Inclusion Financière en Tunisie 2022 État des lieux et opportunités EN PARTENARIAT AVEC: Contenu Résumé Exécutif.................................................................................................................. 1 Aperçu de l’inclusion financière en Tunisie......................................................................4 Opportunités de marché pour les acteurs du secteur financier......................................6 Particuliers Résidents....................................................................................................6 Tunisiens Résidents à l’Étranger...................................................................................8 Auto-Entrepreneurs, Très Petites, Petites et Moyennes Entreprises...........................9 Agriculteurs..................................................................................................................13 Leviers d’action des acteurs de l’écosystème financier ................................................. 16 Acteurs du marché...................................................................................................... 16 Régulateurs...................................................................................................................17 Approche et Méthodologie.............................................................................................. 18 Remerciements................................................................................................................. 21 Acronymes ......................................................................................................................... 21 Résumé Exécutif Le taux d’inclusion financière en Tunisie semble avoir progressé au cours de la Démographie et tissu économique tunisiens dernière décennie en dépit de la situation politico-économique1 du pays. En témoignent les résultats de l’enquête récemment menée par la Société Financière Internationale (IFC) auprès d’environ 1 100 particuliers, 2 000 entreprises, 600 agriculteurs et 400 Tunisiens résidents à l’étranger. À titre d’exemple, ce sondage 8,4 millions de particuliers adultes* révèle une progression du taux de particuliers clients d’une institution financière de la population est formelle2 qui a atteint 75 pour cent en 2021, contre 61 pour cent en 20183. 70% urbaine* L’enquête dévoile néanmoins des disparités en termes d’inclusion financière en de la population à fonction du segment, des revenus et de la localisation géographique. En effet, 9 pour cent des particuliers et 29 pour cent des entreprises n’ont aucun accès aux services 68% revenus faibles à moyens** financiers. Le niveau d’usage de ces services s’avère basique4 pour 40 pour cent des particuliers et 51 pour cent des entreprises5. Les particuliers à bas revenus, les auto- entrepreneurs et les très petites entreprises représentent les catégories les moins 1 million d’entreprises*** incluses financièrement. Les régions situées hors des grands pôles économiques de des entreprises sont des l’Est du pays – notamment le Grand Tunis, Sousse, Sfax et Nabeul – semblent par ailleurs défavorisées. 87% auto-entrepreneurs** des entreprises sont Le manque de confiance vis-à-vis des institutions financières et le faible niveau concentrées dans les d’éducation financière constituent les principaux freins à l’essor de l’inclusion 82% régions du Grand Tunis financière en Tunisie. Ce constat est particulièrement avéré parmi les populations et de l’Est les moins incluses qui perçoivent les services financiers comme étant coûteux, des entreprises sont complexes, manquant de transparence et ne répondant pas à leurs besoins spécifiques. 30% informelles** Les résultats de ces sondages et les analyses menées ont permis d’identifier une Sources : *Institut National des Statistiques (INS), ** Estimations basées sur les résultats de l’enquête de IFC. *** Registre National série d’opportunités qui s’offre aux acteurs du marché. La saisie de ces opportunités des Entreprises (RNE) favoriserait la réduction des disparités et contribuerait au développement de l’inclusion financière au profit de 7,5 millions de particuliers, 694 000 entreprises formelles6, 500 000 agriculteurs et 800 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger (TRE), tout en générant près de 10,3 milliards de dinars (3,2 milliards de dollars) de revenus bruts pour les acteurs du marché. Ces opportunités proviennent principalement des services d’accès aux comptes, des paiements et transferts digitaux, du financement, de l’assurance et des services non financiers. 1 Le pays a connu une succession de 10 gouvernements depuis janvier 2011, tandis que la croissance moyenne Afin d’atteindre le plein potentiel du marché tunisien, les acteurs du marché annuelle du PIB a été de 1 pour cent pour la période gagneraient à adapter leurs offres aux besoins spécifiques des particuliers et 2011-2020. 2 Institution financière formelle: Banques, La Poste, des entreprises ayant un accès et un usage financiers limités. Le développement Institutions de microfinance et assurances. de l’usage des canaux digitaux et la digitalisation des services et des processus 3 Étude sur l’inclusion financière en Tunisie, Ministère permettraient aux institutions financières et autres acteurs du marché de réduire des Finance, 2018. Ces chiffres diffèrent de ceux leurs coûts de distribution et d’exploitation et leur donneraient par conséquent plus de l’enquête Findex 2021 du Groupe de la Banque Mondiale qui situe le taux de détention d’un compte à de marge pour réduire leurs tarifs. De même, des efforts accrus de communication et 37 % pour les Tunisiens adultes, inchangé par rapport de sensibilisation contribueraient à l’amélioration du niveau d’éducation financière à 2017. Les méthodologies et les échantillons des trois et à la réduction du déficit général de confiance. La mise en place de partenariats études citées diffèrent et les chiffres clés ne sont donc entre acteurs du marché contribuerait également à stimuler les ventes croisées et pas directement comparables. 4 Usage basique des services financiers: pour les permettrait ainsi aux institutions financières d’atteindre de nouveaux segments de particuliers, il s’agit typiquement de 2 produits marché. (principalement un compte de dépôt ou une assurance obligatoire) et une incapacité à constituer Une coordination efficace entre les différents acteurs publics et privés est par ailleurs une épargne. Parmi les entreprises l’usage basique se réfère généralement à une assurance obligatoire primordiale. Bien que la Banque Centrale de Tunisie (BCT) et le Ministère des alors que l’accès aux comptes de dépôt est limité. Finances (MdF) aient lancé plusieurs initiatives au cours des dernières années, des 5 Estimations basées sur les résultats des sondages efforts additionnels s’avèrent nécessaires pour améliorer la gouvernance de l’inclusion menés en 2021. La classification est basée sur un financière à travers une étroite coordination entre les parties prenantes. Il est aussi modèle mesurant le niveau d’inclusion financière conçu dans le cadre de cette étude. question d’accélérer les réformes en cours et d’assouplir certaines contraintes 6 L’inclusion financière pourrait être également règlementaires pour favoriser l’émergence de nouveaux acteurs disruptifs. améliorée pour 206 000 entreprises informelles à travers ces opportunités, principalement au profit des La conjugaison de tous ces efforts stimulerait l’inclusion financière, offrirait davantage entreprises individuelles et des très petites entreprises. d’opportunités aux acteurs du marché, et renforcerait ainsi l’économie tunisienne. 1 Particuliers Résidents Entreprises La population tunisienne atteint 12 millions d’individus, Ce marché compte approximativement 1 million d’entreprises, vivant principalement en zone urbaine (70 pour cent) et majoritairement des auto-entrepreneurs (87 pour cent), dans les gouvernorats côtiers de l’Est du pays (70 pour cent). situées pour la plupart dans le Grand Tunis et la région de l’Est (82 pour cent). S’agissant des très petites entreprises, l’informalité9 atteint 26 pour cent alors qu’elle est de 40 pour cent parmi les auto- entrepreneurs. Les entreprises les moins incluses financièrement sont les auto-entrepreneurs, en particulier dans les secteurs de la construction, du commerce, de l’hôtellerie et de la restauration. Le marché des particuliers résidents compte 8,4 millions d’adultes âgés de plus de 18 ans, pour lesquels il est estimé7 que: 50% 47% 56% N’ont pas de revenus Gagnent moins de Sont utilisateurs ou ont des revenus 500 dinars par mois d’internet volatiles et irréguliers (156 dollars) Près de la moitié des particuliers résidents n’ont aucun accès ou ont un accès et un usage basiques des services financiers8. 87% 82% 26% 40% Niveau d’inclusion financière Complètement exclus : 9 pour cent (0,8 million) n’ont aucun accès ou usage des services financiers formels (pas même une assurance obligatoire ou une couverture sociale). Ce sont principalement des jeunes, des femmes, adultes avec un niveau de scolarisation limité, D’auto- Des auto- vivant dans des zones rurales, chômeurs ou ayant une activité entrepreneurs entrepreneurs sont informels professionnelle vulnérable, ayant un bas niveau de revenus (moins D’entreprises Des très petites de 500 dinars par mois). situées dans le entreprises sont Grand Tunis et la informelles Basique : 40 pour cent (3,3 millions) ont un accès et un usage région de l’Est basiques des services financiers, typiquement 2 produits (principalement un compte de dépôt ou une assurance obligatoire). Niveau d’inclusion financière Ce sont, de manière disproportionnée, des femmes, avec un niveau de scolarisation limité à la base, en début de carrière, gagnant un revenu faible à moyen (moins de 1 000 dinars par mois) et Complètement exclus : 29 pour cent n’ont aucun accès ou usage des généralement pas en mesure de constituer une épargne. services financiers (pas même une assurance obligatoire). Ce sont principalement des auto-entrepreneurs. Moyen : 35 pour cent (2,9 millions) ont accès à 1 ou 2 produits par catégorie (comptes, moyens de paiements, assurance), dont la moitié a un accès au crédit. Ce groupe est principalement composé Basique : 51 pour cent ont généralement souscrit à une assurance d’employés vivant en milieu urbain, en milieu de carrière et de obligatoire alors que l’accès aux comptes de dépôt est limité à une retraités (hommes), avec une formation de niveau secondaire à entreprise sur cinq. Ce groupe est principalement composé d’auto- universitaire qui gagnent un revenu mensuel moyen compris entre entrepreneurs et de très petites entreprises. 