absence d’un système SIG et compte tenu de l’insuffisance d’évaluateurs experts au sein de la DGI, les contribuables peuvent déposer leurs déclarations sur la base de leurs propres estimations de la valeur de leurs propriétés, ce qui crée probablement des problèmes d’équité, des propriétés similaires pouvant ainsi être imposées différemment. L’Article 456a du Code Général des Impôts permet à l’administration de fixer des valeurs de référence pour l’évaluation des propriétés, notamment pour les quartiers chics des villes. Cependant, une évaluation transparente est presque impossible étant donné que les références sont établies de manière arbitraire, ouvrant la voie à une évaluation discrétionnaire et à l’émergence de nouvelles préoccupations en rapport à l’équité et la gouvernance. Recouvrement : Les politiques foncières et l’administration de l’impôt foncier sont centralisées à la DGI, qui recouvre les impôts pour le compte des administrations infranationales. En conséquence, le rôle des conseils locaux est minime. Étant donné que les objectifs de recettes de la DGI ne prennent pas en compte les impôts fonciers et autres taxes communales, l’administration fiscale est peu motivée à allouer ses ressources déjà rares au recouvrement des impôts infranationaux. Dans l’ensemble, l’application est également faible. Source : Kelly, Roy ; Blanc, Roland ; Anand, Aanchal. Property Tax Diagnostic Manual. Washington DC : Groupe de la Banque mondiale. 2020. Teyim Pila, Khan, Strategies to Boost Domestic Revenue Mobilization in Cameroun (avril 2021). Disponible sur SSRN : https ://ssrn.com/abstract=4400096 or http ://dx.doi.org/10.2139/ssrn.4400096. 4.2.7 Dépenses fiscales Le Cameroun prévoit de nombreuses mesures de dépenses fiscales pour l’ensemble des principaux instruments fiscaux du pays, ce qui affaiblit le niveau des recettes fiscales. Le pays a largement eu recours aux traitements fiscaux préférentiels tels que les exonérations, les déductions, les crédits, les taux d’imposition réduits et autres traitements fiscaux spéciaux. Ces mesures visent à encourager l’investissement, à promouvoir le développement de secteurs et de domaines prioritaires, et à poursuivre d’autres objectifs politiques publics. Cependant, les mesures incitatives fiscales réduisent les Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 66 recettes publiques, et ces recettes perdues constituent une dépense fiscale, équivalente à bien des égards aux dépenses publiques.31 Le Cameroun a établi ses dépenses fiscales conformément à la législation fiscale et a également accordé des mesures incitatives en vertu de différents autres codes (tels que dans le secteur forestier, le secteur minier, la promotion de l’investissement et les partenariats public-privé), ainsi qu’à travers des accords conclus entre le gouvernement et des investisseurs particuliers. Une évaluation régulière des dépenses fiscales menée par le gouvernement a permis de relever 227 mesures en rapport à la TVA, aux droits d’accise et aux droits de douane pour 2015 (Annex 8-8). Pour 2021, l’évaluation a relevé 461 mesures de dépenses fiscales couvrant l’ensemble des impôts directs et indirects. Même si les données sont partielles, il semblerait que le Cameroun ait l’un des plus grands nombres de mesures de dépenses fiscales au monde, la moyenne mondiale étant de moins de 100 mesures et la moyenne des PRITI d’environ 70 à 80 mesures.32 Le coût estimé des dépenses fiscales du Cameroun correspond à un manque à gagner en termes de recettes, dont l’importance est comparable à la moyenne des PRITI. Le coût des dépenses fiscales au Cameroun a diminué à mesure que les autorités ont poursuivi leurs efforts de rationalisation, et l’adoption de mesures spéciales pour riposter à la pandémie de COVID-19 n’a pas modifié cette tendance (Encadré 4-8). Depuis 2018, les lois de finances annuelles ont continué à éliminer et à restreindre les dépenses fiscales (exemple : en élargissant la base d’imposition de l’impôt foncier et en réduisant le nombre d’exonérations de TVA), générant ainsi des recettes supplémentaires. Entre 2017 (quand environ 90 % des mesures de dépenses fiscales identifiées ont été évaluées) et 2021, les recettes sacrifiées ont diminué, passant de 2,9 % à 1,7 % du PIB (Encadré 4-7 et Tableau 4-5). Le niveau du manque à gagner en termes de recettes du Cameroun est comparable à la moyenne des niveaux des PRITI, qui est de 2,6 % du PIB, et à la moyenne mondiale, qui est de 3,7 % du PIB. Les mesures spéciales de dépenses fiscales en riposte à la pandémie de COVID-19 ont eu un impact budgétaire très modeste au Cameroun, surtout par rapport à la moyenne mondiale (Encadré 4-8). Encadré 4-7. Rapport sur les coûts des dépenses fiscales au Cameroun Le gouvernement prépare des rapports annuels sur les dépenses fiscales depuis 2016 pour améliorer la transparence budgétaire et orienter les politiques. La DGI et la DGD ont piloté la production de ces rapports, en collaboration avec l’Institut National de la Statistique (INS) et le Ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT), et avec l’assistance de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (FERDI) et de la Banque mondiale. 31 Les dépenses fiscales, selon l’OCDE, sont «des transferts de recettes publiques dus à une réduction des obligations fiscales relativement à une norme». Les dépenses fiscales comprennent l’allègement des taux (taux réduits appliqués à une catégorie de contribuables ou d’activités) ; les exonérations (revenus exclus de la base d’imposition) ; les abattements (montants déduits du revenu brut, pour obtenir le revenu imposable) ; crédits (montants déduits de l’impôt à payer) ; et les reports d’impôts (paiement tardif des impôts). OCDE (2010). « Tax Expenditures in OECD Countries. » OCDE. Paris. 32 Moyennes des données disponibles pour 1990-2021. Les rapports varient selon les pays et les années. Pour 2021, 106 pays, dont 20 PRITI, ont soumis des rapports. Redonda, A., von Halden Wang, C. et Aliu, F. (2023) : Global Tax Expenditures Database [data set], Version 1.1.5, https ://doi.org/10.5281/zenodo.7825791. 33 Moyennes pour l’ensemble des données disponibles sur la période de 1990-2021. Les rapports varient selon les pays et les années. Pour 2021, 106 pays, dont 20 PRITI, ont soumis des rapports. Redonda, A., von Halden Wang, C. et Aliu, F. (2022) : Base de données mondiale des dépenses fiscales [GTED] Rapport d’avancement, Institut allemand de développement (Deutsches Institut für Entwicklungspolitik) et Conseil sur les politiques économiques. https ://doi.org/10.23661/ r2.2022. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 67 Au fil du temps, les rapports ont commencé à couvrir la plupart des mesures de dépenses fiscales. Le nombre de mesures identifiées est passé de 227 en rapport à trois impôts indirects (à savoir la TVA, les droits d’accise et les droits de douane) pour 2015, à 461 en rapport à l’ensemble des impôts directs et indirects (à savoir la TVA, les droits de douane, les droits d’accise, l’IS, l’IRPP et les droits d’enregistrement) pour 2021. La part des mesures identifiées a augmenté rapidement, passant de 60 % en 2016 à 98 % en 2019. Tableau 4-5: Mesures de dépenses fiscales identifiées et évaluées, 2015-2021 Nombre de mesures 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Total des mesures identifiées 227 279 405 405 380 381 461 Total des mesures évaluées 137 230 363 358 371 295 382 Pourcentage 60,4 % 82,4 % 89,6 % 88,4 % 97,6 % 77,4 % 82,9 % Dépenses totales en milliards 155,8 451,6 605,6 545,1 584,7 452,3 439,6 XAF En % du PIB 0,8 % 2,2 % 2,9 % 2,5 % 2,5 % 1,9 % 1,7 % Source : Rapport sur les dépenses fiscales des exercices 2016-2021, calculs des services du Ministère des Finances du Cameroun et des services de la Banque mondiale. Les changements apportés en 2020 et 2021 à la méthodologie d’évaluation des dépenses fiscales font qu’il est difficile d’interpréter les évaluations. Dans le cadre d’un changement de méthodologie en 2020, les mesures en rapport à la TVA sur les intrants et les biens d’équipement importés par les entreprises assujetties à la TVA ont été exclues, contribuant ainsi à une diminution de 23 % des coûts évalués des dépenses fiscales entre 2019 et 2020. Un changement méthodologique ultérieur en 2021, mettant en œuvre la recommandation de la FERDI d’exclure les entreprises enregistrées à la TVA, a davantage réduit le coût estimé des dépenses fiscales. L’approche technique adoptée pour estimer les dépenses fiscales est un compromis ; la collecte et la diffusion des données doivent être renforcées pour garantir la précision des estimations. Premièrement, la méthodologie actuelle utilisée pour estimer les dépenses fiscales surestime probablement leur impact. La méthode de « perte de revenus » adoptée par le Cameroun est relativement simple à utiliser et permet d’effectuer des comparaisons avec les autres pays de la CEMAC et de la CEDEAO. Cependant, elle ne prend pas en compte les changements de comportement des contribuables (effets incitatifs) et l’impact sur les autres recettes ou sur le niveau d’activité. Deuxièmement, les données nécessaires ne sont pas complètes, les entreprises ne respectant pas souvent les exigences en matière de rapport. Enfin, les rapports sur les dépenses fiscales n’ont pas été mis à la disposition du public dans des délais convenables, ce qui affaiblit leur rôle dans le renforcement de la transparence dans l’utilisation des fonds publics. Source : Rapports sur les dépenses fiscales 2019, 2020, 2021 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 68 Les dépenses fiscales en rapport à la TVA sont celles qui ont le plus coûté au Cameroun, la majeure partie des dépenses profitant particulièrement aux ménages à revenus élevés. Ces dépenses fiscales représentaient la plus grande part des dépenses fiscales totales du Cameroun (272,9 milliards XAF ou 54 %), suivies par les dépenses en rapport aux droits d’importation (141,8 milliards de XAF ou 28 %) (Graphique 4-29). La majorité de ces dépenses fiscales sont en rapport au régime fiscal de droit commun, tel que décrit dans le Code Général des Impôts et le Code des Douanes de la CEMAC, représentant plus de la moitié du coût total des mesures incitatives fiscales, suivies par les dépenses fiscales en rapport aux incitations à l’investissement (17 %), et le Code Pétrolier (13 %) (Graphique 4-30). En termes de bénéficiaires, la plus grande part des avantages (58,1 %) revient aux ménages, principalement sous forme d’exonération d’aliments de base et de biens en rapport à la santé. Alors qu’elles devaient profiter aux pauvres, les dépenses fiscales appuyant la consommation des ménages ont tendance à être régressives, profitant de manière disproportionnée aux ménages des déciles de revenus supérieurs. La plupart des avantages restants (39,5 %) reviennent aux entreprises, les grandes entreprises opérant dans l’industrie alimentaire et le secteur minier recevant les incitations fiscales les plus généreuses dont certaines peuvent avoir indirectement profité aux consommateurs sous forme de réduction de prix (Graphique 4-31). Le détail des dépenses fiscales de 2015 à 2021 est présenté à l’Annexe 8. Graphique 4-29: Dépenses fiscales moyennes par type Graphique 4-30: Coût moyen des dépenses fiscales par d’impôt, 2017-202 régime fiscal, 2016-2021 Incitations à l'investissement IRPP 15,7 % 3,0 % Droits enregistrement Accords spécifiques 4,3 % 3,3 % IS sur les sociétés non pétrolières 6,1 % Droits d'accise Code gazier 3,2 % 4,0 % Code Accords de pétrolier libre échange 1,0 % 10,6 % Zones Economiques TVA Spéciales 0,0 % Droit commun 54,0 % Droits de 55,0 % Centres de Gestion douane Agrées (CGA) 0,6 % 28,3 % Financement extérieur ou conjoint 5,7 % Promotion des matériaux et Autres matières premières locaux 2,0 % 2,7 % Note : Les autorités n’ont pas pu fournir des données ventilées Note : Les autorités n’ont pas pu fournir des données par type d’impôt pour les exercices 2015-16. ventilées par régime fiscal pour l’exercice 2015. Source : Rapport sur les dépenses fiscales des exercices 2016- Source : Rapport sur les dépenses fiscales des exercices 2016- 2021. Ministère des Finances. 2021. Ministère des Finances. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 69 Graphique 4-31: Dépenses fiscales par bénéficiaire, 2016-2021 Missions diplomatiques/ Organisations humanitaires 0,6 % Organisations internationales Recettes du secteur non pétrolier 0,1 % 0,4 % Organisations religieuses 0,0 % Administrations publiques Compagnies aériennes 0,1 % 0,4 % Autres 0,8 % Grandes entreprises 31,1 % Entreprises Ménages 39,5 % Entreprises moyennes 58,1 % 4,6 % Petites entreprises 3,8 % Note : Les autorités n’ont pas pu fournir des données ventilées par type d’impôt pour les exercices 2015-16. Source : Rapport sur les dépenses fiscales des exercices 2016-2021. Ministère des Finances. Encadré 4-8. Évaluation des dépenses fiscales en rapport à la pandémie de COVID-19 Un rapport exceptionnel sur les dépenses fiscales a été réalisé par la DGI, évaluant les dépenses fiscales engagées en riposte à la pandémie de COVID-19. L’étude a identifié 17 mesures de politiques administratives et fiscales pour tous les impôts directs et indirects qui constituent des dépenses fiscales en rapport à la COVID-19 pour tous les secteurs affectés, notamment le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, le secteur du transport, les entreprises forestières et autres. Les mesures de politiques fiscales comprenaient une réduction de l’IS qui passait de 30 % à 28 % pour les PME ; une exonération de l’IS pour le secteur hôtelier ; une réduction de la taxe d’abattage qui passait de 4 % à 3 % pour les entreprises forestières certifiées en gestion forestière durable ; et une déduction totale de l’IS pour les dons et cadeaux des entreprises visant à faire face à l’impact de la pandémie. Selon les constats du rapport, les dépenses fiscales en rapport à la COVID-19 ont eu un coût budgétaire modeste. Les dépenses fiscales en rapport à la pandémie ont coûté 14,2 milliards XAF en recettes publiques sacrifiées en 2020-21, soit moins de 2 % du coût total des dépenses fiscales. Le secteur du transport a reçu 28 % de ces dépenses fiscales, tandis que le secteur de l’hôtellerie et du tourisme en a reçu 26 % (Tableau 4-6). À titre de comparaison, l’augmentation des dépenses fiscales à l’échelle mondiale pendant la pandémie de COVID-19 a entraîné un manque à gagner représentant près de 4,4 % du PIB, soit 30 % des recettes fiscales réelles. Fait probablement encore plus important, le gouvernement a pris des mesures administratives pour appuyer la trésorerie des entreprises, notamment en suspendant les contrôles fiscaux pour le deuxième trimestre 2020, en suspendant les procédures de recouvrement forcé et en affectant une allocation spéciale de 25 milliards XAF pour les crédits de TVA des entreprises en attente de remboursement. Ces mesures administratives n’ont pas entraîné de pertes de revenus permanentes, mais ont plutôt reporté le recouvrement des recettes sur les années suivantes. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 70 Tableau 4-6. Dépenses fiscales en rapport à la COVID-19 par secteur, 2020-2021 Secteur bénéficiaire Dépenses fiscales (milliards XAF) Part (%) Secteur hôtelier et touristique 3,7 26 Secteur du transport 4,0 28 Secteur forestier 2,5 18 Vendeurs de produits alimentaires frais Non évalué - Autres secteurs 3,9 28 Grand total 14,2 100 Source : DGI, Rapport sur les dépenses fiscales en rapport à la COVID-19, mai 2022. Base de données mondiale sur les dépenses fiscales, https ://gted.net/2023/04/new-data-and-updates-released-on-the-gted/. 4.3 Administration fiscale Le Cameroun compte deux principales administrations fiscales, toutes deux faisant partie du Ministère des Finances.34 La Direction Générale des Impôts (DGI) est responsable de tous les impôts sauf des taxes sur le commerce international, tandis que la Direction Générale des Douanes (DGD) est responsable des droits de douane. Les organigrammes de la DGI et de la DGD sont présentés à l’Annexe 9. Le Ministère de la Décentralisation et du Développement local coordonne les activités des administrations infranationales et est en charge des transferts et des financements intergouvernementaux. Il contribue à la mobilisation des taxes foncières recouvrées par la DGI. Conformément à l’Article 25 (ii) du Code de la Décentralisation (Loi N°2019/024 du 24 décembre 2019), 15 % des ressources du budget national devraient être transférés chaque année aux administrations locales. Le coût de recouvrement des recettes fiscales au Cameroun est étonnamment bas et davantage de dépenses administratives relèverait probablement le niveau de recouvrement. Le coût de recouvrement des recettes est l’un des indicateurs utilisés pour mesurer l’efficience des agences d’administration fiscales dans le monde entier. Il est calculé en faisant le rapport du coût total engagé pour recouvrer les recettes fiscales sur le total des recettes recouvrées. L’indicateur reflète l’efficience de l’administration fiscale sous l’influence d’une série de facteurs tels que l’utilisation de la technologie, la mise en place de systèmes de contrôle efficaces basés sur les risques et la conformité des contribuables. Le coût moyen de recouvrement des impôts est considérablement plus élevé en Afrique que dans les pays de l’OCDE. En 2020, les administrations fiscales 34 Le Ministère des Finances comprend quatre directions générales : la DGI, la DGD, la Direction Générale du Budget (DGB) ainsi que la Direction Générale du Trésor, de la Coopération Financière et Monétaire (DGTCFM). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 71 en Afrique ont consacré en moyenne 2  % des recettes recouvrées à l’administration des recettes. Au Cameroun, le coût de recouvrement des recettes en 2020 représentait 0,3 % des impôts recouvrés, ce taux étant le troisième plus bas parmi ceux de 19 pays de l’AfSS (Graphique 4-32, Graphique 4-33). La valeur aberrante présentée par le Cameroun pour cet indicateur, celle-ci étant cinq fois inférieure à celle du Nigeria, indique qu’il est possible de générer des avantages, à savoir une augmentation des impôts recouvrés, en allouant un budget plus important à l’administration fiscale. En 2014-2019, le nombre de contribuables camerounais est passé de 80 797 à 121 566, tandis que le nombre d’agents des impôts à la DGI a diminué de 3 893 à 3 317. Les gains de productivité, suite à l’utilisation de la technologie et à l’amélioration des contrôles fiscaux, ont dû être significatifs pour garantir le respect des mêmes normes - et encore plus pour des normes améliorées - en matière de contrôle fiscal sur la période, d’autant plus que code des impôts est devenu plus complexe.35 Graphique 4-32. Coût de recouvrement des impôts dans des Graphique 4-33. Coût de recouvrement des impôts par bloc pays sélectionnés de l’AfSS, 2020 (% des recettes) économique régional, 2020, (% des revenus) 6 3,0 2,66 5 2,5 2,16 4,9 2,03 4,6 4 2,0 1,72 4,1 3,6 3,45 3,4 3 1,5 3,15 2,7 2 1,0 2,15 2,1 2,1 2 1,8 0,46 1 0,5 1,1 0,27 0,9 0,7 0,2 0,1 0 0,0 Eswatini Togo Sierra Leone Botswana Zimbabwe Burundi Zambie Angola Ghana Seychelles Ouganda Tanzanie Nigeria RDC Afrique du Sud Namibie Cameroun Tchad Niger CEDEAO SADC AfSS EAC CEEAC Note : CEDEAO désigne la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. SADC désigne la Communauté de développement de l’Afrique australe. AfSS désigne l’Afrique subsaharienne. CAE désigne la Communauté de l’Afrique de l’Est. CEEAC désigne la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, dont le Cameroun fait partie. Source : African Tax Administration Forum, African Tax Outlook 2021. 35 Direction Générale des Impôts, Rapport décennal 2010-2020, p 17. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 72 Malgré la mise en œuvre d’une série de réformes de l’administration fiscale (énumérées à l’Annexe 10), plusieurs fonctions essentielles de l’administration fiscale au Cameroun doivent être renforcées. Le rapport le plus récent de l’Outil d’évaluation diagnostique de l’administration fiscale (TADAT) (2017)36 et les enquêtes auprès des entreprises menées par la Banque mondiale ont cerné des lacunes dans des fonctions essentielles de l’administration fiscale. L’évaluation TADAT est présentée dans l’Encadré 4-9 et à l’Annexe 11. L’évaluation a également souligné la nécessité de renforcer la coordination entre les différentes unités au sein de l’administration fiscale. Le manque de coordination et la corruption associée pourraient avoir des effets néfastes sur l’environnement des affaires, pouvant inciter certaines entreprises du secteur privé à passer en situation de non-conformité ou d’informalité. Encadré 4-9. Principaux constats du Rapport TADAT 2017 Identification et enregistrement du contribuable : Ces fonctions sont informatisées et centralisent toutes les informations sur les contribuables au niveau national dans la base de données des contribuables actifs (FISCALIS), mais elles restent incomplètes à cause de l’absence de mise en relation avec le logiciel de gestion fiscale (MESURE) qui gère les déclarations et les paiements. Des procédures documentées existent pour identifier et exclure les contribuables inactifs, mais elles ne sont appliquées que de manière ponctuelle, et il n’existe pas encore de plateforme d’échange d’informations entre la DGI et les autres organismes publics ou privés. Déclaration : Les taux de déclaration dans les délais sont faibles pour tous les principaux impôts et taxes, à l’exception de la TVA ; notamment, l’Impôt sur les revenus des personnes physiques (IRPP) enregistre un faible taux de ponctualité de 5,00 à 7,38 %. Le taux de déclaration dans les délais de l’Impôt sur les sociétés (IS) est de 55,33 %, ce qui est bien inférieur au taux pour la TVA qui est de 80 %. Néanmoins, les grandes entreprises remplissent à temps plus de 90 % de leurs obligations de déclaration (97,51 % pour la TVA et 97,73 % pour l’IS). Le recours à la déclaration électronique reste faible, celui-ci ne concernant que les grandes et moyennes entreprises et n’étant utilisé que pour les retenues à la source par les employeurs. Traitement des paiements : Les moyens de paiement électronique sont utilisés pour l’IS, l’IRPP et la TVA ; cependant, ils ne sont pas utilisés pour les retenues à la source à cause de l’indisponibilité des données sur les impôts retenus sur les salaires des salariés qui ne sont pas automatiquement transmises à la DGI. Même si les méthodes de paiement des retenues à la source sur les revenus du travail, les intérêts et les dividendes et les régimes d’acompte sont bien en place, le traitement des paiements est lent et en retard par rapport à ceux des pays de la CEMAC en moyenne. Selon le rapport TADAT 2017, le taux de paiement dans les délais de la TVA, en particulier en termes de nombre de paiements (57 %), est faible par rapport au taux des pratiques d’excellence internationales. En revanche, le taux de paiement dans les délais de la TVA, en termes de valeur, est plus élevé, atteignant 89 %. La TVA représente la source la plus importante de recettes publiques, et son paiement dans les délais influe sur la performance des recettes. Gestion des arriérés et procédures de recours fiscales : La gestion des arriérés pourrait être améliorée dans les domaines du remboursement de la TVA et du règlement des litiges. Actuellement, la DGI ne parvient pas à déterminer le niveau des arriérés d’impôts, notamment : (i) la valeur du total des arriérés des principaux impôts exprimée en pourcentage du total des recettes des principaux impôts recouvrées à la fin de l’exercice budgétaire ; (ii) la valeur des 36 TADAT Cameroun - Rapport d’évaluation de la performance. Juillet 2017. Non rendu public. Une mise à jour du rapport 2017 était attendue pour fin 2023. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 73 arriérés des principaux impôts recouvrables exprimée en pourcentage du total des recettes des principaux impôts recouvrées ; et (iii) la valeur des arriérés des principaux impôts datant de plus de 12 mois exprimée en pourcentage de la valeur de tous les arriérés des principaux impôts. La Direction du Recouvrement, des Valeurs Fiscales et de la Curatelle (DRVFC)37 relevant de la DGI est chargée de l’exécution du recouvrement, mais elle n’est pas parvenue à réduire efficacement le montant des arriérés d’impôts datant de plus de 12 mois. En moyenne, le stock d’arriérés de fin d’année représentait 59 % du total annuel des principaux impôts recouvrés entre 2014 et 2016, et plus de 70 % de ces arriérés dataient de plus de 12 mois, indiquant de faibles performances. Audit et contrôle  : Même si le programme de contrôle fiscal couvre tous les principaux impôts et segments de contribuables, il n’est ni systématique ni adéquatement structuré. La DGI ne dispose pas de mécanisme de recoupement informatisé é à grande échelle des données pour vérifier les informations présentées dans les déclarations fiscales. Au lieu de cela, ces informations sont saisies manuellement sur différentes plateformes et organisées par contribuable dans la base de données de la Brigade des Enquêtes Fiscales (BEF)38. Le Cameroun dispose d’un système de décision public et privé bien structuré pour tous les principaux impôts, mais la DGI n’a pas conclu d’accords de coopération en matière de mise en conformité avec les contribuables admissibles, et elle ne surveille pas le manque à gagner en matière de recettes fiscales à cause de l’ampleur de la pratique des déclarations inexactes chez les contribuables. L’assurance fournie par les audits internes (par l’Inspection Nationale des Impôts) au sein de la DGI est faible à cause de l’absence d’une approche systématique de gestion du risque ; de plus, il n’y existe ni comité d’audit ni département des affaires internes. Litiges fiscaux : Un mécanisme d’examen à plusieurs niveaux des litiges fiscaux est utilisé au Cameroun alors que la DGI39 applique un processus d’examen administratif à deux niveaux. Les agents qui examinent les objections des contribuables déposées auprès de la Division du Contentieux sont physiquement et du point de vue organisationnel distincts des auditeurs, qui font partie du Service d’Audit. Les informations sur les procédures de règlement des litiges sont accessibles au public dans les dispositions du Code Général des Impôts et les contribuables sont explicitement informés de leurs droits. Cependant, seuls 52 % des examens administratifs ayant résolu des litiges sont achevés dans un délai de 30 jour calendaire, alors que selon les recommandations des bonnes pratiques internationales, 90 % des cas devraient l’être. Les divisions législatives et contentieuses analysent les résultats des recours contentieux et lancent les modifications administratives et législatives selon les besoins et de manière non régulière. Remboursement d’impôt : La DGI ne dispose pas d’un système comptable interfacé avec le système de comptabilité des recettes du Ministère des Finances. Même si elle dispose d’un personnel dédié pour l’aider à prévoir et estimer les recettes fiscales, l’équipe n’effectue pas d’analyse des dépenses fiscales, ni du stock de pertes fiscales reportées par les contribuables qui pourraient être compensées par des revenus imposables à l’avenir. Le logiciel de gestion fiscale (MESURE) n’est pas automatiquement mis en relation avec le système comptable du Trésor (CADRE)40 pour garantir l’exactitude et l’exhaustivité du système comptable des recettes fiscales. De plus, le système de remboursement de la TVA n’est pas traité avec un logiciel automatisé à risques prédéterminés et aucun intérêt n’est payé sur les remboursements tardifs. Le délai nécessaire pour payer les remboursements de TVA dépasse généralement 30 jours, moins de 18 % des dossiers étant traités (et 14 % de la valeur étant remboursée) dans les 30 jours, ce qui est considérablement inférieur aux valeurs des normes internationales qui recommandent le traitement d’au moins 90 % des demandes de remboursement de TVA dans un délai de 30 jours calendaires. 37 Direction du Recouvrement, des Valeurs Fiscales et de la Curatelle. 38 Brigade des Enquêtes Fiscales. 39 Pour la première étape du contentieux, le contribuable s’adresse soit au Centre Régional des Impôts (litiges inférieurs à 50 millions XAF), soit à la Direction des Grandes Entreprises de la DGI (jusqu’à 100 millions XAF), soit au Directeur Général des Impôts (litiges supérieurs à 100 millions XAF). Dans la seconde étape, le contribuable non satisfait par la décision rendue dans le cadre de la première étape adresse sa requête au Ministre des Finances. 40 Système comptable du Trésor. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 74 Redevabilité : Il n’existe aucune procédure standard pour garantir l’intégrité de l’administration fiscale, ni politique éthique, ni code de conduite. Il n’existe aucun médiateur ou organisme équivalent chargé de recevoir et d’enquêter sur les plaintes des contribuables sur la manière dont l’administration fiscale les traite. Même si les agences de lutte contre la corruption (CONAC et ANIF) sont chargées d’enquêter et de poursuivre les allégations de corruption de la part des agents du fisc, elles ne sont pas clairement responsables de la supervision de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques de lutte contre la corruption dans l’administration fiscale. Le mécanisme de suivi de la confiance du public dans la DGI fait également défaut, et aucune enquête indépendante n’a été menée pour évaluer la perception de l’intégrité par le public. Même si le rapport annuel sur la performance financière et opérationnelle de l’administration fiscale est publié dans un délai de six mois, les orientations et projets futurs de l’administration fiscale sont réservés à l’usage interne de la DGI. Source : TADAT Cameroun - Rapport d’évaluation de la performance. Juillet 2017. Non rendu public. L’administration fiscale camerounaise impose une charge importante aux entreprises. Environ 42 % des entreprises considèrent que les taux d’imposition élevés constituent une contrainte majeure pour leurs activités, tandis que 36 % considèrent que l’administration fiscale représente un obstacle important (Graphique 4-34). Cela n’est pas surprenant, étant donné qu’au Cameroun, les taux réglementaires de TVA et d’IS sont relativement élevés par rapport à ceux de la plupart des PRITI de l’AfSS, en plus de l’absence d’exonérations d’IRPP. Selon d’autres données factuelles, les entreprises sont tenues d’effectuer un nombre important de paiements d’impôts par an, ce qui nécessite beaucoup de temps et de ressources pour la préparation, la déclaration et le paiement (Graphique 4-35). Le taux total d’imposition et de Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group cotisation (TTIC)41 est relativement élevé exprimé en pourcentage des bénéfices, et le score de l’indice post déclaration (PFI)42 est également élevé suite à un accroissement de l’accès aux remboursements de TVA et une amélioration du processus de contrôle de l’IS (Graphique 4-36). 41 Le taux total d’imposition et de cotisation (TTIC) reflète le montant d’impôts que les entreprises paient. Celui-ci est défini comme étant la somme de tous les impôts et cotisations sociales obligatoires payés, exprimée en pourcentage du bénéfice commercial de l’entreprise. 42 L’indice postdéclaration (IPD) est un score variant entre 0 et 100, où 0 est attribué au processus le moins efficace et 100 au plus efficace. L’indice est composé des quatre composantes à coefficients de pondération égaux suivantes : deux concernent la procédure d’obtention de remboursement de TVA et deux la correction d’une erreur involontaire dans une déclaration d’impôt sur les sociétés. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 75 Graphique 4-34. Entreprises considérant que la fiscalité est Graphique 4-35. Fardeau du paiement des impôts une contrainte (%) 80 1 600 70 1 400 60 1 200 Administration fiscale (%) Cameroun Durée (heures par année) 50 1 000 40 800 Cameroun 30 600 20 400 10 200 0 0 0 20 40 60 80 0 10 20 30 40 50 60 Taux d’imposition (%) Paiements (nombre par années) CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels Note : Chaque pays présente l’enquête au cours d’une année différente, aucune enquête n’est menée pour la Guinée équatoriale. Source : PwC. 2020 Paying Taxes. Source : Enquêtes auprès des entreprises de la Banque mondiale, http ://www.enterprisesurveys.org Graphique 4-36. Charge fiscale et post déclaration Graphique 4-37. Corruption dans le recouvrement des impôts 100 70 Entreprises devant donner des cadeaux (%) 90 60 80 Index postdéclaration (0-100) 70 50 Cameroun 60 40 50 Cameroun 30 40 30 20 20 10 10 0 0 0 10 20 30 40 50 60 0 20 40 60 80 100 Taux total d’imposition et de cotisation (% des bénéfices) Firms visited (%) CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels CEMAC Structural Peers Aspirational Peers Note : Note : Les années d’enquête dans chaque pays ne sont pas nécessairement similaires, aucune enquête n’est menée pour la Guinée Source : PwC, 2020 Paying Taxes. équatoriale. Source : Enquêtes auprès des entreprises de la Banque mondiale, http ://www.enterprisesurveys.org Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 76 4.3.1 Corruption En plus de plusieurs défis en rapport à l’administration fiscale, la corruption constitue un problème urgent. La corruption et la faible qualité des institutions pourraient entraîner à la fois des fuites de recettes et un affaiblissement de la morale fiscale. La fiscalité établit essentiellement un contrat social dans lequel les citoyens paient des impôts dans l’attente de recevoir des services publics en retour. La corruption constitue le quatrième obstacle le plus important dans l’environnement des affaires au Cameroun (Graphique 4-38).43 Environ 82 % des entreprises ont été visitées ou ont dû rencontrer des agents du fisc, à raison de 4 visites par an en moyenne, ce qui est nettement supérieur aux moyennes régionales (2 visites) et des PRITI (1 visite). De plus, une proportion significative d’entreprises (20 %) a dû offrir des cadeaux lors de ces réunions, ce qui dépasse les proportions de 15,5 % des entreprises en Afrique subsaharienne et de 11,5 % à l’échelle mondiale (Graphique 4-37). En outre, selon les révélations de la récente étude sur la Perception de la corruption et l’attitude à l’égard de la fiscalité en Afrique,44 93,4 % des Camerounais pensent que les responsables du gouvernement présidentiel sont impliqués dans des affaires de corruption. Le Cameroun se classe au troisième rang du haut d’une liste de 36 pays africains, après le Nigeria (96,9 %) et le Gabon (95,4 %). La faible conformité fiscale au Cameroun peut être attribuée en partie au manque de confiance des contribuables envers l’administration et à la perception de la corruption. La mauvaise gouvernance des institutions publiques entraîne des inefficiences dans les dépenses publiques et la médiocrité des prestations de services publics, incitant ainsi les citoyens et les entreprises à s’opposer au paiement des impôts. Selon des enquêtes récentes menées par Afro-baromètre, 77 % des Camerounais déclarent avoir, au moins une fois, différé le paiement de leurs impôts à cause de leur mécontentement vis- à-vis de la performance de leur gouvernement. Cela a contribué au classement du Cameroun au 29e rang sur 36 pays africains en termes de conformité fiscale.45 Le Cameroun devrait envisager de mettre en œuvre de vastes réformes de gouvernance dans l’ensemble des dépenses et des services publics, ainsi que dans l’administration fiscale pour renforcer la conformité fiscale. Il pourrait tirer de précieux enseignements des réformes de gouvernance réalisées dans les PRITI tels que le Rwanda, qui a réalisé de grands progrès dans la mise en œuvre de réformes visant à améliorer le recouvrement des recettes et la prestation de services (Encadré 4-10). 43 Les entreprises sont invitées à déterminer quels éléments (sur une liste de 15) constituent les plus grands obstacles à leur développement (Source : Banque mondiale. Description des indicateurs des enquêtes auprès des entreprises. Page 174, 11 septembre 2017). 44 Amadou Boly, Maty Konté et Abebe Shimeles. Corruption Perception and Attitude Towards Taxation in Africa, Journal of African Economies, Volume 30, Supplément d’édition_1, novembre 2021, Pages i140-i157, https ://doi.org/10.1093/jae/ejab024. 45 Isabell, Thomas. (2017). Conformité fiscale : Les Africains affirment leur devoir civique mais manquent de confiance dans le département des impôts. Afrobarometer. Document de politique générale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 77 Encadré 4-10. Réformes de la gouvernance au Rwanda pour améliorer la conformité fiscale Pour renforcer l’efficience et réduire la corruption, le Rwanda a adopté des réformes visant à renforcer la numérisation et la transparence des services publics, ainsi qu’a mis en œuvre des règles de conduite plus strictes et des exercices de renforcement de capacité des employés publics, en particulier les agents du fisc. Un financement intégral de l’administration fiscale, de meilleures conditions de travail et de rémunération, ainsi qu’un renforcement continu de capacité ont stimulé la performance du personnel du fisc. La Rwanda Revenue Authority a été dotée des moyens pour gérer sa mission et son personnel de manière indépendante, sans interférence du ministère des Finances, ce qui a conduit à davantage de créativité et à une augmentation de la productivité. Les contribuables avaient les moyens de tenir l’administration redevable. Par exemple, des récompenses ont été offertes aux dénonciateurs de fraude et de corruption, ce qui a conduit à des licenciements. Plus important encore, le renforcement de la transparence dans les dépenses publiques et l’exécution du budget a permis d’établir un nouveau contrat social avec les contribuables. Les citoyens ont gagné accès aux informations sur les recettes publiques et l’exécution du budget et pouvaient demander des comptes aux fonctionnaires pour les services non fournis, générant ainsi un sentiment d’appropriation chez les citoyens, ce qui s’est traduit par une amélioration de la conformité fiscale. En moins de 10 ans, le rapport impôts sur PIB du Rwanda est passé de 11 à 17 % du PIB (supérieur à la moyenne de ses pairs régionaux), et environ 97 % de ses gros contribuables étaient considérés comme conformes à leurs obligations fiscales, ce qui reflète une consolidation de la confiance dans le gouvernement. Source: Teyim Pila, Khan, Strategies to Boost Domestic Revenue Mobilization in Cameroon (avril 2021). Disponible sur SSRN : https ://ssrn.com/abstract=4400096 or http ://dx.doi.org/10.2139/ssrn.4400096. 4.3.2 Économie informelle Les lacunes dans la gouvernance de l’administration fiscale favorisent l’informalité dans l’économie, ce qui induit une baisse des niveaux de recouvrement des impôts. La corruption et les lacunes incitent les acteurs économiques informels à dissimuler leurs activités aux autorités pour éviter de payer des impôts. Notamment, l’AfSS présente le taux d’économie informelle le plus élevé, représentant en moyenne environ 36 % du PIB en 2010-15, dépassant toutes les autres régions, y compris l’ALC avec ses 33 %, l’Asie du Sud avec ses 28 %, la région MENA avec ses 23 %, l’Asie de l’Est avec ses 21 %, l’Europe avec 20 % et l’OCDE avec ses 15 %.46 Malgré sa taille de moindre importance par rapport à ceux de la plupart des pays pairs, le secteur informel du Cameroun représentait environ 30 % du PIB en 2010-15, ce qui en fait le deuxième le moins important en taille parmi les pays de la CEMAC et le moins important en taille parmi ses pairs structurels et aspirationnels, à l’exception du Vietnam (Graphique 4-39). 46 Sources: Calculs des services de la Banque mondiale, Medina et Schneider (2018). Shadow Economies Around the World ; Documents de travail du FMI. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 78 La concurrence des entreprises informelles représente la contrainte la plus importante pesant sur l’environnement des affaires au Cameroun (Graphique 4-38), même si le secteur informel y est de taille moins importante que dans la plupart des pays pairs. Environ 23 % des entreprises au Cameroun reconnaissent que l’informalité généralisée perturbe leurs activités à cause de la concurrence déloyale, tandis que seuls 6,5 % et 5  % des entreprises considèrent que l’administration fiscale et les taux d’imposition, respectivement, constituent les principales contraintes pesant sur l’environnement des affaires (Graphique 4-38). La proportion d’entreprises au Cameroun désignant le secteur informel comme étant le principal défi pour l’environnement des affaires est deux fois supérieure à celle dans le monde (12 %) et à celle dans l’AfSS (11 %). Graphique 4-38. Dix principaux obstacles dans Graphique 4-39: Économie informelle, Cameroun et pays de l’environnement des affaires, en se basant sur le vécu des comparaison, 2019, (% PIB) entreprises (% des entreprises) 55 Moyenne CEMAC Moyenne AfSS 25 Cameroon AfSS Monde 50 20 45 40 % d'entreprises 15 35 30 10 25 5 20 15 44,4 34,7 40,1 29,9 51,6 32,0 40,4 37,7 35,6 36,6 32,6 31,1 20,5 0 10 Pratiques du secteur informel Accès au crédit Electricité Pratiques de l'administration fiscale Règles douanières et commerciales Taux d'imposition Inadéquation de la main-d'oeuvre Transports Crime, vols et troubles Corruption RCA Tchad Rep. du Congo Cameroun Gabon Guinée Equat. Côte d'Ivoire Sénégal Ghana Maroc Kenya Sri Lanka Vietnam PFR PRITI PRITS PRITI PRITI Pairs Pairs CEMAC structurels aspirationnels Source : Informal Economy Sizes, World Economics Database ; Medina et Source : Cameroun (2016). Enquêtes auprès des entreprises de la Banque Schneider (2018). Shadow Economies Around the World, Documents de travail mondiale, http ://www.enterprisesurveys.org du FMI ; et calculs des services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 79 4.4 Options de réformes Le Cameroun a déployé des efforts pour simplifier les régimes fiscaux et réformer l’administration des recettes, mais les résultats ne se sont pas améliorés de manière significative. La diminution du recouvrement des recettes et le ralentissement économique dû à la COVID-19 soulignent la nécessité de recouvrer les recettes de manière efficace et équitable. L’analyse de ce chapitre met en évidence les lacunes dans la conception des politiques et la conformité fiscales, soulignant la nécessité d’un plan de réforme élargi couvrant à la fois les principales politiques et l’administration fiscales. Les éléments des politiques fiscales doivent être mis en accord avec les pratiques d’excellence internationales et modifiés pour réaliser les multiples objectifs d’un système fiscal solide, notamment l’efficience des recettes, l’équité, la neutralité et la réactivité aux défis environnementaux et climatiques. L’administration fiscale, d’autre part, devrait appuyer la mise en conformité des contribuables (par exemple, en créant une administration fiscale accessible en permanence, en tirant parti de l’identité et de la vérification numériques et en décentralisant les services de l’administration fiscale) et devrait réduire le fardeau des contribuables (par exemple, en utilisant la science des données et des outils analytiques pour réduire au minimum les interventions humaines, et en adaptant les approches à des groupes particuliers de contribuables tels que les grandes entreprises contribuables ou les personnes fortunées).47 4.4.1 Considérations en matière de réforme des politiques fiscales Examiner et restructurer les politiques fiscales globales C’est le bon moment pour le Cameroun d’entreprendre une révision approfondie de son code des impôts. La fragmentation actuelle de la fiscalité au Cameroun entrave l’élaboration de politiques fiscales globales, faute d’orientation claire pour utiliser efficacement les principales sources fiscales et s’adapter aux changements économiques. De nombreux pays ont mené à bien la diversification de leurs recettes fiscales en mettant en œuvre des stratégies telles que l’élargissement de l’assiette fiscale et la réduction des taux, en se concentrant sur des sources moins volatiles telles que l’IRPP et la TVA, conduisant à une plus grande efficacité et à l’amélioration de la production de recettes. Cependant, le système fiscal camerounais ne fournit pas suffisamment d’efforts systématiques pour optimiser les sources fiscales, s’appuyant sur des sources de revenus mineures, appelées « auxiliaires », qui limitent le recouvrement des impôts et la prévisibilité des recettes. L’absence de principes globaux de politiques fiscales peut expliquer en partie le rapport impôts sur PIB relativement faible du pays. Il est également essentiel de simplifier le code des impôts du Cameroun. La simplification du code des impôts pourrait simultanément combler l’écart fiscal et réduire les coûts de mise en conformité en améliorant la conformité des contribuables à travers des obligations claires et standardisées. Le code fiscal actuel, élaboré sur plusieurs décennies et sans révision approfondie, accorde aux autorités fiscales un pouvoir discrétionnaire sur certaines options, entraînant des 47 Administration fiscale 2023 : informations comparatives sur l’OCDE et d’autres économies avancées et émergentes. OCDE Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 80 incohérences dans l’octroi des exonérations et des abattements. La standardisation de ces éléments de l’assiette fiscale apporterait non seulement de la clarté, mais réduirait également leur complexité pour les contribuables.48 Les autorités sont invitées à mettre en place une Stratégie de Revenus à Moyen Terme (SMTR) mettant l’accent sur une fiscalité inclusive et durable. Actuellement, le Cameroun ne dispose pas d’une SMTR consolidée en accord avec les politiques fiscales récentes. La SMTR devrait proposer une feuille de route claire pour réduire l’écart fiscal, définir des objectifs réalistes à moyen terme pour diversifier les sources fiscales et établir des plans réalisables pour réduire les dépenses fiscales et améliorer l’administration fiscale. L’exploitation des rapports annuels existants sur les pertes de recettes peut constituer un point de départ précieux dans la mise en œuvre des réformes opérationnelles de la gestion des dépenses fiscales. En plus des réformes des principaux types d’impôts, le Cameroun devrait prioriser les gains d’efficience et d’efficacité dans les domaines couverts par les impôts spéciaux, ainsi que la production des recettes associées. • Partage des recettes. L’existence de différentes recettes au Cameroun contribue à l’inefficience de la fiscalité. Ces recettes, qui constituent 1,2  % du PIB, proviennent des TSPP, de la taxe forestière et d’autres recettes fiscales mineures. Contrairement à la fiscalité générale, qui génère des recettes sans contrepartie recouvrées pour les réserves financières communes, les recettes fiscales spéciales sont recouvrées et redistribuées selon des modalités cloisonnées. A cause de ces modalités, ainsi que des pertes d’efficience, les recettes ne sont pas disponibles pour financer des domaines de dépenses critiques. Les modalités d’affectation spécifique des impôts spécifiques partagés avec les autorités locales, y compris le TSPP, réduisent l’efficience du système fiscal. De plus, certaines taxes de moindre importance (tels que la taxe touristique ou les droits de timbre), instituées dans le cadre d’accords de partage des revenus avec les autorités locales, peuvent imposer aux entreprises un fardeau de mise en conformité excessif par rapport aux avantages à en tirer. • Fonds routier. L’affectation actuelle des recettes à des dépenses spécifiques (tels que l’entretien des routes) ne correspond pas exactement aux besoins réels en matière de dépenses, entraînant ainsi des inefficiences tant du côté des recettes que des dépenses. L’introduction de recettes supplémentaires, telles que d’éventuels péages ou redevances, et la mise en accord des allocations budgétaires avec les besoins de dépenses contribueraient à combler le déficit persistant du financement destiné à la construction et l’entretien des routes. Les recettes affectées au Fonds Routier, provenant principalement de la TSPP, ne suffisent pas actuellement à cet effet. Réformer les régimes d’impôt sur le revenu des personnes physiques Deux aspects cruciaux doivent être pris en compte lors de la modification du régime de l’IRPP. Premièrement, il est essentiel d’établir un seuil d’exonération pour l’IRPP. Le choix d’un 48 Cela comprend également une liste d’exemptions dans différents domaines. Par exemple, les exonérations de TVA sur les équipements et matériels des secteurs de l’agriculture et de la pêche comprennent plus de 190 groupes de postes (Code des Impôts, Annexes au Titre 1), et la liste des postes à amortir dans le cadre du calcul des revenus imposables au titre de l’IS et de l’IRPP est très long et excessivement détaillé, entraînant de longues procédures de contrôle fiscal et réduisant la visibilité des obligations spécifiques des contribuables (Code des Impôts, Article 27) et sur l’IS (Code des Impôts, Article 7d). Pour l’IRPP, il existe plus de 100 grandes catégories d’amortissement, les taux variants entre 5 % et 33 %. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 81 seuil d’IRPP approprié, que ce soit sous la forme d’une tranche zéro, d’une déduction de base ou d’un crédit d’impôt général, favorise la progressivité de l’impôt en réduisant ou en éliminant le fardeau fiscal pesant sur les personnes à faible revenu. Le Cameroun ne dispose actuellement pas d’une tranche à taux d’imposition nul, créant un important écart fiscal pour les revenus faibles et moyens et incitant les entreprises du secteur formel à basculer dans l’informel. L’introduction d’un seuil d’exonération pourrait non seulement soulager les ménages les plus pauvres de l’obligation de payer des impôts, mais aussi faciliter l’administration. Deuxièmement, le régime actuel de l’IRPP, qui prévoit une déduction fixe et élevée de 500 000 XAF, tend à favoriser les riches. Même si plusieurs économies émergentes et en développement n’ont établi aucun seuil, celui-ci ne devrait pas non plus être excessivement élevé, cela pouvant entraîner une diminution significative des recettes. Dans les pays de l’OCDE, la médiane est d’environ 25 % du salaire moyen.49 La déduction annuelle actuelle au Cameroun (500 000 XAF, soit environ 815 USD50), représente 57 % du PIB par habitant du pays, soit 1 440 USD. Cette déduction forfaitaire fait augmenter presque au double le PIB par habitant, réduisant au minimum la couverture de l’IRPP, affaiblissement le rendement des recettes et compromettant ainsi la redistribution de l’impôt sur les revenus. De plus, la déduction forfaitaire annuelle pourrait ne pas être en adéquation avec les objectifs de distribution des recettes. Les personnes ayant des revenus plus élevés bénéficient d’une déduction fiscale plus élevée que celles ayant des revenus plus faibles. Cette disparité se produit parce que les salariés aux revenus plus élevés bénéficient de la déduction forfaitaire dans une tranche d’imposition supérieure, alors que les salariés à faible revenu bénéficient de l’avantage dans la tranche d’imposition inférieure. La variation de l’impôt à payer due aux déductions est déterminée par le taux d’imposition marginal le plus élevé du contribuable. Pour remédier à ce résultat non souhaité, de nombreuses économies avancées justifient la subvention des revenus des travailleurs à faible salaire à travers des crédits d’impôt. Simplifier le régime fiscal spécial et le système d’imposition des revenus réels Le régime fiscal spécial actuel fait que le système est trop complexe et crée des failles favorisant les regroupements et l’évasion fiscale. Un système de taux forfaitaire et un régime fiscal simplifié sont considérés être les véritables régimes fiscaux spéciaux pour les PME ; cependant, sa structure détaillée pourrait être ajustée pour répondre au double objectif de la mise en place de régimes fiscaux spéciaux : simplifier la mise en conformité et encourager les entrepreneurs à intégrer le filet fiscal. • Le système de taux forfaitaires classe les entrepreneurs individuels en quatre groupes (Tableau 4-7). Le taux de l’impôt libératoire est déterminé par les autorités régionales ou locales, entraînant des disparités et la corruption. En particulier, il n’existe pas dispositions claires sur l’exonération de l’impôt libératoire pour les microentreprises familiales dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 2,5 millions XAF. Un entrepreneur individuel pourrait payer entre 0 et 20 000 XAF. En revanche, une personne physique gagnant moins de 2 millions et bénéficiant de la déduction de base actuelle de l’IRPP de 500 000 XAF, encourt une obligation fiscale de 10 % 49 Khaled Abdel-Kader et Ruud De Mooij. Document de travail du FMI : Tax Policy and Inclusive Growth. WP/20/271. 50 Au taux de change de 1 $ US = 613,67 XAF au 9 novembre 2023. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 82 (pouvant dépasser le maximum de 20 000 XAF dans la Catégorie A). Dans certains cas, les personnes physiques peuvent opter pour le système forfaitaire plutôt que de payer l’IRPP. Les disparités existant dans le traitement de l’IRPP et de l’Impôt sur les sociétés (IS) incitent les entrepreneurs à manipuler la répartition des revenus du travail et du capital afin de réduire au minimum leurs obligations fiscales globales. L’alignement des seuils de la base d’imposition, du taux et de l’exonération pour les microentreprises familiales sur ceux de l’IRPP contribuerait à l’équité du traitement des impôts entre salariés et non-salariés. Proposer des paramètres équivalents à ceux des microentreprises familiales et les aligner sur la base, le taux et l’abattement personnel ou la déduction de base de l’IRPP favoriserait l’équité du système fiscal. Tableau 4-7. Sous-catégories du système à taux forfaitaire Entreprises individuelles Chiffre d’affaires annuel (XAF) Taux de la taxe libératoire (XAF) Catégorie A Inférieur à 2,5 millions 0 - 20 000 Catégorie B Entre 1,5 millions et 5 millions 20 001 - 40 000 Catégorie C Entre 5 millions et 7,5 millions 40 001 - 50 000 Catégorie D Entre 7,5 millions et 10 millions 50 001 - 100 000 • Les entreprises (entrepreneurs individuels ou personnes morales) dont le chiffre d’affaires annuel est compris entre 10 millions et 50 millions relèvent du régime fiscal simplifié (actuellement établi à un impôt sur les sociétés de 25 %). Il est à noter que ce taux d’IS est l’équivalent de celui d’un régime d’imposition des revenus réels applicable aux petites entreprises (à chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions) et aux entreprises de taille moyenne (à chiffre d’affaires annuel compris entre 50 millions et 3 milliards). Pour créer un système plus équitable et encourager la migration volontaire vers le régime standard, le taux du régime fiscal simplifié devrait être sensiblement inférieur à celui appliqué aux entreprises sous le régime d’imposition des revenus réels, réduisant ainsi les activités dans le secteur informel. • Il est essentiel de clarifier le régime fiscal spécial des PME, notamment par rapport au recours à la « taxe libératoire », est essentiel. La méthode actuelle d’évaluation des taux de profit basée sur le chiffre d’affaires, présumé ou réel, manque de précision. Le Cameroun pourrait envisager d’introduire une imposition par présomption fondée sur des indicateurs ou une estimation différenciée du chiffre d’affaires en fonction des différents secteurs d’activité. • La structure de l’IS du Cameroun devrait être revue. Les taux différenciés de l’IS, prévoyant un taux standard de 30 % et un taux inférieur de 25 % (auparavant 28 %) pour les petites et moyennes entreprises (PME), ne sont pas en accord avec les pratiques d’excellence. Le Cameroun devrait envisager d’appliquer un taux réglementaire unique, en révisant éventuellement le taux standard de 30 % afin d’éviter une perte d’efficience, en particulier pour les PME déclarant des bénéfices inférieurs. Les mesures incitatives fiscales en rapport à l’IS devraient également être rationalisées. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 83 Améliorer la qualité des politiques en matière de droits d’accise La réforme des droits d’accise nécessiterait un examen périodique de la base d’imposition et de la structure des taux. L’assiette fiscale devrait être élargie de manière à englober un plus large éventail de sources de carburant et d’énergie, ainsi que de nouveaux produits tels que les boissons sucrées, les pneus et les sacs en plastique. Simultanément, il faudrait rationnaliser les taux de manière à prendre en compte les risques pour la santé publique, la pollution, l’environnement et le climat, tout en générant des recettes supplémentaires. Contrairement à la tendance internationale reposant sur l’utilisation de droits d’accise spécifiques ou d’une combinaison de droits d’accise spécifiques et ad valorem sur les produits du tabac, le Cameroun recourt uniquement aux taxes ad valorem. Les taxes spécifiques sont faciles à administrer, ne nécessitant que la détermination de la quantité à taxer. Cependant, elles comportent des limites : par exemple les recettes ne changent pas en cas d’augmentation des prix (inflation) et les recettes fiscales diminuent en termes réels à moins que les taux d’imposition ne soient indexés. Les droits d’accise ad valorem, en revanche, sont perçus en fonction de la valeur du produit et ne nécessitent pas d’indexation des taux, mais sont plus complexes à gérer. En pratique, pour choisir entre une structure de taux spécifique ou ad valorem, il suffit souvent de peser les avantages administratifs des taxes spécifiques par rapport à la perte potentielle de recettes face à l’inflation, à moins que les taux d’imposition nominaux ne soient indexés et régulièrement ajustés. Les gouvernements dont les capacités en matière d’administration des recettes sont faibles, tels que celui du Cameroun, doivent généralement chercher un compromis entre la simplification et la prévisibilité pour les contribuables, représenté par le passage à des impôts spécifiques, et composer avec les limites d’une telle démarche en termes d’impact sur la performance des recettes à cause l’incapacité à s’adapter aux variations de prix. L’option la plus privilégiée dans la conception moderne des droits en matière d’accises consiste à combiner les deux principes, en appliquant des ajustements périodiques aux taux pour tenir compte de l’évolution des prix. De plus, le Cameroun devrait appliquer des taux de droits d’accise différents aux produits du tabac nationaux et importés. Le Cameroun est en voie d’introduire une taxe carbone. En 2024, le pays prévoit d’introduire une taxe carbone dans le cadre de ses engagements énoncés dans les Contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN) afin de respecter les Accords de Paris en matière d’atténuation de l’impact du changement climatique. Le rapport sur les perspectives économiques de l’Afrique, publié en septembre 2022, prévoyait que le Cameroun libèrerait quatre fois plus d’émissions de carbone d’ici 2043, pour atteindre 15,1 millions de tonnes, à cause des cimenteries et des sociétés d’hydrocarbures. L’introduction de la taxe carbone vise à inciter les pollueurs à réduire leurs émissions de carbone pour éviter une augmentation de l’imposition, en accord avec l’engagement du pays à réduire ses émissions de carbone de 32 % d’ici 2035, tel que déclaré lors de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21) à Paris en 2015. Refonte de la taxe forestière Le Cameroun peut améliorer son régime fiscal forestier en mettant en œuvre une taxation différentielle et une tarification du carbone. Les principaux objectifs des régimes fiscaux Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 84 forestiers sont la génération de recettes et la gestion durable des forêts. À cette fin, le Cameroun devrait élaborer un système complet de taxation différentielle basé sur des pratiques forestières durables, intégrant des systèmes de certification qui imposent des taxes plus élevées sur les exploitations forestières illégales et des taxes plus faibles sur les activités forestières durables. De plus, l’intégration de la tarification du carbone aux politiques nationales de taxation forestière, ainsi qu’une mise en œuvre cohérente, sont cruciales. La mobilisation du secteur privé est essentielle pour améliorer les résultats en matière de taxes forestières, étant donné qu’elle contribue largement à la déforestation. Le secteur formel, en particulier, est une source principale de recettes fiscales forestières et un moteur potentiel du développement industriel local, et joue un rôle central dans la garantie de la bonne gouvernance dans le secteur forestier. Limiter les dépenses fiscales La gestion budgétaire des dépenses fiscales au Cameroun doit être renforcée et consolidée. Actuellement, les dépenses fiscales sont autorisées non seulement dans le code des impôts mais également dans la législation et les procédures sectorielles, ce qui entraîne un manque de cohérence et de contrôle central. Selon les pratiques d’excellence, il faudrait consolider les dépenses fiscales dans le code des impôts sous l’autorité du Ministère des Finances. Le Cameroun doit mettre en place un mécanisme systématique pour assurer le suivi des recommandations présentées dans le Rapport annuel sur les dépenses fiscales. Actuellement, les dépenses fiscales sont engagées d’une manière trop large et sans discernement, profitant à de nombreuses entreprises et secteurs économiques, et faisant que la mise en conformité fiscale est difficile tandis que l’administration des recettes est lourde et coûteuse. Par exemple, il existe plus de 100 mesures en rapport à l’amortissement des moyens de production dans l’IS, les taux variant de 5 à 50 %. Dans le secteur agricole, environ 190 à 200 types d’équipements ou de matériels sont exonérés de la TVA. Pour rationaliser et renforcer l’efficience, le Cameroun devrait limiter strictement la portée des exonérations aux seules celles décrites dans la directive CEMAC 07/11-UEAC-028-CM-22, même si le pays présente une bonne performance en matière de recettes de TVA. De plus, l’intégration de l’accès aux dépenses fiscales au cadre budgétaire à moyen terme (CBMT) devrait être renforcée et des clauses de temporisation des dispositions existantes en matière de dépenses fiscales devraient être mises en œuvre. Le Cameroun pourrait envisager des mesures fiscales incitatives basées sur les coûts plutôt que sur les bénéfices. Les mesures incitatives fiscales peuvent être améliorées en mettant l’accent sur la réduction du coût d’investissement plutôt que sur l’octroi d’un allègement de l’impôt sur les bénéfices. De nombreux pays avancés encouragent la recherche et le développement (R&D) à travers des crédits d’impôt spéciaux ou des super déductions, reconnaissant les effets positifs de la R&D sur la croissance à long terme. Selon les expériences vécues par d’autres pays, il serait préférable de fournir un appui en rapport aux aspects des coûts afin d’éviter de subventionner des entreprises déjà rentables et d’axer les dépenses fiscales sur des secteurs spécifiques en se basant sur une évaluation des avantages marginaux. Simplifier les exonérations fiscales dans les aspects des coûts peut également alléger la charge des contrôles fiscaux. Les mesures incitatives fiscales à l’investissement qui réduisent directement le coût de l’investissement, telles que les crédits d’impôt à l’investissement, l’amortissement accéléré Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 85 ou la comptabilisation pure et simple en charges de l’investissement, génèrent davantage d’investissement par dollar dépensé.51 Pour garantir l’efficacité des mesures incitatives à l’investissement et éviter qu’elles ne deviennent contre-productives, il est important de les cibler plus efficacement. La loi actuelle n° 2013/04 du 18 avril 2013, qui instaure les mesures incitatives à l’investissement privé, définit trois catégories d’investissements bénéficiant de modalités exceptionnelles pendant les phases de création et d’exploitation, dont une pour les entreprises existantes. Cependant, cette loi, principalement extérieure au Code des impôts, constitue une menace pour la mobilisation des recettes à cause des risques de planification fiscale. Pour résoudre ce problème, il est recommandé, entre autres, de limiter la portée des régimes d’investissement aux entreprises seulement ; faire respecter la stricte application de la loi sur les mesures incitatives à l’investissement, excluant les investissements dans des activités existantes afin de prévenir la concurrence déloyale ; et améliorer la fluidité et la transparence des principales procédures administratives pour toutes les activités économiques. Ces améliorations sont essentielles pour inspirer confiance aux investisseurs s’engageant sur le marché. Accélérer la réforme de la fiscalité foncière Le Cameroun doit de toute urgence réformer la structure et le recouvrement de ses impôts fonciers. Les réformes devraient viser à élargir l’assiette fiscale ainsi qu’améliorer l’évaluation des propriétés, la facturation, le recouvrement, l’application et les services aux contribuables. Les modifications à apporter aux politiques fiscales devraient être orientés sur la définition de l’assiette fiscale, l’évaluation de la valeur des propriétés, l’établissement de taux d’imposition appropriés et la mise en œuvre de politiques en rapport aux abattements et allégements fiscaux, au recouvrement des impôts et à l’application des lois. L’administration fiscale, quant à elle, devrait mettre l’accent sur l’élargissement de l’assiette fiscale, l’affinage de l’évaluation des propriétés, l’évaluation des obligations fiscales et l’amélioration des processus de recouvrement tout en offrant de meilleurs services aux contribuables. Pour mener à bien une réforme de la taxe foncière, il est nécessaire de collaborer avec les conseils locaux. En tirant parti des réformes du Ministère des Finances dans le domaine des TIC, une interface peut être mise en place avec le Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières pour faciliter l’identification des propriétés. Les stratégies visant à améliorer la couverture et la collecte d’informations devraient être en accord avec les initiatives dans le domaine des TIC du gouvernement, y compris la communication, les options de paiement à distance sécurisées et la délivrance de reçus. Des mesures incitatives devraient être introduites pour encourager la mise en conformité et le paiement des arriérés, telles que des plans de paiement flexibles et une remise partielle des pénalités pour ceux qui règlent leurs dettes principales en un seul paiement. Pour garantir l’équité et l’efficacité, la politique actuelle d’évaluation volontaire des propriétés devrait être maintenue, mais des évaluations préalables à la déclaration devraient être menées pour les propriétés de grande valeur dans les quartiers d’affaires et les quartiers diplomatiques. De plus, des déclarations de revenus à valeurs de propriété préremplies devraient être fournies aux contribuables. 51 FMI, OCDE, Banque mondiale and ONU, 2015, Options for Low Income Countries’ Effective and Efficient Use of Tax Incentives for Investment. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 86 4.4.2 Considérations en matière de réforme de l’administration fiscale Les administrations fiscales modernes visent à recouvrer efficacement les recettes, à réduire au minimum les coûts administratifs et de mise en conformité, et à traiter les contribuables équitablement. Les systèmes les plus efficaces encouragent la plupart des contribuables à se mettre en conformité volontairement, permettant ainsi aux agents du fisc de se concentrer sur les personnes en situation de non-conformité. Un recouvrement des impôts mené à bien repose sur la performance de l’administration fiscale dans différents domaines, notamment la gestion des ressources humaines, les contrôles internes visant à prévenir la corruption, les activités du Trésor, ainsi que l’éducation et la sensibilisation des contribuables. Malgré les efforts déployés par le Cameroun pendant la dernière décennie pour moderniser ses systèmes informatisés d’administration fiscale, le faible rapport coût sur recettes du recouvrement des impôts reste préoccupant. Pour résoudre ce problème, les autorités devraient procéder à une évaluation complète des allocations budgétaires destinées à la production de recettes et revoir les principales mesures administratives fiscales. Cette évaluation pourrait être menée séparément ou dans le cadre d’examens futurs tels que le TADAT ou d’une SMTR. Ces dernières années, le Cameroun a lancé une série de réformes de l’administration fiscale pour améliorer la conformité des contribuables et le recouvrement des recettes. Ces réformes comprennent la publication en ligne du registre national des contribuables, la mise en œuvre de la déclaration en ligne des revenus, l’introduction des déclarations préremplies, la mise en place de plusieurs réformes de l’impôt foncier, la redéfinition des stratégies de contrôle fiscal et la numérisation du processus de contentieux fiscal. Alors que ces efforts visent à accroître l’efficience, la bonne gouvernance et la transparence de l’administration publique, plusieurs défis persistent. Pour résoudre ces problèmes, il faut renforcer la capacité et la connectivité, promouvoir la synergie entre les différentes plateformes numériques et former les agents de recouvrement des impôts et les contribuables pour qu’ils puissent s’adapter efficacement aux réformes numériques. • Refondre le processus métier. La DGI et la DGD pourraient envisager de renforcer les fonctions essentielles de l’administration fiscale, en particulier l’enregistrement des contribuables, le service aux contribuables, le contrôle fiscal, la gestion des arriérés et les recours fiscaux (Graphique 4-40). Pour gérer la mise en conformité volontaire, il faut trouver un juste équilibre entre la robustesse des mesures d’exécution (contrôle fiscal, recouvrement et gestion des arriérés) et l’amélioration des services aux contribuables. L’amélioration du contrôle fiscal fondé sur le risque et son application au contrôle fiscal du remboursement de la TVA contribueraient à la réalisation d’un double objectif : (1) prévenir les demandes de remboursement frauduleuses pour préserver les recettes ; et (2) atténuer les effets négatifs sur la trésorerie des entreprises et réduire au minimum les répercussions en cascade. De même, la fonction du recours fiscal devrait être examinée pour garantir l’équité. L’identification complète et exacte des nouveaux contribuables, ainsi que la vérification efficace de la légitimité des radiations, constituent les fondements essentiels pour établir une base de données fiable et consolidée sur les contribuables. La fiabilité constitue la base de l’amélioration de la comptabilité, du contrôle, du recouvrement et de la gestion des arriérés fiscaux. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 87 Graphique 4-40. Fonctions essentielles des Centres des impôts Enregistrement des Processus de Gestion des arriérés Contrôle fiscal Recours fiscaux contribuables déclaration • Enregistrement • Traitement et • Lancement de • Promotion de la • Processus et initial d’un examen des la stratégie de mise en conformité réglements pré- particulier formulaires de gestion de la dette volontaire judiciaires • Enregistrement déclaration fiscale • Mise à jour du • Détection des cas • Droit d’appel initial d’une • Réception par registre des de non conformité auprès d’un forum nouvelle entreprise voie électronique paiements des au niveau des indépendant • Délivrance du NIU des déclarations contribuables contribuables • Suivi des cas de • Mise à jour des déposées et • Enregistrement particuliers litige enregistrements sur délivrance et classification • Réalisation de • Publication des les contrbuables d’un récépissé des arriérés par contrôle fiscal et décisions des • Archivage du électronique pour ancienneté, d’enquête sur les tribunaux registre principal chaque déclaration importance et fraudes des contribuables en ligne segment de • Centralisation • Processus de • Traitement des contribuable des critères de radiation déclarations • Mise à exécution sélection des fiscales (y compris du recouvrement risques de contrôle les déclarations des arriérés et ciblant les les plus modifiées) pour radiation des élevés de fausse toutes les taxes dettes non déclaration principales recouvrables Source : Conception des services de la Banque mondiale. • Renforcer la numérisation et l’informatisation. Le Cameroun a réalisé des progrès dans le développement et l’intégration des systèmes informatiques dans le cadre de ses initiatives de modernisation de l’administration fiscale. Cependant, il est crucial que les autorités veillent à ce que ces outils soient conformes aux normes établies par l’OCDE. Le gouvernement pourrait établir des partenariats avec des entités du secteur privé pour exploiter des outils technologiques tels que l’analyse de données en utilisant l’intelligence artificielle (IA), les mégadonnées, un entrepôt de données centralisé et la technologie chaîne de blocs pour les transactions numérisées. Par exemple, des systèmes de facturation électronique obligatoire de la TVA pour les grandes entreprises pourraient être mis en œuvre, simplifiant ainsi l’administration de la TVA et permettant une utilisation beaucoup plus efficace des crédits sur les intrants (Encadré 4-11). • Améliorer la collaboration pour lutter contre la fraude fiscale. Le Cameroun devrait s’efforcer d’intégrer les informations sur les contribuables et de favoriser une collaboration étroite entre les administrations douanières et fiscales. La mise en œuvre de procédures efficaces de contrôle et de suivi des exonérations au sein des douanes, appuyée par une collaboration à travers la plateforme « FUSION » entre la DGI et la DGD, est vitale. Cela inclurait la migration des dossiers, la création d’une base de données unifiée des contribuables et la fusion des systèmes de paiement fiscal et de dédouanement. Le renforcement des contrôles et l’échange d’informations entre ces autorités permettraient de cerner les incohérences et d’empêcher les fraudes fiscales. De plus, la mise en œuvre de l’identification biométrique des contribuables, le renforcement des processus d’évaluation en douane et l’optimisation des Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 88 procédures de contrôle au sein des douanes amélioreraient encore la conformité. Un rapprochement régulier entre ces deux administrations est essentiel pour consolider efficacement ces efforts de lutte contre la fraude et la contrebande. • Réduire et formaliser le secteur informel. Pour améliorer la compréhension des activités du secteur informel, une approche holistique est nécessaire, comprenant une révision de la portée actuelle de la fiscalité et allant de la simplification des politiques fiscales au renforcement de l’administration fiscale. Cette révision devrait viser à : (1) garantir une fiscalité juste et simple pour les PME. Le code des impôts sur les revenus au Cameroun est très complexe et constitue une barrière à l’entrée pour les PME informelles ; (2) étudier la possibilité d’utiliser des mécanismes de retenue à la source pour les agents du secteur informel. Par exemple, des pays tels que le Gabon et le Malawi ont mis en place respectivement un droit de douane de cinq % et une retenue à la source de trois % sur les biens et services importés par des particuliers ou des entreprises non enregistrés comme assujettis à la TVA. Plusieurs pays de l’AfSS ont mis en place des retenues à la source sur les revenus de différents services, revenus de location ou services d’entrepreneurs ; et (3) intégrer la bonne gouvernance des entreprises, le marché du travail et les mesures fiscales. Encadré 4-11. Expérience internationale du recours à la facturation électronique obligatoire pour la TVA De nombreux pays dans le monde exigent que toutes les transactions assujetties à la TVA soient facturées par voie électronique (e-invoicing). Le Mexique et la Corée du Sud ont été parmi les premiers pays à introduire cette exigence en 2011, et de nombreux autres pays tels que l’Indonésie (2016) et l’Inde (2020) ont suivi, tandis que d’autres pays tels que les Philippines, la Thaïlande et le Vietnam travaillent sur la mise en place de tels systèmes. Corée du Sud : L’utilisation de la facturation électronique de la TVA a débuté en tant qu’option en 1997 avant de devenir obligatoire pour toutes les entreprises, à l’exception des petites entreprises, en 2011. Cette mesure a réduit la charge administrative en rapport à la déclaration de la TVA, ce qui a permis aux entreprises de réaliser des économies estimées à environ 0,8 milliard USD par an. Les facteurs de réussite étaient les suivants : (i) l’administration publique a appuyé la normalisation et la certification de la normalisation de la facturation électronique avant qu’elle ne devienne obligatoire ; (ii) les PME ont bénéficié de mesures incitatives fiscales les encourageant à mettre en place les systèmes informatiques nécessaires, et encourraient des pénalités en cas de non-transmission des factures électroniques ou de transmission tardive des factures électroniques à l’administration fiscale ; et (iii) l’exigence a été étendue progressivement aux petits contribuables. Mexique : Le gouvernement a rendu obligatoire l’utilisation de factures électroniques avec déclaration en ligne et en temps réel aux autorités fiscales en 2011 pour les gros contribuables. Cette exigence a par la suite été élargie à toutes les entreprises dont les revenus annuels sont supérieurs à 325 000 USD. Les contribuables qui émettent ou utilisent des factures électroniques non conformes à la réglementation s’exposent à des sanctions légales pour fraude fiscale, qui comprennent des amendes, la perte de la patente et/ou des peines de prison, selon l’importance de l’infraction. Indonésie : En 2014, l’Indonésie a élaboré une base juridique pour les factures électroniques, et les factures électroniques sont devenues obligatoires pour toutes les entreprises en 2016. Le recours à la facturation électronique a contribué à réduire l’incidence des fausses factures et des demandes frauduleuses de remboursement de TVA, augmentant ainsi les recettes de TVA. Les entreprises doivent utiliser un logiciel fourni par la Direction Générale des Impôts et recevoir un « e-certificat ». Source : KPMG et autres ressources 2021. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 89 Tableau 4-8. Recommandations pour améliorer la mobilisation des recettes fiscales Objectif Actions recommandées Chronologie La politique fiscale Assurer la stratégie Adopter et mettre en œuvre une stratégie de revenus à Court terme et la coordination moyen terme (SRMT) axée sur une fiscalité inclusive, large et durable. DGI/DGD/MINFI de la réforme de la politique fiscale Établir un seuil d’impôt (exonéré) en dessous duquel le Court à moyen revenu des personnes physiques n’est pas imposé. terme Renforcer la Augmenter la progressivité de l’impôt sur les salaires, en Court à moyen progressivité des augmentant les taux pour les plus hauts revenus et en les DGI/DGD/MINFI terme impôts sur le revenu réduisant pour les plus bas. MINEPAT, API des personnes physiques Revoir les régimes fiscaux spéciaux pour les PME (petites Court à moyen entreprises). terme Harmoniser les taux d’accises entre la production locale Court à moyen et les biens importés. terme Réduire la liste des produits soumis à accises à la liste Court à moyen des produits soumis à accises incluse dans la directive terme CEMAC de 2011. Rationaliser les droits DGI/DGD/MINFI d’accise Ajustez automatiquement les accises spécifiques sur le Court à moyen tabac en fonction de l’inflation. terme Lancer une analyse approfondie du régime des droits Moyen à long d’accise. terme Examiner la politique d’impôt foncier, notamment en Court à moyen définissant l’assiette fiscale, en évaluant la valeur des terme propriétés et en fixant les taux d’imposition appropriés. Accélérer la réforme de l’impôt foncier Limiter à court terme et supprimer à moyen et long terme Court à moyen l’exonération de taxe foncière accordée aux structures DGI/MINFI terme pour financer les CTDs utilisées comme usines ou entrepôts. Revoir les voies de recours post évaluation des Moyen à long propriétés. terme Réviser la structure des taux et établir des systèmes de Court à moyen certification pour imposer des taxes plus élevées sur terme l’exploitation forestière illégale et réduire les taxes sur les Repenser la fiscalité opérations forestières durables. forestière pour DGI/MINFI soutenir les objectifs environnementaux Intégrer la tarification du carbone dans les politiques Moyen à long nationales de fiscalité forestière et garantir une mise en terme œuvre coherente. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 90 Objectif Actions recommandées Chronologie Réviser le Code des investissements de 2013 (loi n° Court à moyen 2013/004) pour réduire et rationaliser les incitations terme fiscales à l’investissement privé vers les secteurs prioritaires et uniquement ceux ayant des rendements économiques positifs. Réduire le champ des exonérations conformément aux Court à moyen directives CEMAC 2022 puis conformément au Code des terme impôts Réduire les dépenses fiscales pour limiter DGI/DGD/MINFI les pertes de recettes Faire du Code des impôts le seul fondement juridique Moyen à long des dépenses fiscales. terme Intégrer la rationalisation des dépenses fiscales dans le Moyen à long cadre des programmes de réforme fiscale plus larges du terme MTRS. L’administration fiscale Créer une base de données des contribuables individuels Court à moyen complète avec une ventilation par tranche de revenu. terme Intégrer dans cette base de données un système d’audit Court à moyen de l'accès des utilisateurs et des modifications apportées terme aux données d'enregistrement des contribuables. Fournir un accès en ligne sécurisé aux entreprises et Court à moyen aux particuliers pour s'inscrire et, une fois enregistrés, terme pour mettre à jour les détails contenus dans la base de données (par exemple, l'adresse postale ou Enregistrement professionnelle d'un contribuable). des contribuables : Etablir et maintenir DGI/MINFI une base de données à jour et complète Réduire le risque de doublons ou d’enregistrements Court à moyen des contribuables. contradictoires pour les entreprises et les particuliers. terme Fournir des informations spéciales pour les Moyen à long créations d'entreprises par l'intermédiaire des unités terme d'enregistrement des bureaux des impôts, ainsi qu'en coopération avec d'autres agences gouvernementales. Effectuer des évaluations préalables à la déclaration Moyen à long pour les propriétés de grande valeur dans les quartiers terme d'affaires et les quartiers diplomatiques et fournir aux contribuables des déclarations de revenus pré-remplies avec la valeur des propriétés. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 91 Objectif Actions recommandées Chronologie Rationaliser le dépôt des déclarations fiscales et faciliter Court à moyen les mécanismes efficaces de traitement des paiements terme pour les contribuables grâce à des déclarations de revenus simplifiées. Introduire des mesures visant à réduire les coûts de Court à moyen conformité pour les contribuables (par exemple, des terme exigences simplifiées en matière de tenue de registres et de déclaration pour les petites entreprises ; le pré-remplissage des déclarations fiscales et/ou des systèmes qui éliminent la nécessité de les déclarer ; des installations téléphoniques et en ligne automatisées, y compris via des plateformes mobiles) Adopter l’utilisation obligatoire des systèmes de Court à moyen facturation électronique de TVA pour les grandes terme entreprises. Développer la numérisation (y compris les échanges Moyen à long automatiques d’informations, la facturation électronique terme et le pré-remplissage des déclarations fiscales) pour réduire les coûts de conformité. Déclarations fiscales et paiements : Mettre Renforcer le cadre institutionnel permettant l'échange de Moyen à long en place des centres données avec les entreprises collectant des informations terme des impôts dédiés sur les contribuables telles que les fonds de pension, les compagnies d'électricité et d'eau. DGI/DGD/MINFI à la facilitation de la déclaration et du paiement des Enrichir et adapter le système de dépôt électronique des Moyen à long impôts. déclarations en fonction des besoins des contribuables terme de chaque segment. Établir un portail sur la législation fiscale, un centre Court à moyen d’appels efficace et une brochure d’orientation. terme Utiliser un contrôle basé sur les risques pour identifier Court à moyen rapidement la sous-déclaration. terme Renforcer les capacités des intermédiaires fiscaux Moyen à long engagés dans la préparation et le dépôt des déclarations terme fiscales. Fournir et promouvoir l’utilisation d’outils de déclaration Moyen à long électronique pour tous les impôts de base. terme Améliorer les processus de collecte de l’impôt foncier Moyen à long en améliorant la couverture et la collecte d’informations terme via l’alignement sur les initiatives TIC du gouvernement, y compris la communication, les options de paiement à distance sécurisées et la génération de reçus. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 92 Objectif Actions recommandées Chronologie Renforcer la collaboration entre les douanes et les impôts Court à moyen pour partager toutes les informations disponibles et terme contrôler efficacement la fraude. Renforcer la Renforcer la capacité de l’administration fiscale (en Moyen à long collaboration entre particulier pour la collecte des taxes d’accise) au niveau terme DGI/DGD/MINFI/ les agences fiscales des municipalités. MINDEVEL et avec les autorités infranationales Établir une interface TIC avec le Ministère des Domaines, Moyen à long du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF) pour terme faciliter l’identification et l’évaluation des propriétés en vue du paiement de l’impôt foncier. Élaborer des stratégies efficaces pour gérer les arriérés Court à moyen d’impôts. terme Améliorer l’approche basée sur les risques pour la Court à moyen sélection des cas de contrôle fiscal, en se concentrant terme sur les segments de contribuables présentant des risques élevés de non-conformité. Réviser les voies de recours en matière fiscale pour offrir Court à moyen aux contribuables un mécanisme de règlement des terme Gestion des arriérés différends facilement accessible et efficace. / Contrôle fiscal / Recours fiscaux. Créer une unité dédiée avec un personnel spécialisé, Moyen à long Créer une unité formé et à temps plein pour appliquer des stratégies terme dédiée à la gestion adaptées et orientées vers le débiteur en matière de la dette fiscale DGI/DGD/MINFI d'exécution et de recouvrement des créances. et réorganiser le processus de contrôle fiscal pour Soutenir les opérations d’audit avec des systèmes Moyen à long améliorer la gestion informatiques consolidés et automatiser le sous-système terme de la dette fiscale. de gestion des cas d’audit qui attribue les cas d’audit, surveille les progres enregistrés, enregistre les décisions, stocke les documents de travail et les données et génère des rapports de gestion. Introduire des incitations au respect de l’impôt foncier Moyen à long et au paiement des arriérés, telles que des plans de terme paiement flexibles et une remise partielle des pénalités pour ceux qui règlent leurs dettes en un seul paiement. 93 5 ALLOCATION ET EXÉCUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 94 5.1 Allocation budgétaire Compte tenu des niveaux relativement faibles de dépenses publiques globales du Cameroun à la suite de l’ajustement budgétaire entamé depuis 2016, le pays a alloué une part nettement plus importante à l’investissement et une part légèrement inférieure aux prestations sociales que les pays comparatifs. La structure des dépenses du Cameroun diffère de celles des pays de comparaison, dépensant beaucoup plus en investissement public (31,6 % des dépenses publiques) que ses pairs structurels ou aspirationnels (19,4 et 12,9 %, respectivement), que tous les PRITI (17,7 %), et que l’AfSS dans son ensemble (18,6 %) sur la période de 2015 à 2021. Sur la même période, le pays a dépensé moins en prestations sociales (6,2 % des dépenses) que tous ses pairs, sauf ses pairs structurels (5,4 %), que tous les PRITI (qui consacrent 12,1 % de leurs dépenses aux prestations sociales) et que ses pairs aspirationnels (qui dépensent 15,9 %) (Graphique 5-1). Graphique 5-1. Dépenses publiques par catégorie, Cameroun et groupes de pays (% des dépenses), moyenne 2015-2021 35 % 30 % 25 % Masse salariale 20 % Biens et services Dépenses de capital Paiements d'intérêts 15 % Prestations sociales Subventions 10 % Autres 5% 0% Cameroun Pairs aspirationnels Pairs structurels PRITI AfSS Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Si l’on se réfère à une définition simple, la rigidité budgétaire semble poser moins de problèmes au Cameroun qu’à ses pays comparatifs. La rigidité des dépenses désigne la faiblesse de capacité du gouvernement à modifier le niveau ou la structure de son budget dans un délai d’un à trois ans à cause d’obligations contractuelles, de contraintes juridiques ou réglementaires ou de faiblesses institutionnelles. La rigidité budgétaire limite la capacité du gouvernement à modifier l’importance et la structure du budget public à court terme. Une définition simple qui permet des comparaisons entre pays repose sur Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 95 des composantes budgétaires généralement rigides : salaires publics, retraites et service de la dette.52 Selon cette définition, le budget du Cameroun semble relativement flexible. Le Cameroun dépense moins en salaires et en intérêts sur la dette que ses pairs, et à peu près autant en retraites payées. De 2015 à 2021, le Cameroun a alloué en moyenne 4,5 % de son PIB aux salaires et rémunérations du secteur public, tandis que les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et l’Afrique subsaharienne présentaient des moyennes plus élevées de 6 % et 7 % respectivement, et que les pairs aspirationnels et structurels du Cameroun ont dépensé en moyenne 6,4 et 6,1 % de leur PIB, respectivement (Graphique 5-2). De même, les dépenses au titre des paiements d’intérêts étaient en moyenne nettement inférieures au Cameroun, même si les récentes augmentations des paiements d’intérêts - le pays empruntant davantage pour financer de grands projets d’infrastructures - mettent en évidence l’alourdissement du fardeau du service de la dette à cause de l’augmentation des engagements envers les créanciers bilatéraux et commerciaux (Graphique 5-3). Le niveau du fardeau du système de retraite du Cameroun se situe à peu près dans la moyenne de ceux des pays similaires, la variabilité étant importante entre les pairs aspirationnels mais aussi les pairs structurels (Graphique 5-4). Dans le système de retraite du Cameroun, les obligations au titre des pensions de retraite des militaires représentent 70 % du déficit des retraites. Graphique 5-2. Masse salariale, Cameroun et pays de Graphique 5-3. Paiements d’intérêts, Cameroun et pays de comparaison (% PIB), moyenne 2015–21 comparaison (% PIB), moyenne 2015–21 8,00 7 7,00 6 6,00 5 5,00 4 % du BIP % du BIP 4,00 3 3,00 2 2,00 1 1,00 0,00 0 AGO COD UGA AGO CMR COD RWA RWA TZA MRT ETH KEN SEN UGA CMR RWA RWA TZA MRT ETH KEN SEN Pairs aspirationnels Pairs structurels Pairs aspirationnels Pairs structurels Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. 52 Munoz, Ercio and Olaberria, Eduardo, Are Budget Rigidities a Source of Fiscal Distress and a Constraint for Fiscal Consolidation? (6 août 2019). Document de travail de recherche sur les politiques de la Banque mondiale n° 8957, disponible sur SSRN: https ://ssrn. com/abstract=3433463 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 96 Graphique 5-4. Paiements de pensions, Cameroun et pays de Graphique 5-5. Biens et services, Cameroun et pays de comparaison (% du PIB), moyenne 2015–21 comparaison (% du PIB), moyenne 2015–21 2,5 8 7 2 6 1,5 5 % du BIP % du BIP 4 1 3 2 0,5 1 0 0 CMR SEN KEN RWA UGA COD MRT AGO ETH TZA RWA CMR SEN KEN RWA UGA COD MRT AGO ETH TZA RWA Pairs aspirationnels Pairs structurels Pairs aspirationnels Pairs structurels Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Les mesures prises par le Ministère des Finances ont fait que les dépenses salariales, sans prise en compte des indemnités et perdiems, sont restées stables entre 2016 et 2021. La part des dépenses publiques consacrée aux salaires et traitements a légèrement varié entre 2016 et 2021, représentant en moyenne 4,5 % du PIB (Graphique 5-6). La masse salariale a été contenue suite à la mise en œuvre de mesures comprenant : (i) la mise en œuvre du Comptage Physique du Personnel de l’État, achevé en 2019, qui a généré environ 0,15 % du PIB d’économies budgétaires annuelles ; (ii) la constitution de provisions pour plus de 3 % du PIB d’arriérés injustifiés ; (iii) un audit pour identifier les fonctionnaires et retraités décédés, ayant générant une économie ponctuelle de 0,05 % du PIB ; (iv) une révision visant à réduire les bénéficiaires de pensions d’invalidité, générant une économie annuelle de 0,05 % du PIB ; (v) la mise à jour de la liste des fonctionnaires aux postes consulaires et diplomatiques, ayant généré une économie ponctuelle de 0,06 % du PIB. Néanmoins, les dépenses salariales n’incluent pas les indemnités, y compris les indemnités journalières distribuées aux fonctionnaires. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 97 Graphique 5-6. Dépenses publiques par classification économique (en % du PIB), 2016-2021 0,25 0,2 0,15 0,1 0,05 0 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Masse salariale Biens et services Transferts et Subventions Investissements Paiements d'intérêts Remarques : Le service de la dette comprend les paiements d’intérêts et d’amortissement. Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Même si les dépenses globales en biens et services sont restées stables sur la période 2016-2021, une trop grande partie de ces dépenses a été consacrée à la représentation et aux services externes. Exprimées en part du PIB, les dépenses en biens et services n’ont pas beaucoup varié au cours des sept dernières années, représentant en moyenne 3,9 % (Graphique 5-6). Cependant, parmi ces dépenses en biens et services, malgré les recommandations précédentes visant à réduire les dépenses de représentation et de services externes (dans le PER de 2018), ces catégories de dépenses sont restées élevées, continuant à représenter ensemble plus de la moitié de tous les biens et services (même si en 2021 elles ont connu une légère diminution, passant à 43 %, les frais de représentation représentant 16 % tandis que les services externes représentaient 27 %) (Tableau 5-1). Les services externes relevant de la ligne 618 comprennent principalement des dépenses telles que les assurances, les abonnements et l’utilisation du téléphone, les abonnements à des sites web et l’utilisation d’Internet, les frais d’envoi, les valises diplomatiques, les honoraires et frais annexes, ainsi que les frais de formation, de stage et d’organisation de séminaire. Ces dépenses pourraient être qualifiées de dépenses récurrentes. Ces dépenses présentent un chevauchement avec certaines dépenses incluses dans les coûts de fonctionnement. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 98 Tableau 5-1. Dépenses en biens et services par type (parts en %), 2015-21 2015 2016 2017 2018 2018 2020 2021 Biens et services 100 100 100 100 100 100 100 Fournitures et entretien courant 23,6 21,4 24,4 21,9 20,5 20,3 26,1 Fournitures et équipements 7,5 5,1 6,7 5,4 6,0 7,5 9,2 techniques Carburants et lubrifiants 6,7 4,6 4,5 5,0 4,7 4,5 6,0 Coûts de transport 3,1 3,1 2,3 3,0 2,1 1,4 2,0 Eau, électricité, gaz et autres coûts 2,8 10,2 10,0 3,3 3,2 3,1 4,6 énergétiques Location 1,8 1,7 2,1 2,1 2,0 2,4 4,1 Maintenance et sécurité 4,2 3,6 3,2 3,8 3,2 3,1 5,2 Frais de représentation, de mission et 18,1 17,9 16,7 14,3 15,8 13,4 15,8 de cérémonie Services externes 32,3 32,5 30,0 41,1 42,3 44,2 27,0 Entretien des routes et des 0,1 0,0 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 infrastructures Source : BOOST, MINFI. Dans l’ensemble des autres catégories économiques de dépenses, la baisse des dépenses d’investissement depuis 2016 a été en partie compensée par une forte hausse du service de la dette et par une augmentation des subventions et des transferts. Les dépenses d’investissement ont diminué régulièrement, passant de 7,5 % du PIB en 2016 à 4,5 % en 2021, en partie à cause de l’achèvement des projets en rapport à la Coupe d’Afrique des Nations 2021, compétition internationale de football masculin, puis de retards en rapport à la pandémie dans les projets d’infrastructure (Graphique 5-6). Au cours de la même période, le service de la dette a considérablement augmenté, passant de 2,3 % du PIB en 2016 à 4,8 % en 2021 où il représentait la plus importante des cinq catégories de dépenses économiques du budget de l’État. Entre 2016 et 2021, le Cameroun a connu une augmentation notable des dépenses en subventions et transferts, qui sont passées de 1,9 % du PIB en 2017 à 3,0 % en 2021, sous l’effet de la variation des subventions aux carburants et des bourses d’études ainsi que d’une augmentation du nombre de retraités couverts. Le Cameroun continue de consacrer une part importante des dépenses publiques à l’administration publique générale et relativement peu aux secteurs sociaux, notamment à la santé. Selon la classification fonctionnelle du budget, en 2021, l’allocation Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 99 de l’administration générale et financière - qui englobe l’administration territoriale, les affaires financières et budgétaires, la planification et les statistiques, le personnel administratif et les services généraux - représentait 24,7 % du budget de l’État. Ce niveau de dépenses administratives est élevé par rapport à ceux des pays de comparaison de la région, mais plus typique des exportateurs de pétrole, en particulier en Afrique subsaharienne. En comparaison, les dépenses consacrées à l’éducation, à la santé et à la protection sociale ont légèrement augmenté, passant de 20,4 % des dépenses publiques en 2019 à 23,4 % en 2021. Les dépenses d’éducation représentaient plus de 15 % du budget de l’État, alors que les dépenses de santé ne comptaient que pour 5,7 % en 2021 (même après une augmentation de 50 % par rapport à 2019). Le budget du Cameroun est fortement centralisé, même si une grande partie de ces dépenses centralisées sont destinées aux retraites et au service de la dette. Le Ministère des Finances (MINFI) et le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT) jouent un rôle important dans la gestion de plus de 40 % du budget du Cameroun, y compris certaines lignes budgétaires allouées aux dépenses sectorielles (par classification administrative) (Tableau 5-2). La part du budget non explicitement allouée à un ministère ou à un organisme public spécifique a augmenté pour atteindre en moyenne 40,7 % des dépenses publiques entre 2015 et 2020, contre en moyenne 35,4 % entre 2006 et 2015. Ces dépenses centralisées, gérées par le MINFI53 et le MINEPAT, comprennent le service de la dette extérieure et intérieure, les retraites et les transferts aux collectivités décentralisées, qui représentaient en 2020 la moitié du total. Tableau 5-2. Composition administrative des dépenses (% du total), 2015-20 et moyenne 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Moyenne Ministères, institutions et 62,0 64,0 62,8 54,6 55,5 56,7 59,3 administration publique Dépenses centralisées, dont : 38,0 36,0 37,2 45,4 44,5 43,3 40,7 Retraites 5,2 5,2 5,3 4,4 4,5 5,6 5,0 Dette publique extérieure 3,1 7,0 6,6 8,0 10,2 8,5 7,2 Dette publique intérieure 9,4 5,9 5,4 12,1 9,6 7,7 8,3 Subventions 8,3 3,5 3,5 5,1 7,7 4,7 5,5 Common expenses 5.8 7.6 9.9 9.5 9.4 13.1 9.2 Source : BOOST, MINFI 53 Le Ministère des Finances (MINFI) est composé de quatre directions générales : la DGI, la DGD, la Direction Générale du Budget (DGB) et la Direction Générale du Trésor, de la Coopération Financière et Monétaire (DGICFM). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 100 La part élevée du budget allouée aux « dépenses communes  » compromet la transparence et la redevabilité budgétaires. Les dépenses communes, classées au Chapitre 65 du budget de l’État, sont gérées de manière centralisée par le Directeur Général du Budget et couvrent différents types de dépenses dans différents services administratifs. Au cours de la période 2015-2020, les dépenses communes représentaient en moyenne 6,4 % des dépenses totales (Tableau 5-2). Ces fonds sont à l’origine d’une grande partie des écarts excessifs entre les allocations budgétaires initiales, les allocations budgétaires révisées et les dépenses effectives (voir Encadré 5-1). De plus, les dépenses communes comprennent certaines dépenses telles que les indemnités journalières ou les frais de déplacement qui sont classées sous la rubrique des biens et services au lieu de celle des « dépenses de fonctionnement ». Encadré 5-1. Part élevée des dépenses communes Pendant la période 2015 à 2020, les dépenses communes représentaient en moyenne 6,4 % du total des dépenses budgétisées dans la loi de finance initiale. Ce pourcentage a fluctué, atteignant un minimum de 5,7 % en 2016 et un maximum de 7,7 % en 2018. En revanche, les dépenses communes comptaient en moyenne pour 9,3 % dans la loi de finance rectificative et pour 9,0 % du total des dépenses affectées à chaque année financière de cette même période. La part des dépenses communes augmente régulièrement entre la loi de finance initiale et la loi de finance modifiée. En conséquence, les taux d’exécution des dépenses communes, par rapport aux lois de finance initiales, étaient en moyenne de 137 % sur la période 2015-2020, un pic de 200 % étant atteint en 2020. Graphique 5-7. Dépenses communes exprimées en pourcentage des dépenses totales 0,14 0,12 0,1 0,08 0,06 0,04 0,02 0 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Budget initial Budget révisé Engagements Source : Autorités camerounaises, calculs des services de la Banque mondiale Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 101 Les dépenses en biens et services, en moyenne, représentaient 78,5 % du total des dépenses communes de 2015 à 2020 (Tableau 5-3). Alors qu’elles ne représentaient initialement que 11,6 % des dépenses totales en biens et services dans le budget de l’État de 2015 à 2020, cette moyenne a grimpé à 44,4 % dans les lois financières modifiées, 42,5 % des dépenses en biens et services commandées étant intégrées aux dépenses communes. Notamment, le taux d’exécution des dépenses en biens et services du Chapitre 65 (Dépenses communes), par rapport aux budgets initiaux, a atteint en moyenne un taux stupéfiant de 594 % sur la période 2015-2020. Tableau 5-3. Dépenses communes, et dépenses en biens et services classées dans les dépenses communes (2015-2020) Année Total des dépenses B&S - Dépenses Ratio communes communes 2015 203,6 146,8 72,1 % 2016 282,1 214,3 76,0 % 2017 375,0 274,4 73,2 % 2018 434,2 332,3 76,5 % 2019 464,5 399,0 85,9 % 2020 545,2 442,5 81,1 % Moyenne 384,1 301,6 78,5 % Source : Autorités camerounaises, calculs de la Banque mondiale 5.1.1 Dépenses d’investissement public La prédominance des investissements dans les infrastructures a persisté même si l’investissement public global a diminué, près des deux tiers des dépenses publiques d’investissement étant consacrés aux investissements dans le transport, l’énergie et la télécommunication. Tel que mentionné précédemment (Section 5.1), les dépenses d’investissement public ont régulièrement diminué, passant de leurs pics de 7,5 % du PIB et de 36,9 % des dépenses publiques en 2016 à 4,5 % du PIB et 21,8 % dépenses en 2021 (Graphique 5-8). Pendant cette période, 62,3 % en moyenne de cet investissement public ont été consacrés aux infrastructures, une part qui est restée stable (Graphique 5-9). Le secteur des infrastructures comprend les infrastructures de transport, y compris les routes et les ports, ainsi que l’énergie et la télécommunication. Les principaux secteurs sociaux – santé et éducation – n’ont reçu que 7,4 % et 4,5 % en moyenne des allocations du budget d’investissement public (BIP), et les investissements dans le secteur de la santé ont continuellement diminué, passant de 8,7 % du BIP en 2016 à 6,2 % en 2021. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 102 Graphique 5-8. Dépenses publiques d’investissement Graphique 5-9. Répartition sectorielle du budget (% du PIB), 2016-21 d’investissement (en %), 2016-21 8,0 100 % 7,0 6,0 50 % 5,0 % du PIB 4,0 3,0 0% 2,0 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 Dépenses communes Production et echanges 1,0 Infrastructure Affaires sociales et emplois Santé Communication, culture, loisirs et sports 0,0 Enseignement, formation et recherche Administration générale et nancière 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Défense et sécurité Souveraineté Source : Autorités camerounaises, calculs des services de la Banque mondiale Malheureusement, les dépenses relativement élevées du Cameroun en investissements génèrent moins d’actifs d’infrastructure étant donné que l’efficience des dépenses publiques est bien inférieure au potentiel et manque de performance par rapport à celles des pays pairs. En théorie, le Cameroun pourrait améliorer de jusqu’à 40 % la qualité de ses infrastructures routières tout en maintenant le même niveau de dépenses publiques exprimées en pourcentage du PIB : ses infrastructures obtiennent actuellement un score de qualité de 2,78, alors que la frontière d’efficience pour le niveau de dépenses publiques du Cameroun permettrait d’obtenir un score de qualité de 3,96 (Graphique 5-10). Alors que de nombreux pays de comparaison sont également confrontés à des inefficiences, tous les pays pairs aspirationnels du Cameroun ont réalisé Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group des infrastructures de transport routier de meilleure qualité ; notamment, le Rwanda, le Sénégal et l’Ouganda ont atteint cette qualité supérieure avec des dépenses publiques similaires en pourcentage du PIB. Parmi ses pairs structurels, l’Ethiopie se distingue par l’efficacité supérieure de ses investissements pour un niveau de dépenses similaire. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 103 Graphique 5-10. Distance par rapport à la frontière d’efficience et dépenses en infrastructures de transport routier, Cameroun et pays de comparaison 6 RWA, 1,00 Infrastructures : qualité des infrastructures 5 SEN, 0,83 4 CMR, 0,70 KEN, 0,84 (1-7=meilleure) 3 2 COD AGO, 042 1 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 Dépenses: publiques, 2010-20 Remarques : Les pairs aspirationnels sont le Sénégal, le Kenya, l’Afrique du Sud, le Rwanda et l’Ouganda. Les pairs structurels sont la Mauritanie, l’Angola, l’Ethiopie, la Tanzanie et la République démocratique du Congo. Qualité des infrastructures : Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Malgré les inefficiences de l’investissement public, le Cameroun a tiré des avantages modestes mais durables en termes de croissance en s’appuyant sur ses dépenses d’investissement public, même si celles-ci sont plus faibles que celles des pays comparatifs à l’échelle mondiale ou régionale. En plus d’une comparaison des dépenses d’investissement public du Cameroun avec celles des pays pairs pour évaluer si les niveaux d’investissement public ont été appropriés, l’impact de l’investissement public sur la croissance du Cameroun est un point important à considérer. Une simple comparaison des tendances de l’investissement public avec les tendances du PIB ou de la croissance du PIB non pétrolier semblerait indiquer que l’investissement mine le PIB. Cependant, une évaluation plus approfondie de l’impact de l’investissement public sur la croissance du Cameroun révèle une relation positive. Selon les estimations, le multiplicateur d’investissement public du Cameroun, basé sur des régressions utilisant des données de 1999 à 2000, serait de 1,1, soit 1 XAF d’investissement public génère 1,1 XAF d’activité économique. Cependant, bien que supérieur à un, cet effet multiplicateur de l’investissement public est plus faible que les estimations mondiales ou régionales, probablement à cause de fuites dues aux importations et à la faible productivité de l’investissement public du pays, conséquence des lacunes dans la sélection des projets, la transparence de l’exécution et la comptabilité des actifs (Encadré 5-2). Encadré 5-2. Est-ce que le Gouvernement du Cameroun investit trop ou pas assez ? Une évaluation du multiplicateur d’investissement public Malgré le repli des dépenses d’investissement ces dernières années, les investissements publics au Cameroun suivent une tendance générale à la hausse depuis 2000, reflétant les efforts du pays pour combler son important déficit d’infrastructures, mais avec un impact incertain sur la croissance. La précédente stratégie de développement du gouvernement visait à réaliser une transformation structurelle à travers des investissements publics massifs. En réponse, les dépenses publiques d’investissement ont augmenté, passant d’une moyenne de 2,4 % du PIB sur la période 2000-07 à 5,1 % du PIB sur la période 2008-15 et 6,8 % sur la période 2016-2020. L’impact sur la Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 104 croissance n’était pas clairement visible, la croissance moyenne du PIB non pétrolier étant passée d’une moyenne de 4,9 % sur la période 2000-07 à 4,3 % sur la période 2008-15 et à 4,1 % sur la période 2016-20 (Graphique 5-11). Entre 2000 et 2020, l’investissement public au Cameroun a donné une impulsion modeste mais durable à la croissance du PIB réel, avec un multiplicateur estimé à 1,1, signifiant que 1 XAF d’investissement public génère 1,1 XAF d’activité économique. L’impact de l’investissement public sur la croissance du PIB réel au Cameroun est estimé à l’aide de techniques de modélisation tirées de documentation universitaire. En utilisant les données annuelles de 1999 à 2020 et en tenant compte du stock de capital existant du Cameroun, le multiplicateur d’investissement public au Cameroun est estimé à 1,1, indiquant un impact positif sur la croissance économique ; de plus, le multiplicateur cumulé reste statistiquement différent de zéro jusqu’à pendant un an et demi après un choc, ce qui suggère un effet durable sur le PIB (Graphique 5-12). Même si les estimations empiriques varient considérablement, les multiplicateurs en rapport à l’investissement public atteignent généralement environ 1,5 à l’échelle mondiale ; selon des données récentes, l’investissement public dans les pays en développement ont des rendements encore plus élevés étant donné que le stock initial de capital public est moins importante et que la qualité, la quantité et l’accessibilité des infrastructures économiques sont plus faibles. Les rendements de l’investissement public au Cameroun pourraient être compromis à cause des fuites dues aux importations et de la faible productivité de l’investissement public du pays causée par des lacunes dans la sélection des projets, la transparence de l’exécution et la comptabilisation des actifs.56 Graphique 5-11. Investissement public (% PIB, %) et Graphique 5-12. Estimation de la réponse du PIB au choc croissance du PIB 2007-2021 de l’investissement public (en %) 8 7 1,5 6 1,0 5 4 0,5 3 0,0 2 1 -0,5 0 -1,0 99 01 03 05 07 09 11 13 15 17 19 21 0 1 2 3 4 5 6 7 19 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 Limite supérieure Limite inférieure Croissance du PIB réel Croissance du PIB non pétrolier Effet estimé Investissement public (en % du PIB) Remarques : La courbe de la tendance de l’investissement public suit une Remarques : Le choc représente 1 % de la variation du PIB en trajectoire d’investissement lissée. investissement public pendant l’année 0. Source : Simulations des services de la Banque mondiale. Source : Simulations des services de la Banque mondiale. 