1 000 et 1 999 dinars. Élevé : 15 pour cent (1,3 million) ont généralement plusieurs comptes, un accès au crédit, 3 moyens de paiement en moyenne Moyen : 17 pour cent des entreprises ont, toutes, des comptes de et 2 produits d’assurance. Cette catégorie est principalement dépôt et plusieurs produits d’assurance, alors que les trois quarts des composée d’hommes vivant en zones urbaines, d’employés en entreprises ont un accès au crédit. milieu de carrière et de retraités ayant fait des études supérieures et gagnant un revenu mensuel moyen entre 2 000 et 2 999 dinars. Étendu : 1 pour cent (0,1 million), cette catégorie est limitée à un Élevé : 3 pour cent ont généralement accès à plusieurs comptes groupe minoritaire qui a accès et utilise tous les types de produits, et à d’autres services financiers tels que le crédit, l’assurance et les y compris les services financiers digitaux. Ce groupe minoritaire paiements. est principalement composé de personnes à revenu élevé dépassant les 3 000 dinars par mois, de sexe masculin, vivant dans les zones urbaines, ayant un niveau d’éducation et une situation professionnelle très avancés. Globalement, le genre ne semble pas impacter le taux global Dans l’ensemble, l’étude a confirmé une d’inclusion financière dans la mesure où 92 pour cent des corrélation positive entre la taille de hommes ont accès à au moins un service ou produit financier l’entreprise et son inclusion financière. contre 90 pour cent pour les femmes. Néanmoins, les hommes tunisiens sont plus susceptibles de souscrire à plusieurs services financiers, ce qui se traduit par une disparité notable au niveau de l’intensité d’usage des services financiers. 2 Tunisiens Résidents à l’Étranger Agriculteurs Le marché des TRE est estimé à 1,7 million d’adultes, Le nombre total d’agriculteurs tunisiens est estimé majoritairement des hommes et vivant majoritairement à environ 500 000, dont environ la moitié ont 50 en Europe. ans et plus. Par rapport aux locaux, les TRE ont tendance à utiliser moins d’espèces pour les paiements et à avoir plus d’engouement 82% pour la digitalisation: 94% 46% 62% 74% 64% 81% 69% Des agriculteurs Des agriculteurs n’ont Des exploitations sont des hommes pas été scolarisés ou n’excèdent pas 5 n’ont qu’un niveau hectares primaire d’éducation Des TRE Des Des TRE Des Tunisiens Tunisiens particuliers particuliers résidents résidents 80% 56% utilisent des cartes intéressés par un service de paiement complet de banque en ligne Des exploitations sont Des agriculteurs concentrées dans les détiennent des comptes 63 pour cent des Tunisiens Résidents à l’Étranger régions du Nord et du au sein des banques et/ Centre ou La Poste détiennent des comptes au sein d’institutions financières nationales; principalement des banques. L’épargne est le principal motif de détention de comptes. Le manque de confiance vis-à-vis des institutions financières et le faible niveau d’éducation financière constituent les principaux obstacles à l’inclusion financière des agriculteurs. “ La conjugaison de tous ces efforts stimulerait l’inclusion financière, offrirait davantage d’opportunités aux acteurs du marché et 7 Source : résultats du sondage. 8 Basé sur le score d’inclusion financière conçu dans le cadre de cette étude (cf. section relative à la renforcerait ainsi l’économie présentation de méthodologie pour plus de détails). 9 Entreprises qui ne sont pas enregistrées auprès d’une structure gouvernementale comme indiqué tunisienne. par la personne interrogée durant le sondage. 3 Aperçu de l’inclusion financière en Tunisie L’inclusion financière a progressé en Tunisie au cours de ces du cash au niveau des distributeurs automatiques de billets (DAB). dernières années. En général, les transactions en cash demeurent prédominantes. Ainsi, deux tiers des entreprises (67 pour cent) utilisent uniquement Les résultats du sondage révèlent une amélioration de l’inclusion le cash pour leurs transactions et si 64 pour cent des particuliers financière depuis 201810. À titre d’exemple, la détention de comptes utilisent des alternatives à l’argent liquide comme les mandats par les adultes auprès des banques et de La Poste a respectivement postaux et les paiements par carte, la fréquence de leur utilisation progressé de 33 à 49 pour cent, et de 32 à 35 pour cent en 2021. Cette reste très limitée, à savoir une à deux fois par mois. Parmi les progression s’inscrit dans la continuité de la tendance positive déjà entreprises, les auto-entrepreneurs et les très petites entreprises observée entre 2011 et 2017, période durant laquelle la détention de sont les plus concernés. La souscription aux produits d’assurance est, comptes par les particuliers âgés de plus de 15 ans a évolué de 24 à 37 quant à elle, principalement stimulée par les produits obligatoires pour cent11. Le taux de détention de comptes auprès d’institutions de comme l’assurance automobile. microfinance (IMF) a, quant à lui, pratiquement doublé passant de 5 pour cent en 2018 à 9,7 pour cent en 2021. Cet accès limité et cet usage basique des services financiers sont plus prononcés dans les régions du Sud et de l’Ouest ainsi que L’amélioration de l’inclusion financière semble être étroitement dans les zones rurales. Alors que la détention de compte parmi les liée aux récentes initiatives menées par les autorités. particuliers atteint les 63 pour cent dans le Grand Tunis par exemple, elle ne dépasse pas les 35 pour cent dans le Centre Ouest. Aussi, la Ces dernières années, le gouvernement a multiplié les actions visant détention de compte est en moyenne de 56 pour cent dans les zones à améliorer l’inclusion financière. Ces efforts s’appuient notamment urbaines, alors qu’elle ne dépasse pas les 30 pour cent dans les zones sur la Stratégie Nationale d’Inclusion Financière (SNIF) de 2016 et sur rurales. la mise à jour de la réglementation bancaire. Revue en 2018, la SNIF s’est traduite par de multiples initiatives telles que la réglementation Le manque de confiance envers les institutions financières, le coût sur les établissements de paiement (EdP), le lancement des services des services et le niveau limité d’éducation financière figurent de paiement mobiles, la fusion en cours des associations de parmi les principales barrières à l’inclusion financière. microfinance en institutions régionales ainsi que l’élaboration d’un nouveau code des assurances. Les résultats de l’enquête soulignent un manque de confiance des clients et des prospects vis-à-vis des institutions financières hors La L’initiative de de-cashing menée par la BCT a été lancée en 2017 Poste, avec des niveaux de confiance variant entre 37 et 57 pour cent, afin de réduire l’usage du cash dans le cadre des paiements et de comme indiqué dans le tableau 1. Pour l’ensemble des catégories de l’épargne informelle12. Par ailleurs, le gouvernement a entrepris la population, les principales raisons citées justifiant ce manque de des actions spécifiques durant la pandémie de COVID-19 qui ont confiance sont le coût des services perçu comme élevé, l’historique permis de digitaliser le transfert des aides octroyées par l’État aux des incidents non résolus, la complexité des services et l’opacité des particuliers à travers des portefeuilles électroniques, attirant ainsi procédures. Toutefois, La Poste fait figure d’exception puisqu’elle près de 420 000 utilisateurs auprès de La Poste. bénéficie d’un niveau de confiance de 80 pour cent toutes catégories interrogées confondues, probablement en raison du moindre coût et Néanmoins, l‘accès aux services financiers et leur usage de la simplicité perçue des procédures et des produits. demeurent limités pour certains segments de la population et zones géographiques. Tableau 1 : Niveau de confiance envers les institutions financières par catégorie interrogée, %, 2021 Alors que l’inclusion financière semble progresser, certains segments de la population demeurent en retrait. Les résultats du sondage indiquent que 9 pour cent des particuliers et 29 pour cent des entreprises n’ont aucun accès ou usage des services financiers. Particuliers Tunisiens Entreprises Agriculteurs Parmi ceux qui sont clients d’institutions financières, beaucoup Résidents Résidents à ont un accès et un usage assez restreints des services et produits l’Étranger financiers. Quatre particuliers sur 10 et un peu plus de la moitié des entreprises (51 pour cent) détiennent réellement un ou deux Institutions de Non Non 49% 48% produits financiers tels qu’un compte de dépôt, une solution de Microfinance applicable applicable paiement ou une assurance obligatoire. Les catégories les moins incluses sont majoritairement les particuliers à bas revenus, les Assureurs 54% 37% 55% 52% auto-entrepreneurs et les très petites et petites entreprises. Banques 57% 55% 46% 56% Le principal usage des comptes de dépôt pour les particuliers est lié au retrait du cash, notamment suite à la réception des salaires, Établissements Non Non Non 37% de Leasing applicable applicable mesuré des pensions de retraites ou des aides sociales. Cette tendance se confirme également auprès des particuliers détenant des cartes de La Poste 84% 69% 75% 88% débit qui utilisent 75 pour cent de leurs transactions pour retirer 4 Le manque d’éducation financière, au niveau des particuliers, des via des prêts bancaires (38 %), le marché obligataire local (24 %) et, très petites, petites et moyennes entreprises (TPME), ainsi que dans une moindre mesure, via des institutions de financement du des agriculteurs constituent un défi qu’il conviendra de surmonter développement (IFD). Les possibilités réduites de refinancement afin de stimuler le développement de l’inclusion financière. À limitent par conséquent leur appétit au risque et l’élargissement de titre d’exemple, 61 pour cent des particuliers et 54 pour cent des leurs portefeuilles. agriculteurs jugent les produits d’assurance trop complexes, 35 pour cent des particuliers uniquement connaissent le concept de wallet et Les banques sont également le principal pourvoyeur de fonds de 14 pour cent des entreprises connaissent le concept de financement capital-risque, les investissements étant principalement encouragés alternatif. Cela n’empêche pas la majorité des clients des banques par des avantages fiscaux14. Cependant, les fonds de capital-risque et de La Poste de manifester un grand intérêt pour les services sont en majeure partie orientés vers des entreprises matures de financiers digitaux qui représentent une alternative aux canaux de taille moyenne, généralement dans le secteur manufacturier, distribution traditionnels, tel que présenté dans le tableau 2. tandis que les entreprises les moins incluses financièrement sont majoritairement des auto-entrepreneurs, des très petites et petites Les conclusions des sondages soulignent également que pour entreprises du secteur des services. l’ensemble des catégories, les clients existants et potentiels s’attendent à des services financiers moins coûteux, plus Les acteurs financiers adressant les populations les moins transparents, plus accessibles et plus simples à souscrire et à utiliser. incluses, comme La Poste et les IMF, font face à des défis structurels qui entravent leur développement. Tableau 2 : Intérêt pour les solutions financières entièrement numériques parmi les clients des Banques et de La Poste La Poste, acteur public majeur du secteur financier, est un vecteur important d’inclusion financière. L’institution détient 2 millions de comptes courants, 4 millions de comptes d’épargne en 202015 