54 Un modèle de projection linéaire locale (PLL) est utilisé avec la croissance du PIB réel comme variable dépendante et prenant l’investissement public, le stock de capital moyen et une tendance quadratique comme variables endogènes, suivant l’approche d’Izquierdo et Al. (2019). Le modèle PLL offre des avantages par rapport à la méthodologie classique à structure vectorielle autorégressive (SVAR), notamment la facilitation des estimations à travers des techniques de régression unique (en utilisant des erreurs-types corrigées par panel), une robustesse aux erreurs potentielles de spécification (telles que l’autocorrélation sérielle, l’autocorrélation transversale et l’hétéroscédasticité). et la flexibilité nécessaire pour prendre en charge les spécifications non linéaires qui ne sont pas autorisées dans les modèles SVAR multivariables standard. Voir Izquierdo, et. al. (2019), Is the public investment multiplier higher in developing countries? An empirical investigation. Bureau National de la Recherche Economique. http ://www. nber. org/papers/w26478. 55 Par exemple, Ilzetzki et. Àl. (2013) ont fait état d’un multiplicateur d’investissement de 1,6 pour les pays à faible revenu sur un horizon de trois ans. Cependant, selon les estimations d’Arizala et. Àl. (2017) pour l’Afrique subsaharienne, une augmentation de 1 % de l’investissement public a augmenté la production d’environ 0,7 % à moyen terme. Voir Vagliasindi, Maria ; Gorgulu, Nissan (2021). What Have We Learned about the Effectiveness of Infrastructure Investment as a Fiscal Stimulus A Literature Review. Document de travail de recherche sur les politiques 9796. Groupe de la Banque mondiale. https ://doi. org/10. 1596/1813-9450-9796. Voir Ilzetzki, Ethan, Enrique G. Mendoza et Carlos A. Végh. (2013). How Big (Small?) are Fiscal Multipliers? Journal of Monetary Economics, volume 60, numéro 2, mars 2013, pages 239-254. Voir Arizala, Francisco et. Àl. (2017). The Impact of Fiscal Consolidations on Growth in Sub-Saharan Africa. Document de travail du FMI. WP/17/281. Fond monétaire international. 56 IMF (2016), Cameroon Public Investment Management Assessment (PIMA). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 105 5.2 Exécution du budget La crédibilité budgétaire du Cameroun, évaluée à travers la comparaison entre les dépenses effectives et les dépenses budgétisées, a été stable et plus forte que celle de la plupart des pays de comparaison. Les dépenses publiques globales du Cameroun ne se sont pas démesurément écartées du plan sur la période de 2010 à 2021. Pendant cette période, le Cameroun a dépensé en moyenne 5,6 % de moins que prévu dans le budget. En termes de performance, cet écart par rapport au plan soutient avantageusement la comparaison avec ceux de l’ensemble de la CEMAC (différence de -8,8 %) et ceux des pairs aspirationnels du Cameroun (-6,4 %). Les pairs structurels du Cameroun ont maintenu une crédibilité budgétaire plus forte, leur déficit moyen de dépenses étant de seulement 3,3 %, tout comme l’ensemble de la région (41 pays d’Afrique subsaharienne ayant des données disponibles), la différence étant de seulement -2,6 % entre les dépenses effectives et le budget (Graphique 5-13). Au cours des années plus récentes de 2010 à 2021, la performance du Cameroun est restée stable (-5,6 %), tandis que tous les autres groupes ont connu un affaiblissement de leur crédibilité budgétaire. Graphique 5-13. Ecart entre le budget révisé adopté et le budget exécuté, Cameroun et pays de comparaison (en %), 2010-21 s el nn s el tio ur st airs as airs ra ct I R SS IT R pi ru CM P P PF PR Af 0 -2 (2010-2021 average) -4 % Approved -6 -8 -10 -12 -14 -16 Remarques : L’ODD 16.6.1 mesure les principales dépenses publiques exprimées en parts du budget initial approuvé. L’Afrique subsaharienne comporte 41 pays. La CEMAC comprend le Cameroun, le Tchad, la République du Congo et le Gabon. Les pairs structurels sont l’Angola, la République démocratique du Congo, l’Ethiopie, la Mauritanie et la Tanzanie. Les pairs aspirationnels sont le Kenya, le Rwanda, le Sénégal, l’Afrique du Sud et l’Ouganda. Source : Banque de données de la Banque mondiale. De plus, les importantes modifications annuelles apportées à la loi de finance initiale ont sapé la crédibilité du budget du pays en réorientant la composition et les allocations budgétaires. De 2015 à 2021, les dépenses totales approuvées dans la loi de finance rectificative ont augmenté en moyenne de 2,7 % par rapport à celles dans la loi de finance initiale (Tableau 5-4). Les modifications apportées à la composition du budget et imposées chaque année par les budgets révisés revêtent une importance encore plus grande que le dépassement total des dépenses. Entre 2015 et 2021, la part des dépenses d’investissement a été réduite en moyenne de 1,7 point de pourcentage (passant d’une moyenne de 32,7 % des dépenses totales à 31,0 %), tandis que la part des dépenses Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 106 courantes a été augmentée en moyenne de 1,2 point de pourcentage. Il est important de noter que ces révisions ont considérablement modifié la composition du budget pour les dépenses courantes : en moyenne entre 2015 et 20201, le budget révisé a augmenté la part consacrée à la consommation de biens et de services de 6,2 points de pourcentage (passant de 10,1 % des dépenses à 16,3 %), les ressources affectées aux « provisions » du budget initial ayant été réaffectées. La catégorie des biens et services ayant connu la plus forte augmentation est celle des charges externes, dont la part a augmenté de 4,3 points de pourcentage en moyenne. En conséquence, la rémunération des services extérieurs est passée d’une moyenne de 2,1 % des dépenses totales dans les budgets initiaux à une moyenne de 6,3 % dans les budgets révisés. De même, l’allocation pour les représentations, missions, réceptions et cérémonies, qui s’élevait en moyenne à 1,5 % des dépenses totales dans le budget initial, a augmenté, passant à 2,6 % en moyenne dans les lois de finance rectifiées (Tableau 5-4). Ainsi, un déséquilibre existe déjà dans le budget initial, des parts disproportionnées étant allouées aux dépenses courantes en rapport aux représentations et au paiement des services extérieurs, et a été aggravé par la révision budgétaire.57 Tableau 5-4. Révision et exécution budgétaires (parts exprimées en % et évolution des parts), moyenne 2015-2020 Variation des Parts (%) : parts (points de pourcentage) : Budget Budget Dépenses Initial à Révisé à initial révisé effectives révisé effectif Total des dépenses 100,0 % 100,0 % 100,0 % 2,7 % -4,2 % Dette 10,9 % 11,4 % 11,3 % 0,5 % 0,0 % Dépenses d’investissement 32,7 % 31,0 % 30,7 % -1,7 % -0,3 % Dépenses courantes 56,4 % 57,6 % 58,0 % 1,2 % 0,3 % 61 - Biens et services 10,1 % 16,3 % 16,6 % 6,2 % 0,3 % 610 - Fournitures et entretien courant 2,1 % 3,4 % 3,6 % 1,3 % 0,2 % 611 - Fournitures et équipements techniques 1,1 % 1,0 % 1,1 % 0,0 % 0,0 % 612 - Carburants et lubrifiants 0,8 % 0,8 % 0,8 % -0,1 % 0,1 % 613 - Coûts de transport 0,4 % 0,4 % 0,4 % 0,0 % 0,0 % 614 – Eau, électricité, gaz et autres coûts 0,6 % 0,9 % 0,9 % 0,3 % 0,0 % énergétiques 615 - Location 0,3 % 0,3 % 0,3 % 0,0 % 0,0 % 616 - Maintenance et sécurité 0,5 % 0,5 % 0,6 % 0,0 % 0,0 % 617 - Frais de représentation, de mission et 1,5 % 2,6 % 2,6 % 1,0 % 0,1 % de cérémonie 618 - Services externes 2,1 % 6,3 % 6,3 % 4,3 % -0,1 % 619 - Entretien des routes et des 0,7 % 0,0 % 0,0 % -0,7 % 0,0 % infrastructures 62 - Salaires 22,8 % 22,2 % 22,5 % -0,6 % 0,3 % 57 Il faudrait noter que le FMI considère l’utilisation par le Cameroun des lois de finance rectificatives sous un angle plus positif, les percevant comme une mesure d’urgence pouvant contribuer à la réalisation des objectifs des programmes du FMI et à l’atténuation des risques budgétaires. FMI (2023), « Third Review Under the Extended Credit Facility », Rapport pays du FMI n° 23/114, mars. p 8. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 107 Variation des Parts (%) : parts (points de pourcentage) : Budget Budget Dépenses Initial à Révisé à initial révisé effectives révisé effectif 63 - Taxes à payer 0,1 % 0,6 % 0,6 % 0,5 % 0,0 % 64 - Charges financières 3,3 % 3,8 % 3,6 % 0,5 % -0,1 % 65 - Subventions à verser 3,1 % 3,2 % 3,2 % 0,0 % 0,0 % 66 - Virements à payer 6,5 % 7,2 % 7,2 % 0,7 % 0,0 % 67 - Autres dépenses 4,3 % 3,8 % 3,6 % -0,5 % -0,2 % 69 - Provisions 6,3 % 0,7 % 0,7 % -5,6 % 0,0 % Dépenses totales (milliards XAF ; variation en %) 4 357,6 4 474,1 4 286,0 2,7 % -4,2 % Source : Direction Générale du Budget (DGB), MINFI Cameroun. Le système budgétaire du Cameroun est confronté à d’importants défis résultant des dépassements annuels de dépenses dans des catégories budgétaires spécifiques et des révisions de la loi de finance initiale par ordonnances qui sont presque toujours confirmées a posteriori par le Parlement. Ces pratiques portent atteinte à la transparence et à l’exactitude des processus budgétaires du pays. Au cours des dernières années, les allocations budgétaires ont été révisées par décret présidentiel et ratifiées plus tard seulement par le Parlement. Ce processus, qui accorde au gouvernement le pouvoir de s’écarter des allocations budgétaires initiales sans avoir obtenu au préalable l’approbation parlementaire, suscite des inquiétudes quant au contrôle budgétaire et compromet la transparence et la redevabilité dans le processus budgétaire. De plus, les importantes allocations aux « provisions » dans le budget initial contribuent à cette opacité. Même si les dépenses globales sont moins affectées suite à l’allocation initiale d’environ 6,3 % du budget aux « provisions », les écarts entre la comptabilité officielle et les statistiques financières posent des problèmes dans l’analyse des dépenses et du budget : des incohérences, telles que la catégorisation de dépenses en biens et services dans les données budgétaires mais en virement dans les comptes du Trésor, étant notées. Les dépassements de dépenses se produisent généralement dans le cadre de procédures spéciales, y compris les comptes d’avances de caisse (petite caisse), les engagements provisoires et les avances de trésorerie, qui sont justifiés par l’urgence des dépenses mais nécessitent une régularisation a posteriori dans la Loi de finance rectificative. Les incohérences entre les données budgétaires et comptables, telles que l’enregistrement des dépenses en biens et services dans les données budgétaires mais en virements dans les comptes du Trésor, compliquent l’analyse des dépenses et du budget ; cependant, les constats de ce rapport sont généralement les mêmes quelle que soit la source des données. Le recours excessif à des procédures budgétaires exceptionnelles au Cameroun continue de nuire à la gestion de la trésorerie publique ainsi qu’à la transparence budgétaire. Les dépenses faisant appel à des procédures exceptionnelles ont atteint un pic à plus de 11 % des dépenses primaires totales (hors dépenses financées sur financement extérieur) en 2020 et ont atteint en moyenne plus de 9 % sur la période 2018-2021. Etant donné que ces dépenses, principalement en biens et services, ne sont pas prévues dans les plans de trésorerie, mais sont pourtant prioritaires dans le décaissement, elles évincent Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 108 les dépenses normales (par exemple, pour la correction et la notation des examens nationaux). Ce problème n’est pas nouveau, il a déjà été cerné lors de la Revue des dépenses publiques de 2018, et le gouvernement s’est engagé à limiter ces procédures exceptionnelles en les faisant passer à moins de 5 % des dépenses primaires totales.58 Ce plafond est établi en tant qu’objectif indicatif dans l’accord triennal sur la Facilité élargie de crédit et le Mécanisme élargi de crédit du FMI signé en juillet 2021, mais le gouvernement n’a jamais réussi à le respecter depuis la mise en œuvre du programme. Le cumul d’arriérés constitue le principal instrument d’ajustement budgétaire. Entre 2015 et 2020, il y a eu une augmentation préoccupante de l’accumulation des arriérés intérieurs, atteignant en moyenne environ 40 % sur cette période. Il est à noter qu’une partie de ces arriérés, à savoir 10 %, est attribuable à des retards de paiement, souvent désignés par « Reste à payer » (RAP). Les principaux contributeurs à cette accumulation sont les dépenses d’investissement et les remboursements de la dette intérieure à court terme (Graphique 5-14, Tableau 5-5). De plus, les provisions représentent environ 18 % de ces arriérés, tandis que les dépenses salariales et les transferts sociaux représentent respectivement 4 % et 10,4 % sur cette période. L’importante accumulation d’arriérés fausse non seulement l’évaluation du solde budgétaire, mais entrave également sévèrement l’efficacité de l’exécution du budget. L’existence d’arriérés conduit à une sous-estimation des dépenses, obscurcissant finalement le véritable impact des opérations gouvernementales et l’ampleur des problèmes de budget que le pays doit résoudre. En effet, le budget de l’année n+1 supporte souvent la charge de l’apurement des arriérés accumulés à l’année n. L’existence d’arriérés conduit à une sous-estimation des dépenses, obscurcissant en définitive le véritable impact des opérations gouvernementales et l’ampleur du déficit budgétaire dans le cas du Cameroun. Tableau 5-5. Part importante du budget accumulée sous forme d’arriérés intérieurs Allocation Engagement Paiement Restes à Arriérés RAP/Com Arriérés/ budgétaire Payer (RAP) Com (crédit) 2015 3 767,8 3 870 2 102,8 510,5 1 767,2 13,20 % 45,7 % 2016 4 469,1 4 845 3 494,8 494,5 1 350,2 10,20 % 27,9 % 2017 2 898,4 4 688,1 2 409 711,8 2 279,1 15,20 % 48,6 % 2018 4 809,8 3 837,8 2 755,5 521,1 1 082,3 13,60 % 28,2 % 2019 3 572,4 5 947,6 3 463,9 429,9 2 483,8 7,20 % 41,8 % 2020 4 641,6 4 552,2 2 342,1 331 2 210,1 7,30 % 48,6 % 2015-2020 24 159 27 740,6 16 568 2 998,7 11 172,6 10,8 % 40,2 % Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. 58 La Circulaire n°00008349/MINFI du 30 décembre 2019 visait à limiter le recours aux procédures exceptionnelles et donnait des instructions sur l’exécution de la loi de finance, le suivi et le contrôle budgétaire pour l’année financière 2020. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 109 Graphique 5-14. Décomposition des retards de paiement (en % des dépenses totales, moyenne 2015-20) Remboursement dettes MLT Investissement Remboursement dettes CT Biens et Services Salaires Impôts à payer Charges financières, intérêts et commissions sur crédit Subventions à payer Transferts à payer Autres dépenses Provisions Source : Autorités camerounaises et Calculs des services de la Banque mondiale. 5.2.1 Marchés publics Le PER de 2018 a mis en évidence plusieurs problèmes dans le système de passation des marchés publics, notamment la complexité des procédures, la faiblesse du suivi et un manque de personnel qualifié. Le processus était caractérisé par des procédures longues et complexes qui entraînaient souvent des retards dans la mise en œuvre des projets d’investissement. En moyenne, selon les constats, le processus de passation des marchés en 2015 se prolongeait sur 167 jours et comportait 28 étapes administratives pour la Commission Spéciale de Passation des Marchés, et une durée plus longue de 366 jours incluant 58 étapes administratives pour le Ministère des Marchés Publics (MINMAP). Le Cameroun ne disposait pas de procédures et d’outils complets pour surveiller efficacement le processus de passation des marchés, repérer les retards et remédier aux goulots d’étranglement, ce qui entravait le suivi de la performance et le respect des principes de redevabilité. Le manque de compétences du personnel au sein des ministères de tutelle a également contribué aux retards, tandis que l’absence de plans de passation des marchés et le manque de préparation des dossiers d’appel d’offres pendant la phase de préparation ont aggravé le problème. De plus, des contraintes de ressources et d’expertise pesaient sur les agences gouvernementales participant à la gestion de la passation des marchés, affectant la qualité de la programmation, des dossiers d’appel d’offres, des rapports d’évaluation des offres et du suivi des contrats. L’adoption du nouveau Code des Marchés Publics en 2018 et la mise en œuvre des réformes associées ont considérablement amélioré la performance du Cameroun en matière de passation des marchés, l’efficacité s’étant améliorée à toutes les étapes de la passation des marchés. En 2021, suite à la réforme des marchés publics, 97,0 % Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 110 des appels d’offres (avis d’offres de participation) prévus ont été lancés, ce qui constitue un taux très élevé (Tableau 5-6). Le taux d’adjudication des contrats a également présenté une amélioration constante, atteignant 94,8 % en 2021. De plus, le taux de signature des contrats attribués a augmenté, passant de 80,0 % en 2018 à 92,4 % en 2021. Même si le taux de réception59 des contrats reste faible, il s’est également considérablement amélioré, passant de 50,7 % en 2019 à 74,3 % en 2021. Ce faible taux est principalement dû aux retards dans la signature des contrats et le caractère pluriannuel de certains contrats, notamment ceux de travaux d’infrastructures. La capacité de paiement de l’État et la qualité des ressources humaines au niveau du maître d’ouvrage continuent de fragiliser l’exécution des contrats de marchés publics. Cependant, la performance globale entre 2018 et 2021 a été satisfaisante. Tableau 5-6. Indicateurs de performance dans l’exécution des marchés publics au Cameroun 2018 2019 2020 2021 Sollicitation : Taux de lancement d’avis d’offres de participation 92,4 95,6 90,1 97,0 Evaluation et adjudication : Taux d’adjudication de contrat 84,4 88,7 88,5 94,8 Conclusion de marchés : Taux de signature de contrats 80,0 84,8 85,9 92,4 Exécution et suivi : Taux de réception des prestations/contrats 59,9 50,7 62,7 74,3 Remarques : Le taux de lancement des avis d’offres de participation est le rapport du pourcentage des appels d’offres prévus sur le nombre total de projets. Le taux d’adjudication des contrats est le pourcentage de projets attribués à travers des appels d’offres concurrentiels. Source : MINMAP 5.2.2 Gestion de l’investissement public Suivant les informations des autorités camerounaises, le niveau d’exécution des dépenses d’investissement était élevé jusqu’en 2021, avant de connaître une baisse significative en particulier pour les projets financés sur ressources intérieures, tandis que les projets financés sur ressources extérieures ont pris du retard, en partie à cause des retards dans le financement de contrepartie. De 2015 à 2020, le taux d’exécution moyen du BIP au Cameroun était de 92,4 %, ce qui est légèrement inférieur au taux d’exécution budgétaire global de 98,4 %, même s’il s’est amélioré au fil du temps, passant de 91,0 % en 2015 à 97,9 % en 2020. Cette tendance s’est inversée en 2021, année où le taux d’exécution a connu une baisse significative, passant à 80,5 % seulement du montant alloué au titre du LFR/effective. Notamment, les investissements financés sur 59 Le taux de réception des contrats relève de l’étape de sollicitation (nombre de nouveaux contrats par mois), mesurant le niveau de concurrence entre les fournisseurs et l’efficience du processus de passation des marchés. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 111 ressources intérieures en 2021 ont atteint un taux de mise en œuvre impressionnant de 99,9 %, selon les rapports du gouvernement, alors que le taux d’exécution des projets financés sur ressources extérieures était nettement inférieur, atteignant 66,9 % seulement. Cette sous-performance des investissements financés sur financement extérieur peut être due aux progrès limités de certains projets d’infrastructures, tels que la « Deuxième phase du port de Kribi », qui a connu un taux de décaissement de 2,7 % seulement sur le montant plafond alloué de 41 milliards XAF. Les retards dans le décaissement des fonds de contrepartie constituent un problème plus général pour les projets bénéficiant d’un financement extérieur. Mais plus important encore, l’exactitude et la fiabilité des données et des rapports du gouvernement sur les investissements publics ont été remises en question par des études menées par des partenaires techniques et financiers qui indiquent que le taux d’exécution effectif des projets d’investissements publics est bien inférieur, estimé à environ 50 % seulement.60 Encadré 5-3. Les défis de la gestion de l’investissement public au Cameroun Selon une évaluation menée par les autorités en juin 2021, la gestion des projets d’investissement public au Cameroun est confrontée à plusieurs défis nécessitant une attention particulière et des améliorations. Les principaux problèmes cernés comprennent : • Priorisation inefficace des projets  : Le lancement de nombreux projets sans couverture budgétaire conséquente, générant des inefficacités, constitue une préoccupation majeure. Cette approche aboutit à la multiplication de projets en concurrence pour des ressources limitées, compromettant ainsi l’efficacité de l’investissement public. • Problèmes de qualité et coûts récurrents : De nombreux investissements sont de qualité médiocre et ne tiennent pas suffisamment compte des coûts récurrents en rapport à l’entretien et à l’exploitation des infrastructures existantes. Les périodes d’exécution de certains projets sont particulièrement longues, s’étalant sur 8 à 15 ans. Cette situation entraîne une détérioration rapide des actifs de l’État et une augmentation des dépenses de réhabilitation, sans qu’il y ait un impact positif sur la croissance. • Capacité des entrepreneurs et retards de paiement : Les capacités techniques et financières des entrepreneurs retenus pour exécuter les projets d’investissement public sont souvent insuffisantes. Cette insuffisance est aggravée par des retards de paiement, incitant les entrepreneurs à abandonner les projets, perturbant encore davantage les calendriers et les résultats des projets. • Problèmes budgétaires et de programmation des investissements : Souvent, les projets sont lancés sans tenir suffisamment compte de l’espace budgétaire disponible, entraînant des problèmes de manque de clarté de la programmation pluriannuelle et de pérennité. Des problèmes tels que l’incohérence des crédits budgétaires, la discontinuité de la programmation des projets et les importants déficits de financement exacerbent ces défis. • Projets extrabudgétaires et complexité du suivi : De nombreux projets lancés en dehors du cadre du budget formel (extrabudgétaire) dans différentes administrations imposent des exigences budgétaires considérables. Cette pratique complique le suivi budgétaire et met à rude épreuve la gestion financière. 60 FMI (2016), Évaluation de la gestion des investissements publics au Cameroun (PIMA). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 112 Ces constats font écho à l’évaluation de la gestion des investissements publics (PIMA) de 2020, qui a souligné que malgré les récentes augmentations, l’efficience des investissements publics au Cameroun reste relativement faible. • L’écart d’efficience du Cameroun par rapport à celles des pays les plus performants dépasse les 60 %. • La gestion du stock des soldes engagés non décaissés (SENDS) ainsi que la préservation de la viabilité de la dette extérieure représentent des défis importants. • L’attention accordée aux dépenses récurrentes et aux coûts de maintenance est faible lors de la planification du projet. Cette négligence affecte négativement le fonctionnement, la productivité et la pérennité du projet. • L’absence d’une approche systématique pour estimer les dépenses récurrentes en rapport au financement intérieur pendant la phase de préparation du projet compromet l’efficacité de la planification. • La coordination et le partage d’informations entre le Ministère des Finances (MINFI) et le Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT) sont insuffisants. Sources : PIMA 2020 et rapport sur le Programme d’Investissements Prioritaires (PIP) 2022-2024 5.3 Réformes budgétaires Depuis 2018, le Cameroun a mis en place un cadre juridique et institutionnel complet visant à améliorer la qualité des dépenses et à renforcer le contrôle de la gestion des fonds publics, en accord avec le nouveau cadre harmonisé de gestion des finances publiques de la CEMAC. En juillet 2018, le Parlement a adopté deux lois majeures concernant les finances publiques et le budget, ainsi qu’un nouveau code des marchés publics, le tout étant complété par plusieurs décrets. Entre autres objectifs, ces réformes juridiques ont contribué à transposer le nouveau cadre harmonisé de gestion des finances publiques (GFP) de la CEMAC. Ce nouveau cadre juridique a facilité la mise en œuvre d’une politique d’ajustement budgétaire visant à optimiser les recettes internes, à maîtriser les dépenses et à gérer la dette. Le cadre a donné lieu à de nombreuses réformes dans différents domaines des finances publiques, notamment la mobilisation des recettes ; le contrôle des finances publiques ; la préparation, l’exécution, le suivi et le contrôle du budget ; la gestion de la trésorerie et de la dette ; la comptabilité publique ; et la supervision des entités publiques. Ces réformes visent à améliorer l’efficience, la transparence et la redevabilité dans la gestion des fonds publics au Cameroun. Les principales modifications légales et réglementaires apportées étaient : a. Loi n° 2018/011 du 11 juillet 2018 portant Code de la transparence et de la bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques : Cette loi établit un cadre visant à promouvoir la transparence, la redevabilité et la bonne gouvernance dans la gestion des Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 113 finances publiques. Il énonce des principes et des directives pour garantir l’adéquation de la gestion financière, de la budgétisation, de la comptabilité et des rapports dans le secteur public. b. Loi n° 2018/012 du 11 juillet 2018 portant régime financier de l’État et des autres entités publiques : Cette loi régit les opérations financières et la gestion de l’État et des autres entités publiques. Elle définit des réglementations sur la préparation, l’exécution et le contrôle du budget, ainsi que des règles pour la comptabilité publique, la gestion de la dette et l’établissement de rapport financier. c. Décret n° 2018/366 du 20 juin 2018 portant Code des marchés publics : Ce décret établit un cadre global pour les marchés publics au Cameroun. Il définit les règles et procédures pour garantir la transparence, la compétitivité et l’efficience du processus de passation des marchés. Le code vise à améliorer la qualité des marchés publics, y compris la sélection des entrepreneurs et l’exécution des marchés publics. d. Décret n° 2018/4992/PM du 21 juin 2018 définissant les règles régissant le cycle de vie des projets d’investissement public : Ce décret énonce les exigences en matière de sélection de projet, d’études de faisabilité, d’estimation des coûts, et d’évaluation de l’impact environnemental et d’approbation du projet. L’objectif est de garantir que les projets d’investissement sont correctement préparés et évalués avant leur mise en œuvre, réduisant ainsi au minimum les risques et améliorant les résultats des projets. e. Décrets portant calendrier budgétaire de l’État, présentation de la Nomenclature budgétaire de l’État, du Plan comptable de l’État et du Règlement Général de la Comptabilité Publique.61 La gouvernance du système de passation des marchés publics a été renforcée par la mise en œuvre d’un nouveau cadre juridique défini dans le Code des Marchés Publics de 2018. Publié par décret en juin 2018, le nouveau Code des Marchés Publics a établi un cadre complet pour garantir la transparence, la compétitivité et l’efficience du processus de passation des marchés. Le nouveau code établit la pleine redevabilité de l’autorité contractante et la séparation des fonctions de passation des marchés, de contrôle et de réglementation. Plusieurs nouveaux types de contrats et d’appels d’offres ont été introduits, parmi lesquels figurent les appels d’offres en deux étapes, les accords- cadres, les contrats de conception-construction, les contrats réservés, les négociations préalables à l’adjudication des marchés, ainsi que la suppression de l’examen des projets de marchés attribués par appel d’offres. Contrairement à la réglementation précédente, le nouveau code restreint le rôle du MINMAP au contrôle externe, se limitant à recevoir des exemplaires de toute la documentation produite dans le cadre de l’adjudication et de l’exécution des marchés et transmise par les commissions de passation des marchés et des pouvoirs adjudicateurs. 61 Le Décret n° 2019/281 du 31 mai 2019 établit le calendrier budgétaire de l’État. Le Décret n° 2019/3187/PM du 9 septembre 2019 fixe le cadre général de présentation de la nomenclature budgétaire de l’État. Le Décret n° 2019/3199/PM du 11 septembre 2019 établit le cadre général de présentation du plan comptable de l’État. Le Décret n° 2020/375 du 7 juillet 2020 établit le règlement général de la comptabilité publique. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 114 Encadré 5-4. Principales innovations du Code des Marchés Publics du Cameroun 2018 Redevabilité totale des maîtres d’ouvrage et des comités d’administration (pouvoirs adjudicateurs). La conduite des procédures de passation des marchés publics relève désormais de la compétence exclusive des ministères et des entreprises publiques (maîtres d’ouvrage et maîtres d’ouvrage délégués). Dans les entreprises publiques, le comité d’administration devient le garant de la mise en œuvre des nouvelles procédures de passation des marchés. Nouvelles structures pour l’adjudication et le contrôle des marchés publics. Des structures internes de gestion administrative des marchés publics (SIGAM) sont mises en place pour assister les pouvoirs adjudicateurs dans leurs nouvelles fonctions. Les commissions de passation des marchés sont réorganisées aux niveaux central, régional et départemental (crédits délégués). Le Ministère des Marchés Publics (MINMAP) devient le contrôleur externe des marchés publics, mettant en place les commissions centrales de contrôle des marchés publics, chargées notamment du visa préalable au paiement (obtention de l’approbation avant paiement), du contrôle d’efficacité et de qualité, et de la lutte contre la corruption. Réduction des délais pour certaines procédures. Les délais de soumission et d’évaluation des offres sont raccourcis ; pour la conclusion de contrats de gré à gré ; et pour la soumission de la présélection des offres. Nouveaux types de contrats et d’appels d’offres. Un appel d’offres en deux étapes a été mis en place au cas où le maître d’ouvrage souhaite fonder son choix sur des critères de performance, les contraintes d’exploitation et le coût économique. Des accords-cadres permettent de passer des commandes en fonction des besoins. Les contrats de conception-construction d’infrastructures et les contrats réservés, notamment avec des artisans, sont également désormais autorisés. Les autres principales modifications apportées concernaient les négociations préalables à l’adjudication des contrats ; et la suppression de l’examen des projets de marchés attribués par appel d’offres. Mise en place d’un comité de recours. Placé au sein de l’Agence de Régulation des Marchés Publics, ce comité est chargé d’examiner les recours des soumissionnaires et de formuler les mesures correctives appropriées à transmettre au MINMAP. Source : Services de la Banque mondiale. Dans le cadre du nouveau Code des marchés publics, des mesures ont été également introduites pour renforcer les services décentralisés et le rôle des CTDs dans le processus de passation des marchés publics. Les gouverneurs de région et les préfets de département disposent désormais de structures de gestion administrative des marchés publics, avec des commissions régionales et départementales des marchés établies pour superviser les activités de passation des marchés. En outre, la possibilité de créer un comité de recours au niveau régional apporte un élément supplémentaire de transparence et de redevabilité. Au sein des administrations, les maîtres d’ouvrage disposent de commissions internes de passation des marchés qui comprennent un secrétaire nommé par le pouvoir adjudicateur. Enfin, au sein du MINMAP, la Commission centrale de contrôle des marchés assure un contrôle et une réglementation efficaces des activités de passation des marchés au niveau central, un mécanisme de surveillance et de contrôle centralisés des processus de passation des marchés. Outre le nouveau Code des marchés publics, plusieurs réformes ont été mises en œuvre pour rationaliser le processus de passation des marchés, réduire la paperasse et améliorer la transparence et l’efficacité, dont le passage à l’e-passation des marchés publics constitue l’amélioration la plus importante, mais inachevée. La mesure la plus Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 115 importante a été la numérisation et l’informatisation des différentes étapes du processus de passation des marchés depuis 2016 sur la plateforme COLEPS (Cameroon Online E-Procurement System). Le système d’e-passation des marchés du Cameroun prend en charge les plans de passation des marchés, la publication et la notification, ainsi que les appels d’offres en ligne, mais pas l’évaluation et l’adjudication des contrats en ligne. La transparence a été renforcée à travers la publication semestrielle et annuelle depuis 2020 de rapports de suivi et d’évaluation et de statistiques sur la passation et l’exécution des marchés publics. L’efficacité a été rehaussée à travers la mise en œuvre d’un mécanisme de rémunération et de paiement basé sur la performance pour les acteurs clés du système de passation des marchés publics. Afin de réduire les retards dans les processus de passation des marchés et améliorer la conformité à l’avenir, l’accent devrait être mis sur une formation complète et le renforcement des capacités des ministères concernés et des collectivités territoriales décentralisées ainsi que sur l’achèvement de la transition à l’e-passation des marchés. Malgré ces améliorations juridiques et institutionnelles, le Cameroun n’a pas donné suite aux recommandations relatives à la composition et à la mise en œuvre des dépenses publiques énoncées dans le PER de 2018. L’analyse du dernier PER a montré bon nombre des problèmes relevés ici (Encadré 5-5). Sur les cinq recommandations sur la composition et la mise en œuvre des dépenses publiques dans le PER de 2018, une seule a connu des progrès partiels : réduire les coûts de passation des marchés en utilisant une liste de prix de référence pour les biens et services (Tableau 5-7). Encadré 5-5. Principales conclusions de la revue des dépenses publiques de 2018 sur l’allocation et l’exécution du budget La Revue des dépenses publiques du Cameroun de 2018 a cerné les principaux défis en matière d’efficience, d’équité et d’efficacité des dépenses publiques. Elle a montré que l’efficience et l’efficacité sont faibles, en particulier dans le secteur de la santé et dans les entreprises publiques. L’allocation des dépenses publiques a été biaisée vers les frais généraux et le service de la dette, ce qui fait que les secteurs prioritaires ne disposaient pas de ressources suffisantes. En outre, une part importante des dépenses en biens et services était constituée d’avantages non salariaux déguisés. Le rapport souligne l’impact négatif de l’augmentation des dépenses, en particulier en matière d’investissement en immobilisations, sur les déséquilibres budgétaires, nécessitant un ajustement budgétaire à court terme. Il recommande d’améliorer l’efficacité de l’allocation en réduisant les dépenses d’administration et de biens et services. La revue a également souligné la complexité de la masse salariale, les rémunérations non salariales n’ayant aucun lien avec la performance. Les transferts vers des entreprises publiques et des organismes publics autonomes ont été signalés comme des risques budgétaires. Si l’investissement public a contribué à réduire le déficit d’infrastructures, il faudrait encore des réformes politiques et un entretien adéquat pour assurer la qualité des infrastructures. La crédibilité du budget a été minée par des taux d’exécution supérieurs à 100 %, et la gestion centralisée du budget de l’État a entraîné des coûts politiques et sociaux. Source: Revue des dépenses publiques du Cameroun : aligner les dépenses publiques sur les objectifs de la Vision 2035. Washington DC :Groupe de la Banque mondiale. http://documents.worldbank.org/curated/en/501141543353309471/Aligning-Public-Expenditures-with-the-Goals-of-Vision-2035 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 116 Tableau 5-7. Résumé de la mise en œuvre des recommandations du PER 2018 sur la composition et la mise en œuvre des dépenses publiques Objectifs Recommandations du PER 2018 Statut 1 Réduire les dépenses Élaborer et mettre en œuvre un plan Pas de progrès. d'administration générale d'action visant à réduire graduellement et financière (classification les frais généraux du gouvernement, budgétaire fonctionnelle) ce qui créera une marge de manœuvre budgétaire pour augmenter les dépenses publiques dans les secteurs sociaux (et autres secteurs prioritaires). 2 Réduction des coûts des Veiller à ce que la liste de prix de référence Circulaire émise en marchés publics pour les biens et services standard décembre 2020 exigeant (mercuriale) soit utilisée comme référence l'utilisation de la et comprenne les prix les plus bas mercuriale Veiller à la mise possibles afin de réduire la variation des en œuvre de la circulaire coûts des marchés publics entre les entités et évaluer la mise en publiques et de contenir les dépenses en œuvre de la mesure. biens et services 3 Rééquilibrer les dépenses Réaffecter une partie des frais de Pas de progrès. en biens et services représentation externe à l'entretien des (classification budgétaire infrastructures et aux coûts énergétiques. économique) 4 Examiner les dépenses Procéder à un examen approfondi des Pas d'information élevées en subventions et organismes publics autonomes afin transferts, en particulier d'évaluer leur impact budgétaire net sur les aux établissements publics finances publiques et leur pertinence pour administratifs autonomes et la prestation de services. aux entreprises publiques 5 Réduire la part du budget Réduire considérablement l'utilisation des Pas de progrès. qui est gérée de manière dépenses non affectées non liées à la dette centralisée (classification en les affectant à des fonctions spécifiques administrative) du gouvernement. Le Cameroun a pris d’importantes mesures pour améliorer la gestion de ses investissements publics, conformément aux recommandations du PER de 2018. Ces efforts comprennent la révision du programme d’investissement public pour répondre à diverses caractéristiques des projets, l’adoption d’un cadre multicritère pour la priorisation et la sélection des projets et l’établissement d’un système de gestion de projet pour l’allocation budgétaire. Des actions à court et moyen termes ont également été mises en œuvre pour améliorer l’efficacité des investissements publics. En appui à ces réformes, le Cameroun a introduit le Décret 2018/4992 visant à rationaliser les processus de maturation des projets et a créé une banque de projets pour un suivi complet des projets, mettant l’accent sur la transparence et l’efficacité de la gestion des investissements publics. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 117 Néanmoins, des défis importants persistent. Pour renforcer l’investissement public, il est primordial de donner la priorité à l’exécution des projets dans les délais, d’affiner les procédures de sélection des projets et d’améliorer la transparence et la mobilisation du public. Pour pouvoir mettre en œuvre les projets en cours de manière efficace, il faut remédier aux retards dans les décaissements des fonds de contrepartie (comme indiqué dans la section 5.2.2). L’amélioration de la qualité des futurs projets nécessite de renforcer les capacités de sélection des projets, ce qui inclut des critères standardisés et des évaluations ex ante et ex post renforcées. La participation de la société civile et des administrations locales aux processus de sélection, d’évaluation et de suivi peut favoriser l’amélioration de l’investissement public. 5.4 Options de réformes L’allocation budgétaire du Cameroun continue d’être fortement centralisée, même si une grande partie de ces dépenses centralisées sont destinées aux retraites et au service de la dette. Dans les budgets initiaux, des ressources importantes au titre des dépenses courantes ont été régulièrement réservées en tant que « provisions » à allouer ultérieurement, ce qui compromet la transparence et la redevabilité budgétaires. L’exécution du budget continue de se heurter à des difficultés. Les modifications importantes de la loi de finance initiale effectuées chaque année portent atteinte à la crédibilité du budget du pays, notamment parce que la révision de la loi de finance initiale est menée par le biais d’un décret présidentiel confirmé uniquement ex post par le Parlement, affaiblissant ainsi la transparence et l’exactitude du système budgétaire du pays. En outre, le recours excessif à des procédures budgétaires exceptionnelles continue de nuire à la gestion de la trésorerie ainsi qu’à la transparence budgétaire. L’adoption du nouveau Code des marchés publics en 2018 et la mise en œuvre des réformes associées ont considérablement amélioré la performance en matière de passation des marchés publics au Cameroun, avec une plus grande efficacité à toutes les étapes du processus. Cependant, la transition en cours vers l’e-passation des marchés publics offre une promesse de rationalisation du processus de passation des marchés publics et d’amélioration de la transparence et de l’efficacité. Les options de réformes permettant de faire face à ces défis sont résumées dans le Tableau 5-8 suivant. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 118 Tableau 5-8. Recommandations pour améliorer l’allocation et l’exécution des dépenses publiques Objectif Recommandations Horizon d’implémentation Réduire les dépenses Réduire les dépenses communes (Chapitre 65 du budget Court à moyen terme et les provisions de l'État) centralisées pour Réduire les dépenses centralisées à moins de 40 % des Court à moyen terme améliorer l’allocation dépenses totales, à l’exclusion des dépenses essentielles budgétaire telles que les retraites et le service de la dette. Réguler la budgétisation des provisions afin d’éviter les Court à moyen terme écarts excessifs. Améliorer la crédibilité Adopter une feuille de route pour réduire le niveau des Court à moyen terme du budget en évitant les dépenses mises en œuvre au moyen de procédures procédures budgétaires exceptionnelles en dessous du plafond convenu de 5 % exceptionnelles et les des dépenses totales (dans le cadre du programme du modifications du budget FMI). par décret présidentiel et Eviter les modifications de la loi budgétaire initiale par Court à moyen terme en modifiant le budget le biais d’ordonnances et faire passer toutes les révisions uniquement par voie budgétaires par le Parlement. parlementaire Réduire l'accumulation de nouveaux arriérés, en Court à moyen terme commençant par une étude visant à identifier les ministères qui accumulent d'importants stocks d'arriérés et en promulguant une réglementation selon laquelle les allocations budgétaires sectorielles serviront à apurer les arriérés. Améliorer les processus Fournir une formation complète et un renforcement Moyen à long terme de passation des des capacités aux ministères concernés et aux autorités marchés grâce au locales décentralisées afin d'améliorer le respect du Code renforcement des des marchés publics. capacités et à la Lancer l’évaluation en ligne et l’attribution des contrats Moyen à long terme passation de marchés dans le cadre des réformes des marchés publics électronique afin électroniques. de réduire la durée moyenne et d’améliorer la conformité. Rationaliser les Remédier aux retards dans le décaissement des fonds de Court à moyen terme procédures de contrepartie pour les projets financés de l’extérieur grâce décaissement des fonds à une hiérarchisation appropriée. de contrepartie pour faciliter l’exécution en temps opportun des projets d’investissement. Renforcer les processus Améliorer le développement des capacités dans Moyen à long terme d’investissement les processus de sélection des projets, y compris la public pour améliorer normalisation et la transparence des critères de sélection l’allocation des dépenses et le renforcement des évaluations ex ante et ex post de d’investissement la mise en œuvre des projets. Améliorer l’information Mener des enquêtes sur tous les projets d’investissement Court à moyen terme et la transparence en cours de mise en œuvre et centraliser les informations pour renforcer le suivi dans une base de données pour faciliter un meilleur suivi et l’évaluation des et évaluation. investissements publics. Impliquer la société civile et les gouvernements locaux Moyen à long terme dans la sélection, l’évaluation et le suivi des projets d’investissement public. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 119 Objectif Recommandations Horizon d’implémentation Améliorer l’efficacité, Accélérer l’opérationnalisation du Compte Unique du Court à moyen terme la transparence et Trésor pour améliorer la gestion financière. la responsabilité de l’exécution du budget Renforcer les données budgétaires en établissant une Moyen à long terme grâce à une meilleure plateforme ou un mécanisme centralisé pour garantir une gestion financière, des collecte et une communication de données cohérentes données budgétaires et précises entre des entités telles que le Ministère des cohérentes et précises, Finances et le Ministère de l’Économie, de la Planification un suivi et une évaluation et de l’Aménagement du Territoire solides de l’exécution du budget et la participation Établir des mécanismes solides de suivi et d’évaluation Moyen à long terme des principaux acteurs. pour suivre les dépenses réelles par rapport au plan budgétaire, y compris un examen régulier des rapports d’exécution du budget, des audits et le recours à des organes de contrôle indépendants. Encourager la participation active et l’engagement Moyen à long terme des parties prenantes dans les processus de gestion et d’exécution du budget. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 120 6 STIMULER LE DÉVELOPPEMENT DU CAPITAL HUMAIN À TRAVERS DE MEILLEURES DÉPENSES SOCIALES Le capital humain est un moteur important de croissance économique et de développement social inclusifs et durables. Il est généralement admis que le niveau de vie d’un pays est, par-dessus tout, fonction de sa capacité à développer et à exploiter les compétences, les connaissances, la santé et les habitudes de sa population, c’est-à-dire le capital humain de la nation. L’éducation, la santé et la nutrition sont les principaux secteurs qui contribuent directement au développement du capital humain, et l’éducation joue un rôle particulièrement important du fait que c’est elle qui dote les personnes et la société des connaissances, des compétences et des valeurs dont elles ont besoin pour améliorer leur niveau de vie. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 121 6.1 Résultats et dépenses en matière de capital humain L’Indice du capital humain du Cameroun reste inférieur à la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI), ce qui indique des défis en matière d’éducation, de santé et de protection sociale qui compromettent la productivité future et posent un défi à l’objectif de croissance durable et inclusive du pays. Même si le Cameroun est un PRITI, ses résultats en matière de santé et d’éducation, comme il ressort de l’Indice du capital humain (ICH)62, se rapprochent davantage de la moyenne des pays à faible revenu. Un enfant né au Cameroun juste avant la pandémie aura une productivité équivalant à 40 % de la productivité qu’il aurait eue s’il avait bénéficié d’une éducation complète et d’une pleine santé. L’ICH du Cameroun a légèrement augmenté entre 2017 et 2020, passant de 0,39 à 0,40. Toutefois, son niveau correspond tout juste à la moyenne de la région d’Afrique subsaharienne (0,40), mais reste bien en dessous de la moyenne de tous les PRITI (0,48). Les mauvais résultats scolaires sont l’un des principaux facteurs contribuant à ce classement. Les enfants camerounais peuvent s’attendre à terminer 8,7 années de scolarité à l’âge de 18 ans (nombre inférieur à la moyenne des PRITI de 10,4 années). Cependant, lorsque les années de scolarité sont ajustées du facteur « qualité de l’apprentissage », elles n’équivalent plus qu’à 5,3 années de scolarité, soit un écart d’apprentissage de 3,4 années. Par ailleurs, seuls 92 enfants sur 100 nés au Cameroun survivent jusqu’à l’âge de 5 ans, ce qui est inférieur aux 96 enfants sur 100 du groupe des PRITI. Enfin, 29 enfants sur 100 présentent un retard de croissance et sont donc à risque de limites cognitives et physiques qui peuvent les handicaper toute leur vie durant. Les différences entre les sexes sont faibles, mais les résultats sont marqués par d’importantes disparités en matière de revenus entre les régions, et entre le milieu rural et urbain. En particulier, l’ICH tend à être plus faible dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest à cause de la crise sociopolitique qui frappe les régions anglophones. Le Cameroun a fait de l’accélération du développement du capital humain un pilier à part entière de sa Stratégie Nationale de Développement à l’horizon 2030 (SND30) et a pris l’engagement d’assurer son financement adéquat dans le cadre du PREF- CEMAC. Les objectifs stratégiques sont de garantir l’accès de tous les enfants d’âge scolaire à l’enseignement primaire ; d’atteindre un taux d’achèvement de 100 % dans le cycle primaire ; de réduire les disparités régionales en matière d’infrastructures scolaires et de personnel enseignant  ; et d’augmenter l’offre de formation professionnelle et technique de 10 à 25 % dans le cycle secondaire et de 18 à 35 % dans l’enseignement supérieur. Cet objectif d’amélioration du capital humain est également en adéquation avec le Programme des réformes économiques et financières de la CEMAC (PREF-CEMAC) de 2021, dans le cadre duquel les pays de la zone ont pris l’engagement d’assurer un financement adéquat des secteurs de l’éducation, de la formation professionnelle et de la santé, tout en renforçant les mécanismes de protection sociale pour faire face aux effets des chocs extérieurs et se prémunir contre d’éventuelles crises et vulnérabilités futures. 62 L’ICH mesure la quantité de capital humain qu’un enfant né aujourd’hui peut espérer atteindre à l’âge de 18 ans comparée au potentiel. Il exprime la productivité de la prochaine génération de travailleurs par rapport à une situation idéale où elle aurait accès à une éducation complète et à une pleine santé. Voir le Projet pour le capital humain de la Banque mondiale sur https://www.worldbank.org/en/publication/human-capital. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 122 Les dépenses publiques d’éducation, de santé et de protection sociale au Cameroun ne sont pas à la hauteur des références internationales, en particulier dans le domaine de l’éducation, alors que des défis tels que l’impact persistant des conflits internes amplifient la nécessité de telles dépenses. Les dépenses sociales publiques au Cameroun restent faibles, les dépenses de santé, d’éducation et en assistance sociale constituant environ 20 % du montant total des dépenses publiques. L’éducation reçoit la part la plus élevée des dépenses sociales, représentant environ 15 % du budget, ce qui est de loin inférieur aux références internationales communes de l’équivalent de 4 à 6 % du PIB. Les dépenses publiques dans le secteur de la santé, qui représentent environ 5 % des dépenses totales en 2021 ou l’équivalent de 0,7 % du PIB, se comparent également mal à la recommandation de l’OMS selon laquelle les PRITI devraient y consacrer au moins l’équivalent de 6 % de leur PIB et au montant moyen des dépenses publiques des PRITI équivalant à 3,9 % du PIB (en 2019). En outre, il semblerait que les faibles dépenses d’éducation du Cameroun génèrent des résultats aux tests encore plus faibles63 (Graphique 6-1), et ses faibles dépenses de santé ne permettent pas de réduire la mortalité infantile avec autant d’efficacité que dans les pays présentant des niveaux de dépenses de santé similaires (Graphique 6-2). Par ailleurs, il se peut que des dépenses sociales à la hauteur des benchmarks internationaux soient insuffisantes au Cameroun, compte tenu des besoins du nombre élevé de réfugiés et de déplacés internes (Encadré 6-1). Graphique 6-1. Dépenses d’éducation et scores aux tests, Graphique 6-2. Dépenses de santé et mortalité infantile, Cameroun et pays de comparaison (% PIB et score) Cameroun et pays de comparaison (% PIB et taux) 600 90 (pour 1 000 naissance svivantes) Taux de mortalité, nourrisson 80 Scores aux tests harmonisés 550 70 500 60 450 50 40 400 30 350 20 300 10 250 0 2 4 6 8 2 4 6 8 10 Dépenses publiques d'éducation (% du PIB) Dépenses publiques d'éducation (% du PIB) Cameroun CEMAC Cameroun CEMAC Pairs structurels Pairs aspirationnels Pairs structurels Pairs aspirationnels Economies émergentes Economies avancées Economies émergentes Economies avancées Remarque : Les scores harmonisés aux tests se rapportent à 2018. Voir la note de bas de page 63. Source: WDI. Source : WDI et Projet pour le capital humain de la Banque mondiale. 63 Les élèves camerounais obtiennent un score de 379 à un barème où 625 correspond à un niveau avancé et 300 au niveau minimum. Les scores harmonisés aux textes mesurent la qualité de l’éducation en harmonisant les scores obtenus par les élèves aux textes des programmes internationaux majeurs de test des acquis scolaires. Voir le Projet pour le capital humain de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 123 Encadré 6-1. Conflits, réfugiés et déplacements internes Cela fait au moins six ans que les régions du Nord et de l’Extrême-Nord du Cameroun, où Boko Haram continue de mener une guerre de faible intensité, est secouée par de fréquentes explosions de violence. D’après l’International Crisis Group, plus de 3 000 personnes ont été tuées et 250 000 ont été déplacées. Par ailleurs, le conflit en cours en République centrafricaine a amené des réfugiés à fuir et à entrer au Cameroun par la frontière orientale. Enfin, depuis fin 2016, le Cameroun est en proie à un conflit sécessionniste d’intensité grandissante dans ses deux régions anglophones (régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest), où environ 17 % de la population est concentrée. Suite à un décompte récent, l’International Crisis Group a conclu qu’au moins 6 000 personnes ont été tuées et 765 000 déplacées, parmi lesquelles 70 000 sont réfugiées au Nigeria. Dans l’ensemble, au mois de juin 2023, le Cameroun comptait sur son sol plus d’un million de personnes déplacées internes (PDI), près de 500 000 réfugiés (dont plus de la moitié proviennent de République centrafricaine, environ un quart du Nigeria, et d’autres, de pays tels que le Tchad et la République démocratique du Congo), et environ 600 000 rapatriés. Ceci a entraîné des mouvements migratoires vers le Nigeria et des déplacements internes vers les régions du Littoral, de l’Ouest, du Centre (département du Mfoundi) et de l’Adamaoua (département du Mayo-Banyo), notamment. Ces crises humanitaires et sécuritaires ont aggravé la pauvreté et imposé des charges supplémentaires aux services sociaux du Cameroun, en particulier le système éducatif. Source : Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ; Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies ; Organisation internationale pour les migrations ; International Crisis Group ; et Gouvernement du Cameroun. 