et un réseau de 1 054 agences, y compris dans les régions non ciblées par les banques. La Poste est aussi un pionnier des services financiers Particuliers Tunisiens Entreprises Agriculteurs Résidents Résidents à digitaux, avec plusieurs initiatives développées depuis 2010 telles l’Étranger que les solutions de mobile money, l’application de portefeuille mobile D17 et la plateforme numérique myPoste permettant de 72% 72% 81% 72% gérer tous les services financiers à distance. Cependant, n’étant pas autorisée à distribuer de crédits, La Poste perdrait des clients ayant Les institutions financières se concentrent principalement un besoin de financement. La Poste a d’ailleurs soumis une demande sur les personnes à revenus moyens à élevés et sur les grandes d’autorisation en vue de créer sa propre banque. Cette demande est entreprises, avec peu d’efforts en faveur des populations les actuellement en cours d’examen. moins incluses. Le secteur de la microfinance s’est considérablement développé Les banques publiques, avec environ un tiers des portefeuilles de au cours de ces dernières années avec un taux de croissance crédits13, ont principalement financé, ces dernières années, les annuel moyen de 19,7 pour cent entre 2010 et 202116. En général, entreprises détenues par l’État et le déficit public, délaissant ainsi les opérateurs du secteur de la microfinance rencontrent des les populations les moins incluses financièrement. Les deux autres difficultés dans le cadre de leur refinancement. Les associations de tiers du portefeuille de crédit sont détenus par des institutions microfinance dépendent exclusivement des lignes de refinancement financières étrangères et locales qui ont généralement peu d’appétit de la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS) qui n‘ont pas dépassé les pour les segments considérés comme risqués. 101 millions de dinars (31 millions de dollars) en 202017. Les principales institutions financières, telles que les banques et “ les compagnies d’assurance, ont historiquement concentré leurs activités sur les particuliers à revenus moyens à élevés, ainsi que sur les grandes entreprises. Elles ont également densifié leurs réseaux d’agences dans les pôles économiques les plus développés du Grand Tunis et d’autres régions de l’Est, au détriment des régions de l’Ouest et des zones rurales. Des offres ciblant les particuliers et Les résultats de l’enquête indiquent que l’inclusion financière s’est améliorée en Tunisie depuis 2018. “ les entreprises les moins inclus financièrement ont commencé à émerger, notamment des offres de produits et services adaptées aux besoins des TPME ainsi que des agences spécialisées et des comptes gratuits avec des cartes prépayées. Les banques représentent l’une des plus importantes parties prenantes du secteur de l’assurance, contrôlant 11 des 18 compagnies  tude sur l’inclusion financière en Tunisie, Ministère des Finances, 2018. 10 É d’assurance du marché. Traditionnellement, les assureurs se sont 11 Pour les particuliers âgés de 15 ans et plus, Findex, Banque Mondiale. Il est à concentrés sur les produits obligatoires (Non-Vie) et les offres noter que ce taux de détention de comptes pour les plus de 15 ans mesuré au niveau du Findex 2021 publié en juin 2022 demeure stable à 37 pour cent. d’Assurance-Vie pour les personnes à revenus élevés. Les assureurs 12 https://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/actualites.jsp?id=393. ont récemment commencé à numériser la souscription des produits 13 Banque Centrale de Tunisie, Rapport sur la supervision bancaire, 2020. et la gestion des sinistres, et à adresser les populations à plus faibles 14 83 pour cent des ressources, Association Tunisienne des Investisseurs en Capital (ATIC), rapport annuel, 2020. revenus avec des produits de micro-assurance-crédit distribués en 15 Source : La Poste, Rapport annuel 2020. Les chiffres ne reflètent pas le nombre partenariat avec les IMF. exact de clients actifs : 1 client peut détenir plusieurs comptes et les comptes ne sont pas tous actifs. Selon le sondage IFC réalisé auprès des particuliers en Les banques détiennent par ailleurs des participations majoritaires 2021, 35 pour cent de la population adulte détient des comptes à La Poste, ce qui correspondrait à 2,94 millions d’individus. dans quatre des huit sociétés de leasing qui proposent 16 Source: données de l’Autorité de Contrôle de la Microfinance (ACM). principalement du crédit-bail. Les sources de refinancement de ces 17 Source: BTS, rapport annuel 2020. entités étant limitées par la règlementation, elles se refinancent 5 Opportunités de marché pour les acteurs du secteur financier Cette étude met en lumière un déséquilibre significatif entre l’offre et la demande. Ce déficit se traduirait en opportunités pouvant atteindre jusqu’à 7,5 millions de particuliers résidents en Tunisie, 694 000 entreprises formelles, 800 000 Tunisiens résidents à l’étranger et 500 000 agriculteurs, et des revenus bruts supplémentaires de 10,3 milliards de dinars (3,2 milliards de dollars) pour les acteurs financiers. Les entreprises informelles expriment également un fort engouement pour les services financiers et représentent un potentiel d’environ 111 millions de dinars (31 millions de dollars). Toutefois, il s’agit d’une opportunité à long terme dans la mesure où l’accès aux services financiers requiert généralement un niveau minimum de formalité. Particuliers Résidents L’amélioration de l’inclusion financière de 7,5 millions de particuliers à revenus bas ou moyens générerait 6,1 milliards de dinars (1,9 milliard de dollars) de revenus bruts pour les acteurs du secteur financier. Bien que leurs besoins diffèrent selon les types de services, les particuliers s’accordent sur des attentes communes relatives à la transparence, au prix, à l’accessibilité et à la simplicité des services. Ils expriment également le souhait d’adopter des services digitaux. L’accès aux comptes transactionnels18 combinés à des moyens digitaux de paiement et de transfert, l’épargne, l’assurance et le crédit constituent les principales opportunités pour les acteurs du secteur financier. Tableau 3 : Opportunités pour les acteurs du secteur financier ciblant les particuliers Principaux types d’institutions financières concernées par ces opportunités Revenus Opportunité (Millions Banques La EdP IMF Assureurs Poste TND) Comptes transactionnels avec des services digitaux de paiements et 300 de transferts domestiques Services de micro-épargne 19 Crédits pour financer des achats immobiliers ou le lancement 3 600 d’activités économiques Services de micro-assurance 130 Assurance santé complémentaire 2 100 Produits et services pouvant être fournis directement par l’institution financiére Produits et services pouvant être distribués en partenariat avec d’autres acteurs Des comptes transactionnels avec des services digitaux de paiements et de transferts domestiques bénéficieraient à 2,6 millions de particuliers. Les résultats de l’enquête montrent que 36 pour cent des particuliers utilisent uniquement le cash pour régler leurs transactions. Concernant le commerce électronique, l’utilisation du cash reste à un niveau plus élevé avec 83 pour cent des transactions réglées en espèces. Par ailleurs, parmi les clients des banques et de La Poste, environ la moitié seulement détient des cartes de débit ou de crédit. Le niveau élevé d’utilisation de l’espèce pourrait en partie s’expliquer par des problématiques d’infrastructure. À titre d’exemple, 45 pour cent des terminaux de paiement installés sont hors service et environ 25 pour cent des guichets automatiques de La Poste sont en général interrompus en raison de problèmes techniques19. Cependant, 57 pour cent des particuliers, qui règlent leurs transactions exclusivement en espèces, seraient intéressés par l’adoption de moyens de paiement digitaux, à condition qu’ils soient moins coûteux, facilement 6 accessibles et plus sûrs. Les institutions financières gagneraient Le marché tunisien de l’assurance demeure peu développé, avec à exploiter cette opportunité en fournissant des comptes des primes atteignant environ 235 dollars par habitant22 en 2019, transactionnels à prix réduits, avec des fonctionnalités de paiement contre 318 dollars pour le Maroc et 4 649 dollars en France. Le marché de base via des cartes de débit et/ou des portefeuilles électroniques. a pendant longtemps été principalement porté par des produits Il conviendra de mettre à profit la digitalisation pour accélérer la obligatoires, tels que la couverture santé de la Caisse Nationale souscription aux services, simplifier les procédures e-KYC et réduire d’Assurance Maladie (CNAM) et l’assurance automobile. Toutefois, le les coûts opérationnels. Les opérations de cash in/out seraient secteur s’achemine vers un renforcement des offres d’assurance-vie ainsi facilitées grâce aux réseaux d’agents et aux gestionnaires en raison de la volonté des compagnies d’assurance d’élargir leurs automatiques de billets. portefeuilles à des produits plus rentables. Pour attirer davantage de clients, les assureurs devront remédier au manque de confiance La micro-épargne inciterait 4 millions de particuliers à bas ou général, à une perception de coûts élevés des services offerts et à des moyens revenus à déposer 800 millions de dinars (249 millions de produits et des procédures jugés complexes. dollars) auprès des institutions financières. L’assurance maladie complémentaire améliorerait la couverture La crise économique perdure depuis une décennie dans le pays. d’environ 6 millions de personnes tout en générant jusqu’à 2,1 Aggravée par les conséquences de la pandémie du COVID-19, elle a milliards de dinars (660 millions de dollars) de primes brutes pour engendré un taux de chômage persistant d’environ 16 pour cent et les acteurs du marché. a impacté la situation financière de nombreux ménages. L’épargne brute a chuté à 5 pour cent du PIB en 2020, contre 21 pour cent en Les trois quarts des adhérents de la CNAM interrogés se disent 201020. Un tiers des personnes interrogées conserve son épargne insatisfaits de la couverture fournie par la Caisse, qui compte sous forme d’espèces à la maison, pour des raisons de commodité environ 8 millions d’adhérents. De même, tout comme les deux et de disponibilité en cas d’urgence. Les offres d’épargne proposées autres caisses de sécurité sociale (Caisse Nationale de Sécurité actuellement par les banques et La Poste impliquent le dépôt et Sociale (CNSS) et Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance le retrait des fonds dans des agences physiques par les clients. Sociale (CNRPS)), la CNAM rencontre des défis financiers Cela occasionne des frais de transport, du temps d’attente et des structurels qui limitent sa capacité à faire face à l’inflation des contraintes supplémentaires liées notamment à des horaires coûts de santé. L’écart qui en résulte (entre les coûts réels et les restreints d’ouverture. Cette situation décourage particulièrement honoraires et remboursements par la CNAM) est estimé à plus les micro-épargnants. La mise en place de partenariats