6.2 Vers un système éducatif mieux géré générant de meilleurs résultats 6.2.1 Performance et résultats du secteur de l’éducation Au cours de la dernière décennie, le secteur éducatif camerounais a été considérablement affecté par des crises dont les effets se sont conjugués, notamment les crises politiques et sécuritaires ainsi que la pandémie de COVID-19. Les crises sociopolitiques persistantes dans plusieurs régions posent d’importants défis humanitaires, y compris des déplacements forcés massifs, la destruction d’écoles et la mise en danger des élèves et des enseignants (Encadré 6-1). La fermeture de l’ensemble des écoles et des établissements d’enseignement au plus fort de la pandémie de COVID-19 a exacerbé les défis préexistants en matière d’éducation. Cette section fait le point sur la situation du secteur de l’éducation du Cameroun depuis le dernier PER de 2018 (Encadré 6-2).64 64 L’analyse dans cette section s’appuie sur diverses sources de données, y compris : (i) les données administratives : annuaire statistique du MINEDUB, du MINESEC et du MINSEUP ; (ii) les données budgétaires du Ministère des Finances et des Ministères de l’Éducation (données BOOST) ; et (iii) résultats d’apprentissage : PASEC 2019. L’enquête auprès des ménages (ECAM5) la plus récente n’était pas encore disponible. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 124 Encadré 6-2. Réformes du secteur éducatif au Cameroun depuis le PER de 2018 • Efficacité de l’allocation budgétaire à l’éducation : Les réformes ont amélioré la transparence du financement des écoles à travers la Circulaire n° 014/1/426/MINEDUB/SG/DRFM publiée en novembre 2022, précisant les critères d’allocation et les responsabilités. Sa pleine mise en œuvre est en attente. • Financement basé sur les résultats (FBR) : Dans le cadre du Projet d’appui à la réforme de l’éducation (PAREC), le Cameroun a introduit une approche de FBR pour appuyer les écoles et les communautés accueillant des déplacés et des réfugiés, ce qui a contribué à l’équité et à l’efficacité. • Réforme de la politique relative aux manuels scolaires : Pour remédier à la faible disponibilité des manuels scolaires et à leurs coûts élevés, le Cameroun a mis en œuvre diverses interventions qui ont conduit à une amélioration des ratios manuel/élève, réduit le coût unitaire des manuels scolaires et mené à l’adoption d’une politique unique relative aux manuels scolaires pour toutes les matières dans le système éducatif. • Révision de la politique de la profession enseignante : Des politiques globales de la profession enseignante, adoptées en 2021 pour l’enseignement primaire, promeuvent le recrutement fondé sur le mérite, le recrutement local par le biais d’offres d’emploi, une meilleure coordination du déploiement et des mesures de rétention. Une stratégie similaire est en cours d’élaboration pour l’enseignement secondaire. • Rationalisation de l’inscription à la paie : Des initiatives telles que le guichet unique au niveau central et les services déconcentrés autonomisés accélèrent l’inscription à la paie et les premiers paiements des enseignants nouvellement recrutés. Des programmes de formation ont été introduits pour informer les enseignants du primaire nouvellement recrutés sur le processus administratif d’inscription à la paie et de décaissement des salaires. Sources : MINEDUB, MINESEC, Banque mondiale La fragmentation institutionnelle continue de poser de sérieux défis administratifs au système éducatif camerounais. Le secteur de l’éducation camerounais est complexe et fragmenté, opérant en deux langues et géré par six ministères distincts chargés de l’éducation. Le gouvernement réglemente les systèmes scolaires en anglais et en français, y compris les règles régissant les programmes scolaires, les manuels scolaires, les examens, les calendriers scolaires et l’ouverture de nouvelles écoles privées et publiques. Six ministères publics sont responsables des différents cycles d’enseignement, notamment le Ministère de l’Éducation de Base (MINEDUB),65 et divers autres ministères interviennent également dans le secteur de l’éducation.66 Le financement privé tient une place importante au Cameroun, les écoles primaires et secondaires privées représentant environ 30 % du nombre total des effectifs, et la part de la prestation privée de services éducatifs restant 65 Ces six ministères sont le Ministère de l’Éducation de Base (MINEDUB), le Ministère des Enseignements Secondaires (MINESEC), le Ministère de l’Enseignement Supérieur (MINESUP), le Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (MINEFOP), le Ministère de la Jeunesse et de l’Éducation Civique (MINJEC) et le Ministère de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (MINRESI). 66 Tels que le Ministère des Sports et de l’Éducation Physique (MINESUP) et le Ministère des Affaires sociales (MINAS). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 125 stable aux niveaux préscolaire, primaire et secondaire au cours de la dernière décennie. Les prestataires privés dominent l’Enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP), où ils représentent près de 80 % des effectifs. Le déploiement et la rétention des enseignants dans les régions fragiles du Nord- Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, en particulier dans l’enseignement primaire et secondaire général, ont été faibles, malgré les efforts fournis. Malgré trois cycles de recrutement et de déploiement d’enseignants, les ratios élèves/enseignant continuent de varier très fortement selon les écoles et les régions. Environ 66 % des écoles primaires publiques comptant 100 élèves ou plus sont désormais dotées d’au moins 3 enseignants rémunérés par l’État. L’objectif d’ajouter au moins 18 000 enseignants de plus d’ici 2026 devrait porter cette part à 95 %. Toutefois, la répartition des enseignants reste un problème majeur. D’après les statistiques du dernier recensement scolaire correspondant à l’année scolaire 2021-2022, 86 % des déploiements d’enseignants dans le primaire ne s’expliquent pas par le nombre d’élèves inscrits dans l’école. De même, dans l’enseignement secondaire, une étude de 2022 sur les besoins en personnel enseignant de l’enseignement secondaire général a mis en lumière une inadéquation de la répartition des enseignants du secondaire qui variait considérablement selon les régions et les départements. Les effets de ces mauvaises allocations du personnel enseignant sont exacerbés par les problèmes de rétention des enseignants déployés dans les zones défavorisées, ceux-ci optant dans bien des cas d’être mutés (ou redéployés) vers des postes administratifs ou d’autres ministères.67 Des progrès ont été enregistrés en ce qui concerne les politiques de gestion des enseignants, mais il reste encore beaucoup à faire pour améliorer leur rétention et orienter le déploiement vers les zones défavorisées. Pour l’enseignement primaire, la politique globale de la profession enseignante, adoptée en 2021, s’est traduite par une législation qui appuie : (i) le recrutement des enseignants sur la base du mérite ; (ii) le recrutement local à travers une approche faisant appel à l’affichage des offres d’emploi ; (iii) une meilleure coordination des déploiements et des redéploiements en fonction des besoins ; et (iv) la rétention des nouveaux enseignants à travers un engagement de cinq ans. Pour l’enseignement secondaire, une stratégie globale de réforme des enseignants est en cours d’élaboration et sera livrée fin 2023, comprenant de meilleures normes pour la formation initiale, l’affectation et le déploiement des enseignants, ainsi que des améliorations des incitations professionnelles, de la formation continue, de la gestion de carrière et de planification prospective des effectifs. En outre, une série de mesures administratives ont été prises pour réduire les retards dans l’inscription à la paie des enseignants nouvellement recrutés. À l’avenir, il faudra davantage veiller à améliorer la rétention68 et le déploiement des enseignants en : (i) établissant la nécessité de décourager les enseignants de muter vers des postes administratifs ou d’autres ministères ; (ii) déployant des enseignants du primaire et du secondaire dans les écoles présentant le nombre le plus élevé d’élèves par enseignant financé par l’État (qui ont le plus besoin de plus d’enseignants) et (iii) renforçant les contrôles de la présence des enseignants à leurs postes. 67 Les statistiques proviennent du MINEDUB. 68 Dans son communiqué de presse n°70/23/MINESEC/SG/DRH/SDP/SFCP du 30 mai 2023, où il appelle à la dénonciation anonyme, le MINESEC révèle que 1 573 enseignants ne sont pas à leur poste. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 126 La croissance des effectifs dans le secteur de l’éducation a connu un ralentissement entre 2015 et 2021 après des augmentations substantielles au cours des 15 années précédentes et le cas des enfants affectés par les conflits a exercé une pression supplémentaire. Sous les effets conjugués de la croissance démographique et de la transition vers la gratuité de l’enseignement primaire en 2001, tous les secteurs de l’éducation, en particulier l’enseignement primaire, ont connu une augmentation massive des effectifs jusqu’en 2015 environ. Puis, entre 2015 et 2020, alors que les effectifs dans le primaire continuaient à augmenter, les effectifs dans le secondaire ont chuté (Graphique 6-3). Au niveau régional, les effectifs dans tous les cycles d’enseignement ont fortement diminué dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest avec l’intensification du conflit (Encadré 6-1), tandis que les effectifs dans le primaire ont fortement augmenté ailleurs. La crise des déplacements forcés a placé près de 1,9 millions d’enfants d’âge scolaire dans le besoin d’une aide à l’éducation (sur un total de 7,6 millions d’élèves inscrits), intensifiant considérablement les pressions exercées sur le système éducatif et exacerbant les besoins en infrastructures à tous les niveaux. Graphique 6-3. Effectifs par cycle d’enseignement (en milliers), 2000-2021 5 000 Scolarisation totale (en milliers) 4 500 4 000 3 500 3 000 2 500 2 000 1 500 1 000 500 0 2000 2005 2010 2015 2020 Maternelle Primaire Secondaire Supérieure Source : ISU UNESCO (data.uis.unesco.org), MINEDUB, MINESEC, MINESUP. Les taux de scolarisation dans les secteurs primaire et secondaire ont baissé au cours de ces dernières années, ce qui fait que le Cameroun est de plus en plus à la traîne par rapport à ses pays pairs. Au cours de la période 2001-2015, les taux bruts de scolarisation ont augmenté de façon constante dans tous les cycles du secteur éducatif camerounais. En 2015, les taux nets de scolarisation dans le primaire avaient tellement augmenté que le Cameroun figurait parmi les pays les plus performants d’Afrique subsaharienne et se comparait à certains pays d’Asie de l’Est. Puis, au cours de la période 2015-2019, ces progrès ont commencé à ralentir, le taux brut de scolarisation dans l’enseignement primaire passant de 116 % en 2015 à 106 % en 2019, et le taux net de scolarisation dans le primaire retombant de près de 97 % en 2015 à un peu moins de 92 % en 2019 (Graphique 6-4). Dans l’enseignement secondaire, les taux de scolarisation ont diminué entre 2015 et Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 127 2021, et le taux brut de scolarisation est passé de 59 % en 2015 à 45 % en 2021, tandis que le taux net de scolarisation a chuté de 44 % en 2015 à moins de 37 % en 2021. À mesure que les taux de scolarisation ont augmenté, le nombre d’enfants non scolarisés a constamment diminué entre 2001 et 2015 ; toutefois, il est en augmentation depuis. Avec la baisse des taux de scolarisation, la proportion des enfants en âge de fréquenter le primaire qui sont non scolarisés est passée de 5 % en 2015 à 9 % en 2019. La grande proportion d’enfants d’âge primaire (50 %) parmi les PDI en provenance du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en 2019 a fortement contribué à cette augmentation. Graphique 6-4. Taux brut de scolarisation, Cameroun et pays comparables, 2012-19, (Pourcentage du groupe d’âge) 120,0 90,0 60,0 30,0 0,0 Cameroun PRITI PRITS Côte Sénégal Ghana Vietnam Egypt Guatemala d'Ivoire Pairs structurels Pairs aspirationnels 2012 2019 Source : WDI et calculs des services de la Banque mondiale. Les taux d’achèvement, qui reflètent la qualité et l’efficacité du système éducatif, donnent davantage de preuve de cette érosion. Le nombre d’enfants qui achèvent l’école primaire chaque année, exprimé en pourcentage de la population en âge d’achever ce cycle au Cameroun, a baissé de 74 à 65 % dans le primaire et de 46 à 37 % dans le secondaire au cours de la période 2015-2019. L’écart s’est creusé encore plus entre le pays et la moyenne des PRITI qui présentaient des taux d’achèvement de 89 % dans l’enseignement primaire en 2019 et de 75 % dans le secondaire, ainsi qu’avec la plupart de ses pairs structurels et régionaux (dont le taux moyen d’achèvement du primaire est de 86 %) (Graphique 6-5). De plus, le taux de transition de l’enseignement primaire au secondaire reste nettement inférieur à celui des autres PRITI. En 2021, seuls 48 % des élèves ayant achevé leur cinquième année d’études se sont inscrits à l’école secondaire, contre 68 % en 2014 et une moyenne de 80 % dans les PRITI. Pour atteindre les objectifs stratégiques énoncés dans la SND30, le gouvernement doit éliminer tous les obstacles qui empêchent les enfants d’achever le cycle d’éducation de base, en particulier chez les plus marginalisés. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 128 Graphique 6-5. Taux d’achèvement du cycle primaire (%), 2019 120 100 80 60 40 20 0 a re M ie Vi ie n te nie go m m al a Ta un do a d ja an y oi s s g na an n o ne ai To ïd Cô za né Iv Ke h er et al ug ba G d' n Sé O er In Ca Az Remarques : La moyenne des pays pairs est de 86 %, indiquée par la ligne en pointillés. Le taux d’achèvement de l’école primaire, ou taux brut d’achèvement des études primaires, correspond au nombre d’enfants ayant achevé leurs études primaires, indépendamment de leur âge, exprimé en proportion de la population en âge d’achever ce cycle d’enseignement. Source : Base de données EdStats de la Banque mondiale. Les élèves du primaire camerounais ont obtenu des résultats légèrement meilleurs aux tests standardisés en 2019 comparé à 2014, mais le reste de la région d’AfSS a connu des améliorations plus importantes. En 2019, environ 40 % des élèves en deuxième année d’études au Cameroun ont obtenu un score supérieur à « suffisant » en lecture au test d’évaluation standardisé du PASEC,69 contre 30 % en 2014, et environ 58 % ont obtenu un score supérieur à « suffisant » en mathématiques, contre 55 % en 2014. Néanmoins, les résultats des élèves camerounais de deuxième année d’études en lecture et en mathématiques étaient inférieurs aux scores moyens des élèves des pays francophones d’Afrique subsaharienne. (Voir également le Graphique 6-1 pour une comparaison internationale des scores obtenus aux tests). Les disparités entre les sexes dans l’éducation ont diminué mais restent significatives dans le secteur primaire. Entre 2015 et 2019, l’indice de parité entre les sexes70 pour le taux brut de scolarisation dans le primaire est resté inchangé à environ 0,90. Cependant, ces disparités ont été considérablement réduites, voire éliminées dans l’enseignement secondaire : en 1980, les garçons étaient presque deux fois plus nombreux que les filles dans l’enseignement secondaire, mais en 2015, l’indice de parité entre les sexes s’est amélioré pour atteindre 0,86, et en 2021, il dépasse tout juste 1,00. La réalisation de la parité entre les sexes dans le préscolaire continue d’être un défi (avec un indice de 0,37). Indépendamment du cycle d’enseignement, les garçons continuent d’avoir des taux de scolarisation et d’achèvement de loin plus élevés. 69 Le PASEC est le Programme d’Analyse des Systèmes Éducatifs de la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie, un test standardisé administré aux élèves en deuxième et sixième années d’études dans les pays francophones du monde entier. 70 L’indice de parité entre les sexes est le ratio entre le nombre de filles et de garçons inscrits dans un cycle d’enseignement donné. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 129 6.2.2 Dépenses du secteur de l’éducation Les dépenses publiques d’éducation du Cameroun restent de loin inférieures aux moyennes de la région et des pays pairs et continuent d’être en deçà des objectifs de la stratégie propre du gouvernement camerounais en matière d’éducation. En 2021, le niveau des dépenses publiques d’éducation du Cameroun, équivalant à 3,2 % du PIB, correspondaient presque à la moyenne en baisse de l’AfSS, mais se situait bien en dessous de celles des PRITI (4,1 %) et de l’objectif international fixé dans la Déclaration d’Incheon de l’équivalent de 4 à 6 % du PIB (Graphique 6-6). Au cours de la période 2015-2021, les dépenses d’éducation n’ont pas atteint l’objectif de 20 % du montant total des dépenses fixé dans la Stratégie du gouvernement pour le secteur de l’éducation pour 2013-2020. Le gouvernement est en train de finaliser sa nouvelle stratégie sectorielle pour l’éducation et la formation (2023-2030), conformément à la SND30, qui se fixe, entre autres objectifs stratégiques, de : (i) garantir l’accès de tous les enfants d’âge scolaire à l’enseignement primaire ; (ii) atteindre un taux d’achèvement de l’école primaire de 100 % ; (iii) réduire les disparités régionales en matière d’infrastructures scolaires et de personnel enseignant. Graphique 6-6: Dépenses publiques d’éducation, Cameroun Graphique 6-7: Dépenses d’éducation et pays de comparaison (% PIB), 2010-21 4,5 % 2021 4,0 % 2020 3,5 % 3,0 % 2019 2,5 % 2,0 % 2018 1,5 % 2017 1,0 % 0,5 % 2016 0,0 % 2015 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 0% 20 % 40 % 60 % 80 % 100 % Cameroun AfSS Enseignement primaire Enseignement secondaire PRITI Enseignement supérieur Formation professionnelle Source : Direction Générale du Budget – MINFI - Cameroun, Source : Direction Générale du Budget - MINFI Cameroun Base de données WDI de la Banque mondiale 150. L’enseignement secondaire absorbe la plus grande partie des dépenses, même si les effectifs du primaire sont plus importants et croissent plus rapidement, et la formation professionnelle a reçu plus d’attention des autorités. Plus de la moitié des dépenses d’éducation va à l’enseignement secondaire, qui ne représente qu’un quart des effectifs, alors qu’un tiers va à l’enseignement primaire qui concentre les deux tiers des Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 130 effectifs. Le secteur le plus sous-financé de l’éducation est la formation professionnelle : elle représente moins de 3 % des dépenses totales d’éducation, malgré l’accent que la SND30 met sur la nécessité de renforcer et d’élargir l’appui au secteur de l’EFTP pour aider le pays à développer des compétences et des qualifications de haute qualité, capables d’induire une transformation structurelle de l’économie nationale. Si le budget était alloué conformément aux recommandations du Partenariat mondial pour l’éducation, c’est-à-dire une allocation minimale de 45 % au cycle primaire, les résultats scolaires s’amélioreraient considérablement (Graphique 6-7). 151. Dans le but de renforcer l’efficacité des allocations budgétaires au bénéfice de l’éducation, des progrès substantiels ont été réalisés en matière de transparence de la formule de financement des écoles. Étant donné que le Cameroun continuera à subir de fortes contraintes budgétaires sur le moyen terme, le gouvernement s’est concentré sur l’amélioration de l’allocation budgétaire au sein du secteur de l’éducation. Une formule de financement des écoles, établie en novembre 2022 mais pas Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group encore pleinement mise en œuvre, clarifie les critères d’allocation par école, l’utilisation des fonds et les responsabilités des différents agents. De plus, le gouvernement a mis en œuvre une approche de financement basé sur les résultats pour aider les écoles et les communautés à accueillir les personnes déplacées et les réfugiés, ce qui contribuera à améliorer l’équité régionale. 152. Malgré la part élevée des coûts de personnel dans les dépenses d’éducation, le ratio élèves-enseignant au Cameroun se détériore et reste élevé, comparé aux normes internationales. Entre 2015 et 2021, les dépenses d’investissement ont baissé, passant de plus de 10 % des dépenses totales d’éducation à environ 5 %, les dépenses se déplaçant vers les salaires et les traitements, qui représentent désormais 75 % des dépenses d’éducation (Graphique 6-8). Ce déplacement de l’allocation a été amplifié par les faibles taux d’exécution des dépenses d’investissement, qui sont retombés à 50 % en 2021, selon toute probabilité sous l’effet de la pandémie de COVID (Graphique 6-9) au moins partiellement. Malgré la part élevée des dépenses salariales, et même en incluant les enseignants rémunérés par les parents, le ratio élèves-enseignant qualifié dans l’enseignement primaire s’est détérioré, passant de 41,5 % en 2015 à 45,6 % en 2019, ce qui est supérieur aux ratios observés dans 15 pays pairs (Graphique 6-10). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 131 Graphique 6-8. Dépenses d’éducation par type (% du total), Graphique 6-9. Taux d’exécution des dépenses d’éducation 2015-2021 par type (en %), 2015-2021 100 % 140 % % of Dépenses totales d'éducation 80 % 120 % 60 % 100 % 40 % 80 % 20 % 60 % 0% 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 40 % 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Investissement Biens et services Investissement Salaires Subventions Consommation de biens et services Transferts Autres dépenses Total Source : Direction Générale du Budget - MINFI Cameroun. Graphique 6-10. Ratio élèves-enseignant qualifié dans l’enseignement primaire, Cameroun et pays pairs, 2019 50,0 45,6 45,0 40,0 35,0 30,0 25,0 20,0 15,0 10,0 5,0 0,0 ie sie sie n am na en ia a l re go da n ga ny ija ou ib ér oi ha m an To ay né tn né ba Ke am ig er Iv Yé G ug al e do Sé d' N m er Vi N M O Ca In Az te Cô Ratio élève/enseignant Moyenne des pairs hors AfSS Moyenne de tous les pairs Remarques : La moyenne sur l’ensemble des pays pairs est de 24. La moyenne des pays pairs hors d’AfSS est de 19. Source : Institut de statistique de l’UNESCO. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 132 6.2.3 Équité régionale dans le secteur de l’éducation Les régions que le gouvernement a déterminé comme Zones d’éducation prioritaires (ZEP) restent à la traîne en ce qui concerne la plupart des mesures de la performance éducative et de nombreuses mesures des intrants éducatifs. Il s’agit des régions du Nord, de l’Extrême-Nord, de l’Est et de l’Adamaoua. En 2021, le taux de réussite aux examens du primaire était de 71 % dans les ZEP contre 83 % au niveau national. Les ratios élèves-enseignant étaient pires ; l’accès aux manuels scolaires était plus faible ; et il était moins courant de trouver de l’électricité dans les écoles primaires dans les ZEP. En 2021, près de 63 % des établissements d’EFTP se trouvaient dans les régions du Centre et du Littoral, tandis que moins de 15 % des centres d’EFTP opéraient dans les ZEP. Les efforts de recrutement d’enseignants ont conduit à une amélioration des ratios élèves-enseignant dans les écoles primaires, même si certaines régions restent en proie à des difficultés, ainsi qu’à un changement radical consistant à s’écarter du modèle d’enseignants payés par les parents dans toutes les régions. Le nombre d’enseignants dans le système éducatif reste inférieur aux besoins du pays et la qualité des enseignants est faible : en moyenne, 33 % des enseignants n’atteignent pas le niveau de qualifications minimal requis. Le manque d’enseignants a poussé de nombreux parents à recruter et à rémunérer eux-mêmes des enseignants supplémentaires, notamment dans les ZEP. La part des enseignants du primaire rémunérés par les parents avait atteint 38 % au cours de l’année scolaire 2015-2016. Puis, entre 2016 et 2021, le ratio national élèves-enseignant (enseignants payés par Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group l’État et financés par les parents compris) s’est légèrement amélioré. Cependant, malgré les efforts de recrutement ciblant les ZEP, ces régions (Extrême-Nord, Nord, Adamaoua et Est) continuent de présenter les pires ratios élèves-enseignant globaux et des ratios légèrement inférieurs à ceux de 2016. Dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest où la déperdition des enseignants est élevée à cause de la crise sécuritaire, le nombre d’élèves a également baissé, atténuant l’impact sur les ratios d’enseignants. Bien que les progrès aient été inégaux entre régionaux en termes de placement d’enseignants dans les salles de classe, un changement positif spectaculaire s’est produit entre 2016 et 2021 avec l’abandon du financement des enseignants par les parents dans toutes les régions, une victoire majeure pour une plus grande équité dans les services éducatifs (Graphique 6-11). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 133 Graphique 6-11. Ratios élèves-enseignant dans l’enseignement primaire, avec et sans les enseignants rémunérés par les parents, par région, 2016 et 2021 140,0 Eléves par enseignant 120,0 100,0 80,0 60,0 40,0 20,0 0,0 re st UN a t d l st ra Es st d u d Su ue nt ue or ao or ue tto O Ce O N O N am O ER Li e- d- d- M Ad m or Su CA trê N Ex 2016 toutes les écoles 2016 Ecoles publiques uniquement 2021 toutes les écoles 2021 Ecoles publiques uniquement Source : Ministère de l’Éducation de Base du Cameroun. La mise en œuvre du décret de 2017 sur les manuels scolaires a contribué à améliorer leur disponibilité et leur accessibilité-prix. Néanmoins, l’accès aux manuels scolaires varie selon les régions. Pendant des années, le Cameroun a souffert d’une grande insuffisance de l’offre de manuels scolaires abordables, présentant l’un des pires ratios manuel-élève au monde, ainsi que des coûts élevés et une mauvaise qualité de l’offre existante. En 2018, un manuel scolaire pour le primaire coûtait en moyenne 6,25 USD au Cameroun, contre un prix d’environ 1 USD dans les pays comparables, en partie à cause d’une politique permettant à chaque école de sélectionner les titres. Grâce à un financement supplémentaire et à la mise en œuvre de réformes politiques connexes71, le Cameroun a connu une amélioration spectaculaire de son ratio élèves/manuel en 2021, atteignant une moyenne nationale de moins de 4 contre près de 15 en 2013 ; et les coûts unitaires des manuels scolaires ont été réduits de moitié. Cependant, des inégalités régionales demeurent : la région de l’Extrême-Nord présente toujours un ratio supérieur à sept élèves par manuel (Graphique 6-12). 71 Projet PAREC de la Banque mondiale ; Programme d’amélioration de l’équité et de la qualité de l’éducation de la Banque mondiale ; et Opérations d’Appui aux Politiques de Développement pour la Consolidation Budgétaire et la Croissance Inclusive de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 134 Graphique 6-12. Ratio élèves/manuel par région (nombre moyen d’élèves par manuel de mathématiques et de lecture dans l’enseignement primaire), 2020/2021 8,0 7,4 7,0 6,0 4,8 5,0 4,1 3,8 3,9 3,9 4,0 3,4 3,5 3,0 2,5 2,0 1,0 1,0 0,0 st st re ua st st st t d Es l ra ue ue ue ue ue nt or ao tto Ce O O O O O N am e- d- d- d- d- Li Ad m or Su Su or rê N N t Ex Source : Ministère de l’Éducation de Base du Cameroun. Les infrastructures scolaires et l’accès aux services dans le secteur primaire se sont globalement améliorés, mais les disparités régionales persistantes reflètent les inégalités de financement. Environ 98 % des écoles primaires publiques ont accès à l’eau potable en 2021 contre 30 % en 2015. Environ 13 % de ces écoles ont l’électricité contre 7 % en 2015. Les écoles primaires des ZEP sont nettement moins susceptibles d’avoir accès à l’électricité que celles des zones côtières ou du centre du pays (Graphique 6-13). Graphique 6-13. Pourcentage d’écoles primaires publiques ayant accès à l’électricité et à l’eau potable par région, 2015 et 2021 100 0 % 90,0 % 80,0 % 70,0 % 60,0 % 50,0 % 40,0 % 30,0 % 20,0 % 10,0 % 0,0 % Cameroun Nord Sud Ouest Est Centre Littoral Adamaoua Nord- Extrême- Sud- Ouest Nord Ouest Dispose de l'eau potable 2015 Dispose de l'eau potable 2021 A accès à l'énergie électrique 2015 A accès à l'énergie électrique 2021 Source : Ministère de l’Éducation de Base du Cameroun Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 135 Une proportion alarmante des enfants scolarisés, vivant pour la plupart dans les régions les plus pauvres, n’ont pas d’acte de naissance, ce qui les empêche d’achever leurs études primaires. Les dernières statistiques du Ministère de l’Éducation de Base, publiées en février 2023, montrent que 1 486 689 élèves officiellement inscrits actuellement dans le système éducatif camerounais n’ont pas d’acte de naissance. Ils représentent un tiers de l’ensemble de la cohorte à 11  % et 30,1  % des enfants inscrits dans les cycles de maternelles et primaire respectivement. Sans acte de naissance, ces élèves ne peuvent pas s’inscrire aux examens de fin d’études primaires et ne peuvent pas accéder à l’école secondaire. Ils abandonnent alors leurs études ou redoublent l’année tout en faisant les démarches nécessaires pour en obtenir un. Cette problématique se posent particulièrement dans les ZEP (Graphique 6-14). La situation dans les régions du Nord et de l’Extrême-Nord est encore plus préoccupante. En effet, ces deux régions abritent à elles seules plus de la moitié de tous les enfants camerounais n’ayant pas d’acte de naissance. Face à l’impact de cet obstacle administratif, le gouvernement est en train de rechercher une solution durable. Au Cameroun, les démarches en vue d’obtenir un acte de naissance constituent un processus fastidieux et en plusieurs étapes, impliquant non seulement des coûts financiers72 mais aussi des coûts intangibles. Entre la perte de temps et les dépenses financières qu’elles engagent, les formalités pour obtenir un acte de naissance pour leurs enfants représentent un parcours incertain pour les familles camerounaises vulnérables. Graphique 6-14. Enfants scolarisés dans le primaire n’ayant pas d’acte de naissance par région, régions ZEP surlignées, nombre et pourcentage d’élèves, 2022 Élèves n’ayant pas d’acte de naissance RÉGION Élèves Nombre % ADAMAOUA 328 629 135 598 41,3% CENTRE 826 604 108 567 13,1% EST 346 351 176 612 51,0% EXTREME-NORD 1 046 333 436 112 41,7% LITTORAL 542 015 48 599 9,0% NORD 692 586 331 585 47,9% NORD-OUEST 167 344 45 245 27,0% OUEST 613 035 70 344 11,5% SUD 186 382 62 210 33,4% SUD-OUEST 195 011 71 817 36,8% TOTAL 4 944 290 1 486 689 00 30,1% Source : Annuaire 2022 du MINEDUB Cameroun. 72 D’après une publication récente de la Banque mondiale datant de 2023, les Camerounais dépensent en moyenne 32 700 XAF pour obtenir un acte de naissance au Cameroun, ce qui constitue une somme prohibitive dans un pays où 25,7 % de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté international de 2,15 USD en PPA par jour. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 136 6.2.4 Messages clés et recommandations 6.2.4.1 Dépenses d’éducation et efficacité Compte tenu des contraintes de ressources financières auxquelles le secteur public est confronté dans son fonctionnement, il est tout à fait justifié de rechercher des gains d’efficacité, c’est-à-dire les économies qu’on peut réaliser en promouvant une utilisation efficace des ressources. Les efforts visant à améliorer l’éducation devraient non seulement chercher à augmenter le financement, mais aussi à améliorer l’allocation et l’efficacité d’utilisation des ressources. Le système éducatif camerounais, en particulier dans les cycles primaire et secondaire, présente encore des opportunités d’amélioration de l’efficacité des dépenses. Ainsi, le suivi budgétaire pourrait être renforcé pour améliorer les taux d’exécution, assurer une utilisation efficace des ressources, de bonnes performances et une allocation intra sectorielle fondée sur les priorités, et réduire la corruption et le gaspillage. Le passage du modèle actuel basé sur des transferts budgétaires à des mécanismes de financement direct des écoles, y compris à travers un cadre de dépenses locales, pourrait améliorer la transparence, la redevabilité et l’allocation des fonds aux écoles. En outre, reconnaissant le fait qu’à 3,2 % du PIB du pays, les dépenses publiques d’éducation du pays continuent de se situer en deçà de ses objectifs de financement pour l’éducation, les contraintes budgétaires pourraient empêcher une augmentation des ressources du secteur sur le court terme. Les efforts doivent donc être axés sur l’amélioration de l’efficacité d’utilisation des ressources existantes afin d’obtenir de meilleurs résultats scolaires. Le gouvernement devrait aussi bien augmenter les ressources dédiées aux investissements visant à améliorer la qualité de l’éducation, qu’appuyer une exécution efficace du budget d’investissement. L’essentiel du budget pour l’éducation est alloué aux dépenses récurrentes, tandis que la part allouée aux investissements est relativement petite et en train de s’amenuiser. Le manque d’investissement en capital contribue à des environnements d’apprentissage de mauvaise qualité, qui à leur tour, contribuent à de faibles résultats scolaires. La performance des élèves du primaire camerounais au PASEC 2019 est inférieure à la moyenne régionale. De même, le faible taux d’exécution du petit budget d’investissement ne permettrait pas d’atteindre les résultats recherchés dans les limites des contraintes budgétaires. La réforme de la gestion des ressources humaines passerait par une réaffectation des dépenses et l’amélioration de l’efficacité. Divers documents stratégiques et études mettent en avant l’importance de réformer les politiques de la profession enseignante, en particulier dans l’enseignement secondaire. La stratégie de réforme de la Gestion des ressources humaines de l’État pour l’enseignement secondaire vise à améliorer les normes en matière de formation initiale, de sélection, d’affectation et de déploiement des enseignants, ainsi qu’en matière d’incitations professionnelles, de formation, de gestion des carrières et de planification prospective de la main-d’œuvre. La mise en œuvre de la stratégie nécessite d’augmenter les dépenses dédiées aux salaires des enseignants. Cette augmentation doit être largement soutenue par une plus grande efficacité de gestion des ressources humaines et l’élimination de tous les enseignants fantômes du système. En outre, il est impératif de prioriser le redéploiement et la rétention des enseignants afin de combler le manque d’enseignants rémunérés par l’État Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 137 dans les écoles présentant les besoins les plus pressants73 au lieu de systématiquement recruter des enseignants tant au niveau primaire que secondaire. Comme les enseignants ont un statut de fonctionnaires, leur mutation vers d’autres ministères ou postes administratifs au sein de leurs ministères de tutelle est une cause majeure de la faiblesse du ratio enseignant-élève et de la rétention. Pour s’attaquer à ce problème et réduire le flux d’enseignants passant à des postes administratifs au sein des ministères de l’Éducation ou d’autres ministères, il serait pertinent de renforcer les conditions de redéploiement et/ou d’affectation des enseignants à des postes administratifs dans les ministères de tutelle ou dans d’autres ministères. Pour le cas spécifique du MINEDUB, un des objectifs est de recruter un minimum de 18 000 nouveaux enseignants d’ici 2026. Cette mesure devrait porter la proportion des écoles publiques comptant chacune au moins 3 enseignants rémunérés par l’État de 43 à 95 %, sous réserve de maîtriser la déperdition irrégulière des enseignants. 6.2.4.2 Équité des dépenses et priorités Pour atteindre les objectifs stratégiques énoncés dans la SND30, le gouvernement doit éliminer tous les obstacles qui empêchent les enfants d’achever le cycle de l’enseignement de base, en particulier chez les plus marginalisés. Les autorités sont en train de finaliser une nouvelle stratégie sectorielle pour l’éducation et la formation (2023-2030) en adéquation avec la SND30, qui se fixe, entre autres objectifs stratégiques, de : (i) garantir l’accès de tous les enfants d’âge scolaire à l’enseignement primaire ; (ii) atteindre un taux d’achèvement de l’école primaire de 100 % ; (iii) réduire les disparités régionales en matière d’infrastructures scolaires et de personnel enseignant. Pour que ces objectifs se concrétisent, la question de l’acte de naissance doit être résolue de toute urgence à l’aide de mesures innovantes et durables. Des progrès significatifs ont été réalisés au cours des dernières années pour considérablement réduire les dépenses à la charge des parents, contribuant ainsi à alléger le fardeau de l’éducation et à réduire le risque d’abandon scolaire, en particulier dans les ZEP. L’école est officiellement gratuite, mais jusqu’à récemment, les dépenses qu’elle impliquait pour les ménages restaient très élevées, surtout dans le cycle primaire, finançant les postes d’enseignants manquants (par l’intermédiaire des associations de parents) et les manuels scolaires, ce qui rendait l’école trop chère pour les plus pauvres. Des progrès significatifs ont déjà été réalisés (avec l’appui de la Banque mondiale) et le financement des enseignants par les parents a été considérablement réduit. À l’avenir, le gouvernement devrait faire un suivi des dépenses à la charge des ménages, en s’aidant de sources telles que les enquêtes auprès des ménages, afin d’assurer la gratuité effective de l’enseignement primaire public, en particulier pour les plus pauvres et les plus défavorisés. Des mesures ont été prises depuis 2017 pour tâcher d’apporter une réponse à la question de la disponibilité et de l’accessibilité financière des manuels scolaires, autres éléments clés de l’éducation, mais il en faut d’autres pour assurer la pérennité de la politique d’accès 73 Certaines écoles primaires publiques comptent 100 élèves ou plus, et moins de 3 enseignants rémunérés par l’État. La banque s’efforce de combler l’écart en fournissant un appui continu à travers le projet PAREC, se fixant pour cible que 90 % des écoles atteignent cet objectif d’ici 2026. Dans la situation actuelle, cette proportion est d’environ 66 % alors que dans la situation de référence, elle était de 43 %. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 138 gratuit aux manuels scolaires. Le pays a ramené son ratio manuel/élève à un paquet de trois manuels essentiels (français, anglais et mathématiques) pour deux élèves (en 2022), a réduit de moitié le coût unitaire des manuels en 2021 et a institué une politique de titres uniques pour les manuels scolaires de chaque matière sur l’ensemble du système éducatif. À l’avenir, avec la montée des prix des manuels scolaires, le gouvernement devrait envisager de fournir gratuitement des manuels scolaires aux ZEP, en prévoyant un fonds ou une ligne budgétaire dédié(e) pour cela. Le financement du gouvernement en appui à l’édition, à l’impression et à la distribution des manuels scolaires, dont la coordination sur l’ensemble des parties prenantes est assurée par la Primature, contribuerait également à maintenir la disponibilité et l’accessibilité financière des manuels. Pour réaliser les objectifs nationaux en matière d’éducation, il faudra éventuellement s’attaquer directement aux disparités existant entre les régions, les milieux, les revenus, les sexes et autres catégories : (i) la poursuite de la décentralisation pourrait apaiser les tensions politiques et sociales et améliorer l’efficacité dans la réalisation des résultats dans le secteur de l’éducation ; (ii) des réformes devraient être entreprises face aux barrières administratives qui imposent des coûts élevés aux pauvres ; et (iii) les dépenses d’éducation à la charge des parents doivent être revues. La décentralisation budgétaire dans les régions affectées par des conflits est un outil qui pourrait améliorer la qualité de l’éducation, canaliser les ressources vers les régions à la traîne et promouvoir la stabilité. La formule de financement des écoles, dans le cadre de laquelle le financement et la responsabilité de la prestation des services éducatifs sont transférés à chaque école, est un élément clé de la décentralisation de l’éducation. En même temps, lorsqu’on constate l’existence d’un obstacle administratif à la réussite des élèves, tel que l’exigence d’un acte de naissance pour s’inscrire à l’examen de fin d’études primaires et à l’entrée au collège, le gouvernement devrait intervenir pour en atténuer l’impact sur les pauvres en dispensant certains groupes ou en éliminant l’exigence. Enfin, même si le financement des enseignants par les parents a été considérablement réduit, le gouvernement doit faire un suivi des dépenses à la charge des ménages, en s’aidant de sources telles que les enquêtes auprès des ménages, afin d’assurer la gratuité effective de l’enseignement primaire public, en particulier pour les plus pauvres et les plus défavorisés. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 139 6.3 Investir dans un secteur de la santé efficace, inclusif et résilient L’effet conjugué de divers défis a entravé la réalisation de plusieurs objectifs ambitieux fixés dans le cadre de la Revue des dépenses publiques (PER) de la Banque mondiale en 2018 et définis dans les politiques et les plans stratégiques nationaux du Cameroun. La sous-performance du système de santé est principalement attribuable à l’insuffisance de financement, à la faible disponibilité et la faible qualité des services de santé et à l’inefficacité de la gestion du système de santé. Ce chapitre présente une analyse approfondie du secteur de la santé, se concentrant sur l’état actuel des indicateurs de santé essentiels et offrant une évaluation des avancements réalisés dans la mise en œuvre des recommandations du PER de 2018. Les constats et les recommandations prospectives aborderont des domaines critiques tels que le financement des soins de santé, l’accès aux services de santé et la qualité de ceux-ci, ainsi que la gestion des ressources de soins de santé. Un résumé complet de ces recommandations est présenté dans un tableau à la fin de ce chapitre. Encadré 6-3. Stratégie de santé du Cameroun (SSC), 2016-2027 Le Gouvernement du Cameroun a élaboré une Stratégie sectorielle de la santé (SSS) pour la période 2016-2027, dans le but général de parvenir à un accès équitable et universel à des services de santé de qualité. Cette stratégie contribue à l’objectif de promouvoir la santé et la productivité du capital humain afin de l’habiliter, à son tour, à générer une croissance économique forte, inclusive et durable. La SSS pose des buts et des objectifs spécifiques dans plusieurs domaines essentiels : • Promotion de la santé : Cet aspect de la stratégie est axé sur le renforcement des capacités institutionnelles et communautaires, l’amélioration des milieux de vie, la promotion de comportements sains et l’encouragement des pratiques familiales essentielles. • Prévention des maladies : Les objectifs ici sont de réduire l’impact et la prévalence des maladies transmissibles, d’éliminer les maladies tropicales négligées, de réduire le risque d’événements majeurs de santé publique, d’augmenter la couverture des interventions de prévention et de réduire la prévalence des principales maladies non transmissibles. • Prise en charge : Cette composante vise à assurer la prise en charge efficace des maladies transmissibles et non transmissibles, y compris leurs complications. Elle cible également la prise en charge des problèmes de santé des mères, des nouveau-nés, des enfants et des adolescents, des urgences médicales et des événements de santé publique, tout en s’efforçant de réduire les handicaps qui peuvent être corrigés. • Renforcement du système de santé : Le but principal ici est de réduire les paiements directs effectués par les ménages pour leurs soins de santé, d’assurer la disponibilité des infrastructures, des équipements et des programmes de soins de santé nécessaires, d’augmenter l’accès à des produits pharmaceutiques de qualité, de renforcer la disponibilité de professionnels de santé qualifiés et d’améliorer la disponibilité d’informations sanitaires de qualité pour permettre une prise de décision fondée sur des données factuelles. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 140 • Gouvernance et pilotage stratégique : Le but de cette partie de la stratégie est de normaliser, réglementer et améliorer la redevabilité au sein du système de soins de santé. L’accent est également mis sur le renforcement de la planification, de la supervision, de la coordination et du suivi stratégique de la santé à tous les niveaux du système de santé. Pour cause de contraintes budgétaires, le gouvernement compte prioriser les interventions à haut niveau d’impact, en accordant une attention particulière à la santé de la mère et de l’enfant. De plus, il se concentrera sur la lutte contre les maladies transmissibles et non transmissibles qui contribuent de manière significative à la charge de morbidité globale dans le pays. Source : Stratégie sectorielle de la santé du Cameroun (SSS) 2016-2027. 6.3.1 Performance du secteur de la santé En termes de performance, le secteur de la santé du Cameroun est nettement à la traîne comparé aux autres PRITI d’Afrique subsaharienne (AfSS). En ce qui concerne les principaux indicateurs de santé tels que l’espérance de vie, la prévalence du VIH, l’incidence du paludisme et de la malnutrition, la mortalité chez les enfants âgés de moins de cinq ans et la mortalité maternelle, le Cameroun se classe parmi les PRITI les moins performants d’AfSS (Graphique 6-15, Graphique 6-16). En outre, les résultats en matière de santé indiquent de fortes inégalités régionales et en rapport aux niveaux de revenus au sein du pays. Les défis auxquels le secteur de la santé fait face comprennent la faiblesse de l’accès aux équipements médicaux et aux médicaments essentiels, une pénurie de professionnels de la santé qualifiés et motivés, le manque d’accès physique aux formations sanitaires dans de nombreuses régions, la mauvaise qualité du service et un sous-financement général (avec des dépenses de santé qui représentent 3,9 % du budget public). De plus, en l’absence de couverture d’assurance maladie complète, les paiements à la charge des ménages sont élevés, représentant plus de 65 % des dépenses totales de santé et entraînant des coûts de soins de santé catastrophiques pour les ménages. Les défis auxquels le secteur de la santé est confronté sont aggravés par la faiblesse de la préparation et de la réponse aux épidémies et sont encore exacerbés par les crises sociopolitiques et sécuritaires. Le Cameroun se heurte à des écueils dans les efforts qu’il mène pour fournir des services de santé fiables et abordables. Ces défis comprennent les crises politiques, institutionnelles et socioéconomiques, les conflits régionaux et le fardeau supplémentaire de la pandémie de COVID-19. Avec l’augmentation du taux d’extrême pauvreté de 24,5 % en 2019 à 25,3 % en 2021, il est devenu de plus en plus difficile pour de nombreux Camerounais d’accéder aux services de santé. En outre, la pandémie de COVID-19 a mis à rude épreuve les services de soins de santé primaires, entraînant une moindre utilisation des services essentiels. Par exemple, le nombre des consultations externes a chuté de 7 %, le recours aux soins prénataux de 8 % et une baisse a été enregistrée dans divers services de vaccination (5 % pour le vaccin Penta 3, 5 % pour la polio, 7 % pour la rougeole) et les hospitalisations ont baissé de 10 %. La région de l’Ouest en particulier a Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 141 connu d’importantes perturbations dans la prestation de services de santé du fait de la crise sociopolitique dans les régions anglophones (Encadré 6-1). Les crises internes, les déplacés internes et les réfugiés étrangers ont entrainé une augmentation de la demande pour des services de santé et du coût de prestation de ces services à ces populations affectées. Le gouvernement a réagi de façon rapide et décisive à la pandémie de COVID-19. Le Cameroun a été l’un des pays les plus affectés d’AfSS et le premier d’Afrique centrale en termes de nombre de cas confirmés de COVID-19,74 et le gouvernement a mis en œuvre 19 mesures pour atténuer la pandémie. Celles-ci comprenaient des tests généralisés, le traitement et l’intégration des soins de santé mentale dans la réponse nationale. Cette prise d’action décisive lui a permis de réouvrir les écoles en juin 2021, d’accueillir le championnat d’Afrique de football en janvier 2021 et d’atténuer l’impact de la deuxième vague de la pandémie. Cependant, le fardeau financier associé à ces efforts de réponse à la pandémie a été considérable. Encadré 6 4. Principaux constats des audits du Fonds COVID-19 Les autorités camerounaises ont répondu à la pandémie de COVID-19 par un plan global, à savoir le Plan de riposte global, dans le cadre duquel 479 milliards XAF ont été alloués sur une période de 3 ans, avec 296 milliards XAF réservés pour l’année financière 2020. Le Compte d’affectation spéciale pour la COVID-19 (CAS-COVID) a été mis en place avec un budget de 180 milliards XAF pour gérer ces fonds. Le CAS-COVID a couvert 24 ministères et avait pour objectif d’apporter une réponse aux impacts sanitaires et socioéconomiques de la pandémie. Il a fait l’objet de deux audits visant à évaluer l’utilisation des fonds publics et la performance des politiques, l’un pour l’année fiscale 2020 et l’autre pour l’année fiscale 2021. Principaux constats: Manque de comptabilité centralisée : La communication d’informations d’ordre non sanitaire des centres de soins au Ministère de la Santé Publique manquait d’organisation, ce qui a affecté la coordination stratégique et la riposte à la pandémie. Opacité de l’adjudication de contrats spéciaux : Le processus d’adjudication des contrats spéciaux manquait de transparence, menant éventuellement à des abus. D’après les conclusions de l’audit, certaines pratiques pourraient constituer des délits. Le recours à des procédures dérogatoires au-delà de juillet 2020 a été jugé coûteux et d’une moindre efficacité. Difficultés à collecter des informations comptables fiables : Les équipes de contrôle ont rencontré des difficultés considérables pour collecter des informations comptables exactes. L’audit a mis en avant l’importance de maintenir des contrôles financiers et d’accélérer les réformes comptables, en particulier l’informatisation. 74 Linda Esso, et al., La réponse audacieuse du Cameroun à la pandémie de COVID-19 pendant les première et deuxième vagues, Lancet, 21 (août 2021), pp. 1064- 1065. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 142 Les principales recommandations à l’endroit du Ministère de la Santé sont : • Mettre en place un système de prime standardisé pour le personnel de soins de santé lors des urgences. Elaborer des indicateurs de performance pour la gestion administrative. • Créer une application informatique centralisée pour les données statistiques. • Mettre en œuvre un mécanisme de sauvegarde de données pour les statistiques en rapport à la pandémie. Elaborer des procédures administratives, financières et opérationnelles pour le Système de gestion d’incident. • Publier une liste des contrats attribués dans le cadre du Programme 971 sur le site web du Ministère en la mettant à jour régulièrement, affichant notamment les détails du contrat et les informations relatives aux entreprises. Source : Chambre des Comptes 2021, 2023 En réponse aux défis auxquels il est confronté en matière de santé, le Cameroun a lancé plusieurs initiatives, y compris la mise en œuvre de la couverture santé universelle (CSU) et l’accélération du processus de décentralisation. Des avancements significatifs ont été réalisés en matière de décentralisation, marqués par l’adoption de règlements et de décrets majeurs. À noter que des décrets datant de 2021 ont établi le cadre de décentralisation, transférant aux collectivités territoriales des responsabilités essentielles telles que celle de la santé. Un décret crucial en date de février 2023 a transféré davantage de compétences du gouvernement central aux autorités régionales, démontrant un engagement en faveur d’une gouvernance plus localisée des soins de santé. Parallèlement à ces efforts, des progrès ont été réalisés dans l’adoption de la CSU. L’engagement du Cameroun en faveur de la CSU remonte à 2012, et des analyses détaillées des implications de la CSU sont en cours depuis 2015. Malgré quelques retards au début, la CSU a été officiellement lancée dans la région de l’Est en avril 2023. Le pays a également un historique remarquable dans la mise en œuvre de divers projets de financement des soins de santé, avec plus de 30 qui sont actuellement actifs, parmi lesquels 19 sont appuyés par des bailleurs.75 Cependant, d’importants défis demeurent, notamment en ce qui concerne la maîtrise des coûts de la CSU et l’harmonisation des différentes approches de financement des soins de santé, qui sont cruciales pour une prestation efficace et durable des services de santé à l’échelle nationale. 6.3.2 Résultats du secteur de la santé Même si les indicateurs de santé se sont améliorés au cours des six dernières années, les améliorations n’ont pas été significatives. Comparées à celles enregistrées dans d’autres pays de la région et ceux ayant des revenus similaires, les améliorations relevées dans le secteur de la santé au Cameroun ont été décevantes. L’espérance de vie a légèrement augmenté entre 2017 et 2019, mais cette amélioration a été affectée par l’impact de la COVID-19 au cours des dernières années, et le Cameroun figure parmi les 75 Strategic Health Purchasing in Cameroon (SPARC), mai 2021. Dans la note d’orientation, les différents projets sont judicieusement classés en catégories et leur avancement et les défis associés sont indiqués. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 143 pays ayant réalisé le moins de progrès en matière de réduction du retard de croissance. Malgré une baisse du taux de fécondité, s’accompagnant d’une amélioration des taux de mortalité maternelle, ces derniers restent élevés. Même si certaines baisses des taux de mortalité des nouveau-nés et des nourrissons ainsi que chez des enfants de moins de cinq ans ont été enregistrées, la performance du Cameroun a été, au mieux, médiocre par rapport à celle de la région et des pays aux revenus comparables (Graphique 6-15, Graphique 6-16). Les résultats des enquêtes périodiques relatives aux indicateurs clés de la santé de la reproduction et de la planification familiale sont moyens. Les indicateurs clés de la nutrition et de la santé des enfants indiquent des résultats mitigés. La sous-alimentation et l’insécurité alimentaire ont augmenté, le retard de croissance n’a diminué que légèrement et les principales interventions en matière de santé de l’enfant ont été sporadiques. Les résultats du Cameroun en matière de vaccination sont particulièrement mauvais. Les comparaisons à l’échelle de la région et au sein du groupe de revenus sont à l’image des résultats précédents. Les indicateurs varient considérablement selon les régions et les quintiles de revenu, les pires résultats étant enregistrés dans les zones les plus reculées et parmi les populations les plus vulnérables.76 Les populations du Nord du Cameroun se trouvent dans la pire situation : l’Extrême-Nord, le Nord, l’Adamaoua et l’Est enregistrent constamment les pires résultats. À titre d’exemple, le taux de mortalité infanto- juvénile relevé dans le Nord est plus de quatre fois supérieur à celui relevé à Yaoundé. D’énormes disparités sont relevées en matière de malnutrition infantile, l’incidence de la malnutrition aiguë chez les enfants de moins de 5 ans dans l’Extrême-Nord étant 11 fois plus élevée que dans l’Ouest. En outre, l’utilisation des services de santé maternelle tels que la vaccination des enfants, les soins prénataux, les accouchements assistés et la planification familiale moderne varie considérablement selon les régions. Par exemple, la couverture des accouchements assistés dans l’Ouest, le Nord-Ouest, à Yaoundé Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group et à Douala est environ trois fois plus élevée que dans le Nord et l’Extrême-Nord. Les zones rurales et isolées sont désavantagées parce qu’elles disposent non seulement de moins de formations sanitaires que les zones urbaines mieux connectées, mais sont également confrontées à des difficultés liées à la rétention du personnel de santé. Dans toutes les régions, le nombre de formations de soins primaires par habitant est fortement corrélé aux taux de mortalité infantile.77 76 PER de 2018, p. 120–122. 77 Banque mondiale, Cameroon Deepening Decentralization to improve Service Delivery, Note conceptuelle, p. 6. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 144 Graphique 6-15. Même s’il s’est amélioré au cours de ces Graphique 6-16. … et le niveau de mortalité infantile y est dernières années, le niveau de mortalité maternelle au plus élevé que dans la plupart de ses pays pairs. Cameroun reste très élevé… 900 80 800 70 60 700 50 600 40 500 30 20 400 10 300 0 Ouzbekistan Égypte PFR AfSS Côte d'Ivoire Bolivie Sénégal Guatemala Cameroun Kenya Ghana 200 100 0 2000 2005 2010 2015 Cameroun AfSS Pairs structurels Pairs aspirationnels PRITI PFR 2010 2020 PRITS PRE Remarque : Mortalité maternelle (pour 100 000 naissances vivantes). Remarque : Mortalité infantile (pour 1 000 naissances vivantes). Source : WDI. Source : WDI. Graphique 6-17. Pourcentage de femmes enceintes Graphique 6-18. Pourcentage des enfants vaccinés âgés couvertes par la thérapie ARV de 12 à 23 mois 100 100 90 90 80 80 70 70 60 60 50 50 40 40 30 30 20 20 10 10 0 0 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 Cameroun AfSS PRITI Cameroun AfSS PRITI Source : WDI Source : WDI Selon l’indice d’accès et de qualité des soins de santé (HAQ), la qualité des services de santé au Cameroun a considérablement baissé au cours de la dernière décennie. Malgré des investissements notables dans les niveaux secondaires et tertiaires des soins de référence, l’inégalité d’accès à des formations sanitaires adéquatement équipées demeure. La pénurie de ressources humaines dans le secteur de la santé constitue un problème critique, exacerbé par les conditions de travail difficiles des prestataires de soins de santé. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 145 Le pays est confronté à de graves contraintes de ressources administratives, techniques et financières pour faire face aux crises immédiates et couvrir les besoins à long terme permettant de parvenir à la couverture santé universelle (CSU). La forte dépendance envers l’importation pour l’approvisionnement en médicaments (environ 98 % des médicaments sont importés) et le fonctionnement de la chaîne d’approvisionnement a eu un impact négatif sur la disponibilité des médicaments et des fournitures médicales essentiels. La mise en œuvre du Financement basé sur la performance (FBP) n’a également généré qu’un faible impact. Graphique 6-19. Faible qualité des soins de santé au Cameroun 187 175 171 153 150 123 111 Côte Sénégal Cameroun Ghana Kenya Guatemala Égypte d'Ivoire Source : Lancet, 2 juin 2018. Remarque : Indice d’accès et de qualité des soins de santé. Le fait que les soins cliniques manquent de qualité et ne soient pas complets compromet gravement les soins de santé maternelle et infantile. L’observation directe de consultations externes d’enfants de moins de 5 ans souffrant de diarrhée a montré que seulement 20 % des prestataires de soins de santé procèdent à une évaluation clinique complète de l’enfant. Cette estimation variait selon les régions et la valeur la plus faible a été relevée dans le Nord (13 %). De plus, ces observations directes ont permis de savoir que la plupart des prestataires de soins de santé des régions du Nord-Ouest, du Sud- Ouest et de l’Est proposaient des consultations prénatales de qualité, tandis que dans l’Adamaoua, l’Extrême-Nord et le Nord, cette qualité était variable, avec des scores de qualité d’environ 40 % ou moins en moyenne (PER de 2018, p. 124-125). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 146 L’indice d’accès et de qualité des soins de santé (HAQ) montre une performance baissière du système de prestation des services de santé du Cameroun. Figurant déjà parmi les scores les plus faibles au monde en 2015, l’indice HAQ du Cameroun est resté pratiquement inchangé depuis 2018. Seuls 48 % des hôpitaux remplissent les critères de bonne performance hospitalière.78 Les résultats des entretiens d’évaluation de la perception du personnel de santé dans 53 hôpitaux publics sont étayés par des données provenant d’autres sources indiquant l’insuffisance de la qualité de prestation des services de santé au Cameroun. Tableau 6-1. Indice d’accès et de qualité des soins de santé au Cameroun, 2010-19 2010 2015 2016 2019 42,5 44,4 32,0 33,7 Jeune (0-14 ans) 39,9 Actif (15-64 ans) 37,0 Post-actif (65-74 ans) 33,5 Source: 2010–2015: Indice HAQ, Lancet 2017: 251; 2016: Measuring Performance on the HAQ Index, Lancet 2018: 391: 2245; 2019: Indice HAQ, Lancet 2022, 10: e1727. 6.3.3 Dépenses dans le secteur de la santé Les dépenses totales de santé au Cameroun ont connu une certaine croissance au cours des dernières années, mais elles restent relativement faibles en pourcentage des dépenses totales ou en dépenses de santé par habitant. D’où l’extrême difficulté à faire face aux défis du secteur et un taux de dépenses de santé à la charge des ménages parmi les plus élevées dans le monde. Le Cameroun n’a pas encore réussi à atteindre la cible de 15 % du budget du Gouvernement alloué au secteur de la santé fixée par la Déclaration d’Abuja de 2001. Au lieu de cela, la part du budget global qu’il a allouée à la santé se situe en moyenne entre 4 et 5 % (Graphique 6-20). Les dépenses publiques de santé, exprimées en pourcentage du total des dépenses publiques, ont connu une baisse significative au cours des années précédant le PER de 2018. Depuis lors, elles se sont quelque peu redressées, atteignant l’équivalent de 3,7 % en 2021. Malgré cela, les dépenses de santé du Cameroun sont restées relativement stables, oscillant entre l’équivalent de 3,4 et 3,7 % du PIB. Comparé à d’autres pays africains et à ses pairs en termes de revenus, le Cameroun se classe au dernier rang en termes de dépenses publiques de santé exprimées en proportion des dépenses totales de santé et présente 78 Alain Gilles Foka Tagne, et al., Appréciation de la performance hospitalière des hôpitaux publics au Cameroun : une perception du personnel de santé, Journal of Academic Finance, Vol. 11, 2 (Automne 2020), 330-344. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 147 l’une des proportions de dépenses de santé à la charge des ménages les plus élevées au monde. De 2015 à 2021, les dépenses courantes de santé sont passées de 1,16 milliard USD à 1,54 milliard USD. Toutefois, avec la croissance démographique du pays d’environ 15 % entre 2015 et 2021, les dépenses de santé par habitant ont varié entre 50 et 58 USD. D’après les projections de l’Institute for Health Metrics and Evaluation, les dépenses totales de santé (DTS) diminueront en 2023, se redresseront en 2024 et atteindront 1,91 milliard USD d’ici 2030, avec des DTS par habitant projeté à 53 USD la même année. Il ne restera probablement donc que peu d’espace budgétaire pour relever les défis du secteur de la santé. L’insuffisance des ressources financières publiques allouées au secteur de la santé a favorisé une dépendance envers les financements externes et privés. Au cours des dernières années, les dépenses de santé à la charge des ménages et l’aide extérieure en rapport à la santé ont considérablement augmenté (alors que leurs niveaux étaient déjà élevés). Actuellement, les dépenses intérieures privées de santé constituent la majeure partie des DTS, les dépenses à la charge des ménages étant particulièrement courantes. Celles-ci s’élevaient en moyenne à 40 USD au cours des années qui ont précédé la pandémie de COVID-19. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 148 Graphique 6-20. Dynamique des dépenses de santé b. Le gouvernement ne couvre qu’une petite part des dépenses de a. Les ressources allouées au secteur de la santé sont insuffisantes. santé. 5 000 000 6,0 % En % PIB 4 000 000 5,0 % 4,0 4,0 % 3,0 3 000 000 CFAF 3,0 % 2,0 2 000 000 2,0 % 1,0 1 000 000 1,0 % 0,0 2015 2016 2017 2018 2019 2020 0,0 % 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Budget national Dépenses de santé courantes (DSC) Budget alloué à la santé Dépenses de santé intérieures générales Variation annuelle du gouvernement (DSIG-G) d. Même s’il a augmenté, le niveau des dépenses de santé du c. Dépenses intérieures de santé du gouvernement, 2000-2019 Cameroun reste inférieur à celui de ses pays pairs de la région et du groupe de revenus. 2,5 Tendances des dépenses de santé du gouvernement (DSG) 40,0 par habitant 2,0 1,5 30,0 1,0 20,0 0,5 10,0 0,0 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18 0,0 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 00 02 04 06 08 10 12 14 16 18 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 20 Cameroun Revenu intermédiaire Afrique subsaharienne tranche inf PFR AfSS CMR AFO e. Les dépenses privées représentent la plus grande partie des f. Les dépenses à la charge des ménages dans le système de santé dépenses totales de santé. camerounais sont élevées. 100 % 100 % 80 % 98 % 60 % 96 % 40 % 20 % 94 % 0% 92 % 2015 2016 2017 2018 2019 2020 90 % 88 % Dépenses privées domestiques de santé 86 % Dépenses extérieures de santé 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Dépenses publiques de santé Paiements directs Pré-paiements volontaires Source: OMS, https://apps.who.int/nha/database/Select/Indicators/fr Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 149 Il y a peu de données disponibles sur l’allocation des dépenses de santé. Les données des Comptes nationaux de santé (CNS) ne renseignent que sur les dépenses réelles effectuées entre 2018 et 2019, tandis que les données BOOST ne couvrent que les dépenses approuvées de 2015 à 2021 (Tableau 6-2). Même si les deux sources présentent des données similaires en termes d’allocations budgétaires initiales, des divergences sont relevées au niveau des dépenses réelles (engagements). L’analyse des données BOOST a, de ce fait, été axée uniquement sur les allocations budgétaires par catégorie budgétaire, ces données étant fortement concentrées au niveau central et dans la fonction administrative. Il n’en reste pas moins que les données disponibles indiquent de grandes différences entre les budgets initiaux et les engagements. Tableau 6-2. Données BOOST vs données Comptes Nationaux de Santé (CNS), 2015-2020 2015 2016 2017 2018 2019 2020 BOOST : 213 600 250 000 235 951 696 000 208 100 000 000 178 204 040 197 206 712 197 206 188 815 291 087 Budget initial CNS : Total 207 600 000 000 236 157 000 000 208 195 000 000 175 540 000 000 207 943 000 000 213 651 000 000 alloué BOOST : 213 612 595 241 205 202 705 162 164 628 825 523 130 767 648 079 145 186 370 307 139 261 650 999 Ordonnancé CNS : Total 191 250 000 000 233 600 000 000 185 000 000 000 172 469 000 000 190 418 000 000 212 515 000 000 dépensé BOOST : 100,0 % 87,0 % 79,1 % 73,4 % 70,2 % 73,8 % % dépensé CNS : 92,1 % 98,9 % 88,9 % 98,3 % 91,6 % 99,5 % % dépensé Sources : Autorités camerounaises, MINFI, MINSANTE, calculs des services de la Banque mondiale. Graphique 6-21. Écart entre les allocations budgétaires initiales et les engagements Pourcentage de changement entre 350 40 % le budget initial et l'engagement 300 20 % 250 0% 200 150 -20 % 100 -40 % 50 -60 % 0 2018 2019 2020 2021 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Dépenses de santé en capital Budget voté Budget exécuté Dépenses courantes en santé Source: BOOST. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 150 Au cours des dernières années, les priorités en matière de dépenses de santé du Cameroun ont changé.79 Entre 2015 et 2018, les investissements dans les soins de santé représentaient en moyenne 55,9 % des dépenses totales en soins de santé, toutefois, ce pourcentage est retombé à une moyenne de 45,7 % au cours des années 2019 à 2021, ce qui indique une baisse des investissements dans les soins de santé. En revanche, les dépenses de fonctionnement au sein du secteur de la santé ont augmenté de 48,3 % des dépenses totales à 54,2 % au cours de la même période (Graphique 6-22). Malgré ce changement de priorités en matière de dépenses, l’allocation des dépenses de santé par maladie et par fonction est restée relativement inchangée entre 2015 et 2021. La majorité des dépenses de santé a été allouée aux « autres dépenses de gouvernance », et des différences significatives ont été relevées entre le budget initial adopté, le budget révisé et les engagements réels au sein du secteur de la santé au cours de cette période. Graphique 6-22. Changement des priorités du gouvernement en matière de dépenses de santé a. Les dépenses de fonctionnement ont augmenté… b. …principalement les dépenses salariales. en % des dépenses publiques de santé 100 % 70 80 % 60 60 % 50 40 % 40 30 20 % 20 0% 10 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 0 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Biens et services Investissment Fonctionnement Subventions/Transferts Salaires Source : Source : BOOST, MINFI et calculs des services de la Banque Mondiale. La centralisation de l’exécution budgétaire au Cameroun entrave une allocation efficace des ressources aux interventions de santé à haut niveau d’impact, notamment les soins primaires, les mesures préventives et les services de santé communautaire. Environ 90 % des ressources publiques sont allouées au niveau administratif central. À cause de cette approche centralisée, une part importante des dépenses publiques de santé est absorbée par les coûts administratifs. Pour améliorer le système de santé, il est impératif d’assurer une répartition plus équitable des ressources budgétaires au sein du secteur de la santé. Cela impliquerait de canaliser les fonds vers les formations de niveau district offrant des soins rentables, tels que les soins primaires, les services préventifs et les 79 Les données des CNS corroborent les données BOOST en ce qui concerne la stabilité relative des dépenses par fonction, type de service et maladie. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 151 programmes de santé communautaire, assurant ainsi un meilleur accès et une meilleure qualité des services de santé, en particulier dans les régions mal desservies. Le sous-financement systématique des formations de soins primaires fait que le coût des soins de santé est transféré aux ménages. Au total, 99 % des dépenses de santé des ménages sont des paiements directs versés aux prestataires de soins de santé au moment de la prestation des services, tant pour les soins cliniques que pour les médicaments. Les fonds générés à partir des frais d’utilisation et de la vente de médicaments représentent entre 50 et 100 % du budget de fonctionnement des formations sanitaires publiques et privées au Cameroun, ce qui est inefficace et inéquitable et entrave l’accès des pauvres. Même si les frais d’utilisation peuvent être une source importante de financement de la santé, ils ne devraient pas devenir la principale source de financement des formations sanitaires. Les dépenses publiques allouées aux programmes s’attaquant aux principales causes de morbidité et de mortalité au Cameroun sont insuffisantes. Entre 2019 et 2021, le gouvernement a alloué environ 64 % du budget de la santé à la prise en charge des maladies. Cependant, les allocations budgétaires pour les services et programmes de prévention et de promotion de la santé à fortes externalités positives sont principalement constituées par les dépenses administratives au niveau du gouvernement central. De ce fait, la fourniture de ces services au niveau des prestataires est presque entièrement financée par des partenaires externes et les ménages, une situation qui est préoccupante. Ce modèle d’allocation révèle une disparité entre les priorités de santé déclarées et les allocations budgétaires réelles. L’émergence de plusieurs épidémies nécessitant d’allouer des ressources au traitement des cas existants explique éventuellement l’accent mis sur la prise en charge des maladies plutôt que sur les initiatives de prévention et de promotion de la santé. La fourniture de ces services essentiels est, en conséquence, fortement dépendante du financement des partenaires externes et de chacun des ménages. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 152 Graphique 6-23. Allocation des dépenses par fonction et maladie, 2019-2021 (pourcentage des dépenses totales de santé du gouvernement) Allocation des dépenses par fonction Allocation par type de prévention (en % des dépenses totales en santé) (% des dépenses totales à la prévention des maladies) 100 % 100 % 90 % 80 % 80 % 70 % 60 % 60 % 50 % 40 % 40 % 20 % 30 % 20 % 0% 10 % 2019 2020 2021 0% Maladies tropicales négligées Maladies chroniques non transmissibles 2019 2020 2021 Maladies chroniques non transmissibles Maladies à potentiel épidémiologique Maladies à potentiel épidémiologique Soins préventifs Transmission mère-enfant du VIH-SIDA VIH/SIDA, Tuberculose, Hépatites virales et Gouvernance et Appui institutionnel infections de courte durée Promotion de la santé Transmission mère-enfant du VIH-SIDA VIH/SIDA, Tuberculose, Hépatites virales et Soins curatifs infections de courte durée Autres maladies Malaria Composition des dépenses de santé publiques Allocation géographique des dépenses de santé (en % des dépenses totales de santé) 100 % 100 85 % 80 70 % 60 55 % 40 % 40 25 % 20 10 % 0 -5 % 2019 2020 2021 2019 2020 2021 00 ADMINISTRATION CENTRALE 10 RÉGION DE L'ADAMAOUA Développement urbain 11 RÉGION CENTRALE 12 RÉGION DE L'EST Controle des maladies et des épidémies 13 RÉGION DE L'EXTREME-NORD 14 RÉGION DU LITTORAL Soins de santé primaire Soins de santé secondaire Soins de santé tertiaire Frais administratifs Autres Source : CNS, BOOST. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 153 L’élaboration d’une stratégie de financement du secteur de la santé a avancé, mais aucun plan stratégique global n’a encore été adopté. Le Ministère de la Santé, avec l’aide de la Banque mondiale et d’autres partenaires au développement, a formulé une stratégie de financement de la santé ainsi que des modalités de mise en œuvre qui ont été soumises au gouvernement pour approbation formelle.80 Cependant, l’avancement vers la mise en œuvre d’autres éléments connexes d’une stratégie de financement du secteur de la santé a été lent, notamment en termes de décentralisation de l’autorité à budgétiser, financer et mettre en œuvre les initiatives de santé locales et à adopter des lois, réglementations et outils pour la CSU. Depuis le PER de 2018, le Cameroun s’est heurté à des défis majeurs dans l’introduction de l’assurance maladie à base communautaire (mutuelles de santé) et de la CSU. Même si leur nombre a augmenté entre 1998 et 2010, les mutuelles ne couvrent qu’un faible pourcentage de la population, sans jamais dépasser 3 % (EDS 2018). En 2014, seules 43 mutuelles étaient encore opérationnelles, fournissant une couverture à 63 000 personnes, ce qui ne constitue que 0,2 % de la population.81 Malgré ces défis, le pays a œuvré pour jeter les bases de la mise en œuvre de la CSU82 depuis 2015. Même si le coût estimatif élevé d’environ 3 milliards USD, constitue un obstacle important, la région de l’Est a commencé à mettre en œuvre la CSU en avril 2023. L’insuffisance des ressources financières publiques allouées au secteur de la santé a favorisé une dépendance envers les sources extérieures de financement et les ménages. Il n’y a guère eu d’avancement depuis le PER de 2018. Les dépenses privées intérieures de santé, et en particulier les dépenses à la charge des ménages, constituent la grande majorité des dépenses de santé actuelles. Comme indiqué plus tôt, les dépenses publiques de santé du Cameroun, exprimées en pourcentage des dépenses publiques totales, figurent parmi les plus faibles au monde Tableau 6-3. À cause de cela, les dépenses à la charge des ménages camerounais, exprimées en proportion des DTS se classent parmi les plus élevées au monde. Les dépenses à la charge des ménages s’élevaient en moyenne à environ 40 USD au cours des années qui ont précédé la pandémie de COVID-19. 80 Ministère de la Santé, Stratégie de Financement de la Santé (Avril 2020). 81 Voir F. Fouakeng, et al., Couverture Santé Universelle au Cameroun : Etat des lieux et défis à relever pour accélérer cette réforme. https ://d2s5011zf9ka1j. cloudfront.net/sites/default/files/2020-07/Article-CSU-Cameroon.pdf ; et Chenjoh Joseph Nde, et al., Reaching Universal Health Coverage by 2035 : Is Cameroon on Track? Universal Journal of Public Health 7(3) 2019 : 110-117. 82 Nde, et al. donnent un tableau complet des étapes tandis que Fouakeng et al. cernent les principaux défis. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 154 Tableau 6-3. Financement des dépenses de santé Dépenses Courantes de santé (DCS) 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Pourcentage des DCS Dépenses intérieures générales de santé du 10,1 % 10,2 % 4,2 % 9,7 % 11,1 % 16,3 % gouvernement (DIGSG) Dépenses externes de santé (EXT) 9,9 % 9,8 % 9,5 % 14,3 % 13,0 % 11,9 % Dépenses intérieures privées de santé (DIPS) 80,0 % 80,0 % 86,4 % 76,0 % 75,8 % 71,8 % Dépenses à la charge des ménages 69,9 % 70,0 % 75,6 % 72,3 % 72,2 % 68,3 % Paiements anticipés volontaires 7,1 % 7,1 % 7,7 % 3,4 % 3,3 % 3,2 % DCS par habitant en USD 50,3 51,2 50,2 57,7 56,1 58,0 Dépenses intérieures générales de santé du 5,0 5,2 2,0 5,6 6,2 9,4 gouvernement (DIGSG) Dépenses externes de santé (EXT) 4,9 5,0 4,7 8,2 7,3 6,9 Dépenses intérieures privées de santé (DIPS) 40,2 40,9 43,4 43,8 42,6 41,6 Dépenses à la charge des ménages 35,1 35,8 38,0 41,7 40,5 39,6 Source: https://apps.who.int/nha/database Le financement privé est la source principale de financement des dépenses de santé. En outre, la faiblesse des investissements dans le cadre des politiques d’ajustement structurel mises en œuvre par le passé a causé des dommages durables au système de santé.83 Ces défis sont aggravés encore plus par la dépendance excessive envers les services de santé financés par le secteur privé qui facturent des frais aux utilisateurs. L’insuffisance des ressources financières publiques allouées à la santé a favorisé une dépendance envers les financements extérieurs et les ménages. Comme le montre le Tableau 6-3, les dépenses privées intérieures de santé, et en particulier les dépenses à la charge des ménages, constituent la large majorité des dépenses de santé actuelles. Les dépenses à la charge des ménages s’élevaient en moyenne à environ 40 USD au cours des années qui ont précédé la pandémie de COVID-19. Pour s’attaquer à ces défis, le Cameroun a, avec l’aide des bailleurs de fonds, mis en place plusieurs initiatives visant à accroître le financement du secteur de la santé. Il s’agit notamment de mesures visant à mettre les ressources en commun, à établir des mécanismes de partage des risques et à acheter des services de santé. Malgré un certain avancement au niveau des achats stratégiques, le manque de fonds et la forte fragmentation ont atténué leur impact positif potentiel sur le système de santé et la capacité à élargir l’espace budgétaire pour les soins de santé. Néanmoins, ces initiatives constituent un pas dans la bonne direction, à savoir vers l’amélioration des soins de santé au Cameroun. 83 Hayriye Isik et Hubert Ndifusah, Health Care System and Health Financing Structure, The Case of Cameroon, IAAOJ, Health Science, 2013, 1(2), 24‐44. Voir Bernhard Liese, et al., The Human Resource Crisis in Health Services In Sub-Saharan Africa, Banque mondiale (15 septembre 2003), Encadré 2, p. 9. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 155 6.3.4 Equité régionale dans l’accès aux services de santé La pandémie de COVID-19 a exacerbé les difficultés financières entravant l’accès aux services de santé. Elle a contribué à faire augmenter le taux d’extrême pauvreté de 24,5 % en 2019 à 25,3 % en 2021 et a sévèrement limité la capacité de nombreux Camerounais à accéder aux services de santé sur leurs propres moyens. La distribution géographique des infrastructures de soins de santé au Cameroun présente des disparités,84 néanmoins l’offre de formations publiques de soins primaires (CSI ou CMA) semble satisfaire à la demande à l’échelle nationale. Le pays compte un total de 6 202 formations sanitaires soumettant des données à la plateforme DHIS2, dont 46,4 % sont publiques, 40,9 % privées et 12,8 % privées/confessionnelles (Graphique 6-24). Yaoundé et Douala concentrent notamment près d’un tiers du nombre total de formations sanitaires à l’échelle nationale. Même si des disparités sont relevées lorsque les formations publiques sont considérées séparément, l’offre de formations publiques de soins primaires semble satisfaisante au niveau national, avec en moyenne 5 000 personnes desservies par formation. De même, le nombre d’hôpitaux (0,8 hôpital pour 100 000 habitants) correspond à la moyenne d’Afrique subsaharienne (AfSS) de 0,8. Néanmoins, ces statistiques masquent des variations régionales et des disparités significatives sont relevées sur l’ensemble du pays en ce qui concerne la densité de la population par formation sanitaire qui est fortement corrélée aux taux de mortalité infantile. Parvenir à un accès équitable aux services de santé demeure un défi, en particulier dans les régions manquant d’infrastructures de soins de santé. Les infrastructures de santé du Cameroun présentent d’importantes disparités en termes de distribution, se concentrant particulièrement dans les grandes villes de Yaoundé et Douala. Au-delà de ces centres urbains, on retrouve essentiellement des formations sanitaires publiques, notamment dans les trois régions du Nord et dans l’Est. En revanche, dans les zones urbaines des régions du Centre et du Littoral (Graphique 6-24), seulement 2 % des formations sanitaires sont classées publiques. Toutefois, lorsque les formations publiques sont analysées séparément, les disparités persistent. En outre, la densité de population par formation sanitaire, une mesure étroitement associée aux taux de mortalité infantile, varie considérablement à travers le pays.85 Même si le nombre d’hôpitaux pour 100 000 habitants du Cameroun correspond à la moyenne d’Afrique subsaharienne (AfSS) de 0,8, la distribution des formations sanitaires entre les régions, d’un point de vue géographique, reste inégale. Le ratio moyen de 5 000 personnes par formation publique de soins primaires indique que l’offre de ces formations est raisonnablement satisfaisante au niveau national. Cependant, le défi consiste à parvenir à une distribution plus équitable des ressources et des formations de soins de santé sur l’ensemble du pays, en garantissant que toutes les régions, en particulier celles n’ayant pas suffisamment accès aux soins de santé, fassent l’objet d’une attention et bénéficient d’un développement des infrastructures adéquats. 84 Ministère de la Santé Publique, Profil de l’offre de soins et caractéristiques de la demande de quelques soins et services, Rapport thématique 2019 (août 2020). 85 Même si la faiblesse du nombre de formations publiques entraîne une augmentation uniforme significative de la densité de la population, cette augmentation est particulièrement importante à Yaoundé et à Douala. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 156 Graphique 6-24. Offre et distribution des formations sanitaires par région a. La distribution des formations sanitaires publiques entre les b. … malgré une offre raisonnable de formations. régions est inégale… Distribution régionale des formations 60 000 sanitaires en pourcentage du total 50 000 18 % 16 % 40 000 14 % 30 000 12 % 20 000 10 % 8% 10,000 6% 4% Sud Hors Yde SO Dia Ouest Ydé NO Adam Nord hors Dia Nord Est Ex 2% 0% Nord SO Dla hors Dla Ydé hors Ydé Sud Adam Ouest Extr. Nord Est NO Adamaoua Centre Littoral Autres régions Adamaoua Centre Littoral Autres régions Autres installations Installations publiques Source: DHIS2 2019. La disponibilité de matériel et de fournitures médicales essentielles reste insuffisante. Au cours des cinq dernières années, le Cameroun a accordé une attention significative au développement d’équipements et d’installations spécialisées au sein de son système de soins de santé. Toutefois, une évaluation a montré d’importantes faiblesses en matière de disponibilité de matériel médical, de médicaments essentiels et de fournitures. Une étude menée en 2018 sur 646 formations sanitaires a mis en lumière des lacunes considérables dans la variété comme la quantité des équipements médicaux et des médicaments dans le pays. En examinant les six régions du Cameroun, l’indice de disponibilité des équipements médicaux de base allait d’un minimum de 70 % dans le Nord à un maximum de 94 % dans le Nord-Ouest. L’indice de disponibilité des médicaments essentiels est systématiquement faible dans toutes les régions, avec des valeurs particulièrement faibles dans l’Adamaoua (54 %) et dans le Nord (50 %), tandis que les régions du Nord-Ouest et de l’Extrême- Nord détiennent les scores les plus élevés (71 %). Cette tendance s’étend aux fournitures obstétriques d’urgence et aux médicaments pour traiter le paludisme. En outre, le Cameroun connaît une grave pénurie de ressources humaines dans le secteur de la santé. Selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Cameroun se situe bien en dessous du seuil de densité recommandé de 10,9 agents de santé pour 1 000 habitants, nécessaire pour atteindre au moins 70 % des objectifs de couverture santé universelle (CSU) du pays. Actuellement, la densité du Cameroun se situe à moins d’1,0 agent de santé pour 1 000 habitants. En termes de densité du personnel médical et infirmier, le Cameroun se retrouve parmi les pays les moins bien classés au Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 157 monde et dans la région. Deux recensements du personnel de santé menés en 2011 et en septembre 2021 ont montré que le vivier de professionnels de santé formés était insuffisant. En 2011, le Cameroun comptait 25 183 agents de santé publics, alors que le recensement en ligne de 2021 a enregistré 39 720 agents, dont 11 346 fonctionnaires, 4 846 contractuels, 3 412 décisionnaires et 20 116 intérimaires (Tableau 6-4). Malgré l’augmentation considérable des effectifs entre 2011 et 2021, le déficit actuel de personnel est supérieur au nombre d’agents existants. Pour combler ce déficit important et persistant, l’autorisation de recruter 3 800 agents a été donnée pour 2022, mais les nouvelles recrues ne sont qu’au nombre de 100, soulignant le besoin pressant de combler ce manque critique de personnel. Tableau 6-4. Déficit de personnel et objectifs de recrutement Existant Déficit 2011 2021 2021 2023 Médecins/ Généralistes 1 565 3 917 6 000 6 000 Spécialistes Infirmiers / aides-infirmiers 16 211 10 615 38 000 38 000 Sage-femmes 2 158 2 158 Techniciens médicaux 2 064 5 235 4 200 4 200 Autre personnel de santé 5 343 11 117 Autre 250 Total 25 183 31 134 50 358 50 358 Sources : Calculs des services de la Banque Mondiale à partir des données du Ministère de la Santé Publique 2011, OMS. Notes : le déficit est calculé selon l’approche basée sur l’utilisation, les besoins attendus en matière de services de santé sur la base de l’utilisation actuelle des services de santé et en tenant compte des tendances de l’évolution démographique. La distribution inégale des agents de santé à travers le pays exacerbe le problème de la disponibilité de personnel. La région du Centre, où seulement 18 % de la population vit, compte près de 40 % des médecins du pays. Le nombre de personnel de santé par habitant dans le Sud-Ouest est quatre fois supérieur à celui de l’Extrême-Nord et près de cinq fois supérieur à celui de l’Adamaoua et du Nord. Une enquête récente menée auprès du personnel de santé a montré que dans les régions de l’Adamaoua, de l’Extrême- Nord, du Nord et de l’Est, 20 à 30 % du personnel de santé ne se trouvait pas dans leur formation pour des raisons inconnues le jour de l’enquête. Les quatre régions détenant les taux d’absentéisme les plus élevés parmi les agents de santé présentaient également la plus grande charge de travail par membre du personnel. Les conditions de travail du personnel de santé sont souvent démotivantes et la rétention de ce personnel représente un problème sérieux dans le secteur de la santé. Les défis liés à la formation, au recrutement/à l’embauche, au lieu d’affectation, à l’état Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 158 physique des formations, ainsi qu’à la supervision et à la rémunération, ont contribué à la faiblesse de la performance du personnel de santé.86 Les progrès en matière d’accès aux médicaments essentiels et aux fournitures médicales ont été faibles. Une des recommandations du PER de 2018 était d’améliorer la disponibilité des médicaments essentiels au Cameroun à travers de meilleures réglementations et une gestion plus solide de la chaîne d’approvisionnement. Malgré cette recommandation, le pays continue à avoir des difficultés à assurer un approvisionnement adéquat en médicaments et fournitures médicales essentiels. Les données de l’Enquête de suivi des dépenses publiques (ESDP) de 2019 révèlent que les ruptures de stock de médicaments sont répandues et fréquentes à travers le Cameroun, mettant en évidence des problèmes persistants d’accès aux ressources de soins de santé nécessaires. Le Tableau 6.5 présente la part des formations sanitaires de diverses régions du Cameroun qui ont connu des ruptures de stock de médicaments essentiels en 2017, illustrant l’ampleur du problème. Pour améliorer les services de santé et les résultats globaux en matière de santé dans le pays, il faudra impérativement surmonter ces défis.87 Tableau 6-5. Part des formations sanitaires ayant connu des ruptures de stocks de médicaments essentiels en 2017, par région DH SMC IHC Total Adamaoua --- 100 44,4 50,0 Centre 100 71,4 40,00 50,0 Est 66,7 33,3 52 50,0 Extrême-Nord 50 40 37,5 38,8 Littoral 100 25 44,4 50,0 Nord 75 100 58,2 59,7 Nord-Ouest 50 33,3 22,2 28,0 Ouest 100 50 47,8 51,6 Sud 0 33,3 26,7 26,5 Sud-Ouest 100 33,3 21,4 27,8 Total 73,1 47,5 42,7 45,5 Source: Public Expenditure Tracking Survey (PETS) Cameroun 2019. 86 Paul Jacob Roby, et al., « Répondre aux problèmes de répartition des personnels de santé : une expérience de choix discret pour développer des stratégies de rétention en milieu rural au Cameroun », Int J Health Policy Manag 2015, 4(3), 169-180. 87 ESDP, Annexe 2, Tableau 34. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 159 L’introduction du financement basé sur la performance (FBP) au Cameroun a eu un impact mitigé sur la disponibilité des médicaments essentiels et des fournitures médicales. Même si le FBP a considérablement élargi la couverture, la faisant passer de 78 districts en 2017 à 172 districts sur 189 en 2019, cet élargissement de la couverture ne s’est pas toujours traduit par une amélioration effective de la disponibilité des articles. Divers défis, notamment des retards de paiement des FBP, le manque d’autonomie des formations sanitaires, l’inefficacité des dirigeants et des facteurs contextuels tels que l’éloignement ou la difficulté d’accès des zones, ont entravé la bonne mise en œuvre du FBP. À cause de ces défis, la performance des différentes formations sanitaires a été variable et les retards de paiement ont eu des effets négatifs sur la prestation de services. Des préoccupations ont également été soulevées concernant le contrôle qualité des médicaments, les disparités entre les formations et la fragmentation du système de gestion des médicaments. Pour tâcher d’apporter une réponse à ces problèmes, le rapport annuel du Mécanisme de financement mondial recommande de compléter certains aspects spécifiques du FBP, tels que l’autonomisation des pharmacies et la libéralisation des systèmes d’approvisionnement en médicaments, par des interventions axées sur l’équité, une réglementation renforcée et des mesures visant à assurer la qualité des médicaments.88 Une évaluation de l’approvisionnement en médicaments dans le cadre du FBP au Cameroun a montré des résultats mitigés. D’après l’analyse, l’intervention de FBP n’a pas eu d’effet sur l’occurrence des ruptures de stock de médicaments destinés aux soins prénataux, de vaccins, de médicaments destinés à la prise en charge intégrée des maladies de l’enfance ni de médicaments liés au travail et à l’accouchement. En revanche, le FBP a conduit à une réduction notable et statistiquement significative de 34 % des ruptures de stock de médicaments de planification familiale. Il est important de noter que l’efficacité du FBP varie selon les régions et les zones, avec des réductions substantielles des ruptures de stock de produits de planification familiale observées dans la région du Nord-Ouest et en milieu rural, mettant en évidence les disparités régionales et géographiques des résultats du programme.89 La qualité des médicaments au Cameroun reste mauvaise, avec une prévalence importante de médicaments de qualité inférieure et falsifiés (QIF). Une analyse évaluant la prévalence des médicaments QIF90 dans le pays révèle une situation préoccupante, avec plus d’un quart (26,9 %) des médicaments échantillonnés qui ont été déterminés de qualité inférieure. Cette prévalence tombe dans la fourchette des 18 à 48 % indiquée91 pour les LIC et PRITI. Toutefois, ce chiffre est supérieur à la prévalence de 18,7 % mesurée pour l’Afrique dans son ensemble. En termes de classes thérapeutiques, la prévalence la plus élevée de médicaments QIF est observée dans la catégorie des antiparasitaires, à savoir 34,4 %. On note que les médicaments antipaludiques constituent une part importante de ces antiparasitaires, à hauteur de 79,5 %, signalant l’existence d’un problème critique au niveau de la qualité des médicaments utilisés pour lutter contre le paludisme au Cameroun. 88 Isidore Sieleunou, et al., Comment le financement basé sur la performance affecte-t-il la disponibilité des médicaments essentiels au Cameroun ? Une étude qualitative, Health Policy and Planning, 34, 2019, iii4–iii19. 89 Isidore Sieleunou, et al., Le financement basé sur la performance freine-t-il les ruptures de stock de médicaments essentiels ? Résultats d’un essai randomisé contrôlé au Cameroun, 23 mai 2020. 90 Christelle Ange Waffo Tchounga, et al., Médicaments de mauvaise qualité au Cameroun : une revue critique, Am. J. Trop. Méd. Hyg., 105(2), 2021, p. 284-294. 91 Almuzaini T Choonara I Médicaments de qualité inférieure et contrefaits : une revue systématique de la littérature. BMJ Ouvert 3 : e002923 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 160 Tableau 6-6. Échantillons pris en compte pour les calculs de prévalence Échantillon Qualité Mauvaise Total (n) Prévalence acceptable (n) qualité (n) (%) Antiparasitaires, y compris les antipaludiques 384 201 585 34,4 Anti-inflammatoires et analgésiques 92 48 140 34,3 Antibiotiques 351 90 441 20,4 Plusieurs catégories 166 39 205 19,0 Antirétroviraux 60 9 69 13,0 Total 1 053 387 1 440 26,9 Source : Christelle Ange Waffo Tchounga, et al. (2021) Le Gouvernement du Cameroun, Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group en collaboration avec divers partenaires au développement, a déployés des efforts importants pour améliorer la gestion de la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique à plusieurs niveaux dans le pays. Plusieurs partenaires au développement, dont l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), Expertise France, la Clinton Health Access Initiative, la Coopération technique allemande (GIZ), le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), prennent activement part au renforcement de la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique au Cameroun. Ces initiatives de collaboration sont axées sur divers domaines clés, notamment l’appui aux réformes politiques visant à optimiser le système de chaîne d’approvisionnement national, la promotion de l’utilisation d’outils électroniques pour améliorer la disponibilité et l’utilisation des données, l’amélioration de la logistique nationale telle que la gestion des stocks et la livraison en temps opportun des produits de santé, et le renforcement des capacités du personnel au niveau des régions et des formations sanitaires en matière de gestion de la chaîne d’approvisionnement. Ces efforts sont essentiels pour améliorer la disponibilité et la qualité des médicaments et des fournitures médicales dans le pays. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 161 6.3.5 Équité et efficacité L’introduction et l’expansion du FBP ont amélioré l’équité et l’efficacité du système de santé camerounais. Avant l’introduction du FBP, les pratiques budgétaires archaïques favorisaient les régions plus développées, conduisant à un sous-financement systématique des formations de soins primaires. Ceci a placé un fardeau financier important sur les ménages en matière de dépenses de santé. Le système budgétaire précédent reposait sur des coûts opérationnels fixes qui étaient fonction du nombre et de la catégorie d’infrastructures de santé dans une région et du nombre de districts de santé, sans tenir compte de facteurs tels que la charge de morbidité, la taille de la population, les aspects géographiques ou les conditions socioéconomiques. Il en a résulté que les allocations budgétaires par habitant étaient considérablement plus élevées dans les régions plus développées telles que le Sud et le Centre, tandis que les régions plus pauvres telles que le Nord et l’Extrême-Nord recevaient moins de financement. Cette approche a également augmenté les coûts des soins de santé pour les ménages, affectant de manière disproportionnée les populations les plus pauvres et les plus vulnérables,92 avec un recouvrement des coûts inefficace et inéquitable au niveau des formations sanitaires. Le FBP a également apporté plus d’équité dans la répartition des ressources budgétaires au sein du secteur de la santé, en mettant l’accent sur les formations au niveau du district qui offrent des formes de soins rentables, notamment les soins primaires, les soins préventifs et les services de santé communautaire. Dans le cadre du système FBP, les budgets sont toujours alloués par région et type d’infrastructure de santé, en revanche, ils sont désormais calculés sur la base de résultats projetés plutôt que sur plusieurs postes à coûts fixes. Ceci a simplifié le processus de préparation du budget en le réduisant à un seul poste, et les allocations sont déterminées sur la base de considérations stratégiques plutôt que d’une égalité stricte. Les paiements réels effectués au bénéfice des formations sanitaires dépendent des résultats vérifiés et sont gérés avec la participation active du personnel de la formation, conformément aux lignes directrices et sans interférence du gouvernement central. Ces changements reflètent une approche plus efficace et plus équitable à la budgétisation et à l’allocation des ressources pour les soins de santé. Les avancées réalisées dans le processus de décentralisation dans le secteur de la santé depuis 2018 ont amélioré l’équité. En 2018, plus de 90 % du budget de la santé publique a été alloué au niveau administratif central.93 Cependant, depuis 2021, les services de santé ont été inclus dans les budgets décentralisés. Cependant, à compter de 2021, les services de santé ont été incorporés dans les budgets décentralisés. Si cette plus grande responsabilité et plus grande autonomie ont entraîné des changements dans les structures de gouvernance et de gestion, elles ont également posé des défis grandissants. Il est important de noter que le processus de décentralisation n’a entraîné qu’une faible redistribution des ressources sur l’ensemble du système de santé.94 92 Voir Innocent Laisin, et al., The Implications of Healthcare Utilization for Catastrophic Health Expenditure in Cameroon, IOSR Journal of Economics and Finance, Vol. 11, Issue 3 Ser. IV (mai-juin 2020), 22-36. 93 PER (2018), p. 132. 94 Ces décrets ne transfèrent pas l’autonomie financière aux collectivités locales. Voir Richard Alain Ndoumbé, Le Processus de Décentralisation au Cameroun: Avancées, Pesanteurs et Perspectives. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 162 Malgré l’expansion du financement basé sur la performance (FBP) dans le secteur de la santé, l’exécution des dépenses publiques de santé au Cameroun reste hautement centralisée. Environ 35 % des dépenses de santé sont exécutées par l’administration centrale, y compris dans les régions se caractérisant par une fragilité et des taux de pauvreté élevés, telles que les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême- Nord. Cette approche centralisée restreint la capacité des formations de soins primaires à fournir des services efficaces. Par ailleurs, les formations sanitaires reçoivent souvent leurs financements en retard à cause de complexités administratives et de problèmes de trésorerie. Ainsi, en 2017, seulement 54,9 % de ces formations ont reçu l’intégralité de leur subvention comme prévu, mettant en évidence les difficultés liées au manque de ponctualité des décaissements financiers.95 Graphique 6-25. Allocation budgétaire pour l’acquisition de biens et services, d’équipements médicaux et la construction de centres de santé (milliards XAF) Régions Budget de fonctionnement Crédits d’investissement Acquisition de biens Part (%) Acquisition Part (%) Construction Part (%) et prestation de de matériel de centres de services médical santé Administration centrale 83,554 61,84 0 0,0 2,05 35,08 Adamaoua 0,916 0,68 0,141 12,53 0,52 8,90 Centre 17,903 13,25 0,88 7,82 0,65 11,12 Est 3,545 2,62 0,255 22,67 0,334 0,57 Extrême-Nord 0,606 0,45 0,960 8,53 0,25 4,28 Littoral 7,966 5,90 0,770 6,84 0,5075 8,68 Nord 7,304 5,41 0,720 6,40 0,387 6,64 Nord-Ouest 0,538 0,40 0,640 5,69 0,4 6,84 Ouest 5,249 3,89 0,710 6,31 0,95 17,03 Sud 6,550 4,85 0,111 9,87 0 0,0 Sud-Ouest 0,973 0,72 0,150 13,33 0,05 0,86 Total 135,109 100 1,125 100 5,843 100 Source : Base de données du journal des projets 2017. 95 Ministère de l’Économie, de la Planification et du Développement Régional, Public Expenditure Tracking Survey-Health (décembre 2019), pp. 31, 38. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 163 La gestion centralisée du budget entraîne des retards au niveau du retrait, de l’engagement, de la validation et de la planification des autorisations de dépenses. La gestion centralisée du budget au niveau des formations implique : (i) l’insuffisance des informations concernant les transferts du budget de fonctionnement ; (ii) la dépendance envers les biens et les services financés par le gouvernement central ; et (iii) le manque de complétude de la tenue de registres, empêchant le suivi des dépenses réelles. La publication annuelle du Budget Citoyen depuis 2019 constitue un engagement important pour la transparence. 6.3.6 Efficience Une analyse des formations sanitaires primaires (c’est-à-dire les hôpitaux, les CMA et les centres de santé) a montré qu’environ un tiers d’entre elles était techniquement efficace. En outre, l’analyse a montré que cette efficacité technique pouvait être améliorée de plus d’un tiers en augmentant les éléments de base des soins : le nombre d’agents de santé, le nombre de lits et la prise en charge efficace des patients. Des décalages importants existent entre les ressources disponibles et la demande de services de santé, entraînant des inefficacités. Le manque d’adéquation entre les dépenses publiques et les principales causes de morbidité et de mortalité constitue un problème majeur. Par exemple, les régions présentant les taux de mortalité les plus élevés chez les moins de 5 ans reçoivent, en moyenne, des allocations budgétaires par habitant inférieures à celles présentant des taux de mortalité plus faibles. De même, les régions présentant de faibles taux de couverture d’accouchement assisté reçoivent, en moyenne, moins de financements publics que les régions ayant des taux de couverture plus élevés. De plus, la forte concentration des professionnels de santé en milieu urbain exacerbe encore plus les disparités en matière d’accès aux services de santé. Par ailleurs, les priorités en matière de dépenses publiques ne mettent pas suffisamment l’accent sur les programmes de santé publique essentiels d’une grande efficacité et générant des externalités positives. Au lieu de cela, les achats stratégiques sont actuellement restreints à une poignée de programmes gratuits ou subventionnés, presque tous financés exclusivement par des partenaires externes. Cette dépendance excessive envers le financement extérieur constitue une préoccupation majeure pour la pérennité de ces programmes, en particulier compte tenu de la volatilité de l’aide dans les contextes de fragilité et des difficultés à harmoniser les différentes approches. Même si un des principes directeurs du FBP est d’allouer des fonds en fonction d’activités spécifiques, cette approche n’a pas encore contribué à accroître l’efficacité allocative ni technique au Cameroun. Le regroupement des allocations de programme pour créer des lignes budgétaires fournissant des détails sur les intrants (c’est-à-dire les « activités ») a mené à la création de plusieurs milliers de lignes budgétaires pour chacune des formations sanitaires, ainsi que les districts de santé, les délégations sanitaires Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 164 régionales et les agences au niveau central au sein du Centre de santé multi professionnel (MSP). Ces lignes budgétaires ne définissent cependant pas correctement les dépenses spécifiques ; elles brouillent la relation entre l’allocation des ressources et la mise en œuvre des différents programmes et activités de santé, et elles compliquent les efforts visant à isoler les coûts de chacun des programmes et à évaluer leur contribution au budget total. Étant donné que la plus grande partie du budget est allouée à un nombre modéré d’activités de grande valeur, l’adoption de budgets globaux comptant une seule ligne budgétaire pour chaque institution pourrait améliorer l’efficacité d’allocation. La coordination de la prestation de services avec d’autres secteurs (par exemple, l’éducation, l’eau et l’hygiène, et l’agriculture) pourrait également améliorer les dépenses de santé et les résultats des soins de santé. Les priorités actuelles en matière de dépenses dans le secteur de la santé au Cameroun ne semblent pas orientées vers plus d’efficience et d’efficacité. Les dépenses publiques ne sont pas suffisamment axées sur des programmes de santé publique essentiels d’une grande efficacité et générant des externalités positives. Actuellement, les achats stratégiques se limitent à quelques programmes gratuits ou subventionnés, essentiellement financés par des partenaires externes. Cette forte dépendance envers le financement extérieur soulève des préoccupations relatives à la pérennité, en particulier au vu de la volatilité de l’aide dans les contextes de fragilité et des difficultés à harmoniser les différentes approches. 6.3.7 Options de réformes Le Cameroun n’a guère avancé dans la mise en œuvre des principales recommandations formulées dans le PER de 2018. Des efforts ont été déployés pour renforcer le processus budgétaire, mais aucun changement géographique ou programmatique significatif n’a été opéré au niveau des dépenses. Même si des avancements ont été réalisés en matière de décentralisation de la gestion budgétaire dans certains secteurs, le secteur de la santé ne fait pas encore partie des secteurs priorisés par le gouvernement, et les autorités doivent encore parvenir à une pleine mise en œuvre des mesures visant à accroître les dépenses locales. En résumé, l’efficacité des dépenses de santé au Cameroun a été entravée par l’insuffisance des ressources financières, leur manque d’adéquation et/ou leur mauvaise utilisation. S’appuyant sur les conclusions d’études et d’analyses récentes sur les dépenses du secteur de la santé, le PER recommandait aux autorités de : • Renforcer la gouvernance et l’efficacité d’allocation des ressources : Promouvoir l’allocation stratégique des ressources à tous les niveaux du système de santé et améliorer la coordination entre les parties prenantes impliquées dans le financement de la santé afin d’optimiser l’efficacité des dépenses. Favoriser la décentralisation des dépenses de santé. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 165 • Favoriser la transparence et la redevabilité  : Établir un système standardisé et codifié pour gérer les ressources de santé de manière à garantir la redevabilité sur l’ensemble de la pyramide sanitaire. Mettre en œuvre des mécanismes visant à assurer la transparence, la redevabilité et la mise en œuvre d’efforts pour lutter contre la corruption au sein du secteur de la santé. S’attaquer aux faiblesses du cadre de financement basé sur la performance et accélérer sa mise en œuvre à l’échelle du pays. Renforcer le système d’information financière, mettre à jour le cadre juridique régissant l’allocation et l’utilisation des ressources dans les structures de santé publique et mener régulièrement des activités de contrôle, d’audit, d’enquête, de suivi et évaluation pour la gestion des ressources financières. • Négocier des facilités budgétaires pour les programmes de santé : Collaborer avec le gouvernement à la rationalisation des processus budgétaires relatifs aux programmes du Ministère de la Santé. Envisager de mettre en place des comptes spéciaux pour la performance et les achats stratégiques, afin de surmonter les défis en rapport à l’exécution centralisée et lourde du budget, y compris l’allocation des ressources et la justification a posteriori. Rationaliser le processus d’exécution budgétaire. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 166 6.4 Améliorer le système de protection sociale du Cameroun 6.4.1 Programmes de protection sociale/performance et résultats Le Gouvernement du Cameroun reconnaît de plus en plus le rôle que la protection sociale joue dans la réalisation de ses objectifs de développement, la plaçant au centre de ses stratégies ; cependant, la pauvreté et la vulnérabilité ont été en hausse au cours de ces dernières années. S’appuyant sur la Politique Nationale de Protection Sociale (PNPS) de 2017, la SND30 met en avant le rôle capital que la protection sociale (avec la santé et l’éducation) joue dans le développement du capital humain du pays. La consolidation et l’expansion des services de protection sociale, y compris la création d’un programme national de filets de sécurité sociale, y sont déterminées comme les principales priorités du secteur. Cependant, la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine ont aggravé les conditions sociales et économiques des ménages camerounais. Trois années de perturbations économiques – récession mondiale et ruptures d’approvisionnement suivies d’une forte inflation, avec de fortes fluctuations des prix internationaux du pétrole et des denrées alimentaires – ont fait augmenter le nombre de pauvres et de vulnérables au Cameroun. Une aide sociale d’urgence, sous forme de transferts en espèces et d’assistance médicale, a été mise en place pour remédier à la situation, et le gouvernement a stabilisé les prix nationaux des carburants en continuant à les subventionner. Le Cameroun dispose de nombreux programmes de protection sociale, comprenant l’assurance sociale, des programmes de soutien à l’emploi, des programmes généraux de subventions et l’assistance sociale. Le pays dispose de divers programmes de protection sociale appartenant aux quatre catégories définies dans la base de données de l’Atlas d’indicateurs de résilience et d’équité en matière de protection sociale (ASPIRE96) de la Banque mondiale. Il dispose d’une assurance sociale contre la vieillesse, avec des régimes de retraite contributifs privés aussi bien que publics. Il compte 26 programmes actifs pour les marchés du travail, 16 programmes fournissant des subventions générales et 3 programmes d’assistance sociale (dominés par le Projet Filets Sociaux [PFS]). Le Cameroun compte aussi des programmes de protection sociale dans deux autres domaines : les services de protection sociale avec deux programmes actifs et un programme de services de santé non contributif. Aucune réforme majeure de la protection sociale n’a été mise en œuvre depuis le PER de 2018, qui a montré que les dépenses en protection sociale étaient régressives et a recommandé de réorienter les efforts sur les jeunes. Dans l’ensemble, le système de protection sociale du Cameroun et son financement n’ont connu que de changements modestes depuis l’évaluation du PER de 2018, même si les composantes des dépenses ont varié depuis 2018. Ce rapport a montré que les dépenses en protection sociale étaient 96 Les données sur les dépenses de protection sociale ne comprennent pas les dépenses en retraite, datent de 2016 ou de l’année la plus récente et proviennent de la base de données ASPIRE. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 167 régressives, largement concentrées sur des retraites qui bénéficient à une fraction de la population composée essentiellement de fonctionnaires retraités. Le PER de 2018 a également permis d’établir que : (a) les subventions universelles ont considérablement diminué entre 2013 et 2016 (avec la chute des prix internationaux des produits alimentaires et des carburants) ; (b) les dépenses en protection sociale présentaient une efficacité d’allocation légèrement meilleure  ; en revanche, (c) les deux tiers des dépenses en protection sociale couvraient le déficit de financement des retraites de la fonction publique. Le rapport a recommandé d’améliorer l’efficacité et l’équité des dépenses en les réorientant des personnes âgées vers les jeunes, à l’aide de programmes ciblant la pauvreté. Pour appuyer cet objectif global, il a été conseillé au gouvernement d’améliorer la viabilité budgétaire des retraites publiques, de permettre aux prix des carburants sur le marché intérieur de fluctuer avec les prix internationaux, de déterminer les risques non couverts parmi les pauvres et de concevoir des interventions visant à atténuer ces risques. Le Cameroun offre une assurance sociale qui protège certains travailleurs contre la vieillesse et l’invalidité à travers des régimes publics et privés ; cependant, seulement un tiers des travailleurs du secteur formel sont couverts par l’assurance sociale et moins d’un cinquième des personnes âgées reçoivent une pension, ce qui est bien en deçà des normes régionales. Le Cameroun a une assurance sociale pour les employés des secteurs public et privé, offrant des pensions de vieillesse, d’invalidité et de survivant aux travailleurs du secteur formel. Dans les deux cas, il s’agit de régimes de retraite à prestations déterminées par répartition. Le régime de pension du secteur public, destiné aux fonctionnaires et aux militaires, est géré par l’État par l’intermédiaire du Ministère des Finances. Les travailleurs du secteur privé sont couverts par la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS). La couverture des régimes de pension privés comme publics est faible, avec seulement environ un tiers des personnes employées dans le secteur formel qui cotisent aux retraites en 2021 (19 % au régime de pension de la fonction publique et 17 % à la CNPS). Sur l’ensemble des travailleurs formels et informels, seuls 5,4 % sont assurés. Pour ceux déjà âgés de plus de 60 ans, la proportion de 18,6 % des personnes ayant dépassé l’âge de la retraite et touchant une pension au Cameroun est bien en dessous de la moyenne d’Afrique subsaharienne de 27,1 % et de la moyenne des PRITI de 38,6 %. Quelques programmes en faveur de l’emploi ont été développés et sont axés sur les jeunes et le milieu rural. Les programmes en faveur de l’emploi, parrainés par le Gouvernement du Cameroun visent à améliorer les opportunités d’emploi et le développement des compétences, en particulier pour les jeunes. Ces programmes offrent des centres de formation professionnelle et d’autres programmes de formation, ainsi qu’un appui financier aux demandeurs d’emploi et aux entrepreneurs pour démarrer ou développer leur entreprise.97 En 2016, la plupart des financements gouvernementaux destinés aux programmes de soutien à l’emploi ont bénéficié aux jeunes et aux groupes ruraux.98 Plusieurs nouveaux programmes ont été créés depuis 2017, y compris des programmes pour la formation à l’emploi des jeunes, l’appui au développement agricole, l’appui au secteur informel et l’inclusion des femmes. À l’avenir, il importera d’améliorer le ciblage des programmes et des activités en rapport au marché du travail. 97 Les politiques d’emploi relèvent principalement du Ministère de l’Emploi et de la Formation Professionnelle et du Ministère de la Jeunesse et de l’Education Civique. 98 Sosale, Shobhana et Kirsten Majgaard. 2016. Favoriser les compétences au Cameroun : développement inclusif de la main-d’œuvre, compétitivité et croissance. Orientations du développement. Washington, DC : Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 168 Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Les subventions générales du Cameroun sont dominées par les subventions universelles aux carburants, y compris pour le kérosène qui est surtout utilisé par les ménages pauvres, mais dont les coûts en hausse appellent à augmenter les prix et à réexaminer le programme. Le Cameroun a révisé son système de subvention aux carburants en 2010 à la suite d’émeutes en protestation à la hausse des prix des produits alimentaires et des carburants, mettant en œuvre une politique de stabilisation des prix pour amortir l’effet des fluctuations des prix internationaux des carburants sur l’économie. Un fonds de stabilisation des prix des carburants, la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (CSPH), indemnise la raffinerie de la compagnie pétrolière nationale pour la différence entre les prix internationaux et les prix fixés par décision administrative.99 Le prix à la consommation du kérosène (pétrole lampant ), principalement utilisé par les groupes vulnérables, a donc été constant depuis 2010, mais les coûts du diesel et de l’essence ont également été subventionnés, ce qui a eu pour effet de rendre le programme globalement très régressif en termes d’impact sur les revenus des ménages. (Voir la Section 6.4.3 pour une analyse plus approfondie des impacts distributifs.) La flambée des prix internationaux des carburants a fait considérablement augmenter le coût budgétaire de ces subventions en 2022, exigeant une action du gouvernement dans le cadre de son programme avec le FMI,100 et les prix des carburants ont été augmentés en février 2023 (de 16 % pour l’essence, de 25 % pour le diesel et de 60 % pour le kérosène utilisé par l’industrie). De plus, dans le cadre du programme du FMI, le gouvernement s’est engagé à réduire progressivement les subventions aux carburants et a été invité à envisager des ajustements automatiques à l’avenir, accompagnés de mesures telles que le renforcement du filet de sécurité sociale et l’amélioration de l’accès aux services de santé et d’éducation.101 99 Kojima, Masami. 2013. Prix des produits pétroliers et politiques complémentaires : Expérience de 65 pays en développement depuis 2009. Document de travail sur la recherche politique; N° 6396. Banque mondiale, Washington, DC. http://hdl.handle.net/10986/13201 100 Les accords de facilité élargie de crédit (FEC) et de mécanisme élargi de crédit (MEC) sur trois ans signés avec le FMI en juillet 2021. 101 FMI. 2023. Quatrième revue dans le cadre des accords de facilité élargie de crédit et de mécanisme élargi de crédit. Rapport pays du FMI n° 23/251. Juillet 2023. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 169 L’expansion des transferts monétaires ciblés nécessite un registre social unifié permettant d’évaluer l’admissibilité  ; le Cameroun voudrait passer d’un registre pilote à un registre complet qui peut également aider à mieux cibler les programmes de soutien à l’emploi. Un registre social inclusif permettrait au gouvernement d’identifier les ménages et de canaliser l’appui avec rapidité et efficacité, tout en renforçant la coordination entre les agences gouvernementales et les partenaires au développement responsables de la fourniture de protection sociale. Les registres sociaux existants au Cameroun ont une couverture faible et ne sont pas harmonisés. Le gouvernement, sous la direction du Ministère des Affaires Sociales (MINAS), a reconnu la nécessité d’établir une base de données nationale des ménages vulnérables admissibles aux programmes de protection sociale - le Registre Social Unifié (RSU), identifiés à travers une méthodologie standard. Le MINAS a travaillé à établir un registre social pilote, collectant des données sur les populations vulnérables depuis 2015 avec l’aide de l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’enfance) et de l’OIT (Organisation internationale du travail). Le registre social pilote couvre actuellement 15 communes et 64 424 personnes et il est prévu de couvrir 22 communes et jusqu’à 100 000 personnes d’ici mi-2022. En outre, l’UNICEF est en train de piloter le processus d’enregistrement au niveau municipal, en vue de mettre en place des processus et des mécanismes de référence. Un projet de la Banque mondiale, entré en vigueur en décembre 2022, financera le développement du registre (3,5 millions USD), notamment l’application de processus participatifs au niveau communautaire afin d’identifier les bénéficiaires. Le RSU est conçu pour un usage dans la réponse aux chocs ; il sera mis à la disposition des communes pour permettre une réponse décentralisée. Le gouvernement devrait tâcher de finaliser la création et la mise en œuvre d’un Registre social permettant d’évaluer de manière fiable l’admissibilité des ménages et des personnes à l’assistance sociale, ainsi qu’aux programmes du marché du travail, aux dispenses de frais d’assurance maladie et à d’autres services. L’assistance sociale au Cameroun a été limitée au programme de filets sociaux financé par les bailleurs, dont la couverture des pauvres a été insuffisante malgré son expansion, mettant en avant la nécessité de réformes politiques et réglementaires pour créer un filet de sécurité permanent et stable financé par le gouvernement. Le Projet Filets Sociaux (PFS) est le principal instrument d’assistance sociale du pays, fournissant des activités argent-contre-travail et des transferts monétaires inconditionnels. Le PFS est financé par la Banque mondiale102 depuis 2015 et une nouvelle version élargie du programme a débuté en janvier 2023. Le PFS a couvert environ 385 000 ménages depuis 2015, mais malgré son expansion substantielle récente, la couverture globale de l’assistance sociale au Cameroun reste faible, atteignant seulement 25 % des pauvres. Le PFS a jeté les bases d’un filet de sécurité robuste, mais les progrès réalisés dans l’amélioration des dispositions institutionnelles et l’obtention d’un financement fiable et prévisible pour un programme de filet de sécurité permanent ont été lents. Des réformes politiques et réglementaires sont nécessaires pour capitaliser les investissements réalisés dans le PSF et développer un système de filet de sécurité plus efficace et plus efficient. Pour être plus précis, pour pouvoir élargir les transferts monétaires, il faut trouver un moyen fiable d’évaluer l’admissibilité des ménages et des personnes à l’assistance sociale. Sur le moyen terme, les autorités devraient envisager de : (i) transformer le PSF en un 102 Projet filets sociaux adaptatifs et d’inclusion économique (P175363) Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 170 programme gouvernemental doté de son propre cadre juridique et politique approprié ; (ii) se doter d’un budget à long terme prévisible pour les principaux programmes de filet de sécurité ; (iii) mobiliser régulièrement des financements publics pour garantir la prévisibilité du paiement des transferts monétaires aux bénéficiaires ; et (iv) établir une structure gouvernementale permanente et stable pour accueillir les programmes de filet de sécurité. Pour la protection sociale dans son ensemble, l’adéquation des prestations est insuffisante en raison de la faible couverture des pauvres, et non du niveau des prestations, ce qui met en évidence la nécessité d’une stratégie globale de protection sociale. Au Cameroun, seulement 1,1 % du quintile inférieur de la population bénéficie de prestations d’assistance sociale, d’assurance sociale et de programmes du marché du travail, contre 27,6 % dans l’ensemble de l’AfSS. Cependant, pour ceux qui reçoivent des prestations, celles-ci représentent en moyenne 28  % de leur revenu, ce qui est comparable aux niveaux régionaux. Étant donné qu’il est essentiel d’avoir des systèmes de protection sociale inclusifs et réactifs pour atténuer les chocs et protéger le capital humain, la mise en place d’un programme de filet de sécurité permanent reste une priorité clé au Cameroun. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement pourrait valider et publier la Stratégie nationale de protection sociale et impliquer les communautés locales et les organisations de la société civile dans la planification, la mise en œuvre et le suivi des programmes d’assistance sociale afin de garantir leur pertinence et leur efficacité. 6.4.2 Dépenses en protection sociale Les dépenses de protection sociale ont considérablement fluctué entre 2017 et 2022, culminant en 2019 et 2022. Les dépenses totales en protection sociale du Cameroun ont représenté en moyenne 2,5 % du PIB entre 2017 et 2021. Elles ont plus que doublé, passant de l’équivalent d’1,8 % du PIB en 2017 à 3,9 % en 2019, après que les dépenses associées aux programmes en rapport au marché du travail ont été triplées (en termes de pourcentage du PIB) (Graphique 6-26). Ces dépenses de programmes avaient presque disparu en 2020 pendant la pandémie de COVID (et les dépenses de subventionnement ont également diminué avec la chute des prix internationaux des carburants), contractant les dépenses globales en protection sociale à l’équivalent d’1,6 % du PIB en 2020 avant de redresser leur montant à l’équivalent de 2,3 % du PIB en 2021, année où les pressions pour un ajustement budgétaire ont contenu les dépenses. Néanmoins, les dépenses en protection sociale du Cameroun hors retraites équivalant à 1,4 % du PIB en 2021 ont été supérieures à celles de ses pairs (moyenne de 1,0 % du PIB).103 En revanche, les dépenses d’assistance sociale, qui équivalaient à seulement 0,2 % du PIB en 2021, représentaient moins de la moitié de la moyenne des pays pairs (0,4 % du PIB) (Graphique 6.27). 103 Les pays pairs comprennent le Kenya, la Côte d’Ivoire, le Vietnam, la Namibie, le Nigeria, l’Azerbaïdjan, le Soudan, la Malaisie, le Ghana, le Togo, l’Indonésie et le Sénégal. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 171 Graphique 6-26. Dépenses de protection sociale par type (% Graphique 6-27. Dépenses d’assistance sociale, Cameroun et PIB), 2017-2021 pays pairs (% PIB), 2016 ou année des dernières données 4,0 4,0 3,5 3,0 3,0 2,5 % GDP 2,0 2,0 1,0 1,5 1,0 0,16 0.0 0,5 2017 2018 2019 2020 2021 0,0 Assistance sociale ga 16 8 Sé sie, 6 6 ib 020 7 1 In ysie 016 Az nam 016 M na 16 N re, 6 N jan 6 d' o, 1 Programmes d'employabilité 01 1 da 01 ou 201 er 02 oi 01 1 te og 02 né 20 ne 20 0 ba , 20 ,2 Su l, 2 am ,2 2 ,2 et , 2 G a, 2 2 T ,2 Services de santé sans contributions ie , a, n n ny i i ha Services de prestations sociales Ke a ig Iv er al do er m Vi Subventions générales Ca Co Pensions publiques Source : Banque mondiale, base de données ASPIRE Même si les dépenses en aide sociale ont augmenté depuis 2017, elles restent mal financées comparées aux normes internationales et régionales, en particulier au vu de l’aggravation de la pauvreté et des conflits en cours, et sont fortement dépendantes du financement des bailleurs de fonds. Dans l’ensemble, les dépenses en aide sociale ont augmenté entre 2017 et 2021, passant de l’équivalent de 0,09 % du PIB à 0,16 %, s’élevant toutefois en moyenne à 0,08 % du PIB sur la période. Ce niveau de dépenses est nettement inférieur à celui des homologues régionaux et structurels du Cameroun qui dépensent en moyenne l’équivalent de 0,37 % de leur PIB en aide sociale, soit le double des dépenses actuelles du Cameroun (Graphique 6-27) ; cela dit, il est encore plus éloigné de la moyenne de 1,2 % du PIB de l’Afrique subsaharienne.105 En outre, environ trois quarts du montant total de l’aide sociale sont financés par des bailleurs internationaux, et le PFS représente la quasi-totalité des dépenses en aide sociale. Malgré l’aggravation de la pauvreté et des inégalités entraînée par les conflits, le changement climatique et la pandémie de COVID-19, le pays n’a pas procédé à d’augmentation significative de ses dépenses associées aux programmes d’aide sociale ciblés. La plupart des dépenses en protection sociale du Cameroun sont associées aux pensions des fonctionnaires et aux subventions aux carburants gérées par le MINFI, même si les programmes pour le marché du travail sont en train de se développer ; néanmoins, la région du Centre continue de concentrer les dépenses en protection sociale, bénéficiant aux ménages les plus riches et urbains. Les pensions publiques 105 Moyenne des dépenses annuelles d’assistance sociale en Afrique subsaharienne pour 36 pays et différentes années (généralement de 2015 jusqu’à la dernière année où des données sont disponibles) telle que tirée de la base de données ASPIRE de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 172 représentent plus de 40 % des dépenses totales en protection sociale et près d’1 % du PIB, et sont restées stables au cours de la dernière décennie. Cette situation constitue cependant une nette amélioration par rapport à celle où deux tiers des dépenses en protection sociale ont servi à couvrir le déficit de financement des pensions de la fonction publique tel qu’évalué dans le PER de 2018. Elles sont suivies en termes de taille par les programmes de marché du travail, qui représentent environ un tiers des dépenses en protection sociale et l’équivalent d’environ 0,7 % du PIB, conforté par plusieurs nouveaux programmes créés depuis 2017, tels que la formation à l’emploi des jeunes et l’appui au développement agricole. Les subventions universelles, essentiellement destinées au carburant, continuent de représenter environ un cinquième des dépenses sociales des dernières années, variant au gré des fluctuations des prix internationaux du pétrole, pendant que le Cameroun assure la stabilité des prix à la pompe. Compte tenu de l’accent mis sur les dépenses en protection sociale, la plupart des allocations budgétaires vont au MINFI à qui la responsabilité des pensions du secteur public et les subventions au carburant revient, suivi du MINFI qui est chargé de l’aide sociale, des services sociaux et de la protection de la famille et de l’enfant. D’autres programmes sont dirigés par le Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale et le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille. Les cotisations privées sont insuffisantes, faisant baisser les pensions, tandis que les cotisations publiques dépendent largement des subventions gouvernementales. La Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS) est financée par une combinaison de cotisations des employés et des employeurs équivalant chacune à 4,2 % des salaires, soit un total de 8,4 % des salaires depuis 2015. Ce taux est nettement inférieur à la moyenne observée parmi les pays pairs structurels et aspirationnels qui se situe à 15,9 %.106 En outre, il est inférieur à la moyenne des régimes de retraite du secteur privé d’Afrique subsaharienne (AfSS), qui est de 14,2 %. La formule des prestations et l’approche ad hoc au paiement des pensions ne sont pas conformes aux pratiques d’excellence internationales. Les deux régimes de pension gardent un taux de dépendance d’environ 0,37, ce qui implique qu’il y a environ 2,7 cotisants par retraité. Une évolution dans le bon sens s’est cependant produite, avec le taux de dépendance qui est passé de 53 % en 2016 à 37 % en 2021, impliquant que chaque retraité est soutenu par environ trois cotisants, contre deux en 2016 (Graphique 6-28). Malgré quelques améliorations, le régime de pension du secteur public au Cameroun continue de faire face à un déficit persistant. Les recettes du régime de pension du Cameroun ne couvrent qu’environ un tiers de ses dépenses. Les deux tiers restants de ces dépenses sont financés par les recettes générales. On note en particulier qu’au sein du système de retraite du Cameroun, les obligations associées aux pensions militaires constituent une part importante du déficit des pensions, à savoir 70 % de celui-ci (voir Chapitre 4). Au cours de la dernière décennie, les prestations décaissées en rapport aux pensions des militaires et des fonctionnaires ont largement dépassé les cotisations versées dans le système de retraite. 106 Taux de cotisation moyen à la sécurité sociale au Cameroun, au Kenya, au Togo, en Côte d’Ivoire, au Nigeria, au Ghana, en Malaisie, en Indonésie, au Sénégal, au Soudan, au Viêt Nam, en Azerbaïdjan et en Namibie pour l’année la plus récente où des données sont disponibles. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 173 Graphique 6-28. Affiliés au régime de pension du secteur public 350 000 45 % 300 000 43 % 250 000 40 % 200 000 38 % 150 000 35 % 100 000 50 000 33 % 0 30 % 2017 2018 2019 2020 2021 Pensionnés Contributeurs Taux de dépendance (axe de droite) Source : Banque mondiale, base de données ASPIRE Les dépenses publiques en pensions équivalaient à environ 1 % du PIB en 2021. L’écart entre les recettes provenant des cotisations et les dépenses du régime du secteur public s’est creusé au fil du temps. Le montant des dépenses était environ trois fois supérieur à celui des recettes provenant des cotisations en 2021 (Graphique 6-29). Il est difficile d’évaluer avec précision la suffisance et la générosité des prestations de pension sans avoir accès à la répartition de leurs montants. Cependant, cette mesure grossière soulève d’importantes questions quant au niveau des prestations versées par le régime de pension du secteur public, étant donné qu’elle témoigne d’un niveau de générosité et de non-équité important entre les travailleurs des secteurs privé et public, ainsi qu’entre les travailleurs du secteur public et la population globale dans son ensemble. Graphique 6-29. Performance financière du régime de retraite du secteur public 250 000 1,04 1,02 1,02 200 000 Millions de XAF 1,00 1,0 150 000 % du PIB 0,98 100 000 0,97 0,96 0,94 0,94 50 000 0,92 0 0,90 2017 2018 2019 2020 Montant des contributions Dépenses Dépenses en % du PIB Source : Banque mondiale, base de données ASPIRE Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 174 La politique de l’emploi est principalement financée par le Fonds national de l’emploi (FNE). Le FNE est financé par le Gouvernement du Cameroun et d’autres partenaires au développement tels que la Banque mondiale et la Banque africaine de développement. Le budget du FNE sert à fournir un appui financier aux demandeurs d’emploi et aux entrepreneurs, ainsi qu’à financer des programmes de formation et d’autres initiatives visant à réduire le chômage dans le pays. De même, le Gouvernement du Cameroun et d’autres partenaires au développement financent également le Programme d’appui à l’emploi des jeunes (PEJ). Le budget du programme sert à fournir un appui financier et une formation aux jeunes entrepreneurs en vue de les aider à démarrer ou à développer leur propre entreprise. Fluctuant au gré de la volatilité des prix internationaux de l’énergie, les subventions universelles aux carburants sont devenues prohibitives. En raison de la flambée des prix des carburants, le coût budgétaire des subventions aux carburants a atteint l’équivalent de 3,4 % du PIB en 2022 (contre 0,8 % en 2021).107 La majeure partie de ce coût provient de la subvention au diesel et à l’essence, qui sont principalement utilisés par les ménages les plus riches. Malgré leur caractère régressif, les dépenses en subventions aux carburants étaient plus de 20 fois supérieures aux dépenses associées aux programmes d’aide sociale ciblés. Les dépenses consacrées aux subventions des carburants sont de loin supérieures aux dépenses en aide sociale ciblées et progressives (Graphique 6-30). D’après les estimations, l’augmentation (moyenne de 21 %) des prix des carburants de février 2023 réduira le coût budgétaire des subventions aux carburants à 0,5 % du PIB en 2023, et le gouvernement s’est engagé à continuer de réduire ces subventions dans le cadre du programme du FMI. Graphique 6-30. Coût budgétaire des subventions aux carburants, Cameroun et pays de comparaison (pourcentage du PIB), 2019-2022 4 3,5 3 2,5 % du PIB 2 1,5 1 0,5 0 Cap-Vert RCA Gabon Guinée Equatoriale Gambie Burkina Faso Nigeria Congo Sénégal Mauritanie Cameroun 2019 2020 2021 2022 Source : Autorités nationales et calculs du personnel de la Banque mondiale, provenant de la Banque mondiale. Cameroun Economic Update June 2023 - Reforming Fuel Subsidies (anglais). Washington, D.C. : Groupe de la Banque mondiale. 107 FMI. 2023. Quatrième revue dans le cadre des accords de facilité élargie de crédit et de mécanisme élargi de crédit. Rapport pays du FMI n° 23/251. Juillet 2023. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 175 Dans l’ensemble, les allocations budgétaires au bénéfice des ministères impliqués dans la protection sociale sont faibles. Le budget pour la protection sociale des quatre ministères reste très faible et relativement stable, constituant 0,17 % du budget public total en 2019 et 2021 (Graphique 6-31). Le Ministère des Finances exécute l’essentiel du budget alloué à la protection sociale, sous forme de subventions universelles pour la plupart ; il est suivi par le Ministère des Affaires Sociales (MINAS). Le MINAS finance principalement les composantes de l’aide sociale, du travail social et de la protection de la famille et de l’enfance. Graphique 6-31. Budget et dépenses exécutées par les ministères chargés de la protection sociale 0,25 0,2 0,15 0,1 0,05 0 Budget voté Budget Exécuté Budget voté Budget Exécuté Budget voté Budget Exécuté 2019 2020 2021 Ministère des Finances (Subventions de protection sociale) Ministère des Affaires Sociales Ministère du Travail et de la Sécurité Sociale Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille Source: Boost (MINFI) Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 176 Les dépenses en protection sociale sont principalement allouées à l’administration centrale et à la Région du Centre. La proportion des dépenses allouées à l’administration centrale est passée de 41,6 % à 58,5 % entre 2019 et 2021. Sur la même période, la Région du Centre concentrait environ 47 % des dépenses en moyenne. En moyenne, seulement 0,2 % des dépenses sont allées aux neuf autres régions où les besoins sont plus importants. Graphique 6-32. Répartition des dépenses en protection sociale au sein des régions du Cameroun. 100 % 80 % 60 % 40 % 20 % 0% 2019 2020 2021 Administration centrale Adamaoua Centre Est Extrême Nord Littoral Nord Nord-Ouest Ouest Source: Boost (MINFI) 6.4.3 Analyse distributive des subventions aux combustibles fossiles108 Les subventions aux combustibles fossiles au Cameroun sont devenues une charge budgétaire importante avec l’augmentation des prix internationaux de l’énergie. Comme indiqué plus tôt, l’utilisation de fonds publics pour geler les prix de détail des carburants empêche d’allouer ces ressources à d’autres dépenses publiques potentiellement plus productives, telles que les investissements sociaux et en infrastructures. Les subventions aux carburants introduisent également des distorsions d’environnement et de marché, encourageant une plus grande utilisation des combustibles fossiles. L’objectif des subventions universelles est de fournir un moyen aisé, d’un point de vue administratif, de protéger les pauvres contre la volatilité excessive des prix. Il est important d’appréhender l’impact distributif des subventions aux combustibles fossiles actuelles alors que le Cameroun envisage des approches pour réformer le programme. Les subventions aux carburants du Cameroun sont fortement régressives, avec l’analyse distributive qui confirme que les ménages plus aisés consomment plus de carburant que les ménages les plus pauvres. Les ménages plus riches consacrent 108 Voir Banque mondiale, Rapport sur la situation économique du Cameroun, juin 2023 - Réforme des subventions aux carburants http://documents.worldbank. org/curated/en/099063023163038119/P1779950d70c4f0700aa5b0cbed824dc4a5 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 177 généralement une part plus importante de leur budget total au carburant, en particulier l’essence et le diesel, parce qu’ils possèdent davantage de véhicules personnels et de générateurs diesel.109 Parce que les ménages aisés consacrent non seulement une part plus élevée de leur budget au carburant, mais disposent également de budgets plus importants, ils bénéficient de manière disproportionnée des subventions qui réduisent le prix du carburant. Comparés aux ménages urbains, les ménages ruraux allouent une part plus importante de leur budget au carburant, mais dépensent un montant absolu inférieur parce qu’ils sont plus pauvres. Parmi les trois combustibles considérés, les subventions au kérosène ne sont pas régressives parce que ce combustible représente une part plus importante de la consommation totale des ménages pauvres et ruraux, comparée à celle des ménages riches et urbains. Comme les ménages plus aisés consomment plus de carburant, ce sont eux qui bénéficient le plus des subventions et subiraient les pertes directes les plus sévères (en XAF) du fait de la réforme des subventions aux carburants. Une tendance claire se dégage des trois scénarios présentés : (i) réduction de 20 % des subventions, ce qui se rapproche des hausses de prix de février 2023, (ii) réduction de 40 % des subventions, et (ii) élimination des subventions aux carburants (Graphique 6-33).110 Les ménages plus aisés essuient des pertes nettement plus élevées que les ménages plus pauvres. Par exemple, d’après les estimations, les ménages du quintile de revenu le plus élevé vivant en milieu urbain perdront 440 000 XAF (770 USD) par an si les subventions aux carburants étaient complètement supprimées. Autrement dit, ce montant représente le niveau d’avantages qu’ils reçoivent actuellement des subventions. Graphique 6-33. Impact des scénarios divers de réduction des subventions aux carburants (perte moyenne par ménage en milliers de FCFA), suivant les milieux urbains et ruraux et suivant les quintiles de revenus 440 400 Perte moyenne par groupe de revenus des ménages 296 300 239 197 200 185 176 138 147 104 119 96 100 79 74 88 68 79 55 48 59 60 32 37 42 40 28 27 21 29 16 14 0 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 Urban Rural Baisse de 20 % des subventions Baisse de 40 % des subventions Baisse de 100 % des subventions Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. 109 Estimation obtenue à partir des données de la Quatrième enquête camerounaise auprès des ménages de 2014, (ECAM4). L’enquête était représentative de l’ensemble du pays et a été menée auprès d’un échantillon de 12 897 ménages répartis dans 1 024 grappes de l’ensemble du pays. 110 Parce que les autorités camerounaises ont maintenu le prix du kérosène, les estimations concernent exclusivement l’essence et le diesel. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 178 Cependant, les ménages pauvres sont également indirectement affectés par la réforme des subventions aux carburants, ce qui peut aggraver la pauvreté. Même s’ils consomment beaucoup moins d’essence et de diesel, les ménages pauvres sont indirectement affectés par la réduction des subventions aux carburants, parce que celle-ci entraîne une augmentation des prix d’autres produits pour lesquels le carburant constitue un élément de coût important. La répartition de la consommation sur les trois scénarios de réduction des subventions, avec la ligne verticale indiquant le seuil de pauvreté national de 339 715 XAF par ménage et par an, montre que tous les scénarios se traduisent par une baisse globale de la consommation (décalage à gauche) et, par conséquent, une augmentation du nombre de personnes en situation de pauvreté (Graphique 6.34). Graphique 6-34. Impact de la pauvreté sur la répartition des dépenses de consommation La ligne rouge correspond au seuil de pauvreté international 1.500e-0 Situation de référence Réduction de 20 % 1.000e-06 Réduction de 40 % Réduction de 100 % 5.000e-07 0 1 000 000 2 000 000 3 000 000 Dépense par habitant Source : Autorités camerounaises, Calculs des services de la Banque mondiale. Les économies réalisées grâce à l’augmentation des prix des carburants peuvent aider à financer l’expansion de programmes d’assistance sociale ciblés afin d’atténuer les effets négatifs de la réforme des subventions sur les pauvres ; toutefois, il sera important d’assurer une conception rapide et minutieuse de ces programmes. L’expérience internationale montre que des filets de sécurité ciblés peuvent jouer un rôle de tampon et offrir aux ménages pauvres une protection contre les hausses de prix associées à la réforme des subventions. Le plus important, cependant, c’est de mettre le filet de sécurité en place avant la réduction des subventions, afin de prévenir les effets négatifs – et potentiellement irréversibles – sur les pauvres. Cette réponse doit inclure des systèmes de prestation robustes, tels qu’un registre social et un système de paiement numérique, qui peuvent être rapidement déployés parallèlement à la réforme des subventions. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 179 6.4.4 Options de réformes du système de protection sociale Il s’agit globalement des mêmes recommandations que celles proposées dans le PER de 2018, étant donné qu’aucun changement majeur n’a été opéré jusqu’ici. Elles visent à améliorer l’efficacité et l’équité des dépenses, à réorienter les dépenses d’une petite partie de la population âgée vers une base plus large d’enfants, de jeunes et de population en âge de travailler, à assurer la viabilité budgétaire des pensions et à orienter les dépenses de manière à contribuer à la réalisation des objectifs de la SND30 du gouvernement, afin d’appuyer un plus grand développement. 6.5 Options de réformes pour booster le capital humain au Cameroun Avec peu de progrès réalisés dans la mise en œuvre des réformes présentées dans le PER 2018, le Cameroun est désormais confronté à des perspectives difficiles pour apporter les changements nécessaires au renforcement du développement de son capital humain à l’appui d’une croissance durable. S’appuyant sur l’analyse des sections précédentes sur le secteur de l’éducation, le secteur de la santé et la protection sociale, un ensemble de recommandations dans les domaines de l’éducation, de la santé et de la protection sociale sont présentées ci-dessous dans la Tableau 6-7. Tableau 6-7. Mesures de réformes pour améliorer l’éfficacité des dépenses en capital humain Objectif Actions recommandées Responsabilités Chronologie Secteur Éducatif Réaffecter les dépenses Dépenser davantage pour l’éducation, en MINFI, MINDEVEL, Moyen à long terme publiques globales aux priorités particulier pour l’investissement. MINEDUB, MINESEC stratégiques, en dépensant davantage pour l’éducation Améliorer l’efficacité des Mise en œuvre complète des MINFI, MINDEVEL, Court à moyen terme dépenses en mettant en œuvre réglementations de novembre 2022 sur la MINEDUB, MINESEC des règles de financement des transparence et l'efficacité du financement écoles scolaire Soutenir les apports clés en Imposer un redéploiement plus équitable MINFI, MINDEVEL, Court à moyen terme imposant le déploiement des des enseignants et réduire le nombre de MINEDUB, MINESEC enseignants et en finançant les personnel administratif. manuels scolaires Créer un Fonds national pour les manuels MINFI, MINEDUB, MINESEC Court à moyen terme scolaires pour soutenir l'édition, l'impression et la distribution des manuels scolaires afin de les rendre disponibles dans toutes les régions, en particulier les zones d'éducation prioritaire (ZEP). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 180 Objectif Actions recommandées Responsabilités Chronologie Remédier aux disparités en Réformer les obstacles administratifs qui MINEDUB, MINESEC Court à moyen terme supprimant les dépenses nuisent aux pauvres, comme l'exigence d'un administratives, en réduisant acte de naissance pour obtenir un diplôme les dépenses directes, en d'études primaires. fournissant des manuels gratuits et en promouvant la Suivre et gérer les dépenses directes MINFOPRA, Court à moyen terme décentralisation budgétaire. d'éducation des familles défavorisées MINEDUB, MINESEC Soutenir la gratuité ciblée des manuels MINFI, MINEDUB, MINESEC Court à moyen terme scolaires dans les zones d’éducation prioritaire (ZEP). Promouvoir la décentralisation budgétaire MINFI, MINEDUB, MINESEC Moyen à long terme pour améliorer la prestation des services publics, y compris l'éducation Secteur de la santé Réaffecter l’ensemble des Augmenter les ressources financières MINFI, MINEPAT, DGB, Short to medium term dépenses publiques aux globales disponibles pour le secteur de la MINSANTE priorités stratégiques, en santé dépensant davantage pour la santé en consolidant les régimes existants, en développant une Harmoniser et consolider les dispositifs de MINFI, MINEDUB, MINESEC Court à moyen terme stratégie de financement et financement existants en améliorant la gestion des ressources. Élaborer une stratégie de financement MINFI, MINDEVEL, Court à moyen terme du secteur de la santé et adopter/mettre MINEDUB, MINESEC en œuvre une stratégie de financement et tous les textes réglementaires d’accompagnement nécessaires Améliorer l’efficacité des Améliorer l'allocation des ressources en MINFI, MINDÉVEL, Court à moyen terme dépenses de santé en fournissant un financement suffisant aux MINSANTE augmentant le financement régions pour gérer les établissements de régional, en donnant la priorité santé et le personnel nécessaire dans le à des services efficaces,réduire cadre des compétences transférées les dépenses des ménages et promouvoir la responsabilisation via la gestion et l’évaluation Renforcer le processus budgétaire pour MINFI, MINDÉVEL, Court à moyen terme financières. améliorer l’allocation géographique et MINSANTE favoriser les dépenses programmatiques Favoriser l’efficacité de la prestation MINFI, MINSANTE Court à moyen terme de services en donnant la priorité aux allocations budgétaires pour les programmes de santé publique essentiels et les services de santé rentables Atteindre une couverture sanitaire MINFI, MINFOPRA Moyen à long terme universelle en réduisant les dépenses MINSANTE des ménages grâce à un financement innovant et durable pour un accès gratuit ou subventionné aux soins de santé pour certaines populations. Promouvoir la transparence et la MINSANTE Moyen à long terme responsabilité dans l’allocation des ressources à travers : (i) l’amélioration des systèmes d’information financière ; (ii) la mise à jour du cadre juridique contrôlant les autorisations financières et les dépenses ; et (iii) la participation systématique à l’évaluation des résultats. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 181 Objectif Actions recommandées Responsabilités Chronologie Soutenir les apports clés du Augmenter la disponibilité du matériel MINSANTE Court à moyen terme secteur de la santé grâce à une médical nécessaire plus grande disponibilité des équipements, un personnel adéquat, une meilleure Optimiser la répartition du personnel MINFI, MINSANTE Court à moyen terme disponibilité des médicaments existant entre les régions et les essentiels et des incitations établissements pour remédier aux disparités pour la performance des en matière d’accès aux soins de santé. établissements. Aligner le recrutement sur les besoins spécifiques en matière de soins de santé par le biais du secteur public et du recrutement décentralisé, et améliorer la rétention en impliquant le personnel dans la gestion. Garantir une utilisation efficace des ressources humaines et offrir des avantages ciblés Améliorer la disponibilité des médicaments MINSANTE Court à moyen terme essentiels et des fournitures médicales grâce à des mesures réglementaires et à la gestion de la chaîne d'approvisionnement Fournir des incitations pour la performance MINSANTE, MINFOPRA Medium to long term des hôpitaux/centres de santé à travers des contrats qui favorisent des soins de qualité, une charte des « droits et devoirs » des patients et une collecte systématique de statistiques dans les établissements de santé publics et privés Remédier aux disparités Assurer une meilleure répartition territoriale Court à moyen terme dans le secteur de la santé des formations sanitaires publiques sur la en équilibrant l’offre de soins base d’une carte sanitaire actualisée de santé entre les régions, en ciblant les médicaments essentiels sur les populations Mettre en place avec les autorités locales Court à moyen terme vulnérables et en décentralisant un système ciblé de distribution de la gestion budgétaire. médicaments essentiels aux populations les plus vulnérables des zones défavorisées Décentraliser la gestion budgétaire des Moyen à long terme ressources financières Secteur de la protection sociale Réaffecter les dépenses Réaffecter une partie des économies MINFI Court à moyen terme publiques de protection sociale réalisées sur les subventions résultant vers les priorités stratégiques des récentes augmentations du prix des en utilisant les économies carburants pour élargir les programmes réalisées grâce à la réforme des d’aide sociale ciblés. subventions aux carburants, en finalisant une stratégie nationale, en s’engageant dans une budgétisation à long terme Adopter et publier la Stratégie Nationale de MINAS Court à moyen terme et en élargissant le programme Protection Sociale. de filets de sécurité sociale (Projet Filets Sociaux) en un programme national. Établir un budget prévisible à long terme MINFI, MINAS Moyen à long terme pour les principaux programmes de filet de sécurité sociale et garantir des paiements prévisibles et ponctuels des transferts monétaires aux bénéficiaires. Transformer le programme de filets sociaux MINAS Moyen à long terme (Projet Filets Sociaux) en un programme national doté d'un cadre juridique et politique approprié. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 182 Objectif Actions recommandées Responsabilités Chronologie Améliorer l’efficacité des Réaffecter le budget de protection sociale MINAS, MINDEVEL Court à moyen terme dépenses de protection sociale de l’administration centrale aux régions. en réaffectant le budget aux régions, en impliquant les communautés locales et Engager les communautés locales et les MINDEVEL, MINAS Court à moyen terme en réformant les retraites organisations de la société civile dans la publiques. planification, la mise en œuvre et le suivi des programmes d’assistance sociale afin de garantir leur pertinence et leur efficacité. Réformer le système public de retraite pour MINFI Moyen à long terme le rendre plus durable. Soutenir les éléments clés de la Accélérer la mise en œuvre d'un registre MINAS Court à moyen terme protection sociale en mettant social et adopter les critères d'éligibilité des en œuvre un registre social et ménages et des individus à l'aide sociale, en établissant une structure aux programmes du marché du travail, aux publique permanente. dispenses de frais d'assurance maladie et à d'autres services. Établir une structure publique permanente MINFI, MINAS Moyen à long terme et stable pour accueillir les programmes d’aide sociale. Remédier aux disparités en Améliorer le ciblage des programmes de MINFI Court à moyen terme matière de protection sociale soutien à l’emploi. en ciblant les dépenses sur les enfants et les jeunes, les pauvres et les personnes vulnérables. Augmenter les dépenses dans les Moyen à long terme programmes d'assistance sociale visant à améliorer les conditions de vie des enfants, des jeunes, des personnes vulnérables et des pauvres. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 183 7 PROMOUVOIR UNE PRESTATION DE SERVICES PUBLICS EFFICACE À TRAVERS LA DÉCENTRALISATION BUDGÉTAIRE Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 184 Le renforcement de la décentralisation est une priorité cruciale dans le cadre des efforts menés par le Cameroun pour renforcer la résilience, réduire les conflits et promouvoir la stabilité (Évaluation des risques et de la résilience au Cameroun, 2020). Ces dernières années, le pays a connu une série d’événements déstabilisateurs et de crises infranationales qui ont entraîné des déplacements, une montée de la violence, des interruptions de la prestation de services sociaux et une érosion de la confiance envers la gouvernance centrale et locale (Encadré 6-1). Ces conflits, bien que propres à chaque région, ont des facteurs sous-jacents communs : une détérioration du contrat social, un manque de confiance envers les institutions étatiques, un système centralisé caractérisé par le clientélisme et une répartition inégale des ressources, la marginalisation de certains groupes et une prestation de services inadéquate. Reconnaissant la nécessité de s’attaquer à ces problèmes, le Grand dialogue national de 2019 a appelé à une accélération de la décentralisation afin de répondre aux aspirations des diverses populations. Dans la Stratégie nationale de développement, la gouvernance, la décentralisation et la gestion stratégique de l’État ont été déterminés comme un pilier essentiel pour l’atténuation des risques de conflit, incluant diverses mesures telles que la décentralisation et le développement local, le renforcement de l’État de droit et de la sécurité, l’amélioration des services publics et la lutte contre la corruption. Le système actuel d’administration publique et de prestation de services publics du Cameroun est constitué d’un noyau central d’où partent des ramifications parallèles d’entités déconcentrées et décentralisées. Le Cameroun est composé de 10 régions ayant à leur tête des gouverneurs nommés par le Président, elles-mêmes divisées en 58 départements ayant à leur tête des préfets et 360 districts ayant à leur tête des sous-préfets. Le pays compte 360 communes et 14 communautés urbaines. Les entités déconcentrées représentent le gouvernement central et ses ministères aux niveaux des régions, des départements et des districts, tandis que les entités décentralisées se situent au niveau des municipalités/communes, se présentant sous forme de conseils municipaux élus, ayant à leur tête des maires ; et au niveau des régions, sous forme de conseils régionaux élus dirigés par des présidents.111 Graphique 7-1. Régions, communautés urbaines et communes Régions Communautés urbaines Communes Adamaoua 01 33 Centre 03 34 Est 02 29 Extrême Nord 01 40 Littoral 01 70 Nord 01 21 Nord-Ouest 01 47 Ouest 01 21 Sud 01 34 Sud-Ouest 02 31 Total 14 360 Source: Cameroon Political Economy Analysis (PEA) 2022 111 Banque Mondiale. 2022. Économie politique Analyse de la décentralisation au Cameroun Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 185 Malgré des progrès dans la décentralisation au Cameroun, d’importants défis restent à relever. Le transfert de compétences et de ressources vers les collectivités territoriales décentralisées figure parmi les principaux défis, ceux-ci ayant souvent une faible capacité à générer des revenus propres. Même si les principaux impôts et taxes sont collectés par les services déconcentrés du Ministère des Finances, le transfert de ces fonds vers les collectivités locales est sujet à des retards. De plus, les transferts effectués par le gouvernement central ne respectent pas systématiquement les délais prescrits. Le gouvernement reconnaît la nécessité de prendre de plus amples mesures pour assurer l’achèvement du processus de décentralisation et la mise en œuvre effective des dispositions essentielles. Pour cela, il faudra s’attaquer à des problèmes tels que le manque de ressources humaines et financières, qui entrave les capacités d’investissement locales. La résolution de ces défis techniques permettrait au programme de réforme d’avancer, favorisant la stabilité et l’autonomisation des communautés locales. La décentralisation budgétaire joue un rôle crucial dans l’efficacité de prestation des services publics et d’utilisation des fonds publics. Dans le contexte du Cameroun, la décentralisation budgétaire tient un rôle encore plus important dans la résolution des causes de fragilité. Avec une population de plus de 28 millions d’habitants, le pays est confronté au défi de répondre aux divers besoins et demandes de ses citoyens de diverses régions. Dans un tel scénario, la décentralisation budgétaire constitue un puissant outil de responsabilisation des collectivités territoriales décentralisées et leur permet de répondre aux besoins spécifiques de leurs communautés. En outre, alors que le Cameroun s’efforce d’améliorer la prestation de services publics et d’optimiser les dépenses publiques, la décentralisation des pouvoirs budgétaires vers les collectivités territoriales décentralisées présente potentiellement de nombreux avantages, dans le sens où elle permet de rapprocher la prise de décision budgétaire des citoyens des régions. Tableau 7-1. Résumé de la mise en œuvre des recommandations du PER de 2018 du Cameroun sur la décentralisation Recommandation du PER de 2018 Statut Principaux défis Envisager un transfert progressif de Le processus de décentralisation Poursuivre la décentralisation des certaines fonctions et/ou sous-fonctions est en cours. ressources afin de les mettre en du gouvernement central vers les échelons correspondance avec les compétences inférieurs du gouvernement. transférées. Ce chapitre présente une analyse de la situation de la décentralisation budgétaire au Cameroun à la suite de l’adoption du Code de décentralisation en 2019. Il vient en complément du document de référence sur « L’économie politique de la décentralisation au Cameroun », qui donne un aperçu du processus et des principaux acteurs impliqués. Il visera essentiellement à appréhender la manière dont les dynamiques institutionnelles et politiques ont façonné la trajectoire historique de la décentralisation. L’analyse jettera les bases de l’évaluation de la viabilité budgétaire du système actuel et donnera des éclairages sur l’avenir de la décentralisation au Cameroun. Le chapitre est organisé en quatre sections. La Section 1 donne un aperçu du processus de décentralisation au Cameroun, mettant Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 186 en évidence les avantages et les inconvénients de la décentralisation des dépenses dans les pays à faible revenu, en particulier en Afrique. La Section 2 présente un résumé des développements politiques récents liés à la décentralisation des dépenses au Cameroun. La Section 3 examine les aspects recettes et dépenses de la décentralisation budgétaire dans le pays. Enfin, la Section 4 présente une analyse des dépenses décentralisées et déconcentrées au Cameroun. Le chapitre s’achève sur la Section 5, avec un résumé de la discussion et des recommandations politiques pratiques formulées sur la base des résultats. Le PER de 2018 a recommandé le transfert des fonctions de l’administration centrale aux collectivités locales. 7.1 Contexte politique et socioéconomique de la décentralisation au Cameroun Depuis 1996, le Cameroun s’est engagé dans la voie de la décentralisation, reconnaissant le rôle déterminant que les collectivités territoriales décentralisées jouent en tant que moteurs du développement et la nécessité de leur transférer des compétences et des ressources. L’objectif principal est d’octroyer davantage d’autorité sur les ressources publiques et les processus décisionnels aux collectivités locales. Ceci implique d’allouer des ressources financières, y compris des recettes fiscales et des subventions, du gouvernement central aux collectivités locales, pour les habiliter à financer et à superviser leurs propres initiatives et programmes de développement. Un jalon important a été atteint en 2004 avec l’adoption d’une nouvelle constitution qui reconnaît officiellement le rôle des collectivités locales dans le développement et formalise le principe de décentralisation. La même année, le gouvernement a adopté la Loi sur la décentralisation et la gouvernance locale, qui a créé des conseils locaux et défini leurs responsabilités et fonctions. Cependant, le transfert effectif de compétences et de ressources des ministères vers les communes n’a débuté qu’en 2010 et son niveau a varié selon les différents ministères. Par ailleurs, les compétences dévolues aux régions et aux communes restent vagues et limitées. Même si la législation définit l’étendue des fonctions à transférer aux collectivités territoriales décentralisées (CTD), le gouvernement central conserve la responsabilité première de la fourniture de presque tous les services publics. Certains ministères répugnent encore à partager leurs pouvoirs et leurs ressources. En particulier, le transfert des responsabilités en rapport à la protection civile et à la gestion du personnel enseignant et de santé n’a pas encore été pleinement réalisé. En outre, ces compétences n’ont pas été davantage ventilées en attributs ou sous-fonctions. Même si des avancements ont été réalisés dans le transfert de compétences moins coûteuses, la gestion globale des ressources humaines des secteurs de la santé et de l’éducation, qui, selon la législation, devrait être transférée aux CTD reste du ressort du gouvernement central (Encadré 7-1).112 112 Banque Mondiale. 