entre acteurs de 50 pour cent des frais de santé supportés par les adhérents23. financiers contribuerait à l’essor de la micro-épargne. Il s’agit en Dans ce sens, les compagnies d’assurance pourraient nouer effet de proposer des offres d’épargne adaptées aux besoins (via des partenariats avec la CNAM pour concevoir et proposer une un modèle individuel ou collectif), des canaux digitaux fluidifiant assurance maladie complémentaire. la souscription et la gestion des produits, ainsi que des réseaux d’agents et des gestionnaires automatiques de billets facilitant les La micro-assurance attirerait ainsi 3 millions de particuliers et dépôts et les retraits. générerait près de 130 millions de dinars (41 millions de dollars) de revenus pour les acteurs du marché. Un portefeuille de crédits de 26 milliards de dinars (8 milliards de dollars) bénéficierait à 1,5 million de particuliers générant jusqu’à Parmi les personnes interrogées, 39 pour cent ont exprimé un 3,6 milliards de dinars (1,1 milliard de dollars) d’intérêts bruts21. intérêt pour les produits de micro-assurance. Les personnes à faibles ou moyens revenus (inférieurs à 1 000 dinars par mois) Les résultats de l’enquête révèlent que 72 pour cent des individus sont celles qui manifestent le plus d’engouement. L’objectif est de ont recours au crédit, dont la moitié emprunte exclusivement auprès réduire leur exposition au risque via une couverture compatible de créanciers informels tels que la famille, les amis et les épiciers. avec leurs capacités financières. Ces produits couvriraient des Les personnes à faibles revenus, gagnant moins de 500 dinars par risques divers tels que le décès du chef de famille, des accidents, mois, sont celles qui ont particulièrement recours à ce type de des blessures ou des maladies entraînant une invalidité partielle financement informel. Les personnes ayant des revenus supérieurs ou totale, ou encore des risques liés à des biens tels que des à 1 000 dinars par mois s’orientent principalement vers les banques. logements ou des petits équipements. Les IMF pourraient jouer Les IMF visent quant à elles principalement les personnes à faibles et un rôle majeur dans la distribution de ces produits auprès des moyens revenus (inférieurs à 1 000 dinars). segments cibles, en partenariat avec les assureurs. La digitalisation est également un levier clé permettant la baisse des coûts de Environ quatre personnes interrogées sur dix (39 pour cent) distribution et de gestion. expriment un besoin de financement dans les douze prochains mois, principalement pour lancer une entreprise ou acquérir un logement. Ces besoins représentent une opportunité potentielle pour les banques et les IMF d’environ 20,7 milliards de dinars (6,5 milliards de dollars) et 5,3 milliards de dinars (1,7 milliard de dollars) respectivement. Pour saisir cette opportunité de marché, les acteurs financiers gagneraient à capitaliser sur la digitalisation afin de 18 C ompte transactionnel : compte utilisé pour effectuer des opérations baisser les coûts de distribution et de gestion, ainsi que sur des courantes de paiement, d’encaissement, de transfert. Il peut s’agir d’un moyens innovants d’évaluation des risques de crédit basés sur les compte bancaire, d’un compte postal ou d’un compte détenu auprès d’un données. En effet, il conviendrait de proposer des offres sur mesure, établissement de paiement. 19 Source : statistiques collectées auprès de La Poste et de Monétique Tunisie. une tarification adaptée en fonction du risque, des procédures 20 Banque Mondiale Open Data. administratives simplifiées, des exigences de garanties allégées 21 Les taux d’intérêt appliqués sont les suivants: 9,7% appliqué pour 20,7 en fonction des cas, et par conséquent des montants de crédit plus milliards de dinars fournis par les banques conformément au taux d’intérêt moyen au second semestre 2021 selon la Banque Centrale de Tunisie, et 30% élevés pour mieux répondre aux besoins de la clientèle. pour 5,3 milliards de dinars fournis par les IMF sur la base des estimations du secteur. 22 Converti à la parité de pouvoir d’achat. 23 Source : Estimations réalisées au cours de l’étude. 7 Tunisiens Résidents à l’Étranger Des services financiers ciblant 830 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger généreraient 1,9 milliard de dinars (590 millions de dollars) de revenus bruts pour les acteurs financiers tunisiens. Les principales opportunités pour ce segment portent sur les solutions digitales de paiements et de transferts internationaux, l’épargne, le crédit et l’assurance multi-risques habitation. Tableau 4 : Opportunités pour les acteurs financiers ciblant les TRE Principaux types d’institutions financières concernées par ces opportunités Revenus La Opportunité (Millions Banques EdP Assureurs Poste TND) Comptes transactionnels avec des services digitaux de paiements et 15 de transferts domestiques Offres d’épargne en devises en 22 Tunisie Transferts internationaux vers la 7 Tunisie Crédits pour financer des achats immobiliers ou le lancement 1 800 d’une activité économique Assurance multi-risques habi- 58 tation Produits et services pouvant être fournis directement par l’institution financière Produits et services pouvant être distribués en partenariat avec d’autres acteurs Environ 220 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger augmenteraient leur épargne en Tunisie de 1,1 milliard de dinars (340 millions de dollars) moyennant des incitations qui répondraient à leurs attentes. 63 pour cent des TRE interrogés dans le cadre de cette étude détiennent des comptes auprès d’institutions financières tunisiennes, la plupart étant des comptes bancaires. Le motif principal de la détention de comptes bancaires en Tunisie est l’épargne. L’épargne détenue par les Tunisiens Résidents à l’Étranger est relativement plus stable et sert à financer des besoins à moyen et long terme, notamment la retraite. 45 pour cent des répondants sont prêts à augmenter leur épargne auprès des institutions financières tunisiennes s’ils perçoivent de meilleurs rendements et un accès facilité à leurs fonds. Les offres existantes sur le marché semblent être en deçà de ces attentes et doivent être repensées en conséquence. Bien que La Poste et les banques proposent des comptes d’épargne dédiés aux TRE, les processus d’ouverture et de gestion de ces comptes sont partiellement digitalisés et ne peuvent être intégralement gérés à distance. La disponibilité d’un chargé de clientèle dédié apparait ainsi comme le critère le plus important dans le choix d’une banque pour 41 pour cent des répondants. Plusieurs banques mettent effectivement à disposition des chargés de clientèle spécialisés dédiés aux TRE. Néanmoins, 23 pour cent des clients existants déclarent être insatisfaits des services notamment en raison de la mauvaise qualité de gestion de la relation. La Poste quant à elle ne dédie pas de chargés de clientèle spécialisés, ni pour les particuliers en Tunisie, ni pour les Tunisiens Résidents à l’Étranger. Par ailleurs, les produits d’épargne en devises étrangères sont généralement peu rémunérateurs, et peuvent s’avérer complexes et coûteux en termes de gestion. Des comptes transactionnels en devises couplés aux solutions digitales de paiement et de transfert intéresseraient 420 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger. Environ un quart des TRE interrogés règlent leurs transactions exclusivement en espèces lorsqu’ils sont en Tunisie. Même si cette proportion est inférieure à celle des résidents (36 pour cent), une utilisation plus répandue des paiements digitaux par les TRE devrait être possible puisque ces TRE vivent principalement dans des pays dotés d’écosystèmes favorisant le paiement digital. Le recours à l’utilisation du cash dans le pays d’origine est lié à la perception du coût élevé des moyens alternatifs de paiement, au manque de terminaux de paiement électronique et aux difficultés perçues de souscription aux cartes locales. Alors que ces contraintes sont partagées par 8 les résidents, les TRE en visite en Tunisie sont également confrontés au coût de change lorsqu’ils utilisent des cartes émises par des banques étrangères. Ils seraient toutefois plus enclins à utiliser des moyens digitaux de paiement tels que les cartes et les wallets si les institutions financières revoyaient les frais à la baisse, avec des processus de souscription simplifiés, et une acceptation plus répandue par les commerces de ces moyens de paiement. Au moins 250 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger seraient intéressés par des services de transferts internationaux facilement accessibles, sécurisés et à faible coût. Les transferts de fonds de la diaspora tunisienne ont atteint un record exceptionnel de 7,5 milliards de dinars (2,3 milliards de dollars) en 202124, soit une augmentation de 28 pour cent par rapport aux 5,8 milliards de dinars en 2020 (alors équivalent à 5,3 pour cent du PIB). Les services de transfert formels dominent : 80 pour cent des répondants à l’enquête transfèrent leurs fonds par le biais d’acteurs financiers formels. Alors que les utilisateurs des services de transfert de fonds formels déclarent être généralement satisfaits compte tenu de la rapidité et de la simplicité des services, le coût est perçu comme étant élevé. Cette perception concernerait 20 pour cent des TRE qui transfèrent leurs fonds par des canaux informels. La mise en place de canaux de transferts instantanés et moins coûteux devrait drainer davantage de fonds vers les canaux formels et les institutions financières en attirant les utilisateurs privilégiant le coût. Ce type de services est déjà fourni par de nouveaux acteurs internationaux25 sur d’autres marchés (contrairement à la Tunisie), concurrençant ainsi les banques et les sociétés traditionnelles de transfert d’argent, grâce à une politique de tarification attractive. Un portefeuille de crédits de 21 milliards de dinars (6,5 milliards de dollars) permettrait de répondre aux besoins de financement de 160 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger. Seuls 14 pour cent des TRE interrogés ont déjà obtenu un crédit auprès d’une institution financière en Tunisie et notamment auprès d’une banque. Une proportion comparable (18 pour cent) a exprimé un besoin de financement dans les douze prochains mois, principalement pour l’achat d’un bien immobilier ou le financement d’une entreprise en Tunisie. Alors que plusieurs banques proposent déjà des crédits immobiliers dédiés à la diaspora, les offres dédiées aux crédits aux entreprises restent limitées. Il s’avère que les TRE s’attendent à des taux d’intérêt inférieurs à ceux traditionnellement offerts - potentiellement parce qu’ils ont vécu dans un environnement de taux bas en Europe au cours de la dernière décennie. Globalement, les taux d’intérêt appliqués par les banques se situent entre 3 et 4 pour cent pour refléter le risque lié à des clients selon leur historique en matière d’emprunts. 220 000 Tunisiens Résidents à l’Étranger souscriraient à des produits d’assurance multi- risques habitation, ce qui générerait environ 58 millions de dinars (18 millions de dollars) en primes pour les compagnies d’assurance. Environ 30 pour cent des TRE interrogés détiennent déjà un produit d’assurance local, principalement une assurance automobile obligatoire. Étant donné que la majorité des TRE vivent dans des pays européens offrant des régimes de sécurité sociale étendus, couvrant la maladie et la retraite, le besoin d’assurance locale est principalement lié aux actifs physiques tels que les voitures ou les logements. Bien que de tels produits soient disponibles en général, il n’existe pas d’offres dédiées à la diaspora. La souscription à ces services et la gestion des sinistres nécessitent généralement une présence physique dans le pays. Des produits d’assurance habitation adaptés, incluant la possibilité de souscrire et de gérer les sinistres à distance via les canaux digitaux, susciteraient l’intérêt des TRE. Auto-Entrepreneurs, Très Petites, Petites et Moyennes Entreprises En bénéficiant de services adaptés, environ 694 000 auto-entrepreneurs, très petites, petites et moyennes entreprises formelles généreraient 1,3 milliard de dinars (405 millions de dollars) de revenus pour les acteurs financiers. Pour les auto-entrepreneurs et les TPME formelles, les opportunités majeures identifiées dans le cadre de cette étude portent sur l‘accès à des comptes transactionnels abordables, l’adoption de moyens de paiement digitaux, le crédit et le capital-investissement, l’assurance et les services non financiers. 24 Banque Centrale de Tunisie. 25 Exemples : Wise, Revolut, Remitly, OFX. 9 Tableau 5 : Opportunités pour les acteurs financiers ciblant les entreprises Principaux types d’institutions financières concernées par ces opportunités Revenus Sociétés de Plateformes de Investisseurs Opportunité (Millions Banques La Poste EdP Leasing / IMF financement Assureurs TND) en capital Factoring participatif Comptes transactionnels avec des services digi- ~ 75 taux de paiement et de transferts domestiques Crédit ~ 1 100 Capital Non estimé Financement participatif ~ 90 Assurance multi-risques ~ 39 Services non financiers Non estimé Produits et services pouvant être fournis directement par l’institution financière Produits et services pouvant être distribués en partenariat avec d’autres acteurs Mixte: fourniture de certains services en direct et distribution d’autres services en partenariat avec d’autres acteurs tiers La mise en place de comptes transactionnels à des coûts plus accessibles et de solutions digitales d’encaissement toucherait respectivement 302 000 auto-entrepreneurs formels et 195 000 TPME, générant un total de 77 millions de dinars (24 millions de dollars) de revenus bruts. Les résultats de l’enquête soulignent que 61 pour cent des entreprises formelles détiennent des comptes transactionnels, y compris ceux utilisés conjointement pour les besoins personnels et professionnels. La détention de comptes varie considérablement selon la taille de l’entreprise, avec un taux de détention de 58 pour cent pour les auto-entrepreneurs, de 80 pour cent pour les très petites entreprises, de 96 pour cent pour les petites entreprises et de 100 pour cent pour les moyennes et grandes entreprises. Alors que La Poste attire principalement une clientèle d’auto- entrepreneurs à faibles revenus, les entreprises à taille plus significative optent pour les banques commerciales afin de pouvoir accéder à des capitaux et à une série de services spécialisés, tel que le montre le graphique 1. À ce titre, les banques concentrent leurs efforts commerciaux sur les professions à revenus très élevés, généralement des professionnels tels que les médecins, les architectes et les avocats ou d’autres entreprises bien établies. La Poste, pour sa part, n’est pas proactive sur le segment des auto-entrepreneurs ou des très petites entreprises26. Les 39 pour cent restants n’ayant pas de comptes sont majoritairement des auto-entrepreneurs qui, pour la plupart, ne perçoivent pas l’intérêt d’ouvrir de comptes, pensent manquer des ressources financières nécessaires ou encore ne font pas confiance aux institutions financières. Graphique 1 : Détention de comptes par les entreprises formelles auprès des banques et de La Poste par taille d’entreprise, %, Enquête IFC 2021 99% 93% 67% 38% 31% 28% 18% 14% Auto-Entrepreneurs Très Petites Entreprises Petites Entreprises Moyennes Entreprises 0 employés 1 à 5 employés 6 à 49 employés 50 à 199 employés 26 Source : entretien avec La Poste Banques La Poste 10 Le cash est prépondérant au niveau des décaissements. 86 pour cent des entreprises interrogées utilisent en effet principalement de l’espèce lors des paiements. Pour les auto-entrepreneurs et les très petites entreprises, la proportion atteint les 88 pour cent, alors qu’elle baisse considérablement parmi le segment des entreprises à taille plus significative, atteignant ainsi les 18 pour cent pour les moyennes entreprises. 53 pour cent des entreprises interrogées n’utilisent aucun moyen digital pour régler leurs dépenses, s’appuyant uniquement sur des moyens de paiement non digitaux (espèces, chèques, effets de commerce, mandats postaux). Cependant, 62 pour cent d’entre elles se montrent prêtes à adopter des solutions digitales telles que les cartes, les virements et les prélèvements automatiques. Les wallets pourraient devenir la prochaine génération de méthodes de paiement, mais nécessitent davantage d’efforts de développement et aussi de communication. Pour les encaissements, 49 pour cent des entreprises interrogées n’utilisent aucun moyen digital de paiement. Toutefois, la moitié d’entre elles est prête à adopter un mode de paiement digital pour recevoir des paiements via l’utilisation de terminaux ou de portails de paiement, des virements, des prélèvements automatiques ou des wallets. Les institutions financières pourraient saisir cette opportunité en équipant les auto- entrepreneurs, les très petites et petites entreprises de moyens digitaux de paiement fiables et simples à déployer et à utiliser avec une tarification attractive. Un financement potentiel au profit de 313 000 auto-entrepreneurs et TPME rapporterait 1,1 milliard de dinars (342 millions de dollars) de revenus bruts aux institutions financières. Seulement 26 pour cent des entreprises formelles interrogées ont confirmé avoir eu accès au crédit auprès d’institutions financières, avec de grandes disparités entre les différents segments. Seuls 22 pour cent des auto-entrepreneurs ont obtenu un crédit auprès d’institutions financières, contre 49 pour cent pour les très petites entreprises, 68 pour cent pour les petites et moyennes entreprises et 85 pour cent pour les grandes entreprises. L’enquête révèle que les petites, moyennes et grandes entreprises sollicitent principalement des financements auprès des banques et des sociétés de leasing, tandis que les auto-entrepreneurs et les très petites entreprises s’appuient principalement sur les IMF et, dans une moindre mesure, sur les banques, y compris la BTS. Les entreprises sont financièrement vulnérables lors de la première année d’activité puisque les banques les considèrent comme étant trop risquées à court terme pour bénéficier de lignes de financement. Par ailleurs, la BTS et la Banque de Financement des Petites et Moyennes Entreprises (BFPME) ne sont pas en mesure de remédier à ce déficit parce qu’elles ne disposent pas de solutions de financement à court terme. 40 pour cent des auto-entrepreneurs et des TPME interrogées, qui sont vraisemblablement éligibles pour bénéficier d’un crédit, ont exprimé un besoin de financement, principalement pour acquérir de nouveaux actifs et acheter des matières premières. Les entreprises de taille moyenne en particulier, s’attendent à des taux d’intérêt bas, à moins d’exigences en termes de garantie, et à des délais d’exécution plus courts que ceux pratiqués actuellement. Les résultats de l’enquête confirment par ailleurs que les grandes entreprises ont une meilleure connaissance des produits financiers, des exigences de qualité plus élevées et des besoins plus complexes que les autres segments. Les auto-entrepreneurs, les très petites entreprises, et les petites entreprises réclament des montants de crédit plus élevés que ceux offerts généralement par les institutions financières à ce type de segments. Face à ces attentes, les institutions financières affichent des exigences et des politiques différentes comme le montre le tableau 6. Tableau 6 : Comparaison des conditions d’accès au crédit pour les différents types d’institutions financières Taux d’Intérêt Garanties Montants Délais d’octroi 14% fixe en moyenne Leasing Pas de garanties requises Pas de restriction réglementaire en général 1 à 2 semaines en Moyenne avec plafond variable BTS 5% fixe Pas de garanties requises Jusqu’à 150 000 TND Supérieur à un mois A récemment commencé à BFPME 7 à 8% fixe De 150 000 à 15 millions TND Supérieur à un mois exiger des garanties 10% fixe en moyenne Entreprises avec un minimum de 500 000 Factoring Pas de garanties requises n/a avec plafond variable TND de chiffre d’affaires 30% fixe en moyenne Montant moyen de 4 000 TND avec un Moins d’une semaine en MFI Garanties exigées sans platond maximum autorisé de 40 000 TND général Le plus haut niveau de Crédits court terme plafonnés par la 9 à 10% variable avec Banks garantie en général (jusqu’à réglementation. Crédits moyen et long termes Supérieur à un mois plafond variable 300% de la valeur du crédit) non plafonnés Offre sans ou avec peu de restrictions Offre avec quelques restrictions Offre avec plusieurs restrictions Source : Recherche documentaire et entretiens menés par l’équipe projet. Les sources pour les taux d’intérêts sont basées sur les chiffres communiqués par la Banque Centrale de Tunisie, ou collectés durant les entretiens avec les experts et les institutions financières – Ces derniers ne constituent pas systématiquement une source officielle. 11 25 000 TPME formelles seraient intéressées par le financement par capitaux propres, pour une enveloppe globale estimée à 2,5 milliards de dinars (779 millions de dollars). Seulement 7 pour cent des TPME interrogées ont eu recours à des levées de fonds auprès d’investisseurs. Cependant, 30 pour cent des TPME manifestent un intérêt pour les solutions de capital-investissement, et se disent prêtes à faire appel à des investisseurs en capital. Actuellement, l’offre est dominée par les sociétés d’investissement à capital risque (SICAR) qui se concentrent sur les entreprises de taille moyenne du secteur manufacturier. Ces acteurs ont fait preuve d’un appétit limité pour les secteurs de l’agriculture, du commerce et des technologies, soit les secteurs rencontrant des difficultés d’accès au financement. Les SICAR se concentrent également sur les entreprises de taille moyenne en phase de croissance, alors que les capitaux investis en phases d’amorçage et de démarrage demeurent limités. Le financement participatif sous forme de crédit, de capital ou de don constituerait un moyen alternatif de financement pour plus de 28 000 auto-entrepreneurs et TPME formelles intéressés. Bien que le financement participatif soit un nouvel outil de financement, connu seulement de 13 pour cent des entreprises interrogées, il suscite déjà l’intérêt des particuliers et de potentiels investisseurs, ainsi que des entreprises ayant un accès limité au financement. Cependant, en l’absence d’un cadre règlementaire adéquat, l’offre actuelle est quasi inexistante. L’équipement de 197 000 auto-entrepreneurs et TPME formelles intéressés en couverture d’assurance multi-risques générerait environ 39 millions de dinars (12 millions de dollars) en primes brutes pour les assureurs. 