2022. Économie politique Analyse de la décentralisation au Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 187 Encadré 7-1. Rôle et pouvoirs des CTD en vertu de la loi • En 2019, un nouveau Code général des CTD (CGCT) a été adopté. Il a, entre autres choses, étendu des compétences aux régions et aux communes et accordé un statut particulier aux régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (NOSO). Ce nouveau Code s’appuie en grande partie sur une révision des lois de 2004, leur adaptation au contexte actuel et les recommandations élaborées lors de l’Assemblée Générale des Communes. • Les CTD désignent par définition les régions et les communes (Article 2, CGCT) : La commune est la CTD à l’échelon de base. Elle a pour mission générale d’assurer le développement local et d’améliorer le cadre et les conditions de vie de ses habitants (Article 147, CGCT) et la région est une CTD composée de plusieurs départements. Elle couvre le même territoire que la région à titre de circonscription administrative. La région a une mission générale d’avancement économique et social. À ce titre, elle contribue au développement harmonieux, équilibré, solidaire et durable de la région (Article 259, CGCT). • Les domaines de compétences transférés aux communes et aux régions par la loi comprennent l’action économique, l’environnement et la gestion des ressources naturelles, l’aménagement du territoire, le développement régional, l’urbanisme et le logement, la santé et la population, la protection sociale, l’éducation, l’alphabétisation et la formation professionnelle, la jeunesse, les sports et les loisirs, la culture et la promotion des langues nationales. Une date limite a été fixée pour achever le transfert de toutes les responsabilités juridiques, à savoir 2015. Depuis 2010, 63 compétences ont été déléguées par 20 ministères par des décrets spécifiques. Cependant, plusieurs fonctions n’ont pas été transférées. • Les régions sont une création récente. Le 22 décembre 2020, le Cameroun a organisé ses premières élections régionales. Aujourd’hui, les 10 régions du Cameroun sont dirigées par 897 conseillers régionaux élus, même si les régions, en tant qu’entités administratives, ne sont pas encore pleinement opérationnelles et manquent de ressources humaines, financières et matérielles. Source: PEA, 2022 Au cours des dernières années, le Cameroun a renouvelé son engagement envers la décentralisation, notamment la décentralisation budgétaire,113 ce qui s’est traduit par l’adoption de la Loi 2019/024 du 24 décembre 2019. Cette loi définit le cadre général des collectivités territoriales et de leur système financier, ainsi que les régimes spécifiques applicables à certaines collectivités territoriales. Elle crée également un statut et un cadre juridique particuliers pour les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Le Ministère de l’Administration Territoriale (MINAT) et le Ministère de la Décentralisation et du Développement Local (MINDDEVEL) sont chargés de réglementer et de superviser l’organisation et le fonctionnement des CTDs tout en assurant le suivi et évaluation de la politique de décentralisation du gouvernement. 113 La décentralisation est le processus de transfert d’un pouvoir, d’une autorité ou d’un processus décisionnel d’une autorité centrale vers des échelons inférieurs de gouvernement, d’organisations ou de personnes. La décentralisation budgétaire, quant à elle, désigne spécifiquement la délégation de pouvoirs et de responsabilités budgétaires d’un gouvernement central à des échelons inférieurs de gouvernement, tels que les autorités municipales ou régionales. Elle implique d’accorder le pouvoir de générer des recettes, de prendre des décisions budgétaires et de gérer les finances publiques au niveau local. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 188 La Loi 2019/024 du 24 décembre 2019 portant code général des CTDs comporte plusieurs innovations importantes pour le Cameroun. D’abord, la loi a aboli le principe de complémentarité et l’a remplacé par le principe de subsidiarité, élargissant les responsabilités transférées aux autorités infranationales. Elle a également établi l’élection des maires des villes, rompant avec l’ancienne pratique consistant à nommer les délégués depuis l’échelon national. Deuxièmement, la loi a créé un statut et un cadre juridique particuliers pour les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Ce statut particulier accordé à ces régions figurait parmi les accords politiques conclus pour apaiser les mouvements sécessionnistes. Par ailleurs, la loi permet la création et la gestion de missions de développement régional, la reconnaissance du statut de chefferie traditionnelle et l’institution d’un « conciliateur public indépendant » dans ces deux régions. Néanmoins, d’importantes difficultés et retards demeurent au niveau de la mise en œuvre. Des défis tels que les relations de travail et la coordination des responsables à différents échelons, la fourniture et la gestion des ressources humaines, ainsi que le statut des autorités élues et du personnel locaux restent des sujets de préoccupation. Il existe plus de 150 textes juridiques connexes mais bon nombre d’entre eux n’ont pas été pleinement mis en œuvre. À cause de la faiblesse des ressources financières au niveau local, les collectivités locales rencontrent des difficultés dans la planification et la mise en œuvre de projets de développement. De nombreux conseils locaux peinent à financer leurs programmes, ce qui donne une mise en œuvre lente ou incomplète. De plus, le manque d’expertise et de ressources parmi les conseils locaux nuit à l’efficacité de la gestion financière et peut constituer un facteur favorable à la mauvaise gestion des fonds et à la corruption. La taille financière des CTD au Cameroun est inconnue. Elle ne fait pas l’objet de calcul régulier. Le Fonds spécial d’équipement et d’intervention intercommunale (FEICOM) dispose d’un recueil de statistiques pour 2012-2016 et de données brutes collectées pour 2017-2021 qui serviront à mettre à jour le recueil. Malheureusement, les données concernant les comptes publics collectées en 2021 ne concernent que 170 organismes communaux, alors que les données concernant les comptes publics collectées en 2020 étaient disponibles pour 254 organismes communaux. Pour ces deux années, il manque les comptes de la communauté urbaine de Yaoundé, la deuxième plus grande collectivité municipale du pays en termes de population, ainsi que celle concentrant la plupart des communes qui le composent. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 189 7.2 Le processus de décentralisation budgétaire comme voie d’amélioration de la prestation de services Depuis les années 1980, de nombreux pays en développement se sont engagés dans la voie de la décentralisation budgétaire comme moyen d’améliorer la prestation des services publics. Par exemple, l’Inde a reconnu les besoins en financement des Institutions Panchayati Raj (IPR), responsables de la gouvernance et du développement locaux. Toutefois, ces IPR sont confrontées à des défis tels que la faiblesse des ressources et des capacités, l’ingérence politique, le manque d’autonomie et le manque de sensibilisation du public.114 De même, l’Indonésie a constaté l’impact positif de la décentralisation sur la prestation de services, mais elle est confrontée à des défis tels que la répartition inégale des ressources et le manque de coordination.115 Le programme de décentralisation budgétaire du Brésil a permis à l’échelon local d’avoir un plus grand contrôle sur la prise de décision et l’allocation des ressources,116 mais il se heurte à des défis tels que l’inégalité de la répartition des revenus, la faiblesse de la capacité budgétaire dans les zones reculées et la corruption. Enfin, les efforts de décentralisation de l’Afrique du Sud ont amélioré la prestation de services dans les domaines de la santé et de l’éducation, mais des défis subsistent, tels que l’inégalité des capacités de collecte de revenus parmi les municipalités. Plusieurs pays africains ont mis en œuvre la décentralisation budgétaire pour accorder une plus grande autonomie aux collectivités locales. Les réformes de décentralisation budgétaire ont commencé à prendre de l’ampleur en Afrique subsaharienne au début des années 1990. La décentralisation budgétaire la plus avancée est observée dans trois pays d’Afrique subsaharienne, à savoir le Nigeria et l’Afrique du Sud, où les dépenses au niveau des administrations infranationales représentent environ la moitié des dépenses totales des administrations publiques.117 Au Ghana, la décentralisation a été mise en œuvre depuis le début des années 1990 et a entraîné des améliorations de la prestation de services et une plus grande participation des citoyens. Les collectivités locales du Ghana se sont vu conférer davantage de contrôle sur les processus décisionnels et l’allocation des ressources, une évolution qui est la bienvenue. Il reste cependant certains obstacles à surmonter, tels que la forte dépendance envers les subventions du gouvernement central dont la fiabilité et la ponctualité ne sont pas garanties, ainsi que la faiblesse des systèmes de gestion financière et l’ingérence politique qui ont conduit à la nomination de personnel non qualifié à des postes des administrations des collectivités locales (Encadré 7-2). De même, le programme de décentralisation budgétaire du Kenya a permis d’améliorer l’accès aux services de santé, en particulier en milieu rural et dans les zones isolées, grâce à un plus grand contrôle de l’échelon local sur l’allocation des ressources et la prise de décision. En Tanzanie, le programme de décentralisation budgétaire vise à transférer la responsabilité des soins de santé et de l’éducation aux collectivités locales, ce qui constitue une initiative prometteuse. Cependant, il est confronté à certains défis, comprenant l’insuffisance du transfert de ressources financières, un cadre juridique qui entraîne un chevauchement des responsabilités et un manque de redevabilité, la faiblesse des capacités des autorités du gouvernement local et la faiblesse de la coordination intergouvernementale (UNICEF, 2018). 114 Ministère de Panchayati Raj 2021; Reddy & Mohapatra 2017 115 Banque mondiale 2020 116 Falleti 2012 117 FMI (2018). Leçons pour une décentralisation budgétaire efficace en Afrique subsaharienne Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 190 Encadré 7-2. Coûts et avantages de la décentralisation budgétaire : revue documentaire La documentation relative à la décentralisation budgétaire dans les LIC, les PRITI et l’AfSS donne une image mitigée de ses avantages et de ses coûts. Prestation de services améliorée : Des études ont montré que la décentralisation peut améliorer l’efficience et l’efficacité de prestation de services, dans la mesure où les collectivités locales sont généralement mieux placées pour cerner les préférences et les besoins locaux et y répondre (Bardhan et Mookherjee 2006 ; Faguet 2004). Par exemple, une étude de Gershberg et ses collègues (2016) a révélé que la décentralisation en Tanzanie a entraîné des améliorations de la prestation de soins de santé primaires et une augmentation de l’utilisation des services de santé maternelle et infantile. La décentralisation budgétaire peut également mener à des améliorations de la prestation de services de santé, d’éducation et d’approvisionnement en eau (Bird et Vaillancourt 1998 ; Chellaraj et Mattoo 2009). Plus grande redevabilité : La décentralisation peut accroître la redevabilité et la transparence du gouvernement en rapprochant les processus décisionnels des citoyens. Plus précisément, les études ont montré que la décentralisation peut mener à une plus grande participation des citoyens à la gouvernance locale et à une meilleure transparence et redevabilité dans la gestion des ressources publiques (Bardhan et Mookherjee 2006 ; Faguet 2004). Plus grand développement économique : Des études ont révélé que la décentralisation peut faire augmenter les investissements et créer des emplois, les collectivités locales étant souvent mieux placés pour adapter leurs politiques aux conditions locales et attirer des investissements privés (Faguet 2004 ; Smoke 2005). Par exemple, une étude de Crook et Manor (1998) a révélé qu’en Ouganda, la décentralisation avait entraîné une augmentation des investissements dans les infrastructures et une amélioration de la productivité agricole. Cependant, la documentation met également en avant plusieurs coûts potentiels de la décentralisation budgétaire. Inefficacités et fragmentation : La décentralisation peut conduire à des inefficacités et à une fragmentation de la prestation de services et de la gestion des ressources, en particulier dans les contextes où les collectivités locales n’ont pas la capacité de gérer les ressources avec efficacité. Des études ont également révélé que la décentralisation peut mener à une duplication des efforts et à un manque de coordination entre les collectivités locales (Bardhan et Mookherjee 2006 ; Smoke 2005). Ingérence politique : La décentralisation peut accroître le risque d’ingérence politique dans l’allocation des recettes et la gestion des dépenses. Par exemple, une étude menée par Devas et ses collègues (2004) a révélé qu’en Indonésie, la décentralisation a entraîné une augmentation de la corruption et des comportements de recherche de rente parmi les politiciens locaux. Dans l’ensemble, la documentation suggère que les avantages et les coûts de la décentralisation budgétaire dans les LIC, les PRITI et l’AfSS dépendent d’une série de facteurs, notamment la qualité de la gouvernance, la capacité des collectivités locales et le niveau de coordination intergouvernementale. Source : Services de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 191 Le Cameroun a quelque peu avancé dans l’amélioration de la prestation de services publics et la promotion de l’appropriation et de la redevabilité locales à travers la décentralisation budgétaire, mais des défis subsistent. Au fil des années, le pays a graduellement accru l’autonomie des collectivités locales, le dernier coup de collier en date ayant eu lieu en 2004. Les collectivités territoriales disposent désormais de pouvoirs de dépenses légèrement plus étendus, qui leur permettent de percevoir des impôts et des taxes et d’investir dans l’amélioration de la prestation des services publics au sein de leurs communautés respectives. La mise en œuvre de ces initiatives s’est heurtée à certaines difficultés, notamment en ce qui concerne le transfert des pouvoirs de dépenser du gouvernement central vers les collectivités locales. La faiblesse des capacités et des ressources des collectivités locales a également limité leur capacité à fournir les services essentiels. Néanmoins, le gouvernement a pris des mesures pour aider les collectivités locales à travers des programmes de formation et d’appui technique, et un potentiel d’améliorations supplémentaires existe. Les particularités du Cameroun constituent un défi à sa décentralisation budgétaire. Avec une population urbaine disproportionnellement élevée, la faible densité démographique du pays se traduit par des unités administratives de petite taille qui limitent la capacité des municipalités à fournir des services publics. Cette situation affecte considérablement la génération de revenus, notamment hors de Douala et de Yaoundé. Il est essentiel de reconnaître l’unicité de la situation du Cameroun dans le contexte des LIC et PRITI africains pour réussir la décentralisation. Graphique 7-2. Statistiques infranationales, Cameroun et groupe de pays pairs Population Densité Population de Nombre moyen Nombre Nombre urbaine (hab/km2) la capitale d’habitants par d’autorités d’autorités (% de la commune infranationales infranationales population au niveau au niveau totale) intermédiaire régional ou étatique Cameroun 57,6 55,8 11,9 73 738,5 14 10 Faible revenu 30,9 126,4 8 186 671,8 33,1 9,2 Revenu 48,9 174,4 10,6 93 810,6 320,6 26,3 intermédiaire tranche inférieure Afrique 40,3 106,1 9,9 183 602,8 35,4 16,3 subsaharienne Source : (SNG)-WOFI, base de données de l’OCDE 2022 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 192 7.3 Décentralisation budgétaire et cadre de dépenses locales La décentralisation budgétaire au Cameroun repose sur trois principales sources de financement, notamment les ressources fiscales collectées au niveau central et transférées aux CTDs, les transferts budgétaires des ministères de tutelle et la Dotation générale à la décentralisation. Les ressources des CTD sont composées des recettes de la fiscalité locale et des transferts budgétaires du gouvernement central. Ces derniers constituent une part importante des ressources financières à la disposition des CTD. Ces transferts, dont le montant est déterminé par la loi, sont gérés par les présidents des régions ou les maires pour garantir leur utilisation effective pour des initiatives de développement local. La Dotation Générale à la Décentralisation désigne les ressources allouées aux CTD sous forme d’allocations budgétaires pour le financement partiel de la décentralisation. Le nouveau Code Général des CTDs a fixé le montant minimum de cette dotation à 15 % des recettes de l’État. Le montant total de ce transfert est défini annuellement dans la Loi de Finances sans formule fixe. Les communes du Cameroun financent essentiellement leur fonctionnement à partir d’une surtaxe de 10 % connue sous le nom de Centimes additionnels communaux (CAC) prélevée sur les principaux impôts nationaux, notamment l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ces impôts nationaux sont collectés de manière centralisée par l’administration fiscale, la Direction Générale des Impôts (DGI), et les communes perçoivent 1/11ème des recettes provenant de ces impôts après déduction des frais de perception. La répartition de ces fonds entre les communes est effectuée selon une diversité de critères, souvent avec l’aide du FEICOM. De plus, les municipalités reçoivent une partie de certains impôts nationaux, des subventions du gouvernement central et des revenus provenant des impôts locaux. Ces impôts locaux comprennent la taxe professionnelle (patente), les droits de licence, les taxes sur les jeux de hasard et le divertissement, la taxe foncière sur les biens immobiliers, les droits de mutation (pour les locations et les ventes) d’immeubles, le droit de timbre automobile et la taxe de développement local. Certaines taxes sont partagées entre le gouvernement central et les autorités infranationales, notamment la redevance forestière, le droit de timbre sur la publicité, la taxe minière et la taxe de séjour. La Direction des finances locales du MINDDEVEL, une entité nouvellement créée, joue un rôle essentiel dans la supervision des aspects financiers de la décentralisation au Cameroun, mais est confronté à des défis. Opérant au sein de la structure organisationnelle du Ministère de la Décentralisation et du Développement Local (MINDDEVEL), cette direction est chargée de superviser le financement des efforts de décentralisation. Ses fonctions comprennent l’évaluation de la performance et des tendances des finances locales, la supervision de l’exécution du budget public alloué aux entités locales et la gestion des processus liés à la collecte et à l’utilisation des ressources générées par les taxes municipales. Par ailleurs, le financement du budget des entités locales est facilité à travers le Fonds spécial d’équipement et d’intervention intercommunale (FEICOM). Cependant, son efficacité est limitée par le manque de capacités et les lacunes institutionnelles. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 193 Encadré 7-3. Le Fonds spécial d’équipement et d’intervention intercommunale (FEICOM) Le FEICOM, créé par la Loi n° 74/23 de 1974, fonctionne comme un établissement public financièrement et juridiquement autonome, placé sous la tutelle technique du Ministère chargé des Communes, des Collectivités Territoriales et des Services Décentralisés (CTD) et la tutelle financière du Ministère des Finances. Son objectif principal est de promouvoir le développement équitable de toutes les CTD, en favorisant la solidarité nationale et l’équilibre interrégional et intercommunal, en coordination avec les instances administratives compétentes. Le FEICOM réalise cette mission en regroupant et en redistribuant divers impôts, taxes et prélèvements communaux et régionaux soumis à péréquation. Il alloue également une partie de la Dotation générale de décentralisation aux régions, aux municipalités et aux communautés urbaines bénéficiaires. Par ailleurs, le FEICOM joue un rôle central en facilitant la rémunération des membres des conseils régionaux et des magistrats municipaux et participe activement aux initiatives financières visant à faire progresser le développement économique local, notamment la mobilisation des ressources aux niveaux national et international et la gestion des fonds de coopération décentralisée au profit des CTD. La bonne mise en œuvre par le FEICOM de nombreux projets dans des secteurs tels que la santé, l’éducation, les infrastructures et le commerce, principalement financés à l’aide des impôts communaux soumis à péréquation (ICSP), a considérablement renforcé les capacités financières des CTD à répondre à leurs besoins de développement. Cependant, le FEICOM est confronté à plusieurs défis, notamment en termes d’intégration dans le cadre national de gouvernance budgétaire. Les principaux problèmes incluent le manque d’intégration avec les systèmes du Trésor du Ministère des Finances, ce qui peut entraîner des retards dans l’accès aux ressources financières du compte unique du Trésor. De plus, des conflits d’intérêts peuvent survenir entre le rôle de financement du FEICOM et sa fonction de fourniture de transferts. La faible accessibilité en ligne des états financiers du FEICOM constitue un autre défi important qui empêche d’évaluer le financement des collectivités locales avec précision. Source : Ministère de la Décentralisation et du Développement Local. 7.3.1 Recettes propres des collectivités locales 118 Les recettes fiscales locales, dites recettes propres, regroupent diverses déductions perçues par l’administration fiscale ou les services compétents des CTD. Il s’agit notamment des taxes municipales, des surtaxes municipales sur les taxes et droits de l’État, des taxes et droits régionaux et d’autres déductions obligatoires spécifiées par la loi. Le code général des impôts aborde ces prélèvements obligatoires dans son troisième livre consacré au financement des CTD. Les impôts locaux peuvent être collectés soit par le gouvernement central et redistribués selon des critères de répartition prédéterminés, soit directement par les services compétents des CTD. Les impôts collectés par le 118 Cette section sera axée sur les communes, les régions ne recevant actuellement qu’une quantité négligeable de ressources. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 194 gouvernement central sont alloués au FEICOM par le Trésor pour être répartis entre les CTD. Ces transferts, se présentant sous forme d’accords de partage des recettes fiscales, sont classés en deux groupes : i. Les ressources intercommunales : Taxes servant à soutenir financièrement les projets d’investissements locaux et le fonctionnement du FEICOM. ii. Les ressources de péréquation  : Le principal impôt soumis à péréquation au Cameroun est les Centimes communaux additionnels (CAC), qui sont redistribués à partir des impôts centraux à travers un mécanisme complexe. Une partie de la répartition est basée sur des critères démographiques, tandis que 20 % sont répartis à parts égales entre chaque municipalité. L’objectif de la péréquation est de promouvoir la solidarité entre les différents territoires en égalisant la Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group capacité fiscale de l’ensemble des municipalités. Toutefois, les petites municipalités rurales ont exprimé leurs préoccupations par rapport au processus de redistribution actuel, celui-ci priorisant des critères démographiques et désavantageant les petites municipalités par rapport à leurs homologues de taille plus grande. Elles ont proposé d’inclure à leur place des critères supplémentaires dans la formule pour une meilleure prise en compte des spécificités territoriales. Les bonnes pratiques internationales intègrent souvent des facteurs tels que la pauvreté et des indicateurs spécifiques à une zone aux côtés de la population (pondérée à environ 50 %) dans les formules de péréquation.119 iii. Il existe également des impôts que chaque commune prélève directement sur son territoire, et les recettes perçues sur ces impôts ne sont pas transférées au gouvernement central. Les recettes non fiscales englobent diverses sources, comprenant la Dotation générale à la décentralisation et le fonctionnement des services régionaux et communaux. Ce type de recettes inclut des recettes : (i) générées par le domaine public régional et communal ; (ii) provenant d’une propriété privée régionale ou municipale ; et (iii) générées à partir de la fourniture de services publics ou privés. Ces sources contribuent aux flux de revenus des CTD et appuient leur viabilité financière. 119 Banque mondiale, 2022. Économie politique Analyse de la décentralisation au Cameroun Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 195 Graphique 7-3. Sources de revenus des CTDs Recettes infranationales Impôts centraux partagés et autres impôts Subventions du gouvernement central et Autres recettes (14,7%) (78,7%) autres recettes (6,6%) Impôts et taxes locales pré- Subventions provenant du gouvernement central affectés Transférés directement Dotation générale à la Transferts effectués par les à travers le Trésor decentralisation (DGD) services ministériels Transférés indirectement à travers Dotation générale au fonctionnement (DGF) le Trésor Dotation générale à l’investissement (DGI) Source : Adaptée de l’évaluation PEFA (2017) et SNG WOFI (2022). Les parts relatives dans les trois premières catégories sont tirées de l’évaluation PEFA. Graphique 7-4. Allocation des recettes des Centimes Additionnels (CAC) 10 % pour le recouvrement des impôts CAC 30 % 70 % 20 % FEICOM pour le fonctionnement l’investissement 40 % 60 % CTD où le contribuable vit Centralisation au FEICOM 42 % CAC 28 % CAC 73 % 20 % 4 % 3 % Municipalités Communes = communes/ frontières/ with activities % population communautés affectées par without a head urbaines des catastrophes office Source: Regional decentralization in Cameroon: Progress, asymmetry, and financing (Banque mondiale 2020). Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 196 Malgré une augmentation au cours des dernières années, la mobilisation des recettes au profit des CTDs reste relativement faible (Graphique 7-5). Les recettes allouées aux CTD ont augmenté de 41 % entre 2015 et 2021, avec la somme collectée qui a atteint 209 milliards XAF en 2021, contre 148,3 milliards XAF en 2015. L’augmentation des recettes est principalement tirée par les sources non fiscales, qui ont augmenté de 120 % en 2021, alors que les recettes fiscales n’ont augmenté que de 19 % la même année. Malgré ces évolutions positives, les revenus mobilisés pour les CTD restent faibles par rapport au PIB du Cameroun, allant de l’équivalent de 0,7 à 0,9 % du PIB au cours des dernières années. Graphique 7-5. Dynamique des recettes communales Recettes collectées en % du PIB Sources des recettes communales 1,00 % 230 210 0,95 % 190 0,90 % 170 150 0,85 % 130 0,80 % 110 90 0,75 % 70 0,70 % 50 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 0,65 % Recettes fiscales Recettes non fiscales 0,60 % 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Recettes totales Désagrégation des sources de recettes Contributions régionales aux recettes fiscales 100 % 80 % 60 % 40 % 20 % 0% 2017 2018 2019 2020 2021 CAC Recettes propres Patente ADAMAOUA CENTRE Timbre automobile Taxes forestières EST EXTRÊME-NORD Taxe de développement local LITTORAL NORD Taxes propriété foncière Autres recettes NORD-OUEST OUEST SUD SUD-OUEST Source : Autorités camerounaises, Calculs de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 197 Les comptes administratifs consolidés de 75 % des CTD mettent en évidence leur forte dépendance envers les recettes fiscales collectées au niveau central et transférées aux CTDs et les subventions de l’État. Au fil des années, le ratio de collecte des recettes budgétaires s’est amélioré par rapport aux projections des évaluations basées sur les recettes (EBR), passant d’un peu plus de 56 % en 2017 et 2018 à une moyenne de 61 % de 2018 à 2021. Au cours de la même période (2017-2021), le taux de collecte moyen des recettes de fonctionnement s’est élevé à 65,7 %, tandis que le taux moyen de collecte des revenus des investissements a été inférieur, à hauteur de 54,6 %, principalement en raison du recours aux subventions de l’État. Il convient de noter que la subvention de fonctionnement de l’État s’est améliorée de façon significative, atteignant un taux d’achèvement moyen de 44,6 % sur la même période. Les collectivités locales camerounaises rencontrent des difficultés significatives pour générer leurs propres recettes. Il s’agit notamment du faible niveau de développement territorial, du manque de ressources et de la faiblesse de la collaboration entre le MINFI et les communes. Le manque d’activités économiques et la pauvreté des communautés constituent des contraintes majeures pour la fiscalité locale, ce qui fait que les municipalités ne peuvent pas compter sur leurs propres impôts, collectés au niveau local, pour financer leurs projets. De plus, la collecte des impôts par l’État est affectée par un manque de ressources, de coordination et de transparence, rendant difficile le contrôle et l’évaluation des recettes fiscales partagées. Pour apporter une réponse à ces problèmes, le MINDDEVEL et le MINFI travaillent activement à élaborer une réforme de la fiscalité locale et régionale, visant à clarifier les responsabilités de perception, à améliorer les mécanismes de distribution et à renforcer l’efficacité globale.120 7.3.2 Subventions et transferts centraux Les subventions de l’État aux CTD comprennent la Dotation générale à la décentralisation et les transferts provenant des services ministériels. Comme stipulé par le Code Général des CTDs de 2019, la Dotation générale à la décentralisation, qui devrait constituer au minimum 15 % des recettes budgétaires des CTD, est constituée de la Dotation générale pour le fonctionnement et de la Dotation générale pour l’investissement. L’allocation spécifique de la Dotation générale à la décentralisation aux CTDs est déterminée annuellement par la Primature sans référence à une formule fixe. Jusqu’en 2020, la Dotation générale de décentralisation121 a constitué en moyenne environ 1 % du budget annuel approuvé. À partir de 2021, les régions ont commencé à recevoir une dotation budgétaire de montant égal au titre de la Dotation Générale à la Décentralisation (DGD) (Graphique 7-6). Le montant de la Dotation générale à la décentralisation est passé du montant forfaitaire de 10 milliards XAF des années 120 Banque Mondiale. 2022. Économie politique Analyse de la décentralisation au Cameroun. 121 La dotation générale à la décentralisation a fait l’objet de diverses interprétations et le texte en cours d’élaboration sur la fiscalité locale propose une définition du numérateur et du dénominateur de l’objectif minimum de 15 % fixé par la loi. La définition proposée pour le numérateur exclut de la dotation générale à la décentralisation les transferts de recettes fiscales vers les CTD, comme c’est actuellement le cas, c’est-à-dire les impôts collectés au niveau central et transférés aux CTDs. Cela implique que seules les allocations budgétaires globales et sectorielles seront prises en compte. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 198 précédentes, uniquement dédié aux communes, à 49,8 milliards XAF pour l’année budgétaire 2019. Ce montant majoré comprenait, pour la première fois, 7 milliards XAF destinés à faciliter le fonctionnement des Conseils régionaux, même s’ils n’avaient pas encore été mis sur pied à ce moment. En 2021, avec la mise en place des conseils régionaux, l’enveloppe de fonctionnement a inclus des dotations pour leurs frais de fonctionnement, notamment la mise en place des conseils régionaux et la rémunération des conseillers. En 2022 et 2023, chacune des 10 régions du Cameroun a reçu un montant égal de 3 milliards XAF à travers le budget annuel. De plus, le FEICOM, l’agence de l’État chargée de distribuer les impôts centraux partagés aux communes et aux CTD, a accordé une ligne de crédit d’1 milliard XAF à chaque région en 2022. Certaines régions ont déjà utilisé ce crédit pour financer des projets et des priorités spécifiques. Le FEICOM considère cette enveloppe totale de 10 milliards XAF comme un prêt à rembourser lorsque la fiscalité régionale deviendra effective. Graphique 7-6. Allocations de la dotation générale à la décentralisation en XAF, 2010-2023 250 5 4,5 200 4 3,5 150 3 2,5 100 2 1,5 50 1 0,5 0 0 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 Dotations % Dotation/Budget de l'Etat (axe de droite) Source : Calculs des services de la Banque mondiale sur des données des autorités camerounaises. Les transferts ou crédits budgétaires des ministères sectoriels vers les CTD ont récemment augmenté mais restent relativement faibles. Ces transferts, qui constituent la deuxième source de revenus des CTD, sont intégrés dans les budgets des ministères sectoriels et sont critiques pour habiliter les CTD à s’acquitter de leurs responsabilités. Ces allocations sont passées de 44,7 milliards XAF en 2015 à 101,9 milliards XAF en 2021, représentant 3,1 % du budget de l’État en 2021. Néanmoins, la nécessité d’efforts concertés pour atteindre les objectifs fixés et assurer l’accès des CTD à des ressources financières suffisantes demeure. En outre, il est important de noter que cette approche s’écarte des pratiques d’excellence internationales, dans la mesure où les ministères sectoriels peuvent traiter les CTD comme des unités déconcentrées, mettant en avant la nécessité de mesures supplémentaires pour atteindre les objectifs de ressources financières pour les CTD. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 199 Graphique 7-7. Forte dépendance des CTDs aux transferts du gouvernement central Répartition des transferts par région et par habitant 100,0 110 3,5 % 100 3,0 % 80,0 90 2,5 % Billions CFAF 80 60,0 70 2,0 % 60 1,5 % 40,0 50 1,0 % 40 20,0 30 0,5 % 20 0,0 % 0,0 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2015 2016 2017 2018 2019 2021 Transferts aux CTD ADAMAOUA CENTRE EST EXTREME-NORD LITTORAL NORD-OUEST NORD OUEST Transferts/Recettes domestiques SUD-OUEST SUD Source : Base de données BOOST du Cameroun, Calculs de la Banque mondiale. En l’absence de données détaillées sur les dépenses de l’ensemble des communes et des régions du Cameroun, il est difficile d’évaluer les dépenses des CTD avec précision. Les données disponibles se rapportent principalement aux dépenses des entités déconcentrées, indiquant une allocation très inégale des ressources, à la faveur particulière de la région du Centre. En l’absence d’informations détaillées, il est difficile d’évaluer et d’analyser les modèles de dépenses au niveau des CTD. En outre, des doutes ont été exprimés quant à la capacité des systèmes de gestion financière à saisir les données géographiques avec exactitude. En l’absence de données géographiques fiables, il est difficile de faire le suivi et l’analyse des dépenses au sein de régions ou de municipalités spécifiques, entravant l’efficacité de la gestion financière et des processus décisionnels. Le faible transfert de compétences et de fonctions vers les CTD au Cameroun a également fait qu’il manque des informations sur leurs opérations, compliquant l’analyse des dépenses. Pour améliorer l’analyse financière et les processus décisionnels, il est crucial d’améliorer le transfert de compétences et de fonctions vers les CTD. Cela permettrait d’avoir une compréhension plus approfondie des dépenses au niveau des CTD et faciliterait une allocation et une planification efficaces des ressources au niveau local. En outre, l’intégration du FEICOM dans la base de données du gouvernement et le renforcement de l’exactitude et de la fiabilité des systèmes de gestion financière à saisir des données géographiques sont essentiels pour résoudre ces problèmes.La part relativement faible des dépenses publiques allouée aux CTD au Cameroun est également un sujet de préoccupation (Graphique 7-8). Actuellement, les CTD reçoivent environ 3,5 % du montant total des recettes et des dépenses publiques, ce qui indique qu’une part importante des dépenses publiques est toujours gérée et exécutée au niveau du gouvernement central. Cette faible allocation des dépenses publiques aux CTD peut avoir des implications sur Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 200 la gouvernance locale et la prestation de services. Elle restreint l’autonomie et la capacité des CTD à satisfaire aux besoins et aux priorités spécifiques de leurs communautés avec efficacité. Par ailleurs, elle réduit l’impact potentiel de la décentralisation sur la promotion du développement local, de processus décisionnels participatifs et d’une fourniture de services publics efficace. Graphique 7-8. Le niveau d’allocation budgétaire aux CTD est faible. En % des dépenses gouvernementales totales 5,0 % 4,5 % 4,0 % 3,5 % 3,0 % 2,5 % 2,0 % 1,5 % 1,0 % 0,5 % 0,0 % 2017 2018 2019 2020 2021 Dépenses allouées aux CTD Source : Base de données BOOST du Cameroun, Calculs de la Banque mondiale. Une part importante des dépenses publiques au Cameroun est destinée à l’administration centrale, au lieu d’être allouée à des zones géographiques spécifiques. Cette tendance est observée dans divers secteurs, notamment la santé, l’éducation et les infrastructures. Environ 80 à 85 % du montant total des dépenses n’est affecté à aucune région ou localité. Même si on s’attend à ce que certaines fonctions telles que l’administration générale et les dépenses de souveraineté soient centralisées, des secteurs tels que la santé, l’éducation et les infrastructures devraient bénéficier d’une allocation régionale plus élevée pour assurer un développement équilibré et une prestation de services efficace au niveau local. Le pourcentage élevé de dépenses affectées à l’administration centrale dans des secteurs tels que la santé et l’éducation, soit entre 78 et 92 %,122 indique un faible niveau de décentralisation des processus décisionnels et d’allocation des ressources aux collectivités régionales et locales ; il laisse entrevoir que les compétences les plus coûteuses, telles que la gestion du recrutement du personnel 122 Les dépenses allouées à l’administration centrale incluent les dépenses allouées aux structures et services déconcentrés, ce qui signifie qu’elles sont destinées à être exécutées au niveau local mais restent sous le contrôle des autorités centrales. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 201 de santé et d’éducation n’ont pas été décentralisées dans la pratique. Cette inégalité restreint l’autonomie et la capacité des collectivités régionales et locales à satisfaire aux besoins et aux priorités spécifiques de leurs communautés avec efficacité. Dans le cas des infrastructures, même s’il existe une allocation explicitement destinée aux régions, sa part a diminué au cours des dernières années, passant de plus de 53 % en 2016 à 36-38 % en 2018-2021 et elle est principalement allouée à l’achat de biens et de services plutôt qu’à des projets spécifiques à une région. Même si certaines préoccupations concernant la capacité effective des entités décentralisées à gérer les ressources humaines de la santé et de l’éducation, par exemple, sont légitimes, la décentralisation pourrait être menée selon une approche progressive où certaines fonctions, telles que le recrutement, sont régionalisées au niveau déconcentré en attendant que les CTD renforcent leurs capacités. Une telle approche appuierait le recrutement de personnel dans les zones défavorisées, surtout si elle est accompagnée de mesures visant à encourager ces affectations (telles que l’introduction d’une indemnité de difficulté). Sur le moyen et long terme, il faudra s’atteler au développement d’une fonction publique locale dotée d’un statut défini et de parcours et perspectives professionnels attractifs.123 Graphique 7-9. Part des dépenses affectées à l’administration centrale, 2016–2021124 Total Affaires économiques Infrastructures Affaires sociales Santé Communication, culture, loisirs, sports Education Administration générale et nancière Défense et sécurité Souveraineté Dépenses non allouées par fonction 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Moyenne 2016-2021 Source: Base de données BOOST du Cameroun, Calculs de la Banque mondiale. 123 Un projet de loi pour la création d’un service public local est en attente depuis quelques années. 124 Les données des tableaux de cette section se rapportent aux ordonnancements. L’analyse du budget donne des chiffres similaires. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 202 Les frais de personnel constituent en moyenne 32,7 % des frais de fonctionnement des CTD (Graphique 7-10). Ces frais n’incluent cependant pas les salaires couverts par le budget de l’État, étant donné qu’ils ne sont pas inclus dans les budgets des CTD. Cette exclusion pourrait avoir un impact sur la proportion globale des dépenses de personnel. Les dépenses de fonctionnement des CTD, qui constituent moins de la moitié de leurs dépenses totales, ont diminué de 49,6 % en 2017 à 40,2 % en 2019, avant d’augmenter légèrement pour atteindre 46,4 % des dépenses totales en 2021. Ces résultats mettent en évidence les difficultés que les CTD rencontrent pour parvenir à gérer leurs budgets avec efficacité, notamment en termes de calendrier des recettes et la mise en correspondance des taux d’exécution des dépenses avec les taux de réalisation des recettes. Les régions du Centre et du Sud reçoivent relativement plus d’allocations aux infrastructures que le reste du pays (Graphique 7-11). Cependant, il est difficile d’établir les parts de chacune des communes comme Douala et Yaoundé avec précision à cause des limites de la base de données BOOST, qui fournit des informations sur les modèles de dépenses. À l’opposé, l’Adamaoua, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest reçoivent les parts les plus faibles des allocations aux infrastructures. Une analyse plus détaillée au niveau du programme révèle qu’une part importante des dépenses dans ces régions est consacrée à l’amélioration des routes, de l’eau et des installations d’assainissement, ce qui suggère qu’elles sont axées sur l’amélioration des infrastructures essentielles qui contribuent à l’amélioration des transports et à la fourniture de services de base. Néanmoins, en l’absence de données spécifiques relatives à chaque commune, il est difficile d’établir une ventilation précise des dépenses en infrastructures au sein de chaque région. Graphique 7-10. Les frais de personnel représentent une part importante des coûts de fonctionnement des CTD 55 % 50 % 45 % 40 % 35 % 30 % 25 % 2017 2018 2019 2020 2021 Part des dépenses courantes dans les dépenses totales Part des dépenses de personnel dans les dépenses courantes Source : Calculs des services de la Banque mondiale sur les données du FEICOM. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 203 Graphique 7-11. Part des allocations aux infrastructures par région, 2016-2021 100 en % des dépenses publiques totales d'infrastructure 80 60 40 20 0 2016 2017 2018 2019 2020 2021 ADMINISTRATION CENTRALE ADAMAOUA CENTRE EST EXTREME-NORD LITTORAL NORD-OUEST NORD OUEST SUD-OUEST SUD Source : Base de données BOOST du Cameroun, Calculs de la Banque mondiale. Selon les pratiques d’excellence, une répartition verticale des ressources devrait réduire l’écart entre les besoins en dépenses locales et le potentiel de recettes. Dans la pratique, cependant, la répartition verticale des ressources au Cameroun n’a pas été mise en œuvre selon une méthodologie cohérente, étant donné que les normes de prestation de services ont été coupées des contraintes budgétaires et plutôt basées sur la population. Les normes de prestation de services sont fixées par les collectivités territoriales, tandis que les décisions relatives aux ressources à transférer sont essentiellement prises au niveau central. Les transferts aux collectivités locales, en particulier les transferts d’investissement et courants, constituent moins d’1 % des dépenses totales. Moins d’1 % des dépenses enregistrées sont allouées aux transferts d’investissement et courants destinés aux collectivités locales, ce qui met en évidence la faiblesse de l’appui financier affecté au développement local. En outre, un manque considérable d’informations sur les transferts provenant du FEICOM, principal gestionnaire de ces transferts, mine la transparence et l’exhaustivité des données lors de l’évaluation de l’allocation des ressources. Les allocations enregistrées suivent une tendance notable, à savoir des décaissements importants au bénéfice de l’administration centrale, tandis que certaines régions ne reçoivent aucune allocation. Ce manque de transparence soulève des préoccupations quant à la répartition des ressources et à l’équité entre les régions. Par exemple, dans le cas des transferts de capitaux de 2021, ils ont été principalement alloués à l’administration centrale ou catégorisés de manière ambiguë comme « Ensemble des régions  », rendant difficile la distinction des allocations spécifiques à chacune des régions. De plus, les données Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 204 indiquent des allocations relativement faibles au bénéfice de régions comme le Nord- Ouest, le Sud-Ouest et Adamaoua, qui pourraient avoir besoin de davantage d’appui à cause des défis économiques et sociaux auxquels ils sont confrontés. Les régions les plus pauvres telles que le Nord ne reçoivent aucun capital ni transferts récurrents, mettant en évidence une forte disparité dans la répartition des ressources. Graphique 7-12. Transferts aux CTD exprimés en pourcentage des dépenses, 2016-2021 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Transfert en capital Transfert en fonctionnement Source : Base de données BOOST du Cameroun, Calculs de la Banque mondiale. Tableau 7-2. Transferts d’investissement et de fonctionnement par région, 2019-2021 (en millions XAF) 2019 2020 2021 TRANSFERTS DE DÉPENSES D’INVESTISSEMENT AUX CTD 1 194,8 6 641,3 1 690,6 ADMINISTRATION CENTRALE 584,3 6 590,3 99,0 ADAMAOUA - 20,0 36,0 CENTRE 324,0 26,0 836,5 EST 189,2 - - EXTRÊME NORD 30,2 - - LITTORAL - - 12,5 NORD-OUEST - 5,0 10,0 NORD - - 98,5 OUEST - - 9,2 SUD - - 533,0 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 205 2019 2020 2021 SUD-OUEST 67,0 - 56,0 TRANSFERTS POUR DÉPENSES COURANTES 20 698,2 16 559,4 42 155,7 ADMINISTRATION CENTRALE - - 27 596,3 CENTRE 7 170,7 5 736,6 4 736,6 EST 724,0 579,2 579,2 LITTORAL 6 974,1 5 579,3 4 579,3 NORD-OUEST 1 043,8 835,0 835,0 SUD 370,54 297,2 297,2 RESTE DES RÉGIONS 4 415,0 3 532,0 3 532,0 TOTAL DES TRANSFERTS 21 893,1 23 200,7 43 846,3 Source : Base de données BOOST sur le Cameroun. Un examen de l’allocation par habitant des fonds pour la santé et l’éducation dans les régions du Cameroun permet d’obtenir des informations détaillées sur les disparités régionales. Au cours des trois dernières années, la région de l’Adamaoua a bénéficié de l’allocation par habitant la plus élevée pour l’éducation, tandis que le Nord a reçu la plus faible. En ce qui concerne la santé, la région du Sud détenait l’allocation par habitant la plus élevée. Toutefois, la dispersion était élevée dans les deux secteurs, étant donné qu’il existait une différence significative entre la région bénéficiant de l’allocation la plus élevée et celle recevant l’allocation la plus faible. Le rapport entre l’allocation de ces deux régions était d’environ 3 à 5 fois, soulignant les disparités d’allocation des ressources pour la santé et l’éducation sur l’ensemble des régions. Graphique 7-13. Répartition des dépenses d’éducation et de santé du gouvernement central par habitant (XAF) Education Santé 7 000 5 000 6 000 4 500 4 000 5 000 3 500 4 000 3 000 3 000 2 500 2 000 2 000 1 500 1 000 1 000 500 0 0 UA UA RD E RD E ST D ST T RD ST RD ST L T D ST ST L TR TR ES RA SU ES RA SU AO UE UE AO O UE O UE UE O UE O N N TO N N TO N N O -O CE AM -O CE O -O AM -O E- E- T D T RD D M RD LI M AD LI AD SU SU RE E O O TR N T N EX EX 2019 2020 2021 2019 2020 2021 Sources : BOOST, Institut National de la Statistique, Calculs des services de la Banque Mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 206 Les données du Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire (MINEPAT), en charge des investissements publics, confirment les tendances observées dans les transferts au bénéfice des CTDs et montrent que la région du Centre reçoit le plus gros montant de transferts. Si l’on considère les transferts au niveau par habitant, la région du Sud apparaît comme la région qui reçoit le plus de transferts, ce qui suggère qu’en rapport à la taille de la population, le Sud reçoit une part relativement plus importante de transferts que les aux autres régions. Les régions de l’Est et de l’Adamaoua se distinguent en tant que les deuxième et troisième plus gros bénéficiaires de transferts par habitant, suivies par la région du Nord-Ouest. À l’inverse, la région du l’Extrême Nord reçoit le niveau de transferts par habitant le plus faible (Tableau 7-3). Cependant, les données présentent des limites, étant donné que les données du ministère combinent les transferts au bénéfice de la région du Centre et de la ville de Yaoundé, ainsi que ceux au bénéfice de la région du Littoral et de la ville de Douala. Les constats doivent être interprétés avec prudence et les allocations spécifiques à chaque sous-entité doivent être examinées plus en détail. Tableau 7-3. Transferts du MINEPAT aux CTD, 2017-2021 Montants totaux Montants par tête (en milliards de FCFA) en 2021 2017 2018 2019 2020 2021 ADAMAOUA 3,01 3,78 5,73 6,89 7,61 2 238,45 CENTRE 8,52 9,21 16,11 16,26 16,58 1 759,02 EST 3,19 2,68 7,29 7,92 8,28 2 778,26 EXTREME NORD 4,18 5,32 10,46 12,61 13,71 883,45 LITTORAL 3,66 3,76 5,94 6,47 7,63 918,85 NORD 3,08 3,57 6,11 7,30 7,46 1 037,62 NORD OUEST 4,88 2,58 3,94 6,68 7,80 2 143,32 SUD 6,83 3,36 7,58 6,30 10,20 3 231,49 SUD OUEST 4,01 2,22 5,52 6,75 7,80 2 113,65 Notes : Les cellules en rouge correspondent aux montants les plus faibles. Les cellules vertes correspondent aux montant les plus élevés Source : Ministère de la Décentralisation et du Développement Local, Calculs des services de la Banque mondiale. Les données montrent l’existence d’un problème récurrent de faibles taux d’exécution, tant sur le plan des recettes que des dépenses, avec une tendance similaire observée sur l’ensemble des régions. Malgré des niveaux relativement élevés de recettes et de dépenses récurrentes, les municipalités présentent systématiquement des faibles taux d’exécution qui tombent souvent en dessous de la barre des 70 %, tandis que les dépenses se situent en moyenne autour de 50 à 60 %. Ce phénomène est principalement attribué au manque de flexibilité des recettes et des dépenses récurrentes en période de ralentissement économique, mettant en évidence la tendance à surestimer à la fois les budgets de recettes et de dépenses, ce qui, à terme, mène à la sous-utilisation des fonds disponibles. Ces faibles taux d’exécution récurrents, notamment en ce qui concerne le Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 207 recouvrement des recettes et l’utilisation des dépenses au sein des communes, mettent en évidence une surestimation du budget. En outre, ces défis persistants font obstacle à la mise en œuvre efficace des projets de développement et la prestation de services au niveau local. Pour s’attaquer aux faibles taux d’exécution et à la grande rigidité des dépenses du pays, il faut améliorer les processus de planification et d’exécution budgétaires au niveau des communes. Il est essentiel d’améliorer la précision des projections de recettes et de dépenses, de mettre les estimations budgétaires en correspondance avec les capacités réelles de mise en œuvre et d’améliorer la flexibilité budgétaire afin de s’adapter à l’évolution des circonstances. Cela contribuerait à assurer une utilisation optimale des ressources et à promouvoir une prestation de services efficace au bénéfice des communautés locales. Tableau 7-4. Communes : Paramètres financiers sélectionnés, 2017-2021 (moyenne) Taux d’exécution des Titres des lignes Équilibre Recettes (estimation) Rigidité dépenses ADAMAOUA 0,9 69,9 63,5 21,1 CENTRE 1,0 67,3 55,7 26,2 EST 1,0 65,2 54,3 18,2 EXTRÊME NORD 1,0 61,4 51,9 18,8 LITTORAL 1,0 59,6 49,4 26,1 NORD 0,9 70,8 58,1 19,1 NORD OUEST 1,0 68,4 62,3 28,5 OUEST 1,1 60,3 55,0 26,8 SUD 0,9 53,2 48,9 23,1 SUD-OUEST 0,8 73,8 58,7 36,7 Source : Ministère de la Décentralisation et du Développement Local, Calculs des services de la Banque mondiale. Les taux d’exécution des dépenses des CTD sont restés nettement inférieurs à leurs taux de réalisation de recettes. Leur taux d’exécution des dépenses s’élevait en moyenne à 48,3 % sur la période 2017-2021, ce qui est inférieur à leur taux moyen de réalisation de recettes de 61 %. Cet écart s’applique aussi bien aux dépenses de fonctionnement qu’aux dépenses d’investissement et s’explique par le fait que les dépenses ne peuvent être engagées que lorsque les ressources financières sont disponibles, lesquelles sont souvent retardées par la mise à disposition tardive des ressources par les autorités centrales et le FEICOM. Le Cameroun est confronté à des défis de transparence et de reporting budgétaires au niveau local, malgré l’existence d’une législation solide. Le niveau de conformité Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 208 financière est faible, avec seulement 41 % des autorités infranationales qui ont soumis leurs comptes à la Cour des comptes en 2019. De plus, moins d’un tiers des communes respectent la règle de l’équilibre budgétaire, et elles n’ont pas la capacité de produire des cadres budgétaires et des cadres de dépenses à moyen terme avec efficacité. Le Ministère de la Décentralisation et du Développement Local et le Ministère des Finances ne parviennent pas non plus à fournir des informations sur les transferts pour l’année suivante en temps voulu, créant des difficultés de planification financière. Les audits réalisés par la Cour des comptes ne sont pas accessibles au public, ce qui réduit encore plus la transparence et la redevabilité. Pour relever ces défis, il faut améliorer la transparence, renforcer les capacités et partager les informations entre les entités gouvernementales, afin d’améliorer la gestion budgétaire et la redevabilité au niveau infranational. 