41 pour cent des entreprises interrogées ont souscrit à au moins un produit d’assurance, notamment une assurance automobile obligatoire. Les auto-entrepreneurs détiennent en moyenne moins d’une police d’assurance (principalement l’assurance automobile), contre quatre polices d’assurance pour les grandes entreprises, en particulier l’automobile, l’assurance multi-risques, la responsabilité civile et la protection du transport de marchandises. Bien que ces différences soient en partie justifiées par la base d’actifs plus large et plus diversifiée des grandes entreprises, elles mettent également en exergue une appétence des assureurs pour les moyennes et grandes entreprises. Le manque de connaissances financières, la méfiance envers les compagnies d’assurance et la perception de coûts élevés limitent également la couverture d’assurance des auto-entrepreneurs et des très petites entreprises. 25 pour cent des auto-entrepreneurs et des TPME expriment le besoin de souscrire à des polices d’assurance au cours des douze prochains mois, principalement pour la couverture multi-risques et l’assurance automobile/flotte. 393 000 entreprises formelles seraient intéressées par les services non financiers27; un service qui pourrait être fourni par les institutions financières. Seules 24 pour cent des entreprises interrogées ont bénéficié de services non financiers tels que des formations. Ces services sont principalement fournis par des fournisseurs spécialisés et les IMF, avec des offres limitées au niveau des autres institutions financières. Certaines banques ont récemment commencé à fournir des services non financiers aux clients et aux non-clients par exemple, à travers des réseaux d’agences dédiées aux TPME qui offrent des formations et des conseils aux clients et aux non-clients. 50 pour cent des auto-entrepreneurs et des TPME interrogées ont exprimé un intérêt pour des services non financiers. Les services de formation et de conseil constituent des priorités absolues pour tous les segments, notamment pour développer les compétences en marketing et en commerce comme le montre le tableau 7. Les auto-entrepreneurs sont particulièrement intéressés par un accompagnement technique et entrepreneurial. Les TPME, quant à elles, ont besoin de plus de formations et de conseils en gestion (juridiques, comptables, financiers), ainsi que de solutions technologiques (exemples : ERP, comptabilité, CRM…). Tableau 7 : Classement des principaux services non financiers de formation et de conseil demandés par segment d’entreprises, Enquête IFC 2021 Auto- Très Petites Moyennes Grandes Entrepreneurs Petites Marketing & commerce (incluant e-commerce) 1 1 1 1 1 Secteur juridique, comptabilité et financement 6 2 2 2 3 Technologie 4 4 3 3 2 27  Les services non financiers sont Entrepreneuriat 3 3 4 6 4 des services de développement Technique / Artisanat 2 5 6 4 5 commercial offerts par les banques pour compléter leurs offres Accès aux marchés 7 6 5 5 - financières de base pour les TPME. Agronomie 5 - - - - Classement effectué sur la base d’une échelle de 1 à 7 (1 étant le plus souvent cité et 7 le moins souvent cité). 12 Toutes les opportunités pourraient être élargies à environ 200 000 auto-entrepreneurs, très petites et petites entreprises informelles et générer ainsi 111 millions de dinars (35 millions de dollars) en revenus bruts pour les acteurs financiers, pourvu que ces entreprises atteignent un niveau préalable de formalisme. Outre la formalité, les freins à l’inclusion financière des auto-entrepreneurs, très petites et petites entreprises informelles s’avèrent comparables à ceux relatifs aux entreprises formelles. Globalement, les entreprises informelles ont une confiance faible envers les institutions financières. Seules 51 pour cent des entreprises informelles font confiance aux banques et 58 pour cent aux assureurs. La Poste est une exception puisque le niveau de confiance atteint 76 pour cent. Le coût élevé perçu des services et l’éducation financière limitée constituent également des obstacles à l’inclusion financière. Pourtant, les entreprises informelles partagent le même intérêt pour les produits et services financiers que les entreprises formelles. 28 pour cent d’entre elles expriment un intérêt pour les comptes transactionnels à faible coût avec des méthodes intégrées de paiement et de transfert numériques. Environ 53 000, soit 17 pour cent des entreprises informelles auraient besoin de financement dans les 12 prochains mois pour un encours total de 900 millions de dinars (280 millions de dollars), tandis que 25 000 (8 pour cent) manifesteraient un intérêt pour la souscription d’une assurance multi-risques professionnelle ou d’une assurance flotte. Enfin, 56 000 (18 pour cent) entreprises informelles souhaiteraient bénéficier de services non financiers – principalement des formations en marketing, entrepreneuriat, commerce électronique et domaines techniques. Agriculteurs Les agriculteurs interrogés partagent des défis similaires à ceux des particuliers et des entreprises en termes d’accès aux services financiers. Les résultats mettent également en exergue le manque de confiance envers les institutions financières et un faible niveau d’éducation financière. Les agriculteurs s’avèrent particulièrement intéressés par des solutions digitales et une meilleure qualité des services, notamment un meilleur traitement de la part des institutions financières. En général, les institutions financières ne considèrent pas les agriculteurs comme un segment prioritaire, à l’exception des institutions publiques, comme l’illustre la distance moyenne qu’un agriculteur doit parcourir pour atteindre l’agence la plus proche d’une institution financière. En moyenne, il est nécessaire de parcourir 6 kilomètres pour atteindre La Poste, 11 kilomètres pour les banques publiques (généralement une agence de la Banque Nationale Agricole (BNA)), 15 kilomètres pour les IMF, 18 kilomètres pour les assureurs - notamment une agence de la Caisse Tunisienne d’Assurances Mutuelles Agricoles (CTAMA) - et 67 kilomètres pour les établissements de leasing28. La BNA et la CTAMA, qui ont pour mandat de soutenir les agriculteurs, ont, elles aussi, réduit leur exposition à ce segment pour des raisons de rentabilité. Le portefeuille de prêts agricoles de la BNA est passé de 51 à 35 pour cent entre 2009 et 2019, et la part des primes brutes collectées par la CTAMA auprès des agriculteurs est passée de 57 à 33 pour cent au cours de la dernière décennie. Cette situation est principalement due à trois grands types de défis structurels au sein des chaînes de valeur agricoles: (i) défis liés à l’exploitation à l’instar du manque de documents de propriété, (ii) problématiques spécifiques à l’agriculteur et notamment le niveau d’éducation peu avancé qui empêche l’utilisation de techniques agricoles modernes et, (iii) défis liés au marché, notamment l’accès limité aux marchés, la volatilité des prix, les problématiques dues à la règlementation des prix et les pressions inflationnistes croissantes sur les coûts impactant ainsi la rentabilité. Aussi, le renforcement de l’inclusion financière d’un demi-million d’agriculteurs via des services financiers et non financiers adaptés générerait 1 milliard de dinars (312 millions de dollars) de revenus bruts pour les acteurs du marché. Les principales opportunités identifiées portent sur l’épargne, les paiements digitaux, le crédit, l’assurance et les services non financiers. 28 Source : Enquête IFC 2021. 13 Tableau 8 : Récapitulatif des opportunités potentielles ciblant les agriculteurs Principaux types d’institutions financières concernées par ces opportunités Revenus Sociétés de Opportunité (Millions Banques La Poste EdP Leasing / IMF Assureurs TND) Factoring Comptes transactionnels avec des services digitaux de paiements et de 78 transferts domestiques Services d’épargne adaptés aux besoins 10 des agriculteurs Crédits pour financer les cycles d’ex- 808 ploitation et les investissements Assurances agricoles contre les risques climatiques, les infestations et la mortal- 64 ité du bétail Formations, notamment sur les tech- niques agricoles, et accès à des solutions Non estimé digitales agricoles Produits et services pouvant être fournis directement par l’institution financière Produits et services pouvant être distribués en partenariat avec d’autres fournisseurs Mixte: fourniture de certains services en direct et distribution d’autres services en partenariat avec des acteurs tiers Des comptes transactionnels avec un tarif adapté atteindraient environ 250 000 petits exploitants agricoles qui sont actuellement non-bancarisés ou qui utilisent exclusivement le cash pour leurs transactions financières. 56 pour cent des agriculteurs interrogés détiennent des comptes auprès des banques et/ou de La Poste, le taux de détention de compte étant le plus faible chez les agriculteurs ayant des surfaces de moins de 2 hectares. Globalement, les petits exploitants agricoles estiment qu’ils ne sont pas éligibles à l’ouverture de comptes dans des institutions financières en raison de leurs faibles revenus, ou que l’ouverture de compte ne leur apporterait aucune valeur ajoutée. Cela met en évidence le coût élevé perçu des services financiers, ainsi qu’une éducation financière limitée. Les agriculteurs ont davantage recours au cash comparativement aux particuliers et aux entreprises, avec un taux de 83 pour cent. Cette situation s’explique par le manque d’alternatives et par la simplicité et la sécurité perçues des transactions en espèces. Néanmoins, environ un agriculteur sur deux exprime un intérêt pour l’adoption de moyens digitaux de paiement, en particulier les virements et les cartes de débit. 71 pour cent des agriculteurs qui se rendent régulièrement dans une agence bancaire seraient favorables à l’utilisation des solutions entièrement numérisées, ce qui permettrait un gain de temps et de coûts de transport conséquent. Le niveau de connaissance des wallets est encore faible. Les agriculteurs les plus disposés à adopter les moyens digitaux de paiement sont ceux qui sont déjà clients des banques ou de La Poste. Des produits d’épargne accessibles et flexibles généreraient pour les institutions financières 450 millions de dinars (140 millions de dollars) de dépôts supplémentaires collectés auprès d’environ 101 000 agriculteurs. Près de la moitié des agriculteurs interrogés parvient à épargner. 