7.4 Options de réformes La décentralisation budgétaire au Cameroun est confrontée à des défis importants qui affectent son efficacité et son efficience, notamment le manque de transparence et de redevabilité, l’inégalité d’allocation des ressources, l’insuffisance des capacités administratives et l’ingérence politique. La Loi de 2019 pose l’architecture juridique des structures des autorités infranationales (par exemple, en utilisant l’approche asymétrique). Pour surmonter les défis auxquels les efforts de décentralisation se heurtent, les autorités du gouvernement central ainsi que des collectivités territoriales doivent s’inspirer des pratiques d’excellence internationales et prendre des mesures pour améliorer la mobilisation des recettes locales, augmenter les transferts financiers, mettre en œuvre la péréquation financière, améliorer la coordination intergouvernementale, renforcer les mécanismes de redevabilité et promouvoir la participation du public. Améliorer la mobilisation des recettes locales Au Cameroun, le manque d’autonomie fiscale au niveau local pose des difficultés de collecte des recettes, notamment en ce qui concerne les impôts régionaux et municipaux. L’autonomie fiscale peut impliquer d’accorder aux bénéficiaires des recettes fiscales une autonomie totale en ce qui concerne leur collecte, en leur donnant le pouvoir de fixer et de recouvrer les impôts, ou bien de restreindre leurs pouvoirs aux surtaxes dont le taux est fixé par les autorités régionales, mais dont l’assiette fiscale reste celle du gouvernement central. L’autonomie fiscale est capitale pour assurer la redevabilité des élus régionaux ou municipaux envers leurs électeurs. Il est important de renforcer la mobilisation des recettes locales à travers l’adoption et la mise en œuvre efficace de la législation fiscale locale afin de garantir la viabilité financière des collectivités locales. Pour y parvenir, on pourrait, par exemple, réviser et mettre à jour les lois et les réglementations relatives aux recettes en créant une stratégie globale de mobilisation de recettes, en renforçant la capacité d’administration des recettes, en garantissant l’engagement actif des citoyens et des parties prenantes, en diversifiant les sources de recettes, en améliorant les systèmes et les technologies de collecte et en menant avec diligence un suivi et évaluation des efforts de mobilisation de recettes. Même si l’adoption d’une loi sur la fiscalité locale constitue une évolution positive, son Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 209 efficacité dépend de la bonne mise en œuvre des réformes de mobilisation de recettes, telles que l’amélioration des pratiques d’administration fiscale et l’élargissement du champ d’application du recouvrement des recettes par les collectivités territoriales. Les autorités pourraient adopter une approche utilisant des surtaxes pour introduire une certaine flexibilité dans la détermination des niveaux de service public. Dans le cadre d’une telle approche, les assemblées régionales voteraient éventuellement pour des taux de surtaxe soumis à une limite de 10 % du taux national et/ou pourraient rendre la taxe professionnelle locale (patente) régionale.125 Par exemple, si le taux national est de 20 %, les régions peuvent fixer des taux de surtaxe variant entre 0 et 2 %. Le type de taxe approprié pour un système de surtaxe régionale dépend du système fiscal national. Il est important de tenir compte de la mobilité de l’assiette fiscale entre les régions et de choisir une assiette fiscale à moindre mobilité, telle que le revenu des personnes physiques, plutôt que les bénéfices des sociétés. En outre, il est essentiel d’éviter d’introduire des taxes qui réduisent la mobilité intra-nationale et interrégionale des biens et des services, et il faudrait mettre les responsabilités et les recettes propres en relation autant que possible. Il existe trois grandes options de fiscalité régionale sur le moyen terme. La première consiste à introduire une surtaxe sur l’impôt sur le revenu des personnes physiques basée sur le montant payable au niveau national. Cependant, il peut s’avérer difficile d’associer la résidence (région) d’un contribuable à l’impôt sur le revenu. La deuxième option consiste à mettre en place une taxe sur la consommation d’électricité, soit pour les ménages, soit pour l’ensemble des utilisateurs. Cette taxe pourrait être un montant fixe par kilowattheure (kWh) ou une surtaxe liée à la TVA appliquée à la consommation d’électricité. L’emplacement régional des compteurs d’électricité permet alors une identification précise et la consommation d’électricité sert d’indicateur de revenu. Enfin, la troisième possibilité consiste à régionaliser la taxe professionnelle locale (patente) et permettre aux régions de fixer les taux d’imposition dans une fourchette spécifiée. Puisque l’assiette fiscale correspond à chaque établissement, elle peut être régionalisée avec efficacité, et cette approche fonctionne comme une taxe sur le chiffre d’affaires. La mise en œuvre d’impôts levés par les conseils régionaux crée un lien entre les électeurs régionaux et les dépenses des conseil régionaux, renforçant la redevabilité et les processus décisionnels au niveau régional. Elle offre aux élus régionaux un moyen de mettre la génération de recettes en correspondance avec les besoins et les priorités régionales, menant à une gouvernance et à une prestation de services plus efficaces. Augmentation des transferts budgétaires L’augmentation des ressources financières transférées aux collectivités locales est un élément clé de la décentralisation budgétaire. Elle peut être réalisée en révisant le cadre de décentralisation budgétaire, en augmentant l’allocation du budget national aux collectivités locales, en améliorant la collecte et la gestion des recettes par les collectivités locales sur la base des compétences transférées et en renforçant la coordination et la consultation intergouvernementales. Le gouvernement central devrait également allouer 125 Note technique 2023 sur le financement des régions du Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 210 une part suffisante et équitable des ressources financières aux collectivités locales, y compris une allocation adéquate et progressive pour la dotation générale à la décentralisation. Le processus budgétaire doit s’écarter des modes d’allocation budgétaire appliqués par le passé pour s’ancrer dans des critères clairs, ainsi que des objectifs et des résultats en rapport à la prestation de services (budgétisation fondée sur des formules). Ceci renforcerait la capacité financière des collectivités locales à fournir des services et à mettre en œuvre des projets de développement. Parallèlement à cela, la capacité des collectivités locales à gérer les ressources qu’elles reçoivent (planification, préparation et exécution budgétaires) doit être renforcée. Il est essentiel d’améliorer le cadre de décentralisation budgétaire existant pour assurer que les collectivités locales sous-financées reçoivent des fonds supplémentaires pour les services essentiels. Ceci implique d’adopter la formule de péréquation pour les régions soutenues par l’assistance technique de la Banque mondiale et de réviser la conception globale des transferts fiscaux, y compris la formule de péréquation existante conçue pour les municipalités en rapport à l’allocation des CAC, pour assurer une répartition plus équitable des ressources fiscales entre les CTD. Ce type de système contribuerait à atténuer les disparités et à promouvoir un développement équilibré. Il est critique d’effectuer les transferts de fonds dans les délais prévus pour pouvoir améliorer la prestation de services au niveau local. Il est essentiel que l’État respecte les délais de remboursement des impôts et de transfert des autres ressources financières aux collectivités régionales et locales. Le décaissement rapide des fonds permet aux collectivités territoriales de disposer des ressources financières nécessaires pour planifier et exécuter des programmes de développement spécifiques à la région avec efficacité, améliorant, à terme, la prestation de services dans leurs régions respectives. La connexion des CTD au Compte unique du Trésor devrait renforcer l’autonomie financière des collectivités territoriales tout en maintenant la stabilité budgétaire. Allouer des subventions basées sur la performance Pour améliorer l’efficacité des transferts, il est possible d’introduire des subventions sans affectation particulière et axées sur la performance. Les subventions conditionnelles aident à renforcer les capacités institutionnelles locales. Un projet pilote de système de subventions basées sur la performance mis en œuvre à travers l’opérationnalisation du Projet de gouvernance locale et de communautés résilientes (P175846) contribuera non seulement à augmenter les transferts aux CTD, mais contribuera également à augmenter l’allocation de ressources budgétaires nationales aux collectivités locales, conformément au Code de la décentralisation. Pour promouvoir la transparence et la bonne gouvernance, il faut renforcer les mécanismes de redevabilité. La création d’un cadre de redevabilité robuste, englobant des systèmes de rapport et d’audit financiers, est cruciale pour assurer la transparence et la gestion prudente des fonds publics. Il faudrait continuer à intégrer le système de préparation et d’exécution du budget municipal (SIMBA) avec les systèmes centraux et Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 211 à le renforcer. En outre, l’incitation des collectivités locales à soumettre leurs comptes à la Cour des comptes et la promotion de la publication de rapports d’audit contribuera à renforcer la redevabilité et la transparence. Il est nécessaire de promouvoir la participation du public, c’est-à-dire encourager la mobilisation et la participation citoyennes aux processus décisionnels en rapport aux questions budgétaires locales. Pour réaliser ceci, on peut régulièrement mener des consultations publiques, effectuer une budgétisation participative et mener des initiatives d’éducation civique (en impliquant les citoyens dans des discussions en rapport aux questions budgétaires et aux priorités locales en matière de budget, à travers la mise en œuvre du Projet de gouvernance locale et de communautés résilientes [P175846]). Le gouvernement devrait intensifier et institutionnaliser la tenue régulière de consultations publiques pour impliquer les citoyens dans les processus budgétaires et la prise de décision en rapport aux questions budgétaires, solliciter leurs contributions, leurs commentaires et leurs suggestions sur les priorités budgétaires, la génération de recettes et l’allocation des dépenses. Les décideurs politiques doivent tirer des enseignements des expériences internationales. Ils doivent étudier les modèles de décentralisation budgétaire qui ont réussi et tirer des enseignements des pratiques d’excellence internationales. Cela pourrait impliquer de faire des échanges de connaissances, de réaliser des évaluations par les pairs et de rechercher de l’assistance technique auprès d’organisations internationales et de pays ayant des expériences similaires. Credits photo: Odilia Hebga / World Bank Group Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 212 Tableau 7-5. Mesures de réformes pour accélérer la décentralisation budgétaire Responsables de Objectif Actions recommandées Chronologie mise en oeuvre Adopter et mettre en œuvre efficacement la loi sur la MINFI Court à moyen fiscalité locale MINDDEVEL terme Introduire une approche de majoration des taux Court à moyen Améliorer la d’imposition en faveur des régions pour offrir une MINFI terme mobilisation des flexibilité dans la détermination des niveaux de MINDDEVEL revenus locaux service public Réaliser un diagnostic systématique du système de Moyen à long taxe foncière MINFI terme Augmenter l'allocation du budget national aux Court à moyen collectivités locales conformément au Code de la terme MINFI décentralisation Augmenter Améliorer la prévisibilité des transferts à travers la Court à moyen les transferts terme création de sous-comptes liés au Compte Unique du MINDDEVEL budgétaires Trésor pour transférer les fonds directement vers les MINFI du budget CTD. national vers les collectivités locales Améliorer l'équité des transferts Court à moyen conformément intergouvernementaux en adoptant la formule de terme Parlement au Code de la péréquation pour les régions et en révisant la formule MINFI décentralisation de péréquation pour les communes. et améliorer la prévisibilité de ces Revoir la conception des transferts fiscaux aux Moyen à long CTDs afin d’identifier les lacunes et les domaines à terme transferts améliorer et proposer les amendements nécessaires. MINDDEVEL Promouvoir la participation du public aux processus Court à moyen décisionnels en menant des consultations terme publiques régulières, en intégrant des pratiques MINFI de budgétisation participative et en engageant les MINDDEVEL citoyens dans les discussions liées aux questions fiscales et aux priorités budgétaires locales. Rendre les processus Piloter un système de subventions basé sur la Court à moyen budgétaires locaux performance pour les CTD. terme plus participatifs et plus responsables Intégrer et renforcer le système de préparation et Moyen à long MINDDEVEL terme d'exécution du budget communal (SIMBA) avec les MINFI systèmes centraux Inciter les collectivités locales à soumettre leurs Moyen à long comptes à la Cour des comptes et à rendre publics MINDDEVEL terme les rapports d’audit. MINFI Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 213 Réferences Articles de Rapports et de Revues Officielles Banque Mondiale. (2012) Approfondir la décentralisation pour améliorer la prestation de services au Cameroun, p. 6. Banque mondiale. (2018), Revue des Dépenses Publiques du Cameroun. Banque mondiale. (2022). Économie politique Analyse de la décentralisation au Cameroun. Cornevin, A., et al. (17 mars 2023). Une plongée approfondie dans la dynamique fiscale : comparaison des techniques d’estimation dans un grand panel hétérogène. Documents de travail du FMI, 2023 (071). FMI. (Août 2012). Cameroun : Rapport sur l’article IV de 2012. Rapport Pays No. 12/237. FMI. (Juillet 2014). Cameroun : Rapport sur l’article IV de 2014. Rapport Pays No. 14/212. FMI. (Décembre 2015). Cameroun : Rapport sur l’article IV de 2015. Rapport Pays No. 15/331. FMI. 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Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 214 Articles de Journaux et de Revues Académiques Baudouin Fuh Suh. (2021). Politique de contrôle de l’alcool au Cameroun : une revue de la portée. Université de Finlande orientale, Faculté des sciences de la santé.Alain Gilles Foka Tagne, et al. (Automne 2020). Appréciation de la performance hospitalière des hôpitaux publics au Cameroun : une perception du personnel de santé. Journal of Academic Finance, 11(2), 330-344. Linda Esso, et al. (21 août 2021). La réponse audacieuse du Cameroun à la pandémie de COVID-19 pendant les première et deuxième vagues. Lancet, 21, 1064-1065. Paul Jacob Roby, et al. (2015). Répondre aux problèmes de répartition des personnels de santé : une expérience de choix discret pour développer des stratégies de rétention en milieu rural au Cameroun. Int J Health Policy Manag, 4(3), 169-180. Chenjoh Joseph Nde, et al. (2019). Atteindre la Couverture Sanitaire Universelle d’ici 2035 : le Cameroun est-il sur la bonne voie ? Journal universel de santé publique, 7(3), 110-117. Documents et Notes de Politiques Fouakeng, F., et al. Couverture Santé Universelle au Cameroun : Etat des lieux et défis à relever pour accélérer cette réforme. Ministère de la Santé. (Avril 2020). Stratégie de Financement de la Santé. Organisation mondiale de la santé. WHO Global Tobacco Control Report, 2019: Offer to help quit tobacco. Genève: Organisation mondiale de la santé. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 215 8 ANNEXES Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 216 8.1.1.1 Tendances et structure des recettes du Cameroun, 2010-2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 13 610,6 14 434,8 15 395,9 16 658,6 17 966,1 19 043,1 20 038,6 20 960,9 22 203,3 23 243,7 23 486,5 25,141.5 PIB nominal en monnaie locale, base 2016 (milliards XAF) Milliards XAF Recettes totales et 1 938,9 2 249,1 2 423,5 2 622,0 2 901,7 3 013,2 2 838,5 3 039,9 3 522,6 3 650,5 3 219,2 3 554,3 subventions Recettes totales 1 867,6 2 188,9 2 368,6 2 575,7 2 858,5 3 002,2 2 784,4 2 975,1 3 435,9 3 517,2 3 177,5 3 489,3 1. Recettes du secteur 497,0 637,9 693,0 699,7 678,8 556,4 425,0 385,9 500,3 584,5 428,2 482,2 pétrolier 2. Recettes du secteur non- 1 370,6 1 551,0 1 675,6 1 876,0 2 179,7 2 445,8 2 359,4 2 589,2 2 935,6 2 932,7 2 749,2 3 007,1 pétrolier 2.1 Recettes fiscales 1 290,9 1 464,0 1 582,8 1 764,9 2 026,7 2 149,4 2 215,3 2 441,1 2 744,2 2 768,3 2 560,6 2 829,7 Impôts sur le revenu, les 342,9 405,3 471,0 513,1 613,4 683,9 635,7 627,5 718,2 729,4 731,8 765,9 bénéfices et les plus-values Impôt sur le revenu des 123,2 136,4 142,5 192,9 238,8 229,1 211,4 212,9 245,3 256,3 249,8 257,4 personnes physiques Impôt sur les sociétés 172,4 214,4 261,3 258,4 298,0 367,0 351,5 319,5 354,9 345,5 352,3 394,2 Impôt sur les plus-values 27,7 32,5 38,3 39,0 44,5 48,8 39,4 42,2 42,7 47,6 54,2 45,5 (IRCM) Autres impôts directs 19,6 22,0 28,9 22,7 32,2 39,0 33,3 52,9 75,2 80,0 75,4 68,8 Impôts indirects 948,0 1 058,8 1 111,8 1 251,8 1 413,3 1 465,5 1 579,7 1 813,6 2 026,0 2 038,9 1 828,8 2 063,8 TVA 456,4 526,6 550,0 653,1 726,1 734,6 804,4 965,6 1 161,0 1 133,7 936,3 1 053,8 Accises 81,4 97,5 100,0 110,4 121,2 184,7 211,0 204,4 202,2 241,1 283,9 328,5 Taxe spéciale sur les 83,0 84,6 97,4 109,6 118,5 103,8 105,6 122,1 127,5 128,7 135,7 146,8 produits pétroliers (TSPP) Taxes sur le commerce 252,7 273,6 294,1 289,7 356,6 338,1 348,6 398,9 405,9 393,2 349,5 398,2 international Taxe forestière 9,0 14,1 13,5 15,1 14,0 15,0 15,6 18,3 17,7 19,5 18,3 18,5 Frais d’inscription et droits 65,4 62,4 56,7 73,8 76,9 89,2 94,4 104,4 111,6 122,6 105,3 118,0 de timbre 2.2 Recettes à régulariser - - - - 32,8 - - - - - - - 2.3 Recettes non-fiscales 80,8 88,0 94,0 96,8 119,3 153,9 144,0 148,1 191,5 164,4 188,7 177,4 2.4 Factures -1,1 -1,1 -1,2 -0,6 0,9 - 0,0 - - - - - 2.5 Recettes de privatisation - - - 15,0 - 142,5 - - - - - - 3. Subventions 71,3 60,2 55,0 46,3 43,2 11,1 54,1 64,8 86,7 133,3 41,7 65,0 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 217 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 En pourcentage du PIB Recettes totales et 14,2 15,6 15,7 15,7 16,2 15,8 14,2 14,5 15,9 15,7 13,7 14,1 subventions Recettes totales 13,7 15,2 15,4 15,5 15,9 15,8 13,9 14,2 15,5 15,1 13,5 13,9 1. Recettes du secteur 3,7 4,4 4,5 4,2 3,8 2,9 2,1 1,8 2,3 2,5 1,8 1,9 pétrolier 2. Recettes du secteur non- 10,1 10,7 10,9 11,3 12,1 12,8 11,8 12,4 13,2 12,6 11,7 12,0 pétrolier 2.1 Recettes fiscales 9,5 10,1 10,3 10,6 11,3 11,3 11,1 11,6 12,4 11,9 10,9 11,3 Impôts sur le revenu, les 2,5 2,8 3,1 3,1 3,4 3,6 3,2 3,0 3,2 3,1 3,1 3,0 bénéfices et les plus-values Impôt sur le revenu des 0,9 0,9 0,9 1,2 1,3 1,2 1,1 1,0 1,1 1,1 1,1 1,0 personnes physiques Impôt sur les sociétés 1,3 1,5 1,7 1,6 1,7 1,9 1,8 1,5 1,6 1,5 1,5 1,6 Impôt sur les plus-values 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,3 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 0,2 Autres impôts directs 0,1 0,2 0,2 0,1 0,2 0,2 0,2 0,3 0,3 0,3 0,3 0,3 Impôts indirects 7,0 7,3 7,2 7,5 7,9 7,7 7,9 8,7 9,1 8,8 7,8 8,2 TVA 3,4 3,6 3,6 3,9 4,0 3,9 4,0 4,6 5,2 4,9 4,0 4,2 Accises 0,6 0,7 0,6 0,7 0,7 1,0 1,1 1,0 0,9 1,0 1,2 1,3 Taxe spéciale sur les 0,6 0,6 0,6 0,7 0,7 0,5 0,5 0,6 0,6 0,6 0,6 0,6 produits pétroliers Taxes sur le commerce 1,9 1,9 1,9 1,7 2,0 1,8 1,7 1,9 1,8 1,7 1,5 1,6 international Taxe forestière 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 Frais d’inscription et droits 0,5 0,4 0,4 0,4 0,4 0,5 0,5 0,5 0,5 0,5 0,4 0,5 de timbre 2.2 Recettes à régulariser - - - - 0,2 - - - - - - - 2.3 Recettes non-fiscales 0,6 0,6 0,6 0,6 0,7 0,8 0,7 0,7 0,9 0,7 0,8 0,7 2.4 Factures 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 - 0,0 - - - - - 2.5 Recettes de privatisation - - - 0,1 - 0,7 - - - - - - 3. Subventions 0,5 0,4 0,4 0,3 0,2 0,1 0,3 0,3 0,4 0,6 0,2 0,3 Source : MINFI du Cameroun et calculs du personnel de la Banque mondiale Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 218 8.1.1.2 Ventilation des recettes fiscales (en pourcentage des recettes fiscales), 2010-2021 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 En pourcentage des recettes fiscales Recettes fiscales 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 Impôts sur le revenu, les 26,6 27,7 29,8 29,1 30,3 31,8 28,7 25,7 26,2 26,3 28,6 27,1 bénéfices et les plus-values Impôt sur le revenu des 9,5 9,3 9,0 10,9 11,8 10,7 9,5 8,7 8,9 9,3 9,8 9,1 personnes physiques Impôt sur le revenu des sociétés 13,4 14,6 16,5 14,6 14,7 17,1 15,9 13,1 12,9 12,5 13,8 13,9 Impôt sur les plus-values (IRCM) 2,1 2,2 2,4 2,2 2,2 2,3 1,8 1,7 1,6 1,7 2,1 1,6 Autres impôts directs 1,5 1,5 1,8 1,3 1,6 1,8 1,5 2,2 2,7 2,9 2,9 2,4 Impôts indirects 73,4 72,3 70,2 70,9 69,7 68,2 71,3 74,3 73,8 73,7 71,4 72,9 TVA 35,4 36,0 34,8 37,0 35,8 34,2 36,3 39,6 42,3 41,0 36,6 37,2 Accises 6,3 6,7 6,3 6,3 6,0 8,6 9,5 8,4 7,4 8,7 11,1 11,6 Taxe spéciale sur les produits 6,4 5,8 6,2 6,2 5,8 4,8 4,8 5,0 4,6 4,6 5,3 5,2 pétroliers (TSPP) Taxes sur le commerce 19,6 18,7 18,6 16,4 17,6 15,7 15,7 16,3 14,8 14,2 13,6 14,1 international Taxe forestière 0,7 1,0 0,9 0,9 0,7 0,7 0,7 0,7 0,6 0,7 0,7 0,7 Source : MINFI du Cameroun et calculs du personnel de la Banque mondiale Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 219 8.1.1.3 Ventilation des recettes totales et des taxes et impôts (% du PIB), 2020 Nombre de pays Recettes fiscales Recettes totales dans le groupe *GNI par pays Fourchette en Taxe foncière Subvention Commerce Pays sélectionnés de revenu USD 1/ Accise TVA CIT PIT Revenu élevé 59 > 14 010 38,29 21,59 6,48 2,08 0,68 1,59 3,14 7,27 2,24 Revenu moyen tranche 59 3 960 – 12 390 29,96 18,24 6,04 2,13 2,43 0,59 2,93 2,88 3,48 supérieure Revenu intermédiaire 46 840 – 3 930 17,40 16,10 4,53 1,78 2,04 0,32 2,77 2,30 1,88 tranche inférieure Faible revenu 30 < 1 200 17,65 10,87 3,74 1,28 1,96 0,14 2,05 2,17 4,51 CEMAC Revenu moyen Guinée Equatoriale tranche 5 800 14,10 7,58 0,85 0,33 0,21 0,01 5,08 0,92 0,03 supérieure Gabon 7 030 17,61 12,46 1,52 0,80 3,51 0,07 4,47 1,52 0,04 Revenu intermédiaire Cameroun 1 520 13,88 11,26 3,99 1,21 1,49 0,01 1,57 1,02 0,18 tranche inférieure Rép. du Congo 1 820 22,24 20,36 2,59 0,25 1,71 0,06 1,39 1,74 0,36 Rép. Centrafricaine 510 21,75 7,52 2,68 1,37 2,07 0,08 0,71 0,86 11,8 Faible revenu Tchad 630 21,15 13,58 1,53 0,55 1,36 0,37 2,19 1,64 4,24 Pairs structurels Côte d’Ivoire 2 280 14,98 12,34 2,72 1,66 2,96 0,53 1,57 1,51 0,55 Revenu intermédiaire Ghana 2 310 13,05 12,04 2,35 1,12 1,41 - 2,92 2,02 0,31 tranche inférieure Sénégal 1 430 20,16 16,79 5,71 1,78 2,40 0,06 2,67 2,57 2,30 Pairs aspirationnels Kenya 1 840 16,67 13,13 3,58 1,85 1,41 0,01 2,87 3,73 0,18 Maroc Revenu 3 020 27,00 20,02 6,94 2,38 0,86 - 4,46 3,67 0,43 intermédiaire tranche Sri Lanka inférieure 3 720 8,67 7,68 1,48 2,03 2,28 - 1,36 0,09 0,03 Viêt Nam 3 390 17,40 16,10 5,40 1,60 1,30 0,03 3,40 1,80 0,00 Remarque : PIT = impôt sur le revenu des personnes physiques ; CIT = impôt sur les sociétés ; TVA= taxe sur la valeur ajoutée ; et Gabon – la taxe foncière de 2014 est utilisée. Pour le Cameroun, les données sur la TVA incluent un remboursement des crédits de TVA. Source: WDI; Base de données FAD du FMI; MINFI du Cameroun; MINFI du Viêt Nam;Nam;et Gabon – Banque mondiale 2019, PER Improving Spending Quality to Foster Inclusive Growth 2019 and excise tax derived from IMF Central African Economic and Monetary Community (CEMAC): Selected Issues. Rapport national n° 19/2. Janvier 2019. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 220 8.1.1.4 Tranches d’impositions statutaires de l’IRPP dans les pays de la CEMAC Countries Income group Taxable income (CFAF) Rate ( percent) Cameroun Revenu intermédiaire tranche 0-2 millions 10 inférieure 2 000 001 - 3 millions 15 3 000 001 - 5 millions 25 Plus de 5 millions 35 République Centrafricaine Faible revenu 0 - 378,000 0 378,001 - 1,680,000 8 1,680,001 - 3,360,000 15 3,360,001 - 5,040,000 28 Plus de 5 040 000 40 Tchad Faible revenu 0 - 800,000 0 800,001 - 2,500,000 10 2,500,001 - 7,500,000 20 Plus de 7 500 000 30 Guinée Equatoriale Revenu intermédiaire tranche 0-1 millions 0 supérieure 1 000 001 - 3 millions 10 3 000 001 - 5 millions 15 5 000 001 - 10 millions 20 10 000 001 - 15 millions 25 15 000 001 - 20 millions 30 Plus de 20 millions 35 Gabon Revenu intermédiaire tranche 0 - 1,500,000 0 supérieure 1,500,001 - 1,920,000 5% x Q - 75 000 1,920,001 - 2,700,000 10% x Q - 171 000 2,700,001 - 3,600,000 15% x Q - 306 000 3,600,001 - 5,160,000 20% x Q - 486 000 5,160,001 - 7,500,000 25% x Q - 744 000 7,500,001 - 11,000,000 30% x Q - 1 119 000 Plus de 11 000 001 35% x Q - 1 669 000 République du Congo Revenu intermédiaire tranche 0 - 464,000 1 inférieure 464 001 - 1 million 10 1 000 001 - 3 millions 25 Plus de 3 millions 40 Remarque : Au Gabon, le nombre d’actions permet de déterminer un ratio ‘Q’ qui permet de déterminer la tranche de revenus du salarié. Taux progressif de 0 à 35 %, multiplié par les charges familiales du contribuable (« actions » - dans la limite de six enfants à charge). « Q »= ratio déterminé en fonction des « actions ». Source : MINFI du Cameroun ; Deloitte : Guide to fiscal information Key economies in Africa 2021 ; et PwC Worldwide Tax Summaries Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 221 8.1.1.5 Recettes provenant de l’IRPP (% du PIB), taux maximum de l’IRPP et ratio de productivité des pays d’AfSS et des pays pairs, 2020 Pays sélectionnés (1) (2) 3) = (2)/(1) Classement au Taux maximum Recettes de l’IRPP Ratio de productivité coefficient d’efficacité IRPP (% du PIB) CEMAC Revenu intermédiaire tranche supérieure Guinée Equatoriale 35 0,92 0,026 5 Gabon 35 1,52 0,043 3 Moyenne 35 1,22 0,035 Revenu intermédiaire tranche inférieure Cameroun 35 1,02 0,029 4 République du Congo 40 1,74 0,044 2 Moyenne 38 1,38 0,036 Faible revenu République Centrafricaine 40 0,86 0,022 6 Tchad 30 1,64 0,055 1 Moyenne 35 1,25 0,038 Pairs structurels Revenu intermédiaire tranche inférieure Côte d’Ivoire 36 1,51 0,042 Ghana 30 2,02 0,067 Sénégal 43 2,57 0,060 Moyenne 36 2,03 0,056 Pairs aspirationnels Revenu intermédiaire tranche inférieure Kenya 30 3,73 0,124 Maroc 38 3,67 0,097 Sri Lanka 18 0,09 0,005 Viêt Nam 35 1,80 0,051 Moyenne 30 2,32 0,069 Source : MINFI du Cameroun, MINFI du Cambodge, MINFI du Viêt Nam, GFS du FMI et calculs du personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 222 8.1.1.6 Recettes provenant de l’IS (% du PIB), taux maximum de l’IS et ratio de productivité des pays d’AfSS et pays pairs, 2020 Selected Countries (1) (2) (3) = (2)/(1) Classement au Taux de Recettes de l’IS Ratio de productivité coefficient d’efficacité l’impôt sur les (% du PIB) sociétés prévu par la loi CEMAC Revenu moyen tranche supérieure Guinée Equatoriale 35 5,08 0,145 2 Gabon 30 4,47 0,149 1 Moyenne 33 4,77 0,147 Revenu intermédiaire tranche inférieure Cameroun 30 1,57 0,052 4 République du Congo 28 1,39 0,050 5 Moyenne 29 1,48 0,051 Faible revenu République Centrafricaine 30 0,71 0,024 6 Tchad 35 2,19 0,063 3 Moyenne 33 1,45 0,043 Pairs structurels Revenu intermédiaire tranche inférieure Côte d’Ivoire 25 1,57 0,063 Ghana 25 2,92 0,117 Sénégal 30 2,67 0,089 Moyenne 27 2,38 0,089 Pairs aspirationnels Revenu intermédiaire tranche inférieure Kenya 30 2,87 0,096 Maroc 31 4,46 0,144 Sri Lanka 28 1,36 0,048 Viêt Nam 20 3,40 0,170 Moyenne 27 3,02 0,114 Source : MINFI du Cameroun, MINFI du Cambodge, MINFI du Viêt Nam, GFS du FMI et calculs du personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 223 8.1.1.7 Recettes de la TVA (% du PIB), taux standard de la TVA, ratios de productivité et coût-efficacité pour les pays d’Afrique subsaharienne et pays pairs Pays (1) (2) (3) = (2)/(1) (4) (5) = (2)/((1)*(4)) Classement au sélectionnés Taux standard Recettes de la Productivité de Consommation Coût-efficacité coefficient de de la TVA TVA la TVA finale des coût-efficacité (pourcentage du ménages PIB) (% du PIB) CEMAC Revenu intermédiaire tranche supérieure Guinée Equatoriale 15 0,85 0,057 68,47 0,083 6 Gabon 18 1,52 0,085 41,95 0,202 3 Moyenne 17 1,19 0,071 55,21 0,142 Revenu intermédiaire tranche inférieure Cameroun 17 3,99 0,235 73,11 0,321 2 République du 18 2,59 0,144 42,04 0,342 1 Congo Moyenne 19 3,29 0,189 57,57 0,331 Faible revenu République 19 2,68 0,141 91,20 0,155 4 Centrafricaine Tchad 18 1,53 0,085 90,01 0,094 5 Moyenne 19 2,10 0,113 90,60 0,125 Pairs structurels Revenu intermédiaire tranche inférieure Côte d’Ivoire 18 2,72 0,151 66,13 0,228 Ghana 12.5 2,35 0,188 70,17 0,268 Sénégal 18 5,71 0,317 68,82 0,461 Moyenne 16 4,03 0,253 69,49 0,365 Pairs aspirationnels Revenu intermédiaire tranche inférieure Kenya 16 3,58 0,224 75,63 0,296 Maroc 20 6,94 0,347 58,30 0,595 Sri Lanka 12 1,48 0,123 70,95 0,173 Viêt Nam 10 5,40 0,540 67,86 0,796 Moyenne 15 3,50 0,226 74,47 0,323 Source: Cameroon MINFI, Cambodia MINFI, Vietnam MINFI, IMF GFS, and World Bank Staff calculation Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 224 8.1.1.8 Ventilation des dépenses fiscales, 2015-2021 8.1.1.8.1 Nombre de mesures par régimes Nombre de mesures 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Régimes de droit commun N/A 248 328 328 292 295 382 TVA N/A 226 300 300 269 271 349 Droits de douane à l’importation (DDI) - 19 12 12 10 10 12 Droits d’accises (DA) - 3 3 3 4 5 3 Impôt sur les sociétés (CIT/IS) - - - - 1 1 1 Impôt sur le revenu des personnes physiques - - 9 9 5 5 14 (IRPP) Droit d’immatriculation (DF) - - 4 4 3 3 3 Régimes dérogatoires N/A 31 77 77 88 86 79 TVA N/A 17 7 7 11 5 11 Droits de douane à l’importation (DDI) - 14 6 6 11 14 6 Droits d’accises (DA) - - 1 1 - - 1 Impôt sur les sociétés (CIT/IS) - - 32 32 28 29 34 Impôt sur le revenu des personnes - - 17 17 24 24 14 physiques (PIT/IRPP) Droit d’immatriculation (DF) - - 14 14 14 14 13 Total des mesures relevées 227 279 405 405 380 381 461 Total des mesures évaluées 137 230 363 358 371 295 382 Pourcentage 60,4 % 82,4 % 89,6 % 88,4% 97,6 % 77,4 % 82,9 % Remarque : Le rapport sur les dépenses fiscales pour l’AF 2015 est estimé uniquement sur la base de la TVA ; et le nombre désagrégé de mesures par régime des dépenses fiscales de l’AF 2015 au sein des régimes de droit commun et des régimes dérogatoires n’est pas disponible (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. 8.1.1.8.2 Dépenses fiscales par structure organisationnelle Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 PIB nominal 19 043,1 20 038,6 20 960,9 22 203,3 23 243,7 23 486,5 25 141,5 Recettes fiscales totales 2 149,4 2 215,3 2 441,1 2 744,2 2 768,3 2 560,6 2 829,7 DGD N/A N/A 288,3 341,4 351,3 252,9 229,0 % du PIB - - 1,4 % 1,5 % 1,5 % 1,1 % 0,9 % % des recettes fiscales totales - - 11,8 % 12,4 % 12,7 % 9,9 % 8,1 % DGI N/A N/A 317.2 203.8 233.4 199.4 210.6 % du PIB - - 1,4 % 1,5 % 0,9 % 1,0 % 0,8 % % des recettes fiscales totales - - 13,0 % 13,0 % 7,4 % 8,4 % 7,8 % Total 155.8 451.6 605.6 545.1 584.7 452.3 439.6 % du PIB 0,8 % 2,2 % 2,9 % 2,5 % 2,5 % 1,9 % 1,7 % % des recettes fiscales totales 7,2 % 20,4 % 24,8 % 19,9 % 21,1 % 17,7 % 15,5 % Remarque : Les données désagrégées par structure organisationnelle des dépenses fiscales des AF 2015 à 2016 entre la DGI et la DGD ne sont pas disponibles (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 225 8.1.1.8.3 Dépenses fiscales par type d’impôts Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 TVA 155,8 335,1 277,6 316,8 399,6 260,1 165,2 Intérieur N/A 120,2 113,8 139,5 198,4 158,2 141,3 TVA à l’importation N/A 214,9 163,7 177,3 201,2 101,9 23,9 Droits de douane à l’importation (DDI) - 107,4 107,2 150,3 147,2 143,8 194,8 Droits d’accises (DA) - 9,1 12,4 25,0 16,8 21,3 38,0 Intérieur - 8,2 6,6 11,2 13,9 14,1 27,8 DA à l’importation - 0,9 5,8 13,8 2,9 7,3 10,3 Impôt sur les sociétés (CIT/IS) - - 84,3 10,8 16,3 16,2 33,8 Impôt sur le revenu des personnes physiques - - 53,6 13,0 2,1 6,1 2,8 (PIT/IRPP) Droit d’inscription (DF)??? - - 70,6 29,3 2,6 4,8 5,0 Dépenses fiscales totales 155,8 451,6 605,6 545,1 584,7 452,3 439,6 Remarque : Le rapport sur les dépenses fiscales de l’AF 2015, estimées uniquement sur la base de la TVA, et les données relatives aux dépenses fiscales faites à partir de la TVA pour l’AF 2015, désagrégées selon qu’elles se rapportent à la TVA intérieure ou à la TVA à l’importation ne sont pas disponibles (N/A) ; le rapport sur les dépenses fiscales pour l’AF 2016 ne couvre que trois impôts indirects (TVA, droits d’accises ou DA et droits de douane ou DDI). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. 8.1.1.8.4 Dépenses fiscales par secteur Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Immobilier N/A 0,1 - - N/A N/A N/A Agriculture, élevage et pêche N/A 30,3 54,1 11,9 N/A N/A N/A Logements sociaux N/A - 1,9 - N/A N/A N/A Banque et assurance N/A 13,5 24,1 16,3 N/A N/A N/A Industrie alimentaire N/A 203,7 210,9 284,5 N/A N/A N/A Secteur de l’électricité, du gaz, du pétrole et des N/A - 211,4 59,0 N/A N/A N/A mines Eau et énergie N/A 75,0 - - N/A N/A N/A Santé et sécurité sociale N/A 43,9 5,0 5,0 N/A N/A N/A Métallurgie N/A 26,6 31,4 20,8 N/A N/A N/A Autres secteurs N/A 58,5 66,8 147,6 N/A N/A N/A Dépenses fiscales totales 155,8 451,6 605,6 545,1 584,7 Remarque : Les données relatives aux dépenses fiscales des années financières 2015 et 2019 désagrégées par secteur ne sont pas disponibles (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. 8.1.1.8.5 Dépenses fiscales par bénéficiaire Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Entreprises N/A 139,0 381,3 294,6 168,6 134,6 172,1 Grandes entreprises N/A N/A N/A 239,2 138,9 92,0 N/A Moyennes entreprises N/A N/A N/A 35,3 19,0 15,6 N/A Petites entreprises N/A N/A N/A 20,1 10,7 27,0 N/A Ménages N/A 303,3 221,4 246,9 415,7 303,2 267,5 Administrations publiques N/A 1,1 0,7 3,6 - - - Missions diplomatiques et assimilées N/A 2,3 1,5 - - - - Organisations humanitaires N/A 3,2 - - - - - Organisations internationales N/A 0,7 - - - - - Organisations religieuses N/A 0,0 - - - - - Compagnies aériennes N/A 0,4 - - - - - Autres N/A 1,6 0,3 - 0,3 14,6 - Dépenses fiscales totales 155.8 451,6 605,6 545,1 584,7 452,40 439,60 Remarque : Les données relatives aux dépenses fiscales de l’année financière 2015 désagrégées par bénéficiaire ne sont pas disponibles (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 226 8.1.1.8.6 Dépenses fiscales par fonction budgétaire Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Mesures économiques N/A 142,6 383,8 296,3 158,9 132,3 202,7 Mesures sociales N/A 309,1 220,3 231,6 395,1 265,2 233,9 Défense nationale N/A 0,0 - - - - - Conventions internationales N/A - 1,5 - - - - Mesures environnementales N/A - - 17,1 14,4 3,4 2,9 Autres N/A - - - 16,1 51,4 Dépenses fiscales totales 155,8 451,6 605,6 545,1 584,7 452,3 439,5 Remarque : Les données relatives aux dépenses fiscales de l’année financière 2015 désagrégées par fonction budgétaire ne sont pas disponibles (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. 8.1.1.8.7 Dépenses fiscales par régime fiscal Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Droit commun N/A 349,1 265,5 361,2 247,1 332,7 314,7 Incitations à l’investissement N/A 20,7 101,1 75,6 186,2 53,5 94,8 Accords et spécifications N/A 26,4 28,3 32,6 5,0 0,3 Code pétrolier N/A 37,5 106,3 44,1 110,0 3,7 Code gazier N/A 3,0 89,5 5,0 5,4 1,0 5,3 Code minier N/A 0,1 0,1 2,4 0,5 0,3 9,4 Convention internationale N/A 6,7 Missions diplomatiques connexes N/A 1,5 Zone de libre-échange N/A 4,2 11,5 9,0 4,3 6,4 0,2 Zones économiques spéciales (ZES) N/A 0,1 Mesures exceptionnelles N/A 2,9 3,8 Régime boursier N/A 0,5 - 0,2 0,1 1,4 Centres de Gestion Agréés (CGA) N/A 0,3 11,7 0,3 3,5 2,1 Financement externe ou conjoint (FINEXT) N/A 32,4 Promotion des matières premières et matériaux N/A 11,6 locaux Autres N/A 2,4 25,6 18,3 Dépenses fiscales totales 155,8 451,6 605,6 545,1 584,7 452,3 439,5 Note: The disaggregated data of FY 2015 and FY 2019 tax expenditures by sector are not available (N/A). Source: Rapport Sur Les Depenses Fiscales De L’exercice 2016-2021, Cameroon MINFI and World Bank Staff calculations. 8.1.1.8.8 Dépenses fiscales par objectif Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Développer le secteur pétrolier, gazier et minier N/A 45,1 196,8 51,4 32,5 5,0 14,7 Encourager la transformation locale du bois N/A 1,9 1,9 3,1 6,5 2,4 3,9 Encourager l’épargne N/A 2,5 9,7 12,7 Faciliter l’accès à l’éducation N/A 2,1 0,6 1,7 0,1 0,6 0,7 Faciliter l’accès des ménages aux produits de N/A 214,9 192,1 192,6 353,7 211,6 170,5 première nécessité Faciliter l’accès aux soins de santé N/A 54,0 20,7 20,9 13,1 22,8 18,8 Faciliter l’accès à l’électricité N/A 11,6 7,9 Faciliter l’accès à l’eau potable N/A 0,2 1,4 Faciliter l’accès au crédit N/A 0,1 Promouvoir le développement de l’économie N/A 1,8 0,1 14,4 3,4 1,1 verte Promouvoir les investissements privés N/A 60,9 152,4 89,8 84,9 60,3 113,8 Promouvoir les investissements publics N/A 2,5 0,4 Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 227 Milliards XAF 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Promouvoir la bourse N/A 0,5 1,0 0,1 0,1 1,4 Promouvoir les CGA N/A 1,6 3,5 2,1 Respecter la législation communautaire N/A 0,0 Respecter les accords internationaux N/A 8,3 1,7 Appuyer la consommation des ménages N/A 28,0 2,8 28,5 24,1 29,2 32,1 Appuyer le secteur agricole N/A 19,4 10,7 Appuyer le secteur de la pêche N/A 0,6 Appuyer le secteur de l’élevage N/A 7,4 Appuyer le secteur agro-pastoral N/A 5,6 7,9 13,0 17,1 0,1 27,6 Appuyer le secteur des logements sociaux N/A 7,5 0,5 3,1 3,6 1,0 0,8 Appuyer l’acquisition de véhicule N/A 0,1 6,9 17,0 1,8 Appuyer l’industrie du livre et l’édition N/A 0,9 1,8 0,2 6,1 Appuyer le développement des PME N/A 0,4 12,9 Appuyer le secteur industriel N/A 39,7 Appuyer le secteur métallurgique N/A 31,0 Appuyer les personnes en situation de handicap N/A 11,1 Promouvoir la recherche et l’innovation N/A 2,0 7,7 Promouvoir les financements étrangers N/A 32,0 Valoriser les matières premières et les matériaux N/A 11,6 locaux Développer le service postal N/A 0,5 0,4 0,5 0,6 Autres objectifs N/A 1,3 7,8 27,6 25,8 51,4 Dépenses fiscales totales 155.8 45,1 196,8 51,4 32,5 5,0 14,7 Remarque : Les données relatives aux dépenses fiscales de l’année financière 2015 désagrégées par fonction budgétaire ne sont pas disponibles (N/A). Source : Rapport sur les dépenses fiscales de l’année financière 2016-2021, calculs du MINFI du Cameroun et du personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 228 8.1.1.9 Structure organisationnelle des principales institutions fiscales Le MINFI compte deux principales administrations fiscales. 1. La Direction Générale des Impôts (DGI) est chargée de concevoir une politique fiscale propice à une meilleure mobilisation des ressources budgétaires (par exemple, la coordination et le suivi des services ; l’élaboration, la mise en œuvre et le contrôle de l’application de la législation fiscale, le calcul et le recouvrement impôts, les enquêtes et contrôles fiscaux, la lutte contre la fraude fiscale et la coopération internationale). La DGI est organisée en services centraux et services déconcentrés. Elle a amélioré l’organisation tant de ses services centraux que de ses unités de production en améliorant la segmentation de ses contribuables selon leur taille (chiffre d’affaires) et leur activité. 1.1 Services centraux. Les services centraux comprennent 10 Directions Centrales, un bureau des courriers et une Cellule d’Information et de Communication. Les services centraux de la DGI sont chargés de coordonner les activités, de concevoir les outils de pilotage et d’évaluer la performance fiscale. Ils ont connu plusieurs changements organisationnels. Entre le décret n° 2008/365 du 8 novembre 2008 applicable en 2010 et le décret n° 2013/066 du 28 février 2013 portant organisation du Ministère des Finances (MINFI) en vigueur, les services centraux de la DGI ont connu une profonde refonte y compris : • La reconfiguration des anciennes structures et la création de nouvelles Divisions : Division de l’Etude, de la Planification et des Réformes Fiscales (DEPRF) ; Division du Contentieux (DC) ; et Division de l’Informatique (DI) ; • La création de nouvelles directions : Direction des Affaires Générales (DAG) ; Direction du Recouvrement, de Valeurs Fiscales et de la Curatelle (DRVFC) ; le Bureau des Grands Contribuables (BGC) ; • L’augmentation du nombre de Sous-Directions : Sous-direction du Budget et du Matériel (SDBM/DAG) ; Sous-direction du Suivi des Recettes Affectées (SDSRA/DRVFC) ; • La création de nouvelles cellules : Cellule d’exploitation (CE/DI) ; Cellule des Réseaux de Communication (CRC/DI) ; Cellule de Recherche et d’Analyse des Informations Fiscales (CRAIF/DEPSCF) ; Cellule de Suivi des Régimes Fiscaux Dérogatoires et Spécialisés (CSRFDS/DLRFI) ; Cellule de Suivi, d’Analyse et de Recours Gracieux (CSARG/DC) ; Cellule Informatique et Statistiques (CIS/DGE) ; Cellule de Perfectionnement et de Formation Continue (CPFC/DAG) ; Cellule d’Information et de Communication (CIC) ; • La création des postes de Directeur Adjoint : (Coordonnateur des Unités de Gestion, Coordonnateur des Brigades de Contrôle des Grandes Entreprises, Receveur des Impôts), au BGC Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 229 • Bureau des Grands Contribuables (BGC) : Créé en 2004 sous le nom de « Cellule des Grands Contribuables », le BGC fait partie des services centraux de la DGI. En 2014, ses compétences ont été recentrées sur les véritables grandes entreprises avec le relèvement du seuil à 1 à 3 milliards XAF de chiffre d’affaires annuel. Cette réforme a réduit le nombre de contribuables gérés par le BGC de 569 en 2013 à 408 en 2014, avant que ce nombre passe de 378 en 2015 à 505 en 2019. Grâce à cette réforme, l’efficacité des services du BGC a été renforcée et les opérations complexes des grandes entreprises ont été mieux suivies. 1.2 Services déconcentrés. Les services déconcentrés sont constitués de 14 Directions Régionales des Impôts (DRI). • Directions Régionales des Impôts (DRI) : Chargées de la coordination des services fiscaux déconcentrés, les Directions Régionales des Impôts déterminent l’assiette fiscale et assurent le respect des règles, le contrôle fiscal, le recouvrement et le traitement des contentieux des différents impôts, droits et prélèvements relevant de leur compétence. De 12 Directions Provinciales des Impôts telles que créées par le décret N°2008/365 du 08 novembre 2008 susvisé, le nombre de Directions Régionales des Impôts (DRI), créées par le décret n°2013/066 du 28 février 2013, est passé à 14 en 2019. • Bureaux des Moyens Contribuables (BMC) : Les deux premiers BMC ont été créés en 2006 à Douala et Yaoundé. Ils administraient des contribuables dont le chiffre d’affaires variait entre 100 millions et 1 milliard XAF. Jusqu’en 2013, la DGI ne comptait que 2 BMC avec un indice cumulé des contribuables de 2 861 contribuables. À partir de 2014, l’administration fiscale a décidé d’abaisser le seuil de TVA de 100 millions XAF à 50 millions XAF. À partir de ce moment, tous les contribuables dont le chiffre d’affaires est compris entre 50 millions et 3 milliards XAF sont gérés par les BMC. • Cellules spéciales d’enregistrement (CSE) : Créées en 2008 par une décision du ministre des Finances afin de sécuriser les recettes de l’enregistrement des marchés publics, les CSE ont été inscrites dans le décret n° 2013/066 du 18 février 2013 précité, qui leur assigne également des missions de suivi et de contrôle des domaines et des biens vacants en liaison avec la cellule compétente de la Direction chargée du recouvrement des créances. • Centre Spécialisé pour les Etablissements Publics : Il est chargé du contrôle du respect, du contrôle et de la perception des impôts, taxes et redevances auprès des établissements publics, des RLA et autres Organismes Publics de la Région Centre. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 230 • Centre spécial des Impôts pour les Professions Libérales et de l’Immobilier (CSIPLI) : Créé en 2006 à Douala et Yaoundé, le CSIPLI administre les contribuables qui exercent des professions libérales et/ou exercent dans le secteur immobilier. • Bureaux divisionnaires des impôts (BDI) • Programmes d’amélioration des revenus  : Les Programmes d’amélioration des recettes ont été mis en place avec des compétences en matière de gestion et de perception des impôts, droits et prélèvements dans leurs domaines respectifs. Graphique A8.1 : Organigramme de la Direction Générale des Impôts (DGI) Direction Générale des Impôts (DGI) Cellule d’Information Service du Courrier et de Communication Direction de l’Etude, de la Planification et des Réformes Fiscales Division des Enquêtes, de la Services centraux Service d’Audit Interne Programmation et du Suivi de la Performance Fiscale Direction des Affaires Division des Statistiques, Générales des Simulations et de l’Immatriculation Bureau des Grands Division Informatique (DI) Contribuables (BGC) Direction du Recouvrement, Division de la Législation de la Valeur Fiscale et de la et des Relations Fiscales Curatelle (DRVFC) Internationales Division du Contentieux Direction Régionale des Impôts (DRI) Services déconcentrés Cellule Régionale Brigade Brigade Service des de Programmation Service du Service de la Régionale Régionale de Cellule du Affaires et de Suivi des Courrier Communication d’Enquêtes et Contrôle et Contentieux Générales Contrôles et de Recherche d’Inspection Inspections Cellule des Bureau Régional Bureau des Movens Statistiques, de Cellule Régionale Bureau Cellule Spéciale d’Audit Interne Contribuables l’Immatriculation, du de Perception des Divisionnaire des d’Immatriculation des Services (BMC/CSIPLI/ Contrôle de Gestion et Impôts Impôts Fiscaux CFSEPCTO) de l’Informatique Note : CSIPLI Centre spécial des impôts pour les professions libérales et l’immobilier et CFSEPCTO Centre Fiscal Spécialisé pour les Etablissements Publics, les Collectivités Territoriales et autres Organismes. Source : Direction Générale des Impôts : Rapport annuel 2018 et rapport décennal 2010-2020. Conception par le MINFI du Cameroun et le personnel de la Banque mondiale. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 231 2. La Direction Générale des Douanes est chargée de l’élaboration et de l’application de la législation douanière ainsi que de la perception des droits et taxes de douane. Graphique A8.2 : Organigramme de la Direction Générale des Douanes (DGD) Direction Générale des Douanes (DGD) Services Centraux Services déconcentrés 12 Secteurs Douaniers Service du Protocole Division des Opérations Financière du Commerce Extérieur et du Contrôle du Change 79 Dépôts Douaniers Direction de l’Audit Interne Centres Informatiques Division de la Législation et du Régionaux Contentieux Fonds Central du Contentieux Douanier 12 Commandements de Division de la Coopération Groupe Douanier actifs Internationale et de l’Assiette Fiscale Cellule d’Information et 38 Subdivisions de Communication douanières Division des Enquêtes et de l’Application Commandement du 114 Brigades Douanières Groupe d’Intervention Spécial des Douanes Division Informatique 34 Postes Douaniers Centre de Formation des Douanes Cellules Opérationnelles du Commandement du Division de la Perception des Groupe d’Intervention Recettes et des Statistiques Spécial des Douanes Division des Etudes, de la Facilitation des Echanges et de l’Analyse des Risques Division des Ressources et de la Logistique Source : Direction Générale des Douanes : Rapport annuel 2019. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 232 8.1.1.10 Réformes au titre de l’Administration fiscale 1. Publication pour la première fois du fichier national des contribuables sur le site de la DGI. 2. Mise en œuvre de plusieurs procédures électroniques pour réduire le coût de réalisation des déclarations de revenus et améliorer la conformité fiscale. La DGI a mis en place un dépôt électronique des régimes fiscaux standards pour les contribuables du Bureau des Grands Contribuables (BGC). 2014 3. Introduction de la déclaration pré-remplie (DPR). 4. Mise en œuvre de changements organisationnels pour renforcer les capacités de gestion de l’impôt foncier dans les centres fiscaux pays pour contrebalancer la suppression de la TVA et d’autres taxes gérées par les centres divisionnaires. 5. Mise en place d’un service de paiement de la taxe foncière par téléphone mobile (taxe mobile). 1. Introduction d’une nouvelle méthode de perception du droit de timbre aéroportuaire en donnant aux compagnies aériennes la responsabilité de percevoir la taxe au moment de la vente du billet d’avion. Avant 2015, le droit de timbre aéroportuaire était payé par le passager, en personne, avant d’embarquer sur son vol, auprès des services des recettes fiscales créés dans tous les aéroports du Cameroun. Ce mode 2015 de recouvrement s’est avéré fastidieux et peu pratique pour les passagers et les compagnies aériennes, parce que les passagers sont obligés de faire la queue pour payer la taxe tandis que les compagnies aériennes perdent un temps utile à attendre que les passagers aient fini de payer avant d’embarquer. 1. Mise en place d’une déclaration électronique des marchés publics. 2. Mise en place d’une déclaration électronique des ventes/transferts de biens immobiliers comprenant la mise en place de valeurs administratives en matière de biens immobiliers et la consécration du paiement des droits d’enregistrement et de timbre des ventes/transferts d’immeubles exclusivement par virements bancaires. 2016 3. Application d’un mécanisme destiné à inciter les contribuables à produire des déclarations par le biais d’une amnistie fiscale pour les impôts impayés des années précédentes. 4. Rationalisation des modalités d’intervention des services fiscaux 5. Elargissement de la dématérialisation des timbres fiscaux aux huit autres chefs-lieux de région après celle de 2011 lancée à Yaoundé et Douala. 1. Simplification et modernisation du calcul, de la déclaration et du paiement de la licence commerciale grâce à un système de lancement qui permet le calcul automatique du montant en ligne et supprime ainsi 2017 la copie sur support papier. 2. Introduction d’un nouveau mécanisme de perception des impôts et taxes sur l’exécution du budget de l’État. 1. Élargissement de la dématérialisation des timbres fiscaux à toutes les caisses du Trésor à l’étranger et à toutes les sous-divisions des Régions du Sud-Ouest, de l’Ouest et du Centre après l’élargissement de 2016. 2018 2. Remplacement du dédouanement fiscal par le certificat de dédouanement fiscal (CDF) qui est délivré en ligne aux contribuables à jour de leurs obligations fiscales. 3. Élargissement de l’assignation externe au percepteur des recettes douanières. 1. Mise en place de la réunion annuelle pour assurer les transferts des contribuables d’un centre à un autre et assurer la traçabilité des mouvements des contribuables dans l’index. 2. Instauration d’une version électronique de la Déclaration Statistique et Fiscale (DSF) pour les entreprises appartenant à des unités spécialisées. La Revenue Development Foundation (RDF) en association avec la coopération allemande GIZ a été retenue pour développer une application de déclaration électronique des DSF. 2019 3. Mise en place de la transmission/communication électronique de certains documents de procédure tels que les Actes de Recouvrement des Impôts (ARI), avis de contrôle, avis de déclaration, etc. 4. Interfaçage avec la plateforme e-GUCE du Guichet Unique du port de Douala pour le télépaiement des taxes à l’importation de véhicules, génération en ligne de bulletin de versement de retenue à la source pour les marchés publics. 5. Elargissement de la dématérialisation des timbres fiscaux aux régions du Sud, du Littoral, de l’Est et de l’Adamaoua après l’élargissement de 2018. 1. Achèvement de la dématérialisation des timbres fiscaux dans les régions du Nord, de l’Extrême-Nord et 2020 du Nord-Ouest. Source : Direction Générale des Impôts : Rapport décennal 2010-2020. Ministère des Finances, Cameroun. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 233 8.1.1.11 Résumé du diagnostic de l’administration fiscale La Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) (ou Société allemande pour la coopération internationale GmbH) a évalué le système d’administration fiscale du Cameroun du 10 au 25 avril 2017 à l’aide de l’outil de diagnostic TADAT. L’outil TADAT donne une évaluation de la performance de l’administration fiscale en situation de référence et cette évaluation peut être utilisée pour définir les priorités de réforme. Le cadre TADAT est axé sur l’administration des principaux impôts directs et indirects essentiels aux recettes du gouvernement central, à savoir l’impôt sur les sociétés (IS), l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) ; la TVA ; le droit d’accise ; et les retenues à la source par les employeurs. En 2017, l’évaluation a porté sur 28 indicateurs de haut niveau dans 9 domaines d’analyse couvrant la plupart des fonctions, processus et institutions de l’administration fiscale, le but étant de renforcer l’administration fiscale, d’améliorer la mobilisation des recettes, d’améliorer les services aux contribuables et de promouvoir une meilleure conformité et discipline des contribuables. L’évaluation TADAT montre que le Cameroun obtient d’excellents résultats en matière de systèmes de recouvrement efficient (DA 5) et de processus de règlement des litiges fiscaux (DA 7), et de manière satisfaisante en matière d’incitation à l’exactitude des déclarations (DA 6) et de prévision des recettes fiscales gouvernementales (DA 8). L’évaluation globale suggère des possibilités d’amélioration (Tableau 8-1).126 126 Prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 234 Tableau 8-1. Évaluation des fonctions essentielles de l’administration fiscale camerounaise, 2017 Indicateur Indicateur détaillé Score DA 1 : Intégrité du registre des Pertinence et exactitude des renseignements relatifs aux contribuables D contribuables Détection des contribuables potentiels C Identification, évaluation, classement et quantification des risques D d’inobservation fiscale POA2 : Gestion efficace des Atténuation des risques par un plan d’amélioration de l’observation volontaire D risques Suivi et évaluation des activités d’atténuation des risques d’inobservation D fiscale Identification, évaluation et atténuation des risques institutionnels. D Ampleur, degré d’actualité et accessibilité des renseignements D DA 3 : Appui de l’observation Ampleur des mesures prises pour réduire les coûts de l’observation fiscale pour D volontaire les contribuables Recueil de l’opinion des contribuables sur les produits et services D DA 4 : Production en temps Taux de déclarations déposées dans les délais C opportun des déclarations de revenus Utilisation de dispositifs de déclaration en ligne D Utilisation de méthodes de paiement en ligne C DA 5 : Paiement de l’impôt à Utilisation de méthodes efficaces de recouvrement temps Taux de paiements dans les délais C Stock et flux des arriérés d’impôts. D+ Ampleur des mesures de vérification prises pour détecter les déclarations D+ inexactes et dissuader les contribuables DA 6 : Présentation de renseignements exacts dans les Ampleur des mesures préventives prises pour inciter les contribuables à faire B déclarations des déclarations exactes Suivi de l’ampleur des déclarations inexactes D Existence d’un processus de règlement des contentieux indépendant, facile à A gérer et progressif DA 7 : Résolution efficace des litiges fiscaux Délai de règlement des contentieux C Mesure dans laquelle les résultats des contentieux sont suivis d’effet B Contribution au processus de prévision des recettes fiscales de l’État B DA 8 : Gestion efficace des Pertinence du système de comptabilisation des recettes fiscales D revenus Pertinence du traitement du remboursement d’impôts D Mécanismes d’assurance interne. D+ DA 9 : Responsabilisation et Contrôle externe de l’administration fiscale. D+ transparence Perception de l’intégrité des services par le public D Publication des opérations, des résultats et des plans C+ Note : La note « A » (vert gras) correspond à une performance qui respecte ou dépasse les bonnes pratiques internationales. « B » (vert clair correspond à une performance solide (bon niveau de performance mais un niveau en dessous des meilleures pratiques internationales). « C » (jaune) signifie une performance mauvaise par rapport aux meilleures pratiques internationales. « D » (rouge) indique une performance insuffisante et est attribué lorsque les critères minimaux correspondant à une note « C » ne sont pas remplis. Un « D » pourrait également être attribué si les informations disponibles sont insuffisantes pour déterminer et évaluer le niveau de performance. Source : TADAT Cameroun Rapport d’évaluation de la performance. FMI. Juillet 2017. Revue des finances publiques du Cameroun : Collecter davantage, Dépenser Mieux pour atteindre les objectifs de la Vision 2035 8.1.1.12 Part moyenne du PIB de l’économie informelle en 2004-15 en Afrique subsaharienne Maurice 20,73 Afrique du Sud 22,60 Namibie 24,54 Botswana 26,29 Lesotho 29,23 Guinée équatoriale 29,26 Ethiopie 30,24 Cameroun 30,62 Cabo Verde 30,87 Kenya 31,98 Rwanda 32,14 Mozambique 32,71 Burkina Faso 34,19 Tchad 34,36 Mali 34,63 Ouganda 35,20 Togo 36,15 Malawi 36,81 Sierra Leone 37,24 Burundi 37,61 Sénégal 37,76 Angola 37,99 Swaziland 38,15 Niger 38,26 Guinée-Bissau 38,45 Comores 38,48 Guinée 39,35 Zambie 39,59 République du Congo 39,72 Erythrée 40,60 Ghana 40,84 Libéria 42,23 République Centrafricaine 42,48 Côte d'Ivoire 43,07 Madagascar 43,13 Gambie 43,38 République démocratique du Congo 45,32 Tanzanie 46,89 Nigeria 53,10 Bénin 53,26 Gabon 56,64 Zimbabwe 64,08 0 10 20 30 40 50 60 70 Source : Calculs des services de la Banque mondiale ; Médine et Schneider (2018). Shadow Economies Around the World : Documents de travail du FMI