50 pour cent d’entre eux épargnent exclusivement auprès d’institutions financières, tandis que 40 pour cent n’utilisent que des moyens d’épargne informels tels que du cash à la maison, auprès de la famille ou des placements « en nature ». Ces agriculteurs ont généralement des plans d’épargne à court terme pour couvrir les besoins d’urgence, financer leur activité agricole ou pour l’éducation de leurs enfants. En proposant des solutions de micro-épargne avec des moyens simples de dépôt et de retait, les institutions financières attireraient davantage de dépôts de la part des agriculteurs qui n’épargnent que de manière informelle. L’absence de ces caractéristiques au niveau des produits existants a été citée par les agriculteurs comme principal obstacle à l’épargne auprès des institutions financières. L’octroi de 8 milliards de dinars (2,5 milliards de dollars) de crédits à 325 000 agriculteurs générerait 800 millions de dinars (249 millions de dollars) de revenus bruts pour les institutions financières. Le segment des agriculteurs est celui dont les besoins en financement dans les douze prochains mois est le plus fort parmi toutes les populations interrogées, avec 92 pour cent des agriculteurs 14 qui souhaitent bénéficier de crédit pour financer leur cycle d’exploitation ou pour procéder à des investissements avec des montants moyens de 12 000 (3 700 dollars) et 39 000 (12 000 dollars) dinars respectivement. Les résultats de l’enquête montrent que 31 pour cent des agriculteurs ont contracté des crédits auprès d’institutions financières, principalement auprès des IMF et des banques, en particulier la BNA. L’accès au financement est positivement corrélé à la taille de l’exploitation. En revanche, les canaux de financements informels tels que la famille et les amis représentent la seule source de crédit pour près de la moitié des agriculteurs interrogés. Les prêts de la part de la famille et des amis n’entraînent aucune charge, sont plus faciles à collecter, offrent une flexibilité au niveau du remboursement, et les agriculteurs ayant recours à ce type de financement se disent satisfaits des modalités. La flexibilité des remboursements est particulièrement appréciée dans les situations de volatilité des marchés. Les produits d’assurance contre les risques climatiques, les infestations des cultures et les maladies du bétail intéresseraient 227 000 agriculteurs et généreraient 64 millions de dinars (20 millions de dollars) de primes brutes pour les assureurs. 29 pour cent des agriculteurs interrogés bénéficient d’une couverture d’assurance. Cependant, la proportion varie selon la taille de l’exploitation, la couverture chutant à 15 pour cent chez les petits exploitants agricoles ayant des surfaces inférieures à deux hectares. À l’instar des entreprises, l’utilisation est limitée par le manque de connaissances financières, le coût élevé perçu des produits d’assurance et la méfiance envers les compagnies d’assurance. Néanmoins, 61 pour cent des agriculteurs interrogés expriment un intérêt pour les produits d’assurance, principalement pour se prémunir contre les risques climatiques. Les services non financiers tels que les formations aux techniques agricoles et la facilitation de l’accès aux solutions digitales de gestion des activités agricoles pourraient enrichir la proposition de valeur des institutions financières et attirer près de 116 000 agriculteurs. Seuls 5 pour cent des agriculteurs interrogés ont eu recours à des services non financiers par le passé, en partie en raison de la connaissance limitée de ce type de services et de leurs fournisseurs. Pourtant, 41 pour cent des agriculteurs ont exprimé un intérêt pour les services non financiers, principalement la formation aux techniques agricoles et dans une moindre mesure, le conseil et les études techniques, les formations à l’entreprenariat, l’accès au financement, l’accès aux marchés et à la commercialisation. L’enquête montre également qu’environ la moitié des agriculteurs est intéressée par des solutions digitales pouvant les aider dans la gestion de leurs exploitations agricoles, telles que la gestion de l’eau et de l’irrigation, l’approvisionnement et la gestion des ventes. Ces services seraient adossés à des fonctionnalités associées à des services financiers, tels que les paiements digitaux, l’épargne et le crédit. “ Les agriculteurs ont exprimé la plus forte demande de crédit de toutes les catégories d’enquête avec 92% exprimant le besoin d’un prêt dans les 12 prochains mois. “ 15 Leviers d’action des acteurs de l’écosystème financier Acteurs du marché Afin de saisir ces opportunités, il conviendra pour les acteurs financiers de développer des offres adaptées aux besoins spécifiques des segments cibles. Il s’agit de tirer parti de la digitalisation afin de réduire les coûts de distribution et de gestion, permettant in fine de proposer des tarifs plus adaptés. Des partenariats entre acteurs financiers et fournisseurs de services non financiers (prestataires de solutions digitales, fournisseurs d’intrants agricoles, formateurs, experts…) permettraient d’enrichir la gamme d’offres, d’attirer des clients supplémentaires et d’améliorer la portée et les ventes croisées. Enfin, l’accompagnement au changement et la communication sont essentiels pour améliorer la culture financière et remédier au manque de confiance. 1. Adapter les offres aux attentes et aux besoins spécifiques des segments cibles. Afin de répondre aux besoins des segments financièrement mal desservis, les acteurs du marché pourraient proposer des offres à des tarifs compétitifs. Il sera aussi question d’adopter une approche omnicanale permettant une exécution rapide et un accès facile aux services financiers. Il conviendra par ailleurs de garantir la transparence des tarifs et des procédures et d’assurer la sécurité des opérations. Des services non financiers peuvent être également intégrés aux offres soit en capitalisant sur l’expertise interne en matière de conseil, d’accès aux marchés, de solutions digitales ou bien en tissant des partenariats avec des fournisseurs externes spécialisés. 2. Investir dans la digitalisation des services et des parcours pour réduire les coûts de distribution, de gestion et in fine les tarifs pour les usagers. La digitalisation offre une opportunité pour les acteurs du marché de repenser les parcours clients et simplifier les procédures afin de mieux répondre aux besoins des usagers. La digitalisation ne doit pas se limiter au front-end et doit pouvoir se faire de bout en bout. Pour augmenter la valeur ajoutée et stimuler l’intérêt, les produits financiers pourraient être couplés à des services digitaux non financiers tels que des solutions de facturation ou de comptabilité pour les entreprises, des solutions de gestion agricole pour les agriculteurs, la gestion budgétaire pour les particuliers, et l’accès à l’information en général. En outre, les institutions financières pourraient investir davantage dans les moyens digitaux de paiements tels que les terminaux de paiement électroniques de nouvelle génération, les gestionnaires automatiques de billets avec fonctions de dépôt et de retrait et les portails de paiement. Les solutions innovantes proposées par les Regtechs et les Agritechs peuvent être envisagées afin de collecter des données, améliorer l’accès aux services, piloter le risque et réduire les coûts. 3. Établir des partenariats avec d’autres acteurs du marché pour enrichir la proposition de valeur, améliorer les ventes croisées et atteindre de nouveaux segments de marché. Le développement des partenariats entre les acteurs financiers améliorerait la distribution et faciliterait l’accès. À titre d’exemples, des partenariats impliquant des compagnies d’assurance et des IMF permettraient de distribuer des produits d’assurance à de nouveaux clients. Des accords avec les EdP donneraient accès à un réseau élargi de points de cash in/out et de distribution de produits/services. Des partenariats avec des fournisseurs de services non financiers (Agritechs, éditeurs de logiciels, prestataires de formation, experts techniques…) enrichiraient aussi la proposition de valeur pour attirer les usagers en fonction de leurs besoins. Dans l’agro-industrie, le renforcement des mécanismes de chaînes de valeurs, au travers de partenariats entre les acteurs de la chaîne de valeur, les institutions financières et les prestataires de services non financiers serait bénéfique à l’ensemble de l’écosystème. Les fournisseurs de crédit et les investisseurs en capital pourraient collaborer pour lever des capitaux, en particulier lors des premiers stades de développement où les banques limiteraient leur contribution à des besoins de court terme moins risqués. De 16 plus, les fonds d’investissement, y compris les plateformes 3. Investissement en capital. Le Ministère des Finances pourrait de crowdfunding à venir, contribueraient aux efforts de encourager les fonds d’investissement sous sa tutelle à investir sensibilisation et d’éducation des entreprises (principalement dans les secteurs les moins inclus financièrement et dans les les auto-entrepreneurs et très petites entreprises) en matière de entreprises en phase de démarrage. Il s’agira également de connaissances financières. renforcer l’alignement entre la stratégie d’investissement de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), le plan stratégique 4. Approfondir la communication avec les clients et les de développement économique du pays et la Stratégie prospects pour améliorer la culture financière et rétablir la Nationale pour l’Inclusion Financière. confiance, en adaptant le contenu et les canaux en fonction du contexte, des besoins et des connaissances financières des Le Ministère des Finances peut, d’autre part, envisager populations cibles. Il conviendra d’assurer la formation des d’allouer davantage de ressources aux fonds d’investissement équipes de front office dans les agences, des agents et des publics tels que le FOPRODI/FONAPRA afin d’améliorer équipes de terrain dont le rôle est majeur dans ce processus. l’accès au financement par des fonds propres pour les TPME. L’accélération des réformes en cours visant à clarifier le statut, la Régulateurs gouvernance et le mandat des institutions publiques telles que Les régulateurs sont principalement amenés à (i) améliorer la la BFPME, la SOTUGAR et la BTS est particulièrement attendue. gestion de l’inclusion financière grâce à une coordination plus étroite entre toutes les parties prenantes, (ii) accélérer les réformes 4. Paiements et transferts. Afin de faciliter l’émergence de en cours et (iii) assouplir les autorisations et les exigences pour nouveaux prestataires de paiement, l’assouplissement du encourager les innovations et l’émergence de nouveaux acteurs sur cadre réglementaire par la BCT - en réduisant le capital le marché. Plus précisément sur: minimum requis de cinq millions de dinars (1,6 million de 1. L’épargne. Afin de stimuler le développement de la dollars) ou en créant des seuils spécifiques selon les différents micro-épargne, la BCT pourrait envisager d’assouplir la services – pourrait être envisagé. Deuxièmement, la BCT réglementation exigeant un montant minimum de 10 dinars pourrait considérer de ne pas exiger l’interopérabilité comme (3,1 dollars) pour une opération de dépôt. En outre, en fonction condition préalable à la mise en place des nouveaux services. de la maturité des EdP et des IMF, la BCT et le Ministère des La simplification des démarches des particuliers, par la BCT, Finances seraient amenés à étudier l’opportunité d’autoriser pour souscrire et résilier des prélèvements serait également ces acteurs à opérer en tant qu’intermédiaires pour collecter nécessaire. La BCT, en interne, pourrait aussi continuer à l’épargne en partenariat avec les banques et La Poste. Aussi, capitaliser sur la « sandbox » et le « BCT Lab » afin d’accélérer pour encourager les TRE à épargner localement en devises, le le développement de nouveaux cas d’usage et d’innovations renforcement du niveau de garantie de dépôts est nécessaire techniques. pour rassurer les épargnants. 5. Assurance. L’accélération de la mise en œuvre de la stratégie 2. Le crédit. Il conviendrait d’aborder la problématique des du Ministère des Finances visant la réforme des assurances et créances en souffrance (NPLs) au travers d’un ensemble l’amélioration de la gestion du FIDACN en revoyant notamment d’initiatives coordonnées (juridiques, fiscales et prudentielles) le taux de cotisation des agriculteurs serait nécessaire. De développées dans le cadre d’une stratégie nationale et même, il serait opportun de lancer une étude de faisabilité de holistique sur les NPLs (actuellement en cours de préparation). l’assurance agricole indicielle pour développer des produits Par ailleurs, la publication de la circulaire de la BCT en cours adaptés visant la couverture des risques climatiques. accélèrerait la mise en place du cadre réglementaire encadrant les plateformes de financement participatif. L’élaboration d’un cadre réglementaire dédié à l’affacturage est également attendu. En ce qui concerne le secteur de la microfinance, l’accélération de la réforme structurelle en cours serait très appréciée. Cette réforme implique la fusion des associations de microcrédit en institutions de microfinance régionales et devrait avoir un impact positif significatif sur la gouvernance et les pratiques. Elle contribuerait également à l‘amélioration de la surveillance réglementaire et faciliterait in fine l’accès des IMF aux capitaux auprès des institutions financières locales et internationales. 17 Approche et Méthodologie Cette étude a été menée de janvier 2021 à janvier 2022. Elle a inclus (i) quatre sondages portant sur un total de 4 132 répondants, (ii) 56 focus groupes et entretiens approfondis avec des particuliers résidents, des TRE, des entreprises et des agriculteurs, (iii) 60 entretiens avec des acteurs du secteur tels que des institutions financières, des régulateurs et des experts, et (iv) une recherche documentaire couvrant 12 études clés sur l’inclusion financière en Tunisie au cours de la dernière décennie. Méthodologie des sondages Les trois sondages menés auprès de 1 113 particuliers résidents en Tunisie, 409 Tunisiens Résidents à l’Étranger et 1 986 entreprises ont été réalisés par entretien téléphonique assisté par ordinateur (CATI), tandis que le sondage mené auprès de 624 agriculteurs a été réalisé par entretien personnel assisté par ordinateur (CAPI). Tous les répondants étaient des adultes âgés de 18 ans et plus. Tableau 9 : Aperçu des échantillons, des méthodologies et du calendrier de l’enquête Échantillon Nombre de Format Période du sondage Questions 1 113 257 19/06/2021 - 09/07/2021 Particuliers Résidents 1 986 194 CATI 13/07/2021 - 06/09/2021 Entreprises 409 126 23/07/2021 - 30/08/2021 TRE 624 280 CAPI 03/12/2021 - 30/01/2022 Agriculteurs Particuliers Résidents : Tunisiens résidant en Tunisie. Dans l’ensemble, l’échantillon est représentatif de la population générale en termes de sexe, d’âge, de répartition géographique et de localité (urbaine/rurale) tel que fourni par l’Institut National de la Statistique (INS) selon le recensement de 2014. Tunisiens Résidents à l’Étranger : Tunisiens résidant hors de Tunisie, ayant leur résidence principale et leur activité à l’étranger. L’échantillon de cette population a été basé sur la répartition de la diaspora par pays de résidence telle que publiée par l’INS et l’Office National des Migrations en 2021. La population totale des TRE est estimée à 1,7 millions de Tunisiens dont 86% résident en Europe et 10% dans les pays arabes selon les chiffres officiels du Ministère des Affaires Etrangères de la Migration et des Tunisiens à l’Étranger. L’enquête ne couvre qu’une liste limitée de pays et n’est donc pas représentative de l’ensemble des TRE, mais uniquement des pays inclus dans le périmètre du sondage. Entreprises : Les entreprises sont classées par nombre de salariés selon la classification du Registre National des Entreprises (RNE) dans ses statistiques de 2020 sur les entreprises formelles. 18 Tableau 10 : Échantillon d’enquête sur les entreprises par type d’entreprise Nombre total Nombre total Nombre total Segment d’entreprises Nombre d’employés d’entreprises formelles en d’entreprises formelles d’entreprises informelles Tunisie dans l’échantillon dans l’échantillon Auto-Entrepreneurs 0 679 770 264 150 Très Petites Entreprises 1à5 80 503 599 114 Petites Entreprises 6 à 49 18 252 715 40 Moyennes Entreprises 50 à 199 2 634 71 0 Grandes Entreprises 200 et plus 956 33 0 Total 782 115 1 682 304 L’échantillon a été centré en faveur des très petites, petites, moyennes et grandes entreprises par opposition aux auto-entrepreneurs, afin de garantir une représentativité des échantillons de ces catégories et disposer de résultats révélateurs. Les données agrégées pour la population totale des entreprises sont ajustées en fonction de la part relative de chaque catégorie d’entreprises. Agriculteurs : Les agriculteurs sont définis comme des individus directement impliqués dans la gestion d’une activité agricole en tant que propriétaires,gestionnaires locataires ou gestionnaires d’une exploitation familiale. Les travailleurs agricoles qui ne répondent pas à cette définition ne sont pas considérés dans cette population. Indice d’inclusion financière L’indice d’inclusion financière utilisé pour évaluer l’inclusion financière des particuliers et des entreprises a été conçu dans le cadre de l’étude. Le score est basé sur deux types de données quantitatives : • L’accès : le nombre de produits et services souscrits • L’utilisation : fréquence d’utilisation ou de renouvellement des produits et services souscrits Évaluation des opportunités Les opportunités présentées dans cette étude ont été déduites des écarts entre l’offre et la demande de services financiers et non financiers exprimés dans les résultats de l’enquête. Chaque opportunité est définie comme une nouvelle souscription de produits et services ou une utilisation supplémentaire de produits et services existants proposés par des acteurs financiers. L’évaluation des opportunités repose sur deux facteurs: (i)  L’impact : Il s’agit principalement d’une estimation de la taille de la population cible qui peut bénéficier de l’opportunité et des revenus potentiels pouvant être générés par les institutions financières. La taille de la population est extrapolée à partir des résultats de l’enquête et inclut les clients supplémentaires qui pourraient être servis par les institutions financières. Les estimations des revenus bruts potentiels sont basées sur la taille de la population cible et les unités de prix en fonction du produit/service, par exemple, le taux d’intérêt moyen, les frais moyens... (ii) La faisabilité : La faisabilité d’une opportunité est évaluée en fonction des principaux facteurs affectant la réalisation d’une opportunité tels que le cadre réglementaire, l’infrastructure, la connaissance du marché... Toutes les opportunités présentées ont également été revues par un panel d’experts spécialisés dans les différents types de services financiers, qui ont examiné la justification, les hypothèses et les données sous-jacentes aux opportunités. Taux de change Le taux de change utilisé dans ce rapport est le suivant : 1 USD = 3,208 TND, consulté le 12 juillet 2022 sur xe.com. 19 20 Remerciements Cette étude a été financée par l’Agence Suédoise de Coopération Internationale au développement (SIDA) et le Secrétariat d’État suisse à l’économie (SECO). IFC a chargé Matine Consulting de mener cette étude et de rédiger ce rapport. L’équipe projet tient à remercier tout particulièrement Fatma Yeger, Hamza Fekih, Hanen Lazreg, Mohamed Abbassi, Ouissem Ghorbel, Sami Chaouch, Slim Houij, Slim Nacef de Matine Consulting, ainsi que Hassen Zargouni, Thouayba Ennafti, Mariem Moussaoui, Myriam Abid, Youssef Ben Halima, Hana Ben Hlima, Yassine Setti de Sigma Conseil, Thameur Hemdane, Anis Allouche, Mongia Khemiri, Mahmoud Hachicha, Ali Mnif, Sami Bibi, Elyes Jouini, Abdelhamid Bouabdallah, Arthur Bala, pour leurs contributions en tant qu’experts. Du côté d’IFC, cette étude a été dirigée par Sinja Buri, Wiame Benhaddi et Niklas Murken, avec la précieuse contribution de Riadh Naouar, Amine Benjelloun, Ahmed Zairi, Fabian Reitzug, Ana Fernandez, Khadiga Hassan, Omoneka J. Musa, Meritxell Martinez, Margarete Biallas, Joseck Ludiri, Lesley Denyes, Carol Khouzami, et Shadreck Mapfumo. Cette publication a été éditée et produite par Anna Koblanck, Lisa Johnston et Elena Franchi. Acronymes BNA Banque Nationale Agricole en Tunisie BFPME Banque de Financement des Petites et Moyennes Entreprises BTS Banque Tunisienne de Solidarité CAPI Entretien personnel assisté par ordinateur CATI Entretien téléphonique assisté par ordinateur BCT Banque Centrale de Tunisie CDC Caisse des Dépôts et Consignations CNAM Caisse Nationale d’Assurance Maladie CNRPS Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale CNSS Caisse Nationale de Sécurité Sociale CRM Customer Relationship Management CTAMA Caisse Tunisienne D’Assurances Mutuelles Agricoles EdP Établissement de Paiement ERP Enterprise Resource Planning / Progiciel de gestion intégré FIDACN Fonds d’Indemnisation des Dégâts Agricoles causés par les Catastrophes Naturelles FONAPRAM Fonds National de Promotion de l’Artisanat et des Petits Métiers FOPRODI Le Fonds de Promotion et de Décentralisation Industrielles INS Institut National de la Statistique IMF Institution de Microfinance KYC Know Your Customer PIB Produit Intérieur Brut RNE Registre National des Entreprises SOTUGAR Société Tunisienne de Garantie TPME Très petites, petites, moyennes entreprises TRE Tunisiens Résidents à l’Étranger 21 Inclusion Financière en Tunisie - État des lieux et opportunités Sur la base d’enquêtes et de recherches documentaires en 2021 et 2022, ce rapport vise à présenter un état des lieux actualisé de l’inclusion financière en Tunisie et à mettre en exergue les opportunités qui se présentent aux acteurs du marché. www.ifc.org Contacts IFC Tunisia IFC Financial Institutions Group Ahmed Zairi Amine Benjelloun Country Officer Senior Operations Officer azairi@ifc.org abenjelloun@ifc.org IFC Applied Research & Learning Soren Heitmann Research Lead sheitmann@ifc.org